:
Monsieur le président, nous sommes heureux d'avoir été invités ici aujourd'hui pour faire un bref exposé de l'expertise canadienne en matière d'exploitation minière, particulièrement dans les régions éloignées.
[Traduction]
Je suis vraiment ravi d’être ici.
Je crois que vous avez reçu une copie de nos observations préliminaires. Afin de garder un maximum de temps pour discuter, je n’aborderai pas tous les points énoncés dans le document. J’aimerais néanmoins attirer votre attention sur quelques points importants.
[Français]
En vertu de la Constitution canadienne, le gouvernement fédéral a de grandes responsabilités relativement aux terres fédérales, à la politique fiscale et monétaire, aux relations internationales et au commerce, aux statistiques nationales et à la science et la technologie.
[Traduction]
Dans le Nord, le gouvernement fédéral administre les ressources minérales des Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut. Au Yukon, cette responsabilité est en voie d’être transférée aux autorités territoriales.
J’aimerais attirer votre attention sur un point en particulier, à savoir que ce sont en fait les provinces, en d'autres termes les gouvernements provinciaux, qui possèdent et gèrent les ressources minérales qui se trouvent sur leur territoire et qu’il leur incombe de prendre les décisions relatives à l’utilisation des terres.
Je tiens également à préciser que ce n’est pas le ministère des Ressources naturelles qui détermine les priorités ou qui élabore les politiques internationales. Je vais vous parler de la situation au Canada et de ce que nous faisons ici. Je vais également tirer un parallèle avec l’Afghanistan, mais je tenais à souligner que nous ne sommes pas vraiment bien placés pour parler des priorités et des politiques du Canada sur la scène internationale.
Certains secteurs qui touchent l’exploitation minière sont partagés entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. C’est le cas du développement économique, de la protection et de la conservation de l’environnement, de la santé et de la sécurité, ainsi que du développement économique et de la consultation des Autochtones. Dans ce dossier, nous travaillons de concert avec plusieurs autres ministères fédéraux, notamment: le ministère des Pêches et des Océans relativement aux impacts sur l’habitat du poisson; le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien relativement à la réglementation de l’exploitation minière dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, et la consultation auprès des Autochtones; Transports Canada; Ressources humaines et Développement des compétences Canada relativement aux compétences; Statistique Canada relativement à certaines statistiques; Industrie Canada relativement au répertoire des sociétés minières, pour contribuer à établir des liens dans la fourniture de biens et de services, et, bien sûr, avec nos collègues du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.
Donc, Ressources naturelles Canada a le mandat de recueillir et de publier des statistiques sur l’exploration minérale, le développement et la production, et sur les industries minières et métallurgiques du Canada. Nous procédons à un examen complet et scientifique et à un relevé de la structure géologique et de la minéralogie du Canada. Nous veillons au développement durable des ressources minérales du Canada et à leur gestion intégrée. En outre, nous cherchons à favoriser le développement et l’utilisation responsables des ressources minérales du Canada.
Au chapitre des sciences de la Terre, Ressources naturelles Canada met, de façon ouverte et transparente, les données scientifiques à la disposition de l’ensemble des Canadiens et de sociétés étrangères, afin de garantir que les activités d’exploration, d’exploitation et de production profitent au maximum aux Canadiens. Nous pouvons approfondir cette question.
Nous participons à toutes les étapes du cycle de l’exploitation minière, à savoir l'acquisition d'un terrain, l’exploration, l’exploration avancée, les études de préfaisabilité et de faisabilité, l'élaboration des projets miniers comme tels, leur déroulement, la fermeture et même le renoncement aux droits de propriété du terrain.
Le Canada est un expert dans le domaine de l’exploitation minière et, eu égard aux particularités topographiques de notre pays, nous sommes au courant des problèmes particuliers que pourrait poser l’exploitation dans des régions éloignées. L’exploitation minière dans des collectivités et des régions éloignées pose bien sûr des défis sur le plan de l’infrastructure, de l’environnement, de la main-d’œuvre et sur le plan social. Le Canada applique un système de libre entrée pour l’accès aux droits miniers. Autrement dit, n’importe qui peut jalonner une concession dans une zone géographique donnée. Les autres pays appliquent plutôt un système de vente aux enchères où les gouvernements participent à l'évaluation de la valeur d'une parcelle de terrain et déterminent ensuite comment obtenir la meilleure offre. C’est une autre caractéristique distinctive du Canada.
