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AFGH Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan


NUMÉRO 024 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 15 février 2011

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Il s'agit de la 24e séance du Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan.
    Nous avons deux points principaux à l’ordre du jour, soit le rapport du ministère des Ressources naturelles et la vidéoconférence avec un témoin à Vancouver.
    En ma qualité de président du comité, j’aimerais vous faire une proposition. Nous sommes saisis d'une motion et je vous propose d’en débattre au tout début. Je suis certain que le débat ne prendra que quelques minutes. Ensuite, j'aimerais diviser la réunion en deux périodes de 45 minutes, au lieu d’avoir une période d'une heure et une de 30 minutes. Je vous propose de procéder ainsi, parce que la deuxième partie de la réunion sera interrompue à 17 h 15, en raison de votes. Par conséquent, pour accorder le même temps de parole aux deux témoins, je divise la réunion en deux périodes de 45 minutes. Ensuite, à 17 heures, nous consacrerons 15 minutes aux travaux futurs, à huis clos.
    Est-ce que tout le monde est d’accord?
    Des voix: D'accord.
    Le président: Parfait.
    Monsieur Bachand, voulez-vous présenter la motion, s'il vous plaît?

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais d'abord remercier le comité directeur de m'avoir permis de présenter la motion qui est devant nous.
    C'est une motion qui concerne la lapidation de jeunes hommes et de jeunes femmes en Afghanistan. Le Comité de la condition féminine a adopté cette motion à l'unanimité et ses membres m'ont demandé de la présenter à des instances qui discutent de la situation en Afghanistan. Je la soumets donc à ce comité et je vais aussi la soumettre au comité de suivi sur l'Afghanistan.
    La motion demande au gouvernement de prendre les actions nécessaires pour mettre fin aux lapidations commises en Afghanistan pour toutes sortes de raisons. On pouvait voir récemment, sur YouTube, deux jeunes gens se faire lapider parce qu'ils voulaient se marier et que leurs familles était contre. Elles ont décidé de leur donner la mort par lapidation. C'est un procédé qui est très barbare.
    Je sais que c'est un geste symbolique, mais j'en ai discuté ce matin avec le comité directeur et tout le monde était d'accord. Je vous demande, donc au nom de ces jeunes hommes et de ces jeunes femmes, d'adopter la motion qui va être soumise à la Chambre par d'autres comités, dont celui de la condition féminine.
    Je vous remercie d'avance de la confiance que vous m'accordez et vous demande de bien vouloir appuyer cette motion.

[Traduction]

    Y a-t-il des commentaires?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Merci.
    Nous passons maintenant à un exposé du ministère des Ressources naturelles.
    Je souhaite la bienvenue à M. Anil Arora, sous-ministre adjoint du Secteur des minéraux et des métaux du ministère des Ressources naturelles, à Mme Ginny Flood, directrice générale de la Direction de la politique des minéraux, métaux et matériaux, et à M. David Boerner, directeur général de la Direction du Centre et du Nord du Canada de la Commission géologique du Canada.
    Nous vous souhaitons la bienvenue à notre comité. Nous vous laissons la parole pour présenter un bref exposé, si vous voulez en faire un, puis nous passerons aux questions et observations.
    Je suis désolé que nous ayons moins de 45 minutes.
    Je vous laisse la parole, monsieur.

[Français]

    Monsieur le président, nous sommes heureux d'avoir été invités ici aujourd'hui pour faire un bref exposé de l'expertise canadienne en matière d'exploitation minière, particulièrement dans les régions éloignées.

[Traduction]

    Je suis vraiment ravi d’être ici.
    Je crois que vous avez reçu une copie de nos observations préliminaires. Afin de garder un maximum de temps pour discuter, je n’aborderai pas tous les points énoncés dans le document. J’aimerais néanmoins attirer votre attention sur quelques points importants.

[Français]

    En vertu de la Constitution canadienne, le gouvernement fédéral a de grandes responsabilités relativement aux terres fédérales, à la politique fiscale et monétaire, aux relations internationales et au commerce, aux statistiques nationales et à la science et la technologie.

[Traduction]

    Dans le Nord, le gouvernement fédéral administre les ressources minérales des Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut. Au Yukon, cette responsabilité est en voie d’être transférée aux autorités territoriales.
    J’aimerais attirer votre attention sur un point en particulier, à savoir que ce sont en fait les provinces, en d'autres termes les gouvernements provinciaux, qui possèdent et gèrent les ressources minérales qui se trouvent sur leur territoire et qu’il leur incombe de prendre les décisions relatives à l’utilisation des terres.
    Je tiens également à préciser que ce n’est pas le ministère des Ressources naturelles qui détermine les priorités ou qui élabore les politiques internationales. Je vais vous parler de la situation au Canada et de ce que nous faisons ici. Je vais également tirer un parallèle avec l’Afghanistan, mais je tenais à souligner que nous ne sommes pas vraiment bien placés pour parler des priorités et des politiques du Canada sur la scène internationale.
    Certains secteurs qui touchent l’exploitation minière sont partagés entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. C’est le cas du développement économique, de la protection et de la conservation de l’environnement, de la santé et de la sécurité, ainsi que du développement économique et de la consultation des Autochtones. Dans ce dossier, nous travaillons de concert avec plusieurs autres ministères fédéraux, notamment: le ministère des Pêches et des Océans relativement aux impacts sur l’habitat du poisson; le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien relativement à la réglementation de l’exploitation minière dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, et la consultation auprès des Autochtones; Transports Canada; Ressources humaines et Développement des compétences Canada relativement aux compétences; Statistique Canada relativement à certaines statistiques; Industrie Canada relativement au répertoire des sociétés minières, pour contribuer à établir des liens dans la fourniture de biens et de services, et, bien sûr, avec nos collègues du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.
    Donc, Ressources naturelles Canada a le mandat de recueillir et de publier des statistiques sur l’exploration minérale, le développement et la production, et sur les industries minières et métallurgiques du Canada. Nous procédons à un examen complet et scientifique et à un relevé de la structure géologique et de la minéralogie du Canada. Nous veillons au développement durable des ressources minérales du Canada et à leur gestion intégrée. En outre, nous cherchons à favoriser le développement et l’utilisation responsables des ressources minérales du Canada.
    Au chapitre des sciences de la Terre, Ressources naturelles Canada met, de façon ouverte et transparente, les données scientifiques à la disposition de l’ensemble des Canadiens et de sociétés étrangères, afin de garantir que les activités d’exploration, d’exploitation et de production profitent au maximum aux Canadiens. Nous pouvons approfondir cette question.
    Nous participons à toutes les étapes du cycle de l’exploitation minière, à savoir l'acquisition d'un terrain, l’exploration, l’exploration avancée, les études de préfaisabilité et de faisabilité, l'élaboration des projets miniers comme tels, leur déroulement, la fermeture et même le renoncement aux droits de propriété du terrain.
    Le Canada est un expert dans le domaine de l’exploitation minière et, eu égard aux particularités topographiques de notre pays, nous sommes au courant des problèmes particuliers que pourrait poser l’exploitation dans des régions éloignées. L’exploitation minière dans des collectivités et des régions éloignées pose bien sûr des défis sur le plan de l’infrastructure, de l’environnement, de la main-d’œuvre et sur le plan social. Le Canada applique un système de libre entrée pour l’accès aux droits miniers. Autrement dit, n’importe qui peut jalonner une concession dans une zone géographique donnée. Les autres pays appliquent plutôt un système de vente aux enchères où les gouvernements participent à l'évaluation de la valeur d'une parcelle de terrain et déterminent ensuite comment obtenir la meilleure offre. C’est une autre caractéristique distinctive du Canada.
    Le Canada possède également de l’expertise technique en matière d'exploitation minière, mais nous comptons beaucoup sur l'industrie privée et les experts de l'industrie pour nous fournir cette expertise. Certains de nos laboratoires fournissent néanmoins de l’expertise technique relative à l’exploitation minière verte, par exemple, le but étant de veiller à ce que l’exploitation se fasse de la façon la plus responsable possible, en réduisant au maximum l’empreinte écologique et l’impact sur l’eau, et en utilisant le moins d'énergie possible, par exemple.
    Je vais m’arrêter ici. Mes collègues et moi répondrons, du mieux possible, à vos questions.

