FAIT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE
COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 29 février 2000
Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.
Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui comme porte-parole de la Société canadienne de la Croix-Rouge, M. de Mestral, de l'université McGill, M. Duplessis et M. Wharram. Messieurs, je vous remercie beaucoup d'avoir accepté notre invitation d'être des nôtres.
J'ai cru comprendre que vous alliez nous décrire un peu les activités actuelles de la Croix-Rouge, puis peut-être ce que vous faites au Kosovo. Comme nos audiences portent justement sur le Kosovo, cela pourrait nous être utile.
[Français]
M. Armand de Mestral (président du conseil d'administration, Société canadienne de la Croix-Rouge): Je vous remercie, monsieur le président. Je m'appelle Armand de Mestral et je suis président bénévole du conseil d'administration de la Croix-Rouge. Je suis président d'un conseil formé également entièrement de bénévoles. Je suis accompagné, de ce côté en général de la Société canadienne de la Croix-Rouge, par le Dr Pierre Duplessis, qui est le responsable principal de nos activités au Canada, et du sous-secrétaire de la Société canadienne de la Croix-Rouge, M. Paul Wharram, qui est responsable des questions internationales et des questions de gouvernance.
Monsieur le président, je vous remercie très sincèrement du temps que vous nous accordez aujourd'hui pour discuter avec vous de certains points saillants de la 27e Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge, qui s'est tenue récemment. Nous souhaitons profiter de l'occasion pour explorer avec vous le lien unique qui existe entre le gouvernement du Canada et la Société canadienne de la Croix-Rouge et parler du potentiel d'un solide partenariat qui peut faire progresser les programmes du Canada dans les domaines de la politique étrangère et de la sécurité humaine.
• 1540
La 27e Conférence internationale du Mouvement de la Croix-Rouge
et du Croissant Rouge a eu lieu à Genève du 31 octobre au 6 novembre
1999. Cette conférence a réuni les représentants des trois
composantes du Mouvement international du Croissant Rouge et de la
Croix-Rouge: le Comité international de la Croix-Rouge, le CICR; la
Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du
Croissant Rouge, qui réunit les sociétés nationales; et les 175
sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge, comme la
Société canadienne.
La conférence a également réuni les représentants des gouvernements des pays signataires des Conventions de Genève. La Conférence internationale est donc une conférence unique, une tribune sans pareille sur la scène internationale, car les gouvernements participent sur un pied d'égalité avec les autres composantes de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge pour étudier et adopter des politiques portant sur l'action humanitaire et le droit international humanitaire. L'assemblée délibérante suprême du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge, la Conférence internationale, établit l'orientation et fixe les priorités et les normes de l'intervention humanitaire mondiale partagées entre la Croix-Rouge et les gouvernements.
Les délégations de la Société canadienne de la Croix-Rouge et du gouvernement du Canada ont siégé côte à côte à la conférence de 1999, tout comme l'ont fait 150 autres gouvernements et leur société nationale respective de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge. La conférence internationale, qui a réuni plus de 300 délégations et quelque 2 000 personnes au total, est une des tribunes humanitaires les plus importantes du monde en ce qu'elle unifie et lie l'éventail complet des intervenants humanitaires du monde entier, des stratèges gouvernementaux aux quelque 105 millions de bénévoles du Mouvement de la Croix-Rouge, qui fournissent des services humanitaires partout sur la planète.
Cette conférence visait notamment à discuter du droit international humanitaire et à trouver des moyens de le renforcer et de le faire respecter davantage pendant les conflits humanitaires. Le travail du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge ne s'arrête toutefois pas aux limites d'une zone de conflit. Comme vous le savez peut-être, nous assurons aussi des services aux sinistrés et des soins de santé dans les collectivités, «dans le monde entier et au coin de la rue», selon notre devise. Nous cherchons à aider les personnes les plus vulnérables de la population et à préserver leur dignité. Nos délibérations de novembre dernier à Genève ont porté sur les rôles qui nous sont confiés à la fois en période de guerre ou de conflit et en période de paix. Ces mandats constituent globalement notre engagement envers l'humanité.
La 27e Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge a donné les résultats suivants:
1. l'adoption d'une déclaration solennelle qui résume nos réflexions et nos intentions et qui sert dans les médias et dans les communications avec le public.
2. L'adoption d'un plan d'action pour les années 2000 à 2003, qui traduit les engagements conjoints des États et du mouvement. Le plan d'action résume les interventions spécifiques qui s'imposent si l'on veut améliorer la sécurité mondiale des êtres humains.
3. La déclaration individuelle d'engagement de tous les gouvernements et de toutes les sociétés nationales. Les engagements renforcent le plan d'action et clarifient le point de convergence de nos efforts. Ils nous obligeront à rendre des comptes à l'avenir.
Les trousses d'information qui vous ont été distribuées contiennent de l'information sur toutes ces questions. Cet après-midi, avec votre permission, je voudrais parler de ces deux derniers résultats de la conférence et formuler ensuite une recommandation précise qui, selon nous, aidera à renforcer la contribution humanitaire du Canada sur la scène internationale.
Nous devons conjuguer nos efforts pour mobiliser le pouvoir de l'humanité. La 27e Conférence internationale avait pour thème «Mobiliser le pouvoir de l'humanité». Ce thème fait maintenant partie du nouvel énoncé de mission de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge.
• 1545
Qu'entendons-nous par «le pouvoir de l'humanité»? Le Mouvement de la
Croix-Rouge est ouvert à quiconque y trouve une place où exercer sa
responsabilité d'aider des tiers et de trouver des solutions aux
problèmes communautaires. La mobilisation des bénéficiaires, des
bénévoles et des donateurs témoigne de cette responsabilité, qui
consiste à collaborer efficacement dans le contexte de programmes de
coopération, de partenariats de longue durée et d'activités de
défense.
Nous savons que la violence et la haine règnent dans le monde. Nous savons aussi qu'on y trouve de la compassion. En «mobilisant le pouvoir de l'humanité», nous cherchons à créer un point de convergence pour cette compassion, à encourager l'humanité à montrer ce qu'elle a de mieux à offrir.
Au Canada et dans le monde, nous collaborons en partenariat avec les paliers de gouvernement, qu'ils soient locaux, provinciaux ou nationaux, pour nous préparer aux catastrophes et y réagir. Nous conjuguons nos efforts dans le sillage des catastrophes dévastatrices comme les tempêtes de verglas qui ont sévi dans l'Est du Canada ou les inondations qui ont frappé le Manitoba et le Québec. Récemment, nous avons collaboré avec les ministères de l'Immigration et de la Défense nationale pour répondre aux besoins des réfugiés kosovars accueillis au Canada. La Croix-Rouge canadienne a pu mobiliser quelque 4 400 bénévoles qui ont fait don de plus de 180 000 heures de service au cours de l'opération Parasol l'été passé.
Sur la scène internationale, la Croix-Rouge gère ou réachemine en moyenne quelque 20 millions de dollars par année d'aide humanitaire de l'ACDI. Nous diffusons de l'information sur le droit humanitaire et nous donnons de la formation en Amérique centrale. Nous fournissons de l'aide au développement sous forme de soins de santé primaires et de programmes d'immunisation. Au Canada, nous éduquons et sensibilisons les jeunes aux besoins du monde en développement, le tout grâce à l'aide financière du gouvernement au pouvoir.