Le Canada possède également de l’expertise technique en matière d'exploitation minière, mais nous comptons beaucoup sur l'industrie privée et les experts de l'industrie pour nous fournir cette expertise. Certains de nos laboratoires fournissent néanmoins de l’expertise technique relative à l’exploitation minière verte, par exemple, le but étant de veiller à ce que l’exploitation se fasse de la façon la plus responsable possible, en réduisant au maximum l’empreinte écologique et l’impact sur l’eau, et en utilisant le moins d'énergie possible, par exemple.
Je vais m’arrêter ici. Mes collègues et moi répondrons, du mieux possible, à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie d’être venus.
J’ai une question importante à poser. Pourquoi voudrait-on investir en Afghanistan? Je connais bien la situation en Mongolie. Ce pays doit se doter d’une loi sur la protection des investissements étrangers, mais le gouvernement hésite à présenter une telle loi au Parlement, parce qu’il a le sentiment d’avoir été floué, au chapitre des redevances et des taxes, par les investisseurs étrangers, au début des années 1990, alors que le pays venait d’instaurer une nouvelle démocratie.
En l’absence d’un Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers, l’APIE, ou d’un accord semblable, et d’un régime stable capable de régler la question des redevances et des taxes, et des coûts d’infrastructure, je ne vois pas pourquoi les sociétés minières investiraient en Afghanistan. Il ne faut pas non plus oublier que, d’une part, l’ancien ministre des Mines avait rencontré des fonctionnaires canadiens en 2008, avant d’être démis de ses fonctions en 2009, en raison d’un pot-de-vin de 30 millions de dollars en lien avec l’exploitation d'une mine de cuivre par des Chinois — le ministre a bien sûr nié, mais le président Karzai l’a bien sûr limogé — et que, d’autre part, l’Afghanistan est un pays en guerre.
Monsieur le président, voici la question que j’aimerais poser: Au chapitre de la protection, quels conseils ou quelle aide donnez-vous aux sociétés canadiennes — comme Kilo, par exemple, qui cherche à implanter un important projet minier en Afghanistan?
Il va sans dire que tout investisseur veut s’assurer que son capital est protégé. En Mongolie, comme vous le savez probablement, les sociétés canadiennes se classent au second rang des investisseurs, mais elles sont toujours en pourparlers avec le gouvernement de la Mongolie pour obtenir une protection juridique de leurs investissements et de celles d’autres sociétés, bien sûr.
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Merci monsieur le président et bienvenue au comité.
Nous vous avons demandé de venir dans le cadre de notre étude sur la présence non militaire du Canada en Afghanistan après 2011.
Jusqu’à présent, l'Agence canadienne de développement international et les autres organismes ont investi dans la bonne gouvernance et les écoles, des priorités établies par la commission Manley. Le comité en tient compte. Nous avons reçu, par l’entremise de la Bibliothèque du Parlement, de l’information relative aux gisements naturels et à l’exploitation minière en Afghanistan. Le but du comité est d’établir comment le Canada peut aider les Afghans à exploiter ces ressources, de sorte qu’elles servent de source de revenu et de stabilité.
L’expérience dans d’autres pays a montré qu’en l’absence d’une bonne gouvernance, la corruption prévaut dans l’exploitation de ces ressources et que, par conséquent, les gens ne profitent pas des retombées qui y sont associées.
Le comité veut examiner comment le Canada pourrait se servir de son expertise pour aider les Afghans. Notre bilan sur le plan de la responsabilité sociale d’entreprise est excellent et l’expertise de nos sociétés minières est confirmée. Nous sommes des experts de renommée internationale et j’espère que nous sommes meilleurs que les Australiens.
