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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 008 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 4 mai 2020

[Énregistrement électronique]

(1710)

[Traduction]

    Merci, madame la greffière. La séance est ouverte.
    Bienvenue à la huitième réunion du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes. Conformément aux ordres de renvoi adoptés le 24 mars, le 11 avril et le 20 avril 2020, le Comité se réunit pour entendre des témoignages liés à l'étude de la réponse du gouvernement à la pandémie de COVID-19.
    La réunion d'aujourd'hui se tient par vidéoconférence, et les délibérations seront accessibles sur le site Web de la Chambre des communes. C'est toujours la personne qui parle qui apparaît à l'écran, plutôt que l'ensemble du Comité. Pour faciliter le travail de nos interprètes et garantir le bon déroulement de la réunion, j'aimerais énoncer quelques règles à suivre.
    Premièrement, l'interprétation de cette vidéoconférence fonctionnera essentiellement comme pour une réunion normale du Comité. Au bas de l'écran, vous avez le choix entre « parquet », « anglais » ou « français ». Pour résoudre les problèmes de son, veuillez vous assurer d'utiliser le canal anglais quand vous parlez en anglais, et le canal français quand vous parlez en français. Je vais demander aux témoins de prêter une attention particulière à cela. Si vous avez l'intention de passer d'une langue à l'autre, vous devez également changer de canal pour choisir celui qui correspond à la langue que vous employez.
    Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je prononce votre nom. Quand vous êtes prêt à parler, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Je vous rappelle que tous les commentaires des députés et des témoins doivent être adressés au président.
    La règle est la même pour les rappels au Règlement. Mesdames et messieurs les députés, si vous voulez invoquer le Règlement, veuillez le faire savoir en activant votre micro et en vous identifiant. Si vous désirez réagir à un rappel au Règlement qui a été soulevé par quelqu'un d'autre, utilisez l'icône de main levée.
    Veuillez parler lentement et clairement. Quand vous ne parlez pas, votre micro doit être désactivé. Comme vous l'avez entendu pendant le test de son, l'utilisation du casque-micro est fortement encouragée. Si votre microphone pend de votre casque d'écoute, veillez à ce qu'il ne frotte pas sur votre chemise pendant que vous parlez.
    En cas de problème technique, lié par exemple à l'interprétation ou à une déconnexion accidentelle, veuillez en informer immédiatement le président ou la greffière, et l'équipe technique travaillera à résoudre le problème. Veuillez noter que nous pourrions devoir suspendre la séance si cela se produit, car nous devons veiller à ce que tous les députés et témoins puissent participer pleinement.
    Avant de commencer, je vais vous demander à tous de cliquer en haut à droite de votre écran afin d'utiliser l'Affichage galerie. Vous pourrez ainsi voir tous les participants dans une grille à l'écran. Tout le monde peut voir tout le monde, de cette façon.
    Cela étant dit, j'aimerais maintenant remercier les témoins d'être avec nous aujourd'hui. Nous avons Kent Forth, président de Foreign Agricultural Resource Management Services, ou F.A.R.M.S. De l'organisation International Longevity Centre Canada, nous entendrons Margaret Gillis, présidente, et Kiran Rabheru, président du conseil d'administration. Nous avons également Juliana Dalley, avocate-conseil à l'interne du Migrant Workers Centre.
    Si j'ai bien compris, nos témoins ont des déclarations liminaires à prononcer.
    Monsieur Forth, la parole est à vous. Vous avez 10 minutes.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président, avant que nous commencions — ce ne serait pas une de nos réunions si je ne commençais pas par un rappel au Règlement. J'aimerais simplement souligner rapidement que même si nous comprenons que la ministre des Aînés est très occupée et que nous lui savons gré de sa correspondance, nous sommes bien sûr très déçus qu'elle ne puisse être présente aujourd'hui. Tous les autres ministres ont comparu devant nous, et nous sommes impatients de la voir également. J'aimerais donc que nous continuions d'essayer de la faire comparaître devant nous dès que possible.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Nous allons le faire. On nous a assuré que votre déception ne durerait pas encore longtemps. Nous allons donc persister.
    À cet égard, la Chambre des communes nous a demandé, à titre d'information et, je pense bien, en guise de rappel au Règlement, de répondre le plus rapidement possible. Ce faisant, nous devons être au Cabinet et être au-devant des processus d'élaboration de politiques à titre de secrétaires parlementaires, ainsi que de ministre du Cabinet, et c'est ce qui retarde sa comparution devant le Comité. Elle essaie de répondre à la demande de la Chambre visant la préparation du projet de loi et du dossier pour les aînés le plus rapidement possible, et elle ne veut pas manquer une seule autre journée.
    Elle comparaîtra dès qu'elle le peut, mais elle prend aussi très au sérieux la responsabilité que lui a confiée la Chambre des communes.
    Merci.
    Monsieur Forth, vous avez la parole pour 10 minutes. Nous vous écoutons.
    Vous devez activer votre microphone, monsieur Forth.
    Nous allons passer à Mme Gillis, de l'International Longevity Centre Canada, puis nous reviendrons à M. Forth quand les problèmes techniques seront résolus.
    Madame Gillis, vous avez 10 minutes. Allez-y.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler.
    Je suis Margaret Gillis, présidente de l'International Longevity Centre Canada, que je vais appeler ILC Canada. Notre organisation défend les droits des personnes âgées. Elle fait partie d'une alliance mondiale qui englobe 16 pays et est associée à l'Institut de recherche LIFE de l'Université d'Ottawa.
    Je suis accompagnée du Dr Kiran Rabheru, président du conseil d'administration de l'ILC Canada. Il est professeur de psychiatrie à l'Université d'Ottawa et gérontopsychiatre à l'Hôpital d'Ottawa.
    Nous sommes ici aujourd'hui pour étudier la réponse de notre gouvernement à la pandémie de COVID-19. Comme de nombreux Canadiens, je suis reconnaissante de la collaboration sans précédent que nous avons constatée entre les divers partis, ici au Parlement, ainsi qu'entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Tous ont mis les besoins des Canadiens au premier plan et ont mis de côté la politique partisane et les questions de compétence. Nous sommes également reconnaissants au Comité HUMA de s'arrêter à réfléchir et à obtenir des perspectives initiales de la part des Canadiens concernant la réponse à la crise de la COVID-19. Il s'agit cependant pour nous d'un premier pas dans ce qui devrait être un long processus.
    Nous savons tous que les personnes âgées forment le groupe le plus gravement touché à l'échelle mondiale, dans cette crise. Nous savons que les droits et les contributions des personnes âgées sont souvent négligés, aussi bien en politique qu'en pratique. Le Canada doit jouer un rôle de premier plan pour ce qui est de rectifier le traitement horrible subi par les aînés pendant cette pandémie, entre autres par le parrainage de la Convention des Nations unies sur les droits des personnes âgées, qui contribuerait à garantir que les droits des personnes âgées ne sont pas ignorés.
    Il est absolument essentiel d'être vigilants en ce moment, mais il est prématuré de croire que nous allons obtenir une évaluation complète en nous concentrant étroitement sur la réponse du Canada alors que nous sommes en pleine crise. Il faudra un changement profond et durable, et c'est probablement comme essayer de bâtir un avion en plein vol. Nous devons donc maintenir cet effort. Nous aurons besoin d'un processus complet pour cerner les leçons apprises, et ce processus doit comporter l'examen de tous les aspects de la crise de la COVID-19. Nous parlons ici de prévention, de préparation, de réponse — là où nous en sommes maintenant — et de reprise.
    Les défis auxquels nous faisons face, comme le démontrent les problèmes systémiques dans les établissements de soins de longue durée, l'augmentation de la maltraitance des aînés et l'âgisme condescendant manifesté envers les personnes âgées dans la presse et dans notre société, sont devenus plus visibles et urgents durant la pandémie. Nous devons faire face à cette réalité sans précédent et faire avec détermination ce qu'il faut pour soutenir les droits de la personne. Nous devons assumer conjointement la responsabilité des résultats pour les Canadiens. Plutôt que de chercher des coupables, nous devons tous assumer une part de la responsabilité et agir rapidement afin de résoudre la situation.
    Nous avons trouvé encourageant d'entendre le premier ministre Trudeau dire que: « nous devons faire mieux, car nous manquons à nos responsabilités envers nos parents, nos grands-parents, nos aînés — cette grande génération qui a bâti notre pays; nous devons prendre soin d'eux convenablement ».
    Nous devons faire mieux, et nous devons trouver une façon de rétablir et de renforcer les valeurs canadiennes. Il est temps de faire preuve d'audace. Il est temps de nous ouvrir à la nouvelle ère après COVID-19. Les Canadiens veulent des réponses. Les Canadiens ont besoin de leadership, et ils doivent demander des comptes en ce qui concerne les aînés. Le temps est critique, et tous les éléments sont favorables au changement que le Canada doit opérer.
    J'aimerais utiliser la discussion d'aujourd'hui à promouvoir les façons dont nous pouvons raffermir les droits des personnes âgées de manière à garantir que leur vie, leur santé et leur bien-être ne sont pas négligés pendant et après la pandémie.
    Comme je l'ai mentionné, il n'existe pas de convention internationale complète et obligatoire visant les droits des personnes âgées comme c'est le cas pour les femmes, les enfants et les personnes handicapées. L'ILC croit fermement qu'une convention internationale obligatoire assurerait une meilleure protection aux personnes âgées, protection qui a tant fait défaut pendant la pandémie. Nous devrions discuter de la façon dont une convention serait utile en examinant deux droits importants en guise d'exemple: le droit à la santé et le droit à des soins de longue durée abordables et accessibles.
    Pensez un peu à ce que nous avons vu au cours des dernières semaines: des personnes âgées qu'on a laissées mourir dans leur lit sans aide médicale, atteintes d'un virus provoquant d'énormes souffrances, ou des personnes âgées mortes de déshydratation ou de malnutrition, ou laissées dans leur lit souillé. Comment quelque chose d'aussi cruel et impensable peut-il se produire au Canada?
(1715)
    Qui peut oublier les images prises devant des résidences de soins de longue durée, où l'on voit des membres des familles des résidents qui cherchent à voir la personne chère dont ils n'ont pas eu de nouvelles depuis des jours, tout cela pour apprendre qu'on l'a laissée mourir, sans aide, de la façon la plus horrible?
    Le Canada est-il un pays qui laisse mourir ses citoyens les plus vulnérables, un pays qui n'a plus qu'un système si incapable de faire face à une crise qu'il est réduit à compter sur l'armée pour sauver les personnes vulnérables? Où sont les droits de ces personnes?
    Demandez-vous également si nous laisserions une telle chose se produire dans nos écoles, dans nos garderies, dans nos hôpitaux ou dans n'importe quelle autre institution. Il y a là une leçon très fondamentale, et c'est que les droits de la personne ne peuvent pas être négligés dans le contexte d'une pandémie ni en aucun autre temps. Les droits de la personne doivent être à l'avant-plan de tout ce que nous faisons.
    Selon les plus récentes données, 79 % des décès au Canada pendant la pandémie sont survenus dans des établissements de soins de longue durée. Il faut le reconnaître: c'est une violation des droits de la personne. Et c'est le reflet d'un âgisme systémique et d'une dévaluation de l'importance des contributions des Canadiens âgés. Nous pouvons tous affirmer que nous sommes tristes des pertes de vies, mais peu d'entre nous peuvent se dire surpris de ce qui s'est passé.
    Il faut vivre sous une roche pour manquer les multiples rapports de maltraitance dans les établissements de soins de longue durée: la femme aveugle de 94 ans, enfermée pendant deux semaines dans une chambre infestée de punaises de lit; le meurtre révoltant de huit résidents en Ontario, situation qui aurait pu se répéter si la meurtrière n'avait rien dit à son pasteur; ou les cas multiples de suffocation, de tabassage et de négligence qui ont parfois mené à des décès. Toutes ces violations manifestes des droits de la personne se sont produites avant la pandémie.
    Le traitement des personnes âgées au Canada n'est rien de moins qu'un échec sur le plan des droits de la personne, et cela se passe chez nous. Cela crève le cœur de voir comment les travailleuses de première ligne se débattent dans les situations les plus impossibles. Nous devons prendre des mesures maintenant pour veiller à ce que cela ne se produise plus jamais.
    L'ILC Canada encourage le gouvernement canadien et tous les parlementaires à travailler ensemble à la protection des droits des citoyens âgés en pavant la voie à une convention sur les droits des personnes âgées. Une telle approche contribuerait par beaucoup au rétablissement de notre réputation en tant que pays qui accorde une grande valeur à la vie de tous les citoyens. Pourquoi? Parce que la convention donnerait les personnes âgées comme étant détenteurs de droits. Elle contribuerait à la lutte contre l'âgisme. Elle permettrait au public de tenir les gouvernements responsables des violations des droits de la personne en lui donnant accès au Conseil des droits de l'homme des Nations unies, et elle servirait à éduquer le public ainsi qu'à habiliter les personnes âgées.
    Une convention aiderait aussi à promouvoir et à protéger les droits et la dignité des personnes âgées. La pandémie a des répercussions qui font ressortir sans équivoque que les politiques et les mécanismes actuels sont insuffisants du point de vue des droits de la personne. Tout cela a eu des conséquences graves sur les vies des personnes âgées.
    Nous avons tous observé les changements d'attitude à l'égard des personnes handicapées et les changements dans les mesures prises par les pays dans le sillage de l'adoption de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, que le Comité connaît probablement très bien, je le présume. Nous avons la certitude qu'une convention des Nations unies sur les droits des personnes âgées aurait la même influence et les mêmes effets positifs. Nous invitons le Canada à jouer le rôle prépondérant à l'égard d'une telle convention afin de favoriser une meilleure compréhension de la portée et du sens des droits de la personne pour tous.
    Cette initiative cadrerait avec la longue et fière tradition du Canada en ce qui concerne la protection des droits aux Nations unies. L'ILC Canada est à l'avant-garde du mouvement en faveur d'une convention des Nations unies. Depuis six ans, nous travaillons activement au sein du Groupe de travail des Nations unies à composition non limitée sur le vieillissement. Ce faisant, nous avons continuellement encouragé le Canada à agir avec détermination. En 2018, l'ILC Canada a déposé aux Nations unies une pétition demandant que le Canada dirige et appuie la convention. Nous avons été très encouragés quand le délégué du Canada aux Nations unies a annoncé que la porte était ouverte au soutien du Canada, mais malheureusement, rien ne s'est passé depuis. La porte est ouverte, et nous espérons que vous allez la franchir.
    Depuis le début de la pandémie, nous avons lancé une campagne de lettre adressée aux ministres Champagne et Schulte pour demander au Canada qu'il dirige et appuie la convention. Notre lettre a été déposée au Comité aujourd'hui. Nous établissons avec succès un dialogue avec d'autres groupes. Nous misons sur la montée du soutien public et politique, notamment celui d'éminents Canadiens comme le major général Lewis MacKenzie, qui a signé une lettre d'appui que nous avons également fournie au Comité.
