HEAL Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON HEALTH
COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 24 novembre 1999
Le président (M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.)): Mesdames et messieurs, nous allons ouvrir la séance du Comité de la santé.
Nous devrions commencer par régler quelques questions administratives. M. Martin a demandé que le ministre comparaisse devant le Comité de la santé pour l'examen du budget supplémentaire des dépenses, au moins d'ici le 6 décembre, en raison des exigences de la loi. Si le comité est d'accord, je me demande si nous ne pourrions pas simplement régler cette question de la façon suivante, c'est-à-dire en demandant à la greffière de contacter le ministre pour voir s'il peut comparaître devant le comité avant le 6 décembre pour l'examen du budget supplémentaire des dépenses.
Si nous sommes d'accord, je pense que nous pouvons continuer. Est-ce d'accord?
M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le président, je préférerais que nous votions pour nous prononcer de façon décisive sur cette question afin qu'il soit pris bonne note que nous demandons au ministre de comparaître devant le comité. Ainsi, le ministre n'épargnera aucun effort pour venir. Si son emploi du temps ne le lui permet pas, tant pis, mais je crois essentiel que le comité vote sur cette question pour faire clairement comprendre au ministre que nous voudrions qu'il comparaisse.
Le président: Dans ce cas, je vais simplement vous demander de proposer une motion... Je vais formuler les choses ainsi. Tous les membres du comité sont-ils d'accord pour que nous demandions au ministre de comparaître si son emploi du temps le lui permet? Tous ceux qui sont pour?
Des voix: D'accord.
Le président: La motion est adoptée à l'unanimité. Merci beaucoup.
Je voulais également porter une autre question à l'attention du comité et des membres de l'auditoire... Personnellement, je voudrais dire que depuis mon arrivée sur la Colline j'ai été très impressionné par le calibre de notre personnel et les gens qui travaillent pour nous. Si vous regardez autour de vous, vous verrez des gens à ma droite et à ma gauche qui font un travail exceptionnel, non seulement pour ce comité, mais pour l'ensemble du gouvernement, et certainement pour les Canadiens de toutes les régions du pays.
Je m'adresse particulièrement à Nancy Miller Chenier, qui revient d'Oxford, où elle a défendu avec succès une thèse de doctorat. Je tenais à ce que vous sachiez que sa thèse portait sur l'égalité entre les sexes dans le contexte de l'emploi. J'espère que d'ici lundi on lui annoncera officiellement qu'elle a obtenu un doctorat.
Cela souligne le calibre des gens qui travaillent pour nous, c'est-à-dire non seulement pour les parlementaires et les autres, mais aussi pour la population canadienne. Je crois que nous devrions féliciter Nancy pour son excellent travail, et je vais donc demander de le faire.
Des voix: Bravo!
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord): Pouvons-nous la convoquer comme témoin au sujet de ce projet de loi?
Le président: Je crois que nous devrons peut-être le faire à un moment ou l'autre.
Passons maintenant à nos témoins, qui représentent les Instituts de recherche en santé du Canada. Comme vous le savez, c'est une question dont la Chambre débat actuellement, et nous espérons que le projet de loi sera bientôt renvoyé devant notre comité. Je crois que cela se passera très bientôt. Nous recevons donc le Dr Henry Friesen, qui est le président du conseil d'administration ainsi que le président du Conseil de recherches médicales.
Je vous propose de demander au Dr Friesen de commencer par nous faire une déclaration liminaire. Je lui demanderai ensuite de bien vouloir nous présenter les personnes qui l'accompagnent aujourd'hui et que nous entendrons également. Nous passerons alors aux questions en commençant par le Parti réformiste, avec des tours de sept minutes.
Docteur Friesen, la parole est à vous.
Dr Henry Friesen (président, Conseil de recherches médicales; président du conseil d'administration provisoire, Instituts de recherche en santé du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président. C'est une occasion spéciale, un moment historique pour nous tous ici. Nous participons à une initiative qui conduira à la création d'une nouvelle institution extrêmement importante pour les Canadiens.
Je suis accompagné de M. Eric Maldoff, l'un des partenaires de la firme Heenan Blaikie, de Montréal, dont il est le vice-président; de Mme Dorothy Lamont, présidente-directrice générale de la Société canadienne du cancer et de l'Institut national du cancer du Canada; du Dr Yves Morin, professeur émérite, membre du conseil d'administration du Conseil de recherches médicales du Canada et cardiologue de renom, ainsi que de M. Tom Brzustowski, président du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie.
• 1545
Mark Renaud, que vous allez peut-être rencontrer plus tard, je
crois, aurait voulu venir, mais il a été retenu par d'autres
obligations. Par conséquent, des trois présidents des conseils de
recherche qui auraient dû être là, il nous manque M. Renaud, qui,
bien entendu, apporte à cette initiative la perspective du milieu
des sciences sociales et humaines.
Je crois utile d'expliquer très brièvement pourquoi nous sommes ici, quels sont nos antécédents et ce qui nous a amenés à partager la même opinion quant à la possibilité de moderniser la recherche en santé au Canada.
Le Conseil de recherches médicales que le projet de loi C-13 propose d'abolir a 40 ans d'histoire derrière lui. Cela nous ramène 40 ans en arrière, presque à l'époque où j'ai terminé mes études, pour réfléchir à ce que la vie était alors et ce qu'elle est aujourd'hui. Nous faisons partie de ces changements, dans les structures, les possibilités et les défis qui nous attendent.
Il y a 40 ans, une épidémie de poliomyélite faisait rage à Winnipeg. Aujourd'hui, depuis 10 ans, la polio a été vaincue en Amérique du Nord. Il n'y en a eu aucun cas. Dans l'intervalle, la variole a disparu de la face du monde. Mais nous avons de nouveaux fléaux. Il y a le VIH. Ces changements continueront de se produire, et il faudra que les institutions et les organismes qui oeuvrent dans le domaine de la santé se préparent à y faire face.
Des dizaines de milliers de gens ont été hospitalisés dans des établissements pour la tuberculose et des maladies mentales. À l'époque, nous n'avions pas vraiment pris conscience des répercussions que les facteurs sociaux et économiques avaient sur la santé. C'est une chose que l'on comprend mieux. Nous contribuons à ces changements.
Le CRM et le Programme national de recherche et de développement en matière de santé ont créé une excellente base qui fera partie de la structure des IRSC. C'est un moment très particulier pour nous tous alors que nous envisageons les nouvelles possibilités qui s'offrent à nous, les changements profonds qui transformeront, moderniseront et uniront une organisation de recherche en santé qui sera complète, centrée sur les résultats et dont les objectifs premiers seront la poursuite de l'excellence—je parle de l'excellence selon les normes internationales—et la création de nouvelles connaissances qui feront du Canada un chef de file mondial, et qui verra à ce que ces connaissances soient appliquées de toute urgence pour améliorer la santé des Canadiens, améliorer les soins de santé, consolider le système et améliorer les services et les produits de santé.
Le projet de loi poursuit un objectif particulier. C'est il y a un an, environ, que nous avons fait valoir notre cause au ministre. Nous représentions un vaste regroupement. Les chercheurs de la santé n'ont pas été les seuls à dire au ministre qu'il y avait des possibilités à saisir. En fait, il avait devant lui un nouveau rassemblement des forces de plusieurs institutions et organismes.
Je voudrais surtout parler de l'engagement extraordinaire des organismes bénévoles nationaux. Ils représentent des millions de Canadiens, leur sincérité et leur générosité, car des millions de Canadiens comprennent les espoirs que la recherche leur apporte pour résoudre les problèmes qui les touchent.
J'ai eu l'honneur, il y a quelques années, d'assumer la présidence de l'Institut national du cancer du Canada, l'organisme dont Dorothy est la directrice générale. C'est là que j'ai constaté le dynamisme, la passion et la détermination des bénévoles qui font partie de cette merveilleuse organisation.
Grâce aux efforts de tous les groupes participants, le budget de février 1999 annonçait des fonds supplémentaires et la mise en place du processus qui nous a conduits là où nous sommes aujourd'hui. Le ministre de la Santé a nommé 34 chercheurs éminents à un conseil d'administration provisoire dont nous sommes les représentants. Là encore, il s'agissait d'un vaste regroupement réunissant des perspectives différentes.
• 1550
Il y a eu de très longues discussions, et parfois même des
débats animés sur certaines questions, mais cela a finalement
débouché sur une convergence d'opinions, et le projet de loi qui en
résulte représente la bonne façon de procéder pour notre pays.
Cette mesure aura des répercussions aux quatre coins du Canada. Ce projet de loi C-13 porte bien son nom, étant donné qu'il y a treize provinces et territoires. Les gens de toutes les régions du pays devraient voir les avantages qui découleront de cette mesure.
Selon nous, il s'agit d'une loi habilitante. Elle facilite les choses et fournit un cadre de travail. En fait, la structure est très simple. Il y a un conseil d'administration, un président, une série d'instituts qui centreront leur attention sur certains thèmes et qui seront dirigés par des personnalités exceptionnelles guidées par des conseils consultatifs. C'est une loi habilitante. Elle assure une certaine souplesse.
Il s'agit d'un nouveau mode d'organisation qui, selon moi, donnera suite à l'engagement que le premier ministre a pris de faire du Canada le meilleur endroit où vivre. Le Canada est le meilleur endroit pour la création de nouvelles connaissances. On tiendra compte de nouveaux facteurs déterminants de la santé qui n'avaient qu'une importance secondaire jusqu'ici. Cela créera un solide environnement de recherche. Cette initiative va faire suite aux autres investissements du gouvernement fédéral de façon très logique. Le FIC et les chaires du XXIe siècle feront du Canada un pays où la recherche atteindra les plus hauts niveaux.
Avant de conclure et de céder la parole à Eric Maldoff pour lui permettre de présenter son point de vue, je tiens à remercier les membres du comité pour l'appui qu'ils nous ont accordé tout au long de l'initiative qui a conduit à la création des IRSC... et avant cela, pour leur appui au Conseil de recherches médicales.
Monsieur Maldoff.
M. Eric M. Maldoff (vice-président, conseil d'administration provisoire, Instituts de recherche en santé du Canada): Merci beaucoup.
C'est pour moi un grand plaisir et un honneur que d'être ici avec vous aujourd'hui. Je suis également très soulagé de voir que nous avons pu arriver jusqu'ici.
C'est un énorme défi que le milieu de la recherche a dû relever pour unir ses forces comme il l'a fait, avec une grande solidarité, de façon à vous inciter à adopter le projet de loi dont le Parlement a été saisi.
On m'a présenté comme étant un avocat, ce que je suis, l'un des deux avocats que compte le conseil d'administration provisoire. À part ce défaut, au cours des dix dernières années j'ai été le président du conseil d'administration de l'Hôpital pour enfants de Montréal, de l'Hôpital universitaire pédiatrique de l'Université McGill, et, plus récemment, j'ai été membre du comité exécutif du centre de santé de l'Université McGill. Au cours de cette période, j'ai également siégé au Forum national sur la santé, que vous connaissez sans doute.
Cette initiative a été absolument passionnante. Le domaine de la recherche joue évidemment un rôle clé pour la santé des Canadiens et pour nos services de soins de santé, et les Canadiens y accordent une très grande importance. Le programme de recherche fait partie intégrante de tout ce réseau.
Il a été extrêmement intéressant de travailler avec ce comité de 34 personnes aux antécédents et aux intérêts différents, qui venaient de milieux différents et des quatre coins du pays. Je dirais que c'était une expérience typiquement canadienne. Tous ces gens ont pu travailler ensemble parce qu'ils s'intéressent à la recherche et aussi parce qu'ils se méfient profondément les uns des autres. Tous croient que leurs propres intérêts devraient l'emporter sur le reste.
Comme d'habitude, c'est d'abord la foire d'empoigne, après quoi, au bout de quelques semaines, chacun finit par s'entendre. Les gens s'aperçoivent que, quels que soient leurs antécédents, l'endroit d'où ils viennent ou leur langue, ils poursuivent le même objectif. Ils commencent à s'exprimer dans les mêmes termes.
La première question à l'ordre du jour de notre conseil d'administration provisoire consistait à formuler des recommandations pour le libellé de la loi. Nous devions procéder rapidement, étant donné que nous nous étions réunis pour la première fois à la fin de mars et au début d'avril et que nous devions communiquer nos recommandations avant la fin de juin.
Le groupe s'est entendu de façon étonnante. Ses instructions pour la rédaction du projet de loi représentaient l'opinion unanime de 34 personnes venant de diverses régions du pays, des opinions qui résultaient des consultations intensives que nous avions menées un peu partout au Canada, dans les milieux intéressés, dans le milieu de la recherche, de même qu'auprès d'experts canadiens et étrangers. Par exemple, nous avons rencontré les instituts de santé nationaux, de même que l'organisme chargé de la politique de santé aux États-Unis.
• 1555
Nous avons également tenu des consultations importantes en
juin, au sommet scientifique du Conseil de recherches médicales. En
septembre, un atelier interactif a été organisé par le Conseil de
recherches en sciences humaines et la Fondation canadienne de la
recherche sur les services de santé, où les chercheurs de tout le
pays se sont réunis pour discuter de cette initiative. Les
organismes bénévoles nationaux ont tenu une importante réunion en
septembre.
Ce ne sont là que quelques-uns des événements qui ont réuni des gens de tout le pays.
