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SNSN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Sous-comité de la Sécurité publique et nationale du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 13 avril 2005




º 1620
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson (Crowfoot, PCC))
V         M. Horst Intscher (directeur, Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada)
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Horst Intscher

º 1625

º 1630

º 1635
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC)
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Peter MacKay
V         M. Horst Intscher
V         M. Peter MacKay
V         M. Horst Intscher
V         M. Peter MacKay
V         M. Horst Intscher
V         M. Peter MacKay
V         M. Horst Intscher

º 1640
V         M. Peter MacKay
V         M. Horst Intscher
V         M. Peter MacKay
V         M. Horst Intscher
V         M. Peter MacKay
V         M. Horst Intscher
V         M. Peter MacKay
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ)
V         M. Horst Intscher
V         M. Serge Ménard
V         M. Horst Intscher
V         M. Serge Ménard
V         M. Horst Intscher

º 1645
V         M. Serge Ménard
V         M. Horst Intscher
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.)
V         M. Horst Intscher
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Horst Intscher
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Horst Intscher

º 1650
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Horst Intscher
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Horst Intscher
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. Horst Intscher
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD)
V         M. Horst Intscher
V         M. Joe Comartin
V         M. Horst Intscher
V         M. Joe Comartin

º 1655
V         M. Horst Intscher
V         M. Joe Comartin
V         M. Horst Intscher
V         M. Joe Comartin
V         M. Horst Intscher
V         M. Joe Comartin
V         M. Horst Intscher
V         M. Joe Comartin
V         M. Horst Intscher
V         M. Joe Comartin
V         M. Horst Intscher
V         M. Joe Comartin
V         M. Horst Intscher
V         M. Joe Comartin
V         M. Horst Intscher
V         M. Joe Comartin
V         M. Horst Intscher
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.)

» 1700
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher

» 1705
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Tom Wappel
V         M. Peter MacKay
V         M. Horst Intscher
V         M. Peter MacKay
V         M. Horst Intscher

» 1710
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Peter MacKay
V         M. Horst Intscher
V         M. Peter MacKay
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.)

» 1715
V         M. Horst Intscher
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         M. Horst Intscher

» 1720
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         M. Horst Intscher
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Serge Ménard
V         M. Horst Intscher

» 1725
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Serge Ménard
V         M. Horst Intscher
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Joe Comartin
V         M. Horst Intscher

» 1730
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Joe Comartin
V         M. Horst Intscher
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         M. Horst Intscher
V         M. Tom Wappel
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Horst Intscher

» 1735
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)
V         M. Joe Comartin
V         Le vice-président (M. Kevin Sorenson)










CANADA

Sous-comité de la Sécurité publique et nationale du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


NUMÉRO 009 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 13 avril 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

º  +(1620)  

[Traduction]

+

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson (Crowfoot, PCC)): Conformément à l'ordre de renvoi du 9 décembre 2004, étude de la Loi antiterroriste, je déclare ouverte la 9e séance du comité en ce mercredi 13 avril.

    Aujourd'hui, nous accueillons avec plaisir plusieurs témoins. Étant donné que le temps dont nous disposons est quelque peu réduit et que nous accueillons deux groupes de témoins et qu'un autre comité se réunit ici à 17 h 30, je proposerais que nous essayions de terminer le premier segment à 16 h 50, de façon à pouvoir entendre le second jusqu'à 17 h 30.

    Cela vous convient-il?

    Des voix : D'accord.

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson) : Très bien.

    Nous accueillons des représentants du Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada.

    Soyez les bienvenus. Si vous avez un exposé, nous vous accordons de 10 à 15 minutes... c'est notre façon habituelle de fonctionner, puis nous vous poserons des questions.

    Monsieur Intscher, vous êtes le bienvenu.

+-

    M. Horst Intscher (directeur, Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président.

    J'ai quelques remarques qui devraient me prendre environ 15 minutes, mais si vous préférez que j'abrège, je peux le faire.

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Il n'y a aucun problème.

+-

    M. Horst Intscher: Je suis heureux d'avoir été invité à me présenter devant le comité aujourd'hui pour parler de CANAFE et des mesures que nous avons mises en oeuvre dans le cadre des dispositions de la Loi antiterroriste.

    Je suis accompagné aujourd'hui par mes collègues Sandra Wing, sous-directrice de la gestion des relations externes au CANAFE, et Josée Desjardins, avocate générale de nos services juridiques.

    Je dirai quelques mots au sujet de notre mandat et de notre évolution, de nos activités, de nos résultats et de nos perspectives d'avenir.

    La Loi sur le recyclage des produits de la criminalité a été adoptée en juin 2000. Avec cette loi, le principal objectif était de faciliter la détection et la dissuasion du blanchiment d'argent au Canada et partout dans le monde en exigeant que les intermédiaires financiers déclarent les opérations douteuses et autres et qu'ils tiennent des dossiers sur l'identification des clients; en exigeant que les personnes et les entités qui traversent la frontière avec des sommes importantes en espèces ou des instruments monétaires déclarent ces mouvements; et en créant le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, ou CANAFE.

    Notre organisme a été créé en vertu de la Loi pour recevoir des renseignements sur certaines opérations, les analyser et, le cas échéant, les communiquer aux organismes d'application de la loi et à d'autres organismes d'enquête et unités du renseignement financier étrangères.

    L'expression « unité du renseignement financier » est reconnue internationalement et signifie une unité centrale ou nationale qui recueille, analyse et communique des renseignements sur des opérations financières touchant des soupçons de blanchiment d'argent et, plus récemment, de financement d'activités terroristes.

    CANAFE est l'unité du renseignement financier, ou URF, du Canada. Il s'agit d'un organisme indépendant qui relève du ministre des Finances, lequel rend compte au Parlement des activités du Centre. CANAFE est également tenu de fonctionner de façon indépendante par rapport aux organismes d'enquête à qui il est autorisé à communiquer des renseignements financiers. Cette indépendance a été conçue afin d'équilibrer la protection des renseignements financiers personnels et les besoins des organismes d'application de la loi dans le cadre d'une enquête.

    Suite aux événements du 11 septembre 2001, les gouvernements ont commencé à accorder plus d'importance à la lutte contre le terrorisme. À l'automne de 2001, le Parlement a adopté la Loi antiterroriste, qui renforçait notre système de lutte contre le blanchiment d'argent afin d'empêcher les groupes terroristes d'utiliser le système financier.

    Les modifications apportées par la LAT à la loi habilitante de CANAFE en ont modifié le nom, qui est devenu la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et ont augmenté de trois façons importantes la portée des opérations à déclarer à CANAFE. Les déclarations d'opérations douteuses comprenaient maintenant les soupçons de financement d'activités terroristes en plus des soupçons de blanchiment d'argent. CANAFE devait maintenant recevoir les rapports portant sur les biens appartenant à un groupe terroriste et sur toute opération reliée à ces biens, et CANAFE était autorisé à recevoir des renseignements transmis volontairement touchant des soupçons de financement d'activités terroristes et non seulement de blanchiment d'argent.

    Les modifications exigeaient également que lorsque nous avions des motifs valables de soupçonner que les renseignements financiers pouvaient être pertinents à une enquête ou à une poursuite portant sur une infraction de financement d'activités terroristes, ces renseignements devaient être fournis à la police. Un pouvoir de même nature a également été créé pour la déclaration au SCRS des renseignements touchant les soupçons de menaces à la sécurité du Canada, qui comprennent les soupçons de financement d'activités terroristes.

    Ces modifications ont élargi notre mandat et augmenté nos capacités dans le cadre de la lutte contre le blanchiment d'argent et nous ont permis de jouer un rôle unique et important dans les efforts pangouvernementaux de lutte contre le financement des activités terroristes.

    Pour ce qui est de ce que nous faisons, notre loi exige que les institutions financières et les autres entreprises oeuvrant dans le domaine et les services financiers tiennent des dossiers sur leurs clients et leurs opérations et qu'elles déclarent certaines opérations à CANAFE. Les renseignements sur les opérations financières que nous recevons comprennent les opérations, quels que soient leur nature et leur montant, qui laissent soupçonner un lien avec des activités de blanchiment d'argent ou de financement d'activités terroristes—ce que nous appelons des opérations douteuses; les opérations en espèces de 10 000 $ et plus, ce qui ne comprend pas les retraits en espèces; les télévirements, au Canada ou à l'étranger, de 10 000 $ ou plus; et les biens appartenant à un groupe terroriste.