(1720)
    Nous croyons que cette occasion que nous avons eue de vous parler aujourd'hui est un signe clair de l'ouverture aux changements nécessaires pour améliorer les vies des Canadiens âgés. Nous espérons sincèrement et résolument que vous allez soutenir notre appel à défendre les droits des Canadiens âgés.
    Pour terminer, mesdames et messieurs les honorables membres du Comité HUMA, j'aimerais vous laisser sur trois points à retenir.
    Le premier est que le Canada doit grandir et apprendre du traitement des aînés dans le contexte de cette pandémie. Nous devons apporter des changements profonds et majeurs à la façon dont nous les traitons, car les droits de la personne n'ont pas de date de péremption. Ils commencent à la naissance et se terminent à la mort.
    Le deuxième est que le Canada doit diriger l'élaboration de la Convention des Nations unies qui vise les personnes âgées. Cette convention traite des droits fondamentaux de la personne. Elle correspond parfaitement à nos valeurs canadiennes, qui nous tiennent à cœur.
    Le troisième est que le temps presse. Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre avant de faire ce qu'il faut pour les droits des Canadiens âgés. Nous devons agir maintenant.
    Merci.
    Merci, madame Gillis.
    Monsieur Forth, vous avez la parole pour 10 minutes. Nous vous écoutons.
(1725)
    Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité des ressources humaines, de m'avoir demandé de comparaître aujourd'hui.
    Je suis Ken Forth. Je suis un maraîcher de Hamilton, en Ontario. Notre famille pratique l'agriculture depuis de nombreuses générations. À l'heure actuelle, c'est la famille de mon fils et moi.
    Je suis également le président du programme F.A.R.M.S., Foreign Agricultural Resource Management Services. Nous nous occupons de l'administration et de la logistique pour le déplacement de 25 000 à 30 000 travailleurs vers l'Ontario, le Canada atlantique et le Manitoba.
    Le secteur de la production des fruits et légumes est un secteur où il faut mettre la main à la pâte. Par exemple, nous employons des travailleurs depuis plus de 100 ans dans nos fermes. Notre ferme fait affaire avec le PTAS, le Programme des travailleurs agricoles saisonniers, depuis 50 ans, et fait appel à des travailleurs de la Jamaïque.
    Les employés qui travaillent à la ferme comptent beaucoup pour nous; ils sont comme des membres de la famille. Ils viennent ici pour venir en aide aux agriculteurs et, par le fait même, pour aider le Canada à produire des aliments. Leur travail ici leur donne un niveau de vie meilleur dans leur pays, dont une éducation pour leurs enfants.
    Le virus qui sévit dans le monde entier est très préoccupant pour tout le monde. Je peux vous assurer que tous les agriculteurs prennent la situation très au sérieux. On assure une grande surveillance dans le cadre de notre programme en ce qui concerne le virus, y compris Service Canada, les ministères provinciaux du Travail, les vrais experts, les autorités locales en santé publique et les ministères de la Santé.
    EDSC a présenté un protocole juste après l'annonce du 20 avril, et le protocole était satisfaisant. Il était très logique et fonctionnait pour tout le monde. La majorité d'entre nous ont fait l'objet d'inspections à de nombreuses reprises cette saison par l'entremise des divers protocoles en place. Nos employés sont ravis de ce qu'ils voient et entendent et de ce que nous faisons dans nos fermes.
    Je tiens à être clair: nous tenons absolument à ce que nos employés étrangers ou canadiens demeurent en sécurité. Comment pourrait-il en être autrement? Nous isolons les nouveaux travailleurs temporaires pendant 14 jours. Lorsque nous travaillons, nous gardons nos distances le plus possible. Lorsque c'est impossible, les travailleurs portent des masques, des lunettes ou des écrans faciaux. Les agriculteurs ont pris des mesures exceptionnelles, sans oublier qu'ils ont dépensé des milliers de dollars, pour rassurer les travailleurs que leur lieu de travail est sécuritaire. Les agriculteurs font preuve d'une grande ingéniosité et vont souvent au-delà de ce qui est nécessaire. Par exemple, de nombreux agriculteurs ont installé des barrières dans les dortoirs et sur l'équipement agricole pour assurer un milieu de travail sécuritaire.
    Pour terminer, le gouvernement du Canada, les provinces et les autorités sanitaires locales devraient tous être fiers du protocole qu'ils ont mis en place en très peu de temps, et la communauté agricole y a répondu. Mais il y a une dernière mise en garde: la situation est très paralysante pour les agriculteurs. Nous avons fait ce qu'on exigeait de nous et bien plus, et si nous pensons que nous pouvons encore faire mieux, nous le ferons. Cinq organismes surveillent nos exploitations à l'heure actuelle. Une surveillance plus rigoureuse et des mesures additionnelles feront fuir les agriculteurs de cette industrie — certains l'ont déjà quittée — et rendront leur tâche impossible à accomplir: la tâche de produire des aliments au Canada.
    Par exemple, nous avons vu le gouvernement fédéral défendre les propriétaires et les sociétés multinationales qui rapportent des milliards de dollars. Nous aimerions qu'ils défendent les intérêts des agriculteurs de temps à autre, et nous pensons que nous avons besoin de ce soutien maintenant. Nous sommes tous en faveur des méthodes de sécurité qu'ils ont mises en place pour isoler nos travailleurs. Par exemple, nos travailleurs ne quittent jamais la ferme et ne veulent pas quitter la ferme non plus. Ils me disent qu'ils viennent ici pour travailler. Ils ne veulent pas être infectés en allant au centre commercial ou ailleurs. Ils font leurs commandes à l'épicerie du coin, qui prépare leurs commandes chaque vendredi. Nous allons les ramasser et nous leur livrons, et ils nous en sont très reconnaissants. Nous croyons qu'ils sont très en sécurité et que les agriculteurs font un meilleur travail que ce que l'on pense.
    C'est tout pour ma déclaration, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Forth, et merci d'avoir été aussi concis.
    Nous allons maintenant entendre, du Migrant Workers Centre, Mme Juliana Dalley.
    Vous avez la parole pour 10 minutes, madame Dalley. On vous écoute.
    Merci, monsieur le président, et merci au Comité de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.
    Je suis Juliana Dalley. Je suis avocate-conseil au Migrant Workers Centre. Je me joins à vous à partir de Vancouver, sur le territoire non cédé du peuple salish du littoral. Je vais vous parler aujourd'hui des répercussions de la crise de la COVID-19 sur certains des travailleurs les plus vulnérables au Canada — les travailleurs migrants et sans papiers.
    Je représente le Migrant Workers Centre, un organisme sans but lucratif à Vancouver qui se consacre à offrir des services d'aide juridique aux travailleurs migrants. Établi en 1986, le MWC facilite l'accès à la justice pour les travailleurs migrants. Nous offrons des conseils et des services de représentation gratuits à plus d'un millier de travailleurs migrants chaque année. Nous offrons aussi des services de vulgarisation juridique, effectuons des réformes des lois et des politiques et présentons en justice des causes types.
    Des centaines de milliers de travailleurs migrants et sans papiers au pays travaillent dans nos épiceries et comme préposés au nettoyage, préposés aux soins, camionneurs, travailleurs agricoles, et j'en passe. Ces travailleurs sont aux premières lignes de la pandémie de la COVID-19. Les travailleurs migrants cultivent les aliments que nous consommons et s'assurent qu'ils se rendent sur les tablettes. Ils construisent nos maisons, nos écoles et nos lieux de travail et gardent ces espaces propres et sécuritaires. Ils prennent soin de nos enfants, des aînés, des malades et des personnes handicapées. Ils font partie des héros que nous applaudissons chaque jour.
    La crise de la COVID-19 a montré à quel point ces héros de première ligne sont vraiment essentiels. Elle a montré à quel point notre société dépend des travailleurs migrants pour occuper ces emplois peu rémunérés. Or, les travailleurs migrants sont particulièrement vulnérables aux abus et à l'exploitation dans le cadre de leur travail. Bon nombre d'entre eux n'ont aucun moyen pour devenir résidents permanents du Canada, puisque leur travail n'est pas considéré par le gouvernement comme étant un travail suffisamment qualifié.
    La structure du Programme des travailleurs étrangers temporaires rend les travailleurs migrants vulnérables aux abus. Il est important de comprendre les répercussions de la COVID-19 sur les travailleurs migrants.
    Pour demander un permis de travail, un travailleur étranger temporaire doit d'abord avoir une offre d'emploi, un contrat de travail et une étude d'impact sur le marché du travail, ou EIMT, d'un employeur canadien. Ce processus peut parfois prendre jusqu'à un an. Les travailleurs doivent ensuite présenter une demande de permis de travail d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ou IRCC. Le permis de travail qu'ils reçoivent les autorise seulement à travailler pour cet employeur, à ce poste, à cet endroit. Si le travailleur perd son emploi, il doit recommencer le processus au complet.
    Il est important de noter que les travailleurs migrants ne peuvent pas travailler pour subvenir aux besoins de leur famille et à leurs propres besoins pendant qu'ils attendent l'approbation d'un nouveau permis de travail. S'ils commencent à travailler avant que leur permis de travail soit approuvé, ils risquent d'être arrêtés, détenus et expulsés du Canada. Ce système rend les travailleurs migrants particulièrement vulnérables. Ils ne peuvent pas dénoncer les abus dans le lieu de travail ou des conditions de travail dangereuses par crainte de perdre leur emploi.
    Les travailleurs sans papiers sont confrontés à des défis semblables. Bon nombre d'entre eux contribuent à l'économie canadienne depuis des années, comblent les pénuries de main-d’œuvre en occupant des emplois peu rémunérés et dangereux que les Canadiens ne veulent pas occuper. Or, leur statut d'immigrant expiré les rend vulnérables aux abus. De plus, ils ont un accès limité, voire aucun accès, aux indemnités pour accidents du travail ou aux soins de santé financés par l'État. La pandémie de la COVID-19 n'a fait qu'exacerber ces vulnérabilités. Au Migrant Workers Centre, nous voyons que nos clients sont touchés par la COVID-19 de bien des façons.
    Pour les travailleurs des services essentiels, y compris les travailleurs agricoles, ils sont très à risque d'être exposés à la COVID-19. Nous avons tous vu les nouvelles tragiques d'éclosions à des fermes, pépinières et usines de transformation de la viande. Bon nombre de ces travailleurs sont des travailleurs migrants ou sans papiers. Ils mettent leur vie en danger pour que nous puissions manger. Bon nombre d'entre eux ont peur d'aller travailler, mais ils ne peuvent pas parler.
    Pour les travailleurs agricoles plus particulièrement, bon nombre d'entre eux travaillent dans des conditions que peu de Canadiens toléreraient. Les lignes directrices publiées par Emploi et Développement social Canada pour employer des travailleurs migrants durant la crise de la COVID-19 ne sont pas suffisantes pour protéger ces travailleurs vulnérables, à notre avis. Je vais revenir sur ce point plus tard dans mes remarques.
    Par ailleurs, de nombreux travailleurs migrants sont à risque de devenir des travailleurs sans papiers en raison de la crise de la COVID-19. Plus de travailleurs étrangers temporaires perdent leur emploi, et ils ne peuvent pas travailler parce qu'ils ont un permis de travail pour un employeur précis. Ces gens veulent travailler. Nous avons des clients qui sont des travailleurs de la santé et qui veulent être aux premières lignes de cette crise, mais ils ne le peuvent pas. Nous avons des clients qui veulent travailler dans les fermes, mais ne peuvent pas le faire parce qu'ils n'ont pas les autorisations de travailler adéquates.
    Les travailleurs étrangers temporaires qui perdent leur emploi ne peuvent pas renouveler leur permis de travail facilement parce qu'ils ne peuvent pas obtenir une EIMT. Là encore, le processus pour faire une demande d'EIMT est complexe, long et coûteux, et de nombreux employeurs ne sont pas disposés à franchir les étapes de ce processus, et plus particulièrement à la lumière de l'incertitude à laquelle nous sommes confrontés en raison de la COVID-19.
(1730)
    Si un travailleur migrant a perdu son emploi à cause de la COVID-19 et a encore un statut, il peut demander la Prestation canadienne d'urgence, mais si son permis de travail arrive à expiration et qu'il perd son statut au Canada, il n'est pas admissible à la PCU. S'il perd son statut, il se retrouve dans une situation impossible. Il ne peut pas travailler pour subvenir aux besoins de sa famille. Il ne peut pas présenter une demande d'assurance-emploi sans statut. Il ne peut pas demander la PCU sans numéro d'assurance sociale, et il ne peut pas quitter le Canada en raison des restrictions de voyage et des frontières fermées. Des travailleurs dans cette situation se sont adressés à notre bureau, et nous avons dû leur dire qu'il n'y a aucune option juridique viable pour leur permettre de travailler, de renouveler leur statut ou de présenter une demande de soutien de revenu.
    Nous estimons qu'il y a des dizaines de milliers de travailleurs migrants au Canada dont le permis de travail est venu à expiration depuis le début de la crise de la COVID-19. Ces travailleurs perdront leur statut pour des raisons indépendantes de leur volonté, si aucun changement n'est apporté. Cela aura pour effet que de nombreuses personnes deviendront sans papiers. Par ailleurs, nous savons que les employeurs, surtout dans la chaîne d'approvisionnement alimentaire, sont confrontés à des pénuries de main-d’œuvre à cause de la crise. Il y a des solutions. Le gouvernement du Canada a les outils pour venir en aide à des centaines de milliers de travailleurs migrants au Canada.
    Je vais maintenant formuler nos recommandations.
    Premièrement, délivrez des permis de travail ouverts aux travailleurs durant la crise de la COVID-19. L'octroi de permis de travail ouverts ou sans restrictions permettra aux travailleurs de continuer de travailler ou de retourner travailler dans les postes disponibles et de maintenir leur statut au Canada durant la pandémie de la COVID-19. IRCC devrait automatiquement renouveler les permis de travail et accorder un permis de travail ouvert durant cette période ou redonner aux travailleurs un permis de travail ouvert s'ils ont déjà perdu leur statut.
    Les travailleurs qui ont un statut sûr peuvent avoir moins peur de signaler s'ils présentent des symptômes ou de dénoncer des préoccupations en matière de santé et de sécurité dans leur lieu de travail. Cela réduira la propagation de la COVID-19. En outre, nous savons que les employeurs ont désespérément besoin de travailleurs. Cependant, moins de travailleurs arrivent au Canada. L'octroi de permis de travail ouverts permettra aux travailleurs migrants qui sont déjà ici au Canada et qui ont peut-être perdu leur emploi de combler ces pénuries de main-d’œuvre rapidement et efficacement. Ce sera bénéfique pour tout le monde.
    Deuxièmement, nous recommandons qu'EDSC améliore son système d'observation pour prévenir les abus envers les travailleurs migrants à faible revenu et rétablir les inspections en personne. EDSC a le mandat de s'assurer que les employeurs respectent les règlements qui leur sont imposés pour embaucher des travailleurs migrants. Cependant, EDSC a déclaré qu'il ne fera pas d'inspections en personne en raison de la COVID-19. À notre avis, c'est inacceptable.