Le principal aspect de la loi que le conseil d'administration provisoire a proposée, après mûre réflexion, c'est qu'il fallait, pour que le programme de recherche du pays continue de répondre aux réalités et aux besoins de la population canadienne, que nous nous dotions d'une structure stratégique qui puisse encourager l'initiative des chercheurs et se prêter à une grande diversité. Nous avions donc besoin d'une loi d'une vaste portée, habilitante, souple et propre à favoriser l'excellence de la recherche dans le domaine de la santé.
Je crois que tous les membres du conseil d'administration provisoire trouvent très encourageant de voir que le projet de loi C-13 reflète toutes ces idées. Il énonce de façon très énergique et très positive les valeurs qui le sous-tendent et l'objectif de cette entreprise.
Un principe primordial est bien entendu le concept des instituts. Comme Henry l'a mentionné, chaque institut aura un directeur scientifique jouissant d'un grand respect et d'une grande réputation d'excellence dans son domaine. Les instituts se spécialiseront dans certains thèmes et seront considérés comme des centres de leadership scientifique au Canada. Ils auront une existence non pas physique, mais virtuelle, et réuniront les chercheurs et la communauté scientifique, les bailleurs de fonds, les usagers, les organismes de bienfaisance ainsi que les provinces, pour promouvoir la recherche au nom des Canadiens.
Ces instituts pourront donc se fixer un programme de recherche stratégique dans leur champ thématique et disposeront d'un budget pour les initiatives de recherche, les initiatives stratégiques et le développement de l'institut.
Comme la loi le prévoit clairement, les instituts seront mandatés pour aborder les quatre domaines de la recherche en santé, soit la recherche biomédicale, la recherche clinique appliquée, les services et les systèmes de santé, ainsi que la culture, la société et la santé publique.
C'est une des grandes innovations dans le domaine de la santé dont les Canadiens peuvent être très fiers. Cette initiative va relier ensemble l'éventail complet des divers aspects et facteurs qui se rapportent à la santé des Canadiens. Nous reconnaissons par là que notre façon de concevoir la santé a changé. Nous savons que les facteurs sont multiples. Nous savons qu'il faut déployer des efforts interdisciplinaires. Nous savons que les problèmes et les solutions sont complexes et qu'il faudra dépenser beaucoup d'argent pour pouvoir trouver les solutions et assurer leur application.
Nous croyons que les instituts de recherche en santé apporteront une nouvelle synergie pour la recherche canadienne en santé et qu'ils permettront d'améliorer la santé et le bien-être des Canadiens tout en leur offrant des possibilités, des emplois et un très brillant avenir.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Maldoff.
Madame Lamont.
Mme Dorothy Lamont (vice-présidente, conseil d'administration provisoire, Instituts de recherche en santé du Canada): Bonjour, mesdames et messieurs. C'est pour moi aussi un grand honneur que d'être ici aujourd'hui... et je ressens le même soulagement qu'Eric.
J'ai également eu l'honneur de participer au processus remarquable que nous avons entrepris pour transformer la recherche en santé au Canada.
• 1600
Je voudrais parler un peu d'un élément essentiel de la
recherche en santé, le secteur bénévole, et d'une importante
caractéristique des IRSC, à savoir les partenariats.
En tant que directrice générale de l'Institut national du cancer du Canada et de la Société canadienne du cancer, j'ai pu constater directement les répercussions de la recherche en santé sur les Canadiens. J'ai vu des gens qui n'auraient pas survécu à leur cancer il y a 20, 15, ou même 10 ans, et qui ont maintenant la joie de vivre et de voir grandir leurs enfants, et même leurs petits-enfants, grâce à la recherche effectuée par les chercheurs canadiens.
Mes organismes ont eu le privilège de soutenir une bonne partie de cette recherche grâce aux généreux dons philanthropiques du public canadien. Le bénévolat est un secteur solide pour qui le financement de la recherche en santé est une longue et fière tradition. Vous ne le savez peut-être pas, mais son appui est un modèle pour le monde entier.
Les instituts de recherche en santé du Canada doivent s'appuyer sur cette force, de même que sur les atouts que représentent les nombreux intervenants qui s'intéressent à la recherche en santé. C'est la méthode canadienne, et nous avons tout lieu d'être fiers de pouvoir établir cette entité, qui, j'en suis certaine, multipliera les effets de nos divers investissements dans la recherche en santé, ce qui améliorera la santé des Canadiens.
La Société canadienne du cancer et l'Institut national du cancer du Canada sont de grandes organisations, mais ce n'est là qu'un exemple des nombreux organismes bénévoles qui, collectivement, ont financé près de 15 p. 100 de la recherche en santé au Canada en 1997. Cela représentait environ 227 millions de dollars. En 1998, ce montant a été estimé à près de 300 millions de dollars.
Il faut souligner que ce secteur, qui représente 10 millions de bénévoles qui travaillent activement dans les réseaux de tout le pays, a participé à cette initiative et va jouer un rôle permanent et important dans le développement du potentiel des IRSC.
Selon moi, l'une des plus grandes réalisations des IRSC est que les organismes de bienfaisance nationaux qui oeuvrent dans le domaine de la santé formeront, avec les autres parties prenantes, des partenariats qui élargiront et augmenteront les répercussions de la recherche financée par le gouvernement fédéral et les autres sources de financement. Ce rôle sera particulièrement évident au sein des conseils consultatifs des instituts.
À part quelques rares exemples dont j'ai été témoin, c'est la première fois que le secteur du bénévolat et d'autres membres du public ont participé officiellement aux prises de décisions concernant l'orientation, le financement et l'organisation de la recherche en santé financée par le gouvernement fédéral. Pour les organismes comme les miens, les conseils consultatifs des instituts figurent parmi les caractéristiques les plus intéressantes et les plus novatrices des IRSC.
Divers types de partenariats ont été prévus, dont certains entre les IRSC et les organismes de bienfaisance nationaux et provinciaux, de même que d'autres organismes bénévoles, qui sont nombreux, comme vous le savez. Les IRSC concluront des partenariats pour établir des objectifs et des programmes de recherche communs et améliorer la coordination et la planification de nos efforts communs.
Les utilisateurs de la recherche, par exemple les fournisseurs de soins de santé privés, les associations professionnelles, le secteur privé, les consommateurs et les autres favoriseront des partenariats avec les IRSC de façon à ce que les résultats de la recherche soient diffusés rapidement à ceux qui pourront en bénéficier.
Les IRSC établiront des liens solides avec les services et les organismes de santé provinciaux et les responsables de la prestation des soins afin qu'ils profitent des connaissances générées par la recherche.
Les IRSC formeront également des partenariats avec le secteur privé pour financer la recherche et faciliter la commercialisation des résultats de la recherche financée par les IRSC si c'est bénéfique pour les Canadiens sur le plan sanitaire, économique et social.
Les IRSC établiront des partenariats solides avec tous les membres du secteur de la recherche afin d'intégrer les activités de ces derniers et de transformer la façon dont la recherche est menée. C'est un programme très ambitieux, mais il vaut la peine d'y travailler, et c'est réalisable dans l'intérêt des Canadiens.
• 1605
Je vous remercie de votre attention. Je suis prête à discuter
de ces questions plus à fond avec vous.
Le président: Merci beaucoup, madame Lamont. C'était excellent.
[Français]
Monsieur Morin.
Dr Yves Morin (membre du Conseil de recherches médicales du Canada; membre du Conseil d'administration provisoire, Instituts de recherche en santé du Canada): Merci, monsieur le président.
Il est exceptionnel qu'une organisation comparaisse devant un comité parlementaire pour recommander sa propre disparition, mais c'est précisément ce que nous faisons aujourd'hui.
En effet, le projet de loi C-13 abrogera la Loi sur le Conseil de recherches médicales du Canada et mettra un terme à 40 ans d'existence du CRM. Ce projet de loi a l'appui unanime de tous les chercheurs qui sont affiliés au CRM, comme on a pu le voir lors du sommet scientifique qui s'est tenu à Toronto en juin dernier; il a aussi reçu l'appui unanime des membres du conseil à plusieurs reprises.
[Traduction]
Le projet de loi C-13 aura pour effet d'abroger la Loi sur le Conseil de recherches médicales et de mettre un terme aux 40 années d'existence du CRM. Le fait que ce projet de loi ait le plein appui des chercheurs du CRM témoigne de la confiance qu'ils placent dans les IRSC et ces importantes initiatives.
[Français]
Pendant ses 40 ans d'appui à la recherche, le CRM a permis la réalisation de découvertes qui ont vraiment contribué au bien-être des Canadiens.
Mais si notre passé est productif, notre avenir le sera encore davantage.
En effet, la création des Instituts de recherche en santé du Canada, les IRSC comme on les appelle maintenant, permettra à nos meilleurs chercheurs de réaliser de la recherche à des niveaux semblables à ceux que l'on retrouve ailleurs au monde, tout en assurant un soutien salarial à plus de chercheurs à toutes les étapes de leur carrière.
Les IRSC rendront les chercheurs encore plus efficaces. À titre d'exemple, le Dr Jacques Simard, un jeune chercheur de l'Université Laval qui a découvert le gène BRC A2, qui prédispose au cancer du sein, voit dans la venue des IRSC un élément novateur qui lui permettra, dans ses recherches, d'intégrer de nouvelles disciplines—il est généticien de base—comme l'épidémiologie, l'éthique, la démographie, la clinique et les services de distribution de soins, tout ceci au service de la population de l'est du Québec.
En tant que Québécois, j'aimerais souligner le rôle important qu'a joué le Dr Michel Bureau, président du Fonds de recherche en santé du Québec, au niveau du Conseil provisoire des IRSC. La recherche en santé au Québec est particulièrement robuste et a grandement profité de l'appui du CRM. Je suis persuadé que nos chercheurs québécois profiteront au maximum de la création des IRSC.
En terminant, monsieur le président, les Instituts de recherche en santé du Canada construiront sur les fondations du CRM un édifice qui répondra aux possibilités qu'offre la science et aux besoins des Canadiens en matière de santé à l'aube du XXIe siècle.
[Traduction]
Les IRSC poursuivront la tradition du Conseil de recherches médicales et aideront à créer un climat propice à la recherche en santé pour le XXIe siècle.
Merci beaucoup.
Le président: Merci.
Monsieur Brzustowski.
M. Tom Brzustowski (président, Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie; membre, conseil d'administration provisoire, Instituts de recherche en santé du Canada): Merci, monsieur le président.
Bonjour, mesdames et messieurs. Je suis ravi, moi aussi, d'appuyer cette initiative extrêmement importante.
Je voudrais me faire l'écho de M. Maldoff. Cette initiative est le résultat de beaucoup de travail. C'était un travail difficile, mais qui a été accompli sous la poussée des idées très intéressantes que le Dr Friesen a présentées à de nombreuses reprises.
Monsieur le président, je me dois de vous dire quelques mots au sujet de moi-même et des raisons pour lesquelles le président d'un organisme qui parraine la recherche en science et en génie se trouve devant vous.
En ce qui me concerne, comme vous le savez, j'ai été professeur à l'Université de Waterloo pendant des années, plus précisément pendant 25 ans. J'ai ensuite été pendant huit ans sous-ministre en Ontario, et les dernières fonctions que j'ai remplies dans cette province, pendant plusieurs années, consistaient à diriger le Conseil du premier ministre sur la santé, le bien-être et la justice sociale. Cela m'a apporté une certaine compréhension du sujet que nous examinons ici.
• 1610
Je voudrais toutefois vous parler des activités du Conseil de
recherches en sciences naturelles et en génie. Si vous le
permettez, je voudrais vous lire deux petits paragraphes—et c'est
à cela que se limitera mon discours—figurant dans une déclaration
que j'ai publiée il y quelques semaines, à l'intention des
chercheurs de notre conseil, soit de 9 000 à 10 000 personnes, pour
leur expliquer quelles pourraient être nos relations.
[Français]
-
Tout d'abord, rappelons que les ICRS
sont très prometteurs. Leur
approche intégrée de la recherche en santé dans ses
quatre domaines d'activités (recherche biomédicale
fondamentale, recherche clinique appliquée, systèmes de
soins de santé et déterminants sociaux et culturels de la
santé) permettra d'examiner, selon une
perspective d'ensemble, un nombre accru de facteurs qui
ont une incidence sur notre santé. On peut attendre de
cette nouvelle vision de la recherche qu'elle améliore
la prestation de services et qu'elle se traduise par
une meilleure santé pour la population canadienne.
Je poursuis en anglais.
[Traduction]
Mais quelle sera la participation du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie? La réponse est simplement que la loi qui nous régit nous empêche expressément de soutenir les sciences de la santé en ces termes:
-
Le Conseil a pour mission:
-
a) de promouvoir et de soutenir la recherche dans le domaine des
sciences naturelles et du génie, à l'exclusion des sciences de la
santé;
Néanmoins, le conseil se livre, bien sûr, à de la recherche fondamentale en sciences naturelles et en génie qui peut contribuer en aval à la recherche dans le domaine de la santé. Nous finançons également des recherches dans le domaine de la technologie qui peuvent avoir des applications dans les sciences de la santé et les soins médicaux.
À la veille du millénaire, les frontières entre les disciplines se chevauchent tellement qu'une découverte dans le domaine des sciences de la vie peut entraîner la semaine suivante une nouvelle découverte dans un laboratoire de recherche médicale, et qu'une découverte ou une invention dans un laboratoire d'ingénierie peut être adaptée pour être utilisée dans les services de santé le lendemain.
