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AAND Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ABORIGINAL AFFAIRS AND NORTHERN DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES AUTOCHTONES ET DU DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 15 novembre 1999

• 1611

[Traduction]

La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)): Mesdames et messieurs, nous allons commencer la réunion numéro 6. Nous avons à l'ordre du jour le projet de loi C-9, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord définitif nishga.

Cet après-midi, nous accueillons un groupe de témoins. Je souhaite la bienvenue à Mme Debra Logan de la B.C. Shellfish Growers' Association, à Karl English de LGL Limited Environmental Research Associates, au professeur Parzival Copes de l'Université Simon Fraser et à M. Phillip Eidsvik de la British Columbia Fisheries Survival Coalition. Je vous remercie tous de votre participation.

Vous allez témoigner en groupe. Vous vous êtes entendus sur l'ordre de présentation et je vous invite à respecter dans la mesure du possible la limite des dix minutes. Je ne m'inquiéterai pas d'un débordement de 30 secondes, mais je vous prie de ne pas tenter de déborder de 20 minutes, puisque je ne vous laisserai pas faire. Nous allons commencer par M. Eidsvik. Suivront ensuite M. English, Mme Logan, et puis M. Copes. Ainsi, monsieur Eidsvik, la parole est à vous lorsque vous serez prêt.

M. Phillip Eidsvik (directeur exécutif, British Columbia Fisheries Survival Coalition): Permettez-moi tout d'abord de vous remercier d'être venus en Colombie-Britannique. Je suis content que le Parti réformiste vous y ait obligés. Comme l'a dit M. O'Reilly, la chorégraphie est déjà établie. Néanmoins, nous sommes contents que vous soyez venus. Au moins nous avons l'occasion de dire quelque chose.

Nous représentons environ 8 000 membres. Nous représentons la plus importante organisation de pêcheurs de la Colombie-Britannique. La seule question qui nous intéresse est celle des droits et des revendications autochtones en matière de pêche. Nous ne nous intéressons à rien d'autre. Notre coalition a été créée du fait que, en Colombie-Britannique, il n'est pas nécessairement bien vu de s'opposer à une mesure comme le traité nishga ou à une politique qui vise particulièrement les peuples autochtones. On risque de passer pour un méchant ou un raciste. Bien des gens ont peur de comparaître devant un comité comme le vôtre justement pour cette raison.

Mike Hunter, du Conseil des pêcheries de la Colombie-Britannique, s'excuse de ne pouvoir participer. M. Green aurait aimé être ici aujourd'hui mais, malheureusement, il a été exclu. M. Hogan, de l'Association des propriétaires de navire de pêche de Prince Rupert, aurait également aimé être ici aujourd'hui. Malheureusement, il a lui aussi été exclu. Nous n'avons pas été autorisés à remplacer M. Hunter. Par contre, M. Milton Long, ardent défenseur du traité à Vancouver, attend en coulisses, au cas où un autre ardent défenseur du traité ne serait pas en mesure de se rendre ici. Il pourrait alors le remplacer.

Voilà justement le genre de malhonnêteté et de tromperie qui caractérise le processus du traité depuis le début. Nous ne voulions pas vraiment nous donner la peine de comparaître aujourd'hui puisque, comme l'a dit M. O'Reilly, la chorégraphie est déjà bien établie. Cependant, nous sommes ici parce que nous tenons à témoigner officiellement au sujet du grand tort qui est en train d'être infligé en Colombie-Britannique. Je n'ignore pas que la plupart d'entre vous ne viennent pas de la Colombie-Britannique. Vous allez retourner dans vos milieux respectifs et ce sera un fait accompli. Nous, qui vivons ici, devrons vivre avec les conséquences. Pour moi et pour nos membres, qui sont des pêcheurs, il s'agit d'une bien triste affaire.

Pour vous donner un bref historique, permettez-moi de vous dire que l'association qui nous représentait auparavant a poursuivi le gouvernement fédéral, le ministère des Affaires indiennes, en 1987 parce que les négociations relatives au traité des Nishgas se déroulaient en secret. Nous avons pu obtenir une copie de l'accord sur les pêches à la faveur d'une fuite. Nous avons alors poursuivi devant la Cour fédérale et gagné le procès. Ensuite, nous avons perdu en appel, car le juge a déclaré que les parties ne faisaient que parler et qu'il n'y avait pas lieu de s'inquiéter d'une simple entente. Fred Welchi, le négociateur du ministère des Affaires indiennes à l'époque, a déclaré au juge qu'il ne fallait pas s'inquiéter, que nous aurions tout le temps voulu pour faire valoir nos points de vue et qu'il n'était pas juste d'empêcher les parties de discuter, même en secret, étant donné que tout le monde aurait son mot à dire après la signature du traité.

• 1615

Bien entendu, une fois rendu public l'accord de principe concernant le traité nishga, et une fois signé l'accord définitif, les Nishgas, le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial refusent catégoriquement de modifier quoi que ce soit, ne serait-ce qu'une virgule. Ainsi, évidemment, nous avons notre mot à dire. Il nous a fallu vous traîner de force pour vous faire venir en Colombie-Britannique. Avons-nous effectivement participé à l'accord? Aucunement.

Un des résultats du procès a été qu'un comité consultatif de négociation du traité a été établi. En 1996, les membres de ce comité, représentant des gens occupant 500 000 emplois en Colombie-Britannique, ont unanimement réclamé la démission du négociateur fédéral de l'accord nishga. Comme les autres conseils du comité consultatif, cette demande a été rejetée. Nous nous retrouvons donc avec une entente gravée dans le marbre sans avoir pu nous prononcer là-dessus.

Nous trouvons cela outrageant et offensant. Ce qui nous déplaît particulièrement, c'est que pour les questions touchant les pêches, il existait deux possibilités.

Les Autochtones veulent avoir plus de possibilités de pêche. Nous avons toujours dit que les Autochtones de Colombie-Britannique peuvent détenir 100 p. 100 de toutes les pêcheries—déjà 30 p. 100 des participants à la pêche au saumon et au hareng sont des Autochtones—mais que ceux d'entre nous qui détiennent déjà une part des pêcheries doivent se faire acheter leur actif à un prix équitable, au prix du marché. En outre, lorsque de nouveaux pêcheurs autochtones auront acheté leur part de marché, ils devront pêcher dans le strict respect des règles et des règlements qu'observent tous les autres. C'est ce qu'on appelle le compromis industriel. Cela représente un modèle, celui de l'unité, de la pêche en commun, comme nous le faisons depuis une centaine d'années.

Il existe un autre modèle, qu'appuient les Nishgas ainsi que les négociateurs fédéral et provincial du traité. Il s'agit du modèle de la division et de la séparation. Selon ce modèle, les Nishgas pêchent un jour, et nous pêchons un autre jour. Voici un tas de poisson pour les Nishgas; voici un autre tas de poisson pour les autres Canadiens. La séparation et la division ne constituent pas une façon édifiante de commencer un siècle nouveau. Nous ne pensons pas que ce modèle soit acceptable.

En jetant un coup d'oeil dans la salle aujourd'hui, je me dis que si M. Keddy recommande que 25 à 50 p. 100 du homard dans sa circonscription soit accordé aux Autochtones et précise qu'ils devront pêcher certains jours... Ils ne sont pas si polis dans cette région; les pêcheurs viendraient probablement incendier sa maison et il ne serait jamais réélu.

Madame la présidente, je crois comprendre que vous êtes avocate. Comment réagiriez-vous si 25 p. 100 ou 50 p. 100 de tout le travail des avocats au Canada était réservé aux avocats autochtones? Vous trouveriez cela blessant.

Monsieur O'Reilly, vous qui travaillez dans l'immobilier, mettons qu'il y ait une loi qui exige que 25 p. 100 de toutes les ventes d'immobiliers soient réservées aux agents immobiliers autochtones. Ce serait offensant.

Le principe fondamental que je croyais que l'on pourrait maintenir par le processus du traité, principe appuyé par la Cour suprême du Canada dans de nombreuses causes, c'est qu'il n'y aurait qu'une seule pêcherie. Tout le monde pêche ensemble, conformément aux mêmes règles et règlements et, dans ces limites, on peut faire beaucoup de place aux Autochtones. Comme je l'ai dit, nous avons affirmé dès le début que l'on peut acheter 100 p. 100 des droits de pêche.

Nous nous retrouvons donc à cette réunion-ci. J'ai entendu le témoin précédent, M. Jack Talstra, le maire, qui a déclaré avoir l'appui de la population de Terrace. Il a dit que ses gens appuyaient généralement le traité. Pourtant, lorsqu'il a eu l'occasion de leur proposer un référendum pour voir s'ils appuyaient réellement le traité, il a refusé. Le gouvernement de Colombie-Britannique a refusé de nous donner la possibilité de nous exprimer, de voter.

Je me souviens de l'Accord de Charlottetown. Le Parti conservateur, les Libéraux fédéraux, la Banque Royale, tous les grands groupes de lobbying ont dit que ce serait une bonne chose pour la population du Canada. Or, la population du Canada était bien éclairée et elle l'a rejetée.

Certaines personnes diront que nous avons tort pour ce qui est du traité nishga. Nous pensons avoir raison. Nous nous occupons de cela depuis assez longtemps. Le principe fondamental, c'est que les gens ont le droit d'avoir tort. Il est juste que nous puissions décider. Il n'est pas juste que vous veniez de l'Ontario, que vous écoutiez quelques personnes, que vous multipliiez les témoins favorables à vos vues et que vous rentriez ensuite en Ontario pour nous laisser ici nous débrouiller avec les problèmes que vous aurez créés pour les cinq siècles à venir.

Il y a eu trois référendums en Colombie-Britannique. Ils ont été organisés par des groupes de citoyens. Chaque fois, les gens sont venus voter. À Norton à Delta-South Richmond, 3 000 personnes se sont exprimées et 97 p. 100 d'entre elles ont voté contre le traité. Il s'agit d'une circonscription urbaine. Lors des élections du district scolaire, la semaine suivante, le nombre des électeurs a chuté de moitié.

• 1620

À Port Hardy, localité de pêche que malheureusement, d'après ce qu'on me dit, vous connaissez bien, 44 p. 100 des gens qui ont voté lors de la dernière élection se sont présentés pour un sondage organisé par les citoyens, et 95,5 p. 100 d'entre eux ont voté contre le traité nishga.

Venir donc dire ici qu'en général la population appuie le traité, alors qu'elle n'a jamais eu l'occasion de se prononcer, nous trouvons cela inacceptable. Bien sûr, s'il y a un référendum juste, un vote libre, et que nous perdons, nous rentrerons chez nous, moi et les membres de l'organisme que je représente. Le processus démocratique aura prévalu.

Malheureusement, les délibérations d'aujourd'hui me rappellent la façon dont ce processus d'élaboration d'un traité s'est déroulé. C'est un traité qui a été négocié dans le secret, et sur lequel le citoyen ordinaire a été empêché de s'exprimer. Pourtant, c'est ce citoyen ordinaire qui en paiera le prix, aux dépens de son emploi, de son gagne-pain, de son foyer, de son avenir. C'est une terrible trace de votre passage en Colombie-Britannique, une fois que vous serez partis.

Merci.

Des voix: Bravo, bravo!

La présidente: Merci.

Monsieur Karl English, s'il vous plaît.

M. Karl K. English (vice-président, LGL Limited Environmental Research Associates): Merci.

Je suis heureux d'avoir l'occasion de m'adresser au comité et de répondre à vos questions au sujet de la composante du traité touchant les pêches. C'est la seule composante que je connaisse et pour laquelle j'aie les qualifications pour répondre.

Je suis un biologiste des pêches. Mon travail consiste à recueillir des renseignements et à fournir des conseils sur la gestion des pêches afin d'empêcher la surpêche et la destruction des stocks dont dépendent les pêches.

En clair, disons que ce qui est bon pour le poisson est bon pour la pêche. On ne peut avoir de pêche que s'il y a des poissons. La question qu'il faut donc manifestement se poser est la suivante: ce traité est-il bon pour le poisson?

Je vais examiner cette question relativement à trois éléments. J'ai quelques transparents de rétroprojection que j'espère pouvoir utiliser. Désolé qu'ils ne soient pas traduits en français, mais quelques-uns des plus intéressants contiennent plus de chiffres que de mots.

Les trois éléments que j'examine sont: les droits détenus en commun à une part du saumon de la région de la Nass; la gestion commune des pêches; et le Lisims Fisheries Conservation Trust Fiducie de conservation des pêches Lisims.

Pour ce qui est des droits détenus en commun, l'élément fondamental de ce traité est que ce droit est fonction de l'abondance de poisson. Les dispositions prises favorisent une exploitation durable de la pêche du point de vue écologique et économique. Le fait que la part des Nishgas soit détenue en commun et qu'elle dépende de l'abondance des stocks locaux, encourage fortement les Nishgas à capturer le poisson de la façon la plus efficace et la plus sensible aux exigences économiques. Ces méthodes seront encouragées parce que l'étendue des prises des Nishgas sera directement liée à la santé et à la taille des stocks de poisson dans leur région.

La pêche de stocks mélangés sera réduite en faveur d'une augmentation des pêches terminales. La pêche de stocks mélangés occasionne des problèmes de gestion depuis bien des années.

Les taux de remonte inférieurs à un certain niveau entraîneront une fermeture complète de la pêche des stocks concernés. Pour la première fois, le traité nishga établit une méthode précise de calcul du nombre d'espèces de saumon que les Nishgas pourront capturer une année donnée.

Ce tableau indique, pour une espèce, le saumon rouge, la relation entre le taux de remonte au Canada, l'allocation accordée aux Nishgas et les autres allocations des pêches commerciales. Vous pouvez donc voir à quel niveau la pêche est permise. Au bas de ce tableau, dans la partie bleue, vous pouvez voir l'échappée, c'est-à-dire le poisson qui se rend dans les frayères. Ensuite, il y a la première partie de la pêche, une très petite pêche effectuée par les Nishgas, jusqu'au moment où la cible d'échappée est atteinte. À partir de là, interviennent la pêche en vertu de l'accord de capture et la pêche commerciale.

• 1625

Cela montre très clairement que ces dispositions sont fondées sur des fluctuations. L'importance de la capture autorisée change en fonction du niveau d'abondance. Le tableau vous montre les parts relatives à des tailles de stocks donnés. Voilà donc pour le saumon rouge.

Il y a un tableau semblable pour le saumon quinnat, avec des axes et des chiffres différents. La ligne dont je n'ai pas parlé pour le premier tableau indique ce que sont les estimations actuelles pour la taille moyenne des stocks de 1977 à 1997. Comme vous pouvez le constater, la taille moyenne du stock de saumon quinnat est considérablement inférieure à celle du saumon rouge.

Le dernier critère des prises autorisées, c'est qu'elles sont différentes pour chaque espèce. Le niveau d'abondance de chaque espèce dans la région de la Nass est nettement différent et les dispositions en tiennent compte. Les deux grands stocks sont le saumon rouge et le saumon rose; les autres sont beaucoup plus petits.

Ces allocations, comme vous pouvez le voir, aideront les Nishgas et d'autres gouvernements à élaborer des plans de pêche et à gérer la pêche de façon à prévenir la surpêche. Le fait que la pêche nishga soit communautaire signifie que les Nishgas pourront mettre en oeuvre des méthodes plus efficaces que celles de la pêche actuelle, en propriété commune. Ce nouveau type de pêche prévoit l'utilisation de techniques de pêche sélective, telles que les tourniquets, les pièges et les bordigues dans les zones de pêche terminales. Elles permettent aux Nishgas de se concentrer sur les stocks les plus abondants, ce qui permet de protéger les stocks et les espèces les plus faibles.

Pour chaque espèce de saumon, comme je l'ai dit, l'allocation annuelle aux Nishgas augmentera et diminuera en fonction du niveau d'abondance du poisson. Cela est précisé au paragraphe 14 du traité. Cette mesure donnera aux Nishgas des possibilités de capture supplémentaire au cours des années de grande abondance, celles où tous les pêcheurs ont accès à plus de poisson, et réduira les possibilités de pêche les années de faible abondance, celles où tout le monde doit diminuer la pêche.

Associée à l'engagement de ne pas surpêcher les stocks de la vallée de la Nass—au paragraphe 17 du traité—cette disposition permet d'assurer que le traité nishga protégera mieux les objectifs de frai que le statu quo. La santé des stocks profitera à tous les utilisateurs de la ressource, aussi bien les Nishgas que les non-Nishgas.

Pour ce qui est de la gestion commune des pêches, aux termes de l'accord définitif, la gestion des pêches a été conçue de façon à inclure les Nishgas et à être très adaptable quant au processus. Le Comité mixte de gestion des pêches se composera de deux représentants de chacun des gouvernements et aura droit de regard sur la recherche, la gestion et les plans de récolte pour la région de la Nass.

