JUST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS
COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 30 novembre 1999
Le président (l'hon. Andy Scott (Fredericton, Lib.)): Bienvenue tout le monde.
Nous commençons aujourd'hui à entendre des témoins relativement au projet de loi C-3, Loi concernant le système de justice pénal pour les adolescents, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence. Nous recevons aujourd'hui un groupe de hauts fonctionnaires du ministère de la Justice. Je vois le nom de Catherine Latimer derrière la carafe d'eau. Je ne pense pas me tromper.
• 1115
Je vais demander à Mme Latimer...
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le président, il me semble que depuis 1993, la ministre vient habituellement nous rencontrer la première fois qu'on discute d'un projet de loi du gouvernement. En tout cas, j'ai souvent vu le solliciteur général et le ministre de la Justice venir témoigner avec les fonctionnaires. La ministre n'est pas là. Est-ce qu'il y a une explication à cela? Est-ce qu'elle va venir plus tard?
Vous comprendrez que ce projet de loi est éminemment politique. Je suis persuadé qu'au niveau juridique, on ne vous prendra pas en défaut, et je ne voudrais pas le faire non plus, mais cette loi est éminemment politique et j'aurais aimé que la ministre de la Justice soit présente en même temps que les fonctionnaires. Y a-t-il une explication à cela, monsieur le président?
[Traduction]
Le président: On m'informe que la ministre a offert de comparaître à la fin du processus pour nous donner l'occasion d'engager le comité et le Canada dans ce débat. Elle veut voir ce qui se passe et entendre ce qui va se dire au sujet de la mesure législative. Elle aimerait comparaître en temps opportun. Nous amorçons aujourd'hui notre discussion avec des hauts fonctionnaires sur la mesure législative que nous étudions. Nous pouvons ainsi commencer à nous renseigner nous-mêmes et à poser des questions aux personnes compétentes.
Monsieur Saada.
[Français]
M. Jacques Saada (Brossard—La Prairie, Lib.): Monsieur le président, j'aimerais vous demander la permission de quitter un peu plus tôt. Comme vous le savez, il y a aujourd'hui, en Chambre, un débat sur une motion du Bloc québécois sur le crime organisé.
M. Michel Bellehumeur: C'est ma motion.
M. Jacques Saada: Comme secrétaire parlementaire du solliciteur général, je souhaite intervenir, comme tous les députés de la majorité. Je dois être en Chambre pour le faire et je regrette de ne pouvoir assister à toute la réunion aujourd'hui. Merci.
[Traduction]
Le président: Merci.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Monsieur le président, j'aimerais savoir quand la ministre a offert de venir à la fin des témoignages. J'aimerais aussi savoir si on en a discuté en comité. Il me semble que je n'ai manqué aucune séance de ce comité. Le projet de loi C-3 m'intéresse particulièrement, et je n'ai pas été saisi du fait que la ministre voulait venir témoigner seulement à la fin. Est-ce que cela a été fait derrière les rideaux? J'aimerais le savoir. Pour ma part, j'aurais plaidé pour qu'elle vienne au tout début, quitte à ce qu'elle revienne à la fin. Ce sont des questions éminemment politiques, et ce ne sont pas les fonctionnaires qui vont répondre à ces questions.
[Traduction]
Le président: L'invitation a été envoyée et la ministre y a répondu en proposant que les hauts fonctionnaires comparaissent et qu'elle le fasse plus tard au cours du processus. Il n'y avait rien de malfaisant là-dedans, pas de ma part à tout le moins. Ce n'est qu'une façon d'aborder cette mesure législative.
Je prends note de vos réserves et je vais voir si elles sont partagées. Au bout du compte, c'est ce que la ministre nous a répondu. C'est ce qu'elle décide.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Vous me dites que c'est la réponse que le greffier a reçue; je n'étais peut-être pas présent. J'ai peut-être manqué cinq minutes pendant lesquelles vous avez discuté de cela, mais je veux savoir si on a discuté de la réponse de la ministre en comité. Je sais qu'elle est maître de son programme, mais je sais également que le Comité de la justice a un mot à dire sur la façon dont il va entendre ses témoins. Est-ce qu'on a discuté en comité du fait que la ministre se réservait le droit de venir témoigner à la fin?
Je ne veux pas que vous oubliiez que la ministre de la Justice du Québec a demandé à trois reprises à rencontrer la ministre de la Justice du Canada et que cette dernière a dit non à trois reprises. Si les ministres de la Justice, qui vont appliquer cette loi dans les provinces, ne peuvent pas interroger la ministre et ne peuvent pas connaître ses intentions politiques sur ce projet de loi, j'imagine que c'est au moins une prérogative du Comité de la justice que d'entendre la ministre. J'aurais aimé l'entendre au début de tout. Ça va teinter les questions qu'on devra éventuellement poser aux témoins.
Encore une fois, je n'ai aucune question à leur poser sur les intentions politiques. Ce sont des avocats, des femmes et des hommes de loi qui ont fait un projet de loi, mais il y a eu une décision politique de modifier la loi, et j'aurais aimé entendre la ministre de la Justice.
Ma question est très simple, monsieur le président. Je ne veux pas me fâcher et je ne suis pas fâché. Est-ce qu'on a discuté en comité du fait que la ministre, contrairement à ce qu'elle fait d'habitude, ne voulait pas venir témoigner au tout début, mais seulement à la fin? Est-ce qu'on en a discuté en comité?
Le président: Seulement dans la mesure où à la dernière réunion, la semaine dernière, lorsque nous avons distribué la liste des témoins que nous entendrions, si vous vous rappelez bien, il y était dit que mardi...
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Non, j'étais là.
[Traduction]
Le président: ... qu'aujourd'hui nous rencontrerions des hauts fonctionnaires du ministère de la Justice. Il n'y était pas précisé que la ministre serait absente ni qu'elle avait répondu en disant qu'elle comparaîtrait ultérieurement. Cependant il y était précisé que des hauts fonctionnaires du ministère de la Justice comparaîtraient et nous avons procédé en conséquence.
Ainsi si je...
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Monsieur le président, quand vous étiez solliciteur général, vous avez déposé des projets de loi et vous êtes venu témoigner avec les fonctionnaires. C'est la pratique générale. Dans ma tête à moi, quand j'ai entendu dire que la première rencontre serait avec le ministère de la Justice, il allait de soi que la ministre viendrait témoigner avec les fonctionnaires. Je n'ai pas demandé de précisions. Je n'ai pas demandé si Mme Lisette Lafontaine, Mme Latimer, etc. seraient là. Je savais qu'elles s'intéressaient au dossier et qu'elles seraient là. Mais dans ma tête à moi, la ministre devait aussi être présente. Elle ne l'est pas, et on n'en a pas discuté au comité.
J'aimerais que la ministre sache que je suis fort déçu qu'elle se cache de cette façon alors qu'on étudie un projet de loi qui, je le répète, est éminemment politique. Elle ne vient pas discuter du projet de loi à la première occasion où le Comité de la justice en est saisi. Je vois toute l'importance que la ministre accorde au Comité de la justice et je veux qu'elle sache que je suis fort déçu. Elle va le savoir quand elle va venir témoigner ici.
[Traduction]
Le président: Je suis certain qu'elle en entendra parler. Aussi je ne veux pas être cité comme modèle pour les ministres.
Vous avez la parole.
M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Si vous me permettez une brève réponse, on m'informe que la ministre rencontrera vendredi son homologue du Québec. On a ainsi donné suite aux demandes de M. Bellehumeur. Il appert donc que la ministre ne se cache pas de ce comité ni M. Bellehumeur. Il s'agit d'une mesure législative très importante.
Je reconnais qu'il arrive souvent que nous entendions les ministres au début de nos études mais il nous est aussi arrivé de le faire à la fin des audiences. Nous procédons, à mon avis, à un examen de la loi et nous devrions entendre toutes les parties. Il ne serait certes pas inopportun d'entendre la ministre de la Justice au début de cette discussion. Il importe, je crois, que nous comprenions bien cette loi et que si nous y parvenons, certaines des préoccupations de M. Bellehumeur se dissiperont. Je suis convaincu que nous y parviendrons.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur MacKay.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Je comprends simplement par là que la loi que beaucoup de changements seront apportés à la loi et qu'en fait elle sera à ce point modifiée par l'opposition que, lorsque la ministre comparaîtra à la fin de l'exercice, elle sera prête à accepter certains de ces changements et sera bien informée.
Le président: Je suis convaincu qu'elle entendra parler de cela également.
M. Peter MacKay: Merci.
Le président: Si nous pouvions maintenant entreprendre l'étude de cette mesure législative importante. Mme Latimer pourrait peut- être se présenter ainsi que les personnes qui l'accompagnent.
Mme Catherine Latimer (avocate-conseil/directrice, Justice applicable aux jeunes, ministère de la Justice): Merci, monsieur le président.
Nous sommes heureux de nous faire aujourd'hui les porte-parole de la ministre pour vous renseigner au sujet de la stratégie de renouvellement du système de justice pour les jeunes, pour expliquer le sens et les dispositions du projet de loi C-3 dont l'examen a été confié à ce comité et pour vous donner toute l'information documentaire que nous pouvons.
Je m'appelle Catherine Latimer et je suis directrice de la politique relative à la Justice applicable aux jeunes au ministère de la Justice. Je suis accompagnée aujourd'hui de Paula Kingston, Lisette Lafontaine, Bob Lutes et Dick Barnhorst. Ils assument tous une responsabilité à l'égard d'éléments clés du projet de loi et je suis sûre qu'ils sont en mesure de vous répondre si vous posez des questions détaillées au sujet du fond du projet de loi. Nous travaillons tous pour le ministère de la Justice dans le domaine de la justice applicable aux jeunes.
Je sais que ce n'est pas la première fois que le comité parlementaire se penche sur cette question. Je pense que le dernier exercice a été très exhaustif. L'excellent travail du comité s'est fondé sur de longues consultations et a donné lieu à la publication du rapport de 1997 intitulé Renouvellement de la justice pour les jeunes sous les auspices de la présidente de l'époque Shaughnessy Cohen. Il a servi d'assise à la Stratégie du gouvernement pour le renouvellement du système de justice pour les jeunes lancée en 1998.
Étant donné les longues consultations auxquelles a procédé ce comité, ses membres savent qu'il s'agit d'un domaine complexe de la politique sociale et juridique. Les gens ont à coeur la justice pénale pour les jeunes et entretiennent souvent des opinions très solides et tout à fait opposées en ce qui a trait à son fonctionnement. Les perceptions erronées sont assez courantes. Le rapport de 1997 du comité a permis d'éclaircir un grand nombre de ces questions et d'établir solidement la réforme du système de justice pour les jeunes.
Il s'est attaché précisément à la perception selon laquelle le système de justice pour les jeunes est trop clément en faisant ressortir que le nombre d'incarcérations en ce qui a trait aux jeunes compte parmi les plus élevés dans le monde occidental et que les peines sévères ne sont pas un moyen de dissuasion.
Le comité a fait ressortir que la criminalité chez les jeunes est un problème complexe qui exige une réponse à multiples facettes faisant appel à de nombreuses disciplines et partenaires. Cette conclusion vient étayer la stratégie plus large de renouvellement du système de justice pour les jeunes dans la nouvelle mesure législative.
• 1125
Nous avons distribué le document synoptique—j'espère qu'on
l'a fait. J'aimerais simplement vous faire parcourir le document
qui met vraiment en lumière les principaux changements apportés à
la loi et le nouveau projet de loi sur la justice pour les jeunes.
En mai 1998, la ministre de la Justice a lancé la stratégie de renouvellement du système de justice pour les jeunes du gouvernement, une approche globale et multisectorielle à la criminalité chez les jeunes qui insiste sur la prévention, les conséquences significatives, la réadaptation et la réinsertion sociale. Nous collaborons avec de nombreux partenaires, comme vous le savez peut-être, en ce qui a trait à la mise en oeuvre de cette mesure législative et à l'élaboration de la législation. Il s'agit plus particulièrement de nos collègues provinciaux et territoriaux. Nous cherchons également à améliorer nos partenariats avec d'autres secteurs et à offrir un appui au programme et du financement pour faire en sorte que la loi soit appliquée.
La stratégie comprend une nouvelle loi visant à remplacer la Loi sur les jeunes contrevenants que nous proposons d'abroger et de remplacer par le projet de loi C-3. Le but de la stratégie est d'établir un système de justice pour les jeunes qui protège la société et suscite sa confiance grâce à des réponses significatives qui font une distinction entre les délinquants violents et la vaste majorité des délinquants non violents, à une diminution du recours au système de justice formel, à la réduction du recours à l'incarcération, à l'amélioration de la réadaptation et de la réinsertion sociale et à l'engagement des citoyens et des partenariats en ce qui a trait à la question plus large de la justice pour les jeunes.
La nouvelle loi, par l'entremise de ses principales orientations, respecte les notions nationales et internationales des droits de la personne dans le cadre de l'application du droit pénal aux jeunes, insiste sur les principes de la responsabilité et sur des conséquences significatives pour l'ensemble des crimes commis par les jeunes, ce qui se traduit par différentes approches à l'égard des infractions avec violence et sans violence, favorise les résultats sociaux constructifs dans un cadre de responsabilité, savoir le respect des valeurs sociales, la réparation du tort causé, la réadaptation et la réinsertion sociale. Les interventions doivent être fondées sur les besoins et la situation des différents contrevenants. La large marge de manoeuvre permet de personnaliser les interventions en fonction des besoins particuliers du jeune contrevenant et d'atteindre les meilleurs résultats possibles pour la société.
Ce nouveau système de justice applicable aux jeunes est également plus souple et plus rationnel. Beaucoup prétendent que notre projet de loi est assez complexe; c'est exact, mais c'est pour justement en assurer la souplesse de façon que la loi puisse s'appliquer d'une manière qui réponde aux besoins de ceux qui l'appliquent dans leurs secteurs et leurs compétences.
Je vais passer en revue certains des principaux éléments de la nouvelle loi. On a souvent dit que la Loi sur les jeunes contrevenants manque de clarté au niveau des principes et des orientations. À partir des conseils du Comité permanent, nous avons tenté de corriger cette situation en incluant un préambule et une déclaration de principes et objectifs.
Le préambule comporte une déclaration des valeurs, droits et responsabilités tant de la société que des jeunes, par rapport à la criminalité des jeunes. Les principes et objectifs sont énoncés au début de la loi et dans différentes parties de celle-ci afin d'en guider la mise en application. Par exemple, des principes de détermination de la peine sont prévus dans le projet de loi.
Il ne fait aucun doute que toute loi pénale vise à protéger le public. Nous essayons de le faire par la prévention, les conséquences significatives et la réadaptation. Les autres principes font clairement la distinction entre le système de justice applicable aux jeunes et celui applicable aux adultes et incluent la responsabilité proportionnelle. Tout le monde comprend bien, je crois, que lorsqu'un jeune de 14 ans commet une infraction, c'est moins grave que lorsqu'une personne de 40 ans commet la même infraction; les conséquences doivent donc être différentes.
Mesures procédurales supplémentaires. Les jeunes ne comprennent pas les mesures auxquelles ils sont soumis dans le processus pénal et il faut donc prévoir des mesures procédurales supplémentaires pour eux.
Une insistance plus grande sur la réadaptation et la réinsertion sociale. Nous parlons ici de jeunes qui sont en phase de développement et qui ont sûrement la possibilité de revenir sur le droit chemin si l'on adopte des techniques pertinentes de réadaptation et de réinsertion sociale.
Dans le cadre de toute intervention auprès de ces jeunes, nous recherchons les meilleurs résultats sociaux possibles pour ce qui est du comportement offensant, afin de renforcer le respect pour les valeurs de la société, d'encourager la réparation du tort causé à la victime et à la collectivité, de faire participer l'adolescent, la famille, la collectivité et les autres, de prendre en compte les différences ethniques, culturelles, linguistiques et entre les sexes ainsi que les besoins particuliers.
On a prévu des règles de procédure spéciales ayant trait aux droits à l'application régulière de la loi et qui encouragent une participation respectueuse et positive des victimes et des collectivités.
• 1130
L'un des principaux aspects de la réforme législative vise les
mesures extrajudiciaires. Bien que l'on nous ait dit qu'il s'agit
d'une expression très difficile à prononcer et peu facile à
comprendre, il reste que c'est un concept très important qui permet
de trouver des moyens plus efficaces de traiter avec beaucoup de
jeunes gens qui ont affaire au système de justice applicable aux
jeunes.
Sur le plan international, nous avons beaucoup moins recours à des solutions de rechange autres que le processus judiciaire formel que d'autres pays. Cette loi vise à trouver des moyens plus constructifs de traiter avec les jeunes gens en dehors du système.
Cette loi prévoit de telles mesures que les agents de police doivent envisager avant de passer à d'autres mesures. C'est à la police de déterminer si les mesures extrajudiciaires sont suffisantes pour tenir l'adolescent responsable de sa conduite. Les mesures extrajudiciaires englobent les avertissements, les mises en garde, suivant la recommandation du Comité permanent, et les renvois informels par la police. C'est véritablement une approche en plusieurs étapes et si ces mesures ne se révèlent pas suffisantes, les jeunes gens peuvent être tenus de suivre des programmes comme les programmes de réconciliation de la victime et de l'infracteur, les entretiens du groupe familial, les ordonnances de service communautaire et tout ce qui permet à la collectivité et aux jeunes de régler leurs problèmes de comportement en dehors du processus judiciaire formel.
Selon les principes énoncés, les mesures extrajudiciaires sont présumées suffisantes dans le cas de première infraction contre les biens mais ne se limitent certainement pas à ces cas-là. Beaucoup trouvent qu'elles sont très utiles dans le cas d'infractions plus graves. Elles encouragent également la participation positive des victimes à cette étape du processus.
Toujours dans les principaux éléments de la nouvelle loi, nous avons les mesures judiciaires. Si notre système fonctionne correctement, bien moins de jeunes gens se retrouveront dans le processus judiciaire formel. Nous voulons toutefois que les cours soient prises au sérieux en matière de responsabilité criminelle si bien que leur niveau a été en général rehaussé. Les cours, les cours pour les jeunes, serviront de tribunes pour tous les crimes commis par les adolescents. Elles pourraient englober les cours supérieures, selon les circonstances.