C'est pour cette raison et pour toutes les raisons que vous avez entendues tout à l'heure que je suis fier d'être ici et d'appuyer sans équivoque le principe des IRSC.
Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup.
Merci à vous tous. Je suis sûr que nous approfondirons la discussion dans un instant, lorsque nous passerons aux questions. Nous vous remercions pour vos opinions et vos déclarations liminaires.
Monsieur Elley, voulez-vous commencer?
M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.
C'est également un honneur pour moi que de participer à cette journée historique, et je voudrais commencer par adresser mes remerciements au Conseil de recherches médicales pour le merveilleux travail qu'il a accompli au cours des années pour le compte des Canadiens, dans tout le domaine de la recherche médicale. Vous méritez toutes nos félicitations pour ce que vous avez accompli jusqu'ici.
Comme toute bonne organisation, vous pouvez regarder en arrière, mais vous ne pouvez pas rester dans le passé. Au nom de l'Opposition officielle et du Parti réformiste, je tiens à dire que nous appuyons tout à fait cette initiative. Nous croyons qu'elle est bonne pour la recherche médicale, bonne pour la santé des Canadiens et bonne pour le pays. Nous sommes donc tout à fait d'accord. Nous avons peut-être quelques questions à poser, mais ce ne sont certainement pas des questions importantes.
Je signale que j'ai participé à une excellente séance d'information donnée par les fonctionnaires de Santé Canada au sujet de cette mesure avant la réunion et que je n'ai donc pas beaucoup de questions à poser. J'ai déjà obtenu la plupart des réponses.
Bien entendu, il y a d'autres organismes de recherche au Canada. Il y a certains établissements de recherche privés. Certains d'entre eux sont reliés aux institutions de recherche provinciales, et ce sont les gouvernements provinciaux qui les financent. Je me demande quels sont les rapports entre les provinces et le gouvernement fédéral à cet égard, comment les provinces ont été consultées et quel devrait être leur rôle au sein des nouveaux instituts de recherche en santé du Canada. Quelqu'un voudrait peut-être répondre à cette question.
Dr Henry Friesen: C'est une bonne question.
Des voix: Oh, oh!
M. Reed Elley: C'est aussi une question réformiste. Je viens de l'Ouest.
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): [Note de la rédaction: Inaudible]
M. Reed Elley: Il n'y a pas de monopole là-dessus, Réal.
Dr Henry Friesen: Je voudrais d'abord vous remercier de vos commentaires louangeurs.
Au Canada, la recherche en santé se fait dans le cadre d'un partenariat souvent implicite, car la plupart du temps il n'y a pas d'accord officiel. Si je peux vous donner une vue d'ensemble, le financement de la recherche en santé se chiffre aux environs de 2,3 milliards de dollars—c'est un chiffre récent de Statistique Canada—dont un peu plus d'un milliard vient du secteur privé. L'autre milliard provient du secteur public, sans oublier les organismes bénévoles.
Commençons par le financement du gouvernement fédéral, qui s'élève à 20 ou 25 p. 100 environ. Il a diminué un peu, mais il est en train de remonter. Nous avons ensuite l'ensemble des organismes bénévoles. Les organismes de recherche des provinces représentent une composante très importante. Il y a aussi beaucoup d'appuis locaux. Dans chaque collectivité, on est très fier des institutions qui soutiennent la recherche dans le domaine de la santé.
En réalité, aucune entente officielle n'est conclue avec ces principales sources de financement. Les endroits où se fait la recherche sont également variés. Il y a des centaines d'institutions, que ce soit les universités, les hôpitaux, les instituts de recherche et les laboratoires privés, bien entendu, qui fonctionnent tous selon la méthode canadienne.
Pour répondre plus précisément à votre question au sujet des provinces et de la façon dont elles ont été consultées, le conseil d'administration provisoire comptait des représentants des deux provinces qui ont officiellement investi dans la recherche sur la santé. Dans le cas du Québec et du FRSQ, le Fonds de la recherche en santé du Québec, son président, Michel Bureau, faisait partie du conseil d'administration provisoire. Il était membre d'un groupe de travail précédent qui a débouché sur cette initiative. Le représentant de l'Alberta était le Dr Matt Spence, le président de l'Alberta Heritage Foundation for Medical Research.
De plus, à divers moments, le sous-ministre et d'autres personnes ont discuté avec les sous-ministres de la Santé à l'occasion des consultations fédérales-provinciales des sous-ministres. J'ai rencontré à plusieurs reprises des sous-ministres ou ministres de la Santé ou, dans certains cas, du Développement économique, dans le cadre de cette initiative. Les discussions portant sur les IRSC ont joué le rôle de catalyseur.
Dans certaines régions du pays, nous pouvons voir que la recherche n'est pas aussi florissante qu'elle le devrait. Grâce au soutien supplémentaire initial qu'apporte le financement des IRSC, nous avons pu conclure une entente de partenariat avec les ministères de la Santé et du Développement économique de la Saskatchewan ainsi qu'une entente avec le Manitoba. Nous nous sommes également déplacés vers l'Est, jusqu'au Nouveau-Brunswick et à l'Île-du-Prince-Édouard. C'est la première occasion que nous avons de voir la recherche mieux représentée aux quatre coins du pays.
M. Reed Elley: Merci beaucoup, docteur Friesen, et je vous remercie tous d'être venus ici aujourd'hui. Malheureusement—j'espère que vous m'en excuserez—je dois partir pour prendre la parole à la Chambre.
Dr Henry Friesen: Mon collègue me rappelle que Jeff Lozon, le sous-ministre de la Santé de l'Ontario, faisait également partie du comité.
M. Reed Elley: Très bien. Je me réjouis de l'entendre. Merci beaucoup.
Le président: Merci de votre question, monsieur Elley.
Nous allons continuer...
[Français]
Avez-vous une question, monsieur Ménard?
M. Réal Ménard: Je ne vois pas le jour où je n'aurai pas de questions. J'en ai cinq.
Évidemment, le Bloc québécois appuie avec un enthousiasme réel le projet de loi. J'aimerais que vous nous disiez la différence qui existe entre les centres d'excellence et les instituts qu'on s'apprête à créer. Il est important que les membres du comité comprennent bien cette distinction.
Deuxièmement, quel sera l'effet de la fusion du CRM et des instituts de recherche qui seront créés sur le plan des questions d'intendance liées aux ressources humaines?
• 1620
Troisièmement, j'ai une question
sur le plan très important, pour les
partis d'opposition et pour la démocratie en général,
de la reddition des comptes. Je sais qu'il y a
un avocat parmi nous. C'est sûrement un concept
qui lui est familier.
Par le passé, le Conseil de recherches médicales
devait rendre compte
au ministre, qui, lui, défendait les budgets
du CRM en comité. Donc, comment les
principes de l'allocation des ressources et de la reddition
des comptes seront-ils mis en oeuvre?
Est-ce que ce sera de la même façon que pour le CRM?
C'est une question importante pour nous.
Il y a une autre question très importante. Comment les arbitrages vont-ils se faire? Par exemple, avec mon bon ami le Dr Patry, je me suis intéressé au sida. Quand on parle au Dr Remis, qui est un épidémiologiste, le discours n'est pas le même que quand on parle au Dr Weinberg ou au Dr Sékaly de l'Institut de recherches cliniques de Montréal. On m'a d'ailleurs dit que vous aviez reçu beaucoup de propositions de création d'instituts. Il y a des gens qui devront faire des arbitrages. Si on parle d'en créer une quinzaine et que vous avez au-delà de 300 propositions, des regroupements seront possibles, mais quelqu'un devra faire l'arbitrage. Donc, parlez-nous un peu du processus d'arbitrage et dites-nous comment tout cela va se faire.
Dr Yves Morin: Vous vouliez poser cinq questions.
M. Réal Ménard: Oui, mais j'en garde deux pour plus tard, parce que la distance crée le désir.
[Traduction]
Dr Henry Friesen: Merci. Je vais commencer par les trois premières questions, et j'inviterais peut-être Eric Maldoff, qui a suggéré l'idée qui a obtenu l'appui du conseil d'administration provisoire, à vous parler de la création des instituts, de la question de l'arbitrage autour de laquelle les instituts seront constitués.
Il y a des différences importantes entre les réseaux de centres d'excellence et les IRSC. Le but des réseaux de centres d'excellence est de veiller, en insistant particulièrement sur leurs objectifs, à ce que la recherche soit reliée à la croissance économique et, plus récemment, à l'établissement des politiques. Mais leur but est avant tout de faire en sorte que les découvertes des chercheurs se traduisent par des résultats économiques. C'est un critère essentiel.
Les IRSC s'intéressent à la santé. C'est leur objectif le plus fondamental. Les objectifs sont donc différents. Deuxièmement, l'échelle est différente. Si vous imaginez de 10 à 15 instituts... Eric Maldoff va vous en parler dans un instant. Avec un budget de 500 millions de dollars qui prend de l'expansion... Il s'agit d'une entreprise de 50 millions de dollars. Un institut a donc pratiquement la même taille que tous les réseaux de centres d'excellence, dont le budget actuel est d'environ 70 millions de dollars.
Je vais peut-être également demander à Tom Brzustowski s'il désire vous en parler plus en détail.
Les programmes et leur mise en oeuvre sont très différents. Dans le réseau de centres d'excellence, on demande parfois la création de nouveaux réseaux, pour une période de sept ans. Pour ce qui est des instituts, il s'agit d'un concours actif, dynamique et permanent qui a lieu deux fois par an, et les différences sont donc très importantes.
Pour ce qui est de la transition du personnel du CRM aux IRSC, vous pouvez lire en caractères gras dans le projet de loi—et cela signale, je suppose, qu'après un certain temps ces dispositions seront supprimées du projet de loi—que le personnel qui travaille actuellement pour le CRM aura la garantie d'obtenir un emploi dans les IRSC. Bien entendu, les IRSC prennent de l'expansion et auront besoin de personnel supplémentaire.
Le Programme national de recherche et de développement en matière de santé va être intégré dans les IRSC. Il fera partie de la nouvelle structure. Je vois là une possibilité d'expansion, mais dans des limites raisonnables. Les IRSC devraient être une organisation rationnelle. Il faudrait faire en sorte que le maximum d'argent soit consacré à la recherche plutôt qu'à l'édification d'une structure bureaucratique.
L'imputabilité revêtira des dimensions nouvelles très importantes et très intéressantes dans les IRSC par rapport au Conseil de recherches médicales. Vous avez remarqué la procédure habituelle. Nous soumettons un rapport annuel, que le ministre dépose à la Chambre. Bien entendu, nous sommes régulièrement appelés à comparaître devant votre comité ou d'autres comités pour rendre des comptes, et en ce sens nous sommes imputables. Ces deux mécanismes continueront de fonctionner.
• 1625
Il y a deux nouveaux éléments inscrits dans la loi. C'est sans
doute l'une des premières fois que le conseil d'administration est
tenu de mener un examen de chaque institut tous les cinq ans. Il
peut apporter des modifications ou des changements si les résultats
ne sont pas satisfaisants. Deuxièmement, il doit soumettre lui-même
toute l'organisation à un examen international tous les cinq ans.
C'est un nouvel élément.
Enfin, en ce qui concerne les conseils consultatifs de chaque institut, je suppose que certains ne les considéraient pas au départ comme un mécanisme de reddition de comptes, mais ces conseils seront formés de spécialistes de chacun des thèmes de l'institut, qui seront des gens bien informés et éclairés qui, s'ils sont mécontents, pourront faire part de leurs objections au conseil d'administration ou à d'autres instances. Ces conseils représentent une nouvelle dimension importante de l'imputabilité, et je crois qu'ils joueront également un rôle utile pour l'organisation.
Eric, peut-être pourriez-vous répondre à la question du processus que le conseil d'administration croit utile pour procéder à la tâche difficile que représente la création des instituts.
[Français]
M. Eric Maldoff: Vous avez posé une question concernant l'arbitrage.
Si j'ai bien compris, l'arbitrage a un sens un peu plus large que la seule question du choix des instituts. Selon mon expérience, dans le secteur de la santé, on vit des arbitrages quotidiens. Les gens ne s'entendent pas bien les uns avec les autres. Il y a des gens qui tiennent à leur opinion. Il y a de grands débats sur n'importe quoi. Ayant été impliqué dans la fusion de quatre hôpitaux à Montréal, je peux vous dire que c'est un grand défi.
Je vais aborder la question à plusieurs niveaux. Dans n'importe quelle entreprise dans le domaine de la santé, il y a un processus d'arbitrage quotidien. À chaque niveau, à chaque jour, à chaque endroit, des questions doivent être réglées.
Quant au choix des instituts, pendant les derniers mois, nous avons reçu quelque 175 propositions de toutes sortes d'organismes et d'individus. Certaines étaient très bien formulées et d'autres, un peu moins bien. Il y a des groupes d'intérêt et chacun veut avoir son propre institut.
Pour changer le cadre de réflexion sur les instituts, nous avons proposé qu'on invite le grand public et certains organismes à nous faire une proposition sur une gamme d'instituts. Au lieu de proposer un seul institut, le leur, qu'ils en proposent 10 ou 15, si on tient pour acquis qu'il y en aura 10 ou 15. Nous voudrions encourager les gens qui sont impliqués dans ce domaine à réfléchir sur toute la gamme des recherches qui devraient être faites et sur la meilleure façon d'organiser tout cela.