    Ces renseignements nous sont déclarés par une vaste gamme d'institutions et d'intermédiaires, à commencer par les institutions de dépôt comme les banques, les coopératives de crédit et les caisses populaires, mais y compris aussi les entreprises de transfert de fonds et de vente de titres négociables, les courtiers de change, les courtiers en valeurs mobilières, les comptables, les sociétés d'assurance-vie, les courtiers et agents immobiliers et les casinos.

    De plus, toute personne traversant la frontière doit déclarer à l'Agence des services frontaliers du Canada tout mouvement d'espèces ou d'instruments monétaires de 10 000 $ et plus, au Canada ou à l'étranger. L'ASFC envoie ces déclarations à CANAFE.

    L'ASFC est également investie du pouvoir de saisir des fonds qui ne sont pas déclarés ou qui suscitent des soupçons de recyclage des produits de la criminalité. CANAFE reçoit également des déclarations sur ces saisies.

    En plus de notre pouvoir de recevoir des renseignements transmis volontairement sur des soupçons de blanchiment d'argent et de financement d'activités terroristes, CANAFE peut également utiliser des renseignements du domaine public, des bases de données commerciales ainsi que les bases de données des organismes d'application de la loi ou de sécurité nationale qui oeuvrent à l'échelle fédérale ou provinciale.

    J'aimerais maintenant décrire de façon plus détaillée les rouages de nos activités quotidiennes. Nous sommes un organisme relativement petit avec un effectif d'environ 180 employés et un budget annuel d'à peu près 30 millions de dollars. CANAFE remplit deux principales fonctions opérationnelles reliées à son mandat de détection et de dissuasion : l'analyse et la conformité. L'obligation qu'a CANAFE de détecter et de dissuader le blanchiment d'argent et le financement d'activités terroristes est respectée grâce à nos analyses des renseignements financiers que nous recevons. Ces analyses sont effectuées afin de communiquer des renseignements de qualité qui peuvent servir aux organismes responsables d'enquêtes sur le financement d'activités terroristes et le blanchiment d'argent.

    Notre capacité en technologie de l'information est un élément essentiel de ce processus. Les différents types de déclarations d'opérations dont j'ai déjà parlé sont reçus électroniquement dans la base de données de CANAFE et deviennent immédiatement disponibles aux fins d'analyse. L'amorce des analyses de CANAFE est variée. En effet, une analyse peut être déclenchée par une déclaration ou une série de déclarations provenant d'entités telles que les banques ou les coopératives de crédit et ainsi de suite, par des renseignements transmis volontairement par des organismes d'application de la loi ou le SCRS au sujet d'un cas auquel il travaille, ou encore par des renseignements fournis par une unité du renseignement financier étranger. Quelle que soit l'amorce de l'analyse, les analystes consultent la base de données du centre au moyen d'outils technologiques précisément conçus à cette fin, pour découvrir des modes d'opérations qui soulèvent des soupçons de recyclage des produits de la criminalité ou de financement des activités terroristes. Après avoir fait une analyse, si CANAFE a des motifs raisonnables de soupçonner que les renseignements seraient utiles aux fins d'enquête ou de poursuite relativement à une infraction de recyclage des produits de la criminalité ou de financement des activités terroristes, le centre doit communiquer ces renseignements à la police. Lorsqu'il existe des motifs raisonnables de soupçonner une menace envers la sécurité du Canada, y compris le financement des activités terroristes, CANAFE doit communiquer les renseignements au Service canadien du renseignement de sécurité.

    Dans certains cas, nous devons également communiquer les renseignements à l'Agence du revenu du Canada ou à l'Agence des services frontaliers du Canada. Dans le cas de ces organismes, nous devons répondre à un double critère. Tout d'abord, nous devons soupçonner l'existence d'une opération de recyclage des produits de la criminalité ou de financement d'activités terroristes et ensuite, nous devons confirmer que ces renseignements se rapportent à une infraction commise en vertu des lois que ces organismes sont chargés d'appliquer.

    Nous pouvons également communiquer spontanément ou sur demande de l'information aux unités du renseignement financier étrangères avec lesquelles nous avons conclu une entente de partage de l'information. Ces ententes bilatérales doivent être approuvées par le ministre des Finances.

    Les renseignements que le centre peut communiquer sont décrits de façon précise dans sa législation. Il s'agit des renseignements désignés concernant les opérations, l'endroit où elles ont été effectuées, la personne qui a agi, ainsi que de tout autre renseignement sur les comptes, les entreprises ou d'autres activités en cause.

    La communication, par CANAFE, de renseignements de cet ordre est précieuse pour les organismes d'application de la loi car elle leur donne des pistes à explorer. Un cas typique de communication peut permettre d'identifier six ou sept personnes, cinq entreprises, et mettre en cause un nombre considérable d'opérations de différentes sortes qui ont souvent été déclarées par deux entités déclarantes ou plus.

    Néanmoins, les renseignements désignés ne révèlent pas tout aux organismes d'application de la loi. En fait, le système canadien prévoit un mécanisme qui permet à la police ou au SCRS d'obtenir des renseignements additionnels auprès de CANAFE dans le cadre d'une enquête portant sur le blanchiment d'argent ou le financement d'activités terroristes. Lorsque le tribunal émet une ordonnance de production, l'enquêteur peut obtenir de CANAFE une analyse complète du cas.

    Notre loi interdit toute communication ou utilisation non autorisée de renseignements reçus par CANAFE des entités déclarantes ainsi que des renseignements que prépare le centre à partir de ces déclarations. La peine maximale pour quiconque est reconnu coupable d'une utilisation non autorisée de renseignements est une amende de 500 000 $ et une peine d'emprisonnement de cinq ans.

º  +-(1625)  

    Je vous ai parlé des analyses, mais je voudrais aussi dire quelques mots sur la conformité. La conformité permet d'augmenter le niveau et la qualité des déclarations à des fins d'analyse, mais elle permet également de s'assurer que les services financiers canadiens respectent les normes qui ont été conçues afin d'empêcher qu'ils deviennent des points de transit pour les fonds illégaux.

    CANAFE est également chargé de veiller à ce que les entités déclarantes se conforment à la loi et à son règlement et nous avons instauré un programme de conformité moderne et complet reposant sur le risque. La qualité de nos analyses repose directement sur la qualité des renseignements financiers que nous recevons. Nous accordons donc de l'importance à l'établissement et à l'entretien de relations de travail solides et reposons sur la coopération avec toutes nos entités déclarantes dans le cadre de l'approche axée sur le risque que nous adoptons afin d'assurer la conformité et d'améliorer le plus possible la qualité et la quantité de leurs déclarations.

    Jusqu'à maintenant, nous avons effectué plus de 200 examens de la conformité sur les lieux, dans chacun des secteurs d'entités déclarantes, reconnaissant les défis que posent les secteurs qui ne sont pas réglementés, c'est-à-dire les entreprises de transfert de fonds ou de vente de titres négociables et les opérations de change.

    Chaque examen de la conformité révèle des lacunes. La grande majorité des entités souhaitent être conformes. Elles collaborent et prennent des mesures lorsque des lacunes sont portées à leur attention. Un petit nombre d'entre elles ont été, ou seront, renvoyées aux organismes d'application de la loi aux fins d'enquête et de poursuites éventuelles, comme le prévoit la loi.

    Je dirai quelques mots sur nos résultats.

    Au cours de l'exercice 2003-2004, CANAFE a effectué 197 communications de renseignements financiers concernant des soupçons de blanchiment d'argent et de financement des activités terroristes, le tout totalisant 700 millions de dollars. De ce nombre, 48, représentant 70 millions de dollars d'opérations, étaient liées à des soupçons de financement d'activités terroristes et/ou d'autres menaces à la sécurité du Canada.

    Plus récemment, entre le 1er avril et le 31 décembre 2004, autrement dit, les trois premiers trimestres du dernier exercice financier, CANAFE a divulgué un nombre total de 99 cas, représentant plus de 1,25 milliard de dollars en opérations. De ce nombre, 25 touchaient des cas de financement d'activités terroristes.

    Comme je l'ai indiqué, au cours de l'exercice 2003-2004, la valeur des opérations déclarées et soupçonnées d'association au financement des activités terroristes, et d'autres menaces à la sécurité du Canada était d'environ 70 millions de dollars. Selon les résultats obtenus dans le premier trimestre, cette valeur pourrait doubler au cours de l'exercice actuel.

