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PROC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


NUMÉRO 017 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 28 février 2008

[Enregistrement électronique]

(1110)

[Traduction]

    Chers collègues, je vous souhaite la bienvenue après notre semaine de congé parlementaire.
    Nous allons entamer la 17e réunion du comité qui va se dérouler conformément au paragraphe 106(4) du Règlement. Comme vous le savez, il s'agit d'une réunion spéciale qui a été réclamée par quatre de nos membres.
    Je vais vous lire la motion et demander que quelqu'un l'appuie. La motion invite le comité à se rencontrer pour discuter de la demande de quatre membres de considérer la tenue de séances additionnelles tous les mercredis, lorsque la Chambre est en session, débutant le 27 février 2008, afin d'entendre le témoignage d'individus concernant les dépenses faites par le Parti conservateur du Canada lors de la campagne électorale de 2006 en commençant par ceux-ci: a) M. Marc Mayrand, Directeur général des élections, b) M. Gary Caldwell, ancien candidat conservateur dans Compton—Stanstead, c) Liberato Martelli, ancien candidat dans Bourassa.
    C'est proposé par Mme Redman. Merci.
    Nous passons au débat.
    Madame Redman, je vous en prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je constate que nous revenons encore sur la même question. Nous avons essayé à plusieurs reprises déjà d'aborder ce sujet, mais les députés du côté gouvernemental s'y sont systématiquement opposés. Nous allons donc essayer, une nouvelle fois, de faire valoir l'opinion de la majorité du comité qui désire recueillir des témoignages sur cette question.
    Comme nous sommes en situation de gouvernement minoritaire, nous sommes tous prêts à affronter des élections n'importe quand. Pour que les Canadiennes et les Canadiens sachent tout de ce problème, de ce tour de gobelet auquel s'est livré un seul parti lors des élections de 2006, il convient que le comité accueille le Directeur général des élections, le DGE, ainsi que MM. Caldwell et Martelli qui ont d'ailleurs exprimé leur mécontentement dans la presse, puisque dans certains cas d'anciens candidats conservateurs se sont sentis contraints ou poussés à jouer le jeu en sachant pertinemment que c'était une erreur.
    Élections Canada reconnaît, clairement, que cette procédure est inappropriée, raison pour laquelle l'organisme a refusé d'autoriser des dépenses au Parti conservateur. Ce faisant, ce parti a dépassé de près de 1,2 million de dollars le maximum autorisé pour sa campagne de publicité nationale. Comme nous sommes en situation de gouvernement minoritaire, nous jugeons qu'il y a péril en la demeure. Cette motion nous donne l'occasion d'aborder la question de façon raisonnable et nous devrions commencer sans plus tarder.
    Ce serait bien si, pour dévier de nos habitudes, nous votions sur cette motion aujourd'hui même.
    Monsieur Preston.
    Je fais un rappel au Règlement, car Mme Redman et les libéraux ne comprennent peut-être pas qu'afin de nous retrouver en élections, il faudrait d'abord qu'ils déclenchent un certain vote...
    Ça, c'est de la rhétorique. Je vous en prie, tenons-nous-en aux règles. Merci.
    Monsieur Reid, c'est à vous.
    Il y a en fait quelque chose de nouveau: cette motion est différente de celle dont nous avons été saisis... mon Dieu... d'août à février dernier et tout ce que je dirai au sujet de cette première motion qui n'a pas abouti, c'est que nous avons à peine eu le temps de la découvrir. Nous avons passé beaucoup de temps dessus. Je dois supposer que les gens d'en face se sont finalement rendus à l'idée qu'elle comportait certains éléments inappropriés, notamment dans la façon dont elle était rédigée. Je parle bien de la motion précédente, mais les changements intervenus s'appliquent tout autant à ce dont nous parlons ici.
    Dans la motion précédente, on supposait a priori que nous étions coupables. Il était question d'actions illégitimes — ce sont les termes qui avaient été employés — de la part du Parti conservateur lors des élections de 2006. Certains d'entre nous se sont objectés — une fois pendant deux bonnes heures de suite — à l'emploi du terme « illégitimes » qui, selon moi, était destiné à donner l'impression que nous étions coupables sans plus de précisions.
    Les auteurs de la motion auraient simplement ou dire qu'Élections Canada « contestait » nos dépenses illégitimes ou, mieux, contestait la légalité de nos dépenses ». Mieux encore, ils auraient pu dire que « les dépenses électorales sont contestées parce qu'Élections Canada estime que ce genre de dépenses convient dans le cas des libéraux, mais pas dans celui des conservateurs ». Je pense que tout cela nous ramène au sempiternel problème fondamental de la tournure des motions.
    Bien que cette nouvelle motion soit nettement différente de la précédente à certains égards, pour l'essentiel, elle est la même. On y suppose qu'il faut se pencher sur les dépenses électorales du Parti conservateur et pas sur celles des autres partis. On y part du principe que seules les dépenses électorales de 2006 méritent un examen, et non celles des élections précédentes et surtout pas celles des élections de 2004. Ce qu'il convient de souligner par-dessus tout, dans ce passage sous silence de élections de 2004, c'est que cette année-là, le Parti libéral du Canada avait beaucoup plus d'argent qu'en 2006. Cela étant, il était mieux en mesure d'effectuer des transferts de fonds entre ses différents QG de campagne de même que de ses QG de campagne au siège national, ce qu'il lui a été beaucoup moins possible en 2006. J'estime que cela est amplement confirmé dans les affidavits qui ont été soumis à la faveur des procédures judiciaires qui opposent le Parti conservateur du Canada à Élections Canada, affidavits qui établissent que ce genre de pratiques — bien que le Parti libéral ait fait un peu la même chose, comme d'autres groupes politiques, lors des élections de 2006 — étaient très répandues en 2004.
    Je me propose de continuer à vous entretenir de certaines de ces questions, mais je tiens à m'arrêter quelque peu sur deux grands éléments fondamentaux qui brillent par leur absence — ou du moins qui occupent tout la scène sous l'effet de leur absence — de la motion qui nous est proposée aujourd'hui. Monsieur le président, cette motion, qui se concentre sur une seule élection et un seul parti, vise à obtenir un instantané qui ne racontera évidemment pas tout.
    Vous avez peut-être vu certaines publicités télévisées du Globe and Mail qui vont me servir d'analogie. L'une d'elle présentait la photo de deux jeunes garçons, plutôt mignons. Elle avait été filmée en plan rapproché, mais quand la caméra faisait un traveling arrière pour découvrir la scène complète, on s'apercevait que ces deux jeunes garçons tenaient des kalachnikovs. On avait dès lors un point de vue différent, et c'est essentiellement ce qui se produit avec cette motion. Elle vise à nous donner une représentation tronquée de la réalité, car elle serre certains aspects de trop près...
(1115)
    Superbe analogie.
    Merci. Elle m'est venue à l'esprit, parce que je viens de me procurer un de ces téléphones avec appareil photo intégré qui permettent de zoomer sur un détail et donc d'extraire certains éléments de la scène pour que le produit final paraisse mieux — en laissant de côté, par exemple, un membre de la belle-famille situé en arrière-plan.
    Je fais un rappel au Règlement. Qu'est-ce que tout cela a à voir avec le fait de vouloir acheter un vote pour 1 million de dollars?
    Je ne vois pas de quoi vous parlez.
    Eh bien, si vous ne voyez pas, monsieur le président, lisez donc le journal d'aujourd'hui. Le Parti conservateur était prêt à payer 1 million de dollars pour acheter un vote.
    Je ne reçois pas ce journal.
    Eh bien, nous vous en ferons livrer un exemplaire, monsieur le président.
    Je vous en prie, monsieur Reid, vous avez la parole.
    Je pense savoir ce à quoi le député fait allusion. Monsieur le président, il a fallu un peu de temps pour établir le lien, mais la question dont parle le député n'est visée ni par la motion présentée par Mme Redman, ni par les autres libellés qu'il m'a été donné de voir. Je ne pense donc pas que ses propos aient un rapport avec la motion dont nous sommes saisis. Cependant, je suppose que nous pourrions traiter de l'aspect qu'il a soulevé, comme de toute autre sujet d'ailleurs, par le truchement d'un amendement, si le député décide d'en proposer un quand son tour viendra de prendre la parole. Peut-être pourra-t-il envisager de le faire à ce moment-là.
    Dans ses remarques liminaires, Mme Redman a employé les termes « contraints ou poussés » à propos de deux anciens candidats conservateurs, soit Gary Caldwell, dans Compton—Stanstead et Liberato Martelli, dans Bourassa.
    Je me demande si elle est consciente du sens juridique des termes « contraints ou poussés », qui laissent entendre que la personne concernée a subi directement ou indirectement des violences physiques ou a fait l'objet d'un chantage. Au sens légal du terme, les expressions « contraints » et « poussés » qualifient des actes criminels. Je suis à peu près certain que la députée ignorait le sens de ces mots, parce qu'ils auraient non seulement décrit une violation de la Loi électorale du Canada, mais aussi une violation du Code criminel. Si les candidats avaient effectivement émis de telles accusations, je suis à peu près certain que nous nous serions retrouvés dans une situation très différente. Nous serions sans doute en présence d'une poursuite au pénal.
    S'ils semblent raisonnables en surface, ces propos sont malheureux parce qu'ils sont excessifs et trompeurs. Je pense que ce n'est pas voulu, mais il demeure qu'il est trompeur de donner l'impression que le problème auquel nous sommes confrontés est une crise de caractère exceptionnel.
    Je suis, moi aussi, convaincu que nous sommes en présence d'un véritable problème, mais je veux parler du fait que l'arbitre de nos élections, qui devrait être impartial, l'organisme chargé d'administrer nos élections — soit Élections Canada — est loin d'être impartial. Il accorde un traitement différent aux différents partis. C'est ce qu'on peut constater dans l'instantané « tronqué » qu'on nous propose dans cette motion soumise au comité. En réalité, cette motion vise à consacrer, à légitimer la manière inique dont Élections Canada traite les partis pour donner l'impression que nous avons affaire à un scandale, tandis que c'est Élections Canada elle-même qui n'applique pas la loi de la même façon aux différents partis.
    Quand on y pense, ça saute aux yeux, puisque ce n'est pas Élections Canada qui est en train de poursuivre le Parti conservateur ou l'un de ses agents officiels devant les tribunaux, mais bien l'inverse : ce sont deux anciens agents officiels du Parti conservateur qui poursuivent Élections Canada. Il est très important de ne pas perdre cela de vue.
    Nous savons tous très bien que nous ne devrions pas parler de ce genre d'affaire qui fait l'objet d'une convention relative aux questions en instance. Nous savons que vous avez rendu un jugement. Nous savons que celui-ci a été renversé. Nous savons aussi que l'annulation de votre décision n'a pas été motivée. Elle a été une simple prise de position associée par le jeu du vote majoritaire. Ce faisant, il ne faut pas mettre tout cela sur le dos des députés d'en face. C'est ainsi que cela fonctionne, quand on conteste le président et qu'on passe au vote sans débat ou discussion. Il demeure que les gens d'en face ont disposé de huit mois, de sept mois de toute façon, pour nous faire part de leurs motifs et je n'ai, jusqu'ici, pas entendu un seul député d'en face me donner une raison qui m'aurait convaincu que la convention relative aux questions en instance ne s'applique pas en l'espèce.
(1120)
    Ils n'ont pourtant pas manqué d'occasions, à ce comité, dans nos débats, de même que dans les médias et ailleurs, d'expliquer que, dans ce cas particulier, la règle du «sub judice, ne s'applique pas ici. Les libéraux obéissent sans doute à une logique implacable, sans quoi ils n'affirmeraient pas une telle chose; toutefois, la convention relative aux questions en instance est destinée à garantir l'application de la loi à toutes les parties prenantes, en parfaite impartialité et en toute équité. Ce principe immuable ne peut être mis en péril par les actions de notre comité.