(1540)

    Je vous remercie beaucoup, monsieur Arora.
    Je donne la parole à l’opposition officielle.
    Monsieur Wilfert, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie d’être venus.
    J’ai une question importante à poser. Pourquoi voudrait-on investir en Afghanistan? Je connais bien la situation en Mongolie. Ce pays doit se doter d’une loi sur la protection des investissements étrangers, mais le gouvernement hésite à présenter une telle loi au Parlement, parce qu’il a le sentiment d’avoir été floué, au chapitre des redevances et des taxes, par les investisseurs étrangers, au début des années 1990, alors que le pays venait d’instaurer une nouvelle démocratie.
    En l’absence d’un Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers, l’APIE, ou d’un accord semblable, et d’un régime stable capable de régler la question des redevances et des taxes, et des coûts d’infrastructure, je ne vois pas pourquoi les sociétés minières investiraient en Afghanistan. Il ne faut pas non plus oublier que, d’une part, l’ancien ministre des Mines avait rencontré des fonctionnaires canadiens en 2008, avant d’être démis de ses fonctions en 2009, en raison d’un pot-de-vin de 30 millions de dollars en lien avec l’exploitation d'une mine de cuivre par des Chinois — le ministre a bien sûr nié, mais le président Karzai l’a bien sûr limogé — et que, d’autre part, l’Afghanistan est un pays en guerre.
    Monsieur le président, voici la question que j’aimerais poser: Au chapitre de la protection, quels conseils ou quelle aide donnez-vous aux sociétés canadiennes — comme Kilo, par exemple, qui cherche à implanter un important projet minier en Afghanistan?
    Il va sans dire que tout investisseur veut s’assurer que son capital est protégé. En Mongolie, comme vous le savez probablement, les sociétés canadiennes se classent au second rang des investisseurs, mais elles sont toujours en pourparlers avec le gouvernement de la Mongolie pour obtenir une protection juridique de leurs investissements et de celles d’autres sociétés, bien sûr.
    Vous soulevez un certain nombre de défis auxquels les sociétés canadiennes font face dans leurs activités d’exploitation minière à l’étranger.
    L’Institut Fraser, par exemple, mène chaque année une recherche, destinée aux pays, aux industries et aux organismes, visant, au fond, à établir la liste des pays les plus sûrs sur le plan de l’investissement. Vous avez parlé de certaines conditions préalables, comme la bonne gouvernance et la nécessité de s’assurer qu’un pays possède le cadre réglementaire et politique approprié pour permettre à l’industrie de participer au développement d’un projet.
    Je sais que, il y a quelques années, les autorités afghanes avaient lancé un appel d’offres pour l’exploitation d’un gisement en particulier, le gisement Aynak je crois, et que les Chinois avaient obtenu le contrat. Une société canadienne avait également participé à cet appel d’offres.
    Au bout du compte, il revient au secteur privé et aux sociétés minières de décider s’ils peuvent accepter les conditions existantes dans un pays et d’en tenir compte avant de présenter une soumission ou de développer un projet donné.
    À l’instar de l’Institut Fraser, vous avez souligné les conditions et les entraves dont les pays, l’industrie ou les sociétés doivent tenir compte avant d’aller de l’avant avec un projet donné.

(1545)

    Monsieur le président, je vais laisser la parole à M. Dion.
    Je voulais simplement rappeler que dans le cas de la Mongolie, les sociétés canadiennes exercent beaucoup de pression sur l’ambassade et le gouvernement canadiens pour qu’ils interviennent, car les règles sont en train de changer dans ce pays. C’est là que le bât blesse, car à quoi bon conclure une entente avec un pays, fondée sur des règles données, si ces mêmes règles changent après-coup et que l’investisseur se fait flouer, plus particulièrement en ce qui a trait aux redevances et aux taxes.
    Puis-je vous laisser la parole, monsieur Dion?
    Il vous reste environ trois minutes. Je n'ai pas chronométré le temps, mais vous avez environ trois minutes.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    D'abord, monsieur Arora, je voudrais vous féliciter pour avoir souligné votre titre de champion des langues officielles. C'est visiblement quelque chose qui vous tient à coeur et je vais donc poser mes questions en français.
    Avez-vous une stratégie pour que le secteur minier canadien exploite la situation en Afghanistan pour le bénéfice des Afghans et du Canada? Si oui, quelle est-elle?
    Merci beaucoup. C'est vraiment un plaisir de représenter mon ministère dans le rôle de champion des langues officielles.
    En fait, la stratégie que nous avons partout au monde est de travailler avec les organismes multilatéraux, c'est-à-dire avec nos partenaires aux Nations Unies, en particulier le comité qui s'occupe du développement durable, par exemple. Il y a aussi d'autres institutions comme l'ICMM, qui est un organisme qui s'occupe du développement des ressources de façon responsable.
    Nous participons très activement à un forum intergouvernemental. Je crois qu'après notre présentation, vous allez rencontrer les représentants de PDAC et de l'Association minière du Canada. Nous travaillons avec des groupes multilatéraux pour promouvoir les meilleures pratiques partout dans le monde en ce qui concerne les différents aspects. Selon les pays, il y a des situations différentes, plusieurs défis et plusieurs niveaux de gouvernance.
    Donc, nous avons un système transparent qui nous permet de travailler de façon multilatérale et les autres pays peuvent profiter des discussions tenues dans le cadre des forums. C'est notre stratégie.
    C'est vraiment bénéfique pour nous, au Canada, spécifiquement à cause des ententes que nous avons avec d'autres institutions. Cela nous permet de cultiver nos relations avec certains pays. Cependant, comme je le disais tout à l'heure, ce n'est pas notre responsabilité de déterminer la politique étrangère, ni les priorités. Cela ne relève pas de notre ministère.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Bachand.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    En 2008 — nous en parlions plus tôt —, le ministre des Mines de l'Afghanistan est venu à Ottawa. Savez-vous de quoi il a parlé en tant que porte-parole en matière de ressources naturelles? Avez-vous assisté à cette rencontre et pouvez-vous nous dire grosso modo de quoi il a été question?

(1550)

    Je n'y ai pas participé personnellement, parce que je ne suis au ministère des Ressources naturelles du Canada que depuis environ 11 mois. Cependant, je suis au courant des réunions qui ont eu lieu en 2008 et, bien sûr, des discussions qui ont suivi avec certaines personnes de l'Afghanistan. Je crois qu'il y a eu des demandes en termes de technologies, etc.
    On travaille avec nos collègues et on a également rencontré l'ambassadeur afin de déterminer comment on pourrait encourager l'Afghanistan à devenir membre des institutions et profiter ainsi de l'expertise de tout le monde.
    Je suis donc au courant. Je n'y étais pas personnellement, mais on continue le dialogue sur ces questions.
    Pouvez-vous dire, monsieur Arora, que vous connaissez le sous-sol afghan? Êtes-vous déjà allé dans ce pays? Avez-vous fait des études là-bas? Non?
    Non. On n'a pas fait d'études ni de visites en Afghanistan. Cela n'entre pas dans notre mandat. C'est quelque chose qui reste à déterminer.
    Cependant, la United States Geological Survey et l'Afghanistan Geological Survey ont fait des estimations. Avez-vous pris connaissance de ces études? Considérez-vous les estimations soumises comme étant assez exactes?
    Je peux peut-être demander à mon collègue, M. David Boerner, de répondre à votre question.
    Nous avons pris connaissance des études de la commission géologique des États-Unis. Cette commission est une organisation de classe internationale et je crois que le travail a été bien fait. Les résultats s'appuient sur des données solides et concrètes. Il reste à déterminer l'importance des gisements de métaux qui sont cachés dans le sol. C'est bien difficile de déterminer la taille et la concentration exactes de cette masse. Il reste donc un exercice statistique à faire pour déterminer approximativement la quantité de métaux. Ce n'est donc pas une observation directe de ce qui existe réellement.
    Vous dites que, du côté scientifique, l'étude a été bien menée. D'après vous, les estimations sont-elles assez exactes?
    « Exactes » n'est pas le mot que j'utiliserais. Il n'est pas possible de dire que les estimations sont exactes. C'est une approximation. On fait une comparaison avec les autres types de gisement de métaux. C'est une comparaison et une estimation.
    Finalement, c'est une estimation des estimations.
    C'est fondé sur les faits, mais ce n'est pas exact.
    Plus tôt, M. Arora, vous avez expliqué en partie la manière de procéder du côté canadien. Je ne sais pas si vous pouvez répondre à ma prochaine question. À votre connaissance, les autorités afghanes sont-elles en mesure de repousser ce que j'appelle « les prédateurs de ressources naturelles »?
    Je sais que les Chinois sont très présents en Afghanistan et anxieux de s'y établir. C'est certainement le cas aussi de certaines compagnies canadiennes dont on sait que les activités ont été plus que douteuses.
    Selon ce que vous connaissez du système afghan sur le plan législatif ou autre en vue de permettre l'accès aux capitaux étrangers, considérez-vous que l'Afghanistan est équipé et outillé pour s'assurer que l'octroi de permis va servir la population afghane? Compte tenu que les lois sont un peu trop laxistes, n'y a-t-il pas un danger que certains prédateurs de richesses naturelles se paient la traite, si je peux m'exprimer ainsi?
    Non, je ne suis pas au courant des politiques, ni de la façon dont le gouvernement fonctionne en Afghanistan. La seule chose que je sais, comme vous, c'est que cela fait quelques années que le gouvernement a ouvert la porte à la concurrence en permettant l'exploration par d'autres pays en vue de déterminer s'il y a un intérêt à exploiter les ressources.
    Comme vous le savez, le gouvernement afghan a reçu plusieurs propositions dont une du Canada, mais cette initiative n'a pas abouti. Bien sûr, il y aura d'autres occasions. Comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est vraiment aux compagnies de déterminer si ça vaut le risque ou non.