    L'augmentation marquée de la valeur des opérations déclarées montre que notre expérience croissante et le volume à la hausse des opérations versées dans notre base de données nous permettent de communiquer des renseignements sur des cas plus importants et souvent plus complexes. Toutefois, cette augmentation n'indique pas nécessairement une hausse dans le financement d'activités terroristes.

    Selon un examen de nos cas de financement d'activités terroristes pour le dernier exercice, nous constatons qu'un vaste pourcentage (80 p. 100) de ceux-ci comportent des télévirements internationaux dont la plupart ont été envoyés vers des lieux qui sont considérés comme des points chauds pour les activités criminelles et terroristes. Nous avons également constaté que dans un tiers des cas de financement d'activités terroristes, les opérations financières sont formées de dépôts importants en espèces et des télévirements.

    Je vais parler brièvement des perspectives.

    Nous sommes très fiers de ce que nous avons été en mesure d'accomplir. Nous existons depuis moins de cinq ans et nous fonctionnons à plein rythme depuis un peu plus de trois ans. CANAFE a vu le jour en juillet 2000, dépourvu d'employés, de bureaux, d'infrastructures ou de systèmes opérationnels, il a rapidement évolué pour devenir un organisme fonctionnant à plein rythme qui fournit des renseignements financiers pertinents. Nous avons conçu des systèmes de TI qui peuvent recevoir d'importantes quantités de déclarations chaque année. Nous avons été la première URF dans le monde à offrir le mode de déclarations électroniques intégrales, dès nos débuts. Nous avons également formé nos analystes et nous leur avons donné les moyens d'utiliser les données pour faire leurs analyses.

    Mais, de façon plus importante, la rétroaction que nous avons reçue des organismes d'application de la loi et du SCRS indique que les renseignements que nous fournissons sont utiles aux fins d'enquêtes en cours et permettent de lancer de nouvelles enquêtes.

    Avant de terminer, j'aimerais souligner que bien que CANAFE ait été créé, somme toute, assez récemment, le centre s'est avéré un succès et nous continuerons d'améliorer notre capacité à fournir aux organismes d'application de la loi et du renseignement des renseignements financiers ponctuels et de grande qualité.

º  +-(1630)  

    Nous continuerons également à promouvoir une approche axée sur la coopération pour assurer la conformité et nous effectuerons des examens des entités déclarantes qui présentent le plus grand risque de non-conformité. Nous continuerons à partager nos expériences et à travailler avec nos partenaires afin de créer un environnement hostile au blanchiment d'argent et au financement des activités terroristes au Canada et partout dans le monde.

    Nous travaillons également à mettre en oeuvre et, dans certains cas, avons déjà mis en oeuvre les recommandations comprises dans le récent rapport de la vérificatrice générale. Par exemple, nous travaillons avec le ministère des Finances sur le document de consultation que le ministère prépare en prévision de l'examen parlementaire de notre loi habilitante qui aura lieu en juillet prochain. Ce document présentera un certain nombre d'améliorations dont l'augmentation de la portée des renseignements compris dans nos communications.

    J'aimerais vous remercier de nouveau de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

º  +-(1635)  

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Merci, monsieur.

    Nous allons commencer par l'opposition et revenir au gouvernement, tout en limitant nos questions à quatre minutes. Nous diminuons donc le temps de parole de sept à quatre minutes.

    Monsieur MacKay, quatre minutes.

+-

    M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Vu les contraintes en matière de temps et la complexité de certaines de ces questions, je me demande simplement, monsieur le président, si nous ne devrions pas profiter au maximum de la présence de nos témoins et demander aux autres de revenir, plutôt que d'essayer d'aller trop vite en ce qui concerne cet exposé en particulier et les questions qu'il suscite.

    Je soumets cette proposition au comité.

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Monsieur MacKay, je propose que vous commenciez à poser vos questions et ce, pendant quatre ou cinq minutes. Nous demanderons à nos autres témoins si cela leur convient.

+-

    M. Peter MacKay: Permettez-moi de commencer par remercier les témoins de leur exposé. Il s'agit d'un sujet fort important et global, et c'est la raison pour laquelle je m'inquiète un peu des contraintes en matière de temps qui nous sont imposées.

    J'aimerais commencer par poser une question, si vous permettez, au sujet de la différence entre les deux types de listes. Si je comprends bien, il existe deux genres de listes en ce qui concerne les entités terroristes en vertu de la Loi antiterroriste. L'une vise les entités terroristes en application de l'article 83.05 du Code criminel. Une entité est inscrite sur ce genre de liste lorsqu'elle a participé sciemment à des activités terroristes, lorsqu'elle a tenté sciemment de commettre un acte terroriste illicite, tandis que la deuxième liste vise les entités qui relèvent du Règlement d'application de la résolution des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme. Je me demande si vous pouvez faire la distinction entre ces deux genres de liste ainsi que souligner les répercussions découlant de l'inscription sur la liste en application du Code criminel par opposition à l'inscription sur la liste en application du Règlement d'application de la résolution des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme, et si en fait elles sont conformes au droit.

+-

    M. Horst Intscher: Je ne pense pas pouvoir véritablement répondre à cette question. Le CANAFE ne s'occupe absolument pas de l'inscription sur les listes ni du processus dans son ensemble. Nous recevons ces listes ainsi que les déclarations de biens appartenant à un groupe terroriste, mais nous ne jouons aucun rôle quant au processus d'inscription.

+-

    M. Peter MacKay: Vous examinez simplement la liste telle qu'elle est fournie. Vous n'avez aucune donnée ni aucune connaissance quant à la façon dont fonctionne le processus.

+-

    M. Horst Intscher: C'est exact.

+-

    M. Peter MacKay: Deuxièmement, il y a eu plusieurs cas — j'en connais au moins un, qui a commencé aux États-Unis. Si vous n'êtes pas au courant de ce cas, veuillez simplement le dire; il s'agit en fait d'une personne d'Ottawa qui est directement visée. Cette affaire découle d'une inscription sur une liste aux États-Unis, qui par la suite a été adoptée par les Nations Unies, si je ne me trompe. Nous parlons ici d'un homme du nom de Liban Hussein, qui vit à Ottawa et dont le frère est un Américain, du Massachusetts. Les deux ont été accusés d'un transfert d'argent, ce qui explique leur inscription sur cette liste. Ils appartiennent à la communauté somalienne du Canada. On a présumé que des fonds retournaient en Somalie; des biens ont été saisis et si je comprends bien, le bureau central de cette organisation a fait l'objet d'une perquisition.

    En juin 2004, M. Hussein a été extradé du Canada à destination des États-Unis; c'était en fait ce qui était prévu, mais aucune suite n'a été donnée et, au bout du compte, tout le processus a été interrompu.

    Êtes-cous au courant de ce cas?

+-

    M. Horst Intscher: Je ne le connais que par rapport à ce que j'ai pu lire dans les médias et pas autrement.

+-

    M. Peter MacKay: Lorsque ce genre de cas se produit et qu'une personne est inscrite sur une liste pour en être ensuite apparemment radiée, savez-vous si les biens saisis au cours de cette activité lui sont rendus? Est-il prévu un dédommagement par l'entremise de CANAFE ou existe-t-il un autre processus dans le cas où des biens ont été effectivement saisis? Je sais qu'il s'agit d'un cas rare.

+-

    M. Horst Intscher: Nous ne sommes pas vraiment en mesure de répondre à cette question, qui devrait plutôt être adressée au ministère de la Justice.

    Pour ce qui est du financement des activités terroristes, notre rôle consiste uniquement à passer au peigne fin les données d'opérations qui nous sont signalées. Lorsque nous repérons des activités au sujet desquelles on aurait des raisons de croire qu'elles sont reliées à un financement d'activités terroristes, nous en faisons état à la GRC ou au SCRS, lesquels mènent l'enquête pertinente.

º  +-(1640)  

+-

    M. Peter MacKay: Vous ne faites que communiquer l'information?

+-

    M. Horst Intscher: Nous ne sommes qu'une organisation qui recueille des renseignement et les transmet aux organismes d'enquête.

+-

    M. Peter MacKay: Servez-vous de témoins dans le cadre de poursuites éventuelles?

+-

    M. Horst Intscher: Nous pourrions effectivement être appelés à comparaître à titre de témoins.

+-

    M. Peter MacKay: Dans les cas où des biens pourraient en fait être saisis, comme je l'ai dit plus haut, savez-vous où ces fonds pourraient être dévolus—comment ces actifs sont bloqués, ou peut-être transférés en fiducie?