Nous sommes fiers de notre programme de personnel à l'étranger, aussi financé par l'ACDI et dans le cadre duquel quelque 80 à 100 Canadiens par année servent comme délégués de la Croix-Rouge et oeuvrent à divers titre dans le monde entier: infirmières et chirurgiens de guerre, logisticiens, administrateurs et travailleurs de secours. Nos délégués canadiens sont très appréciés partout dans le monde et très en demande au Comité international de la Croix-Rouge et à la Fédération internationale, non seulement parce qu'ils peuvent travailler en français et en anglais, ainsi que souvent en espagnol, mais aussi pour leur valeur humanitaire et leur engagement au service d'autrui, caractéristiques dont les Canadiens tirent grande fierté.
Ce sont là des exemples du pouvoir de l'humanité qu'il est possible de mobiliser lorsque la Croix-Rouge canadienne conjugue ses efforts à ceux du gouvernement du Canada.
Le plan d'action adopté par la 27e Conférence internationale reconnaît la grande importance de cette coopération entre les États et le mouvement.
Nous avons certes chacun nos mandats particuliers et nos sphères précises d'influence, et c'est pourquoi il est possible de faire tellement plus lorsque nous conjuguons nos efforts. À cette fin, et pour la première fois dans l'histoire de la Conférence internationale, on a demandé à la fois aux États et aux sociétés nationales de prendre des engagements spécifiques envers la conférence et de décrire en détail comment ils contribueront au plan d'action dans leur territoire. Vous trouverez dans vos trousses d'information les engagements du gouvernement du Canada et de la Croix-Rouge canadienne. Comme vous le verrez, plusieurs engagements ont été pris conjointement, ce qui souligne encore davantage la collaboration sur laquelle reposent nos efforts.
Les engagements sont un moyen concret d'agir de façon concertée. Nos engagements et les priorités mentionnées récemment dans le discours du Trône se complètent en fait: l'édification de communautés sécuritaires, la prévention de la violence, la mobilisation des énergies des bénévoles et l'évolution d'un programme de sécurité humaine.
Sur ce, je cède la parole à mon collègue Paul Wharram.
[Traduction]
M. Paul Wharram (secrétaire général adjoint, Gouvernance et Relations extérieures, Société canadienne de la Croix-Rouge): Après avoir pris des engagements au cours de la conférence internationale, la Société canadienne de la Croix-Rouge et le gouvernement du Canada doivent maintenant voir à leur mise en oeuvre, à leur suivi et à leur évaluation. C'est un minimum.
• 1550
Le Canada s'est engagé devant le monde entier à agir. Dans
deux ans, on nous demandera de rendre compte de nos progrès. La
Société canadienne de la Croix-Rouge et le gouvernement du Canada
ont pris les engagements conjoints que voici. Nous nous sommes
engagés à améliorer la capacité d'intervention d'urgence du Canada
en exploitant nos forces et nos compétences. Nous nous sommes
engagés à demeurer voués aux activités d'intervention contre les
mines qui regroupent à la fois le déminage et l'aide aux victimes
de mines antipersonnel. Enfin, de concert avec 25 autres sociétés
nationales et plus de 30 gouvernements, nous nous sommes engagés à
promouvoir les droits et le bien-être de tous les enfants touchés
par des conflits armés.
Le leadership du Canada relativement à cette dernière question a été très apprécié à la conférence internationale. De concert avec le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, la Société canadienne de la Croix-Rouge a organisé un atelier intitulé «Les enfants touchés par les conflits armés: de la bonne volonté à l'engagement». L'atelier a réuni des représentants de gouvernement et de sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge du monde entier. Les participants ont discuté de l'étendue du problème et des moyens que le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge pouvait prendre pour appuyer tous les aspects, de la démobilisation des enfants-soldats jusqu'à l'aide psychologique, en passant par l'aide communautaire plus générale.
Sur la scène nationale, la Société canadienne de la Croix-Rouge s'est engagée à renforcer son Programme de prévention des abus et à trouver de nouvelles façons de promouvoir nos principes humanitaires pour que nous puissions vivre ensemble sans violence.
Enfin, nous nous sommes engagés à consacrer des ressources supplémentaires au renforcement de nos programmes de perfection des ressources humaines et à mettre l'accent particulièrement sur les bénévoles. Ces engagements représentent un effort important de notre part en vue de mettre en oeuvre au Canada le Plan d'action issu de la conférence internationale.
Sommes-nous à la hauteur de la tâche? Nous en sommes convaincus. La Croix-Rouge canadienne a certes vécu une période difficile et remplie de défis au cours des dernières années. Notre capacité d'élaborer et de réaliser des programmes innovateurs n'a toutefois jamais été plus solide. Nos employés et nos bénévoles sont voués aux principes humanitaires qui sont le phare de notre organisme. Nous croyons aussi que notre capacité de création de programmes est telle que nous pouvons maintenir tous nos services traditionnels tout en ajoutant ceux qui ont fait l'objet des engagements que nous avons pris à la conférence internationale.
Les efforts qui visent à renforcer notre capacité d'intervention auprès des sinistrés sont particulièrement importants. Ce programme-vedette a démontré à maintes reprises qu'il peut fournir de l'aide vitale à toutes sortes de personnes, tant au Canada qu'à l'étranger. Nous cherchons maintenant des moyens d'améliorer les interventions du Canada, en collaboration avec l'Agence canadienne de développement international. C'est excitant et de bon augure pour notre sécurité et notre avenir collectifs.
Je cède maintenant la parole à M. Duplessis.
[Français]
Dr Pierre Duplessis (secrétaire général et chef de la direction, Société canadienne de la Croix-Rouge): Merci beaucoup, Paul.
Monsieur le président, en guise de conclusion, notre dernier point est une recommandation, mais aussi un plaidoyer. Nous croyons que le Canada peut renforcer son rôle de pays qui protège les personnes vulnérables et les aide en renforçant son partenariat avec la Société canadienne de la Croix-Rouge et en l'appuyant davantage.
Le Canada est un chef de file mondial voué à la protection et à l'aide humanitaire. Les exemples de ce leadership ne manquent pas. Je citerai l'aide internationale apportée par l'Agence canadienne de développement international, notre longue tradition de maintien de la paix, le leadership de la campagne internationale pour l'interdiction des mines antipersonnel et un leadership semblable dans le contexte des efforts qui visent à établir une cour criminelle internationale.
Je pense que, comme Canadiens et Canadiennes, nous pouvons être fiers devant un bilan dont à peine quelques exemples ont été mentionnés devant vous. Ce sont donc d'excellentes initiatives que nous applaudissons. De fait, il s'agit des principes fondamentaux de la politique étrangère du Canada, qui sont tout à fait parallèles aux priorités de la Croix-Rouge canadienne et de la Croix-Rouge internationale.
Il y a toutefois, monsieur le président, messieurs et mesdames les élus, la moitié de la planète dont les habitants sont encore aux prises avec des enjeux de survie—manger, boire et être capables de s'abriter le soir—, ce qui nous pousse, nous de la Croix-Rouge, à faire davantage ensemble, tous ensemble, vous et nous, de façon coordonnée et en partenariat.
Mais tout ceci s'inscrit aussi dans le contexte de la réalité quotidienne de la Croix-Rouge canadienne. Il y a maintenant plus de cinq ans que nous luttons pour notre propre survie. Nous avons subi tempêtes et marées: l'enquête Krever, le transfert de notre programme national du sang, le sort souvent ingrat issu de la couverture médiatique et maintenant, depuis juillet 1998, la protection des tribunaux contre la faillite. Nous sommes de plus en restructuration importante, nous avons mis fin à certaines activités et nous avons remercié plusieurs employés.