(1555)

    Est-ce que c'est Rio Novo Gold qui démontrait de l'intérêt à l'époque?
    Je pense qu'il y avait trois compagnies. Je ne suis pas un expert en ce domaine.
    Rio Novo Gold a exprimé beaucoup de réserves à cause du contexte d'insécurité et du manque de réglementation. Considérez-vous qu'il est peut-être prématuré pour des compagnies canadiennes d'aller de l'avant? On semble dire ici que les compagnies ne veulent pas procéder trop rapidement en raison des risques qu'il y a d'investir dans ce pays. On peut également les comprendre. Partagez-vous leur opinion selon laquelle c'est un peu trop risqué pour le moment?
    Je n'ai aucune opinion à ce sujet. C'est vraiment aux compagnies de prendre leur décision.
    Très bien, merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Obhrai.
    Merci monsieur le président et bienvenue au comité.
    Nous vous avons demandé de venir dans le cadre de notre étude sur la présence non militaire du Canada en Afghanistan après 2011.
    Jusqu’à présent, l'Agence canadienne de développement international et les autres organismes ont investi dans la bonne gouvernance et les écoles, des priorités établies par la commission Manley. Le comité en tient compte. Nous avons reçu, par l’entremise de la Bibliothèque du Parlement, de l’information relative aux gisements naturels et à l’exploitation minière en Afghanistan. Le but du comité est d’établir comment le Canada peut aider les Afghans à exploiter ces ressources, de sorte qu’elles servent de source de revenu et de stabilité.
    L’expérience dans d’autres pays a montré qu’en l’absence d’une bonne gouvernance, la corruption prévaut dans l’exploitation de ces ressources et que, par conséquent, les gens ne profitent pas des retombées qui y sont associées.
    Le comité veut examiner comment le Canada pourrait se servir de son expertise pour aider les Afghans. Notre bilan sur le plan de la responsabilité sociale d’entreprise est excellent et l’expertise de nos sociétés minières est confirmée. Nous sommes des experts de renommée internationale et j’espère que nous sommes meilleurs que les Australiens.
    La question que se pose le comité est de savoir comment votre ministère pourrait contribuer au développement des ressources en Afghanistan au profit des Afghans. Nous essayons de lier les deux. Vous nous avez présenté un excellent exposé du travail que vous accomplissez au Canada, mais le comité veut savoir comment votre expertise pourrait être utilisée en Afghanistan.
    Qu’en pensez-vous et comment le Canada pourrait-il mettre son expertise dans ce domaine à la disposition de l’Afghanistan?
    Voilà la raison principale de notre présence ici. Notre but est de partager l’expérience du Canada et d’expliquer pourquoi l’industrie est si prospère au Canada et à l’étranger. Dans mon exposé, j’ai déclaré que, tant au Canada que dans les autres pays, la bonne gouvernance et un bon environnement concurrentiel sont des conditions préalables, des éléments clés, pour garantir le partage des ressources entre tous les ordres du gouvernement.
    Au Canada, par exemple, un très bon régime économique et fiscal permet aux administrations municipales de percevoir des impôts fonciers. Cela leur permet de se financer. Les collectivités locales, par exemple, ont signé des ententes sur les répercussions et les avantages avec les sociétés, à l’instar de nos collectivités de Premières nations.

(1600)

    Comment pouvez-vous, en tant que ministère…? Commençons, une étape à la fois. C’est une question complexe. L'Afghanistan est au point zéro. La gouvernance est mauvaise et les choses ne vont pas bien. D'après votre expérience, quelles petites mesures le Canada pourrait prendre, sur le plan des ressources naturelles, qui serviraient de pierre angulaire aux mesures à prendre à long terme et à court terme. Dites-nous, d’après votre expérience, quels objectifs nous devrions avoir à court terme.
    Premièrement, à mon avis, l’Afghanistan n’est pas le seul pays qui essaie d’exploiter ses ressources tout en veillant à ce que cela profite à sa population. Comme je l’ai dit d’emblée, nous sommes prêts à faire profiter les autres de notre expertise et nous l’avons fait dans le passé.
    Il n’existe aucune formule magique pour l'exploitation responsable des ressources, comme nous l’avons fait au Canada. Nous avons très ouvertement fait part de notre expertise dans ce domaine par l’entremise des organismes multilatéraux dont j’ai parlé plus tôt. En fait, d’autres pays, comme l’Australie, le Royaume-Uni, les États-Unis et certains pays scandinaves, ont ouvertement permis à d'autres de bénéficier de leur expertise. On trouve notamment de nombreux renseignements à ce sujet sur les sites Web de ces organismes.
    Nous encourageons ouvertement nos collègues afghans à mieux tirer profit du dialogue qui existe déjà et du Forum intergouvernemental sur l’exploitation minière, les minéraux, les métaux et le développement durable, par exemple, auquel participent 43 pays. Les pays sont libres d’y adhérer, et c’est dans le cadre de ce forum que les pays échangent des « secrets ». Nous parlons ouvertement de bonne gouvernance, d’environnement concurrentiel, de régimes fiscaux, de cadre de réglementation et de stratégie concurrentielle axée sur l’exploitation écologique et la bonne gestion des ressources. Ce sont en fait des balises, les piliers sur lesquels tout gouvernement devrait fonder son régime et son cadre.
    Bon nombre des pays qui ont réussi à améliorer la qualité de vie de leurs citoyens par l’exploitation de leurs ressources se sont appuyés sur ces piliers. Je pense donc que la clé, c’est de participer aux discussions du forum. Le forum est très ouvert. Il permet à d'autres pays d'y prendre part et d'échanger ouvertement leurs connaissances.
    Je pense que c’est la meilleure stratégie, parce que chaque pays est unique. Certains défis que l’Afghanistan devra relever dans ses régions éloignées sont très différents de ceux que nous relevons au Canada. Je ne pense pas que nous puissions simplement leur donner notre recette et leur dire de s’en servir. Ils profiteraient davantage de l’expérience des pays dont la topographie... qui ont d’autres défis que le Canada et qui en sont à différentes étapes de la mise en valeur. Je pense que les pays qui participent au forum ont l’expertise nécessaire pour aider l’Afghanistan à renforcer uniformément ses capacités dans ce domaine.
    Désolé, nous devons conclure.
    Donc, avant toute chose, nous devrions encourager le gouvernement de l’Afghanistan à adhérer à l’organisme dont vous nous avez parlé?
    Il existe plusieurs organismes, notamment la Commission du développement social des Nations Unies, le Forum intergouvernemental sur l’exploitation minière, les minéraux, les métaux et le développement durable, et le Conseil International des Mines et Métaux, l’ICMM, dont j’ai parlé plus tôt. Il existe plusieurs organismes et je pense que l’Afghanistan devrait y participer pleinement.
    Merci.
    Monsieur Harris, vous avez la parole.

(1605)

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence et M. Arora de son exposé.
    A-t-on demandé à votre ministère d'aider ou de conseiller le gouvernement de l'Afghanistan, de lui fournir une assistance technique ou de l'aider à élaborer un cadre pour l'exploitation des ressources minérales? Vous avez dit qu'on vous l'a demandé — ou que quelqu'un était au Canada en 2008 et l'a demandé — et, si j'ai bien compris, vous avez répondu qu'il y a eu quelques discussions. Je ne vous critique pas, mais lorsque M. Obhrai vous a demandé ce que le ministère pourrait faire, j'ai eu l'impression que c'était du réchauffé. Je ne veux pas faire une analogie trop poussée, mais nous pourrions, par exemple, dire aux Afghans qu'un bon système d'éducation favoriserait leur progrès économique et social, mais ce n'est pas ce dont ils ont besoin. Avez-vous des programmes? Réalisez-vous des projets au Canada? Réalisez-vous ou pourriez-vous réaliser des projets pratiques? Je ne dis pas qu'on ne vous a pas demandé de les réaliser ou que vous n'avez pas le mandat de les réaliser, mais nous essayons de déterminer ce que le Canada pourrait faire pour aider les Afghans sur le plan de la gouvernance. Par exemple, le ministre de l'Agriculture de l'Afghanistan est un Canadien d'origine afghane qui développe sa propre expertise au Canada. Il travaille activement à la mise en place d'un bon système agricole, entre autres.
    Nous pourrions, par exemple, proposer que le gouvernement du Canada aide l'Afghanistan en lui fournissant l'expertise de votre ministère ou celle que vous pourriez obtenir auprès d'autres gouvernements au Canada — car nous avons beaucoup d'expertise au pays. Je vais vous donner un exemple, de la Banque mondiale, qui souligne le long délai de mise en production d'une mine, le manque d'infrastructure de soutien et la nécessité, pour le gouvernement de l'Afghanistan, d'élaborer une politique efficace de gestion des recettes et de partage des bénéfices: en somme, le problème est que l'Afghanistan doit élaborer des politiques. Pour que le développement économique se concrétise, l'Afghanistan doit donc régler certains problèmes, liés au partage des recettes et des bénéfices, que vous soulevez. Ces données datent de septembre 2010, elles sont donc relativement récentes.
    Il est possible que votre ministère pourrait ou serait en mesure de faire plus que de simplement discuter avec l'ambassadeur, entre autres, et élaborer un programme ou un projet. Il pourrait dire: « D'accord, nous avons des gens qui sont prêts à aller aider l'Afghanistan à élaborer ces politiques et à dresser une liste sommaire des obstacles. » À votre avis, si le gouvernement du Canada vous le demandait, seriez-vous en mesure de le faire?
    Vous avez posé des questions précises au sujet de ce qu'on nous a demandé de faire. Je le répète, je ne travaillais pas encore au ministère à l'époque, mais je peux vous confirmer qu'on nous a demandé trois choses en particulier en 2009: de l'équipement d'analyse chimique pour analyser des échantillons de minerai; de l'équipement d'exploration minérale pour savoir quelles régions présentent du potentiel avant d'accepter les investissements du secteur privé, et du soutien à la formation pour le personnel du ministère, ainsi que des bourses d'étude. Voilà les demandes particulières qu'on nous a présentées.
    Il va de soi que l'équipement d'analyse chimique coûte cher et ni mon secteur, ni le ministère, n'a les fonds nécessaires pour répondre à une telle demande. Pour y répondre, d'autres organismes gouvernementaux, comme l'ACDI par exemple, devraient fournir les ressources.
    Vous avez donc reçu des demandes précises, qui répondent à des besoins plutôt fondamentaux. J'en déduis donc que, à l'heure actuelle, l'Afghanistan n'a pas beaucoup d'expertise dans ce domaine et qu'il utilise de l'équipement rudimentaire. Si le Canada voulait, par exemple, aider l'Afghanistan à développer son secteur des minéraux, il pourrait répondre à ces demandes. Ces demandes ont déjà été formulées, mais il faut de l'argent et vous n'avez pas les fonds nécessaires. Est-ce que j'ai bien compris?
    C'est l'Afghanistan qui nous demande de lui fournir cet équipement.
    Je comprends.
    Les fonds devraient-ils être débloqués? Le secteur privé du Canada possède de tels équipements et il pourrait certainement les fournir à l'Afghanistan.
    Les autorités afghanes ont-elles demandé au Canada de former les Afghans et de financer des bourses d'étude pour permettre à des étudiants afghans de venir étudier au Canada? Est-ce que c'était l'idée première?