+-

    M. Horst Intscher: Désolé, je ne le sais pas.

+-

    M. Peter MacKay: Merci.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Monsieur Ménard, quatre minutes.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ): J'avoue que j'ignorais l'existence de votre organisme. J'aimerais comprendre ce que vous faites. Je crois comprendre que vous êtes informés de toutes les transactions de plus de 10 000 $ qui se font au Canada.

[Traduction]

+-

    M. Horst Intscher: Nous sommes informés d'opérations précises comme des opérations en espèces, et non de retraits d'espèces, de plus de 10 000 $; de virements internationaux reçus ou envoyés, de 10 000 $ ou plus, mais non de virements nationaux; enfin, d'opérations douteuses de quelque montant que ce soit. Il pourrait s'agir d'opérations d'un ou de cinq dollars, si l'institution financière qui observe ou effectue ces opérations, a des raisons de croire qu'elles pourraient être liées au financement d'activités terroristes ou à du blanchiment d'argent. Ces opérations pourraient nous être signalées, même si leur montant est inférieur au seuil de 10 000 $. Pour toutes les autres opérations, le seuil se situe à 10 000 $ ou plus.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: J'ai cru comprendre de votre exposé que l'on devait vous informer de toutes les transactions supérieures à 10 000 $. Ce n'est donc pas le cas. On doit poser un jugement avant de vous informer d'une transaction de plus de 10 000 $.

[Traduction]

+-

    M. Horst Intscher: Les opérations douteuses exigent un certain jugement de la part de l'entité déclarante qui doit décider si oui ou non elle a des raisons de croire que l'opération vise le financement d'activités terroristes ou le blanchiment d'argent. Les autres opérations nous sons signalées en vertu d'un critère objectif, à savoir le dépassement du seuil de 10 000 $.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Il doit y avoir des millions, sinon des milliards de transactions de 10 000 $ et plus au Canada. On ne peut pas acheter une voiture ou une maison sans dépenser plus de 10 000 $.

    Beaucoup de compagnies présentes au Canada exportent du papier, des meubles ou d'autres marchandises. Les virements internationaux doivent être légion. Êtes-vous informés de toutes ces transactions?

[Traduction]

+-

    M. Horst Intscher: À l'intérieur du pays, les opérations qui sont déclarées correspondent à des opérations en espèces d'au moins 10 000 $. Toute personne qui paie une voiture 20 000 $ en espèces ou une maison 40 000 $ en espèces nous est normalement signalée. Si l'achat s'est fait au moyen d'un chèque tiré d'un compte bancaire ou d'un transfert de fonds entre la banque, l'avocat ou le vendeur, il n'est pas signalé. Seules les opérations en espèces à l'intérieur du Canada nous sont signalées.

    Les transferts reçus et envoyés—effectivement, tout transfert reçu et envoyé qui s'élève à plus de 10 000 $ nous est signalé. C'est en partie pour diminuer le volume que l'on a fixé le seuil de déclaration à 10 000 $ en ce qui concerne les transferts internationaux et en partie pour essayer d'exclure de cette déclaration automatique les opérations quotidiennement effectuées par des gens ou des familles. Si quelqu'un fait un transfert de 9 000 $ à sa fille qui est étudiante à San Francisco, peu nous importe et cela ne nous regarde pas, mais s'il s'agit d'un transfert de plus de 10 000 $, il nous est signalé. Le volume de ces opérations—les virements internationaux reçus et envoyés—correspond à quelque 6 millions par an.

º  +-(1645)  

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Quand j'étais ministre de la Sécurité publique du Québec, je m'intéressais à la lutte contre le crime organisé, et plus particulièrement aux Hells Angels.

    En quoi votre rôle peut-il vraiment être utile? Est-ce que vous pouvez, par exemple, retracer l'argent amassé par les organisations criminelles de ce type? Cela représente des millions de dollars, n'est-ce pas? De quelle façon pouvez-vous nous être utiles?

[Traduction]

+-

    M. Horst Intscher: Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte. Tout d'abord, nous pourrions repérer les opérations faites par des particuliers ou des groupes qui seraient susceptibles d'intéresser les organes d'application de la loi ou de sécurité. Comme nous recevons l'information relative aux virements internationaux, nous pouvons également en connaître la destination ou le point d'origine.

    Pour étendre encore davantage notre couverture, nous sommes en train de signer autant de protocoles d'entente que possible avec des organismes semblables au nôtre dans d'autres pays à des fins de suivi et de consultation. Par conséquent, si un transfert de 100 000 dollars se faisait entre le Canada et les Îles Caïmans et qu' un accord avait été conclu avec un organisme homologue, nous pourrions lui demander d'essayer de voir si ces fonds restent dans les Îles Caïmans ou s'ils ont été transférés ailleurs. Nous avons déjà signé 20 protocoles d'entente du genre et espérons pouvoir en conclure 20 ou 25 de plus ces deux prochaines années.

    Ce faisant, nous pouvons transmetttre de plus en plus d'informations de ce genre aux organismes d'application de la loi, lesquels sont alors en mesure de voir non seulement qu' un tel ou un tel soupçonné de blanchiment d'argent, a sorti de l'argent du pays, mais aussi de connaître la destination finale de cet argent.

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Merci, monsieur.

    Selon le consensus qui se dégage ici, nous allons poursuivre nos discussions avec le CANAFE aujourd'hui. Nous allons essayer de faire revenir le groupe du Bureau du surintendant lorsque cela lui conviendra, le plus tôt possible, espérons-le. Je comprends dans quelle mesure il aurait été avantageux d'entendre ces deux groupes ensemble. Les listes et même certaines des questions qui se sont posées, devraient peut-être être adressées au Bureau du surintendant.

    Si c'est véritablement le consensus, nous allons continuer d'entendre le CANAFE aujourd'hui et essayer de prévoir les autres pour un autre jour. Veuillez nous en excuser.

    Nous poursuivons avec M. Cullen.

+-

    L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Merci, monsieur Intscher, madame Desjardins et madame Wing.

    Monsieur Intscher, lorsque vous parlez des virements internationaux, 6 millions par an, il s'agit de 6 millions d'opérations et non de 6 millions de dollars, n'est-ce pas?

+-

    M. Horst Intscher: Effectivement, il s'agit de 6 millions d'opérations.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Lorsqu'on parle de virements internationaux que vous surveillez maintenant—et peut-être ma question est-elle stupide—cela englobe-t-il les opérations par Internet ou non?

+-

    M. Horst Intscher: Pas pour l'instant. Il s'agit d'opérations faites par l'entremise d'institutions financières qui utilisent le système SWIFT et également d'autres systèmes de transfert de fonds agréés par les institutions financières.

    À l'heure actuelle, les systèmes de transmission par Internet ou les systèmes de paiement par Internet ne sont pas visés par la loi.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Elles ne sont pas visées par la loi ou cela n'est pas faisable techniquement parlant, ou les deux?

    Tout d'abord, permettez-moi de poser la question suivante. Pensez-vous que des montants importants d'argent pourraient faire l'objet d'un blanchiment par Internet, ou le risque est-il peu élevé?

+-

    M. Horst Intscher: Il est difficile de l'évaluer. Théoriquement, nous savons que cette possibilité existe. Nous avons vu certains cas où des systèmes de paiement Internet interviennent tout en étant finalement rattachés au système financier conventionnel; il s'agissait de cas qui étaient d'un grand intérêt pour nous. Pour ce qui est de l'importance du phénomène, nous ne la connaissons pas vraiment, mais bien sûr, cette possibilité existe.

º  +-(1650)  

+-

    L'hon. Roy Cullen: Vous dites qu'actuellement vous n'avez pas ce mandat en vertu de la loi, n'est-ce pas?

+-

    M. Horst Intscher: C'est exact.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Pour en revenir à...

+-

    M. Horst Intscher: Permettez-moi d'ajouter que ce serait tout un défi que d'essayer d'intervenir, à plus forte raison, de réglementer pareil système.

+-

    L'hon. Roy Cullen: C'était la question que je voulais poser au sujet de la faisabilité. Je me demande vraiment comment vous pourriez le faire, mais pour l'instant, vous ne le pouvez pas, car la loi ne vous en donne pas le mandat.

    Pourrais-je revenir à...? Selon certaines rumeurs, les États-Unis, par l'entremise du Département du Trésor, cherchent des moyens d'obtenir plus d'information au sujet de virements reçus ou envoyés. Êtes-vous au courant et cela se fait-il effectivement? Quelle en serait la logique, mis à part ce qui semble évident, et qu'est-ce que cela pourrait signifier pour les Canadiens qui font des virements internationaux entre les États-Unis et le Canada?

