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Honorables membres du Comité, j'aimerais tout d'abord vous remercier de me donner l'occasion de vous parler d'un sujet fort important, à savoir les travailleurs étrangers temporaires dans le secteur agricole et la pandémie de COVID-19.
En plus d'avoir fait l'objet de mon travail en tant que chercheur sur la politique en matière d'immigration et d'accueil des réfugiés, le sujet me touche personnellement. Mon père était un réfugié du Chili. Grâce à mes connaissances de l'espagnol qu'il m'a transmises, j'ai pu travailler l'été avec des travailleurs étrangers temporaires du Mexique dans les vergers de la Colombie-Britannique pendant mes études.
Avant d'assumer mon poste à la School of Public Policy, je travaillais comme agent de soutien à la clientèle du programme pour les travailleurs étrangers temporaires de la Calgary Catholic Immigration Society, à Calgary en Alberta. Je me suis rendu à plusieurs reprises à l'abattoir de Cargill à High River, en Alberta, pour y rencontrer les travailleurs et leur donner des ressources sur leur statut par rapport à l'immigration et leur emploi.
C'est donc dans ce contexte que j'espère fournir aux membres du Comité une vue d'ensemble du Programme des travailleurs étrangers temporaires dans le secteur agricole canadien en faisant appel à la fois aux données ainsi qu'à mon expérience personnelle.
Les membres du Comité devraient savoir que l'immigration à des fins agricoles a une longue histoire au Canada, et ce, depuis la Confédération en 1867. Pendant les quelque 100 premières années de l'histoire de 153 ans de notre pays, l'une des priorités de notre système d'immigration consistait à assurer et à améliorer notre productivité agricole.
L'Acte d'Immigration de 1869, qui a jeté les bases de la politique canadienne en matière d'immigration liée à la main-d'œuvre au début de la Confédération, contenait plusieurs dispositions qui n'étonneront guère les membres du Comité aujourd'hui. Premièrement, cette loi a été conçue pour attirer les immigrants qui contribueraient à la productivité économique canadienne, notamment en agriculture. Deuxièmement, elle visait à assurer « la sécurité et la protection des immigrants en route vers le Canada et une fois arrivés à destination ». La loi offrait une protection aux nouveaux arrivants contre les magouilles courantes, ainsi que les services d'agents du gouvernement qui aidaient les immigrants à se loger et à établir des contacts avec leurs destinations choisies.
Après l'adoption de l'Acte concernant les terres de la Puissance de 1872, le Canada a accéléré son programme d'immigration et a recruté des millions d'agriculteurs et d'ouvriers agricoles de pays étrangers, ce qui a donné lieu à un gonflement colossal de 1 000 % de la population des Prairies et la création des provinces de l'Alberta et de la Saskatchewan. Cette période est désormais connue comme étant le boom du blé, et ce fut l'époque où le Canada affichait la plus grande croissance économique au monde. De nombreux Canadiens ont des grands-parents et des arrière-grands-parents venus d'Ukraine, de la Pologne ou d'autres pays de l'Europe de l'Est pour travailler en agriculture au Canada.
Je ne passerai pas en revue toutes les lois ou décisions portant sur l'agriculture et l'immigration au Canada, mais je tiens à souligner que depuis la création du Canada jusqu'à la signature du premier accord sur les travailleurs saisonniers en 1966, le Canada a déployé des efforts concertés pour asseoir, protéger et agrandir son système agricole grâce au recrutement et à l'installation d'agriculteurs et d'ouvriers dans les régions agricoles.
De nos jours, la pandémie de la COVID-19 a soulevé des questions quant à la sécurité des travailleurs et de notre chaîne d'approvisionnement en nourriture et la pertinence du Programme des travailleurs étrangers temporaires, alors que les Canadiens connaissent un taux de chômage record.
La School of Public Policy publiera prochainement un article qui indique que le nombre de travailleurs venus pour les secteurs de l'agriculture, de la transformation des aliments et du transport accuse un repli de 14 % par rapport à l'année dernière, ce qui s'est traduit par un manque de quelque 3 800 travailleurs au début de la saison agricole primaire, touchant les activités de semis, de vêlage et de pêche du homard de l'Atlantique.
Cette pénurie, aggravée par une période d'isolement de 14 jours, représente une perte considérable de temps et de travailleurs, compte tenu notamment des achats de semences, de bétail et d'équipement faits dans une perspective d'intensification de la production, avec le besoin accru de travailleurs qui en découle. Il y a également la facette humaine, que je vous décrirai plus tard. La perte est ressentie le plus au niveau du travail primaire dans les fermes, où on voit une réduction de 14 % par rapport à 2019, ainsi que dans les abattoirs de bétail et de volaille, qui subissent une baisse de 20 %, et les usines de transformation des produits de la mer, qui doivent composer avec 60 % de moins de travailleurs étrangers.
On comprend bien que certains recommandent l'embauche de Canadiens pour compenser la baisse des travailleurs étrangers, vu les circonstances actuelles. Je vous préviens, cependant, que cette solution engendrerait plusieurs difficultés.
Premièrement, les producteurs et les employeurs auront besoin de temps et de ressources pour former les nouveaux employés au début de la saison agricole. Deuxièmement, il se peut que les Canadiens ne réagissent pas aux incitatifs à l'embauche ou aux initiatives déployées par les producteurs agriculteurs à l'échelle locale afin de combler le besoin en main-d'œuvre. Les données de Statistique Canada indiquent que les agriculteurs sont prêts à rémunérer davantage leurs employés, et ce, en tenant compte de l'inflation. Une recherche effectuée par le Conference Board of Canada révèle cependant qu'il faudrait bonifier les salaires de plus de 66 % afin de renverser complètement la tendance actuelle de la participation réduite par les Canadiens au secteur agricole.