• 1555
Nous avons quand même renouvelé notre engagement envers l'humanité,
mais notre démarche, monsieur le président, est empreinte de
difficultés. Par exemple, pour la première fois dans notre histoire de
104 années, nous n'avons pas respecté nos contributions statutaires
envers la Fédération de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge. Nous
n'avons pas, monsieur le président, versé nos cotisations au Comité
international de la Croix-Rouge. Il est triste d'avouer que nous
sommes le seul pays donateur au monde à ne pouvoir respecter de tels
engagements. d'autant plus triste que nous savons que les plus démunis
de cette planète ne recevront pas les services que ces sommes d'argent
garantissaient.
Pourtant, la population canadienne a versé des dons importants pour appuyer les opérations de secours à la suite de l'ouragan Mitch, de la crise des Balkans et des tremblements de terre en Turquie, ce qui apparaît, vous en conviendrez, un peu ironique à première vue, puisque la Croix-Rouge lutte pour sa survie au Canada.
Je pense qu'il y a une explication: c'est que le grand public accorde toujours la plus haute estime à la Croix-Rouge canadienne. C'est en considérant le fait que vous représentez ce public, les personnes de partout au Canada, que nous nous adressons à vous aujourd'hui. Quelles que soient les difficultés que nous avons connues, j'aimerais souligner que plus de 80 000 bénévoles continuent de travailler avec nous d'un bout à l'autre du pays. Ils livrent des repas, visitent des personnes confinées chez elles, conduisent des personnes âgées à des cliniques, donnent des cours de secourisme et de sécurité aquatique, sans oublier la formation en prévention des abus dispensée à plus de 70 000 jeunes par année. Ce sont nos bénévoles, vos électeurs, dont certains n'avaient jamais fait de bénévolat avant de se porter volontaires pour aider, par exemple, les réfugiés Kosovars l'été dernier. Nos bénévoles, nos donateurs, nos employés et le public demeurent fidèles à la Croix-Rouge canadienne et à nos services humanitaires.
Notre longue relation, notre rôle d'auxiliaire des services médicaux des forces armées du Canada et notre partenariat dans les interventions de secours aux sinistrés et d'aide humanitaire nous amènent à dire que nous regardons tous, vous et nous, dans la même direction.
Ce que nous vous demandons aujourd'hui d'une façon très concrète, c'est votre appui, que ce soit pour offrir des programmes qui visent à aider à réintégrer les enfants-soldats dans la société civile au Sierra Leone, pour nous aider à respecter nos obligations internationales comme le font certains autres gouvernements, même si c'est temporairement, ou pour intervenir afin de promouvoir l'importance du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge.
Nous somme prêts à répondre aux besoins humanitaires au Canada et à l'étranger. C'est avec beaucoup de fierté que nous avons participé très activement à cette 27e Conférence internationale. C'est avec beaucoup de fierté aussi que nous avons pris des engagements, et c'est avec tout autant de fierté que nous déposerons un bilan fort positif en l'année 2002.
Nos bénévoles, nos employés et les centaines de milliers de bénéficiaires de nos services humanitaires comptent sur vous pour aider la Croix-Rouge canadienne. Ne sommes-nous pas prêts à bien des égards à être un lien entre les collectivités et leur gouvernement? Lorsque nous mobilisons les intentions et la bonne volonté de l'humanité, comme le disait notre président, nous en découvrons le vrai pouvoir et—je paraphrase ici le slogan de la 27e Conférence—ce pouvoir de l'humanité est un des traits marquants de la trempe sociale au Canada.
En résumé, monsieur le président, messieurs et mesdames les élus, nous avons essayé de vous présenter cet après-midi un aperçu de la 27e Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge, ainsi que de l'engagement de la Société canadienne de la Croix-Rouge que nous avons pris devant cette tribune mondiale.
• 1600
Nous espérons pouvoir compter sur le gouvernement du Canada et sur
chacun d'entre vous pour mobiliser le pouvoir de l'humanité, respecter
les engagements que nous avons pris, dont certains sont conjoints, et
enfin nous aider à renforcer cette image et cette présence du Canada
comme pays protecteur et qui aide également.
Monsieur le président, je vous remercie de l'intérêt que vous portez à notre travail. Nous serons heureux de répondre à toutes vos questions cet après-midi.
Le président: Merci.
Madame Picard.
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Je vous remercie.
[Note de la rédaction: Difficultés techniques] ...voir ce qui s'accomplit. Même si on le sait, il est bon de se le faire dire encore.
Les conditions dans lesquelles vous vous trouvez sont aussi inquiétantes. Je trouve cela injuste et inqualifiable.
Je n'ai pas vraiment de questions car je pense que les interrogations que j'ai trouveront leur réponse dans la trousse. Je veux simplement vous dire que vous avez tout mon appui.
Je pense que je vais renvoyer la balle dans le camp du parti au pouvoir parce que ses représentants sont beaucoup plus près que moi du ministre. Cependant, vous avez tout mon appui et, en tant que députée de l'opposition, je ferai tout en mon pouvoir pour qu'on donne suite aux recommandations que vous nous avez faites cet après-midi.
Le président: Madame Marleau.
Mme Diane Marleau (Sudbury, Lib.): Je ne peux m'empêcher de prendre la parole, premièrement pour vous remercier, parce que j'ai eu la chance de travailler avec votre groupe lorsque j'étais ministre de la Coopération internationale. J'apprécie beaucoup votre collaboration et la façon dont vous répondez lorsqu'il y a des crises dans le domaine humanitaire. Je crois que si tous les Canadiens et Canadiennes avaient la chance de voir ce que j'ai vu, ils seraient très fiers de vous accorder leur soutien. Ils le sont d'ailleurs, mais ils le seraient encore davantage.
Vous nous dites que vous n'avez pas pu faire vos contributions pour la première fois depuis 104 ans. Qu'est-ce qu'il faudrait pour que la Croix-Rouge soit capable de faire ses contributions?
Dr Pierre Duplessis: Madame Marleau, vous voulez dire...
Mme Diane Marleau: Au niveau international.
Dr Pierre Duplessis: En termes de dollars, voici ce que cela signifie. Cela signifie un million de dollars par année. On appelle «franchise» la contribution qu'on paie à Genève pour que Genève, en retour, puisse déployer des secours dans le monde en cas de désastre. C'est notre contribution à la fédération, au secteur qui s'occupe surtout des désastres, et au CICR, le Comité international de la Croix-Rouge, qui s'occupe des pays en guerre, auquel nous versons, bon an mal an, 350 000 $. La contribution de la Croix-Rouge canadienne est donc de 1,3 million de dollars, ce que nous avons toujours donné.
Cette année, nous opérons un redressement. Nous avons versé un premier montant de 6 millions de dollars. Je suis à en compléter un deuxième de 9 millions de dollars, et nous avons laissé savoir à Genève que nous ne pouvions pas verser le paiement de nos achats. C'est ainsi.
Mme Diane Marleau: Pensez-vous que, dans les années à venir, vous en serez capables? Vous nous avez demandé si le gouvernement du Canada pouvait vous aider. De quelle façon pourrait-on vous aider?
Dr Pierre Duplessis: Je prévois que la situation sera rétablie dans quelques années. Nous aurons certainement deux ou trois années très difficiles. Si vous me demandez ce que je souhaiterais concrètement pour pouvoir à nouveau faire face à ces chiffres-là, je répondrai que je souhaiterais que durant les cinq ou six prochaines années, le gouvernement canadien nous donne son appui et paie les cotisations à Genève.
