SINS Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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SUB-COMMITTEE ON THE STUDY OF SPORT IN CANADA OF THE STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE
SOUS-COMITÉ SUR L'ÉTUDE DU SPORT AU CANADA DU COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 5 mai 1998
[Traduction]
Le président (M. Dennis J. Mills (Broadview—Greenwood, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs.
Je rappelle aux membres du comité que nous allons rencontrer des avocats spécialistes du commerce le mardi 12 mai prochain. Ce matin-là, nous discuterons de l'ALENA. Nous accueillerons un avocat du ministère des Affaires étrangères qui nous expliquera la position du gouvernement, c'est-à-dire que l'ALENA ne s'applique pas au sport professionnel et particulièrement aux équipes de la Ligue nationale de hockey. Un autre avocat, auteur du livre Navigating NAFTA, se joindra à nous. Selon lui, il est évident qu'il y a lieu pour le Canada de contester aux termes de l'ALENA.
Bonjour monsieur Brochu et bienvenue à notre comité qui fait l'analyse de l'industrie du sport et des liens entre le sport et la création d'emplois dans le pays. Nous vous remercions d'avoir pris le temps de préparer un mémoire. Nous vous sommes d'ailleurs reconnaissants de nous l'avoir envoyé à l'avance. Vous avez maintenant la parole.
M. Claude R. Brochu, (président, Expos de Montréal): Merci beaucoup de me donner l'occasion de venir vous rencontrer.
[Français]
Bonjour, mesdames et messieurs.
[Traduction]
Bonjour, mesdames et messieurs.
[Français]
Je vous donnerai d'abord un aperçu de mes fonctions. Je suis le commandité des actionnaires de la société en commandite Baseball Montréal. Je suis le président du Club de baseball Montréal Inc. Je suis membre du bureau de la Ligue nationale, du conseil exécutif du baseball majeur, et j'ai été élu, avec trois autres propriétaires de la Ligue nationale, pour diriger le baseball. Je pense être le premier Canadien à faire partie de ce groupe depuis qu'existe le baseball majeur.
J'aimerais commencer par vous brosser un tableau de la situation des Expos. Les amateurs de baseball savent qu'on célèbre cette année le 30e anniversaire des Expos. Nous détenons la première franchise à être octroyée par le baseball majeur à l'extérieur des États-Unis.
Bien que nous ayons été le premier club majeur, le baseball professionnel à Montréal est quand même centenaire. Selon les petites études historiques que j'ai pu faire, il y aurait eu du baseball professionnel à Montréal dès la fin des années 1880. Je pense qu'en 1900, Montréal avait gagné un championnat, au niveau de la Ligue internationale, en tant que club professionnel.
Montréal a vécu aussi des années extrêmement emballantes dans le domaine du baseball au cours des décennies 1940 et 1950. Vous savez qu'en 1946, Jackie Robinson était venu jouer à Montréal. Cela constitue, selon moi, un événement historique, parce que Jackie Robinson a été le premier Noir à évoluer au niveau professionnel. Il a joué d'abord pour les Royaux et est monté en grade l'année suivante, quand il est allé jouer pour les Dodgers de Brooklyn. Montréal a connu des années vraiment extraordinaires dans le domaine du baseball. Pendant les 22 premières années d'existence du club, le propriétaire principal en était M. Charles Bronfman. M. Bronfman a quitté les Expos en 1991. C'est à ce moment que nous avons fait l'achat du club. En fait, j'avais 14 partenaires. Le premier acétate, qui est un peu difficile à voir, en fait état dans un premier tableau. Vous l'avez également dans votre copie du mémoire.
• 0910
Les 14 partenaires sont la ville de Montréal, neuf
sociétés ou compagnies canadiennes et montréalaises et
quatre individus. Ce sont eux qui ont fait l'achat du
club en 1991, pour la somme de 104 millions de dollars.
L'engagement de ce groupe-là correspondait essentiellement à un geste de civisme: on voulait que le club demeure à Montréal. La situation était que le club avait tout simplement été mis en vente. On avait dit à plusieurs reprises que jamais on n'aurait les moyens, à Montréal, de faire l'achat du club et qu'il déménagerait. Dans les médias, on annonçait chaque semaine que le club allait déménager dans une des villes des États-Unis. On nous a fait déménager souvent à Buffalo, à Orlando, enfin dans plusieurs villes. Mais nous avons réussi à demeurer à Montréal.
Je peux vous dire que parmi les sociétés qui composent cette liste, sociétés qui sont quand même importantes, aucune n'avait pour objectif ou but stratégique d'être propriétaire d'un club de baseball. Je me souviens d'être allé rencontrer Raymond Cyr, qui était à l'époque le président du conseil de BCE, avec un de mes collègues, Jacques Ménard. Ensemble nous avons vraiment établi le partenariat. M. Cyr m'a tout simplement dit qu'il était important que les Expos demeurent à Montréal. Il a fait un don de 5 millions de dollars afin que le club puisse rester à Montréal, en précisant bien qu'il s'agissait d'un don. Il nous a dit aussi de ne plus jamais venir le voir pour obtenir de l'argent et que ce qu'il faisait là était un geste de civisme pur et simple.
Essentiellement, l'approche des autres société a été en général la même. Elles ne voulaient absolument pas se trouver dans la situation où on leur ferait constamment des demandes, ce qu'on appelle communément des cash calls, pour soutenir et maintenir le club en vie. Il était donc certain qu'il nous fallait nous débrouiller avec les moyens de l'époque, qui sont les mêmes aujourd'hui.
L'organisation des Expos de Montréal est parmi les plus respectées dans le monde du baseball. Je parle de l'organisation dans son ensemble, pas seulement au point de vue du jeu. Nous avons été nommés l'organisation de l'année pour le baseball en 1990, en 1993 et en 1996. C'est la meilleure organisation parmi les 28 équipes. Nous avons été nommés l'équipe de l'année au Canada en 1994. L'année dernière, nous avons été proclamés l'équipe la plus proche de ses partisans par USFANS.
Compte tenu de notre situation, nos ressources financières sont très modestes. En fait, on ne nous définit même pas comme un petit marché, mais comme un micromarché. Cela a été dit par des journalistes de Milwaukee, ville que j'ai toujours considérée comme un petit marché.
Cela a toujours exigé de notre part une gestion très rigoureuse, surtout du côté des dépenses. Nous devons être très innovateurs. Donc, il nous a fallu beaucoup travailler, que ce soit au niveau du service d'accueil, au niveau du stade, au niveau des finances ou au niveau du marketing. Il nous a toujours fallu être très précis, très justes.
Même si la moyenne des salaires dans le baseball majeur est de 1,25 million de dollars US, il ne nous a jamais été possible de payer cela. Nous n'en avons jamais eu les moyens. La moyenne de nos salaires, cette année, est davantage de l'ordre de 368 000 $. Mais nous avons la chance d'avoir le meilleur gérant et une des meilleures organisations au niveau de la formation et du dépistage, et nous avons toujours eu un club performant.
Cette année est un peu une année difficile, je le comprends bien. Mais on s'aperçoit que depuis 1992, au cours des six dernières années, le club a eu la cinquième meilleure fiche au niveau de la performance dans l'ensemble du baseball. C'est dire qu'il n'y a que les gros clubs d'Atlanta, de New York, de Cleveland et de Baltimore qui ont mieux performé que nous, qui ont remporté plus de victoires que nous.
Vous me permettrez de passer un commentaire sur la prochaine diapositive, que je trouve toujours intéressante. C'est comme si on se donnait une petite tape dans le dos. Si on compare le nombre de victoires que le club est capable d'aller chercher aux millions de dollars investis, nous sommes deux fois meilleurs que la moyenne de l'industrie et beaucoup plus performants que le club qui nous suit, les Padres.