(1610)

    Exactement. Nous collaborons avec plusieurs universités canadiennes, parce que le ministère ne s'occupe pas lui-même de la formation. Nous établissons les contacts, avec l'Université Queen's et d'autres établissements, par exemple...
    Mais vous n'allouez pas de bourses?
    Non, notre ministère n'en alloue pas. Ce serait...
    Vous les référez aux universités.
    Exactement. Ensuite, les étudiants tirent profit des divers programmes pour essayer de...
    Il existe des programmes auxquels les étudiants pourraient s'inscrire, par exemple.
    Oui. Nous les référons aux universités.
    Pour répondre à votre question, ce sont les demandes précises auxquelles on nous a demandé de répondre si des fonds étaient disponibles pour l'équipement. Je pense effectivement que ce serait faisable et nous jouons ce rôle de facilitation. En fait, même durant une réunion que nous avons eue avec l'ambassadeur, nous avons noué des contacts avec des représentants de divers établissements et ces derniers seraient prêts à accueillir des étudiants étrangers pour développer leur esprit et leur enseigner les fondements de notre réussite.
    Il y a donc l'équipement d'analyse chimique, l'équipement d'exploration minérale, ainsi que la formation et les bourses. Pouvez-vous nous dire quel genre de formation intéresse le plus les autorités afghanes à l'heure actuelle ou au moment où elles ont pris contact avec votre ministère?
    Je suis seulement au courant des demandes dont je vous ai parlé. Je sais...
    Les autorités afghanes n'ont pas précisé quel genre...? Vous n'avez pas le détail de cela?
    Je n'ai pas le détail de cette discussion en particulier. Par contre, lorsque j'ai discuté avec l'ambassadeur, nous avons parlé d'une multitude de programmes, allant des connaissances spécialisées — comment faire fonctionner ce genre d'équipement, par exemple, faire le travail d'exploration de base, faire fonctionner l'équipement utilisé dans le cadre de la prospection géosismique, du travail géoscientifique, de la cartographie, entre autres — à la conception des mines, en passant par le forage. Le Canada possède cette expertise...
    Oui, l'expertise du Canada est reconnue dans tous les domaines dont il a été question. C'est exact.
    Donc, si vous aviez les ressources et le mandat nécessaires, vous seriez à tout le moins en mesure d'élaborer un programme ou de concevoir des projets de soutien pour ces activités?
    Oui. Certains aspects relèvent de la compétence des provinces. Nous essayons d'établir les liens et de faire en sorte que ces établissements soient en mesure de répondre à ces besoins.
    Merci beaucoup.
    Madame Brown, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci de votre présentation, monsieur Arora.
    Mon gendre fait partie des diplômés des excellents programmes dans le secteur minier qui existent au Canada. Originaire du Ghana, il a fréquenté l'Université Laurentienne en tant qu'étudiant étranger. C'est là qu'il a rencontré ma fille. Il sera très heureux d'apprendre que des ressources sont disponibles en Afghanistan. Il est en voie de terminer son doctorat et se spécialise dans certains métaux des terres rares, dont le germanium. Il vient de dépenser 300 $ pour faire l'acquisition d'une minuscule tranche afin de terminer son projet pour la NASA. Ainsi, lorsque je lui dirai qu'il existe des ressources en Afghanistan, je suis sûre qu'il en sera très heureux.
    J'ai lu certains des documents auxquels je pense que M. Bachand faisait allusion. Selon le magazine américain Businessweek, on estime qu'il se trouve en Afghanistan quelque 1,4 million de tonnes métriques de métaux des terres rares. Dans l'ensemble du pays, il y aurait des gisements d'une valeur totale de trois billions de dollars.
    Voici ce qu'a déclaré le ministre des Mines:
Les métaux lourds des terres rares de Khanneshin ne se trouvent qu'à peu d'endroits dans le monde. Ce gisement pourrait représenter un débouché à long terme pour la province du Helmand, ce qui permettrait de créer des emplois et de stabiliser la région.
    Au début de votre exposé, vous avez parlé du fait que le Canada est en mesure de transformer l'extraction de ressources en avantages socioéconomiques durables pour ses citoyens. J'aimerais que vous nous disiez ce que pourrait être la situation en Afghanistan, selon vous, compte tenu des gisements que les autorités reconnaissent être présents dans ce pays.
    En guise de transition, permettez-moi d'ajouter que, ce matin, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec les représentants d'une organisation qui produit des oligoéléments. Ils m'ont parlé des mines de sel qui se trouvent aussi en Afghanistan. Bien entendu, on a désespérément besoin de sel iodé dans ce pays pour aider la population à être en santé. On dit aussi que le sel peut être fortifié avec du fer afin de produire les oligoéléments nécessaires. Quelles sont les perspectives à long terme pour le bien-être du peuple afghan et les possibilités d'emplois bien rémunérés et de perfectionnement des compétences? Qu'est-ce que vous en pensez?

(1615)

    Nous avons dépassé un peu le temps alloué, mais nous allons vous laisser répondre à cette question.
    La réponse courte est oui.
    Je vous remercie.
    Vous avez parlé de l'omniprésence des minéraux dans notre vie quotidienne et de la façon dont les métaux des terres rares jouent un rôle dans les technologies de pointe. Les technologies vertes et les nouvelles technologies, des éoliennes aux téléphones cellulaires, en passant par les couleurs que l'on voit à la télé, ont recours aux métaux des terres rares et sont extrêmement importantes pour l'avenir.
    Donc, selon vous, il s'agit d'une excellente occasion, non seulement pour l'Afghanistan, mais aussi pour le Canada. Un certain nombre de projets sont en cours en vue d'augmenter le nombre de métaux des terres rares disponibles.
    Vous avez parlé des éléments sains, comme l'iode de sel. Ils peuvent avoir un effet positif sur les résultats en matière de santé, les vitamines, et ainsi de suite. Ils sont importants dans tous les secteurs de la société, et l'Afghanistan ne fait pas exception à la règle. Compte tenu des résultats des travaux géologiques réalisés jusqu'ici, il existe des possibilités réelles en Afghanistan.
    Au Canada, nous sommes choyés sur le plan des ressources naturelles. Il semble y avoir des possibilités en Afghanistan, et celles-ci seraient avantageuses sur le plan de la santé et de la mise au point de nombreuses technologies nouvelles.
    Merci.
    Merci.
    Nous allons devoir en rester là pour le moment. Nous vous remercions de votre présence ici, malgré le court préavis.
    Nous allons suspendre nos travaux pendant un court moment afin que l'on puisse installer l'équipement vidéo. Par la suite, nous passerons à la deuxième partie de notre réunion.
    Merci encore.