Je dois vous dire que ce n'est pas inhabituel. Par exemple, la Croix-Rouge allemande, qui s'occupe toujours de la collecte du sang, bien qu'elle ait connu des problèmes comme ceux que nous avons eus, a un budget d'opération annuel qui dépasse les quatre milliards de dollars canadiens. Pourtant, c'est le gouvernement allemand qui paie la cotisation de la Croix-Rouge allemande.
Dans plusieurs autres pays, dont je pourrais vous fournir la liste, c'est le gouvernement qui paie les cotisations. Comme vous le savez, nous sommes auxiliaires au service humanitaire du gouvernement. Nous travaillons en partenariat. Nous appliquons les Conventions de Genève, où nous sommes nommément identifiés. Donc, nous travaillons avec vous en tant que partenaire privilégié.
• 1605
Une façon pour les gouvernements de reconnaître ce rôle particulier
de la Croix-Rouge est souvent de payer leur «franchise». Ce n'est pas
le cas au Canada, et je dois vous dire que, dans la période difficile
que nous traversons, cela nous permettrait de souffler. Vous vous
imaginez un peu qu'avec les redressements budgétaires qu'on fait, ce
n'est pas facile.
Mme Diane Marleau: Est-ce que vous avez abordé les autorités pour leur demander de vous faciliter ces paiements?
Dr Pierre Duplessis: Je crois que les autorités sont sensibilisées à cet état de fait, mais disons qu'une démarche officielle... On est sorti de cette restructuration il y a à peine 15 jours. Vous êtes la première tribune à en être informée. La situation n'est pas facile. Je vous le dis, elle n'est pas facile.
Mme Diane Marleau: Je comprends très bien. Peut-être le comité pourrait-il faire des recommandations.
Le président: Quel est le montant de votre cotisation?
Dr Pierre Duplessis: Un million de dollars à la fédération et 350 000 $ au CICR. Pour simplifier, le Mouvement international de la Croix-Rouge est en quelque sorte divisé en deux branches. L'une agit en temps de paix, donc s'occupe souvent des désastres et des séismes; c'est la fédération et les sociétés nationales. L'autre branche, qui s'appelle le Comité international, agit en temps de guerre.
Généralement, on donne à la fédération un million de dollars et au CICR, 350 000 $.
Le président: Merci.
Monsieur Paradis.
M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Vous avez fait allusion à quelques reprises, dans votre présentation, à ce partenariat avec le gouvernement canadien. Par exemple, à la page 5, vous dites:
-
Sur la scène internationale, la Croix-Rouge canadienne gère ou
réachemine en moyenne pour 20 millions de dollars par année d'aide
humanitaire de l'ACDI.
À page 6, vous dites:
-
...la Croix-Rouge canadienne conjugue ses efforts à ceux
du gouvernement du Canada.
Et à la page 8, vous parlez d'engagements:
-
Nous nous sommes engagés à améliorer la capacité d'intervention
d'urgence du Canada en exploitant nos forces et nos compétences.
Avez-vous des exemples concrets de ce qui pourrait être fait pour améliorer cette capacité d'intervention d'urgence? Avez-vous des exemples concrets à nous proposer?
Dr Pierre Duplessis: Oui, et je demanderai à mon collègue Paul Wharram de compléter mes propos.
Par exemple, j'aimerais que le Canada soit un pays doté d'une équipe d'urgence très proactive où, par exemple, la Défense nationale nous permettrait de voler, où l'ACDI aurait une équipe d'évaluation qui volerait dans des avions de la Défense nationale, comme cela existe en Allemagne ou en Australie. La Croix-Rouge canadienne irait tout de suite sur les lieux prendre en charge une opération, lors d'un désastre, après une évaluation faite, disons, par l'ACDI.
Ou encore, pour des opérations d'une autre nature et auxquelles les Affaires étrangères, par exemple, pourraient être mêlées, je souhaiterais qu'il y ait une espèce d'équipe d'urgence qui puisse se mobiliser rapidement; qu'on ait des vivres ou, sur une base militaire, la possibilité d'expédier certains biens d'urgence, comme des lits ou l'équipement nécessaire pour purifier l'eau. J'aimerais que, de notre côté, nous puissions mettre à la disposition de ces pays, en partenariat avec l'ACDI et la Défense nationale, l'expertise de délégués bien formés et prêts à s'envoler tout de suite.
Par exemple, s'il arrivait quelque chose au Mozambique, dans ce coin de l'Afrique de l'Est, on partirait en avion, comme le font les Américains. On serait capables d'évaluer la situation, de déployer immédiatement des délégués qui ont de l'expérience et, quelques jours plus tard, d'acheminer des biens par hélicoptères dans ce pays. Ce serait formidable.
M. Denis Paradis: Cela ne se fait pas dans le moment, si je comprends bien. Ce que vous visez, c'est un genre de SWAT team en aide humanitaire.
Dr Pierre Duplessis: C'est exactement cela.
M. Denis Paradis: Pouvez-vous me dire comment cela fonctionne actuellement, afin que je comprenne bien ce que vous voulez? À l'heure actuelle, quand vous êtes appelés à intervenir lors d'un désastre quelconque à l'autre bout du monde, comment faites-vous?
Dr Pierre Duplessis: Je peux vous donner un schéma du fonctionnement.
Le Canada n'a pas encore développé cette capacité, non plus que la Croix-Rouge. Vous comprenez que nous sommes aux prises avec des circonstances qui nous empêchent de faire cela.
• 1610
Il arrive souvent ce qui s'est produit hier. Je reçois un coup de
téléphone et je vois qu'au Mozambique, la situation est hors de
contrôle. On ne sait pas trop comment intervenir. Alors, on fait
appel à la générosité du public, on prend l'argent et on l'envoie à
Genève. Genève, en retour, appelle d'autres sociétés nationales qui
ont ces possibilités. Avec cet argent, on envoie sur place tantôt la
Finlande, tantôt la Suède, tantôt l'Allemagne.
Je préférerais que l'argent du Canada serve à déployer des troupes, des gens, des délégués, des équipes d'évaluation de l'ACDI, des Canadiens qui sont capables de rendre ce service-là.
Actuellement, ce ne peut être qu'un simple transfert d'argent à la fédération, comme on l'a fait hier pour le Mozambique. Ou encore, quand on a un peu plus de temps, comme dans le cas de l'ouragan Mitch, on est capables, après quelques semaines, de demander à un délégué qui se trouve souvent déjà dans les environs de se rendre en avion vers la région ou la ville frappée et de nous fournir une évaluation de la situation, après quoi on envoie soit des délégués, soit une équipe d'évaluation sur place, souvent en collaboration avec l'ACDI.
Mme Marleau se rappellera toute cette très belle opération déployée dans le cas de Mitch. On a réussi à envoyer tantôt des vivres, tantôt des biens humanitaires. Mais en général, la réponse la plus rapide que nous puissions offrir, c'est environ après une quinzaine de jours. Et je dois vous dire que les journées les plus horribles pour ces gens-là sont souvent les 15 premières journées.
Je crois que nous sommes capables d'enclencher une bien meilleure réponse. Souvent, nous envoyons de l'argent le plus rapidement possible et disons aux gens qui sont en mesure de fournir le service d'agir. Pourquoi ne le ferions-nous pas nous-mêmes?
Paul, veux-tu ajouter quelque chose?