• 0915
On a réussi à survivre en tant que club de peine et de
misère. Nous n'avons aucune marge
d'erreur. On a réussi jusqu'à maintenant, mais je vous avoue qu'on
commence à être un petit peu essoufflés. C'est très
difficile parce que chaque année, le club perd ses
joueurs vedettes. En 1994, on a bâti un club qui était
probablement le meilleur club de baseball de la
décennie, à mon avis.
Si on regarde la performance des joueurs qui jouaient pour nous en 1994, on voit qu'ils sont allés chercher des honneurs absolument extraordinaires ailleurs, avec d'autres équipes. En 1996, on a rebâti un club qui a concurrencé jusqu'à la toute dernière semaine de la saison. Bien que 70 p. 100 de nos partisans appuient notre style de gestion, certains d'entre eux sont quand même découragés.
L'organisation trouve cela très difficile aussi. Vous savez, bâtir quelque chose et être obligé de le démolir et de le refaire année après année, c'est extrêmement difficile pour ceux qui nous suivent et qui nous ont à coeur et, bien sûr, pour l'organisation. Donc, pour garder mon club et mon organisation ensemble, à la fin de l'année dernière, quand on a laissé partir Pedro Martinez, qui avait gagné le trophée Cy Young à titre de meilleur lanceur de la Ligue nationale et d'autres, j'ai promis à mon organisation de rebâtir, mais pour la dernière fois.
C'est une promesse que j'ai faite. J'ai dit: On va rebâtir notre club, un club qui va être concurrentiel, et j'espère gagner la série mondiale. J'espère qu'on sera capables de le faire à Montréal, mais si on ne le fait pas à Montréal, on le fera ailleurs. Pour garder tout le monde, il a fallu que je fasse cela. Je considère que c'est une promesse importante pour moi.
Les Expos ont aussi joué un rôle important dans l'instauration d'un système de péréquation aux États-Unis dans le baseball majeur. C'est un système canadien qu'on connaît très bien, et je vous avoue que, lors des négociations et des discussions qu'on a eues dans l'ensemble du baseball, dans certains cas, c'était un peu unamerican. Mais on a réussi à établir un système de péréquation en 1995.
Le système de péréquation est très simple: les plus gros clubs aident les plus petits. C'est tout à fait normal. L'année dernière, par exemple, les plus gros clubs du baseball majeur ont transféré aux plus petits 65 millions de dollars US, ce qui est quand même important. C'est un montant qui va beaucoup augmenter au cours des prochaines années. En tant que club, cela représentait pour nous, l'année dernière, 9 millions de dollars qui ont été transférés des États-Unis. Cette année, 13 millions de dollars seront transférés.
Je vous avoue en toute honnêteté que c'est un montant insuffisant pour qu'on puisse vraiment compétitionner, mais c'est un départ. J'ai l'impression que l'ensemble du baseball va encore se pencher sur le système de péréquation et qu'on pourra avoir des montants plus importants au cours des prochaines années.
Un autre élément très important, c'est qu'on partage à parts égales tous les contrats de télévision et de radio nationales, les droits de marque et les promotions aux États-Unis. Vous savez qu'il y a très peu de participation canadienne dans ce contexte. Bien sûr, au réseau Fox, au réseau NBC ou au réseau ESPN, on s'intéresse fort peu à la télédiffusion des matchs des Expos aux États-Unis. Ils se concentrent plus sur les grosses villes pour avoir les cotes d'écoute qu'ils doivent aller chercher.
Mais nous recevons notre quote-part à part égale. Ce sont des montants importants parce que les contrats américains au niveau du baseball sont très gros. L'année dernière, 51 p. 100 de nos revenus en tant que club venaient des États-Unis. Plus de la moitié de nos revenus venaient des États-Unis. C'est vraiment extraordinaire. C'est de l'argent qui nous est versé à Montréal. Cette année, ce chiffre sera probablement de l'ordre de 60 p. 100. C'est quand même assez considérable. J'y reviendrai un peu plus tard, quand on parlera de l'impact économique. Il est évident que si 60 p. 100 de nos revenus viennent de l'extérieur, ce n'est quand même pas neutre.
• 0920
Permettez-moi un petit à-côté, parce que je
pense que c'est quelque chose qui doit
être fait dans le contexte du baseball. Le
sport est extrêmement important dans la vie des gens.
Au Québec, sept personnes sur 10 suivent le
sport professionnel. Il n'y a pas grand-chose qui est
autant suivi. Sept personnes sur 10 suivent
le hockey, et je peux vous dire que six personnes sur
10 suivent le baseball. Donc, il ne faut pas
dire qu'on est une société qui
ne suit qu'un sport, le hockey. Le baseball est
très suivi.
Regardez le tableau et vous verrez que c'est assez simple. L'année dernière, le baseball avait en moyenne un auditoire radio deux fois et demie supérieur à celui du hockey. Au niveau de la télévision, à SRC et surtout à TQS, si on tient compte du fait que le baseball se joue l'été, à un moment où il y a 20 p. 100 de moins d'auditoire qui regarde la télévision pour des raisons qui sont évidentes, on voit que le baseball, au niveau de la portée, équivaut pas mal au hockey. Au niveau du baseball, il y a, les soirs de match, plus d'un million de téléspectateurs qui regardent les Expos à SRC ou à TQS. C'est quand même considérable.
Le baseball majeur—je pense que tout le monde est au courant, mais je vais quand même vous en expliquer le détail—compte 30 clubs dans 28 villes d'Amérique du Nord. Il y a deux ligues. Nous avons de la chance en ce sens que la Ligue nationale a son club à Montréal et que la Ligue américaine a son club à Toronto.
Le baseball professionnel, bien sûr, a des problèmes. Je considère que le plus gros problème est celui de l'équilibre compétitif. Il faut s'assurer que toutes les villes puissent avoir une chance de gagner. C'est un problème qu'on doit résoudre en ce moment. On va trouver une solution. Mais le baseball professionnel est quand même le sport le plus fréquenté de l'Amérique du Nord.
L'année dernière, dans le baseball majeur, il y a eu 63 millions de spectateurs et cette année, il y aura probablement plus de 70 millions de spectateurs en Amérique du Nord. C'est gros. C'est le sport nord-américain.
Bien que certaines mauvaises langues disent que le sport a des problèmes, que le baseball a des problèmes énormes, je peux vous dire que selon les sondages qu'on fait régulièrement aux États-Unis et au Canada, le niveau de satisfaction du partisan du baseball est de 75 p. 100. C'est important. Cela m'indique que les problèmes qu'on a vécus, surtout en 1994 et 1995 avec la grève, se sont pas mal atténués.
Donc, la compétition est nord-américaine. Le baseball majeur compte des joueurs qui viennent de 17 pays du monde. Je peux vous dire que les Expos ont des joueurs qui viennent de 10 pays. Il faut comprendre que le baseball est un sport un peu différent des autres. Voici ce qui se passe quand on va chercher un amateur au niveau du repêchage. Il y a une formation qui doit se faire sur une période normale de 10 ans avant de pouvoir accéder aux ligues majeures. Bien sûr, on a un club majeur à Montréal, mais on a aussi sept clubs professionnels mineurs au Canada, aux États-Unis et en République dominicaine. Cela représente presque 200 athlètes professionnels qui sont en formation pour le club majeur.
Je vous ai mentionné qu'un de nos avantages à Montréal, en tant que club, c'est que puisqu'on est dans une compétition nord-américaine, on est un partenaire égal avec les autres clubs. Nous partageons à parts égales. C'est merveilleux, cela! Mais il y a aussi certains désavantages. Essentiellement, l'échelle salariale est nord-américaine. C'est-à-dire qu'un joueur qui évolue à New York avec certaines qualités doit être payé au même salaire à Montréal. C'est comme cela que les choses fonctionnent. Donc, ce n'est pas une compétition qui est normale. Un plombier à New York gagne probablement plus cher qu'un plombier à Montréal. Mais cela n'est pas le cas au baseball. L'échelle est nationale.
