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CC20 Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité législatif chargé du projet de loi C-20


NUMÉRO 009 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 4 juin 2008

[Enregistrement électronique]

(1600)

[Traduction]

    Comme nous avons le quorum, je déclare la séance ouverte.
    Conformément à l'ordre de renvoi du 13 février 2008, nous poursuivons notre examen du projet de loi C-20.

[Français]

    Nous avons la chance de recevoir aujourd'hui un témoin qui connaît bien Ottawa.
    Benoît Pelletier a été doyen associé et professeur de l'année à la Faculté de droit de l'Université d'Ottawa, où il a obtenu une maîtrise en droit. Il a par la suite obtenu son doctorat à l'Université de Paris en 1996. M. Pelletier est le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes de la province de Québec. Il est aussi chargé des Affaires indiennes et, ce qui est tout à fait à propos, de la réforme des institutions démocratiques.
     Je vous remercie de votre patience. Nous avons dû tenir un vote aujourd'hui, et c'est la raison pour laquelle nous commençons un peu en retard. Cela étant dit, j'aimerais inviter le ministre Pelletier à émettre ses commentaires.
    Vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    Mesdames et messieurs les membres du comité, je vais d'abord vous présenter la personne qui m'accompagne, M. Jean-Guy Côté, qui est attaché politique à mon cabinet à Québec.
    Je veux dire d'emblée que je suis très heureux de l'invitation qui a été faite au Québec d'intervenir dans le cadre des travaux de ce comité qui examine le projet de loi C-20. Je l'ai dit en 2007 devant un comité sénatorial et je le réitère aujourd'hui: le gouvernement du Québec n'a pas comme politique d'intervenir devant le forum parlementaire fédéral, sauf en des circonstances exceptionnelles. C'est le cas en l'occurrence, puisque c'est la troisième fois que le Québec aura tenu à s'exprimer au Parlement du Canada sur la démarche entreprise par le gouvernement fédéral pour réformer le Sénat.
    Le Québec a exprimé ses positions devant le Sénat, lors des travaux du Comité sénatorial spécial sur la réforme du Sénat à l'automne 2006, et dans le cadre d'un mémoire qui a été déposé, en mai 2007, devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Ses positions sont donc bien connues. Nous avions demandé le rejet de l'ancien projet de loi C-43, maintenant devenu le projet de loi C-20, par lequel le gouvernement fédéral veut introduire un système électoral dans le cadre de la sélection des sénateurs. Nous avions également demandé la suspension des travaux sur l'ancien projet de loi S-4 concernant la durée du mandat des sénateurs, maintenant devenu le projet de loi C-19. Ces deux mesures sont encore présentées de façon distincte, mais elles forment bel et bien un tout.
    Or, le gouvernement du Québec est d'avis que la transformation du Sénat, dans ses caractéristiques essentielles, ne relève pas des lois ordinaires. C'est plutôt une question pleinement constitutionnelle qui nécessite le recours aux procédures multilatérales de modification constitutionnelle.
    Pour le gouvernement du Québec, il ne fait aucun doute que le gouvernement fédéral tente, par ces projets de loi, de faire indirectement ce qu'il ne peut pas faire directement, c'est-à-dire transformer la nature et la vocation du Sénat qui, depuis 1867, agit comme chambre nommée, chargée d'un rôle de second examen législatif.
    Il nous semble également clair que le système envisagé par le projet de loi C-20 est électoral dans son objet et dans son effet. Nous avons remarqué, au cours des travaux du comité, qu'il a été mentionné que le projet de loi C-20 avait été, et je cite, « soigneusement rédigé » pour respecter la Constitution. La Constitution va plus loin que la forme. Elle va plus loin que les techniques de rédaction. Elle s'intéresse au fond des choses, à l'objet même des normes.
    La jurisprudence constitutionnelle a très tôt souligné l'importance de s'éloigner de la simple forme et des seules apparences pour évaluer la constitutionnalité d'une mesure sur le plan du partage des compétences. L'approche formaliste a été rejetée. Les tribunaux ont eu la sagesse de reconnaître qu'une rédaction subtile peut parfois n'être que déguisement. Ils ont mis au coeur du raisonnement constitutionnel l'idée selon laquelle ce qui compte, c'est le caractère véritable des normes.
    À mon sens, cette tradition juridique est tout aussi pertinente lorsqu'il s'agit de se pencher sur les limites de la compétence fédérale unilatérale en matière institutionnelle par rapport aux procédures multilatérales de modification constitutionnelle. Ce qui compte, c'est le but, l'objet et l'effet de ce projet de loi, et non le soin apporté à sa rédaction ou l'inventivité des notions sollicitées, comme celle d'élection consultative aux fins de nomination, notion qui semble être sans précédent.
    Pour le gouvernement du Québec, il ne fait pas de doute que le projet de loi C-20 a pour objet de transformer progressivement la nature du Sénat. C'est là l'objectif clair du gouvernement fédéral. Le système envisagé par le projet de loi ne peut fonctionner, ne peut être viable que s'il est utilisé en tant que système électoral. Sinon, en effet, comment appeler les citoyens à se présenter et à faire l'effort — financier, notamment — de campagnes qui amèneront ces candidates et ces candidats à devoir sillonner la province tout entière? Comment justifier l'implication d'Élections Canada et de ressources publiques pour la conduite d'un scrutin complexe et devant répondre aux exigences du domaine électoral? Comment demander à chacun de venir exercer son devoir de citoyen et d'exprimer son vote dans l'isoloir? Comment empêcher un candidat de se considérer, au terme d'un tel processus, élu directement par la population, vu le recours au suffrage universel?
(1605)
    La notion de consultation nous paraît donc artificielle. S'il y a un bassin de personnes au terme de cet exercice, comme l'ont évoqué certains représentants fédéraux, ce sera un bassin d'élus, ce qui ne change pas l'impact fondamental du projet de loi sur la nature du Sénat. Même si les sièges pour lesquels ces personnes ont été élues ne sont pas tous immédiatement disponibles, ces personnes auront toutes été choisies par les électeurs au suffrage universel. Cette idée de bassin n'atténue en rien l'importance de la transformation institutionnelle envisagée.
    Dans mes interventions antérieures, j'ai évoqué le lien de filiation existant entre les articles 42 et 43 de la Loi constitutionnelle de 1982 et l'avis de 1979 de la Cour suprême dans le Renvoi sur la Chambre haute. En effet, à la suite de cet avis, d'où se dégage le principe selon lequel les caractéristiques essentielles du Sénat échappent au pouvoir fédéral unilatéral, le constituant a indiqué, de façon expresse, certaines exceptions à la compétence fédérale unilatérale aujourd'hui établie par l'article 44. Parmi ces exceptions figurent notamment les questions du mode de sélection des sénateurs, des pouvoirs du Sénat et de la représentation régionale, trois éléments très liés entre eux, soit dit en passant, du point de vue des questions d'équilibre et d'architecture institutionnels.
    Certains intervenants, dans le cadre des débats actuels sur les projets de loi fédéraux, se sont questionnés sur la pertinence, aujourd'hui, du Renvoi sur la Chambre haute. Nous réitérons que cet avis de la cour a gardé toute son actualité. La protection constitutionnelle des caractéristiques essentielles du Sénat est toujours présente dans la Constitution par l'entremise des exceptions mentionnées à l'article 42 et — cela est très important aussi — par la possibilité, au-delà de ces exceptions, qu'il soit nécessaire d'appliquer la procédure générale du 7/50 en vertu de l'article 38 de la Loi constitutionnelle de 1982.
    Le compromis fédératif à la base du système politique canadien trouve expression dans les caractéristiques essentielles des institutions fédérales créées en 1867. Dans son mandat originel, de par la répartition régionale des sièges sénatoriaux, le Sénat est destiné à être le lieu de la représentation des intérêts des composantes de la fédération au sein des institutions fédérales.
    Pour le Québec, ces intérêts comportent, entre autres, une dimension spécifique ayant trait à son identité nationale. Le projet de loi C-20 soulève également des préoccupations sur le plan de la présence des francophones au Sénat et sur le rôle de cette chambre dans la protection de la dualité canadienne, comme l'a particulièrement souligné le mémoire déposé devant ce comité par la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, mémoire auquel le gouvernement du Québec souscrit.
    Le Sénat remplit également un rôle de second examen objectif des mesures législatives proposées par la Chambre des communes. Ce rôle se reflète dans les pouvoirs du Sénat qui donne son agrément à l'ensemble des textes législatifs fédéraux. Or, on le sait, son caractère de chambre nommée vient, dans les faits, moduler grandement l'exercice de ces prérogatives par le Sénat.
    Le projet de loi C-20 encouragerait très certainement le Sénat à utiliser concrètement les nombreux pouvoirs qui sont toujours à sa disposition. Et cela, sans qu'il n'existe de mécanisme pour gérer l'impasse entre les deux chambres. Nous constatons d'ailleurs avec étonnement que certains voient dans les défauts du projet de loi C-20 un moyen — positif, en quelque sorte — de déstabiliser le statu quo, de provoquer le changement. Nous ne pensons pas qu'il soit possible d'aborder les changements institutionnels fondamentaux de cette façon sans tenir compte des liens complexes existant entre les différentes caractéristiques essentielles des institutions concernées.