Nous nous attendons à ce qu'il y ait une réponse très positive. Je pense que cela aiderait le conseil d'administration provisoire, ainsi que le conseil d'administration permanent, si le projet de loi est adopté, à faire les meilleurs choix. Cependant, en vertu de la loi, la décision quant au choix des instituts sera prise par le conseil d'administration.
• 1630
Quant aux autres arbitrages qui auront lieu, on aura
un conseil d'administration dont les membres
seront choisis parmi les gens bien
renseignés dans le domaine. Ces gens
seront représentatifs des régions
et des divers domaines d'intérêt. Ils siégeront ensemble et
prendront des
décisions sur la direction stratégique et sur toutes les
autres questions importantes.
À part cela, dans chaque institut, il y aura un conseil consultatif, lui aussi composé de gens de tous les milieux, de toutes les régions et de tous les secteurs qui vont participer aux décisions importantes et stratégiques.
Quant au choix des propositions de recherche, la loi préconise le système de revue par les pairs qui, on le sait tous, assure l'excellence. On tiendra de grands débats. Il faut donc choisir les meilleures personnes pour siéger au conseil d'administration, aux conseils consultatifs et aux comités de revue par les pairs.
M. Réal Ménard: Est-ce que j'ai le temps de poser une autre petite question?
Le président: Non, monsieur.
M. Réal Ménard: La vie est dure pour moi.
Le président: Merci, monsieur.
Monsieur Patry, s'il vous plaît.
M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Soyez les bienvenues à notre comité. Je voudrais d'abord féliciter tous les membres du conseil d'administration provisoire pour le travail qu'ils ont effectué. Il s'agit d'un très, très grand travail. Il y en a quelques-uns qui ne feront sûrement pas partie du conseil d'administration après la création de qu'on appelle maintenant les IRSC.
Je voudrais poursuivre dans la foulée de mon collègue Réal Ménard. J'ai deux petites questions.
Premièrement, je voudrais savoir si les IRSC devront rendre des comptes au ministre de la Santé. J'ai cru comprendre que c'était le cas, mais je voudrais savoir s'ils seront indépendants, comme le CRTC, ou s'ils relèveront à 100 p. 100 du ministre de la Santé.
Deuxièmement, M. Ménard a parlé des centres d'excellence, mais il y a beaucoup d'autres conseils de recherche au Canada. Il y avait la Stratégie nationale sur le sida, et il y a des conseils pour l'innovation, les recherches sur la santé, les recherches en sciences naturelles et en génie et ainsi de suite. Je voudrais savoir s'il n'y a pas danger de duplication. De quelle façon allez-vous empêcher cette duplication?
Ensuite, vous avez parlé de quatre thèmes,
[Traduction]
ou secteurs. Il s'agissait de la recherche biomédicale, de la recherche clinique appliquée, de la recherche sur les services et systèmes de santé, de la recherche sur les facteurs sociaux et culturels déterminants de la santé et de la santé publique. Vous avez parlé de 10 à 15 instituts. Je voudrais seulement savoir si l'argent disponible va être attribué au prorata à ces divers secteurs. Nous avons toujours l'impression que la santé et les facteurs déterminants de la santé sont les parents pauvres, ceux qui reçoivent moins, tandis que la majeure partie de l'argent sert à la recherche biomédicale ou à la recherche clinique appliquée. Je voudrais savoir ce que vous en pensez.
Ma dernière question s'adresse au Dr Morin.
[Français]
Docteur Morin, dans votre introduction, vous avez parlé du Dr Simard. Vous nous avez dit qu'il faisait une excellente recherche, et j'en suis très conscient, mais qu'après la création des IRSC, il pourrait s'intégrer à d'autres disciplines. Vous sembliez dire que ce serait lui qui s'intégrerait, mais je croyais plutôt que d'autres personnes viendraient s'intégrer à lui, mais complètement en dehors de cela. Je voudrais avoir une meilleure explication de la façon dont on peut intégrer les différentes disciplines. Merci.
[Traduction]
Dr Henry Friesen: Si vous me permettez de commencer, docteur Patry, je vais répondre à votre question concernant la reddition de comptes. Le projet de loi prévoit que les IRSC feront rapport au ministre, avec lequel ils auront des relations sans lien de dépendance. Ces relations seront donc très similaires à celles qui existent actuellement.
Les IRSC pourront également conseiller le ministre sur les questions concernant la recherche en santé et la politique relative à la santé. Il s'agit là d'une responsabilité nouvelle. Cela ne figure pas dans la Loi sur le Conseil de recherches médicales et c'est donc l'occasion pour les IRSC de se lancer dans ce nouveau domaine important.
• 1635
La question du chevauchement est toujours préoccupante. Il y
a un certain nombre de programmes. Je commencerai par les conseils
subventionnaires. Je crois que mon collègue, M. Brzustowski, a dit
que la loi créant le Conseil de recherches en sciences naturelles
et en génie précisait qu'il fallait éviter les chevauchements, ou
plus précisément que sa mission excluait les sciences de la santé.
Les sciences sociales ont également la possibilité, comme elles
l'ont fait par le passé, de financer certains domaines de la
recherche en santé. En réalité, ce financement a été assez limité,
en partie parce que leur budget était limité. Certaines initiatives
de Santé Canada portent sur les domaines dans lesquels le Conseil
de recherches médicales pouvait s'engager.
Le bon sens a prévalu dans plusieurs des initiatives pour lesquelles Santé Canada a demandé au CRM de se charger de la recherche. Après tout, la stratégie sur le sida englobe bien d'autres choses que la recherche. Dans ce cas, ou pour l'initiative sur l'hépatite C, je suppose qu'à l'avenir Santé Canada demandera aux IRSC de participer à la mise en oeuvre du programme comme nous l'avons fait au CRM pour la partie recherche... Un autre exemple est l'initiative sur le cancer du sein pour laquelle Santé Canada, le CRM, la Société canadienne du cancer, l'Institut national du cancer et d'autres organismes ont uni leurs forces pour participer à une activité commune.
On s'était entendu de façon très explicite, dès le départ, pour ne pas se fixer de lignes de démarcation trop rigides et permettre une certaine perméabilité en attendant que les frontières soient un peu plus claires. Cela me paraît logique, car autrement nous courons le risque de définir ce qui, comme Tom l'a souligné, se trouve aujourd'hui dans un domaine et le lendemain dans un autre domaine. Nous nous ferions du tort en traçant des frontières trop rigides.
Pour ce qui est des quatre secteurs et du sous-financement de deux d'entre eux, les services de santé et les sciences sociales, je crois que c'est la réalité. Selon moi, les IRSC auront là l'occasion de reconnaître qu'il est important pour le système de santé canadien d'investir dans ces domaines de la recherche afin de mieux comprendre certains des éléments où la perspective des sciences sociales représente sans doute la meilleure solution.
Permettez-moi de citer l'exemple du tabagisme et du lien qui a été établi entre le tabagisme et de nombreuses formes de maladie. Le quart des décès sont reliés au tabagisme, dit-on. Les connaissances sont là; le comportement n'a pas suivi. En fin de compte, si nous pouvions influer sur le comportement, surtout des jeunes femmes, grâce aux connaissances acquises dans le domaine des sciences sociales, cela aurait des répercussions profondes sur la santé de milliers de gens. C'est un exemple qui montre pourquoi...
Je crois que nous devrions, dès que possible, identifier le niveau d'investissement dans ces deux domaines sous-financés dont vous avez parlé. Je m'attends à ce que le conseil d'administration dise qu'il faudrait établir des objectifs pour cinq ans de façon à consolider notre capacité de recherche.
Pour terminer, en ce qui concerne les programmes de transition, cette déficience a été reconnue au cours de la première année des IRSC. Certains programmes ont été spécialement dirigés vers ces domaines, même la première année.
Mme Dorothy Lamont: Je voudrais ajouter quelques mots au sujet des plans visant à faire en sorte que ces quatre thèmes soient abordés de façon satisfaisante, car nous avons reconnu dès le départ la nécessité de profiter de nos atouts actuels et de développer la capacité de recherche. Chaque institut aura un plan stratégique qui sera approuvé par le conseil d'administration et qui fera partie de la stratégie d'ensemble. Ce plan stratégique servira de base aux affectations budgétaires qui seront faites chaque année et servira également à évaluer le rendement lors des examens quinquennaux.
• 1640
Dans le cadre du travail de chaque institut, nous nous
attendons à ce qu'une partie du budget serve à financer les
demandes des chercheurs et à ce qu'il y ait également des fonds
pour ce que nous appelons des «initiatives stratégiques», qui
aideront par exemple à répondre à certaines questions restées sans
réponse ou à développer la capacité de recherche afin que chaque
institut puisse démontrer qu'il a accordé l'importance voulue aux
quatre thèmes, tant pour ce qui est de la capacité de recherche que
pour ce qui est de la consolidation de ces domaines.
Enfin, nous envisageons également la création d'un comité permanent dont la mission serait de surveiller le développement des domaines qui ont été particulièrement sous-financés par le passé et de tirer la sonnette d'alarme s'il constatait des problèmes au sein d'une organisation.
[Français]
Dr Yves Morin: Votre question est bien sentie, docteur Patry. Vous avez tout à fait raison de dire que cette intégration ne se fera pas dans la même personne. Je reprends l'exemple du Dr Simard, qui est lui-même un généticien bien connu. Il a fait une grande découverte. Il s'est rendu compte que dans l'est du Québec, en particulier dans la région du Saguenay—Lac Saint-Jean, 15 p. 100 des femmes qui présentaient un cancer du sein étaient porteuses d'un gène particulier qu'il avait identifié, soit la variation BRC A2. Il s'agit d'une découverte importante.
Maintenant, cette découverte étant faite, il faut l'appliquer. On doit évidemment faire des études sur les populations. Est-ce que chacune des populations est différente? Le domaine du Dr Simard est tout l'est du Québec. Est-ce qu'il y a des variations dans les populations? C'est une étude qui se fait.
Il y a aussi le Dr Sylvie Marcoux, une épidémiologiste qui était autrefois appuyée par le Programme national de recherche et de développement en matière de santé. Canada. Elle recevait donc une subvention d'un organisme différent.
On peut comprendre qu'il y a une dimension éthique aux questions de dépistage dans ces domaines. À quel âge doit-on faire cela? Est-ce qu'on doit le faire? Le Dr Bartha Knoppers, que vous entendrez ici la semaine prochaine, je crois, est impliquée dans le projet du Dr Simard parce que ces dépistages comportent une composante éthique très importante.
Sur le plan de la démographie, le Dr Maurice Bouchard, frère d'une personne bien connue,...
M. Réal Ménard: Et estimée.
Dr Yves Morin: ...a établi la généalogie pour la région du Saguenay—Lac Saint-Jean depuis 1850. Il est donc très facile de suivre les familles dans cette région.
Enfin, il y a des chirurgiens qui sont impliqués. Également, sur le plan de la distribution et des systèmes de soins, on doit se demander si on doit faire ce dépistage dans l'ensemble de la population.
Le Dr Simard ne pourrait jamais faire toute cette recherche, qui va évidemment profiter à l'est du Québec mais qui sera étendue à l'ensemble du Canada et même du monde, sans intégrer toutes ces personnes de domaines complètement différents, qui n'auraient jamais pu être soutenues par un organisme unique, avec une seule subvention. C'est vraiment une première. Comme le disait le Dr Friesen, c'est une première mondiale. C'est la première fois qu'un seul organisme peut appuyer des gens de tous les domaines, y compris celui de l'éthique, au moyen d'une subvention unique. C'est vraiment un grand progrès pour la recherche. Ceci la rend beaucoup plus efficace.
Le président: Merci beaucoup, docteur Morin.
[Traduction]
Madame Wasylycia-Leis.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, monsieur le président.
Je voudrais aussi remercier tous les témoins d'être venus cet après-midi et pour le travail que la mise en place des IRSC a certainement exigé.
Cela dit, vous ne m'en voudrez pas, j'en suis certaine, si j'émets quelques préoccupations. J'avais certaines inquiétudes avant d'arriver ici, mais après avoir entendu le Parti réformiste dire que tout va pour le mieux, je suis encore plus inquiète.
Des voix: Oh, oh!
Mme Judy Wasylycia-Leis: Je m'inquiète sérieusement.
Pour ce qui est de ma première question, je ne pense pas que vous puissiez y répondre. Elle concerne ce que le Dr Friesen a dit quant au fait que les connaissances servent à changer la société et que la recherche entraîne des changements sociaux.
• 1645
Je crois que la question que nous voulons tous poser est la
suivante: c'est un nouveau modèle très intéressant, mais comment la
bonne recherche qui va en sortir se traduira-t-elle par de bonnes
politiques? C'est une question que nous avons posée hier au cours
du débat, et c'est une question de volonté politique. Je ne
m'attends pas à ce que vous y répondiez, mais je voulais le dire.
La deuxième question que je voudrais soulever concerne le rôle du secteur privé. J'en ai déjà parlé, et il en est question tous les jours aux nouvelles. Il s'agit de l'influence que le secteur privé exerce sur la recherche au Canada, du carcan où elle enferme le chercheur et de la façon dont cela influe sur la recherche. Je me demande comment nous avons réglé cette question dans le projet de loi, qui sera sans doute soumis sous peu au comité.
