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Bonjour, chers collègues.
Nous en sommes en ce mercredi 17 mars 2010 à la deuxième séance du Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan.
J'invite tous les membres du comité à éteindre leur BlackBerry, leur téléphone ou tout autre appareil du genre.
Pour la gouverne des membres du comité, je vous indique que nous consacrerons notre deuxième heure à différentes questions de régie interne. Il y a d'abord une motion qui a été déposée ainsi que le premier rapport de notre sous-comité du programme et de la procédure en plus de la planification de nos travaux futurs.
Lors de la première heure de séance, nous allons poursuivre notre étude sur le transfert de détenus afghans. Nous accueillons comme témoin cet après-midi M. Paul Champ, avocat-conseil pour Amnistie internationale.
Monsieur Champ, je n'ai pas eu la chance de vous parler auparavant, mais je vous invite à faire une brève déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions des membres du comité.
Je vous souhaite la bienvenue. Nous allons vous écouter pendant 5 à 10 minutes et je sais que les membres du comité sont anxieux de discuter avec vous et de vous poser leurs questions.
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Merci beaucoup, monsieur le président. Merci à vous et aux membres du comité de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui au nom d'Amnistie internationale.
Je tiens à vous rappeler que je suis avocat-conseil à la fois pour Amnistie internationale et pour la B.C. Civil Liberties Association. Je représente ces deux organisations dans le dossier du transfert de détenus en Afghanistan depuis 2006. Je les ai représentées à l'occasion d'une contestation judiciaire qui s'est amorcée en février 2007 ainsi que pour leurs procédures devant la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire depuis février 2007 également.
Il va de soi que mes clients suivent de près l'excellent travail accompli par votre comité et les différents témoins qui ont été convoqués et que nous comprenons bien toute l'importance que revêtent ces questions dans le contexte de la controverse entourant le transfert de détenus.
Mes brefs commentaires seront répartis en deux volets. Dans un premier temps, nous nous inquiétons du risque de torture qui perdure pour les détenus livrés aux autorités afghanes après leur capture par les Forces canadiennes. Après quelques brèves observations à ce sujet, je vous offrirai dans un deuxième temps une mise à jour relativement aux procédures entreprises devant la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire. Si mon souvenir est exact, votre comité a commencé à s'intéresser à cette question en octobre 2009 parce qu'on craignait que l'on fasse entrave aux procédures devant la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire. J'ai donc pensé que le moment était bien choisi pour faire le point avec vous sur l'état d'avancement de ce processus.
Parlons d'abord des risques de torture qui persisteraient en Afghanistan. Il nous semble qu'au cours des quatre ou cinq derniers mois, on s'est beaucoup employé à faire valoir qu'il y avait bel et bien des problèmes dans le système de transfert des détenus en Afghanistan en 2006, mais que ces problèmes ont été réglés en mai 2007. On s'est surtout demandé pourquoi on avait mis autant de temps à trouver une solution. J'aimerais simplement préciser, au nom d'Amnistie internationale et de la B.C. Civil Liberties Association, que nous sommes d'avis, à la lumière des éléments de preuve disponibles, qu'il persiste un risque grave et considérable de torture pour les détenus que les Forces canadiennes livrent aux autorités afghanes.
Je rappelle aux membres du comité que la deuxième entente supplémentaire conclue entre le gouvernement de l'Afghanistan et celui du Canada en mai 2007 permettait aux autorités canadiennes de commencer à faire le suivi des détenus. Nous avons toutefois constaté que les diplomates canadiens ont, dès lors, eu droit à de nombreux comptes rendus détaillés de mauvais traitements et de torture lorsqu'ils rendaient visite aux détenus. Je sais que certains ont laissé entendre que ces allégations n'étaient pas crédibles, mais permettez-moi de vous rappeler que la Cour fédérale s'est penchée en 2008 sur ces comptes rendus faits aux diplomates canadiens et que la juge Anne Mactavish a déclaré ce qui suit à cet égard:
Ces plaintes comprenaient des allégations selon lesquelles les prisonniers étaient battus à coups de pied, étaient battus avec des câbles électriques, recevaient des chocs électriques, se voyaient infliger des coupures ou des brûlures, et étaient enchaînés et tenus debout pendant plusieurs jours de suite, les bras élevés au-dessus de la tête.
De plus, dans certains cas, des prisonniers avaient des signes physiques qui correspondaient à leurs allégations de mauvais traitements. En outre, des Canadiens qui effectuaient les visites des lieux ont personnellement vu des détenus manifestant des signes de maladie mentale et, dans au moins deux cas, les rapports des visites de surveillance décrivaient des prisonniers qui paraissaient « traumatisés ».