    Comme nous devons respecter un horaire très serré, je vous prierais de retourner à vos places. Nous allons maintenant reprendre la séance.
    J'aimerais passer à la deuxième partie de notre réunion. Souhaitons la bienvenue à M. Robert Shafer, directeur de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs du Canada. Il comparaît à titre personnel par vidéoconférence, à partir de Vancouver.
    Monsieur, je vous souhaite la bienvenue. J'espère que vous nous entendez bien. Nous sommes heureux de pouvoir profiter de vos compétences dans ce domaine. Nous entendez-vous?
    Je vous entends très bien et je vous remercie, les membres du comité et vous, de m'avoir invité aujourd'hui.
    Merci.
    Les personnes qui comparaissent devant notre comité disposent habituellement d'une dizaine de minutes pour faire leur déclaration préliminaire. Vous pouvez aussi prendre le temps que vous jugerez nécessaire. Je vous cède la parole.
    Merci beaucoup.
    Permettez-moi de me présenter. Je suis très heureux d'avoir la possibilité de vous parler aujourd'hui de mon expérience en Afghanistan en ce qui concerne le secteur des minéraux et le potentiel minier de ce pays.
    Je parle aujourd'hui en mon nom personnel. Je compte plus de 30 ans d'expérience en tant que géologue professionnel et je possède des diplômes universitaires en géologie et en économie. Au cours de ma carrière, j'ai travaillé dans plus de 80 pays. Je crois donc avoir vu un très large éventail de qualités et de modes de vie, ainsi que de gisements minéraux.
    J'occupe actuellement le poste de premier vice-président chez Hunter Dickinson Inc., une société de prospection et d'exploitation minières située ici, à Vancouver. Nous travaillons sur quatre continents depuis plus de 25 ans et nous comptons plus de 6 000 employés dans le monde entier. Notre activité la plus importante au Canada est la mine Gibraltar, en Colombie-Britannique. Il s'agit de la deuxième mine de cuivre en importance au pays. Nous sommes très fiers des excellents rendements qu'obtiennent nos actionnaires sur leurs investissements.
    Je suis aussi directeur de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs du Canada, l'ACPEC. Il s'agit d'une organisation nationale de plus de 7 000 membres, qui représentent un éventail de sociétés et de particuliers qui travaillent dans le secteur de la prospection et de l'exploitation minières. Parmi nos membres, il y a des prospecteurs, des géoscientifiques, des consultants en environnement, des dirigeants de sociétés minières, des étudiants, des employés de l'industrie du forage et d'institutions financières et juridiques, ainsi que des diverses autres industries connexes au secteur minier.
    Les membres corporatifs de l'association comprennent de petites sociétés de prospection et d'exploitation minières, de grandes entreprises productrices et des organisations qui fournissent des services à l'industrie. Notre congrès annuel, qui approche à grands pas, est le plus important en son genre au monde, réunissant tous les ans à Toronto quelque 25 000 personnes des cinq continents.
    J'aimerais vous dire un peu ce que je pense du secteur minier en Afghanistan, ainsi que des possibilités que présente le pays dans ce domaine.
    Comme vous le savez fort bien, l'Afghanistan est un carrefour commercial depuis des siècles, alors que, de mon point de vue, ce pays se trouvait dans une situation désastreuse dans le domaine de la géologie. Au fil des ères géologiques de notre planète, presque tous les continents sont entrés en collision avec ce petit pays. Par conséquent, le pays est presque entièrement montagneux et a été façonné par pratiquement toutes les collisions qui ont pu se produire entre montagnes et continents en raison de ces ions.
    À la suite d'un appel d'offres, notre société, Hunter Dickinson, a été retenue pour élaborer le projet d'envergure mondiale Aynak, en vue d'exploiter une mine de cuivre dans la province du Logar, située à une quarantaine de kilomètres au Sud-Est de Kaboul. Nous sommes l'une des 13 sociétés provenant de 13 pays différents — la seule du Canada — qui ont participé à cet appel d'offres.
    Notre approche était entièrement intégrée, combinant les programmes techniques, environnementaux et socioéconomiques. J'ai conclu personnellement des alliances, notamment avec EDC, le FMI, l'Institut de technologie de la Colombie-Britannique, Caterpillar et la Fondation Aga Khan, dans le but de mettre en place un programme entièrement intégré qui profiterait non seulement au projet minier en cours dans la province du Logar, mais aussi à l'ensemble de l'Afghanistan.
    Le soutien a été fourni par l'ambassade canadienne — et a été très apprécié. Le premier ministre Harper et un certain nombre de ministres ont aussi fait parvenir des lettres d'appui à leurs homologues afghans, à Kaboul.
    Au nombre des faits saillants, mentionnons les rencontres qui ont été facilitées avec des dirigeants communautaires locaux — je crois que les médias les appellent des seigneurs de la guerre, mais nous les appelons des dirigeants communautaires. Nous les avons rencontrés afin de les informer et de les aider à mieux comprendre ce que pourrait être une exploitation minière dans leur région. Quand je suis allé les voir — j'ai rencontré 25 dirigeants communautaires —, ils ne savaient même pas qu'une exploitation minière d'envergure mondiale était en voie d'installation dans leur région. Ils étaient donc très surpris de l'apprendre et ils m'ont été très reconnaissants de leur avoir présenté le programme en entier pour qu'ils puissent nous dire ce qu'ils en pensaient.
    Pour ce qui est du potentiel minier de l'Afghanistan, comme je l'ai déjà dit, ce pays se trouve au carrefour de la géologie et du commerce.

(1620)

    En 2010, vous n'êtes certainement pas sans savoir que la Commission géologique des États-Unis a publié un rapport qui révélait que l'Afghanistan regorgeait de richesses minérales. Selon moi, il s'agissait d'estimations grossières, qui ne se conformaient pas du tout à une définition juridique de l'expression « ressources ou réserves minérales ». Il était question de lignes directrices à l'intention des gouvernements et des entreprises privées qui pourraient souhaiter explorer des ressources minérales au pays. Elles ne pouvaient en aucun cas servir à la rédaction d'un rapport technique que pourraient utiliser des sociétés financières ou d'autres entreprises de ce genre.
    Les obstacles au travail en Afghanistan étaient nombreux. La logistique figurait en haut de la liste. En fait, quand j'ai demandé aux dirigeants communautaires de classer les éléments qu'ils souhaitaient le plus voir être inscrits dans un programme que notre entreprise pourrait mettre en oeuvre dans la région, j'ai été un peu surpris au départ, mais, à bien y penser, il n'est guère étonnant que la logistique soit arrivée en haut de leur liste. Ils avaient besoin de ponts et de routes afin d'avoir un meilleur accès à la campagne ainsi qu'au commerce pour et entre leurs villages. Naturellement, ils ont également parlé de la nécessité d'améliorer le rendement agricole, l'emploi et ainsi de suite.
    Les différences culturelles figurent aussi au nombre des obstacles à la capacité de travailler en Afghanistan. Évidemment, la culture occidentale est très différente de la culture asiatique, mais, encore une fois, en Afghanistan, il existe des cultures à l'intérieur des cultures, en raison des normes tribales qui régissent le mode de vie dans ce pays. Nous cherchions des moyens d'améliorer considérablement les compétences et les aptitudes des Afghans.
    C'est pourquoi j'ai fait intervenir des groupes comme l'Institut de technologie de la Colombie-Britannique qui sont prêts à établir un campus près de la mine de cuivre d'Aynak afin d'offrir des cours non seulement dans les domaines de la prospection et de la géologie, mais aussi dans des activités courantes comme le raccordement de tuyaux, l'électricité et la mécanique. Ces activités pourraient être utiles à la mine et avoir des répercussions positives qui se répandraient partout au pays.
    La production d'énergie est un défi de taille dans ce pays. Presque toute l'énergie est produite au moyen de centrales alimentées au charbon ou au diesel sur une échelle relativement petite. Nous envisagions la possibilité d'exploiter une mine de charbon en plus de construire une centrale au charbon pour qu'une mine comme celle d'Aynak puisse être exploitée.
    Comme je l'ai mentionné, le transport figurait en tête de liste des priorités de la population locale. Pour ce qui est de la sécurité, cela va sans dire.
    Dès le départ, je souhaitais notamment établir un programme d'emploi qui mettrait à profit les compétences des gens sur place. Vous savez peut-être qu'en Afghanistan, presque toutes les constructions sont en pisé. En gros, je souhaitais ériger une enceinte encerclée d'un mur en pisé, non pas tant pour empêcher des gens d'y pénétrer, mais plutôt pour procurer du travail à plusieurs milliers de personnes pendant quelques années. La population pourrait ainsi constater les effets immédiats de notre présence dans ce pays.
    Il était aussi nécessaire de simplement tisser des liens de confiance mutuelle avec la population. C'était tout un défi en soi. J'étais d'avis qu'en allant à la rencontre des gens — notre entreprise était la seule à aller à la campagne pour rencontrer les dirigeants communautaires —, nous pourrions commencer à tisser des liens avec eux.
    L'industrie minière contribue à l'avenir de l'Afghanistan. Je crois sincèrement que... on pourrait comparer l'exploitation minière en Afghanistan à l'établissement de l'infrastructure et des économies des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon. Il y a très peu d'autres débouchés économiques dans ce pays. Évidemment, il est possible de faire de l'agriculture à petite échelle, mais il s'agit d'une agriculture de subsistance.
    De même, la seule façon d'enseigner des compétences de haut niveau et d'implanter des technologies de pointe, c'est d'exploiter les ressources naturelles. La clé du succès, c'était d'introduire ces technologies et d'amener les gens au niveau qui leur permettrait d'être des participants et des chefs de file dans ce domaine.
    On prévoyait qu'après dix ans d'exploitation de la mine à Aynak, il y aurait peut-être moins de cinq expatriés en Afghanistan responsables de cette mine. Tous les autres parviendraient à exploiter la mine grâce à une capacité et à une éducation accrues.