• 0925
Ce qui est un peu exceptionnel et parfois même
troublant,
c'est que c'est le contraire de ce qui se passe dans
toutes
les business traditionnelles.
Le système est tel qu'au niveau du
baseball et du sport en général, si un
propriétaire pose un geste imbécile et accorde un
salaire non raisonnable à un joueur, il n'est pas
puni, mais le problème qu'il vient
de causer devient le problème de l'ensemble du sport.
C'est un élément avec lequel on doit vivre, mais il
faut comprendre que c'est
difficile à contrôler.
J'aimerais vous décrire l'évolution de l'industrie et vous parler un peu des salaires, des revenus et des coûts autres que le salaire des joueurs. Le premier tableau trace l'évolution depuis 1989. La ligne rouge est celle de la moyenne des clubs. Ce sont les revenus moyens d'un club de baseball. Le tracé du bas représente les Expos de Montréal. En 1989, nous étions à 10 millions de dollars de la moyenne des revenus du baseball. Aujourd'hui, l'écart est de plus de 34 millions de dollars. Donc, il y a eu une croissance importante au niveau des revenus en général. Chez les Expos, il n'y a presque pas eu de croissance au niveau des revenus. Le deuxième tableau trace l'évolution des salaires au niveau du baseball majeur et de la moyenne. En 1989, notre moyenne était égale à la moyenne de l'industrie. Aujourd'hui, l'écart entre notre moyenne et celle de l'industrie est de l'ordre de 33,6 millions de dollars. C'est énorme. Nous avons connu une décroissance au niveau de la moyenne salariale, alors que celle de l'ensemble du baseball a augmenté de près de 200 p. 100.
Les salaires de cette année sont indiqués au troisième tableau. Cette année, les Orioles de Baltimore ont des salaires de 70 millions de dollars et les Expos de Montréal ont une masse salariale de 9,2 millions de dollars. C'est un écart absolument extraordinaire. Ça devient assez difficile.
L'autre tableau indique les coûts du club et de la moyenne de l'industrie, excluant les salaires des joueurs. Encore une fois, vous voyez qu'il y a une croissance au niveau de l'ensemble de l'industrie. Les Expos se sont maintenus, en ce qui a trait à leurs dépenses, à leur niveau de 1989.
On fait face une situation impossible en tant que club. Où s'en va l'industrie? Qu'est-ce qui arrive dans ce contexte-là?
Nous avons dû être très disciplinés, très réalistes et surtout bien comprendre dans quelle direction l'industrie s'en va et ce que nous venons faire dans ce contexte-là
Il nous a fallu faire une projection de l'industrie pour les cinq et dix prochaines années. Nous devons être sûrs de notre affaire. Il ne fallait pas voir la vie en rose et voir ce qu'on espère arriver.
Le prochain tableau indique ce que sera l'évolution du baseball et du sport selon nous, les Expos. De 1996 à 2002, on s'attend à ce que les revenus doublent. C'est la ligne rouge que vous voyez sur le tableau. Entre 55 et 60 p. 100 des revenus sont alloués au salaire des joueurs. On s'attend à ce que les salaires doublent d'ici l'an 2002. C'est frustrant. On voit cela et on se dit que cela n'a pas de sens, mais c'est une réalité. Mais si on veut faire partie de cette communauté-là, c'est une chose avec laquelle il faut vivre.
• 0930
Vous savez que c'est difficile pour un club
comme les Expos de Montréal. Nous sommes un club
communautaire. Certains clubs qui sont dans le sport
sont là pour différentes
raisons. Pour certains, cela représente de la
programmation importante. Le club
s'associe à un réseau de télévision, une
superstation. Il y a par exemple WTBS, une
superstation, avec les
Braves d'Atlanta. C'est
60 millions de foyers aux États-Unis; c'est 500
heures de programmation par année. C'est
le club qui a permis à l'empire de Ted Turner de se
bâtir.
On s'aperçoit maintenant que
Disney est aussi devenu propriétaire pour sa
programmation. À Chicago, avec les Cubs, c'est la
Tribune Company qui est propriétaire avec WGN.
Il y a toutes sortes de clubs qui deviennent très gros et très puissants, mais il reste encore, surtout dans de petites villes, des clubs communautaires qui doivent essayer de compétitionner avec ces gros clubs.
Il faut se demander ce qui cause cette flambée de salaires et de revenus. Si on fait des projections au niveau de la croissance de la télévision, au niveau national et au niveau local, on voit qu'il y aura une certaine croissance, mais le gros de la croissance dans le sport et dans le baseball majeur se fera au niveau local. La raison principale, ce sont les nouveaux parcs de baseball.
En ce moment, l'ensemble de l'Amérique du Nord est en train de refaire son infrastructure sportive. Sur le prochain tableau, vous voyez qu'il y a 18 nouveaux parcs de baseball qui viennent d'être construits ou qui vont être construits au cours des deux, trois ou quatre prochaines années en Amérique du Nord. J'ai lu il y a quelques mois dans le Boston Globe que dans l'ensemble du sport, il y a 44 nouveaux parcs, arénas ou amphithéâtres qui se construisent dans l'ensemble de l'Amérique du Nord.
Donc, c'est une réalité. Il faut s'assurer de pouvoir composer avec cela. Bien sûr, dans la situation dans laquelle on vit, on regarde les projections pour les cinq ou dix prochaines années. Je puis vous dire que la première réaction de mes partenaires a été de dire: «Il faut sortir. Il faut vendre ce club-là. Il faut le vendre aux États-Unis le plus rapidement possible pour qu'on puisse éliminer toute la problématique qui s'en vient.»
Mais avant de faire cela, on s'est dit: «Soyons sûrs de notre affaire. Prenons le temps de réfléchir et de bien comprendre.»
[Traduction]
L'une des choses qu'il m'apparaît très important de faire comprendre aux gens de notre milieu, aux journalistes des médias, aux dirigeants politiques et à nos partisans, c'est que nous n'avons pas d'entrée de jeu décidé qu'il nous fallait faire l'acquisition d'un nouveau stade. Ce n'est absolument pas le cas. Bien au contraire. Nous étions enclins à vendre plutôt qu'à bâtir. Nous avons dû nous poser la question suivante: pouvons-nous espérer des revenus raisonnables et avoir une équipe de base-ball compétitive si nous prenons des mesures pour redresser la situation et si, comme l'idée commençait à germer, nous construisons un nouveau stade au centre-ville?
Il y a là une nuance importante car nous ne sommes pas un club de base-ball qui essaie de justifier par tous les moyens la construction d'un stade. Sur le plan commercial, la meilleure décision serait sans doute de vendre; nous l'admettons. Mais nous pensons que le jeu en vaut la chandelle. Pouvons-nous trouver un moyen de survivre compte tenu de tout ce qui se passe dans cette industrie?
Évidemment, tout comme l'aurait fait n'importe quel homme d'affaires intelligent, la première chose que nous avons faite a été de mener une étude de marché. Nous avons donc interrogé les Montréalais et nous leur avons posé la question suivante: y aurait- il une hausse du nombre de spectateurs si nous restions au Stade olympique et si nous essayions de créer une équipe de base-ball gagnante, si nous essayions de faire du Stade olympique un endroit plus agréable, plus convivial, ou si nous construisions un nouveau stade au centre-ville, un stade de gazon naturel en plein air, petit et intime?
• 0935
Nous avons fait une étude approfondie. En fait, il y a eu
trois sondages sur une période de deux ans. Nous avons interrogé
10 000 personnes. En politique, lorsqu'on a 1 000 répondants, on a
une assez bonne idée de l'opinion de la population. Nous, nous
avons sondé 10 000 personnes.