La plupart des détails nécessaires à la mise en oeuvre des dispositions touchant la pêche n'ont pas été inclus dans l'accord définitif. Les parties à l'accord estiment que la gestion détaillée des pêches doit pouvoir évoluer et que son inclusion dans le traité ferait obstacle à cette évolution.

Dans un document distinct intitulé Nisga'a Fisheries Operational Guidelines (Directives opérationnelles sur les pêches nishgas), dont il est fait état au paragraphe 75 du traité, on fournit des détails sur les objectifs actuels de gestion des pêches, le fonctionnement du Comité mixte de gestion des pêches, les méthodes d'évaluation des stocks et les plans annuels de gestion des pêches nishga. Les méthodes d'évaluation des stocks et de gestion des pêches en saison décrites dans le document ne sont pas des idéaux théoriques. Ces méthodes ont été mises en oeuvre dans le cadre du programme des pêches nishga au cours des huit dernières années. C'est grâce à ce programme que nous avons pu formuler ces méthodes.

La composante du traité nishga portant sur les pêches a été conçue de façon à offrir un cadre dans lequel les méthodes de gestion des pêches et d'évaluation des stocks, des méthodes élaborées au moyen du programme des pêches nishga, pourront continuer à évoluer et à donner des résultats positifs.

Le mécanisme de maintien de ces programmes nécessite évidemment des ressources, c'est-à-dire de l'argent. C'est précisément pour cela qu'a été établie la Fiducie de conservation des pêches Lisims. Les fonds de cette fiducie permettront de financer à perpétuité le programme de gestion de la région de la Nass.

• 1630

Comme vous l'avez lu dans le traité, ce fonds de fiducie sera lancé au moyen d'une contribution de 13 millions de dollars versés par les Nishgas et le gouvernement fédéral. On y prévoit la contribution de chaque partie. En outre, ce fonds croîtra grâce au dépôt des bénéfices tirés de l'utilisation efficace des ressources de pêche et aux contributions d'entreprises, d'organismes et de particuliers.

Nous nous attendons à ce que ce fonds contribue de 650 000 $ à un million de dollars par an à la gestion des pêches. Il devrait amortir les fluctuations et l'incertitude des niveaux de financement associées à un financement entièrement dépendant des revenus de la pêche ou de programmes gouvernementaux généralement à court terme.

En résumé, les négociations de l'accord nishga ont permis de mieux comprendre l'évolution des populations de poisson dans la région de la Nass et d'envisager des changements réels. Le programme des pêches nishga, auquel une récompense a été décernée, en est actuellement dans la huitième année et il a été lancé pour recueillir l'information nécessaire à la négociation du traité. Ce programme a prouvé l'efficacité du recours à la technique du tourniquet pour recueillir des poissons et évaluer les stocks, et il a permis de promouvoir cette technique pour la pêche sélective dans l'ensemble de la Colombie-Britannique. L'engagement conjoint des Nishgas et du Canada à mettre en oeuvre la Fiducie de conservation des pêches Lisims assurera la pérennité des éléments essentiels du programme des Nishgas.

En tant que témoin des négociations des pêches des Nishgas depuis huit ans, je peux dire que chacune des parties a consenti des compromis importants dans cet accord. Mais il reste un domaine où les Nishgas ont carrément refusé tout compromis, c'est celui des dispositions protégeant les ressources en poisson dans la région de la Nass.

Les Nishgas m'ont appris à considérer les choses à long terme, à prévoir non pas sur cinq ans, mais cinquante ou cent ans. L'objectif des Nishgas a toujours été de garantir la présence des ressources dans la région de la Nass pour les générations futures, et ce devrait être l'objectif de tout biologiste des pêches conscient de ses responsabilités. Je réponds donc sans équivoque à la question en disant que le traité est bon pour la préservation du poisson.

Merci.

La présidente: Merci, monsieur English.

Des voix: Bravo, bravo!

La présidente: Madame Logan, nous vous écoutons dès que vous êtes prête.

Mme Debra Logan (présidente du Comité des revendications territoriales, B.C. Shellfish Growers' Association): Merci et bonjour. Merci à tous de votre présence.

C'est aujourd'hui la deuxième fois que je comparais devant ce comité pour parler du Traité nishga, à moins que la dernière fois, il ne se soit agi des traités en général. En tout cas, je suis heureuse d'intervenir une fois de plus.

Je représente la B.C. Shellfish Growers' Association. Nos membres sont des ostréiculteurs. Nous ne pêchons pas d'huîtres sauvages. Nous sommes des producteurs au vrai sens du mot. Nous produisons aussi des palourdes, des panopes du Pacifique, des moules et des pétoncles. Nous n'utilisons ni engrais, ni antibiotiques ni produits chimiques pour obtenir nos coquillages.

Notre industrie emploie directement près de 1 000 personnes et réalise un chiffre d'affaires annuel d'environ 16 millions de dollars en exploitant moins de 0,05 p. 100 du potentiel du littoral pour la production d'huîtres, de palourdes, de moules et de panopes—donc 0,05 p. 100 du littoral exploitable.

Compte tenu des possibilités d'expansion, notre industrie pourrait offrir de nombreux emplois dans des activités durables et en respectant l'environnement. Une récente étude de Coopers & Lybrand estime que compte tenu des possibilités d'expansion, la production de coquillages dans cette province pourrait atteindre un chiffre d'affaires de 100 millions de dollars. Avec ce coefficient sept, notre industrie pourrait devenir l'un des protagonistes du commerce dans ce domaine.

L'accès à de nouveaux sites est le principal facteur qui limite notre croissance et nous empêche de proposer ces nouveaux emplois, qui seraient principalement destinés aux nombreux pêcheurs déplacés des communautés rurales du littoral.

• 1635

Pourquoi nous impose-t-on des restrictions? Pourquoi a-t-on imposé une sorte de moratoire à la croissance de notre industrie? Pour deux raisons.

Tout d'abord, la dénomination générale de la production de coquillages est l'aquaculture, qui évoque plus ou moins la salmoniculture, et c'est pourquoi on nous a empêchés de prendre de l'expansion. Nous avons surmonté cet obstacle il y a plusieurs années, du moins au niveau provincial. Évidemment, le ministère des Pêches et des Océans ne change jamais d'avis et n'a de comptes à rendre à personne. Mais la province, quant à elle, a changé d'avis il y a plusieurs années, sans toutefois qu'il en résulte grand-chose.

L'autre raison, ce sont les traités existants ou prévus. Compte tenu des dispositions concernant les droits sur l'estran et les battures qui figurent dans le Traité nishga, le gouvernement, je regrette d'avoir à le dire, s'est cru obligé d'immobiliser notre industrie. Le Traité nishga a accordé aux Nishgas—et je cite les paragraphes 64, 65 et 66, à la page 121 du Traité nishga—«le droit de récolter, à des fins domestiques, des bivalves intertidaux» sur une superficie de 71,13 kilomètres carrés.

Je cite de nouveau:

    Le ministre ne permet pas la récolte commerciale des bivalves intertidaux à l'intérieur des parties de la région de la Nass énoncées dans l'appendice 1.

Il s'agit de la pêche commerciale des non-Nishgas, et la disposition figure à la page 121 de l'accord.

Donc, aux termes du traité, les Canadiens n'ont plus la possibilité de louer des terres aquatiques dans cette zone.

Lorsque cette question a été étudiée au Comité sectoriel des pêches du Comité consultatif de négociation du traité au printemps 1998, on a reconnu que le principe de l'exclusion des terres aquatiques de l'éventuelle procédure de location à des fins d'aquaculture constituait un précédent très sérieux et ne devait être envisagé par aucun gouvernement. Cette recommandation n'a pas été prise en compte par les négociateurs ni par le gouvernement.

L'une des raisons invoquées par les négociateurs pour accorder ce droit aux Nishgas serait, du moins du point de vue du gouvernement, que ces terres aquatiques ont très peu de valeur. C'est vrai dans les circonstances actuelles, mais autrefois, cette région produisait d'énormes quantités de palourdes. Elle a déjà compté cinq conserveries de palourdes. L'argument de la faible valeur est fallacieux et ne devrait pas être consacré par le traité. Qui sait ce que nous réserve l'avenir? Avec les possibilités de réchauffement ou de refroidissement de la planète et des phénomènes comme El Ni«o, les conditions changent. C'est un potentiel très prometteur pour tous les Canadiens qui se trouvent ainsi mis sous le boisseau.

Les articles 2, 5 et 8 de l'énoncé d'intérêt de la procédure de négociation du traité présenté par mon groupe, la B.C. Shellfish Growers' Association, demandent la garantie d'accès à de nouveaux sites, invitent le gouvernement à conserver toutes les responsabilités de gestion et d'octroi de permis de conchyliculture, et précisent que si les traités créent des perspectives de croissance économique pour les Premières nations, ils ne doivent pas pour autant causer de pertes d'emplois pour les Canadiens non autochtones, ni nuire à leur potentiel économique.

En pratique, la B.C. Shellfish Growers' Association ne s'intéresse guère à la superficie de 71,13 km2 revendiquée par les Nishgas. Néanmoins, ce traité va servir de plate-forme pour définir les droits accordés aux autres Premières nations de Colombie-Britannique, ce qui préoccupe considérablement notre association, étant donné que le règlement d'au moins 15 autres traités sur la côte de Colombie-Britannique comprendra sans doute des droits de récolter les coquillages qui s'appliqueront à l'exclusion des pêches commerciales et de la réalisation du potentiel de conchyliculture.

L'énoncé de point de vue de notre association précise que nous sommes favorables à la conclusion des traités. Nous sommes également favorables au développement économique des Premières nations et nous reconnaissons l'importance de cet aspect de la conclusion des traités et de l'objectif connexe d'autosuffisance. Cependant, nous ne sommes pas favorables à la création de zones où la plupart des Canadiens ne pourront, faute d'une origine raciale satisfaisante, se livrer à des activités économiques conformes au respect de l'environnement.

La B.C. Shellfish Growers' Association estime que les règlements devraient consacrer la culture et le patrimoine autochtones, favoriser l'autosuffisance des Autochtones et placer ces derniers sur un pied d'égalité avec les habitants de Colombie-Britannique et tous les Canadiens.

Je voudrais maintenant aborder un sujet légèrement différent. Je voudrais dire à M. Barton que je comprends son mécontentement lorsqu'il essaye de vous livrer son point de vue. J'ai rencontré à plusieurs reprises des groupes de cette région et des autres régions de la Colombie-Britannique, des gens qui se trouvent à l'extérieur de la structure de pouvoir des Premières nations et qui ne peuvent obtenir le niveau de responsabilité auquel ils ont théoriquement droit. Ce sont des gens qui habitent des caravanes rouillées dans les réserves, car ils sont à l'extérieur de la structure de pouvoir. Ce n'est pas à eux que l'on accordera des maisons, sans doute parce que dans le concert autochtone, ils ne suivent pas la bonne partition.

• 1640

Leurs enfants ne feront pas d'études grâce aux largesses du contribuable. Dans bien des cas, ils vivent dans la crainte, à cause du niveau de corruption que l'on rencontre ici et là. Je ne prétends pas que ce soit le cas sur le territoire nishga.

En accueillant les commentaires de M. Barton comme vous l'avez fait et en les réfutant, vous avez, à mon avis, écarté ses préoccupations. Elles sont pourtant bien réelles et ne méritent pas d'être ainsi rejetées du revers de la main.

Tous les journaux que vous pourrez consulter vous donneront un autre point de vue des problèmes de la région, et ce n'est ici que la pointe de l'iceberg. Il est un peu plus facile pour moi d'en parler, car je suis d'origine autochtone. Je me suis déjà trouvée à l'intérieur et à l'extérieur de la structure de pouvoir et je peux vous dire que dans les deux cas, la situation n'est guère confortable, mais elle est certainement plus lucrative quand on est à l'intérieur. Je n'en dirai pas plus sur ce sujet.

Enfin, malgré les réticences de M. O'Reilly pour rencontrer ce groupe et pour venir en Colombie-Britannique, et malgré les préoccupations bien réelles de M. Bonin concernant l'absence de contacts avec l'électorat et les gens qu'il représente, les députés ont ici l'occasion de court-circuiter les habituels dispositifs de filtrage qui les séparent de l'électorat ou du vrai monde présent ici, de tous ceux qui sont venus les rencontrer.

Je regrette que le Parti libéral considère que l'affaire est déjà conclue et que vous perdiez votre temps ici. Si vous avez perdu votre temps, je le regrette.

Je voudrais remercier le Parti réformiste, qui s'est du moins efforcé de nous donner la parole.

En ce qui concerne le choix des témoins que le comité entendra la semaine prochaine, je peux vous dire que si M. Hunter et M. Hogan étaient entendus comme témoins, nous serions prêts à retirer nos préoccupations concernant la liste de témoins choisis pour leur opinion favorable au Traité nishga. Nous serions prêts à retirer ces propos.

La présidente: Merci, madame Logan.

Monsieur Copes, s'il vous plaît.

M. Parzival Copes (professeur, témoignage à titre personnel): Merci, madame la présidente.

[Français]

Veuillez m'excuser de ne pas faire une partie de mes commentaires en français. Malheureusement, je ne peux pas m'exprimer facilement et précisément en cette langue. Pour cette raison, je parlerai en anglais. Je pense que cela ne vous posera pas de problèmes parce que nous avons de bons traducteurs.

[Traduction]

La question de savoir si les dispositions de l'Accord définitif nishga sur les pêches peuvent être approuvées par la Chambre des communes.

Avant de vous faire part de mon point de vue à ce sujet, il me semble important de donner un bref aperçu historique. Les Nishgas forment une communauté distincte qui a conservé sa langue, sa culture et sa structure fondée sur la parenté. Depuis des temps immémoriaux, ils vivent sur la rivière Nass. Avant les premiers contacts avec les Européens, ils vivaient d'une économie de ressources bien développée qui leur assurait généreusement tout le nécessaire, ainsi qu'un excédent qu'ils pouvaient échanger avec leurs voisins. Ils ont ainsi pu atteindre un niveau élevé de confort matériel selon les critères de l'endroit et de l'époque. Ils ont aussi eu le loisir de s'adonner à des traditions de cérémonies et de cadeaux—le potlatch—et ont pu développer une expression artistique impressionnante.

Grâce à son abondance, le saumon a été la principale ressource des Nishgas et de nombreuses autres tribus autochtones qui vivaient le long des grandes rivières à saumon de Colombie-Britannique. Cependant, au cours des années 1870, le gouvernement canadien a décidé, dans l'intérêt des conserveries récemment établies dans la région, de limiter fortement les pêches au saumon des Autochtones en Colombie-Britannique, en ne leur permettant de satisfaire que leurs besoins de consommation et en interdisant l'utilisation d'agrès performants comme les bordigues et les pièges.

• 1645

On a interdit aux tribus visées de vendre ou d'échanger le saumon comme elles le faisaient autrefois. Leurs bordigues et leurs pièges ont été détruits. Au fil des années, l'accès aux autres ressources de la terre et des eaux sur leurs territoires traditionnels a également été gravement limité, ce qui a contribué à les appauvrir et qui a amené plusieurs communautés à tomber dans la dissolution sociale et le désespoir.

Comme on pouvait s'y attendre, les tribunaux ont estimé que le gouvernement canadien n'assumait pas ses responsabilités fiduciaires envers les peuples autochtones en Colombie-Britannique. Ils ont estimé également qu'on avait empêché les tribus de Colombie-Britannique d'exercer leurs droits non éteints sur les ressources et qu'il incombait au gouvernement de régler les revendications autochtones sur ces ressources. C'est dans ce contexte que je voudrais maintenant situer mes commentaires.

Mon opinion concernant le soutien qu'il convient d'accorder aux dispositions sur les pêches de l'Accord définitif nishga est fondée sur cinq considérations, que je présenterai sous forme de questions.

Voici ma première question: est-ce que les dispositions sur les pêches de l'accord contribuent véritablement au rétablissement de la justice historique en restituant aux Nishgas les ressources dont ils dépendaient autrefois et dont ils ont été privés par l'intervention du gouvernement? Ma réponse à cette question est simple. En fonction des considérations historiques que je viens d'évoquer, je considère qu'il faut répondre à cette question par l'affirmative.

Deuxième question: ces dispositions sur les pêches ont-elles une chance de contribuer à la viabilité économique des communautés nishgas? Je réponds en disant que les Nishgas occupent une partie relativement isolée de la Colombie-Britannique où le chômage dans les communautés autochtones est de l'ordre de 45 à 86 p. 100 et où les perspectives de développement économique reposent essentiellement sur les ressources. L'histoire culturelle, l'expérience locale, les aptitudes acquises, le mode de vie, la disponibilité des ressources et la dépendance alimentaire désignent tous la ressource du saumon comme objet naturel de l'activité économique des Nishgas.