    Je suppose qu'en essayant ainsi de faire dévier la discussion, les libéraux tentent d'amener l'électorat, le tribunal populaire, à pencher d'un côté de la balance plutôt que d'un autre, avant une élection. Je me livre, certes, à des conjectures, mais j'ai l'impression que cette motion a été déposée pour être lue à notre première rencontre du 27 février, c'est-à-dire hier. L'enchaînement des événements aurait été parfait pour que ce simulacre de scandale éclate au grand jour juste avant le déclenchement des élections, à la suite d'un vote en chambre qui aurait pu intervenir dès aujourd'hui. Or, grâce à nos amis du Parti libéral, il semble que ce rendez-vous électoral sera loupé. Compte tenu de leur apparent enthousiasme à appuyer notre budget, il n'y aura sans doute pas d'élections.
    Cela veut-il dire que nous allons nous retrouver dans une situation où ils vont essayer d'entretenir ce soit-disant scandale jusqu'aux prochaines élections, c'est-à-dire, au rythme où vont les choses, en octobre 2009. Si tel est le cas, nous devons nous attendre à passer une année ou à une année et demie très fastidieuse. La bonne nouvelle, dans tout ça, c'est que la poursuite judiciaire aura sans doute abouti d'ici là. Les véritables tribunaux se seront prononcés. Les divers sièges de campagne du Parti conservateur auront reçu les fonds que leur doit Élections Canada au titre de leurs dépenses électorales légales et admissibles. Peut-être que tout cela mettra un terme à ce qui n'est, à mes yeux, qu'une vaste mascarade, mascarade qui consiste à nous amener à préjuger de la décision des tribunaux, à tenir des audiences parallèles et à entendre des témoins sélectionnés sur le volet pour que nous parvenions à une conclusion jouée d'avance.
    J'attire l'attention des députés d'en face sur le fait qu'ils risquent de se retrouver dans une situation un tantinet embarrassante quand, après avoir poursuivi cette affaire sans relâche, les tribunaux jugeront injustifiées toutes le tentatives de nos amis.
    Cela me ramène à une question que Mme Redman nous ressasse chaque fois qu'elle redépose sa motion. Elle nous dit qu'Élections Canada a jugé que nous étions dans nos torts. Or, je me permets de souligner qu'Élections Canada n'est pas un tribunal, que ce n'est pas un organisme juridique. Même les tribunaux peuvent se tromper. C'est pour cela que nous avons des cours d'appel. Dans notre système judiciaire, nous avons les tribunaux de première instance, soit le premier palier d'audition des causes au civil ou des procès au criminel. Puis, il y a les cours d'appel qui, selon la province, s'appellent Cour du banc de la Reine, Cour d'appel ou Cour supérieure. Enfin, il y a la Cour suprême. Il existe donc divers paliers qui peuvent reconnaître que les tribunaux inférieurs ont fait erreur. Même la Cour suprême peut se tromper parfois et décider, après coup, de rouvrir une cause pour réviser un jugement. Cela se produit moins fréquemment — en fait, c'est même très rare. Quoi qu'il en soit, même les tribunaux peuvent se tromper. Mais, bon sang de bois!... Élections Canada n'est pas un tribunal. Ce n'est même pas un organisme quasi judiciaire. C'est un organisme qui est chargé d'administrer la loi, raison pour laquelle le commissaire des élections n'a rien à voir avec le Directeur général des élections.
    Convoquer ici le Directeur général des élections, qui est une des parties au différend, qui est l'intimé — regardez, c'est là, en frontispice du document de la Cour fédérale :
Dossier no T-838-07
L.G. Callaghan, en sa qualité d'agent officiel de Robert Campbell, et David Pallet, en sa qualité d'agent officiel de Dan Mailer
    Ainsi, M. Callaghan était agent officiel de M. Campbell et M. Pallet, celui de M. Mailer. Ces deux personnes sont les requérants dans cette affaire. L'intimé — c'est-à-dire celui qui se défend d'avoir enfreint la loi — est le Directeur général des élections du Canada. Vous voyez donc le problème posé par le fait que le tout premier témoin invité, M. Mayrand, soit une des parties à cette cause.
(1125)
    Je me risquerais d'ailleurs à parier que, si nous l'invitions, M. Mayrand nous répondrait ainsi : « Je ne pourrais me présenter devant vous sans risquer de compromettre une procédure dans laquelle je suis moi-même partie. Je me dois donc de décliner votre invitation. » Je ne sais pas si les libéraux ont l'intention de le faire traîner devant nous fers aux pieds, comme Karlheinz Schreiber — de le placer sous mandat du président —, mais j'estime qu'il serait déplacé de le convoquer. J'aurais pensé que les libéraux s'en rendent compte. Le précédent projet de motion des libéraux partait du principe que nous étions a priori coupables, mais au moins, cré coquin de sort! elle n'était pas assortie d'une liste où apparaissait le nom d'une personne qui est l'intimée dans une cause se trouvant devant les tribunaux. C'est là une erreur fondamentale.
    Si j'ai raison dans la thèse que j'ai formulée tout à l'heure, c'est-à-dire que le véritable objectif poursuivi à l'origine était simplement de faire adopter par le comité une motion précisant que nous allons tenir de telles audiences, sans toutefois passer aux actes, les libéraux n'auraient pas risqué d'être embarrassés par le refus de M. Mayrand de se présenter ici, et ils auraient pu continuer tranquillement. Nous nous serions retrouvés en élections. En campagne électorale, on peut toujours faire toutes sortes d'accusations. Il est toujours possible de produire des publicités dans lesquelles on dit n'importe quoi à condition, en conclusion du message, d'ajouter « Nous ne l'inventons pas, ils ne nous le permettraient pas ». Mobilisons-nous! Le Parti conservateur est coupable de toutes sortes de maux que nous aurons imaginés, à condition de préciser « Nous ne l'inventons pas, ils ne nous le permettraient pas ».
    Nous avons vu ce genre de publicités et je pense que c'est ce qui est en train de se produire ici. Je ne sais pas. Il existe peut-être une explication plausible, et il est possible que, quand j'en aurai terminé, un député libéral voudra bien mettre les choses au point et m'expliquer quels sont les véritables motifs des libéraux. Quoi qu'il en soit, si nous donnons suite à cette motion et si nous convoquons M. Mayrand, nous allons créer un grave problème et mettre le comité dans l'embarras, puisque M. Mayrand dira inévitablement : « Je ne peux pas venir, parce que je suis partie à ce différend qui se trouve devant la Cour fédérale du Canada ».
    Tout cela nous ramène donc à l'idée que le DGE administre la loi de différentes façons. Nous l'avons déjà accueilli à de nombreuses reprises pour qu'il nous parle d'autres dossiers, qu'il nous explique comment il les administrait. Son bureau produit notamment des bulletins d'interprétation qui sont affichés sur le site Internet du DGE. Ces bulletins expliquent la façon dont le DGE interprète les articles de la loi — chaque fois qu'il y matière à interprétation — et il obéit en cela à une pratique qui est largement utilisée, non pas par des organes judiciaires, mais par les organes administratifs chargés d'administrer des textes de loi complexes et, au besoin, d'entreprendre des poursuites en vertu de la loi.
    Le DGE est donc un administrateur qui a le pouvoir d'entreprendre des poursuites si, selon lui, la loi qu'il administre a été enfreinte. Cependant, il ne rend jamais lui-même de jugement. Ainsi, sur un certain plan, il fonctionne un peu comme un procureur de la Couronne. Il porte plus d'une casquette. Il administre la loi et doit aussi nommer les directeurs de scrutin, lesquels engagent les scrutateurs et les secrétaires de bureaux de vote dans les 308 circonscriptions fédérales du pays, ce qui représente une lourde tâche administrative. C'est pour cela que le DGE dispose d'un budget conséquent se chiffrant en dizaines de millions de dollars.
    De plus, son personnel examine les activités des participants aux élections et, si le DGE le juge approprié, il peut appliquer certaines mesures administratives, pouvant prendre la forme d'une poursuite, s'il constate que quelqu'un a enfreint la loi.
(1130)
    Ce fut, par exemple, récemment le cas d'un certain James Di Fiore, à Toronto. Lors des élections de 2004 ou 2006 — je ne me souviens pas de laquelle — s'est rendu trois fois dans un même bureau de vote pour réclamer un bulletin à chaque fois. On me dit qu'il n'a voté qu'une fois, et qu'il a remis deux bulletins gâtés. Quoi qu'il en soit, il essayait de prouver qu'Élections Canada ne faisait pas ce qu'il fallait pour vérifier l'identité des électeurs potentiels et éviter des fraudes, sous la forme de votes multiples. Il soutenait qu'à cause de cela certaines circonscriptions pouvaient être remportées par un candidat n'ayant pas forcément la majorité des votes légitimes, ce qui serait, quant à moi, un grave problème. Dans la circonscription où il a voté, il faut savoir que l'ancien candidat et député libéral, Tony Ianno, a soutenu que le néo-démocrate, qui représente maintenant la circonscription, a remporté les élections à cause d'une fraude électorale et qu'une enquête a été déclenchée après coup.
    Tout cela relève de la responsabilité du DGE d'engager des poursuites, et il se trouve que celui-ci a affirmé que M. Di Fiore avait enfreint une disposition de la loi. Vous voudrez bien m'excuser, mais comme je n'envisageais pas de me lancer dans cet argument ou de m'appuyer sur cet exemple, je n'ai pas pris soin de noter de la disposition pertinente de la loi, mais il s'agit d'un article précisant qu'il est interdit de voter plus d'une fois et qu'on ne peut pas, non plus, demander plus d'un bulletin de vote. Le DGE a estimé que cette personne avait violé cette partie de la loi et il a entamé des poursuites contre elle. Le tribunal a tranché en faveur du DGE, contre M. Di Fiore, qui a reçu une peine légère.
    C'est une des choses que fait le DGE, quand il juge qu'un préjudice effectif a été commis et c'est ce qui se passe quand les tribunaux confirment son jugement. Et puis, il y a des situations où le préjudice n'a pas été effectif, mais où le DGE donne une interprétation administrative de la loi différente de l'intéressé, par exemple quand une personne réclame un remboursement pour des dépenses que le DGE juge illégitimes. Je parie qu'il ne se trouve pas un seul député dans cette salle n'ayant pas réclamé de dépenses qui ont été refusées par le DGE. Je ne suis pas sûr qu'il se trouve un seul candidat victorieux au Canada qui n'ait pas réclamé des dépenses lui ayant été refusées. Cela tient à la nature des choses, surtout étant donné l'incroyable complexité qu'il y a de trancher entre dépenses admissibles et dépenses non admissibles. Personnellement, je sais qu'il m'est déjà arrivé de soumettre certaines dépenses limites parce que nous ne voulions pas opter pour une autre pratique — également interdite par la loi — qui consiste à dépenser des sommes sans les consigner. On inclut donc certaines dépenses en se disant qu'elles vont bien passer. Certaines sont acceptées et celles qui ne le sont pas sont rayées de la liste.
    Vous allez voir où je veux en venir avec tout cela. Tout a commencé parce que le Directeur général des élections, en qualité d'administrateur de la loi — je reviens un peu en arrière et je ne parlerai donc pas de ses responsabilités d'engager des poursuites — a également essayé d'interpréter la loi et de déterminer si l'interprétation qu'en avait faite un candidat était valable, pour parvenir à la conclusion que certaines dépenses de publicité réclamées par les candidats conservateurs étaient inadmissibles parce qu'elles n'étaient pas considérées comme de véritables dépenses destinées à faire élire le candidat dans sa circonscription, mais qu'elles étaient d'une autre nature. C'est par là que tout a commencé. Des candidats conservateurs avaient, au niveau de leurs QG de campagne respectifs, engagé certaines dépenses pour acheter des publicités régionales. De l'avis du Directeur général des élections ou de ses sous-fifres, celles-ci n'étaient pas admissibles en tant que dépenses électorales et elles ont simplement été rejetées.