    Le Sénat s'inscrit, en effet, dans un environnement constitutionnel complexe et cohérent faisant intervenir des considérations ayant trait au pacte fédératif et à l'équilibre des relations intergouvernementales. Les projets fédéraux actuels ne sont pas de simples expériences ou projets-pilotes. S'ils étaient mis en oeuvre, ils pourraient entraîner des changements politiques importants à l'égard desquels nous ne pouvons présumer qu'il serait facile d'apporter, le cas échéant, des ajustements ou correctifs, surtout s'il devait en découler des conséquences inattendues.
(1610)
    Dans l'ordre du prévisible, un Sénat élu pourrait avoir des impacts sur l'équilibre des rapports intergouvernementaux, sans que la défense des intérêts provinciaux par la Chambre haute ne soit améliorée. En effet, les nouveaux sénateurs seraient vraisemblablement peu efficaces dans la représentation des intérêts provinciaux, puisqu'ils auraient plutôt tendance à s'intégrer à la dynamique politique propre à la scène fédérale, notamment la dynamique des partis politiques fédéraux, et ce, même si certaines modulations par rapport au modèle australien, qui a servi d'inspiration au gouvernement fédéral, ont été intégrées au projet de loi C-20. La comparaison ici est faite précisément avec le Sénat australien, institution particulièrement marquée par la polarisation partisane.
    C'est plutôt par rapport à la mission constitutionnelle fondamentale du Sénat canadien actuel qu'il faut regarder l'impact du système électoral préconisé par le gouvernement fédéral, et de ce point de vue, il nous paraît clair que la dynamique partisane au sein de la Chambre haute augmentera en intensité.
    Les provinces ont un intérêt direct dans les changements unilatéraux que le gouvernement fédéral propose d'apporter au Sénat. L'argument selon lequel le processus de modification constitutionnelle est trop exigeant n'est pas un argument dans un régime fédéral, où le constitutionnalisme et la primauté du droit sont reconnus comme des principes essentiels. Ce n'est pas un argument non plus dans un régime fédéral, où les recours à des procédures plus complexes pour modifier la Constitution visent à assurer la prise en considération des intérêts minoritaires, lorsque sont en jeu des éléments constitutionnels fondamentaux. La prise en compte des intérêts minoritaires a une importance particulière pour la nation québécoise, compte tenu de sa situation dans l'ensemble canadien.
    L'avenir du Sénat et la modification de ses caractéristiques essentielles ne peuvent être envisagés en dehors du contexte constitutionnel auquel il appartient, celui des modifications constitutionnelles où les provinces sont appelées à exercer une part du pouvoir constituant.
    Il semble peu bal que, sur un sujet aussi clairement constitutionnel que la nature et la vocation du Sénat, nous ayons à tenir un débat de processus, que nous soyons ici à revendiquer la participation des provinces.
    Les provinces doivent faire partie des réformes visant les caractéristiques fondamentales des institutions fédérales. Le Québec n'est pas fermé à l'idée d'une modernisation du Sénat. Il est conscient que ses partenaires fédératifs ont certaines aspirations en cette matière. Il est, pour sa part, naturellement intéressé à la question du rôle du Sénat sur le plan du fédéralisme et, notamment, à celle d'une relation plus étroite entre les provinces et la Chambre haute. Mais un tel travail de modernisation institutionnelle ne peut être monopolisé par un seul Parlement.
    En conclusion, qu'il nous soit permis de réitérer devant ce comité le message exprimé unanimement par l'Assemblée nationale du Québec, dans sa résolution du 16 mai 2007. Le projet de loi C-20, que l'on cherche à présenter comme une modification mineure pour laquelle le Parlement fédéral aurait compétence exclusive, cache en réalité une réforme en profondeur de la nature et de la vocation du Sénat. Une telle réforme ne saurait, sous aucun prétexte, se prêter à une initiative unilatérale du gouvernement fédéral. Les provinces, et le Québec en particulier, ne peuvent être exclus des débats fondamentaux concernant l'évolution de la fédération canadienne.
    Merci.
(1615)
    Merci, monsieur le ministre.
    On va commencer la période des questions.
    Madame Folco.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, vous nous aviez promis une présentation ferme, univoque, claire et limpide. Je vous avoue qu'elle est toutes ces choses.
    Plusieurs membres du comité ont remarqué à quel point le processus qui nous est proposé ferait fi ou pourrait oublier les minorités. Je parle non seulement des minorités linguistiques en tant que nombre — le Québec à l'intérieur du Canada —, mais des autres francophones et des autres minorités canadiennes, en particulier les gens des régions rurales qui ont peu de chances de se faire élire dans n'importe quelle province où il y a de grands centres urbains.
    En qualité de ministre des Affaires intergouvernementales, vous êtes le représentant du gouvernement du Québec au comité. Pouvez-vous nous expliquer ce que ferait le gouvernement du Québec advenant le cas où le projet de loi C-20 serait adopté par la Chambre des communes et irait ensuite au Sénat? Comment le gouvernement du Québec réagirait-il? Quel rôle le gouvernement du Québec et les autres gouvernements provinciaux et territoriaux pourraient-ils jouer? Je ne vous demande pas de parler en leur nom, mais pouvez-vous nous faire un portrait ce que serait la situation?
    Merci.
    Premièrement, vous avez tout à fait raison de rappeler le rôle important du Sénat en ce qui concerne l'expression de la langue française au niveau du Parlement canadien.
    Bien entendu, le Sénat joue un rôle historique en ce qui concerne la présentation de la dualité linguistique au Canada, donc cette présence de deux langues officielles, la langue française et la langue anglaise, ces deux langues trouvant expression dans un bon nombre d'institutions fédérales, notamment au Sénat. Et ça, pour nous, c'est quelque chose d'extrêmement important, surtout que les francophones et les Acadiens de tout le Canada craignent que s'il devait y avoir une réforme du Sénat dans le sens qui est proposé dans le projet de loi C-20, éventuellement, ces francophones aient moins de représentants au Parlement du Canada, ce qui, forcément, entraînerait une perte en ce qui concerne la résonnance de la langue française dans l'ordre fédéral de gouvernance.
    D'autre part, il faut souligner l'importance du Sénat pour le Québec et la représentation du Québec au sein même du Parlement du Canada. Nous savons tous que la population du Québec n'augmentant pas suffisamment rapidement ou suffisamment fortement, le Québec est probablement destiné à voir son poids politique se réduire petit à petit au sein de la Chambre des communes du Canada, où on applique le principe de la représentation proportionnelle. Raison de plus pour s'assurer qu'au Sénat, le Québec est bien représenté, que ses intérêts y sont bien servis et que nous sommes en présence d'une institution fiable qui joue un rôle efficace dans le système politique canadien. En effet, le Sénat peut, dans une certaine mesure, venir pallier cette diminution du poids politique du Québec au sein de la Chambre des communes, en raison, évidemment, de la proportion de sa population eu égard à l'ensemble de la population canadienne.
    On ne parle pas de sujets qui sont mineurs pour nous. On parle de sujets qui sont d'une extrême importance. Le Sénat est donc une institution dont nous sommes très loin de négliger le caractère fondamental dans le contexte du fédéralisme canadien, et notamment en ce qui concerne, je le répète, la place du français, d'une part, et la place du Québec en particulier, d'autre part, au sein du Parlement canadien.
    Cela étant dit, ce que nous souhaitons le plus ardemment, c'est que le gouvernement du Canada lui-même renonce à ce projet, qui est cristallisé dans le projet de loi C-20. Si, pour une raison ou pour une autre, il n'a pas l'intention d'y renoncer, nous espérons qu'il saisira la Cour suprême du Canada de l'ensemble des questions qui sont liées à la constitutionnalité ou non de ce projet de loi. Puisque nous soulevons des questions quant à la constitutionnalité de ce projet de loi, puisque certains experts soulèvent des questions quant à la constitutionnalité de ce projet de loi, il serait sage soit que, je le répète, le gouvernement du Canada renonce à son projet, ce qui serait l'option que nous privilégions, soit qu'il s'adresse à la Cour suprême du Canada pour avoir une opinion sur la constitutionnalité ou non de ce projet de loi.
    À mon avis, il ne suffit pas de croire que c'est constitutionnel ou de croire que c'est inconstitutionnel. Encore faudrait-il, dans le cadre d'une réforme d'envergure comme celle-ci, que ce soit vérifié par les tribunaux.
    Le Québec a réagi fortement, jusqu'à présent, à ces initiatives fédérales en déposant deux mémoires, et j'en suis même à ma deuxième comparution au nom du gouvernement, mandaté par le gouvernement du Québec. Je peux vous dire que le gouvernement du Québec, s'il s'avérait que le gouvernement du Canada songe à aller de l'avant, examinerait tous les scénarios. Mais nous n'avons arrêté aucune décision à ce moment.
