SDEV Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Sous-comité des droits de la personne et du développement international du comité permanent des affaires étrangères et du commerce international
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 23 mars 2005
¹ | 1535 |
Le président (L'hon. David Kilgour (Edmonton—Mill Woods—Beaumont, Lib.)) |
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD) |
Le président |
M. Joe Comartin |
Le président |
M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.) |
¹ | 1540 |
Le président |
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, PCC) |
Le président |
M. Joe Comartin |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD) |
Le président |
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC) |
Le président |
M. Stockwell Day |
Le président |
L'hon. Paddy Torsney (Burlington, Lib.) |
M. Stockwell Day |
¹ | 1545 |
L'hon. Paddy Torsney |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ) |
Mme Catherine Coumans (coordonnatrice de la recherche et programme de l'Asie et le Pacifique , Mines Alerte Canada) |
¹ | 1550 |
Le président |
Mme Catherine Coumans |
¹ | 1555 |
Le président |
Mme Catherine Coumans |
º | 1600 |
Le président |
º | 1605 |
Mme Catherine Coumans |
Le président |
Mme Diana Bronson (coordonnatrice, Programme sur la Mondialisation et les Droits humains, Centre international des droits de la personne et du développement démocratique) |
º | 1610 |
Le président |
M. Peter Goldring |
Mme Catherine Coumans |
M. Peter Goldring |
Mme Catherine Coumans |
M. Peter Goldring |
Mme Catherine Coumans |
M. Peter Goldring |
º | 1615 |
Mme Catherine Coumans |
M. Peter Goldring |
Mme Catherine Coumans |
M. Peter Goldring |
Mme Diana Bronson |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
º | 1620 |
Mme Catherine Coumans |
Mme Diane Bourgeois |
M. Craig Forcese (professeur de droit, Université d'Ottawa, à titre personnel) |
Mme Diane Bourgeois |
Mme Catherine Coumans |
º | 1625 |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
º | 1630 |
Mme Catherine Coumans |
Le président |
Mme Catherine Coumans |
Le président |
Mme Catherine Coumans |
L'hon. Ed Broadbent |
Mme Catherine Coumans |
L'hon. Ed Broadbent |
Mme Catherine Coumans |
º | 1635 |
Le président |
Mme Catherine Coumans |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Catherine Coumans |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Catherine Coumans |
º | 1640 |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Catherine Coumans |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Catherine Coumans |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Catherine Coumans |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Catherine Coumans |
L'hon. Paddy Torsney |
Le président |
Mme Catherine Coumans |
L'hon. Paddy Torsney |
L'hon. Ed Broadbent |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Catherine Coumans |
L'hon. Paddy Torsney |
Le président |
L'hon. Paddy Torsney |
Le président |
L'hon. Paddy Torsney |
Mme Diana Bronson |
º | 1645 |
M. Craig Forcese |
L'hon. Paddy Torsney |
M. Craig Forcese |
L'hon. Paddy Torsney |
Le président |
L'hon. Paddy Torsney |
Le président |
M. Stockwell Day |
Le président |
Mme Catherine Coumans |
M. Stockwell Day |
Mme Catherine Coumans |
Le président |
CANADA
Sous-comité des droits de la personne et du développement international du comité permanent des affaires étrangères et du commerce international |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 23 mars 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1535)
[Traduction]
Le président (L'hon. David Kilgour (Edmonton—Mill Woods—Beaumont, Lib.)): Dépêchons-nous, car cette réunion est importante.
Il est prévu que nous parlions des activités de la compagnie minière canadienne TVI Pacific Inc. aux Philippines.
Monsieur Comartin, je suis heureux de vous voir, parce que je voulais vous donner la parole dans une minute environ.
Nos témoins seront Catherine Coumans, coordinatrice de la recherche et du programme Asie et Pacifique à Mines Alerte Canada.
[Français]
Témoigneront à titre personnel, Onsino Mato et Godofredo Galos,
[Traduction]
et Diana Broson, du Centre international des droits de la personne et du développement démocratique.
Avant que nous commencions, je crois savoir que les députés connaissent un certain nombre des personnes qui ont exprimé le désir d'intervenir sur ce qui se passe au Sri Lanka et j'espère que M. Comartin va pouvoir s'exprimer avec l'aval de tous les membres. M. Day voulait, lui aussi, faire une déclaration, ce dont M. Bains est au courant, mais il n'est pas encore ici.
Je vais donc vous demander, avec votre permission, de donner la possibilité à M. Comartin de faire une brève déclaration, puisqu'il rentre tout juste du Sri Lanka.
Monsieur Comartin, vous avez la parole.
M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): Merci, monsieur le président. Je serai bref.
Nous nous sommes effectivement rendus au Sri Lanka. Nous étions cinq parlementaires dont un sénateur. Côté députation, j'étais en compagnie de Maria Minna, de Derek Lee et de Pierre Poilievre du parti Conservateur. Nous voulions évaluer la situation dans le cadre du cessez-le-feu ainsi que les possibilités de reprise des négociations de paix. Nous étions accompagnés par une délégation commerciale assez importante d'environ 20 membres qui, si je ne m'abuse, étaient tous originaires du Sri Lanka. Pendant que nous étions là-bas, nous avons profité de l'occasion pour évaluer les dégâts occasionnés par le raz-de-marée.
Je vous dirais simplement que, vers la fin de l'année, les risques de reprise des combats étaient assez importants. Ces risquent existent encore, mais d'après les informations que nous avons reçues, surtout de groupes indépendants notamment d'un certain nombre d'ONG internationales, il se sont tout de même atténués à la suite du tsunami.
Je pense que le Canada pourrait jouer un rôle important sur place. Lors des réunions que nous avons eues avec certains représentants des Tigres Tamouls, nous avons soulevé la question des enfants soldats et nous leur avons dit ceci : ils ont signé un accord ou un protocole avec l'UNICEF par lequel ils s'engageaient à ne pas employer d'enfants soldats et à accorder un certain traitement à ceux qu'ils avaient déjà recrutés, ce qui fondamentalement consistait à les rendre à leurs familles et à leur milieu. Or, l'application du protocole est remise en question et nous avons donc proposé à nos interlocuteurs de permettre à un observateur de l'ONU d'accéder à la région sous contrôle des TLET. Je n'ai pas la prétention de vous suggérer ce que vous devez faire, monsieur le président, mais je pense que votre comité devrait poursuivre cette initiative.
Par ailleurs, nous avons aussi parlé de la question des mines terrestres. Les Tamouls participent à des opérations de déminage en collaboration avec leurs adversaires. Les militaires, qui ont posé la plupart des mines terrestres au Sri Lanka, ont remis les cartes indiquant les terrains minés. Nous avons suggéré aux Tigres Tamouls, qui ne tenaient pas de carte et qui ont peut-être posé 10 p. 100 des mines antipersonnel, de suggérer au gouvernement qu'une fois le processus de paix réamorcé et, nous l'espérons, une fois qu'un règlement satisfaisant aura été atteint, d'adhérer à la Convention d'Ottawa. Ils ont pris cet avis en délibéré, mais je dois dire qu'ils y ont réagi assez positivement, tout comme le côté gouvernemental, quand nous lui en avons parlé.
Le président: Merci.
M. Day nous a indiqué qu'il voulait faire une déclaration à ce sujet également. Pouvez-vous vérifier s'il va être ici sous peu? Nous allons devoir passer à l'autre point à l'ordre du jour.
M. Bains veut-il faire une déclaration?
Une voix: Il arrive.
Le président: Eh bien, monsieur Comartin, vous pourriez peut-être traiter de certaines de ces questions et si je répète une partie de ce que vous avez dit, n'hésitez pas...
Je crois savoir que Human Rights Watch a demandé aux États membres de l'ONU de condamner sans équivoque le recrutement d'enfants soldats par les TLET et de suspendre tout appui financier, politique ou militaire jusque-là accordé aux Tigres Tamouls, tant que qu'ils ne cesseront pas de recruter des enfants et qu'ils ne laisseront pas partir ceux qu'ils ont actuellement dans leurs rangs.
Les TLET continent de vouloir recruter des enfants. Selon l'UNICEF, 3 516 enfants auraient été recrutés par les Tigres Tamouls durant le cessez-le-feu. Toujours selon l'UNICEF, une vaste campagne de recrutement a été entreprise après le déclenchement du cessez-le-feu, les TLET ayant accès à des régions jadis qui étaient jadis contrôlées par le gouvernement.
Moins de 50 p. 100 des enfants vont à l'école, de nombreux parents préférant les garder chez eux par crainte qu'ils ne soient enlevés par les TLET entre la maison et l'école.
Pendant que nous attendons, voulez-vous ajouter quoi que ce soit à ce que vous venez de nous dire à ce sujet?
M. Joe Comartin: Nous sommes au courant de ce rapport. Quand nous avons rencontré les gens de l'UNICEF sur le terrain, à Jaffna, ils nous ont dit que, selon les renseignements les plus récents dont ils disposaient, les choses sont en train de changer, notamment parce que le recrutement semble avoir diminué, du moins un peu. Encore une fois, il s'agit d'un tout petit secteur qui n'est pas représentatif de tout ce qui se passe dans la région et il faut donc être prudent.
Ce même bureau de l'UNICEF a constaté qu'au cours des deux ou trois derniers mois il y avait eu 26 ou 27 cas d'enlèvement d'enfants dans cette région. Trois seulement étaient âgés de 12 à 16 ans, les autres ayant 16 ou 17 ans. Tous les enfants de moins de 16 ans ont été très vite renvoyés dans leur foyer, une fois leur âge connu, et les Tigres Tamouls étaient en train de négocier le retour des autres. Selon l'information communiquée par cet employé de l'UNICEF, il semble que les TLET soient en train de changer et qu'ils se montrent beaucoup plus disposés à collaborer.
Je ne voudrais pas trop insister sur la question, mais je pense que le comité doit savoir que, dans cette région, les choses semblent évoluer pour le mieux en ce qui a trait à l'exploitation des enfants.