C'est l'information que l'on a commencé à transmettre aux diplomates canadiens en 2007. Comme nous le savons, les transferts ont été par la suite suspendus en novembre 2007 pendant une période de quatre mois parce que des instruments de torture ont été découverts dans une cellule utilisée pour les interrogatoires.
Nous ne connaissons pas les détails que les diplomates canadiens ont pu apprendre depuis. En novembre 2009, a déclaré publiquement que les transferts ont été interrompus à trois reprises en 2009. Il a indiqué que l'une de ces interruptions s'expliquait du fait que la direction nationale de la sécurité avait refusé l'accès aux prisons pendant un certain temps, et que les deux autres étaient attribuables à de nouvelles allégations de mauvais traitements. Nous n'avons rien pu apprendre de plus à ce sujet et nous serions très intéressés à connaître les détails de ces nouveaux cas d'abus présumés. Je me permets toutefois de rappeler aux membres du comité que toutes les fois où il est question de mauvais traitements dans une prison afghane, il s'agit en fait d'un euphémisme pour parler de torture.
Il faut reconnaître qu'en juin 2007, le ministre MacKay, alors à la tête des Affaires étrangères, et le ministre de la Sécurité publique, Stockwell Day, ont indiqué publiquement qu'il y avait eu de nouvelles allégations de mauvais traitements en provenance des prisons afghanes. Nous avons toutefois découvert un an plus tard que les rapports en question parlaient d'individus battus avec des câbles électriques alors que leurs yeux étaient bandés, soumis à des chocs électriques et frappés aux pieds avec des câbles. Un autre homme ne pouvait dire ce qu'il lui était arrivé, sauf qu'il avait perdu tous ses ongles d'orteil. Nous nous sommes donc inquiétés d'entendre le ministre MacKay indiquer en novembre 2009 que les transferts avaient dû être interrompus encore très récemment, soit au cours de la dernière année. Nous ne connaissons pas les détails des cas allégués et nous ne savons pas pour quelle raison les Forces canadiennes jugent qu'il n'est pas risqué de transférer des détenus dans un tel contexte.
En terminant sur ce sujet, nous avons appris que les Forces britanniques en Afghanistan ont cessé les transferts de prisonniers aux autorités afghanes, et plus particulièrement à la Direction nationale de la sécurité. Les transferts ont été interrompus en juin 2009. Ce moratoire sur les transferts est toujours en vigueur aujourd'hui. Il va de soi que mes clients se demandent pourquoi le Canada juge sans danger de continuer à transférer des détenus, alors que les Forces britanniques considèrent qu'il y a un risque de torture. C'est donc ce qui nous préoccupe relativement aux risques actuels de torture.
Dans un deuxième temps, j'aimerais faire le point avec vous relativement aux procédures entreprises devant la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire. Comme vous vous en souvenez, les procédures ont été suspendues en octobre 2009 parce que tous les documents pertinents n'ont pas été divulgués. Le président alors en poste, Peter Tinsley, a jugé inéquitable pour les personnes faisant l'objet des plaintes, à savoir les agents de la police militaire, que l'on poursuive les audiences sans que tous ces documents soient entièrement communiqués. Il a donc décrété un ajournement jusqu'à la production desdits documents.
Je peux vous indiquer qu'un certain nombre de ces documents ont été effectivement communiqués, tant aux personnes visées qu'à nous-mêmes. Nous ne pouvons pas dévoiler le contenu de ces documents tant qu'ils n'auront pas été produits en preuve, mais je peux vous dire que le gouvernement a finalement consenti à divulguer une quantité considérable de renseignements. Cependant, il y a encore un grand nombre de documents qui n'ont pas été produits. Hier encore, Ron Lunau, avocat principal de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire, a écrit à nouveau au gouvernement au sujet des autres documents attendus du ministère de la Défense nationale ainsi que du ministère des Affaires étrangères. La divulgation continue donc à poser problème.
J'ajouterais qu'au moment où les audiences ont été levées, on s'inquiétait de possibles manoeuvres d'intimidation de la part des avocats du ministère de la Justice auprès de témoins éventuels. On menaçait ceux-ci en leur conseillant de ne pas comparaître devant la commission et de ne pas coopérer avec son avocat. Je peux maintenant vous confirmer que nous avons appris depuis lors d'un avocat du ministère de la Justice que tous ces témoins collaborent maintenant avec l'avocat de la commission, ce qui ne manque pas de nous réjouir.