L'accord prévoit une attribution moyenne annuelle aux Nishgas de 26 p. 100 des prises admissibles de saumon de la rivière Nass, ce qui n'assurera qu'un modeste supplément d'emplois. Cependant, il est prévu qu'un accord financier complémentaire au traité assurera le financement nécessaire pour acheter des droits supplémentaires d'accès dans le secteur des pêches commerciales. À mon avis, les dispositions de l'accord sur les pêches constituent un élément essentiel de la recherche d'une base économique viable pour les Nishgas.

Troisième question: les dispositions sur les pêches sont-elles conciliables avec l'équité due aux autres intervenants du secteur des pêches qui s'intéressent aux ressources de saumon de la Colombie-Britannique? L'attribution de prises supplémentaires aux Nishgas suppose, du moins à court terme, un déplacement des attributions de prises à partir des autres secteurs de pêche, et notamment des petits bateaux de pêche commerciale.

En tant qu'ancien pêcheur de saumon au sein d'une entreprise familiale de pêche, je suis parfaitement conscient des implications de cette situation. Actuellement, je me consacre essentiellement à la recherche et aux interventions en faveur de la pêche artisanale indépendante au Canada et dans d'autres pays.

Je dois préciser que les pêcheurs actuels de Colombie-Britannique ne sont pas responsables des injustices commises il y a un siècle lors de la confiscation des pêches autochtones. On ne devrait pas leur faire payer la restitution de ces pêches.

Heureusement, une solution juste est à portée de main. Il existe deux possibilités de pêche supplémentaire pour les communautés autochtones, qui pourraient être exploitées progressivement à brève échéance sans pour autant diminuer les prises disponibles aux pêcheurs non autochtones. La première est la production supplémentaire grâce à des opérations d'amélioration financées par le gouvernement. La deuxième est la capacité de pêche dégagée par le retrait volontaire des pêcheurs non autochtones qui sont prêts à vendre leur permis de pêche au gouvernement. Le gouvernement canadien a même déjà considéré que la restitution des pêches autochtones pouvait être réalisée de cette façon. À condition que le gouvernement respecte ses engagements et les concrétise intégralement et de façon équitable, la restitution pourrait être réalisée de façon équitable pour tous les intervenants.

• 1650

Quatrième question: les dispositions sur les pêches de l'accord sont-elles compatibles avec des normes élevées de conservation de la ressource, ou mieux encore, peuvent-elles contribuer à une amélioration de la conservation? Traditionnellement, les communautés autochtones des rivières ont toujours utilisé massivement les bordigues, les retenues, les pièges, les épuisettes et les filets à poche. Ces méthodes provoquaient une certaine perte par la mort de poissons non pris après être entrés en contact avec les agrès de pêche, contrairement à ce qui se passe avec les palangres, les gaffes et les filets maillants. Les gestionnaires des pêches préconisent un retour aux agrès traditionnels plus favorables à la conservation qui ont été précédemment bannis, ainsi que l'expérimentation de nouveaux agrès, et de nombreuses communautés autochtones y sont également favorables.

Un programme des pêches nishga élaboré en collaboration avec le ministère des Pêches et des Océans propose actuellement une excellente utilisation des nouvelles possibilités. Il s'agit du recours au tourniquet, qui permet de capturer et de trier les poissons migrateurs, et de relâcher les individus des stocks identifiés comme étant insuffisants. On peut ainsi augmenter le nombre des saumons qui atteignent les frayères dans les stocks insuffisants et effectuer une réforme plus efficace des stocks les plus vigoureux, ces deux interventions ayant pour effet d'améliorer la conservation et d'augmenter les prises durables.

Le Programme des pêches nishga a été consacré par l'attribution du prix de la gestion du ministère des Pêches et des Océans en 1995.

Les prises supplémentaires accordées aux Nishgas dans l'accord définitif vont permettre une pêche sélective à plus grande échelle, une reconstitution des stocks insuffisants et une augmentation des prises durables dans le bassin de la Nass.

Il convient ici de tirer une conclusion importante. On pourrait se servir d'une attribution initiale de prises supplémentaires sur certaines rivières pour préciser le nombre des poissons qui doivent atteindre les frayères tout en assurant le plus grand nombre de prises du surplus. On contribuera ainsi à une augmentation de la production durable de saumons dans les différents bassins. Le supplément de prises autorisées pourra modifier la répartition initiale des prises et on passera du stade de l'interdiction de la pêche à une situation qui ne fait que des gagnants, avec une augmentation sensible du total des prises en faveur de l'ensemble des intervenants.

À mon avis, il convient d'applaudir le programme de pêche sélective et les dispositions sur les pêches de l'accord qui vont permettre aux Nishgas de reconstituer les stocks de saumon de la rivière Nass au bénéfice de la ressource et de tous ceux qui en dépendent.

Dernière question: Les dispositions sur les pêches de l'Accord définitif nishga sont-elles bonnes pour la population du Canada, y compris, en l'occurrence, la population de Colombie-Britannique? Autrement dit, sont-elles conformes à l'intérêt public? Compte tenu de la réponse affirmative apportée aux quatre questions précédentes, j'ai déjà énoncé plusieurs raisons importantes pour lesquelles il faut aussi répondre par l'affirmative à cette dernière question, mais je voudrais y ajouter quelques autres considérations elles aussi positives.

La Cour suprême du Canada a reconnu les droits préexistants des peuples autochtones et a insisté sur la reconnaissance des droits autochtones, qui concilie leur occupation antérieure du territoire avec l'affirmation de la souveraineté de la Couronne sur le territoire canadien. L'Accord définitif nishga permet le règlement des droits autochtones des Nishgas concernant les pêches. Il apporte une solution certaine concernant la procédure et les conditions d'attribution des prises aux Nishgas, précisant du même coup les ressources disponibles pour les autres groupes. L'accord supprime le droit prioritaire indéfini des Nishgas à une pêche alimentaire et place la réalisation des droits de prises des Nishgas sur le même niveau de priorité que les droits des pêcheurs commerciaux et sportifs, levant ainsi plusieurs des principaux irritants dénoncés par les autres intervenants.

L'Accord définitif nishga concerne la satisfaction des droits légitimes et des besoins réels de la population nishga. Je conclus sans hésiter que les dispositions sur les pêches de l'accord méritent le plein appui de la Chambre des communes.

Cependant, en conclusion, je voudrais revenir à ma préoccupation générale concernant l'intérêt public, et en particulier mon souci du bien-être de tous les pêcheurs de Colombie-Britannique. Je le ferai en citant un passage obscur et pourtant très important de l'arrêt Gladstone qui illustre la sagesse de la Cour suprême lorsqu'elle a reconnu la nécessité d'équilibrer et de concilier les intérêts collectifs au sein de notre complexe société canadienne. Comme l'indique l'arrêt, les groupes non autochtones peuvent aussi recourir aux tribunaux pour faire reconnaître leurs droits de pêche au nom de l'équité économique et régionale et en faisant valoir l'historique de l'exploitation de la ressource; c'est là un point de vue que j'ai évoqué et appuyé à maintes reprises, tant dans le contexte canadien qu'au niveau international.

• 1655

La citation est la suivante:

    Les droits ancestraux sont un élément nécessaire de la conciliation de l'existence des sociétés autochtones avec la communauté politique plus large à laquelle ces dernières appartiennent. Les limites imposées à ces droits sont également un élément nécessaire à cette conciliation, si les objectifs qu'elles visent sont suffisamment importants pour la communauté dans son ensemble.

Et voici la partie la plus importante de l'affirmation de la Cour suprême:

    En ce qui concerne la répartition de ressources halieutiques données, une fois que les objectifs de conservation ont été respectés, des objectifs tels que la poursuite de l'équité sur les plans économique et régional ainsi que la reconnaissance du fait que, historiquement, des groupes non autochtones comptent sur ces ressources et participent à leur exploitation, sont le genre d'objectifs susceptibles (du moins dans les circonstances appropriées) de satisfaire à cette norme. Dans les circonstances appropriées, de tels objectifs sont dans l'intérêt de tous les Canadiens et, facteur plus important encore, la conciliation de l'existence des sociétés autochtones avec le reste de la société canadienne pourrait bien dépendre de leur réalisation.

Merci.

La présidente: Merci.

Nous passons au premier tour de questions. Monsieur Scott.

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Merci beaucoup.

J'aimerais remercier tous les témoins de s'être déplacés et je voudrais tout d'abord poser ma question à M. Eidsvik.

Monsieur Eidsvik, vous avez parlé des préoccupations de votre groupe concernant les traités, ainsi que d'une solution industrielle. Nous avons tous parfaitement compris. Pouvez-vous préciser vos préoccupations à l'intention du comité? Je sais que ce n'est pas le Traité nishga à proprement parler, du moins je le crois, qui vous préoccupe, ce sont ses composantes concernant les pêches, qui vont être reprises dans d'autres traités. Avez-vous fait des prévisions concernant la situation de la pêche commerciale en Colombie-Britannique d'ici 10 ou 15 ans si ces dispositions sont reprises dans d'autres traités conclus avec les bandes du littoral de Colombie-Britannique?

M. Phillip Eidsvik: C'est une excellente question. Le Comité consultatif de négociation du traité auquel j'ai fait référence a insisté, dans la mesure où il pouvait le faire, sur la nécessité d'une étude évaluant les conséquences du précédent nishga s'il s'appliquait à l'ensemble de la côte de Colombie-Britannique. Malheureusement, les gouvernements fédéral et provincial ont refusé de publier cette étude. Nous connaissons tous les réponses à cette question, mais on ne nous a pas permis de les voir.

Stewart Bell, du Vancouver Sun, a présenté une demande d'accès à l'information et en a obtenu 300 pages. Chacune d'entre elles avait été censurée en totalité, à l'exception de la page titre. Nous savons qu'une étude a été réalisée, nous savons ce qui va nous arriver. Nous sommes en train de sombrer, et malgré cela, le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial refusent de nous communiquer cette étude. Ils tiennent à la garder secrète.

M. Mike Scott: Pour préciser les choses, vous savez de façon certaine qu'une étude a été réalisée par le gouvernement fédéral et la province et qu'elle portait sur les conséquences à long terme des dispositions du Traité nishga sur la pêche commerciale. Cette étude a été réalisée il y a un certain temps—peut-être pourriez-vous nous donner une date approximative—et vous savez aussi de façon certaine que le gouvernement refuse de vous en divulguer les détails.

M. Phillip Eidsvik: Oui, l'étude a été réalisée par Mike Shepard à la demande du ministère des Pêches et des Océans et du ministère des Affaires indiennes. Les Nishgas sont intervenus dans la réalisation de l'étude, qui s'est trouvée inscrite sur la liste des documents soumis à la table de négociation et qui est devenue un document secret. On a réussi à la garder secrète parce qu'elle fait partie du dossier de négociations. Pour autant que je sache, elle a été réalisée vers 1996. On en a parlé en 1993, mais elle est tout à fait secrète. Je ne peux évidemment pas vous en donner la date, puisqu'elle a elle aussi été censurée.

M. Mike Scott: Debra, je voudrais vous poser une question, car j'ai été très intrigué par vos propos. Ces trois dernières années, je me suis beaucoup préoccupé moi-même du fait que de nombreux Autochtones vivant dans les réserves sont tenus à l'écart de leurs propres communautés.

• 1700

J'aimerais que vous me donniez votre point de vue sur les traités de ce genre, sans faire spécifiquement référence au Traité nishga. Pensez-vous que l'Autochtone ordinaire puisse en bénéficier? Pensez-vous qu'un Autochtone qui vit dans une réserve puisse constater une amélioration importante ou substantielle de son sort grâce à des traités de ce genre?

Mme Debra Logan: Merci, monsieur Scott. C'est très difficile de répondre à cette question, car je crois que la réponse varie d'une bande à l'autre et d'une nation à l'autre.

Je vais vous donner un exemple; j'ai deux tantes qui vivent sur la réserve Sarita sur la côte ouest de l'Île de Vancouver. C'est le gouvernement fédéral qui leur versait 400 $, quelque chose comme ça, leur pension de vieillesse. Avec l'autonomie gouvernementale, le conseil tribal a ensuite décidé qu'elles n'avaient besoin que de 300 $. Aujourd'hui, apparemment, elles n'ont plus besoin que de 200 $. C'est votre serviteur qui compense la différence, et cela après avoir payé des impôts pour aider à verser des pensions aux autres. Pendant que j'y suis, je les fournis également en poisson. Aux termes d'une entente de pêche commerciale dans la région, on ne prévoit pas non plus de poisson pour l'alimentation des personnes âgées.

Je ne pense pas pouvoir généraliser, car il y a probablement des groupes qui profiteront du système. Il y aura certainement des traités administrés équitablement, peut-être même celui-ci, dans le coin supérieur gauche de la Colombie-Britannique. Qui sait? Je ne le sais certainement pas moi-même. Je ne connais pas suffisamment ce groupe, et c'est la raison pour laquelle je ne peux pas donner plus de détails.

Je sais également que la plupart des gens auxquels je parle considèrent que ce processus de traité ne fait que perpétuer certains des problèmes qui existent déjà, mais avec encore moins de responsabilités devant la population canadienne en ce qui concerne l'attribution de l'argent et les décisions prises.

La présidente: Monsieur Scott, votre temps est écoulé. En fait, il est même dépassé.

Monsieur Bachand.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Madame Logan, ma question sera pour vous.

J'aimerais d'abord dire aux gens qu'il est très important pour nous de faire cette consultation parce qu'elle met à l'épreuve les arguments qu'on invoque continuellement. Il est normal que j'adresse mes questions à des gens qui n'avancent pas les mêmes arguments que moi. C'est pour cela que mes questions s'adressent surtout à Mme Logan et à M. Eidsvik. Ce sera fait de façon très respectueuse parce que je pense que c'est la place pour le faire et qu'il est important qu'on le fasse pour s'enrichir mutuellement.

J'aimerais que vous réagissiez à mes propos. Il y a deux façons de régler un problème lorsqu'une clôture est mal placée: ou bien on négocie avec son voisin, ou bien on le poursuit devant les tribunaux. Je parle souvent en caucus avec mes collègues du Bloc québécois, dont deux peuvent témoigner ici.

Je trouve que ça va très mal pour les Blancs en Cour suprême du Canada actuellement et je crois qu'ils sont absolument obligés de négocier sur tout ce qui s'appelle ressources naturelles, y compris les pêches. Il y a sans doute beaucoup de personnes dans cette salle qui connaissent l'un de ceux qui ont ouvert le chemin à cela. Il s'agit du grand Frank Calder, qui a été le premier à faire reconnaître les droits ancestraux des autochtones par la cour. Ces derniers étaient ici avant nous et ils ont donc des droits.

Quand je regarde les autres jugements qui ont été rendus par la Cour suprême et les causes qui sont encore devant les cours, je vois que le score est actuellement d'environ 50 à 0 en faveur des autochtones. On peut penser aux jugements Calder et Gladstone, dont M. Copes a évoqué des extraits. On peut aussi penser au jugement Delgamuukw et au jugement Marshall, le dernier et le plus important, qui précise que les autochtones ont le droit de pêcher pour leur subsistance, et pour une subsistance convenable.

À mon avis, plus on va attendre pour négocier avec les autochtones, plus le rapport de force avec la Cour suprême nous sera défavorable. J'aimerais que vous réagissiez à cela.

• 1705

Il me semble que la solution pour s'en sortir est la négociation. Je suis un gars qui respecte la négociation, surtout quand elle a été faite par trois parties au cours d'une aussi longue période de temps. Tout a été pensé dans ce traité. On peut le contester, mais il faut le voir dans la perspective des jugements de la Cour suprême du Canada et des autres cours. J'aimerais que vous nous disiez si vous préférez qu'on garde le statu quo et que la Cour suprême du Canada rende plus tard des jugements qui nous seront défavorables. Quand quelqu'un a un jugement de la Cour suprême entre les mains, la GRC ne peut pas venir l'arrêter. C'est le plus haut tribunal au Canada qui lui a dit qu'il avait raison.

J'aimerais que vous me disiez si vous préférez la négociation ou le litige devant les cours.

[Traduction]

La présidente: Madame Logan.

Mme Debra Logan: C'est une bonne question, mais je ne peux pas y répondre. Ce n'est pas un sujet que je connais bien. Toutefois, pensez-vous qu'il soit plus honorable de négocier en tant que non-Autochtone dans l'espoir d'obtenir des conditions plus favorables? Ne serait-il pas plus honorable de faire confiance à Mme la Justice aveugle?

C'est une question à laquelle je ne peux répondre, c'est la raison pour laquelle je m'en remets à vous.