Le président: Monsieur Bains.
M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.): Merci.
Je vais très brièvement ajouter quelques points à ce qui vient d'être dit et je vous ferais brièvement part de mon expérience en Asie du Sud et au Sri Lanka. Nous avons rencontré le parti de l'opposition, les leaders des Tamouls, pour leur dire que nous nous préoccupions du sort des enfants soldats.
Ils nous ont dit avoir effectivement perdu beaucoup d'enfants soldats, 700 à 2 000 enfants durant cette période, selon leurs statistiques. Ils nous ont également précisé qu'ils veulent profiter de la catastrophe du tsunami pour accélérer le processus de paix.
Cependant, le premier ministre a exprimé des réserves à ce sujet et il avait demandé à la délégation d'obtenir une réponse des responsables tamouls à cet égard.
Je tenais à le préciser pour tout le monde.
¹ (1540)
Le président: Merci, monsieur Bains.
Monsieur Goldring.
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, PCC): Je voulais dire une chose. Ne trouvez-vous pas que le Canada, qui est signataire de la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, dont l'article 38 déclare qu'il n'y a pas de problème à recruter des enfants soldats de 15 ans et plus, est en porte-à-faux? Si nous avons signé cette convention, cela veut dire que nous sommes d'accord avec le fait qu'un enfant de 15 ans peut être volontaire.
Ne sommes-nous pas un peu hypocrites en encourageant d'autres pays à décréter que, jusqu'à 18 ans, les adolescents sont des enfants, quand, en fait, nous avons signé une convention il y a 10 ans et que nous n'avons pas réellement fait quoi que ce soit pour que les choses changent?
Le président: Nous n'allons pas régler cette question aujourd'hui, monsieur Goldring. Je suppose qu'à la fin de cette séance, nous déciderons si nous voulons en avoir une autre sur la question des enfants soldats et de l'âge tolérable pour le recrutement, comme vous le disiez. Nous y reviendrons.
Monsieur Comartin.
M. Joe Comartin: Pour en revenir sur une chose qu'a mentionné M. Bains, c'est-à-dire l'espoir que le tsunami rapproche les partis, il s'agit d'une des rares conséquences positives de cette catastrophe.
Les partis ont négocié un protocole de paix avec la Norvège, qui fait office d'intermédiaire. Nous avons rencontré les gens du secrétariat à la paix, le vendredi soir, veille de notre départ. Il ne restait plus qu'une pierre d'achoppement pour parvenir à un règlement et je crois que les gens s'attendaient à ce que le tout soit réglé d'ici à aujourd'hui.
Le protocole exigera la collaboration des forces gouvernementales et des forces tamouls à la fourniture d'une aide dans les deux secteurs. On espère que, ce faisant, les deux parties se feront progressivement confiance et que cela favorisera la reprise des négociations de paix.
Le président: Je vois que nous avons parmi nous le Haut-commissaire au Sri Lanka, mais je crois que Son Excellence désire ne pas faire de déclaration aujourd'hui.
Elle nous a effectivement indiqué qu'elle ne voulait pas intervenir.
Nous allons accueillir deux témoins qui rentrent des Philippines, mais comme convenu, je vais demander à M. Day, puis à M. Broadbent...
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD): Je désire faire un rappel amical au Règlement, monsieur le président, si je puis m'exprimer ainsi, parce qu'à propos de la question inscrite à l'ordre du jour, j'allais justement dire que nous avons fait venir deux témoins des Philippines et je crois savoir que nous avons unanimement convenu que nous ne consacrerions pas plus de 10 minutes environ aux déclarations sur le Sri Lanka, qui sont tout de même très importantes.
Le président: Je pense que vous avez raison.
Êtes-vous prêt à faire une déclaration très brève, monsieur Day?
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC): Vous voulez savoir si je veux parler de la situation au Sri Lanka?
Le président: Oui.
M. Stockwell Day: Oui, et je suis heureux que nous accueillions ces témoins-là.
Je ne prendrai que deux ou trois minutes pour parler de la question de l'utilisation des enfants soldats par les Tigres Tamouls, du fait que ces enfants sont recrutés, comme l'ont signalé l'UNICEF et d'autres, pour conduire des missions suicides absolument horribles obéissant au culte de la mort, et du fait que, non seulement l'UNICEF mais aussi la mission de surveillance au Sri Lanka, le gouvernement norvégien — qui contrôle le cessez-le-feu — et d'autres sont absolument consternés par toute cette obscénité. C'est de cela dont il est question.
Human Rights Watch a demandé au Canada, en sa qualité de membre de l'ONU, de suspendre toute aide financière, politique ou militaire aux Tigres Tamouls. J'estime que c'est effectivement la position que nous devons adopter. Du côté de l'opposition, nous entendons travailler dans ce sens. J'espère que tous les députés seront d'accord avec cela, que nous ne ferons pas de politique partisane et que nous parviendrons à nous entendre sur le genre de mesure à prendre dans l'avenir à ce sujet.
Le président: Monsieur Torsney.
Après cela, nous passerons à notre ordre du jour.
L'hon. Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Je vais vérifier les retranscriptions, mais je me demande si M. Day ne vient pas de laisser entendre que le gouvernement du Canada appuie financièrement ou politiquement les Tigres Tamouls. Je me demande si c'est ce qu'il vient effectivement de déclarer.
M. Stockwell Day: Il n'a jamais été clairement décidé de bannir les Tigres Tamouls. Et non, je ne parlais pas de soutien par le gouvernement. Je voulais dire que nous devrons prendre toutes les mesures possibles pour qu'il soit bien clair que les Tigres Tamouls et toutes organisations qui y sont associées au Canada seront inscrits sur la liste des organisations frappées d'une mesure d'interdiction. Jusqu'ici, le gouvernement du Canada s'est refusé à le faire et j'estime, pour ma part, qu'il devrait adopter cette mesure.
¹ (1545)
L'hon. Paddy Torsney: Je vérifierai les bleus.
Le président: Je crois que nous pouvons dire qu'il y a effectivement consensus.
Nous allons maintenant directement passer aux points de l'ordre du jour. À la fin de la réunion, nous déterminerons ce que nous désirons faire au sujet de la situation au Sri Lanka.
Je suis désolé de vous avoir fait attendre, surtout que vous avez fait ce long voyage de Manille.
Monsieur Broadbent, avez-vous une petite motion à proposer?
L'hon. Ed Broadbent: Il s'agit d'un bref rappel au Règlement dont je me suis entretenu avec mes collègues de ce côté-ci. Le professeur Craig Forcese, de l'Université d'Ottawa, qui a déjà comparu devant le comité, faisait également partie de la délégation de Droits et démocratie. Étant donné que nous voulons nous en tenir à de brèves déclarations, j'aimerais recommander que, même si M. Forcese ne prend pas la parole devant nous, nous lui adressions toute question éventuelle d'un point de vue juridique, en rapport avec ce que Mme Bronson va nous dire au nom de Droits et démocratie.
[Français]
Le président: Madame Bourgeois, est-ce que ça va pour vous?
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Oui.
[Traduction]
Mme Catherine Coumans (coordonnatrice de la recherche et programme de l'Asie et le Pacifique , Mines Alerte Canada): Monsieur le président Kilgour et honorables membres du sous-comité. Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole devant vous.
Avant que je ne débute mon exposé, j'aimerais déposer cette lettre de Me Bennett Jones, avocat retenu TVI Pacific, adressée à Mines Alerte Canada. Le signataire de cette lettre exige que nous retirions de notre site Internet tous les éléments d'information concernant TVI Pacific et veiller à ce que toute information qui sera communiquée lors des audiences soit absolue exacte. En outre, il menace Mines Alerte Canada, le conseil d'administration et moi-même de poursuites. Je dépose l'original de cette lettre et sa traduction.
Mines Alerte Canada, qui a été fondée en 1999, surveille les activités de TVI Pacific dans l'île de Mindanao depuis 2000, après notre première rencontre avec le chef du peuple autochtone Subanon, M. Mato, et le frère Albert Bael du diocèse catholique local qui est venu au Canada en 2000 pour nous faire part de sa profonde inquiétude au sujet de cette exploitation minière qui n'en était qu'à l'étape de projet à l'époque.
Mines Alerte Canada a effectué un examen rigoureux des normes internationales en matière d'exploitation minière responsable. Mes commentaires aujourd'hui sont fondés sur une comparaison entre les activités de TVI à Canatuan et ces normes de pratiques exemplaires, notamment en ce qui concerne les droits de la personne. Ils font également écho à la visite que j'ai moi-même effectuée à la mine et aux résidents de la localité, pas plus tard qu'en octobre 2004.
Je soutiendrai pourquoi il convient que le Canada doit se doter d'outils extraterritoriaux qui nous permettront de nous assurer plus efficacement que les activités des compagnies canadiennes sont en harmonie avec les valeurs du Canada et ses objectifs en matière de développement. Je vous parlerai aussi du rôle regrettable que joue le Canada en soutenant cette entreprise par l'entremise de son ambassade et de l'ACI.
Je commencerai par vous parler brièvement de la question des droits territoriaux des Autochtones. Les lois philippines sur les mines, de 1995, et sur les droits de la personne, de 1997, interdisent l'exploitation minière dans les régions occupées depuis des « temps immémoriaux » par des collectivités autochtones, à moins d'avoir obtenu leur consentement libre, préalable et informé.
La nécessité d'obtenir le consentement libre, préalable et informé des peuples autochtones avant de mener des activités de développement sur leurs terres est également soulignée dans les conclusions de récentes études multipartites, comme l'examen des industries d'extraction de la Banque mondiale, en 2003, le rapport de l'Initiative minière mondiale, sous l'égide de l'industrie minière, en 2002, et le rapport de la Commission mondiale des barrages, en 2000. Elle est également reconnue dans les lois et les instruments internationaux.