    Il est possible et nécessaire qu'EDSC réalise des inspections en personne et sans préavis en prenant des précautions de sécurité appropriées. C'est une question de vie ou de mort pour les travailleurs. EDSC a le devoir de s'assurer que les travailleurs sont en sécurité durant cette pandémie. Sans inspection en personne pour veiller à ce que les employeurs respectent les lignes directrices pour embaucher des travailleurs étrangers temporaires durant la crise de la COVID-19, nous serons aux prises avec une crise de plus en plus grave en matière de santé publique. Nous avons vu des dizaines de cas à notre bureau avant la pandémie où des travailleurs ont courageusement décidé de dénoncer des abus à EDSC, mais leurs plaintes n'ont mené nulle part. Cela ne peut pas se produire durant cette crise. Le Migrant Workers Centre a appuyé des recommandations pour apporter des améliorations aux lignes directrices d'EDSC, et nous serions ravis de les communiquer au Comité.
    Troisièmement, nous recommandons qu'un nouveau programme de résidence permanente pour les travailleurs migrants et sans papiers soit mis sur pied. Bien qu'ils effectuent un travail essentiel sur lequel nous comptons, de nombreux travailleurs migrants tels que les travailleurs agricoles saisonniers, préposés au nettoyage ou commis d'épicerie, n'ont aucun moyen pour devenir résidents permanents du Canada. Ils devraient être autorisés à présenter une demande de résidence permanente. S'ils ont perdu leur statut, ils devraient pouvoir le régulariser en demandant un permis de travail ouvert. Depuis trop longtemps, le Canada dépend des travailleurs migrants comme une main-d’œuvre jetable. Cela doit changer. Si les travailleurs migrants sont assez bons pour travailler au Canada, ils sont assez bons pour rester comme résidents permanents. Le MWC a écrit au premier ministre Trudeau et au ministre de l'Immigration Mendicino pour exhorter le gouvernement à apporter ces changements.
    Enfin, nous recommandons que les travailleurs sans papiers soient autorisés à avoir accès à la PCU. Durant la pandémie, tous les travailleurs au Canada devraient avoir le même accès à la PCU. La PCU devrait être accessible aux gens dont le numéro d'assurance sociale a expiré, ou le gouvernement peut délivrer un NAS temporaire pour les personnes qui en font la demande en suspendant l'exigence de prouver son statut au Canada pour présenter une demande. Ce faisant, les travailleurs sans papiers pourront accéder au soutien financier dont ils ont besoin et qu'ils méritent durant cette crise.
    Ce sont nos recommandations pour le gouvernement canadien pour qu'il fasse preuve de respect et de gratitude à l'égard des travailleurs migrants et sans papiers durant cette crise.
    Merci.
(1735)
    Merci, madame Dalley. Vous avez respecté scrupuleusement votre temps.
    Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant avec les conservateurs.
    Allez-y, madame Kusie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Gillis, merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd'hui. J'ai été sidérée par l'article paru dans le Globe and Mail et par votre déclaration selon laquelle « les droits de la personne n'ont pas une date de péremption ». Malheureusement, c'est la deuxième fois que nous soulevons la question des droits de la personne dans la gestion de cette pandémie par le gouvernement libéral.
    Ce que les libéraux ont souvent essayé de faire, c'est de se décharger de certains dossiers tels que les établissements de soins de longue durée sur leurs homologues provinciaux, mais vous avez mentionné dans les médias que le manque de normes uniformes pour les soins aux aînés au niveau fédéral rend les Canadiens âgés vulnérables à la maltraitance et à des tragédies comme la pandémie de la COVID-19. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet et nous expliquer comment vous souhaitez que le gouvernement fédéral assure une surveillance additionnelle?
(1740)
    Pour commencer, le problème dans les soins de longue durée est l'exemple parfait où il faut du leadership fédéral ainsi qu'une collaboration avec les provinces et les territoires. Il faudra apporter d'importants changements aux soins de longue durée à la suite de ce que nous avons vu durant la pandémie. Il est très important qu'une entité soit mise sur pied rapidement, peut-être un comité composé de représentants fédéraux-provinciaux-territoriaux, ainsi que d'experts dans le secteur des soins de longue durée. Nous devons vraiment étudier la situation de A à Z. Il ne faut pas se contenter d'examiner les soins de longue durée.
    Nous devons examiner le continuum complet des soins, en commençant avec la question des soins à domicile et leurs répercussions sur les soins de longue durée et les systèmes hospitaliers. Tous ces éléments sont interreliés, et si nous ne les examinons pas ensemble, nous ne trouverons pas une solution adéquate. Il y a notamment le rôle fédéral en lien avec la Loi canadienne sur la santé, et une partie de ce travail consisterait probablement à examiner la façon dont nous pouvons accroître notre efficacité, même par rapport au financement.
    C'est un secteur très important où nous devons tous travailler ensemble dans tous les ordres de gouvernement.
    Merci de ces remarques.
    À ce sujet, d'après vous, a-t-on fait suffisamment de dépistage de la COVID-19 dans les établissements de soins de longue durée? Qu'est-ce que le gouvernement fédéral aurait pu faire pour améliorer le dépistage dans ces centres?
    Je pense que nous savons qu'il y avait un problème au début de cette pandémie en ce qui a trait au dépistage. Par conséquent, la leçon qu'on doit tirer, c'est qu'il faut faire du « dépistage, dépistage, dépistage », et il est extrêmement important de faire tout en notre pouvoir pour appuyer l'industrie des établissements de soins de longue durée.
    Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, j'adresserais également cette question à mon collègue, le Dr Rabheru, qui travaille aux premières lignes.
    Certainement.
    Pour commencer, je veux simplement dire que si cette pandémie de COVID-19 a vraiment ouvert les plaies ou les croûtes de notre système, disons, nous devons prendre énormément de recul et commencer par la question suivante: de qui parlons-nous, exactement?
    Si vous regardez dans votre entourage — je sais qu'il n'y a personne à vos côtés actuellement, mais supposons que oui. Une personne sur trois parmi vous sera atteinte de démence avant d'avoir 80 ans. Si vous pensez que ce ne sera pas vous, vous êtes totalement dans le déni, car cela peut être n'importe qui. Nous connaissons tous des gens qui en sont atteints.
    Deuxièmement, nous vieillissons tous. L'âgisme est très insidieux et nous en sommes tous victimes, sans exception. Par conséquent, nous ne discutons pas de gens de l'extérieur, de gens venant d'ailleurs ou d'un virus. Cela fait partie de notre société.
    La COVID-19 vient de révéler au grand jour certains symptômes qui étaient toujours là. Au-delà de l'impact physique du virus, on a observé une augmentation considérable des problèmes non liés à la COVID, tels que l'isolement social et la mortalité et la morbidité chez les personnes ayant une déficience mentale ou physique. Il y aura beaucoup de travail à faire lorsque la pandémie commencera à s'atténuer, mais nous devons vraiment trouver des façons de transformer le système pour nous assurer de ne plus jamais soumettre nos parents, nos grands-parents ou nous-mêmes, dans quelques années, à une telle épreuve. Nous devons agir dès maintenant.
    Merci beaucoup, docteur.
    En outre, pendant cette pandémie, les gouvernements provinciaux ont renforcé les mesures de protection des personnes âgées des établissements de soins de longue durée. Ils limitent les visites, fournissent de l'EPI au personnel et lui interdisent de travailler dans plus d'un établissement. Bien entendu, la fermeture des frontières s'est fait attendre. Ici, dans ma ville natale de Calgary, le premier ministre provincial a dû se rendre lui-même à l'aéroport pour vérifier les mesures de dépistages mises en place à l'échelle locale, parce que le gouvernement fédéral a tardé à agir.
    Madame Gillis, le gouvernement fédéral aurait-il dû intervenir pour que ces mesures soient prises plus tôt?
    Cette pandémie est un cas intéressant et inhabituel, en ce sens que ce virus est très différent des autres virus. Donc, je crois que le gouvernement suivait les avis qui circulaient à l'époque. Depuis, nous avons appris que de nombreuses personnes asymptomatiques propagent le virus, ce qui est très différent de ce qu'on a vu dans le passé.
    Encore une fois, c'est une leçon très importante qui a été apprise, probablement dans le monde entier et pas seulement ici, au Canada. Tout le monde a été pris au dépourvu, mais j'espère que nous ne le serons plus jamais.
(1745)
    Je l'espère aussi.
    Pensez-vous que le gouvernement fédéral aurait dû, au début de la pandémie, offrir une aide accrue pour veiller à ce que les établissements de soins de longue durée aient assez d'équipement de protection individuelle?
    Pouvez-vous répondre brièvement, s'il vous plaît?
    Bien que cela relève de la compétence des provinces, nous sommes d'avis général que tous les ordres de gouvernement doivent se pencher sur cet aspect, y compris parallèlement aux actions du gouvernement fédéral et dans le contexte d'un examen de la Loi canadienne sur la santé.
    Merci, madame Kusie.
    Merci, madame Gillis.
    Merci, docteur Rabheru.
    Merci à tous les deux.
    Nous passons maintenant, à M. Long, du Parti libéral, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Bonjour à nos témoins et à tous mes collègues.
    Tout d'abord, je rejette l'affirmation de ma collègue, dont les questions laissaient entendre que nous, le gouvernement fédéral, ne sommes pas intervenus. Je rejette catégoriquement cette affirmation. Nous agissons. Aux dernières nouvelles, nos Forces canadiennes sont au Québec. Nos Forces canadiennes sont en Ontario. Ce n'est absolument pas une question partisane. Ce problème par rapport aux personnes âgées existe depuis des décennies, essentiellement. Je tiens à le préciser. Nous connaissons tous les problèmes qui touchent les résidences pour aînés.
    Madame Gillis, concernant la statistique que vous avez donnée, à savoir que 79 % de tous les décès au Canada sont liés aux établissements de soins de longue durée, nous savons que nous avons un énorme défi à relever.
    Voici ma question, madame Gillis. Les personnes âgées sont considérablement moins susceptibles d'avoir accès à des soutiens sociaux essentiels, notamment la possibilité d'avoir de l'aide en tout temps en cas de besoin. Ces soutiens sociaux sont indispensables pendant cette crise de la COVID-19, puisque les personnes âgées doivent s'isoler et comptent sur leur famille, leurs amis et leurs voisins pour la livraison de produits d'épicerie, de médicaments et d'autres articles essentiels.
    Veuillez nous indiquer ce que doit faire le gouvernement fédéral, à court et à long terme, pour veiller à ce que les aînés à faible revenu reçoivent le soutien dont ils ont besoin pendant cette période.
    De mon point de vue de défenseure des droits de la personne, l'accès aux nécessités de base est un droit fondamental.
    Nous avons la Sécurité de la vieillesse et d'autres programmes. Toutefois, je pense qu'on retiendra de cette pandémie certains aspects évoqués par le Dr Rabheru sur l'impact de l'isolement social et la capacité des personnes âgées qui sont isolées socialement d'avoir accès à beaucoup de choses que vous venez de mentionner, notamment l'épicerie. Ce sont là quelques-unes des leçons que nous tirerons de la pandémie. Nous devrons examiner la situation et déterminer si tout cela a été mis en place.
    Merci.
    J'aimerais céder le reste de mon temps à M. Vaughan.
    Monsieur Vaughan, allez-y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup.
    J'ai seulement une petite question complémentaire à celles que vous avez posées au sujet des personnes âgées. Le débat sur le rôle des secteurs privé et public dans le domaine des soins de santé est au cœur de nombreux problèmes auxquels nous avons été confrontés. J'aimerais savoir ce que vous pensez du rôle accru du privé dans ce secteur et de la réduction continue de la réglementation à cet égard.
    C'est un problème que nous avons en ce moment, et nous devrons vraiment nous y attaquer à l'avenir.
    Lorsque nous commencerons à rassembler toutes les preuves sur les endroits où ont eu lieu ces véritables violations des droits de la personne et sur la séquence des événements, nous aurons une partie de la solution au problème. Nous arrivons au milieu de tout cela, en quelque sorte. Nous devons collecter ces données maintenant. Ensuite, nous pourrons intervenir.
    Je voudrais juste lire un bref commentaire et avoir vos commentaires. Une ministre de la Santé a déjà dit ceci:
Contrairement à certains de nos prédécesseurs à Ottawa, qui ont souvent essayé d'imposer aux provinces une conformité bureaucratique rigide aux soins de santé, nous avons respecté leur administration constitutionnelle des soins de santé et les avons encouragées à innover.
    Ce sont les propos de la dernière ministre de la Santé de Stephen Harper.
    Ce point de vue selon lequel le gouvernement fédéral devrait se retirer, se contenter de respecter la compétence des provinces et se défiler en invoquant la Constitution est-il en partie à l'origine de cette défaillance catastrophique?
(1750)
    Je n'aime pas trop qu'on invoque la Constitution, et je pense que nous devons tous travailler ensemble à l'heure actuelle. J'en ai parlé dans mon exposé.
    Il est très important que les provinces collaborent avec le gouvernement fédéral pour examiner ce problème.
    Donc, vous accepteriez que le fédéral joue un rôle qui pourrait empiéter sur les compétences provinciales, mais qui rendrait les choses plus sûres pour les personnes âgées?
    Je n'utiliserais probablement pas le terme « empiéter », mais, oui, je serais d'accord.
    Très bien.
    J'ai une dernière question pour M. Forth...
    Pensez au principe de Jordan, alors que nous avons dû protéger les enfants en raison de problèmes identiques, soit les variations entre les provinces et les territoires et les conflits entre le gouvernement fédéral et les provinces.
    Mon temps de parole est limité; j'ai une question pour M. Forth de F.A.R.M.S. Canada.
    Elle porte sur l'idée selon laquelle tous les travailleurs étrangers que nous recrutons dans d'autres pays pour travailler dans notre secteur agricole sont des travailleurs qualifiés. Certains députés ont fait valoir qu'on n'aurait qu'à envoyer les étudiants aux champs pour la plantation et la récolte des cultures. Qualifieriez-vous de travailleurs qualifiés les travailleurs que vous recrutez à Trinité-et-Tobago, en Jamaïque, dans les Caraïbes orientales ou au Mexique?
    Oui. Vous avez absolument raison, mais ce n'est pas nous qui les choisissons. Ils sont choisis par le ministère du Travail de leur pays respectif, et ils doivent généralement avoir un intérêt quelconque pour l'agriculture.
    On parle de recourir aux étudiants. Nous sommes nombreux à embaucher des étudiants, mais pour ceux d'entre nous qui cultivent à l'extérieur, la saison commence le 1er avril et se termine le 15 novembre. Je pense que les écoles sont ouvertes pendant la majeure partie de cette période. Sans ce programme, nous serions en grande difficulté.
    Ces gens aiment ce travail. Vraiment. C'est leur travail, dans leur pays comme ici. Ils le font chez eux et ils le font ici. Ils gagnent un bon revenu, ici, et ils le ramènent dans leur pays. Penser que certains sont maltraités — mon Dieu! Ils font partie de ma famille, et ce, depuis 50 ans. J'ai eu des gens qui sont venus travailler ici plus de 35 années consécutives avant de prendre leur retraite. Ce sont vraiment des travailleurs qualifiés, parce qu'ils aiment ce qu'ils font. Ce n'est pas un travail difficile; dans notre ferme, il n'y a pas de gros travaux. Il n'y a rien de tout cela. Ils aiment simplement cultiver ce genre de choses, et cela fonctionne vraiment, vraiment bien.
    Merci, monsieur Forth.
    Merci, monsieur Vaughan. Votre temps est écoulé.