La nouvelle loi permet, dans certaines circonstances, l'imposition de peines applicables aux adultes qui sont des peines prévues par le Code criminel. Nous avons également étendu l'imposition de peines applicables aux adultes dans le cas d'infractions désignées, ce qui permet de faire la distinction entre les infractions avec violence et les infractions sans violence.
Nous avons étendu l'imposition de peines applicables aux adultes dans le cas d'infractions désignées qui s'appliquaient aux jeunes de 16 et 17 ans pour qu'elles s'appliquent également aux jeunes de 14 et 15 ans accusés de très graves infractions comme le meurtre, la tentative de meurtre, l'homicide involontaire coupable, l'agression sexuelle grave et pour englober une cinquième catégorie de récidives et de violence. Ainsi, il revient à l'adolescent d'expliquer à la cour pourquoi les peines prévues par le système de justice applicable aux jeunes suffisent à le tenir responsable d'infractions aussi graves.
Nous avons également prévu le pouvoir discrétionnaire du juge d'admettre des déclarations malgré des entorses de nature technique. Beaucoup de protections relatives à l'application régulière de la loi sont prévues dans le cas des déclarations. Il s'agit d'une petite mesure qui accorde au juge le pouvoir discrétionnaire d'admettre des déclarations malgré des entorses de nature technique à certaines des protections ayant trait aux droits à l'application régulière de la loi. Les procédures ont en général été restructurées, réorganisées et rationalisées.
Pour ce qui est de l'important domaine suivant, la détermination de la peine et les peines, je pense qu'il est important de faire remarquer qu'en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants, les deux peines les plus fréquemment utilisées étaient la liberté surveillée et le placement sous garde; de l'avis de nombreux critiques, ces peines ne sont pas aussi efficaces qu'elles pourraient l'être.
Ainsi, 50 p. 100 des jeunes actuellement déclarés coupables en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants sont mis en liberté surveillée. Près d'un tiers finissent par être placés sous garde. Il y avait très peu d'autres solutions mis à part ces deux genres de peine.
Dans la nouvelle loi, les principes de la détermination de la peine insistent sur le caractère proportionnel et la responsabilité. Les principes établissent donc bien le lien entre la sévérité de la peine et la gravité de l'infraction. Ils prévoient que le placement sous garde doit être imposé aux adolescents les plus violents et dans le cas des infractions avec violence les plus graves, tout en encourageant l'imposition de peines dans la collectivité dans les cas moins graves.
• 1135
On a étendu la gamme des peines dans la collectivité afin
d'encourager les jeunes délinquants à accepter leur responsabilité
pour le tort causé et à le réparer. Par ailleurs, les provinces et
les territoires ont le choix d'imposer une suramende compensatoire.
Cette loi prévoit actuellement quatre types de placement sous garde. Le régime applicable dans le cas de meurtre en vertu de la LJC a été préservé. Nous avons prévu le placement sous garde et la surveillance dans le cadre d'un programme intensif de réadaptation pour les jeunes présentant des troubles et ayant commis des infractions graves avec violence. Il s'agit dans ce cas-là de répondre aux besoins thérapeutiques des délinquants les plus violents et cette peine viserait essentiellement ces jeunes. Le régime de placement de base équivaut à des ordonnances de placement sous garde et de surveillance pour les jeunes et nous avons également prévu des ordonnances de placement différé et de surveillance pour les délinquants non violents condamnés à une courte peine.
D'importants changements ont été apportés aux dispositions relatives au placement sous garde, à la réinsertion sociale et à la réadaptation. Les adolescents doivent être placés sous garde à l'écart des adultes et peuvent être transférés dans des établissements pour adultes, compte tenu de leur âge. Cette nouvelle loi prévoit de plus grandes protections pour les jeunes qui sont envoyés dans des établissements pour adultes. Par conséquent, cette nouvelle loi permet de davantage présumer que les adolescents doivent être placés sous garde à l'écart des adultes.
Nous avons également prévu que les décisions administratives quant au niveau de garde et aux congés de réinsertion sociale seront de plus grande portée, car nous croyons que cela favorisera la réinsertion sociale des adolescents tout en facilitant l'application de ces dispositions.
Nous croyons également que la réinsertion sociale permet de diminuer les cas de récidive grâce à une surveillance et à un appui durant la période critique au cours de laquelle l'adolescent réintègre la collectivité. Contrairement à la Loi sur les jeunes contrevenants, nous exigeons maintenant une période de surveillance dans la collectivité après toutes les périodes de placement sous garde. C'était une grave lacune de l'ancienne Loi sur les jeunes contrevenants.
Pour ce faire, le juge qui prononce la peine détermine la durée du placement sous garde et la durée de la peine purgée dans la collectivité sous surveillance ainsi que les modalités de celle- ci. Cela permet d'assurer la transparence du processus de détermination de la peine et de tout ce qui se passe.
Des modalités obligatoires et des modalités supplémentaires de plus grande envergure sont prévues et elles s'ajustent en fonction des problèmes spécifiques de l'adolescent. Si l'adolescent contrevient à une condition de la surveillance dans la collectivité, il peut être arrêté et replacé sous garde. Il est important, je crois, de souligner que le mandat de dépôt vise toute la période, si bien que si un jeune contrevenant commence à avoir des difficultés, il est beaucoup plus facile de le ramener dans un milieu sûr jusqu'à ce que ses problèmes de comportement soient réglés.
Les dispositions relatives à la publication, aux renseignements et aux dossiers ont été également restructurées et modifiées. Il est en général interdit de publier les noms des adolescents qui se retrouvent dans le système de justice applicable aux jeunes, sauf dans le cas des crimes les plus graves. Cela s'applique lorsqu'une peine applicable aux adultes est imposée—l'interdiction de publication n'est plus en vigueur—ou lorsqu'une peine applicable aux adolescents est imposée dans le cas d'une infraction désignée, sauf lorsque le juge exerce son pouvoir discrétionnaire et maintient une interdiction de la publication, en raison des motifs fondés sur la réadaptation et l'intérêt public.
Si l'adolescent est condamné à une peine applicable aux adultes, le dossier est traité tout comme le dossier d'un adulte. Les dispositions concernant les dossiers des adolescents sont restructurées et simplifiées et on prévoit un plus grand accès aux dossiers des jeunes dans l'intérêt de l'administration de la justice et à des fins de recherche.
La plupart des dossiers deviennent inaccessibles et inutilisables si, après avoir purgé sa peine, l'adolescent ne commet pas d'autres infractions pendant une période déterminée; s'il est de nouveau condamné comme un adulte, son dossier actif d'adolescent devient un dossier d'adulte. Par conséquent, si l'adolescent n'a pas changé son comportement et continue de commettre des infractions, son dossier le suit.
Un autre élément, recommandé par le comité parlementaire, vise l'élargissement du rôle de la collectivité et des particuliers dans le système de justice applicable aux jeunes.
Sur recommandation du comité, le mandat des comités de justice pour la jeunesse a été élargi. Nous avons prévu la mise sur pied de groupes consultatifs et la création de partenariats au cours de nombreuses étapes afin de favoriser les interventions positives.
En fait, à toutes les étapes du système de justice applicable aux jeunes où les décisions sont prises, le décideur peut mettre sur pied un groupe consultatif afin de demander des conseils à ceux qui connaissent le mieux l'adolescent et pour savoir quelles mesures il serait bon de prendre pour améliorer le comportement, quelles peines conviendraient ou encore quelles modalités et quel genre d'appui seraient les plus utiles pour faciliter la réinsertion sociale de l'adolescent dans la collectivité.
• 1140
Par conséquent, il est tout à fait possible d'avoir recours
aux groupes consultatifs de manière créative, ce qui favorise les
concepts de justice réparatrice dans tout le système de justice
applicable aux jeunes.
Nous avons également prévu la participation active des victimes et des parents. Les dispositions de cette nouvelle loi facilitent énormément la participation efficace des parents et des victimes et offrent plus de possibilités de mesures non judiciaires et communautaires dans le domaine de la criminalité des jeunes.
C'est ainsi que se termine le résumé des principaux éléments de la nouvelle loi; nous répondrons maintenant avec plaisir aux questions des membres du comité.
Le président: Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à M. Cadman, pour sept minutes.
M. Chuck Cadman (Surrey—Nord, Réf.): Merci, monsieur le président.
Merci, madame Latimer ainsi que vos collègues d'être parmi nous aujourd'hui. J'ai plusieurs questions à poser, mais une observation que vous avez faite au cours de votre exposé m'a un peu perturbé. Vous avez dit que lorsqu'un jeune de 14 ans commet une infraction, la situation est moins grave que si c'était un adulte qui l'avait commise. Pouvez-vous développer et dire ce que vous entendez par là?
Mme Catherine Latimer: Certainement, les conséquences des infractions que commettent les adolescents sont aussi graves pour la collectivité et pour les victimes, indépendamment de l'âge du délinquant. Toutefois, le droit pénal est un concept subtil qui repose sur la mens rea et la capacité de former une intention criminelle autant que sur les conséquences de l'infraction. Si un adolescent vole 100 $, nous considérons la situation moins grave que si un homme ou une femme de 40 ans volait 100 $, car on s'attend à ce que les adultes aient davantage conscience de la nature et des conséquences de leur comportement; ils peuvent donc être tenus plus responsables de leurs actes.
Tout le concept du système de justice applicable aux jeunes repose sur le fait que les adolescents se trouvent à une étape de développement de leur vie et dans de nombreux cas, il n'est pas aussi important d'évaluer avec précision leur degré de responsabilité que dans le cas d'un adulte. Ce n'est pas toujours le cas et c'est la raison pour laquelle une mesure relative au processus de transfert lié à une infraction désignée existe et qu'il est possible de transférer tous les adolescents qui commettent des actes criminels dans des établissements pour adultes. Il s'agit toutefois de cas tout à fait exceptionnels, selon nous.
M. Chuck Cadman: Ce que vous dites donc, c'est que c'est moins grave aux yeux de la loi, mais certainement pas en ce qui concerne les conséquences de l'infraction. Selon moi, lorsqu'un adolescent de 14 ans commet un meurtre, la situation est certainement aussi grave que si c'était un adulte qui commettait un meurtre.
Mme Catherine Latimer: Je suis d'accord avec vous, les conséquences d'un meurtre commis par un adolescent sont aussi graves pour la victime et la famille de la victime ainsi que pour la collectivité que les conséquences d'un meurtre commis par un adulte. Cela ne fait aucun doute.
M. Chuck Cadman: Passons au processus de transfert lié à une infraction désignée. J'ai quelques questions à ce sujet. Pourquoi se limite-t-il, ou pourquoi à votre avis se limite-t-il à quatre infractions—agression sexuelle grave, meurtre, homicide involontaire coupable et tentative de meurtre? Qu'en est-il des voies de fait graves, de l'agression sexuelle armée, ou de tout genre d'agression armée, du vol à main armée? Pourquoi ce processus est-il ainsi limité?
Mme Catherine Latimer: Monsieur le président, je vais demander à Robert Lutes de répondre à cette question.
Le président: Monsieur Lutes.
M. Robert E. Lutes (conseiller juridique, Justice applicable aux jeunes, ministère de la Justice): Une cinquième catégorie a été ajoutée à ces quatre infractions désignées. Il s'agit des infractions graves avec violence et nous avons mis en place, en réponse aux infractions avec violence, un système qui permet au procureur général, s'il est d'avis que l'infraction doit tomber dans la catégorie des infractions graves avec violence, de demander au juge de prendre une décision à la fin de la période. En cas de trois infractions de cette nature, des peines applicables aux adultes peuvent être imposées à l'adolescent. C'est la façon dont on procédait.
Le procureur général a toujours loisir—dans le cas d'un adolescent de 14 ans ou plus qui commet une infraction—de faire une demande d'assujettissement à une peine de deux ans ou plus applicable aux adultes; je crois que tous les cas dont vous faites mention tomberaient dans cette catégorie mais, les infractions désignées sont étendues uniquement pour englober les cas de récidive et de violence.
M. Chuck Cadman: Voulez-vous donc dire que pour que la cinquième infraction désignée puisse être prise en compte, il faut qu'elle ait été déjà consignée dans le cas des infractions préalables?
M. Robert Lutes: C'est exact.
M. Chuck Cadman: Vous demandez en fait au procureur général ou à la cour de lire dans une boule de cristal pour savoir s'il faut consigner une infraction dans la catégorie des infractions suffisamment graves et si une autre infraction suffisamment grave est commise... au moment où l'on en arrive à la troisième infraction... Sinon, si elles ne sont pas consignées, la troisième n'est pas prise en compte—à moins que les deux premières aient été consignées.
M. Robert Lutes: C'est exact, mais je crois que tout le monde se rend compte que les infractions avec violence sont un grave problème. À mon avis, c'est grâce à l'information du public qui s'inscrit dans le cadre de ce processus que tous les procureurs généraux et tous les juges réaliseront qu'il s'agit d'une des réponses apportées par le projet de loi. Nous avons prévu une procédure qui, à notre avis, est assez simple et qui permet au procureur général de faire une demande d'assujettissement à la peine applicable aux adultes. La question relative à la tenue de dossiers s'est posée dans le contexte de l'information du public. Ce mécanisme prévoit que si le procureur général fait une telle demande et que la cour acquiesce à cette demande, la cour consignera cette information dans la catégorie «infractions graves avec violence»; un dossier sera donc créé. Nous pensons donc que c'est ainsi que les intervenants seront informés, comme il se doit.
M. Chuck Cadman: J'imagine qu'il ne reste plus qu'à attendre pour voir comment les choses vont tourner.
Mesures extrajudiciaires. La plupart des gens pensent en termes de première infraction, mais je ne crois pas qu'il s'agisse d'une première infraction qui donne droit à des mesures extrajudiciaires, qu'il s'agisse de mesures de rechange ou de déjudiciarisation. Il s'agit en fait d'une première déclaration de culpabilité, et non pas nécessairement d'une première infraction, n'est-ce pas?
Mme Catherine Latimer: Monsieur le président, j'aimerais demander à Dick Barnhorst de répondre à cette question, car c'est lui le responsable de ces dispositions.
M. Dick Barnhorst (conseiller spécial, Justice applicable aux jeunes, ministère de la Justice): Si je comprends bien votre question, vous voulez parler du processus lié à une infraction désignée.
M. Chuck Cadman: Je veux parler des mesures extrajudiciaires pour l'application de celui-ci. La plupart des gens pensent qu'il devrait s'agir uniquement de la première infraction, mais je crois qu'en réalité, il s'agit de ce que l'on considère comme la première déclaration de culpabilité. Ce qui me préoccupe, c'est que si un adolescent a droit aux mesures extrajudiciaires, l'infraction n'est jamais consignée comme déclaration de culpabilité, n'est-ce pas?
M. Dick Barnhorst: C'est exact.
M. Chuck Cadman: Par la suite, au bout de cinq mois, il commet une autre infraction. Il a toujours droit à une déjudiciarisation ou à des mesures extrajudiciaires, car aucune déclaration de culpabilité n'a été consignée. Dans le contexte de diverses compétences, d'un passage d'une compétence à l'autre, comment est- on censé savoir que l'adolescent a bénéficié de mesures de déjudiciarisation à cinq reprises au cours des années passées?
M. Dick Barnhorst: Le passage d'une compétence à l'autre est un problème. En général toutefois, si le jeune contrevenant se trouve dans la même compétence, il est fort probable que la police ait conservé un dossier de la décision préalable ou que le procureur général ait conservé un dossier de la décision relative à la déjudiciarisation de l'affaire dans le passé. Par conséquent, dans la plupart des cas, je ne pense pas qu'il serait difficile de le savoir.
Il ne faut pas oublier non plus que dans le contexte de la Loi sur les jeunes contrevenants, nous avons été très prudents, de manière générale, pour ce qui est du recours à des mesures extrajudiciaires ou, de rechange, comme nous les appelons aujourd'hui. En règle générale, il n'y a pas eu beaucoup de déjudiciarisation dans le cas d'infractions graves. Il s'agit en règle générale de première infraction. C'est un contexte qu'il est important de garder à l'esprit, je pense.
M. Chuck Cadman: Nous laissons donc à la compétence en jeu la responsabilité de se tenir au courant. Je peux parler de ma propre expérience à propos d'un programme de déjudiciarisation. Les agents de police eux-mêmes ne savent pas si l'un d'eux a fait une mise en garde trois mois plus tôt, le jeune délinquant se manifeste de nouveau et aucun dossier n'a été tenu. Ce qui m'inquiète, c'est que l'on risque de prendre des mesures extrajudiciaires à l'infini.
M. Dick Barnhorst: Tout d'abord, c'est prévu par la Loi sur les jeunes contrevenants, comme vous l'indiquez, me semble-t-il. Je crois que nous pouvons envisager cette question sous l'angle de la formation et de la planification relative à la mise en oeuvre de ce projet de loi; il faut que les policiers et les procureurs puissent se tenir au courant. Je crois que cela peut contribuer à régler ce problème.
M. Chuck Cadman: D'accord.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Cadman.
Monsieur Bellehumeur.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Est-ce que le ministère de la Justice a collaboré à la rédaction de ces outils d'information? Oui? Celui-ci est une fiche documentaire sur le système de justice pénal pour les adolescents et comporte un tableau comparatif de la Loi concernant le système de justice pénal pour adolescents et la Loi sur les jeunes contrevenants. Il y a une déclaration de principe. C'est la première page qui m'a sauté aux yeux, étant donné que je suis le dossier depuis fort longtemps, que je suis avocat et que j'ai lu plusieurs jugements de la Cour suprême à cet effet. Vous indiquez que la Loi sur les jeunes contrevenants manque de clarté, n'établit pas le but principal du système et contient des principes inconsistants et contradictoires. Vous dites qu'aucun principe précis ne l'accompagne aux divers stades des procédures judiciaires. Il semble que la Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents soit beaucoup plus claire.
• 1150
Comment conciliez-vous cela avec plusieurs
jugements de la Cour suprême du Canada relativement
à l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants,
notamment un jugement qui a été rendu en
1992 et que je vais vous citer? La juge L'Heureux-Dubé
dit:
-
...il importe également de souligner qu'elle (la déclaration de principe
de la Loi sur les jeunes contrevenants) représente un
effort honnête pour établir un juste équilibre dans la
façon d'aborder un problème social très complexe.