+-

    M. Horst Intscher: Nous avons entendu dire que les États-Unis ont le pouvoir de surveiller et de recevoir des déclarations sur les virements reçus et envoyés. Sans vouloir nous vanter, nous sommes peut-être en partie responsables de pareille situation. Nous avons remarqué très tôt dans le cadre de notre travail que l'importance du renseignement de ces déclarations était extrêmement élevée, voire plus élevée que celle des déclarations relatives aux opérations douteuses. Dans le cadre de nos discussions bilatérales et multilatérales avec nos homologues américains, nous leur avons fait part de notre expérience à cet égard, tout comme les Australiens qui ont également l'habitude de recueillir ces renseignements. C'est lorsque nous leur avons fait un exposé sur l'importance de ce genre de déclarations dans nos divulgations relatives au financement d'activités terroristes qu'ils s'y sont intéressés et qu'ils ont essayé de voir s'ils pouvaient obtenir le pouvoir de réunir ce même genre de renseignements.

    Pour ce qui est de la pertinence pour les Canadiens, ou de l'impact sur les Canadiens, tout Canadien qui ferait un virement au-dessus du seuil prévu aux États-Unis ferait probablement l'objet d'une déclaration automatique, de la même façon qu'ici. Les volumes de telles opérations aux États-Unis seraient bien sûr beaucoup plus élevés qu'ici, mais il s'agit de déclarations objectives qui à elles seules, certainement dans notre système et probablement également dans le leur, ne déclencheraient pas d'analyse. Il faudrait d'autres renseignements relatifs à de telles opérations pour déclencher toute autre analyse.

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Merci, monsieur Intscher.

    Monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): Merci, monsieur le président.

    Merci de votre présence.

    Monsieur Intscher, certaines de ces questions me préoccupent en fait et j'aimerais poursuivre dans la foulée de celles posées par M. Cullen. Je suis préoccupé par la sécurité et par le fait que vous ne vous sentiez pas à l'aise et vous ne pouvez pas nous dire certaines choses. Si je demandais « Pouvez-vous faire ceci? » ou « Procédez-vous de la sorte? » pourriez-vous répondre ou êtes-vous soumis à certaines restrictions à cet égard?

+-

    M. Horst Intscher: Si l'on arrivait à identifier réellement ou potentiellement l'auteur ou le sujet d'une déclaration, il faudrait que je m'abstienne de répondre, car la loi à laquelle je suis assujetti m'en empêche. Si par hasard on entrait dans des détails au sujet de nos méthodes analytiques, je vous demanderais de me permettre de ne pas répondre car si nous divulguons cette information, certains pourraient trouver le moyen d'échapper à notre regard. Par contre, je pense pouvoir répondre à pratiquement toute autre question que vous voudrez bien me poser.

+-

    M. Joe Comartin: D'accord. Je vais donc poursuivre dans la foulée de M. Cullen.

    En ce qui concerne les virements électroniques, disposez-vous d'une méthode qui vous permette de les évaluer? Je comprends que nous n'ayez pas le mandat législatif pour ce faire, mais existe-t-il une méthodologie technologique qui permette de repérer ces virements?

+-

    M. Horst Intscher: Les virements par Internet?

+-

    M. Joe Comartin: Oui.

º  +-(1655)  

+-

    M. Horst Intscher: Nous ne l'avons pas actuellement.

+-

    M. Joe Comartin: Quelqu'un dans le monde en dispose-t-il?

+-

    M. Horst Intscher: Je ne le crois pas.

+-

    M. Joe Comartin: Quelqu'un dans le monde a-t-il analysé combien de virements de cette nature se font au Canada? Est-ce que l'un de nos alliés a fait une étude là-dessus—aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Australie?

+-

    M. Horst Intscher: Pas à ma connaissance. Jusqu'ici, nous nous sommes penchés sur cette question en examinant les liens avec le système financier conventionnel. Autrement dit, si un de ces modes de paiement ou de virement sur Internet vient à être relié à une institution financière, ce qui arrive assez souvent, cette institution a l'obligation de le déclarer.

+-

    M. Joe Comartin: Avez-vous imaginé comment on pourrait procéder? Si quelqu'un essayait de faire un virement à l'insu de votre organisme, comment utiliserait-il Internet pour le faire? Je ne sais pas si vous pouvez me répondre.

+-

    M. Horst Intscher: Je ne sais pas comment je le ferais. Je n'en sais pas assez sur la façon dont ils fonctionnent ni même à partir d'où, pour pouvoir vous fournir une explication là-dessus.

+-

    M. Joe Comartin: Je n'arrive pas à imaginer comment je pourrais effectuer un virement sans entrer en contact avec les institutions que vous surveillez. Est-il possible qu'une entreprise privée puisse virer de l'argent sans passer par une banque, une coopérative de crédit ou une autre institution financière?

+-

    M. Horst Intscher: Nous savons déjà qu'il y a des moyens d'éviter du moins en partie les institutions financières, mais pas au Canada. Dans certains pays où les cartes de valeur existent, il est possible de virer un montant d'argent d'une carte à une autre sans inscription aucune dans une institution financière. Cette opération ne figurerait nulle part. À ma connaissance, les cartes de cette nature n'existent pas au Canada. Mais nous avons entendu dire que certains pays d'Europe en délivrent et qu'on peut parfois accumuler des sommes importantes sur ces cartes. À l'aide d'un lecteur, elles peuvent servir à virer un montant crédité de ma carte à la vôtre, disons. Ma banque saurait qu'on a crédité un montant dans mon compte quand je rapporterais ma carte, mais il n'y aurait aucune trace de l'opération entre nos deux cartes.

+-

    M. Joe Comartin: Maintenant pour ce qui est de l'argent qui entre au Canada, est-il possible d'éviter de virer de l'argent dans les institutions que vous surveillez?

+-

    M. Horst Intscher: Au Canada? Non.

+-

    M. Joe Comartin: Dans son rapport de novembre dernier sur votre centre, la vérificatrice générale formule un certain nombre de critiques. J'aimerais d'abord vous interroger sur les avocats. Y a-t-il du nouveau à ce sujet? A-t-on réglé l'anomalie qu'elle a constatée?

    Pour les fins du compte rendu, je signale que je parle des comptes en fiducie des avocats.

+-

    M. Horst Intscher: C'est le ministère des Finances plutôt que notre centre qui s'occupe de cette question, mais je crois comprendre que les discussions sont en cours avec les barreaux et que la situation est très encourageante.

+-

    M. Joe Comartin: Mais, actuellement, vous ne surveillez pas les comptes en fiducie des avocats.

+-

    M. Horst Intscher: Non. J'aimerais apporter une précision. Nous ne surveillons pas les comptes en fiducie des avocats mais, si un avocat dépose un gros montant d'argent dans un compte en fiducie, la banque serait tenue de nous le déclarer.

+-

    M. Joe Comartin: La banque serait tenue de le faire?

+-

    M. Horst Intscher: Oui.

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Monsieur Wappel, c'est à vous pour quatre minutes.

+-

    M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.): J'aimerais d'abord vous féliciter d'avoir réussi à partir de rien à monter le centre en si peu de temps. C'est très impressionnant. Bravo et bonne chance.

    Notre comité est chargé d'examiner la Loi antiterroriste. C'est notre mandat. La partie 4 du projet de loi traite justement de votre organisme. Avez-vous des préoccupations ou des recommandations à nous formuler au sujet de l'une ou l'autre des parties du projet de loi qui vous vise? Si oui, quelles sont-elles?

»  +-(1700)  

+-

    M. Horst Intscher: Je crois que nous sommes très satisfaits de la façon dont la loi fonctionne pour nous. Les dispositions actuelles nous permettent de travailler très efficacement. Dans un sens, elles ont été rédigées à partir de notre premier mandat sur la lutte contre le blanchiment d'argent, parce que nous recevions déjà des déclarations sur les opérations en espèces et les télévirements. Par conséquent, on a jugé qu'il valait mieux confier la recherche de renseignements sur le financement des activités terroristes à un organisme qui faisait déjà un travail semblable.

+-

    M. Tom Wappel: Je m'excuse de vous interrompre, mais j'ai seulement quatre minutes.

    Il n'y a donc aucune disposition de la loi que vous aimeriez que nous modifions?