Je reconnais que la Cour suprême a pris des décisions quelque peu déconcertantes, des décisions qui ne me plaisent certainement pas, mais que je respecte tout de même, tout en me demandant quelles pressions politiques ont contribué au mandat du négociateur qui a rendu ces décisions possibles.

Par exemple, dans la mesure où le traité nishga était négocié en secret, si on considère tout ce que nous savions à ce sujet, la mesure dans laquelle nous avons été—et c'est un mot que je pèse—«consultés»... Si je vous dis cela, c'est en ma qualité de membre du Comité consultatif de négociation du traité, ici en Colombie-Britannique. Des conseils très avisés et très constructifs ont fait surface dans de nombreux domaines, pas seulement les pêches, des conseils pris très au sérieux par notre gouvernement provincial qui a tendance à être un peu plus conscient de la réalité sur cette côte.

Je dois reconnaître que pendant tout cet exercice nos négociateurs fédéraux avaient un mandat qui ne coïncidait pas avec la réalité en Colombie-Britannique, et d'une certaine façon, les autorités judiciaires nous auraient peut-être fait une faveur en s'assurant que le processus était sans préjudice, équitable.

M. Claude Bachand: Est-ce que c'est terminé?

La présidente: Non, il vous reste deux minutes.

[Français]

M. Ghislain Fournier (Manicouagan, BQ): Ma question s'adresse à M. Eidsvik, mais si quelqu'un d'autre veut y répondre, qu'il se sente bien à l'aise.

Tous les témoins qu'on a entendus jusqu'à maintenant ont parlé de consultation. Ce matin, quelqu'un me disait que le traité des Nisga'as ne regardait que les Nisga'as, alors que d'autres me disaient qu'il regardait aussi les gens de Colombie-Britannique et tous les autres Canadiens. D'autres me disaient qu'on ne consultait qu'après coup. L'entente a été conclue, et on a consulté à la mode du Far West. Dans le Far West, on tire et ce n'est qu'après coup qu'on se demande si on avait raison de tirer. Actuellement, on est en train de se demander si on a conclu la bonne entente.

Pensez-vous que, par souci d'équité, les Britanno-Colombiens auraient dû ou devraient être consultés par voie de référendum ou par d'autres moyens qui seraient peut-être meilleurs qu'un référendum, si vous en connaissez de meilleurs? Est-ce que cela les regarde ou si on doit s'en remettre aux politiciens, qui disent avoir été élus pour gouverner et ne veulent consulter qu'une partie des gens? Est-ce que les Britanno-Colombiens devraient d'abord être consultés? Est-ce que les Britanno-Colombiens vivent ensemble? Est-ce qu'ils auront à payer certaines sommes?

• 1710

Ce sont les principales inquiétudes que j'ai pu déceler chez vous depuis ce matin. On dit que le comité a fait des reproches...

[Traduction]

La présidente: C'est une question d'une minute qui finit par être assez longue.

Monsieur Eidsvik.

M. Phillip Eidsvik: Je vais essayer de donner une réponse d'une minute.

Notre position a toujours été que dans le cas d'un référendum, en cas de vote favorable à ce traité par la population de la Colombie-Britannique, nous ferions nos valises et nous rentrerions chez nous. Comme il s'agit d'un premier traité, le plus important, il est certain que nous méritions un référendum provincial. Les Nishgas n'ont pas dû s'en remettre aux autorités politiques pour cette entente; il y a eu un vote en toute justice.

On peut comparer cela à des négociations secrètes qui auraient lieu entre le gouvernement fédéral et un groupe de Québécois, négociations qui auraient pour effet de donner à des gens de l'extérieur de 25 p. 100 à 50 p. 100 du poisson dans la région de Gaspé. Comment les Québécois réagiraient-ils, que penseraient vos pêcheurs d'une telle situation? J'imagine qu'ils ne se contenteraient pas d'en discuter ici. J'imagine qu'ils sont un peu plus intraitables que nous ne le sommes.

En ce qui concerne les négociations devant les tribunaux, dans l'affaire Sparrow, le tribunal a choisi de prendre les décisions cas par cas. Le tribunal a réaffirmé qu'à l'avenir il participerait à l'établissement des limites et de la portée des droits autochtones. Vous n'êtes pas un criminel parce que vous soumettez ce genre de question à un tribunal. Notre industrie et l'association pour laquelle je travaille ont dépensé 2,5 millions de dollars pour porter des questions de droits autochtones devant les tribunaux.

Nous sommes allés devant la Cour suprême du Canada pour toutes ces affaires majeures. Je dois avouer qu'à mon avis, à l'exception de la déplorable décision Marshall, la Cour suprême du Canada ne s'est pas mal débrouillée. Si nous nous sommes adressés à ces instances, c'est que nous ne faisions pas confiance au gouvernement fédéral ou au gouvernement provincial pour défendre les intérêts de la population, et nous avons trouvé que les tribunaux étaient très attentifs à nos arguments. Je n'hésiterais pas demain matin à porter n'importe quelle affaire relative au Traité nishga devant un tribunal, à condition qu'on nous permette d'exposer notre position.

Sur la côte Est, dans la communauté des pêcheurs, personne n'a eu cette possibilité. Les gens s'en sont remis au gouvernement fédéral, ils n'ont pas rassemblé une aussi bonne équipe d'avocats qu'ils auraient pu le faire, et n'ont pas embauché les meilleurs témoins experts comme ils auraient dû le faire. Ils se sont très mal débrouillés. Ils ont perdu leur cause. C'est une leçon que nous avons apprise à un palier inférieur lors de l'affaire Sparrow, et par la suite nous avons décidé de ne jamais laisser une affaire nous concernant portée devant les tribunaux sans notre intervention. Encore une fois le gouvernement libéral a ignoré les besoins et les conséquences possibles de la décision Marshall.

J'espère qu'on peut appeler cela une réponse d'une minute et demie.

La présidente: Je précise que cette série de questions va durer jusqu'à 18 h 30, nous avons donc encore pas mal de temps. Mais pour que la séance se déroule de façon ordonnée, nous devons essayer de limiter les questions et les réponses à cinq minutes.

Madame Hardy, c'est votre tour.

Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Merci, madame la présidente.

Je viens du Yukon où en ce moment même on négocie, on signe et on applique des traités modernes. J'aimerais vous donner un exemple; il y a 25 ans, parmi les gens des Premières nations, il y avait trois diplômés. À la dernière cérémonie de diplômes, à cause des efforts des bandes, 200 étudiants des Premières nations ont reçu un diplôme. Il y en avait au moins 50 qui travaillaient dans leurs communautés respectives après avoir fréquenté l'université, et cela, parce que ces mêmes communautés ont accordé une grande importance à ce genre de choses. Vous avez eu beau dire que ce n'était pas ce que vous vouliez dire, quand je vous entends mettre tout le monde dans le même sac, dire que les bandes sont corrompues et ne s'occupent pas bien des gens dont elles sont responsables, cela m'inquiète beaucoup, car les bandes que je connais personnellement travaillent très fort pour défendre les intérêts des personnes âgées, des jeunes, pour assurer l'avenir de leur développement.

Également, j'aimerais assurer à Debra Logan, en particulier, qu'on ne m'a pas traînée ici à mon corps défendant pour écouter des témoins. En fait, en ma qualité de députée au Parlement, c'est une des tâches les plus importantes que j'aie, écouter l'opinion des gens, et c'est de cette façon-là que j'apprends.

Quand j'entends dire que ces décisions sont fondées sur la race, cela m'inquiète beaucoup. Le Canada a entrepris des négociations en vue d'un accord de libre-échange des Amériques, et nous allons être assis à la même table que des Mexicains, des gens qui ne sont pas de la même race que nous. Cela dit, nous ne considérons pas que ces traités, que nous soyons avec eux d'accord ou pas—et personnellement, je ne suis pas tellement en faveur de ces accords de libre-échange—, mais nous ne considérons pas que ces traités sont fondés sur la race.

• 1715

J'aimerais que M. Eidsvik m'explique un peu mieux ce qu'il veut dire par «fondé sur la race», parce que j'ai l'impression qu'à votre avis les Premières nations n'ont pas de droit. Si on vous avait expulsé de votre propre maison, si on vous avait autorisé ensuite à négocier un retour, mais seulement dans une seule pièce dans le sous-sol, vous ne considéreriez pas que c'est juste. En fait, ils ont vraiment des droits, et c'est justement ce qu'on essaie de définir avec ces négociations: la notion de rendre au moins une partie de ces droits à la population, non pas sur la base de la race, mais simplement parce qu'ils étaient les premiers habitants, et que nos tribunaux leur ont reconnu ces droits. Voilà la base du processus de traité.

M. Phillip Eidsvik: Je vais répondre avec plaisir. Lorsque le Canada négocie un accord de libre-échange avec le Mexique, il négocie au nom de tous les Canadiens. Mes ancêtres sont venus de Norvège; ils sont venus ici pour pêcher. Le Canada négocie en mon nom. Il négocie également au nom des Nishgas, des Nuu-chah-nulth, des immigrants chinois et des Vietnamiens.

Ce que tout le monde oublie, c'est que la pêche commerciale en Colombie-Britannique a des caractéristiques uniques. La Cour suprême du Canada a établi que la pêche commerciale au saumon en Colombie-Britannique était née d'un contact européen. C'est ce que la Cour a déclaré à l'occasion de l'affaire Van der Peet et de l'affaire N.T.C. Smokehouse le 23 août 1996.

Pour pouvoir participer à l'établissement du traité avec les Nishgas, je dois être approuvé par la bande, et c'est la bande qui décide si, pour une raison ou pour une autre, je peux être considéré comme un Nishga. Ça, c'est une affaire de race. Ce n'est peut-être pas très joli, pas très confortable, pas très politiquement correct, mais je le dirai tout de même, c'est une affaire de race, et ce n'est pas normal.

À mon avis, dans notre secteur de la pêche commerciale, il y a un autre modèle aux termes duquel tous les Canadiens, quelle que soit leur origine, sont des participants à parts égales. Comme M. Copes l'a dit, les Nishgas pourront augmenter leur participation à la pêche commerciale en achetant des permis à mes collègues et en les transférant aux Nishgas qui pourront ensuite les utiliser pour pêcher avec nous, comme des amis, et en observant les mêmes règles, comme nous le faisons depuis plus de 100 ans.

Dans le nord de la Colombie-Britannique, et plus particulièrement à Prince Rupert, la région la plus touchée, 60 p. 100 des permis de pêche commerciale au filet maillant sont détenus par des Autochtones. Plus de la moitié des gens qui travaillent dans les industries établies sur la terre ferme sont des Autochtones. Une pêche réservée aux Nishgas... tout le poisson vient de cette même réserve.

Il y aura des pêcheurs autochtones et je pense en particulier à Hutch Hunt, un Autochtone de Port Hardy. Il a un permis de pêche à la seine, ou du moins il en avait un. J'ai assisté avec lui à une réunion avec le ministre Anderson—nous y étions allés ensemble pour nous épauler mutuellement—et il a dit: «Je suis le chef de ma région. En 1992, j'ai dépensé 1,5 million de dollars pour construire un senneur flambant neuf. Je fais vivre cinq familles—celles de mon équipage—et vous venez me dire, monsieur le ministre, que vous allez nous enlever du poisson pour le distribuer à diverses communautés de pêche autochtones le long de la côte. Vous venez me dire que cela a été une erreur de miser sur l'économie, sur la pêche commerciale, comme tous les autres Canadiens. Je n'ai pas besoin d'aide. J'irai pêcher n'importe où sur la côte contre n'importe qui et je ferai mieux que n'importe qui.»

Je n'ai jamais pensé que c'était un mauvais modèle. En fait, je pense que c'est un modèle qu'on pourrait reprendre dans d'autres régions. C'est un modèle qui, à cause de la décision Marshall, serait utile sur la côte Est. C'est un modèle dont d'autres industries pourraient s'inspirer. Nous ne refusons pas des débouchés économiques aux Nishgas, nous leur disons: Prenez autant de poisson que vous le pourrez, pêchez autant que vous le voudrez, nous allons pêcher à vos côtés. Ce sera une course entre nous tous à qui en prendra le plus. À mon avis, c'est un modèle dont on peut être fier.

La présidente: Il vous reste environ une minute, si vous le voulez.

Monsieur Keddy.

M. Gerald Keddy (South Shore, PC): J'étais en train de me demander comment orienter mes questions car plusieurs sujets ont été mentionnés. Je peux certainement revenir à ce que Mme Hardy a dit, et confirmer qu'aucun d'entre nous n'a été traîné de force à ce comité. Au contraire, c'est volontiers que nous sommes venus ici pour entendre vos griefs et pour discuter de ce traité, et c'est tout à fait normal. Je n'essaie pas de défendre la position du gouvernement, mais moi aussi je suis venu discuter en toute bonne foi, sans pour autant oublier que le traité a été signé et qu'il n'est pas vraiment possible de le changer. Nous comprenons tous cela. Cela ne rend toutefois pas ce processus inutile. D'autre part, si les trois parties réussissaient à se mettre d'accord, j'imagine qu'il serait encore possible de changer et de modifier le traité. Honnêtement, cela n'est pas très probable.

• 1720

J'ai des questions au sujet des pêches. Je tiens à ce que les gens dans la salle comprennent que je représente la circonscription de South Shore, qu'on considère souvent comme la plus grande circonscription de pêche au Canada. En effet, il y a 1 800 bateaux, une flotte de pêche aux pétoncles en haute mer et également la flotte de pêche à la crevette dans l'est de l'Arctique, ou du moins une grosse proportion de cette flotte. Il est certain que le secteur de l'aquaculture en Nouvelle-Écosse n'est pas développé comme il pourrait l'être. Il l'est au Nouveau-Brunswick, mais certainement pas en Nouvelle-Écosse.

En dépit de ce que vous disent les prophètes de malheur—et même s'ils ont souvent raison—nous avons encore une pêche côtière en Nouvelle-Écosse. Elle est affaiblie, elle n'est plus aussi florissante que par le passé, mais la situation n'est certainement pas comparable à la situation de la morue dans les baies et les ports de Terre-Neuve, car il s'agit d'un type de pêche différent.

Cela dit, je n'ai jamais eu l'occasion de discuter avec un groupe de pêcheurs qui réussissent à se mettre d'accord sur la façon d'organiser les choses sur la côte Est. Chacun a ses idées propres, ses propres prédictions en ce qui concerne l'avenir. Nous avons dans l'est du Canada des défenseurs des quotas qui sont convaincus que c'est la bonne solution. Nous avons des groupes qui veulent revenir à l'ancienne course pour le poisson, les pêcheurs les mieux équipés, les plus rapides, les meilleurs, prenant du poisson et rentrant au port.

Je serai parfaitement honnête. Il y a des membres de ma famille qui ont travaillé dans le secteur des pêches, et c'est une industrie que je connais un peu moi-même, mais personnellement, je suis un agriculteur et un exploitant forestier. Je ne suis pas pêcheur. Toutefois, cela dit, personne ne réussit à se mettre d'accord sur la marche à suivre pour l'avenir des pêches.

Je suis d'accord avec deux choses que M. Eidsvik a dites: que nous devrions avoir les mêmes règles et règlements pour tout le monde et qu'en fin de compte, sans oublier que les Nishgas se verront décerner une partie de cette pêche, nous devrions avoir... Les Nishgas ne vont pas tout prendre, ils n'empêchent pas les autres de pêcher, et si j'ai bien compris cela, ils n'éliminent pas la flotte commerciale. Il s'agit seulement de partager différemment les ressources, mais je ne pense pas qu'un groupe quelconque soit éliminé complètement de cette pêche.

J'ai une question pour M. Eidsvik au sujet des préoccupations dont il nous a fait part.

Si vous regardez les recommandations du Conseil mixte de gestion des pêches, vous y trouverez des exigences en ce qui concerne l'intégration et la gestion efficace de toutes les pêches. C'est une responsabilité du ministre. Si je comprends bien, c'est toujours la responsabilité du ministre.

En fin de compte, le ministre peut décider que tous les groupes pêcheront aux mêmes périodes, en dépit du fait que dans d'autres régions du Canada et en Colombie-Britannique, tous les groupes ne doivent pas pêcher à la même période. Je ne peux pas parler de la Colombie-Britannique, mais en Nouvelle-Écosse les règles sont différentes pour le nez et la queue du Grand banc, nous avons des règles différentes pour le nez du Banc Georges et pour le Bonnet Flammand. Nous avons des règles différentes pour tous les aspects de la pêche et selon les saisons. Les pêcheurs des autres régions qui ont un permis pour un engin donné, d'où qu'ils soient, peuvent seulement pêcher pendant cette période. Si vous n'avez pas de permis pour un engin donné, vous ne pouvez pas pêcher du tout.