Elle poursuit en disant:
-
Les juges et les autres professionnels travaillant
auprès des adolescents qui enfreignent les lois pénales
ont besoin d'un ensemble de principes complexe et
équilibré comme celui qu'on retrouve dans la Loi sur
les jeunes contrevenants.
Je vous cite un jugement, mais je pourrais vous en citer plusieurs autres, parce que la Cour suprême s'est prononcée à plusieurs reprises sur la Loi sur les jeunes contrevenants. Elle avait à interpréter la déclaration de principe qu'on retrouve à l'article 3 de la loi. Les juges de la Cour suprême, de toute évidence, ne partagent pas cette opinion quant au manque de clarté de la loi, qui semble inciter le ministère de la Justice à faire une toute nouvelle loi pour les jeunes aux prises avec un problème de justice.
Ma question est fort simple. Sur quoi vous basez-vous pour faire une telle affirmation, alors que les juges de la Cour suprême du Canada semblent se satisfaire de la loi actuelle et semblent dire qu'elle est suffisamment claire et applicable? Sur quoi le ministère de la Justice se base-t-il pour faire un énoncé aussi fort relativement à la Loi sur les jeunes contrevenants, à savoir que la loi manque de clarté et, surtout, qu'aucun principe précis ne l'accompagne aux divers stades des procédures judiciaires pour les jeunes contrevenants?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: La Cour suprême interprète beaucoup de lois et tente d'y apporter une certaine clarté, mais les gens qui avaient de la difficulté à comprendre ce que prévoyait la déclaration de principes de la Loi sur les jeunes contrevenants étaient ceux qui travaillaient dans le système lui-même et essayaient de l'utiliser.
Je pense que le comité permanent, après ses consultations très intensives—et nous avons également consulté beaucoup de personnes—a recommandé de rendre la déclaration de principes plus claire et d'en corriger les incohérences.
C'est un problème qui se pose depuis longtemps en ce qui concerne la Loi sur les jeunes contrevenants et qu'il faut régler pour refléter l'orientation de cette loi.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Est-ce pour cela, madame Latimer, que le ministère—quand je m'adresse à vous, je m'adresse au ministère car je sais que vous remplissez les commandes que la ministre vous a données—a pris la déclaration de principe qu'on retrouve à l'heure actuelle à l'article 3 de la loi, déclaration qui était le fondement même, la chair sur l'os de la Loi sur les jeunes contrevenants, et l'a enlevée du cadre juridique de la loi pour la mettre dans son préambule? Ce n'est pas pour cela?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Non, pas du tout. Les principes visent à assurer la clarté. Comme je le disais dans ma déclaration liminaire, on retrouve des principes rigoureux à divers stades de la loi. Il s'agit de principes relatifs à la détermination de la peine, qui n'étaient pas aussi clairs auparavant, et de principes liés au placement sous garde et au but recherché lorsque nous plaçons des adolescents sous garde.
Nous essayons donc de mettre l'accent sur les principes dans toute la loi et de définir la façon dont ces dispositions législatives doivent être interprétées à divers stades de la loi. Il s'agissait essentiellement d'orienter ceux qui travaillent dans ce système.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Madame Latimer, on retrouve de beaux principes dans le préambule du projet de loi C-3. Que vaut un préambule pour l'interprétation de la loi?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Me demandez-vous comment le préambule permet d'interpréter la loi?
M. Michel Bellehumeur: Les juges de la Cour suprême du Canada se sont penchés sur de nombreuses lois. Je pense qu'ils se sont même penchés sur la Loi 101, avec son préambule, mais je n'en suis pas certain. Il faudrait que je vérifie. Donc, les juges de la Cour suprême se sont prononcés à quelques reprises pour dire que c'est dans le corpus de la loi qu'on trouve vraiment l'intention du législateur et que c'est en dernier recours, quand le corpus de la loi n'est pas clair, qu'on va au préambule. Est-ce exact?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Oui, je crois que c'est exact. Si le corps de la loi est ambigu, le préambule permet de préciser les choses. Il sert également de déclaration de valeurs sur l'esprit de la loi. Dans ce cas particulier, les valeurs dépassent celles visées par les dispositions législatives.
Il y est question de valeurs sociales, d'obligation sociale, de partenariat avec d'autres intervenants dont aucun n'est visé directement par cette loi. Leur participation doit être indiquée dans un préambule, car il est important, selon nous, pour le système de justice applicable aux jeunes dans son ensemble, d'avoir la coopération de la société et d'autres partenaires. Ce n'est toutefois pas quelque chose que cette loi puisse ou doive contrôler.
Le président: Monsieur Bellehumeur, merci beaucoup. Nous allons vous revenir, nous avons beaucoup de temps.
Monsieur McKay.
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Merci, monsieur le président.
Le Québec et d'autres provinces également s'intéressent, me semble-t-il, au système de justice applicable aux jeunes du Québec et à son fonctionnement. On nous dit, et nous n'avons aucune raison de le contester, que le système québécois est bien supérieur à celui des autres provinces. En résumé, le système du Québec repose sur le principe suivant: si tout marche bien, il est inutile d'intervenir.
À votre avis, y a-t-il quelque chose dans le projet de loi, dans le préambule—au sujet duquel M. Bellehumeur semble s'inquiéter—dans la déclaration de valeurs ou de principes, ou dans le corps de la loi, susceptible d'empêcher le Québec ou toute autre province à appliquer son système le mieux possible de son point de vue? C'est ma première question.
Ma deuxième question porte sur la perception de plus en plus générale que le Québec aborde beaucoup mieux la question que les autres provinces. Il me semble bizarre, voire même étrange, que pour les jeunes de moins de 18 ans, le système semble être bien supérieur. Pour les jeunes de plus de 18 ans, le système semble être identique, sinon pire. Le taux de mise en accusation est bien inférieur, de même que le taux d'incarcération avant l'âge de 18 ans, alors que le taux de mise en accusation, tout comme le taux d'incarcération est semblable ou supérieur après l'âge de 18 ans.
Je me demande si vous pouvez répondre à ces points de préoccupation. Lorsqu'on analyse une loi, il vaut mieux s'attaquer aux faits plutôt que s'en tenir aux mythes.
Mme Catherine Latimer: Le système de justice applicable aux jeunes du Québec a beaucoup à nous apprendre. Lorsque nous avons envisagé de rédiger une loi qui refléterait les recommandations du comité et irait même plus loin, nous avons examiné de très près le système législatif du Québec et la façon dont cette province applique la Loi sur les jeunes contrevenants et ce, pour diverses raisons. L'une d'elles, c'est que le Québec a le taux d'incarcération le plus bas de toutes les compétences. Nous avons eu la forte impression que l'on a trop recours à l'incarcération à l'échelle du Canada. Nous avons donc examiné comment le Québec abordait ces questions particulières.
C'est une des raisons pour lesquelles nous avons souhaité plus de souplesse obligatoire au départ, afin de trouver des moyens efficaces de rejeter les contrevenants les moins graves du système. Nous avons tenté de prévoir suffisamment de souplesse dans les dispositions de la loi de manière que les avantages du système de justice applicable aux jeunes du Québec soient maintenus dans cette nouvelle loi.
• 1200
Nous avons beaucoup appris, je crois. Nous avons essayé de
faire suffisamment de compromis. S'il faut accorder plus de
souplesse dans d'autres domaines pour que le système puisse être
mis en pratique, nous n'hésiterons pas à nous pencher sur d'autres
dispositions.
Pour ce qui est de votre deuxième question, au sujet des différences entre ceux qui ont moins de 18 ans et ceux qui ont plus de 18 ans, je ne suis pas au courant de ces statistiques et je ne peux pas vraiment en parler.
Le système québécois est très différent de celui des autres compétences. Il faut d'abord parler du système québécois de protection de la jeunesse. Beaucoup de jeunes se trouvent dans ce que nous appellerions des établissements fermés aux termes de la Loi sur la protection de la jeunesse ainsi que de la Loi sur les jeunes contrevenants. Il se peut que l'on arrive à un moment donné au même résultat en ce qui concerne le placement sous garde, mais ce ne sont que des suppositions.
Nous pouvons certainement examiner la question et voir si nous trouvons des réponses. Nous pouvons vérifier ces chiffres et essayer d'en expliquer la raison.
M. John McKay: Bien.
Suite à ces deux questions, vous ne pensez pas, en ce moment même, que le préambule ou le contenu du projet de loi pourrait empêcher le Québec de fonctionner comme il le fait actuellement, n'est-ce pas?
Mme Catherine Latimer: Non, je ne le pense pas.
M. John McKay: Pour ce qui est des statistiques, si le Québec déjudiciarise les jeunes avant qu'ils n'arrivent dans le système de justice pénale, il est normal que les taux de mise en accusation et d'incarcération soient bien plus positifs, par comparaison.
Enfin, nous avons récemment appris que le taux est considérable en Saskatchewan. Cela s'explique en grande partie par les questions autochtones, mais je crois aussi par les questions des sans-abri. Un juge doit souvent faire des choix désagréables. Il se peut fort bien que des adolescents soient mis en prison, car on ne sait pas vraiment où les placer.
Votre ministère s'est-il penché sur cette question?
Mme Catherine Latimer: Nous avons en fait examiné ces deux questions. Comme vous le savez, le gouvernement se lance dans une stratégie pour les sans-abri. Nous avons travaillé avec Développement des ressources humaines sur les paramètres pour faire en sorte qu'ils soient suffisamment vastes afin d'englober ces jeunes qui risquent d'être incarcérés uniquement parce qu'il n'y a pas d'autres options. Nous ne croyons pas que l'incarcération des adolescents soit la solution.
Bien sûr, nos taux de détention avant le procès et nos autres taux d'incarcération sont beaucoup trop élevés. Nous essayons de voir si l'on ne peut pas améliorer la situation de ces jeunes qui souvent vivent dans la rue, qui souvent sont vulnérables, qui sont probablement des victimes en puissance et qui, fort probablement, risquent de commettre des crimes. Nous cherchons à régler ce problème particulier dans le cadre de l'initiative pour les sans- abri.
L'autre question que vous avez posée porte sur les Autochtones dans le système de justice applicable aux jeunes, peut-être aussi sur leur surreprésentation et sur la façon de régler ce problème qui, selon nous, est grave. D'après nous, il n'est pas vraiment possible de régler la question de la criminalité des jeunes à moins de prêter particulièrement attention aux problèmes uniques auxquels sont confrontées beaucoup de collectivités autochtones.
À Winnipeg, nous avons réuni la semaine dernière des représentants de collectivités autochtones de tout le pays pour qu'ils nous fassent part de leurs expériences positives au sujet des programmes de justice applicable aux jeunes dans le but de proposer un bon nombre de ces programmes à d'autres collectivités. La mise en oeuvre de cette loi prévoit donc le développement des capacités communautaires autochtones. Nous espérons que cela permettra de régler certains des très graves problèmes liés à la justice applicable aux jeunes Autochtones et nous prenons certainement la question au sérieux.
M. John McKay: Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Nous revenons à M. Cadman, pour trois minutes.
M. Chuck Cadman: Merci, monsieur le président.
• 1205
Sans vouloir trop insister sur ce point, je dois dire que j'ai
passé la fin de semaine en compagnie de 50 ou 60 policiers, dont la
majorité étaient du Québec; ils ne sont pas particulièrement
satisfaits de la situation, mais je ne vais toutefois pas pousser
plus loin.
Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de ne pas recommander la suramende compensatoire? Notre comité a recommandé de l'appliquer à la Loi sur les jeunes contrevenants ou à la nouvelle loi. Le comité l'a recommandé dans le rapport sur les droits des victimes et je me demande simplement pourquoi le gouvernement a choisi de ne pas le faire.
Mme Catherine Latimer: Monsieur le président, je vais répondre de manière générale puis, si cela vous convient, je demanderai à Bob Lutes de donner plus de détails.
Nous avons pris au sérieux la recommandation relative à la suramende compensatoire et nous avons prévu plusieurs options réglementaires. La raison pour laquelle il faut être prudent avant d'en faire une disposition générale, c'est que beaucoup de jeunes sont démunis. Ils n'ont pas de source de revenu. Les lois du travail les empêchent de travailler et ils ont moins accès à des moyens de subsistance que d'autres personnes de la collectivité. Par conséquent, les suramendes compensatoires ne sont pas toujours la meilleure solution.
Nous avons toutefois prévu dans la loi la possibilité d'imposer des suramendes compensatoires de plusieurs façons.
Bob, pouvez-vous expliquer ce que nous avons fait?
M. Robert Lutes: Certainement. Nous avons prévu une certaine souplesse à ce sujet. On s'est demandé si les jeunes avaient la capacité de payer et c'est un point qu'il faut examiner au moment de l'ordonnance ou de l'imposition d'une amende; c'est la cour qui doit procéder à cet examen. Ce qui nous inquiétait dans le cas où la cour jugerait que le jeune peut payer une amende de 100 $, c'est que si la suramende compensatoire fonctionne de la même façon que pour les adultes, 15 p. 100 de plus serait ajouté, alors que peut- être l'examen en question n'a pas été fait.
Deux possibilités sont offertes: premièrement, la suramende compensatoire fait partie des 100 $ si la province ou le territoire choisit cette option; dans le cas contraire, la suramende compensatoire fonctionne de la même façon que dans le système applicable aux adultes. De notre point de vue, la position de la victime est prise en compte, mais il y a deux façons de procéder.
M. Chuck Cadman: Certains pourraient dire que c'est là qu'interviendrait probablement la responsabilité parentale.
L'ancien comité a recommandé que les enfants de 10 et 11 ans relèvent également du système. Contrairement à ce que certains pourraient penser, il ne s'agit pas de les incarcérer, mais plutôt de leur offrir l'aide dont ils ont besoin. Dernièrement en Alberta, au moment de la condamnation d'une jeune personne pour homicide, un juge a déclaré que c'était la pire affaire de sa carrière, car rien n'était prévu en pareil cas. Pourquoi le gouvernement choisirait-il de ne pas adopter la recommandation du comité à cet égard?
Mme Catherine Latimer: Monsieur le président, peut-être puis- je commencer à répondre avant de céder la parole à Dick Barnhorst.
Je crois que le gouvernement pense, tout comme vous, qu'il faut tout faire pour que ces jeunes obtiennent l'aide et l'appui dont ils ont besoin; il croit toutefois qu'il existe une meilleure solution que celle du recours au régime de justice pénale. Nous avons donc une stratégie pour les jeunes de moins de 12 ans et peut-être que Dick pourrait vous donner un peu plus de détails à ce sujet.
M. Dick Barnhorst: Avant de parler de la stratégie, je dirais qu'il me paraît intéressant de noter que lorsque la cour était investie d'une telle autorité en vertu de la Loi sur les jeunes délinquants—lorsque des jeunes de 10 et 11 ans étaient en cause—en règle générale, la cour optait pour les services d'assistance sociale et de santé mentale. Par conséquent, même s'il était possible d'opter pour la justice pénale, les juges avaient tendance à recourir aux services sociaux et de santé mentale.
Comme l'indique le document de politique gouvernementale de mai 1998 intitulé «Le renouvellement du système de justice pour les jeunes», on a pensé que lorsque des jeunes commettent de très graves infractions, ce qui est très rare—j'insiste sur ce point—c'est parce qu'ils sont probablement confrontés à de graves problèmes de santé mentale ou d'assistance sociale, qu'il faut régler.
La question qui se pose est la suivante, comment les régler? Le système de justice pénale est une façon de procéder, mais on peut également utiliser et améliorer ce qui est offert par les systèmes d'assistance sociale et de santé mentale pour les jeunes.
Il y a environ huit semaines, une conférence nationale qui se déroulait ici a regroupé des spécialistes de la question qui ont contribué à la mise au point d'une stratégie nationale visant les jeunes de moins de 12 ans qui commettent ce qui serait considéré comme une infraction, s'ils étaient plus âgés. Tout d'abord, je crois qu'il est juste de dire que les spécialistes ont déclaré à l'unanimité que ces jeunes ne devaient pas être criminalisés et qu'il existe des moyens de régler leurs problèmes dans le cadre des services d'assistance sociale et de santé mentale des enfants qu'il faut toutefois améliorer.
• 1210
Ce qui semble être un pas dans la bonne direction, c'est le
recours à des protocoles qui font en sorte que les enfants ne
tombent pas entre les mailles du filet, qui font en sorte qu'au
niveau local, il existe des moyens permettant de faire appel aux
services adéquats lorsqu'un enfant de moins de 12 ans est mis en
cause dans ce qui pourrait être considéré comme une infraction.
Le modèle présenté à la conférence, que vous risquez de retrouver dans tout le pays, dans une certaine mesure, est celui adopté en février dernier par la communauté urbaine de Toronto. Il a été en quelque sorte proposé par la police de la communauté urbaine de Toronto et je sais que le chef de police, M. David Boothby, y a apporté son appui. Grâce à ce modèle, un protocole et une ligne directe permettent de mobiliser tous les organismes de protection de l'enfance de la collectivité pour faire en sorte que ces enfants ne tombent pas entre les mailles du filet lorsqu'ils sont aux prises à des difficultés.
Dans le cadre d'une stratégie, il faudrait peut-être aussi examiner la pertinence des lois provinciales sur la protection de l'enfance. Comme vous le savez, ces lois varient d'une province à l'autre. En général, il est possible de régler efficacement les problèmes que connaissent les enfants dans le cadre des lois sur la protection de l'enfance, mais ces lois sont différentes. Il a été recommandé d'essayer de mettre au point avec les provinces des lois types pour que ce pouvoir législatif existe au niveau provincial, permettant ainsi de trouver des solutions aux problèmes que posent ces jeunes.
Par ailleurs, plusieurs interventions novatrices sont mises au point, en partie par le Conseil national de la prévention du crime; plusieurs projets pilotes sont prévus pour examiner les meilleures façons de traiter les contrevenants de moins de 12 ans, pour ainsi dire.
Je crois donc que plusieurs choses sont possibles.
Nous avons contacté les directeurs des services d'assistance sociale des enfants dans tout le pays. Ils s'intéressent à la mise au point d'une telle stratégie. Il s'agit véritablement de trouver la bonne façon de réagir tout en sachant qu'il existe des façons autres que celles que propose le système de justice pénale.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Barnhorst et monsieur Cadman.
Nous passons maintenant à Mme Bennett.
Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Monsieur le président, ce n'est pas seulement la loi qui fait problème, ce sont les ressources et c'est une des questions qui ne cesse de revenir sur le tapis. Si les provinces avaient les ressources nécessaires pour prendre les mesures qui s'imposent pour ces jeunes, les résultats seraient meilleurs. Comment pouvons-nous modifier la loi tout en demandant des ressources adéquates? C'est la même chose pour la garde des enfants et les visites aux enfants. Le système a besoin de ressources. Comment, en tant que comité, pouvons-nous faire en sorte que cela se produise?
J'ai une autre question.
Mme Catherine Latimer: Vous faites une excellente remarque qui a d'ailleurs été prise en compte par le cabinet au moment de la mise au point de cette nouvelle stratégie. Comme beaucoup d'entre vous le savez, le budget a permis d'affecter beaucoup de ressources aux questions relatives à la justice applicable aux jeunes, dès le présent exercice. Nous avons reçu 206 millions de dollars de plus pour la justice applicable aux jeunes et probablement 400 millions de dollars pour la phase de mise en oeuvre de six ans. Il est important d'utiliser ces ressources avec sagesse pour bénéficier du soutien des programmes et tirer parti des personnes formées et prêtes à mettre en oeuvre cette nouvelle loi, ainsi que pour pouvoir appliquer le régime de justice pour les jeunes comme il le faut.
Je peux vous donner plus de détails sur les négociations de partage de coûts avec les provinces et sur la façon dont nous cherchons à les faire participer à la mise en oeuvre de la loi, principalement parce qu'elles sont clairement responsables de l'administration de la justice à cet égard.
Des ressources supplémentaires sont bien sûr mises à la disposition des compétences pour leur permettre de préparer le processus de mise en oeuvre de cette nouvelle loi. Nous avons également des ressources supplémentaires pour appuyer l'orientation basée sur la connaissance de la justice applicable aux jeunes, c'est-à-dire la recherche, les projets pilotes, du matériel de formation pour les intervenants, des partenariats, le développement des capacités communautaires autochtones ainsi que l'éducation juridique du public.
Je sais que le comité a fait d'énergiques recommandations au sujet de l'éducation et de l'information des gens en matière de justice applicable aux jeunes; des ressources ont été prévues pour assurer l'éducation juridique du public nécessaire dans le contexte de ce projet de loi.
Le président: Une question rapide.
Mme Carolyn Bennett: Comme je n'ai pas encore siégé au sein de ce comité, j'imagine qu'il faut que je comprenne un peu mieux pourquoi lorsque l'on présume qu'un jeune peut être traité comme un adulte, c'est au jeune en question de prouver qu'il doit être assujetti à la peine applicable aux jeunes plutôt qu'à celle applicable aux adultes.
Mme Catherine Latimer: Je crois que cela nous amène à la question de la gravité de l'infraction commise. Si c'est une infraction désignée, c'est-à-dire une infraction qui tombe dans la catégorie des plus graves—meurtre, tentative de meurtre, homicide involontaire coupable et agression sexuelle grave—le fait est que ces infractions sont suffisamment graves pour que l'on se demande si les peines prévues par le système de justice applicable aux jeunes sont suffisantes pour tenir le jeune responsable. C'est une disposition portant inversion de la charge de la preuve, si bien que le jeune doit réfuter la disposition voulant que des peines applicables aux adultes conviennent peut-être mieux vu la gravité de l'infraction commise.
D'après notre expérience, dans le cas des jeunes de 16 et 17 ans—cela s'est effectivement produit—cette disposition est réfutée dans les cas appropriés, et seules les infractions les plus graves finissent par faire l'objet de peines applicables aux adultes. C'est donc au jeune en cause de réfuter cette disposition dans le cas d'infractions suffisamment graves, mais dans les autres cas, cette réfutation n'est pas quelque chose d'impossible.
Le président: Merci beaucoup.
Comme la question des ressources va se poser de nouveau et qu'elle est essentielle pour les résultats, peut-être pourriez-vous remettre aux membres du comité une note relative à la nature et à l'importance de ces dispositions pour que nous soyons tous au courant des ressources supplémentaires qui ont été prévues pour cet exercice.
Mme Catherine Latimer: Certainement.
Le président: Monsieur Bellehumeur.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Madame Latimer, depuis combien de temps êtes-vous avocate-conseil et directrice de Justice applicable aux jeunes?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: J'occupe ce poste depuis un peu plus de deux ans.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Que faisiez-vous avant cela?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Avant, je travaillais au Bureau du Conseil privé où j'étais conseillère en matière de justice et d'affaires juridiques. Avant cela, j'ai débuté ma carrière de fonctionnaire au ministère du Solliciteur général dans le domaine de la justice applicable aux jeunes. J'y ai passé plusieurs années et j'ai été détachée pendant un an au Manitoba. Avant cela, j'ai fait des études comparatives dans le domaine de la politique relative à la justice applicable aux jeunes à l'Institut de criminologie de Cambridge. Avant cela, j'ai fait des études de droit à l'université Queen's.
[Français]
Des voix: Ah, ah!
M. Michel Bellehumeur: Vous pouvez rire. C'est bien comique. Connaissez-vous le Centre communautaire juridique de Montréal, la Commission des services juridiques, le Conseil permanent de la jeunesse, l'École de criminologie de l'Université de Montréal, l'Institut Philippe-Pinel à Montréal, l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec, qui travaille au niveau des jeunes contrevenants, la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux, l'Association des centres jeunesse du Québec, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, le Bureau des substituts du procureur général? Est-ce que vous avez discuté avec eux? Est-ce que vous discuté également avec l'Association des avocats de la défense du Québec, avec la Société de criminologie du Québec, avec l'Association canadienne de justice pénale, avec la Ligue pour le bien-être de l'enfance du Canada, avec le Regroupement des organismes de justice alternative du Québec? En voulez-vous d'autres? Il y a une trentaine d'organismes québécois qui appliquent quotidiennement la Loi sur les jeunes contrevenants et qui disent non, madame, à la loi que vous vantez et dont vous dites qu'elle a toute la flexibilité nécessaire. Vous avez dit à M. McKay que le Québec aurait toute la flexibilité nécessaire pour faire ce qu'il voulait avec la loi, pour continuer son approche, comme s'il n'y avait pas de modifications. Tout ce beau monde que je vous ai nommé, madame Latimer, que vous n'avez peut-être pas eu le temps de rencontrer parce que cela ne fait pas très longtemps que vous vous occupez spécifiquement de la Loi sur les jeunes contrevenants, dit: «Non, on ne peut pas faire ce qu'on veut, car il n'y a pas la flexibilité nécessaire.» C'est un discours politique, madame. Il me semble que vous êtes une permanente. Vous n'êtes pas du cabinet de la ministre, du volet politique; vous êtes au niveau des fonctionnaires. Je ne voulais pas vous piéger. Je voulais juste savoir si vous étiez dans le système depuis longtemps, et vous semblez l'être. Comment expliquez-vous, madame, que personne au Québec ne croie à la flexibilité de cela? Ce sont des avocats. Il y en a parmi eux qui s'occupent des jeunes contrevenants depuis beaucoup plus longtemps que vous. Il y en a qui sont des criminologues de longue date, des professeurs émérites qui font des conférences partout dans le monde sur l'approche qu'on doit adopter avec les jeunes. Tous ces gens vous disent qu'il n'y a pas de flexibilité. Ils vous disent de ne pas toucher à la loi, car c'est dans son application qu'il y a un problème.
• 1220
Pour ce qui est de l'argent, on peut en parler.
Il y a une facture de 81 millions de dollars
que le fédéral n'a
pas payée au Québec parce que ce dernier met en
application la Loi sur les
jeunes contrevenants. Comment expliquez-vous la
flexibilité dont vous parlez, madame Latimer?
Mme Lisette Lafontaine (avocate-conseil, Justice applicable aux jeunes, ministère de la Justice): Monsieur Bellehumeur, si vous le voulez, je pourrais...
M. Michel Bellehumeur: Oui, mais elle est directrice et c'est elle qui parle depuis le début.
[Traduction]
Le président: Puis-je simplement vous rappeler que vous avez un tour de trois minutes. J'essaie d'être le plus ouvert possible, si bien que j'aimerais entendre la réponse avant de poursuivre.
[Français]
Mme Lisette Lafontaine: Nous savons très bien que les groupes que vous avez mentionnés ont des problèmes. En fait, nous le savons tellement bien que j'ai pris contact avec la plupart de ces groupes l'été dernier pour leur demander de me rencontrer afin que nous puissions approfondir leurs problèmes et voir s'il n'y aurait pas moyen de les résoudre et de suggérer des accommodements à inscrire dans la loi.
Malheureusement, ils ont tous refusé de me rencontrer en disant qu'ils avaient des problèmes quant à la philosophie de la loi, qu'il était inutile de discuter de leurs problèmes et qu'ils voulaient rendre leur position publique. Je leur ai dit que j'étais prête à les rencontrer quand ils le voudraient, mais je n'ai pas entendu parler de qui que ce soit depuis.
M. Michel Bellehumeur: Regardez seulement le vocabulaire utilisé dans la nouvelle loi. C'est le même vocabulaire que dans le Code criminel.
[Traduction]
Le président: Monsieur Bellehumeur, vous allez avoir l'occasion...
[Français]
M. Michel Bellehumeur: On parle d'«infliger une peine». «Infliger un peine» a toute une signification en français. C'est très différent de ce qu'il y a dans la loi actuelle.
À quoi sert-il de discuter avec vous? Vous avez une idée. Vous avez décidé de passer un message: il faut adopter cette loi. Ce serait pour toute la loi. Si vous voulez qu'il y ait de la flexibilité, rédigez un article de loi comme celui qu'on va proposer, qui préciserait que la Loi sur les jeunes contrevenants continue d'être appliquée au Québec, parce que nous sommes une société distincte. Utilisons la résolution du gouvernement pour permettre au Québec de continuer à appliquer la Loi sur les jeunes contrevenants telle qu'on la connaît aujourd'hui. Telle est la flexibilité qu'on recherche. À part cela, ne parlez pas de flexibilité. Il n'y en a pas.
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Je sais que le temps file, monsieur le président...
Le président: Nous allons poursuivre, si vous permettez.
Mme Catherine Latimer: Certainement, nous nous ferons un plaisir de passer en revue les éléments de flexibilité, de souplesse du projet de loi. Nous avons fait beaucoup de travail de documentation et de préparation...
Le président: Beaucoup de questions vont être posées et nous essayons de respecter certaines limites de temps. Beaucoup des témoins qui ont été recommandés vont comparaître au cours de l'exercice.
Madame Carroll.
Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Parlez- moi des éléments de souplesse, madame Latimer.
Mme Catherine Latimer: À tous les stades de la loi, une certaine souplesse est prévue pour permettre à ceux qui appliquent la loi de faire ce qui convient dans leurs compétences et selon leur orientation philosophique. Pour commencer, il n'est absolument pas obligatoire de passer par le système de justice pénale ou le système de justice applicable aux jeunes.
Si le problème du jeune provient essentiellement de besoins ou de difficultés qui nécessitent un genre de traitement, il est parfaitement possible dans le cadre de notre loi d'assujettir le jeune à des mesures extrajudiciaires ou de le renvoyer à un régime entièrement différent, comme par exemple, le régime de protection de l'enfance, qui peut être plus approprié.
Je pourrais demander à chacun de mes collègues de passer en revue les éléments de souplesse applicables aux parties de la loi dont ils sont responsables. Cela vous donnerait une certaine idée de la portée de cette souplesse. Nous avons bien sûr demandé aux rédacteurs de la loi de garder l'idée de cette souplesse à l'esprit. Nous avons 17 pages de documentation qui indiquent où se retrouvent les éléments de souplesse dans la loi, si bien qu'il nous est très facile de répondre à cette question.
Dick, voulez-vous commencer?
M. Dick Barnhorst: Les mesures initiales, la partie extrajudiciaire, prévoient un pouvoir discrétionnaire considérable. En fait, pour situer le contexte, je ferais remarquer que de l'avis de certains—qui est un avis diamétralement opposé—le projet de loi est trop souple, il ne donne pas suffisamment d'indications pour ce qui est de la déjudiciarisation de certaines affaires. Par conséquent, je crois que la plupart des lecteurs considèrent que les mesures initiales prévues par le projet de loi sont très souples.
• 1225
Tout d'abord, ce que l'on appelle les sanctions
extrajudiciaires remplace les mesures de rechange. C'est
essentiellement un changement d'appellation, qui retient l'approche
fondamentale de la Loi sur les jeunes contrevenants et qui signifie
que c'est à chaque province de décider si des sanctions
extrajudiciaires sont possibles ou non et que c'est à chaque
province de déterminer les cas d'infractions et de contrevenants
auxquels conviendraient ces mesures. Par exemple, les critères
d'admissibilité applicables dans une province relèvent complètement
de l'autorité de la province en question.
En outre, toutes les nouvelles options prévues dans le cadre des mesures initiales peuvent être offertes, à la discrétion des provinces, y compris le programme de mise en garde par la police. Ce programme a donné d'excellents résultats en Angleterre et s'est révélé très efficace dans le cas des jeunes qui ont maille à partir avec la justice. C'est à la province de décider si elle veut offrir cette option ou non.
Le concept des groupes consultatifs dont Catherine faisait mention un peu plus tôt se rapporte aux mesures initiales, sans toutefois en faire partie. Ce concept garantit beaucoup de souplesse puisque chaque province peut décider comment un décideur—par exemple un agent de police ou un procureur—peut renvoyer l'affaire à un groupe consultatif. Toute l'organisation des groupes consultatifs relève presque entièrement de la province—le genre de conseils, le nombre des participants et les modalités adoptées.
L'efficacité de ces mesures initiales dépend fortement de la volonté des provinces de mettre en oeuvre l'esprit de la loi qui vise à diminuer le nombre de jeunes qui passent devant les tribunaux, car il existe des façons plus efficaces de résoudre ces affaires en dehors du processus judiciaire. Je pense qu'il est juste de dire que les mesures initiales sont en fait un cadre qui accorde un pouvoir discrétionnaire considérable à la province en ce qui concerne l'adoption de mesures qui, selon elle, sont pertinentes.
M. Robert Lutes: Pour ce qui est des mesures judiciaires, j'aimerais ajouter que beaucoup des dispositions sont identiques à celles de la Loi sur les jeunes contrevenants. Toutefois, nous avons eu plusieurs recommandations constructives du Québec que nous avons incorporées dans certaines dispositions. Par exemple, dans le cas des déclarations, à l'heure actuelle, un jeune a le droit de faire une déclaration, lorsqu'il est accompagné d'un avocat et d'un parent en même temps. Au Québec, il est arrivé qu'un parent soit coaccusé ou fasse l'objet d'une enquête et on a jugé que sa présence n'était pas pertinente. Nous avons donc englobé cette suggestion et je crois qu'elle est fort utile. Il y en a eu quelques autres également.
Les articles relatifs aux peines applicables aux adultes comportent également des éléments de souplesse. Pour ce qui est de l'assujettissement à la peine applicable aux adultes, si le procureur général décide d'y passer outre, il n'a qu'à le dire; ainsi l'affaire continue de relever du système de justice applicable aux jeunes. Il y a plus d'exemples, mais...
Mme Paula Kingston (conseillère juridique, Justice applicable aux jeunes, ministère de la Justice): On retrouve beaucoup de souplesse dans le système de placement sous garde et de surveillance. Je pense en particulier à la décision relative au niveau de placement sous garde. Selon le projet de loi, il s'agit d'une décision administrative qui peut être prise soit par des agents responsables en fonction d'un ensemble de critères et de protection des droits à l'application régulière de la loi, soit par le juge du tribunal pour adolescents. Cette souplesse, cette option, a été prévue à la demande des représentants officiels du Québec.
Par ailleurs, lorsqu'il est question de transférer un jeune—qui purge une peine applicable aux jeunes dans un établissement pour les jeunes—qui arrive à l'âge adulte, c'est au directeur provincial de faire à la cour une demande de transfert dans un établissement pour adultes. C'est véritablement à la province de décider si ce transfert doit avoir lieu ou non. Il s'agit à mon avis des deux principaux éléments de souplesse à cet égard.
[Français]
Mme Lisette Lafontaine: En ce qui concerne la publication des noms, la loi prévoit, à l'article 64, que lorsque le procureur renonce à la peine pour adulte dans le cas d'une présomption, le juge accorde automatique l'interdit de publier, ce qui augmente la protection de la vie privée de l'enfant.
[Traduction]
Le président: Mme Carroll peut poser une autre question, car elle n'a pris que trois secondes pour sa première question.
Mme Aileen Carroll: D'accord, merci, j'ai tendance à parler rapidement.
Si aucun des groupes du Québec—qui, comme on nous l'a dit, ont beaucoup d'expérience dans le domaine des jeunes et de la justice—n'a voulu vous rencontrer, madame Lafontaine, est-il possible qu'ils ne connaissent pas aussi bien les éléments de souplesse que vous nous avez décrits ce matin?
Mme Lisette Lafontaine: C'est possible. Comme je ne les ai pas rencontrés, il m'est difficile de dire s'ils connaissent bien la loi. C'est quelque chose que j'aurais voulu faire au cours de l'été, discuter avec eux pour avoir la certitude que nous comprenons les dispositions de la même façon.
Le président: Monsieur Cadman, vous avez trois minutes.
M. Chuck Cadman: Ma question est très rapide.
Y a-t-il quelque chose dans cette loi qui porte sur les adultes? Y a-t-il quelque chose dans cette loi qui reprend le concept—que l'on retrouve dans l'ancienne LJC—de la participation d'un adulte à la délinquance d'un mineur? Y a-t-il quelque chose dans cette loi qui vise des questions comme celle-ci?
Mme Catherine Latimer: Vous êtes au courant de l'article qui traite de la détention avant le procès, de la mise en liberté avant le procès, et de l'obligation de l'adulte digne de confiance...
M. Chuck Cadman: Ma question porte plutôt sur les cas où un adulte contribue à l'infraction, comme dans le cas des très jeunes adolescents qui font du trafic de drogues.
Mme Catherine Latimer: Une des questions soulevées à ce sujet, c'est que des gens faisaient sortir des jeunes de la détention avant le procès pour les ramener dans la rue et les encourager à participer à d'autres activités peu recommandables. Selon nous, une telle disposition permettrait de régler ce genre de conduite également. Comme vous le savez toutefois, elle s'applique lorsque l'adulte digne de confiance a pris un engagement devant la cour. En pareils cas, cette disposition permet de garantir que la conduite de l'adulte en question est bonne et correspond à l'engagement qu'il a pris au sujet de son comportement à l'égard du jeune en question. À part cela, il n'y a rien d'autre.
