ENVI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 3e SESSION
Comité permanent de l'environnement et du développement durable
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 28 avril 2004
¹ | 1535 |
Le président (l'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.)) |
Mme Anne Mitchell (directrice exécutive, Institut canadien du droit et de la politique de l'environnement) |
¹ | 1540 |
¹ | 1545 |
¹ | 1550 |
Le président |
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, PCC) |
Mme Anne Mitchell |
M. Roy Bailey |
Mme Anne Mitchell |
M. Roy Bailey |
Mme Anne Mitchell |
¹ | 1555 |
M. Roy Bailey |
Le président |
M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ) |
Mme Anne Mitchell |
º | 1600 |
M. Bernard Bigras |
Mme Anne Mitchell |
Le président |
M. Julian Reed (Halton, Lib.) |
º | 1605 |
Mme Anne Mitchell |
º | 1610 |
M. Julian Reed |
Mme Anne Mitchell |
M. Julian Reed |
Mme Anne Mitchell |
Le président |
L'hon. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.) |
º | 1615 |
Mme Anne Mitchell |
L'hon. Serge Marcil |
º | 1620 |
Le président |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
Mme Anne Mitchell |
º | 1625 |
M. Paul Szabo |
Mme Anne Mitchell |
M. Paul Szabo |
º | 1630 |
Mme Anne Mitchell |
M. Paul Szabo |
Mme Anne Mitchell |
M. Paul Szabo |
Mme Anne Mitchell |
M. Paul Szabo |
º | 1635 |
Mme Anne Mitchell |
M. Paul Szabo |
Mme Anne Mitchell |
Le président |
Mme Anne Mitchell |
Le président |
º | 1640 |
Mme Anne Mitchell |
Le président |
º | 1645 |
Mme Anne Mitchell |
Le président |
M. Rex Barnes (Gander—Grand Falls, PCC) |
Mme Anne Mitchell |
Le président |
M. Roy Bailey |
Le président |
º | 1650 |
Mme Anne Mitchell |
Le président |
M. Roy Bailey |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'environnement et du développement durable |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 28 avril 2004
[Enregistrement électronique]
¹ (1535)
[Français]
Le président (l'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Mesdames et messieurs, bonjour. La séance télévisée de notre comité commence.
[Traduction]
Soyez la bienvenue, madame Mitchell, à cette séance qui est télévisée pour la postérité. Tout le monde connaît l'excellent travail de l'Institut canadien du droit et de la politique de l'environnement.
Si vous le souhaitez, faites votre exposé, puis nous vous poserons une bonne série de questions. C'est notre procédure habituelle et j'espère qu'elle vous convient.
Mme Anne Mitchell (directrice exécutive, Institut canadien du droit et de la politique de l'environnement): Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, j'aimerais remercier le comité de l'important travail qu'il fait en faveur de l'environnement et du développement durable. Sans environnement, si nous ne pouvons pas travailler sur les questions de durabilité, nous n'aurons plus d'économie. Votre travail est véritablement essentiel et je tiens à vous en remercier. Je tiens aussi à remercier le président pour son travail au fil des années.
Je vous remercie de me consacrer votre temps cet après-midi. J'ai préparé un court exposé, mais je souhaite aussi solliciter votre aide et recueillir votre avis.
Je remercie également le personnel qui vous a transmis les documents. Nous avons rencontré quelques problèmes techniques, mais je crois que vous avez reçu mon mémoire d'une dizaine de pages dans les deux langues et j'en suis bien satisfaite. Je ne veux pas reprendre l'intégralité du document, mais j'en soulignerai les points principaux.
Tout d'abord, pour ceux d'entre vous qui ne le savez pas, l'Institut canadien du droit et de la politique de l'environnement a été créé en 1970. Depuis 34 ans, nous avons assuré un leadership dans la R et D du droit et de la politique de l'environnement de manière à promouvoir l'intérêt public et la durabilité. Nous sommes intervenus dans l'élaboration de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement et de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
La Charte des droits environnementaux de l'Ontario a été l'un de nos premiers objectifs. Il a fallu y consacrer 25 ans, mais nous sommes heureux de disposer de cette Charte qui vient de célébrer son dixième anniversaire dans cette province, et d'avoir un commissaire au développement durable au niveau fédéral.
Nous avons une longue expérience des Grands Lacs. L'une de nos plus récentes publications, intitulée Troubled Waters?; a paru à la fin des années 1990 et au début des années 2000. Elle étudie certains des problèmes constatés dans les Grands Lacs. En outre, nous avons présenté des rapports annuels sur l'environnement ontarien de 1976 à 2002. Un document que nous avons extrait de l'un de nos rapports était consacré aux leçons que nous avons tirées des événements de Walkerton. Nous avons aussi un rapport intitulé Liquid Assets—Monitoring Water Quality in Ontario.
Nous sommes aussi engagés activement dans le débat sur la durabilité. Il y a trois ans, nous avons produit un document de réflexion intitulé Sustainable Development in Canada: a New Federal Plan, consacré à la nécessité, pour le gouvernement, de faire preuve de leadership, d'éviter les situations en vase clos et d'établir des partenariats avec les provinces et les autres intervenants pour définir la vision de ce que devrait être le pays dans 50 ans.
Aujourd'hui, je dirai quelques mot au sujet de l'état des Grands Lacs et des questions qui nous préoccupent. Même s'il s'agit d'une problématique régionale, c'est également à mon sens un enjeu national et une question de durabilité.
L'Accord sur la qualité de l'eau dans les Grands Lacs a été signé en 1972. Il a été renouvelé en 1978, et les deux pays se sont alors engagés à «redonner aux eaux de l'écosystème du bassin des Grands Lacs leur intégrité chimique et biologique». L'Accord avait deux objectifs: retirer les polluants qui se trouvaient déjà dans le bassin des Grands Lacs et faire en sorte que d'autres polluants ne pénètrent pas dans le réseau des Grands Lacs.
L'assainissement des sédiments contaminés fait partie des problèmes qui nous préoccupent toujours dans le dossier des Grands Lacs. Seules deux des zones contaminées ont été assainies. Il en reste 15 à traiter. Les progrès sont lents.
Une autre question préoccupante concerne les rejets toxiques. Des pesticides, des polluants organiques persistants et des métaux lourds comme le mercure continuent d'aboutir dans le bassin des Grands Lacs. Des groupes communautaires se plaignent de la fuite de BPC dans le fleuve Saint-Laurent, au site d'enfouissement du Technoparc, à Montréal. Ce matin encore, les journaux présentaient un court article sur la façon dont la Commission nord-américaine de coopération environnementale entend faire enquête si deux des trois pays de l'ALENA, à savoir les États-Unis, le Mexique et le Canada, approuvent son intervention.
¹ (1540)
Par ailleurs, des produits chimiques nouveaux aboutissent dans les Grands Lacs. Les eaux canadiennes sont contaminées par une gamme nouvelle de produits pharmaceutiques. Nous nous réjouissons sans doute du fait qu'on a cessé de les jeter dans les sites d'enfouissement, mais les gens s'imaginent désormais qu'ils vont résoudre le problème en s'en débarrassant dans les toilettes. On transforme les rivières en une soupe toxique, sans en connaître les dangers à long terme. Les nouvelles substances préoccupantes dépendront de notre aptitude à identifier leurs effets sur la santé humaine en tenant compte des nouveaux paramètres de la santé. C'est notamment le cas des substances qui nuisent au système endocrinien—et on peut lire dans The Globe and Mail d'aujourd'hui un article présentant une étude d'Environnement Canada sur la modification et la perturbation des systèmes hormonaux.