Les normes en matière d'exploitation minière responsable exigent que les compagnies minières obtiennent le consentement libre, préalable et informé des communautés autochtones avant le début de l'exploitation, mais aussi avant chaque phase d'exploitation et de post-exploitation. Cela veut dire que ce consentement doit être obtenu sans que l'on ait recours à la coercition ou à la manipulation. Ce genre d'accord doit être obtenu avant que l'État ou une tierce partie ne donne une quelconque autorisation et avant que la compagnie n'entreprenne les activités qui vont concerner une communauté, ses terres, ses territoires ou ses ressources. Le consentement doit être informé, c'est-à-dire obtenu après la participation et la consultation des collectivités locales et de leurs membres, en fonction de la divulgation complète de tous les aspects pertinents du projet proposé par la compagnie et par l'organisme qui octroie le permis d'exploitation.
Pour ce qui est de l'obtention du consentement libre, préalable et informé, la loi philippine sur le droit des peuples autochtones stipule que la compagnie doit respecter les traditions culturelles locales, la façon dont les peuplades sont organisées ainsi que les structures de décision et de gouvernance.
Il est important que TVI démontre qu'elle a entrepris ses opérations minières sur la base d'un consentement libre, préalable et informé obtenu par la majorité des foyers apparaissant dans la liste des titulaires de droits de revendication ancestraux légitimes sur la région où travaille TVI.
Pour ce qui est du problème du déplacement et de la réinstallation provoqué par l'exploitation minière, celui-ci est devenu tellement grave qu'on lui a attribué un acronyme, en anglais — MIDR. Il est de plus en plus reconnu que le déplacement de population est l'une des principales sources d'appauvrissement et d'instabilité sociétale liée aux grandes projets de développement dans le monde entier, notamment parce que les populations touchées sont généralement déjà pauvres et marginalisées.
La Banque mondiale a reconnu la gravité de ces risques dans sa politique sur la réinstallation non volontaire. La réinstallation devrait toujours être une solution de dernier recours et ne jamais avoir lieu sans le consentement libre, préalable et informé des personnes touchées, signifié dans un accord de consentement exécutoire. Autrement dit, il ne doit pas y avoir d'éviction et la réinstallation volontaire doit être précédée d'une évaluation indépendante des impacts sur les personnes déplacées, tenant compte de tous les faits possibles que le déplacement entraînera pour les personnes et les collectivités. Aucun déplacement ne devrait avoir lieu avant la conduite d'une évaluation des risques et des conséquences possibles, la conclusion d'une entente avec les personnes touchées et le versement d'une indemnité.
¹ (1550)
Il est généralement admis que la nouvelle situation doit être meilleure que l'ancienne afin de compenser les pertes découlant de la réinstallation. Dans le cas qui nous intéresse, il est question d'une communauté mixte autochtone subanon et d'une communauté de migrants visayans qui se trouve dans la région immédiate d'une zone d'exploitation minière à expansion rapide. J'ai ici des photos qui montrent que la mine vient jusqu'à la porte des gens. je vais les déposer.
Le président: Ces photographies vont-elles faire partie de votre témoignage?
Mme Catherine Coumans: Oui, je vais les déposer dans le cadre de mon témoignage.
TVI est en train de relocaliser certaines personnes et d'en évincer d'autres. J'ai aussi avec moi une copie des avis d'éviction que je vais déposer.
Compte tenu de cette situation, il est important que TVI fasse la preuve qu'elle a effectué une évaluation indépendante de l'impact du déplacement, qu'elle a conclu un accord exécutoire et transparent avec tous les membres des collectivités touchées avant d'entreprendre des activités qui vont occasionner le déplacement de certaines personnes, qu'elle a versé des dédommagements avant d'entreprendre les activités qui vont provoquer le déplacement de certaines personnes, comme le prévoit l'accord exécutoire. Enfin, elle devra prouver que les personnes déplacées se retrouvent dans une meilleure situation qu'avant. Or, tel n'a pas été le cas, parce que nous parlons ici de gens qui vivaient sur les contreforts de la montagne, là où l'exploitation minière a débuté avant qu'elle ne s'étende plus bas.
Dans sa déclaration devant ce comité, qui sera déposée plus tard et que certains d'entre vous ont déjà reçue, le chef autochtone héréditaire, le timuay Jose Anoy, s'est inquiété du fait que le déplacement de certains pourrait ne pas être permanent, parce que ces gens-là devront peut-être déménager une autre fois dans l'avenir à cause des plans d'expansion de la mine. C'est ce genre de déplacement permanent qui, selon la Banque mondiale et d'autres organisations, conduit le plus sûrement à l'appauvrissement des populations.
Le 8 février 2005, plus de 100 personnes se disant des paysans de Canatuan ont envoyé une lettre au gouvernement de la province, Zamboanga del Norte, pour lui faire part de leurs inquiétudes au sujet des relocalisations. Je vais également déposer cette lettre. Elle est en visayan et elle a été traduite en anglais et en français. Elle porte les signatures des intéressés.
En troisième lieu, je vais vous parler du commerce militarisé. TVI exerce ses activités dans une région fortement militarisée de l'île de Mindanao, dans le sud-est des Philippines. Depuis une trentaine d'années, cette région est le théâtre de l'insurrection sécessionniste musulmane. L'armée américaine est actuellement stationnée dans la région, croyant que des forces liées à al-Qaïda y sont actives. Cette région est si dangereuse que l'ambassade canadienne conseille aux voyageurs canadiens de l'éviter.
C'est dans ce contexte que TVI Pacific a fait venir un grand nombre de gardes de sécurité armés. Ces paramilitaires ont été entraînés par l'armée philippine, mais sont payés par TVI Pacific. Ils ont érigé de nombreux barrages routiers autour de la concession minière et également autour des collectivités installées à l'intérieur de la concession. J'ai également des photos de ces postes de contrôle.
En octobre 2004, j'ai dû franchir cinq postes de contrôle pour me rendre là où se trouve la mine. Le premier point de contrôle se situe à l'extérieur du site d'exploitation minière, le long d'une route publique, et non à l'intérieur de la concession.
À l'un de ces postes, à proximité de la zone d'exploitation minière, les gardes avaient installé une grande affiche sur laquelle ils s'identifiaient comme des « combattants de la jungle » qui voulaient « changer les choses ». Vous en avez également une photo. Ils ne paraissent pas très professionnels.
Les Subanons et les résidents de la ville m'ont dit qu'on leur avait interdit le franchissement de ces points de contrôle. Les forces de sécurité de TVI ont provoqué de nombreux affrontements violents. J'invite les membres du comité, qui désireraient obtenir plus de détails à ce sujet, à consulter la récente publication de PipLinks et de Christian Aid. Les auteurs y décrivent les incidents provoqués par ces paramilitaires. J'ai également des copies de ce rapport. Malheureusement, il n'est qu'en anglais et j'en suis désolée.
Amnistie internationale et d'autres organisations ont fait savoir que les compagnies ne devraient pas exercer leurs activités dans des régions où elles sont obligées de recourir à des forces militaires ou d'appliquer des mesures de sécurité excessives pour poursuivre leurs opérations, puisque ces conditions peuvent conduire à des violations des droits de la personne. Une compagnie responsable doit adhérer au Pacte mondial des Nations Unies, aux principes internationaux Sullivan et aux U.S./U.K. Voluntary Principles on Security and Human Rights. Ces ententes engagent les signataires à respecter les accords internationaux sur les droits de la personne et à renoncer à l'utilisation de forces armées dans le cadre de leurs activités. Les compagnies qui évoluent dans des zones de conflit sont informées qu'elles doivent effectuer une étude d'impact sur les situations de paix et de conflit afin d'évaluer le risque de violence ou de tension engendrée par leurs activités.
Je vais maintenant vous parler de la façon dont je perçois certains volets de l'intervention du gouvernement du Canada. Quand j'étais à Canatuan, j'ai rencontré les femmes du village qui m'ont spontanément parlé d'un projet d'élevage de chèvres, lancé par la compagnie, projet qui s'adressait aux femmes de la région. Elles m'ont dit que seules en bénéficiaient les femmes des familles qui soutiennent TVI Pacific et qui ont des membres qui travaillent pour cette compagnie.
¹ (1555)
Ce n'est que plus tard que j'ai appris que cet argent provenait de l'ambassade canadienne, qu'il avait été prélevé sur le Fonds canadien, et qu'il était passé par une compagnie privée, TVI Pacific, pour aboutir dans ce projet communautaire. Cela mérite une explication plus approfondie et j'y reviendrai dans un instant.
Je veux vous parler de deux autres choses. D'abord, le fait que TVI Pacific a affiché sur son site Web les noms de personnes qu'elle calomnie. TVI Pacific affiche régulièrement ces allégations et celles de ses employés sur son site Internet, contre tout résident local et toute organisation qui s'oppose à ses activités dans la région de Siocon. Les noms y apparaissent en clair. Sur ce site Internet, on nomme des gens qui sont associés à des actes parfois très violents, non justifiés, et dans un cas... qui a été débouté en cour. Le site Internet de TVI comporte régulièrement ce genre de propos diffamatoires.
Le président: Puis-je vous interrompre?
J'ai ici une copie de la page Internet de TVI Pacific Inc. et vous vouliez sans doute parler du paragraphe où l'on accuse M. Mato. Je vous le lis :
Les divisions se sont accentuées quand M. Sapian et son frère, tous deux chefs de la faction adverse, ont perdu la vie dans deux embuscades tendues par des guérillas de la MILF contre des véhicules de TVI; plusieurs résidents de la collectivité ont accusé, par voie d'affidavits (et sans preuve à l'appui) M. Mato d'avoir organisé ces embuscades. |
Est-ce le paragraphe dont vous vouliez parler?