Par ailleurs, cela ne règle pas la question des tactiques d'intimidation qui ont pu être utilisées à l'endroit de certains témoins et l'on en discutera à nouveau lorsque les audiences reprendront à la fin du mois. Les audiences doivent recommencer le 24 mars avec trois journées consacrées aux motions. Les audiences seront ensuite suspendues pendant une semaine après quoi, à compter du 5 avril 2010, on entendra des témoins pendant six semaines consécutives. Nous devrions recevoir sous peu la liste définitive des témoins, car la commission continue actuellement à rencontrer et à interroger des personnes qui pourraient être appelées à témoigner.
Je vais conclure à ce sujet et terminer ma déclaration d'ouverture en informant le comité que l'on n'a toujours pas nommé un nouveau président à la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire. Le mandat du président sortant, M. Peter Tinsley, a pris fin le 11 décembre 2009. Le gouvernement a déclaré à ce moment-là qu'un nouveau président serait nommé. Cela n'a pas encore été fait.
Il faut toutefois préciser qu'un autre membre de la commission, M. Glenn Stannard, a été nommé président par intérim. Selon la lettre initiale reçue de l'avocat de la commission en janvier, M. Stannard s'occupera des questions de procédure relatives à ces audiences en attendant qu'un autre président ayant une formation juridique soit nommé, car M. Stannard n'est pas avocat.
Il y a environ quatre semaines, nous apprenions qu'en l'absence d'une nomination à son poste, M. Stannard se désignait lui-même pour présider les audiences de la commission. Dans l'état actuel des choses, non seulement M. Stannard agira-t-il comme président intérimaire de la commission, mais c'est également lui qui présidera par intérim les audiences.
Je veux seulement que les membres du comité comprennent bien que mes clients n'ont absolument rien à reprocher à M. Stannard. Il est l'ancien chef de police de la ville de Windsor. Nous avons toutefois souligné nos préoccupations quant au fait qu'il ne possède aucune formation juridique alors qu'il semble bien que les audiences risquent fort d'être plutôt complexes. Nous avons déjà eu droit à de nombreuses objections des avocats du ministère de la Justice sur des questions de compétence, de privilège et de sécurité nationale, notamment, ce qui nous amène à nous interroger sur le bon déroulement des procédures.
La situation est d'autant plus préoccupante qu'il n'existe nulle part ailleurs au Canada d'organisme d'examen des plaintes contre la police qui n'exige pas une formation juridique de son président.
Voilà pour l'état actuel de la situation. J'en resterai là pour l'instant.
C'était donc ma déclaration préliminaire. Merci beaucoup, monsieur le président.
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Je peux vous dire que j'ai eu l'occasion de prendre connaissance du mandat de M. Iacobucci. D'après ce que j'ai pu comprendre, son mandat se limitera essentiellement à procéder à une contre-expertise relativement aux passages censurés pour des motifs de sécurité nationale dans les documents déjà divulgués. Il s'agit d'un important volume de documents qui ont été produits depuis le début de 2007 et divulgués dans le cadre de différentes procédures, tant devant la Cour fédérale que devant la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire.
Si j'interprète bien son mandat, il ne fera rien d'autre qu'exprimer un deuxième avis sur les censures déjà effectuées. Je dois vous dire que je m'interroge un peu sur l'utilité de la chose.
Mes clients n'ont cessé de réclamer la tenue d'une enquête judiciaire publique en bonne et due forme. Nous avons fait part de nos préoccupations, mais la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire ne s'intéresse en fait qu'à un aspect très étroit de cette vaste problématique qui concerne bien évidemment plusieurs ministères. On ne se penche même pas sur les agissements des Forces canadiennes; on se limite à la seule police militaire. C'est le point de vue que nous avons défendu.
Pour ce qui est des échéanciers, je voudrais également souligner que les avocats du groupe de la sécurité nationale au sein du ministère de la Justice ont mis énormément de temps pour examiner et censurer ces documents. Lors des procédures devant la Cour fédérale, les ordonnances judiciaires se sont succédé pour les inciter à produire ces documents. Les avocats faisaient valoir à chaque fois qu'il faut beaucoup de temps pour ce faire, et la cour finissait toujours par leur accorder un délai. Mais je peux vous dire qu'ils ont mis vraiment beaucoup de temps — plus d'un an, tout au moins — pour produire seulement une faible proportion des documents demandés.