(1625)

    Selon moi, quelle place occupent l'industrie minière et le gouvernement du Canada dans le développement de l'économie afghane de demain? J'examinerais la question du point de vue de la sécurité individuelle et financière. Si l'on parvient à sécuriser le pays, les sociétés minières vont investir en Afghanistan. Si ce n'est pas le cas, le risque sera beaucoup trop grand, non seulement pour le personnel, mais aussi pour les investissements. Les fonds que nous consacrons à la prospection et à l'exploitation sont trop rares et trop précieux pour que nous prenions le risque de les perdre en raison de mesures de sécurité insuffisantes.
    Il serait utile que les sociétés minières qui vont en Afghanistan puissent disposer d'une assurance contre les risques politiques. Il faudrait également examiner d'autres mesures incitatives que pourraient adopter les gouvernements, mais qu'il m'est impossible de proposer, faute de compétences dans ce domaine.
    En résumé, pour la société Hunter Dickinson, Aynak et le projet de mine de cuivre à cet endroit représentaient plus qu'une source d'activités techniques et économiques. Pour nous, les efforts que nous déployions là-bas permettaient d'amorcer le processus d'édification du pays. Une exploitation minière bien gérée en Afghanistan pourrait constituer la pierre d'assise sur laquelle pourrait se développer pour la première fois dans ce pays une économie exempte de conflits et liée à autre chose que la drogue. Ces activités pourraient prendre de l'ampleur et se répandre un peu partout dans le pays pendant de nombreuses décennies.
    Je vous remercie.

(1630)

    Merci beaucoup. De toute évidence, vous êtes très au fait de la situation en Afghanistan et nous vous remercions de ce compte rendu.
    Habituellement, dans notre comité, chaque parti politique dispose de sept minutes pour formuler des observations et poser des questions. Sans plus attendre, donnons la parole au Parti libéral, qui représente l'opposition officielle.
    Monsieur Wilfert, nous vous écoutons.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue, monsieur Schafer. Je partagerai mon temps de parole avec M. Oliphant.
    J'aimerais poser une question par votre entremise, monsieur le président. Vous avez parlé de sécurité et d'assurance contre les risques politiques. J'aimerais soulever la question du régime réglementaire en ce qui concerne les redevances et les impôts. Ce régime n'existe pas à l'heure actuelle. J'ai déjà abordé cette question avec d'autres témoins, dans le cas de la Mongolie, où, en raison de l'absence d'une loi sur la protection des investissements étrangers ou d'un autre mécanisme du genre, les sociétés qui souhaitent investir doivent évidemment composer avec de l'incertitude.
    J'aimerais savoir ce que vous pensez de ce type de régime, qui, de toute évidence, serait nécessaire pour encourager les entreprises à investir en Afghanistan. Je céderai ensuite la parole à M. Oliphant.
    Nous vous écoutons, monsieur Schafer.
    Merci.
    Je serais heureux de parler de l'idée de payer des redevances ou de partager les produits de l'exploitation minière avec le pays et ses habitants. Je pense que c'est la clé du succès pour n'importe quelle entreprise commerciale — pas seulement dans le secteur minier — qui cherche à s'implanter dans n'importe quel pays du monde.
    Les redevances sont un moyen direct de partager la richesse produite par l'exploitation sans que le pays et sa population aient à assumer les risques liés aux coûts. Comme il est nécessaire d'établir un régime dans ce domaine, il faut le faire de manière très responsable et — comment dire? — non pas en fonction des profits à réaliser. Lorsqu'ils mettent sur pied un régime de redevances, les gouvernements oublient souvent qu'au départ, le capital de risque est très élevé. En effet, beaucoup d'argent doit être investi dans les travaux de construction, et les investisseurs qui prennent les risques doivent pouvoir toucher un rendement équitable, tout comme les citoyens peuvent s'attendre à obtenir un pourcentage des richesses puisées dans leur pays. Il faut aussi tenir compte des vicissitudes des cycles économiques et des fluctuations des prix des métaux. Plutôt que de verser des redevances selon un pourcentage qui fluctue, on pourrait envisager des redevances fixes, en fonction d'une base brute. Dans le cas où les prix des métaux sont plus élevés qu'à l'habitude, on pourrait mettre en place un impôt ou des redevances sur les bénéfices.
    Il ne faut toutefois pas réduire la valeur des revenus qui accompagnent les investissements qui permettent d'exploiter une mine. En effet, dans le domaine de l'exploitation minière, les investissements se font sur une base continue, et non une seule fois.
    Merci.
    M. Oliphant, du Parti libéral, posera la question suivante.
    Merci de votre présence ici aujourd'hui.
    C'est toujours difficile — je ne participe pas régulièrement aux réunions de ce comité et j'ai l'impression d'arriver au beau milieu d'une conversation. J'ai un peu l'impression d'être tombé sur une autre planète. Quelque 4 000 Canadiens d'origine afghane vivent dans ma circonscription. Je n'en ai jamais rencontré un qui était géologue, géophysicien ou mineur. Je n'en ai jamais rencontré un qui avait déjà travaillé dans une mine ou qui savait quoi que ce soit au sujet de l'industrie minière. Je leur ai tous déjà parlé. Alors, soit les mineurs, géologues et géophysiciens sont tous restés en Afghanistan où ils ne manquent pas de travail, soit l'industrie minière est pratiquement inexistante dans ce pays.
    Ce pays compte-t-il des géologues? Des géophysiciens? La commission géologique afghane se compare-t-elle à la Commission géologique du Canada sur le plan de l'expertise et des fonctions qu'elle peut assumer? J'ai travaillé comme comptable au sein d'une société sidérurgique responsable d'une mine de fer. Je sais ce qu'il faut faire pour exploiter une mine. Il faut non seulement du minerai de fer, mais aussi un chemin de fer pour le transporter vers une aciérie. Il faut donc aussi une aciérie. Il faut des camions, donc des routes, pour transporter le produit fini qui sort de l'aciérie. Il faut un régime de gouvernance pour que le réseau routier soit sûr. Il faut entretenir des relations patronales-syndicales. Il faut un marché des capitaux, un marché pour l'acier. C'est une entreprise immense.
    J'ai l'impression d'être Alice au pays des merveilles, car cette conversation n'a absolument aucun sens à mes yeux. Nous avons ici une douzaine de parlementaires qui rêvent en couleurs, ainsi que des professionnels qui prennent le temps d'essayer d'informer les membres du comité. Aidez-moi. Est-ce réaliste dans un avenir prévisible?

(1635)

    Vous m'avez posé deux questions. Je vais d'abord tenter de répondre à la deuxième. En fait, vous me demandez ce que représente l'effet multiplicateur d'une mine dans une région éloignée. Dans une région développée, par exemple en Ontario ou au Québec, l'effet multiplicateur d'une mine est probablement de l'ordre de 8 à 10, et ce, peu importe le montant des revenus annuels et de l'ampleur de l'investissement initial dans le projet. Dans une région éloignée, l'effet multiplicateur est probablement de 12 ou 13 fois le montant de l'investissement.
    Vraiment?
    Pour soutenir l'exploitation minière, il faut créer de grandes industries et des micro-industries.
    Je vais maintenant répondre à votre question au sujet des professionnels en Afghanistan. La commission géologique de ce pays est viable. Le pays compte des ingénieurs, des géophysiciens et des géologues. La plupart ont été formés en Union soviétique lorsque ce pays occupait l'Afghanistan. Je ne dirais pas que la commission géologique afghane est au même niveau que les commissions géologiques du Canada ou des provinces, mais elle sait très certainement ce qu'il faut faire pour exploiter une mine ou pour faire de la prospection dans des gisements minéraux. Ces professionnels font probablement du bon travail en tant que gestionnaires principaux de projet, mais ne sont pas en mesure d'exploiter de grandes entreprises.
    Au début de ma carrière, j'ai rencontré un homme qui était gestionnaire principal de la prospection au sein de la société Homestake Mining. Croyez-le ou non, c'était un ressortissant afghan. Il occupait le poste de gestionnaire de la prospection pour Homestake Mining dans l'Est de l'Amérique du Nord. C'est vers lui que je me suis tourné au moment de planifier cette stratégie d'implantation en Afghanistan. Maintenant septuagénaire, il est toujours très actif.
    Je l'ai fait venir en Afghanistan non seulement pour qu'il soit mon conseiller technique et interprète, mais aussi parce c'était un ami. Toutefois, chose plus importante encore, il avait déjà occupé le poste de directeur de la commission géologique afghane. Je ne savais pas cela quand je l'ai embauché, mais, petit à petit, j'ai pu en découvrir de plus en plus à son sujet.
    Pour répondre à votre question, le pays compte effectivement des professionnels compétents. Ils vont avoir besoin d'encadrement pour atteindre le niveau nécessaire pour exploiter une entreprise de calibre mondial, mais c'est déjà un bon début.
    Merci.
    Monsieur Dorion.