Notre propre recherche exploratoire dans le domaine, et je vous préviens qu'il s'agit de recherches préliminaires qui doivent être suivies d'une analyse plus rigoureuse, laisse entendre que les Canadiens ne sont pas aussi sensibles aux augmentations de salaire dans le secteur agricole que les travailleurs étrangers. Il se peut donc que des efforts de recrutement permettent de compenser la baisse de la main-d'œuvre au pays, mais pas complètement.
Pour conclure, j'aimerais vous montrer la facette humaine de ces chiffres. Il faut situer les discussions sur la main-d'œuvre et la productivité dans un contexte humain. Hier, CBC a rapporté qu'un troisième travailleur agricole est mort du coronavirus près de Simcoe, en Ontario. Sa mort vient à la suite de celles de Bonifacio Eugenio Romero et de Rogelio Muñoz Santos, deux travailleurs mexicains fauchés par le virus en travaillant dans des fermes canadiennes.
Lorsque nous étudions la réforme du Programme des travailleurs étrangers temporaires, nous devons nous rappeler que l'amélioration des conditions des travailleurs dans les fermes et dans les usines de transformation n'est pas un jeu à somme nulle dans lequel les Canadiens sont des perdants si les travailleurs en tirent des avantages. En fait, les deux parties peuvent être gagnantes, et c'est donc dans cette optique que j'encourage le Comité à étudier certaines des idées suivantes sur les travailleurs étrangers et l'agriculture.
Primo, revoir l'admissibilité des travailleurs étrangers temporaires à l'assurance-emploi, notamment en période de pandémie et de perte d'emplois, afin de les encourager à prendre des congés plutôt que de risquer de propager la maladie.
Secundo, adapter le Programme pilote d'immigration au Canada Atlantique pour en faire un programme pilote d'immigration agricole et donner aux travailleurs la possibilité d'obtenir leur résidence permanente au moyen des heures accumulées ou du soutien de l'employeur. Plus de 45 % des travailleurs étrangers temporaires reviennent aux fermes au bout de trois ans, 39 % au bout de 5 ans et 25 % au bout de 10 ans. Cela montre que malgré le qualificatif de temporaire, les travailleurs étrangers reviennent en grand nombre année après année.
Tertio, permettre aux agriculteurs de déduire immédiatement les coûts en capital de la construction de nouveaux logements suffisamment spacieux pour les travailleurs étrangers temporaires et obliger IRCC et l'Agence canadienne d'inspection des aliments à effectuer des inspections régulières. En fait, nous pourrions améliorer la sécurité de notre chaîne d'approvisionnement en nourriture en améliorant les conditions de travail. On pourrait également songer à retenir une approche rétrospective plutôt que novatrice à la résidence permanente pour les travailleurs étrangers agricoles. Cela veut dire tenir compte de notre histoire en tant que pays construit au moyen d'un programme d'immigration agricole vigoureux. Il est peut-être temps de revoir cette histoire avec une meilleure compréhension des risques pour la sécurité de l'approvisionnement en nourriture et celle des travailleurs.
Merci.
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Je vous remercie de m'avoir invité à vous parler aujourd'hui au nom de la Migrant Workers Alliance for Change, une coalition de 27 organismes dirigés par des migrants et alliés. Je fais également partie du comité de coordination du Migrant Rights Network, l'alliance canadienne qui promeut la justice pour les migrants.
Le fait est que la capacité d'une personne à accéder aux soins de santé, à faire valoir ses droits au travail, à être avec sa famille ou à se protéger en cas de pandémie est directement liée à sa citoyenneté. C'est vrai parce que la loi le prévoit. À titre d'exemple, les travailleurs agricoles migrants savent qu'une seule personne infectée par la COVID-19 dans une ferme les met tous en danger immédiatement, mais ils ne peuvent pas prendre le risque de s'exprimer, car cela se traduirait par un licenciement, une perte de logement, une perte de revenus et une expulsion.
Samedi soir, Juan Lopez Chaparro est décédé. C'est le troisième travailleur agricole migrant mexicain qui est mort des suites de la COVID-19 en Ontario, après Bonifacio Eugenio-Romero et Rogelio Muñoz Santos. Leurs photos se trouvent ici.
Le Canada compte au moins 1,6 million de migrants temporaires ou sans papiers, ce qui représente une personne sur 23. Il n'a pas su assurer l'égalité des droits et fournir de l'aide à au moins une personne sur 23 pendant la crise de la COVID-19. Cela inclut plus d'un demi-million de personnes dans le pays qui n'ont pas de statut d'immigrant, dont la plupart n'ont pas accès à la Prestation canadienne d'urgence ou même à des soins de santé.
Des femmes migrantes sans papiers sont obligées d'emménager avec des hommes violents. Des familles optent pour un accouchement à domicile sans aide après avoir dû s'endetter pendant des années pour payer des frais médicaux, et des milliers de personnes se sont retrouvées sans abri. Celles qui n'ont pas perdu leur travail ont été confrontées à des conditions dangereuses, sans toutefois qu'on leur verse de complément salarial pour les travailleurs essentiels.
Des centaines, voire des milliers, de travailleurs domestiques migrants sont prisonniers; leurs employeurs refusent de les laisser sortir de leur domicile, même pour faire l'épicerie ou envoyer des fonds chez eux. Ces travailleurs migrants sont contraints de rester dans ces conditions pour effectuer les heures de travail requises afin d'obtenir le statut de résident permanent. En outre, ils doivent se soumettre à des évaluations linguistiques et pédagogiques impossibles pour avoir une chance de retrouver leur famille.
Plus de 850 000 personnes titulaires d'un permis d'études ou d'un permis de travail postdiplôme ne peuvent pas trouver de travail, ont perdu leur salaire et sont en difficulté. Bon nombre ne se nourrissent que grâce aux banques alimentaires, mais les établissements d'enseignement postsecondaire ont augmenté leurs frais de scolarité et les exigences actuelles en matière d'immigration font en sorte que la plupart ne pourront pas obtenir le statut de résident permanent.