Le traitement des eaux usées produit aussi un problème. Les affluents municipaux sont une sérieuse source de contamination. L'une de nos études actuelles est consacrée aux municipalités qui n'ont pas encore fixé de limites de rejet pour la plupart des contaminants courants, et nous avons constaté qu'il n'y a pas d'uniformité dans les limites de rejet de composés chimiques entre les municipalités qui ont fixé de telles limites. On remarque également des différences dans les méthodes de contrôle de la conformité, les exigences en matière de surveillance et les amendes imposées pour des infractions semblables.
À maints endroits, les tuyaux d'égout qui se déversent dans les rivières et les lacs continuent à charrier des bactéries, des métaux et autres produits chimiques. Une étude réalisée par la Lake Ontario Waterkeeper en 2002-2003 a établi que 79 p. 100 des échantillons d'eau de surface prélevés dans six villes du bassin des Grands Lacs ne respectaient pas les objectifs provinciaux de qualité de l'eau. De nombreuses usines municipales de traitement de l'eau et d'assainissement des eaux usées sont vieillissantes et l'augmentation de la population ne fait que les solliciter davantage.
Et que faut-il penser du changement climatique? Le changement climatique est un phénomène largement perçu comme une menace environnementale grave. Il devrait obligatoirement figurer dans la stratégie de gestion des Grands Lacs. La navigabilité de la voie maritime du Saint-Laurent présente certains dangers en raison du bas niveau de l'eau. Au cours de la première partie du XXe siècle, les niveaux de l'eau dans les ports de Montréal étaient de deux mètres supérieurs en moyenne au niveau des basses eaux. Au tournant de ce siècle, la différence n'était plus que de moins d'un mètre.
Parlons maintenant des espèces envahissantes. Des espèces étrangères envahissantes se sont rapidement répandues dans l'environnement canadien, en particulier dans les Grands Lacs. La plupart de ces espèces ont été importées par des particuliers et des centres de jardinage, mais elles posent un problème qui risque d'affecter la santé humaine.
La santé des personnes et de l'environnement constitue une autre des problématiques du dossier des Grands Lacs. Il existe des preuves médicales et scientifiques convaincantes qui montrent l'existence d'un lien direct entre les contaminants de l'environnement et les troubles de la santé chez les adultes, les enfants et les animaux sauvages. En 2002, dans son 11e rapport biennal, la Commission mixte internationale s'est dite préoccupée par les risques sérieux posés à la santé des personnes par les polluants toxiques présents dans les Grands Lacs. Outre les préjudices à la santé, ces substances toxiques ont des conséquences économiques et sociales.
Que peut-on faire face à tous ces problèmes? À notre avis, il faudrait mettre l'accent sur la prévention plutôt que sur les méthodes curatives. Même s'il est important de nettoyer le dégât que nous avons fait, il est encore plus judicieux de prendre des mesures préventives afin de protéger les lacs de l'apparition d'espèces envahissantes, de nouveaux produits chimiques et des effets du changement climatique.
L'une de ces mesures concerne la protection des sources d'eau. Le gouvernement fédéral et le gouvernement de l'Ontario ont constaté le besoin d'une gestion intégrée du bassin versant des Grands Lacs; on en a un exemple en Ontario. Il fait effectivement suite à la tragédie de Walkerton, mais du moins, les autorités proposent désormais un plan comprenant la préservation et la restauration de la qualité et de la quantité de l'eau, la restauration du paysage et la réduction des rejets.
Qu'en est-il de la conservation des ressources naturelles et de l'énergie? Le Canada possède l'une des plus grandes réserves renouvelables d'eau douce de la planète, mais les Canadiens sont parmi les plus grands consommateurs d'eau. Nous en consommons presque cinq fois plus que les Européens et quinze fois plus que les habitants de certains pays du monde en développement exposés à la sécheresse. Nous devons donc modifier nos habitudes de consommation en fonction du fait que certaines ressources canadiennes d'eau douce sont désormais menacées. La conservation de l'énergie et l'utilisation d'énergie renouvelable pourront nous aider à résoudre nos problèmes.
¹ (1545)
En matière de surveillance, bien que les recommandations canadiennes pour la qualité de l'eau en vue de la protection de la vie aquatique contiennent une liste de 180 substances chimiques, les produits chimiques qui font l'objet d'une surveillance ne sont pas plus de 30. C'est ce que signale la CMI, ainsi que l'ICDPE dans son rapport intitulé Liquid Assets: Monitoring Water Quality in Ontario.
Technologie de restauration: Les gouvernements du Canada et de l'Ontario pourraient faciliter la croissance des industries de la restauration, lesquelles pourraient contribuer à la restauration parfaite des Grands Lacs. Il faut que le programme des Grands Lacs combine la restauration et la conservation et intègre des considérations de durabilité. En convertissant des fermes traditionnelles aux principes de la culture biologique et en intégrant l'agriculture aux efforts de restauration des écosystèmes et bassins versants, par le rétablissement des espèces indigènes, la culture de plantes forestières et la réunification d'écosystèmes forestiers séparés, on pourrait non seulement améliorer la biodiversité mais aussi procurer des avantages économiques aux agriculteurs.
La plupart des stations d'épuration sont vieilles et désuètes et ne suffisent plus à la tâche, et il en est de même pour le réseau d'égout, sous-dimensionné, vieillissant et fuyant de toutes parts. Une restauration s'impose.
Mais surtout, il faut éduquer et informer les citoyens. Dans le protocole de 1987 à l'Accord sur la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, on insistait sur la nécessité d'une vaste participation communautaire à l'échelon local. Cependant, l'appui du public et le soutien local ont été limités. On y a même vu le principal obstacle à la mise en oeuvre du projet sur les sédiments au cours d'un atelier de la CMI en 1997. Dans un rapport récent, la CMI a de nouveau insisté sur le fait que la région des Grands Lacs ne pouvait bénéficier d'un appui à titre de priorité nationale sans un plan exhaustif de rétablissement des Grands Lacs qui soit accepté publiquement.
Le gouvernement fédéral et les administrations provinciales doivent accroître leurs efforts en matière d'éducation et d'information, c'est-à-dire faire connaître les résultats dès la surveillance, la raison d'être des méthodologies choisies et les progrès réalisés.
Nous avons des recommandations à vous soumettre. Nous vous demandons de prendre en compte la totalité de ces enjeux, préoccupations et besoins dans le cadre de l'examen du renouvellement du programme fédéral des Grands Lacs, qui est en cours actuellement. Il faut aussi déterminer les possibilités d'approche binationale. Les Grands Lacs constituent une ressource binationale, et je ne sais pas s'il sera possible de progresser sur ce point lors de la réunion de juin du Comité interparlementaire canado-américain.
Dans le cadre de l'examen de l'Accord sur la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, il faudra veiller à ce que celui-ci reflète une vision à long terme de l'écosystème des Grands Lacs. Il faut améliorer la capacité de tous les ordres de gouvernement—fédéral, provincial et municipal—et en particulier, renforcer la capacité des autorités fédérales et ontariennes à concrétiser les engagements pris dans l'Accord canado-ontarien.
Il faut améliorer les mécanismes de participation de la population. Nous sommes intervenus dans deux consultations sur les Grands Lacs au cours des derniers mois, et nous aimerions savoir quels en seront les résultats, compte tenu de l'information que nous avons fournie, et nous souhaitons continuer à participer à la démarche. Il faut prendre des engagements en faveur de l'énergie tirée de la biomasse et en matière de conservation.
Il faudrait que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership et s'efforce de faire de la restauration de l'écosystème des Grands Lacs et du Saint-Laurent une priorité nationale. Il devrait y parvenir en adoptant une approche ciblée et proactive pour le rétablissement des Grands Lacs, qui mette l'accent sur l'éducation et l'information de la population et sur la transparence au niveau de l'approche, de la surveillance et de l'évaluation.