    La raison est très simple, c'est que nous ne voyons pas comment le gouvernement du Canada pourrait ne pas songer à poser la question de la constitutionnalité à la Cour suprême du Canada, étant donné les conséquences majeures qu'il y aurait d'entamer une réforme qui, en bout de piste, s'avérerait peut-être inconstitutionnelle.
(1620)
    Merci. Vous avez terminé?
    Oui, c'était l'essentiel de ma question. Je voulais que ce soit consigné au compte rendu.
    Monsieur Paquette, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, monsieur le ministre de venir témoigner devant le comité.
    Premièrement, j'ai retenu de votre présentation que selon vous, le projet de loi C-20 procédait à des modifications de caractéristiques essentielles du Sénat de façon indirecte, puisque le gouvernement — d'ailleurs, le leader du gouvernement l'avait bien dit dans sa présentation — ne pouvant pas le faire directement, l'a fait indirectement, en ficelant un projet de loi qui, à ses yeux, ne nécessite pas qu'on entame des négociations constitutionnelles.
    Deuxièmement, vous avez fait valoir le fait que ça modifiait en profondeur le compromis fédératif, où le Sénat joue un rôle de contrepoids —  vous l'avez bien expliqué dans la réponse précédente — et donc, pour vous, c'est un sujet clairement constitutionnel qui nécessite des négociations avec le Québec et les provinces pour en arriver à une modification.
    Ma première question vise à savoir si le gouvernement du Québec a été consulté par le gouvernement fédéral avant de présenter le projet de loi C-20.
    La réponse est non. Lorsque nous avons vu le premier projet de loi, le S-4, qui avait été présenté au Sénat, nous nous sommes fait, dès ce moment-là, une idée de ce qui pourrait suivre. Nous n'avions pas été consultés sur le contenu de ce deuxième projet de loi qui a été déposé et qui est venu, en fin de compte, confirmer ce que nous craignions. Nous craignions que le projet de loi S-4, qui portait sur la durée du mandat des sénateurs, ne soit pas une initiative isolée, mais qu'il fasse partie d'une opération d'ensemble. En effet, cette opération d'ensemble a été confirmée par le dépôt du projet de loi C-20.
    Selon vous, non seulement le projet de loi C-20 nécessite l'ouverture de négociations constitutionnelles, mais c'est encore plus vrai pour le projet de loi C-19, qui limite le mandat des sénateurs à huit ans. Les deux projets de loi entraîneraient, de façon plus importante, des modifications à des caractéristiques essentielles du Sénat.
    Les deux projets de loi font partie de la même opération, selon nous. Si on s'était limité au projet de loi S-4... Le gouvernement du Québec avait indiqué, sinon son accord, du moins sa tolérance par rapport au projet de loi S-4. Mais lorsque tout le scénario a été développé et a pris forme, dans le projet de loi C-43 qui est devenu par la suite le projet de loi C-20, nous avons pu constater l'envergure de l'opération. Et c'est exactement ce que nous craignions. Nos pronostics étaient exacts.
(1625)
    Le gouvernement du Québec ne trouve-t-il pas un peu paradoxal de voir arriver le projet de loi C-19, sur la durée des mandats, quelques mois après la reconnaissance par la Chambre des communes de la nation québécoise? Vous avez mentionné que le poids politique du Québec était menacé par l'évolution démographique. On ne l'a pas consulté, et en plus, on nous présente le projet de loi C-20 comme un pas vers une démocratisation des institutions fédérales. On nous dit qu'on va consulter directement la population du Québec, par exemple pour le choix parmi le groupe de sénateurs potentiels, mais on ne veut pas que le gouvernement du Québec soit consulté sur le processus qu'on va mettre en place.
    Je dois vous dire — je suis sûr que vous en avez pris connaissance — que dans ses réponses, le leader du gouvernement a toujours parlé des Québécois. Il s'est toujours refusé de parler du gouvernement du Québec, quant au projet de loi C-20 et à l'avenir des réformes du Sénat.
    Ne trouvez-vous pas un peu paradoxal qu'on nous parle de démocratisation, alors qu'on refuse de consulter le Québec et les provinces?
    Je vous dirai qu'on est conscient du fait qu'il y a, dans tout le Canada, une volonté de modernisation du Sénat, et on souscrit, en quelque sorte, à cette volonté. Le gouvernement du Québec n'est pas contre la modernisation du Sénat. Nous disons que s'il doit y avoir une modernisation du Sénat qui touche à ses conditions essentielles, ça doit se faire selon les règles établies. Ce sont des règles constitutionnelles. En d'autres mots, nous revendiquons le respect de la Constitution canadienne.
    Essentiellement, nous partons d'une prémisse qui, à notre avis, est tout à fait fondée et non contestable. Le Sénat, en tant que tel, n'est pas une institution strictement fédérale, ou fédérale au sens strict. C'est une institution fédérale-provinciale. La Cour suprême l'a dit en 1980. C'est une institution qui touche au coeur même du compromis fédératif de 1867, qui justement, étant de nature fédérale-provinciale, doit échapper, dans ses caractéristiques essentielles, aux pouvoirs de modification unilatéraux du gouvernement du Canada. C'est aussi simple que ça.
    Même si un expert ou un juriste devait me dire que le jugement de 1980 ne s'applique plus parce qu'on y a substitué les procédures de modification de 1982, le jugement faisait le constat suivant: quand le Canada a été créé, en 1867 — je ne parle pas de 1980 —, l'existence du Sénat était une des conditions qu'avait posées le Québec pour adhérer au compromis fédératif canadien. C'était aussi le cas des provinces de l'Atlantique. C'est une réalité historique. Même s'il s'avérait qu'on en vienne à la conclusion que le renvoi de 1980 ne s'applique plus, on ne peut pas refaire cette réalité historique ou la réviser. Le Sénat est une instance fédérale-provinciale dans ses caractéristiques essentielles.
    Ce qui nous amène à la deuxième question. Les projets de loi que nous avons devant nous sont-ils suffisamment substantiels pour que l'on puisse dire qu'ils modifient le Sénat dans ses caractéristiques essentielles, ou non? Si on en venait à la conclusion que les projets de loi C-20 et C-19 ne touchent pas aux caractéristiques essentielles du Sénat, les pouvoirs fédéraux unilatéraux s'appliqueraient vraisemblablement.
    Si au contraire on en venait à la conclusion que ces projets de loi touchent aux caractéristiques essentielles du Sénat et sont substantiels, il faudrait alors forcément appliquer les règles de procédures de modification multilatérales.
    Nous sommes en présence d'un projet de loi qui, dans le fond, changera petit à petit la vocation du Sénat pour progressivement transformer le Sénat en une chambre d'élus. Je considère donc que l'on touche aux caractéristiques essentielles du Sénat. C'est la conclusion à laquelle j'en arrive. Plus on y touche et plus les procédures multilatérales de modification constitutionnelle devraient s'appliquer.
(1630)
    Je dois vous dire qu'environ 80 p. 100 des constitutionnalistes qui sont venus ici étaient du même avis que vous. Seule une très petite minorité de constitutionnalistes sont venus dire que le projet de loi C-20 n'avait pas de portée constitutionnelle. Je crois que la position du Québec est très clairement établie.
    Il me semble que le Québec a toujours fait une demande, celle de pouvoir désigner lui-même les sénateurs du Québec. Cette demande est-elle toujours formulée par le gouvernement du Québec?
    Oui. Parmi tous les modèles qui s'offrent, en ce qui a trait à la réforme du Sénat, nous souhaiterions que celui-ci devienne éventuellement une chambre des provinces. D'ailleurs, à l'origine, le Sénat était censé être une chambre des provinces ou des régions. Ça n'a jamais vraiment été le cas puisque les sénateurs sont nommés par le Gouverneur général, sur recommandation du premier ministre du Canada.
    Nous souhaiterions que le Sénat devienne une chambre des provinces, et la meilleure façon d'y parvenir serait que les sénateurs soient désignés par les provinces elles-mêmes.
    Merci, mais vous avez outrepassé le temps qui vous était imparti.
     Nous entendrons M. Comartin.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, le vote du mois de mai de l'an dernier a-t-il été unanime? Pouvez-vous dire que les deux autres partis du Québec ont la même position que celle que vous avez exprimée dans votre discours d'aujourd'hui?
    Je ne le sais pas. Je sais que tous les partis, unanimement, ont demandé le retrait du projet de loi C-20 et ont demandé la suspension de l'examen du projet de loi C-19. Les raisons peuvent diverger. Je ne peux pas vous dire qu'il y a unanimité par rapport aux arguments ou aux motifs, mais je ne peux pas vous dire le contraire non plus.
    Il n'y a jamais eu quelque réserve que ce soit exprimée par les partis de l'opposition à l'Assemblée nationale eu égard aux présentations que j'ai déjà faites. Jamais personne n'a dit ne pas être d'accord ou n'a dit que c'était faux, que c'était une mauvaise orientation. Ce n'est jamais arrivé.
    J'aimerais revenir aux réponses que vous avez données à Mme Folco. Ai-je raison de croire que la province de Québec est prête à se rendre jusqu'en Cour suprême du Canada pour savoir si ce projet de loi est constitutionnel?
    C'est prématuré de dire cela aussi catégoriquement. C'est une option qui est examinée, mais il n'y a pas de décision arrêtée. Il nous semblerait beaucoup plus sage que le gouvernement du Canada lui-même s'enquière auprès de la Cour suprême du Canada directement par rapport à sa propre initiative. Il me semble que ce serait beaucoup plus sage, et encore plus sage qu'il renonce à ce projet de loi qui, à notre avis, va à l'encontre de la Constitution canadienne.