La question que se pose le comité est de savoir comment votre ministère pourrait contribuer au développement des ressources en Afghanistan au profit des Afghans. Nous essayons de lier les deux. Vous nous avez présenté un excellent exposé du travail que vous accomplissez au Canada, mais le comité veut savoir comment votre expertise pourrait être utilisée en Afghanistan.
Qu’en pensez-vous et comment le Canada pourrait-il mettre son expertise dans ce domaine à la disposition de l’Afghanistan?
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Premièrement, à mon avis, l’Afghanistan n’est pas le seul pays qui essaie d’exploiter ses ressources tout en veillant à ce que cela profite à sa population. Comme je l’ai dit d’emblée, nous sommes prêts à faire profiter les autres de notre expertise et nous l’avons fait dans le passé.
Il n’existe aucune formule magique pour l'exploitation responsable des ressources, comme nous l’avons fait au Canada. Nous avons très ouvertement fait part de notre expertise dans ce domaine par l’entremise des organismes multilatéraux dont j’ai parlé plus tôt. En fait, d’autres pays, comme l’Australie, le Royaume-Uni, les États-Unis et certains pays scandinaves, ont ouvertement permis à d'autres de bénéficier de leur expertise. On trouve notamment de nombreux renseignements à ce sujet sur les sites Web de ces organismes.
Nous encourageons ouvertement nos collègues afghans à mieux tirer profit du dialogue qui existe déjà et du Forum intergouvernemental sur l’exploitation minière, les minéraux, les métaux et le développement durable, par exemple, auquel participent 43 pays. Les pays sont libres d’y adhérer, et c’est dans le cadre de ce forum que les pays échangent des « secrets ». Nous parlons ouvertement de bonne gouvernance, d’environnement concurrentiel, de régimes fiscaux, de cadre de réglementation et de stratégie concurrentielle axée sur l’exploitation écologique et la bonne gestion des ressources. Ce sont en fait des balises, les piliers sur lesquels tout gouvernement devrait fonder son régime et son cadre.
Bon nombre des pays qui ont réussi à améliorer la qualité de vie de leurs citoyens par l’exploitation de leurs ressources se sont appuyés sur ces piliers. Je pense donc que la clé, c’est de participer aux discussions du forum. Le forum est très ouvert. Il permet à d'autres pays d'y prendre part et d'échanger ouvertement leurs connaissances.
Je pense que c’est la meilleure stratégie, parce que chaque pays est unique. Certains défis que l’Afghanistan devra relever dans ses régions éloignées sont très différents de ceux que nous relevons au Canada. Je ne pense pas que nous puissions simplement leur donner notre recette et leur dire de s’en servir. Ils profiteraient davantage de l’expérience des pays dont la topographie... qui ont d’autres défis que le Canada et qui en sont à différentes étapes de la mise en valeur. Je pense que les pays qui participent au forum ont l’expertise nécessaire pour aider l’Afghanistan à renforcer uniformément ses capacités dans ce domaine.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence et M. Arora de son exposé.
A-t-on demandé à votre ministère d'aider ou de conseiller le gouvernement de l'Afghanistan, de lui fournir une assistance technique ou de l'aider à élaborer un cadre pour l'exploitation des ressources minérales? Vous avez dit qu'on vous l'a demandé — ou que quelqu'un était au Canada en 2008 et l'a demandé — et, si j'ai bien compris, vous avez répondu qu'il y a eu quelques discussions. Je ne vous critique pas, mais lorsque M. Obhrai vous a demandé ce que le ministère pourrait faire, j'ai eu l'impression que c'était du réchauffé. Je ne veux pas faire une analogie trop poussée, mais nous pourrions, par exemple, dire aux Afghans qu'un bon système d'éducation favoriserait leur progrès économique et social, mais ce n'est pas ce dont ils ont besoin. Avez-vous des programmes? Réalisez-vous des projets au Canada? Réalisez-vous ou pourriez-vous réaliser des projets pratiques? Je ne dis pas qu'on ne vous a pas demandé de les réaliser ou que vous n'avez pas le mandat de les réaliser, mais nous essayons de déterminer ce que le Canada pourrait faire pour aider les Afghans sur le plan de la gouvernance. Par exemple, le ministre de l'Agriculture de l'Afghanistan est un Canadien d'origine afghane qui développe sa propre expertise au Canada. Il travaille activement à la mise en place d'un bon système agricole, entre autres.