Nous collaborons avec deux groupes écologistes, l'Association canadienne du droit de l'environnement et Great Lakes United. Je regrette que des représentants de ces groupes n'aient pas pu m'accompagner aujourd'hui. Nous travaillons conjointement à plusieurs rapports. Dans l'un d'eux, il est question du financement de la protection des sources; ce sont des études de cas destinées au gouvernement de l'Ontario. Un autre rapport porte sur la participation de la population et la façon de susciter son intérêt; le rapport est en cours de rédaction. Nous avons tenu compte des études de cas réalisées dans d'autres pays, notamment en Europe, au Brésil et dans d'autres parties du monde où l'on trouve des eaux limitrophes.
¹ (1550)
Nous allons présenter cinq documents aux parlementaires fédéraux et provinciaux. Nous aurons une ou deux pages au maximum, et comporteront une traduction française. Il y en aura un sur l'Accord Canada-Ontario, un sur l'Accord sur la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, un sur des problématiques nouvelles et un sur le programme de restauration des États-Unis. Nous ne voulons pas que le Canada reste à la traîne. Il s'agit d'une situation binationale, nous devons collaborer avec les États-Unis et le Canada a un rôle à jouer.
Parallèlement à vos questions auxquelles je vais répondre, j'aimerais obtenir votre avis sur la façon de sensibiliser la classe politique et la population aux problèmes des Grands Lacs, qui constituent une ressources que nous devons protéger.
Je vous remercie de m'avoir écoutée.
Le président: Merci, madame Mitchell.
Nous allons commencer avec M. Bailey, qui sera suivi par M. Bigras et par M. Reed.
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, PCC): Merci, monsieur le président et merci à vous, madame Mitchell.
La plupart des questions environnementales donnent lieu à deux points de vue bien différents. Mais quand on aborde le sujet dont vous nous avez parlé aujourd'hui, cette dichotomie a peu de chance d'apparaître, car la problématique est évidente pour tous les Canadiens. J'ai constaté moi-même que l'eau pose un véritable problème, non seulement dans les Grands Lacs, mais aussi quand on veut protéger l'eau potable dans l'ensemble du Canada. Et c'est de cela que vous vous occupez.
J'ai une question à vous poser. Vous avez parlé de la façon de se débarrasser des médicaments. J'ai souvent entendu dire qu'il ne fallait pas les envoyer dans les sites d'enfouissement ni s'en débarrasser dans les toilettes. Avez-vous dit, vous aussi, que ce n'était pas une bonne idée?
Mme Anne Mitchell: En effet, car les substances passent par les réseaux d'égout et aboutissent dans les Grands Lacs. Il faut ramener les médicaments à la pharmacie. Demandez à Shoppers Drug Mart de les reprendre, ou déposez-les dans un hôpital.
M. Roy Bailey: Merci. Je tenais à avoir cette précision.
Lorsque vous travaillez avec vos homologues des États-Unis, est-ce que la surveillance, le cadre de référence et les méthodes d'analyse sont normalisés? Les rapports des États-Unis et du Canada sont-ils symétriques grâce à l'application des mêmes critères en matière d'analyse, etc.?
Mme Anne Mitchell: Non, je ne pense pas que nous soyons semblables au point d'avoir les mêmes méthodes d'analyse et de mesures. Nous travaillons avec un groupe d'organismes non gouvernementaux américains appelé Blue Group. Actuellement, il consacre l'essentiel de son énergie aux projets de loi sur la restauration dont le Congrès est saisi, et à la Journée des Grands Lacs, qui se tient le 3 mars. Mais je soumettrai ces questions à mes homologues et je vous ferai part du point de vue américain concernant la façon d'assurer l'uniformité des opérations de surveillance.
M. Roy Bailey: J'ai une autre question à ce sujet. En ce qui concerne les tests et la surveillance que votre ministère supervise, évidemment, y a-t-il des compagnies privées qui y participent? Est-ce que ce sont des entreprises du gouvernement, des groupes scientifiques gouvernementaux? Qui s'en occupe?
Mme Anne Mitchell: Dans le cas de l'Ontario, le gouvernement ontarien exerce une certaine surveillance, mais on a fermé certaines stations de surveillance et réduit leur capacité, étant donné les différentes coupures budgétaires et compressions de personnel que l'Ontario a connues depuis huit ans. Nous pensons qu'en réalité, les autorités ne disposent pas de la capacité nécessaire pour faire la surveillance qu'elles disent faire.
Nous leur avons signalé, mais quant à savoir s'ils vont augmenter leur capacité ou non... Beaucoup des tests sont faits par des entreprises privées. En fait, un des groupes avec lesquels nous travaillons, qui est situé sur la rive sud du lac Huron, fait ses propres tests. Il récolte ses propres échantillons et fait ses propres tests.
En fait, ce groupe a obtenu pas mal d'attention dans les journaux locaux de Toronto il y a quelques mois, et il se demande ce qu'il pourrait faire de plus. Pour lui, la prochaine étape serait que deux citoyens fassent une pétition, qu'ils écrivent une lettre au commissaire à l'environnement en Ontario pour dire que le gouvernement de l'Ontario ne protège pas leurs eaux. C'est une des choses qu'il envisage de faire. Je ne sais pas si c'est la voire qu'il a choisie. L'autre chose, c'est de présenter un recours collectif au tribunal. C'est dommage d'en arriver là.
¹ (1555)
M. Roy Bailey: Merci beaucoup, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Bailey.
Mr. Bigras, the floor is yours.
[Français]
M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Merci, monsieur le président.
Madame Mitchell, je vous souhaite tout d'abord la bienvenue au comité.
Je m'intéresse particulièrement, dans le Réseau Grands Lacs/Voie maritime du Saint-Laurent, au sous-système 1, c'est-à-dire celui compris entre Cornwall et la sortie de Beauharnois, ce qui correspond au fond au lac Saint-François, au canal de Beauharnois, à la rivière Saint-Charles, etc., ainsi qu'au sous-système 2, qui comprend le lac Saint-Louis.
Pourquoi? Parce qu'on sait qu'en 1993, Environnement Canada a produit un rapport très intéressant sur la qualité des sédiments et le bilan des dragages dans le Saint-Laurent. On nous y indiquait, en résumé, que dans le sous-système 1, 95 p. 100 des charges estimées en 1989 de trois métaux, soit le cuivre, le zinc et le plomb, provenaient des Grands Lacs et de la région de Cornwall. Voilà pour le sous-système 1.
Pour le sous-système 2, soit celui du lac Saint-Louis, on nous indiquait que les eaux du fleuve étaient vertes et très minéralisées. Elles proviennent du bassin hydrographique des Grands Lacs et du tronçon international du fleuve Saint-Laurent.
Voici ma première question. Considérant que la région des Grands Lacs est une des régions les plus industrialisées, avez-vous perçu des améliorations au cours des dernières années?
Dans la mesure où on sait que ces sous-systèmes sont grandement influencés par ce qui se produit dans les Grands Lacs, avez-vous perçu, ces dernières années, notamment de la part des industries que je ne citerai pas mais dont j'ai les noms ici, des améliorations en matière de décontamination ou de rejet des eaux usées?
[Traduction]
Mme Anne Mitchell: Il ne fait aucun doute que nous avons observé une réduction de certaines substances chimiques. Certaines industries ont des mécanismes, de sorte que lorsqu'il y a déversement... Elles déversent encore leurs eaux dans les Grands Lacs et se plaignent de l'inventaire national des rejets de polluants, parce qu'ils figurent sur notre liste. Selon eux, ce n'est pas juste parce qu'ils respectent les limites légales des substances déversées. Par conséquent, il nous faudra peut-être revoir ces limites légales et les rendre plus strictes. Mais même parmi les industries qui déversent davantage que la limite permise—en cas d'accident ou pour toute autre raison, d'après elles—certaines essaient d'avoir des mécanismes pour pouvoir être alertées avant qu'il y ait déversement dans les Grands Lacs.