Mme Catherine Coumans: C'est effectivement un endroit où cela apparaît, mais ce n'est pas le seul. La compagnie a essayé de poursuivre M. Mato en justice, mais à chaque fois elle a été déboutée. Je crois que la dernière fois où M. Mato a pu blanchir son nom remonte au 14 mars. Les tribunaux ont déclaré que les accusations étaient sans fondement, mais il demeure que la compagnie continue de proférer ces accusations sur son site Internet.
M. Mato n'est pas le seul à être mentionné ainsi. Des organisations et des particuliers le sont également, notamment le maire, et la compagnie allègue toutes sortes de liens avec différentes opérations. N'oubliez pas que nous sommes dans un contexte où tout est très militarisé et où la situation est très dangereuse. Tout le monde est armé dans cet endroit où la violence règne.
Dès que des allégations sont formulées contre des gens, que des personnes sont décédées, les membres des familles se posent des questions. Tout cela est très dangereux et je crois que c'est un problème important. Cette pratique est à la fois offensante et dangereuse pour les personnes et les organisations mentionnées. Une compagnie minière responsable ne devrait pas se servir de son site Internet pour calomnier ses opposants.
Passons, très brièvement, sur les questions environnementales qui vont sans doute nous éclairer le plus. Il convient de relier les préoccupations environnementales aux droits de la personne dans cette affaire, notamment au droit à la subsistance, à la sécurité alimentaire et au moyen d'existence durable des collectivités situées dans les environs et en aval, droits qui sont actuellement menacées par des mesures environnementales inférieures aux normes en vigueur sur le site minier. Les sites miniers devraient contenir, à leur niveau, les effluents toxiques de la mine. Ils devraient éviter qu'ils ne se retrouvent dans l'environnement. TVI Pacific devrait faire des efforts pour installer des terrils et mettre progressivement en valeur les installations abandonnées.
Sur les photos, vous voyez les bassins de sédimentation que j'ai visité en octobre 2004. J'espère que, depuis lors, la compagnie a entrepris des travaux de maintenance de ces bassins, parce que d'après les photos affichées sur son site Internet, ceux-ci semblent être en meilleur état. En octobre 2004, ils étaient dans un état déplorable, ce qui trahissait le manque de responsabilité de la compagnie.
Il y a également un terril qui contient d'importantes quantités de reflux de broyage toxiques. Il semble qu'il n'est plus utilisé. Je me suis entretenue avec les ingénieurs de la mine à l'époque qui m'ont déclaré que ce terril ne servirait plus et qu'ils allaient en ouvrir un autre. Ils m'ont indiqué que le nouveau terril serait ouvragé et que la compagnie responsable se chargerait de la mise en valeur progressive des installations abandonnées. Autrement dit, les tuyaux d'amené des déchets vers l'ancien site seraient retirés et l'emplacement serait mis en valeur.
Parlons à présent du rôle de l'ambassade du Canada et de l'ACDI dans ce dossier.
Selon le site Internet de TVI Pacific, il est clair que nous sommes en présence d'un vieux conflit en matière de droits de la personne, comme je l'ai mentionné. Même d'après le site Internet de la compagnie, on se rend compte qu'il y a des problèmes sur place et que ceux-ci ne sont pas nouveaux. La Commission des droits de l'Homme aux Philippines, l'évêque Jose Manguiran et d'autres évêques se sont dit préoccupés par les violations des droits de la personne, de même que le maire de Siocon, Cesar Soriano, et le rapporteur spécial des Nations Unies, Rudolfo Stavenhagen, qui, en décembre 2002, a officiellement porté plainte auprès du groupe de travail des Nations Unies sur les populations autochtones.
Compte tenu des faits que je viens de vous exposer, il y a lieu de s'inquiéter que TVI Pacific semble jouir d'un appui et d'une confiance anormalement élevée de la part de l'ambassade du Canada à Manille. L'ancien ambassadeur, Robert Collette, et son successeur, Peter Sutherland, ont fait l'éloge de la compagnie dans les médias philippins et déclaré que, selon eux, le projet de Canatuan va devenir un modèle d'exploitation minière responsable. En outre, l'ACDI a récemment démontré sa confiance dans TVI Pacific en acheminant de l'argent du Fonds canadien à TVI Pacific, en passant par l'ambassade, pour un projet de développement communautaire.
En l'absence d'une loi exécutoire visant à obliger les compagnies canadiennes à rendre compte de leurs activités à l'étranger, nous pourrions au moins nous attendre à ce que nos représentants canadiens à l'étranger s'abstiennent de soutenir des compagnies qui sont constamment visées par des allégations de violation des droits de la personne et de non-respect de l'environnement par une diversité de sources, dont l'Église catholique de la région, la Commission des droits de la personne des Philippines et le rapporteur spécial des Nations Unies.
Je conclurais rapidement mon propos en vous faisant part de trois recommandations :
D'abord, j'encourage les membres du sous-comité à maintenir leurs efforts visant à faire adopter une loi qui obligerait les compagnies canadiennes exerçant leurs activités n'importe où dans le monde à se plier à un code de conduite fondé sur les normes internationalement reconnues relatives aux droits de la personne, au travail et à l'environnement. Il en existe des exemples, mais je ne prendrai pas le temps de vous en parler tout de suite.
Deuxièmement, je recommande aux membres du sous-comité d'inciter TVI Pacific à collaborer à une évaluation indépendante des répercussions de ses activités à Canatuan sur les droits de la personne. La compagnie annonce clairement qu'elle veut être une compagnie responsable. Je pense que c'est une ouverture. Il existe effectivement des problèmes, du moins des problèmes allégués, même s'ils ne sont pas forcément confirmés, et il existe une possibilité de lever le doute en incitant la compagnie à collaborer à la tenue d'une évaluation indépendante de ses activités sur les droits de la personne.
º (1600)
Troisièmement, j'encourage les membres du sous-comité à se pencher sur l'utilisation, par l'ACDI, du Fonds canadien à Canatuan et, si jamais l'ACDI souhaitait poursuivre ce programme, à exiger une évaluation d'impact sur les situations de paix et de conflit pour le projet. Aussi étrange que cela puisse paraître... il est conseillé que l'ACDI procède à une évaluation indépendante d'impact sur les situations de paix et de conflit à l'égard du projet de Mindanao. Si cela n'a pas été fait à Mindanao, je recommande que l'ACDI se livre à une telle évaluation.
Avant de rendre le micro, je tiens à dire que quelqu'un devait se trouver ici : une femme autochtone membre du groupe de travail de l'ONU sur les populations autochtones. Elle nous a fait parvenir une déclaration dont j'ai proposé de faire la lecture au greffier. J'ai demandé à quelqu'un de le faire. Est-ce que nous avons...?
Le président: Comme il faudrait une vingtaine de minutes pour la lire, nous pourrions simplement la joindre à la retranscription de cette réunion?
º (1605)
Mme Catherine Coumans: Très bien, c'est ce que nous allons faire.
Le président: Allez-y, madame Bronson.
[Français]
Mme Diana Bronson (coordonnatrice, Programme sur la Mondialisation et les Droits humains, Centre international des droits de la personne et du développement démocratique): Merci beaucoup pour l'invitation à venir témoigner aujourd'hui. Je représente Droits et Démocratie, une création du Parlement canadien. Je crois que vous connaissez notre organisme et que vous connaissez nos programmes. Je n'irai donc pas plus en détail.
[Traduction]
On m'a demandé de parler de la situation des compagnies minières canadiennes et des droits de la personne en général. Comme je connais pas personnellement le cas de TVI aux Philippines, je ne pourrai pas vous en parler.
Au cours des 10 dernières années, dans le cadre des dossiers sur la mondialisation et les droits de la personne, à Droits et démocratie, nous avons été saisis de plusieurs plaintes émanant de groupes dans les pays en développement au sujet de compagnies minières canadiennes. Nous n'en avons traité qu'une petite fraction et, pour vous donner une idée des pays d'où nous arrivent des plaintes crédibles au sujet des pratiques minières qui ont un effet négatif direct sur les droits de la personne, je mentionnerai le Ghana, le Soudan, la République démocratique du Congo, le Kenya, la Tanzanie, l'Inde, l'Indonésie, le Tibet, le Mexique, le Guatemala, le Pérou, le Chili, l'Argentine et la Colombie.
Dans certains cas, les compagnies canadiennes se sont rendues complices de violations graves au titre des droits de la personne, violations qui ont été documentées par des enquêtes gouvernementales ou de l'ONU. En République démocratique du Congo, par exemple, les opérations d'exploration minière ont été particulièrement brutales et des choses horribles se sont produites. Aujourd'hui, ce n'est plus uniquement l'exploitation minière qui est en cause, mais il est impossible de comprendre le conflit actuel et son origine sans écarter tout ce qui touche aux ressources naturelles.
Par ailleurs, la communauté internationale est de plus en plus au courant des problèmes que pose l'extraction de ressources naturelles. À cause des problèmes persistants dans ce secteur, une enquête a été déclenchée et, l'année dernière, la Banque mondiale a publié un rapport à la suite de son examen des industries extractives. Dans son étude, la Banque mondiale a examiné de près l'ensemble des problèmes associés à l'extraction des ressources sur la planète ainsi que l'incidence de ce genre d'opération sur le développement. Elle a produit un rapport très complet qui renferme des recommandations fondamentales en matière de droits de la personne. Près du tiers de ce rapport est consacré à cette dernière question. Malheureusement, l'administration de la Banque et les gouvernements qui sont représentés à son conseil d'administration ont laissé tomber la question des droits de la personne et n'ont tenu compte de presque aucune recommandation. Comme on pouvait s'y attendre, la Banque a dit qu'elle était une institution financière et que les droits de la personne échappent à son mandat.
Toutefois, dans une économie mondialisée, de telles distinctions n'ont plus leur raison d'être. Toutes les institutions internationales devraient être régies en sorte de travailler ensemble et non l'une contre l'autre. Nous devons trouver des façons d'amener les acteurs du secteur privé, même les plus importants d'entre eux, même ceux qui ont des opérations mondialisées, à adhérer aux mêmes principes des droits de la personne que les États et les particuliers. Avant que les gouvernements nationaux appuient des entreprises pour leur permettre d'investir à l'étranger, que ce soit financièrement ou diplomatiquement ou par l'application d'un de leurs outils, ils doivent veiller à ce que ces entreprises ne soient pas complices ou directement responsables de violations de droits de la personne.