[Français]

    Madame Chabot, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Tout d’abord, au nom des personnes aînées, je remercie les représentants des trois organismes de leurs témoignages.
    J’aimerais revenir sur le témoignage de l’International Longevity Centre Canada en lien avec nos personnes aînées. Étant donné ce que nous vivons durant la crise actuelle liée à la COVID-19 dans chacune de nos provinces, je pense que tout le monde se dit qu’il est maintenant temps de dresser un bilan et d’agir vite quant aux conditions de vie des personnes aînées. Déjà, avant la crise...
    Excusez-moi de vous interrompre, madame Chabot, mais les interprètes demandent que vous parliez un peu plus près de votre micro, s’il vous plaît.
    D'accord.
    Ce sujet soulève toutes sortes de considérations. Parlera-t-on de malveillance ou de maltraitance? Je pense aussi que la situation est inédite et qu’il faudra s’y attaquer.
    Pour en revenir aux droits des personnes aînées, vous avez moins évoqué leur précarité financière, que l’on constate plus particulièrement dans le contexte de la pandémie de la COVID-19. Le Bloc québécois a fait des revendications en ce sens. Quelle est votre opinion à ce sujet?

[Traduction]

    Je suis désolée. Vous me demandez si la précarité financière des personnes âgées me préoccupe, c'est cela?
    Oui.
    Bien sûr, cela nous préoccupe. Je pense que nous sommes également très inquiets de l’accessibilité des fonds aux aînés, ainsi que des répercussions financières de la COVID-19 sur eux. Je crois qu’il s’agit là d’un autre aspect que nous devrons examiner de près pour nous assurer que les fonds parviennent aux personnes âgées.
    En général, nous savons que ce sont les femmes âgées qui ont tendance à vivre dans la pauvreté au Canada, et les femmes âgées représentent la grande majorité des personnes âgées. Voilà pourquoi nous appuyons toujours les initiatives qui permettent de surveiller cette situation et d’y remédier.
    Je vous remercie de votre question
(1755)

[Français]

    Je ne suis pas tout à fait d’accord pour dire que certaines compétences pourraient être attribuées à Ottawa. Il faut toujours se rappeler que les domaines de la santé et des services sociaux relèvent des provinces. Chaque province aura à dresser son bilan sur cette question. Un autre aspect majeur est le transfert en santé, lequel donne aux provinces la capacité d’agir.
    Je m’adresse maintenant à Me Dalley, du Migrant Workers Centre. Je vous remercie de votre témoignage. Toute la question des travailleurs migrants est d’actualité: nous avons besoin de ces travailleurs, mais nous n’avons pas en ce moment tous les travailleurs migrants sur lesquels nous devrions pouvoir compter, particulièrement dans le domaine agricole. D’après vous, combien de travailleurs étrangers auraient théoriquement dû revenir cette année et comment aurions-nous pu faciliter leur retour?

[Traduction]

     Si je comprends bien la question, vous voulez savoir combien de travailleurs viennent ici et comment nous pouvons faciliter le processus. À ma connaissance, des dizaines de milliers de travailleurs agricoles viennent au Canada chaque année, dans tout le pays. En ce qui concerne le processus proprement dit, il existe de nombreux programmes dans le cadre desquels les gens peuvent venir ici. Je crois que la plupart d’entre eux relèvent du Programme des travailleurs agricoles saisonniers, dont M. Forth a parlé. Ces travailleurs viennent pour une courte période, généralement jusqu’à huit mois par année, puis ils retournent dans leur pays d’origine à la fin de la saison.
    Comme M. Forth l’a dit, bon nombre de ces travailleurs viennent au Canada depuis bien des années. Je suis consciente qu’ils n’ont pas tous forcément été victimes de maltraitance, ce qui est très bien, mais certains ont...

[Français]

    Je vais préciser ma question.
    Cette année au Québec, à peine la moitié des 15 000 travailleurs étrangers habituellement employés dans le domaine agricole ont pu venir travailler. Au-delà de la question des frontières, comment aurions-nous pu faciliter l’accueil de ces personnes?

[Traduction]

    Nous recommandons que les travailleurs obtiennent un accès à la résidence permanente au Canada. Cela leur permettrait de rester au Canada et de bénéficier des mêmes droits et avantages que ceux dont jouissent les Canadiens. Ces travailleurs auraient ainsi la possibilité de changer d’employeur s’ils étaient victimes de conditions de travail inadmissibles. Grâce à un statut garanti, ils seraient plus à même de dénoncer de telles conditions de travail. Cela leur permettrait d’être avec leur famille au Canada. En effet, bon nombre d’entre eux sont séparés de leur famille pendant de très nombreux mois de l’année.
    Dans l’ensemble, c’est une mesure qui s’impose en raison de la COVID-19, mais aussi pour la suite des choses, car nous comptons sur ces travailleurs et cette main-d’œuvre. À vrai dire, si ces travailleurs sont autorisés à rester ici, le Canada pourra jouir d’une main-d’œuvre plus sûre à l’avenir.
    Merci, madame Dalley.

[Français]

    Je vous remercie, madame Chabot.

[Traduction]

    C’est maintenant au tour de Mme Kwan. Vous avez six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous nos témoins.
     Madame Dalley, en ce qui concerne les travailleurs migrants et les personnes sans papiers, l’un des problèmes qui se posent en plein milieu de la pandémie COVID-19, c’est que certains d’entre eux ont peut-être perdu leur emploi et leur statut. Compte tenu des circonstances, ces deux choses se sont littéralement produites en même temps.
    Si vous perdez votre emploi et que votre permis de travail vient à expiration, vous ne pourrez pas le renouveler, car votre statut est lié à un employeur précis. À cette fin, pensez-vous qu’une solution serait que le gouvernement permette aux personnes dont le numéro d’assurance sociale est expiré de toucher la Prestation canadienne d’urgence? Est-ce une mesure que vous recommanderiez?
(1800)
     Oui, certainement. Nous recommanderions que les gens dont le numéro d’assurance sociale est expiré puissent avoir accès aux prestations.
    Beaucoup d’entre eux ont travaillé au Canada. Ils ont contribué au marché du travail. Comme bien d’autres Canadiens, ils se trouvent dans une crise sans précédent et, ayant perdu leur emploi, ils méritent d’avoir accès aux mêmes outils de soutien du revenu que les autres. Nous serions favorables à l’idée d’offrir un tel soutien aux travailleurs dont le numéro d’assurance sociale n’est plus valide ou de permettre aux gens de demander un numéro d’assurance sociale temporaire sans preuve de statut.
    Nous recommandons également que les personnes puissent demander des autorisations d’emploi ouvertes, ce qui faciliterait l’accès au soutien du revenu et, plus encore, permettrait aux gens de retourner sur le marché du travail et d’occuper des emplois dans certains des secteurs où il existe une pénurie de main-d’œuvre.
    Nous recommanderions donc ces deux mesures.
    Merci.
    En fait, un des problèmes auxquels font face les gens dont le permis de travail arrive à échéance, c’est que le ministère de l’Immigration, des Réfugiés et de la Ciotyenneté éprouve des difficultés dans le traitement des dossiers, d’où les retards. Par conséquent, les gens sont vraiment laissés pour compte.
    Recommanderiez-vous que le ministère prolonge la durée des permis de travail durant cette période et qu’il accorde des permis de travail ouverts plutôt que des permis de travail liés à des employeurs précis?
    Nous serions d’accord pour recommander une telle mesure. Ce serait un moyen efficace et opportun de permettre aux travailleurs de conserver leur statut et de retourner au travail le plus rapidement possible. Voici le problème qui se pose, comme vous l’avez évoqué: lorsqu’un travailleur attend une modification des conditions de son permis de travail ou une prolongation de son permis de travail, il ne peut travailler pour personne d’autre que l’employeur figurant sur son permis de travail. S’il perd cet emploi, il n’aura aucun moyen de subvenir à ses besoins ni à ceux de sa famille.
    La possibilité d’accéder à des permis de travail ouverts, notamment grâce au renouvellement automatique des permis de travail qui viennent à expiration, serait un moyen rapide et efficace pour ces travailleurs de retourner sur le marché du travail, de maintenir leur statut au Canada et de continuer à travailler et à subvenir à leurs besoins.
    Merci beaucoup.
    J’ai une dernière petite question à vous poser sur ce sujet. Comme autre mesure que le gouvernement pourrait prendre pour s’assurer que les travailleurs sans papiers restent en sécurité — et pas seulement pour eux-mêmes, mais aussi dans le but d’aplatir la courbe pour tous les autres —, que diriez-vous si le gouvernement utilisait les numéros d’identification-impôt pour permettre aux gens d’obtenir une aide financière pendant cette période difficile?
    Je crois que nous serions favorables à ce que le gouvernement prenne tous les moyens nécessaires pour mettre cette aide financière à la disposition des travailleurs, avec ou sans papiers. S’il est plus simple pour le gouvernement d’utiliser le numéro d’identification-impôt, nous n’y voyons pas d’inconvénient, pourvu que les travailleurs puissent obtenir l’aide financière qu’ils méritent.
    Merci beaucoup.
     Permettez-moi de m’attarder un instant sur la question des aînés. Nous savons qu’une partie du problème tient à l’absence de normes nationales, pour ainsi dire, dans les établissements de soins de longue durée. C’est d'ailleurs ce qui s’est également produit en Colombie-Britannique, où un grand nombre d’établissements de soins de longue durée ont été privatisés. Les gens étaient obligés de travailler dans des conditions dangereuses et, parfois, auprès de plusieurs établissements.
    Madame Gillis, j’aimerais vous poser une brève question à ce sujet. Si je ne me trompe pas, vous avez déclaré que nous devons, en fait, adopter des normes nationales pour les établissements de soins de longue durée dans l’ensemble du pays. Est-ce bien ce que vous avez dit?
    Oui. Je trouve que c’est une excellente idée. Tous les enjeux que vous avez soulevés, toutes les questions que vous m’avez posées rejoignent, au fond, la question des droits et l’idée qu’il faut faire qui s’impose, en fonction des besoins des gens.
    Les normes nationales sont un excellent exemple, mais pour en revenir à ce que je disais plus tôt, je crois honnêtement que nous devons commencer à changer notre façon de penser à propos des personnes âgées. Nous devons nous attaquer au problème de l’âgisme. Cela se manifeste, à tous les égards, dans la gestion des soins de longue durée, le retrait du financement de ces soins et les problèmes concernant les travailleurs. Tout est lié.
     Je le répète, il faut adopter une « convention ». Traitons ces gens comme des détenteurs de droits et amenons tout le monde à réfléchir avant de prendre des décisions qui touchent les aînés et qui entraînent le genre de problèmes que nous connaissons aujourd’hui.
(1805)
    Merci.
    Avant de manquer de temps, je tiens à souligner que, dans l’immédiat, beaucoup d’aînés sont très inquiets au sujet de leurs prestations du Supplément de revenu garanti. Même si la date limite pour présenter la déclaration de revenus a été repoussée à la fin du mois de juin, certaines personnes ne pourront peut-être pas produire leur déclaration à temps. Au cours de cette période, d’après vous, le gouvernement devrait-il tout simplement maintenir les droits acquis liés au Supplément de revenu garanti pour l'année en cours afin que les gens ne soient pas pénalisés s’ils ne produisent pas leur déclaration de revenus à temps?
    Veuillez répondre brièvement, je vous prie.
    Je ne connais pas très bien le Supplément de revenu garanti et les procédures qui l'entourent, mais voici ce que je peux vous dire. Tout ce que nous pouvons faire pour aider les aînés de quelque façon que ce soit, en particulier ceux qui vivent dans la pauvreté, nous devons le faire.
    Merci beaucoup.
    Merci, madame Gillis, et merci, madame Kwan.
    Cela met fin à notre première ronde. Je tiens à remercier bien sincèrement tous les témoins d'avoir été avec nous. Vos témoignages sont très éclairants.
    Nous allons suspendre brièvement la séance pour tester les microphones de notre deuxième groupe de témoins.
    Bonne soirée à tous et merci d'avoir été avec nous.
    Chers collègues, nous reprendrons sous peu.
    La séance est suspendue.
(1805)

(1810)
     Nous reprenons la séance et souhaitons la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins.
    Nous accueillons M. Jeff Preston, du Collège universitaire King de l'Université Western, et Mme Jennifer Robson, de l'Université Carleton, qui témoignent tous les deux à titre personnel.

[Français]

    Enfin, nous recevons le coordonnateur du Mouvement autonome et solidaire des sans-emploi, M. Sylvain Lafrenière.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à vos déclarations liminaires.
    Monsieur Preston, vous avez la parole pendant 10 minutes.
    J'aimerais tout d'abord remercier le Comité de m'avoir invité à venir lui faire part de mes observations et suggestions.
    Le cri de ralliement du mouvement pour les droits des personnes handicapées est « Rien de ce qui nous concerne ne doit se faire sans nous ». Les consultations comme celles que vous tenez aujourd'hui contribuent donc beaucoup à donner une voix à une population qui, de tout temps, n'a pas eu son mot à dire.
    Je m'appelle Jeff Preston. Je suis professeur adjoint à la Faculté des études sur la condition des personnes handicapées du Collège universitaire King de l'Université Western à London, en Ontario, qui se trouve sur le territoire ancestral des Anishinaabek, des Haudenosaunee...

[Français]

    Monsieur le président...

[Traduction]

    Un instant, monsieur Preston.