Ce fut pour moi une révélation car je dois vous dire que je m'inquiétais. Je me suis toujours inquiété au sujet de Montréal car on nous répète constamment que Montréal n'est pas une ville de base-ball, uniquement une ville de hockey, et que c'est ce qui explique les difficultés de l'équipe. À la suite de ces sondages, il m'est apparu clairement que si nous déménagions au centre-ville, nous attirerions une clientèle que nous n'avons jamais eue à Montréal. Nous irions chercher de nouveaux partisans.
Essentiellement, cela signifie que le nombre de billets de saison y compris ceux vendus aux entreprises, passerait de 6 000 qu'il était à l'époque, en 1996, à 18 000. Notre clientèle régulière nous suivrait là-bas, ce qui signifie qu'au centre-ville, on pourrait aller chercher 200 000, 250 000 ou 300 000 employés du centre-ville. Ces derniers seraient disposés à acheter des billets et à assister aux matchs au stade du centre-ville. À mes yeux, cela représentait un changement important.
Évidemment, nous sommes aussi très conscients que le base-ball est sans doute le sport le plus populaire de tous. Il arrive que 63 millions de personnes regardent un match. Le base-ball est un sport familial. Il doit demeurer abordable. Cela tient à la nature du jeu.
Vous pouvez venir voir les Expos cette année, si vous voulez. Une famille de quatre peut assister à un match et obtenir une très bonne place dans les gradins pour 20 $. Ce n'est pas cher, personne ne peut dire que c'est cher. Le base-ball est accessible; c'est une de ses caractéristiques. Au cours de la saison régulière, les matchs attirent environ 14 000 personnes qui achètent un billet. Nous n'affichons pas le plus grand nombre de spectateurs, mais nous avons de fidèles partisans. Cela est plutôt exceptionnel. On ne voit pas cela dans un autre sport. Il est très important pour nous que les choses restent ainsi. Alors même que nous envisageons la construction d'un nouveau stade, nous voulons faire en sorte que les Expos demeurent très abordables.
Je peux vous le dire tout de suite. Nous savons d'ores et déjà que si nous construisons un stade au centre-ville de Montréal, il y aura environ 11 000 sièges disponibles à 10 $. Ce sera dans trois ans et ces prix seront en vigueur pendant un bon bout de temps après cela—et il s'agit de bons sièges.
Notre étude de marché nous a convaincus que Montréal est effectivement une ville de base-ball. Au centre-ville, avec l'appui du milieu des affaires, nous pourrions réussir. Nous aurions des assises solides et des revenus qui nous permettraient d'être compétitifs.
Nous avons ensuite commandé des études sur l'incidence économique d'un tel stade, encore une fois comme tout bon homme d'affaires l'aurait fait. Nous avons procédé quelque peu différemment. Des tas d'entreprises font faire des études d'incidence économique. C'est normal. Que l'on veuille agrandir une usine, se lancer en affaires ou prendre toute autre initiative de nature commerciale, il convient de faire faire une étude sur les retombées économiques.
C'est ce que nous avons fait. Nous avons demandé à la firme Ernst & Young de faire une étude pour nous. Nous avons fait appel à des spécialistes de leur bureau de Chicago, car nous voulions que l'étude soit très rigoureuse. Ensuite, nous avons pris cette étude et nous l'avons soumise à la firme Raymond, Chabot, Martin et Paré en leur demandant de la valider, de la vérifier, en fonction du modèle économique du Québec.
Il y a aussi eu une troisième étape. En effet, nous savons ce que donnent les études économiques. Elles créent des guerres de chiffres: ce facteur n'est pas important; non, ce n'est pas là le nombre d'emplois créés; ce ne sont pas ces retombées qui se manifesteront; ce ne sont pas ces montants qui iront dans les coffres du gouvernement... On finit par s'obstiner sur des chiffres. En guise d'étape finale, nous avons soumis notre étude, en détail avec toutes les hypothèses, au ministère des Finances du Québec et nous avons demandé aux fonctionnaires de valider ces chiffres. Nous voulions savoir si nos projections étaient raisonnables, si nos données étaient acceptables aux yeux du ministère des Finances et du gouvernement.
Tout a été passé en revue. Il y a eu des discussions et les fonctionnaires sont arrivés à la conclusion que nos chiffres étaient acceptables. Ils étaient prêts à les accepter. Vous aurez remarqué qu'au Québec chaque fois que j'ai apporté dans le débat des données économiques, il n'y a pas eu de réfutation ou de contestation de la part du gouvernement du Québec. Ces chiffres sont acceptables. Les chiffres qui figurent dans le mémoire sont des chiffres dont je tire beaucoup de satisfaction.
• 0940
Au premier niveau, vous pouvez voir une comparaison entre les
chiffres de 1996 et ceux découlant de la présence d'un nouveau
stade de base-ball au centre-ville en 2001 ou 2002.
Essentiellement, tout est là.
Premièrement, pour ce qui est du produit intérieur brut, les 105 millions de dollars de retombées économiques actuelles passeraient à 180 millions de dollars.
Sur le plan de l'emploi, il faut comprendre qu'au Stade olympique, pour ceux d'entre vous qui le fréquentent, nous employons beaucoup de monde, particulièrement des étudiants à la fois le jour d'un match et au cours de la saison régulière. À l'occasion d'un match, on compte jusqu'à 2 000 employés, la plupart des jeunes. Il y a aussi de nombreux retraités qui veulent un travail d'appoint pour arrondir leur revenu. Cela représente une source d'emploi très intéressante. En équivalent à temps plein, cela représente 1 252 emplois. Au nouveau stade, ce chiffre grimperait à un peu plus de 2 000.
À l'heure actuelle, les recettes fiscales générées par le club de base-ball se chiffrent à 23 millions de dollars pour le gouvernement provincial et 20 millions de dollars pour le gouvernement fédéral. Ces recettes passeraient à 41 millions de dollars pour le gouvernement provincial et à 36 millions de dollars pour le gouvernement fédéral. Il est évident que le principal bénéficiaire des Expos est le gouvernement.
La planche suivante est également importante. Elle porte sur l'argument que j'ai avancé tout à l'heure. Dans les discussions que nous avons eues à l'origine avec les gens du ministère des Finances... J'ai déjà eu ce genre de discussions dans le passé. Il est très facile de dire qu'un club de base-ball a un effet neutre sur l'économie en ce sens que si l'argent que les gens dépensent pour les Expos n'était pas dépensé dans ce domaine, il serait dépensé dans un autre. Par conséquent, cela a un effet neutre sur l'économie.
Comme je vous l'ai dit tout à l'heure—et cela est expliqué en détail ici—deux grandes raisons font que ce n'est pas le cas et ce, dans une perspective économique facilement quantifiable.
Premièrement, comme je vous l'ai déjà expliqué, nous sommes un partenaire égal dans la ligue de base-ball, de sorte que nous recevons une part égale des recettes des droits de télévision, grâce à un système d'équilibrage. Plus de la moitié de nos revenus proviennent des États-Unis et si les Expos n'étaient pas ici, à Montréal, les revenus en question échapperaient à la ville.
Deuxièmement, comme nous savions que c'est une question importante et qu'elle serait soulevée, nous avons pris le temps d'identifier nos partisans au Stade olympique, même si nous le faisons pratiquement tous les ans. L'année dernière, 11 p. 100 de nos partisans provenaient de l'extérieur de la province de Québec; pour deux sur trois de ces touristes, le base-ball est la principale raison de leur visite à Montréal. Il y a, bien entendu, des gens qui viennent d'Ottawa, de Plattsburg ou de Burlington pour un seul match, qui achètent leur billet, une bière, un ou deux hot-dogs et qui rentrent chez eux. C'est vrai. Mais bon nombre de spectateurs—et cela aussi est quantifiable—passeront une, deux ou trois nuitées à Montréal. Certains visiteront la province pendant une dizaine de jours.