Malheureusement, nous ne disposons, au Canada, d'aucun processus allant en ce sens. Il n'y est pas possible de vérifier cela, pour l'instant.
Je tiens à être bien précise sur ce que j'affirme au sujet de la responsabilité des grandes sociétés. Ce sont, principalement, les États qui doivent assurer le respect des droits de la personne. Eux seuls ratifient les traités internationaux énonçant leurs obligations en la matière, et ils le font sur une base volontaire. Je crois que les compagnies, les gouvernements et les ONG ont conclu une entente quasiment universelle stipulant que la responsabilité première incombe aux États.
En revanche, le volet du droit international de l'Homme qui n'est pas très clair est celui des obligations dont sont investies les compagnies. Cela fait actuellement l'objet d'un débat. De nombreuses sociétés ont incorporé les principes de respect des droits de la personne dans leur code de conduite et il existe, dans les lignes directrices de l'OCDE, dans la déclaration du BIT, dans le contrat mondial et dans d'autres initiatives multilatérales des déclarations d'ordre général sur les droits de la personne. Si tout cela est très bien, ces déclarations manquent de force parce qu'elles ne sont pas exécutoires et qu'elles ne sont pas complètes ou détaillées sur le plan des droits de la personne.
J'aimerais conclure en vous parlant de deux initiatives qu'il vaut la peine d'appuyer, selon moi, et qui semblent promettre une meilleure intégration des droits de la personne dans les activités des grandes sociétés et dans la prévention des violations à ce chapitre.
Il y a d'abord les normes des Nations Unies pour les entreprises, que je vais pouvoir également vous déposer. Elles sont le résultat de plusieurs années de débat par la sous-commission sur la promotion et la protection des droits de l'Homme aux Nations Unies. Elles seront soumises à débat à la prochaine réunion de la Commission des droits de l'Homme de l'ONU, à Genève, qui aura lieu la semaine prochaine. Ces normes donnent une idée du genre d'obligation que les compagnies devraient contracter dans le domaine des droits de la personne. Elles couvrent les droits civils, politiques, sociaux, économiques et culturels.
º (1610)
Droits et démocratie demande au gouvernement canadien d'en appuyer l'adoption lors de la réunion de la Commission sur les droits de l'Homme des Nations Unies, et de veiller à ce qu'elles demeurent au programme de la Commission. Nous espérons assister, l'année prochaine, à plusieurs discussions ciblées sur la question afin de dégager un consensus multilatéral en la matière.
La deuxième initiative dont je veux vous parler est celle qui touche à l'évaluation de l'impact sur les droits de la personne. Tout comme nous effectuons des évaluations d'incidence environnementale pour les grands projets, nous devrions effectuer une évaluation poussée des répercussions de tel ou tel projet sur les droits de la personne. Nous prétendons essentiellement que les États et les organismes internationaux — par exemple, EDC au Canada ou la Banque mondiale — devraient déterminer quelles incidences les projets de grande envergure risquent d'avoir sur les droits de la personne avant de consentir leur soutien à ces projets. Nous croyons que cela pourrait éviter des abus. Cette façon de faire permettrait aussi de prévenir tous les intervenants des problèmes et des bénéfices associés aux investissements projetés; ce processus devrait intervenir tôt, être transparent et obéir à des consultations et à des communications informées dont toutes les parties sortiraient gagnantes.
Nous sommes en train d'élaborer un instrument du genre. Nous avons lancé une invitation à toutes les compagnies et à toutes les collectivités qui voudraient en faire l'expérience dans le courant de l'année prochaine. Nous accepterons les candidatures jusqu'au 31 mars.
Nos obligations en matière de droits de la personne ne s'arrêtent pas à nos frontières quand d'importants acteurs comme des grandes sociétés agissent à l'étranger. Il est très important que votre comité cherche à trouver des moyens novateurs de faire en sorte que les sociétés canadiennes respectent les droits de la personne ici et à l'étranger. Le rapport de la Commission d'enquête nationale sur la démocratie canadienne et la responsabilisation des entreprises renferme de nombreuses recommandations sur la façon de parvenir à ce résultat. S'il est essentiel de dégager un consensus multilatéral sur cette question, nous devrions également utiliser tous les instruments possibles au Canada pour faire en sorte que les sociétés canadiennes installées dans les pays beaucoup moins riches que les nôtres se conforment aux normes en matière de droits de la personne.
Merci beaucoup.
Le président: Merci beaucoup.
Je vais maintenant directement passer aux questions. Qui va commencer pour l'opposition officielle, M. Goldring ou M. Day?
M. Peter Goldring: Ce sera moi. Merci beaucoup.
Merci pour vos exposés, mesdames et messieurs.
J'ai deux ou trois questions à vous poser. On a parlé de TVI Pacific, mais on ne sait pas exactement qui est cette société. Qui est-elle au juste? A-t-elle un lien avec d'autres sociétés canadiennes, ses opérations reposent-elles sur un fondement juridique, ici, et fait-elle partie d'une société plus importante au Canada?
Mme Catherine Coumans: La société s'appelle TVI Pacific. Elle a son siège à Calgary.
Le projet minier aux Philippines porte un autre nom, TVI Pacific Philippines Resources Inc., mais il est détenu à 100 p. 100 par TVI Pacific. Ainsi, c'est TVI Pacific qui exploite la mine aux Philippines, à Mindanao.
M. Peter Goldring: A-t-elle un lien avec une autre société? Vous parlez de Placer Dome, ici.
Quel genre d'activités a-t-elle au Canada? Ces activités sont-elles différentes ou la compagnie utilise-t-elle d'autres modes opératoires que dans d'autres parties du monde?
Mme Catherine Coumans: Vous posez des questions intéressantes.
Pour autant que je sache, TVI Pacific exploite actuellement deux autres mines dans le monde, l'une aux Philippines qui est en cours de préparation et l'autre, qui est une mine potentielle, en Chine. TVI Pacific a également une filiale qui s'appelle EDCO, spécialisée dans les opérations de forage avec pointe de diamant pour les compagnies minières.
L'exploitation aux Philippines sera la toute première mine de TVI Pacific, parce qu'elle n'a jamais fait cela auparavant. Il s'agit d'une compagnie minière, mais elle n'a aucune expérience dans ce domaine. Ce sera la première fois qu'elle va exploiter une mine.
M. Peter Goldring: Ce sera donc sa toute première mine.
Mme Catherine Coumans: Oui, sa toute première mine dans le monde.
Elle a également un projet d'exploration qui est avancé en Chine — du moins, je crois qu'il l'est. Si ce projet va de l'avant, il s'agira de la seconde mine de la compagnie.
Pour l'instant, elle en est à sa première expérience.
M. Peter Goldring: D'après certaines des informations qui apparaissent ici, il s'agit d'une mine à ciel ouvert d'environ trois hectares. Est-ce la taille de la mine?
º (1615)
Mme Catherine Coumans: C'est possible. Il va s'agir d'une mine à ciel ouvert, sans doute de métaux, principalement de l'or ou de l'argent.
M. Peter Goldring: Entre autres suggestions ou recommandations que vous faites ici, vous dites que notre comité devrait inciter les entreprises canadiennes à adhérer aux normes des Nations Unies. Ces normes ont-elles été adoptées ou sont-elles à l'étape de projet? J'ai l'impression que dans un contexte international, même si le Canada a souscrit à la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, il vaudrait mieux que tout cela relève entièrement des Nations Unies. Existe-t-il un avant-projet de ce texte et le Canada y a-t-il participé activement?
Mme Catherine Coumans: Il n'existe pas de projet global définissant ce qu'il faut entendre par mine responsable. Les divers textes que j'ai décrits, et qui concernent la notion de mine responsable, appartiennent à divers domaines. Par exemple, il y a la question du consentement libre, préalable et informé. Eh bien, un grand nombre de recommandations et de protocoles internationaux ont été signés sur les droits de peuples autochtones. Comme l'exploitation minière envahit souvent les terres des Autochtones, les compagnies doivent être au courant des protocoles concernant les droits des peuples autochtones et se conformer à ces textes, par exemple en ce qui concerne la nécessité d'obtenir un consentement libre, préalable et informé avant de lancer un projet.
Pour ce qui est du déplacement des populations, il fat savoir que celui-ci est occasionné par de nombreux projets de petite envergure, surtout des barrages. C'est pour cela que l'on a élaboré des protocoles et des normes sur la question de la relocalisation des populations, mais ces textes concernent également l'exploitation minière dès qu'il y a déplacement de populations. Je vous ai ainsi énuméré les différents domaines pour parvenir à ce que j'appelle un code d'exploitation minière responsable qui n'existe pas déjà comme tel.
M. Peter Goldring: J'ai l'impression que ce code pourrait s'appliquer à d'autres endroits dans le monde. Encore une fois, ne pensez-vous pas qu'il conviendrait au premier chef d'inciter les Nations Unies à adopter une norme sur ce plan. Pour ce qui est de votre autre recommandation, celle qui consiste à inviter la compagnie à collaborer à une évaluation des répercussions de ses opérations sur les droits de la personne, j'ai l'impression que les Nations Unies seraient, encore une fois, mieux placées sur ce plan.
Deuxièmement, j'aimerais savoir si d'autres entreprises ont volontairement participé à de telles évaluations indépendantes de la répercussion de leurs opérations sur les droits de la personne? Vous pourriez peut-être nous en parler un peu. Des compagnies canadiennes sont-elles du nombre?
Mme Diana Bronson: À ce que je sache, aucune entreprise canadienne ne s'est engagée à effectuer une évaluation des répercussions sur le plan des droits de la personne, mais plusieurs entreprises européennes l'ont fait. BP et Shell, par exemple, ont au moins essayé d'effectuer de telles évaluations.