En Ontario, nous avons connu plusieurs fuites ces derniers mois. Je suppose que les amendes ne sont pas suffisamment élevées. Les inspections ne sont pas assez rigoureuses. Nous n'arrivons pas à trouver les coupables. Je sais que des industries font valoir qu'elles ont apporté des améliorations, et si vous regardez les données de l'Inventaire national des rejets de polluants, vous constaterez probablement des changements.
Nous ne devons pas nous asseoir sur nos lauriers. Il y a de nouveaux problèmes qui émergent et d'autres qui ne sont pas résolus. Deux régions seulement ont été décontaminées. Celles dont vous parlez ne l'ont probablement pas été. Notre priorité doit être de décontaminer ces régions préoccupantes et d'essayer de resserrer les règlements ou nous assurer que les industries... Il faut les mettre à l'amende.
º (1600)
[Français]
M. Bernard Bigras: Monsieur le président, j'aimerais poser une autre petite question, et ce sera la dernière. Dans un rapport du corps des ingénieurs de l'armée américaine, ces derniers proposent cinq options pour rendre la Voie maritime plus compétitive sur le plan commercial et sur le plan de la navigation.
Trois de ces cinq options prévoient un approfondissement de la Voie maritime du Saint-Laurent. On parle dans ce rapport d'un approfondissement de l'ordre de 35 pieds sur le plan des ports, des canaux et donc de la Voie maritime.
Je veux savoir si vous croyez que ces projets de creusage de la Voie maritime sont une bonne chose sur le plan de la protection de l'environnement. Croyez-vous que cela peut avoir des incidences sur la qualité de l'eau? Croyez-vous qu'il s'agit de projets qu'on peut considérer dans une perspective de développement durable?
[Traduction]
Mme Anne Mitchell: Je ne suis pas ingénieure, mais je pense que ces projets seraient catastrophiques à bien des égards : du point de vue de l'environnemental, de la qualité de l'eau également, et aussi parce que nous encouragerait à continuer de...
Cela ne va certainement pas nous aider. Il faut changer fondamentalement notre façon de procéder si nous voulons vraiment un mode de vie durable. Selon moi, les projets que vous avez évoqués vont totalement à l'encontre de cet objectif.
Le président: Merci, monsieur Bigras.
Monsieur Reed, puis monsieur Marcil.
M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, monsieur le président.
C'est un domaine très vaste, et j'aimerais me concentrer, si vous me le permettez, sur deux questions. D'une part, sur les pouvoirs du gouvernement fédéral. Quels sont les pouvoirs fédéraux, au-delà de la pression morale et des suggestions auprès de la Commission mixte internationale, en ce qui concerne les Grands Lacs? Ç'est un sujet de préoccupation.
L'enjeu de la qualité de l'eau, même dans les Grands Lacs, touche les municipalités, la province et les citoyens. Elle ne se limite pas à un palier de gouvernement.
Là où j'habite, nous vivons une situation incroyable. J'ai le privilège discutable de vivre dans la région du Canada qui s'urbanise le plus rapidement en ce moment. Lorsque la municipalité locale s'est aperçu qu'il n'y avait pas assez d'eau souterraine pour la population en croissance, la solution était tout trouvée : un tuyau dans le lac Ontario. Les édiles municipaux se sont dits : Nous allons mettre un double tuyau dans le lac Ontario et nous allons pomper de l'eau, puis nous remettrons l'effluent et nous compterons sur la dilution. C'est une ancienne technologie qui était déjà utilisée à Toronto en 1906.
Dans ce dossier, il n'a jamais été question, par exemple, d'intégrer le traitement des eaux ménagères dans les nouveaux lotissements ou de récupérer les eaux de pluie. Même aujourd'hui, à un mille environ de ma ferme, il y a un lave-auto qui affiche «lavage à l'eau douce seulement». Ce manque de vision et ce genre de gaspillage rendent cette question très actuelle.
Je ne sais pas comment nous pourrions nous y prendre sur le plan des compétences. Si j'étais conseiller municipal, je pourrais travailler à ce niveau, mais alors, je ne serais pas député provincial, etc. Par conséquent, la question est de savoir comment concerter notre action. I faudrait aller jusqu'à stipuler dans la loi municipale que les nouveaux lotissements doivent intégrer de telles initiatives de conservation, parce que pour l'instant, rien n'a changé.
Dans la presse, je remarque qu'on met l'accent sur des choses qui ne figurent pas vraiment sur la liste des priorités. Par exemple, j'ai vu un article de journal—et je serai foudroyée pour avoir dit ça—qui rapportait qu'on avait trouvé un colibacille dans l'eau d'une bande indienne. C'est un problème des plus faciles à résoudre. J'ai un puits sur mon terrain, et j'ai des colibacilles deux fois par an dans mon puits. Quand je m'en rends compte, je mets un peu de javex dans mon puits, et c'est réglé.
Ce n'est pas une bactérie meurtrière. Ce qui est meurtrier, c'est ce qui se passe à plus grande échelle. Heureusement, nous n'avons pas vécu d'autre Walkerton, mais j'ai peur qu'on continue à ne rien faire tant que cela n'arrivera pas; c'est très inquiétant. Alors je suppose que ma question serait la suivante: de quels pouvoirs dispose le gouvernement fédéral? Et aussi, pouvons-nous lancer une campagne pour sensibiliser le public?
º (1605)
Mme Anne Mitchell: C'est indéniablement le gouvernement fédéral qui est responsable de cette question. Il est signataire de l'Accord relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs avec les États-Unis. Cet accord engage le Canada, tout comme les États-Unis, à contrôler la pollution des Grands Lacs et à traiter les eaux usées des usines et des communautés. Ce que le Canada doit faire, c'est parler avec les États-Unis de cette question et déterminer comment ils peuvent travailler de concert.
Le gouvernement fédéral a assurément une responsabilité dans ce dossier puisqu'il est signataire de l'entente Canada-Ontario relative à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs. Le Canada et l'Ontario sont liés conjointement par l'ECO, signée en mars 2002, qui s'échelonne sur cinq ans. C'est une entente entre le gouvernement fédéral et le gouvernement de l'Ontario. Son objectif principal est de rétablir toutes les utilisations de deux des seize secteurs préoccupants, de compléter les mesures prises dans six des secteurs préoccupants et de faire du progrès dans les autres. C'est leur engagement jusqu'en 2007, et nous sommes aujourd'hui en 2004.
Entre autres objectifs, citons instaurer des politiques et des programmes pour progresser vers l'élimination quasi totale des substances toxiques persistantes, comme le mercure, la dioxine, le furane, et les BPC; réduire les autres polluants nuisibles; avoir une connaissance exhaustive des mouvements des sources et de l'incidence des polluants nuisibles. Je ne sais pas où nous en sommes dans ces dossiers et je ne sais pas qui s'en occupe, ou si le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux travaillent de concert.
Nous voulons comprendre les problèmes environnementaux des lacs et leurs causes, dégager un consensus et obtenir un soutien généralisé pour des actions prioritaires. Je ne pense pas que nous l'ayons fait. Ensuite, il faudrait aussi avoir des systèmes fédéraux-provinciaux de surveillance scientifique et de gestion de l'information coordonnés et efficaces pour déceler les changements.
L'Ontario est passée par une période très difficile ces huit dernières années, et tout ce qu'on voyait, c'était des réductions. Étant donné que nous travaillons étroitement avec le bureau régional d'Environnement Canada, je sais qu'il a été difficile pour les deux instances de travailler ensemble dans les régions. Je pense qu'il faut mettre davantage l'accent sur une coopération entre le gouvernement fédéral et le gouvernement de l'Ontario dans ces dossiers.