[Français]

    Je n'ai pas d'interprétation.
    D'accord.
    Est-ce qu'on peut régler le problème de Mme Chabot?
(1815)

[Traduction]

    Monsieur Preston, allez-y. Je suis désolé de cette interruption.
    Il n'y a pas de souci.
    Comme je le mentionnais, je suis professeur adjoint à la Faculté des études sur la condition des personnes handicapées au Collège universitaire King de l'Université Western à London, en Ontario, qui se trouve sur le territoire ancestral des Anishinaabek, des Haudenosaunee, des Lunaapéewak et des Attawandaron.
    Dans mes recherches et ma pratique d'enseignement, je tente de mettre en évidence la construction culturelle des sujets handicapés et les façons pour la culture populaire et les cadres de politique de naturaliser et de renforcer l'idée de la suprématie masculine et du corps en santé. Je suis également né avec une déficience physique, une forme rare de dystrophie musculaire, et je m'identifie fièrement comme personne handicapée. Je me sers d'un fauteuil roulant électrique depuis mon enfance pour être un empêcheur de tourner en rond dans notre monde.
    Même si l'on n'a pris que récemment conscience que la pandémie mondiale de la COVID-19 allait bouleverser nos vies et nécessiter des ressources essentielles et une réorientation des politiques, je pense à ce virus depuis qu'il a dépassé les frontières de la Chine. La COVID-19 constitue une menace inédite, urgente et existentielle pour quelqu'un comme moi qui souffre de dystrophie musculaire, car il s'agit d'une maladie qu'une pneumonie souvent ne pardonne pas. Mes poumons fonctionnant à environ 30 % de leur capacité, il est peu probable que je survive à ce virus. C'est pour cette raison que je m'efforce de vivre dans un isolement relatif depuis le début mars, ce qui me pose un défi particulier, car je ne peux pas physiquement vivre de manière indépendante. Ma masse musculaire étant beaucoup réduite, je ne peux pas subvenir à mes besoins quotidiens, qu'il s'agisse de manger, de faire ma toilette ou de me tourner dans mon lit. Toutes ces activités quotidiennes nécessitent des contacts étroits.
    Les préposés aux services de soutien à la personne qui s'occupent de moi, et qui sont financés par l'entremise du programme de financement autogéré de l'Ontario, vont et viennent au cours de la journée. Beaucoup d'entre eux doivent emprunter le transport en commun, car en raison de leurs faibles salaires, une automobile est souvent un luxe qu'ils ne peuvent pas s'offrir après avoir assumé leurs frais de subsistance. Il se peut qu'à tout moment, l'un d'entre eux me transmette accidentellement le virus et, en raison des pénuries d'équipement de protection individuelle et de désinfectant, je dois m'efforcer d'ériger des barrières entre moi et le monde extérieur. Il me semble parfois inévitable d'attraper cette infection.
    En plus des problèmes physiques et viraux évidents liés à la COVID-19, la peur incessante que je ressens comme nombre de mes amis ayant une déficience est de savoir si nous pourrons recevoir des soins si nous devenons infectés. Lorsque la peur d'une mort imminente s'atténue tranquillement, je me mets à craindre comme nombre de mes semblables qui ont des conditions médicales sous-jacentes que la maladie n'est pas la seule chose qui peut nous emporter pendant la pandémie. La détérioration des systèmes d'aide peut aussi nous être fatale.
    Pour quelqu'un comme moi, la pandémie à la COVID-19 met en lumière la faiblesse et la précarité du tissu sociomédical dans lequel les intervenants s'efforcent, quand tout va bien, de porter le poids de mon existence de personne handicapée. Dans un monde de distanciation sociale, avoir accès aux techniciens qui entretiennent le matériel adapté que j'utilise, comme mon fauteuil électrique ou mon appareil d'assistance à la toux, devient une affaire compliquée. Au début de la pandémie, le Programme d'appareils de réadaptation en Ontario qui subventionne l'achat et la réparation de ce genre d'équipement a été jugé non essentiel et aboli.
    Si j'attrape le virus, les normes de sécurité en milieu de travail vont exiger que tout le personnel porte de l'équipement de protection individuelle impossible à trouver pour continuer à offrir des soins à domicile en toute sécurité. Si je suis hospitalisé, les restrictions imposées aux visiteurs vont faire en sorte que je n'aurai plus accès à mon équipe de soutien et que je deviendrai ainsi totalement dépendant du personnel infirmier déjà surchargé pour me fournir les soins, presque 24 heures sur 24, sept jours sur sept, que je ne suis pas en mesure de m'apporter.
    Comme dans le cas d'Ariis Knight dont nous avons entendu parler en Colombie-Britannique il y a plusieurs semaines, l'hospitalisation peut vouloir dire être placé dans un grand isolement, en étant coupé non seulement de nos relations sociales, mais aussi de ceux qui nous fournissent des soins d'heure en heure et qui nous mettent à l'abri de toute une gamme d'autres menaces comorbides physiques et psychologiques.
    On nous dit que, selon la capacité que l'on aura à aplanir la courbe, des décisions difficiles devront être prises pour choisir entre qui peut, ou ne peut pas, être sauvé. On pourrait être appelé à soupeser la valeur d'une personne en termes de productivité et de chance de survie pour déterminer si elle mérite de recevoir des soins. Ceux d'entre nous qui sont les plus à risque, les personnes handicapées et les personnes âgées, subissent maintenant la pression culturelle et juridique de la nécropolitique, qui nous demande de sacrifier nos vies au profit de gens jugés plus utiles. Même si le mot « eugénisme » est devenu tabou après la Deuxième Guerre mondiale, cette idéologie demeure bien vivante au Canada, tapie derrière les notions de triage et de voie de la nature.
(1820)
    Dans l’immédiat, de quoi les personnes handicapées au Canada ont-elles un besoin urgent? La réponse à cette question est vraiment très vaste, mais j’ai un certain nombre de recommandations qui découlent de ma propre expérience et de celle de ceux avec qui je suis en contact.
    Premièrement, je pense qu’il est d’une importance vitale, en opposition ouverte et sans équivoque aux rationalités eugéniques, que le gouvernement canadien affirme le droit des Canadiens handicapés à un accès juste et équitable aux soins médicaux et interdise tout type de triage des équipements ou des fournitures médicales fondé sur la valeur ou la qualité de vie. Ces types de politiques sont, à mon avis, contraires à l’esprit du pays ouvert, diversifié et bienveillant que nous avons essayé de construire au cours du siècle dernier. N’oubliez pas que sans les Canadiens handicapés, le monde n’aurait pas les marathons de l’espoir, une présentatrice devenue lieutenante-gouverneure, ou la trilogie Retour vers le futur.
    Nous devons également veiller à ce que, une fois qu’un vaccin aura été mis au point, sa distribution soit prioritaire pour ceux qui en ont le plus besoin, comme les travailleurs de première ligne et ceux qui souffrent de conditions sous-jacentes, et non pas seulement en fonction de la valeur économique ou productive.
    Pour assurer un isolement sûr à ceux qui ont besoin de soins à domicile, il est essentiel d’avoir un accès facile et abordable à des équipements de protection individuelle, notamment des masques, des gants et des fournitures sanitaires à base d’alcool. Nous devons également envisager d’augmenter le soutien financier pour les types de soins accrus qui pourraient être nécessaires à l’heure actuelle, car certaines tâches qui pouvaient auparavant être effectuées de manière indépendante peuvent maintenant nécessiter une aide extérieure. Je pense que nous devons reconnaître que le personnel de soins à domicile et les aidants familiaux sont des membres essentiels de l’équipe de soins d’une personne — non pas en tant que visiteur social — qui peuvent apporter un soutien supplémentaire important à une époque où nos hôpitaux sont aux prises avec des problèmes de capacité.
    Nous devons sécuriser nos établissements de soins de longue durée afin d’éviter la propagation du virus d’une unité à l’autre et d’une installation à l’autre. Il est essentiel de soutenir les efforts des provinces pour prendre soin des soignants, notamment en augmentant le nombre de préposés aux bénéficiaires et en leur accordant des congés payés réguliers pour se ressourcer ou lutter contre les maladies. L'augmentation du nombre de personnes travaillant dans ces fonctions est, je crois, essentielle. Cela signifie aussi, cependant, qu’il faut réexaminer les pratiques passées où nous avons placé des personnes handicapées de tous âges dans des établissements médicaux, non pas parce qu’elles avaient besoin de soins médicaux, mais en raison du manque de logements accessibles et abordables.
    Nous devons garantir l’accès à ceux qui souhaitent bénéficier de thérapies ou de services cognitifs, intellectuels et émotionnels pour une maladie mentale ou une détresse préexistante ou nouvellement apparue. Nombre de ces services ont été jugés non essentiels dans les premiers jours de la pandémie, car les ressources des hôpitaux étaient redéployées ailleurs, mais il est important pour nous de remettre ces services en ligne rapidement pour ceux qui dépendent vraiment de ces services et programmes.
    Je pense que nous devrions également réfléchir à la détermination du gouvernement fédéral selon laquelle les personnes sans travail ont besoin d’environ 2 000 $ par mois, plus un revenu pouvant atteindre 1 000 $ pour faire face à la tempête. Pendant ce temps, des programmes comme le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées s’attendent depuis longtemps à ce que les personnes handicapées subsistent avec un peu plus de 1 000 $ par mois. Pourquoi le coût de la vie pour les personnes handicapées et non handicapées est-il présumé être si différent? Qu’est-ce que cela nous apprend sur l’équité de ces programmes qui visent à donner une vie à ceux qui ne peuvent pas travailler dans une économie physiquement ou mentalement inaccessible?
    Quand j’étais jeune, j’adorais jouer avec des Lego, mais je n’aimais pas vraiment la partie construction. Je n’étais pas très doué pour cela, mais j’étais vraiment doué pour démolir les choses. Il y a quelque chose de vraiment spécial ou magique dans ces moments-là, pas seulement dans la destruction gratuite, mais dans ce qu’elle signale, à savoir que dans les ruines du projet détruit se trouvent les blocs de construction du prochain grand édifice.
    Pour faire face à cette menace, nous devons nous demander non seulement comment nous survivons aujourd’hui, mais aussi comment nous vivrons avec nous-mêmes une fois qu’elle sera passée. La COVID-19 peut signifier que le monde que nous connaissions il y a plusieurs mois a disparu, mais que ce n’est peut-être pas une mauvaise nouvelle.
    Et si, dans le Canada post-COVID, nous passions plus de temps à habiliter les gens plutôt qu’à les handicaper? Et si nous réimaginions nos systèmes de soins de santé pour qu’ils soient des systèmes d’abondance et non d’austérité? Et si les modalités de travail flexibles et numériques actuellement offertes aux employés non handicapés étaient étendues de façon permanente aux employés handicapés qui demandent depuis longtemps ce type d’accès? Et si nous offrions aux Canadiens les choses dont ils ont besoin pour s’épanouir, quelles que soient leurs capacités cognitives ou physiques?
(1825)
    Je me réjouis à la perspective d’imaginer certaines de ces possibilités avec vous tous aujourd’hui.
    Merci.
    Merci, monsieur Preston.
    Nous allons maintenant entendre Mme Robinson, qui dispose de 10 minutes.
    Merci, monsieur le président et membres du Comité, de me permettre de me joindre à vous aujourd’hui. Je m’appelle Jennifer Robson et je suis professeure agrégée de gestion politique à l’Université Carleton.
    Pour tenter de minimiser certains des problèmes techniques dont j’ai eu connaissance lors de récentes réunions, je vais aujourd’hui prononcer mes remarques dans une seule langue. Je m’excuse par avance, en particulier auprès de Mme Chabot et de M. Lafrenière, mais je sais que je vais causer des problèmes si j’essaie de réfléchir à ce que je dis et de cliquer sur les différentes langues dans un sens ou dans l’autre. Je m’en excuse.
    Mes remarques d’aujourd’hui s’inspirent de mes recherches sur la politique sociale canadienne et des innombrables demandes de renseignements que j’ai reçues des Canadiens au sujet des aides d’urgence au revenu pendant la pandémie. Les membres du Comité savent peut-être que depuis le 25 mars, je mets régulièrement à jour un résumé en langage simple des prestations de revenu. En fait, je viens de publier une mise à jour de ce document avant de venir témoigner aujourd’hui. Enfin, je parle aussi en tant que mère de trois enfants qui, comme des millions de parents, a essayé de trouver comment jongler avec le travail à temps plein et l’éducation à domicile en même temps.
    J’ai déjà décrit l’arrêt économique attribuable à la COVID comme un coma médicalement induit. En tant que pays, nous commençons peut-être à sortir lentement de ce coma, mais nous ne pouvons toujours pas faire grand-chose sans une sorte de maintien en vie. Alors que nous reprenons connaissance, il y a quelques vérités importantes avec lesquelles nous devons composer.
    La COVID-19 n'a pas frappé tous les Canadiens de façon égale, que ce soit du point de vue de ses effets sur leur santé ou de ses effets sur leur situation financière. Je vais mettre l'accent sur quatre différents types d'inégalités qui importent au cours de la crise et qui continueront d'importer au cours de la relance économique et de la reconstruction économique éventuelle.
    Le premier type est lié aux inégalités en matière d'information et de capacités techniques. Chaque Canadien a bénéficié d'une aide et de renseignements inégaux visant à leur permettre de comprendre et de tirer parti des prestations gouvernementales. En même temps, il est évident que le gouvernement n'a pas toujours eu accès aux données ou systèmes informatiques qui conviennent pour lancer ou adapter des programmes d'une façon aussi souple que les décideurs et le public l'auraient peut-être souhaité.
    Le deuxième type est lié aux inégalités en matière de ressources financières dont les ménages disposent pour se protéger contre une interruption de revenus et la nécessité inévitable d'attendre pour obtenir une aide gouvernementale, même pendant une courte période.
    Le troisième type est lié aux inégalités en ce qui concerne la façon dont la COVID a eu une incidence sur le travail rémunéré. Il y a des gens dont le travail a été en grande partie épargné par la fermeture des entreprises, des travailleurs qui tout à coup ont été jugés essentiels, un nombre trop important de Canadiens qui ont soudainement perdu toutes leurs sources de travail rémunéré ou la plupart d'entre elles et, finalement, des gens dont le chômage préalable à la COVID a été considérablement prolongé.
    Enfin, le quatrième type est lié aux inégalités en ce qui concerne la responsabilité en matière de soins non rémunérés et les possibilités de participer pleinement à la relance économique et à la reconstruction économique éventuelle.
     Permettez-moi d'ajouter un peu plus de détails et de formuler certaines recommandations à l'intention du Comité.
    Le gouvernement du Canada ne dispose pas de suffisamment de renseignements sur les Canadiens ou des systèmes informatiques nécessaires pour être en mesure de concevoir et de mettre en œuvre des mesures de soutien du revenu et de gérer rapidement d'importantes variations en matière d'emploi et de revenus mois après mois. Le fait qu'on a réussi à accélérer le système dorsal de l'assurance-emploi de manière à ce qu'il traite en moyenne 1 000 demandes par minute au lieu de cinq demandes par minute n'est rien de moins qu'un miracle de l'administration publique.
    Comme vous avez entendu le sous-ministre le dire lui-même, il y a beaucoup de choses que nous ne pouvons pas faire aussi rapidement que nous le devrions, ou même du tout, en raison du fait que nos systèmes informatiques ne peuvent pas gérer rapidement des changements ou de petites exceptions aux règles générales. Bien qu'un grand nombre de gens aient vanté les mérites d'un régime national de revenu de base comme solution au problème, le fait est qu'il n'existe aucune liste magique qui permettrait d'identifier tous les Canadiens et de leur envoyer un chèque, et encore moins de trouver tous les Canadiens qui remplissent le critère d'admissibilité que le Parlement pourrait établir. Par conséquent, j'espère que le Comité appuiera le plan visant à faire des investissements substantiels et à long terme dans les systèmes dorsaux du gouvernement afin que nous soyons plus en mesure non seulement de nous préparer pour le prochain choc macroéconomique, mais aussi de répondre au vaste éventail de besoins des Canadiens qui vivent constamment des chocs microéconomiques.
    Un nombre trop important de Canadiens trouvent les programmes gouvernementaux déroutants, et ils le sont. Les foires aux questions qui sont affichées en ligne et les centres d'appels ne remplacent pas une aide et des conseils personnalisés. Étant donné que vous êtes députés, je n'ai pas besoin de vous dire à quel point il est important que les Canadiens aient accès à un soutien local, accessible et précis pour les aider à se prévaloir des programmes gouvernementaux. Vous et les équipes de vos circonscriptions jouez un rôle crucial dans l'établissement de liens entre les gens et l'aide dont ils ont besoin, mais vous ne pouvez pas vous occuper de tout. Aucun réseau n'a été en mesure de le faire.
    Nous devons établir un réseau sans but lucratif et adéquatement financé de services gratuits visant à répondre aux questions de clients qui ne peuvent pas le faire eux-mêmes, à résoudre leurs problèmes et à défendre leurs intérêts. En ce moment, j'encouragerais le Comité à examiner les Citizens Advice bureaus du Royaume-Uni ou les Financial Empowerment Centers des États-Unis comme sources d'inspiration.
    Bon nombre de Canadiens continueront d'avoir besoin d'un soutien du revenu pendant un certain temps, et ils auront besoin que des mesures dynamiques soient prises pour les aider à réintégrer la population active. Nous devons espérer que la subvention salariale d'urgence aura pour effet de rendre temporaire une certaine partie des mises à pied. Toutefois, un grand nombre des secteurs qui ont été les plus touchés par des pertes d'emplois sont liés à l'hébergement, aux services de restauration, au commerce de détail et aux services d'enseignement, et ce sont des secteurs qui figurent plus bas sur la liste de réouvertures des plans provinciaux. Nous voulons inciter les gens à travailler, mais il faut que le travail soit sécuritaire.
    Les programmes d'urgence comme la PCU vont prendre fin progressivement, ou leur conception sera probablement convertie afin qu'ils soient plus souples et qu'ils puissent gérer un éventail plus vaste de cas. Ce sera difficile à accomplir en grande partie en raison des mêmes lacunes en matière de données et de systèmes informatiques fédéraux que j'ai mentionnées il y a un moment. De plus, dans les provinces, des initiatives devraient déjà être en cours en vue d'adapter et d'élargir les programmes d'emploi à mesures actives afin qu'ils soient plus efficaces, qu'ils puissent gérer une demande accrue et qu'ils puissent fonctionner en respectant les contraintes imposées par la distanciation sociale qui est susceptible de se poursuivre pendant un bon moment.
    Un tiers des Canadiens sont entrés dans cette crise sans disposer d'assez d'épargne liquide pour se payer un niveau de vie correspondant au seuil de la pauvreté même pendant un mois, et encore moins pour maintenir leur niveau de consommation habituelle. Quelques liquidités supplémentaires sous forme de reports hypothécaires et d'impôts leur ont probablement apporté une certaine aide, mais une partie de l'étape de la reconstruction devra consister à reconstruire les finances des ménages, et j'espère que les membres du Comité travailleront avec leurs collègues du Comité des finances et d'autres personnes afin de trouver de meilleurs outils pour aider les ménages à réduire leurs dettes et à se constituer un fonds d'épargne d'urgence.
(1830)
    Enfin, trop de familles ayant des enfants devront faire face à des choix horribles et déraisonnables lorsque les entreprises rouvriront leurs portes, étant donné qu'elles devront continuer de concilier des soins non rémunérés et un retour à un emploi rémunéré ou à une recherche d'emploi. Selon les meilleures estimations, deux tiers des emplois perdus en mars — et nous obtiendrons des mises à jour vendredi quant au nombre exact d'heures de travail rémunérées et d'emplois qui ont été perdus — étaient occupés par des femmes, mais ce sont les mères qui, plus que les femmes sans enfant et les pères, ont perdu le plus grand nombre d'emplois rémunérés.
    Les provinces adoptent diverses approches pour la réouverture des entreprises et des services, mais il semble de plus en plus probable que la plupart des écoles primaires ne seront pas en mesure d'ouvrir leurs portes avant septembre. Par ailleurs, les services de garde d'enfants qui étaient déjà incapables de satisfaire à la demande avant la crise ne seront pas en mesure de fonctionner à plein régime pendant un certain temps. Je suis préoccupée par la perte potentielle de places dans les garderies, étant donné que les exploitants de ces garderies perdront des recettes et mettront à pied des employés, et je suis inquiète pour les mères qui seront privées de retourner au travail ou de chercher un emploi, même quand les gouvernements lèveront les restrictions mises en oeuvre à des fins de santé publique. Je crains aussi ce qui adviendra des finances des ménages si, en moyenne, 40 % des revenus gagnés par la famille disparaissent parce que la mère doit rester à la maison pour s'occuper des enfants. Il ne s'agit pas là d'un problème privé à résoudre en famille; c'est une catastrophe macroéconomique en puissance.
    Avec l'accord des provinces, l'aide fédérale devrait être orientée vers la protection des places dans les garderies lorsque les revenus actuels mettent en péril la viabilité de la garderie. Nous devrions aussi accroître le nombre de programmes de garde d'enfants qui peuvent exercer leurs activités en respectant les lignes directrices provinciales en matière de santé, afin que les parents, en général, et les mères, en particulier, puissent participer à la réouverture des entreprises et des services et à l'éventuelle reprise économique.
    Merci. Je suis impatiente de répondre à vos questions.