    J'ajouterai une chose — et je suis prêt à ce qu'on me prouve le contraire —, c'est que le DGE a fait une chose qui est loin d'être légitime, puisqu'à ce que je sache, il a également retenu la totalité des sommes qui devaient être remboursées aux candidats concernés...
    M. Pierre Lemieux: C'est vrai.
    M. Scott Reid: ... et pas simplement les sommes contestées. Ce n'est pas rien, et j'en reviens à l'argument que j'avançait tout à l'heure, soit celui de la partialité.
    M. Pierre Lemieux: C'est ainsi que je vois les choses.
    M. Scott Reid: Mon collègue me confirme que tel fut le cas.
(1135)
    Donc, nous nous retrouvons dans une situation où des dépenses ont été jugées comme non admissibles au titre d'une campagne électorale, dépenses représentant des sommes importantes de 10 000 $ ou 20 000 $ par circonscription. Je ne connais pas les montants exacts, de toute façon ils varient. Quoi qu'il en soit, si ces dépenses devaient être définitivement rejetées, selon les circonscriptions et les montants en jeu, les remboursements refusés pourraient atteindre 80 000 $. Les intéressés n'obtiendraient que 60 p. 100 de ce montant. Supposons que 10 000 $ de frais de publicité soient refusés, cela représenterait 6 000 $ en montant non remboursé. Pour des dépenses totales réclamées de 50 000 $, le remboursement devrait être de 30 000 $. La perte d'une telle somme pourrait entraver la capacité du candidat de contester la prochaine élection, par manque de fonds.
    Élections Canada se trouve donc à créer un autre problème, puisqu'elle risque de décider de l'issue des prochaines élections dans ces circonscriptions. C'est là, quant à moi, la pire atteinte commise par Élections Canada.
    M. Mayrand envoie toujours un observateur à nos réunions et j'espère que celui-ci est en train de prendre des notes.
    En agissant ainsi, Élections Canada risque donc de décider de l'issue des futures élections. Comme elle enfreint son mandat, nous nous devons de corriger la situation.
    C'est là un grave problème. Un très grave problème si un seul parti est visé. Nous sommes donc confrontés à un problème où le DGE n'est pas simplement...
    Puis-je demander une précision?
    Monsieur Lemieux.
    Je me demandais si, d'après ce que M. Reid vient juste de dire, Élections Canada a fourni un motif.
    S'agit-il d'une période de questions?
    Il s'agit d'un débat.
    Non. Je veux simplement qu'il me précise ce point.
    À l'ordre.
    Je ne peux pas vous autoriser à le faire, monsieur Lemieux.
    Monsieur Reid.
    Je préciserai simplement que je n'ai pas la réponse à cette question. Je ne sais pas si cette pratique est universelle ou si elle n'a été appliquée que dans certains cas. Ce que je peux vous dire, c'est que la prochaine fois que nous accueillerons M. Mayrand au comité — et j'estime évidemment que cela ne devra pas se faire dans le cadre de la motion qui est proposée, dans le cadre de cette affaire — je compte bien lui demander de nous expliquer comment son bureau en est arrivé à prendre cette décision, sur quelle politique interne il s'est appuyé et de quelle façon il a appliqué cette politique. Je lui demanderai également de nous fournir un récapitulatif de mesures semblables prises par le passé.
    Je juge approprié de suivre les pratiques administratives d'Élections Canada et de veiller à ce que celles-ci soient conformes à la loi et aux principes de la primauté du droit, ce concept sur lequel repose tout notre système légal, qui en est l'une des pierres d'assise, et qui veut que les lois doivent être appliquées de façon impartiale à toutes les parties, pas uniquement aux partis politiques, dans tous les secteurs d'activité de notre société, et cela en toute égalité.
    Je me demande si tel est le cas. Soit dit en passant, je ne soutiens pas le contraire, tout simplement parce que je n'ai aucune preuve me portant à le conclure. Cependant, dans le cas particulier de la retenue de remboursements destinés à des circonscriptions, j'estime que nous avons affaire à un problème très important. Si — et je pense avoir raison à cet égard — les parties non contestées du remboursement n'étaient pas remises et si nous partions en élections — ce qui aurait pu arriver si ce n'avait été du coup de main des libéraux, puisqu'ils ont apparemment décidé d'appuyer le gouvernement sur presque tout, du moins d'après Rick Mercer — les actions du DGE et de son organisme pourraient avoir une influence sur l'issue du scrutin local et peut-être même des élections générales, et modifier la composition de la Chambre des communes. C'est là un problème très grave et j'invite le DGE à réfléchir à cette pratique qui, quant à moi, est contraire aux devoirs de sa charge, aux obligations qui lui incombent, outre que cela enfreint la Loi électorale du Canada.
    J'en reviens au thème que j'avais commencé à élaborer, à savoir que le Directeur général des élections est investi de responsabilités administratives et de responsabilités d'engager des poursuites. Il n'est pas un tribunal de justice et les jugements qu'il rend n'ont certainement rien de définitif. Même s'il était investi d'une certaine capacité décisionnelle, ses décisions ne seraient pas finales, puisqu'il y aurait toujours la possibilité de recourir à des tribunaux.
    Comme j'ai commencé à en parler un peu, passons maintenant à la question de savoir si Élections Canada s'est acquittée ou pas de son rôle d'administrateur impartial de la loi.
    Je vous ai dit que le Directeur général des élections émet des bulletins d'interprétation, tout comme l'Agence du revenu du Canada le fait pour la Loi sur l'impôt. Les bulletins d'interprétation sont destinés à commenter certains articles de la loi, à expliquer comment ils s'appliquent. Ils sont destinés à interdire telle pratique par rapport à telle autre. Ils ne sont pas forcément très compréhensibles pour le commun des mortels. Ils expliquent pourquoi, selon l'organe administratif, telle pratique est autorisée, tandis que telle autre est interdite.
    Ainsi, le lecteur qui fait ce qui est normalement considéré comme interdit, et qui apparaît à la colonne A du bulletin, doit raisonnablement s'attendre à être vérifié et à être poursuivi pour avoir mal agi. En revanche, s'il fait ce qui est indiqué à la colonne B — autrement dit tout le reste qui ne fait pas l'objet d'une interdiction spécifique — il ne risque pas d'être poursuivi. Agir dans le sens du bulletin, c'est avoir la garantie qu'on n'aura pas d'ennuis.
(1140)
    Certains membres du comité étaient présents quand M. Mayrand a témoigné devant nous pour la première fois. Je lui ai mentionné que je voyais un problème dans le genre de bulletins que son agence publiait, parce qu'ils ne correspondent pas au principe généralement reconnu.
    Tout d'abord, il est bien indiqué dans ces bulletins qu'il ne s'agit pas d'interprétations légales, que l'Agence n'est pas une cour de justice. D'ailleurs, j'en ai un ici qui comporte un avis en première page.
    Soit dit en passant, j'ai appelé ce type de documents bulletins d'information, mais il s'agit en fait de fiches de renseignements. On peut les trouver sur le site d'Élections Canada. Je dois préciser qu'il est tout à l'honneur d'Élections Canada que ces fiches soient faciles à trouver sur le site Internet. La façon dont elles sont rédigées est également louable à certains égards. Elles sont imprimables en format PDF, si bien qu'il n'est pas possible de les modifier pour amener quelqu'un à penser à tort qu'Élections Canada a dit ceci plutôt que cela.
    Il y a donc de bonnes choses dans ces fiches et voici ce qu'on peut lire dans l'avis qui apparaît en haut de la fiche de renseignements 2, qui a été révisée le 1er janvier de l'année dernière :
    Élections Canada publie des fiches de renseignements pour préciser la façon dont il interprète la Loi électorale du Canada et aider le public à la comprendre. Les points de vue exprimés ci-après n'ont pas force de loi et ne visent pas à remplacer le texte officiel de la Loi. L'application de la Loi dans toute situation donnée sera fondée sur les circonstances en cause. Élections Canada se réserve le droit de réviser toute interprétation exprimée dans une fiche de renseignements,
— et la partie qui suit est importante —
soit d'une façon générale, soit à la lumière des circonstances concrètes d'une situation donnée et en conformité avec les faits nouveaux aux plans législatif et judiciaire.
    Je suppose que l'organisme nous indique par là qu'il peut revenir sur une opinion antérieure et dire « Vous aurez lu ceci ou cela auparavant et compris la façon dont nous interprétions alors telle ou telle chose, mais ce n'est plus ainsi que nous l'entendons. Nous adoptons à présent une interprétation plus restrictive. Dès lors, ce que nous avions jugé admissible dans un bulletin d'interprétation précédent est désormais interdit. Le fait que vous ayez agi sur la foi de ce que nous avions indiqué alors n'intervient en rien dans notre position actuelle. »
    Quant à moi, cette façon d'envisager les choses est grotesque. Ce n'est pas celle de M. Mayrand. Ces avis existaient bien avant qu'il soit nommé. Nous sommes en présence d'un problème qui remonte à l'époque où M. Kingsley était le DGE. Je n'ai pas remonté en arrière ni effectué de recherches historiques, mais il est possible que ces avis existaient même avant cela. Peu importe, la position d'Élections Canada est grotesque.
    Dès lors qu'Élections Canada déclare « Nous allons, après coup, réinterpréter certaines dispositions et annuler tout ce que nous aurons dit précédemment », elle vide ses interprétations antérieures de tout leur sens, puisqu'on ne sait pas d'avance ce qu'elle va déclarer demain.
    Le DGE aurait pu dire: « Ce qui suit n'a pas force de loi et n'a pas pour objet de se substituer à la loi. Un tribunal pourrait interpréter telle ou telle disposition de façon différente, mais comme nous sommes les seuls habilités à entreprendre une poursuite, nous n'allons certainement pas agir d'après des éléments que nous avons jugés acceptables, dans ce bulletin ou dans des bulletins antérieurs. »
    Le DGE aurait pu dire : « Nous n'entamerons pas de poursuites à moins qu'un tribunal ne détermine, dans son jugement, qu'une disposition de la loi doit être interprétée d'une façon différente de la nôtre et surtout d'une façon plus restrictive. »
    Il aurait pu dire : « Ce document a été révisé le 1er janvier 2007. En 2006, notre interprétation était plus permissive et celle-ci sera désormais resserrée. Toute action future devra, désormais, être interprétée au vu de ce nouveau bulletin. »
    Je ne suis pas certain que cette dernière proposition soit légitime, mais elle a au moins l'avantage d'indiquer qu'Élections Canada n'a pas l'intention de réinterpréter ses prises de position passées en émettant de nouveaux bulletins, tandis que, pour l'instant, nous assistons à un véritable jeu de passe-passe où, un jour c'est telle règle qui prévaut et un autre jour c'en est une autre. L'organisme change de règle à sa guise, quand celle qui est en vigueur ne lui convient plus.
(1145)
    Peut-on imaginer façon plus arbitraire d'administrer une loi aussi importante, une loi qui régit le déroulement des élections et qui — si elle n'est pas administrée avec impartialité — détermine jusqu'à un certain point le parti qui va gouverner le pays? Comme je le disais, par ses décisions arbitraires, par ses changements d'interprétations, également arbitraires, le DGE se trouve à décider des règles qui sont imposées au pays, peu importe ce que veulent les électeurs, peu importe ce que peut donner une élection juste et impartiale.
    Malheureusement, les partis de l'opposition qui sont susceptibles de bénéficier de ce genre d'abus de la part du DGE ne sont pas très enthousiastes à l'idée d'améliorer les choses. Ils veulent consacrer les actuels modus operandi en recourant, depuis 18 mois, à toutes sortes de manigances. Nous sommes donc confrontés à un très grave problème.