Nous pourrions, par exemple, proposer que le gouvernement du Canada aide l'Afghanistan en lui fournissant l'expertise de votre ministère ou celle que vous pourriez obtenir auprès d'autres gouvernements au Canada — car nous avons beaucoup d'expertise au pays. Je vais vous donner un exemple, de la Banque mondiale, qui souligne le long délai de mise en production d'une mine, le manque d'infrastructure de soutien et la nécessité, pour le gouvernement de l'Afghanistan, d'élaborer une politique efficace de gestion des recettes et de partage des bénéfices: en somme, le problème est que l'Afghanistan doit élaborer des politiques. Pour que le développement économique se concrétise, l'Afghanistan doit donc régler certains problèmes, liés au partage des recettes et des bénéfices, que vous soulevez. Ces données datent de septembre 2010, elles sont donc relativement récentes.
Il est possible que votre ministère pourrait ou serait en mesure de faire plus que de simplement discuter avec l'ambassadeur, entre autres, et élaborer un programme ou un projet. Il pourrait dire: « D'accord, nous avons des gens qui sont prêts à aller aider l'Afghanistan à élaborer ces politiques et à dresser une liste sommaire des obstacles. » À votre avis, si le gouvernement du Canada vous le demandait, seriez-vous en mesure de le faire?
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci de votre présentation, monsieur Arora.
Mon gendre fait partie des diplômés des excellents programmes dans le secteur minier qui existent au Canada. Originaire du Ghana, il a fréquenté l'Université Laurentienne en tant qu'étudiant étranger. C'est là qu'il a rencontré ma fille. Il sera très heureux d'apprendre que des ressources sont disponibles en Afghanistan. Il est en voie de terminer son doctorat et se spécialise dans certains métaux des terres rares, dont le germanium. Il vient de dépenser 300 $ pour faire l'acquisition d'une minuscule tranche afin de terminer son projet pour la NASA. Ainsi, lorsque je lui dirai qu'il existe des ressources en Afghanistan, je suis sûre qu'il en sera très heureux.
J'ai lu certains des documents auxquels je pense que M. Bachand faisait allusion. Selon le magazine américain Businessweek, on estime qu'il se trouve en Afghanistan quelque 1,4 million de tonnes métriques de métaux des terres rares. Dans l'ensemble du pays, il y aurait des gisements d'une valeur totale de trois billions de dollars.
Voici ce qu'a déclaré le ministre des Mines:
Les métaux lourds des terres rares de Khanneshin ne se trouvent qu'à peu d'endroits dans le monde. Ce gisement pourrait représenter un débouché à long terme pour la province du Helmand, ce qui permettrait de créer des emplois et de stabiliser la région.
Au début de votre exposé, vous avez parlé du fait que le Canada est en mesure de transformer l'extraction de ressources en avantages socioéconomiques durables pour ses citoyens. J'aimerais que vous nous disiez ce que pourrait être la situation en Afghanistan, selon vous, compte tenu des gisements que les autorités reconnaissent être présents dans ce pays.
En guise de transition, permettez-moi d'ajouter que, ce matin, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec les représentants d'une organisation qui produit des oligoéléments. Ils m'ont parlé des mines de sel qui se trouvent aussi en Afghanistan. Bien entendu, on a désespérément besoin de sel iodé dans ce pays pour aider la population à être en santé. On dit aussi que le sel peut être fortifié avec du fer afin de produire les oligoéléments nécessaires. Quelles sont les perspectives à long terme pour le bien-être du peuple afghan et les possibilités d'emplois bien rémunérés et de perfectionnement des compétences? Qu'est-ce que vous en pensez?
Permettez-moi de me présenter. Je suis très heureux d'avoir la possibilité de vous parler aujourd'hui de mon expérience en Afghanistan en ce qui concerne le secteur des minéraux et le potentiel minier de ce pays.