Ainsi, les Canadiens ne peuvent jamais pêcher librement. Il faut être dans le secteur ou encore acheter un permis à quelqu'un d'autre.

D'un autre côté, vous avez dit que si on fait sortir les pêcheurs commerciaux non autochtones du secteur, de n'importe quel secteur, le gouvernement fédéral doit absolument racheter ces permis. Je suis entièrement d'accord avec vous. Mais ne pensez-vous pas que l'accord permettrait au gouvernement fédéral de réglementer les pêches, de réglementer les règles en prévoyant une participation des Nishgas et des autres parties?

M. Phillip Eidsvik: Le ministre a le pouvoir d'intervenir et de présenter des décisions par écrit sur les recommandations de ce nouveau conseil de gestion qui doit être créé.

• 1725

Tout d'abord, c'est un peu complexe. Ce genre de modèle de gestion des pêches ne nous satisfait pas tellement. Une grosse partie du problème c'est que cela ne concerne pas simplement les Nishgas mais l'ensemble de la Colombie-Britannique.

Le saumon rouge du Fraser touche la Colombie-Britannique. Son premier point d'arrivée à terre est habituellement la pointe des Îles-de-la-Reine-Charlotte, en territoire Haida. Il descend ensuite sur les côtes ouest et est de l'Île de Vancouver—Kwakiutl et Nuu-chah-nulth. Il se dirige ensuite vers le Fraser où nous avons les Tsawwassen, Burrard, Musqueam, Coquitlam et 97 autres bandes autochtones le long du fleuve.

Donc, si le précédent du Traité nishga s'appliquait, tout un autre échantillon de groupes décideraient des périodes et de la façon dont ils voudraient pêcher et le ministre essaierait de répondre à tous. Nous connaissons un problème similaire. Il s'agit du Traité sur le saumon avec les États-Unis. Il n'y a là que deux groupes, deux seulement—pas 97, deux—qui ne peuvent se mettre d'accord sur la façon de pêcher.

Nous partageons les intérêts de vos pêcheurs là-bas. Nous ne sommes pas très satisfaits de POC. Nous pensons qu'ils pourraient faire mieux. Jusqu'en 1990, nous pensions que nous avions ici la meilleure gestion du saumon au monde. Et voilà qu'on a instauré un programme en 1992 qui a tout mis en l'air.

Quoi qu'il en soit, il faut quelqu'un pour gérer. Il faut que quelqu'un déclare «Arrêtez de pêcher». Balkaniser la gestion des pêches et compliquer tellement les choses au point d'avoir des conseils et commissions ici et là n'est pas une solution. Nous préférerions que l'on finance convenablement les scientifiques de POC. Donnez-leur l'argent dont ils ont besoin. Nous aimerions aussi que l'on finance convenablement des groupes tels que les Nishgas, qui font ce travail depuis huit ans. Ils n'ont pas besoin de traité pour continuer. Ils le font depuis huit ans; ils peuvent continuer. Et nous aimerions que l'on donne aussi les fonds voulus aux fonctionnaires de POC responsables de la mise en application des lois. Vous entendez beaucoup de plaintes à ce sujet dans l'Est.

Il faut qu'il y ait un responsable de la gestion. Nous pensons que sans ça, les pêches sont perdues. Notre expérience sur le Fraser n'a certainement pas été satisfaisante. Beaucoup d'entre nous sont restés à quai cette année, ce qui était une première historique.

La présidente: Merci.

Monsieur Keddy, votre temps est écoulé.

Monsieur Bonin, commencez, s'il vous plaît.

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Merci, madame la présidente.

Nous avons toujours respecté l'honneur dans ce pays. Beaucoup d'entre nous se souviennent de leurs parents, grands-parents et arrière-grands-parents qui disaient «Nous nous sommes mis d'accord avec une poignée de mains» ou «Sa parole était d'or». Nos ancêtres concluaient des accords. Ils discutaient pendant longtemps et négociaient des accords. Personnellement, en l'honneur de mes ancêtres, je tiens à honorer leurs traités.

Ma question s'adresse à Mme Logan et à M. Eidsvik.

Vous avez l'un et l'autre fait allusion à des référendums. Pensez-vous qu'il soit juste que la majorité organise un référendum, prenne une décision sur l'opportunité de modifier ou de retirer les droits acquis de la minorité sans leur consentement? C'est ce dont il est question aujourd'hui, de droits acquis. Nous parlons d'un référendum par lequel la majorité retirerait ces droits acquis au terme de négociations. Pensez-vous que ce soit juste?

M. Phillip Eidsvik: Des droits acquis. Ma foi...

M. Raymond Bonin: En l'honneur de notre tradition.

M. Phillip Eidsvik: En l'honneur de notre tradition, lorsque mon père allait conclure une entente avec son voisin, il pensait à l'incidence que cette décision aurait sur ma famille et il venait en parler avec sa femme. Si c'était une grosse décision, il lui arrivait de réunir la famille.

Dans ce cas, nous avons un père qui vient d'Ottawa, à 3 000 milles de distance, qui conclut une entente, reprend l'avion pour Ottawa et que nous ne revoyons jamais. La famille navigue au gré du vent.

Au début, au nom de nos 8 000 membres, j'ai écrit personnellement à la fois au premier ministre provincial et au premier ministre fédéral pour leur dire: «S'il vous plaît, ne signez pas cette entente». Je disais: «Vous ne pourrez honorer cette entente sans confrontation et sans diviser nos communautés pour les 500 prochaines années». Ils ont passé outre.

Maintenant, vous venez me dire que je suis censé perdre mon emploi et que nos membres vont perdre leur travail parce que des politiques d'Ottawa concluent une entente sans vérifier auprès de la population touchée. Ce n'est pas normal.

• 1730

La présidente: Madame Logan, si vous voulez répondre, allez-y.

Mme Debra Logan: Je croyais que l'intérêt de négocier des traités avec les Premières nations à ce moment de notre histoire était de se pencher sur les besoins actuels et futurs. On a aussi en général le sentiment que nous remédions à des injustices passées, mais j'ai vérifié auprès de plusieurs ministres. En fait, les injustices passées ne sont pas la base sur laquelle on négocie les traités. On s'en occupe d'autres façons, notamment par l'intermédiaire des tribunaux, comme dans le cas des problèmes des pensionnats.

Cela dit, nous avançons. Nous n'essayons pas d'assigner un prix au passé et d'indemniser. Nous devons tous vivre ici.

Pour ce qui est d'un référendum, j'ai pas mal voyagé dans le monde et je crois que c'est vrai: le Canada a la réputation d'être l'une des nations les plus justes, les plus sensées et les plus aimables du monde. Je suis très fière de coudre notre drapeau sur mon sac à dos et, non, je ne le vendrai pas à un Américain. On me l'a demandé une ou deux fois en Europe.

Si l'on a de bonnes consultations sur les traités et si elles sont bien communiquées, les Canadiens sont suffisamment honnêtes pour les appuyer. Si elles sont au contraire conclues de la façon dont elles l'ont été, avec le gouvernement NPD qui invoque la clôture, avec des consultations qui sont en fait une plaisanterie—et si j'ai bien compris, les Libéraux sont prêts à invoquer la clôture—eh bien, non, le la population canadienne ne les appuiera probablement pas. C'est peut être une bonne entente mais, malheureusement, nous aimons que les choses soient expliquées pour que nous puissions nous-mêmes de leurs mérites et ne pas nous faire dire que c'est bon pour nous.

M. Raymond Bonin: Cela revient à dire que lorsque ces traités ont été conclus, lorsqu'ils ont été négociés, les négociateurs blancs n'ont pas pensé à l'avenir. Avant toutefois de partager ce merveilleux pays avec nous, avant de se mettre d'accord pour le partager à tout jamais, avec de parfaits étrangers, les Premières nations ont pris une décision intelligente: elles en ont discuté. Elles savaient exactement ce qu'elles faisaient.

Je maintiens toutefois qu'elles savaient ce qu'elles faisaient parce qu'elles faisaient confiance aux Blancs pensant qu'ils respecteraient leurs engagements. Nous commençons en fait à dire que les temps ont changé. Ma foi, une entente est une entente et si elle doit changer avec le temps, on y met une date limite, on limite sa durée d'application. Il n'y a pas de temporarisation pour les traités. C'est le problème ici.

La présidente: Merci.

Nous allons commencer maintenant le deuxième tour par M. Gouk.

M. Jim Gouk (Kootenay—Boundary—Okanagan, Réf.): Je voudrais éclaircir quelque chose. Nous n'essayons pas de changer des traités. Il n'y a pas de traités en Colombie-Britannique et c'est une partie du problème.

Pour la Colombie-Britannique qui représente les méchants parce que c'est nous qui n'avons pas signé de traité alors que tout le monde l'a fait et qu'ainsi les autres sont les gentils, l'essentiel de ce que l'on sort d'un traité ce sont les terres mises en réserve. Peut-être que cela n'a pas été fait très honnêtement. Je dois dire qu'en étudiant l'histoire je suis un peu gêné par ce que nous avons parfois fait.

Il y a environ 2 400 réserves au Canada et deux tiers d'entre elles se trouvent ici en Colombie-Britannique. Peut-être que nous n'avons pas signé de traités comme tels, mais cela ne veut pas dire que nous ne faisions pas les choses—même si cela n'était pas forcément très généreux—que faisaient les autres provinces dans le cadre du processus de traité.

La situation ici... est-ce qu'une des deux parties devrait rester la même et ne pas être touchée par l'évolution des choses? Il n'y a pas si longtemps, si quelqu'un avait dit qu'un jour l'homme marcherait sur la lune, on lui aurait ri au nez. On ne saurait tout imaginer. Il est bien facile et de dire rétrospectivement qu'on aurait dû prévoir ce qui allait se passer, mais lorsqu'on envisage l'avenir et que l'on essaye de deviner, ce n'est pas la même chose.

• 1735

Aujourd'hui, comme cela l'a très bien été exprimé, il nous faut des traités que les deux parties puissent accepter, ce qui est possible si les deux parties sont consultées.

Il y a deux signataires au Traité nishga. Il y a le peuple nishga, qui veut voir certains droits consacrés ou reconsacrés, et qui veulent être dédommagés pour ce qu'on leur a fait. Ce dédommagement, ces droits sur la terre, les fonds, le poisson viennent bien de quelque part. Il faut que quelqu'un renonce à ses prétentions sur ces choses. C'est l'autre partie. C'est la partie qui doit être consultée. Les Nishgas ont voté sur l'acceptation de ce qui avait été négocié en leur faveur.

L'autre partie, qui doit fournir ce qui a été négocié, devrait elle aussi avoir son mot à dire. Elle n'a pas pu se faire entendre par l'intermédiaire de son gouvernement provincial. Elle n'a même pas pu entendre un débat complet sur la question. Il y a deux groupes de représentants provinciaux: les députés libéraux et néo-démocrates. Ils n'ont pas pu se faire entendre comme il faut. La moitié du traité n'a même pas été débattue au Parlement provincial.

Au niveau fédéral, personne ne présente d'amendements. Le ministre l'a dit tout net: il n'acceptera aucun amendement. Il n'en est pas question.

Nous sommes ici en Colombie-Britannique pour écouter les citoyens de la province avec une arme sur la tempe, pour ainsi dire. Au moins un d'entre vous a été suffisamment honnête pour dire que vous ne vouliez pas vraiment être ici ou nous écouter. Vous allez respecter la forme et puis vous allez l'adopter.

Voici donc ce que je veux demander à M. Eidsvik, en particulier, et à Mme Logan—je pense que M. Eidsvik a déjà répondu et je vais donner la chance à Mme Logan de le faire—si ce texte était négocié au grand jour et que nous ayons notre mot à dire et s'il faisait l'objet d'un vote à l'issue de nos discussions, ne pensez-vous pas que vous-mêmes et ceux que vous connaissez—vous avez vos propres attaches—feraient meilleur accueil au traité, si vous aviez fait partie du processus depuis le début?

Mme Debra Logan: Je peux vous répondre rapidement. Je pense que le Traité sechelt est un bon exemple de ce qui arrive lorsqu'on négocie au grand jour et en répondant aux souhaits des intéressés.

La présidente: Il vous reste du temps, monsieur Gouk, si vous le voulez.

M. Jim Gouk: Merci.

Comme je l'ai déjà dit, quand le traité sera conclu, quelque soit le dédommagement ou la superficie ou les versements faits pour des erreurs passées, sera-t-il final aux yeux de tous les intéressés s'il reste un écart entre les deux peuples? Je pose la question à l'un ou l'autre d'entre vous.

Quand on crée des droits, les gens les utilisent différemment. Mais lorsque l'on crée quelque chose où des peuples différents ont des droits différents en fonction de la race, y existera-t-il une harmonie complète? Je vous pose la question. Trouvera-t-on une solution harmonieuse pour tous quand on dit qu'un groupe est différent et qu'il obtient un droit différent pour cette raison?

La présidente: Monsieur Copes.

M. Parzival Copes: Laissez-moi vous donner un autre son de cloche. Les habitants des diverses provinces jouissent de droits différents en vertu de lois différentes. Les différents membres d'une famille ont des droits d'héritage différents.

Je pense que les peuples autochtones du Canada ont des droits comme collectivités; la Cour suprême l'a dit à maintes reprises. Ce n'est pas à cause de leur race, c'est parce qu'ils forment une communauté établie depuis bien avant notre arrivée.

• 1740

Ils ont des droits relatifs à ce qu'ils avaient, à ce qu'ils ont contribué au pays parce qu'ils étaient propriétaires des ressources qu'ils utilisaient. Ces ressources leur ont été confisquées. C'est bien beau pour nous de dire aujourd'hui que nous voulons tous être sur un pied d'égalité, que nous avons toutes ces richesses et que le passé est bien révolu et que l'on ne va plus s'occuper de cela. Il s'agit de rétablir certains de ces droits.

Il faut aussi s'attaquer à une autre question. Traiter tout le monde de la même façon, ce n'est pas la même chose que leur donner les mêmes droits. Ils ont des besoins différents et des perceptions différentes. Ils ont des cultures différentes. Si l'on disait que chaque Autochtone ici doit être comme le Blanc... C'est ce qu'on a fait. On les a mis dans des internats et essayé d'en faire de petits Blancs, et ça n'a pas marché.

Va-t-on revenir à cela? N'allons-nous pas reconnaître leurs droits d'avoir leur propre culture et de conserver leurs propres communautés?

Ils ont des droits collectifs et c'est ce que nous reconnaissons. Nous les reconnaissons de la façon qui convient: comme un groupe qui jouit de droits collectifs dont beaucoup leur ont été enlevés, ce qui a détruit beaucoup de leurs collectivités.

M. Jim Gouk: Puis-je commenter une des choses que vous venez de dire?

La présidente: Non, parce que votre temps est écoulé.

Madame Karetak-Lindell, vous avez la parole.

Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Merci.

Vous avez beaucoup parlé de démocratie, monsieur Eidsvik. Vous appartenez à une association.

Vous aussi, madame Logan.

Dans vos réunions, comment adoptez-vous vos résolutions? À la majorité?

Mme Debra Logan: Oui.

Mme Nancy Karetak-Lindell: Lorsque le peuple nishga s'est prononcé sur ce traité, la majorité d'entre eux ont voté pour. J'ai donc du mal à comprendre chaque fois que l'un d'entre vous parle d'absence de consultation et du fait que le gouvernement n'a pas tenu compte de votre avis.

Pas une fois vous n'avez mentionné le fait que cette collectivité a donné son accord. Vous omettez toujours de parler d'eux quand vous parlez des décisions qui ont été prises. Je n'arrive pas du tout à comprendre comment vous pouvez ne pas tenir compte d'une population qui a pris la décision d'accepter le traité. Si la majorité du groupe accepte ces conditions, c'est lui qui sera touché. Comment pouvez-vous ne pas respecter cela alors que dans votre propre association vous acceptez ou rejetez des résolutions à la majorité? C'est ma première question.

La présidente: Madame Logan.

Mme Debra Logan: J'ai le respect le plus absolu pour la capacité des Nishgas de voter à la majorité. Il n'y a aucun problème. Ce n'est nullement à moi de décider pour les Nishgas si c'est bon ou mauvais pour eux. Ma tâche est de voir comment le traité qu'ils ont signé touche les gens pour qui je travaille, ceux que je représente.

Faire des observations sur la décision prise par les Nishgas, ce serait à mon avis verser dans le paternalisme de la Loi sur les Indiens; je me prononcerais sur la façon dont les autres mènent leurs affaires.