À l'alinéa 4i) du projet de loi, il est question du «soutien à la mise en marché de la recherche canadienne dans le domaine de la santé». Ne pourrait-on pas remplacer ces mots pour parler par exemple de «l'utilisation de la recherche dans les secteurs public et privé dans l'intérêt public»? Ce serait une façon de reconnaître le problème que ces partenariats entre le secteur public et le secteur privé peuvent poser et d'éviter des conflits d'intérêts en reconnaissant que la mise en marché est un sous-produit de la bonne recherche, qui aboutit à des découvertes, et que c'est donc implicite dans le libellé plus général du projet de loi.
J'aurais une ou deux questions supplémentaires. Dois-je les poser d'un seul coup?
Le président: S'il vous plaît.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Ma question suivante concerne la façon dont le conseil d'administration est constitué aux termes du projet de loi. C'est très vague. Cela permet au gouvernement de nommer jusqu'à 20 membres. Le projet de loi parle de l'excellence scientifique ainsi que d'hommes et de femmes représentant les divers milieux et disciplines visés. Mais c'est très vague, et je ne vois pas comment cela nous protégera contre le gouvernement au pouvoir. Il pourrait y avoir un changement de gouvernement. Ce pourrait même être un gouvernement réformiste. Comment veiller à ne pas nous retrouver avec un conseil dans lequel les intérêts commerciaux et les compagnies pharmaceutiques joueront un rôle clé et où il risquera d'y avoir des conflits d'intérêts? Ne pourrait-on pas, dans ce projet de loi, définir certaines caractéristiques à remplir pour occuper les postes du conseil d'administration?
J'aurais bien d'autres questions. Puis-je avoir le temps réservé aux Réformistes, les cinq prochaines minutes, étant donné qu'ils sont partis?
Le président: Non, je crois que vous avez disposé d'assez de temps vous-même. Ce sont de bonnes questions, et nous allons obtenir des réponses immédiatement.
Dr Henry Friesen: Je commencerai par la question de savoir comment le produit de la créativité et les nouvelles connaissances peuvent être transmis, utilisés et adoptés pour améliorer la santé des gens et dans l'intérêt des institutions du secteur de la santé. On peut dire que cela constitue effectivement un défi. Les mécanismes ou les moyens traditionnels qui ont cours dans le milieu universitaire et qui consistent à publier ces recherches, à organiser des ateliers et des réunions et à diffuser le savoir à une certaine distance ne sont pas adéquats. Je crois qu'on l'a reconnu.
Pour ce qui est d'une analyse approfondie, Johathan Lomas, par exemple, a fait partie de notre conseil d'administration provisoire. C'est une autorité mondiale sur la question de la diffusion des connaissances. Nous avons parrainé au début d'octobre une conférence internationale intitulée «Closing the Loop». Elle réunissait les plus grands experts pour discuter des stratégies et des mécanismes. Les connaissances dont on ne se sert pas représentent un investissement qui ne rapporte rien.
Le conseil d'administration provisoire reconnaît l'importance de la diffusion des connaissances. Nous avons formé un sous-comité, dont Jonathan Lomas fait partie, qui a formulé une longue série de recommandations à ce sujet à l'intention du conseil d'administration. Il faudra investir dans les gens et les stratégies et, bien entendu, certains des nouveaux outils de communication. L'Internet est en train de transformer la diffusion du savoir, et, pour suivre l'exemple des National Institutes of Health, aux États-Unis, nous nous sommes dit que toutes les nouvelles connaissances devraient être affichées sur un site spécialisé dans Internet. Cela a suscité toute une réaction de la part du secteur de l'édition, comme vous pouvez l'imaginer, étant donné qu'un grand nombre d'organisations comptent sur leurs droits d'auteur.
L'environnement est en pleine évolution, et l'IRSC en fait partie. Cette question n'est pas passée inaperçue.
• 1650
Vous avez raison, je n'ai pas de réponse à vous donner, si ce
n'est que les pratiques exemplaires sont extrêmement importantes.
Tous ces éléments représentent une dimension importante. Un bon
exemple qui reflète, je pense, ce que vous voulez dire, c'est qu'on
a effectué ici, à Ottawa, une étude de modeste envergure au cours
de laquelle un urgentologue a examiné toutes les radiographies de
la cheville qui avaient été prises et a dit: «C'est exagéré.
Pourquoi ne pas faire un examen physique très minutieux, établir
des lignes directrices et les utiliser plutôt que la radiographie?
Le résultat final ne sera-t-il pas aussi bon?» La réponse était
affirmative, et l'on pourrait effectivement éviter plus de 90 p.
100 des radiographies inutiles de la cheville. L'application de ces
résultats dans toute la province de l'Ontario va permettre
d'économiser des millions de dollars.
C'est un exemple de diffusion des connaissances. On a commencé par acquérir les connaissances, et ensuite on les a diffusées.
Pour ce qui est du rôle du secteur privé, vous devriez savoir que cette question était au centre des discussions du conseil d'administration provisoire. C'est une question importante. Il est important de mettre en lumière les risques de conflits d'intérêts. Cela fait partie du cadre déontologique qui est incorporé dans la loi et dans la pratique.
Tout d'abord, il est clair, en tout cas à mes yeux, que le financement des IRSC ne doit pas être une subvention à une industrie. Les fonds des IRSC iront exclusivement, selon moi, vers l'université, le chercheur ou l'hôpital. Le secteur privé apporte toutefois son point de vue. Les fonds seront attribués uniquement après un examen par les pairs. Les mêmes normes d'excellence scientifique seront exigées, quelles que soient les modalités.
Le Dr Morin a parlé de l'expérience du Dr Simard. Dans ce cas, une brillante découverte reconnue à l'échelle internationale a permis de créer un test de diagnostic, mais pour développer ce test, il a fallu faire appel à des capitaux américains et à certains experts américains. C'est ainsi qu'un test de diagnostic résultant d'une découverte canadienne a dû être racheté par les organismes canadiens à un prix gonflé. Ce n'est pas normal. Je crois que nous devons mettre au point des mécanismes et des méthodes qui seront plus productifs, car en fin de compte la santé et la richesse sont reliées l'une à l'autre. Une société productive devrait trouver de meilleurs moyens.
Enfin, je dirais que, même si certains s'inquiètent de ce que le secteur privé exerce une influence sur les priorités des IRSC, les ententes conclues entre le secteur privé et le Conseil de recherches médicales correspondent, à 3 p. 100 près, aux ententes dont j'ai parlé; autrement dit, l'industrie ne touchera pas d'argent. L'argent ira aux chercheurs universitaires, qui voient l'occasion de conclure une entente répondant aux normes de l'excellence scientifique, et l'argent extrait de l'industrie servira selon moi à compléter les fonds disponibles.
Pour ce qui est des nominations, peut-être qu'un de mes collègues voudra en parler. Tom pourrait peut-être présenter son propre point de vue. Mais je dois dire que ce projet de loi est plus précis—même si vous lui reprochez d'être vague—en ce qui concerne les caractéristiques qui doivent être celles des membres du conseil d'administration que les exigences concernant le conseil d'administration du conseil dont je fais partie depuis neuf ans. Je dois constater que cela suscitait beaucoup d'intérêt, et je crois que le gouvernement a tenu compte de l'opinion des gens en ce qui concerne les nominations au conseil d'administration.
Le président: Je crois que nous allons en rester là. Cela répond bien à la question.
Madame Wasylycia-Leis, si vous avez besoin de renseignements supplémentaires au prochain tour, nous pourrons peut-être vous donner satisfaction.
Monsieur Thompson.
M. Greg Thompson: Merci, monsieur le président.
Je voudrais, comme le président et mes collègues, vous remercier pour votre excellent travail. Il est très agréable de vous avoir tous ici.
J'ai quelques questions qui concernent uniquement l'organisation. Je sais que nous vous avons posé des questions au sujet du gouvernement et de l'absence de lien de dépendance que nous souhaitons voir entre ce dernier et vous-mêmes. Selon la description que le projet de loi fait de l'organisation des IRSC, je ne vois aucune indépendance vis-à-vis du gouvernement. Cela m'inquiète sérieusement.
Si vous passez à la page 6 du projet de loi, où l'on décrit l'organisation proprement dite, à commencer par le président, celui-ci est nommé par le gouverneur en conseil, c'est-à-dire par le premier ministre du Canada, à titre amovible. Autrement dit, il est en tout temps à la disposition du premier ministre.
Si vous prenez le conseil d'administration, c'est la même chose. Le conseil d'administration est nommé par le premier ministre, à titre amovible, ce qui veut dire que le premier ministre peut congédier ses membres et les remplacer. Le conseil d'administration choisit à son tour les membres des conseils consultatifs. Il y a donc un lien direct entre le bureau du premier ministre et votre organisation, étant donné qu'il décide qui va y siéger et pour combien de temps. Nous avons suffisamment la preuve, au Parlement et dans les instituts de ce genre, que ces relations ne favorisent pas l'indépendance. Nous avons eu tout récemment des situations, à Santé Canada, où nous avons vu que ce mode de nomination pouvait devenir très destructeur. Cela m'inquiète sérieusement.
Je m'inquiète aussi des niveaux de financement. Je répète que je suis d'accord. Je pense que c'est une importante initiative. Toutefois j'ai de graves préoccupations, et je les crois légitimes. Le financement nous permettra d'atteindre des niveaux louables au sein de l'OCDE. Vous le reconnaissez pour la plupart, nous accusons un retard. Je pense que c'est très louable.
D'après l'examen que j'ai fait du gouvernement au fil des ans, ce grand apport d'argent peut avoir différents effets. On se réjouit de cette injection de fonds, mais je pense que cela entraîne, et peut entraîner, un certain laisser-aller, un certain laisser-faire eu égard à la façon dont ces fonds sont dépensés. Je le rappelle, on constate dans tous les exemples du monde occidental où l'argent abonde et où soudainement nous avons une organisation qui dépend du bon vouloir du gouvernement... je pense que cela donne parfois lieu à de l'incurie. Naturellement, je suis d'accord pour qu'on injecte des fonds, mais je souhaite qu'il existe des mesures de contrôle.
Ce qui me ramène à une question qu'un de nos collègues a posée au sujet des instituts. À commencer par le bureau du premier ministre et la façon dont l'organisation est structurée, ces instituts seront définis par le conseil d'administration, qui relève du premier ministre du Canada. Je pense que cela peut donner lieu à une certaine négligence, à de l'arrogance, et peut-être aussi à de l'insensibilité quant à la façon dont certains de ces instituts sont constitués, parce que, en somme, je pense qu'on agira en tant que serviteurs de ses maîtres politiques.
L'autre problème que je perçois a trait au mécanisme de reddition de comptes. On procédera à un examen aux cinq ans, si je ne fais pas erreur. Ce sera donc un processus d'examen quinquennal. Je pense que l'examen doit être un peu plus intensif, et cinq ans c'est une échéance bien supérieure à ce qu'on devrait viser.
• 1700
Je reconnais qu'on peut être cité à comparaître devant le
comité, mais il me semble qu'il doit exister un mécanisme de
reddition de comptes un peu plus strict en ce qui concerne
l'engagement du Parlement du Canada, la reddition de comptes et les
paramètres respectés. Qui déterminera en fin de compte que vous
avez respecté vos objectifs? Est-ce que ce sera le Parlement du
Canada, ou les membres des conseils consultatifs? Le président? Le
conseil d'administration?
Ce sont là, il me semble, des questions légitimes. Je sais qu'il y en a bien d'autres encore, et je vous remercie de m'avoir accordé du temps pour en exposer certaines. Je surveillerai les réponses qu'on y apportera et je verrai à quoi le débat aboutira, si vous le permettez.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Thompson. En effet, vous posez bien des questions, et je suis sûr que le Dr Friesen est déjà prêt à les aborder.
Docteur Friesen, voulez-vous prendre la parole en premier pour répondre à ces questions?
Dr Henry Friesen: J'aborderai les questions très brièvement, et j'inviterai mes collègues vice-présidents à prendre la parole.
Pour ce qui est des nominations, je pense que les faits sont clairs, et vous les avez bien présentés. Les nominations sont faites par le cabinet du premier ministre tant en ce qui concerne le conseil d'administration qu'en ce qui concerne le poste de président.
Le conseil d'administration a la responsabilité d'atteindre un ensemble d'objectifs présentés dans le texte législatif. C'est un paramètre. Il existe tout un ensemble d'intéressés qui sont maintenant encore plus engagés que ce n'était le cas quand il s'agissait du CRM. Nous avons en quelque sorte élargi les perspectives et accru la participation des Canadiens, qui se montreront très intéressés et vigilants, qui exprimeront leurs points de vue, comme ils le font déjà, je le sais, en ce qui a trait aux nominations.
Vous avez certainement le droit de faire état de vos préoccupations, mais je parle par expérience. Je travaille actuellement dans le cadre de cette entente. Je dois vous dire que tous les ministres de la Santé avec qui j'ai eu à traiter, et il y en a eu plusieurs, ont parfaitement respecté cette relation d'indépendance. Je ne me suis jamais trouvé dans une situation où l'un d'entre eux aurait appelé pour suggérer que le conseil fasse ceci ou cela. C'est l'expérience que j'ai eue.
Pour ce qui est des nominations, je le répète, on nous consulte, mais en dernière analyse elles relèvent de la prérogative du premier ministre, évidemment.