Dick, avez-vous autre chose à ajouter?
M. Dick Barnhorst: Je voulais simplement ajouter que lorsque nous nous sommes penchés sur cette question, nous nous sommes souvenus du paragraphe 23.1 du Code criminel, très utile à cet égard. Si un adulte conseille, amène ou incite un jeune de moins de 12 ans à commettre un crime, par exemple, il peut être considéré comme complice, même si le jeune, l'enfant, ne peut être déclaré coupable. C'est, à mon avis, un point pertinent qui nous a paru utile lorsque nous nous sommes penchés sur cette question.
Le président: Merci.
Monsieur Alcock.
M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.
Les observations que vous avez faites un peu plus tôt au sujet des changements relatifs aux enfants plus jeunes m'ont beaucoup intéressé et je suis tout à fait d'accord avec les explications de M. Barnhorst.
Vous avez parlé des organismes de protection de la jeunesse et des conversations que vous avez eues avec les directeurs de ces organismes dans tout le pays. Pouvez-vous nous préciser comment tout cela pourrait fonctionner, quels rapports pourraient être établis?
M. Dick Barnhorst: Voulez-vous parler des rapports entre le système de justice pénale applicable aux jeunes et les organismes de protection de la jeunesse?
M. Reg Alcock: Oui, c'est l'une des observations qui a été faite—je dois vous dire que j'étais directeur d'un organisme de protection de la jeunesse lorsque la loi d'origine a été adoptée, si bien que c'est une question qui m'a toujours intéressé.
Pour les enfants qui ont moins de 12 ans, je suis complètement d'accord avec ce que vous avez dit plus tôt au sujet du fonctionnement de l'ancien système dans leur cas. Vous avez également fait mention de l'établissement de meilleurs rapports entre les organismes de protection de la jeunesse et la justice pénale en ce qui concerne les options que l'on pourrait offrir aux enfants plus jeunes.
Mme Catherine Latimer: Nous essayons en fait de consolider nos relations ou nos partenariats avec des secteurs non traditionnels. Nous organisons des tables rondes ou des séances de brainstorming avec des représentants de divers secteurs. En novembre dernier, nous avons eu une table ronde avec le secteur de l'éducation qui souhaite intervenir de manière constructive et utile dans le domaine de la justice applicable aux jeunes, à partir de la prévention jusqu'à la réinsertion des jeunes dans les écoles et dans les collectivités.
Nous allons avoir une de ces tables rondes lundi prochain avec les professions d'entraide. Nous allons y aborder précisément la question de la collaboration entre les organismes de protection de l'enfance, les professions d'entraide et le système de justice applicable aux jeunes.
Nous devrions en tenir une autre le lundi suivant, le 13 décembre, qui portera sur les arts et les loisirs afin de voir si nous pouvons regrouper ou non ces éléments.
Le but de cette table ronde réunissant des membres de la profession visant à secourir autrui est fondamentalement d'améliorer et de renforcer la collaboration entre eux pour encadrer l'enfant. Nous le faisons parce que le système de justice pénale ne permet pas de répondre à un grand nombre des besoins et des intérêts des jeunes.
• 1235
Nous lisons souvent ces horribles rapports de coroner et la
réponse est qu'aucun système n'est parvenu à aider ce jeune. Je
pense qu'il faut à tout prix coordonner davantage nos efforts,
qu'il s'agisse du système de sécurité sociale, de la stratégie
touchant les pensions alimentaires pour enfants de même que de
notre propre système de justice applicable aux jeunes, de manière
à nous donner les mêmes objectifs et à éviter que les jeunes ne
soient renvoyés d'une discipline à l'autre et tombent entre les
mailles du filet. Nous essayons de mettre en place un meilleur
filet de sécurité sociale entre les deux.
M. Reg Alcock: J'aimerais faire une brève observation. Il s'agit de questions très complexes—je n'ai pas besoin de vous le dire; vous en faites vous-mêmes l'expérience. Ce qui est sûr d'après les échos que j'en ai dans l'Ouest, là où je suis davantage au courant de ce qui se passe, c'est qu'ils se réjouissent de la relation qu'ils ont établie avec vous dans le cadre de l'élaboration de cette stratégie. Et, en toute franchise, je suis très impressionné du travail que vous avez abattu jusqu'à maintenant. Je suis impatient de voir quelle sera la réaction alors qu'ils recomparaîtront devant nous.
Mme Catherine Latimer: Merci beaucoup.
Le président: Merci.
Sur ce, je cède la parole à M. Bellehumeur.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: J'aimerais en tout premier lieu rassurer Mme Lafontaine, qui semble dire qu'au Québec, on critique le projet de loi sans avoir vu le texte de loi ou la documentation pertinente du gouvernement. Je vous rassure: ce n'est pas cela. Au Québec, on est très au courant du projet de loi et de toute la documentation, et on vous suit. D'ailleurs, je peux vous assurer que les gens du Québec seront au courant de tout ce qui se dit à ce comité-ci et qu'ils vont l'étudier. Soyez assurée de cela.
J'invite les députés à lire ce qu'ils ont probablement dans leur courrier actuellement, c'est-à-dire un mémoire de la coalition québécoise. Je siège ici depuis 1993, et c'est la première fois que je vois un mémoire aussi détaillé. Je pense qu'ils ont investi beaucoup dans cela. Madame Carroll, vous allez constater, en lisant ce mémoire, qu'ils sont très au courant de la nouvelle loi.
Pour parler de flexibilité, madame Latimer, comment conciliez-vous la flexibilité et l'alinéa 37(2)b), où on parle d'«infliger», conformément au principe, et d'harmonisation des peines. On dit:
-
...la peine doit être semblable à celle qui serait
infligée à d'autres adolescents pour la même infraction
commise dans des circonstances semblables;
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Il va sans dire que nous avons réfléchi très sérieusement à cet alinéa pour diverses raisons, y compris les préoccupations que le Québec avait soulevées. Je voudrais bien que Dick réponde à votre question, mais simplement pour que vous le sachiez, le mot harmonisation est utilisé ailleurs et ne veut pas dire que c'est la même peine qui serait infligée à tout le monde. D'après la Cour suprême, on laisse ainsi suffisamment de marge de manoeuvre pour que l'on comprenne au sein d'une région ce qu'est une peine juste et si elle est juste par rapport à d'autres à l'intérieur de cette région où des peines ont été infligées.
Mais je vais m'en remettre à Dick qui voudrait peut-être vous renseigner davantage sur une disposition précise.
M. Dick Barnhorst: Je crois que Catherine a pour ainsi dire répondu à la question, mais je pourrais simplement revenir à ce dont il s'agit. Cette disposition traduit une croyance, une politique ou un principe de précision fondamentale et cela a trait à la question de l'équité, savoir que les infractions semblables doivent être traitées de la même manière. Comme l'a dit Catherine, cette disposition se trouve à l'heure actuelle dans le Code criminel et s'applique aux adultes. Elle n'a pas donné lieu au genre de problèmes que craignent certaines personnes. Comme l'a dit Catherine, les tribunaux en sont venus à la conclusion que cette disposition donne une grande marge de manoeuvre à ceux qui l'appliqueront afin de laisser la place aux variantes régionales. Semblable ne veut pas dire pareil et cela laisse beaucoup de place à l'élaboration de peines appropriées qui tiennent compte de certaines variantes d'une région à l'autre.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Êtes-vous en train de dire que dans un procès de jeune contrevenant au Québec, par exemple dans un cas de meurtre, le procureur de la Couronne ne pourra pas citer ou donner en jurisprudence des décisions que la Cour d'appel de l'Ontario aura rendues sur un sujet semblable pour imposer des peines? Est-ce bien ce que êtes en train de dire?
M. Dick Barnhorst: Non, ce n'est pas ce que je suis en train de dire, mais je pense que cela se passe maintenant.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Donc, l'harmonisation des peines aura une influence sur les tribunaux québécois. Les peines qu'on imposera pour un crime X en Ontario ou à Vancouver vont influencer un jour ou l'autre les peines qu'un juge va imposer au Québec aux jeunes contrevenants pour un crime semblable commis dans des circonstances semblables. Où est-elle, la flexibilité?
[Traduction]
M. Dick Barnhorst: Ce que je dis c'est que les faits prouvent que vous n'avez pas raison de vous inquiéter. Les tribunaux en sont venus à la conclusion que la marge de manoeuvre est assez grande pour tenir compte des variantes d'une région à l'autre.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Voyons donc!
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Mme Catherine Latimer: De plus, si elles ont les répercussions dont vous parlez, et nous n'en sommes pas tout à fait certains, mais nous en doutons, il y a de grandes chances pour que les autres provinces et territoires s'inspirent du Québec. Comme le Québec fait subir un examen préalable à un bon nombre des délinquants ayant commis des infractions moins graves, on y a tendance à infliger des peines un peu plus sévères qu'ailleurs. Ainsi, si l'on se dirige vers des peines plus longues, ce qui arrivera vraisemblablement, les autres provinces et territoires viendraient examiner de plus près de la durée des peines au Québec.
Le président: Il vous reste une autre question.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: À l'heure actuelle, où, dans la Loi sur les jeunes contrevenants, y a-t-il une disposition semblable où l'on parle d'harmoniser les peines? Où dit-on que la peine doit être semblable à celle qui serait infligée à d'autres adolescents pour la même infraction commise dans des circonstances semblables? Où, à l'heure actuelle, parle-t-on de cela dans la Loi sur les jeunes contrevenants?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: C'est une des principales raisons pour laquelle nous cherchions des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants, parce que les conséquences de la détermination de la peine prévue dans la Loi sur les jeunes contrevenants par rapport aux adultes sont tout à fait iniques. Il y est question d'une responsabilité atténuée et en ce qui a trait aux sept infractions les plus courantes les jeunes ont tendance à se voir infliger des peines plus longues que des adultes dans des circonstances semblables.
Ainsi, non, vous ne le trouveriez pas dans la Loi sur les jeunes contrevenants et une des lacunes de cette loi consiste à ne pas avoir un système de principes qui mène à l'équité fondamentale dans l'application de la peine pour les jeunes.
Le président: Merci.
Avant d'oublier, il y a eu un ou deux renvois à des décisions du tribunal et des renvois au tribunal. Dans un premier temps, j'aimerais que nous nous familiarisions davantage avec cela.
Dans un deuxième temps, il a été question plus tôt de 17 pages d'exemples où les tribunaux ont fait preuve de souplesse. Je ne sais pas si je l'ai fait à ce moment-là, mais je veux dire clairement que j'en fais la demande maintenant.
Nous passons à M. Maloney.
M. John Maloney: Le Comité de la justice s'est déplacé d'un bout à l'autre du pays pour examiner le système de justice pour les jeunes et, en ce qui a trait à la question de la responsabilité parentale, des arguments ont été présentés de part et d'autre.
Dans cette mesure législative, on laisse entendre la possibilité de recouvrer les honoraires auprès des père et mère. Comment envisageriez-vous une telle situation et ne craignons-nous pas ainsi d'élargir le fossé entre les parents et l'enfant, dans ce cas? Peut-être dans un autre cas, aurait-il été possible d'introduire cette responsabilité parentale par d'autres moyens dont vous n'avez pas tenu compte, et pour quelles raisons?
Mme Catherine Latimer: Nous tenions beaucoup à encourager les parents à jouer un rôle constructif au sein du système de justice applicable aux jeunes. Un des objectifs des groupes consultatifs, c'est d'essayer de faire intervenir les parents, de les intégrer à la solution pour qu'ils puissent participer activement au programme de réadaptation et de réinsertion suivi par leur jeune.
Il arrive souvent que les parents de jeunes qui ont une conduite désordonnée aient du mal à comprendre comment avoir la main haute sur eux. Ils lèvent en quelque sorte les bras de désespoir et disent qu'il n'y a rien à faire avec eux.
Nous croyons qu'il faut les intégrer au processus, leur fournir, s'ils sont d'accord, l'aide et les outils qui permettront aux parents et au jeune de mieux se comprendre, de tenter de corriger ces comportements qui se sont révélés problématiques tant pour la société que pour le jeune lui-même.
Pour ce qui est d'imputer la responsabilité aux père et mère en ce qui a trait au comportement du jeune, nous faisons appel pour le jeune à un modèle qui fait en sorte que le jeune rende compte de ses actes et en soit responsable. Si le jeune doit être tenu responsable des infractions qu'il a commises et en rendre compte, il est alors très difficile de transférer indirectement la responsabilité au parent.
Ce que nous disons en quelque sorte, c'est que si vous avez commis une infraction, peu importe les influences familiales, vous en êtes l'auteur et vous devez en rendre compte de même qu'en assumer la responsabilité. Néanmoins, la mesure d'intervention sociale dans un ce cas doit tenir compte de la conduite et des problèmes sous-jacents, pour essayer de s'attaquer à l'ensemble des problèmes qui mènent à ce comportement particulier. Mais la responsabilité parentale directe n'est pas incluse dans cette mesure législative.
• 1245
Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet Dick?
M. Dick Barnhorst: Catherine a bien répondu, mais j'avais cru que vous vous vouliez savoir entre autres si les honoraires versés à l'avocat sont recouvrés auprès du jeune. Cette disposition dans le projet de loi dit pour ainsi dire que cette loi n'a pas pour effet d'empêcher un service d'aide juridique provincial, par exemple, d'essayer de recouvrer les honoraires versés à l'avocat. Ce n'est pas absolument exigé. Il s'agit de quelque chose qui pourrait se faire maintenant. On précise simplement que c'est dans le domaine du possible.
Vous êtes peut-être au courant d'une décision de la Cour d'appel de l'Ontario qui remonte à quelques semaines et qui portait sur la question de savoir si le tribunal devait évaluer les ressources des pères et mères. Il s'agit donc d'une question actuelle. Le projet de loi précise simplement que c'est permis par les provinces où il existe un service d'aide juridique.
M. John Maloney: Une fois de plus, il s'agit d'une question de souplesse, je suppose.
Le président: Merci beaucoup.
Je vais maintenant passer la parole à M. MacKay étant donné qu'il n'a pas encore eu l'occasion de poser des questions aux témoins.
M. Peter MacKay: Merci, monsieur le président.
Je remercie les membres du groupe de discussion. Je m'excuse de mes entrées et de mes sorties en vitesse. Le fait est qu'il y a un autre projet de loi à caractère juridique devant la Chambre. Je vous prie également de m'excuser si ma question a déjà été posée.
Les principes directeurs de cette mesure législative tombent juste à mon avis: une plus grande importance accordée aux mesures de rechange, un modèle de justice réparatrice, une intervention précoce ainsi que des programmes visant à repérer les jeunes à risque. Je conviens sans réserve qu'il s'agit là d'objectifs louables.
Mais ma question découle de réserves qui ont été émises—et je suis sûr que vous en avez entendu parler—sur le programme de financement actuel et le fait que certaines provinces canadiennes financent entre 60 et 70 p. 100 de l'ancienne Loi sur les jeunes contrevenants et son administration. Par conséquent, l'accent étant mis dans ce projet de loi sur l'apport en première ligne et une plus grande intervention de la part des services de maintien de l'ordre et des organismes de services sociaux, qui sont déjà surchargés, comment conciliez-vous les deux? Comment dites-vous essentiellement: «Faites plus, avec moins»?
Mme Catherine Latimer: C'est une excellente question pour laquelle ce comité nous a entre autres guidés. Ce comité a demandé qu'une plus grande partie de nos fonds soit consacrée au départ aux ressources communautaires plutôt qu'au placement sous garde. Après avoir discuté et négocié avec les provinces, nous avons accepté l'argument voulant que les coûts de la garde soient essentiellement fixes. Nous ne pouvons leur demander de but en blanc de commencer à retirer l'argent de la garde pour le consacrer à ces mesures de première ligne ou communautaires.
Nous avons donc essayé d'obtenir, et nous y sommes parvenus, ce que nous appelons un préfinancement, ce qui permet d'offrir un apport de première ligne dans la communauté. Cela mènerait avec un peu de chance à des économies en ce qui a trait à l'aspect correctionnel et permettrait aux autorités de réinvestir l'argent ainsi épargné dans des programmes communautaires de première ligne. Nous avons obtenu 125 millions de dollars sur une période de six ans.
Les provinces disposent donc d'un large éventail de ressources pour trouver des façons plus modernes ou plus constructives de s'occuper de ces jeunes. Nous avons entendu ces arguments et nous avons essayé d'en tenir compte en prenant des dispositions en matière de financement.
M. Peter MacKay: Je veux simplement bien comprendre, alors. Vous dites que cette idée de réaffectation des ressources a été examinée, mais n'a pas été retenue?
Mme Catherine Latimer: Non.
M. Peter MacKay: Vous n'allez pas réduire les budgets du secteur correctionnel? Ces sommes sont fixes?
Mme Catherine Latimer: Non, je dirais que ce n'est pas le cas. J'entrerais plus dans les détails, mais nous sommes en train de négocier à l'heure actuelle avec les provinces et les territoires sur des ententes de partage des coûts à long terme.
Il va sans dire que nous avons pris note du fait que, indépendamment de nos ententes de base, nous avons mis au point... Il y aura des ajouts aux ententes de base, y compris certains ajustements apportés aux priorités qu'elles contiennent, et nous sommes en train de les négocier. Mais à ces ententes de base, s'ajoutent 125 millions de dollars pour aider à mettre en place des programmes de première ligne.
M. Peter MacKay: Mais vous savez, et je pense que convenez avec moi que l'objectif initial de l'ancienne loi—et je dirais comme de juste—était que la responsabilité du financement serait partagée à part égale en ce qui a trait à l'administration de ces nouveaux programmes. Nous ne parlons pas de nouveaux programmes dans le contexte du système judiciaire. Nous parlons de la GRC et des forces policières municipales à qui il est demandé de prendre en main beaucoup de choses dont elles ne s'occupaient pas auparavant.
• 1250
À une séance de discussions ouvertes auxquelles a participé
M. Lutes en Nouvelle-Écosse, quelqu'un a dit qu'il s'agissait là
pour les services de police d'une justice à la Matt Dillon—à
savoir qu'on leur demande maintenant d'offrir davantage de services
de maintien de l'ordre sur le terrain, ce qui leur demandera plus
de temps, plus d'efforts et, avec un peu de chance, une plus grande
discrétion.