    Ce n'est pas un problème qui est nouveau pour le comité. Je vous invite à consulter les retranscriptions de nos délibérations. Vous y verrez que, quand M. Mayrand a comparu devant nous pour la première fois en qualité de témoin — je ne me souviens d'ailleurs pas s'il a été assermenté, mais je crois qu'il était en fait candidat pour ce poste et qu'il n'avait pas encore été nommé. À cette époque, j'ai abordé avec lui la question des bulletins. Je lui ai dit que je voyais un problème dans la façon dont les avis étaient rédigés. Vous pourrez reprendre les retranscriptions de l'époque et vous verrez ce que j'ai dit très précisément alors. Tout cela devait être changé.
    Évidemment, Élections Canada n'est pas tenue de suivre mon conseil, mais je pense que ce comité se doit d'inviter le DGE à agir différemment — puisque c'est nous qui supervisons ce qu'il fait — pour nous assurer que les avis soient modifiés, qu'ils soient davantage professionnels et moins sujets à des applications abusives. Si ce comité ne prend pas ce genre de mesure, il conviendrait alors que le Parlement modifie la Loi électorale afin d'imposer au DGE de produire des fiches de renseignements ne donnant pas lieu à ce genre de non-sens, soit à des réinterprétations rétroactives de la loi.
    En fait, notre Constitution interdit ce genre de réinterprétations dans le cas des lois... Il est inconstitutionnel de trouver qui que ce soit coupable d'une infraction qui n'existait pas au moment où l'acte a été commis. Permettez-moi de vous donner un exemple.
    Le Sénat vient, enfin — et je pense que c'est surtout parce que les libéraux ne sont pas parvenus à trouver une façon de bloquer la loi sans risquer de déclencher une élection — d'approuver un paquet d'amendements au Code criminel qui comprend une disposition voulant que l'âge de consentement passe de 14 à 16 ans. Autrement dit, si cette loi reçoit la sanction royale dans quelques jours, à la fin du mois de mars, nous aurons enfin — Dieu merci! — reconnu que tout adulte se livrant à des actes sexuels sur un mineur de moins de 16 ans commet un acte criminel. Toutefois, s'il s'avère que quelqu'un a commis un tel acte avant que la loi ne reçoive la sanction royale, même si nous désapprouvons son geste, même si nous le trouvons moralement répugnant, celui-ci ne constituera pas pour autant un acte criminel, parce tel n'était pas le cas au moment où il a été commis. Il n'y a rien que l'on puisse alors faire pour poursuivre la personne par la suite.
    En outre, la Constitution stipule que, dans le cas des infractions pour lesquelles la peine a été resserrée par une loi du Parlement, c'est la peine la moins sévère, en vigueur au moment de la commission de l'acte, qui s'applique, même si la poursuite et le procès au criminel et même si l'imposition et l'exécution de la sentence interviennent après l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions plus strictes.
    La Constitution américaine, la Déclaration des droits, stipule que le Congrès ne doit pas adopter de loi a posteriori. C'est l'une des assises de l'appareil législatif de toute société civilisée. Les Américains l'ont inscrit dans leur Constitution en 1789 ou en 1790. Nous avons fait la même chose, mais avec beaucoup de retard, puisque ce n'était qu'en 1982.
(1150)
    À l'examen de la jurisprudence britannique ou anglaise, vous constaterez que cette notion remonte à l'époque de Sir William Blackstone et même à celle de Sir Edward Coke. Il s'agit d'une des pierres d'assise de toute action se voulant civilisée, pas uniquement dans les systèmes britanniques et inspirée du système britannique, mais aussi dans les systèmes continentaux. Ce principe prévaut dans tous les États de droit. D'ailleurs, sans lui, il ne peut y avoir d'État de droit. C'est un élément essentiel au fonctionnement de la règle de droit.
    Quoi qu'il en soit, ce n'est malheureusement pas ainsi que le Directeur général des élections a envisagé son rôle d'administrateur de la loi et de poursuivant en vertu de la loi, et c'est ce qu'il nous faut changer. Ma dernière remarque est tout à fait pertinente, puisque c'est bien dans les circonstances que je viens de décrire qu'on reproche au Parti conservateur d'avoir enfreint la loi. On nous reproche d'avoir acheté des publicités d'une façon contraire à la loi, telle qu'interprétée par Élections Canada dans son bulletin de renseignements, bulletin sur lequel nous nous étions pourtant fondés pour prendre notre décision à l'époque, c'est-à-dire pour les élections de 2006.
    Après ces élections, le Directeur général des élections a révisé la fiche de renseignements en question pour décréter que les anciennes façons de faire n'étaient plus acceptables. Il a alors soutenu que son interprétation récente — pas celle qui était en vigueur au moment où le Parti conservateur a pris certaines décisions — aurait dû s'appliquer. Ce faisant, il a promulgué a posteriori non pas une loi, mais un règlement ayant force de loi. Désormais, non seulement il ne nous verse pas certaines sommes, mais il retient les sommes qu'il considère comme étant associées à une infraction, infraction qui consiste à avoir dépensé de l'argent dans le cadre d'une campagne nationale afin de promouvoir un parti national, sommes qui auraient dû être utilisées à la place à des fins de promotion locale.
    Je dois dire que je trouve cette interprétation absurde. Contrairement aux Américains et à d'autres pays de régime présidentiel, les pays qui appliquent le système de Westminster ne tiennent pas d'élections distinctes pour l'exécutif. Nous n'avons pas de scrutin séparé pour élire le premier ministre, contrairement à ce qui se fait pour un président. Nous n'avons même pas d'élections distinctes pour les membres de la Chambre haute, même s'il est à espérer que cela changera un jour.
    Quant à l'idée que l'on fasse la promotion d'une campagne nationale... je ne comprends pas ce que cela veut dire. Tous ceux et toutes celles qui ont voté aux dernières élections au Canada ont dû voter pour un député dans une circonscription donnée. C'est incontournable. Certains de ces électeurs se sont exprimés en fonction des qualités de tel ou tel candidat député. Les sondeurs nous disent toutefois qu'ils ont été beaucoup plus nombreux à voter pour les partis et leurs chefs. Je peux vous garantir — et n'importe qui pourra vérifier mes documents de campagne — que si j'aime à promouvoir l'idée que Scott Reid est un type qui a des opinions bien à lui, je ne me fais pas d'illusion quant aux raisons pour lesquelles la plupart des électeurs m'ont choisi. Je reçois des courriers d'électeurs qui me disent, par exemple: « Les conservateurs pourraient faire élire une vache bleue dans le comté de Lanark, s'ils le voulaient ». Certains diront que ça a déjà été tenté, mais ce que je veux signifier par là, c'est que l'électorat vote en majorité pour le parti. C'est ainsi que les choses se sont toujours passé dans ma circonscription. Elles se sont principalement déroulées ainsi dans cette circonscription, même s'il y a eu des exceptions.
    Nous savons que les gens votent beaucoup plus souvent pour le chef que pour le candidat. C'est pour cela que, lors des élections de 2004, élections qui sont exclues de la motion proposée par Mme Redman, on a vu fleurir dans toutes les circonscriptions des panneaux sur lesquels on pouvait lire « Votez pour un tel, le candidat de Paul Martin », panneaux qui portaient la photo de Paul Martin parce qu'on estimait alors que cette bannière était plus vendable que celle des candidats eux-mêmes.
    Pour vous donner un exemple de ce qui se passe sur la scène provinciale, parlons des dernières élections qui se sont déroulées en Ontario...
(1155)
    Nous avons un rappel au Règlement.
    Monsieur Proulx.
    Monsieur le président, si vous me le permettez, j'aimerais inviter le député à nous expliquer quel rapport il y a entre ses propos et le sujet du débat. J'apprécie qu'il fasse la publicité de la bannière Paul Martin, mais je me demande quel rapport il y a entre cette question de bannière, les élections provinciales et le sujet de notre discussion. J'aimerais qu'il nous l'explique, si vous le permettez.
    Je pense qu'il va y arriver. Je l'ai écouté attentivement et j'ai remarqué qu'il s'appuie sur des analogies, des comparaisons. Alors, voyons si c'est ce qu'il va faire dans ce cas également.
    Monsieur Reid.
(1200)
    Merci, monsieur le président.
    Le président a tout à fait raison. Je fonde habituellement mes argumentations sur des analogies, des comparaisons.
    Comme M. Proulx le sait sans doute, j'ai signé deux ou trois ouvrages traitant de différents aspects de la politique publique canadienne. Pour rédiger ces ouvrages, j'ai essayé d'établir des comparaisons en m'inspirant de ce qui se faisait dans d'autres pays, avec plus ou moins de bonheur, relativement à des politiques à peu près semblables aux nôtres. Par exemple, quand j'ai écrit mon livre sur la politique en matière de langues officielles, j'ai estimé que le modèle finlandais — où le finnois et le suédois sont les deux langues officielles — pourrait très bien être appliqué ici pour décider du genre de services à offrir dans la langue de la minorité. De tous les exemples sur lesquels il m'a été donné de mettre la main, j'ai jugé que c'était le meilleur. Je dois préciser que j'ai examiné la situation de bien d'autres pays avant de parvenir à cette conclusion.
    Eh bien, je fais exactement la même chose dans ce cas. Je bâtis mon argumentation autour d'une série de comparaisons. J'essaie de prouver que les gens votent plus souvent ou en plus grand nombre pour les chefs et les partis que pour les candidats eux-mêmes. J'ai mentionné l'exemple de la bannière Paul Martin. Celle-ci a commencé à perdre de son lustre pendant la campagne électorale au point qu'elle est devenue plus difficile à faire passer que le nom du parti qui, historiquement, jouissait d'un impact et d'une loyauté considérables. Quand le nom du chef, dont on avait estimé, au début, qu'il se vendrait mieux que celui du parti, a commencé à perdre du terrain dans l'opinion au point de devenir moins populaire que le parti, certains candidats — je me souviens l'avoir constaté dans le cas de Richard Mahoney — ont supprimé la mention « Votre candidat de Paul Martin » sur leurs panneaux. Une pareille chose s'est produite lors des élections provinciales.
    Voici là où je pense qu'il veut en venir — et j'essaie ici de répondre au dernier rappel au Règlement.
    Je pense que le député est en train de nous dire que, les électeurs ayant tendance à voter davantage pour les partis que pour les candidats dans certains cas, les partis veulent dépenser de l'argent en publicités nationales parce que celles-ci bénéficient aux candidats locaux.
    Excellent résumé. Je ne me rendais pas compte que je n'étais pas en train de résumer mes propos aussi clairement que vous venez de le faire. C'est précisément ça.
    Le président: C'est parfait. Merci.
    M. Scott Reid: Eh bien, c'est tout à fait le cas. Cela explique la logique des achats de publicités régionales ou regroupées. Ces publicités consistent à dégager les éléments qui vont parler aux électeurs de circonscriptions différentes. Par ailleurs, on est aux prises avec les mêmes réalités fondamentales liées aux marchés des médias.
    Dans les circonscriptions de très grande superficie, peu densément peuplées, de petits médias couvrent des territoires moins grands que les circonscriptions. Ce n'est pas ce que l'on constate habituellement. Personnellement, je représente une grande circonscription qui correspond tout à fait à ce que je suis en train de vous décrire. Comme je me plais à l'indiquer à nos amis américains, ma circonscription a la même superficie que l'État du Connecticut, qui compte trois millions d'habitants, tandis que dans Lanark, il n'y en a que 115 000. C'est un vaste territoire peu densément peuplé. On y trouve plusieurs journaux : le Napanee Beaver, à Napanee; le Perth Courierà Perth; le Carleton Place Canadian, à Carleton Place, et le Record News, à Smiths Falls. Tous ces journaux sont dans ma circonscription. La zone de diffusion de Smiths Falls déborde un peu sur une autre circonscription, mais elle couvre essentiellement la mienne. Le Lanark Era est lu à Lanark highlands; la Frontenac Gazette est lue dans Frontenac Sud, tandis que le Frontenac News est lu dans Frontenac Nord. Je pourrais vous donner d'autres exemples, mais je suppose que vous commencez à comprendre ce que je veux dire.