Je parle aujourd'hui en mon nom personnel. Je compte plus de 30 ans d'expérience en tant que géologue professionnel et je possède des diplômes universitaires en géologie et en économie. Au cours de ma carrière, j'ai travaillé dans plus de 80 pays. Je crois donc avoir vu un très large éventail de qualités et de modes de vie, ainsi que de gisements minéraux.
J'occupe actuellement le poste de premier vice-président chez Hunter Dickinson Inc., une société de prospection et d'exploitation minières située ici, à Vancouver. Nous travaillons sur quatre continents depuis plus de 25 ans et nous comptons plus de 6 000 employés dans le monde entier. Notre activité la plus importante au Canada est la mine Gibraltar, en Colombie-Britannique. Il s'agit de la deuxième mine de cuivre en importance au pays. Nous sommes très fiers des excellents rendements qu'obtiennent nos actionnaires sur leurs investissements.
Je suis aussi directeur de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs du Canada, l'ACPEC. Il s'agit d'une organisation nationale de plus de 7 000 membres, qui représentent un éventail de sociétés et de particuliers qui travaillent dans le secteur de la prospection et de l'exploitation minières. Parmi nos membres, il y a des prospecteurs, des géoscientifiques, des consultants en environnement, des dirigeants de sociétés minières, des étudiants, des employés de l'industrie du forage et d'institutions financières et juridiques, ainsi que des diverses autres industries connexes au secteur minier.
Les membres corporatifs de l'association comprennent de petites sociétés de prospection et d'exploitation minières, de grandes entreprises productrices et des organisations qui fournissent des services à l'industrie. Notre congrès annuel, qui approche à grands pas, est le plus important en son genre au monde, réunissant tous les ans à Toronto quelque 25 000 personnes des cinq continents.
J'aimerais vous dire un peu ce que je pense du secteur minier en Afghanistan, ainsi que des possibilités que présente le pays dans ce domaine.
Comme vous le savez fort bien, l'Afghanistan est un carrefour commercial depuis des siècles, alors que, de mon point de vue, ce pays se trouvait dans une situation désastreuse dans le domaine de la géologie. Au fil des ères géologiques de notre planète, presque tous les continents sont entrés en collision avec ce petit pays. Par conséquent, le pays est presque entièrement montagneux et a été façonné par pratiquement toutes les collisions qui ont pu se produire entre montagnes et continents en raison de ces ions.
À la suite d'un appel d'offres, notre société, Hunter Dickinson, a été retenue pour élaborer le projet d'envergure mondiale Aynak, en vue d'exploiter une mine de cuivre dans la province du Logar, située à une quarantaine de kilomètres au Sud-Est de Kaboul. Nous sommes l'une des 13 sociétés provenant de 13 pays différents — la seule du Canada — qui ont participé à cet appel d'offres.
Notre approche était entièrement intégrée, combinant les programmes techniques, environnementaux et socioéconomiques. J'ai conclu personnellement des alliances, notamment avec EDC, le FMI, l'Institut de technologie de la Colombie-Britannique, Caterpillar et la Fondation Aga Khan, dans le but de mettre en place un programme entièrement intégré qui profiterait non seulement au projet minier en cours dans la province du Logar, mais aussi à l'ensemble de l'Afghanistan.
Le soutien a été fourni par l'ambassade canadienne — et a été très apprécié. Le premier ministre Harper et un certain nombre de ministres ont aussi fait parvenir des lettres d'appui à leurs homologues afghans, à Kaboul.
Au nombre des faits saillants, mentionnons les rencontres qui ont été facilitées avec des dirigeants communautaires locaux — je crois que les médias les appellent des seigneurs de la guerre, mais nous les appelons des dirigeants communautaires. Nous les avons rencontrés afin de les informer et de les aider à mieux comprendre ce que pourrait être une exploitation minière dans leur région. Quand je suis allé les voir — j'ai rencontré 25 dirigeants communautaires —, ils ne savaient même pas qu'une exploitation minière d'envergure mondiale était en voie d'installation dans leur région. Ils étaient donc très surpris de l'apprendre et ils m'ont été très reconnaissants de leur avoir présenté le programme en entier pour qu'ils puissent nous dire ce qu'ils en pensaient.