[Français]

    Nous allons poursuivre avec M. Sylvain Lafrenière, du Mouvement autonome et solidaire des sans-emploi.
    Monsieur Lafrenière, vous avez la parole pour dix minutes.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés.
    Je pense que mon intervention s'inscrit bien dans la suite de celle de Mme Robson.
    Je parle au nom du Mouvement autonome et solidaire des sans-emploi, ou MASSE. Il s'agit d'un regroupement d'une quinzaine d'organismes du Québec répartis dans la majorité des régions administratives de la province. La majeure partie de nos groupes interviennent particulièrement sur la question de l'assurance-emploi, mais quelques-uns interviennent également dans des domaines connexes, comme la sécurité du revenu, l'aide sociale ou la santé et la sécurité au travail.
    Nous offrons divers services: du soutien individuel lors de recours, dans le cadre d'un processus de révision ou d'une instance devant un tribunal administratif; de l'information sur la loi en général; et des ateliers d'information et de formation auprès d'autres intervenants, notamment dans le milieu syndical. Personnellement, je représente le Mouvement auprès des instances politiques et d'autres acteurs dans le dossier.
    Notre réseau lutte pour la mise en place d'un régime d'assurance-chômage juste et d'accès universel. Je tiens à rappeler qu'il s'agit d'un objectif important que nous avons depuis longtemps. Je veux aussi rappeler que le programme d'assurance-emploi a été mis à mal depuis les années 1990 et, depuis, il n'a pas fait l'objet d'améliorations substantielles malgré les périodes où le taux de chômage était assez bas, notamment ces dernières années.
    Ce contexte est important puisque, au début de la crise, nous étions très inquiets quant à la capacité du gouvernement à répondre à la demande qui s'annonçait très forte, et qui l'a été d'ailleurs. Le MASSE avait déjà commencé à faire des représentations concernant des retards inusités dans le traitement des demandes de prestation. Depuis novembre, plusieurs groupes ont dénoncé la situation. Le délai prévu de 28 jours était dépassé pour un nombre de plus en plus grand de dossiers. Nous nous inquiétions et nous demandions comment Service Canada allait réussir à répondre à la forte demande qui s'annonçait.
    Nous nous demandons d'ailleurs ce qui est arrivé des dossiers « pré 15 mars ». Ont-ils été traités ou sont-ils en retard en raison de l'afflux de dossiers qui a suivi? C'est une question que nous posons actuellement au gouvernement.
    Dans ce contexte, nous avons apprécié l'annonce de la Prestation canadienne d'urgence, ou PCU, et, surtout, son transfert à l'Agence du revenu du Canada, ce qui a probablement permis de traiter les dossiers de façon relativement efficace. Nous avons applaudi...
    [Difficultés techniques]
    Pardon? Quelqu'un est-il intervenu?
(1835)
    Il y a un problème, monsieur le président.
    Oui, il est clair qu’il y a eu un problème. Est-ce que c’est réglé maintenant?
    Oui, c’est réglé pour moi.

[Traduction]

    Monsieur Vis, vous avez levé la main. Invoquez-vous le Règlement?
    Oui, monsieur le président.
    Il est déjà 15 h 38, heure du Pacifique, et, comme les trois témoins que nous avons entendus sont excellents, j'aimerais demander à tous les membres du Comité la permission de prolonger la séance afin de faire en sorte que nous puissions mener deux séries de questions, par respect pour tous les témoins qui ont comparu aujourd'hui.
    Merci.
    Cette question devrait probablement être adressée aux employés de la Chambre des communes, étant donné que ses ressources font l'objet de demandes substantielles.
    Pouvons-nous permettre à M. Lafrenière de terminer sa déclaration? Cela donnera au personnel de la Chambre des communes le temps de déterminer si c'est possible. Ensuite, je reviendrai sur le rappel au Règlement.
    Merci, monsieur.

[Français]

    Monsieur Lafrenière, vous pouvez continuer.
     Je vous remercie.
    Ce qu'on a apprécié particulièrement au sujet de la PCU, c'est qu'on ait fait de grands efforts pour simplifier la procédure et qu'on ait mis en place un critère d'admissibilité un peu inusité, soit des revenus de 5 000 $. C'est une logique un peu différente de celle du programme d'assurance-emploi. C'est d'ailleurs une lacune du programme d'assurance-emploi actuel que nous dénonçons depuis plusieurs années. Ce critère a permis à plusieurs travailleurs et travailleuses à temps partiel d'avoir accès à la PCU.
    Un autre aspect positif de la PCU, c'est qu'elle a permis d'aider les travailleurs et travailleuses autonomes, qui représentent quand même plus de 15 % de la population du Canada. La grande majorité de ces personnes n'auraient pas eu droit à l'assurance-emploi parce que, dans bien des cas, elles ne cotisent pas au programme. Encore aujourd'hui, le système n'est pas adapté à ces personnes. Pour nous, cette mesure est positive, mais elle prouve également de façon assez éclatante que le régime d'assurance-emploi nécessite une réforme en profondeur à laquelle il faudra réfléchir ultérieurement, puisque cela n'a pas toujours été fait.
    Par contre, nous notons qu'il y a quelques sources d'irritation qui découlent de la PCU, notamment la question du départ volontaire qui n'est toujours pas permis, d'après la loi telle que nous la comprenons. Selon nous, cela constitue un recul parce que c'est permis selon certaines règles de l'assurance-emploi, naturellement sous certaines conditions. Parmi ces conditions, il y a celle touchant la santé et la sécurité. Quand la santé et la sécurité sont menacées, le départ volontaire est autorisé. Là, ce n'est pas permis, et à notre avis, cela désavantage nettement les travailleurs et travailleuses de certains employeurs.
    Je sais que ce n'est pas le cas partout au Canada, mais au Québec, on commence à parler de plus en plus de déconfinement. Nous avons l'impression que cela pourrait donner un avantage indu à certains travailleurs, d'autant plus qu'à notre connaissance, les règles liées à la subvention salariale ne sont pas très restrictives pour les employeurs quant à la protection de leurs employés. Ils pourraient en profiter pour s'attaquer à certaines conditions de travail.
    Par ailleurs, nous saluons l'élargissement de la PCU qui a suivi. Je pense notamment à l'ajout des travailleurs et travailleuses de l'industrie saisonnière. Je pense aussi à toutes les personnes qui avaient subi des pertes financières importantes, mais qui continuaient à recevoir une modeste part de leur revenu habituel. On peut ajouter aussi les personnes qui étaient à la fin de leur période de prestations d'assurance-emploi depuis peu et qui se retrouvaient devant un marché de l'emploi quasi inexistant dans certains domaines.
    Nous pouvons juste déplorer que cela ait pris un peu de temps au gouvernement pour ajouter ces personnes au programme initial. Cela a causé un sentiment et une période d'incertitude, en particulier chez la population des régions où, naturellement, le travail saisonnier est important.
    Nous avons été un peu déçus de la PCU pour les étudiants, qui représente un montant moindre que la PCU. Le débat qui a tourné autour de cette question nous a beaucoup interpellés. Il semble qu'on n'ait pas tenu compte de certaines choses. Par exemple, avec le salaire minimum au Québec, la somme de 1 250 $ représente, grosso modo, un revenu d'emploi à temps partiel à trois jours par semaine. Ce n'est pas le genre d'emploi que recherchent la majorité des étudiants et étudiantes universitaires qui cherchent à profiter de cette période. Il s'agit surtout d'étudiants à revenu modeste et qui ont besoin d'aller chercher un revenu pour pouvoir poursuivre leurs études. Le discours selon lequel cette somme serait une sorte de mesure de dissuasion nous a paru un peu bizarre. Ce n'est pas ce qu'on voit chez la majorité de ces étudiants, qui luttent pour étudier et qui travaillent fort pour y arriver.
    Ce que nous déplorons aussi au sujet de la PCU, c'est qu'il n'y ait toujours pas de règlement découlant de la loi. Pour donner un exemple concret, on ne sait toujours pas s'il y aurait un recours possible pour quelqu'un à qui on a refusé la PCU. Cela nous embête beaucoup parce que nous devons parfois représenter des gens.
(1840)
    Le fait de ne pas savoir s'il existe un mécanisme de recours ou non, et, le cas échéant, ne pas le connaître nous préoccupe.
    Nous déplorons également le maintien de la fermeture des bureaux de Service Canada partout au pays. Bien sûr, il n'est pas question d'une réouverture complète et normale des bureaux, mais nous considérons que c'est un service essentiel qui doit être offert à la population.
    Précisons que les chômeurs et les chômeuses les plus susceptibles de se tourner vers ce mode de service sont les groupes les plus vulnérables de la population, notamment les personnes à faible revenu, habitant dans des régions éloignées qui ont un accès limité à Internet — il faut dire qu'au Québec, on connaît toujours des difficultés à cet égard — ainsi que les personnes peu scolarisées ou les personnes âgées qui éprouvent des difficultés avec les outils technologiques numériques.
    Je termine ma présentation en disant que le MASSE a été également relativement déçu du manque de consultation de la part du gouvernement, notamment en ce qui a trait à nos organismes, tant du côté du bureau de la ministre que de Service Canada. Nous comprenons que la situation était urgente et qu'il fallait prendre des décisions rapidement. Il s'agissait de gros dossiers à mettre en place de façon rapide, et nous le concevons très bien.
    On lit que les programmes d'urgence ne vont durer que quelques mois, mais la récession va arriver et elle va frapper fort. Toutefois, nous espérons que, pour la suite des choses, le gouvernement mettra en place des mesures de consultation auprès des organismes civils pour l'alimenter dans ses réflexions sur les programmes à venir.
    Je termine tout simplement en vous remerciant encore de votre invitation à comparaître, en mon nom et au nom de l'ensemble de nos groupes membres.
    Bien sûr, c'est avec plaisir que je répondrai aux questions relatives à ma présentation ou à d'autres aspects de l'assurance-emploi, que je n'ai pas eu le temps d'aborder aujourd'hui.
(1845)
    Merci beaucoup, monsieur Lafrenière.