Des dizaines de milliers de travailleurs agricoles migrants sont venus au Canada et choisissent d'y rester même s'ils craignent de tomber malades parce qu'ils ne pouvaient pas avoir accès à un soutien du revenu. Nous avons publié le rapport que j'ai ici avec des plaintes au nom de plus de 1 000 travailleurs migrants concernant l'augmentation du racisme, la surveillance, le vol de salaire, l'exploitation, l'intensification du travail et des conditions de logement inhumaines.
Un système d'immigration à plusieurs vitesses, dans lequel certains ont un statut de résident permanent et ont donc des droits en matière de soins de santé, d'unité familiale et d'absence de représailles, tandis que d'autres ont un statut temporaire ou sont sans statut, mène à de l'exploitation. Les inégalités et l'exploitation ont été exacerbées pendant la crise de la COVID-19. Il n'y a pas que les migrants qui le disent. Prenez l'exemple d'un article d'opinion publié le 5 mai 2014 dans le Toronto Star, qui indiquait qu'il s'agissait d'une question d'équité fondamentale et que le Canada devait s'engager à nouveau à faire venir ici des immigrants permanents qui obtiendront la citoyenneté, et cet article a été écrit par , qui était alors député et qui est aujourd'hui premier ministre.
La 16e recommandation qu'a faite votre comité dans son rapport de septembre 2016 était que le Canada « examine les voies d'accès actuelles à la résidence permanente pour l'ensemble des travailleurs étrangers temporaires, de façon à faciliter l'accès à la résidence permanente pour les travailleurs migrants ».
La 19e recommandation que votre comité a formulée dans le cadre de son étude de décembre 2012, sous le précédent gouvernement conservateur, était que le Canada « examine la possibilité d'offrir de meilleures possibilités aux travailleurs étrangers temporaires d'éventuellement devenir des immigrants permanents ».
La raison pour laquelle l'immigration permanente a toujours été un élément central de toute étude sur la vulnérabilité et l'exploitation des résidents non permanents est simple. Comme l'a déclaré la ministre il y a à peine trois jours, il existe un déséquilibre des pouvoirs dans le système. Le déséquilibre des pouvoirs est présent partout où il y a une migration temporaire ou des personnes sans papiers. En leur refusant les droits qui accompagnent la citoyenneté, les lois et les législateurs font pencher la balance vers la maltraitance, l'exploitation, l'exclusion et la mort.
Nous allons fournir à votre comité des recommandations détaillées, mais la solution est très simple. Garantir le plein statut d'immigrant à tous les migrants immédiatement sans exclusion, sans exemption, et veiller à ce que tout le monde arrive au pays en ayant un statut d'immigrant. C'est une question de vie ou de mort.
J'ai quelques dernières remarques à faire. Premièrement, une voie vers la citoyenneté ou la résidence permanente n'est pas la solution. Une autre voie, comme le programme pilote sur l'immigration agroalimentaire qui a été lancé récemment, est une promesse de sécurité pour certains travailleurs s'ils peuvent franchir des obstacles impossibles, les laissant davantage à la merci des employeurs.
Deuxièmement, le renforcement des inspections, bien qu'il soit également nécessaire, ne résoudra pas le problème. Les inspections permettent de s'assurer que les employeurs n'enfreignent pas la loi, mais la majeure partie de ce qu'ils font est légale. La loi n'impose pas l'éloignement social, ne crée pas de normes nationales en matière de logement et ne constitue pas un mécanisme permettant aux travailleurs de se plaindre.
Troisièmement, il ne s'agit pas seulement d'être assez bon pour travailler ou pour rester ou d'être un ange gardien. Oui, les migrants occupent des emplois qui sont essentiels pendant une pandémie, mais qu'il soient handicapés, sans abri ou incapables de travailler, les migrants doivent être en mesure de prendre soin d'eux-mêmes et de leur famille. Qu'il s'agisse de gens qui travaillent dans l'industrie du sexe, dans des entrepôts, dans la construction ou dans la livraison de nourriture, chaque personne est essentielle. Personne ne mérite d'être exploité. Chacun mérite de vivre.
Nous avons besoin d'un système d'immigration à une seule vitesse. Cela signifie permettre à toutes les personnes qui arriveront d'obtenir le plein statut d'immigrant. C'est essentiel. C'est nécessaire. Cela doit se produire maintenant. Des gens perdent la vie.
Merci.
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Oui, je peux certainement parler de cette question également.
Ce que nous avons constaté en préparant la recherche — et cela concerne non seulement les médecins immigrants qui travaillent au Canada, mais aussi plus généralement de nombreux autres travailleurs de la santé, y compris les infirmières, les technologues de laboratoire, d'autres travailleurs de première ligne et les travailleurs qui participent aux tests —, c'est que le temps qu'il faut pour que les titres de compétence d'un nouvel arrivant soient reconnus est démesurément long. Quand je dis « nouvel arrivant », cela peut sembler étrange. Peut-être que le terme plus approprié que je devrais utiliser est « médecin diplômé à l'étranger », ce qui inclurait les gens qui sont citoyens canadiens ou résidents permanents, mais qui ont étudié à l'étranger pour obtenir leur diplôme en médecine.
Nous avons constaté qu'il faut entre 5 et 10 ans pour qu'un nouvel arrivant ou un médecin diplômé à l'étranger obtienne la reconnaissance de ses titres de compétence au Canada. Cela coûte également un montant considérable, plus de 42 % du revenu médian d'un médecin diplômé à l'étranger ou d'un nouvel arrivant pendant cette période. Il ne s'agit pas seulement des coûts du processus lui-même, ce qui comprend des éléments tels que les frais et les exigences concernant le permis d'exercice. Cela inclut également les avantages auxquels ils ont renoncé, comme le revenu qu'ils pourraient gagner pendant cette période, les coûts d'achat des manuels et les coûts de transport liés aux déplacements pour se rendre aux différents entretiens. Pour certains, en particulier ceux de segments plus vulnérables de la population, cela peut signifier qu'il est tout simplement impossible d'exercer leur profession au Canada.