Par ailleurs, voilà plus de deux ans que la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire a demandé au ministère des Affaires étrangères, notamment, des documents qui n'ont toujours pas été divulgués. D'après ce que nous avons pu comprendre, ces retards seraient attribuables au temps requis pour caviarder ces documents pour des motifs de sécurité nationale.
Je dirais qu'il y a tout lieu de se demander si le mandat confié à M. Iacobucci ne va pas s'étendre sur une période extrêmement longue sans que je puisse voir, en toute franchise, ce que cela va nous apporter exactement, si ce n'est une contre-expertise du travail déjà accompli par les avocats du ministère de la Justice.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Tout d'abord, j'aimerais vous remercier d'être de retour devant le comité. On a enfin un statut légal. Je suis certain que tous les journalistes et tous mes amis sont contents de voir qu'on a du café et du jus aujourd'hui. Beaucoup de journalistes sont ici. On va finalement pouvoir parler dans un cadre un peu plus légal.
Je ne sais pas si vous avez suivi la période des questions aujourd'hui. Beaucoup de questions ont été posées sur la construction possible d'une prison en Afghanistan. Selon moi, c'est comme avouer que le Canada savait qu'il y avait de la torture et que des discussions ont été tenues avec les Britanniques et les Hollandais pour que leur propre prison soit créée. Même dans les articles d'aujourd'hui, on dit que M. Amrullah Saleh, qui était le directeur du centre, était vraiment très mécontent.
À ce sujet, je vous fais part de ce qui suit:
[Traduction]
M. Saleh a menacé de cesser les inspections et — pour apaiser semble-t-il le chef de la Direction nationale de la sécurité — les trois pays ont convenu de n'effectuer que des visites conjointes précédées de très long préavis, et ce, une fois par mois au maximum.
[Français]
Le ministre nous a répondu que selon la deuxième entente, il était possible de faire des visites improvisées, n'importe quand, mais ce qu'on lit ici nous indique que ce n'est pas tout à fait le cas.
C'est donc dire, et je pense que vous l'avez mentionné au début, que la torture se poursuit dans les prisons afghanes. Convenez-vous que mon interprétation est assez proche de la vôtre?
Avez-vous lu le 2009 Human Rights Report: Afghanistan du U.S. Department of State?
Tout y est très clair. On y dit ceci:
[Traduction]
« la torture était chose courante au sein de la majorité des instances chargées d'appliquer la loi, et tout particulièrement chez les forces policières » en Afghanistan.
[Français]
Ça ne remonte pas à sept ou huit ans mais à quelques mois, au plus. En effet, ce rapport est daté du 11 mars 2010. Si on tient pour acquis que la torture se poursuit malgré les ententes que le gouvernement a signées avec le gouvernement afghan, on doit se rendre à l'évidence que le gouvernement devrait dès maintenant arrêter les transferts et faire en sorte que les gens capturés par les Forces canadiennes ne soient pas transférés.
Êtes-vous d'accord pour dire qu'en se fondant sur le rapport du U.S. Department of State et sur l'ensemble des données dont on dispose, on a suffisamment de preuves pour justifier que les prisonniers cessent d'être transférés dès maintenant?
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Merci, monsieur Bachand.
Je n'ai entendu que des bribes des questions posées en Chambre aujourd'hui. J'ai toutefois quelques informations à vous transmettre au sujet des prisons en Afghanistan.
Dans le cadre des procédures en cours au Royaume-Uni, j'ai appris qu'en 2009, la Direction nationale de la sécurité avait refusé l'accès aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et au Canada pendant une certaine période, tant que ces pays ne donnaient pas suite à leur promesse de construire une nouvelle prison, comme le faisait valoir M. Saleh, chef de la DNS. Dans l'un des documents émanant de ces procédures, j'ai pu voir que le président Karzai semblait appuyer le chef dans sa démarche.
La situation était peut-être attribuable à l'incident auquel faisait référence M. MacKay en novembre 2009. Je vous rappelle que M. MacKay a parlé de trois occasions où les transferts ont été interrompus en 2009. Il a dit que cela faisait suite dans deux cas à de nouvelles allégations de mauvais traitements et, dans l'autre, à une décision de la Direction nationale de la sécurité qui refusait l'accès, ce qui m'amène à penser que c'est peut-être ce dont il parlait. D'après ce que je peux voir, les transferts se poursuivent, ce qui semble indiquer que le problème a été réglé, mais il est inquiétant de constater que nous n'avions aucune idée de ce qui se passait à l'époque.