J'aimerais demander à Eric, et peut-être aussi à Tom, de parler de l'expérience qu'ils ont eue pendant de nombreuses années au sein d'un autre conseil du même genre.
M. Greg Thompson: Monsieur le président, j'aimerais ajouter quelque chose avant qu'on réponde.
Ce que j'ai examiné, c'est le modèle américain, que, je suppose, vous avez aussi examiné quand vous avez mis cela en place, puisque rien ne se fait isolément. Il y a toujours des modèles dont on s'inspire et qu'on perfectionne. Mais il me semble que les instituts nationaux de la santé aux États-Unis sont un modèle, le modèle auquel nous comparerions l'institut dont nous parlons aujourd'hui.
Comment fonctionne ce modèle américain eu égard aux nominations? Je ne crois pas que le président des États-Unis s'occupe des nominations autant que le fait le premier ministre du Canada.
Le président: Monsieur Maldoff, voulez-vous répondre brièvement?
M. Eric Maldoff: Le secrétaire à la Santé procède aux nominations aux États-Unis. Les instituts en tant que tels sont des entités distinctes et autonomes établies par voie législative qui obtiennent leurs crédits du Congrès.
D'après les informations que nous avons obtenues de ces instituts américains, ce ne serait pas le système idéal. On crée ainsi un système sclérosé qui est très difficile à modifier, parce que tout finit par être assujetti à d'importants lobbies politiques.
Quoi qu'on redoute de l'ingérence gouvernementale, pour le monde de la recherche, le gouvernement, c'est le gouvernement, qu'il s'agisse du Parlement, de l'administration, ou de quiconque en fait partie. On s'inquiéterait tout autant d'une forte ingérence politique que d'une ingérence de l'administration ou d'une ingérence ministérielle.
Nous en avons abondamment débattu entre nous, et il s'agit d'en arriver à un équilibre. Les participants sont assez convaincus qu'on en arrive ainsi à un équilibre. Il existe une véritable reddition de comptes. Si les parlementaires veulent utiliser les mécanismes qui existent, il y aura une très grande reddition de comptes. Les crédits mis à la disposition de cette entité qui verra le jour viendront du gouvernement du Canada. Le budget est voté par le Parlement du Canada.
• 1705
Un rapport sera présenté au Parlement, et il exposera les buts
et les objectifs, les stratégies et le rendement des IRSC pour
chaque année. Le vérificateur général soumettra également un
rapport à ce propos.
Je pense que les députés auront amplement l'occasion de s'enquérir pour s'assurer que l'IRSC fait ce qu'il doit faire, qu'il est efficace, qu'il agit de façon sensée. Nous étions très fortement en faveur d'un rapport annuel qui serait remis au Parlement, et non pas simplement au ministre ou à un ministère, ou qui ne consisterait qu'en une publication attrayante, mais nous voulions quelque chose qui serait déposé au Parlement. Sans doute que le comité ou un autre comité peut convoquer la direction de l'IRSC pour rendre compte de ce qui s'y passe.
Le président: Permettez-moi d'intervenir. Je vois que M. Brzustowski veut aussi répondre à M. Thompson.
M. Tom Brzustowski: Merci, monsieur le président.
Compte tenu de ce qui vient d'être dit et pour ajouter un élément de réponse, je peux apporter un élément d'information concernant l'indépendance d'une entente très similaire à celle dont il est question dans le projet de loi C-13. C'était à l'occasion d'une décision rendue dans le cadre d'un programme et au moyen d'un processus d'examen par les pairs d'un groupe spécial indépendant et que nous administrions nous-mêmes et où des gens qui estimaient avoir été lésés dans ce processus décisionnel d'examen scientifique par des pairs s'étaient adressés à la classe politique pour faire renverser la décision.
Ce qui est très bien ressorti dès le départ et jusqu'à la fin, c'est que le ministre en question a refusé obstinément d'intervenir, ne serait-ce qu'un tant soit peu, pour remettre en question le bien-fondé d'une décision qui avait été rendue dans le cadre de processus appropriés d'examen par les pairs—même si, je dois dire, il lui en a coûté un peu sur le plan politique. Pour moi c'est une balise, à laquelle j'attache beaucoup d'importance.
M. Greg Thompson: Si l'on fait preuve de tant de leadership au ministère, je suppose que nous nous en réjouirons tous.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Thompson.
À ce que je sache, docteur Friesen, nous sommes un peu pressés par le temps; vous devez nous quitter vers 17 h 15.
Dr Henry Friesen: Oui, cela m'arrangerait.
Le président: Nous avons encore deux ou trois autres questions à vous poser.
Dr Henry Friesen: Mes collègues resteront sur place.
Le président: Cela dit, monsieur Szabo, si vous voulez commencer, après quoi je donnerai la parole à M. Jackson, puis à M. Charbonneau.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je ne doute pas que tout le monde se réjouit de la perspective d'accroître le potentiel de recherche de qualité qui se fait au Canada afin que nous soyons en mesure de conserver nos ressources humaines en matière de recherche, et de mettre fin à l'exode des cerveaux, dont le Dr Friesen a parlé au Comité des finances à maintes reprises. Nous progressons actuellement.
Personnellement, je n'ai pas d'inquiétude en ce qui concerne la reddition de comptes tant pour ce qui est des fonds que pour ce qui est de la qualité du travail. Nous avons affaire à des professionnels assujettis à un code de déontologie très strict.
J'aimerais parler d'un point qui est ressorti de ce que vous avez dit, docteur Friesen, à propos de l'importance de se concentrer sur les résultats. J'aimerais que vous me donniez des assurances ou plutôt votre avis sur la question de savoir si oui ou non les résultats consistent simplement à produire un document, ou s'ils ne sont pas plutôt quelque chose qui se traduit par une amélioration tangible de la santé des Canadiens. Pour moi il s'agit en somme de dépenses en matière de soins de santé.
M. Maldoff pourrait intervenir. Je peux lui dire que j'ai été un peu déçu par le rapport final du Forum national sur la santé, parce qu'il m'a semblé que la formulation du rapport provisoire, qui m'avait paru bien rendre compte de la position des différentes équipes de recherche, avait été atténuée, édulcorée et modifiée de manière à présenter comme moins aiguës certaines des questions les plus épineuses.
Je pense, avec tout le respect que je vous dois, à des choses comme l'étude longitudinale nationale de Statistique Canada sur les enfants et la jeunesse, où il est question de la famille, de la famille traditionnelle, entre autres choses. Tout cela a été retiré du rapport final. On a également fait fi de la conclusion du rapport selon laquelle 25 p. 100 des enfants canadiens abordent l'âge adulte avec un important problème physique, mental, social, comportemental ou d'apprentissage, ce qui à mon sens constitue un important sujet de recherche sur les déterminants de la santé de ces enfants.
• 1710
Tout cela est largement lié à autre chose qu'à la recherche
médicale. Cela relève de questions sociales. Cela relève d'autres
problèmes.
Je vous demande en somme en quoi cela va changer les choses. Comment pouvons-nous assurer aux Canadiens que cet investissement que nous faisons dans la recherche fondamentale va se traduire par une amélioration de leur santé?
Le président: Qui veut répondre? Docteur Friesen.
Dr Henry Friesen: Je vais laisser la question du forum sur la santé à Harry.
Vous posez là une question très importante. À la conférence internationale sur la façon de boucler la boucle—à savoir comment pouvons-nous nous assurer que la connaissance acquise contribue à l'amélioration de la santé et du système de soins de santé et à son intégration—nous avons rencontré Henry Mintzberg, un véritable maître de la gestion. Il a fait valoir qu'il était très facile de mesurer des choses qui au fond n'ont pas d'importance. Que ce sont les choses qui comptent vraiment qui sont difficiles à mesurer. Nous en avons ici un exemple.
Je crois pouvoir répondre à la question en disant que les résultats, du point de vue du chercheur, sont les publications, les publications dans des journaux réputés, des publications qui valent à leurs auteurs une reconnaissance et une réputation internationales. Sur la scène scientifique, naturellement, cela se traduit par l'attribution du prix ultime, le prix Nobel, internationalement reconnu.
Je pense que c'est un problème pour le Canada. Michael Smith est le dernier lauréat du prix Nobel—de biologie—à résider au Canada. Il y a beaucoup de Canadiens qui ont remporté le prix Nobel, mais malheureusement ils sont maintenant établis aux États-Unis.
Nous devons changer cela. Cet élément aussi est important pour mesurer les résultats, s'assurer, comme le signalait le premier ministre, que le Canada est reconnu comme un lieu de création du savoir. La norme scientifique ainsi que les prix décernés pour ce rendement en sont une expression.
Pour ce qui est de la santé des Canadiens et du système de soins de santé, il y a aussi des choses comme l'espérance de vie. À la création du CRM, l'espérance était bien moindre que ce qu'elle est aujourd'hui. On estime qu'en investissant pendant quatre ou cinq ans dans la recherche, on ajoute une année à l'espérance de vie, mais la qualité de vie est également une question qui se pose.
Il faut donc tenir compte de certains aspects très pratiques, comme l'efficacité de notre régime de soins de santé. Nous devrions examiner certains éléments de ce que je disais tout à l'heure au sujet des radiographies inutiles. Il y a des dizaines d'exemples de ce genre.
Il se trouve que j'estime que si nous avions investi de façon plus avisée dans la recherche portant sur le système de soins de santé, peut-être au titre des pressions qu'on exerce sur ceux qui sont contraints de gérer ou qui ont la chance de gérer le système de soins de santé... ils auraient trouvé des façons plus innovatrices d'agir. Un investissement, par exemple, par Santé Canada dans un plus grand nombre de dispositifs de mesure de l'information signifierait que quand on s'interroge sur les données relatives aux pressions que subit le système de soins de santé, on disposerait de ces données. Trop souvent on n'en dispose pas.
Je pense que des questions vraiment importantes découlent de ce qui semble être une question bien simple: comment mesurons-nous les résultats? Je pense que ce sera une importante obligation à laquelle l'IRSC devra satisfaire.
Le président: Merci.
Monsieur Maldoff, vouliez-vous prendre la parole?
M. Eric Maldoff: Puis-je me défendre un instant?
Le président: Vous avez la parole.
M. Eric Maldoff: Merci.
Le rapport final du forum sur la santé était le résultat de délibérations ultérieures après les consultations que nous avons tenues publiquement et après un processus assez difficile en une période de grande austérité budgétaire. Une énorme pression s'exerçait sur le forum pour qu'il ne présente pas de recommandations dépassant les limites budgétaires.
Ce que j'ai retenu de cette lutte au déficit, c'est qu'elle a entraîné un certain effritement des choses que le forum voulait faire. Le climat était tel que, par crainte de discréditer tout le rapport, on estimait que la moindre dépense était une hérésie. Tout le monde était obsédé par le déficit.
• 1715
Il en est résulté de bonnes choses, et j'y reviendrai. La
pauvreté des enfants était un grand thème de ce rapport. C'est une
des très grandes initiatives dans lesquelles le gouvernement a
investi ces dernières années. Je ne sais pas si c'est une
coïncidence, mais les membres du forum estiment certainement que
cela a été utile.
Quant à votre question de savoir si cela va changer quelque chose, nous sommes maintenant, heureusement, dans une situation où le gouvernement dispose de plus d'argent, et il peut choisir comment il entend dépenser cet argent. En élargissant le programme de recherche en matière de santé et en présentant le mandat de cette façon, il crée une occasion bien réelle de voir les résultats se traduire par une amélioration bien concrète de la santé.
Qu'est-ce que j'entends par là? En nous dotant d'une série d'instituts, nous allons créer une concurrence interne au sein de l'IRSC même. Les directeurs d'institut vont se livrer concurrence pour obtenir des fonds. Ils auront des plans stratégiques. Ces plans viseront à faire en sorte que le savoir se traduise dans la pratique par des changements sur le plan de la santé. Quand ils reviendront chaque année pour demander davantage de crédits au conseil d'administration, ils devront faire état des résultats obtenus.
Avec dix instituts, on commencera à progresser, et très rapidement tout le monde va emboîter le pas. Nous espérons pouvoir créer une dynamique qui permette de dissiper les inquiétudes dont vous avez fait état, parce que c'est également très important pour nous aussi.
Le président: Merci beaucoup.
Je voulais poser une question au Dr Friesen avant qu'il parte, mais je crois qu'il est déjà parti.
Peut-être que M. Maldoff pourrait m'aider. Dans son exposé, le Dr Friesen a parlé d'ajouter un cadre éthique à la recherche en matière de santé. Je me demande si vous pouvez nous expliquer un peu comment on y arrive par le projet de loi C-13.
Cela vous dit quelque chose?
M. Eric Maldoff: Je ne suis pas certain, mais peut-être que Yves pourrait répondre.
Dr Yves Morin: Pour la première fois pour un conseil de ce genre, la déontologie est incluse, et à trois différents endroits dans le projet de loi. Elle sera présente à deux niveaux. D'abord au niveau du conseil d'administration, où il y aura un bureau de déontologie, comme on l'a recommandé eu égard à la création des instituts. En outre, chaque fois qu'un des instituts présentera un plan stratégique on devra en examiner l'aspect éthique.
C'est donc vraiment prévu à deux niveaux, celui du conseil d'administration, où il y aura un bureau de déontologie, et au niveau de l'institut, où chaque programme devra être envisagé sous son angle éthique. De plus, naturellement, on prévoira un soutien en matière de déontologie, comme dans le cas de toute autre recherche.