Je vais utiliser un exemple concret. Je parlais avec un avocat spécialisé en droit de l'immigration qui a récemment aidé une personne réfugiée à obtenir le statut de personne protégée au Canada. L'individu était un cardiochirurgien colombien très respecté qui parlait couramment les deux langues officielles, l'anglais et le français. Cependant, en raison de la façon dont cette personne est arrivée au Canada, elle n'avait pas beaucoup de biens et de revenus et travaillait pour Uber. Cela signifie que, malgré les connaissances qu'elle possède, il est très peu probable qu'elle puisse obtenir la reconnaissance professionnelle en raison des obstacles financiers.
C'est attribuable en partie au nombre limité de postes de résidence qui sont offerts aux médecins diplômés à l'étranger dans les provinces, mais ce n'est pas la seule raison. Les immigrants arrivent souvent au Canada avec des attentes non fondées selon lesquelles parce qu'ils se sont qualifiés dans le cadre des processus d'immigration fédéraux, ils se sont qualifiés pour travailler. Ils sont tristement déçus lorsqu'ils ne sont pas en mesure d'aider.
J'ai remarqué que récemment, le Québec a décidé qu'il voulait augmenter le nombre de ce qu'il appelle les travailleurs essentiels qui viennent au Québec. Cependant, j'ai constaté que beaucoup d'entre eux auraient besoin d'un permis pour pouvoir exercer leur profession. Même s'ils arrivaient le mois prochain, ils ne seraient probablement pas en mesure d'apporter leur aide à la lutte contre la pandémie de COVID-19 avant un long moment.
Je sais qu'il y a beaucoup de questions à poser aux autres témoins, qui peuvent également fournir des renseignements utiles, et je terminerai donc en disant que cette pandémie nous aide à réfléchir aux barrières à l'entrée qui sont réellement nécessaires. Je peux comprendre nos préoccupations en matière de santé et de sécurité publiques en ce qui concerne le permis d'exercer des nouveaux arrivants, mais d'autres endroits dans le monde, comme l'Irlande, la France, le Royaume-Uni, New York, le New Jersey et plusieurs autres États américains ont décidé de tout mettre en œuvre pour permettre aux immigrants d'exercer leur profession sous la supervision d'un professionnel de la santé autorisé à exercer.
L'État de New York, par exemple, dispensera complètement les immigrants de l'obligation d'avoir un permis pour pouvoir exercer leur profession. Je ne le suggérerais pas nécessairement, mais je pense que cette pandémie est l'occasion de réévaluer notre processus de délivrance de permis aux nouveaux arrivants et la façon de travailler avec les provinces et le gouvernement fédéral pour qu'une partie de leurs processus d'immigration comporte également un volet de délivrance de permis.
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Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie nos deux témoins.
Monsieur Falconer, je suis tout à fait d'accord avec vous. En tant qu'ancien maire et en tant que député maintenant, j'ai travaillé pour essayer d'amener le Québec à modifier les exigences relatives au personnel médical étranger et aux diplômés à l'étranger. Malheureusement, la plupart de ces mesures relèvent des provinces et du collège des médecins, mais je serais ravi d'en discuter avec vous à une date ultérieure.
Je voulais vous interroger tous les deux sur les exigences linguistiques. L'un des dossiers auxquels j'ai travaillé en tant que président du comité de la justice au cours de la dernière législature, c'était une étude sur la traite des personnes. Le comité avait recommandé que les travailleurs étrangers temporaires reçoivent des documents, y compris des documents relatifs à la santé, dans leur langue maternelle, leur propre langue, et pas seulement en anglais et en français.
Étant donné que de nombreux documents ne sont toujours pas disponibles en espagnol, par exemple, si l'on pense aux nombreux travailleurs qui se trouvent actuellement sur nos fermes, ou en tagalog ou dans d'autres langues, je pense qu'il peut y avoir des problèmes de communication; les travailleurs étrangers temporaires ne connaissent pas tous leurs droits et ne sont donc pas en mesure de les faire valoir.
Je me demande si l'un de vous a des recommandations au sujet des langues.
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Pour clarifier les choses, je peux fournir au Comité un mémoire comprenant plusieurs recommandations qui vont du logement à l’assurance-emploi. En ce qui concerne la résidence permanente, je n’ai jamais vu de rapport du directeur parlementaire du budget sur les coûts et les avantages financiers de l’octroi immédiat de la résidence permanente à tout le monde.
Si je peux soulever un point à ce sujet, dans un prochain document de l’école, nous aborderons en fait la... Nous avons fait une analyse de la logistique des transports en ce qui concerne le secteur agricole. Si l’on considère l’ensemble du système agricole, y compris les exploitations agricoles et la transformation, le transport est le seul domaine où l’on dispose réellement de ce que l’on pourrait appeler un taux de transition. Chaque année, disons qu’environ 1 000 travailleurs étrangers temporaires viennent travailler dans le secteur du transport et qu’environ 96 % d’entre eux deviennent des résidents permanents, alors que le nombre de travailleurs étrangers temporaires venant travailler dans ce secteur a augmenté tous les ans. Si nous étions tous des anges, nous n’aurions pas à présenter ces arguments, mais certains continuent de craindre que le fait d’offrir le statut de résident permanent aux travailleurs agricoles ne réduise d’une manière ou d’une autre l’offre de travailleurs agricoles.