Je reformule donc ma question: en tenez-vous compte dans la mise au point des programmes court terme ou s'agit-il d'un objectif à long terme qui exigera beaucoup d'intégration et, avec un peu de chance, un paiement de contrepartie de la part du gouvernement fédéral?
Mme Catherine Latimer: Je devrais dire les deux. Nous nous en occupons pour le court terme également, plus particulièrement en ce qui concerne le financement provisoire, là où nous essayons d'obtenir des changements immédiats et de mettre sur pied le système et à le roder rapidement. De même, il existe un financement permanent et plus systématique sur le long terme.
Nous avons essayé, en conformité de l'entente-cadre sur l'union sociale, d'apporter une certaine stabilité au financement à long terme. Nous savons donc qu'il y aura, à tout le moins, d'une année à l'autre, des hausses de 2 p. 100 en ce qui a trait aux ententes de base. La question est de savoir si nous pouvons... Nous négocions à l'intérieur de ces ententes-cadres l'utilisation que nous devrions faire de ces fonds.
Le président: Merci beaucoup, monsieur MacKay et madame Latimer.
Madame Carroll.
Mme Aileen Carroll: Merci, monsieur le président.
Vous avez parlé plus tôt, si je ne m'abuse, madame Latimer, d'aiguiller l'enfant exclusivement vers les services de protection de l'enfance...
Mme Catherine Latimer: Tout à fait.
Mme Aileen Carroll: ... et ce faisant, de ne même pas faire intervenir les aspects juridiques de la loi.
J'ai certaines doutes à cet égard parce que j'ai de véritables réserves à exprimer sur l'état du système de protection de la jeunesse. Ce sont pour moi de bonnes et de mauvaises nouvelles lorsque je vous entends parler ainsi. Je pense que, en ce qui concerne certains composantes de ce système, les choses ne tournent pas très rond en Ontario. Comme je ne faisais pas partie du Comité de la justice lorsqu'il a procédé à cette étude, je ne prétendrais pas connaître la situation dans les autres provinces.
Je vous demande de nous dire ce que vous percevez comme étant les atouts et les faiblesses de ce système. Je sais qu'il s'agit là d'une question assez vaste et je ne veux pas la laisser trop ouverte, mais j'aimerais que vous me disiez si vous croyez que le système suffira à la tâche prévue dans la nouvelle mesure législative.
Merci.
Mme Catherine Latimer: Vous soulevez là toute une question et je suis convaincue que d'autres témoins que vous entendrez voudront aussi en parler, je suis donc heureuse de vous offrir quelques...
Mme Aileen Carroll: Éclaircissements.
Mme Catherine Latimer: Éclaircissements, je l'espère.
Nous essayons d'atteindre de nombreux objectifs par l'entremise du système de justice pour les jeunes. De nombreux critiques ont soutenu qu'on ne devrait pas considérer le système de justice applicable aux jeunes comme étant le principal moyen d'offrir des programmes de traitement. Si un jeune est dans le besoin, cela n'a rien à voir avec le fait qu'il a commis ou non une infraction.
D'aucuns soutiendront qu'ils veulent être en mesure d'infliger une peine parce qu'ils veulent davantage de temps pour imposer un programme de traitement au jeune. D'autres sont d'avis que ce n'est pas utile et que l'accès à des programmes de traitement—bien-être de l'enfance, éducation et santé mentale—ne devrait pas être associé au fait que le jeune s'est vu ou non infliger une peine, que ces choses devraient être dissociées. C'est une des raisons pour laquelle nous voulons travailler en plus étroite collaboration avec nos autres partenaires.
Le problème qui se pose c'est que, si le jeune se retrouve dans le système de justice applicable aux jeunes et qu'on doit lui imposer une peine plus longue pour répondre à ses besoins, au bout du compte on punit le jeune dans le besoin. Si un jeune est victime de violence à la maison, on finit par le placer plus longtemps sous garde. Cela pose certains problèmes de justice la plus élémentaire. Ce n'est pas qu'il ne faille pas répondre aux besoins du jeune. La question qu'il faut se poser est la suivante: quel est le régime le plus approprié pour régler ces problèmes? Le système de justice pénale, un quelconque régime ou la création de partenariats?
Il est vrai que si les autres systèmes ne fonctionnent pas aussi bien que prévu, ils doivent être modifiés. Toutefois, les systèmes doivent, dans une certaine mesure, être indépendants l'un de l'autre. Ils doivent être distincts.
Beaucoup de personnes soutiennent que le placement sous garde ne constitue pas un moyen efficace de corriger ou de traiter les comportements délictueux.
Nous devons revoir le rôle du système de justice pour les jeunes. Évidemment, quand ils sont pris en charge par le système et qu'une peine leur est imposée, nous devons nous attacher à prendre toutes les mesures nécessaires pour répondre à leurs besoins. Or, à notre avis, le principe de responsabilité constitue un facteur contraignant. Les jeunes qui ont des besoins spéciaux ne se verront pas imposer des peines plus longues en fonction de la nature de l'infraction qu'ils ont commise. C'est le modèle que propose le projet de loi.
Mme Aileen Carroll: Est-ce que les programmes et ressources qui existent au Québec sont plus facilement disponibles, et donc plus efficaces? Est-ce pour cela qu'ils ont des réserves?
Mme Catherine Latimer: À notre avis, le nombre de jeunes ayant des problèmes de comportement et autres problèmes généraux, qui sont pris en charge par le système de protection de l'enfance semble plus élevé au Québec que dans certaines autres provinces. Je vais toutefois donner la parole à Lisette parce que je ne connais pas tellement bien le système en vigueur au Québec.
[Français]
Mme Aileen Carroll: Vous pouvez donner vos explications en français, madame.
[Traduction]
Mme Lisette Lafontaine: Je n'ai pas grand chose à ajouter. Nous n'avons pas effectué d'étude spéciale sur le système de protection de l'enfance au Québec. Je sais que le gouvernement du Québec a dit vouloir continuer d'appliquer la Loi sur les jeunes contrevenants parce que ses systèmes de protection de l'enfance et de justice pénale pour les adolescents sont très bien intégrés, et que le projet de loi risque de les affaiblir. C'est tout ce que je suis en mesure de vous dire à ce sujet.
Le président: Merci.
Monsieur Cadman.
M. Chuck Cadman: Je n'ai pas de questions à poser.
[Français]
Le président: Monsieur Bellehumeur.
M. Michel Bellehumeur: Pour nous aider à comprendre le pourquoi de la modification que vous voulez apporter au système de justice pour les adolescents, avez-vous des études ou des statistiques qui démontrent que la publication des noms a un effet sur la criminalité des jeunes? J'aimerais avoir des études sur ce sujet. Est-ce qu'il y en a?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Si je puis me permettre, on laisse entendre, entre autres, que la publication du nom va favoriser la réadaptation du jeune. Mais je n'en suis pas tellement certaine.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Quel est la motivation?
Mme Lisette Lafontaine: Toutes les règles qui concernent la publication des noms sont une sorte de balancing act qu'on fait pour concilier le droit à la liberté d'expression et le droit à la liberté de la presse avec le droit du jeune à la vie privée. C'est une réconciliation de deux droits qui semblent s'opposer. Dire que la publication du nom va aider à la réhabilitation n'est certainement pas un argument valable. Au contraire, il y a des preuves que cela peut nuire au jeune...
M. Michel Bellehumeur: Le stigmatiser.
Mme Lisette Lafontaine: ...en le stigmatisant. C'est pourquoi on limite considérablement les cas où on peut publier le nom. En gros, on peut actuellement le faire quand le jeune est transféré à la cour pour les adultes. Dans le projet de loi C-3, on prévoit qu'on pourra le faire dans le cas où il reçoit une sentence d'adulte.
On va continuer à protéger le nom des jeunes qui reçoivent une sentence spécifique d'adolescent. Dans le cas où la sentence d'adolescent est donnée pour l'une des cinq infractions désignées, le juge devra décider s'il y aura publication ou non.
M. Michel Bellehumeur: Je reviens à ma question du début, qui portait sur la déclaration de principe. Je pense que vous venez de nous donner la preuve qu'il y a effectivement un déplacement. En vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants, on s'occupait en tout premier lieu des besoins du jeune. C'était l'élément numéro un. C'est tout ce qu'on retrouve à l'article 3, au niveau de la déclaration de principe. Le numéro un, c'était le besoin des jeunes. Ensuite on regardait la protection de la société et on pensait qu'en investissant pour satisfaire aux besoins du jeune, la société serait protégée à long terme.
Vous venez de me répondre de façon très banale sur un seul point, et je pourrais vous en trouver plusieurs dans le projet de loi C-3. Uniquement au sujet de la publication des noms, vous venez de me dire que les règles n'ont pas été édictées en fonction du jeune, mais pour atteindre un meilleur équilibre entre ce qui se fait au niveau des droits, au niveau de la presse, au niveau de ceci et au niveau de cela. C'est justement pour cela que gens ne veulent pas s'asseoir avec vous pour négocier des accommodements, comme vous l'avez dit plus tôt.
• 1300
La philosophie numéro un, madame, c'est la protection
de la société et la circulation de l'information.
Ensuite, s'il
reste du temps et l'énergie, on voit aux
besoins du jeune.
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Bob, pouvez-vous nous donner le numéro de l'article de la Loi sur les jeunes contrevenants?
M. Robert Lutes: La déclaration de principes a été clarifiée en 1995, dans le cadre du projet de loi C-37. On y a rajouté l'alinéa (c.1), qui précise que l'objectif premier du système de justice pénale pour adolescents est de protéger la société en...
La question a fait l'objet de discussions. La Cour suprême du Canada a examiné ces principes, et on a tenté de clarifier l'importance que revêt la protection de la société.
Mme Catherine Latimer: J'ajouterais que la Loi sur les jeunes contrevenants comportait de nombreuses intentions louables. Ce ne sont pas tellement les intentions, les protections et les droits supplémentaires qui compliquaient la tâche des législateurs, mais plutôt les résultats obtenus.
Les problèmes ici sont nombreux. Un trop grand nombre de jeunes qui commettent des infractions criminelles sont placés en détention. Comme nous l'avons indiqué dans notre déclaration, les principes étaient jugés contradictoires et peu clairs.
Les droits des jeunes étaient trop facilement bafoués. De sérieuses violations étaient commises, surtout en matière de publication. Les noms des jeunes jugés devant un tribunal pour adultes étaient publiés avant même qu'ils ne soient reconnus coupables. Leurs droits en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants étaient donc violés. Ils finissaient par être acquittés, sauf que leurs noms avaient été publiés.
En vertu du projet de loi, aucun nom ne sera publié tant qu'une personne n'aura pas été reconnue coupable. Donc, les protections accordées aux jeunes sont resserrées, et non assouplies, dans le cadre de ce projet de loi.
Le président: Monsieur MacKay.
M. Peter MacKay: Merci, monsieur le président. Ma question s'adresse à M. Lutes. Je sais que, en tant que procureur, il a une vaste expérience de la criminalité juvénile.
Il est vrai qu'il y avait un problème de perception à l'égard de l'ancienne Loi sur les jeunes contrevenants. Le projet de loi tire ce qu'il y a de mieux de la Loi sur les jeunes contrevenants, et clarifie certains des concepts et principes qui le sous-tendent.
Toutefois, il y a certains éléments ici qui pourraient poser problème. Je fais allusion aux expressions utilisées.
Est-ce que le placement différé, dont il est question dans la partie sur la détermination de la peine, est la même chose qu'une condamnation conditionnelle? Est-ce que le juge aurait le pouvoir de dire, par exemple, vous êtes condamné à deux ans de prison, mais vous allez purger votre peine au sein de la collectivité, sous certaines conditions, et s'il y a manquement à l'une de ces conditions, vous allez être réincarcéré?
De plus, bon nombre de ces mesures proactives risquent d'être mal interprétées par les juges qui vont peut-être accorder trop d'importance à l'approche communautaire, de sorte que les principes de réadaptation vont l'emporter sur la protection de la société. Les groupes consultatifs, les partenariats, la participation d'un plus grand nombre de joueurs sont tous de beaux principes, mais vont-ils pouvoir être appliqués? Dira-t-on de ce projet de loi qu'il est trop indulgent envers les jeunes?
Il est vrai que certains des principes que vous avez décrits dans votre déclaration liminaire sont complexes. Je pense par exemple à l'admissibilité de déclarations qui risquent d'entraîner l'exclusion d'éléments de preuve. En vertu de l'ancienne Loi sur les jeunes contrevenants, les policiers devaient s'assurer que les conditions énoncées dans un document de huit pages étaient réunies avant de pouvoir admettre une déclaration en preuve. Prévoit-on organiser des séances d'information détaillées sur la question à l'intention des juges, des avocats et des procureurs? Il faudra des années avant qu'on puisse mettre ces principes en oeuvre.
Je pense que ma question est assez claire.
M. Robert Lutes: Pour ce qui est de l'admissibilité des déclarations, nous avons apporté des changements qui avaient été demandés par un grand nombre de personnes. Est-ce qu'ils contribueront à simplifier le processus? Nous savons que les règles qui s'appliquent aux déclarations faites par les jeunes contrevenants sont compliquées. Celles qui s'appliquent aux déclarations faites par les adultes le sont aussi.
• 1305
Tout le monde s'entend pour dire que les circonstances
particulières des jeunes contrevenants doivent être prises en
considération.
Je travaille dans ce domaine depuis très longtemps et, à ma connaissance, c'est la première fois que le gouvernement fédéral s'engage à prendre de telles mesures. Les policiers savent que les choses vont changer, la Couronne aussi. Tous ceux qui travaillent dans le système savent que les choses vont changer. Le gouvernement s'est engagé à fournir des mesures de soutien. Nous avons à maintes reprises, quand les gens demandaient à nous rencontrer—chaque fois que nous le pouvions, nous réservions du temps pour cela. Il est clair que nous allons devoir consacrer beaucoup de temps et d'énergie à ce projet de loi.
Pour ce qui est des juges et de la question de savoir s'ils ne risquent pas de se montrer trop indulgents, si cela ne risque pas de miner quelque chose, ce que nous avons constaté, entre autres, c'est que les gens ont l'impression que si le jeune n'est pas traduit devant les tribunaux, l'infraction n'est pas prise au sérieux. Or, ceux qui ont bénéficié de mesures de rechange ou qui participeront aux programmes extrajudiciaires reconnaîtront qu'il s'agit-là d'un processus très efficace. C'est souvent plus difficile pour le jeune, qui ne peut refuser de participer à de tels programmes. Il y a beaucoup de juges au Canada et nous devrons attendre de voir ce qu'ils vont faire.
Pour ce qui est de la question du placement différé, Dick est mieux placé pour y répondre.
M. Dick Barnhorst: Le placement différé ressemble effectivement à une condamnation conditionnelle.
Je tiens à souligner que nous incarcérons un grand nombre de jeunes dans ce pays. Comme l'indique le préambule, le projet de loi vise, entre autres, à réduire le recours à l'incarcération. Or, le placement différé est une des nouvelles solutions—nous n'en avons pas encore parlé aujourd'hui—qui s'offrent aux juges, car nous voulons les encourager à choisir des options autres que l'incarcération. Plus de 80 p. 100 des jeunes incarcérés dans ce pays sont des délinquants non violents; bon nombre d'entre eux sont des délinquants primaires non violents. Nous pensons que ces solutions peuvent être très efficaces et donner des résultats positifs.
Maintenant, pour revenir à la question de la perception du public, que vous avez abordée, à mon avis, il faut tenir compte de ce que le public pense non seulement de la condamnation conditionnelle, mais également du placement sous garde imposé aux adolescents. Nous avons beaucoup à faire de ce côté-là. Voilà pourquoi cette période de mise en oeuvre de cinq à six ans est tellement importante. Cette approche est différente de celle que nous avons utilisée quand la Loi sur les jeunes contrevenants a été adoptée.
Donc, il faut absolument tenir compte de ce que le public pense de cette question et pas seulement, disons, des condamnations conditionnelles. On a trop souvent recours à l'incarcération, et c'est une option que les juges... Au fait, nous avons rencontré des juges, nous avons assisté aux séances d'information qui avaient été organisées à leur intention, et cette option n'a suscité aucune réaction négative de leur part.
M. Peter MacKay: Je pense que le fait de distinguer les délinquants violents des délinquants non violents est une très bonne chose.
J'aimerais vous poser une question au sujet de la garde, de la détermination de la peine et de la réinsertion sociale. Vous venez de dire que le placement différé équivaut à une condamnation conditionnelle. Est-ce que la réinsertion sociale, qui à mon avis, est le modèle que nous devons privilégier—je pense qu'on a parlé d'une «surveillance accrue au sein de la collectivité»—équivaut à une libération conditionnelle? Si oui, est-ce que cela ne va pas à l'encontre de ce qui constituait, aux yeux du public, un des points forts de l'ancienne Loi sur les jeunes contrevenants, soit le recours à l'incarcération, une opinion que je ne partage pas?
Le fait de garder un jeune en détention jusqu'à l'expiration du mandat d'incarcération, et c'est l'expression qu'on utilise dans le système de justice pour adultes, signifiait qu'on disposait d'une période fixe pour essayer de corriger son comportement. Or, je sais que les choses ne se passent pas comme cela, mais c'était l'objectif qu'ils visaient: nous avons deux ans; il va rester avec nous pendant deux ans, et nous pouvons adapter nos programmes de réadaptation en conséquence. Or, en vertu de cette nouvelle approche, le jeune va passer tant de temps en détention, et tant de temps en liberté conditionnelle.
Mme Catherine Latimer: En surveillance.
M. Peter MacKay: Ma question—et vous avez manifestement effectué des recherches là-dessus—est la suivante: est-ce que ce manque d'uniformité va miner la confiance du public? Est-ce que cela va empêcher les responsables, dans les établissements correctionnels pour jeunes contrevenants, de dire, nous avons tant de temps pour travailler avec ces jeunes? C'est le juge, n'est-ce pas, qui fixe la durée de la peine au moment du prononcé de la sentence?
Mme Catherine Latimer: Oui. Puis-je demander à Paula Kingston de répondre à cette question? Elle est spécialisée dans ce domaine.