    Est-ce que la province de Québec a entamé des discussions avec les autres provinces pour moderniser le Sénat? Avez-vous eu des rencontres avec les autres provinces à ce sujet?
    Pas formellement. Il y a eu des échanges de points de vue. Les provinces ne partagent pas toutes la même position que le Québec. À titre d'exemple, l'Ontario favorise l'abolition du Sénat, ce qui n'est pas la position que nous défendons. Au contraire, je l'ai dit d'emblée, pour nous, le Sénat est une institution importante dans l'équilibre fédératif. On est loin de préconiser l'abolition du Sénat en tant que tel.
    Je ne suis pas en mesure de vous dire combien de provinces partagent le point de vue exprimé par le Québec. Mais fondamentalement, cela n'enlève rien, à mon avis, au sens de notre démarche, qui est le suivant: il y a une province, le Québec, qui demande qu'on vérifie le respect de la Constitution canadienne. C'est le sens profond de notre démarche, qui prétend même que l'initiative fédérale a des côtés inconstitutionnels. À mon avis, c'est une allégation fort sérieuse, dans notre contexte fédératif. Cela ne peut pas être pris à la légère, ça va de soi.
(1635)
    Merci d'être ici. Ce sont toutes les questions que j'avais à poser.
    Merci.
    Monsieur Gourde?
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci, monsieur Benoît Pelletier, de venir nous rencontrer. Vous êtes très intéressant.
    Quelles sont les appréhensions du gouvernement du Québec face à la modernisation du Sénat? Vous en avez parlé un peu tout à l'heure, mais y a-t-il des choses que vous voudriez ajouter?
    D'abord, comme je l'ai dit tout à l'heure, nous avons certainement l'objectif de faire en sorte que le Sénat devienne une chambre des provinces. Or, il est très clair que même si, en vertu des règles constitutionnelles, nous en venions à permettre l'élection des sénateurs — prenons l'hypothèse où il y aurait une discussion constitutionnelle et qu'au bout du compte, on élirait les sénateurs en vertu d'élections fédérales —, on s'éloignerait de l'objectif d'avoir une chambre des provinces, très certainement. On aurait sans doute un renforcement de la démocratie fédérale. On aurait peut-être même un renforcement du pouvoir central, puisque nous aurions deux chambres qui revendiqueraient chacune une légitimité démocratique. Cependant, les provinces, ou du moins le Québec serait loin de son but, soit de transformer le Sénat en une chambre des provinces. C'est l'une des craintes que nous avons en ce qui concerne toute cette démarche de réforme du Sénat, de modernisation du Sénat.
    Cependant, nous sommes profondément en faveur du débat sur la réforme du Sénat. Nous comprenons les ambitions et les attentes d'un certain nombre de provinces, de nos partenaires fédératifs, et les attentes d'un certain nombre de Canadiens qui semblent souhaiter qu'il y ait effectivement une certaine modernisation, voire même, dans le cas de plusieurs Canadiens, une démocratisation du Sénat. Nous pensons que s'il doit y avoir des décisions à cet égard, elles doivent être prises en fonction des règles constitutionnelles établies. Nous n'avons rien contre le débat si ce n'est, je vous le rappelle, qu'en ce qui nous concerne, l'objectif demeure d'obtenir une chambre des provinces.
    Au sujet de la chambre des provinces, vous avez dit tout à l'heure que l'histoire démontre que c'était la volonté des Pères de la Confédération d'avoir un Sénat qui représente les provinces.
    De quelle façon pourrait-on choisir les sénateurs pour qu'ils représentent les provinces?
    À titre d'exemple, l'Accord du lac Meech, qui a été proposé par un gouvernement conservateur, ne l'oublions pas, contenait une proposition pour que les sénateurs puissent être élus ou désignés par les assemblées législatives provinciales. Ce peut être un mécanisme à envisager.
    De cette façon, on n'aurait pas de problèmes constitutionnels?
    Il faudrait en même temps revoir les pouvoirs du Sénat. On ne peut pas permettre qu'un Sénat transformé en chambre des provinces ait un veto absolu sur la passation des projets de loi fédéraux. Forcément, cela s'accompagnerait d'un veto suspensif, plutôt que d'un veto absolu.
    En ce moment, avec le projet de loi C-20, on se retrouve devant le même problème, à plus ou moins court terme. Supposons que ce projet de loi soit adopté et que le Sénat, petit à petit, se transforme en une chambre élue. Ce Sénat revendiquerait sa légitimité démocratique, et on devrait alors régler toute la question de la relation entre le Sénat et la Chambre des communes. Les pouvoirs du Sénat pourraient forcément être remis en question, dans un contexte comme celui-là. Il y aurait deux chambres qui prétendraient avoir une légitimité démocratique. Il y a même des sénateurs qui prétendraient avoir plus de légitimité parce qu'ils auraient été élus par toute une province.
    Il ne faut pas traiter ces questions à la légère. Ce sont des questions fondamentales et qui interpellent les parlementaires fédéraux. Ceux et celles qui siègent à la Chambre des communes devraient se préoccuper de cette question à plus ou moins long terme.
    Les pouvoirs du Sénat pourraient être interprétés d'une autre façon.
(1640)
    Pardon?
    Si ce dont vous avez parlé se produisait, les pouvoirs du Sénat, sur le plan constitutionnel, devraient-ils être négociés entre la Chambre des communes et le Sénat?
    Très clairement, si vous voulez changer les pouvoirs du Sénat, c'est une modification constitutionnelle en bonne et due forme. C'est prévu à l'article 42 de la Loi constitutionnelle de 1982. À moins d'une subtilité à laquelle je ne pense pas en ce moment, la modification constitutionnelle multilatérale serait tout à fait incontournable.
    La position du gouvernement du Québec semble très claire en ce qui a trait au Sénat. Vous êtes prêt à le moderniser. Si un autre parti politique prenait le pouvoir... On sait que la position du Bloc est d'abolir le Sénat. Le Parti québécois veut-il unilatéralement abolir le Sénat?
    Je ne me souviens pas qu'il se soit prononcé sur la question, mais je ne serais pas étonné qu'il aille dans le même sens que le Bloc québécois. Je dis cela sous toute réserve, car je n'ai pas pu le vérifier récemment.
    On n'aurait donc pas un consensus de tous les partis politiques au Québec quant à la modernisation du Sénat.
    En matière de modification constitutionnelle ou de réforme des institutions canadiennes, l'histoire démontre que l'unanimité est impossible. Peut-on avoir un consensus entre les formations politiques, deux formations sur trois? Je ne le sais pas. Peut-on avoir un consensus dans la population? C'est possible.
    Je ne sous-estime pas la difficulté du mécanisme de modification constitutionnelle. Cependant, ce n'est pas nous qui avons présenté le projet de loi C-20. Ce projet de loi pose une problématique qui nous interpelle et à laquelle nous réagissons. Je ne peux pas dire que ce sont des dossiers faciles ou qui suscitent beaucoup l'intérêt des citoyens, surtout pas au mois de juin.
    Merci.
    Monsieur Murphy.
    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie d'être ici, monsieur le ministre. Je viens du Nouveau-Brunswick et je suis fier d'être voisin de la belle province de Québec. Nous partageons aussi un lien historique en tant que partenaires dans le projet de Confédération, avec l'Ontario et la Nouvelle-Écosse.
    Je suis d'accord lorsque vous dites que le Sénat est un élément historique important pour ces quatre provinces, qui ont été les premières. De plus, en tant que représentant d'une communauté acadienne, je peux affirmer que c'est très important pour protéger les droits linguistiques des francophones.
    J'ai quelques questions à vous poser sur la position de la belle province. D'abord, il est clair que vous voulez que le gouvernement renonce à ce projet de loi. Ensuite, si le gouvernement fédéral n'y renonce pas, votre gouvernement compte s'adresser à la Cour suprême. Toutefois, je ne suis pas certain de comprendre le troisième point du gouvernement du Québec.
    Dans le cas où votre gouvernement ne s'adresserait pas à la Cour suprême, vous voudriez que le Québec s'adresse à la Cour d'appel du Québec pour en obtenir une décision sur la constitutionnalité de ce projet de loi. S'agit-il de la position du Québec? Est-il prématuré de dire cela?
    C'est prématuré parce qu'il n'y a pas de décision arrêtée au Québec, mais on étudie le scénario voulant qu'on intervienne auprès de la Cour d'appel, puis de la Cour suprême du Canada. Il n'y a pas de décision arrêtée sur cette question, mais quiconque connaît le dossier sait bien qu'il s'agit d'une hypothèse que le gouvernement doit considérer.
    Je répète qu'il serait, à notre avis, beaucoup plus sage que le gouvernement du Canada lui-même, s'il a toujours l'intention d'aller de l'avant avec son projet de loi C-20, s'enquière de sa constitutionnalité auprès de la Cour suprême. Je pense que ce serait une démarche beaucoup plus sage. Par ailleurs, nous réagissons aussi en faisant bien connaître notre position aux parlementaires fédéraux, qui auront éventuellement un rôle à jouer dans l'adoption du projet de loi C-20.
(1645)
    Je trouve cela intéressant. J'ai lu les commentaires d'un sénateur à l'effet que vous-même aviez l'intention de vous battre contre ce projet de loi en Cour suprême. Le sénateur Brown a peut-être mal interprété vos sentiments, mais il a dit qu'il était impossible pour la province de Québec de,