+-

    M. Horst Intscher: Je ne pense pas.

+-

    M. Tom Wappel: Très bien. Et il n'y en a pas non plus que vous aimeriez faire abroger? Je parle plus précisément de la partie 4 de la loi.

+-

    M. Horst Intscher: C'est celle qui nous vise plus particulièrement? Non, monsieur.

+-

    M. Tom Wappel: Y a-t-il des dispositions que vous aimeriez faire ajouter à la partie 4 pour pouvoir améliorer votre travail?

+-

    M. Horst Intscher: Je ne vois pas pour l'instant, mais j'aimerais signaler que la loi habilitante va faire l'objet d'un examen parlementaire quinquennal plus tard cette année, et c'est dans le cadre de cet examen que nous viendrions proposer des modifications à une partie ou l'autre de la loi, et pas seulement aux dispositions qui traitent plus précisément du financement des activités terroristes.

+-

    M. Tom Wappel: D'accord. Merci.

    Le paragraphe 56(1) de la loi vous permet de divulguer des renseignements désignés à des organismes étrangers qui ont des attributions similaires aux vôtres. L'avez-vous déjà fait?

+-

    M. Horst Intscher: Oui.

+-

    M. Tom Wappel: Pouvez-vous nous en parler et nous dire, par exemple, à quel genre d'organisme étranger?

+-

    M. Horst Intscher: Ce serait à nos homologues étrangers. Toute unité du renseignement financier étrangère assujettie aux conditions que nous nous sommes imposées pour négocier des accords pourrait conclure un protocole d'entente avec nous. Nous en avons signé une vingtaine et nous échangeons des informations avec environ cinq ou six de ces organismes. Nous l'avons fait avec certains d'entre eux à de multiples occasions, mais pour tous les aspects de notre mandat, autant le blanchiment d'argent que le financement d'activités terroristes.

+-

    M. Tom Wappel: Merci.

    Que faites-vous d'endroits comme les maisons de vente aux enchères et les bijouteries, qui ne sont pas tenus de vous faire des déclarations, n'est-ce pas?

+-

    M. Horst Intscher: Votre question est très pertinente. Ils ne sont pas visés par la loi ou le règlement mais, en vue de l'examen quinquennal, nous nous demandons si d'autres genres d'entreprises qui vendent des biens de grande valeur ou par qui d'importantes sommes en espèces peuvent transiter devraient être visées par la loi.

+-

    M. Tom Wappel: Et qu'en pensez-vous?

+-

    M. Horst Intscher: Pour l'instant, je peux seulement vous donner mon avis personnel, parce que nous n'avons pas encore d'informations objectives sur la quantité d'argent en espèces qui circule dans ces entreprises, mais nous avons recueilli beaucoup de données empiriques sur l'argent liquide utilisé chez les vendeurs d'automobiles et les bijoutiers, par exemple.

»  +-(1705)  

+-

    M. Tom Wappel: Il me semble que ce sont d'excellents endroits pour échanger de l'argent liquide contre des produits de grande valeur.

    J'ai une idée qui me passe par la tête. Si vous alliez acheter comptant deux ou trois montres luxueuses dans une maison de vente aux enchères, j'imagine que l'établissement n'aurait pas à déclarer la vente, mais s'il va déposer l'argent à la banque, en présumant qu'il le fasse, la banque devrait alors vous déclarer l'opération et, si vous aviez des soupçons, vous pourriez faire enquête à ce sujet. Est-ce le cas? Est-ce ainsi que les choses fonctionnent?

+-

    M. Horst Intscher: Oui.

+-

    M. Tom Wappel: Est-ce qu'il me reste du temps?

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Vous avez dépassé le temps alloué d'une minute. Merci, monsieur Wappel. Merci de me rappeler à l'ordre.

    Nous allons revenir à M. MacKay.

+-

    M. Tom Wappel: J'aimerais intervenir au prochain tour, je vous prie.

+-

    M. Peter MacKay: J'aimerais poursuivre dans le même ordre d'idée. Je suis curieux. Nous savons que d'importantes sommes d'argent passent par les banques, d'autres gestionnaires de fonds, des comptables. Qu'en est-il des négociants de titres? Les déclarations sont-elles obligatoires dans leur cas? Pour ce qui est des banques, pouvez-vous nous dire ce à quoi elles sont obligées ou non de se conformer, et est-il possible d'obtenir un mandat en cas de non-conformité?

+-

    M. Horst Intscher: Pour répondre à votre première question, oui, les courtiers en valeurs mobilières doivent faire des déclarations.

    Pour ce qui est des banques, et de toute autre entité déclarante, la loi nous autorise à aller les visiter sans mandat pour faire un examen de conformité. Nous ne procédons pas souvent de cette façon. Nous communiquons avec les entités déclarantes mais, si nous avons des raisons de croire qu'il y a de sérieux problèmes de conformité, nous allons leur indiquer en bonne et due forme que nous allons leur rendre visite pour faire un examen et pour quelle raison.

    À la suite de cet examen, nous leur ferons part des anomalies décelées. Elles ont 30 jours, ou parfois 60, pour corriger la situation. Nous allons vérifier par la suite si c'est fait. Si nous repérons d'autres omissions ou infractions, nous pouvons demander qu'il y ait une enquête ou des poursuites criminelles en vertu des dispositions de la loi sur les sanctions pour non-conformité.

+-

    M. Peter MacKay: Merci.

    J'aimerais revenir à la question des avocats, parce que, si j'ai bien compris, les avocats étaient visés par la loi au départ avant d'en être exemptés à la suite d'une contestation judiciaire. La question a été de nouveau discutée récemment. En fait, je pense qu'un rapport de la GRC indique que les avocats, dans certains cas, sont maintenant les cibles d'activités mafieuses associées à la corruption et au blanchiment d'argent. Et si je ne me trompe pas, un avocat de Toronto a récemment été condamné à purger une peine de quatre ans dans un pénitencier fédéral.

    Je me demande si vous savez s'il y a des discussions ou des négociations en cours afin que les avocats soient visés par la loi. Je crois que c'est la question du secret professionnel qui a été invoquée.

    Pouvez-vous nous dire si on songe à ce que les avocats soient visés par la loi?

+-

    M. Horst Intscher: Oui. D'après ce que je crois comprendre, le ministère des Finances et les différents barreaux discutent activement des moyens d'assujettir les avocats à la loi tout en respectant le secret professionnel.

    Dans sa première version, la loi n'exigeait pas que les avocats déclarent des opérations visées par le secret professionnel. Mais les barreaux ont contesté le texte de la loi, estimant que la protection n'était pas suffisante et ils ont obtenu des injonctions et l'application de la loi a été suspendue. Mais on a l'intention de les assujettir à la loi.

    Quant aux faits rapportés sur les avocats associés au blanchiment d'argent ou faisant l'objet de pressions de la part d'éléments louches, c'est un problème qui n'a rien à voir avec la conformité aux exigences de déclaration. Il y a des gens qui sont mêlés à des activités criminelles dans toutes les professions, que ce soit des employés d'institutions financières ou des intermédiaires financiers, indépendamment du fait qu'il y ait des exigences de déclaration.

»  +-(1710)  

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Monsieur MacKay.

+-

    M. Peter MacKay: Pour revenir au rapport de la vérificatrice générale, elle indiquait que vos activités étaient paralysées par les lois sur la protection des renseignements personnels. Elle précise que vous êtes incapable de divulguer des informations qui donneraient accès au contexte de vos interventions aux enquêteurs de la GRC, par exemple. Je pense qu'il y a très peu d'informations que vous avez pu divulguer en vue de poursuites, et je vous demande si vous pensez qu'il pourrait y avoir plus de poursuites si vous pouviez exposer le contexte de vos preuves à la Couronne et aux enquêteurs.

+-

    M. Horst Intscher: Que ce soit pour les fins du renseignement ou des enquêtes, il vaut toujours mieux avoir plus d'informations. Plus vous en avez mieux c'est, que vous soyez dans le milieu du renseignement ou dans celui des enquêtes.

    L'observation faite par la vérificatrice générale décrivait, dans un sens, une situation précise à un moment précis. C'est ce qui se passait il y a environ un an alors que nous fonctionnions depuis à peu près un an et demi. Depuis, autant nous que les responsables de l'application de la loi connaissons beaucoup mieux notre produit et ce qu'il représente et ne représente pas.