La semaine prochaine, apparemment, vous rencontrerez Mme Bartha Knoppers, une éthicienne réputée. Elle préside notre comité de déontologie.
Cela dit, le rapport du comité de déontologie devrait paraître sur notre site web dans les jours qui viennent.
Le président: Merci pour cette précision.
Nous commençons un autre tour par Mme Wasylycia-Leis.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Je vais essayer de ne poser que quatre brèves questions.
La première concerne le secteur privé. J'ai entendu la réponse, mais j'ai encore des questions à poser là-dessus. Le groupe de travail du conseil d'administration provisoire dit en fait que l'IRSC devrait s'assurer que ses priorités de recherche sont établies indépendamment de toute considération commerciale. Pouvez-vous me dire quelle disposition de la loi le garantit?
Ma deuxième question concerne le conseil d'administration. Puisque nous parlons d'une approche transformationnelle de la recherche, je me demande si nous ne devrions pas essayer d'adopter une approche plus innovatrice face au conseil d'administration et inscrire dans le projet de loi que la composition de ce conseil doit assurer l'équité entre les sexes et l'équilibre régional.
Je suis également préoccupée par la santé des femmes. Je ne sais pas comment les instituts seront répartis ni s'il y aura un institut distinct s'occupant de la santé des femmes, mais je me demande s'il ne pourrait pas y avoir dans la loi une disposition reconnaissant la nécessité de faire en sorte que dans tous les instituts on fasse des analyses comparatives entre les sexes.
• 1720
Ma troisième question a trait à une préoccupation qu'ont
certains, à savoir si, avec ce nouveau modèle, les fonds et les
projets toucheront toutes les régions du pays, même celles où il
n'y a peut-être pas une grande tradition de recherche.
S'occupera-t-on du niveau communautaire et de projets qualitatifs
non traditionnels? Comment s'y prendra-t-on? Et comme le suggérait
Greg Thompson, serait-il important de disposer d'un mécanisme pour
pouvoir évaluer ce que fera l'institut au cours, par exemple, des
trois prochaines années, puisque les fonds seront accordés
progressivement jusqu'en 2002, jusqu'à ce qu'il soit pleinement
opérationnel? Est-ce qu'on ne pourrait pas établir un mécanisme
d'évaluation?
Ma dernière question a trait à l'éthique. J'aimerais savoir où dans ce projet de loi on traite sérieusement de cette question, parce que nous avons soulevé des préoccupations, et elles ont trait à la question de savoir si oui ou non l'IRSC devrait s'autodiscipliner. Devrait-on miser sur l'autodiscipline en matière d'éthique? Ne devrait-il pas y avoir un examen indépendant, surtout quand on songe aux préoccupations qui ont été exprimées face à ce qui se passe au PPT et aux changements apportés relativement aux sujets de recherche humaine dans les essais de phase un. On craint vraiment qu'au niveau gouvernemental on ne dilue tout le processus et qu'un cadre réglementaire strict ne soit pas jugé nécessaire.
Dans ce contexte, est-ce que le projet de loi ne devrait pas traiter plus strictement de l'aspect éthique?
Le président: Comme toujours, il y a beaucoup de questions. Merci beaucoup.
Qui veut répondre en premier?
Dr Yves Morin: Pour ce qui est de l'éthique, comme je l'ai dit, Bartha Knoppers sera ici la semaine prochaine. Elle est notre experte en la matière. Elle fait partie de ceux qui ont travaillé sur ce sujet. En réalité, elle est étonnamment satisfaite du projet de loi, parce qu'elle dit que c'est la première fois qu'on mentionne l'éthique à trois endroits dans un projet de loi. C'est elle qui le dit.
Vos préoccupations sont tout à fait à propos. Elle a eu un grand rôle à jouer dans la création de cet organisme, et elle est, soit dit en passant, la principale éthicienne au Canada. C'est donc à elle qu'il faudrait poser la question.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Très bien.
Dr Yves Morin: J'aimerais parler de l'aspect communautaire, et peut-être que mes collègues voudront répondre aux autres questions.
Comme vous le savez, l'est du Québec compte un grand nombre de petites communautés et l'équipe de transition a mis en place un programme pour la première année de l'IRSC. Comme vous le savez, le conseil de direction ne sera pas créé avant un an, si bien qu'un programme de transition verra à l'attribution des crédits à divers fonds. Vous trouverez également ces renseignements sur notre site Web.
C'est ce qu'on appelle l'Alliance communautaire pour la recherche en matière de santé, et 10 millions de dollars ont été alloués à ce programme. Ces crédits seront accordés à des organismes communautaires—par exemple, un organisme de bénévoles qui voudrait s'occuper d'un besoin particulier au sein de la collectivité. Les fonds y sont accordés, et il y aura des chercheurs en santé qui travailleront dans la collectivité à l'extérieur. La recherche effectuée fera appel à la communauté et celle-ci en bénéficiera. Cela se fait à l'extérieur des grands centres, à l'extérieur des grandes universités. On s'y intéresse beaucoup—vraiment beaucoup. Les gens se montrent intéressés et sont enthousiastes.
C'est vraiment la première fois que nous le faisons, et c'est important, parce que de nombreuses communautés ont des problèmes particuliers. Par exemple, le Saguenay—Lac-Saint-Jean a une forte incidence d'une certaine maladie congénitale, et il est important de faire de la recherche.
Pour répondre à votre question, c'est une grande percée en matière de recherche communautaire.
Le président: Docteur Brzustowski.
Dr Tom Brzustowski: J'aimerais ajouter brièvement quelque chose à propos de l'éthique et de la question d'équilibre.
En matière d'éthique, il existe un niveau additionnel au-delà des conseils subventionnaires. Les trois conseils ensemble—c'est-à-dire, le CRSH, le CRM et le CRSNG—ont publié une politique de ces trois conseils sur la déontologie en matière de recherche portant sur des sujets humains. Chacune de ces institutions de recherche doit donc avoir son propre conseil de déontologie en matière de recherche et traiter de façon très éthique la conception de la recherche—c'est-à-dire ne pas le faire après coup, mais à l'étape de la conception.
• 1725
Soit dit en passant, vous devez bien savoir que cela ne va pas
sans coûts, et que cela fait partie intégrante des coûts indirects
croissants de la recherche, qui ne reçoit généralement pas d'appui
dans les universités.
Pour ce qui est de la question d'équilibre, d'après notre expérience, le conseil du CRSNG compte au moins 21 membres en plus du président, donc c'est comparable. Quand on nomme des gens au conseil du CRSNG, on essaie d'assurer une bonne représentation des régions; des groupes linguistiques; des sexes; des chercheurs du secteur privé, du monde universitaire et du gouvernement; des diverses disciplines, comme les sciences de la vie par opposition aux sciences physiques et au génie. Essayer de faire cela avec 21 personnes, c'est vraiment toute une tâche.
Néanmoins, à tout moment, si vous vous présentiez à une réunion du conseil, vous verriez qu'on y assure un équilibre très acceptable de tous les participants dans ces différents domaines d'intérêt. Les nominations se font exactement de la façon décrite dans la loi.
Mme Dorothy Lamont: Je vais tâcher de répondre à vos deux premières questions.
La première, si j'ai bien compris, a trait à vos préoccupations face à l'influence de l'industrie sur tout le processus.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Oui.
Mme Dorothy Lamont: Il n'y a aucun doute qu'on en a beaucoup débattu au niveau du conseil d'administration provisoire, et au fait l'idée était que la santé des Canadiens et les éléments qui vont influencer la santé des Canadiens étaient absolument la toute première de nos préoccupations. Lorsqu'il y a des intérêts de nature commerciale et des intérêts en matière de santé des Canadiens qui se rejoignent, alors très bien, mais la toute première question ici est la question de la recherche en matière de santé qui allait avoir un impact sur la santé. Donc c'était là certainement l'intention du CAP.
Pour ce qui est de votre deuxième question au sujet de l'équilibre et ainsi de suite à l'intérieur du CAP, encore une fois, nous en avons longuement débattu. Vous remarquerez la phrase «femmes et hommes» par opposition à «hommes et femmes».
Mme Judy Wasylycia-Leis: Oui, j'allais le mentionner.
Mme Dorothy Lamont: Je peux vous assurer que ça a été une lutte acharnée. Cela signifie donc quelque chose.
Encore une fois, la question devient plus complexe si nous commençons à dire que nous devons avoir tant de représentants du secteur X et tant de représentants du secteur Y, et ainsi de suite. Nous étions très préoccupés, en élaborant nos recommandations législatives, par le fait que la législation aura à faire ses preuves sur une longue période de temps. Oui, je suis convaincue que la question de l'égalité des sexes, et les questions régionales vont continuer de se poser, mais il y a d'autres questions qui pourraient émerger et dont on devra tenir compte. Donc, nous avons cru qu'il valait mieux en dire moins pour cette raison-là. Nous voulions que cette loi soit utile au fil des ans.
De nombreuses personnes ont des préoccupations particulières. Certains de mes collègues du secteur bénévole, je vous l'assure, voulaient être représentés au sein du conseil, mais ils semblent satisfaits et sont satisfaits du fait qu'il est important de choisir les personnes les plus qualifiées et d'avoir confiance que nous allons retenir de bons critères pour faire ces nominations—non seulement les nominations initiales, mais toutes celles qui suivront pendant de nombreuses années.
Le président: Merci beaucoup, madame Lamont.
M. Eric Maldoff: Monsieur le président, j'ai un point dont nous pourrions traiter très rapidement.
Nous pensons que ce serait une erreur de passer à une révision triennale. Ce sera une tâche que de mettre sur pied ce système et de le rendre opérationnel. La transition entre le présent et la concrétisation de cette vision va prendre environ cinq ans à notre avis. Si au beau milieu de tout cela, nous commençons à revoir...
Le but d'une révision est d'examiner les résultats et de faire le point. Si en cours de route on lance une révision, je crois que nous allons retarder notre capacité de rendre le système opérationnel.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Moi je parle plutôt d'un mécanisme d'évaluation à même le système afin de voir où vont les fonds et de vérifier au fur et à mesure si on respecte les objectifs qui ont été fixés.
M. Eric Maldoff: Mais ce sera compris dans le rapport qui sera présenté au Parlement, et en plus de cela le comité permanent a un droit de regard en vertu de cette loi, qui pourra donner lieu à beaucoup de remises en question, si ce n'est rien d'autre.
Le président: Merci beaucoup, c'était une précision très importante.
J'ai deux personnes qui attendent patiemment l'occasion de poser leurs questions: M. Jackson, suivi de M. Charbonneau, qui est le secrétaire parlementaire du ministre de la Santé.
Monsieur Jackson.
M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à accueillir nos invités et à les remercier de tout le travail qu'ils font au nom de tous les Canadiens et Canadiennes. Ils sont en voie de former une nouvelle organisation, et nos systèmes de comités auront à subir une telle transformation, tout comme la prestation des services gouvernementaux.
Comme vous l'avez dit, le Conseil de recherches médicales va devenir l'IRSC. Je vous félicite en tant que groupe d'avoir été capable d'en arriver à cette décision sans que qui que ce soit ne tente de conserver le Conseil de recherches médicales, étant donné ses origines et étant donné le fait que vous vous y sentiez à l'aise.
Il ne fait aucun doute que la population en général détient énormément de connaissances, bonnes et moins bonnes, et qu'on peut avoir accès à un certain nombre de renseignements sur l'Internet, dont on ne connaît pas les auteurs. Il y aura beaucoup de filtrage, et il y aura évidemment beaucoup de partage d'information de part et d'autre. En écoutant mes collègues, non seulement ici mais à la Chambre, je me demande si nous faisons figure de chefs de file ou si nous suivons tout simplement le courant, en ce qui a trait à certaines de nos idées sur la façon de gouverner le pays.
À mon avis, je crois que tout le monde, qu'il s'agisse du gouvernement ou de vous-mêmes, doit être transparent et juste. Vous devez évaluer toutes les questions que nous vous soumettons. Si vous ne le faites pas, votre organisme n'est pas à la hauteur. Mais je tiens à vous dire que je crois que vous êtes en tête de file pour ce qui est de trouver la meilleure façon d'offrir ces ressources aux Canadiens et aux Canadiennes.
Le docteur Friesen nous a quittés. La dernière fois qu'il était ici, il m'a dit que le Canada représentait environ 3 p. 100 de l'ensemble des connaissances. J'espère que nous pourrons améliorer cela, mais je me demande s'il y a des statistiques quant à ce que fournissent les Américains, par exemple, et la ventilation de ces chiffres-là. Voilà une question.
L'autre question qui me vient à l'esprit est liée au fait que lorsque nous avons mis sur pied le régime de soins de santé, je crois que nous avions un certain nombre de services de base et ainsi de suite. Comme nous l'avons dit, il y a 40 ans, les défis et les difficultés étaient tout autres. Maintenant nous oublions parfois qu'il vaut mieux prévenir que guérir. Par exemple, au lieu d'avoir à trouver un coeur pour faire une greffe, si nous avions pu empêcher l'accident et que cette personne ne s'était pas écrasée contre un arbre, à ce moment-là on n'aurait pas eu à chercher des organes de rechange.
Il y a donc toute une série de questions dont il faut se préoccuper. Il y a la santé, le régime alimentaire, l'exercice, et il y a certains cas où le pronostic veut que la maladie soit fatale, mais les gens croient quand même que des machines pourraient les aider.