     En règle générale, les marchés des médias urbains englobent plusieurs circonscriptions. C'est le cas du Ottawa Citizen ou, pour prendre un exemple encore plus frappant, du Toronto Star. Dans combien de circonscriptions retrouve-t-on le Toronto Star? Sans doute une bonne cinquantaine. il n'est pas uniquement distribué dans les circonscriptions de Toronto et de ses banlieues, puisqu'on retrouve des boîtes de distribution du Star dans des coins de ma circonscription qui longe en partie le lac Ontario. Je sais précisément où se trouve le dernier poste à essence, le long de la 7, où le Toronto Star est livré. Ce quotidien est distribué aussi loin qu'à Kaladar, dans l'Est. En remontant la 7 vers l'est, vers Sharbot Lake, on trouve l'Ottawa Citizen. C'est le long de cette ligne que les zones de distribution de ces deux journaux se rencontrent. C'est à peu près là aussi où passe la frontière qui divise les fans des Sénateurs d'Ottawa d'un côté et ceux des Maple Leafs de Toronto de l'autre. Eh bien, je peux vous dire, monsieur le président, que les députés doivent prendre au sérieux cette importante ligne de démarcation.
    Je pourrais continuer sur ce thème, mais comme je risque de soulever des objections quant à la pertinence de mes propos, je vais m'arrêter là.
    Comme les marchés des médias débordent des limites des circonscriptions, il est donc nécessaire de regrouper les publicités. Si l'on agit ainsi, si tous les partis font la même chose, et tous les partis l'ont fait pendant très longtemps — pas uniquement dans le cas des journaux, même si c'est plus particulièrement le cas, mais aussi pour les publicités radio et les publicités télévisées, parce que ces marchés de médias débordent des limites des circonscriptions — on se trouve dès lors aux prises avec une série de problèmes fondamentaux.
    Le fait de dresser une liste de candidats, comme nous l'aurions fait si nous avions appliqué une telle procédure dans l'Est de l'Ontario — liste comportant des noms comme Scott Reid, Gordon O'Connor, Pierre Lemieux, Dean Del Mastro, John Baird, Pierre Poilievre, Cheryl Gallant, Daryl Kramp, Blair MacLean, Royal Galipeau et Gord Brown, qui sont tous des gens fantastiques — reviendrait à faire une liste de blanchisserie interminable. Je pense en avoir fait la démonstration. Cette liste ne veut rien dire. C'est juste une longue litanie. Elle n'amènera personne à changer sa façon de voter, ce qui est pourtant l'essence même d'une publicité électorale. Il est également difficile d'essayer de dresser la liste des réalisations de toutes les personnes énumérées. Certains sont des candidats n'ayant jamais été élus, comme ce fut le cas de Pierre lors des dernières élections. D'autres sont des vieux de la vieille aux traits sculptés par le burin de l'expérience, comme moi. Il était difficile de nous décrire de façon générique, d'où la tendance à promouvoir le parti et son chef ou une combinaison des deux. Tout dépend si votre parti se vend mieux que votre chef. Je pense que cela explique la raison pour laquelle Élections Canada précise qu'il est permis, dans les publicités locales, de promouvoir le parti, le chef, la bannière et les politiques du parti.
    J'espère avoir un exemplaire de la Loi électorale du Canada. Non. Je pense l'avoir oublié dans mon bureau et je vais donc devoir demander à mon assistante de gambader dans les escaliers pour aller m'en chercher un.
(1205)
    Je vais continuer en vous livrant mon argumentation générale, puis je reviendrai sur la Loi électorale quand mon assistante me l'aura rapportée.
    Je tiens à préciser une chose au sujet de cette loi. Elle permet spécifiquement de promouvoir le parti, le chef et ainsi de suite et elle ne laisse place à aucune autre forme d'interprétation.
    Pendant que nous attendons cette loi, je vais attirer votre attention sur le principe constitutionnel dont je vous parlais plus tôt, soit celui de la non-culpabilité pour une infraction commise au moment où celle-ci n'était pas encore codifiée dans la loi. Je vous ai donné l'exemple de la Déclaration des droits aux États-Unis qui interdit l'adoption de lois a posteriori.
    Il se trouve que la Charte canadienne des droits et libertés, à la clause 11, traite des droits légaux. C'est une des nombreuses clauses à traiter de cette question. Voici comment se présente le paragraphe en question:
11. Tout inculpé a le droit:
g) de ne pas être déclaré coupable en raison d'une action ou d'une omission qui, au moment où elle est survenue, ne constituait pas une infraction d'après le droit interne du Canada ou le droit international et n'avait pas de caractère criminel d'après les principes généraux de droit reconnus par l'ensemble des nations;
    Le passage « d'après les principes généraux de droit reconnus par l'ensemble des nations » tient au fait que l'on voulait alors intégrer les crimes de guerre. C'est pour cela qu'on retrouve cette disposition relative au droit international.
    Je ne pense pas qu'un seul parti contestera que ce principe énoncé dans notre Constitution est pertinent à ce dont nous parlons ici. Il s'applique à toutes les poursuites entreprises en vertu du droit canadien.
    Nul ne peut être reconnu coupable d'un fait si, au moment où il a été commis, celui-ci ne constituait pas une infraction en vertu d'une loi canadienne. Cela vaut pour toutes les poursuites.
    Certains croient, à tort, que ce qui n'est pas autorisé par la loi peut l'être par le biais d'un règlement ou d'une loi administrative. C'est totalement faux. Le fait que les règlements soient prescrits de façon plus informelle que les lois, ne change pas le fait qu'ils sont adoptés en vertu des dispositions d'une loi.
    Normalement, un projet de loi traitant de drogues, par exemple, énumérera toute une série de substances et précisera « ainsi que toute autre substance inscrite dans cette liste par le ministre concerné, ajoutée par le biais d'un arrêté ou décision du gouverneur en conseil ». Il s'agit de parties de la loi qui sont administrées par ceux qui sont chargés de l'appliquer, et ces parties sont soumises aux mêmes restrictions constitutionnelles que la loi elle-même.
    Par ailleurs, le DGE n'est pas investi du pouvoir de prendre des règlements. D'ailleurs, aucun règlements ne découle de la Loi électorale. Le DGE est investi d'un rôle administratif. Il a la capacité d'adopter des règlements administratif ou en vertu de ses interprétations de la loi relativement à une infraction commise aux termes d'un article de la loi qu'il peut éventuellement juger nécessaire de poursuivre. C'est là où se situent ses pouvoirs.
    Toutefois, ces pouvoirs découlent également du principe fondamental de la règle de droit et de la Constitution — de toute la Constitution, y compris du paragraphe 11g) de la Charte. Il n'y a pas à en sortir.
    Cela interdit bien évidemment les pratiques que l'on essaie de justifier dans les avis des bulletins d'interprétation. Cela interdit aussi la pratique consistant à se livrer à une interprétation après des élections et d'appliquer rétroactivement la décision qu'on a prise. Il n'y a, là non plus, pas moyen de s'en sortir.
    Il y a autre chose que je juge également utile de vous mentionner au sujet de la Charte. Le paragraphe (1) de la clause 15 stipule que les lois doivent être appliquées de façon impartiale. Elles doivent être d'application générale. On ne peut avoir, en aucun cas, une loi qui s'appliquerait de façon différente à différentes personnes.
(1210)
    Tout le monde sait que le gouvernement est tenu d'appliquer uniformément la loi à toutes et à tous, sauf dans les cas prévus par les exceptions de la clause 15. Je ne me les rappelle pas toutes, mais il est question d'âge, de race, de sexe, de religion, d'ethnicité, etc. De plus, il serait inconstitutionnel qu'une personne spécifiquement chargée d'appliquer également la loi à tous, agisse différemment selon le parti concerné. Ce serait illégal en vertu de la Loi électorale du Canada. C'est donc illégal aux termes de la Loi électorale du Canada, mais c'est aussi strictement interdit en vertu du paragraphe (1) de la clause 15 de la Charte.
    Revenons-en à ce que dit la Loi électorale au paragraphe 407(1) qui, je le concède est plutôt confus :
Les dépenses électorales s'entendent des frais engagés par un parti enregistré ou un candidat et des contributions non monétaires qui leur sont apportées, dans la mesure où les biens ou les services faisant l'objet des dépenses ou des contributions servent à favoriser ou à contrecarrer directement un parti enregistré, son chef ou un candidat pendant une période électorale.
    Évidemment, personne ne conteste l'application de ces dispositions à des dépenses encourues durant une période électorale. Dans la même veine, personne ne conteste la partie concernant la promotion des candidats. Tout cela a donc trait à la promotion d'un parti ou d'un chef.
    Vous aurez remarqué que rien, dans ce paragraphe, ni dans d'autres dispositions de la Loi, d'ailleurs, ne fait de différence entre les dépenses associées à une campagne locale et celles associées à une campagne nationale.
    Nous avons bien sûr fixé les limites pour les campagnes locales et les campagnes nationales. Toutefois, nous n'avons jamais — et quand je dis « nous », je pense aux législateurs — récrit cette partie de la loi qui régit les portions admissibles des dépenses électorales afin d'en exclure ces aspects. Si nous l'avions fait, monsieur le président, nous serions aux prises avec un problème de fond.
    Monsieur le président, je me demandais si vous ne pourriez pas... Pouvez-vous faire, vous-même, un rappel au Règlement? J'ai de la difficulté à me concentrer avec tout ce bruit en arrière-plan et j'aimerais bien que vous demandiez aux gens de se taire un peu.
(1215)
    Merci.
    Excusez-moi. Je veux favoriser la discussion, mais le député a tout à fait raison. Ça commence à devenir bruyant. Il a de la difficulté à se concentrer et je suis sur le point de ne plus pouvoir l'entendre, même s'il est tout à côté de moi.
    Je n'ai rien contre le fait que vous continuiez à discuter, et j'en comprends d'ailleurs la nécessité. Toutefois, je vous demande de vous éloigner un peu et de parler plus doucement. Merci.
    Veuillez poursuivre, monsieur Reid.
    Merci, monsieur le président.
    Je viens juste d'indiquer que des dépenses électorales incluent tout ce qui est destiné à promouvoir directement un parti, son chef ou un candidat ou, au contraire, à en combattre un autre, durant une période électorale. Quand nous avons rédigé cette disposition, le législateur n'a pas fait le distinguo entre campagne nationale et campagne locale. Nous n'avons même pas précisé qu'il s'agissait de « promouvoir le candidat » ou encore « tel ou tel candidat ». Nous n'avons pas précisé cela.
    Je tenais simplement à vous indiquer que cet article couvre les deux cas de figure. D'un côté, il n'est pas permis de dépasser le plafond des dépenses qui est fixé. Cela étant, si on respecte la règle établie, on peut s'attendre à être remboursé. Dans un monde idéal, tout le monde doit vouloir faire tout son possible pour dépenser un maximum et bénéficier d'un remboursement.
    Si l'on entre dans le détail, on commence à voir apparaître les problèmes associés à la formule de remboursement des frais. Comment, en effet, déterminer à quoi sert telle ou telle dépense? Voilà l'univers impossible et fantasmagorique dans lequel le DGE nous précipite avec ses interprétations de la loi, quand il nous dit que certaines dépenses sont désormais permises, que nous pouvons promouvoir certaines choses, mais qu'il existe des objectifs électoraux légitimes que l'on ne peut promouvoir dans le cadre d'une élection.
    Je me demande si nous ne risquons pas de nous retrouver face à la justice, un jour, si le DGE continue d'interpréter les choses de la sorte en nous disant: « Vous dites que vous avez agi pour obtenir des votes, mais moi, je prétends que vous ne l'avez pas fait pour que ces votes vous soient destinés, que vous poursuiviez d'autres objectifs. Ça, c'est illégitime et je ne vais pas vous rembourser. Qui sait, je vais peut-être même vous poursuivre en justice. »
    Si je dépense certaines sommes qu'on estime ne pas être destinées à faire élire Scott Reid dans sa circonscription, mais plutôt à participer à une campagne nationale — qui, comme je le disais, revient à faire une distinction artificielle étant donné qu'il n'existe pas de charge exécutive décidée par scrutin national — si l'on m'accuse, donc, de me livrer à ce genre d'exercice, je risque de me retrouver dans une situation où le DGE prétendra que je ne cherchais pas à promouvoir ma candidature, mais à promouvoir celle de quelqu'un d'autre, peut-être des candidats d'une circonscription voisine.