    Même si nous ne pouvons pas tout dévoiler sur les opérations et qui les a faites, nous arrivons quand même à transmettre certaines informations. Si nous ne pourrions pas déclarer que M. Brown a fait un dépôt en espèces de 12 000 $ mardi dernier, nous pourrions dire que M. Brown, Mme Smith, M. White, et Mlle Pink ont fait les 263 transactions suivantes au cours des trois derniers mois dans les 12 institutions financières suivantes. Nous en indiquons beaucoup sur les personnes impliquées et la nature des activités. Ceux qui reçoivent ces informations en apprennent beaucoup sur ceux qui sont en cause et sur la nature des activités. Comme nous réussissons mieux à identifier de grands groupes et à fournir plus d'informations et comme les responsables de l'application de la loi savent mieux utiliser ce que nous leur fournissons...

+-

    M. Peter MacKay: Le CANAFE a-t-il réussi à mener à bien des poursuites?

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Monsieur MacKay, non, nous devons nous arrêter ici.

    Monsieur Macklin.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président, et merci aux témoins.

    Il y a tellement de choses qui nous viennent à l'esprit quand on se met à penser à la façon dont on agit et aux limites arbitraires que nous imposons à ces opérations. On peut se demander si le système bancaire en général a changé. Autrement dit, repérons-nous plus d'opérations de 9 000  $ maintenant et sommes-nous en mesure d'en tenir compte ou d'utiliser les informations de ce genre pour voir si le projet de loi est court-circuité d'une façon ou d'une autre?

»  +-(1715)  

+-

    M. Horst Intscher: Si je ne m'abuse, les institutions financières font un suivi des opérations sous ce seuil. Si un client vient à plusieurs reprises déposer des sommes de 9 900 $, 9 200 $, etc., il attirera l'attention de l'institution financière, ce qui pourrait donner lieu à la transmission d'une déclaration d'opérations douteuses. Je sais que des institutions financières procèdent actuellement à l'installation de certains logiciels qui leur permettront de balayer systématiquement toutes les opérations à la recherche d'opérations douteuses. Les déclarations des institutions financières seront ainsi encore plus efficaces qu'aujourd'hui.

    Cela dit, il faut de nombreuses transactions de 9 900 $ pour blanchir 10 millions de dollars. Quiconque veut blanchir de grosses sommes d'argent ne s'y prendra sûrement pas de cette façon et recherchera probablement d'autres mécanismes. Toutefois, les gens qui désirent blanchir 40 000 $, 60 000 $ ou 80 000 $ pourraient être tentés de le faire au moyen de plusieurs dépôts. Cependant, les institutions financières guettent ce genre de technique. Évidemment, nous leur avons remis des lignes directrices à ce sujet, mais elles connaissaient ces façons de faire bien avant notre arrivée. Donc, lorsqu'elles repèrent ce type de comportement chez certains clients, surtout ceux dont le type d'entreprise ou de profession n'est pas habituellement associé à de fortes sommes d'argent, elles font une déclaration d'opérations douteuses.

    C'est bien d'en être conscient, et je suis content que les institutions financières fassent un suivi des opérations sous ce seuil. Je ne vois toutefois pas ça comme un grand risque ou une brèche dans notre programme de lutte contre le blanchiment d'argent.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Si, d'après vous, c'était quelque chose qui devait être examiné de plus près, vous en feriez la recommandation lors de l'examen quinquennal, n'est-ce pas?

+-

    M. Horst Intscher: Absolument.

»  +-(1720)  

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Pouvez-vous nous donner un aperçu du type d'analyse que vous faites? Nous voyons qu'il y a des déclarations occasionnelles. L'analyse dont vous parlez sert-elle uniquement à examiner les transactions connexes? Est-ce ainsi que vous procédez? Pouvez-vous nous donner plus de détails? J'aimerais savoir ce qui vous incite à signaler les opérations douteuses au SCRS ou à la police.

+-

    M. Horst Intscher: Essentiellement, nous recherchons dans notre base de données des opérations ou des séries d'opérations qui se démarquent d'une façon particulière. Je ne peux pas toutefois vous révéler toutes les possibilités. Nous comparons aussi, par exemple, les virements télégraphiques déclarés avec les grandes opérations en espèces ou les opérations douteuses qui nous ont été signalées. Il se peut qu'un service de police nous informe volontairement que trois personnes font l'objet d'une enquête pour blanchiment d'argent. Ce genre d'information figure également dans notre base de données. Par conséquent, si on constate soudainement un grand nombre d'opérations en espèces ou de virements télégraphiques ayant un lien avec cette d'information, nous poussons d'avantage notre enquête.

    Parfois, nous repérons un compte ou un numéro de compte dans lequel on observe un nombre élevé d'opérations particulières; nous pouvons alors regarder ça de plus près pour voir qui sont les responsables et les bénéficiaires de ces transactions et déterminer s'il y a des liens avec d'autres séries d'opérations ailleurs. On peut examiner ce qui cloche dans tout ça. Parfois, il faut vraiment élargir le contexte. Par exemple, ce qui peut sembler tout à fait innocent dans un contexte donné peut devenir douteux dans un autre.

    Je vais vous donner un exemple hypothétique. Supposons que le propriétaire d'un restaurant-minute se pointe à la banque tous les trois jours pour y faire un dépôt de 15 000 $. Au pire, ça peut sembler un peu curieux mais pas douteux parce qu'on sait que ce type d'entreprise manipule beaucoup d'argent liquide. Toutefois, si ce même propriétaire devait commencer soudainement à transférer des fonds à Singapour ou à Dubai, ça retiendrait notre attention car c'est une opération qui n'est pas habituelle pour ce genre d'entreprise.

    Cela suffirait à justifier une déclaration. Évidemment, nous ferions d'autres recherches pour confirmer davantage nos doutes avant de divulguer cette information. C'est en somme le genre d'incompatibilité ou d'incohérence sur le plan des opérations que nous guettons. Parfois, nous répondons directement à une demande provenant d'une unité du renseignement financier d'un autre pays, ou il se peut que cette unité nous divulgue de l'information nous permettant soudainement de faire des liens qu'il nous était impossible de faire auparavant.

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Merci, monsieur Intscher.

    Monsieur Ménard.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: J'ai peut-être été induit en erreur par les notes que j'ai lues. À la base du système, les transactions légitimes des gens normaux comme vous et moi sont généralement faites par chèque ou par instrument monétaire.

    Ce n'est pas illégal d'acheter une automobile 15 000 $ au comptant. Pourtant, c'est ce que font les gens du crime organisé, parce qu'ils ont beaucoup d'argent liquide. Ils peuvent aussi acheter un système de cinéma maison à 60 000 $ et le payer au comptant. C'est le point de départ de votre travail. Il en est de même pour certains types de transactions que vous jugez suspicious ou douteuses.

    Nous sommes responsables des deniers publics. Vous avez un budget de 30 millions de dollars et 180 employés. Je ne comprenais pas, en lisant le document, quel était l'avantage d'avoir quelqu'un, quelque part, qui compile tous les achats de maisons et d'automobiles au Canada, ainsi que toutes les transactions commerciales excédant 10 000 $. Apparemment, ce n'est pas ce que vous faites.

    Il y a une chose qui m'intrigue. Comment allez-vous identifier les gens du crime organisé qui, justement, achètent au comptant des objets de valeur comme des installations de cinéma maison, des automobiles de luxe et ainsi de suite? Est-ce que le système à votre disposition va vous permettre de les retracer et de les signaler à la police?

[Traduction]

+-

    M. Horst Intscher: Vous avez soulevé des points intéressants. D'abord, comme je l'ai dit plus tôt, l'achat d'une maison, peu importe sa valeur, ne nous est pas habituellement signalé. Toutefois, si la maison a été payée en argent comptant et que l'agent immobilier, le notaire ou l'avocat participant à la transaction nous le signale, ça attire certainement notre attention. Toutefois, cela n'en fait pas automatiquement une opération douteuse. Il y a des gens qui gardent beaucoup d'argent comptant; donc, s'ils décident de dépenser 100 000 $ ou 200 000 $ pour l'achat d'une maison, c'est curieux, mais ce n'est pas encore douteux.

    Cependant, si cette même personne fait ça trois fois de suite en trois mois, ça va vraiment éveiller nos soupçons et nous inciter à découvrir qui est cette personne et si nous avons des renseignements la concernant. Nous utiliserions alors les renseignements fournis volontairement par les organismes d'application de la loi, les données des bases de données de ces organismes ainsi que les renseignements publics ou disponibles sur le marché pour déterminer s'il y a quelque chose de louche. Habituellement, quand il y a des transactions financières consécutives aussi considérables, on finit par découvrir quelque chose qui laisse entrevoir des activités criminelles.