Il y a aussi la question, comme le soulignait le Globe and Mail de ce matin — et j'ai vu d'autres documents le corroborant — des discussions tenues en 2006, relativement à un centre de détention conjoint qui aurait été cogéré par les autorités afghanes et les forces de l'OTAN. J'ai ici un document faisant état de cette proposition en mars 2006 au Royaume-Uni. Voici ce qu'on peut y lire:
Cette solution serait avantageuse, car elle permettrait de conserver un visage afghan. On augmenterait les chances de respecter les obligations internationales tout en investissant dans une infrastructure afghane créant une capacité durable qui demeurerait présente après le départ des forces internationales.
Et on ajoute plus loin:
Le Canada et les Pays-Bas ne sont pas favorables à cette proposition.
Nous ne savons pas ce qui explique cette résistance de leur part.
En procédant au contre-interrogatoire de Mme Colleen Swords, la sous-ministre adjointe du ministère des Affaires étrangères en 2007, j'ai entendu parler de cette proposition. Nous avons appris qu'il y a effectivement eu des pourparlers concernant un établissement en mode de cogestion, mais nous ne savons pas pourquoi le Canada s'y est opposé en fin de compte. C'est une proposition mise de l'avant par mes clients depuis très longtemps pour faire en sorte que le Canada puisse respecter ses obligations internationales.
Pour ce qui est de votre dernier point au sujet du rapport rendu public par le département d'État américain il y a quelques jours à peine, il faut malheureusement constater que l'on retrouve des commentaires semblables au sujet des risques de torture en Afghanistan dans les rapports américains depuis plusieurs années. Je peux vous dire que j'ai pris connaissance de quelques rapports similaires produits par le ministère canadien des Affaires étrangères. Ils nous ont été communiqués dans le cadre des procédures judiciaires et les constatations qu'on y retrouve sont très semblables depuis plusieurs années. Les Canadiens soulignent en effet que la torture est beaucoup trop fréquente — c'est l'expression utilisée — dans ces établissements. Nous n'avons aucune raison de croire que la situation s'est améliorée dans les prisons afghanes. Nous n'avons aucune preuve en ce sens.
J'ai également eu connaissance d'un autre rapport produit à l'été 2009 par la Commission indépendante des droits de l'homme de l'Afghanistan sur les causes de la torture dans les établissements d'application de la loi. La commission a procédé à une étude scientifique très sérieuse sur la situation des détenus afghans. On a mené des entrevues auprès de 400 individus dont plus de 90 p. 100 ont déclaré avoir été victimes de mauvais traitements ou de torture lorsqu'ils étaient détenus par les autorités afghanes.
À la lumière de ces éléments d'information et de ce que nous avons pu entendre par ailleurs — à savoir que les diplomates canadiens avaient eu vent de nouvelles allégations de mauvais traitements en 2009, selon le ministre MacKay — et, dans le contexte de cette preuve accablante, compte tenu des critères juridiques applicables au risque de torture, je ne vois pas comment les Forces canadiennes peuvent continuer à transférer des détenus sans enfreindre les règles du droit international.
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En fait, toutes les dispositions s'appliqueraient.
Nous ne voulions pas contester le droit des Forces canadiennes de capturer et de détenir des individus en Afghanistan. Selon la résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies approuvant la FIAS, et selon le protocole d'entente définissant les arrangements d'ordre technique entre l'Afghanistan et le Canada, il allait de soi que les Forces canadiennes étaient légalement autorisées à capturer des gens et à les garder en détention. Ce n'était donc pas une question qui nous posait problème.
Il y avait toutefois lieu de s'interroger sur un possible manquement aux dispositions prévoyant une protection contre « les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives » lorsque des individus sont capturés et fouillés. Nous n'avions aucun élément de preuve à cet effet. Pour ce qui est de la détention arbitraire, lorsqu'un individu est emprisonné pendant plusieurs mois sans qu'aucune accusation ne soit portée, je pense que la situation peut devenir problématique, mais encore là nous n'avions pas de preuves.
Notre inquiétude quant à l'article 7 nous venait du fait que l'on transférait des détenus sans qu'ils n'aient droit à une audience. Et la Cour suprême du Canada a conclu, relativement aux non-Canadiens qui sont extradés ou déportés, qu'ils avaient droit à la protection de la Charte si on les exposait à la torture. C'est sur ce jugement que nous avons fondé notre argumentation.