Nous essayons d'élaborer une évaluation des répercussions sur le plan des droits de la personne, d'après les normes de l'ONU, pour donner une idée du genre d'obligations auxquelles les compagnies devraient se plier. Nous examinerons donc globalement les activités des compagnies pour voir en quoi elles touchent aux différents droits mentionnés dans les normes de l'ONU. C'est ce que nous sommes en train de faire et c'est ce que nous espérons pouvoir tester avec des compagnies ou des collectivités qui voudront bien se proposer.
Ce matin, j'ai rencontré des représentants d'une compagnie de Montréal qui désire explorer cette possibilité avec nous. Nous serions très heureux si TVI, par exemple, venait nous voir pour nous dire qu'elle est disposée à faire cela.
[Français]
Le président: Pour le premier tour, nous allons donner cinq minutes à chacun des députés.
Madame Bourgeois.
Mme Diane Bourgeois: Merci, monsieur le président.
Mesdames, bonjour. Merci d'être venues allumer une lumière rouge à l'endroit du problème que vous avez soulevé.
Vous avez dit que la compagnie minière avait fait des activités qui étaient préjudiciables au peuple des Philippines. Par contre, vous dites: « La Commission des droits de la personne des Philippines, l'évêque, [...] le maire, [...] le rapporteur spécial [...] ont tous exprimé leurs inquiétudes devant ces actes de violence [...] ».
Est-ce que ces gens ont fait des pressions auprès du Canada pour que cessent les activités de cette compagnie? Est-ce que des pressions ont été exercées auprès de la compagnie et auprès du gouvernement du Canada pour que cessent ces activités?
º (1620)
[Traduction]
Mme Catherine Coumans: La personne dont j'aurais aimé me faire accompagner pour vous lire la déclaration que j'ai mentionnée tout à l'heure, a été en contact avec le rapporteur spécial pour les peuples autochtones. Elle a fait partie de ceux qui l'ont fait venir aux Philippines pour enquêter sur la situation. Elle saurait mieux que moi ce qui est advenu de ce rapport.
Pour autant que je sache, des échanges ont actuellement lieu avec la Commission sur les droits de l'homme aux Philippines. Il y a sans doute des discussions également avec l'ambassade. En revanche, je ne sais pas si cela a donné lieu à quelque chose d'officiel ici. Je crois que tout cela se produit davantage derrière des portes closes.
[Français]
Mme Diane Bourgeois: La question que je vous pose est très importante parce que si les activités de cette entreprise étaient connues du gouvernement du Canada depuis un certain temps, ce dernier est d'autant plus coupable qu'il n'a pas posé de gestes. C'est très important.
Ma question s'adresse à Mme Bronson et à son avocat. Vous excuserez mon ignorance, mais existe-t-il des lois internationales qui nous permettraient ou qui permettraient à un groupe de faire pression afin que le gouvernement puisse mettre son pied à terre face aux problèmes de cette entreprise et, peut-être, face aux autres entreprises qui ne respectent pas les normes internationales? Y a-t-il des lois internationales? Si oui, le Canada les a-t-il signées?
[Traduction]
M. Craig Forcese (professeur de droit, Université d'Ottawa, à titre personnel): Pas directement. Personne, en droit international, ne se charge de réglementer les activités des entreprises canadiennes ou étrangères évoluant à l'étranger. Cela me ramène à ce qu'a mentionné Mme Broson, c'est-à-dire à l'absence de normes légales internationales exécutoires s'appliquant aux entreprises en matière de droits de la personne.
En revanche, il existe ce que l'on appelle des instruments internationaux non exécutoires, comme les lignes directrices de l'OCDE, auxquelles le Canada a adhéré. Il s'agit essentiellement d'un code volontaire que les membres de l'OCDE ont convenu d'appliquer. Entre autres dispositions, cette convention de l'OCDE prévoit que les entreprises doivent respecter les droits de la personne. Il n'y a pas d'autre définition, il s'agit juste d'une affirmation.
Elle n'est pas exécutoire en droit, mais le Canada dispose de ce qu'on appelle un point de contact, autrement dit un bureau au ministère des Affaires étrangères auprès de qui les organisations non gouvernementales et les autres peuvent porter plainte relativement aux opérations des entreprises canadiennes à l'étranger. D'autres seraient sans doute mieux en mesure que moi de vous parler de l'efficacité de ce bureau. Je crois savoir que le groupe de contact en général n'a pas vraiment de pouvoir pour faire pression sur les sociétés. Il agit plus en qualité de facilitateur et de communicateur que d'organisme de réglementation.
[Français]
Mme Diane Bourgeois: D'accord.
Ma dernière question s'adresse à Catherine Coumans.
Vous dites que l'ancien ambassadeur et son actuel successeur ont fait l'éloge de TVI Pacific. D'abord, croyez-vous que les deux personnes sont au courant des actions de TVI Pacific? Ensuite, qu'est-ce qui nous le prouve? Enfin, croyez-vous que les gens de l'ACDI sont au courant de cela? Et je veux des preuves.
[Traduction]
Mme Catherine Coumans: La question de la prise de position officielle de ces deux ambassadeurs et leurs déclaration dithyrambiques sur la compagnie sont du domaine public. Dans les journaux philippins, l'ambassade ne cesse de faire la promotion de cette compagnie pour une bonne raison.
Il s'agirait de la première compagnie minière internationale à travailler aux Philippines depuis le désastre de Marcopper — autre compagnie minière canadienne — en 1996. En quelque sorte, on y voit une façon de racheter la réputation des compagnies minières canadiennes aux Philippines après cette grande catastrophe de 1996. C'est aussi une façon de montrer qu'une compagnie est, de nouveau, disposée à se lancer dans l'exploitation minière là-bas.
Ainsi, le projet est hautement prioritaire pour l'ambassade. C'est ce qui ressort clairement des déclarations faites dans la presse et dans les médias aux Philippines.
La question de savoir si le personnel de l'ambassade est parfaitement au courant de ce qui se passe sur les lieux d'exploitation est très intéressante. J'ai, personnellement, passé cinq heures à l'ambassade après avoir visité le site minier. Je dois vous dire que je n'étais pas seule là-bas. J'étais avec des gens de KAIROS, organisation parapluie des Églises. J'ai donc visité l'emplacement de la mine en compagnie de membres de KAIROS avant que nous nous rendions à l'ambassade, à notre retour à Manille.
Nous avons consacré une grande partie de nos discussions à la question de l'argent de l'ACDI et du caractère exceptionnel du financement d'une société par l'intermédiaire de l'ambassade. Il a également été question du fait qu'aucune étude d'impact sur les situations de paix et de conflit n'a été effectuée, bien que le projet soit sur le point d'aboutir, contrairement à ce que l'ACDI a fait dans d'autres pays.
À l'ambassade, nous étions accompagnés d'Autochtones, pas uniquement d'Onsino Mato, mais du timuay, le chef, qui a expliqué sans détour son expérience personnelle du projet. Il y avait aussi Godofredo Galos qui a expliqué les conséquences de ce projet pour la culture du riz et des aliments de subsistance des résidents de la localité, parce que la rivière est polluée. Nous avons donc parlé de tout cela à l'ambassade.
L'ambassadeur était absent à ce moment-là et nous n'avons donc pas pu le rencontrer. Nous avons retenu très clairement de ce qu'ils nous ont dit que personne de l'ambassade n'avait visité l'emplacement de la mine, notamment parce qu'il est déconseillé aux Canadiens de se déplacer dans cette région à cause du danger qui y règne.
Il est assez intéressant de constater que cette mine soit située en plein coeur d'une zone de conflit et que tant de gens par ailleurs puissent s'y rendre. Même pour nous, cela a été difficile. Nos amis aux Philippines ont insisté pour que nous nous fassions accompagner de gardes armés, ce qui nous a mis très mal à l'aise. Nous avions sept gardes du corps armés avec nous, mais c'était la seule façon pour nous d'atteindre la mine et d'aller sur la montagne, selon...
º (1625)
[Français]
Le président: Je m'excuse, madame Bourgeois, mais votre temps est écoulé.
Monsieur Broadbent.
[Traduction]
L'hon. Ed Broadbent: Merci, monsieur le président.
Je ferais précéder mes questions de deux ou trois commentaires à l'intention de mes collègues.
L'une des raisons pour lesquelles je tenais à ce que l'on nous soumette un cas concret d'allégations très graves concernant une compagnie canadienne présente aux Philippines, c'est que nous pouvions avoir un point de vue particulier et un point de vue général avec le témoignage des gens de Droits et démocratie. J'ai l'impression que cette formule est particulièrement souhaitable quand un comité veut étudier un dossier.
Je tiens à ajouter quelque chose à l'intention de mon collègue conservateur, à la suite de sa question sur les études d'impact sur les situations de paix et de conflit réalisées par d'autres compagnies canadiennes. Nombre d'entre elles n'ont pas forcément effectué de telles études, mais beaucoup l'ont fait et je vais vous en citer quelques-unes.
Pour mémoire, monsieur le président, je vous indiquerai simplement qu'il y a deux ans notre commission sur la responsabilité des sociétés que j'ai eu le plaisir de co-présider comptait trois de ses cinq membres — j'insiste : trois sur cinq — qui étaient d'anciens PDG. Cette information vient de ce genre de commission.
Il est ressorti que plusieurs bonnes compagnies canadiennes effectuent maintenant de telles évaluations d'impact sur les situations de paix et de conflit. Je crois que c'est notamment le cas de Suncor, de Shell Canada et d'Alcan. Il y a plusieurs bonnes sociétés canadiennes dans le secteur du développement des ressources à l'étranger.