Pour ce qui est du potentiel minier de l'Afghanistan, comme je l'ai déjà dit, ce pays se trouve au carrefour de la géologie et du commerce.
En 2010, vous n'êtes certainement pas sans savoir que la Commission géologique des États-Unis a publié un rapport qui révélait que l'Afghanistan regorgeait de richesses minérales. Selon moi, il s'agissait d'estimations grossières, qui ne se conformaient pas du tout à une définition juridique de l'expression « ressources ou réserves minérales ». Il était question de lignes directrices à l'intention des gouvernements et des entreprises privées qui pourraient souhaiter explorer des ressources minérales au pays. Elles ne pouvaient en aucun cas servir à la rédaction d'un rapport technique que pourraient utiliser des sociétés financières ou d'autres entreprises de ce genre.
Les obstacles au travail en Afghanistan étaient nombreux. La logistique figurait en haut de la liste. En fait, quand j'ai demandé aux dirigeants communautaires de classer les éléments qu'ils souhaitaient le plus voir être inscrits dans un programme que notre entreprise pourrait mettre en oeuvre dans la région, j'ai été un peu surpris au départ, mais, à bien y penser, il n'est guère étonnant que la logistique soit arrivée en haut de leur liste. Ils avaient besoin de ponts et de routes afin d'avoir un meilleur accès à la campagne ainsi qu'au commerce pour et entre leurs villages. Naturellement, ils ont également parlé de la nécessité d'améliorer le rendement agricole, l'emploi et ainsi de suite.
Les différences culturelles figurent aussi au nombre des obstacles à la capacité de travailler en Afghanistan. Évidemment, la culture occidentale est très différente de la culture asiatique, mais, encore une fois, en Afghanistan, il existe des cultures à l'intérieur des cultures, en raison des normes tribales qui régissent le mode de vie dans ce pays. Nous cherchions des moyens d'améliorer considérablement les compétences et les aptitudes des Afghans.
C'est pourquoi j'ai fait intervenir des groupes comme l'Institut de technologie de la Colombie-Britannique qui sont prêts à établir un campus près de la mine de cuivre d'Aynak afin d'offrir des cours non seulement dans les domaines de la prospection et de la géologie, mais aussi dans des activités courantes comme le raccordement de tuyaux, l'électricité et la mécanique. Ces activités pourraient être utiles à la mine et avoir des répercussions positives qui se répandraient partout au pays.
La production d'énergie est un défi de taille dans ce pays. Presque toute l'énergie est produite au moyen de centrales alimentées au charbon ou au diesel sur une échelle relativement petite. Nous envisagions la possibilité d'exploiter une mine de charbon en plus de construire une centrale au charbon pour qu'une mine comme celle d'Aynak puisse être exploitée.
Comme je l'ai mentionné, le transport figurait en tête de liste des priorités de la population locale. Pour ce qui est de la sécurité, cela va sans dire.
Dès le départ, je souhaitais notamment établir un programme d'emploi qui mettrait à profit les compétences des gens sur place. Vous savez peut-être qu'en Afghanistan, presque toutes les constructions sont en pisé. En gros, je souhaitais ériger une enceinte encerclée d'un mur en pisé, non pas tant pour empêcher des gens d'y pénétrer, mais plutôt pour procurer du travail à plusieurs milliers de personnes pendant quelques années. La population pourrait ainsi constater les effets immédiats de notre présence dans ce pays.
Il était aussi nécessaire de simplement tisser des liens de confiance mutuelle avec la population. C'était tout un défi en soi. J'étais d'avis qu'en allant à la rencontre des gens — notre entreprise était la seule à aller à la campagne pour rencontrer les dirigeants communautaires —, nous pourrions commencer à tisser des liens avec eux.
L'industrie minière contribue à l'avenir de l'Afghanistan. Je crois sincèrement que... on pourrait comparer l'exploitation minière en Afghanistan à l'établissement de l'infrastructure et des économies des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon. Il y a très peu d'autres débouchés économiques dans ce pays. Évidemment, il est possible de faire de l'agriculture à petite échelle, mais il s'agit d'une agriculture de subsistance.