[Traduction]
M. Paul Wharram: J'ajouterais seulement que nous avons aussi un rôle à jouer dans les phases de réadaptation et de reconstruction, chose que l'on oublie souvent.
Les premières étapes d'intervention après une catastrophe attirent beaucoup l'attention. Les médias les couvrent très bien, et le public répond très généreusement aux premiers appels à l'aide d'urgence. Toutefois, aux étapes de reconstruction et de réadaptation et durant la phase de développement qui suit, étapes beaucoup plus longues que la phase d'intervention d'urgence, il nous faut tous lutter et avoir des trésors d'imagination pour contribuer à la reconstruction des collectivités détruites, pour réduire les vulnérabilités et accroître les capacités. C'est un autre domaine de compétence que maîtrise bien le Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, dans lequel il a beaucoup d'expérience et qu'il tient également pour une priorité. Nous ne laissons pas les sinistrés en détresse après qu'a frappé la catastrophe.
[Français]
M. Denis Paradis: En terminant, j'aimerais vous féliciter pour l'excellent travail que vous faites.
Dr Pierre Duplessis: Merci beaucoup, monsieur Paradis. On l'apprécie.
Le président: Merci.
Docteur Patry.
M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Merci à nos invités.
J'ai trois petites questions. Monsieur Duplessis, au tout début de votre texte, vous dites que vous avez adopté, à la 27e Conférence internationale, une déclaration solennelle, que j'ai lue et qui est très bien. Est-ce qu'il y a des modifications par rapport à ce qui existait au préalable? C'est peut-être la première fois que je vois une déclaration solennelle de la part d'un organisme comme le vôtre. Est-ce qu'il y a eu des modifications simplement pour continuer dans la même voie?
Voici ma deuxième question. Vous dites que vous diffusez sur la scène internationale de l'information sur le droit humanitaire et donnez de la formation en Amérique centrale. À qui s'adresse cette formation et de quelle façon fonctionne-t-elle?
Troisièmement, vous avez tenu récemment, en collaboration avec le ministère des Affaires étrangères, un atelier intitulé «Les enfants touchés par les conflits armés: de la bonne volonté à l'engagement». Tout cela m'intéresse énormément pour deux raisons.
Premièrement, je suis président de la section canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, et c'est un sujet dont on discutera l'été prochain au Cameroun. J'aimerais donc que vous me fassiez part des conclusions de cet atelier.
Deuxièmement, je pense que le secrétaire parlementaire du ministère des Affaires étrangères, M. Paradis, pourra vous dire qu'il y aura quelque chose à l'automne sur le problème des enfants armés. Je pense que le Canada veut assumer un leadership assez important, sinon aussi important ou plus important que celui qu'il a assumé dans le cas des mines antipersonnel. Merci.
Dr Pierre Duplessis: Donnez-moi cinq secondes.
M. Bernard Patry: Oui.
Dr Pierre Duplessis: Au sujet de la déclaration, je demanderai peut-être au président de compléter, mais je peux dire que ce n'est pas inhabituel. C'est une façon de procéder. Ce qu'il y a d'assez exceptionnel, c'est qu'il y a environ 150 Croix-Rouges, ainsi que des mouvements qui ne portent pas l'étiquette Croix-Rouge, qui participent tous les quatre ans, côte à côte avec leurs gouvernements, à l'établissement de l'agenda humanitaire du plus gros mouvement humanitaire au monde. Tous ces gens, qui viennent de pays qui vivent des contradictions parfois énormes, de pays qui sont dans l'extrême pauvreté mais qui ont une petite Croix-Rouge qui fonctionne parfois à bout de bras, tous ces gens se sont entendus pour déclarer au monde: «Voici ce qu'on veut faire». Il y a unanimité et consensus autour de cela. Cela semble tout petit, mais je vous dis que c'est exceptionnel. Pour moi, ce sont des moments uniques qu'on ne vit pas très souvent dans une vie. C'est inspirant. Donc, ce n'est pas inhabituel. C'est la façon de procéder. On a réussi à faire un consensus autour de cela. Il s'agit de l'agenda humanitaire pour les quatre prochaines années.
Armand, veux-tu ajouter quelque chose à ce sujet?
M. Armand de Mestral: Monsieur le président, si vous me le permettez, pour ajouter à ce que disait Pierre, je dirai qu'on parle beaucoup à notre époque du rôle des ONG dans la formation du droit international qui, jusqu'à récemment, était fait exclusivement par les États, pour les États, aux fins des États. Mais voilà qu'à Rome, à Osaka et ailleurs, dans les dernières années, des centaines d'ONG descendent sur les grandes réunions, parfois à la surprise des gouvernements, comme à Seattle, et jouent souvent un rôle extrêmement positif. Je pense qu'il est intéressant de noter que la Croix-Rouge joue ce rôle depuis des décennies. Nous sommes formellement mentionnés dans les conventions et les protocoles de Genève. La Croix-Rouge, depuis 100 ans, est le moteur d'accords internationaux et est en quelque sorte la conscience du droit humanitaire. Elle aide à formuler et à développer des conventions internationales de droit humanitaire. C'est donc un organisme qui joue un rôle très particulier et qui, à bien des égards, est à l'avant-garde.
Aujourd'hui, évidemment, il y a de nombreuses autres organisations humanitaires remarquables qui nous suivent et qui jouent des rôles complémentaires, mais sur ce plan, l'action conjointe des sociétés nationales et des gouvernements sur la scène internationale est une action remarquable et unique.
Dr Pierre Duplessis: Pour ce qui est de votre deuxième question, essentiellement, nous agissons dans une quinzaine de pays d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud. Notre rôle est d'enseigner aux corps policiers et aux armées le droit humanitaire international, c'est-à-dire le respect des personnes blessées au combat, le respect des conventions sur les biens du patrimoine, etc. Toutes ces choses sont en quelque sorte à la base des valeurs fondamentales de la démocratie et d'une société civile qui fonctionne. On part des principes fondamentaux: pas de torture et des choses comme celle-là. Telle est l'activité que nous avons dans une quinzaine de pays en Amérique centrale.
Il y a beaucoup d'autres programmes d'éducation, mais qui n'ont pas l'ampleur de ce programme d'enseignement du droit humanitaire international. Encore une fois, je vous rappellerai que la Croix-Rouge est l'organisme tributaire par excellence de l'application des Conventions de Genève et du droit humanitaire international, ce qui nous donne un rôle unique. Le Canada est apprécié dans ces pays à cause de son passé. Ce n'est pas un pays colonisateur, mais plutôt un pays colonisé. C'est un pays neutre...
Le président: [Note de la rédaction: Inaudible].
Dr Pierre Duplessis: Eh bien, nous vivons avec notre tradition. Le Canada n'est pas un pays belliqueux et il est d'autant plus apprécié. Et, comme le disait si bien mon collègue Armand de Mestral au début de sa présentation, non seulement parlons-nous le français et l'anglais, mais souvent aussi l'espagnol, ce qui est très apprécié.
Pour l'atelier sur les enfants-soldats, j'aimerais que Paul Wharram vous en parle. C'est quelque chose d'important, où le Canada peut encore marquer des points. On aurait à vous offrir quelque chose du même style que dans le cas des mines antipersonnel. La campagne contre les mines antipersonnel, c'est le CICR, c'est la Croix-Rouge et cela a mené au prix Nobel. Les premiers qui se sont impliqués, ce sont les médecins de la Croix-Rouge. Ils se sont dit que ce qui se passait n'avait pas de sens, qu'il fallait s'en occuper. Il a fallu une dizaine d'années avant d'en arriver à sensibiliser le monde.