Mme Paula Kingston: Oui, pour ce qui est du recours à l'incarcération soit plus efficace, il est important de signaler que le juge, au moment du prononcé de la sentence, fixera le temps que le jeune... la partie de la peine qui sera purgée sous garde, et la partie de la peine qui sera purgée au sein de la collectivité. Il le fait dans le but de répondre à cette préoccupation.
Pour ce qui est des agents correctionnels ou de détention, ils savent qu'ils disposeront d'un certain laps de temps pour travailler avec le jeune pendant qu'il purge sa peine sous garde et au sein de la collectivité. Mais c'est ce dernier point qui est le plus important. En vertu du projet de loi, un plan de réinsertion sociale qui prévoit des programmes adéquats doit être établi et mis en oeuvre pendant que le jeune est détenu sous garde, et une fois qu'il a réintégré la collectivité.
Donc, pour revenir à ce que vous avez dit, il est plus efficace, sur le plan de la réinsertion sociale, de participer à des programmes au sein de la collectivité. Cela permet d'assurer une certaine continuité. La remise en liberté se fait de façon progressive, ce qui au bout du compte devrait favoriser la réinsertion sociale de la personne.
M. Peter MacKay: Existe-t-il des dispositions qui prévoient la révocation de ces programmes?
Mme Paula Kingston: Oui. En fait, l'adolescent doit se conformer à certaines conditions, comme le fait de se présenter aux autorités, de respecter la loi. Il y a également des conditions qui sont imposées sur une base individuelle, comme le fait de participer à un programme particulier, de suivre un traitement au sein de la collectivité. Tout est fonction des besoins de l'adolescent. S'il ne respecte pas les conditions énoncées, il peut purger le reste de sa peine sous garde.
M. Peter MacKay: Qui se charge de prendre cette décision?
Mme Paula Kingston: Le tribunal.
M. Peter MacKay: Bon nombre des programmes que prévoit le projet de loi n'existent pas dans les régions rurales du Canada.
Mme Paula Kingston: Vous avez raison, et cela nous ramène à ce qu'a dit Catherine au sujet du financement et des ressources. Vous avez tout à fait raison. Les ressources additionnelles serviront à mettre sur pied des programmes dans les collectivités.
M. Peter MacKay: Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup, monsieur MacKay.
Je voudrais profiter de cette occasion pour vous poser quelques questions. Ce qui m'intéresse, ce sont les résultats obtenus jusqu'ici, étant donné que la Loi sur les jeunes contrevenants prévoit une période de garde déterminée, et ce que vous prévoyez pour l'avenir. Je comprends pourquoi il est nécessaire d'avoir des programmes, ainsi de suite.
Ma question est la suivante: existe-t-il des preuves qui montrent que, parce que le système de justice pour les jeunes tprévoit un mécanisme de libération automatique, parce qu'il est plus circonscrit que le système de justice pour adultes, les jeunes auront moins tendance à participer à des programmes? Voilà pour la première question.
La deuxième question porte sur votre exposé, la première partie de celui-ci—en fait, les intérêts que nous cherchons à protéger. Vous dites que le but de la stratégie est «d'établir un système de justice juste pour les jeunes qui protège la société et suscite sa confiance grâce à: (1) des réponses significatives qui font une distinction entre les délinquants violents et la vaste majorité des délinquants non violents». J'aimerais savoir pourquoi on doit établir une distinction. Est-ce pour adopter des réponses qui sont proportionnelles à l'infraction commise? Est-ce pour répondre aux besoins différents des jeunes, en fonction de la nature des infractions commises?
Mme Catherine Latimer: Je vais répondre à votre deuxième question, et je vais ensuite demander à Paula de nous dire si le mécanisme de mise en liberté dissuade les jeunes de participer à des programmes. D'accord, Paula?
La distinction entre les délinquants violents et les délinquants non violents se fait à divers niveaux, car elle influe sur le type de régime, le type de placement sous garde qui sera imposé... Le programme intensif de réadaptation s'adresse aux délinquants violents qui ont de graves problèmes de comportement et qui sont peut-être atteints de troubles mentaux qui les incitent à la violence. La distinction que nous faisons nous permet de prendre les mesures qui s'imposent pour répondre aux besoins du délinquant.
• 1315
Par ailleurs, nous jugeons qu'il est important de pouvoir dire
que, si le délinquant est violent, son cas doit être traité avec
plus de sérieux. S'il est accusé de meurtre, d'homicide
involontaire, de tentative de meurtre ou d'agression sexuelle
grave, ou s'il a tendance à commettre des infractions graves avec
violence, son cas doit être pris au sérieux et ce, dès le départ.
Si aucune distinction n'était faite, les jeunes au sein de
l'appareil de justice pénale seraient tous assujettis au même
traitement. Ils obtiendraient des peines comparables, que ce soit
pour des infractions très mineures ou très graves. Les délinquants
qui commettraient une première infraction contre les biens se
retrouveraient dans des établissements de garde, ce qui ne serait
pas le cas s'ils étaient pris en charge par le système de justice
pour adultes.
Nous avons constaté que les peines comparables applicables aux sept infractions les plus courantes commises par des adultes étaient en général moins sévères que celles que recevaient les jeunes dans les mêmes circonstances. Nous avons voulu établir une distinction plus claire entre les infractions graves qui exigeaient la mise en place de programmes coûteux, adaptées aux besoins des jeunes—parce que ce comportement, s'il n'était pas corrigé, aurait des conséquences sur la protection de la société—et celles qui pouvaient être purgées de façon plus efficace et constructive au sein de la collectivité. Nous avons voulu faire une distinction entre la nature des infractions commises, et les mesures qui devaient être prises pour les corriger.
Paula.
Mme Paula Kingston: Pour ce qui est de la mise en liberté—la peine purgée au sein de la collectivité et le placement sous garde—et la question de savoir si cela aurait un impact sur la participation aux programmes, je pense qu'il faut jeter un coup d'oeil sur les peines qui sont infligées en cas de meurtre par le système de justice pour les jeunes. À l'heure actuelle, quand un jeune est accusé de meurtre, une partie de sa peine est purgée en détention, et une partie au sein de la collectivité. Or, cela ne dissuade aucunement les jeunes de participer à des programmes. En fait, nous avons relevé plusieurs cas où les jeunes ont réussi à réintégrer la société grâce à cette formule.
J'ajouterais qu'il n'est pas juste de dire que le jeune bénéficie automatiquement d'une remise en liberté, parce qu'il est placé dans un lieu de garde. De plus, comme on vient de le dire, l'autorisation qui lui est accordé peut être révoquée s'il ne respecte pas les conditions qui lui sont imposées quand il purge sa peine au sein de la collectivité.
Le président: Je n'aurais pas dû employer cette expression.
Monsieur Bellehumeur.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Pour que le comité comprenne bien et apprécie à sa juste valeur le projet de loi C-3, avez-vous des expertises ou des documents qui démontrent qu'un durcissement la loi ou des sentences a un effet quelconque sur la criminalité chez les jeunes?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Je tiens à préciser que nous n'avons pas modifié le système de détermination de la peine. Le système est le même que celui que prévoit la Loi sur les jeunes contrevenants. Donc, les peines ne sont pas plus lourdes.
Dick, souhaitez-vous ajouter quelque chose?
M. Dick Barnhorst: Je tiens tout simplement à dire que ce projet de loi est, à bien des égards, moins sévère que la Loi sur les jeunes contrevenants, à cause des problèmes que pose cette loi, comme Catherine l'a mentionné plus tôt.
Par exemple, dans bien des cas, les adultes vont recevoir des peines moins sévères pour les infractions qu'ils ont commises, et les jeunes, des peines plus longues. Dans un sens, si les changements proposés dans le projet de loi sont adoptés, certaines des peines imposées seront en fait moins sévères—et sans doute plus efficaces, à notre avis—que celles que prévoit la Loi sur les jeunes contrevenants. Il s'agit là d'un point fondamental.
Je trouve qu'il est injuste de dire que les peines prévues sont plus lourdes. Comme l'a mentionné Catherine, un jeune pouvait, compte tenu de ses besoins, se voir imposer une peine plus longue en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants. Le projet de loi met davantage l'accent sur l'infraction, la responsabilité et le caractère proportionnel, de sorte que la peine imposée sera en fait moins sévère que celle qui serait infligée en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants. C'est une question complexe, et je ne veux pas trop simplifier les choses, mais je crois qu'il est important de répondre au commentaire général que vous faites au sujet du durcissement de la loi. Un examen approfondi du projet de loi vous permettra de constater que ce n'est pas le cas.
M. Michel Bellehumeur: Vous venez de dire qu'en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants, il était possible de donner aux jeunes des sentences plus lourdes qu'en vertu du projet de loi C-3. Est-ce bien ce que vous venez de dire?
[Traduction]
M. Dick Barnhorst: Dans une certaine mesure, oui. En fait, le jeune contrevenant peut, dans le cadre d'une approche qu'on qualifie de plus indulgente, se voir imposer une peine plus longue en fonction de ses besoins.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Peut-on dire que ceux qui donnaient des peines disproportionnées ou plus lourdes en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants ne respectaient pas la loi? En vertu de la déclaration de principe qu'on trouve à l'article 3, les tribunaux et les provinces avaient suffisamment d'outils pour donner au jeune la sentence dont il avait besoin. On a tout cela dans la Loi sur les jeunes contrevenants à l'heure actuelle.
[Traduction]
M. Dick Barnhorst: Je m'excuse, pouvez-vous répéter? Qu'est-ce qu'on a dans la Loi sur les jeunes contrevenants?
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Je vais vous dire ce qui se passe au Québec. Au Québec, lorsqu'il y a des jeunes qui sont aux prises avec un problème, qui ont même commis un meurtre, on a tout ce qu'il faut dans la Loi sur les jeunes contrevenants pour prendre les mesures nécessaires pour répondre aux besoins du jeune, en conformité de l'article 3 de la loi, qui contient la déclaration de principe.
Vous nous dites que ce n'est pas vrai qu'il va y avoir un durcissement avec le projet de loi C-3 parce que les jeunes auront des sentences encore moins lourdes en vertu du projet de loi C-3.
[Traduction]
M. Dick Barnhorst: Non, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. L'adolescent peut se voir imposer, en fonction de ses besoins, une peine plus lourde en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants. Je m'excuse si je vous ai induit en erreur.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Vous parlez de répondre aux besoins des jeunes. Si les jeunes ont besoin d'un suivi ou ont besoin d'être en circuit fermé pendant un certain temps, il faut répondre à ces besoins du jeune. Vous êtes en train de me dire qu'avec la nouvelle loi, même si le jeune a besoin d'un suivi de cinq, six ou dix ans, en vertu de la nouvelle loi, il va pouvoir sortir au bout de deux ans. Ce que vous venez de dire n'a aucun sens.
[Traduction]
M. Dick Barnhorst: Je ne sais pas si j'ai bien compris votre question, mais je vais essayer d'y répondre.
Ce que nous essayons de dire... D'abord, je vous renvoie au paragraphe 37(1), qui porte sur la détermination de la peine. Cette disposition précise clairement que la peine imposée doit favoriser la réadaptation et la réinsertion sociale de l'adolescent. Donc, la peine imposée doit être fonction des besoins de l'adolescent.
Or, le projet de loi établit aussi certains principes qui doivent être respectés. Dans le cas d'une infraction jugée mineure, la peine imposée par le tribunal doit, dans une certaine mesure, être proportionnelle à la gravité de l'infraction commise. Les besoins de l'adolescent doivent être pris en considération. La peine ne serait pas efficace si les besoins de l'adolescent n'étaient pas pris en compte, étant donné que la peine imposée doit favoriser la réadaptation et la réinsertion sociale du jeune.
• 1325
Je pense que la confusion vient des principes qui doivent être
pris en considération au moment de déterminer la peine à imposer à
l'adolescent qui a commis une infraction.
Le président: Monsieur MacKay.
M. Peter MacKay: Merci.
Je pense connaître les réponses aux deux questions, mais je vais quand même les poser. La peine la plus sévère qu'on peut imposer dans le cas d'un crime très grave... Malheureusement, il arrive qu'un jeune de 16 ans commette un meurtre au premier degré, qui est planifié, prémédité. Les principes sont les mêmes en vertu des dispositions sur le renvoi et, à mon avis, c'est là l'aspect le plus complexe du projet de loi parce que le fardeau de la preuve a déjà été modifié à quelques reprises.
Ces jeunes sont renvoyés devant des tribunaux pour adultes et reconnus coupables de meurtre au premier degré. Ils peuvent toujours se voir imposer la prison à vie, une peine de 25 ans, et être admissibles à une libération conditionnelle après 10 ans. Voilà le principe qui serait appliqué. C'est le pire des scénarios qui pourrait se produire.
J'aimerais revenir à la question qu'a posée le président concernant la mise en liberté. Est-ce que la peine de 18 mois qui est infligée à un adolescent, dont six doivent être purgés sous surveillance au sein de la collectivité, équivaut à une libération d'office? Est-ce que l'adolescent est remis en liberté au bout de 12 mois, peu importe le comportement qu'il a eu, ou est-ce que quelqu'un au sein du système peut dire, non, cette personne n'a participé à aucun programme, s'est très mal comportée pendant les 12 mois, et ne sera pas remise en liberté au bout de six mois? Cette libération d'office n'est pas la même que celle dont bénéficient les adultes.
Mme Paula Kingston: En fait, dans votre exemple, la mise en liberté serait accordée après 12 mois, mais sous condition. Les agents correctionnels ou le directeur provincial peuvent renvoyer l'adolescent devant un tribunal. C'est ce que prévoient les dispositions actuelles de la Loi sur les jeunes contrevenants dans le cas des jeunes qui ont commis un meurtre.
Plusieurs facteurs doivent être pris en considération afin de déterminer si l'adolescent présente un risque de récidive. Tous ces facteurs doivent être pris en considération. Est-ce qu'on dénote certaines tendances chez l'adolescent? Est-il déjà arrivé dans le passé qu'il ne respecte pas les conditions qui lui avaient été imposées? L'adolescent ne sera pas remis en liberté si le juge décide qu'il ne satisfait pas tous les critères.
M. Peter MacKay: Donc, ce n'est pas seulement le comportement qu'on évalue?
Mme Paula Kingston: Non.
M. Peter MacKay: On évalue également les risques qu'il présente. C'est la Couronne qui doit démontrer au juge du tribunal de la jeunesse que l'adolescent risque de commettre un nouveau crime?
Mme Paula Kingston: C'est le directeur provincial qui doit le faire.
M. Peter MacKay: Très bien. Merci.
Mme Paula Kingston: Encore une fois, c'est ce que précisent les dispositions relatives aux peines infligées en cas de meurtre.
M. Peter MacKay: Donc, une personne pourrait se voir imposer une peine de 12 ou de 18 mois pour un crime autre qu'un meurtre.
Mme Paula Kingston: Oui, c'est ce que précisent les dispositions de la loi actuelle.
Le président: Vous dites que c'est la Couronne qui doit le démontrer?
Mme Catherine Latimer: Le directeur provincial.
Le président: D'accord. Merci.
[Français]
Monsieur Bellehumeur.
M. Michel Bellehumeur: Vous dites que vous avez collaboré à la rédaction de cela. Est-il vrai que la criminalité chez les jeunes est à la baisse au Canada?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Oui, heureusement. La criminalité chez les jeunes est à la baisse au Canada. Le nombre de crimes violents est stable ou légèrement à la hausse, mais dans l'ensemble, le nombre de crimes commis par les jeunes a diminué depuis 1995.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Il y a quelques années, au Québec, il y a eu le rapport Jasmin. Est-ce que vous en avez pris connaissance?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Oui.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: C'est bien. Au plan juridique, et non au plan politique, que diriez-vous si je proposais de modifier le projet de loi C-3 en y ajoutant un article qui se lirait ainsi:
-
La présente loi s'applique à toutes les provinces à
l'exception du Québec. Dans ce dernier cas, les
dispositions de la Loi sur les jeunes contrevenants
telle qu'elle existait immédiatement avant la sanction
royale du projet de loi C-3, déposé au cours de la
deuxième session de la 36e législature et intitulé
Loi concernant le système de justice pénal pour les
adolescents,
et modifiant et abrogeant certaines lois en
conséquence,
continuent de s'appliquer au Québec.
Je ne vous demande pas de me répondre au plan politique, car vous n'êtes pas ici pour cela, mais au plan juridique. Est-ce qu'on pourrait ajouter une telle disposition au projet de loi C-3?
Mme Catherine Latimer: On nous a déjà posé cette question. C'est ce qu'a recommandé Mme Goupil dans sa lettre. Le fait de permettre à une province de se soustraire à l'application du régime de droit pénal peut entraîner des conséquences juridiques et politiques graves. Cela soulève de sérieuses questions de justice, d'équité, ainsi de suite.
Je ne crois pas pouvoir en dire plus à ce sujet.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Vous avez parlé des conséquences juridiques et politiques. Je ne veux rien savoir des conséquences politiques. Je veux savoir quelles sont les conséquences juridiques.
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: On risque de soulever de sérieuses questions d'ordre juridique, en vertu et de la Charte et de la Déclaration des droits, si les gens dans différentes provinces du Canada sont assujettis à des régimes de droit pénal différents et peut-être aussi à des peines différents. Cette proposition soulève de sérieuses questions.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Venez-vous de parler de peines différentes d'une province à l'autre?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: De peines ou de sanctions différentes? Les peines imposées seraient certainement différentes. La Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents prévoit un plus vaste éventail de peines. Elle prévoit des peines qui n'existent pas en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Finalement, on se retrouve encore avec l'harmonisation des peines. Vous êtes en train de me dire que le Québec ne pourra pas donner des peines différentes de celles qu'on donne en Colombie-Britannique parce qu'à ce moment-là, il ne respecterait pas la Charte.
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Je pense que nous avons ici un petit problème de traduction. Est-ce que vous parlez de la sévérité des peines ou du type de peines qui pourraient être imposées aux adolescents? Ce que je dis, c'est que l'éventail des peines ne serait pas le même. La Loi sur les jeunes contrevenants prévoit moins d'options que la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Les peines les plus sévères restent les mêmes. Nous n'avons pas modifié le régime de détermination de la peine dans la nouvelle loi.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Quand vous dites que les peines seront les mêmes dans l'ensemble, qu'entendez-vous par cela?