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Je pense que c'est très grave et que c'est une question importante qui reste sans réponse. Les forces canadiennes reçoivent-elles des renseignements issus des interrogatoires de la DNS et font-elles enquête pour s'assurer que ces renseignements n'ont pas été arrachés sous la torture? C'est une question très grave. Si c'était le cas, le Canada violerait les obligations contractées en vertu de la Convention contre la torture.
Je reviens à l'une des bonnes questions de M. Dechert sur le changement de circonstances dans un conflit armé ou sur le théâtre d'une guerre. On ne peut pas se soustraire au devoir d'interdire la torture. Quand le droit international sur les droits de la personne et le droit humanitaire international se superposent l'un à l'autre, il y a des cas où le second aurait préséance sur certaines dispositions plus rigides du premier. Ce ne serait pas le cas si la preuve était arrachée sous la torture. Si ce l'était, nous serions très inquiets.
D'après beaucoup de documents que j'ai consultés, je ne suis pas sûr que les Forces canadiennes poseraient la question. D'après de nombreux rapports que j'ai lus, il semble que, dans de nombreux cas, elles ont adopté l'opinion selon laquelle les droits des détenus en tant que personnes relèvent du ministère des Affaires étrangères et que, en conséquence, elles n'avaient pas à s'en soucier. C'est ce que nous avons constaté, je crois, dans d'autres cas, par exemple avec le SCRS qui, à l'étranger, prétend qu'on n'a pas à s'inquiéter de savoir ni à enquêter pour savoir si on a arraché des renseignements de quelqu'un en le torturant. Or, c'est un motif très grave de préoccupation.
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Oui, monsieur le président, je vais le faire rapidement.
La motion consiste à ce que le comité commence sans délai à examiner et à étudier les préparatifs et les plans du Canada en vue du retrait des Forces canadiennes en Afghanistan en 2011 ainsi que les efforts et les plans pangouvernementaux en Afghanistan après 2011, compte tenu du fait que la fin de la mission canadienne en Afghanistan, prévue pour 2011, approche à grands pas, que le comité a été créé expressément pour étudier le mandat de cette mission et son évolution constante dans une perspective pangouvernementale, et que la pertinence stratégique et l'importance de ces plans sont telles qu'elles nécessitent clairement une attention immédiate.
La motion traite de questions qui préoccupent grandement nos alliés membres et non membres de l'OTAN. Et ce sont certainement des choses qui préoccupent beaucoup les Forces canadiennes et les membres, qui sont évidemment conscients de ce qui s'annonce pour 2011. Ils aimeraient avoir un peu plus de précisions au sujet de la mission.
Franchement, il serait beaucoup plus productif pour ce comité de penser à l'avenir que de ressasser le passé. Nous allons tous convoquer des témoins, et ces témoins, si on se dit les choses honnêtement, vont nous dire ce qu'on attend d'eux. Il n'y a aucune raison de se surprendre du témoignage de M. Champ. Il est l'employé de deux organisations qui luttent contre notre gouvernement, alors il est évident qu'il va tenir ce genre de discours.
Je souhaite simplement que le comité revienne à son mandat, c'est-à-dire d'étudier la mission et le déroulement de la mission en vue de 2011, ainsi que l'avenir de cette mission. À notre avis, c'est beaucoup plus important que de se lancer dans une chasse aux sorcières politique à saveur partisane.
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Monsieur le président, tout d'abord, comme vous le savez, le comité a adopté une motion déposée par M. Harris pour que soit poursuivie l'étude sur la détention des prisonniers afghans.
J'ai indiqué l'autre jour à M. Hawn, monsieur le président, que l'opposition officielle serait plus qu'heureuse d'appuyer cette motion, mais à deux conditions. La première est qu'on enclenche immédiatement une enquête publique, de façon à pouvoir régler la question des détenus et obtenir tous les documents pertinents. La seconde, et je sais qu'il ne s'agit pas d'un amendement favorable, monsieur le président, consiste à retirer les mots « commence sans délai à ». Autrement dit, la motion se lirait comme suit: « Que le comité examine et étudie les préparatifs et les plans du Canada », et ainsi de suite. Nous serons très heureux de le faire, mais comme le comité a déjà adopté une motion pour traiter de la question des détenus, cette dernière a évidemment préséance.