Pour les enfants-soldats, nous sommes prêts à vous donner un coup de main et à faire du Canada le chef de file. J'aimerais que Paul vous en parle davantage.
[Traduction]
M. Paul Wharram: Je vais aborder la question sous trois angles différents.
Tout d'abord, notre stratégie inclut d'accroître la sensibilisation de la communauté internationale. Notre objectif, comme cela s'est fait avec tant d'efficacité quand le Canada a assumé le leadership de la campagne contre les mines terrestres, est de rendre inacceptable le recrutement d'enfants de moins de 18 ans comme soldats. C'est l'objectif—de rendre ce recrutement si intolérable au sein de la communauté internationale, comme nous l'avons fait pour les mines terrestres, que tous les pays du monde hésiteront à le faire. Donc, notre premier objectif est de mieux sensibiliser la communauté internationale au phénomène.
Le deuxième consiste à s'attaquer aux causes profondes du phénomène, à la raison pour laquelle les enfants deviennent des soldats au départ, que ce soit la pauvreté, le manque de possibilités d'éducation ou les valeurs. Nous nous attaquons à ces trois causes dans le cadre de nos programmes de développement, d'éducation et de diffusion de valeurs humanitaires afin de montrer aux jeunes qu'il existe d'autres moyens que la violence.
La troisième approche ou stratégie consiste à démobiliser et à réintégrer les enfants-soldats une fois qu'ils ont quitté les troupes. C'est un défi difficile à relever, parce que souvent ils ont été isolés par leurs familles, complètement isolés par leurs collectivités. Il faut trouver un moyen de les soutenir et de les réintégrer à la société civile. La solution est de mettre sur pied les programmes qui conviennent et de leur fournir les outils et l'aide dont ils ont besoin pour réintégrer la société civile.
Dans les trois domaines, nous comptons sur nos partenaires pour nous aider.
[Français]
M. Bernard Patry: J'ai juste un commentaire à faire. Je veux remercier M. Duplessis parce que la question de la formation est quand même très intéressante. Ce n'est peut-être pas une première, mais c'est excellent pour moi de savoir à qui vous donnez la formation. Si vous avez les conclusions de l'atelier que vous avez tenu avec le ministère des Affaires étrangères, j'aimerais, si c'était possible, que vous en fassiez bénéficier tout le comité en les faisant parvenir à la greffière, s'il vous plaît. C'est un sujet dont je veux vraiment m'occuper, et mon collègue aussi. C'est un domaine où on peut faire énormément de bien pour la société. Encore une fois merci.
M. Armand de Mestral: Je veux ajouter que nous avons fait cet atelier conjointement avec la société de la Colombie et celle de Sierra Leone, ce qui, évidemment, a rendu les témoignages encore plus véridiques et parfois plus poignants. Le président de Sierra Leone avait littéralement la main à moitié enlevée. Heureusement, il est en voie de guérison, mais il a vécu cela lui-même et ses enfants ont été pris dans ce terrible conflit. Il a pu témoigner, devant tous ceux qui participaient à l'atelier, des conditions sociales et humaines qui font que les jeunes sont les cibles et les victimes faciles. Et c'est la même chose pour la Colombie. Les situations y sont différentes, mais quand même, là aussi, les enfants sont presque toujours les plus vulnérables et ils sont les premiers à souffrir des conflits.
M. Irwin Cotler (Mont-Royal, Lib.): Je voudrais aussi vous féliciter pour votre engagement humanitaire.
Comme l'a dit mon collègue, M. de Mestral, cet engagement n'a rien de nouveau. La Croix-Rouge internationale est en réalité à l'avant-garde et a joué le rôle de pionnier dans le développement du droit humanitaire international.
J'ai deux questions que j'aimerais poser à M. de Mestral, si vous me le permettez. La première concerne la participation de la Croix-Rouge canadienne à l'enseignement du droit humanitaire international aux membres de nos forces armées, plus particulièrement à ceux qui font du maintien de la paix.
Ensuite, lors de la récente Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, je crois savoir qu'il a été question de la possibilité d'inclure Magen David Adom dans le mouvement. Je me demande si vous pouvez nous en dire davantage à ce sujet.
M. Armand de Mestral: Je vous remercie, monsieur. Je demanderai peut-être à Paul Wharram de prendre également la parole au sujet de ces deux questions. Elles sont à la fois intéressantes et importantes.
Nous avons certes un engagement de longue date à l'égard du ministère de la Défense nationale en vue d'aider à former les soldats, surtout ceux qui sont envoyés dans des missions de maintien de la paix, mais également, bien sûr, à d'autres. Toutefois, étant donné la participation intensive des militaires canadiens aux opérations de maintien de la paix, cette formation est particulièrement pertinente.
Il est juste de dire selon moi—et je laisserai Paul Wharram vous en dire davantage à ce sujet—que nous sommes fiers de ce que nous faisons dans ce domaine, mais que nous pourrions aussi faire beaucoup plus.
Comme professeur de droit international, j'ai été particulièrement frappé, à la conférence internationale, par le fait que les Australiens sont venus à cette conférence accompagnés non seulement d'une coordinatrice du droit humanitaire international, une brillante jeune femme qui a son doctorat en droit international, mais également par le professeur de droit humanitaire de la Croix-Rouge qui enseigne à l'Université de Melbourne.
En tant que personne responsable de la Croix-Rouge, mais aussi en tant que professeur de droit, rien ne me plairait autant que de voir, quelque part au Canada, un professeur titulaire de droit humanitaire international, une chaire de droit humanitaire international. Ce serait peut-être quelque chose que pourrait accomplir à long terme la Croix-Rouge, avec l'aide des instances publiques, qu'elles soient fédérales ou provinciales.
M. Irwin Cutler: J'aimerais ajouter que j'avais l'expérience australienne à l'esprit, puisque j'ai visité l'Australie et que j'ai été reçu par le professeur.
M. Armand de Mestral: Ce qu'ils ont fait est tout à fait remarquable. En réalité, nous pouvons apprendre de leur exemple.
Je demanderais à Paul Wharram de vous en dire un peu plus au sujet des programmes particuliers, parce qu'ils sont importants.
Quant au deuxième point, la question très épineuse et de longue date de savoir quelle place accorder à ce que l'on pourrait appeler la Croix-Rouge israélienne, c'est-à-dire le Magen David Adom qui joue ce rôle en Israël et qui répond à toutes les exigences du mouvement international, le problème à résoudre gravite autour du symbole. Comme vous le savez bien, les symboles sont extrêmement importants, plus particulièrement peut-être dans le cas du Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, parce que notre symbole est un gage de protection. La raison d'être même du symbole dès le début a été de rappeler que ceux qui ont le privilège de le porter ont droit à la protection et au respect, c'est-à-dire tous ceux qui visitent les prisons, qui se rendent dans les camps de prisonniers de guerre et je ne sais quoi encore, au nom de la Croix-Rouge.
Les délégués de la Croix-Rouge portent l'insigne qui leur assure habituellement, bien que pas toujours malheureusement, une certaine protection. On tient donc beaucoup, au sein du mouvement, à ce que toute solution permettant l'admission du Magen David Adom n'enlève pas de sa valeur au symbole tel qu'il est actuellement utilisé. Nous aurions tous pu indubitablement faire plus et faire mieux en vue de régler le problème, mais malheureusement le problème très épineux à résoudre tient en partie au désir manifesté jusqu'à maintenant par Magen David Adom de conserver son insigne et de lui voir accorder autant d'importance qu'à celui de la Croix-Rouge.