Or, c'est essentiellement le base-ball qui les a attirés. Cela a une valeur et c'est ce que nous avons indiqué également. Pour ce qui est des dépenses touristiques, je pense que nous avons été plutôt prudents lorsque nous avons aligné les chiffres. L'an dernier, elles auraient représenté plus de 22 millions de dollars et je crois qu'avec un nouveau stade, elles s'établiraient approximativement à 36 millions de dollars.
D'autres facteurs sont difficilement quantifiables. Ainsi, on ne peut dénombrer le nombre de Québécois qui, par amour du base-ball, partent de Montréal pour assister à un match à Boston ou à Toronto.
Certains d'entre vous ont peut-être eu la chance d'être à Toronto lorsque Montréal a affronté les Blue Jays pendant trois ou quatre jours à l'occasion du week-end de la Fête du Canada. J'y étais. J'ai vécu intensément cette expérience. J'ai vu les lanceurs Jeff Juden et Roger Clemens se livrer bataille au cours d'un match de base-ball classique. Nous avons remporté la victoire, ce qui m'a rendu fort heureux, mais toute l'ambiance était formidable. Le Skydome était rempli à craquer. La moitié des partisans encourageaient les Expos et l'autre moitié les Blue Jays. C'était tout à fait incroyable.
Nous avons parlé à des tas de gens dans les estrades et je suis convaincu que 10 000 des 40 000 spectateurs étaient venus de Montréal. Ils étaient là pour encourager les Expos et ce, par amour du base-ball.
• 0945
Il est impossible de quantifier cela dans une perspective
économique. On ne peut chiffrer un tel phénomène, mais il existe.
C'est précisément ce qui se passerait. C'est un facteur de
l'équation économique qu'on ne peut mesurer, mais croyez-moi, il
existe bel et bien. Il suffit de se rendre à un stade et
d'interroger les partisans sur leurs lieux d'origine pour
comprendre que le phénomène est tout à fait réel.
Nous avons également évalué un troisième élément, soit la construction. Si nous construisons un stade, il en découlera des avantages économiques. Cela va de soi. Si nous ne le construisons pas, cet avantage ne se matérialisera pas.
La construction du stade en soi, qui s'étalera sur une période de trois ans, créerait près de 2 800 emplois. Elle fournira au gouvernement du Québec et à Revenu Canada des recettes fiscales de l'ordre de 37 et 22 millions de dollars respectivement. L'incidence sur notre produit intérieur brut sera d'environ 180 millions de dollars.
Nous avons ensuite abordé un domaine qui est sans aucun doute un peu plus difficile à quantifier, mais qui est tout aussi important que l'incidence économique. Nous avons effectué des études urbaines. Nous avons demandé à une firme très réputée, l'Institut national de recherche scientifique de Montréal, de faire des études approfondies pour nous. Évidemment, la Chambre de commerce de Montréal a elle aussi effectué ses propres études.
La Chambre de commerce a demandé à ses comités de développement urbain, du logement et du tourisme de faire leurs propres études indépendantes. Chacun a étudié le projet d'un stade au centre-ville de son propre point de vue. On a examiné le projet sous l'angle de son influence sur le tissu urbain de Montréal et l'industrie touristique. Ensemble, les membres de ces divers comités ont constitué un comité mixte qui s'est réuni à maintes reprises pendant plusieurs mois.
Je peux vous dire que le comité de la Chambre de commerce appuie sans réserve le projet des Expos pour les raisons suivantes. Le départ des Expos affaiblirait la réputation de Montréal et nuirait au climat socio-économique et à la qualité de ses produits touristiques. À leur avis, le fait que les Expos déménagent au centre-ville ne nuirait pas au Stade olympique. D'ailleurs, le Comité des installations olympiques est du même avis. En fait, cela risque d'être avantageux pour le Stade olympique qui pourrait aller chercher des revenus supplémentaires.
Leur conclusion, c'est que les Expos génèrent des retombées économiques pour Montréal. Le déménagement des Expos dans un nouveau stade au centre-ville rehausserait l'intégration des produits touristiques liés au patrimoine de Montréal ainsi qu'aux manifestations de la culture, du sport et du divertissement qui ont lieu près du Vieux-Port, dans le Vieux-Montréal et près du canal Lachine, ainsi qu'à d'autres lieux culturels, comme la Place des Arts.
La création d'un nouveau complexe sportif dans le centre-ville de Montréal, complexe qui comprendrait le Centre Molson et le stade proposé, stimulerait la revitalisation et le redéveloppement urbain du centre-ville, en parallèle avec l'expansion du Centre des congrès de Montréal, le développement de la Cité internationale, l'École de technologie supérieure, le réaménagement du Faubourg des Récollets, ainsi que les travaux menés le long du canal Lachine dans le cadre de ce que Montréal appelle son plan bleu et vert.
L'Institut national de recherche scientifique, l'INRS, a également effectué une étude sérieuse à notre intention. Encore là, si les membres du comité le souhaitent, je pourrai leur faire parvenir cette excellente étude. L'Institut voulait étudier les répercussions socioculturelles d'un nouveau stade pour les Expos à Montréal. C'est une très bonne étude. Ses auteurs ont cerné les questions entourant le débat sur le stade. Ils ont étudié l'incidence du tourisme urbain et des sports professionnels à Montréal sur notre identité culturelle. Évidemment, ils ont accordé une attention particulière au secteur sud-ouest de Montréal, là où nous souhaitons implanter le stade.
Je ne peux rendre justice à ce rapport en quelques mots, mais après avoir passé en revue toute la documentation et le débat, ses auteurs sont arrivés à la conclusion que le débat sur les stades et le sport professionnel est dominé par une poignée de chercheurs universitaires américains qui sont convaincus que l'investissement public dans de nouveaux stades urbains n'est pas rentable.
• 0950
Nous les connaissons. Ils sont au nombre de cinq: Robert A.
Baade, Roger Knoll, Benjamin Okner, James Quirk et Mark S.
Rosentraup. Ce sont cinq chercheurs qui moussent continuellement
leurs projets d'étude ou leurs opinions, lesquelles sont reprises
par des économistes à l'échelle internationale.
Mais l'INRS considère leurs arguments incomplets car ils sont essentiellement fondés sur les avantages économiques directs générés par un stade sur les plans de l'emploi, des revenus et des profits immédiats. Il ne faut pas oublier les nombreux avantages indirects, que ce soit dans le domaine du tourisme ou de la vente au détail. Ce peut être quelque chose d'aussi simple qu'une augmentation de la valeur des propriétés pour une municipalité, surtout si l'on stimule la croissance dans un secteur qui ne produisait pas tellement de recettes fiscales. À mon avis, tout cela est quantifiable.
Je vais vous lire une citation de Mark Rosentraup, qui critique volontiers l'intervention publique pour ce genre d'installation:
-
Dans une société qui accorde une valeur aussi extraordinaire aux
sports, dans quelle mesure les villes qui n'ont pas de franchise
sportive des ligues majeures souffrent-elles? Est-ce qu'une ville
qui n'a pas d'équipe attitrée devient une communauté de seconde,
troisième ou quatrième catégorie?
Toute communauté ou ville de notre société qui souhaite devenir un grand centre doit également se forger et entretenir une identité sportive. Et c'est grâce à leurs équipes et à leurs installations que les villes réussissent à se créer une telle identité. Nous savons que les gens choisissent la ville où ils souhaitent vivre sur la base de facteurs tels que les coûts, l'infrastructure, les transports, l'énergie et les possibilités d'éducation. Nous savons également que lorsque les cadres d'une compagnie choisissent de s'installer quelque part, ils recherchent une haute qualité de vie pour leurs employés et pour eux-mêmes.