• 1745

Mme Nancy Karetak-Lindell: Vous avez parlé d'un référendum. Je viens du Nunavut où nous venons de réaliser avec succès une... je ne sais pas exactement quel mot employer, mais comme groupe nous avions le sentiment d'avoir notre propre façon de nous gouverner avant que quelqu'un vienne nous dire de nous gouverner autrement sans tenir compte du fait que nous avions déjà notre système. Depuis le 1er avril, on nous a donné la possibilité de nous gouverner nous-mêmes d'une manière que nous aurions dû avoir depuis 50 ans. Mais je ne pense pas qu'il aurait été juste pour des non-Inuits de voter dans un référendum pour décider si je devais garder ma langue et ma culture.

Quand vous parlez d'un référendum, comment pouvez-vous, un non-Nishga, voter pour décider si les Nishgas doivent garder leur langue et leur culture? Tel serait l'effet d'un référendum. Comment un référendum où la majorité des électeurs ne sont pas des Nishgas pourrait-il décider des droits que les Nishgas doivent avoir. Pour moi, l'accord du Nunavut et le traité avec les Nishgas sont une façon de redonner aux populations les droits qu'elles ont toujours eus, avant que quelqu'un ne décide que cela devrait se faire différemment.

Mme Debra Logan: Aucun référendum, aucun diktat du gouvernement, ni l'opinion publique, ni les conseils de qui que ce soit, y compris des Affaires indiennes, ne changeront quoi que ce soit au maintien de ma langue et de ma culture. Rien du tout. C'est une question tout à fait accessoire en ce sens que personne n'a aidé les Canadiens d'origine italienne à conserver leur langue et leur culture. Personne n'a aidé ceux d'entre nous qui n'ont pas signé de traité à conserver leur langue et leur culture. Nous le faisons sans l'aide du gouvernement, sans son paternalisme. Nous n'avons pas besoin d'un référendum pour ou contre nous pour conserver notre langue et notre culture. C'est une question apolitique. C'est entre nous.

Mme Nancy Karetak-Lindell: Je me souviens il y a quelques années lorsque les Sikhs sont entrés à la GRC, ils n'avaient pas le droit de porter leur turban. C'étaient des gens d'ailleurs qui voulaient conserver leurs droits en fonction de leur culture. Ils voulaient porter le turban. La population canadienne a apporté ces changements à la GRC pour les incorporer à notre société. Je trouve très troublant que l'on reconnaisse des gens de l'extérieur du pays et que l'on accepte leur culture et leur mode de vie mais qu'il faille faire subir à notre population autochtone toutes sortes de tests pour jouir de leurs droits dans leur propre pays. L'article 35 reconnaît les droits ancestraux.

J'ai des droits au Canada qui sont différents des autres parce que nous étions les premiers habitants du pays. Mais il a été très difficile pour nous d'être reconnus de la sorte et d'obtenir la possibilité de vivre comme nous l'entendons. Je trouve très troublant que nous acceptions les cultures et les traditions d'un autre groupe venu d'une autre partie du monde alors que nous avons du mal à accepter ceux qui sont ici au pays.

La présidente: C'est tout? Merci.

[Français]

Monsieur, voulez-vous commencer, s'il vous plaît?

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Je voudrais d'abord rappeler que le Bloc québécois avait voté contre la motion visant à mettre fin au débat en Chambre parce qu'il est important de donner du temps à des débats comme ceux-là.

• 1750

Nous sommes heureux d'être ici et de vous entendre, mais préoccupés, comme d'autres, par le fait que certains souhaitent des consultations non pas véritablement pour entendre des témoignages, mais plutôt pour s'opposer à un accord, et pas toujours de façon très constructive. C'est pour cela que l'on peut parfois se préoccuper des motifs de ceux qui veulent faire des consultations plutôt que de la question des consultations et de l'importance de ces consultations.

J'aimerais revenir sur une chose que M. Copes a évoquée et que je trouve très importante. Il semble que les objections occultent la réalité, à savoir qu'on ne veut pas, dans certains milieux, reconnaître des droits collectifs à des peuples, des group rights, comme le disait M. Copes. Finalement, c'est cela que cachent beaucoup de griefs à l'égard de cet accord et de plusieurs autres accords concernant les nations autochtones. On ne veut pas reconnaître aux nations autochtones des droits collectifs, des droits qui leur sont dus à cause de leur présence antérieure sur le territoire, du fait qu'elles s'affirment comme des nations. Nous en savons quelque chose au Québec. Nous pensons aussi que, parfois, on ne souhaite pas nous reconnaître notre droit collectif d'être reconnus comme peuple.

Nos collègues réformistes ne seront pas très heureux de ce que je vais dire, mais voici ce qui me dérange le plus dans tout ce qui a été dit depuis longtemps. Le fait de suggérer que cet accord est raciste est, à mon avis, tout à fait contraire à l'économie et même à la lettre de cet accord. S'il est vrai que la citoyenneté nisga'a sera accordée selon des critères qui tiennent compte de l'ascendance, elle pourra aussi être accordée à d'autres autochtones. Dans le chapitre 20, il est clair que l'on peut accorder la citoyenneté à des autochtones qui ne sont pas nisga'as, et il est clair que la nation nisga'a pourra aussi accorder la citoyenneté à des personnes qui ne sont pas autochtones parce que son gouvernement pourra adopter des lois ouvrant la citoyenneté nisga'a à des personnes qui ne sont pas d'ascendance nisga'a.

Ce qui me dérange dans les accusations de racisme du Parti réformiste et que vous avez répété ici, monsieur Eidsvik, c'est que cela ne reflète pas l'esprit et la lettre de cet accord, qui donne un peu de temps aux Nisga'as pour s'ouvrir aux autres nations, aux personnes qui ne sont pas de leur nationalité afin de sortir du cadre raciste qu'était la Loi sur les indiens et qui n'existera plus pour les Nisga'as parce qu'il y aura cet accord.

Comment pouvez-vous dire et répéter ici que c'est un accord raciste?

[Traduction]

M. Phillip Eidsvik: Eh bien, je suis un peu perdu, pour vous dire la vérité, parce que vous venez de dire que la Loi sur les Indiens est raciste. En vertu de la Loi sur les Indiens, les bandes indiennes décident qui fait partie d'elles. En vertu de ce traité, les Nishgas vont décider qui fait partie de leur groupe et ils nous reprochent de dire que c'est raciste. Alors si la Loi sur les Indiens est raciste—c'est ce que vous venez de dire—ils décident qui sont membres de leur groupe en fonction de la race. Ce traité, qui leur permet de décider qui fait partie de leur groupe en fonction de la race, dans ce cas, d'après vous, est raciste.

M. Daniel Turp: Vous n'avez pas compris.

M. Phillip Eidsvik: Je n'ai pas dû comprendre. Une fois de plus.

M. Daniel Turp: La Loi sur les Indiens est raciste, d'accord? Ceci remplace la Loi sur les Indiens. Ceci n'est pas raciste, parce que cet accord permettra aux Nishgas d'admettre dans leur communautés des gens qui ne sont pas des Nishgas.

M. Phillip Eidsvik: N'importe quel conseil de bande peut en faire autant aujourd'hui.

M. Daniel Turp: Vous pensez qu'ils ne le feront pas? C'est la raison pour laquelle vous pensez que c'est raciste? Vous pensez qu'ils ne voudront pas s'ouvrir à d'autres? C'est votre argument?

M. Phillip Eidsvik: Je peux vous dire ce qui nous est arrivé sur le Fraser avec d'autres groupes. Pendant sept ans, sur le quai, j'ai observé les bandes de Musqueam et de Sto:Lo pêcher. On leur a donné le droit d'accorder des permis à qui elles veulent. Elles n'ont encore jamais accordé de permis à quelqu'un qui n'est pas directement relié à leur bande.

• 1755

Peut-être un jour les Nishgas s'ouvriront-ils à d'autres. C'est curieux, par contre, vu les avantages du Traité nishga, je serais étonné qu'ils en fassent profiter largement les autres Canadiens.

Actuellement, ceux qui se sont prononcés sur le traité ont été choisis en fonction de leur patrimoine raciale ou de leur appartenance à la bande indienne. Je n'ai donc pas pu me prononcer sur ce traité; dans ce cas, comment pouvez-vous me dire que ce traité n'est pas basé sur la race? Avez-vous pu vous prononcer, vous, autrement que comme députés?

M. Daniel Turp: Je fais confiance aux Nishgas. Je pense qu'en agissant ainsi nous leur ouvrons un nouvel avenir. C'est ce que je crois. Je fais confiance aux gens parce que c'est une façon très différente de voir nos liens avec les Nishgas. C'est ma façon de voir l'avenir.

M. Phillip Eidsvik: Je pense que les Nishgas ont fait un excellent travail de négociation dans ce traité et qu'ils ont lieu d'être fiers de ceux qui l'ont négocié pour eux. Ils ont fait de l'excellent travail.

Ce traité, par contre, est conçu pour longtemps. Il est coulé dans le ciment constitutionnel. Quand la génération actuelle de Nishgas aura disparu, qui la remplacera? J'hésite à donner ce genre de droit de pêche à un groupe donné alors qu'il y a un bien meilleur modèle, où tous les Canadiens peuvent participer sur le même pied. C'est cela le modèle. Pourquoi distinguer entre les Canadiens?

M. Daniel Turp: J'ajouterais seulement que l'avenir ce n'est pas une question d'hésitation. L'avenir, c'est respecter autrui et s'assurer que les gens vivent ensemble grâce à des accords comme celui-ci.

M. Phillip Eidsvik: Si le traité avec les Nishgas est adopté, il y a aura des jours de pêche sur la Nass. Si je pêche les jours où seuls les Nishgas ont le droit de pêcher, je serai arrêté et jeté en prison. Je pourrais perdre mon permis et mon bateau. C'est pêcher ensemble ça?

Jusqu'à présent, lorsque la saison de pêche était ouverte, elle l'était pour tout le monde: les Nishgas, les Giksans, les Italiens.

Parzival, je vous vois faire non de la tête, mais il y a moins de 50 Autochtones qui travaillent à l'Université Simon Fraser sur 3 000 employés. Sur nos 3 000 pêcheurs, 1 000 sont Autochtones et ils sont sur le même pied que tous les autres. Ne me faites pas non de la tête comme ça.

La présidente: Monsieur Copes, allez-y. Cela mettra fin au tour actuel et nous passerons au deuxième tour.

M. Parzival Copes: Je pense qu'il y a malentendu sur ce qui se passe dans la pêche au saumon ici.

Le saumon est un poisson migratoire. Tout le monde ne pêche pas au même moment. Vous pêchez quand le poisson est dans votre territoire. Les Nishgas vont donc pêcher lorsque le poisson sera sur leur territoire. C'est à eux de gérer la pêche là. Ils font de l'excellent travail. Ils ont reçu un prix. Ils augmentent donc la productivité totale du bassin de la Nass, au profit de tous. Vous ne pouvez pas vous attendre à ce que tout le monde pêche ailleurs parce qu'ils pêchent aujourd'hui, lorsqu'il se trouve que le poisson est dans leur territoire. C'est absurde.

M. Phillip Eidsvik: C'est ce que nous faisons dans le secteur de la pêche depuis un siècle.

La présidente: Merci, monsieur Copes.

Monsieur Finlay, vous avez la parole.

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Je suis tout à fait d'accord avec mes collègues, Nancy, M. Bonin et M. Turp. C'est très difficile si vous refusez de considérer l'histoire. Dans la pêcherie de l'Atlantique—et je remercie M. Keddy de son mini croquis—une grande partie de la morue n'était pas capturée par des Canadiens; elle était pêchée par des Espagnols et des gens d'autres pays d'Europe, d'où vient M. Eidsvik. La pêche au saumon de la Colombie-Britannique—et je suis biologiste, ou je l'étais...

M. Jim Gouk: D'où venez-vous, John?

M. John Finlay: Je viens des Antilles.

La pêche au saumon de la Colombie-Britannique a été monstrueuse pendant des années. On pouvait bien gagner sa vie sur le Fraser si on s'y rendait au bon moment, comme tous les autres. Le poisson n'avait aucune chance. Si vous aviez un bon bateau et capturiez beaucoup de poisson, vous pouviez gagner le salaire d'un an en deux semaines à peu près.

Je veux que M. English sache que je le remercie de son information scientifique. Je suis reconnaissant de ce qu'il nous a dit. Je ne suis pas certain si M. Eidsvik a bien compris le croquis. Le graphique montre bien que lorsque les Nishgas utilisent leur méthode éprouvée d'augmenter le nombre de poissons autorisés à frayer pour pouvoir augmenter le nombre de ceux qui reviendront de l'Alaska et d'ailleurs, ils rendent service aux autres pêcheurs ici.

• 1800

Je tiens à dire que je suis reconnaissant aussi à M. Copes de son exposé fort intelligent et méthodique.

Je voudrais demander à M. Eidsvik s'il estime oui ou non que 26 p. 100 du saumon de la Nass est un chiffre injuste pour ceux qui habitent sur au moins la moitié de la Nass, comme on le voit sur la carte. Pour moi, ce n'est pas leur juste part et ils ont accepté beaucoup de concessions.

Monsieur Eidsvik, en ce qui concerne votre idée de vous précipiter dans votre bateau et de faire concurrence à tous les autres, et si c'est vous qui en attrapez le plus c'est tant pis pour eux, eh bien cela va tuer la pêche en deux ou trois ans. Avec une attitude comme celle-là, il n'y aura plus de pêche. On a tous suffisamment d'information scientifique pour le savoir.

Madame Logan, s'il y a maintenant 100 000 producteurs qui utilisent 0,05 p. 100 des sites riverains potentiels pour votre industrie des mollusques et des crustacées de toute évidence prospère, comment pouvez-vous trouver à redire que les Nishgas en aient 71 kilomètres carrés? Qu'est-il arrivé aux palourdes qui alimentaient les cinq usines de transformation de ces régions? Ce n'était pas des usines Nishgas, n'est-ce pas? Ce ne sont pas les Nishgas qui ont récolté les palourdes au point de les conduire à l'extinction dans la région. C'est nous tous.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Monsieur English.

M. Karl English: Je voudrais mentionner que la pêche ici n'est plus en aussi bon état qu'elle l'a été. Il faut désespérément apporter des modifications au système parce qu'il va s'écrouler si nous ne le faisons pas.

Il faut entre autres ramener de l'ordre dans la pêche, définir quelle part va à qui et en quel nombre et où les prélèvements peuvent être faits. Même si on peut souhaiter que tout le monde prenne le large en même temps, et ait le même accès à cette richesse naturelle, il faut y mettre de l'ordre.

L'accord prévoit une forme simpliste d'ordre avec des pêcheries en eau vive clairement définie à l'aide d'engins de pêche qu'on a pu commencer à utiliser il y a à peine quelques années. De fait, on ne pouvait même pas songer à proposer l'idée dans certains secteurs. Cette option était exclue parce que les intérêts de la pêche commerciale de l'époque y avait vu. Ce n'était même pas sur la table.

Maintenant on va l'envisager dans d'autres secteurs. Les groupes qui travaillent avec des pêcheurs commerciaux sur la côte du centre s'affairent à déployer des engins en eaux vives. Ils collaborent avec les Premières nations comme celles d'Oweekeno sur des rivières comme la Wannock et sans doute aussi sur le Fraser, et ils cherchent des possibilités de coopérer.

Tout cela se fait parce que les gens disent qu'un changement s'impose. L'accord a ouvert la possibilité—comme beaucoup d'autres accords en Colombie-Britannique—de régler nombre des problèmes du secteur de la pêche. Abandonnons la course commercialisée au poisson, ordonnons les prélèvements, haussons le nombre de reproducteurs dont nous avons besoin et attelons-nous y. Ces ressources peuvent produire beaucoup plus qu'elles ne le font aujourd'hui.

Le cas de l'an dernier est exemplaire. Au moment où tous les autres stocks que chacun se disputait est en train de disparaître, la NASS a connu une des meilleures productions qui soit. Une pêche très ordonnée, contrôlée, avec ses propres pêcheurs commerciaux dans le Nord... et les objectifs d'échappée ont été atteints, même s'il y avait des tonnes d'engins de plus que par le passé, parce qu'il n'y avait plus de pêcheries ailleurs.

• 1805

Il faut donc voir la situation dans son ensemble et réaliser—et je n'essaie pas ici d'enraciner le système ou de protéger un système parfait qui nous a très bien servi et qui va être détruit par quelque chose d'autre—que nous avons l'occasion d'améliorer le système. C'est ce que l'on est en train de faire ici.

La présidente: Merci, votre temps est écoulé.

Madame Louise Hardy, vous disposez de cinq minutes.

Mme Louise Hardy: J'aimerais revenir à nouveau sur l'hypothèse que ce traité repose sur la race. Je n'arriverai sans doute pas à convaincre M. Eidsvik, mais je vais essayer.