La plupart des pays y consacrent entre 9 et 14 p. 100 de leur PIB. Je me demande comment vous allez envisager la situation, étant donné la quantité de recherches dont vous avez besoin. Quand nous écoutons nos collègues de l'opposition, il s'agit toujours d'y injecter de plus en plus d'argent. Même si vous y consacrez plus d'argent, vous pourriez y mettre 163 milliards, mais on essaierait toujours d'en avoir plus. Il faut évaluer certaines de ces choses, et vous voudrez peut-être y apporter des changements. Vous estimerez peut-être que ça devrait être plus que 9 p. 100 du PIB tout simplement puisque nous avons recours à un plus grand nombre de machines aujourd'hui, nous avons recours à plus de machines qui font de l'imagerie sophistiquée, nous remplaçons plus de genoux, ou il y a un plus grand nombre d'opérations des yeux.
Alors, j'ai deux questions. Premièrement, en ce qui a trait à l'ensemble des connaissances, qui contribue quoi, sur le plan mondial? Deuxièmement, qui chez vous va évaluer les statistiques en rapport avec le PIB, par exemple, et les systèmes de prestation de services pour tous les Canadiens?
Dr Yves Morin: Merci beaucoup de ces très bonnes questions.
Il est très difficile pour quelque pays que ce soit au monde de comparer sa recherche en matière de santé avec la recherche qui se fait aux États-Unis. Ils font classe à part. Au Canada, si nous regardons seulement les crédits accordés par le gouvernement fédéral au Conseil de recherches médicales, nous avons commencé avec 250 millions de dollars. Sur une période de trois ans, ce chiffre est passé à 500 millions de dollars avec l'IRSC. Et, soit dit en passant, c'est une situation tout à fait unique au monde qu'on ait réussi à doubler l'appui qu'on accorde à la recherche en matière de santé dans une si courte période. Cela étant dit, cependant, les États-Unis en sont à 16 milliards de dollars, c'est-à-dire six fois le montant par habitant que nous dépensons au Canada, et leur budget augmentera de 15 p. 100 encore une fois cette année. Ils sont donc dans une situation tout à fait unique.
Comme on l'a dit tout à l'heure, nous améliorons notre situation au sein du G-7. Nous étions presque au dernier rang jusqu'à tout récemment, mais je crois maintenant que nous sommes quatrième. L'objet, bien sûr, pour la recherche sur les services en matière de santé pour les Canadiens est d'atteindre 1 p. 100 de ce qu'on dépense sur la santé au Canada, c'est-à-dire 800 millions de dollars. Je crois que nous tendons vers cela, et je crois que ces efforts mettront le Canada dans une très bonne posture.
Alors, je crois qu'il faut voir ce qui a été fait. Nous sommes contents. C'est un grand effort, et nous avons doublé le budget consacré à la recherche, mais je crois qu'on peut encore améliorer les choses.
M. Ovid Jackson: Puis-je vous interrompre, docteur Morin? Ça va très bien pour ce qui est de vos objectifs, mais quelle est notre part de la production du savoir mondial par rapport à la production des Américains?
Le Dr Yves Morin: Je ne suis pas très fort en mathématiques, surtout devant un comité parlementaire, mais si on dit que 500 millions de dollars représentent 3 p. 100, alors que représente 16 milliards de dollars? Cela vous donnerait une idée approximative de l'effort américain.
M. Ovid Jackson: Alors, il y a une corrélation directe avec le montant d'argent que vous dépensez?
Dr Yves Morin: Oui.
Pour ce qui est de l'autre point concernant le coût des soins de santé au Canada, bien sûr, c'est très coûteux. Nous y consacrons 80 milliards de dollars, et ces coûts ne cessent de grimper. La population vieillit. La technologie dont vous avez parlé coûte plus cher. Mais j'estime que la création des IRSC constitue un pas important pour ce qui est du contrôle des coûts.
En fait, comme le docteur Friesen l'a dit plus tôt, il nous manque des renseignements. Nous ne savons vraiment pas ce que nous faisons. On consacre de l'argent à une question sans savoir vraiment si la situation s'améliore ou non.
Alors, une partie importante du budget de recherche des IRSC sera consacrée au système de prestation des soins de santé. Je crois que cela nous aidera beaucoup à rentabiliser le système et à réduire les coûts. On veut, évidemment, réduire les coûts et donner un service maximal.
Le président: Merci.
Le Dr Tom Brzustowski: Je crois que je peux vous aider un peu. Ces 3 p. 100 sont très importants, mais cela suppose aussi quelque chose d'important—c'est-à-dire, que nous aurons accès aux 97 p. 100 restants, à condition de comprendre ce que font les autres et, à partir de nos propres recherches, de pouvoir juger de l'importance de leurs recherches.
À l'heure actuelle, on peut tout télécharger de l'Internet, mais il faut savoir ce qu'on cherche. Il faut comprendre ce qu'on reçoit. On n'y arrive pas sans faire de la bonne recherche soi-même.
Alors le fait d'avoir un financement adéquat et des normes mondiales de qualité, comme le souligne le projet de loi à plusieurs reprises, appuyées par les IRSC, signifie que nous aurons plus que jamais auparavant accès à ces autres 97 p. 100.
Pour ce qui est des États-Unis et de leur contribution aux connaissances mondiales en matière de santé, je crois que le chiffre se situe entre 50 p. 100 et 60 p. 100.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Charbonneau.
[Français]
M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): C'est à mon tour de vous saluer et de vous féliciter pour le travail que vous faites depuis un certain temps pour en arriver à concevoir ce projet, qu'il nous appartient maintenant, comme législateurs, de mettre en oeuvre au moyen d'une loi pour permettre à la communauté scientifique et de la santé d'aller de l'avant. C'est un travail très important qui a été fait, et ce n'est que le préambule à ce qui se fera à l'avenir.
Nous allons faire notre possible, en quelques séances, pour entendre les nombreux témoins, discuter entre nous, collègues des différents partis, et essayer de livrer un projet de loi qui ne déformera pas trop, je l'espère, la proposition que vous nous faites, qui en respectera l'esprit et qui tiendra compte de quelques suggestions qui pourront nous être faites.
L'après-midi est avancé. J'aimerais poser quelques questions, mais j'aimerais que vous nous parliez quelque peu de la manière dont se fera l'évaluation de la performance.
J'ai remarqué, en lisant les articles 14 et 15, qu'on avait laissé au conseil d'administration la possibilité de déléguer le mandat d'«évaluer le rendement global d'IRSC, notamment à l'égard de la réalisation de sa mission», ce qui est prévu à l'alinéa 14b). Quand on regarde l'article 15, on voit qu'on a ouvert la porte à la délégation, ce qui n'est pas le cas pour a) et c). À l'alinéa a), c'est l'orientation stratégique, à c), c'est le budget, et il n'est pas question de déléguer cela, mais on ouvre cette possibilité pour l'évaluation. Quelle logique sous-tend cela?
Également, je voudrais que vous nous parliez quelque peu du pourcentage des dépenses qui ira à l'administration. Je sais que c'est une question qui va venir et qui est déjà dans l'air. Vous avez l'expérience du Conseil de recherches médicales. Quel pourcentage du budget du Conseil de recherches médicales est affecté à l'administration du conseil, et comment voyez-vous l'avenir au sein des instituts? Est-ce que cette machine dépensera davantage d'argent, à peu près le même pourcentage d'argent ou moins d'argent pour les frais d'administration? Il y aura, non pas un conseil, mais 10 ou 15 instituts. Est-ce que les dépenses administratives seront proportionnellement plus élevées? Naturellement, tous les budgets vont augmenter, y compris les frais d'administration, mais est-ce qu'on va faire des économies d'échelle?
Le président: Merci, monsieur.
Dr Yves Morin: Monsieur, je vous remercie de votre question et des commentaires que vous avez faits concernant l'étude que vous allez faire de notre projet de loi. On sait que vous allez évaluer l'ensemble du projet de loi avec beaucoup de soin.
En ce qui concerne l'évaluation du rendement global, il y a un précédent à cela. Pour commencer, je dois vous dire que le rapport annuel ne changera pas. En ce qui concerne l'évaluation du rendement global, il y a un précédent à cela: le Conseil de recherches médicales du Canada, à intervalles réguliers, est soumis à une évaluation par un organisme extérieur. L'évaluation du conseil a été faite par un organisme extérieur qui regroupait des gens de différents pays ainsi que un ou deux Canadiens. L'évaluation était complètement extérieure, et je pense qu'il y a un avantage à cela. On parle donc de la possibilité de s'en remettre à une évaluation extérieure des IRSC par des gens de l'étranger et des Canadiens.
C'est probablement dans ce but qu'on a prévu la possibilité de déléguer cette attribution à l'extérieur.
En ce qui concerne votre deuxième question,
[Traduction]
pour ce qui est des coûts administratifs?
M. Eric Maldoff: Vouliez-vous aborder l'évaluation?
Mme Dorothy Lamont: Je pense que le docteur Morin a très bien expliqué le sujet. C'est quelque chose qui devrait être fait d'une façon indépendante pour être bien fait, et l'évaluation devrait être déléguée pour s'assurer qu'il y ait une évaluation convenable du travail du conseil d'administration.
Le président: Pourrait-on, alors, parler des coûts administratifs?
Le Dr Yves Morin: Voulez-vous que j'aborde la question des coûts administratifs?
[Français]
Le Dr Friesen nous a dit à plusieurs reprises que l'argent servant à appuyer la recherche, ce qu'il y a de plus important, compterait pour 90 95 p. 100 du budget. Il est entendu que nous adoptons une structure un peu plus décentralisée que celle des conseils traditionnels. Toutefois, sur le plan administratif, tout sera centralisé, que ce soit les finances, le personnel, l'évaluation des projets de recherche ou le bureau du président.
Au niveau de chaque institut, le personnel de soutien administratif sera peu important. Il y aura peut-être deux ou trois personnes. Autrement dit, toute l'administration va se faire en un lieu central, au niveau du conseil d'administration.
Par conséquent, on peut affirmer que la recherche bénéficiera de 90 à 95 p. 100 du budget, ce qui est à peu près la moyenne canadienne.
Le Dr Friesen a fait une étude et il nous assure que de 90 à 95 p. 100 du budget des IRSC sera affecté à l'appui direct de la recherche.
[Traduction]
Le président: Juste une petite question pour obtenir une précision et pour m'assurer que je comprends bien cela.
Pour ce qui est du conseil d'administration provisoire et de ses recommandations vis-à-vis des instituts, qu'avez-vous décidé pour la configuration, ou pour le financement, la taille, etc.? Qu'en est-il de la création? Sur quoi allez-vous vous concentrer? Avez-vous, en fait, considéré cela, et est-ce que vous êtes prêt à en parler aujourd'hui?
M. Eric Maldoff: La conception et la création des instituts ont certainement été de très importants sujets de discussion au niveau du conseil d'administration provisoire depuis qu'on a reçu les directives et les recommandations. Dorothy est présidente d'un groupe de travail qui s'est occupé de ce sujet. La conception des instituts est maintenant affichée sur le site Web, alors le fruit de nos discussions a été rendu public. Voilà pour l'essentiel. Et si vous voulez entamer une discussion concernant la conception des instituts, nous pouvons le faire. Vous avez les bonnes personnes devant vous.
Le Dr Yves Morin: Nous pouvons vous consacrer les cinq prochaines heures.
M. Eric Maldoff: Il s'agit d'une discussion sérieuse.
J'aimerais rappeler que nous sommes un conseil d'administration provisoire. Nous élaborons des recommandations. Nous avons préparé des recommandations pour l'ébauche d'un projet de loi, mais il incombe aux instances dûment autorisées d'élaborer le projet de loi devant vous. Nous avons aussi élaboré des recommandations concernant la structure et les activités des IRSC. Enfin, si ce projet de loi est adopté—et je m'attends à ce qu'il le soit—il incombera au président et au conseil d'administration de décider s'ils acceptent ou rejettent nos recommandations.
Le président: C'est une bonne précision. Vous avez dit que c'était affiché sur le site Web, monsieur Maldoff?
M. Eric Maldoff: C'est exact.
Le président: Alors nous pouvons le consulter, n'est-ce pas?
M. Eric Maldoff: Est-ce que c'est sur le site Web?
Une voix: Oui, c'est sur le site Web, et c'est aussi dans les délibérations du comité, et je crois comprendre que les députés le recevront demain.
Mme Dorothy Lamont: Une fois qu'ils auront reçu le projet de loi.
Le président: Très bien.
Merci beaucoup. La réunion a été très productive. Je crois que c'est évident. À moins qu'il n'y ait d'autres points à soulever, je vous remercie tous et toutes d'être ici aujourd'hui. Vous nous avez donné des renseignements très précieux, et nous apprécions grandement votre aide.
M. Eric Maldoff: Monsieur le président et membres du comité, nous vous remercions de nous avoir accordé ce temps. Il s'agit d'une initiative très importante. Nous apprécions beaucoup votre attention. Cette initiative vient du monde de la recherche, des Canadiens qui cherchent à mettre à jour le programme de recherche en matière de santé. Au nom de tous les gens que nous avons consultés et de tous les membres du conseil d'administration provisoire, je vous remercie de vos efforts et de votre temps.
Le président: Merci beaucoup.
La séance est levée.