• 1630
Nous croyons savoir qu'on s'est rapproché d'un compromis au sein du
Magen David Adom. De plus, il faudrait que je précise, à ce stade-ci,
qu'un nouveau comité a été formé par le Comité permanent du mouvement
en vue de trouver une solution globale. Il envisage toutes les
possibilités, y compris un symbole entièrement nouveau, ce qui serait
extraordinairement difficile à réaliser étant donné qu'il faudrait le
faire approuver par chaque gouvernement signataire des Conventions de
Genève ainsi que par les sociétés nationales. Cela signifierait
également qu'il faudrait renoncer au symbole probablement le plus
connu au monde, encore plus que Coca-Cola. On ne renonce pas à pareil
symbole à la légère.
Cela étant dit, je crois que nous avons tous besoin de travailler encore plus fort à résoudre ce problème.
Je demanderais à Paul Wharram de vous en dire davantage.
M. Paul Wharram: Je vous remercie.
Pour renchérir, je dis souvent que la croix rouge et le croissant rouge n'appartiennent pas à la Croix-Rouge et au Croissant-Rouge. Les symboles de ces deux organismes appartiennent aux États qui sont partie aux Conventions de Genève. Donc, pour introduire un nouvel insigne, comme l'Étoile de David rouge, et pour la faire inclure dans les Conventions de Genève, il faudrait, tout d'abord, obtenir une décision en ce sens et la ratification de tous les États signataires des Conventions de Genève. Il y en a quelque 180. Donc, il faudrait avant tout l'appui collectif des gouvernements qui ont signé les Conventions de Genève.
Cependant, cela étant dit, le Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge tient vraiment à ce que la question demeure sur la table et à ce que nous trouvions une solution qui permette au Magen David Adom d'être membre à part entière du mouvement et de jouir des mêmes droits que toutes les autres sociétés nationales qui en font partie.
La question est très complexe. Il n'existe pas de solution simple. Il faut beaucoup de négociation. Nous espérons que, maintenant que le comité permanent a accepté de former ce groupe de travail auquel les gouvernements ont été invités à participer, on trouvera une solution.
M. Pierre Duplessis: Je vous remercie, Paul.
Monsieur Cotler, je pourrais peut-être revenir à la question du droit humanitaire international simplement pour vous donner une idée de la gravité de la situation actuelle au sein de la Croix-Rouge. Nous avions un poste de coordonnateur en matière de droit humanitaire international, mais en raison d'un manque de fonds, nous avons demandé au Comité international de la Croix-Rouge de le financer. Nous payions les dépenses pour que le coordonnateur puisse se trouver à Ottawa et coordonner tous les efforts au pays. Le poste est vacant depuis mai dernier parce que M. Nicholas Borsinger est retourné en Arménie. Nous cherchons désespérément les fonds qui nous permettraient de combler le poste.
Cela ne signifie pas que nous ne menons pas d'activités ayant trait au droit humanitaire international—au contraire. Toutefois, comme notre organisme est responsable de faire connaître le droit humanitaire international et qu'il est celui qui a l'expérience pour le faire, j'estime cet état de faits inacceptable. Je vous prierais instamment de fournir le soutien financier, car nous ne pouvons pas tolérer une telle situation.
[Français]
Le président: Monsieur Paradis.
M. Denis Paradis: Monsieur le président, j'ai une seule question. Vous avez parlé de restructuration. Or, dans les états financiers de la Société canadienne de la Croix-Rouge, on mentionne—et c'est indiqué à la page 7—que la suspension des procédures est prolongée jusqu'au 29 février 2000. Si je ne m'abuse, c'est aujourd'hui. Pourriez-vous nous indiquer où vous en êtes rendus au niveau de la restructuration?
Dr Pierre Duplessis: C'est mon dossier préféré. Pour que l'on s'entende bien, je vous dirai que lorsque l'on avait transféré la gestion du sang, on avait demandé que les titres soient sans servitude aucune. On voulait l'aval de la cour pour être sûrs que tout était correct. On s'était dit qu'il y aurait peut-être des poursuites—il n'y en avait pas encore—de plusieurs milliards de dollars et on s'est demandé ce qu'on devait faire. On a donc cherché la loi qui s'appliquait le mieux à notre situation et on a trouvé que c'était la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, communément appelée la loi de la protection de la faillite.
• 1635
Nous nous sommes amenés devant les tribunaux, le 20 juillet 1998, et
nous avons demandé une prolongation au-delà des 60 premières journées.
Mercredi de la semaine dernière, encore une fois, nous avons demandé
une prolongation, qui, espérons-le, sera la dernière. Je pense que ce
sera la dernière. La prolongation a été accordée vendredi dernier par
la Cour supérieure de l'Ontario. Cette prolongation va jusqu'au 30
juin, ce qui fait que le scénario est le suivant. Nous devons
soumettre notre plan d'arrangements à nos créanciers. C'est à la fois
l'argent donné aux victimes de l'hépatite C et l'argent donné à nos
créanciers impayés. Cela fera l'objet d'un vote. Ces gens-là vont
venir voter. Les victimes vont venir voter par milliers sur notre
plan, ce qui est une chose inhabituelle. Vous vous imaginez un peu le
scénario. Cela va se produire avant le 31 mai.
Donc, il va y avoir un vote, et c'est là que l'on saura si, oui ou non, la proposition de la Société canadienne de la Croix-Rouge sera acceptée par ses créanciers. Ensuite, les choses deviendront automatiques. Si le plan est rejeté, la Société canadienne de la Croix-Rouge sort, entre guillemets, de la cour et revient à la situation initiale du 19 juillet 1998.
Si le plan est accepté, la cour se penche là-dessus. Il y a une période d'appel où on vérifie que tout a été fait correctement et légalement. Si tout va bien, on a la bénédiction de la cour et, à ce moment-là, le juge ordonne par un décret de la cour que cela soit mis à exécution. Les créanciers sont liés par la proposition, de même que les victimes, même celles qui n'auront pas voté, car c'est un vote à la majorité des votants.
Voilà où on en est. Nous avons bon espoir que la proposition que nous sommes à finaliser avec le gouvernement, les victimes, les compagnies d'assurances et tout le monde sera acceptable pour les créanciers. Ce n'est pas facile. Encore une fois, il n'y a pas beaucoup de compagnies qui ont été pendant deux années sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. Il nous faut continuer de fonctionner. Nous vivons de la charité des gens.
Les grandes corporations nous demandent souvent si elles peuvent nous faire confiance, parce que nous sommes sous la protection de la loi. Malgré tout, je dois vous dire que dans les opérations comme celle des réfugiés kosovars, nous avons eu des milliers et des millions de dollars en dons des grandes compagnies, ce qui est extraordinaire. Nous avons eu des millions de dollars des Canadiens: pour l'ouragan Mitch, on a eu 9,2 millions de dollars.
Donc, malgré tout, on a du soutien, mais disons qu'on pourrait avoir un soutien encore plus grand. On est en concurrence avec d'autres organismes. Ce n'est pas facile. Quand on va à Genève, on est la seule société de la Croix-Rouge dans cette situation pour le moins embarrassante.
Voilà où on en est.
M. Denis Paradis: Donc, vous devriez le savoir d'ici le 31 mai.
Dr Pierre Duplessis: Oui. La date fatidique est le 31 mai. Notre sort sera alors connu.