Madame Lafontaine, vous comprenez mieux le français. Je pense que vous saisissez ce que je veux dire. Mme Latimer vient de dire qu'au niveau des conséquences juridiques, on ne pourrait pas avoir un article excluant textuellement le Québec de l'application du projet de loi C-3, parce qu'un jour ou l'autre, on se trouverait dans une situation où les peines données aux jeunes contrevenants du Québec seraient différentes de celles données aux jeunes des autres provinces. Est-ce bien ce que vous avez dit?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Je m'excuse, ce n'est pas ce que j'ai dit.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Ce n'est pas cela. Bon.
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit que cette proposition entraînerait des conséquences juridiques et politiques graves. Les peines infligées en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants seraient différentes de celles qui seraient imposées aux adolescents assujettis au droit pénal dans les autres provinces, et cela pourrait être une source d'inquiétude.
De la même façon, les protections relatives aux droits de la personne, aux procédures de recours, seraient différentes au Québec, et peut-être pas aussi étanches que dans certaines autres provinces, et cela pourrait poser des problèmes. Une telle exemption soulèverait des questions d'ordre politique et juridique.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Madame, est-ce qu'on s'entend pour dire qu'à l'heure actuelle, le Québec applique la Loi sur les jeunes contrevenants fort différemment des autres provinces?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Oui, et c'est pourquoi la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents laisse suffisamment de latitude aux provinces. Le cadre juridique accorde à bon nombre d'entre elles la latitude dont elles ont besoin. Nous sommes conscients du fait que le Québec n'est pas le seul à adopter une approche unique à l'égard de la Loi sur les jeunes contrevenants. D'autres provinces le font, et elles ont un taux d'incarcération assez élevé.
Il faudrait trouver un moyen de composer avec la situation si toutes les provinces appliquaient un régime différent.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Le fait que le Québec applique la Loi sur les jeunes contrevenants différemment des autres provinces ne pose pas de problèmes. Cependant, si on voulait, au moyen d'un article qu'on ajouterait au projet de loi C-3, exclure le Québec de l'application de la Loi C-3 afin qu'il continue d'appliquer la Loi sur les jeunes contrevenants, il y aurait un problème.
Mme Catherine Latimer: En vertu de la Constitution du Canada, le gouvernement fédéral est responsable de l'application des lois fédérales. Il doit veiller à ce qu'il y ait une certaine uniformité et continuité dans l'application des lois et des procédures pénales au Canada.
Nous serions donc confrontés à des problèmes d'ordre politique et juridique si une province... Oui, la loi fédérale continuerait d'être appliquée au Québec, sauf qu'il y aurait des problèmes si elle n'était administrée de la même façon dans toutes les provinces, puisque cela irait à l'encontre de ce qu'avaient prévu les auteurs de la Constitution. Cette situation soulèverait des questions de principe et de procédure importantes.
[Français]
Mme Lisette Lafontaine: Monsieur Bellehumeur, vous demandez si le fait que la loi est administrée différemment au Québec pose des problèmes. Non, parce que l'administration de la loi est de compétence provinciale. Ce n'est pas du tout comme le fait d'avoir une loi différente dans une province.
M. Michel Bellehumeur: C'est un fait. C'est surtout le fait qu'il n'y aurait pas l'harmonisation des peines que vous souhaitez qui poserait problème en vertu de la Charte.
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Pas seulement cela.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Je vous demande pardon?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Ce n'est pas seulement...
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Plus que ça. Une bonne partie.
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Non. L'impact serait plus vaste. Essentiellement, les jeunes contrevenants au Québec n'auraient pas droit aux garanties supplémentaires en matière de recours dont bénéficieraient les jeunes contrevenants ailleurs au Canada. Cela poserait de graves problèmes.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Est-ce que le ministère de la Justice du Canada a eu des pourparler avec le ministère de la Justice des États-Unis relativement à la Loi sur les jeunes contrevenants?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Nous avons consulté de nombreux fonctionnaires aux États-Unis, dont Jerome Miller et diverses autres personnes qui militent depuis longtemps en faveur de la désincarcération aux États-Unis. Nous avons consulté de nombreux décideurs aux États-Unis.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Est-il exact que le projet de loi C-3, Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents, s'approche davantage de ce qu'on fait aux États-Unis que de l'ancienne Loi sur les jeunes contrevenants?
[Traduction]
Mme Catherine Latimer: Pas du tout. Les États-Unis n'appliquent pas les principes de justice réparatrice que prévoit la Loi. Ils n'offrent pas le même genre de programmes et de solutions de rechange à l'incarcération. Ils n'offrent pas le même genre de programmes de réinsertion sociale que nous proposons.
Les adolescents ont plutôt tendance à être pris en charge par le système de justice pour adultes, ce qui fait que leurs droits en matière de recours ou les intérêts à long terme de la société sur le plan de la réadaptation et de la réinsertion ne sont pas adéquatement protégés. Ce projet de loi ne ressemble en rien aux modèles américains que nous avons examiné.
Le président: Merci, monsieur Bellehumeur. Je vous ai accordé beaucoup de temps.
Monsieur MacKay.
M. Peter MacKay: Merci, monsieur le président. Voilà le genre de gymnastique intellectuelle qu'il faut faire quand on adopte une approche unique dans ce domaine.
Ma question est très simple. En ce qui concerne le modèle qui a été retenu, les principes de juste réparatrice qui sont appliqués, pourquoi hésitons-nous à étendre la notion de jeune contrevenant de même que l'application de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, aux jeunes de moins de 12 ans?
Je ne cherche pas offenser les soi-disant esprits cartésiens qui pourraient laisser entendre que cela nous permettrait de nous en prendre aux jeunes de 10 ans. Mais cette démarche nous permettrait de les faire participer à ces programmes dès le départ, d'identifier le jeune de 10 ou de 11 ans qui... Cela arriverait très rarement, peut-être dans moins de 1 p. 100 des cas. Pourquoi ne pas en étendre l'application?
Des études ont été réalisées sur la question. En fait, des experts du ministère de la Justice l'ont eux-mêmes proposé au cours des audiences. A-t-on sérieusement envisagé cette possibilité? Pourquoi refuserions-nous de le faire?
Mme Catherine Latimer: Nous l'avons sérieusement envisagé. Dick vous expliquera pourquoi nous avons choisi de ne pas le faire.
M. Dick Barnhorst: Il en a été question dans le document intitulé Le renouvellement du système de justice pour les jeunes, qui a été déposé en mai 1998. Je vais résumer ce qui a été dit.
• 1340
Comme vous l'avez mentionné, ce sont probablement les cas plus
rares qui posent problème, les cas où une infraction relativement
grave a été commise. Ce sont ces cas qui soulèvent sans doute les
questions les plus importantes concernant le bien-être et la santé
mentale des enfants. Quand vous dites qu'il faut mettre en place
des mesures ou des programmes adéquats pour venir en aide à
l'adolescent, vous avez raison. La question qu'il faut se poser est
la suivante: est-ce que la réponse doit venir du système de justice
pénale?
Comme je l'ai dit plus tôt pendant votre absence, des experts se sont penchés sur la question lors d'une conférence nationale qui a eu lieu, il y a environ huit semaines. Ils se sont entendus pour dire qu'il y a d'autres moyens d'aborder le problème—le système de justice pénale ne constituant pas la seule solution—sauf qu'il faut les trouver. Voilà le défi qui nous attend. De plus, comment pouvons-nous mettre en place les mécanismes qui nous permettront d'y arriver?
On a proposé la mise en oeuvre d'une stratégie nationale qui engloberait, entre autres, des protocoles d'entente conclus avec les autorités policières. Il y en a un qui a est entré en vigueur, le 1er février de cette année, dans la région métropolitaine de Toronto, et qui réunit les organismes d'aide à l'enfance et aux familles, les policiers, et qui prévoit également un service de téléassistance. L'idée est d'adopter des mesures efficaces et opportunes pour éviter que les enfants tombent entre les mailles du filet.
Je tiens également à préciser que l'ancienne Loi sur les jeunes délinquants, qui accordait aux tribunaux le pouvoir...
M. Peter MacKay: Quel était l'âge minimum dans la Loi sur les jeunes délinquants?
M. Dick Barnhorst: Même si ce n'était pas précisé dans la loi, l'âge minimum était de sept ans.
M. Peter MacKay: Sept ans.
M. Dick Barnhorst: Oui.
Mais même avec les jeunes de 10 et de 11 ans, qui est le groupe dont on entend le plus souvent parler, même dans cette catégorie d'âge, les juges, en vertu de l'ancienne Loi sur les jeunes délinquants—ils en avaient le pouvoir—avaient tendance à recourir aux services d'aide à l'enfance et de santé mentale pour répondre aux besoins de l'adolescent.
Donc, la question qu'il faut se poser est la suivante—et la conférence avait pour but, en partie, de jeter les grandes lignes d'une stratégie nationale—quels sont les autres moyens d'aborder le problème? Les directeurs de services d'aide à l'enfance à l'échelle nationale se sont beaucoup intéressés à la question, et c'est un dossier sur lequel nous nous penchons.
Outre les protocoles d'entente, il y a également les lois provinciales qui s'appliquent aux jeunes de moins de 12 ans. Il existe des lois provinciales sur le bien-être et la santé mentale des enfants. Ces lois doivent être examinées afin de déterminer si elles sont adéquates.
Par exemple, dans certaines provinces, le jeune de 11 ans qui commet un crime grave et qui souffre de troubles émotifs ou mentaux sévères peut être placé en détention dans un établissement de traitement, compte tenu de la gravité de son cas. Il existe des recours, mais il n'est pas nécessaire pour cela de faire appel au système de justice pénale et de criminaliser le comportement.
Il est plus important d'essayer de déterminer ce qui incite les enfants appartenant à ce groupe d'âge à adopter un tel comportement.
M. Peter MacKay: Mais où les placeriez-vous et pendant combien de temps? Vous n'avez pas le pouvoir de le faire.
M. Dick Barnhorst: Non...
M. Peter MacKay: Prenons le pire des scénarios, soit un enfant de 10 ou de 11 ans qui commet un meurtre. Ce qui m'inquiète, ce sont les mesures d'intervention, les besoins à long terme de l'enfant—et bien entendu, les mesures prises pour protéger la société si cet enfant affiche des tendances sociopathiques antisociales. Comment pouvons-nous intervenir rapidement et répondre à tous ces besoins?
M. Dick Barnhorst: Eh bien, c'est ce que je dis. Je tiens à être très clair. Cette question ne relève pas de la loi fédérale, mais de la loi provinciale en matière de bien-être et de santé mentale des enfants.
M. Peter MacKay: Il n'y a donc aucune uniformité.
M. Dick Barnhorst: En fait, si vous examinez les lois de près, vous allez constater qu'il existe une certaine uniformité entre elles. Ce que nous envisageons de faire dans le cadre de la stratégie qui sera mise en place, c'est d'examiner les différences qui existent entre les provinces, et d'améliorer les services offerts dans les compétences où les dispositions législatives ne sont pas les mêmes.
Mais, à mon avis, les lois concernant le bien-être et la santé mentale des enfants ne varient pas tellement d'une province à l'autre. Elles prévoient, pour les cas les plus graves, des mesures d'intervention adéquates pour les adolescents.
M. Peter MacKay: Est-ce que ce groupe auquel vous faites allusion a préparé des documents, des études, des rapports? Peut-on en avoir des copies?
M. Dick Barnhorst: Certainement. Par exemple, les directeurs des services d'aide à l'enfance à l'échelle nationale ont préparé une étude sur l'adéquation de la loi et des services. Je vous en fournirai une copie.
M. Peter MacKay: Merci.
Merci, monsieur le président. Merci, membres du groupe de discussion.
Le président: Monsieur Bellehumeur, vous avez droit à une autre question.
M. Michel Bellehumeur: La nouvelle loi aura pour nom «Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents». Le vocabulaire de cette loi est fort différent de celui de la Loi sur les jeunes contrevenants. Je peux vous donner des exemples. Où, dans la Loi sur les jeunes contrevenants, parle-t-on d'infliger une sentence? Où, dans la Loi sur les jeunes contrevenants, parle-t-on de la détermination de la peine? Où, dans la Loi sur les jeunes contrevenants, parle-t-on de victime et d'accusé? Où, dans la Loi sur les jeunes contrevenants, parle-t-on de sentence proportionnelle à la gravité de l'offense? N'est-ce pas un vocabulaire nouveau?
Mme Lisette Lafontaine: Je crois en effet que le terme «infliger» est nouveau. Maintenant, nos rédacteurs croyaient que c'était le mot qu'on devait maintenant utiliser. J'aurais personnellement préféré le terme «imposer», mais je ne pense pas que cela change quoi que ce soit au sens de la loi.
M. Michel Bellehumeur: D'accord.
Mme Lisette Lafontaine: Je partage votre opinion. Je n'aime pas beaucoup le terme «infliger», mais on m'a dit que c'était maintenant le terme qu'on utilisait en français.
M. Michel Bellehumeur: Est-ce que je me trompe en disant que la structure de la Loi C-3 ressemble beaucoup à celle du Code criminel?
Mme Lisette Lafontaine. Cela ne m'a pas frappée. Parlez-vous du vocabulaire ou de la structure de la loi?
M. Michel Bellehumeur: Des deux. Je pense qu'il y a une similitude entre le vocabulaire du Code criminel et celui de la loi que vous proposez dans le projet de loi C-3, et entre la structure des deux lois: la comparution, la détermination de la peine, etc. C'est une structure qui ressemble beaucoup à celle du Code criminel. Je pense notamment aux chapitres qu'on voit au début du Code criminel et ainsi de suite.
Mme Lisette Lafontaine: Je ne sais pas si cela ressemble plus au Code criminel qu'à une autre loi. Il y a souvent des chapitres dans une loi. Quant à l'utilisation du mot «sentence», dans la Loi sur les jeunes contrevenants, on appelle cela une disposition, et c'était uniquement là que c'était utilisé. Notre intention n'a peut-être pas donné les résultats escomptés, mais elle était de simplifier les choses. Nous n'avons certainement pas l'intention de changer...
M. Michel Bellehumeur: Très bien. Je fais erreur quand je pense que des gens, quelque part, ont réfléchi et se sont dit qu'ils allaient harmoniser le Code criminel avec la Loi sur les jeunes contrevenants. Il n'y a aucune approche de ce genre.
Mme Lisette Lafontaine: Ce n'était pas une harmonisation comme telle. On voulait essayer de simplifier les choses. Je sais qu'on nous accuse d'avoir produit quelque chose d'extrêmement complexe, mais on a voulu utiliser le vocabulaire le plus courant. Je pense qu'il n'y avait pas beaucoup d'avocats qui parlaient de la disposition. Je pense que les gens parlaient plutôt de la sentence.
M. Michel Bellehumeur: Seuls les avocats spécialistes dans le domaine parlaient de la disposition.
Mme Lisette Lafontaine: Même eux parlaient plus de sentence ou de peine que de disposition. C'est vraiment la seule chose qui nous a guidés. C'est vraiment une décision technique. Ce n'est certainement pas une décision politique, et on n'avait pas l'intention de changer quoi que ce soit à la loi.
M. Michel Bellehumeur: Je suis sûr que les rédacteurs et le ministère de la Justice ont pris en considération le fait que le juge Lamer, dans un renvoi de l'Île-du-Prince-Édouard relativement à la Loi sur les jeunes contrevenants, faisait une mise en garde en disant que la Loi sur les jeunes contrevenants n'était pas la reproduction du Code criminel.
Mme Lisette Lafontaine: Et on ne veut pas qu'elle le soit.
M. Michel Bellehumeur: Et vous ne croyez pas que ce soit le cas, présentement?
Mme Lisette Lafontaine: Ce n'était pas notre intention. Ce n'étaient pas nos instructions non plus.
M. Michel Bellehumeur: Donc, vous pensez que, quand les spécialistes qui appliquent la loi vous disent que c'est une reproduction du Code criminel que vous voulez adopter pour les moins de 18 ans, ils font erreur. Vous détenez la vérité.
Mme Lisette Lafontaine: Non. Je vous ai dit que ce n'était pas notre intention. Il faudra juger du résultat.
M. Michel Bellehumeur: C'est tout pour aujourd'hui.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Je tiens à remercier les témoins.
Monsieur Maloney.
M. John Maloney: Je n'ai pas de questions à poser aux témoins, monsieur le président. M. Bellehumeur a indiqué qu'il avait un mémoire et qu'il en fournira une copie à Mme Carroll. Je me demande si les membres du comité ne pourraient pas aussi en avoir une copie.
M. Michel Bellehumeur: Non.
Le président: Non...
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Je l'ai reçu hier ou aujourd'hui. C'est mon adjoint qui me l'a donné. C'est le mémoire de la coalition québécoise. Après avoir fait une vérification, elle a écrit à tous les députés de la Chambre des communes et à tous les sénateurs pour leur remettre son mémoire. Vous allez probablement recevoir cela aujourd'hui. C'est dans votre courrier.
M. John Maloney: Merci.
[Français]
M. Michel Bellehumeur: Pendant que j'ai la parole, monsieur le président, j'aimerais mettre certaines choses au clair. J'avais dit que je vous soumettrais la liste des témoins sur lesquels on s'étaient entendus, avec les adresses précises. Je voudrais vous remettre cette liste.
Je pense que c'est vous, monsieur Maloney, qui disiez qu'il fallait qu'il y ait un certain équilibre entre les témoins québécois et les témoins du reste du Canada. J'ai ici quelques noms d'éminents professeurs d'université de la Saskatchewan, de la faculté des Sciences humaines de l'Université de Victoria, en Colombie-Britannique, de gens qui veulent venir témoigner. Il serait très intéressant d'avoir l'opinion de ces gens de l'Ouest canadien, qui ressemble étrangement à celle dont je vous fais part ici depuis plusieurs mois.
[Traduction]
Le président: Vous êtes un homme de grande intelligence, monsieur Bellehumeur.
Je tiens à remercier les témoins.
Je tiens également à remercier M. Maloney d'être resté jusqu'à la fin, et de nous avoir permis de continuer à siéger jusqu'à l'heure prévue.
J'espère que nous allons poursuivre le dialogue. Nous avons demandé à obtenir certains renseignements et nous espérons les recevoir bientôt. Je suis certain que nous aurons l'occasion de vous rencontrer de nouveau pour discuter du contenu du projet de loi.
La séance est levée.