La présence de travailleurs étrangers temporaires dans d’autres secteurs, tels que le transport, prouve le contraire. Les gens continueront à vouloir venir travailler au Canada. Je comprends que l’autre conseil puisse être en désaccord avec moi sur ce point, mais le programme d’immigration de l’Atlantique, avec l’accumulation des heures, pourrait être adapté à un projet pilote d’immigration agricole, mais il doit être accompagné d’autres réformes qui se concentrent sur la sécurité des travailleurs. La résidence permanente produit effectivement de bons résultats en matière de soins de santé et de revenus. Dans l’immédiat, nous pouvons également faire beaucoup plus en matière de logement, d’assurance-emploi et, comme l’a souligné Mme Kusie, de partage des permis, afin que les travailleurs puissent également exercer dans le domaine dans lequel ils ont été formés.
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Merci, monsieur le président, et merci aux membres du Comité de m’avoir donné l’occasion de me présenter devant vous aujourd’hui.
Je vous rejoins depuis Toronto, territoire traditionnel de nombreuses nations, dont les Mississaugas de Credit, les Anishinabes, les Chippewas, les Haudenosaunee et les Wendats. Il compte aujourd’hui de nombreux peuples des Premières Nations, des Inuits et des Métis.
Je vous parlerai de trois priorités qui doivent être prises en compte par le gouvernement dans sa réponse à la COVID: la régularisation du statut d’immigration, l’accès aux prestations et aux aides pour tous, et la sélection de l’immigration.
La première est la régularisation du statut d’immigration, et je sais que vous avez entendu M. Hassan avant moi.
Le Canada a une population importante et croissante de personnes ayant un statut d’immigration précaire qui vivent et travaillent ici. Parmi ces personnes figurent des demandeurs d’asile haïtiens déboutés qui travaillent dans le secteur des soins de longue durée et d’autres services essentiels dans la région du Grand Montréal, ainsi que des sans-papiers qui travaillent dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire, dans le secteur des soins personnels, dans l’entretien, et plus encore. Ils paient des impôts et des droits, et certains paient même des impôts sur le revenu des particuliers, mais ils ne peuvent pas accéder aux prestations ou aux programmes gouvernementaux.
En raison de leur statut d’immigration précaire, les travailleurs sans papiers sont vulnérables à l’exploitation et aux abus. Étant donné la nature de nos programmes de travailleurs temporaires, la majorité de ces travailleurs est racialisée. En cette période de COVID, nombreux sont ceux qui travaillent dans des conditions dangereuses, car ils ont le sentiment de ne pouvoir rien dire ou faire de peur de perdre leur emploi. Il est clair qu’ils sont nécessaires parce que les employeurs continuent à les employer et leur versent très probablement des salaires inférieurs.
Les femmes sans papiers sont parmi les plus vulnérables à l’exploitation, notamment à la violence conjugale et à la violence exercée par un partenaire intime. Ces femmes sont également en majorité racialisées.
Nous pensons que cette période sans précédent offre au Canada l’occasion d’envisager sérieusement un vaste programme de régularisation du statut d’immigration afin de permettre aux personnes dont le statut d’immigration est précaire d’obtenir la résidence permanente. Le Canada dispose déjà d’au moins deux programmes pilotes de ce type: un dans la région du Grand Toronto qui s’adresse aux travailleurs du secteur de la construction, et un autre plus récent destiné à certains travailleurs agricoles.
Bien qu’il n’existe que des estimations du nombre de personnes dont le statut d’immigration est précaire, nous savons que ces chiffres ont augmenté au fil du temps, en particulier lorsque des changements ont été apportés aux différents programmes d’immigration et que des personnes sont passées à travers les mailles du filet. Un certain nombre de ces résidents vivent et travaillent au Canada, parfois depuis de nombreuses années. Ils sont déjà établis. Ils ont des réseaux et probablement même des membres de leur famille qui pourraient être résidents permanents ou citoyens canadiens.
Il y a des familles de citoyenneté mixte et des enfants canadiens dont les parents sont sans papiers. Ce n’est pas inhabituel au Canada. Ces enfants canadiens se voient souvent refuser des prestations.
Les demandeurs d’asile, les travailleurs migrants, les étudiants étrangers et les personnes sans papiers ou dont le statut est précaire présentent un bon bassin de candidats dans lequel puiser pour atteindre les objectifs d’immigration déjà fixés par le gouvernement, que nous savons que nous n’atteindrons pas cette année et très probablement pas l’année prochaine en raison de la pandémie.
Les personnes qui n’ont pas le statut de résident ou de citoyen à part entière sont des membres de nos communautés et contribuent à notre économie. Nous tirons bien plus de profit de leur présence ici qu’ils n’en retirent eux. Faisons ce qu’il faut, et laissons-les obtenir le statut de résident permanent à part entière.
L’autre question, qui est connexe, est l’accès aux prestations pour tous. Pour revenir à mon point précédent, les personnes ayant un statut d’immigration précaire paient des impôts et des droits, et certaines paient même un impôt sur le revenu des particuliers, mais elles ne peuvent pas accéder aux prestations ou aux programmes gouvernementaux. Les recherches montrent qu’elles investissent beaucoup plus dans notre économie qu’elles n’utilisent les services financés par l’État.
Pendant la crise de la COVID, de nombreuses personnes ont perdu leur emploi dans l’économie informelle, et donc leurs revenus. Ils ne bénéficient d’aucune aide financière ni d’aucun avantage. Récemment, l’OCASI, mon organisation, a collaboré avec certains de nos organismes membres et d’autres dans toute la province, à Toronto et dans le sud de l’Ontario en particulier. En travaillant avec deux fondations privées, nous avons pu obtenir un peu de financement pour apporter un soutien à ceux qui n’ont aucun revenu. C’était peu, alors vous pouvez imaginer que nous l’avons écoulé très rapidement.