Dans les pays nordiques, il y a ce que l'on appelle les zones autonomes. Une d'entre elles appartient à la Finlande, il s'agit des îles d'Aland. Ses habitants ressemblent en tout point au reste de la population de la Finlande sauf qu'ils ont une histoire et une langue différente. Ils ont négocié un traité et ont leur propre gouvernement. Ils ont leur propre citoyenneté et autorisent des étrangers à devenir citoyens, s'ils parlent leur langue. Les habitants peuvent aussi renoncer à leur citoyenneté quand ils veulent. Parce qu'ils dépendent de la pêche, ils ont des lois qui régissent qui peut pêcher. Cet accord repose sur des droits parce que tout au long de leur histoire ils ont eu le droit d'avoir leur gouvernement.

Je vois la transposition de cela ici. Nous essayons ici de donner aux Nishgas leurs droits. On nous répète sans cesse que l'accord est basé sur la race.

Il est évident que la Loi sur les Indiens était fondée sur la race. Nous avons donc enlevé ces droits à une population en raison de sa race. Aujourd'hui nous négocions des traités pour les leur redonner, et on nous accuse de leur donner quelque chose à cause de leur race. On fait donc quelque chose de mal s'ils sont des Indiens mais on ne peut pas faire quelque chose de bien s'ils sont des Indiens. C'est un raisonnement qui ne tient pas debout.

La présidente: Monsieur Eidswik.

M. Phillip Eidswik: Vous laissez entendre que notre association entérine la Loi sur les Indiens mais nous prêter ces propos est honteux et scandaleux. Nous n'avons jamais souscris à la Loi sur les Indiens; nous pensons que c'était une erreur dès le début. Elle a causé des souffrances partout au pays et nous sommes heureux de voir qu'on la remplace et que l'on va dans un autre sens.

Par contre, le droit des Nishgas de vendre du saumon n'a jamais été prouvé. Les deux causes qui ont porté sur la vente de saumon en Colombie-Britannique porte sur deux très gros consommateurs de saumon, l'un sur le Fraser et l'autre au sud de l'île de Vancouver. Dans les deux cas, la Cour suprême du Canada a déclaré qu'ils n'ont même pas pu prouver l'existence d'un droit commercial de faire du troc, encore moins, ce qui est encore plus difficile à prouver, le droit de vendre le saumon. Il est assez évident que le commerce du saumon c'est comme le commerce de l'air. La plupart des gens dans la société antérieure aux contacts ici avaient accès au saumon.

Pour ce qui est de l'eulakane, c'est une autre affaire. Les données historiques indiquent que les Nishgas ont toujours beaucoup vendu d'eulakane. Devant un tribunal, ils n'auraient pas de difficulté à prouver leur droit commercial concernant l'eulakane, mais c'est différent en ce qui concerne le saumon.

On ne protège donc pas un droit figurant dans le traité. On crée un nouveau droit dans le traité et c'est déplorable pour différentes raisons, notamment la question raciale, la gestion, les conséquences pour les autres, et le plus difficile...

En ce qui concerne les commentaires concernant cette nouvelle façon de gérer les pêches... ce n'est pas un débat sur le traité. Il s'agit de savoir si la privatisation des pêches est une bonne mesure.

Si on voulait faire admettre cette idée sur la côte Est, monsieur John Finley, les pêcheurs se retrouveraient diviser, et je pense que M. Keddy est de mon avis.

Si l'on privatise les pêches de façon que tout le monde obtienne une certaine quantité de poisson sur une période donnée et à un endroit donné, on va susciter bien des controverses. Si c'est ce que vous voulez faire dans le domaine des pêches, c'est parfait, mais il n'y a pas besoin de traité pour cela.

La présidente: Madame Logan, allez-y.

Mme Debra Logan: Excusez-moi, monsieur Finlay, je ne me souviens pas de tout ce que vous avez dit mais j'aimerais revenir sur un point qui me trouble particulièrement. Il s'agit de cette course effrénée pour attraper le dernier poisson. Je vais faire ici un parallèle. Supposons une banlieue où l'on trouve une taverne. Par définition, elle est destinée à permettre aux gens du voisinage de s'y rencontrer avant de rentrer chez eux. C'est très différent du bar du centre-ville, ou la tenue habillée est de rigueur et où la police fait régulièrement une ronde dans le stationnement.

• 1810

Si le propriétaire de la taverne de quartier veut respecter l'esprit même de son établissement, il va sans doute fermer à 22 heures. Après tout, à cette heure-là, ses clients devraient avoir rejoint leurs familles. Ils ne devraient pas rester à boire à la taverne jusqu'à 2 heures du matin. Mais il reste que les tavernes de quartier restent ouvertes jusqu'à qu'elles soient obligées de fermer par les règlements municipaux ou la régie des alcools, c'est-à-dire à 2 heures du matin.

Pourquoi est-ce qu'elles restent ouvertes? Pour deux raisons. Tout d'abord, le propriétaire à des factures à payer. Il a acheté une infrastructure et il doit l'exploiter et la laisser ouverte le plus longtemps possible pour payer ses factures. Deuxièmement, il y a la motivation du profit. Je suppose que tout le monde, dans cette salle, comprend cette motivation. Il n'y a personne ici qui ne soit pas intéressé à gagner de l'argent.

Pour les pêches, c'est la même chose.

Évidemment, je remercie les autorités municipales et la régie des alcools qui forcent la main aux tenanciers de taverne en les obligeant à fermer à 2 heures. C'est très bien. On évite ainsi de se retrouver avec des ivrognes dans la rue à 7 heures du matin, et des gens qui ne rentrent jamais chez eux.

Il en va de même pour les pêches. Les pêcheurs cherchent à faire du mieux qu'ils peuvent pour leurs familles, de la même façon que le propriétaire de la boutique de hot dog reste ouvert aussi longtemps que le lui permettent les arrêtés municipaux, si les affaires sont bonnes, et il en va de même pour le tenancier de taverne. Comme chacun cherche à gagner le plus d'argent possible, il faut des arrêtés municipaux pour obliger la taverne ou la boutique de hot dog à fermer, et c'est pourquoi le ministre des Pêches et Océans ferme aussi la pêche.

Mais le problème provient-il des pêcheurs qui sont trop âpres au gain ou du ministère des Pêches et Océans? Est-ce que le ministère se soustrait à l'obligation qu'il a vis-à-vis de l'ensemble des Canadiens de garder en bon état la ressource qui constitue un bien commun?

La présidente: Monsieur O'Reilly, vous avez cinq minutes.

M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.

Je remercie les témoins de m'avoir cité. Je suis heureux d'avoir amorcé le débat en indiquant que l'accord était signé et qu'il serait adopté par le Parlement, ce qui est la vérité, que cela vous plaise ou non.

Je voudrais tirer les choses au clair. Je ne suis pas venu ici contraint et forcé. En fait, comme pourront en témoigner les membres du comité, on m'avait demandé de rester à Ottawa à cause d'un vote important à la Chambre sur la loi concernant les autorités portuaires. On a aussi demandé à M. Bonin de rester à Ottawa. J'ai dit que je ne voulais pas rester, que je voulais donner sa chance à la Colombie-Britannique et que je ne voulais pas manquer ce voyage.

Donc contrairement à la belle évocation de M. Gouk, qui prétend qu'on m'a traîné ici contre mon gré, je dis que ce n'est pas vrai. Au contraire, j'avais même l'occasion de ne pas venir.

Je crois profondément en la démocratie et je tiens à ce que l'opposition ait le droit de s'exprimer, mais je tiens aussi à dire en toute vérité que le traité est signé et que tout changement devra résulter d'un accord entre les parties, et non d'une intervention du Parlement du Canada.

Et si c'est une vérité trop crue pour certaines personnes ici présentes, je refuse de m'en excuser.

Je voulais simplement faire cette mise au point, madame la présidente. J'avais la possibilité de rester à Ottawa. Comme je l'ai dit tout à l'heure, bien que je me ressente encore du décalage horaire et de mon vaccin contre la grippe, je considère qu'une mauvaise journée en Colombie-Britannique en vaut quatre bonnes à Ottawa.

M. Jim Gouk: J'accepte ces excuses.

Des voix: Ah, ah!

M. John O'Reilly: Ce ne sont pas des excuses, c'est la vérité.

Merci beaucoup à nos témoins. Je m'intéresse beaucoup ces deux points de vue contradictoires. Évidemment, tout changement suscite une opposition.

Je suis agent immobilier depuis 30 ans. Moi non plus, je n'aime pas le changement. On a modifié toute la réglementation de l'immobilier. Comme vous le savez, avec un peu de chance, je n'y reviendrai jamais, mais peut-être devrai-je y retourner.

Je tiens à vous remercier de m'avoir permis de venir en Colombie-Britannique. C'est une magnifique province, dont vous avez tout lieu d'être très fiers.

À propos, je vais voter pour cet accord.

Merci.

La présidente: Avant de donner la parole au prochain intervenant, M. Keddy, j'en profite pour préciser que n'importe qui, aussi bien un témoin qu'une personne dans la salle, peut à tout moment envoyer au greffier son opinion sur le traité.

Nous avons déjà commencé à recevoir des mémoires, et j'imagine que nous en recevons d'autres. Il faut que vous sachiez que ce comité a été envoyé par la Chambre des communes pour tenir dans une courte période, des audiences dans cinq endroits différents de la Colombie-Britannique.

• 1815

Je tiens aussi à préciser qu'au moment où nous avons reçu ce mandat, nous n'avions pas de budget de déplacements. Pour obtenir un budget de déplacements, il faut avoir des témoins. Le comité s'est réuni immédiatement après avoir été informé de cette consultation et a constitué une liste de témoins potentiels. Nous avons tenu deux séances consécutives, puis nous avons consulté notre comité directeur. La semaine dernière, la Chambre ne siégeait pas et nous étions tous dans nos circonscriptions respectives; les greffiers ont profité de cette semaine de relâche pour contacter les témoins éventuels. Nous nous sommes réunis ici après un préavis très court et après avoir constitué notre liste de témoins pour obtenir le budget nécessaire à notre voyage en Colombie-Britannique.

Le comité a dû déployer des efforts considérables pour se rendre ici hier et nous sommes très reconnaissants à nos témoins de bien vouloir prolonger la séance en soirée pour nous faire part de leurs points de vue. Nous pensons qu'il s'agit là d'un exercice utile, qui va se poursuivre toute la semaine. Et nous espérons aussi qu'à partir de demain, le temps se mettra de la partie.

Monsieur Copes, vous voulez intervenir.

M. Parzival Copes: Madame la présidente, je voudrais signaler au comité parlementaire que pour cette séance, j'ai préparé un mémoire qui va être traduit et distribué. Au verso du document, vous trouverez un certain nombre de références à d'autres documents que j'ai rédigés. J'en ai laissé certains exemplaires au greffier, et vous serez en mesure de les consulter.

La présidente: Monsieur Copes, si vous voulez nous remettre vos documents...

M. Parzival Copes: C'est déjà fait.

La présidente: Parfait. Nous allons les faire traduire. Vous n'avez pas à vous occupez de la traduction.

Monsieur Keddy, vous avez cinq minutes.

M. Gerald Keddy: Merci, madame la présidente.

Il reste quelques thèmes à aborder. J'ai l'impression que nous tournons en rond, et j'ai encore plusieurs choses à dire. Je ne suis pas certain de ce qu'en pensent nos témoins et je vais donc essayer de resserrer le débat.

Tout d'abord, je ne suis pas d'accord avec M. Eidsvik lorsqu'il dit que tout cela est déjà consacré dans la Constitution. C'est une belle figure de style, mais en réalité, ce traité n'est pas protégé. Il ne fait pas partie de la Constitution du Canada; il est protégé par la Constitution du Canada, ce qui est bien différent.

Certains éléments de ce traité doivent être modifiés avec le consentement de deux des parties, tandis que d'autres ne peuvent être modifiés qu'avec le consentement de trois parties. On n'a pas besoin de rallier l'adhésion de huit provinces de notre pays pour convenir d'un changement à apporter au traité. Il y a une grande différence entre une chose qui fait partie de la Constitution et une chose qui est protégée par elle. Nous avons tous des droits qui sont protégés par la Constitution.

L'autre question est celle des pêches fondée sur la race. Ce commentaire m'a un peu surpris.

Dans l'ensemble du pays, mais particulièrement sur la côte Est, nous avons des pêches où certaines communautés sont parfois sureprésentées. Par exemple, sur la côte Est, il arrive que quelques individus accaparent un volume considérable du TPA. Une personne détient à elle seule 39 p. 100 du TPA de pétoncles en pêche hauturière, et pourtant, personne ne peut dire que la pêche fondée sur les droits de cette personne ou sur sa race.

Je suis d'accord avec vous pour dire que si le TPA de saumon est attribué intégralement à la Nation nishga, on aura peut-être une pêche fondée sur la race. En réalité, une partie de la pêche est attribuée à un groupe.

J'ai déjà dit qu'en réalité, 26 ou 27 p. 100 du TPA, cela pourrait représenter des volumes importants, mais il se peut aussi que ce soit 26 ou 27 p. 100 de rien. Ce pourcentage n'existe que si l'on s'occupe bien de la ressource, si l'on permet la reproduction, le retour à l'océan, si les poissons ne sont pas interceptés en Alaska et s'ils peuvent faire leur montaison pour se reproduire.

• 1820

J'ai écouté les arguments de part et d'autre, et je pense que si le gouvernement fédéral affirme très clairement dans le cas où certains permis ne peuvent pas être utilisés et dans le cas où on supprime le permis à un non-Autochtone, cette personne devrait être indemnisée—et j'en reviens à ce que je disais tout à l'heure—la procédure devrait être considérée différemment et celui qui perd son gagne-pain ou qui perd le permis qu'il détient actuellement devra être indemnisé.

Est-ce que je simplifie à l'excès?

M. Phillip Eidsvik: Sur ce point, vous avez raison. Lorsqu'on modifie l'attribution des ressources, quelle que soit la façon de procéder, on va pénaliser quelqu'un. On pratique déjà trop la pêche. Les pêcheurs actuels ne devraient pas avoir à supporter la dette de tous les Canadiens envers les Nishgas. Il est injuste de désigner les pêcheurs de la côte nord-ouest de la Colombie-Britannique en leur disant «maintenant, c'est à vous de payer».

Vous avez donc raison sur ce principe, mais j'ai toujours du mal à admettre que si on accorde 25 p. 100 aux Nishgas, ce ne sera pas fait selon un critère racial...

M. Gerald Keddy: Ce que je veux dire, c'est que ce n'est pas plus racial que dans le cas d'une seule personne qui détient 39 p. 100 du TPA de palourdes en haute mer. Ce n'est pas plus racial qu'une pêche que je pourrais citer dans la circonscription de la rive sud, où on a dépassé le nombre des permis de pêche au homard, ou celle qui compte cinq chalutiers hauturiers.

Il y a une multitude d'intérêts dans les pêches qui appartiennent à des groupes ou à des particuliers, et nous ne disons pas que c'est mauvais. Je regarde le traité nishga et je me dis: bon, d'accord, il se trouve que 26 p. 100 du TPA appartient à la Nation nishga. Je ne considère pas que la pêche est répartie en fonction de la race.

M. Phillip Eidsvik: Je crois que nous ne sommes pas tout à fait du même avis. Je tiens à vous signaler qu'il y a cinq autres groupes autochtones qui revendiquent le saumon de la Nass. Le premier à avoir conclu un traité a maintenant 26 p. 100 du TPA.

Prenons par exemple James Walkus, ce chef autochtone de Port Hardy qui avait 18 senneurs avant le rachat. J'ignore quel est le nombre définitif.

Je ne dis pas qu'il a un intérêt fondé sur la race parce qu'il possède 18 senneurs. Pas du tout. Il a acheté ses senneurs sur le marché libre. S'il me dit un jour: «Phil, je veux que tu m'achètes mon bateau», je peux l'acheter. Je n'ai pas besoin d'être admis dans sa bande pour aller pêcher avec ce bateau-là et prendre la part du contingent qu'il aura négocié. Voilà la différence.

Ce serait la même chose si vous disiez que, parce suite de la décision Marshall, nous allons donner aux Micmacs et aux Malecites 50 p. 100 du TPA et qu'ils pourront pêcher les jours où ils voudront pêcher. Les cris de protestation ne tarderaient pas à se faire entendre sur toute la côte Est. Si vous appliquiez le principe consacré par le traité nishga aux pêches de la côte Est, je crois que vous verriez que cela ne marcherait pas.

M. Gerald Keddy: Je suis bien conscient des détails de la décision Marshall et de ses conséquences. C'est une question d'importance pour la côte Est et nous ne l'avons pas encore réglée. Je crois toutefois qu'elle se soldera par un changement dans le secteur des pêches.