De même, la seule façon d'enseigner des compétences de haut niveau et d'implanter des technologies de pointe, c'est d'exploiter les ressources naturelles. La clé du succès, c'était d'introduire ces technologies et d'amener les gens au niveau qui leur permettrait d'être des participants et des chefs de file dans ce domaine.
On prévoyait qu'après dix ans d'exploitation de la mine à Aynak, il y aurait peut-être moins de cinq expatriés en Afghanistan responsables de cette mine. Tous les autres parviendraient à exploiter la mine grâce à une capacité et à une éducation accrues.
Selon moi, quelle place occupent l'industrie minière et le gouvernement du Canada dans le développement de l'économie afghane de demain? J'examinerais la question du point de vue de la sécurité individuelle et financière. Si l'on parvient à sécuriser le pays, les sociétés minières vont investir en Afghanistan. Si ce n'est pas le cas, le risque sera beaucoup trop grand, non seulement pour le personnel, mais aussi pour les investissements. Les fonds que nous consacrons à la prospection et à l'exploitation sont trop rares et trop précieux pour que nous prenions le risque de les perdre en raison de mesures de sécurité insuffisantes.
Il serait utile que les sociétés minières qui vont en Afghanistan puissent disposer d'une assurance contre les risques politiques. Il faudrait également examiner d'autres mesures incitatives que pourraient adopter les gouvernements, mais qu'il m'est impossible de proposer, faute de compétences dans ce domaine.
En résumé, pour la société Hunter Dickinson, Aynak et le projet de mine de cuivre à cet endroit représentaient plus qu'une source d'activités techniques et économiques. Pour nous, les efforts que nous déployions là-bas permettaient d'amorcer le processus d'édification du pays. Une exploitation minière bien gérée en Afghanistan pourrait constituer la pierre d'assise sur laquelle pourrait se développer pour la première fois dans ce pays une économie exempte de conflits et liée à autre chose que la drogue. Ces activités pourraient prendre de l'ampleur et se répandre un peu partout dans le pays pendant de nombreuses décennies.
Je vous remercie.
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Des collègues ont souligné l'absence d'infrastructures. Vous-même, vous avez mentionné que dans ce pays, il existe ce problème d'absence d'infrastructures pour permettre, par exemple, le transport du minerai. Il y a peu de chemins de fer, une absence de ponts et de tunnels, etc.
Il y a aussi une absence relative de formation. Vous avez parlé de géologues formés en Union soviétique, à l'époque de l'occupation. J'imagine que le nombre de telles personnes dans la population est extrêmement faible et qu'en conséquence, une entreprise qui s'installerait là-bas serait une entreprise qui projetterait une image étrangère aux yeux des gens du pays parce qu'il y aurait très peu de cadres locaux.
Vous avez noté également l'absence de sources d'énergie qu'il faut développer. Vous avez parlé de problèmes de sécurité, entre autre d'une période de deux ans pour la construction d'un mur qui protégerait les installations. Vous avez mentionné les difficultés d'ordre culturel. On sait que la société afghane est, en général, animée par des préoccupations qui ne sont pas d'ordre économique mais de toute autre nature.
En résumé, une telle entreprise de prospection et d'exploitation en Afghanistan ne serait-elle pas une chose totalement artificielle, étrangère au pays et perçue comme telle par la population, d'où des menaces à la sécurité? Une telle entreprise exigerait-elle, pour être viable et protégée, des mesures que les ressources du pays ne peuvent pas payer? Ce serait donc des États occidentaux qui financeraient la protection d'une telle entreprise. N'est-on pas en train de rêver quand on parle d'un tel projet?
Si vous avez toute la protection qu'il faut et les infrastructures, peut-être que vos actionnaires recevraient, comme vous le mentionniez au début de votre intervention, de large returns. Cela pourrait être payant pour les actionnaires, mais ce sera peut-être extrêmement coûteux pour une période indéfinie pour les pays étrangers, dont le Canada, qui devraient assumer l'environnement nécessaire à une telle entreprise.