L'absence de musées, d'orchestres, d'établissements scolaires de qualité, peut retarder le développement économique d'une ville car ce sont des attributs auxquels les gens tiennent beaucoup. Les gens veulent également pouvoir assister à des manifestations sportives car celles-ci constituent une partie importante de leur vie. Dans la société nord-américaine, une ville a besoin des sports pour devenir un centre de développement important.
[Français]
L'INRS est arrivé à des conclusions au niveau de ses recherches: pour eux, le futur parc des Expos est appelé à devenir un axe de développement important qui favorisera l'expansion du centre-ville de Montréal. Il contribuera également à la relance socio-économique du secteur de Griffintown en favorisant la création de nouveaux commerces et établissements. Le stade est appelé à devenir un lieu de rassemblement majeur. Le nouveau parc contribuera à la qualité de vie des citoyens et ajoutera un caractère festif qui distingue Montréal sur la scène touristique internationale.
Un nouveau parc augmentera le rayonnement de Montréal sur le continent et contribuera à confirmer son statut de grande ville nord-américaine. Il existe une rentabilité sociale et culturelle à la présence d'un stade au centre-ville qui ne peut être quantifiée avec des paramètres économiques et financiers classiques. Ce sont des éléments qualitatifs qui ne sont pas chiffrables: les vertus civiques, la portée symbolique, le sentiment de fierté collective, la contribution à la qualité de la vie locale, le pouvoir d'attraction, l'image internationale et combien d'autres bénéfices indirects.
L'INRS dit très clairement qu'il n'accepte pas que l'on dise que la ville de Québec n'a rien perdu avec le départ des Nordiques et que Denver n'a rien acquis avec l'acquisition de l'Avalanche. Ce n'est pas acceptable.
On s'est penché en dernier lieu, parce que c'est un élément qui n'est souvent pas quantifiable, mais qu'on a essayé de quantifier, sur la visibilité. Que représente pour une ville comme Montréal le fait d'avoir un club international, nord-américain, au niveau de la présence dans les médias? Vous savez, j'ai été surpris, mais pas tellement, de constater qu'un club à Montréal nous donne, pour la ville, plus d'un milliard de mentions en Amérique du Nord. Montréal est mentionnée comme étant une ville de baseball.
• 0955
Il y a 10 000 postes de radio, 1 800 journaux et
des milliers de postes de télévision, et
tout le monde parle du sport de façon quotidienne,
ce qui a un impact certain. Certaines personnes vont
dire que cela ne se vend pas, que ce n'est pas ça qui
fait vendre.
Vous savez qu'en publicité, il faut d'abord commencer par créer des impressions. En publicité, on dit souvent que 50 p. 100 des messages publicitaires sont gaspillés, mais il s'agit de savoir quels 50 p. 100 sont gaspillés. Plus on mentionne la ville, plus cela devient crédible. Cela fait partie d'un mind set qui se crée en Amérique du Nord.
Le meilleur exemple que je puisse vous donner est celui de l'année dernière, quand Tiger Woods est venu visiter Montréal pour la première fois. On a demandé à Tiger Woods ce qu'il connaissait de Montréal. Il a souri un petit peu et il a dit que les Canadiens jouaient à Montréal, que les Expos jouaient à Montréal et qu'il y faisait très froid l'hiver. C'était ce qu'il savait sur Montréal. Vous voyez un athlète très connu qui véhicule ce genre de choses. C'est la réalité. Notre image, qu'on le veuille ou non, est véhiculée en Amérique du Nord par les sportifs.
Toutes ces informations ont été extrêmement révélatrices pour moi. Il est vrai que, pour régler nos problèmes une fois pour toutes, la décision d'affaires serait probablement de vendre le club. Mais nous sommes prêts, en tant que partenaires, à prendre le risque et à rester à Montréal. Nous voulons rester à Montréal. Il faut qu'on reste à Montréal, moyennant certaines conditions, bien sûr.
Nous avons choisi de nous orienter vers le projet d'un nouveau parc de baseball au centre-ville de Montréal. C'est un projet de 250 millions de dollars et je suis convaincu—j'espère que je vais vous faire réfléchir là-dessus—que l'avenir du baseball majeur à Montréal passe par la construction d'un nouveau parc au centre-ville.
Nous sommes arrivés à la conclusion qu'on peut produire des équipes gagnantes et atteindre la stabilité financière avec un nouveau parc de 35 000 places à ciel ouvert, avec une surface de gazon naturel, situé au centre-ville de Montréal.
Son financement doit prendre la forme d'un partenariat collectif réunissant tous les intervenants des différents secteurs d'activités. On a d'abord pris la communauté des affaires au mot. Au niveau d'une relocalisation, elle est prête à appuyer le club. On s'est dit qu'elle devait d'abord s'impliquer et on a demandé à la communauté d'affaires de fournir les premiers 100 millions de dollars pour la construction du stade. Cela va se faire par l'entremise de l'achat de sièges et de droits qui y sont rattachés.
Notre objectif est de vendre au milieu d'affaires de la ville de Montréal 18 000 fauteuils. Nous vendons essentiellement les droits de ces fauteuils. Cela commence à 500 $ et va jusqu'à 10 000 $. Le message est très simple: à une petite société qui veut appuyer le club et devenir membre fondateur du club, on demande huit versements de 63 $ sur quatre ans. Mon message à la communauté des affaires est très clair, parce que je pense qu'il n'y a pas une compagnie qui n'a pas les moyens de faire cela.
Aux plus grosses sociétés, bien sûr, on essaie de vendre des fauteuils pour 10 000 $. Cet argent va nous aider à trouver les premiers 100 millions de dollars dont nous avons besoin pour la construction. Les 150 millions de dollars manquants nécessiteront la participation des gouvernements sous une forme qui sera à déterminer.
Le présent groupe d'actionnaires s'engage à laisser le club en place et à demeurer à Montréal pendant les 25 prochaines années. Je peux vous dire qu'il n'y aura pas un gros rendement sur cet actif-là.
Compte tenu de la situation financière actuelle, je pense qu'il faut essayer de trouver—et en fait, on tente désespérément de trouver—des solutions pour garder le club à Montréal comme ce fut le cas en 1991.
• 1000
Nous sommes prêts à prendre le risque et, comme je l'ai
mentionné, à nous engager pour les 25 prochaines années,
mais pas à n'importe quel prix. Il est clair que le
club ne peut assumer aucune forme de financement du
service de la dette avec le nouveau parc. Mais nous
disons cela depuis le début. Ça fait un an qu'on essaie
de faire passer ce message. On ne pourra pas non
plus supporter de lourdes taxes financières à Montréal.
Vous savez que les Expos sont nettement désavantagés par rapport aux clubs américains. Je pense qu'il y a eu des témoignages à ce sujet lorsque la Ligue nationale est venue. Je n'ai pas besoin d'insister sur ces choses, mais il est certain qu'en tant que club, nous ne pouvons pas concurrencer des clubs qui bénéficient d'un financement public. Dans le baseball, je peux vous dire que depuis 1989, 80 p. 100 des stades qui ont été construits, et je devrais même dire tous les stades qui ont été construits, ont été financés à 80 p. 100 par des fonds publics.
On ne peut pas non plus concurrencer au niveau des taxes foncières ni des taxes de consommation. Pour nous, à cause de la TVQ et de la TPS, il y a un écart de 10 à 12 p. 100 avec la moyenne des villes américaines. On ne peut pas non plus concurrencer, aux États-Unis, l'absence de taxes dans plusieurs autres cas, sans parler de la différence des taux de change.