Nous sommes prêts à examiner la question. J'imagine que tout dépendra du nombre de témoins et quel serait le délai accordé à l'étude de la question des détenus afghans. Nous sommes loin de croire, monsieur le président, que la question des détenus afghans soit une perte de temps. Nous ne croyons pas non plus qu'il s'agisse d'une chasse aux sorcières politique. Nous croyons plutôt que c'est une façon d'arriver à la vérité. Malheureusement, si on veut que cette motion soit adoptée immédiatement, tout ce qu'il y a à faire, c'est de convaincre le gouvernement d'enclencher une enquête publique. À cette condition, nous sommes disposés à le faire. Autrement, nous voulons qu'il soit clair que nous appuyons la proposition de M. Hawn, mais celle-ci doit passer après les discussions que nous avons actuellement au sujet des détenus afghans, comme le comité en avait convenu.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
J'appuie la proposition de retirer les mots « commence sans délai à » de la motion.
Il est évident que nous devrons tôt ou tard examiner la question. Mais vous le savez, le comité a déployé des efforts remarquables pour avoir accès à des versions non expurgées des documents. Nous devons trouver un moyen d'obtenir ces documents sans causer préjudice à la sécurité nationale ni compromettre des renseignements de nature confidentielle dans l'intérêt du public. Et j'estime que c'est possible. Tant que ce point n'a pas été résolu, je crois que nous devons poursuivre l'étude sur l'Afghanistan.
Nous avons obtenu de nouvelles informations aujourd'hui. Par exemple, nous savons qu'il pourrait falloir jusqu'à deux ans à M. Iacobucci pour faire cet examen. Vous pouvez l'interpréter comme vous le voulez, monsieur Dechert. J'en ai fait ma propre interprétation, et nous allons maintenant laisser les choses suivre leur cours. Je suis d'accord pour dire que nous devons nous pencher sur cette question à un moment ou à un autre, mais pas avant que le comité ait réussi à percer la vérité dans ce dossier. Soit dit en passant, la raison pour laquelle le comité se penche sur la question des détenus afghans — et je crois que M. Champ nous l'a fait comprendre aujourd'hui —, c'est qu'il ne semble pas y avoir d'autre mécanisme efficace pour le faire. Comme M. Champ l'a indiqué, la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire n'examine qu'un seul aspect précis de la question. Une enquête nous permettrait d'avoir une vue d'ensemble de la situation. Nous tentons de combler les lacunes d'ici à ce qu'une enquête soit enclenchée, et je crois que nous avons l'obligation de le faire.
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Merci, monsieur le président.
On a tenu un peu la même discussion dans le cadre du comité restreint l'autre jour. Or un argument auquel je tiens n'a pas encore été repris par mes collègues.
M. Hawn veut qu'on commence sans délai à étudier les préparatifs et les plans du Canada en vue du retrait des Forces canadiennes. Or je veux souligner qu'on avait une excellente occasion de le faire après les Fêtes, pendant quatre semaines, mais que le gouvernement a décidé de proroger les travaux de la Chambre. On a donc perdu énormément de temps.
Je veux aussi rappeler que nous, au comité, étions prêts à continuer les travaux avant les Fêtes, mais que la délégation du Parti conservateur s'est livrée à un boycottage. Alors, quand on nous dit vouloir commencer les travaux sans délai, je réponds que le délai a été créé par le Parti conservateur. C'est un argument important dans le cadre de la discussion d'aujourd'hui.
Nous sommes également d'accord pour retirer l'expression « sans délai ».
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D'abord, je tiens à remercier M. Dosanjh de s'être prononcé en faveur de la motion telle qu'elle est rédigée, lorsqu'il a souligné que 2011 approche à grand pas comme on le mentionne dans la motion; en ce moment, ni M. Dosanjh ni le reste du comité ne connaît les plans du gouvernement. Je suis heureux qu'il dise être d'accord pour que nous commencions cela sans délai, afin que nous puissions traiter de questions en lien avec ce qui s'en vient.
Il ne fait aucun doute que cela pourrait très bien traîner en longueur, surtout s'il y a un manque de bonne volonté, et en ce moment, il semble que ce soit le cas. Cela pourrait bien traîner jusqu'en 2011, probablement environ six mois après que M. Iacobucci aura présenté ses conclusions, dans un document qui pourrait être mis à la disposition du comité.
J'ai vraiment beaucoup de difficulté à comprendre où les députés de l'opposition veulent en venir lorsqu'ils réclament une enquête publique exhaustive. Je me demande si l'un d'entre eux pourrait nommer une enquête publique qui n'a pas largement dépassé l'échéance prévue.
Comment pouvons-nous croire que nous pourrions entreprendre une enquête publique sur cette question avant six mois? Qu'il ne serait pas nécessaire de demander une prolongation pour une enquête publique exhaustive? Que nous n'aurions pas à demander de prolongation pour la rédaction du rapport d'enquête?