[Traduction]

    en français, « amorcer une contestation judiciaire pour quelque chose qui se passe en Saskatchewan ou en Colombie-Britannique ».

[Français]

    Avez-vous l'intention de vous adresser à la Cour suprême ou à une autre cour pour demander un changement aux lois de la Saskatchewan, de la Colombie-Britannique, de l'Alberta et du Nouveau-Brunswick? Est-ce le but de votre comparution devant ce comité?
    Nous n'en sommes pas là, mais nous sommes conscients de cette nouvelle réalité qu'est l'adoption de lois provinciales favorisant l'élection de candidats au poste de sénateur. Nous étudions évidemment les conséquences de l'ensemble de ces démarches, mais notre analyse ne nous a pas menés au point où nous pouvons nous prononcer sur ces questions spécifiques. Je ne peux donc confirmer que nous amènerions effectivement toutes ces questions devant les tribunaux.
    Une résolution de l'Assemblée nationale du Québec datant de novembre dernier dit précisément ceci:
[...] l'Assemblée nationale du Québec réaffirme au gouvernement fédéral et au Parlement du Canada que toute modification au Sénat canadien ne peut se faire sans le consentement du gouvernement du Québec [...]
     Que veulent dire exactement les mots « toute modification au Sénat »? Veut-on parler de changements apportés aux sièges ou à la couleur des murs ou est-il clair, à votre avis, qu'il s'agit d'aspects essentiels du caractère du Sénat?
    Il est évident que cette motion est inspirée du Renvoi relatif à la Chambre haute de 1980. Forcément, on parle de toute modification aux caractéristiques essentielles du Sénat. À ce sujet, nous nous conformons au renvoi de la Cour suprême, qui était empreint de bon sens. La Cour suprême a précisé que dans un cas où il serait question de changer la peinture et que cela n'entraînait pas beaucoup de conséquences, la décision pouvait probablement être prise en vertu des pouvoirs de modification unilatéraux d'Ottawa, mais que s'il était question d'apporter des changements importants à la maison, le consentement des provinces serait nécessaire. Pourquoi? Parce que la maison dont on parle n'appartient pas seulement à Ottawa: elle appartient aussi aux provinces.
    Merci, monsieur le ministre.
    Monsieur Moore.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Je tiens à vous remercier de comparaître aujourd'hui, monsieur le ministre.
    Que pensez-vous du processus actuel de nomination des sénateurs? En êtes-vous satisfait? Croyez-vous qu'il sert adéquatement les intérêts des Québécois et des autres Canadiens? Qu'en pensez-vous?
    Je crois que ce processus comporte certains avantages, car il a permis la nomination au Sénat de plusieurs personnes éminentes, qui ont bien servi le pays et le Parlement fédéral. Je considère donc que le processus actuel de nomination a une certaine valeur.
    D'un autre côté, si l'on veut changer la méthode de nomination des sénateurs, il est clair qu'il faut modifier la Constitution. Je n'irais pas jusqu'à dire que le projet de loi C-20 prévoit pareille mesure, car c'est très subtil. Le changement est toutefois suffisamment profond pour toucher aux fondements du Sénat; voilà pourquoi la réforme doit passer par une modification officielle et multilatérale de la Constitution.
(1650)
    Monsieur le ministre, je crois que vous avez indiqué que si l'on changeait la méthode de nomination, vous privilégieriez un système de consultations auquel l'Assemblée nationale du Québec participerait directement. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous préférez que l'on consulte les membres de l'Assemblée nationale du Québec, des politiciens élus, plutôt que les citoyens du Québec ou ceux des autres provinces?
    Premièrement, si on changeait le Sénat pour en faire une chambre des provinces, laissez-moi vous dire que cela provoquerait une petite révolution. Il faudrait certainement que toutes les provinces et le gouvernement fédéral participent au débat.
    Est-ce une raison pour ne pas poursuivre cet objectif? Non, mais en même temps, la question est très complexe. Si l'on intervient, il faudra modifier les pouvoirs du Sénat. Comme je l'ai dit plus tôt, il faudrait remplacer le véto absolu dont jouit actuellement le Sénat par un véto suspensif. C'est un changement notable, mais nous préférerions que le Sénat devienne une chambre des provinces et que les représentants des provinces y soient nommés par leurs assemblées législatives respectives. Il ne s'agirait pas de personnes élues par les provinces, mais de représentants des assemblées législatives.
    Savez-vous pourquoi j'adhère au concept de chambre des provinces? C'est parce que je crois que les provinces devraient avoir davantage leur mot à dire sur l'avenir du Canada et l'évolution de la fédération canadienne. Je crois que l'une des façons d'y parvenir consiste à transformer le Sénat en une chambre des provinces; mais ce serait un changement radical.
    Vous avez fait un commentaire, ce dont je vous remercie, même s'il ne concerne pas directement la situation. Ce n'est pas parce quelque chose est difficile à accomplir que c'est nécessairement une raison pour ne pas tenter d'améliorer les choses.
    Vous avez donné votre avis sur les aspects constitutionnels de ce projet de loi, formulant notamment des observations sur sa constitutionnalité. Nous avons déjà convoqué le professeur Peter Hogg à ce sujet. Il est, comme vous le savez, un grand expert des questions constitutionnelles. Selon lui, le projet de loi est tout à fait conforme à la Constitution. Donc, si on se fie à son avis sur la constitutionnalité de la mesure législative...
    Les opinions varient. Vous avez indiqué que des partis politiques et même certaines provinces considèrent que le Sénat devrait être complètement aboli; l'idée fait son chemin. D'autres, qui ont peut-être des intérêts particuliers dans ce dossier, croient, pour une raison ou une autre, que le Sénat devrait rester exactement tel qu'il est actuellement; c'est un autre point de vue dont on doit tenir compte.
    Mais selon moi, la plupart des Canadiens, d'où qu'ils soient, ne sont pas entièrement satisfaits du statu quo. Ils considèrent qu'ils devraient avoir davantage leur mot à dire en vertu des principes démocratiques. Vous avez également faire remarquer que l'on ne doit pas renoncer simplement parce que la tâche est ardue. Que pensez-vous alors de notre intention d'apporter un changement qui permettrait une représentation et une légitimité plus démocratiques au Sénat, proposition jugée constitutionnelle par un expert en la matière?
(1655)
    Je sais que même parmi les experts, les points de vue diffèrent. N'est-ce pas là une bonne raison pour clarifier la situation et nous assurer que nous ne faisons pas d'erreur? C'est cela qui compte, finalement.
    Comme je l'ai indiqué, certains spécialistes affirment que l'avis de la Cour suprême formulé en 1980 sur la Chambre haute ne s'applique plus et que cela a été remplacé par les articles 42 ou 44 de la Loi constitutionnelle de 1982. Ils considèrent que la mesure législative ne cadre pas avec l'article 42 et doit donc correspondre à l'article 44. Mais qu'en est-il de l'article 38 et de la procédure de modification résiduelle? Pourquoi cette procédure ne s'appliquerait-elle pas lorsqu'un projet de loi touche les caractéristiques fondamentales du Sénat qui ne figurent pas à l'article 42? Si ces caractéristiques ne sont pas visées par l'article 42, elles ne devraient pas figurer à l'article 44 non plus; elles devraient relever d'une autre disposition. Si ce n'est pas l'article 44 ou 42, ce devrait être l'article 38.
    Je n'ai vu aucun commentaire favorable à l'article C-20 qui ne pourrait pas, d'une manière ou d'une autre, être remis en question. Voilà pourquoi je vous invite à être extrêmement prudents dans ce dossier. Même si les objectifs que vous poursuivez en tant que représentants du gouvernement fédéral sont tout à fait légitimes, il faut respecter un certain processus constitutionnel au Canada. Finalement, ce que l'on voit ici, c'est une province qui demande que l'on respecte la Constitution à laquelle elle a adhéré en 1867.
    Merci, monsieur le ministre.
    Nous revenons à M. Paquette.

[Français]