    Si nous cotisons tous à l'achat d'une publicité collective, cela ne changera pas grand-chose dans ma circonscription, mais pourrait faire une énorme différence dans celle d'à côté. Que se passerait-il si je dépensais personnellement plus dans cette campagne collective que mon voisin? Quelle serait l'infraction? Nous sommes en présence d'une interprétation surréaliste de la loi faite par le Directeur général des élections.
    Cela n'a rien à voir avec ce que stipule le paragraphe 407(1) autour duquel s'articule l'ensemble de la loi.
    Voici donc à quoi ressemble l'argument que nous sert Élections Canada: « Le paragraphe 407(1) dit ce qu'il dit. Nous ne le contestons pas, mais vous devez le lire à la lumière de l'ensemble de la loi ainsi que nos bulletins d'interprétation. »
    Eh bien, cette façon de voir les choses soulève un ensemble de problèmes. Je pense vous avoir déjà dit que cette situation est surréaliste et qu'elle est même inconstitutionnelle. Nous sommes face à un problème de constitutionnalité.
    Et puis, je vois trois autres problèmes, entre autres, que je me propose de traiter.
(1220)
    Le premier de ces problèmes, c'est que le paragraphe 407(1) ne précise pas quelle disposition légale doit être lue en parallèle avec ce paragraphe. En général, on devrait voir une mention du genre: « Sous réserve de ceci ou de cela, les dépenses électorales comprennent »; suivraient ensuite les dépenses en question. Cela n'est indiqué nulle part.
    Pourtant, la loi regorge de mentions « sous réserve » qui indiquent que tout est permis dans la limite des conditions imposées dans d'autres articles. Cela étant, comme le paragraphe en question ne comporte pas de mention particulière, il n'y a pas à considérer qu'il est limité par d'autres dispositions de la loi. Absolument pas. C'est ce que les tribunaux constateront quand ils seront enfin appelés à se pencher sur cette disposition, parce que c'est la seule interprétation logique. C'est la seule interprétation cohérente d'un point de vue législatif. Soyons honnêtes, si vous devez prendre tous les articles de la loi qui contiennent des dispositions particulières et indiquer que celles-ci doivent être interprétées sous réserve des autres dispositions de cette même loi qui sont de nature plus générale, aucune disposition particulière ne peut dès lors plus s'appliquer. En l'espèce, seuls les principes généraux vaudraient et il faudrait les soumettre à un arbitrage légal après coup. Dans ce cas de figure, la loi ne serait qu'une vaste bouillie, et c'est pour ça qu'un des piliers du droit veut que les principes généraux ne peuvent éclipser les dispositions particulières. Tout le système de la common law repose sur ce principe.
    Il se trouve que, pas plus tard qu'hier, j'ai lu quelque chose au sujet de la règle du précédent, ou stare decisis, selon laquelle les juges qui se penchent sur de nouvelles causes fondent leurs décisions sur des jugements et des précédents plutôt que sur les principes en fonction desquels ces jugements ont été rendus. Ils ne doivent juger que sur les faits en présence.
    Tout cela a pour objet de s'assurer que le particulier garde le pas sur le général, sauf si le législateur a décidé d'inverser la règle ou si notre Constitution précise que c'est le général qui a préséance sur le spécifique, comme on a pu le constater dans la clause de la Charte que je vous ai lue au sujet des principes de droit international. Dès lors qu'une telle précision n'est pas apportée, le général ne peut pas prendre le pas sur le particulier. Il ressort, de toute évidence, que ce n'est pas indiqué ici. Cette remarque est très importante et je dirais qu'elle vient saper la position d'Élections Canada, cela sans compter les autres aspects qui ne l'aident pas non plus.
    Qu'en est-il des autres parties de la loi? Eh bien, il y a l'article 319 dont je vais maintenant vous parler. Celui-ci définit ce qu'il faut entendre par publicité électorale. Vous allez comprendre pourquoi il est important que nous en parlions. Cet article est en fait un article de définition. Tout ce qui se trouve dans les lois doit être interprété en fonction des définitions apparaissant dans un article de ce genre, quand il y en a un. Cette partie est donc tout à fait pertinente. D'ailleurs, c'est ce qu'indique l'article 319: « Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente partie », partie qui débute à l'article 407 et se poursuit au-delà.
    Le terme « publicité électorale » est l'une des expressions définies dans cet article:
« publicité électorale » Diffusion, sur un support quelconque au cours de la période électorale, d'un message publicitaire favorisant ou contrecarrant un parti enregistré ou l'élection d'un candidat, notamment par une prise de position sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat.
    Vient ensuite une énumération de tout ce qui n'est pas autorisé ou plutôt des modes de communication interdits. On trouve quatre alinéas dont l'un traite de « la diffusion d'éditoriaux, de débats, de discours, de nouvelles, d'entrevues, de chroniques, de commentaires ou de lettres ». Rien de cela n'intervient dans les dépenses électorales. Il y a aussi la distribution d'ouvrages, l'envoi de documents par une personne ou un groupe directement à ses membres, ses actionnaires ou ses employés et la diffusion, sur une base non commerciale, d'opinions politiques sur Internet. Tout cela est exclu.
    Pour en revenir à cet article et aux dépenses de publicité électorale, je précise que celui-ci concerne la publicité électorale et ce que l'opposition a jugé comme étant des publicités électorales illégitimes. Je tiens à être bien clair à ce sujet, parce que l'opposition et le Directeur général des élections soutiennent que certains types de publicité sont interdits.
(1225)
Pour résumer, je dirais que la « publicité électorale » n'est pas qualifiée en tant que publicité électorale pour une circonscription, pour un parti ou pour une seule élection. Il est question de
diffusion, sur un support quelconque au cours de la période électorale, d'un message publicitaire favorisant ou contrecarrant un parti enregistré ou l'élection d'un candidat, notamment par une prise de position sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat.
Voilà une disposition qui semble ratisser large. Il est donc absurde de prétendre que ces dépenses étaient illégitimes parce qu'elles ne visaient pas à promouvoir les candidats, qu'elles étaient destinées à promouvoir le parti, qu'elles étaient censées être lues ou entendues ou vues par des gens qui ne faisaient pas partie de l'électorat visé, et la loi ne va pas dans le sens de cette interprétation.
    J'aurai un troisième argument à vous proposer dans un instant, qui va concerner ce que je trouve de foncièrement défaillant dans l'argumentation générale d'Élections Canada. Avant cela, je veux faire une remarque relativement à la désignation du destinataire d'un message, au fait qu'Élections Canada décide que le candidat A, qui se trouve à tel endroit, a contribué à une publicité achetée dans une autre région géographique que la sienne.
    Comme je le disais, je représente une vaste circonscription qui prend naissance à l'ouest de la ville d'Ottawa. Carleton Place, Smiths Falls et Perth en sont les plus importantes villes et le comté de Lanark... la circonscription se poursuit pour former une sorte de gigantesque L inversé, au nord de Kingston, puis à l'ouest de Kingston. Elle couvre une grande surface de forêts inhabitées, de régions sauvages et une zone assez densément peuplée le long de l'autoroute 401. La plus importante ville dans cette région est Napanee qui compte 5 000 habitants. La région rurale environnante en compte 15 000.
    Voilà où je veux en venir. Il y a donc 15 000 résidents dans cette région. Combien d'automobiistes empruntent l'autoroute 401 et passent donc par ma circonscription tous les jours? On m'a appris récemment qu'il pouvait y en avoir 50 000, c'est-à-dire la moitié de la population de la circonscription et certainement beaucoup plus que celle de Napanee par où passent tous ces véhicules. Eh bien, un énorme panneau a été érigé à l'intersection de l'autoroute 401 et de la route 41. La route 41 est orientée nord-sud; elle est l'axe nord-sud du comté de Lennox et d'Addington. Le panneau est donc visible depuis la 41, mais aussi depuis la 401. Il fait la promotion de Stephen Harper, parce que j'estime que si les gens se souviennent que Stephen Harper est le chef de mon parti, cela contribuera à ma réélection. J'en ai facturé les coûts à ma campagne.
Voilà à présent que je dois craindre qu'Élections Canada vienne me voir et me dise: « Les conducteurs qui empruntent la 401 — dont presque aucun ne réside dans votre circonscription — voient ce panneau. Ce ne sont même pas des Ontariens, ce sont des Québécois. Eh bien, ils pourraient modifier leur façon de voter dans une circonscription québécoise parce qu'ils auront vu la photo de Stephen Harper et qu'ils se rappelleront qu'il est le chef du Parti conservateur du Canada. »
    On en est là. Il faut que je commence à me préoccuper du fait qu'avec mon argent, dépensé localement, je risque d'influencer le vote à l'extérieur de ma circonscription. Or, on ne devrait pas considérer que ce genre de dépense intervient dans le cadre d'une campagne électorale et qu'elle est interdite. Pour en revenir à l'article 319, je rappelle que la section des définitions s'applique à la publicité et, dès lors, que les dépenses à des fins de publicité électorale concernent tous les moyens connus, sauf ceux faisant l'objet d'une exception, notamment:
     d) la diffusion par un individu, sur une base non commerciale, de ses opinions politiques sur le réseau communément appelé Internet.
Des documents circulent; des documents sont transmis d'une personne à l'autre.
    Pour ce qui est de la notion d'externalité, définie par les économistes comme étant l'effet externe d'une chose destinée, à l'origine, à des fins internes, la loi considère que cela est tout à fait légitime. Elle va jusqu'à le préciser. Je prétends, en outre — même si je ne considère pas que tel a été le cas pour les publicités dont nous parlons — qu'il n'y a rien d'illégitime à ériger et bordure de la 41 un panneau publicitaire et que les automobilistes empruntant la 401 seraient en mesure de voir au point de décider de voter autrement. Il s'agit bien d'un effet d'externalité, qui échappe à ma campagne locale, mais après tout pourquoi pas? N'ai-je pas le droit de faire de la promotion à l'échelle nationale?
    Si ce devait être illégitime, je suppose que nous devrions adopter une règle interdisant aux candidats à une charge publique, comme moi, de participer à des événements ou à des entrevues d'envergure nationale, par exemple en compagnie de Don Newman. Comble de l'horreur, ce genre de participation pourrait influencer les électeurs à l'extérieur de nos circonscriptions.
(1230)
    Je me demande alors comment nous pourrions réaliser une quelconque publicité nationale, parce que comme nous sommes tous candidats à des charges publiques dans des circonscriptions locales, nous nous trouverions à enfreindre cette règle — si elle devait exister, ce qui n'est pas le cas, parce qu'elle est absurde. Je pense m'être bien fait comprendre.
    J'ai dit que l'argument avancé par Élections Canada quant à la façon d'interpréter le paragraphe 401(1) de la loi, paragraphe qui autorise très clairement la publicité effectuée par le Parti conservateur, présente trois problèmes. Élections Canada ajoute effectivement qu'il ne faut pas oublier les autres aspects de la loi, qu'il interpréter le paragraphe au regard des autres partis et des bulletins d'interprétation.
    J'ai dit que je voyais trois problèmes à cet égard. Je vous ai présenté le premier et le second, et il est temps de passer au troisième. Celui-ci concerne évidemment les interprétations d'Élections Canada qui ont non seulement confirmé nos pratiques, mais qui l'ont fait de façon plutôt indiscutable. Je vais m'arrêter un peu sur les bulletins d'interprétation du DGE. Je vous invite à examiner celui qui est à l'origine de notre désaccord avec le DGE, de même que les bulletins précédents. Donnez-moi un instant pour mettre la main sur celui qui m'intéresse.