Par ailleurs, avant que nous ne passions à des questions particulières sur la compagnie qui nous intéresse, mes honorables collègues auront appris, dans le témoignage de Mme Bronson, que de nombreux pays où des compagnies canadiennes sont présentes font de très vilaines choses, pour dire les choses carrément. C'est ce que nous apprennent les preuves crédibles recueillies par Droits et démocratie de même que par les organisations de défense des droits de la personne à l'extérieur du Canada. Il y a des choses pas très catholiques qui se produisent à l'étranger, que ce soit en matière d'environnement, de droits autochtones ou d'autres droits de la personne, au nom du développement et j'estime que nous devrions nous y intéresser.
Je voulais simplement faire précéder ma question de ces remarques d'ordre général.
Madame Coumans, vous avez parlé de quelque chose de très particulier. Je conclus que la compagnie en question a été complice de violations graves au titre du respect de l'environnement et des droits des peuples autochtones ainsi que de divers droits de la personne. Vous avez mentionné en passant que vous avez reçu ce que je qualifierais de lettre d'intimidation de la compagnie, il y a 48 heures, lettre dans laquelle on menace explicitement votre organisation en lui indiquant ce qu'elle doit ou ne doit pas dire.
Ma question est donc la suivante : cette lettre a-t-elle eu pour effet que vous avez modifié de façon importante ce que vous vouliez déclarer publiquement, même si vous êtes légalement à l'abri de toute poursuite dans cette enceinte? Est-ce que courrier a influencé vos déclarations?
º (1630)
Mme Catherine Coumans: Oui! La déclaration que je vous ai lu aujourd'hui a été épurée des détails que j'envisageais de vous fournir. Il est en fait assez difficile de lire une déclaration comme celle-là où je vous énonce les principes généraux de l'exploitation minière responsable sans vous donner d'exemple sur ce qui se passe là-bas. Je vous ai donc énoncé les principes, sans plus, en laissant entendre qu'il y a peut-être des choses inquiétantes dans ce cas, sans que je puisse vous en donner les détails.
Le président: Je vais vous interrompre un instant. Vous êtes protégée par le privilège parlementaire ici. J'espère que vous le savez. Je suis toutefois bien conscient que cette protection vous fait peut-être une belle jambe.
Des voix: Ah, ah!
Mme Catherine Coumans: Je vais vous dire ce que notre avocat nous a dit.
Le président: Allez-y, madame Coumans... ce temps vous appartient.
Mme Catherine Coumans: Il y a, bien sûr, cette lettre au sujet de laquelle notre conseil s'est beaucoup inquiété. Nous sommes une petite organisation sans but lucratif. Nous avons un personnel de quatre employés qui travaillent le trois quarts du temps et nous n'avons aucune ressource pour faire face à ce genre de situation. Je dirais que, dans les six années d'existence de Mines Alerte, nous avons été très actifs et très directs auprès de différentes entreprises au Canada, grandes comme petites, et nous n'avons jamais vécu cela avant. Il y a certainement une conclusion à tirer à cet égard. Cette compagnie s'est montrée très agressive en notre endroit, ce qui est entièrement nouveau pour nous. Et je m'arrêterais là.
Je vais revenir sur la question des détails de cette affaire. Notre avocat nous a effectivement indiqué que notre témoignage serait couvert par l'immunité parlementaire. Cependant, la compagnie a dit très clairement qu'elle surveillerait ce que nous allions déclarer. Il n'est pas forcément nécessaire d'établir un lien entre ce que je déclare et la menace d'une poursuite juridique. Cette menace existe dans l'absolu. Nous venons, apparemment, d'être avisés de ce risque de poursuite et cela influence malheureusement ce que je peux dire ici.
L'hon. Ed Broadbent: Merci.
J'aimerais ajouter une chose. J'ai l'impression que, comme vous l'avez vous-même indiqué, toutes les sociétés n'agissent pas de la sorte. Vous avez été très actifs et les nombreuses autres entreprises que vous avez ouvertement critiquées n'ont pas eu recours à de telles tactiques. C'est cependant une conséquence inévitable dans le genre de société où nous vivons, ces entreprises peuvent engager des avocats et elles ont beaucoup d'argent pour les payer. Nous avons assisté à la même chose avec l'industrie du tabac aux États-Unis et, au Canada, nous l'avons vu avec les dénonciateurs ou les organisations des droits de la personne qu'il est possible d'intimidées à cause d'un manque de moyens financiers pour faire face à la musique. Cela dit, vous êtes littéralement paralysé.
Je vais vous poser une question : pouvez-vous vous permettre d'engager un avocat advenant que la compagnie vous traîne devant les tribunaux?
Mme Catherine Coumans: Je ne suis pas sûre de pouvoir vous répondre. Je ferais mieux de ne pas le faire. Restons-en là.
L'hon. Ed Broadbent: Eh bien, je vais répondre à ma propre question, comme on le fait à la Chambre des communes, monsieur le président.
Je sais d'expérience, pour avoir traité avec des ONG à Droits et démocratie, que des organisations peuvent être littéralement paralysées. Elles n'ont pas les ressources nécessaires pour réagir. Elles ont de la difficulté à trouver les ressources voulues pour faire venir des témoins dans de telles situations.
Je vous rappelle que nous parlons d'une compagnie dont le site Internet est outrageux et comporte de nombreuses contrevérités confirmées un peu partout, notamment par des tribunaux des Philippines, et que cette même entreprise canadienne essaie d'intimider une petite ONG.
Pourriez-vous nous parler un peu plus en détail des sommes que l'ACDI a versées à cette compagnie en passant par l'ambassade?
Mme Catherine Coumans: Il s'agit d'un projet de subsistance communautaire — j'ai oublié de me munir de la proposition — qui concerne l'élevage de chèvres et la production de certaines cultures pour les alimenter. Ce projet est essentiellement destiné aux femmes. Il va tout à fait dans le sens des priorités de l'ACDI aux Philippines, dans la région, c'est-à-dire les femmes et la subsistance. Je n'ai pas de problème avec le projet en tant que tel. Qui y verrait un problème?
Ce qui est intéressant, c'est que nous en avons entendu parler pour la première fois quand nous étions sur place, en compagnie de KAIROS Canada. Les femmes se sont plaintes à nous que l'argent que TVI dépensait dans la communauté aboutissait dans les poches de celles dont les familles avaient apporté leur appui à la compagnie et dont un frère ou l'époux travaillait pour TVI. Nous n'avons donc pas couru après ce genre d'information, mais ce sont les gens qui nous en ont fait part. À cette époque, nous ne savions pas que cet argent... Nous pensions que la compagnie minière canadienne dépensait son argent à elle et que cela avait pour effet de diviser la communauté. Je dois être prudente.
º (1635)
Le président: Excusez-moi. Veuillez finir votre réponse, parce que nous manquons de temps.
M. Bains suivra.
Mme Catherine Coumans: Ce n'est que lorsque nous sommes revenus en ville que nous avons rencontré le maire — parce que c'est lui qui nous a appris la nouvelle — qui nous a dit « Vous savez, je pense que cet argent vient de l'ambassade ». Après cela, quand nous sommes allés à Manille, à notre ambassade, nous avons voulu savoir ce qu'il en était. Nous avons alors appris que c'était de l'argent du Fonds canadien.
Plus tard, nous avons rencontré des gens de l'ACDI en compagnie d'une délégation des Philippines, ici à Hull, pour aborder cette question. On nous a déclaré catégoriquement que ce projet échappait à la politique du Fonds canadien, que l'argent du Fonds devait être utilisé en partenariat avec des groupes de la société civile et que ce n'est que dans de rares cas, voire exceptionnels, que les fonds transitent par des entreprises privées locales, quand c'est le meilleur moyen de faire aboutir un projet. En revanche, il était anormal que cet argent soit acheminé par l'intermédiaire d'une compagnie minière canadienne.
L'hon. Paddy Torsney: Nous aurons peut-être des questions à poser.
Tout d'abord, pour bien préciser les choses, les agents de l'ACDI ont visité ce projet à trois reprises — le 17 février 2004, puis le 22 juin 2004 — et le deuxième versement a été retenu à cause de certaines réserves qu'ils avaient exprimées. En tout, 14 000 $ ont été ainsi investis par le biais du fonds canadien.
À la façon dont je comprends les choses, le problème tient au fait que la compagnie engage des gens de la région et qu'il y a donc un chevauchement — il y a ceux qui sont engagés par la compagnie, les gens de la région qui travaillent pour cette société, et les femmes qui obtiennent de l'argent pour élever des chèvres au titre du programme. Y a-t-il, sur place, une ONG qui pourrait servir de relais à la place de la compagnie?
Mme Catherine Coumans: Je dois vous préciser qu'à l'origine, on nous a dit à l'ambassade que personne n'avait visité le projet et qu'on nous a indiqué plus tard qu'en fait des gens s'étaient rendus sur place. Je suis heureuse de savoir que le projet a été visité.
Pour ce qui est de la présence sur place d'une ONG qui pourrait servir de partenaire, j'en ai parlé à l'ambassade et l'on m'a répondu par la négative. Il y aurait peut-être d'autres façons de faire administrer ce projet.
Je me suis, depuis, entretenue avec Alix Yule qui administre beaucoup de projets de l'ACDI à Mindanao, avec Agriteam Canada, et qui connaît bien cette situation. Elle était en route pour les Philippines et c'est elle, entre autre, qui m'a dit que... En fait, nous réalisons des études d'impact sur les situations de paix et de conflit pour tous nos projets, à cause des pays dans lesquels nous les menons. Elle a été très surprise. Elle m'a dit que, selon certaines rumeurs, l'argent destiné au projet des chèvres venait de l'ACDI, mais qu'elle avait été surprise d'apprendre que celui-ci provenait du Fonds canadien. Selon elle, des ONG étaient présentes dans la municipalité de Siocon. Elle avait travaillé sur un projet côtier local. Elle a précisé que ce n'était pas parce qu'il manquait d'ONG sur place, mais qu'il était possible qu'aucune ONG ne se soit sentie à l'aise pour travailler dans la région de l'exploitation minière, à cause des conflits qui entourent cette opération, mais elle a confirmé qu'il y avait des ONG...