[Traduction]

     Chers collègues, il reste environ 14 minutes pour aborder le rappel au Règlement de M. Vis avant la fin programmée de la séance. Si nous menons une série complète de questions, nous dépasserons de 10 minutes la durée prévue de la séance. Cela ne me semble pas déraisonnable, et le personnel m'assure qu'il n'y voit pas d'objections.
    Je vous invite à nous faire part de vos commentaires, mais deux séries complètes de questions prolongeraient la séance de 30 à 40 minutes, ce qui, selon moi, est presque déraisonnable, mais je m'en remets aux membres du Comité à ce sujet. Je suggère que nous menions une série d'interventions de six minutes par parti et que nous concluions la séance par la suite.
    Fort bien. Je vois quelques pouces levés à l'écran.
    Nous allons commencer par accorder six minutes à M. Albas du Parti conservateur.
    Vous avez la parole, monsieur Albas.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous nos témoins de nous faire bénéficier de leurs compétences et de comparaître devant notre comité aujourd'hui.
    J'aimerais commencer par interroger Mme Robson.
    L'un des sujets que j'ai abordés à maintes reprises devant les membres de notre comité, c'est le cas tragique des femmes enceintes à qui Service Canada refuse d'accorder la PCU. Le ministre a promis de régler cette question, mais vous soutenez que c'est un problème d'informatique. Nos systèmes sont désuets, et le gouvernement planifie de les rectifier seulement dans plusieurs années.
    Pourriez-vous parler un peu de cet enjeu, s'il vous plaît?
    Si je comprends bien le problème, c'est que les femmes enceintes qui demandent la PCU par le truchement de Service Canada déclarent, bien sûr, qu'elles sont enceintes, puis se rendent compte qu'elles sont redirigées vers les prestations de maternité. Si j'ai bien compris le témoignage du sous-ministre la semaine dernière, c'est que le système dorsal de l'aspect assurance-emploi de la PCU, qui n'est pas administré par l'ARC, ne fait pas de distinction qui permette de traiter ces cas exceptionnels.
    En temps normal, il n'est pas inhabituel que des femmes enceintes soient mises à pied, puis touchent des prestations régulières de l'AE avant d'effectuer la transition vers les prestations de maternité ou parentales, et il y a parfois un petit ajustement au nombre de semaines où elles y sont admissibles. Je ne maîtrise pas tous les détails et je n'ai pas pu tout comprendre du témoignage du sous-ministre pour déterminer quelle est la nature exacte des limites techniques, mais j'ai remarqué qu'il a mentionné le système obsolète COBOL, qui est encore plus vieux que moi, donc il commence vraiment à dater.
    Les députés seront peut-être curieux de savoir que sur mon fil Twitter, la fin de semaine dernière, j'ai publié une petite capture d'écran de code COBOL, qui ne sert qu'à une chose, en fait: il permet d'imprimer les renseignements figurant dans un dossier sur une feuille de papier. J'ai été frappée de constater que s'il faut un code aussi complexe simplement pour imprimer quelque chose, il doit être très compliqué d'un point de vue technique de créer des exceptions, de dire à un système établi depuis si longtemps de faire quelque chose différemment, de faire une exception si une femme affirme qu'elle est enceinte, pour qu'elle puisse tout de même recevoir la PCU.
    Cela dit, je suis déçue parce qu'il est évident qu'il fallait s'y attendre. Je n'ai pas entendu les mêmes doléances des femmes qui ont présenté leur demande directement à l'Agence du revenu du Canada. Je me demande s'il vaudrait la peine que le Comité prenne le temps de se pencher sur la question pour comprendre en quoi le système dorsal de l'ARC diffère de celui de Service Canada.
(1850)
    Vous avez mentionné qu'il faut miser sur un soutien de proximité et l'accessibilité, et c'est ce que les bureaux des députés de toutes allégeances essaient de faire. Nous en avons parlé avec d'autres personnes qui nous ont dit que ce n'était pas attribuable à un problème technique. Elles nous ont dit que la loi établissant la PCU exclut les femmes enceintes et que le personnel de Service Canada cite des articles de la loi pour se justifier.
    La ministre a dit que ce n'était pas vrai. Croyez-vous que ce n'est qu'à cause d'un manque de formation? Je sais que vous avez dit que ce pourrait être lié au système dorsal COBOL, mais le plus important, pour moi, c'est d'obtenir une réponse pour ces femmes enceintes.
    J'ai moi-même lu cette loi et fait quelques commentaires à son sujet dans l'un des premiers articles qui est sorti sur les femmes enceintes. Selon mon interprétation du projet de loi C-13 qui a donné vie à la PCU, les femmes enceintes n'en seraient pas exclues. Il y a une disposition dictant qu'on ne peut pas toucher simultanément des prestations de maternité ou parentales et la PCU, mais il y est aussi écrit que ces mêmes prestations contribuent au seuil minimal de revenu de travail de 5 000 $ pour être admissible. Il me semble donc qu'il était prévu dans la loi que des travailleuses enceintes ou mères pourraient aussi avoir besoin de la PCU.
    D'après ce que j'ai entendu, le personnel de Service Canada transmet des messages contradictoires quand les gens appellent. Je suis persuadée que chaque fonctionnaire de Service Canada essaie de faire de son mieux et qu'en ces circonstances exceptionnelles, il peut y avoir de la confusion sur les règles exactes qui s'appliquent. Dans une certaine mesure, la réponse qu'une personne obtiendra dépendra du moment où elle appellera et de la personne qui sera là pour lui répondre. C'est la raison pour laquelle il sera toujours important, selon moi, de clarifier les règles et que la population ait accès à un soutien local accru pour résoudre le problème, quels que soient les programmes mis en place par le gouvernement.
    Croyez-vous que le fait qu'on ait pu mettre la PCU en place assez vite et que les gens reçoivent l'argent tout aussi vite montre qu'il est tout simplement inacceptable qu'il faille cinq ans pour corriger un problème de système obsolète comme celui de l'AE?
    Je ne suis pas une spécialiste des TI, donc je ne peux malheureusement pas me prononcer sur l'acceptabilité ni la validité du temps estimé pour mettre un logiciel à jour. Je comprends — et on peut le lire dans les journaux — qu'il y a plusieurs systèmes anciens au gouvernement du Canada qui sont essentiels pour accomplir sa mission d'offrir de l'aide à l'emploi et au revenu aux Canadiens, mais qu'ils méritent tous une sérieuse modernisation. C'est un projet de longue haleine. J'espère qu'on fera ce qu'il faut non seulement pour affecter des ressources adéquates à ce projet, mais également pour s'assurer de l'appui du public.
    Merci, madame Robson.
    Merci, monsieur Albas.
    Monsieur Vis, je vois que vous avez levé la main. Vouliez-vous invoquer le Règlement?
    Je voulais réagir à une chose qui a été mentionnée un peu plus tôt, mais vous ne m'avez pas vu quand j'ai levé la main.
    J'aimerais savoir si ceux d'entre nous qui n'ont pas pu poser de questions à M. Preston et à Mme Robson pourraient recevoir leur adresse courriel pour communiquer avec eux après la réunion, parce que j'avais beaucoup de questions à leur poser.
    Merci.
    Merci, monsieur Vis.
    Notre prochaine intervenante sera une députée libérale. Madame Young, vous avez six minutes.
    Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci infiniment, monsieur le président.
    Je remercie tous nos témoins d'aujourd'hui.
    Monsieur Preston, j'aimerais commencer par vous poser quelques questions, si vous me le permettez. J'aimerais vous remercier de mettre en lumière des vérités douloureuses liées à cette pandémie et les effets qu'elle a sur les Canadiens handicapés. Vous avez soulevé un certain nombre de questions, mais j'aimerais d'abord vous poser une question très générale.
    Comment trouvez-vous que le gouvernement a réagi à cette pandémie, de manière générale?
    Je pourrais répondre à cette question de bien des façons. Je dirai pour commencer que personnellement, j'ai beaucoup apprécié que le gouvernement agisse sur-le-champ, qu'il insiste sur l'importance de la distanciation sociale et qu'il prenne la situation très au sérieux, sans essayer de continuer comme si de rien n'était. Je pense que c'était essentiel. Cela signifie non seulement que j'ai pu me réfugier chez moi, en toute sécurité, mais aussi que mes préposés de soutien, par exemple, ont également pu s'isoler. Je pense que c'était absolument nécessaire.
    Je crois aussi qu'il était judicieux de créer la PCU, ne serait-ce que parce qu'elle permet aux personnes handicapées de recevoir un peu d'argent, dans la mesure où elles travaillaient avant. Je dirais que c'est peut-être là l'une de ses limites. Il y a beaucoup de personnes qui bénéficient de programmes comme le POSPH qui n'y ont pas accès parce qu'elles n'ont pas accumulé de revenus d'emploi. Elles ne recevaient que des services d'aide.
    L'autre problème qu'on entend, c'est que ce revenu sera traité comme tel, c'est-à-dire que les personnes qui touchent la PCU verront diminuer d'autant leurs versements du POSPH, en Ontario, ce qui ne fera qu'alourdir le fardeau administratif des personnes handicapées qui devront déclarer leurs prestations et en faire le suivi. Elles devront conserver cet argent, ce qui est compliqué.
(1855)
    Je vous remercie de cette réponse. Nous espérons nous aussi que les gouvernements provinciaux ne décideront pas de la récupérer en coupant leurs prestations.
    Dans votre exposé, vous avez dit qu'il fallait s'occuper des soignants. La semaine dernière, une motion a été adoptée par consentement unanime afin que le gouvernement mette en place des mesures afin d'offrir plus d'aide aux personnes handicapées qui doivent absorber des dépenses extraordinaires en raison de la COVID-19, puis qu'il évalue quel est le meilleur moyen de le faire.
    J'aimerais savoir comment vous espérez que ces mesures de soutien additionnel vous aident, vous et vos préposés de soutien.
    Ce soutien supplémentaire est absolument essentiel, particulièrement pour ceux qui utilisent du personnel de soutien ou en ont besoin. Même pour moi, qui suis professeur d'université et qui suis bien payé pour ce que je fais, les coûts grimpent. Il est difficile d'avoir accès à de l'équipement de protection individuelle, et les coûts montent en flèche.
    Comme je l'ai déjà mentionné, les gens sont en train d'épuiser leurs économies à toute vitesse. Toute forme de soutien financier qui pourra nous aider à absorber une partie de ces coûts nous permettra d'encaisser un autre mois en toute sécurité. Plus nous pourrons le faire, le mieux.
    Un financement accru aux soignants permettrait aussi de faire en sorte qu'ils ne soient pas tenus de travailler à plusieurs endroits à la fois. C'est un énorme problème à l'heure actuelle pour certains de mes préposés qui, pour joindre les deux bouts, doivent travailler à différents endroits, y compris chez moi. Cela présente un énorme risque viral. On réduirait passablement ce risque en payant suffisamment les personnes qui prennent soin des Canadiens handicapés pour qu'elles puissent survivre.
    Merci beaucoup. Je laisserai le reste de mon temps à M. Vaughan.
    Monsieur Vaughan, la parole est à vous.
    Nous ne vous entendons pas, monsieur Vaughan.
    Nous entendons maintenant vos animaux de compagnie.
    Je m'excuse. Je ne sais pas trop ce qui s'est passé.
    Tenez le micro plus près de vous, si vous le pouvez, monsieur Vaughan.
    J'ai des oiseaux près de moi. Je m'excuse.
    Le gouvernement conservateur de l'Ontario n'est pas le seul gouvernement provincial à avoir réduit ses prestations d'invalidité, mais considéreriez-vous qu'il s'agit d'une atteinte aux droits de la personne?
    C'est assurément une question qui se pose. Je pense que si l'on regarde comment le gouvernement fédéral s'est efforcé d'aider les personnes non handicapées par rapport à la façon dont nous avons toujours cherché à aider les personnes handicapées au Canada, il faut vraiment réfléchir à la façon dont nous essayons d'aider les personnes handicapées, tant pendant qu'après la pandémie.
    Nous avons également entendu des commentateurs conservateurs faire valoir que si la PCU est trop lucrative, elle dissuadera les gens de travailler. Est-ce vrai pour les personnes handicapées?
    Selon mon expérience, la plupart de mes amis qui ont un handicap physique ou intellectuel ou une maladie mentale veulent travailler. Ils veulent être des membres productifs de la société.
    Ce n'est pas parce qu'ils reçoivent du soutien qu'ils restent chez eux. Ils restent chez eux parce que les milieux de travail ne sont pas accessibles physiquement ou que l'attitude n'y est pas inclusive. Quand un employeur voit sur le curriculum vitae d'une personne qu'elle a un handicap, elle ne sera même pas convoquée en entrevue.
    En ce moment, le travail peut même être dangereux.
    Je me tourne maintenant vers Mme Robson concernant l'idée d'éliminer graduellement la PCU plutôt que de l'élever au rang de revenu de base universel. Pourquoi recommanderiez-vous de l'éliminer graduellement plutôt que d'en faire un revenu de base universel à cent pour cent, comme certains le proposent?
(1900)
    Je vous remercie de cette question.
    L'intention stratégique à la base de la PCU est de fournir aux gens les ressources économiques nécessaires pour qu'ils puissent rester chez eux et respecter la distanciation sociale. Comme notre régime d'assurance-emploi ne couvrait pas adéquatement tous les travailleurs et ne pouvait tout simplement pas suffire à la demande, sur le plan logistique, la PCU a été mise en place comme prestation d'urgence temporaire.
    Son élimination graduelle ne sera pas simple. Je pense en avoir déjà parlé un peu dans mon exposé. Nous essayons de réfléchir à des moyens d'aider les travailleurs pour qu'ils retournent au travail lorsqu'ils pourront le faire en toute sécurité. Or, ce moment variera beaucoup d'une personne à l'autre, compte tenu de la nature même de la sécurité et des contraintes auxquelles chacun est exposé.
    Comme je l'ai déjà exprimé, il y a à tout le moins des limites opérationnelles qui nous empêchent d'établir un revenu de base universel, parce que comme je l'ai dit, nous n'avons pas de liste magique. Nous n'avons pas de liste vraiment universelle. Nous avons créé le système le plus simple possible pour répondre à la demande très vite, mais toutes les personnes dans le besoin n'y ont pas nécessairement accès. Comme on a pu le constater, ce n'est pas nécessairement magique. Nous...
    Je m'excuse, madame Robson. Nous avons largement dépassé le temps imparti.
    Merci, monsieur Vaughan.