Les pêcheurs en sont conscients. Ils demandent deux choses, ces pêcheurs du secteur commercial. D'abord—et je ne veux pas m'écarter du sujet qui nous occupe—, ils demandent que tout accroissement de la pêche se fasse à l'intérieur des limites du contingent approuvé et que l'on rachète aux pêcheurs commerciaux les permis qu'ils sont prêts à vendre, mais que personne ne soit obligé de vendre son permis de pêche.

Il est d'ores et déjà acquis—et cette conviction est fort répandue—que la décision entraînera un changement dans le secteur des pêches de la côte Est. Il se peut que la bataille se poursuive devant les tribunaux et que le cheminement pour en arriver à un règlement soit long et ardu, mais il ne fait aucun doute que le secteur des pêches va changer.

Le changement ne se produira pas facilement et ne se fera pas du jour au lendemain, mais l'important selon moi, c'est de s'assurer que personne n'ait à en subir de conséquences néfastes. Si un pêcheur décide de quitter le secteur, il devrait être dédommagé ainsi que pour son permis de pêche. Il ne s'agit donc pas d'accroître le TPA parce qu'il y a plus de pêcheurs. Il faut plutôt intégrer les nouveaux dans le secteur existant. La ressource est limitée, et elle existe à cause des efforts de conservation, attribuables principalement à l'action du MPO de concert avec les pêcheurs commerciaux.

• 1825

La question qui nous occupe ici est distincte. J'essaie d'en éliminer la dimension raciale, qui à mon avis nuit au débat.

M. Philipp Eidsvik: La différence, c'est qu'on accorde 26 p. 100 à une Nation nishga. Cette part de la pêche est accordée aux Nishgas aux termes d'un accord protégé par la Constitution. Personne d'autre ne peut y avoir accès à moins que les Nishgas ne décident de s'en départir. Leur part ne fait pas partie du domaine public, comme c'est le cas pour tout le reste.

M. Gerald Keddy: En quel sens les Nishgas ne font-ils pas partie du domaine public? Ils en font partie. Ils font partie du pays qu'on appelle le Canada. L'argent qu'ils gagnent n'est pas englouti dans un trou noir pour ne jamais en ressortir. Ils contribuent à la richesse générale du pays. Il y a des biens qui sont achetés et vendus, que ce soit à Terrace ou ailleurs. Tout le monde fait partie de ce grand organisme, si vous voulez, qu'on appelle l'économie du pays.

La présidente: Nous allons conclure là-dessus. Vous avez dépassé vos cinq minutes.

M. Iftody sera notre dernier intervenant aujourd'hui.

M. David Iftody (Provencher, Lib.): Merci beaucoup. Et j'ai cinq minutes?

La présidente: Vous avez cinq minutes.

M. David Iftody: J'espérais que vous m'en accorderiez 30 puisque j'ai attendu si patiemment.

La présidente: Non, vous n'avez que cinq minutes.

M. David Iftody: Je tiens à m'expliquer publiquement et aussi pour la gouverne de M. Eidsvik.

Je ne suis pas de l'Ontario. Je suis un Canadien de l'Ouest—vous n'allez pas m'en tenir rigueur, n'est-ce pas?—et je représente les agriculteurs de ma région, principalement du sud du Manitoba. Mon grand-père est venu ici comme immigrant, comme le vôtre d'ailleurs, même si je ne suis pas toujours d'accord avec votre façon d'interpréter l'histoire, qui abonderait selon vous d'aberrations fondées sur la race.

La majorité des électeurs que je représente sont des Mennonites qui sont venus ici, soit avec la première vague d'immigration en 1974, soit avec la deuxième au début du siècle. Ils sont venus au Canada à certaines conditions. Par exemple, ils refusaient de porter des armes ou de faire la guerre. Ces conditions ont été acceptées pour des raisons—ah!—d'origine ethnique et raciale. Ils tenaient à avoir des écoles séparées à cause de leurs croyances religieuses chrétiennes. Ils ne voulaient pas être intégrés au système scolaire régulier, et cette condition aussi a été acceptée, pour quelle raison, sans doute à cause de leur origine raciale. Fait intéressant, ils ont prospéré au Canada et ils comptent parmi ceux qui ont apporté une contribution des plus dynamiques à notre pays. Un des membres du Parti réformiste est d'ailleurs de ce nombre. M. Epp est d'origine mennonite, et c'est ainsi que les siens en sont venus à faire partie du Canada.

Je ne suis pas du tout d'accord avec vous non plus, monsieur, quant à la façon dont d'après vous notre histoire et notre Constitution ont été façonnées—la relation avec la Couronne britannique, la négociation des traités, le traité de Paris, signé en même temps que le traité MacKay, etc. Je crois que vous avez une bonne connaissance des dossiers en cause dans l'optique de vos intérêts, et vous avez bien su nous présenter votre point de vue, mais je trouve que vous présentez vos préoccupations dans le cadre d'une vision fort étroite de l'histoire canadienne, de notre société, de nos lois, de notre Constitution et des rapports entre nos divers peuples.

On ne m'a pas amené ici de force. Mon ministre aurait d'ailleurs préféré que je reste chez moi. J'aime venir en Colombie-Britannique. C'est une magnifique province, on y trouve des gens formidables, certains des plus admirables du Canada. J'ai beaucoup d'amis ici, monsieur. Je ne fais pas partie d'une bande démoniaque venue arracher quelque chose aux braves gens de la région de Terrace, comme vous voulez le laisser entendre. J'ai d'ailleurs été un peu froissé par vos propos à ce sujet. Vous les trouvez peut-être justifiés politiquement étant donné vos intérêts, mais je ne suis certainement pas de cet avis. Je tiens à le dire publiquement pour que vous en soyez bien conscient.

La question que je veux poser s'adresse en fait à certains des autres témoins qui attendent là très patiemment depuis, il me semble, plusieurs heures. Je voulais demander à certains d'entre eux de nous dire ce qu'ils pensent du tableau pessimiste qu'on nous a brossé. M. Eidsvik a dit, par exemple, que nous serons perdus, que le ciel va s'effondrer si le traité est signé, que les malheurs s'abattront sur ceux qui travaillent dans le secteur des pêches. Je ne sais pas comment il fait pour en arriver à ces conclusions. Nous avons parlé de divers droits de pêche, et il continue à revenir à la question de la race, espérant peut-être ainsi provoquer l'affrontement et à des querelles émotives et troublantes entre les gens.

• 1830

Je voudrais me reporter au paragraphe 33 du chapitre 8, qui porte sur les pêches. D'après mon interprétation, de manière générale, s'il n'y a pas de pêche commerciale non nishga, les Nishgas ne sont pas autorisés à pêcher non plus. Ce qui nous guide de manière générale c'est que nous souhaitons tous favoriser la conservation et servir l'intérêt de tous les braves gens de cette région, Autochtones ou non-Autochtones.

Je veux vous en faire lecture, si vous le permettez. Le paragraphe 33 énonce que:

    Si dans toute année, il n'y a aucune récolte dirigée dans les pêches commerciales ou récréatives canadienne d'une espèce de saumon de la Nass, la vente de cette espèce de saumon de la Nass récoltée dans les récoltes dirigées de cette espèce dans les pêches nishgas de cette année n'est pas permise.

Doit-on y voir une volonté d'en arriver à un juste milieu? Je veux savoir si j'interprète bien ce paragraphe en pensant que les rédacteurs cherchent essentiellement à en arriver à un compromis à des fins de conservation. Quand une partie ne pêche, l'autre ne pêche pas non plus.

Je voudrais commencer par M. English, puis le professeur Copes pourrait aussi me dire ce qu'il en pense.

La présidente: Vous avez la parole, monsieur English.

M. Karl English: Pendant le long processus qui a abouti à l'accord, il a beaucoup été question de la façon d'éviter les conflits relatifs aux types d'engins. La préoccupation de beaucoup de pêcheurs du Fraser qui a été abordée à la table de négociation, par les négociateurs fédéraux et provinciaux—ce n'est pas comme s'ils n'y avaient pas été représentés—tenait au fait qu'ils ne voulaient pas que les Nishgas puissent se livrer à des activités de pêche commerciale alors même que les autres étaient amarrés au quai—c'était là leur inquiétude, c'est pourquoi cette disposition a été incluse dans l'accord.

Les Nishgas ne s'imaginaient pas qu'il y aurait sans doute bien des cas où, pour permettre une gestion efficace de la ressource, les autres seraient amarrés au quai. Il n'y a effectivement pas de cas dans l'histoire récente de fermeture de la pêche dans la Nass. L'expérience des dernières années dans le Fraser suscite toutefois de vives inquiétudes maintenant, et c'est ce qui explique qu'on ait prévu une disposition expresse à cet égard. Les Nishgas ne pourront pas vendre le poisson qu'ils sont autorisés à prendre si la population générale des pêcheurs commerciaux qui détiennent un permis de pêche commerciale au Canada ne peuvent pas vendre ni cibler ces mêmes stocks.

M. David Iftody: Aux termes de ce chapitre, il n'y a donc pas eu d'avantages secrètement négociés en fonction de la race pour donner aux pêcheurs des Premières nations un avantage injuste. Si donc les autres pêcheurs sont amarrés au quai, la corde bien entortillée autour de leurs jambes, les Indiens n'iront pas prendre tous les poissons. C'est ce que dit cette disposition. N'est-ce pas?

M. Karl English: C'est juste. Dans la pratique, à cause du lieu où s'effectuent les activités de pêche, il faut que les poissons échappent aux engins des autres pêcheurs, de sorte qu'on veut éviter que les Premières nations ne se retrouvent toujours en bout de ligne et n'aient droit qu'aux restes des autres pêcheurs. L'idée est d'essayer de planifier les activités de pêche de chaque groupe pour qu'ils puissent pêcher, non pas tous au même endroit au même moment, mais d'une façon ordonnée tout au long de la saison, pour que chacun ait son tour à essayer d'attraper les poissons quand ils apparaissent. Si les nombres sont trop petits pour que nous ayons une pêche commerciale dirigée des stocks de la région de la Nass, les Nishgas continueront à pêcher si les poissons ne sont pas trop petits, mais ils ne pourront vendre aucun des poissons qu'ils auront ainsi pêché aux termes du traité. Ils pourront ramener le poisson chez eux—le nombre sera très petit; pour le sockeye, je crois qu'il s'agit de moins de 20 000 poissons, alors qu'ils en attrapent actuellement bien au-delà de 35 000 à 55 000 par an—et ils pourront en nourrir leurs familles comme ils le font depuis des milliers d'années, mais ils ne pourront pas vendre le poisson, si les pêcheurs commerciaux ne peuvent pas le vendre non plus.

M. David Iftody: Madame la présidente, je voudrais profiter du temps de parole qu'il me reste pour poser une question au professeur Copes.

Il est toujours difficile de poser des questions de ce genre, parce qu'il s'agit d'intention, de motivation, etc, éléments qu'il est toujours difficiles de décrire. On risque de froisser les gens, même si ce n'est pas du tout ce que je veux faire ici.

• 1835

Dans les propos que vous avez tenus sur l'Accord, si je vous ai bien compris, vous avez semblé laisser entendre à notre comité, pour notre gouverne et aux fins de la rédaction de notre rapport qui doit être déposé au Parlement à l'étape de la troisième lecture, que tout le monde était gagnant, dans l'ensemble. Vous êtes professeur et vous vous y connaissez dans ce domaine, contrairement à moi, vous avez une compréhension approfondie de toute la question de la conservation; si les intérêts de la population de la Colombie-Britannique sont décrits ici de manière générale, s'ils sont protégés pour la plupart de manière certaine, la certitude étant au nombre de ces intérêts je suis perplexe. Nous avons entendu les autres témoins nous expliquer en des termes assez émotifs les raisons qui les amènent à s'opposer à l'Accord, nous les avons entendus décrire le problème en invoquant la question de la race et en disant que nous sommes perdus—j'ai noté certains des adjectifs qu'ils ont utilisés.

Pouvez-vous m'aider et aider les membres de notre comité à déterminer peut-être ce que craignent, à votre avis, les membres du groupe qui sont à côté de vous? Pourquoi cela leur pose-t-il un problème si les faits laissent entendre dans le traité, et que d'autres disent, que ce sera une situation gagnante? En d'autres termes, qu'est-ce qui suscite réellement le débat?

M. Parzival Copes: Il me fera plaisir de répondre à ces questions. Je le ferai en deux parties. Tout d'abord, je pense que le problème c'est qu'on a mal compris et également mal répondu aux questions concernant la pêche autochtone sur le bas Fraser. J'ai moi aussi des critiques sévères à l'égard de la façon dont on a abordé ces questions.

Ce que nous avons constaté—et je pense que c'est pour cette raison que l'on critique le fait que les Autochtones ont la permission de pêcher alors que d'autres ne l'ont pas—c'est qu'à la suite de l'arrêt Sparrow, qui a déterminé que les peuples autochtones avaient le droit de pêcher à des fins alimentaires, sociales et rituelles, le ministère des Pêches et des Océans a dû prendre des dispositions pour rendre la chose possible. Ce qui est malheureux, c'est que bien que les tribus autochtones aient toujours pratiquer la pêche, particulièrement sur les grands réseaux fluviaux, à des fins alimentaires—la pêche alimentaire existait déjà—le problème c'est que cela n'était pas quantifié. Si on veut avoir une bonne gestion des pêches, il faut être en mesure de dire quelle quantité de poisson sera pêchée et qu'à un certain moment donné il faudra fermer la pêche parce qu'il y a suffisamment d'échappements.

Donc, dans l'arrêt Sparrow, lorsque la Cour suprême dit qu'on devrait donner davantage de possibilités aux peuples autochtones pour pêcher à des fins alimentaires, sociales et rituelles, le problème consiste à déterminer combien de poissons cela représente, jusqu'à quel point il est possible de pêcher. Les Autochtones disent qu'ils ont besoin d'une plus grande quantité de poisson à des fins alimentaires et rituelles. On s'est demandé s'ils pouvaient vendre les poissons qu'ils pêchaient à des fins alimentaires, sociales et rituelles. Dans de nombreux cas, la Cour suprême a dit qu'ils ne pouvaient pas le vendre, mais dans certains cas si c'était quelque chose d'inhérent à leur culture, s'ils le faisaient par le passé, s'ils faisaient le commerce du poisson avec des tribus avoisinantes, etc., alors ils pouvaient vendre le poisson pêché à des fins alimentaires.

On a présenté à ce moment-là l'affaire Gladstone, mais très souvent il est difficile pour les Autochtones de prouver qu'ils le faisaient par le passé, car il n'y a pas beaucoup de preuves historiques écrites. Dans l'affaire Gladstone, il y en avait, car lorsque Mackenzie est arrivé sur la côte Ouest lors de son périple dans tout le Canada, il a décrit dans son journal la pêche, le commerce de la pêche des oeufs de hareng sur algue, de sorte qu'on avait donc des preuves historiques à cet effet. Delgamuukw changera peut-être quelque chose en ce sens que l'histoire orale sera peut-être dorénavant également acceptée.

• 1840

Voilà donc le problème qu'avait le ministère des Pêches et Océans. La pêche autochtone ne pouvait être limitée à une quantité précise de poisson.

Pour résoudre ce problème, le MPO a dit aux tribus du bas Fraser qu'il allait leur donner une allocation assez généreuse pour la pêche alimentaire, mais qu'elles devaient accepter de se limiter à cette quantité, mais pour que les choses soient plus intéressantes pour les tribus, le MPO leur permettait de décider si elles voulaient garder ou vendre le poisson. Cela a donc incité bon nombre de tribus à signer. Elles pouvaient donc pêcher une telle quantité de poisson et pas plus, cette pêche serait une pêche alimentaire mais elles pouvaient en faire ce qu'elles voulaient.

Naturellement, d'autres pêcheurs voyant ce qui se passait, que la pêche alimentaire avait la priorité...

M. David Iftody: Je sais que l'on s'apprête à m'interrompre. Si je pouvais résumer...

M. Parzival Copes: Permettez-moi de passer à la question la plus importante.

La présidente: Excusez-moi. Je pense que vous avez tous les deux terminé en ce qui concerne cette question. Nous avons légèrement dépassé le temps qui nous était alloué.

Je vais maintenant remercier tous les témoins d'être venus ici aujourd'hui et d'être restés. Vous avez tous contribué au débat.

Je voudrais par ailleurs remercier tous les membres du public de la région qui sont venus ici aujourd'hui écouter ce que nos témoins avaient à nous dire.

Pour ce qui est de demain matin, je voudrais aviser notre comité que notre avion a maintenant atterri à Terrace et que ce sera à notre pilote de décider si nous pouvons ou non décoller demain. Si cela n'est pas possible, d'autres dispositions seront prises pour que nous nous rendions à Smithers demain. Nos greffiers nous en informeront aussitôt qu'ils le sauront.

Merci beaucoup. La séance est levée. Nous reprendrons demain à Smithers.