L'hon. Paddy Torsney: Eh bien, allons un peu plus dans le détail.
Êtes-vous en train de dire qu'il ne faudrait pas aider cette région parce que, comme vous l'avez indiqué, ce projet est destiné à aider les femmes? C'est ce que vous nous avez dit et je me dois de vous poser la question. Vous ne voulez pas que l'on intervienne auprès des gens de la région? Voulez-vous instaurer un partenariat avec une autre organisation et, si oui, laquelle? Vous avez un avis, puisque vous venez de l'exprimer, et j'aimerais que vous nous apportiez une précision. Que voulez-vous que nous fassions?
Mme Catherine Coumans: La région de Mindanao est constituée d'une chaîne montagneuse. Il y a des localités plutôt pauvres là-bas.
º (1640)
L'hon. Paddy Torsney: Vous ne voulez pas qu'on investisse là-bas. C'est cela que vous dites?
Mme Catherine Coumans: Voilà ce qui est intéressant. Pourquoi est-ce que cette collectivité en particulier obtient une aide pour l'élevage de chèvres et pas celle qui est à côté, où il n'y a pas d'exploitation minière? Toutes ces localités méritent qu'on les aide, méritent que l'ACDI administre des projets d'élevage de chèvres. C'est tout de même curieux que ce projet se déroule là-bas et c'est pour cela et on peut se demander pourquoi il divise la collectivité?
Quand les gens sur place nous en ont parlé, ils ne nous ont pas dit que la compagnie minière administrait un formidable projet concernant l'élevage de chèvres. La première chose qu'on nous a dite, c'est qu'il y avait un projet et que seules certaines femmes en bénéficiaient. Cela, c'était avant qu'on apprenne d'où venait l'argent.
L'hon. Paddy Torsney: Bien! Je veux que les choses soient bien clairs, parce que je ne comprends pas encore très bien. Êtes-vous en train de nous recommander que l'on interrompe ce projet et que l'on ne fournisse pas les chèvres aux gens de la région? Voulez-vous que l'on administre ce genre de projet dans des collectivités situées sur d'autres contreforts montagneux?
Mme Catherine Coumans: Dans le mémoire que j'ai déposé aujourd'hui, je recommande que l'ACDI fasse la même chose que ce qu'elle a fait pour d'autres projets à Mindanao, c'est-à-dire qu'elle effectue une étude d'impact sur les situations de paix et de conflit pour ce projet, surtout que l'argent est canalisé par une entreprise privée et qu'il y a des problèmes sur place en matière de droits de la personne.
L'hon. Paddy Torsney: Bien, je comprends cela.
Pour ce qui est du résultat de l'étude d'impact, si les résultats sont négatifs après un investissement de 14 000 $, voulez-vous que l'on poursuive le projet ailleurs?
Mme Catherine Coumans: Nous devrions au moins trouver une façon d'acheminer l'argent vers ceux et celles qui en ont besoin, par l'intermédiaire de la compagnie.
L'hon. Paddy Torsney: Pas de problème. Je voulais que les choses soient bien claires, parce que vous sembliez dire que les populations sur place ont besoin de cet argent et, personnellement, j'essaie de savoir comment nous pourrions les aider au mieux.
Deuxièmement, il y a une chose qui m'inquiète... M. Broadbent a soulevé la question de la lettre de l'avocat et il est évident que nous voulons que les choses soient bien précises. Soyons clairs. Quand avons-nous reçu votre déclaration? Si cette lettre est vieille de 48 heures, quand avons-nous reçu votre déclaration si celle d'aujourd'hui est différente de celle que vous auriez aimé faire?
Mme Catherine Coumans: Je me suis arrangée pour faire parvenir cette déclaration en fonction des exigences de M. Rumas, c'est-à-dire à temps pour la faire traduire en français. C'était mardi dernier.
L'hon. Paddy Torsney: Ainsi, cette déclaration n'est pas différente de celle que vous auriez faite sans la lettre de l'avocat?
Le président: Soit dit en passant. M. Rumas acquiesce de la tête.
Mme Catherine Coumans: Il m'a demandé de lui faire parvenir toute la documentation qu'il fallait faire traduire avant le 14 et j'ai fait tout mon possible pour lui envoyer tous les documents à temps, notamment ma déclaration. La lettre des avocats de la compagnie, elle, est arrivée le 18.
L'hon. Paddy Torsney: La déclaration que vous avez envoyée est-elle différente de celle que vous auriez voulu faire?
L'hon. Ed Broadbent: Sa déclaration d'aujourd'hui était différente de celle qu'elle a envoyée par écrit au comité.
L'hon. Paddy Torsney: Très bien, je conclue donc que certains éléments manquent.
Mme Catherine Coumans: Effectivement, la différence se situe au niveau du détail. Je ne pouvais pas étayer et j'ai laissé des choses de côté.
L'hon. Paddy Torsney: Allons-nous avoir toute la déclaration que nous avons en dossier?
Le président: Non, cette déclaration fait partie du dossier, mais le public ne la voit pas. Cela n'est pas versé sur Internet. Ici, nous parlons de ce qui se passe sur Internet.
L'hon. Paddy Torsney: Très bien. J'étais confuse. Je ne me suis jamais trouvée dans cette situation mais je voulais simplement tirer les choses au clair.
J'ai une dernière question à poser. La semaine prochaine, madame Bronson, vous allez à Genève où il est à souhaiter que des progrès seront réalisés dans le dossier des normes internationales. Je voulais savoir comment fonctionne la loi à cet égard. Si cette compagnie — je crois qu'il est utile de rentrer dans le détail ici — enfreint les règlements, mais qu'elle respecte la loi des Philippines, que va-t-il se passer? Il est évident qu'il va falloir tenir compte de la loi nationale. Qu'adviendra-t-il, par exemple, si le gouvernement des Philippines ne veut pas adhérer à cette loi internationale? Comment les choses fonctionneront-elles dans différents cas de figure?
Le président: Excusez-moi, mais nous essayons d'obtenir un témoignage important de Mme Coumans pour les travaux du comité.
L'hon. Paddy Torsney: C'est très bien. Ma question s'adresse aux deux autres témoins.
Mme Diana Bronson: Craig complétera ma réponse, mais sachez que, pour l'instant, aucun gouvernement n'a encore adopté les normes en question. Celles-ci ont été produites par un comité d'experts nommés par les gouvernements. Pour l'instant, il est question de réaliser le consensus autour de ces normes qui suscitent beaucoup de désaccord à cause de la façon dont elles sont libellées.
Rien, par exemple, n'empêcherait le gouvernement canadien de dire qu'il adhère à ces normes et qu'il va les imposer aux compagnies qui prétendent obtenir un soutien public quelconque. Mais cela risque fort de ne pas se produire. Il serait mieux de commencer par dégager un consensus international à leur sujet et, plus tard, de les faire ratifier par les gouvernements pour qui elles seraient exécutoires.
Il existe déjà tout un ensemble d'obligations que le Canada et les Philippines se sont engagés à respecter. Le Canada et les Philippines ont en effet ratifié le Pacte international des droits civils et politiques de même que le Pacte international des droits économiques, sociaux et culturels, en sorte que nos deux pays sont mutuellement intéressés à ce que ces traités soient respectés.
Mais je vais laisser le soin à Craig de compléter ma réponse.
º (1645)
M. Craig Forcese: Les normes de l'ONU dont nous parlons ici ont été approuvées en principe, mais sans plus. Il ne s'agit pas d'un traité international ni d'une loi internationale. Elles s'apparentent davantage à une déclaration de l'Assemblée générale et nous ne parlons donc pas d'une loi à caractère international.
Pour lui donner force de loi, il faudrait l'inscrire en prolongement de la compétence extraterritoriale canadienne...
L'hon. Paddy Torsney: Effectivement, et c'est ce dont nous parlons ici à ce comité.
M. Craig Forcese: Dans des circonstances analogues à ce cas. C'est de cela dont il est question.
L'hon. Paddy Torsney: Bien. Ma question...
Le président: Madame Torsney. Excusez-moi, mais votre temps est écoulé.
L'hon. Paddy Torsney: Eh bien, nous n'avons pas...
Le président: Nous allons passer à huis clos. Excusez-moi. Nous écoutons avec grand intérêt ce que vous avez à dire, mais je crois que tout le monde ici est tombé d'accord. M. Mato et M. Galos viennent des Philippines et il ne serait pas juste — nous devons nous arrêter à 17 h 30 — de ne pas leur donner tout le temps voulu pour qu'ils témoignent à huis clos.
Monsieur Day.
M. Stockwell Day: Monsieur le président, j'ai une brève question à poser à laquelle nous pourrons répondre plus tard. Je me rends compte que nous devons passer à huis clos et j'en respecte les raisons.
Avez-vous répondu à l'invitation de la compagnie? Celle-ci a dit qu'elle paierait pour qu'une personne de Mines Alerte se rende sur place et visite l'exploitation minière — une seule personne. Deux, ce serait mieux. Si vous insistiez auprès de la compagnie, je pense que vous pourriez obtenir un passage pour deux personnes, je ne sais pas.
Je prends acte des préoccupations qui ont été exprimées, mais à l'expérience, je sais que nous aimons entendre les versions des deux côtés. Avons-nous accès à la version de l'autre partie dans ce dossier?
Le président: Nous pourrons en parler à la fin de la réunion. Nous voulons bien sûr entendre...
Mme Catherine Coumans: Je crois que la compagnie a été invitée.
M. Stockwell Day: Bien, c'est la question que je voulais poser.
Mme Catherine Coumans: En fait, je crois qu'elle devait comparaître le 23 février et que quelque chose s'est passé mais je n'en suis pas certaine.
Le président: Eh bien, je présente mes excuses à tout le monde, mais
[Français]
le comité a décidé de poursuivre ses travaux avec les témoins à huis clos.
[La séance se poursuit à huis clos]