[Français]

    Monsieur Schafer, m'entendez-vous? La traduction vous parvient-elle?

[Traduction]

    Je vous entends. Merci pour l'interprétation.

[Français]

     Des collègues ont souligné l'absence d'infrastructures. Vous-même, vous avez mentionné que dans ce pays, il existe ce problème d'absence d'infrastructures pour permettre, par exemple, le transport du minerai. Il y a peu de chemins de fer, une absence de ponts et de tunnels, etc.
    Il y a aussi une absence relative de formation. Vous avez parlé de géologues formés en Union soviétique, à l'époque de l'occupation. J'imagine que le nombre de telles personnes dans la population est extrêmement faible et qu'en conséquence, une entreprise qui s'installerait là-bas serait une entreprise qui projetterait une image étrangère aux yeux des gens du pays parce qu'il y aurait très peu de cadres locaux.
    Vous avez noté également l'absence de sources d'énergie qu'il faut développer. Vous avez parlé de problèmes de sécurité, entre autre d'une période de deux ans pour la construction d'un mur qui protégerait les installations. Vous avez mentionné les difficultés d'ordre culturel. On sait que la société afghane est, en général, animée par des préoccupations qui ne sont pas d'ordre économique mais de toute autre nature.
    En résumé, une telle entreprise de prospection et d'exploitation en Afghanistan ne serait-elle pas une chose totalement artificielle, étrangère au pays et perçue comme telle par la population, d'où des menaces à la sécurité? Une telle entreprise exigerait-elle, pour être viable et protégée, des mesures que les ressources du pays ne peuvent pas payer? Ce serait donc des États occidentaux qui financeraient la protection d'une telle entreprise. N'est-on pas en train de rêver quand on parle d'un tel projet?
    Si vous avez toute la protection qu'il faut et les infrastructures, peut-être que vos actionnaires recevraient, comme vous le mentionniez au début de votre intervention, de large returns. Cela pourrait être payant pour les actionnaires, mais ce sera peut-être extrêmement coûteux pour une période indéfinie pour les pays étrangers, dont le Canada, qui devraient assumer l'environnement nécessaire à une telle entreprise.

(1640)

[Traduction]

    Nous vous écoutons.
    Je suis d'accord avec vous dans une très large mesure. Ce serait effectivement le cas, tout particulièrement pendant les premières années. Je crois qu'au fil du temps, l'exploitation minière aiderait le pays à prospérer. Comme je l'ai dit, on s'était donné un délai de 10 ans pour en arriver à confier en grande partie aux Afghans une exploitation minière de calibre mondial. Je crois qu'en effet, compte tenu de l'expertise en ingénierie et en géologie qui existe déjà dans ce pays, il est possible de construire sur des bases solides. Toutefois, il faudrait un programme d'échange pour former plus de spécialistes et pour les amener aux niveaux nécessaires pour gérer de la manière la plus efficiente possible les activités de prospection et d'exploitation minières.
    Pour ce qui est de la logistique, l'accès est probablement un enjeu de la même envergure dans ce pays qu'au Nunavut ou dans les Territoires du Nord-Ouest. Bien que le pays soit très montagneux, les conditions météorologiques ne sont pas aussi rigoureuses. Parallèlement, il n'y a pas de véritables infrastructures routières. Par conséquent, il faudrait avoir souvent recours à des hélicoptères, ainsi qu'à des pistes d'atterrissage.
    Pour ce qui est des gains à réaliser, je crois avoir souligné la nécessité de tisser des liens de confiance mutuelle. Une fois qu'une mine sera en exploitation et que la population locale se rendra compte des avantages qui en découlent pour elle et qui commencent à se répandre à la grandeur du pays, je crois que le géologue spécialisé dans la prospection sera accueilli à bras ouverts dans de nombreuses régions du pays. De par leur tradition, les Afghans sont enclins à protéger quiconque frappe à leur porte contre toutes les formes de dangers. Par conséquent, la situation pourrait être très exigeante au cours des premières années et il pourrait être nécessaire d'assurer une escorte militaire aux petits groupes de géologues qui font de la prospection en vue de découvrir de nouveaux gisements d'or, de cuivre et de fer. Toutefois, après un certain temps — peut-être 10 ou 15 ans —, la façon d'aborder la situation ne serait plus la même.
    Sérieusement, je comparerais la situation à ce qu'il a fallu faire à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, lorsqu'on a fait de la prospection dans l'Ouest canadien et américain afin de découvrir des gisements de cuivre et d'or et dû composer avec les populations autochtones locales. Il a fallu aménager de nombreux forts et avoir souvent recours à la cavalerie pour protéger les populations qui vivaient à la frontière. En Afghanistan, la situation ressemblerait beaucoup à cela.

(1645)

    Merci. Il reste à peu près une minute.
    Monsieur Bachand, avez-vous une question brève?

[Français]

    Oui, très rapidement.
    Monsieur Schafer, je vois que vous avez au sein de votre groupe un comité des affaires internationales par lequel vous voulez hausser votre profil. J'ai vu qu'à la conférence de Kaboul qui a eu lieu l'été dernier, il y aurait eu une discussion sur les mines et la richesse du sous-sol afghan.
    Avez-vous été témoin de cela ou êtes-vous au courant si cet enjeu a été abordé au sommet de Kaboul, l'été dernier?

[Traduction]

    Je n'ai pas assisté à la conférence. J'imagine que Hunter Dickinson devait être la seule société canadienne à avoir manifesté un tel intérêt à cette époque. Je sais que deux ou trois petites entreprises américaines de prospection ont assisté à la conférence et qu'il a surtout été question de mines d'or, car c'est peut-être le type d'exploitation minière le plus facile à lancer dans les régions éloignées.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant donner la parole au parti ministériel. Monsieur Dechert, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président. Monsieur Schafer, je vous remercie de nous avoir communiqué ces renseignements très intéressants cet après-midi.
    En tant qu'avocat spécialisé en droit commercial ayant été rattaché pendant de nombreuses années à un cabinet d'avocats de Toronto, j'ai appris à fort bien connaître l'Association canadienne des prospecteurs et des entrepreneurs. Je vois que vous êtes membre de cette organisation. J'ai assisté un certain nombre de fois aux conférences tenues à Toronto, et je suis conscient de l'excellent travail qu'elle réalise en vue de réunir des experts de toutes les régions du monde. Je sais aussi qu'elle sert de vitrine mondiale à l'expertise canadienne.
    Étant originaire de la région de Toronto, je connais particulièrement bien l'expertise canadienne dans l'exploitation minière et le financement des sociétés exploitantes des ressources. Je vous saurais gré de nous dire comment, selon vous, l'expertise canadienne pourrait contribuer à l'essor de l'industrie primaire en Afghanistan.
    Il ne fait aucun doute que le milieu canadien du financement minier est un chef de file mondial dans l'exportation de compétences techniques vers des régions éloignées. Le secteur minier et le milieu du financement minier sont toujours à l'affût de nouvelles régions où investir. Dans une région éloignée, la tâche la plus facile, c'est de trouver les gisements. Dans les régions minières traditionnelles, comme à Timmins et à Val-d'Or, c'est toujours plus difficile de trouver les mines de deuxième et de troisième génération. Les premiers gisements sautent littéralement aux yeux. Je pense qu'à très court terme, si l'on met en place des mesures incitatives et des mécanismes de sécurité appropriés, certaines régions de l'Afghanistan pourraient connaître un essor industriel aussi remarquable que celui qui a marqué le Nord du Québec, de l'Ontario, de la Saskatchewan et du Manitoba au milieu du XXe siècle.
    On dirait que le Canada et l'Afghanistan pourraient tous deux tirer un avantage net de la présence de l'industrie canadienne en Afghanistan.
    Tout à fait.
    Dans vos observations, vous avez parlé des chefs de file communautaires que vous avez rencontrés en Afghanistan. Même si ces dirigeants ne sont peut-être pas considérés comme des partenaires d'affaires idéaux au Canada, je me demande si on a vraiment le choix de faire affaire ou non avec eux quand on tente d'exploiter les ressources naturelles en Afghanistan.
    Je pense que pour pouvoir exploiter convenablement des ressources naturelles partout dans le monde, il est essentiel d'entretenir de bonnes relations avec les chefs de file communautaires. Quand ils ont compris ce que je leur proposais ou la situation que je leur décrivais, les chefs de file communautaires que j'ai rencontrés ont cru très sincèrement qu'ils pourraient en faire bénéficier leurs petites communautés et leurs villages. Ces activités pourraient améliorer la qualité de vie de leur population, non seulement grâce aux exploitations minières, mais aussi grâce à une agriculture plus efficace — que l'on pense notamment aux animaux reproducteurs et au bétail. Tout cela fait partie intégrante d'un concept de ce genre. Une fois la confiance mutuelle établie, l'apport des populations et des chefs de file locaux devient automatique et assure la réussite des entreprises.