En ce qui concerne les municipalités, vous avez raison. Si nous poursuivons sur la voie de l'étalement urbain, si les promoteurs font ce qu'ils veulent où ils le veulent, si nous continuons à construire des maisons colossales avec encore plus de terrain, si nous maintenons ce type de développement urbain, nous aggravons la situation.
Il faut changer. Il faut faire une campagne de sensibilisation de la population pour déterminer ce que signifie la réussite dans la société du XXIe siècle. Ça ne peut plus être une grosse maison, plus d'argent, une nouvelle voiture chaque année. Si nous adhérons à l'objectif d'une société durable, il faut présenter d'autres critères de réussite : la musique, l'art, le bénévolat, un joli jardin, une bonne utilisation des loisirs. Il y a d'autres façons de mesurer la réussite, et c'est sur ce genre de mode de vie que doit être axée cette campagne de sensibilisation. Nous savons tous que si tout le monde sur cette terre vivait comme nous, il faudrait quatre planètes.
º (1610)
M. Julian Reed: Le plus frustrant, c'est que si le gouvernement fédéral décidait de lancer une campagne de publicité intensive, nous serions immédiatement dans le pétrin parce que...
Une voix: La période de questions est terminée.
M. Julian Reed: Dans une situation comme celle-là, le gouvernement fédéral est toujours perdant, parce qu'on l'accuse de faire du prosélytisme ou quelque chose du genre.
Mme Anne Mitchell: Peut-on faire avancer les choses de manière non partisane? Les Grands Lacs sont un enjeu non partisan.
M. Julian Reed: Bien sûr, il faudrait que l'opposition le reconnaisse.
Des voix: Oh, oh!
Mme Anne Mitchell: Ça ne doit pas forcément être une campagne massive de publicité—même s'il est vrai que les gens regardent énormément la télévision aujourd'hui. Laissez-moi vous donner un exemple. Nous travaillions récemment avec le Bureau de l'inventaire national de rejet des polluants. Nous cherchions des études de cas où des groupes communautaires ont eu recours aux données de l'inventaire. Ces groupes voulaient utiliser les données de l'inventaire pour aller dans les usines et expliquer leur action. Nous avons eu beaucoup de difficulté à trouver ces études de cas. Des groupes communautaires utilisent les données de l'inventaire, mais plutôt comme outil de pression ou de promotion d'une politique.
Nous sommes également allés dans les bureaux régionaux d'Environnement Canada du pays et nous posé la question suivante aux employés: «Vous êtes en Alberta»—ou ailleurs, peu importe—«Connaissez-vous des groupes qui sont intéressés à utiliser ces données?» Ils n'en connaissaient pas. Il y a moyen de se servir de vos bureaux régionaux pour communiquer le message et parler aux gens.
M. Julian Reed: Merci, monsieur le président.
Le président: Nous passons maintenant à M. Marcil, qui sera suivi de M. Szabo.
[Français]
L'hon. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.): Merci, monsieur le président.
J'ai lu des rapports et des articles de journaux de langue française sur la qualité de l'eau du lac Saint-François. On avait mesuré la qualité de l'eau du lac Saint-François par rapport à celle des lacs environnants, dont le lac Saint-Louis et le lac Saint-Pierre, et on disait justement que l'eau du lac Saint-François était, non pas bonne pour la consommation, mais meilleure que celle des autres lacs. Pourtant, le lac Saint-François est le fleuve Saint-Laurent et il se nourrit des eaux qui viennent des Grands Lacs et ensuite du canal de Beauharnois. Tout cela se déverse dans le lac Saint-Louis, un des lacs qui souffrent le plus actuellement, tout comme le lac Saint-Pierre.
Chez nous, à Saint-Anicet, qui est situé près de l'État de New York, presque en face de Cornwall, il y a une guerre qui se fait actuellement à propos de la rivière La Guerre, qui se jette dans le fleuve. Il y a une bataille actuellement entre les agriculteurs et les résidants du lac. Étant donné qu'on parle beaucoup de métaux et des nombreuses industries qui sont installées tout près des Grands Lacs, tant aux États-Unis qu'au Canada, je voudrais savoir quel est l'impact de la pollution agricole à la fois sur les Grands Lacs et sur le fleuve Saint-Laurent. Y a-t-il eu une amélioration ou si la situation s'est dégradée?
º (1615)
[Traduction]
Mme Anne Mitchell: Évidemment, les écoulements agricoles, en particulier ceux des énormes exploitations qu'on voit apparaître actuellement, ont un effet délétère. C'est eux qui sont à l'origine des événements de Walkerton. Certaines porcheries sont aussi grosses que des petites villes; du moins, elles abritent autant de porcs que certaines petites villes comptent d'habitants. Or, les petites villes sont réglementées, alors que les porcheries ne le sont pas. La première chose à faire, à mon sens, est de traiter et de réglementer ces exploitations comme des établissements industriels.
Évidemment, nous avons aussi un rôle à jouer à titre individuel. Nous déversons des ordures dans les Grands Lacs, nous les polluons et nous jetons toutes sortes de choses dans les égouts. En Ontario, l'une des façons les plus courantes de se débarrasser des déchets dangereux consiste à les déverser dans les égouts. Il faut que cela cesse.
Il y a deux façons d'y parvenir. Il faut une campagne de sensibilisation massive. Je suis convaincue que si on parvient à alerter les Canadiens, ils seront à même de modifier leurs habitudes, mais la difficulté est d'attirer leur attention. Je pense qu'il faut aussi renforcer la législation tant au niveau fédéral qu'au niveau provincial.
En ce qui concerne les problèmes actuels, le gouvernement ne peut pas les résoudre à lui seul, mais il peut faire preuve de leadership quant aux mesures à prendre. Les industriels et les simples particuliers ont tous un rôle à jouer. La notion même de durabilité exige la collaboration des trois niveaux de gouvernement et de tous les secteurs d'activité.
Comment peut-on progresser à moins que quelqu'un ne dégage une vision des objectifs à atteindre? Peut-on se contenter d'épuiser les ressources en disant que ce ne seront pas nous, mais nos petits-enfants qui vont devoir régler les problèmes? Comment convaincre nos concitoyens qu'il n'est plus possible de continuer et qu'il faut agir?
Je n'ai pas les réponses à ces questions. J'aimerais avoir vos conseils quant aux façons de progresser, car il serait bien préférable que nous puissions progresser ensemble et trouver conjointement une solution.
[Français]
L'hon. Serge Marcil: Mais le problème auquel on fait souvent face dans le domaine de l'environnement est que tout le monde veut aller au ciel, mais que personne ne veut mourir; c'est un peu ça, le problème. Les gens sont tous en faveur de l'environnement et des eaux propres. On voudrait que tout le monde fasse de la récupération, qu'on élimine de plus en plus les sites d'enfouissement et qu'on les remplace par des usines de récupération, de recyclage et de transformation des déchets. Le problème est que les individus ou les entreprises... La première chose qu'il faut faire, à mon avis, avant même de s'attaquer aux entreprises, est de convaincre les gens de chacun des petits villages, de chaque municipalité de l'importance de l'environnement parce qu'eux-mêmes travaillent dans ces entreprises. En aval, par la suite, on peut s'attaquer aux entreprises. Les gens qui y travaillent seront sensibilisés à l'environnement et forceront leur entreprise à mettre ces choses en pratique. On donne l'exemple du Protocole de Kyoto. C'est sûr et certain que si vous demandez à une multinationale d'intervenir et de prendre des mesures pour nous permettre, comme pays, d'atteindre nos objectifs en matière de gaz à effet de serre... Il faut absolument que les gens qui travaillent dans ces entreprises soient convaincus et exercent de la pression sur les actionnaires et ainsi de suite.