Des organismes ont également collecté des fonds privés pour répondre au besoin urgent de soutien financier et de ressources de base qu’ils constatent, mais ces efforts sont de faible ampleur et très localisés. Ils n’atteignent pas tous ceux qui ont besoin d’aide et, bien sûr, ils ne sont pas suffisants.
Nous savons gré au gouvernement d’avoir donné un coup de pouce à la Prestation canadienne pour enfants. Cette mesure est bien accueillie par de nombreuses familles à faible revenu ayant des enfants mineurs, mais il s’agit d’une prestation qui n’est pas accessible aux personnes dont le statut d’immigration est précaire, même si elles ont des enfants nés au Canada, comme je l’ai mentionné précédemment.
Nous saluons également le complément ponctuel de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti. Toutefois, ces prestations ne sont pas accessibles aux résidents permanents qui vivent ici depuis moins de dix ans, même s’ils y vivent et y travaillent depuis, disons, neuf ans et demi. À l’heure actuelle, alors que même les membres de leur propre famille peuvent avoir subi une perte de revenus, il est possible qu’ils ne puissent littéralement compter sur personne pour les aider avec leur revenu.
Les temps sont très difficiles pour de nombreux résidents, mais surtout pour les personnes dont le statut d’immigration est précaire. Je vous invite à demander que les prestations et programmes gouvernementaux soient étendus à tous les résidents, quel que soit leur statut d’immigration, jusqu’à ce que nous puissions surmonter cette crise. Le gouvernement peut le faire en émettant un numéro d’assurance sociale temporaire que les gens peuvent utiliser pour faire leur demande. Nous en sortirons plus forts en tant que société et nous serons mieux placés pour commencer à reconstruire l’économie, en travaillant en sécurité et ensemble.
Mon dernier point est de vous exhorter à ouvrir la sélection de l’immigration économique. S’il y a une chose que nous avons apprise au cours de cette pandémie, c’est à quel point une grande partie de ce que nous considérons comme un travail essentiel est invisible. Nous ne le remarquons que lorsqu’il manque, lorsqu’il n’y a pas de nourriture sur nos tables, lorsqu’il n’y a personne pour prendre soin des Canadiens âgés dans les centres de soins de longue durée — pour cuisiner et nettoyer pour eux — lorsqu’il n’y a personne pour emballer et livrer la nourriture, les médicaments, le papier hygiénique et les autres fournitures essentielles dont nous avons besoin.
Cependant, ce ne sont pas les emplois de notre programme de sélection de l’immigration, qui est biaisé en faveur des travailleurs hautement qualifiés et des étudiants très instruits dans certains secteurs. Ne vous méprenez pas. Oui, nous avons besoin des personnes qui possèdent ces compétences. Nous avons également besoin de ceux qui cultivent et récoltent notre nourriture, travaillent dans nos usines de transformation de la viande et du poisson, construisent nos maisons, travaillent comme aide-soignants, nettoyeurs et ouvriers généraux, et travaillent dans nos centres d’appel. Tirons les leçons de l’expérience et ouvrons la sélection des immigrants pour qu’elle corresponde à la réalité de ce que nous voyons sur les marchés du travail partout au Canada.
En attendant, nous devrions commencer à donner aux personnes qui sont déjà ici la possibilité de devenir des résidents permanents si c’est ce qu’elles souhaitent faire. Certaines peuvent ne pas être intéressées. Elles peuvent préférer retourner dans leur pays d’origine, mais il y en a beaucoup d’autres qui veulent rester et qui ont déjà commencé à prendre les mesures nécessaires pour y parvenir en travaillant et en se construisant une vie ici.
Monsieur le président, pendant le temps qu’il me reste, je tiens à souligner les relations de travail positives qui se sont établies dans le secteur en collaboration avec le gouvernement fédéral. Je pense que cela souligne l’importance de l’établissement de relations cohérentes et du travail conjoint, comme c’est le cas au sein du Conseil national d’établissement et d’intégration de notre secteur.
Comme vous le savez, mon organisation, l’OCASI, chapeaute plus de 230 organismes de l’Ontario qui offrent des services et des programmes aux nouveaux arrivants au Canada. Le secteur — et je sais que je peux parler au nom de mes organisations-cadres sœurs dans tout le pays — a été soulagé et encouragé que le gouvernement fédéral l’ait déclaré comme un service essentiel. Nous avons deux raisons principales de considérer cette mesure comme une bonne politique. Le rôle principal des organismes d’aide aux immigrants et aux réfugiés est de soutenir les nouveaux arrivants dans le processus de construction d’une nouvelle vie au Canada.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Honorables membres du Comité, bonjour.
Je suis avec vous aujourd'hui pour vous parler de la situation des travailleurs des industries saisonnières, qui vivent dans des régions dépendantes des industries saisonnières.
Les industries saisonnières ont toujours joué un rôle important dans l'économie canadienne. Elles sont encore d'une importance centrale dans certaines régions du pays, où elles fournissent une grande partie des emplois disponibles. Malheureusement, du fait de cette dépendance aux industries saisonnières dans de plus en plus de régions, on ne peut plus vivre de la combinaison du travail saisonnier et du soutien de l'assurance-emploi.
Même si les travailleurs prennent tout le travail disponible en haute saison, ils ne sont pas capables de traverser la saison morte. Dans une bonne année, un travailleur saisonnier travaillera pendant 14 semaines, ou l'équivalent de 525 heures. Même dans les régions où le taux de chômage est de plus de 16 %, les travailleurs ne sont admissibles qu'à 33 semaines de soutien, ce qui leur laisse cinq semaines sans revenu. Le problème vient du fait que, durant la saison morte, il n'y a pas beaucoup d'emplois disponibles. Le manque de diversification économique nous rend dépendants de l'aide du programme d'assurance-emploi.