Il est donc très clair pour nous, bien qu'on n'ait pas encore vraiment défini la forme d'aide dont on va avoir besoin, qu'il est impératif d'en venir à des solutions qui seront acceptables tant pour les gouvernements que pour les contribuables et les Expos. Nous avons trouvé quelques solutions en Amérique du Nord. Ça se fait. On n'est pas plus fous que les autres. Si on s'y met, on est capables de trouver des solutions. Nous comprenons aussi très bien que dans le contexte économique et financier dans lequel nous vivons, les subventions directes ne sont probablement pas acceptables. C'est une chose que nous acceptons très bien, mais il y a des solutions. Je pense qu'il faut que nous prenions le temps, qu'on soit calmes, qu'on raisonne et qu'on aille en profondeur pour trouver les solutions.
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup, monsieur Brochu.
Je tiens à vous dire que notre comité a beau être là pour se familiariser avec les rapports qui existent entre le sport et la création d'emplois au niveau amateur et au niveau professionnel, et cela dans toutes les sphères sportives, tous les membres de ce comité, et beaucoup de députés au Parlement, sont particulièrement convaincus de la nécessité d'étudier toutes les possibilités de revitalisation économique de Montréal, car nous sommes tous très conscients, nous qui sommes les représentants de la nation au Parlement, des tribulations de cette ville au cours de ces dernières années. Je vous remercie beaucoup pour votre exposé.
Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur Brochu, je veux d'abord vous remercier pour les documents que vous nous avez remis ainsi que pour la présentation que vous nous avez faite. Même si ça peut étonner certaines personnes, je vous dirai qu'ayant été élevée à côté du stade des Royaux, je connais un peu la situation dans la joute de baseball: on entendait crier la foule de notre balcon quand on n'y allait pas.
J'ai trouvé très intéressante la présentation que vous nous avez faite. Malheureusement, il y a beaucoup de tableaux qu'il faudrait analyser en détail parce que nous n'avons eu les documents que ce matin. En vous écoutant, je me suis fait une réflexion que je voudrais partager avec vous avant de vous poser une question. J'ai eu l'impression que vous étiez dans la même situation que nos gouvernements, c'est-à-dire toujours en déficit. Quand les gouvernements sont en déficit année après année, leur solution est d'aller chercher de l'argent dans les poches des contribuables pour combler leurs trous. Mais ils oublient une chose, et c'est de contrôler les dépenses.
Vous nous présentez un tableau et je vais vous en donner le titre puisque, malheureusement, les pages ne sont pas numérotées. C'est celui qui a de belles couleurs vert foncé et vert pâle et qui donne l'impression d'être dans la forêt et dans l'espérance totale et absolue. C'est ce tableau qui indique où vos revenus vont augmenter.
• 1005
Vous nous dites que les revenus vont augmenter
considérablement d'ici 2002. Les salaires ont déjà
doublé entre 1990 et 1993, et ils vont doubler encore
d'ici 2002. D'ici quatre
ans, les salaires seront le double de ce qu'ils sont
présentement.
Si on pouvait annoncer à l'ensemble des Canadiens, des Canadiennes, des Québécois et des Québécoises que leurs maigres revenus, leur sécurité de revenu, leurs prestations de bien-être social ou d'assurance-emploi, ou le salaire moyen de ceux qui vivent sous le seuil de la pauvreté vont doubler d'ici quatre ans, je pense que la population serait contente. Mais on n'est pas en mesure de faire ces projections-là. Je suis un peu inquiète de voir comment on peut arriver à nourrir autant d'espoir dans une entreprise qui est incapable de contrôler ses dépenses.
Qu'est-ce que vous attendez pour contrôler et plafonner les salaires des joueurs? Vous nous dites que vous ne pouvez pas faire autrement et que les salaires vont doubler dans quatre ans. Je ne comprends pas comment vous pouvez à la fois venir nous dire que le salaire moyen au baseball est de 1 179 000 $US et qu'il sera de 2,2 millions de dollars dans quatre ans, et de nous demander sans rire de vous aider.
M. Claude Brochu: Madame Tremblay, je peux vous dire que moi je ne ris pas de cela; je ne trouve pas cela bien drôle. Je vous avoue que notre club ne sera jamais le genre à se permettre des vedettes à des prix fous. Mais essentiellement, le sport fait partie du show-business dans un sens, et c'est une situation qu'on ne peut pas contrôler.
À la fin des années 1980, un arbitre a prétendu que les propriétaires essayaient de contrôler les salaires des joueurs. On a jugé qu'il y avait eu collusion et on nous a infligé une amende de 300 millions de dollars aux États-Unis. On considère que ce marché est quand même un marché libre et on doit le laisser évoluer comme il se doit.
Si on ne regarde que cet élément-là, bien sûr, ça nous choque. Moi, ça me choque. Je ne le comprends pas et ça me frustre. Il ne faut toutefois pas s'attarder uniquement sur cet aspect. Oui, c'est un élément que je déplore et que je n'aime pas, mais de l'autre côté de la médaille, qu'est-ce que ça représente?
Essentiellement, si les revenus augmentent, les salaires augmentent, mais les salaires n'augmenteront pas si les revenus n'augmentent pas. Lorsqu'il y a augmentation, tout le monde vient y chercher sa quote-part: s'il y a plus de revenus, il y a plus d'emplois, et donc plus de recettes fiscales pour les gouvernements. S'il y a plus de revenus, cela a plus d'impact.
Je concède qu'il y a un élément négatif que je n'aime pas, mais de l'autre côté de la médaille, si on réussit à le faire, cela nous permettra d'augmenter, voire quasiment de doubler le nombre d'emplois et de doubler les recettes fiscales. Il y a tout de même certains avantages. Il ne faut pas oublier que les revenus des joueurs professionnels qui évoluent au Canada sont imposables à 40 p. 100, ce qui représente des montants assez importants.
Dans tout ce débat-là, il est important de bien comprendre l'équation. Selon moi, c'est une décision d'affaires. Il faut prendre le temps de regarder les bénéfices et les coûts et se demander si l'équation est positive ou négative. Si on fait une étude approfondie, si on comprend bien la situation et si on s'aperçoit que l'équation est négative, on dit non. Si on a tenu compte de tout l'aspect économique et de tout l'aspect social et qu'on considère que l'équation est négative, alors on dit: Non, on n'embarque pas dans votre projet, déménagez. Il n'y a pas de problème, on va très bien s'arranger.
Mais je pense que ce n'est pas le cas. Au fur et à mesure que j'avance dans ce dossier-là, je m'aperçois que les bénéfices sont absolument extraordinaires.
• 1010
Oui, je comprends que c'est difficile à avaler et qu'il
faut parfois avaler dur
au niveau des salaires des joueurs. Mais, comme
j'essayais de l'expliquer, à Montréal, c'est un
élément qu'on ne contrôle pas. Nous sommes
responsables, bien que les médias nous critiquent
souvent, disant que nous sommes cheap.
Nous ne versons pas de telles sommes d'argent et nous
avons toujours refusé de le
faire. On m'adresse régulièrement des critiques
personnelles sévères à cet effet. Nous continuerons à
vivre selon nos moyens. Je pense toutefois
que ce qu'on essaie de
faire est très bénéfique pour l'ensemble de la population.
Mme Suzanne Tremblay: Depuis que les Expos sont à Montréal, on ne peut quand même pas dire que les contribuables n'ont pas aidé à garder l'équipe. Vous savez aussi bien que moi que lorsqu'on parlait de construire le Stade olympique, les Expos demandaient qu'il y ait un toit parce qu'on devait reporter trop de joutes en raison du froid et parce qu'il neigeait parfois au mois d'avril. Ensuite, on nous a demandé de rapprocher les bancs, d'installer un écran géant et d'en venir à une entente relative au loyer que vous payez à la RIO. De plus, les gens qui achètent des loges ou des billets peuvent encore réclamer des déductions d'impôt de l'ordre de 50 p. 100, bien qu'il faille quand même reconnaître qu'elles étaient de 80 p. 100 auparavant. Ce n'est quand même pas rien.