    Vous avez rappelé plus tôt la demande que fait le Québec depuis un bon moment, à savoir que les provinces puissent nommer elles-mêmes leurs sénateurs, de façon à faire du Sénat une chambre des provinces.
    On a interpellé le premier ministre à ce sujet et il nous a répondu qu'il ne favorisait pas le remplacement du patronage fédéral par du patronage provincial.
    Comment réagissez-vous à cette affirmation, qui frôle le populisme? Elle démontre à mon avis l'intransigeance du premier ministre pour ce qui est de sa façon de voir la réforme du Sénat.
    À mon avis, il pourrait très bien y avoir au Canada, comme c'est le cas dans d'autres fédérations du monde, une chambre des provinces tout à fait viable et utile. On pourrait même, à certains égards — et je dis bien à certains égards, et non complètement —, s'inspirer du modèle allemand, qui a fait ses preuves au fil des années. Il faudrait cependant apporter un certain nombre d'ajustements à ce modèle, de façon à ce qu'il ne provoque pas certains effets pervers qu'il a provoqués en Allemagne.
    Par ailleurs, je répète l'importance qu'a le Sénat pour le Québec. Ce n'est pas un témoignage qui est en soi banal. Le Québec considère que le Sénat joue un rôle important en ce qui concerne l'équilibre fédératif.
(1700)
    S'il y avait une réforme du Sénat, il faudrait que les provinces et le Québec soient consultés. Peu importe la réforme, je suis convaincu que pour le Québec, il s'agit d'une forme de contrepoids à la place qu'il occupe à la Chambre des communes.
    Plus tôt, j'ai lu ce que disait M. Harper sur l'idée de faire du Sénat une chambre des provinces. On sent clairement que le gouvernement Harper — et c'était le cas également de M. Van Loan quand il est venu témoigner — considère que les projets de loi C-19 et C-20 sont à prendre ou à laisser, en ce sens que si ces derniers ne sont pas adoptés, il va s'employer à abolir le Sénat.
    Croyez-vous que ce genre d'affirmation, qui à mon avis frôle le chantage, tienne la route? Peut-on vraiment craindre que le gouvernement fédéral, le Parti conservateur, décide unilatéralement d'abolir le Sénat? Cette menace est-elle crédible? Ça donnerait nécessairement lieu à de nouvelles négociations constitutionnelles.
    Je pense qu'encore plus d'experts vous diront que cela ne peut se faire qu'en vertu d'une procédure de modification constitutionnelle multilatérale. La Constitution prévoit déjà, à l'article 42, que vous ne pouvez pas toucher aux pouvoirs du Sénat sans appliquer la procédure 7/50. Si vous éliminez tous les pouvoirs, a fortiori, cette procédure s'applique. Il y a même plusieurs experts qui prétendent que dans un cas comme celui-là, cela demanderait le recours à l'article 41, puisque vous changeriez la procédure de modification constitutionnelle, qui accorde au Sénat un certain pouvoir, un veto suspensif par rapport à certaines modifications constitutionnelles. Alors, honnêtement, l'abolition du Sénat de façon unilatérale me semble carrément impensable.
    Je peux vous assurer que le Bloc québécois juge que les projets de loi C-19 et C-20 sont inadmissibles, et qu'il va se faire le porteur du consensus de l'Assemblée nationale.
    J'aimerais vous poser une question en marge du sujet, mais qui y est tout de même liée. M. Harper et le gouvernement conservateur déploient beaucoup d'énergie pour réformer le Sénat au moyen des projets de loi C-19 et C-20. Avec cette vision, ils tentent n'importe quel changement pour redynamiser le débat concernant la réforme du Sénat.
    Serait-il préférable que le gouvernement conservateur déploie autant d'énergie, sinon plus, à régler le problème du pouvoir de dépenser du fédéral dans les champs de compétence du Québec et des provinces? Comme vous le savez, à plusieurs reprises, le ministre des Finances et le premier ministre nous ont annoncé un projet de loi, lequel n'est toujours pas déposé. En ce moment, il y a un contrôle et ils n'ont pas besoin de s'en remettre à quelqu'un d'autre.
    À court terme, la priorité devrait-elle être plutôt de travailler à des objectifs atteignables, comme l'élimination du pouvoir de dépenser du fédéral dans les champs de compétence des provinces et du Québec?
    La priorité du gouvernement du Québec n'était pas la réforme du Sénat. C'est devenu un enjeu pour nous en raison des circonstances, bien entendu. Nous avons déjà dit que notre priorité était l'encadrement du pouvoir fédéral de dépenser. C'est la position que notre gouvernement a privilégiée.
    Le gouvernement du Canada a une vue d'ensemble. Il voit les demandes des provinces de l'Ouest et doit aussi composer avec les intérêts de plusieurs partenaires, ce qui est tout à fait légitime. Il a jugé qu'il devait faire de la réforme du Sénat un enjeu. En soi, je ne conteste pas ce choix et je ne conteste même pas les motivations qui en sont à l'origine. Cependant, cela doit se faire selon les règles établies, lesquelles sont de nature constitutionnelle.
    Dans ce contexte, nous avons nos propres priorités, et le gouvernement du Canada a une perspective pancanadienne, bien entendu. Je suis tout à fait conscient que plusieurs provinces demandent une modernisation du Sénat. Ce n'est pas pour les embêter que nous prenons ces positions, mais pour rappeler l'importance de respecter le compromis fédératif de 1867, de respecter la Constitution actuelle et de respecter le rôle des provinces dans le système fédéral canadien.
    Merci.
(1705)
    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Preston, figuriez-vous sur la liste?
    Je vais y aller, même si je n'ai pas tout le temps qui me serait normalement accordé.
     J'ai entendu de nombreux spécialistes au sein de ce comité. Je vous remercie de comparaître aujourd'hui, monsieur le ministre, pour nous faire part du point de vue de votre province. C'est vraiment très intéressant d'entendre votre opinion et de recueillir autant de renseignements que possible sur la question.
    Nombreux sont ceux qui sont venus nous dire, un peu comme vous d'ailleurs, à quel point il est difficile d'accomplir la tâche dont nous sommes investis, c'est-à-dire faire du Sénat une institution différente de celle qu'elle est aujourd'hui. Est-ce que tous ces efforts en valent la peine, même si tout le monde semble insister sur la difficulté de cette entreprise? Eh bien, je suis de ceux qui aiment relever les défis et je dis: oui, allons de l'avant. C'est la difficulté même de l'initiative qui la rend si digne d'intérêt. Qu'en pensez-vous? Vous répétez que c'est facile de faire obstacle à la réforme du Sénat ou aux changements que nous aimerions apporter. Est-ce que le jeu en vaut la chandelle?
    Je crois que cela vaut la peine d'essayer d'améliorer la fédération canadienne. Nous pourrions nous y prendre de différentes manières, constitutionnelles ou non. Tout dépend de ce que l'on veut.
    Dans notre cas, lorsque nous avons formé le gouvernement, au Québec, en 2003, nous avons décidé de renforcer le Québec au sein d'un Canada plus fort en recourant à des moyens non constitutionnels. Je crois que nous y sommes fort bien parvenus. Il reste encore beaucoup à faire, mais nous sommes fiers de notre succès.