Je vais vous donner l'exemple d'un microsystème. Prenons la situation des agriculteurs qui veulent produire. Au Québec, les règlements du ministère de l'Agriculture exigent qu'on respecte un certain espace sur les berges. De façon générale, on ne doit pas déboiser pour empêcher l'irrigation et ainsi de suite. Les agriculteurs, à cause de la mondialisation de l'économie et pour pouvoir atteindre le marché, sont obligés de défricher et de défricher continuellement. Puis, pour pouvoir continuer à cultiver et à produire davantage, on utilise toutes sortes de produits. Où cela s'en va-t-il ? Cela s'en va dans les ruisseaux, puis dans les rivières et ensuite dans le lac. Il y a, d'une part, des riverains qui veulent protéger les eaux du lac et, d'autre part, des agriculteurs qui veulent produire. Lorsqu'on leur demande de se conformer à des protocoles, cela exige souvent de gros investissements de leur part et ils n'ont pas nécessairement d'aide des gouvernements pour se convertir.
Tel est le problème des grosses entreprises qui sont situées sur le bord des lacs. Vous avez soulevé la problématique des porcheries. La rivière Yamaska, dans mon comté, a été l'une des rivières les plus polluées au Québec, si ce n'est au Canada. Elle polluait par le fait même le fleuve Saint-Laurent. Des efforts ont été faits, notamment dans le cadre de Saint-Laurent Vision 2000, qui ont permis à des groupes sensibles à l'environnement de s'organiser, de sensibiliser également les municipalités et ainsi de suite.
Je suis d'accord avec vous qu'il faut faire des efforts et qu'il y a de très nombreux intervenants à sensibiliser, soit les gouvernements municipaux et provinciaux et le gouvernement fédéral, mais aussi les entreprises et les citoyens. C'est un effort continuel, mais le jour où il n'y aura plus d'eau, plus de poissons dans l'eau, plus d'oiseaux, plus d'arbres, il sera trop tard. Tout le déboisement qui se fait actuellement au Brésil est épouvantable. On dirait que les gens n'allument pas. Ils allument peut-être, mais des organismes comme le vôtre ont besoin de plus de soutien. Je pense qu'il n'y a pas un seul parlementaire qui soit contre l'environnement et je ne pense pas qu'on doive faire de la politique avec cela. On devrait cependant poser plus de gestes pour soutenir les municipalités, les provinces et les entreprises dans l'application de saines pratiques en matière d'environnement.
Merci beaucoup de votre collaboration.
º (1620)
[Traduction]
Le président: Monsieur Szabo.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci.
Je vous remercie d'être parmi nous, madame Mitchell. Votre document aborde un vaste éventail de domaines, ce qui me rappelle que bon nombre d'entre eux sont interreliés et que si l'on veut résoudre un problème complexe avec une solution simple, on fait fausse route. Quoi qu'il en soit, l'éducation de la population fait normalement partie de toute solution efficace à un problème. Avez-vous une idée du niveau de compréhension ou de connaissance des problématiques que vous venez d'évoquer dans l'ensemble de la population canadienne?
Mme Anne Mitchell: La population se divise en deux groupes. Il y a le grand public que je fréquente généralement, qui ne sont pas tous des gens du type à appartenir à des ONG. Ce sont des gens qui réfléchissent et qui savent que nous avons un problème.
L'une des difficultés, dans le domaine de l'environnement, c'est d'amener les gens à agir et à penser que ce qu'ils font est vraiment important. Je vais vous donner deux exemples. Avant de me joindre à cet organisme, j'ai travaillé à la lutte contre l'apartheid. Je dirigeais un organisme qui fournissait une aide juridique et humanitaire aux prisonniers politiques et aux familles d'Afrique du Sud. Personne ne croyait que ce problème pourrait être résolu. Il y avait de nombreux facteurs en cause. Tout d'abord, il régnait au sein du pays une violence à laquelle il fallait mettre fin. Les deux leaders, le président Botha et Nelson Mandela, ont été suffisamment raisonnables pour se rendre compte qu'il fallait trouver une solution à ce problème. Il y a eu des pressions internationales, mais il y a aussi eu des gens qui ont décidé d'agir.
Certains ont perdu le sentiment d'appartenir à une collectivité, leurs perspectives communautaires ou leur souci de la communauté. Nous avons tous un rôle à jouer.
La publicité montrée à la télévision ne nous aide pas non plus. On nous dit constamment que nous devons accumuler davantage de possessions, acheter plus de produits et toujours viser plus haut. Certains doivent avoir deux emplois pour conserver leur grosse maison et leur nouvelle voiture tout en payant les cours d'équitation et de ballet de leurs enfants.
º (1625)
M. Paul Szabo: Nous avons une optique trop vaste. Essayons de la préciser. L'approche est également importante. Dans votre mémoire, vous dites que l'approche actuelle vise à corriger les problèmes plutôt qu'à les prévenir. C'est un débat qui a déjà eu lieu dans notre régime de soins de santé. On a dit qu'il fallait promouvoir de meilleurs choix de modes de vie et qu' en santé, un dollar investi dans la prévention donne de meilleurs résultats qu'un dollar qui sert à payer des traitements, des médicaments, etc.
Appliquons cette notion à un sujet que le Canadien moyen comprend, c'est-à-dire le traitement des eaux usées. Bien des gens ne comprennent sans doute pas d'où vient l'eau qu'ils consomment. Ils ne sont peut-être pas au courant des faits que vous nous avez communiqués. D'après le rapport de 2002-2003, on a constaté que 79 p. 100 des échantillons d'eau de surface recueillis dans six villes différentes du bassin des Grands Lacs n'étaient pas conformes aux objectifs de la province en matière de qualité de l'eau. Si les objectifs, les limites ou les normes ne sont pas appliqués, à quoi peut-il servir de les établir? Si les provinces affirment que cela relève de leur compétence mais qu'elles ne s'acquittent pas de leur responsabilité, nous avons un problème et le travail n'est pas fait.
Vous avez également donné un exemple dans lequel les niveaux de bactérie E. coli étaient de 2 000 fois plus élevés que ce qui est prévu dans les objectifs provinciaux de qualité de l'eau. C'est loin d'être raisonnable. Je ne me soucie pas de savoir si le grand public est en mesure d'agir ou non, puisque c'est accablant. Nous parlons des autorités responsables.
Si le comité voulait vraiment s'attaquer à cette question, qui devrait-on convoquer pour nous expliquer pourquoi cette situation est acceptable et pourquoi on n'applique pas les normes qu'on est censé avoir? Qui contribue à ces problèmes? Pourquoi est-il acceptable d'endommager la nature dans certains secteurs? Il importe que nous sachions qui cause le problème. Je sais que vous voulez participer à la solution, mais il y en a d'autres qui participent au problème. Il n'est pas suffisant à mon avis de dire que cela dépend de nos choix de modes de vie.
Mme Anne Mitchell: Vous pourriez,bien sûr, convoquer les gens du ministère de l'Environnement de l'Ontario. Pourriez-vous les convoquer?
Vous pourriez évidemment convoquer le ministre de l'Environnement.
M. Paul Szabo: Vous avez parlé, entre autres choses, des produits chimiques qui sont déversés dans les Grands Lacs par l'entremise des effluents. Qu'en est-il des municipalités? Pourrions-nous examiner certaines des grandes municipalités et voir quelles sont leurs pratiques? J'aimerais bien savoir ce qu'elles font et ce qui est mesuré. Elles pourraient nous dire ce qu'elles mesurent, reconnaître les problèmes qui se posent et voir si elles s'en lavent les mains. Il serait très intéressant de confronter les gens qui sont à la source du problème et ceux qui peuvent le résoudre.
Savez-vous si quelqu'un tient particulièrement à protéger les méthodes qui sont utilisées actuellement?