    Je vous ai parlé de ceux que l'on retrouve sur le site Internet, mais ces bulletins se retrouvent aussi dans le Manuel des candidats. Il s'agit des manuels dans lesquels Élections Canada explique le fonctionnement des élections pour que les candidats et leurs agents soient mieux en mesure d'appliquer la loi. La production de ces instruments relève évidemment entièrement du mandat d'Élections Canada. Il serait très difficile au néophyte de se plonger dans cette loi, vaste et complexe, qui a naturellement pris de l'ampleur au fil du temps et qui n'est donc pas particulièrement conviviale. Comme il serait injuste de demander à qui que ce soit d'entreprendre une telle aventure, le DGE produit depuis longtemps déjà un manuel à l'intention des candidats et de leurs agents officiels.
    Je crois savoir qu'ils remontent à 1988. Ils sont peut-être même plus vieux que cela, mais ils ont au moins 20 ans. De 1988 à 2007, ils traitaient vraiment des publicités électorales faites par les candidats, mais l'année dernière, ils ont fait l'objet d'un changement soudain et profond, soit une année après les élections de 2006. Il est sans doute tout aussi important de faire remarquer, certains diront que ça l'est encore plus, que ces changements sont survenus après qu'il devint évident que le Parti conservateur n'accepterait pas les décisions — disons-le carrément — erronées d'Élections Canada, soit de retenir les fonds destinés à certains candidats et, j'ajouterai, d'avaliser les décisions illégales du DGE de retenir les autres remboursements qui n'étaient pas contestés.
    Les lignes directrices précisaient jusqu'alors très clairement qu'il n'y avait rien d'illégitime, dans le cadre d'une campagne locale, à promouvoir le candidat localement ou à l'échelon national, dans une publicité du parti national. Je vais vous en donner quelques exemples.
    Pour commencer, voici ce que précisent les lignes directrices et les procédures d'Élections Canada relativement aux dépenses électorales des candidats, et cela dans la version de 1988 du manuel:
... le Directeur général des élections considérera que le fait de respecter les présentes lignes directrices équivaudra à respecter les exigences réglementaires d'émission des certificats aux fins du remboursement des dépenses [...]. Le respect de ces directives sera la garantie que le commissaire n'entreprendra pas de poursuites aux termes de ces dernières.
    Je reviendrai là-dessus dans une seconde pour vous lire le reste, mais arrêtons-nous ici un instant pour réfléchir à cette partie. Ce libellé devrait se retrouver dans l'avis qui apparaît en première page des fiches de renseignements consultables en ligne — on préciserait ainsi très clairement que, si l'on suit les lignes directrices, on ne risque pas d'être poursuivi. En revanche, si on ne les suit pas, eh bien tant pis, on aura été prévenus.
(1235)
    Ce serait très différent du type d'énoncé actuel dans lequel Élections Canada se réserve le droit de revenir en arrière et de réinterpréter certaines choses après coup. On se rappellera donc — en ce qui concerne l'argument actuel d'Élections Canada qui ne voit pas de problème à réinterpréter les faits après coup, à vous trouver coupable et à vous poursuivre pour des choses pour lesquelles elle avait déclaré ne pas avoir eu l'intention de vous poursuivre dans le passé —, que l'ancienne disposition nous mettait à l'abri de toute poursuite à condition de respecter les directives.
    Cela dit, voici ce que l'on peut lire à la section 1.5 intitulée « Dépenses d'élections », aux pages 10 et 11 de ce manuel:
... de tous les supports et services destinés à promouvoir favoriser un candidat, sont considérées comme des dépenses électorales...
    Permettez-moi d'insister sur la partie qui suit:
... les frais... doivent être considérés comme des dépenses électorales si la publicité est destinée à favoriser ou à contrecarrer directement un parti enregistré ou l'élection d'un candidat.
    Donc, « les frais... doivent être considérés comme des dépenses électorales », ce qui revient à dire: « Vous devez nous soumettre ces dépenses, vous n'avez pas le choix. Si vous ne le faites pas, vous commettez une infraction et vous vous exposerez à des poursuites. »
    Compte tenu de tout le tapage des autres partis, je tiens à préciser une chose. Les agents officiels ont agi ainsi, non pas tant de bonne foi, mais parce qu'ils croyaient qu'ils étaient tenus de le faire en vertu d'une injonction d'Élections Canada, c'est-à-dire qu'ils devaient réclamer ce genre de dépenses en tant que dépenses de campagne locale. Ils avaient l'impression que, s'ils ne l'avaient pas fait, ils se seraient placés en infraction de la loi. Ils avaient l'impression qu'ils auraient été poursuivis s'ils n'avaient pas agi ainsi. Il est tout simplement révoltant de constater que ce respect rigoureux de la loi leur a valu d'être accusés de faire partie de ce qu'Hillary Clinton a appelé une vaste conspiration de la droite visant à détourner les deniers publics.
    Pour nous rapprocher un peu plus de l'époque actuelle, il faut savoir que nous disposons à présent d'une version révisée en 1997 du Manuel d'élection des candidats, de leurs agents officiels et de leurs vérificateurs. Voyons ce qu'on y trouve. Je rappelle qu'il s'agit d'un manuel d'Élections Canada.
... le Directeur général des élections considérera que le fait de respecter les présentes lignes directrices équivaudra à respecter les exigences réglementaires d'émission des certificats aux fins du remboursement des dépenses.
    Je vais maintenant vous lire ce que précise le DGE à la page 18:
Bien que l'expression « publicité » ne soit pas précisément définie dans la Loi, il convient de l'interpréter comme incluant tout type de publicité destinée à favoriser ou à contrecarrer un parti enregistré ou l'élection d'un candidat [...] Toute publicité électorale qui a pour but de favoriser ou de contrecarrer un candidat [...] doit porter l'autorisation de la personne requise.
    Vous vous souviendrez qu'une des plaintes émises concerne le fait que des dépenses relatives à des publicités portant par ailleurs la mention « autorisée par l'agent officiel du candidat » avaient été faites hors de la circonscription. Il y a effectivement un problème d'ordre géographique. Il y a, selon moi, un véritable problème dans le fait de faire une publicité non autorisée dans un certain secteur. Il n'y a pas de problème dans le fait de recourir à d'autres personnes pour autoriser ces publicités.
    Je constate que le premier de ces deux aspects n'apparaît pas dans les arguments invoqués par Élections Canada, ou plutôt par le Parti libéral, soit le caractère légitime de ces actions. Ce que ces gens-là jugent illégitime, c'est qu'un candidat, dont la circonscription se situe à l'est d'une ligne imaginaire, ait fait sur son nom de la publicité qui a été autorisé par... publicité s'étant retrouvée sur un autre marché. Cela n'est pas autorisé. Cependant, il faudrait raisonner a contrario et se demander pourquoi des publicités se retrouvent sur des marchés où elles n'ont pas été autorisées par l'agent officiel, et l'argument serait alors davantage convaincant.
    Après tout, le respect outrancier d'une disposition de la loi ou d'un bulletin d'interprétation du DGE ne constitue pas une infraction.
    Puis, nous avons le rapport du Directeur général des élections à la suite des 36es élections générales. Rappelons que le DGE dépose un tel rapport au Parlement après chaque élection, rapport que notre comité examine.
(1240)
    Je siège à ce comité depuis longtemps et je dois dire que nous n'avons pas toujours examiné ce genre de rapport de façon consciencieuse et aussi prestement que nous l'aurions dû. Quoi qu'il en soit, cela pourra faire l'objet d'un autre thème de discussion.
    On pourrait conjecturer...
    Excusez-moi, monsieur Reid, mais pourriez-vous nous répéter la date de ce rapport? Je ne l'ai pas entendue.
    Celui-ci concerne la 36e élection générale, donc celle de 1997.
    J'essaie de démontrer — afin de gagner M. Proulx de vitesse, puisqu'il ne va pas manquer de faire un rappel au Règlement — qu'Élections Canada a interprété la loi de la même façon pendant très longtemps. Cela rejoint tout à fait ce que le Parti conservateur et ses agents officiels ont fait durant les élections de 2006.
    Je respecte énormément Giant Tiger. Je vais y faire mes courses régulièrement.
    Une voix: C'est un très bon magasin
    À l'ordre, je vous prie.
    Monsieur Reid, c'est à vous.
    C'est à mon tour de signaler à M. Proulx qu'il est hors de propos.
    Une voix: Est-ce que vous y achetez vos cravates? C'est juste pour savoir.
    Une voix: Bien évidemment.
    Une voix: Ce sont des cravates toutes faites?
    Une voix: Est-ce qu'il y en a d'autres?
    Une voix: Moi, je suis fier d'acheter mes cravates à Giant Tiger. Je tiens à le dire haut et fort.
    M. Scott Reid: Je commence à être un peu agacé par tout ça, monsieur le président.
    Moi, c'est le saumon de là-bas que j'aime.
    Une voix: Je suis fier de mes cravates.
    Le président: Monsieur Reid.
    Avant que je ne sois interrompu par le dandy de Hull—Aylmer, j'étais sur le point de vous dire que le rapport du DGE au sujet de l'élection de 1997 — la 36e élection générale — donne la même interprétation. En effet, lors de ces élections, les partis n'avaient pas eu l'autorisation, aux termes de l'article 48 de la loi, de faire de la publicité le 1er juin, c'est-à-dire la veille du scrutin, ni le 2 juin, jour de scrutin. Cependant, d'autres candidats avaient été autorisés à en faire parce que des restrictions semblables, apparaissant dans d'autres articles de la loi, avaient été éliminées par les tribunaux. Il s'agit de dispositions d'embargo qui ne s'appliquent plus, mais l'interprétation de la section pertinente de la loi demeure et elle est cohérente.
    Voici d'ailleurs comment le Directeur général des élections l'exprime:
L'admissibilité des publicités radiodiffusées a seulement été déterminée par l'identité de la personne morale ou physique facturée. Le contenu des publicités autorisées était uniquement fonction du principe de la liberté d'expression garanti par la Charte. Cela étant, de nombreux candidats ont réservé du temps d'antenne la veille et le jour même du scrutin. Comme le temps publicitaire réservé était couramment utilisé pour des publicités nationales comportant un élément local, l'interdit fixé par l'article 48 a été sans effet.
    Et cela, on ne l'a pas lu exclusivement dans le rapport au Parlement, mais aussi dans un communiqué et dans un avis aux médias qui ont respectivement été émis par Élections Canada les 24 et 29 mai 1997.
    Ainsi, Élections Canada réaffirmait très clairement qu'à l'époque, le DGE estimait que le contenu des publicités ne devait être soumis à aucune restriction. Nous estimons, de notre côté, que de telles restrictions n'ont pas lieu d'être, parce que la Charte nous autorise à faire de telles publicités.
    Celui qui était Directeur général des élections à l'époque, M. Kingsley, a reconnu ouvertement que la loi permettait aux candidats de contribuer à l'achat de publicités nationales. Il a même précisé que le temps d'antenne réservé servait souvent à faire passer des publicités nationales qui comportaient des mentions locales. Il n'y voyait pas de problème. Les fonds utilisés pour cela étaient remboursés dans la mesure où les mentions locales étaient incluses et personne ne conteste que ce genre de mentions, alors autorisées par les agents officiels, apparaissaient dans ces publicités. Cela n'est pas contesté.
    Revenons donc en 2000. Encore une fois, le Manuel d'élection des candidats, de leurs agents officiels et de leurs vérificateurs de 2000 reprend la même interprétation qui apparaît au paragraphe 4.4.5, sous le titre « Publicité électorale »:
Une publicité électorale s'entend de la diffusion, sur un support quelconque au cours de la période électorale, d'un message publicitaire favorisant ou contrecarrant un parti enregistré ou l'élection d'un candidat, notamment par une prise de position sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat.
    Quant au paragraphe 4.4.5.1, « Identification de la publicité électorale », voici ce qu'il précise:
Toute publicité électorale qui a pour but de favoriser ou de contrecarrer un candidat, notamment en prenant position sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat, doit porter l'autorisation de la personne requise.