Le problème du trou noir, c'est-à-dire les semaines sans revenu, ajoute à la dévitalisation de nos régions. Les gens sont tannés de vivre toujours près de la limite, alors ils déménagent dans les centres urbains. La réponse du gouvernement, le projet pilote des cinq semaines supplémentaires, a donné un coup de pouce vraiment bienvenu, mais ce n'est pas suffisant. Comme je viens de le montrer, même dans les régions où le taux de chômage est le plus élevé, le trou noir persiste. Celui-ci a toujours existé, mais, pour plusieurs d'entre nous, il a empiré depuis quelques années. Cela vient du fait que plusieurs de nos communautés font partie des régions économiques de l'assurance-emploi où le taux de chômage est plus bas et ne reflète plus la réalité de nos économies locales.
Par exemple, chez nous, dans la région de Restigouche-Albert, nos petites communautés dépendent de l'industrie saisonnière et elles sont regroupées avec la banlieue de Moncton, ce qui diminue le taux de chômage. Pour prendre un autre exemple, la région de la Haute-Côte-Nord a un taux de chômage local qui dépasse de 9 % le taux de référence pour la région économique de l'assurance-emploi dont elle fait partie. Ainsi, pour être admissibles, les travailleurs doivent accumuler presque 700 heures, ce qui est très difficile. De plus, même s'ils étaient admissibles, ils n'auraient droit qu'à 18 semaines de soutien.
J'aimerais soulever un autre problème. Dans plusieurs de nos communautés, le taux de chômage baisse, mais ce n'est pas parce qu'il y a plus d'emplois. C'est parce que, en raison du vieillissement de la population, il y a moins de demandeurs d'emploi pour le même nombre d'emplois disponibles. C'est pourquoi nous pensons que le projet pilote doit être amélioré. Nous avons interpellé la ministre à ce sujet, mais, malheureusement, cela n'a pas été reconnu.
Voici ce que nous recommandons. Tout d'abord, nous voulons faire passer à 10 le nombre de semaines supplémentaires dans les régions désignées. Ces semaines supplémentaires seraient assujetties au nombre maximal existant de semaines de prestations, soit 45 et plus. Ensuite, il faut faciliter l'accès au projet pilote en changeant les critères d'admissibilité au statut de travailleur saisonnier. En ce moment, les règles sont compliquées et arbitraires. Elles font en sorte que de véritables travailleurs de l'industrie saisonnière n'y sont pas admissibles. Nous proposons que les employeurs indiquent sur le relevé d'emploi si une mise à pied est de nature saisonnière ou non, pour qu'il y ait moins de jugements portés sur ces personnes. En outre, nous proposons de revoir la carte des régions de l'assurance-emploi pour mieux refléter les conditions du marché du travail. La carte n'a pas été changée depuis 20 ans. Pouvez-vous imaginer cela? On a besoin d'enlever la poussière sur ce vieux meuble.
Je profite de l'occasion pour saluer les travailleurs de la Commission de l'assurance-emploi du Canada et tous les comités qui ont travaillé fort sur la question de l'assurance-emploi. Je remercie également le Conseil national des chômeurs et chômeuses, ou CNC, parce que les bureaux de l'assurance-emploi sont fermés et c'est nous qui devons accompagner ces gens.
Finalement, une autre avenue est possible. Il s'agit de changer les paramètres du programme d'assurance-emploi pour tous les Canadiens, selon la formule suivante: fixer à 420 le nombre d'heures requis pour y être admissible; accorder 35 ou même 40 semaines de prestations supplémentaires; et utiliser les 12 meilleures semaines pour établir le niveau des prestations. Une telle formule aurait l'avantage de la simplicité et de l'équité.
Pour ceux et celles qui s'inquiètent de l'abus possible de telles dispositions, je voudrais rappeler deux choses. Premièrement, à leur maximum, les prestations d'assurance-emploi ne donnent même pas l'équivalent du salaire minimum, qui est lui-même insuffisant pour franchir le seuil de faible revenu du gouvernement.
Deuxièmement, d'après le rapport de contrôle et d'évaluation du programme d'assurance-emploi, les chômeurs n'utilisent en moyenne que 20 semaines de prestations des 35 auxquelles ils ont droit. La grande majorité des Canadiens utilisent donc le programme de façon raisonnable. Par contre, 33 % des prestataires épuisent leurs prestations avant de pouvoir se trouver du travail. Ce sont ces gens-là qui nous inquiètent, et j'espère qu'ils vous inquiètent aussi.
En conclusion, je voudrais que vous reteniez deux éléments de mon témoignage. D'abord, nos régions ont besoin d'aide pour se revitaliser. Ensuite, l'assurance-emploi ne réglera pas tous les problèmes, c'est certain, mais elle joue un rôle essentiel. Il faut qu'elle soit adaptée pour mieux soutenir les travailleurs des industries de nos régions. En ce moment, je me dis qu'il y a un grave problème, parce que l'assurance-emploi n'a pas su répondre aux besoins des gens pendant la crise de la COVID-19. On a été obligé d'inventer un autre programme, soit la PCU.
Je vous remercie de m'avoir écouté.
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Nous étions heureux de l'annonce de la PCU, d'autant plus qu'elle était facile à obtenir et offrait une certaine souplesse aux gens qui y étaient admissibles. Nous étions aussi heureux de savoir que le gouvernement nous avait entendus et que de plus en plus d'étudiants étrangers étaient admissibles.
Ce qui nous préoccupe, c'est que bon nombre de personnes — celles dont le statut d'immigration est précaire ou qui sont sans papiers — n'ont pas eu accès à la PCU.
Comme vous le savez, nous avons parlé de la situation à tous les ministres que nous avons pu trouver. Nous leur avons parlé à maintes reprises des personnes qui sont au pays depuis de nombreuses années, qui sont passées à travers les mailles du filet pour une raison ou une autre et qui sont maintenant sans papiers. Ces personnes travaillent de façon officieuse. Elles ont perdu leur emploi et n'ont pas accès aux prestations provinciales ou au soutien du revenu comme la PCU.