º (1630)
Mme Anne Mitchell: Il y a divers angles à cette question. Il y a entre autres Great Lakes United et l'Association canadienne du droit de l'environnement. Nous tenons actuellement une réunion au sujet des ONG.
M. Paul Szabo: Vous parlez des gens qui travaillent à trouver des solutions. Ma question porte sur ceux qui causent les problèmes.
Autre exemple dont la CMI et d'autres nous ont parlé, le problème des espèces étrangères envahissantes et le contrôle du déversement des eaux de ballast. Nous savons que les espèces étrangères envahissantes arrivent en grande partie par ces eaux de ballast.
Je crois savoir qu'il existe des «directives d'application volontaire» en ce qui a trait aux eaux de ballast, par opposition à un règlement d'application obligatoire. On peut se demander qui bénéficie du fait que nous n'avons pas de règlement obligatoire. Qui protège-t-on? Protège-t-on des sociétés qui devraient débourser de l'argent si on appliquait un règlement efficace pour contrôler les eaux de ballast?
Pourquoi ne donne-t-on pas des pouvoirs accrus à la CMI, qui, semble-t-il, ne possède pas les outils nécessaires pour corriger le problème, afin de nous assurer de ne pas résoudre le problème d'une espèce étrangère envahissante en créant plus tard un autre problème? Il n'y aurait aucun avantage net à procéder de cette façon, si l'on sait qu'une espèce étrangère envahissante est aussi coûteuse pour l'économie canadienne que les coûts du SRAS, d'après ce qu'on nous a dit.
C'est un problème important. La population n'est probablement pas au courant, et il ne semble pas que la crise soit suffisamment grave pour pousser qui que ce soit à agir ou à promouvoir le règlement de ces problèmes. Que faut-il faire?
Mme Anne Mitchell: C'est probablement la principale question. Je n'ai pas non plus de réponses à proposer.
Nous essayons de faire ressortir les enjeux et les préoccupations. Le comité pourrait probablement convoquer les dirigeants des usines implantées à Sarnia, près de Hamilton, ou dans le sud de l'Ontario.
Je ne sais pas... Je ne sais pas si cela dépend des armateurs. Il y a de grandes sociétés en cause, des sociétés qui n'ont probablement pas intérêt à apporter les changements que nous réclamons.
M. Paul Szabo: J'estime qu'une des raisons pour lesquelles nous avons réussi à obtenir les appuis nécessaires dans les discussions sur notre adhésion à l'accord de Kyoto, c'est qu'on a pu établir un lien direct avec la santé.
Mme Anne Mitchell: C'est vrai.
M. Paul Szabo: Cela a été le facteur déterminant. Bon nombre des questions que vous avez soulevées sont clairement reliées à la santé publique.
Vous avez dit être venue nous demander ce qu'il convient de faire, nous demander des conseils. Je vais conclure mes observations en vous disant que les députés sont au Parlement pour représenter leur circonscription et défendre les intérêts de tous leurs commettants. Cela signifie que les députés peuvent communiquer avec tous les Canadiens. Je veux que vous sachiez, comme tous les auditeurs ou téléspectateurs, que si vous avez un message à livrer, il nous serait très utile que vous fassiez parvenir des documents, à tous les députés du Parlement, ce qui peut se faire très facilement par courrier électronique. Nous pouvons ensuite les transmettre à nos commettants au moyen d'envois collectifs, de nos 10 p 100, ou d'autres moyens par lesquels nous communiquons avec la population.
Il est extrêmement important que nous puissions bénéficier de votre expérience et de votre information, mais il faut comprendre qu'il ne sera pas possible de distribuer des documents de 10 pages à tout le monde.
º (1635)
Mme Anne Mitchell: En effet.
M. Paul Szabo: Mais je puis vous assurer qu'il serait possible de rédiger un bon document d'une page, qui exprime au mieux vos connaissances, votre compétence et votre passion pour le sujet. Et le message pourrait être communiqué, car vous avez à la Chambre des communes des amis prêts à vous aider en informant la population.
Mme Anne Mitchell: J'apprécie votre offre et je vous en remercie. Notre organisme est très petit. Notre appellation trahit notre... En fait, quand les gens voient le titre d'Institut canadien du droit de la politique et de l'environnement, ils pensent que si ce n'est pas un organisme du gouvernement, il est au moins financé par le gouvernement. Hélas, ce n'est pas le cas.
Le président: Madame Mitchell, vous avez conclu vos remarques en demandant comment on pourrait mieux faire connaître ce problème. Pour faire suite à ce que vient de dire M. Szabo, il y a un certain nombre de mesures que vous pourriez prendre et que vous avez probablement déjà mises à l'essai auparavant.
Tout d'abord, permettez-moi de vous féliciter, vous et l'Institut, du chapitre 2 que vous avez rédigé l'an dernier, dans votre rapport quinquennal. Vous semblez posséder un certain nombre de réponses. Vous avez divisé le chapitre en sections sur la protection de l'eau potable, la protection des sources d'eau, la conservation de l'eau et la protection des Grands Lacs. Votre association a déjà accompli un travail considérable dans ce domaine. Le travail technique a donc été réalisé. Ce que vous semblez chercher, c'est le moyen de susciter une volonté politique. Est-ce exact?
Mme Anne Mitchell: Oui.
Le président: Eh bien, comme vous le savez, il y a toutes sortes de moyens de susciter une volonté politique. Il y a par exemple l'Association des municipalités de l'Ontario, dont la plupart des membres représentent des municipalités qui entourent le lac Ontario ou les autres Grands Lacs. Il ne leur serait pas trop difficile d'inscrire la conservation et la protection de l'eau à leur programme et d'adopter des résolutions vigoureuses qui viseraient le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral.
Ce ne sera sans doute pas suffisant, et l'étape suivante consisterait à communiquer avec les députés provinciaux et fédéraux. Vous pourriez ainsi créer la pression nécessaire dans les circonscriptions qui sont associées aux Grands Lacs d'une façon ou d'une autre. Cela représente quelque 60 députés, sinon plus. Il vous faudrait probablement beaucoup de temps pour communiquer avec chacun d'eux, mais il y a différents moyens de nos jours, entre autres le courrier électronique. Vous pourriez ainsi déclencher une action concertée.
L'action concertée que nous recherchons est déjà décrite dans votre document, dans une de vos recommandations d'aujourd'hui. Vous avez fixé la date de 2015 pour le rétablissement des secteurs préoccupants; cela se trouve à la page 12 de votre document. C'est ce qu'il faut demander aux députés provinciaux et libéraux, ainsi qu'à l'Association des municipalités de l'Ontario. Il faut leur demander de prévoir dans les budgets des municipalités, du gouvernement de l'Ontario et du gouvernement fédéral les fonds nécessaires à une action concertée par les trois ordres de gouvernement pour que les travaux de rétablissement soient achevés d'ici 2015. Cela ne devrait pas être trop difficile.
Dans votre exposé, ou en réponse à une question, vous avez parlé de l'entente entre le Canada et l'Ontario. Il ne faut pas oublier qu'à l'heure actuelle, cette entente se limite à une très petite somme répartie sur une période de cinq ans. Cette entente pourrait être l'outil par lequel obtenir les fonds nécessaires, du moins de deux des ordres de gouvernement, le gouvernement fédéral et la province, afin d'atteindre l'objectif de restaurer complètement tous les secteurs préoccupants d'ici 2015. Les municipalités devront faire leur part pour participer à cet effort.
Enfin, la semaine dernière, nous avons eu le plaisir et l'honneur d'entendre devant notre comité le nouveau ministre chargé de l'infrastructure, M. Scott. Il nous a donné un aperçu de ce qui se fait actuellement et il nous a dit que des sommes relativement importantes seront investies dans le programme d'infrastructure. Il a également déclaré qu'il n'a pas encore pris de décision au sujet de l'attribution de quelque 1,4 milliard de dollars au titre de projets qui n'ont pas encore été déterminés. Je suis sûr que même une petite partie de cette somme pourrait être très utile si elle servait au rétablissement des secteurs préoccupants.