    Cependant, même si j'ai dit que l'on peut modifier certaines choses sans toucher à la Constitution, je vous rappelle que lorsque la Constitution s'applique, on ne peut rien y changer. La Constitution est comme un contrat qui lie des partenaires. Nous considérons que pour des raisons fondamentales, ce contrat doit être respecté.
    Comme l'a fait remarquer M. Paquette, la situation a l'avantage de nourrir le débat concernant une institution dont nous n'avons peut-être pas suffisamment parlé au cours des dernières années et qui mérite un peu plus notre attention. Il s'agit d'une discussion très salutaire. Or, nous sommes au coeur de ce débat; c'est la raison de ma présence ici aujourd'hui. Cela vaut la peine de continuer, d'essayer d'améliorer la fédération, de respecter la Constitution ainsi que les provinces et de nous doter enfin d'institutions représentatives de toutes les provinces et tous les Canadiens. Ils doivent s'y reconnaître et y adhérer. Ce qui nous préoccupe, c'est la grande importance que semble revêtir l'adhésion du Québec à la réforme du fédéralisme canadien.
    Vous venez de dire, comme vous l'avez indiqué plus tôt d'ailleurs, que vous comprenez que les Canadiens aspirent à une plus grande démocratisation et qu'ils pourraient l'exiger. Je suis également d'accord avec vous que nous avons laissé ce sujet de côté trop longtemps. Nous avons vu ce qui s'est passé depuis 1867, et je ne suis pas certain que beaucoup de Canadiens puissent affirmer que le Sénat, sous sa forme actuelle, correspond à leur idée de la démocratie ou de ce que le Canada devrait être. À mon avis, nous devons réconcilier le Sénat avec l'idée que s'en font les citoyens de notre pays. Maintenant, la question est de savoir si nous le réformons d'un seul coup ou si nous y allons progressivement? On dit que la meilleure manière de s'attaquer à un si gros projet, c'est d'y aller par étapes. Est-ce que le projet de loi C-20 constitue une de ces étapes?
(1710)
    Ce qui compte, c'est le résultat final: arriver à ses fins.
    On m'a peut-être accusé de l,avoir déjà fait.
    Voilà qui est très avisé et très subtil. Mais est-ce constitutionnel? J'en doute. Pourquoi permettrait-on à quelqu'un de faire indirectement ce qu'il ne peut faire directement?
    Dans notre cas, même en faisant preuve de doigté, l'intervention est suffisamment importante pour susciter une réaction, pour nous faire réagir à la situation et nous faire dire que la mesure va trop loin. C'est quelque chose qui, à notre avis, nécessite une modification constitutionnelle officielle, un point c'est tout.
    D'un autre côté, je sais ce à quoi aspirent bien des gens. Dans notre société, la Constitution l'emporte sur tout le reste et doit être respectée. Nous pouvons parfois agir de concert, sans avoir à faire une modification constitutionnelle. Nous sommes prêts à le faire, à participer à un projet canadien. Mais si nous avons l'impression que la Constitution s'applique, alors il faut la respecter.
    Si nous acceptons d'y aller par étapes, un peu à la fois, que ce passera-t-il ensuite? Les pouvoirs seront-ils répartis entre le gouvernement fédéral et les provinces? Renverra-t-on le dossier à la Cour suprême du Canada? Qu'adviendra-t-il alors? Tôt ou tard, on se heurtera à des aspects que nous ne pouvons accepter parce que leurs conséquences à long terme seraient trop néfastes pour la fédération canadienne.
    Merci, monsieur le ministre.
    Madame Folco, vous avez la parole pour la dernière série de questions.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, le projet de loi C-20, tel qu'il nous est présenté, prévoit l'élection des sénateurs province par province et, il me semble, sous l'égide et le contrôle du gouvernement fédéral, puisqu'une des choses qu'il dit, c'est que les élections à la deuxième chambre — appelons-la le Sénat — pourraient avoir lieu en même temps que les élections à la Chambre des communes, dans chacune des provinces et selon des normes qui sont celles du gouvernement fédéral. C'est une des possibilités avancées dans le projet de loi. C'est le gouvernement fédéral qui propose le nombre d'électeurs et c'est aussi le gouvernement fédéral, ou en tout cas le premier ministre, qui choisirait parmi les sénateurs élus les personnes dont il proposerait ensuite le nom au Gouverneur général.
    Donc, il y a une combinaison de procédures qui me semble intéressante. Mais je m'éloigne un peu de mon sujet. Compte tenu du fait que c'est le fédéral qui semble contrôler l'élection des sénateurs à cette chambre des provinces, verriez-vous les provinces prendre une part beaucoup plus importante, jouer un rôle beaucoup plus important dans l'élection de ces candidats au Sénat dans chacune des provinces, comme l'a fait l'Alberta, par exemple, lors des deux dernières élections qu'elle a tenues pour les sénateurs?
    Ce n'est pas un scénario que nous envisageons, parce que nous ne voulons pas accréditer une démarche qui, à notre avis, transformerait à terme le mandat du Sénat et transformerait cette institution progressivement en une chambre élective, sans qu'il y ait application des procédures de modification constitutionnelle formelles. Alors, ce n'est pas un scénario que nous examinons.
    Si on considère le projet de loi C-20, on se demande quelle en est la nature véritable, ce qu'on appelle le pith and substance. Quel est le fondement du projet de loi C-20? Vous allez y voir un tas de mesures, y compris la participation du directeur général des élections, des règles pour le dépouillement des votes, les dépenses électorales, et ainsi de suite. Nous sommes carrément en présence d'un projet de loi électoral.
    Le fait qu'on nous dise que c'est pour la consultation des citoyens ne change rien, à mon avis, à la nature même du projet de loi. En vertu du projet de loi C-20, on pourrait dire à quelqu'un de se porter candidat dans une province, de faire le tour de la province, de défendre son point de vue, ses opinions, d'essayer de se rendre intéressant pour la population... 
(1715)
    Surtout pas une plateforme, monsieur le ministre.
    Je n'ai pas utilisé cette expression.
    Alors, on dirait à une personne de tenter de se rendre intéressante pour la population, d'encourir des dépenses électorales, de participer à une élection, et à la fin, le premier ministre du Canada pourrait dire qu'il préfère telle autre personne qui n'a pas passé le test électoral. Et on nous dit que le premier ministre garde son pouvoir discrétionnaire, qu'il fait toujours les recommandations au gouverneur en conseil.
    Franchement, quand on se pose la question aussi grossièrement, peut-être, je pense que la conclusion vient d'elle-même.
    Vous avez terminé, madame Folco? Merci.
    J'aimerais remercier le ministre d'avoir partagé ses connaissances avec tous les Canadiens et de nous avoir fait mieux comprendre son point de vue au sujet de la réforme du Sénat.