    Une fois encore, si vous vous dites que l'injonction dont nous parlons fait suite à une modification des règles qui étaient en vigueur en 1988, sachez que ces passages datent de 2000.
(1245)
    Rapprochons-nous un peu plus de notre période dans ce voyage dans le temps pour en arriver au Manuel d'élection des candidats, de leurs agents officiels et de leurs vérificateurs de décembre 2005. C'est ce manuel qui a été appliqué lors des élections de 2006. C'est celui-ci qui a été suivi par tous les agents officiels qui, selon les députés libéraux d'en face, se sont placés en infraction de la loi en soumettant des dépenses légitimes et en appliquant des... On en tremble! Ces gens-là ajoutaient des mentions locales — leurs propres répliques — à des publicités qui passaient ailleurs et faisaient la promotion de leur candidat. Si jamais nos enfants apprennent cela, ils vont en faire des cauchemars.
    Monsieur le président, je fais un rappel au Règlement. Je pense que le député devrait s'adresser au président plutôt que de nous dévisager les uns et les autres, surtout à l'occasion d'un discours.
    Merci. Je suis d'accord. C'est un bon rappel au Règlement et je vais inviter le député à s'adresser à la présidence.
    Continuez, monsieur Reid.
    Je tiens à faire une précision à ce sujet, monsieur le président, par souci d'équité. Il est important que je précise que je m'adressais aux députés par votre intermédiaire, parce que ces transcriptions vont être lues. J'avais tourné ma tête dans une autre direction à ce moment-là, mais comme vous le savez, il y a pas mal de discussions en arrière-plan dans cette pièce. Je n'ai pas une voix de stentor et il était possible que certains ne m'entendent pas toujours bien. Je m'adressais donc à eux, par votre intermédiaire, mais je l'ai fait d'une façon qui m'a amené à tourner momentanément la tête dans une autre direction... et je ne cherchais pas à faire autre chose que cela.
    Je suis conscient que M. Godin a fait ce rappel au Règlement avec la meilleure des intentions, mais il se trouve qu'à ce moment-là, tout comme je le fais maintenant, je m'adressais aux membres du comité par votre intermédiaire, même si je regardais alors M. Godin et ses collègues. Je tiens à ce que vous compreniez cela, monsieur le président, et à ce que tous les membres le comprennent: je m'adresse au comité par votre intermédiaire. J'en ai terminé avec ce rappel au Règlement.
    Le Manuel d'élection des candidats, de leurs agents officiels et de leurs vérificateurs, de décembre 2005, précise ce qui suit sous le titre « publicité électorale »:
« publicité électorale » Diffusion, sur un support quelconque au cours de la période électorale, d'un message publicitaire favorisant ou contrecarrant un parti enregistré ou l'élection d'un candidat, notamment par une prise de position sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat.
    C'est exactement le même libellé. Quelle surprise! « ... message publicitaire favorisant ou contrecarrant un parti enregistré ou l'élection d'un candidat ». Et nous en arrivons à ces fameuses mentions locales avec ce qui suit; je cite: « Toute publicité électorale qui a pour but de favoriser ou de contrecarrer un candidat, notamment en prenant position sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat » — et je demande un roulement de tambour — « doit porter l'autorisation de la personne requise ».
    Je précise au passage que le roulement de tambour ne fait pas partie de la citation.
    Ce texte se retrouvait donc dans le manuel de 2005 et il était exactement le même que celui de 2000. C'est donc ce libellé qui se serait appliqué à toute élection intervenue entre décembre 2005 et janvier 2006, dont celle du 23 janvier 2006. Nous y sommes.
    Quand Élections Canada précise que nous devons interpréter la loi au regard de ses bulletins d'interprétation, je suppose qu'elle veut parler des bulletins d'interprétation qui n'ont pas été modifiés pendant 18 ans. Aucun autre document n'indique qu'il en a été autrement. À l'époque, ces interprétations sont demeurées les mêmes. Rien n'indiquait alors qu'agir ainsi constituait une violation de la loi. Pour Élections Canada, il n'y avait pas d'infraction aux dispositions législatives en vigueur. Il n'y avait aucune infraction. Cette interprétation correspondait davantage au respect diligent et constant des dispositions de la loi.
    Revenons-en aux affidavits concernant des pratiques semblables appliquées par les libéraux. Je constate qu'on ne peut pas, dans ce cas, parler de respect diligent des dispositions de la loi. Nous avons eu affaire à des rapports miteux, cas après cas, si bien qu'il est impossible de savoir exactement combien d'argent a été dépensé, quels transferts ont été effectués à destination ou à partir des circonscriptions dans le cadre de la promotion des candidatures, de la campagne nationale et ainsi de suite. Si cela était vrai en 2006, et ce le fut en 2004 pour le Parti libéral de même que, je dois le préciser, pour le Bloc et le NPD, mais surtout pour les Libéraux dont on peut qualifier les rapports d'un très grand nombre de campagnes de « peu soignés ».
    Voilà donc le portrait de la situation.
    Puis, soudain, en mars 2007 — je crois — le Manuel d'élection des candidats, de leurs agents officiels et de leurs vérificateurs est modifié par Élections Canada. Cette édition est différente des autres, mais elle rejoint l'interprétation actuelle. Voici ce qu'on peut y lire sous le titre « Publicité électorale »:
La publicité électorale est la diffusion, sur un support quelconque au cours de la période électorale, d'un message publicitaire favorisant ou contrecarrant un candidat, notamment par une prise de position sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat.
(1250)
    Il n'est donc plus question de candidat ou de parti, n'est-ce pas? Les mots « parti enregistré ou l'élection d'un candidat » ont disparu. Je ne sais pas pourquoi. Je peux toujours me dire que cet escamotage est dû à de vils motifs ou bien à une erreur d'impression. Ce que je sais, en revanche, c'est que les choses étaient différentes lors des élections de 2006.
    Le paragraphe suivant concerne l'identification de la publicité électorale. Je vais, à nouveau, vous lire ce que contient l'édition de mars 2007 du Manuel d'élection des candidats, de leurs agents officiels et de leurs vérificateurs.
    Je veux faire un rappel au Règlement.
    Non, vraiment?
    Monsieur Godin, pour un rappel au Règlement .
    Pouvez-vous nous dire, monsieur le président, si vous avez l'intention que nous poursuivions ainsi jusqu'au vote qui doit se dérouler en soirée? À l'évidence, le député fait de l'obstruction systématique et, d'après les règles, nous devons poursuivre.
(1255)
    Nous verrons ce qui se passe.
    Je vous en prie, monsieur Reid.
    Merci.
    Pour ce qui est de l'identification de la publicité électorale, il est dit que toute publicité électorale...
    Excusez-moi, j'ai été interrompu et je sais que M. Godin tiendra à ce que je précise mon propos.
    Je suis en train de lire la version de mars 2007 du Manuel d'élection des candidats, de leurs agents officiels et de leurs vérificateurs qui dit ceci:
Toute publicité électorale qui a pour but de favoriser ou de contrecarrer un candidat, notamment en prenant position sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat, doit porter l'autorisation de la personne requise (p. ex. une publicité qui favorise ou contrecarre un autre candidat de la circonscription doit être autorisée par l'agent officiel du candidat).
    Encore une fois, le mot « parti » a disparu, mais aussi étrange que cela puisse être, il est encore permis de prendre position « sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat ».
    J'ai l'impression que nous avons là une interprétation qui est... comment dire? Elle n'est plus aussi explicite. Elle est plutôt baroque, je dirais même rococo.
    Une voix: Rococo?
    M. Scott Reid: Rococo, c'est du baroque qui est plus baroque que le baroque...
    Le comte Chocula? Les McGuinty sont décidément des champions dans leurs interventions.
    Ce qu'on dit ici, selon moi, c'est que si l'on favorise un candidat... poursuivons par l'exemple de ma circonscription. Si l'on favorise Scott Reid en disant « Votez pour Scott Reid, un candidat qui se tient debout », il n'y a pas de problème. Cependant, il est ici question d'une prise de position « sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat ».
    Prenons un autre exemple. Je suis associé à une campagne d'installation généralisée de défibrillateurs dans les arénas de hockey. Ces défibrillateurs sont installés dans les coffres à bagages des voitures de patrouille de deux corps policiers indépendants. Je suis pas mal intervenu dans ce dossier et j'en suis plutôt fier. J'ai trois bureaux de circonscription en tout.
    Si je fais la promotion de ce genre d'activité, il n'y a pas de problème. Pas de problème non plus si je prends officiellement position dans des dossiers comme le Registre des armes d'épaule auquel, je peux vous l'assurer, tous les électeurs de ma circonscription s'opposent.
    Toutefois, il est ici précisé que la prise de position doit concerner « une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat ». Ainsi, si je favorise une position adoptée par mon parti au sujet de la TPS, que nous avons réduite de 7 à 5 p. 100, ou si je veux attirer l'attention de l'électorat sur le fait que le Parti libéral du Canada veut refaire passer la TPS à 7 p. 100, je suppose qu'il n'y aura pas de problème là non plus.
    Cependant, pas question de faire la promotion du parti. Je suppose que je peux parler de TPS, à condition de ne pas mentionner le nom du parti. Il n'y a pas de problème à dire « Il y a un autre groupe, que nous ne pouvons nommer, dirigé par un type, que nous ne pouvons pas nommé non plus, qui veut ramener la TPS à son ancien niveau ». Cependant, dès l'instant où je précise « Nous parlons des libéraux et de Stéphane Dion », ça ne va plus.
    Je dois supposer que c'est ainsi qu'il faut comprendre cette interprétation. Celle-ci n'a aucun sens et je me risquerais même à dire qu'elle est inconstitutionnelle. De toute façon, elle est absurde.
    Même si elle n'était pas absurde, il demeure qu'elle a été faite a posteriori. Elle ne peut pas s'appliquer aux élections de 2006, parce qu'elle n'était pas en vigueur alors.
    Je rappelle le libellé du manuel de 1988:
Le respect de ces directives sera la garantie que le commissaire n'entreprendra pas de poursuites aux termes de ces dernières.
    Il faut comprendre que cela signifie en fait: « Ce n'est pas vraiment ce que nous avons voulu dire. Nous avons voulu dire que nous n'entreprendrions pas de poursuites sauf si l'envie nous en prenait, sauf si nous voulions le faire demain, dans dix ans ou dans vingt ans d'ici. »
    Je ne sais pas — je ne suis pas avocat — dans quelle mesure ce genre de libellé est contraignant.
(1300)
    Cette interprétation émane de quelqu'un qui devait exercer un certain contrôle administratif sur cet organisme. On peut, légitimement et de façon réaliste, s'attendre à ce que le Directeur général des élections se conforme aux dispositions de la loi et agisse d'après ce qu'il a déclaré.
    Il est possible que la déclaration que je viens de vous lire lie le Directeur général des élections, auquel cas il n'y a plus de problème. Je ne sais pas dans quelle mesure cela pourrait être plaidé devant les tribunaux. Je suppose que tel sera le cas.
    Il est évident que le DGE a changé son interprétation après coup, ce qui en dit long de sa conception de l'équité et de l'impartialité en matière d'application de la loi. Pour dire le moins, il s'agit là d'une mauvaise pratique administrative.
    Les principaux changements tiennent à la suppression de la notion de promotion d'un parti. Comme je le disais, c'est à croire que cela est dû à une erreur d'impression. Pour vous en persuader, il vous suffirait de reprendre ce texte et d'y ajouter la mention « parti enregistré », pour constater que sa suppression semble accidentelle. Ainsi, vous pourriez revenir à la formule: « la publicité électorale est la diffusion, sur un support quelconque au cours de la période électorale, d'un message publicitaire favorisant ou contrecarrant »...
    Chers collègues, nous avons épuisé l'ordre du jour et sommes arrivés au terme du temps prévu pour cette réunion convoquée en vertu du paragraphe 106(4) du Règlement.
    La séance est levée.