Mais pour être inscrit à la liste des projets d'infrastructure, il faut que les députés fédéraux et provinciaux manifestent une volonté politique, puisque les programmes d'infrastructure sont généralement mis sur pied et approuvés par les trois ordres de gouvernement.
º (1640)
Généralement—c'est une question de procédure—, ce sont les municipalités qui prennent l'initiative. Si toutes les municipalités avoisinantes incluaient dans la liste des fonds qu'ils demandent au gouvernement fédéral en matière d'infrastructure une certaine somme qui serait consacrée au rétablissement des 15 sites des Grands Lacs, les gouvernements fédéral et provincial auraient bien de la difficulté à ne pas en tenir compte. Par contre, si les municipalités ne présentent pas de demande pour obtenir une partie des fonds ou si elles ne négocient pas de mesures pour le rétablissement de ces sites, il y a peu de chances que le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral inscrivent ces mesures de rétablissement à leur liste.
Il faut donc communiquer avec les municipalités pour qu'elles lancent le processus. Et pour cela, l'un des moyens serait de communiquer avec l'Association des municipalités de l'Ontario, tout en obtenant parallèlement l'appui des maires des grands centres urbains, en commençant par ceux situés près du Saint-Laurent, entre autres Montréal, Cornwall, Kingston, Toronto et Hamilton, puis ceux des villes entourant les Grands Lacs. Lorsqu'une coalition de maires demanderont des fonds dans le cadre du programme d'infrastructure, il sera bien difficile de leur dire non.
Cela vous semble-t-il logique?
Mme Anne Mitchell: Oui, cela semble logique.
Nous collaborerions également avec les groupes communautaires locaux qui vivent dans ces municipalités afin de couvrir et le sommet et la base.
Le président: Si cela échouait, la solution de rechange serait de voir à ce que la prochaine entente Canada-Ontario contienne un financement suffisant pour atteindre cet objectif de 2015.
Enfin, Environnement Canada a communiqué à notre comité un rapport intitulé Menaces pour la disponibilité de l'eau au Canada. Cette étude a été réalisée par l'Institut national de recherche sur les eaux. Le chapitre 7 porte sur les pratiques et changements concernant l'aménagement du territoire et, plus particulièrement, l'agriculture. Vous avez parlé des pratiques agricoles. Dans cette étude, on examine les effets de l'exploitation agricole sur l'eau, les effets de l'irrigation, les tendances futures et les nouveaux enjeux. Ce document pourrait vous être très utile en ce qui a trait du moins aux éléments ruraux du programme.
D'autres chapitres pourraient également vous être utiles en ce qui concerne la conservation de l'eau. Par exemple, le chapitre 5 porte sur l'approvisionnement en eau des municipalités et sur le développement urbain.
Comme vous pouvez le constater, Ottawa est généralement le fournisseur éloigné de financement, mais il octroie très souvent des fonds lorsqu'on lui en fait la demande. Il faut toutefois que l'initiative vienne de quelque part, et dans ce cas-ci, il me semble que la première étape consisterait à susciter une volonté politique aux niveaux municipal, provincial et fédéral.
º (1645)
Mme Anne Mitchell: Monsieur le président, je vous remercie de ces observations et de ces conseils.
Le président: Nous passons maintenant au second tour.
Monsieur Barnes.
M. Rex Barnes (Gander—Grand Falls, PCC): Merci beaucoup d'être venue nous rencontrer aujourd'hui, madame Mitchell. C'est un plaisir de vous poser des questions au sujet des Grands Lacs.
J'ai été conseiller de la ville de Grand Falls—Windsor. Le conseil avait décidé qu'il fallait prendre des mesures pour protéger l'environnement, plus particulièrement dans le cas d'une de nos grandes rivières, que nous polluions. Nous sommes parfois allés à l'encontre des conseils des contribuables, car nous estimions que la collectivité devait agir. C'est ce qui se produit dans ce cas-ci. Les politiciens de la province doivent prendre position pour s'assurer que des mesures soient prises.
Il n'est pas mauvais que vous ne soyez pas financé par le gouvernement, car j'ai constaté par le passé que les organismes financés par le gouvernement ont généralement tendance à suivre les décisions de ce gouvernement. Sinon, le gouvernement peut leur retirer leur financement. Cela ne se produit pas toujours, mais il faut être très prudent. Nous avons besoin de groupes comme le vôtre pour défendre l'environnement.
D'après ce que j'ai compris, vous êtes à la croisée des chemins. Tout le monde se renvoie la balle au sujet des Grands Lacs, et il faut remettre ce projet sur ses rails. Tout d'abord, il faut faire accepter ce projet par les politiciens. Une fois qu'ils l'auront accepté, vous constaterez que les choses seront plus faciles. Ce qu'il vous faut faire, c'est communiquer avec l'ensemble des politiciens dont les circonscriptions sont situées autour des Grands Lacs et leur dire qu'il est temps d'agir, qu'il faut faire ce que l'on prêche et faire progresser les choses.
Les Grands Lacs font l'objet de nombreuses menaces. D'après vous, quelle est la plus grande de ces menaces, celle qui devrait être traitée immédiatement par les politiciens, pour sensibiliser la population au problème, et que devrait-on faire pour la contrer?
Mme Anne Mitchell: La chose la plus pratique que nous puissions faire immédiatement, c'est de rétablir les secteurs préoccupants. Pour ce qui est de sensibiliser la population, nous devons faire le lien entre les Grands Lacs, la santé et les changements climatiques, parce que tout cela est intégré.
Le président: Merci, monsieur Barnes.
Monsieur Bailey, voulez-vous faire une autre observation sur ce sujet ou sur un autre?
M. Roy Bailey: Non. J'aurai une déclaration à faire à la fin.
Le président: Madame Mitchell, merci beaucoup d'être venue faire le point avec nous dans ce dossier. Nous en entendons trop rarement parler.
Votre document contient une recommandation qui offre d'énormes possibilités. Vous préconisez d'éliminer les incitatifs fiscaux dans le cas de pratiques non durables, comme par exemple l'agriculture industrielle, d'en accorder pour encourager les pratiques durables. C'est un message à communiquer aux ministres des Finances du gouvernement fédéral et des provinces, surtout en ce qui a trait à l'agriculture industrielle. Cela pourrait se faire au moyen de conversations, d'échanges de correspondance, etc.avec les ministres concernés en Ontario, ainsi que dans d'autres ordres de gouvernement. Les incitatifs fiscaux peuvent être des outils très puissants.
Avez-vous d'autres observations?
Merci beaucoup de votre témoignage. Nous communiquerons probablement plus tard avec vous.
º (1650)
Mme Anne Mitchell: Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs du comité.
Le président: Monsieur Bailey.
M. Roy Bailey: Monsieur le président, je souhaite vous faire mes adieux, à vous et aux membres du comité, même s'ils ne sont pas très nombreux. En effet, je ne reviendrai pas la semaine prochaine et je ne siégerai pas aux autres réunions du Comité de l'environnement. J'ai siégé dans de nombreux comités, et je dois vous avouer que celui-ci m'a été le plus agréable. J'ai eu beaucoup de plaisir à travailler avec vous et je vous offre mes meilleurs voeux.
Mon PDG m'a dit que je resterais désormais à la maison.
Le président: Monsieur Bailey, nous avons eu beaucoup de plaisir à vous compter parmi nous. Mes collègues et moi avons beaucoup apprécié votre sagesse et vos interventions. Nous vous offrons nos meilleurs voeux, à vous et à votre PDG.
La séance est levée.