Nous parlons ici d'une enquête publique en bonne et due forme. Si une telle demande était acceptée et s'il s'agit vraiment du problème des plus pressant dont parle l'opposition, ce ne serait pas dans l'intérêt de la population canadienne, pour la simple et bonne raison qu'il faudrait au moins deux ou trois ans pour réaliser cette enquête.
Comparons cela avec l'enquête de M. Iacobucci, à qui l'on a demandé d'examiner les documents et de les mettre si possible à la disposition de notre comité.
Si le comité souhaite travailler très bientôt avec des documents révisés et faire ce qu'il a à faire, ce serait très intéressant. Mais je me demande si la population canadienne aimerait connaître, comme M. Dosanjh l'a si généreusement affirmé, les perspectives du gouvernement du Canada pour 2010, la façon dont le gouvernement entend agir pour que la population canadienne ait son mot à dire dans le retrait des troupes et la fin du conflit armé en Afghanistan.
Comme je l'ai dit, je tiens à remercier M. Dosanjh de s'être prononcé clairement contre cet amendement, car il reconnaît l'importance pour ce comité d'être en mesure d'aller de l'avant et de se pencher sur ce que le gouvernement accomplira en 2011.
Monsieur Wilfert, je me demande si vous pouvez imaginer une situation où au fil du temps, peu importe le temps pendant lequel la question des détenus sera à l'étude, il y aurait une période d'une durée raisonnable au cours de laquelle nous pourrions examiner le contenu de la motion, discuter de quelques points ou de tous les points qu'elle comporte et ensuite revenir à la question des détenus.
Monsieur, vous avez entraîné ce comité contre son gré dans le débat à savoir si la question de la torture doit être prise en considération. Si je peux me permettre, et peut-être avec les meilleures intentions du monde, par cette motion modifiée, vous avez contribué à ce que le comité manque de la souplesse qu'il lui faut et à ce que le contenu de cette motion s'éloigne de la finalité première du comité sur l'Afghanistan.
Sauf votre respect, je vous proposerais de laisser tomber la dernière partie de votre amendement, auquel cas les différents membres de ce comité pourront espérer un minimum de coopération. Nous, les députés du parti ministériel, reconnaissons que nous ne sommes pas assez nombreux dans ce comité, d'après la façon dont il est constitué, pour empêcher la saisie de cette motion, mais au moins, nous trouverions un petit terrain d'entente afin d'aller de l'avant avec cela lorsque nous en aurions l'occasion.
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Merci, monsieur le président.
Je pense qu'une certaine souplesse s'impose. Je dois dire, sauf votre respect, que des petits jeux politiques se jouent aujourd'hui. Par exemple, je n'aime pas les cinq derniers mots qui ont été utilisés. Quelqu'un pourrait s'en servir pour jouer à un petit jeu et dire que le comité a convenu que cette question nécessite une attention immédiate, qu'elle a une importance primordiale et qu'il ne faut pas tarder, même si la première phrase est supprimée. Nous comptons sur vous, monsieur le président, pour empêcher ce type de chose de se produire.
En toute bonne foi, j'accepterais ces mots si personne ne pouvait s'en servir pour tenter de prendre le comité en otage à un moment donné en disant que nous nous sommes déjà mis d'accord là-dessus. Je suis très heureux que ma motion ait été soumise en premier et que le président la considère comme la priorité du comité. Je crois que nous avons l'impression, du moins M. Wilfert, qu'une certaine souplesse s'impose.
Je ne vois aucun problème à ce que quelqu'un veuille tenir une séance d'information à un moment donné. À moins que quelque chose survienne très rapidement, nous mettrons peut-être beaucoup de temps à terminer l'étude de la question des détenus afghans. Nous en avons peut-être encore pour longtemps à le faire. À mon avis, cela ne veut pas nécessairement dire que nous devrions nous empêcher de tenir une ou deux fois des audiences pour rattraper le retard pris dans d'autres activités du comité. Je ne crois pas que les choses doivent être absolues au point où nous ne pouvons pas en parler à moins d'avoir terminé l'étude sur les détenus en Afghanistan.
Nous avons dit clairement que c'est une priorité. Si ces derniers mots ne sont pas utilisés pour tenter de prendre le comité en otage, je ne vois aucun problème à ce que nous soyons plus souples. J'espère pouvoir obtenir la promesse des députés du parti ministériel là-dessus.