[Traduction]

    Je suis certaine, monsieur le ministre, qu'avec le feu nourri de questions auquel nous vous soumettons, vous avez l'impression d'être au coeur d'une bataille juridique. Je vous remercie de faire preuve de patience.
    M. Reid invoque le Règlement.
    Je suspends brièvement la séance pour que nous puissions dire au revoir à notre invité. Nous reprendrons nos travaux dans quelques instants.
    Merci.
(1720)
    Nous reprenons la séance.
    Monsieur Reid.
    J'ai invoqué le Règlement concernant l'invitation que nous avons lancée à Bill Boyd, ministre responsable de la réforme du Sénat en Saskatchewan. Je crois comprendre que le Comité l'avait convoqué et que si cette invitation était renouvelée, il pourrait venir. Je sais que nous avons discuté de son absence, due à je ne sais quel problème de communication.
    Je sais que lorsque j'ai abordé la question aujourd'hui, vous vous êtes dits un peu surpris. D'après ce que j'ai compris, M. Boyd a su trop tard qu'il était invité à comparaître; je suppose donc qu'il y a eu un manque quelque part, et nous savons tous ce que c'est. Qui n'a pas déjà eu de problème de courriels ou de messages téléphoniques? Quoiqu'il en soit, si nous pouvions réitérer notre invitation, je crois qu'il est fort probable que M. Boyd comparaisse.
    Si nous pouvions clarifier la situation, il ne fait aucun doute que nous le réinviterons. D'après ce que j'ai compris, nous avons longuement correspondu avec lui depuis le 27 mars.
    Il est peut-être temps de mettre sur pied un comité directeur chargé d'examiner la liste des témoins, pour que personne ne soit pris par surprise. Je croyais que nous avions dressé cette liste lors de la rencontre initiale. J'ai été quelque peu étonnée lorsque le représentant de la Saskatchewan nous a avisés qu'il ne viendrait pas.
    Des commentaires?
    Monsieur Murphy.
    Je voulais simplement dire que je crois également qu'il est temps qu'un sous-comité se réunisse pour discuter de la liste des témoins. De toute évidence, s'il y a eu un malentendu, personne ne s'objectera à entendre le témoignage de quelqu'un qui n'a pu se présenter. On peut bien jeter le blâme sur les politiciens, cela nous va parfaitement.
    C'est toujours la faute des politiciens, évidemment.
    Devrions-nous former le comité directeur avant ou après le congé d'été? Qu'est-ce qui vous conviendrait le mieux?
    Je proposerais, madame la présidente, de nous réunir avant le congé d'été. Comme nous pouvons le voir sur le calendrier, nous revenons en septembre, car il n'y aura pas de prorogation.
    Nous pourrions nous voir lundi alors. Qu'en pensez-vous?
    D'accord. À quelle heure se réunit-on normalement?
    Habituellement après la période des questions. C'est le moment qui convient le mieux à la plupart des membres. Sommes-nous d'accord?
    Absolument.
    Vous êtes libre, monsieur Reid, de jeter un coup d'oeil sur les notes. Mon greffier m'en a remis toute une pile sur cette correspondance.
    Ce serait très utile, en fait. Je vous remercie.
    Merci.
    La séance est levée.