M. Denis Paradis: Merci.
[Traduction]
Le président: J'ai une question découlant de votre exposé. Vous avez mentionné le recours à la force en rapport avec le droit humanitaire international, et nous en entendons beaucoup parler dans le cadre de nos audiences sur le Kosovo, que vous suivez peut-être. Vous avez mentionné particulièrement qu'il s'agit-là d'une question qu'il faut examiner à la lumière de la Charte, puisqu'on débat, relativement au Kosovo, de la légalité de l'intervention en vertu de la Charte. Si elle ne l'était pas, on veut aussi savoir quelles seront les conséquences sur le droit humanitaire international et ainsi de suite. Il y a donc bien des zones grises.
La Croix-Rouge comme tel ou la Croix-Rouge internationale va-t-elle proposer les conditions en vertu desquelles, à son avis, les Nations Unies pourraient autoriser ou accepter une intervention humanitaire? M. Axworthy, je crois, a fixé, dans son discours devant les Nations Unies, une série de cinq critères qui conviendraient. Faites-vous des démarches en ce sens auprès des Nations Unies? Cela engage-t-il des changements dans la façon dont fonctionne le Conseil de sécurité où l'autorisation serait donnée, de manière à éviter que nous ne nous retrouvions dans une situation comme celle du Kosovo, où il n'y a pas eu d'autorisation?
M. Armand de Mestral: Voilà en réalité le genre de question au sujet de laquelle le comité international, s'il agit... C'est lui qui voit à l'élaboration des politiques et à l'orientation. Les sociétés nationales ne s'engagent pas vraiment dans ce genre de dossier concernant les grandes orientations et les grands principes du droit international, comme la Charte.
Dans l'optique de la société nationale, nous pouvons affirmer que, comme toute autre société de la Croix-Rouge, nous sommes là pour aider toutes les victimes. En fait, la Société canadienne de la Croix-Rouge a participé au travail dans les camps de réfugiés et travaille actuellement à la réadaptation dans tous les camps—à l'intérieur et à l'extérieur du Kosovo, en Albanie, en Macédoine, en Serbie. Là où il y a des victimes, la Croix-Rouge est présente pour apporter de l'aide. C'est le genre de fonction à laquelle la société canadienne prendrait part. S'il y a élaboration à long terme d'un droit international et d'une politique à ce très haut niveau, ce serait le Comité international de la Croix-Rouge qui y participerait.
Le président: Les événements survenus récemment ont-ils rapproché la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge en termes de coopération?
Il me semble qu'il y a 25 ans, on n'entendait pas beaucoup parler du Croissant-Rouge. Maintenant, on semble accepter que les deux organismes aient une approche unie.
M. Armand de Mestral: Il ne s'agit pas de deux organismes distincts; ils n'en forment qu'un. Il n'y a qu'un seul mouvement. La fédération a été formée, si l'on recule dans le temps, à la demande des Américains, des Britanniques, des Français et des Allemands qui souhaitaient intervenir peu après la Première Guerre mondiale, quand la terrible épidémie de grippe espagnole sévissait en Europe et particulièrement en Pologne et qu'un million de personnes sont mortes en un seul hiver. On s'intéressait beaucoup, particulièrement aux États-Unis, à un organisme qui apporterait de l'aide aux victimes de l'après-guerre.
Pour diverses raisons trop complexes pour qu'on s'y arrête, à ce stade-là, le Comité international de la Croix-Rouge, d'une part, et les sociétés nationales, d'autre part, ont décidé de se scinder. C'est alors qu'a été formée ce qu'on a appelé la Ligue—si ma mémoire est bonne, sept ans plus tard—par essentiellement un groupe d'Européens, plus une ou deux sociétés d'Amérique latine. Par la suite, on a déployé d'immenses efforts en vue d'y inclure les sociétés du Proche-Orient. C'est alors que le mouvement est devenu la Société de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. En fait, il y a même une troisième composante, le Lion rouge d'Iran, dont l'appellation, sur l'ordre de la société iranienne, n'est plus utilisée, mais qui pourrait l'être et qui est mentionnée dans les conventions.
Voilà donc le véritable historique. Toutefois, il est indubitable qu'il n'existe qu'un seul mouvement et une seule fédération. La fédération est connue sous le nom de Société de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, d'où certaines difficultés avec le Magen David Adom—non pas au niveau des principes, de l'action et de l'intervention humanitaire, mais au niveau malheureusement, jusqu'ici, de la question insoluble du symbole à utiliser et de savoir s'il ne faudrait pas s'en tenir aux symboles qui sont déjà utilisés.
M. Pierre Duplessis: À cet égard, le défi est un peu différent. Au Canada seulement, il existe actuellement 70 000 organismes de charité. Le problème est donc tout à fait différent. Il ne se situe pas au sein de la famille de la Croix-Rouge, mais plutôt au niveau de la collaboration au sol lorsque des opérations sont menées. S'il y a 70 000 organismes de charité au Canada, imaginez combien il y en a dans le monde. C'est tout simplement inconcevable.
Le président: D'accord.
Madame Marleau, vous avez quelque chose à dire?
Mme Diane Marleau: J'ai un avis de motion dans lequel je présente un texte au comité lui demandant de recommander au gouvernement, notamment à l'ACDI, d'aider la Société canadienne de la Croix-Rouge à respecter ses obligations internationales jusqu'à ce qu'elle soit capable de les assumer elle-même, si jamais elle le peut.
• 1645
Je ne puis déposer la motion aujourd'hui pour deux raisons.
D'une part, je n'en ai pas donné avis. D'autre part, il n'y a pas
quorum. S'il y avait eu quorum, nous aurions peut-être pu en
débattre, si tous avaient été d'accord pour le faire.
Je donne donc avis de la motion, parce que je crois sincèrement que vous faites une contribution extrêmement importante à notre image humanitaire dans le monde. C'est une honte que vous n'ayez pas pu faire ces paiements. Tout comme d'autres pays le font pour leur société nationale, notre gouvernement peut vous aider.
Le président: J'accepte donc ce que vous venez de dire comme un avis de motion, et nous en débattrons quand il y aura quorum.
Mme Diane Marleau: Avec un peu de chance, la motion sera adoptée.
Le président: J'aimerais simplement ajouter que je remercie les témoins du travail qu'effectue la Croix-Rouge à l'échelle internationale et nationale. Par exemple, je sais que, dans la circonscription que je représente, elle a mis sur pied un programme très efficace intitulé «Out of the Cold» et auquel en fait j'ai participé à titre bénévole. Elle semble être plus consciente que d'autres du besoin de nous persuader de porter des chapeaux et des gants. Je ne sais pas trop, mais ce doit être un programme de santé, monsieur Duplessis, que les autres ne semblent pas offrir.
Quoi qu'il en soit, la Croix-Rouge est très efficace dans notre propre région urbaine, dans le Canada tout entier et à l'échelle internationale. Il a été très intéressant pour nous d'apprendre ce que vous faites à l'échelle internationale.
J'aimerais simplement, au nom de tous les membres du comité, vous remercier énormément d'avoir assumé la responsabilité de voir à ce que cette institution extraordinairement importante survive à ce qui doit être un moment très difficile de son histoire. Nous vous souhaitons franc succès dans cette difficile entreprise. Nous sommes convaincus que vous réussirez, pour le plus grand bénéfice de tous les Canadiens et du reste de l'humanité. Je vous remercie beaucoup de tous vos témoignages.
La séance est levée jusqu'à 9 heures, jeudi prochain.