[Français]

    Nous passons maintenant la parole à Mme Chabot pour six minutes.

[Traduction]

    Monsieur le président, j'aimerais rapidement invoquer le Règlement. Je sais que nous travaillons tous d'environnements différents, chacun chez soi, pour cette séance virtuelle ardue, mais il est très difficile d'entendre certaines questions et réponses quand il y a des distractions en arrière-plan. Je voudrais vraiment demander à tous les députés et aux témoins, dans la mesure du possible... Pour utiliser une expression surutilisée en ce moment, nous vivons des temps sans précédent, mais c'est très déconcentrant. Il est très difficile d'entendre les questions et les réponses avec toutes les distractions en arrière-plan.
    Ce n'est qu'un commentaire, monsieur le président. Si chacun peut faire de son mieux pour assurer le silence en arrière-plan, ce serait apprécié. Je ne peux pas moi-même le faire toujours, puisqu'on voit parfois mes enfants faire irruption, mais je fais de mon mieux pour informer les membres de ma famille de la situation, et il serait apprécié que nous faisions tous notre possible pour limiter les distractions.
    Les écouteurs fournis par la Chambre des communes aident beaucoup aussi, mais je vous remercie de cette observation, madame Kusie.
    Merci.

[Français]

    Madame Chabot, vous avez la parole pour six minutes.
     Bonjour.
    Je veux d'abord remercier les trois derniers intervenants.
    Pour ma part, je crois également qu'il serait fort intéressant de prolonger la séance d'une heure.
    Monsieur Lafrenière, je vous remercie de votre présentation. Vous avez évoqué vos craintes et les difficultés que vous avez rencontrées. À nos bureaux, nous avons rencontré les mêmes difficultés concernant l'admissibilité à la PCU et la fermeture des bureaux de Service Canada. Nous avons posé des questions aux fonctionnaires au sujet de Service Canada, et ils nous ont fait part de tous les problèmes liés au fait que les services sont uniquement disponibles par Internet ou par téléphone. Comment voyez-vous la reprise des services en personne à court terme?
    Mme Robson a aussi parlé de souplesse en ce qui concerne la PCU et la PCUE, la Prestation canadienne d'urgence pour les étudiants. Le Bloc québécois a justement proposé une mesure visant à ce que les gens ne perdent pas entièrement leurs prestations en cas de reprise du travail. J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet.
    En terminant, pourriez-vous nous parler un peu de la manière dont vous voyez la reprise et la suite des choses?
     Tout d'abord, en ce qui concerne les bureaux de Service Canada, je dois dire que je ne suis pas un spécialiste de la logistique. Je sais que les centres ont des superficies variées, mais il est possible d'en ouvrir, du moins dans la plupart des villes intermédiaires du Canada, car il y a un besoin.
    En ce qui concerne les répercussions liées à cela, je ne sais pas si cela se passe partout de la même façon, mais, comme je l'ai mentionné, il est actuellement impossible pour certaines personnes d'utiliser Internet, car elles n'y ont pas accès à la maison et elles ne peuvent pas se rendre dans les centres communautaires habituels où elles peuvent avoir accès à un ordinateur pendant une heure ou deux. Du côté de la ligne d'information téléphonique, cela commence à peine à se calmer. Toutefois, au cours des premières semaines, les gens nous appelaient constamment pour nous dire qu'ils étaient tout simplement incapables d'avoir une réponse, malgré de nombreux essais, ou qu'ils avaient attendu des heures au téléphone. Le service est inadéquat et il faut y remédier au plus vite.
    Comme le gouvernement n'était pas capable de répondre à la demande, nos groupes devaient s'en charger. Par exemple, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, il arrivait qu'on remplisse une demande en ligne pour une personne en lui demandant ses renseignements au téléphone. Voilà le genre de répercussions qui ont touché nos groupes de façon concrète. Cette situation n'est donc pas facile, surtout pour nos groupes qui, comme à peu près tout le monde, font du télétravail. Ils ont été obligés de se réorganiser à la maison. La très grande majorité d'entre eux ne sont même pas dans leur lieu de travail habituel.
    Concernant la PCUE, si j'ai bien compris votre question, je dirais que nous privilégions une mesure semblable à celle qui a finalement été adoptée pour la PCU, c'est-à-dire de prendre en considération un petit montant. Je ne sais pas si cette somme atteindrait 1 000 $ comme dans le cas de la PCU, mais s'il est possible de prouver qu'il y a eu une perte de revenu ou qu'il y en a une à prévoir, nous pensons que les étudiants devraient quand même y avoir accès. Pour ces gens-là, comme je l'ai dit, il s'agit aussi d'un revenu qui leur permettrait de poursuivre leurs études. C'est d'ailleurs une question qui n'a pas été beaucoup soulevée lors des débats. Personnellement, je n'en ai pas entendu beaucoup parler. Il y a aussi toute cette dimension à considérer.
    Pour ce qui est de la suite des choses, c'est sûr qu'il faut se poser la question. Bien qu'on pense tout de suite au secteur de la restauration, qui est souvent mentionné, il y a des secteurs entiers qui vont prendre du temps à redémarrer. Il y a même des secteurs auxquels on ne pense pas nécessairement et qui exportent une partie de leurs produits. Quand pourra-t-on recommencer à exporter? C'est bien beau de faire rentrer les gens au travail, mais sera-t-on capable d'écouler les produits?
    Il risque d'y avoir une longue période où les entreprises vont rappeler seulement une partie de leur personnel ou réduire les horaires de travail. On ne sait pas encore comment cela va se passer, mais il faut y réfléchir. Je pense que l'assurance-emploi aura un rôle central à jouer. Je ne sais pas comment le gouvernement financera la caisse d'assurance-emploi, mais au rythme où vont les choses, si on prend l'argent de la caisse, elle n'existera plus très bientôt. Il faut remettre ce programme en marche de toute façon, et il faut discuter des bases sur lesquelles cela se fera. Il doit y avoir un débat de société et on doit inviter les intervenants à se prononcer là-dessus.
(1905)
    Il ne vous reste que 10 secondes, madame Chabot. Je pense qu’il est impossible d’obtenir une réponse en aussi peu de temps.
    Merci, monsieur Lafrenière.
    Est-ce que j’ai terminé, monsieur le président?
    Vous n’avez que le temps d’un commentaire très bref, madame Chabot.
    Monsieur Lafrenière, vous avez mentionné qu’une révision globale du régime d’assurance-emploi n’avait pas été faite depuis 40 ans. Tout en gardant des mesures transitoires dans le cadre de la reprise, êtes-vous d’accord sur le besoin de s’attaquer immédiatement à ce dossier?
    Monsieur Lafrenière, je vous encourage à fournir une réponse écrite à la greffière, s’il vous plaît. Nous avons atteint la limite de notre temps.
(1910)
    Parfait, monsieur le président. Je comprends.
    Merci beaucoup, monsieur Lafrenière.
    Merci, madame Chabot.

[Traduction]

    Nous entendrons maintenant Mme Kwan, qui dispose de six minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie également les témoins.
    Ma première question s'adresse à M. Preston. Le NPD souhaitait que le gouvernement établisse une prestation directe universelle. De cette façon, les personnes handicapées, âgées et toutes les autres seraient incluses. Nous essayons maintenant plutôt de combler les lacunes avec la PCU, le programme pour les étudiants, etc.
    Le gouvernement a décidé de ne pas retenir cette option, et nous voilà avec la PCU. La semaine dernière, à la Chambre des communes, nous avons réussi à convaincre le gouvernement d'appuyer une motion, qui a été adoptée à l'unanimité, afin que les personnes âgées et les personnes handicapées touchent des prestations pour traverser l'épreuve de la COVID-19.
    J'aimerais savoir si vous auriez des recommandations à faire à ce sujet.
    Oui. Quand on parle de financement, je pense qu'il est absolument essentiel de mettre l'argent entre les mains des personnes pour qu'elles puissent elles-mêmes subvenir à leurs propres besoins, en fonction de ce qui est important pour elles. Chaque fois que les gouvernements essaient d'offrir directement des soins à la population, de déterminer de quel type de mesures ils ont besoin, ils font fausse route, parce que le handicap n'est pas monolithique.
    J'estime absolument essentiel de permettre à chaque personne d'utiliser l'argent pour obtenir ce dont elle a besoin au moment où elle en a besoin. Il n'y a pas que les masques et les gants, littéralement, ce peut vouloir dire d'embaucher des personnes pour aller à l'épicerie, aller chercher des médicaments à la pharmacie, faire toutes ces petites choses que malheureusement, bon nombre d'entre nous tenaient pour acquises avant que tout cela n'arrive.
    Merci.
    Nous avons également discuté du fait qu'il y a des provinces qui récupèrent une partie des prestations d'urgence, donc la façon de faire n'est pas la même partout au pays.
    Si nous voulons nous assurer que toutes les personnes reçoivent l'aide dont elles ont besoin, sans rien perdre de l'autre côté, devrions-nous établir des normes nationales en ces circonstances sans précédent? Je sais qu'habituellement, nous n'intervenons pas dans les domaines de compétence des provinces et des territoires, mais c'est une question qui me traverse l'esprit. Dans ces circonstances sans précédent de pandémie nationale, est-ce une chose que le gouvernement fédéral devrait envisager?
    Oui. Je me sens peut-être plus à l'aise de le dire de chez moi, à London, en Ontario, plutôt que d'Ottawa, où il serait facile de me trouver, mais la vie d'une personne handicapée peut différer grandement d'une province à l'autre. Selon la province où l'on vit, l'expérience du handicap est totalement différente. Dans une situation comme celle-ci, de pandémie mondiale, il doit absolument y avoir un leadership qui vient d'en haut. Nous devons veiller à ce que les personnes handicapées ne glissent pas entre les mailles du filet, qu'elles vivent à l'Île-du-Prince-Édouard ou en Colombie-Britannique.
    Je vous remercie beaucoup pour votre réponse.
    Madame Robson, alors que nous voulons commencer à penser à l'après-COVID, nous sommes toujours dans une situation où les gens doivent encore maintenir une distance sociale et où ils sont encore sans emploi. Je ne suis pas certaine qu'en juin les choses reviendront à la normale et quelle sera la normalité à ce moment-là.
    S'il est nécessaire, et c'est fort probable, que les prestations soient maintenues jusqu'à ce qu'il ne soit plus nécessaire d'observer la distanciation sociale, est-ce quelque chose que le gouvernement devrait faire à votre avis?
    Je vous remercie pour votre question.
    Je crois qu'il est clair que les personnes qui ont demandé la Prestation canadienne d'urgence et qui ont reçu quatre paiements d'affilée auront atteint en juin le maximum de 16 semaines de prestations. Un certain nombre de prestataires de la PCU, nous l'espérons, auront été réembauchés par leur employeur grâce à la subvention salariale. Toutefois, un grand nombre de personnes n'auront pas été réembauchées, alors, nous devrons continuer à leur fournir un soutien financier.
    Comme je l'ai mentionné, les mères seront particulièrement désavantagées si les services de garde et les écoles ne rouvrent pas complètement avant septembre. Elles aussi devront continuer de bénéficier d'un soutien financier.
    Merci.
    Actuellement, mon bureau est inondé de courriels provenant de personnes qui tombent entre les mailles du filet. Prenons, par exemple, les petites entreprises. Le programme d'aide pour le loyer commercial s'applique aux propriétaires. Certains propriétaires n'ont pas de prêt hypothécaire, alors, ils affirment que ce programme ne fonctionne pas pour eux. D'autres ne veulent pas remplir la paperasse ni traiter avec le gouvernement, alors, ils ne présenteront pas de demande. Rien n'incite les propriétaires à soutenir les locataires grâce à ce programme.
    Le gouvernement devrait-il envisager de modifier le programme pour faire en sorte que cette aide pour le loyer commercial soit versée directement aux propriétaires de petites entreprises plutôt qu'elle leur soit versée par l'intermédiaire des propriétaires d'immeubles commerciaux? Devrait-on éliminer l'exigence selon laquelle il faut avoir un prêt hypothécaire?
(1915)
    Si je comprends bien, ce programme a été élaboré au terme de négociations entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux, car, bien entendu, la réglementation régissant les loyers relève de la compétence des provinces. Cette question dépasse un peu mon domaine d'expertise, mais je crois savoir que le gouvernement a mis en place d'autres mesures de soutien pour les petites entreprises. Il serait intéressant de savoir si les petites entreprises qui ne peuvent pas bénéficier de l'aide d'urgence pour le loyer commercial en raison des critères ou des circonstances que vous avez mentionnés sont admissibles à d'autres mesures de soutien destinées aux petites entreprises, et le cas échéant, si cela leur permet d'obtenir le soutien nécessaire.
    Permettez-moi d'intervenir.
    Mes électeurs — et je reçois littéralement des milliers de courriels de leur part — affirment qu'ils ne peuvent pas en bénéficier. Les propriétaires uniques, par exemple, éprouvent encore des difficultés. Ils ne sont pas admissibles à un prêt. La situation va perdurer, alors, je crois qu'il est dans notre intérêt que le gouvernement aide les petites entreprises à survivre en ce moment, car s'il ne le fait pas, la reprise sera d'autant plus difficile pour nous, collectivement, pour le Canada dans son ensemble. Je comprends que...
    Merci, madame Kwan. Le temps est écoulé.
    Premièrement, je remercie beaucoup tous les témoins pour leur présence et pour être restés plus longtemps.
    Je remercie également le personnel de soutien d'être resté plus longtemps.
    J'ai senti qu'il y avait de la frustration quant au temps que nous avons eu pour poser des questions aux témoins. Si nous souhaitons que certains témoins comparaissent à nouveau, ils seront peut-être disposés à le faire. Nous pourrions notamment discuter de cela lors de la conversation informelle avec des représentants de chacun des partis avant la prochaine réunion de vendredi.
    Sur ce, je remercie tous mes collègues. Je vous souhaite une excellente soirée.
    La séance est levée.
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