Comme je l'ai fait valoir dans mon exposé, de nombreux organismes communautaires tentent d'amasser des fonds. L'OCASI travaille en collaboration avec deux fondations — l'Atkinson Foundation et le nouveau fonds Mariam Assefa, par l'entremise de World Education Services — pour aider certaines familles, surtout dans le Sud de l'Ontario et ici, à Toronto. Ces gens ont toujours besoin de soutien.
En ce qui a trait à la réponse rapide relative à la PCU, nous sommes satisfaits de voir que les critères ont été élargis afin de veiller à inclure les étudiants étrangers et que l'information a été communiquée de manière adéquate. Nous étions toutefois préoccupés par le manque d'information traduite. Les organismes ont redoublé d'efforts pour veiller à ce que le message se rende dans les collectivités, par l'entremise de divers médias dans la langue maternelle des membres de la collectivité, par exemple, ce qui a donné lieu à une participation très positive parmi les personnes admissibles. On se préoccupait toutefois des personnes qui continuent de passer à travers les mailles du filet parce qu'elles ne sont pas admissibles à l'aide sociale provinciale ni au soutien du revenu fédéral. Il faut faire quelque chose.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Bonjour, madame Douglas. Bonjour, monsieur Thibodeau.
Je vais m'adresser à vous, monsieur Thibodeau. Je vous remercie de votre témoignage. Vous l'avez dit d'entrée de jeu, les travailleurs de l'industrie saisonnière forment une partie importante de l'économie canadienne. Je vais vous poser une question avant de parler des projets pilotes et des façons de les améliorer.
On le sait, il y a eu une période d'incertitude à cause de la COVID-19. Les travailleurs de l'industrie saisonnière, qui étaient dans le trou noir, ne pouvaient pas espérer gagner un revenu qui leur permettrait d'être admissibles à une autre période. Ils ont donc eu accès à la Prestation canadienne d'urgence. Il a fallu travailler fort, mais, finalement, ils y ont eu accès.
Quelle solution entrevoyez-vous? Normalement, à ce moment-ci de l'année, les travailleurs font le plein en prévision de la prochaine saison. Nous voulons que la période durant laquelle les travailleurs n'ayant pas repris leur emploi et recevant la PCU puisse être calculée aux fins d'admissibilité à l'assurance-emploi, puisqu'ils étaient dans l'impossibilité de reprendre leur emploi.
Selon vous, est-ce une bonne solution? Envisagez-vous d'autres mesures?
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C'est une très bonne solution.
Il est certain que les travailleurs des industries saisonnières étaient dans un trou noir. Il existait un projet pilote du gouvernement provincial qui s'est terminé à la fin de mars. C'est à ce moment que j'ai reçu beaucoup d'appels, plus de 300 en une semaine. Les gens m'appelaient, parce que beaucoup étaient dans ce trou noir et n'avaient aucun revenu. Ces gens ont dû se tourner vers la Prestation canadienne d'urgence pour recevoir de l'aide. Ensuite, ils ont pu retourner travailler.
Je pense qu'il est très important que l'on se penche sur l'ensemble du système de l'assurance-emploi afin de pouvoir répondre aux besoins des travailleurs des industries saisonnières. Peut-on pêcher l'hiver? Peut-on vivre du tourisme l'hiver? Peut-on aller cueillir des bleuets l'hiver? Peut-on ramasser de la tourbe l'hiver? Peut-on aller couper du bois l'hiver? La réponse à chacune de ces questions est non.
Il faut éviter de juger les travailleurs des industries saisonnières: ces gens travaillent de 70 à 80 heures par semaine sur du ciment, à la chaleur, la sueur au front. Ce n'est pas parce qu'ils ne veulent pas travailler, mais c'est tout ce qu'ils ont.
Il ne faut pas oublier l'importance économique des travailleurs des industries saisonnières, sur lesquels reposent 60 % de l'économie du Canada. Aujourd'hui, des magasins sont ouverts. Qui les fait rouler? Ce sont les retraités et les travailleurs d'industries saisonnières.
Les travailleurs à temps plein — je n'ai rien contre eux — travaillent dans des bureaux jusqu'à 17 h ou plus tard. Entre 9 h et 17 h, qui fait vivre les entreprises? Ce sont les travailleurs d'industries saisonnières. Leur importance pour l'économie est très grande.
Il est important, sinon primordial, que tout le système d'assurance-emploi et toute la situation actuelle soient étudiés. La pandémie de la COVID-19 nous a mis le vent dans les voiles et donné la possibilité de changer les choses. Je pense qu'il faut changer les zones et les heures et se pencher sur les besoins de tous les travailleurs en matière d'assurance-emploi.
La pandémie de la COVID-19 nous envoie un message: il faut du changement, il faut dépoussiérer les meubles.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à remercier les deux témoins de leur apport.
Au Canada, beaucoup de secteurs d'activités dépendent beaucoup du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Dans une circonscription comme la mienne, dans la Saskatchewan rurale, j'en connais l'importance pour, particulièrement, les producteurs agricoles, pour qui le temps est d'une importance capitale. Nous savons également que les mortalités récentes de travailleurs agricoles migrants sont vraiment navrantes, et les comptes rendus sur leurs conditions de travail sont très préoccupants.
La réussite du programme est visiblement dans l'intérêt des travailleurs, des employeurs et de l'État. Je dirais que cette réussite doit se mesurer non seulement par l'accès rapide à des employés, mais, également, par les conditions d'hygiène et de sécurité en milieu de travail.
Madame Douglas, compte tenu de ces mesures, les employeurs des ouvriers étrangers temporaires, d'après vous, ont-ils les ressources convenables pour se conformer aux exigences fédérales et provinciales relatives à la COVID-19?