»  +-(1725)  

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Monsieur Ménard, veuillez être très bref.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Communiquez-vous ces informations aux ministères du Revenu?

[Traduction]

+-

    M. Horst Intscher: Nous pouvons divulguer des renseignements au ministère du Revenu, mais seulement dans certaines circonstances. Si nous avons des motifs valables de soupçonner des activités de blanchiment d'argent ou de financement d'activités terroristes, nous devons divulguer cette information à la police ou au SCRS. Si nous soupçonnons aussi de la fraude fiscale, nous pouvons alors divulguer cette information au ministère du Revenu.

    Si nous soupçonnons, en examinant nos données sur les opérations, qu'une personne ou un groupe de personnes fraudent le fisc, nous ne pouvons divulguer cette information que si nous avons préalablement établi qu'il y avait aussi des motifs valables de soupçonner des activités de blanchiment d'argent ou de financement d'activités terroristes.

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Merci, monsieur Intscher.

    Monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin: Merci, monsieur le président.

    Monsieur Intscher, je dois avouer que l'image que vous donnez de votre organisation n'est pas celle qu'a dépeinte la vérificatrice générale. Celle-ci a été très critique. Elle a dit qu'il y avait un manque de communication de part et d'autre, c'est-à-dire tant du côté des institutions qui vous soumettent des déclarations que des organisations qui reçoivent vos rapports. Celles qui vous soumettent des déclarations ne reçoivent aucune rétroaction sur la valeur de leurs rapports, et le SCRS et la GRC ne vous disent pas si l'information que vous leur transmettez ou la forme que celle-ci prend leur est utile.

    Je comprends que ce rapport date d'environ un an, mais pouvez-vous nous dire précisément ce qu'a fait votre organisation pour régler ces problèmes?

+-

    M. Horst Intscher: Je commencerai par parler des entités déclarantes. Avant la publication du rapport, nous avions commencé à donner pas mal de rétroaction aux institutions financières au sujet de la nature et de la qualité de leurs déclarations et à les informer en général sur la façon dont nous utilisions leurs déclarations. Nous n'avons pas le droit de leur dire ce qu'il advient de leurs déclarations, mais nous pouvons néanmoins leur expliquer un peu comment leurs déclarations se comparent avec celles de l'industrie, à savoir si elles sont utiles et quels sont les renseignements pertinents et ceux qui le sont moins.

    D'ailleurs, nous avons tenu des séances de rétroaction plutôt exhaustives auprès de toutes les principales institutions financières, et cette démarche demeurera un volet de notre programme de rétroaction. Je dois admettre, toutefois, que nous n'avions fait de tels exposés qu'auprès de deux ou trois institutions au moment où la vérificatrice générale procédait à l'examen de notre organisation. Depuis, nous les avons toutes rencontrées, et ça continue. Aussi, nous tenons périodiquement des séances d'information et de rétroaction auprès d'autres entités déclarantes.

    En ce qui a trait à l'utilité du produit, du point de vue des organisations qui reçoivent les renseignements, la réponse de certains organismes d'application de la loi était plutôt positive comparativement à ce que disait le rapport de la vérificatrice générale. Nous n'en étions qu'à nos débuts. Depuis, nous avons élargi le type et le nombre de rapports qui leur sont transmis. Nous essayons de mettre en place des mécanismes de rétroaction systématique auprès du SCRS et de la police — pas seulement la GRC —, ainsi qu'un mécanisme de rétroaction de routine pour les forces policières, autres que la GRC, qui reçoivent nos rapports, qu'il s'agisse de la police provinciale ou municipale.

»  +-(1730)  

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): C'est la dernière question; je vous demanderais d'être très bref. Nous avons encore un autre intervenant.

+-

    M. Joe Comartin: Merci, monsieur le président.

    Allez-vous informer le Parlement ou la population des résultats obtenus par votre organisation et des améliorations apportées aux communications pour que nous sachions à quoi servent les 31 millions de dollars que nous vous allouons chaque année?

+-

    M. Horst Intscher: Oui, ça figurera dans notre rapport annuel.

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): M. Wappel posera la dernière question de la séance.

+-

    M. Tom Wappel: Monsieur le président, merci. Je ne sais pas si c'est ma seule question.

    Je vous renvoie à la cinquième diapositive de la version française de votre présentation. Vous mentionnez que 197 cas ont été communiqués, ce qui représente environ 9,5 millions de rapports, n'est-ce pas?

+-

    M. Horst Intscher: Oui.

+-

    M. Tom Wappel: D'après votre document, 48 des 197 cas communiqués portent sur des activités terroristes. Je suppose que vous voulez parler d'activités terroristes présumées, n'est-ce pas?

+-

    M. Horst Intscher: Oui.

+-

    M. Tom Wappel: De ces 48 cas de financement présumé d'activités terroristes, combien étaient fondés?

+-

    M. Horst Intscher: Laissez-moi revenir en arrière sur le nombre de cas et pour parler de votre observation concernant les neuf millions de rapports. Le nombre de cas n'est pas équivalent au nombre de déclarations. Un cas peut contenir six déclarations, souvent, des centaines, et parfois même des milliers. Il s'agit de cas et non d'opérations distinctes, alors que ce qu'on nous signale, ce sont des opérations distinctes.

    Pour ce qui est des 48 cas de financement présumé d'activités terroristes, nous les avons divulgués au SCRS et à la GRC car nous avions des motifs valables de soupçonner des activités illicites. Il revient donc aux organismes d'enquête, c'est-à-dire la GRC et le SCRS, de déterminer s'il s'agit véritablement de financement d'activités terroristes et, si c'est le cas, de cerner son importance, et de vérifier si ces activités illicites sont plus, ou moins, étendues que ce que nous leur avons dit.

+-

    M. Tom Wappel: D'accord, mais y a-t-il un suivi quelconque pour que vous sachiez si vos soupçons étaient fondés ou si votre analyse était bonne? Il vous faut quand même des indications pour être en mesure de déterminer si vos employés relèvent le bon type d'information ou non.

+-

    M. Horst Intscher: D'après le SCRS, nos rapports leur sont très utiles dans le cadre de leurs enquêtes. La GRC nous a dit sensiblement la même chose. Dans certains cas, nos rapports ont donné lieu à de nouvelles enquêtes sur des gens qui n'étaient pas sur leur radar.

+-

    M. Tom Wappel: Mais vous ne pouvez pas répondre à ma question, n'est-ce pas? Des 48 cas de financement présumé d'activités terroristes, certains étaient-ils véritablement fondés?

+-

    M. Horst Intscher: Nous ne pouvons pas répondre à ça.

+-

    M. Tom Wappel: Merci.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): Vous ne pouvez pas répondre parce que vous ne le savez pas ou parce que vous ne voulez pas divulguer de telles informations?

+-

    M. Horst Intscher: À l'heure actuelle, nous ne le savons pas. Même lorsque nous le saurons, je ne pourrai vous répondre qu'en vous donnant des chiffres globaux. Tout ce que nous savons pour l'instant, c'est que les renseignements que nous avons fournis ont été utiles dans le cadre des enquêtes.

    Certaines enquêtes sur le blanchiment d'argent et le financement d'activités terroristes sont très complexes et délicates et leur dénouement peut prendre beaucoup de temps. Ça ne m'étonne pas vraiment qu'il n'y ait pas encore eu beaucoup de poursuites découlant des renseignements que nous avons divulgués, mais il devrait y en avoir beaucoup d'ici un an ou deux. En raison de leur complexité et, souvent, de la portée internationale des activités illicites, beaucoup d'enquêtes peuvent durer des années.

»  -(1735)  

+-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): D'accord. J'aimerais d'abord remercier M. Intscher, Mme Desjardins et Mme Wing de leur présence. Je prie le Bureau du surintendant des institutions financières d'accepter une fois de plus toutes nos excuses.

    Un autre comité se tiendra ici à 17 h 30.

    Monsieur Comartin.

+-

    M. Joe Comartin: Je comprends. J'ai un dernier point à soulever, et j'aimerais le faire pendant que M. Intscher est encore ici. Monsieur le président, nous n'avons pas obtenu assez d'information. Je crois que nous devrons peut-être convoquer de nouveau ce témoin.

-

    Le vice-président (M. Kevin Sorenson): J'en ai pris bonne note, tout comme les greffiers.

    La séance est levée.