(1650)

    Certains de ces chefs de file communautaires pourraient contribuer à la protection des intervenants au début de l'implantation de l'industrie des ressources en Afghanistan.
    J'ai posé la question directement à plusieurs d'entre eux et ils m'ont presque tous répondu exactement la même chose. Ils m'ont dit que si nous tenons nos promesses, les étrangers qui pourraient être présents dans la vallée ne s'approcheront pas de nous.
    C'est intéressant.
    En somme, ils contrôlent les populations locales et sont disposés à tenir à distance quiconque les empêcherait de jouir des avantages qui leur sont destinés.
    On dirait que, à bien des égards, ils peuvent être de bons partenaires en affaires.
    Quel est, selon vous, le degré de responsabilité sociale des entreprises canadiennes qui exploitent les ressources? Comment les sociétés canadiennes peuvent-elles aider les Afghans à exploiter leurs ressources de façon responsable?
    Je dirais que la responsabilité sociale des entreprises est une science et une activité qui sont encore en pleine évolution. Au cours des 25 dernières années, c'est devenu un élément dont il faut tenir compte dans le budget non seulement des entreprises minières, mais aussi de toutes les sociétés qui font des affaires un peu partout dans le monde. Nous en avons toujours à apprendre à ce sujet. Cela dit, grâce à l'interaction et à la coordination de l'ACPE, nous avons élaboré des guides et des lignes directrices pour aider les sociétés qui se rendent dans des régions éloignées à éviter les faux pas et les problèmes. Elles savent ainsi comment régler les problèmes qui sont liés à la responsabilité sociale des entreprises, non seulement à l'égard des peuples autochtones à l'échelle locale, mais également ici même, au Canada.
    Les évaluez-vous?
    Oui. Nous en avons encore à apprendre, mais c'est quelque chose qui s'implante très solidement et je pense que le Canada est un chef de file en la matière.
    C'est intéressant.
    Comment le gouvernement canadien peut-il aider votre entreprise et les sociétés comme la vôtre à aider les Afghans à exploiter leurs ressources?
    À l'heure actuelle, ce qu'il faut, c'est renforcer la sécurité des personnes. À l'époque de l'appel d'offres concernant le projet de mine de cuivre, le conflit en Afghanistan était beaucoup moins intense qu'à l'heure actuelle.
    Le degré de violence a augmenté considérablement en Afghanistan depuis le moment où j'y étais, en 2006-2007. Par conséquent, les sociétés ne vont pas chercher à s'implanter dans ce pays maintenant. Je pense qu'il faut établir un cessez-le-feu, sinon les entreprises ne voudront pas compromettre la sécurité de leurs employés.
    Merci.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Enfin, le dernier, mais non le moindre, à prendre la parole est M. Harris, du NPD. Vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Schafer, je vous remercie de nous faire bénéficier de votre expérience. Vous vous êtes rendu sur place, en Afghanistan, et avez été à même de constater le niveau de développement dans ce pays.
    Quelque chose m'a frappé. En réponse à une question de M. Dion, vous avez parlé du Far West et du rôle de la cavalerie pour faire évoluer la situation en Afghanistan.
    Voici ma question: quel est le rôle de l'armée dans tout cela? On estime que les ressources minérales pourraient avoir une valeur de 222 billions de dollars. Ce chiffre découle de travaux réalisés par la Commission géologique des États-Unis, mais, chose fort intéressante, c'est en fait le département de la Défense qui a publié l'information, et le Pentagone a joué un rôle très actif à cet égard. Le général Petraeus, qui est maintenant le commandant des troupes en Afghanistan, a participé à la publication de ces renseignements.
    Je me demande vraiment comment tout cela s'inscrit dans la situation actuelle en Afghanistan. Vous dites que la région est instable et que vous avez besoin de protection pour pouvoir exploiter les ressources minérales. Quel est le rôle de l'armée? Quel doit être son niveau d'intervention pour favoriser le type d'exploitation dont vous parlez?

(1655)

    Encore une fois, permettez-moi de parler de mon expérience personnelle.
    Au cours des dernières années, le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis — le département d'État et le département de la Défense — ont communiqué régulièrement avec moi. Il y a environ six mois, le département de la Défense a envoyé trois représentants pour me rencontrer à Vancouver. Ils étaient de la société de développement économique — je ne suis pas sûr que ce soit la bonne appellation —, laquelle fait partie du département de la Défense. Elle tente de créer des débouchés commerciaux dans les régions de l'Afghanistan qu'elle estime avoir sécurisées.
    Au sein de cette société de développement économique, ils m'ont parlé du développement de la prospection minière.
    S'agissait-il du ministère de la Défense du Canada ou des États-Unis?
    Celui des États-Unis.
    C'était le département de la Défense américain.
    Oui. En gros, ces responsables ont mis sur pied une sorte de société d'État pour aider le secteur privé à exploiter les ressources naturelles et peut-être aussi d'autres industries, comme celles de la distribution de la téléphonie cellulaire et d'autres moyens de communication.
    Je crois sincèrement que le département de la Défense a publié ce rapport de la Commission géologique des États-Unis afin de mettre un peu de baume sur les plaies de la guerre en Afghanistan et de montrer que le pays n'est pas complètement dénué de richesses, mais plutôt que les débouchés économiques se multiplieront une fois que la paix sera revenue. On voulait aussi indiquer qu'au moins, le département de la Défense était disposé à assurer un certain degré de sécurité pour aider les entreprises à établir une base en Afghanistan pour y faire des affaires.
    Cependant, il semble, monsieur Schafer — et vous venez de le dire vous-même —, que ce projet ne puisse pas se réaliser immédiatement. Il y a certaines exigences à long terme. La Banque mondiale a indiqué que le gouvernement afghan devait élaborer des politiques efficaces de gestion des recettes et de partage des bénéfices. Lorsqu'il a comparu devant notre comité, le sous-ministre ou le sous-ministre adjoint des Ressources naturelles nous a parlé de demandes d'aide très fondamentales adressées au gouvernement du Canada en ce qui concerne du matériel analytique, du matériel de prospection et d'exploitation minières, de la formation et du soutien sous forme de bourses d'études. Vous avez parlé d'un programme d'échange. Est-ce le genre d'aide que le gouvernement canadien peut fournir à l'heure actuelle en Afghanistan, c'est-à-dire un soutien de base pour que le pays puisse acquérir un certain niveau de compétences?
    J'ai bien aimé votre idée de programme d'échange. Nous en avons parlé il y a quelque temps. Il semble que pour pouvoir exploiter des mines convenablement, il faille mettre en place un régime approprié. Convenez-vous que nous devrions exhorter le gouvernement du Canada à offrir de l'aide sur le plan de l'expertise et de l'équipement nécessaires? Aussi, pourriez-vous décrire ce qui serait, selon vous, un programme d'échange viable?
    Merci beaucoup d'avoir posé cette question.
    Je pense qu'en ce moment, c'est précisément à ce niveau que le gouvernement canadien pourrait être très utile, car les risques sont faibles pour la vie humaine. Du point de vue des infrastructures, il est relativement peu coûteux d'investir, comme je l'ai dit, dans la mise sur pied d'un programme en collaboration avec l'Institut de technologie de la Colombie-Britannique afin d'assurer la formation de techniciens en géologie, de mécaniciens, de monteurs de tuyaux, de soudeurs et d'électriciens. Toutes ces choses finissent par s'intégrer à l'infrastructure, puis au tissu du pays. Dans le cadre d'un programme d'échange, l'étape suivante consisterait à amener les finissants les plus brillants des cours techniques à poursuivre des études universitaires. Par conséquent, je pense que le gouvernement du Canada pourrait certainement participer à un programme de ce genre, car il présenterait peu de risques et serait fort enrichissant.

(1700)

    Merci. Je conviens avec vous qu'il y a beaucoup de travail à faire afin d'enseigner les compétences nécessaires pour atteindre un certain niveau d'expertise. Votre ami géologue pourrait peut-être nous aider en nous conseillant à ce propos. Il semble vous avoir beaucoup aidé lorsque vous étiez en Afghanistan. Le fait de très bien connaître la langue locale ne nuit pas non plus.
    Je pense qu'il me reste très peu de temps. Si je posais une question, on vous demanderait d'y répondre en cinq secondes. Je vais donc m'abstenir de le faire.
    Je tiens à vous remercier d'avoir partagé avec nous aujourd'hui votre expérience sur le terrain en Afghanistan ainsi qu'auprès de l'industrie.
    C'était pour moi un honneur d'être ici aujourd'hui.
    En tant que président du comité, je tiens à vous remercier d'avoir pris le temps de partager avec nous votre expertise. Votre témoignage a été très utile, et nous nous servirons des renseignements que vous nous avez communiqués au moment de rédiger notre rapport. Je vous remercie.
    Merci beaucoup de m'avoir invité. Je vous en sais fort gré.
    Bon, nous allons maintenant suspendre la séance pendant quelques minutes. Nous allons poursuivre la séance à huis clos et nous pencher sur notre rapport.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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