Le coût du nouveau parc est évalué à 250 millions de dollars. Est-ce que cette somme comprend les infrastructures, l'eau, l'égout, l'accès routier, l'aménagement périphérique et paysager, et le raccordement au transport commun, s'il y a lieu? Serons-nous obligés de vous construire une station de métro et d'ajouter toutes ces choses-là aux 250 millions de dollars?
M. Claude Brochu: Vous m'avez posé de nombreuses questions auxquelles j'essaierai de répondre.
Je dois dire tout d'abord que lorsque la franchise a été octroyée à Montréal en 1968, le maire de l'époque, Jean Drapeau, avait promis à l'ensemble du baseball qu'on aurait un stade pour le baseball. Ça n'a pas fonctionné et on s'est ramassés au parc Jarry, qui était vraiment un parc des ligues mineures qu'on a réaménagé pour les Expos.
Mme Suzanne Tremblay: C'est très pratique avec 30 000 personnes.
M. Claude Brochu: Oui, je l'avoue. Mais cela fait partie de la nostalgie, que j'ai vécue moi aussi. On se souvient du parc Jarry au mois de juillet quand il faisait beau et que le soleil brillait dehors, mais on oublie le parc Jarry au mois d'avril et à la fin septembre, alors qu'on gelait comme des crottes. C'était moins drôle à ce moment-là, mais on oublie ça.
Je puis aussi vous dire qu'au niveau du Stade olympique, il n'y a pas eu de grandes consultations avec le club de baseball. C'était avant mon temps, mais je peux vous dire que ça n'a jamais été un stade bâti pour le baseball, et nos partisans nous le disent aujourd'hui. Il faut aussi comprendre que bien que nos relations soient très bonnes aujourd'hui, nos relations avec la Régie des installations olympiques ont déjà été assez difficiles. Elle a sa propre culture, plus fonctionnaire. C'est donc un peu différent. Autant la Régie était orientée vers les salons et les expositions, autant nous étions orientés vers le baseball.
Je conviens que certains investissements ont été faits. Mais, dans bien des cas, le club a eu le dos large. Il est facile de dire qu'on a fait ceci et cela pour le club, qu'on a bâti un écran pour nous et qu'on a avancé les fauteuils, mais je peux vous dire que la Régie en a profité pour se payer toutes sortes de changements au niveau de sa structure pour pouvoir accommoder ses salons et ses expositions.
Donc, si on construit une simple poutre pour y afficher ou y raccorder un tableau électronique et que par la suite on installe derrière toutes sortes d'aires d'exposition et que ce tableau, avec toutes ces nouvelles contraintes, finit par coûter cinq ou dix fois plus qu'il en aurait coûté pour monter un simple tableau, nous ne devrions quand même pas en être tenus responsables. Si on avance le terrain pour que ce soit mieux pour les partisans et qu'on décide aussi de faire tous les raccordements électriques et d'eau pour alimenter tous les kiosques lors des foires ou quoi que ce soit, ce n'est quand même pas nous qui sommes responsables.
Quant au bail avantageux dont vous parliez, je considère qu'on paie notre part.
• 1015
Bien que la Régie ne reconnaisse pas cela, je
considère que lorsqu'elle perçoit 10 $ par espace de
stationnement et qu'elle en vend 4 000 lors d'un événement de
baseball, ces 40 000$ représentent une forme de loyer.
Si cet événement de baseball n'avait pas lieu, elle
n'aurait pas ces revenus.
Et dans la mesure où de nombreux autres stades partout
en Amérique du Nord remettent ces revenus
à leurs clubs, je considère ça comme une forme de loyer.
Si on regarde tout l'ensemble de ces choses-là, y
compris les dépenses en immobilisation que nous
assumons pour les concessions alimentaires, tout ce qui
est bâti lors des événements non reliés au
baseball et tous les revenus qui sont
perçus et donnés à la Régie, je considère qu'on fait
notre part.
Nous ne croyons pas qu'il y aura grand-chose à faire au niveau de l'infrastructure lors de la construction du nouveau stade. On devra peut-être faire certains investissements au niveau de l'évacuation d'eau parce qu'on me dit que tout le système d'eau et les systèmes d'évacuation du bas de la ville sont très vieux et très désuets. Il est évident que l'affluence créée par le venue de 37 000 personnes au stade exigera certains ajustements, mais au niveau de l'accès aux autoroutes Bonaventure et Ville-Marie, je ne pense pas que grand-chose ait besoin d'être fait.
Je ne crois pas qu'il sera nécessaire de prolonger le métro parce que le baseball est plutôt un sport estival. Il fait généralement beau et chaud. On veut que les gens sortent dehors. Ils sortiront du métro au Centre Molson ou ailleurs et pourront descendre la rue Peel pour venir assister à un match. Je ne prévois pas qu'il y aura des coûts considérables au niveau de l'infrastructure.
Je pense que j'ai répondu à toutes les questions.
Mme Suzanne Tremblay: Oui, je reviendrai plus tard.
Le président: Thank you. Monsieur Coderre.
M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Merci, monsieur Brochu. Au niveau de la ville de Montréal, la seule grosse construction à l'heure actuelle est l'amélioration de l'autoroute Ville-Marie, comme on l'a vu ce matin. Il y a donc un problème sérieux. On ne doit pas se fermer à tout nouvel investissement et opposer une franchise professionnelle à la revitalisation de Montréal.
Je considère qu'étant donné que Montréal périclite, on n'a pas les moyens de perdre les Expos de Montréal, tout comme on n'a pas les moyens de perdre le Canadien de Montréal ou toute autre franchise professionnelle. C'est la première chose.
Deuxièmement, j'aimerais dire qu'il est exact qu'il y a des salaires exorbitants, mais étant un amateur de baseball, je remarque également qu'il n'y a pas nécessairement de lien direct entre une masse salariale très élevée et le nombre de victoires accumulées. Le fait qu'un club ait une masse salariale de 70 millions de dollars ne veut pas nécessairement dire qu'il va gagner la série mondiale. On se rappelle très bien qu'en 1994, s'il n'y avait pas eu la grève, avec la faible masse salariale qu'on avait au niveau des Expos, on aurait gagné cette série mondiale. J'en suis convaincu.
Maintenant, j'aimerais qu'on parle directement des revenus des Expos. J'ai posé la question à M. Corey la semaine dernière. Je lui ai demandé si, dans la mesure où on s'entend pour établir ce partenariat... Moi, je suis ouvert à ça. Je suis contre toute subvention directe, mais je suis ouvert à l'établissement d'un partenariat. Contrairement au Bloc québécois qui pense qu'on ne doit donner aucune aide directe ou indirecte, je crois qu'une franchise professionnelle a des impacts, protège les emplois, crée d'autres emplois et amène des revenus supplémentaires au gouvernement pour payer les programmes sociaux et le système de santé qu'on veut.
Est-ce que vous êtes prêts à ouvrir vos livres au gouvernement pour qu'on puisse regarder l'ensemble des dépenses et revenus en vue d'avoir le meilleur partenariat possible, dans un climat de transparence?
M. Claude Brochu: Pour répondre à votre question directement, oui. Vous savez que nous sommes une société privée, et j'ai toujours essayé d'éviter de dévoiler des chiffres de crainte qu'on se retrouve par la suite dans une polémique, dans une discussion qui n'a parfois ni queue ni tête.
Cela arrive souvent. Je l'ai vécu par le passé, lorsqu'on a eu des commissions, surtout aux États-Unis, avec le syndicat des joueurs et certains économistes pour savoir ce qu'on devait faire dans l'ensemble du baseball. Si les chiffres ne font pas l'affaire de quelqu'un, on les rejette par la suite.
Cela étant dit, je suis absolument prêt à vous dévoiler ces chiffres et à discuter avec vous du détail de nos états financiers, de nos bilans. C'est absolument sûr.
M. Denis Coderre: On a aussi beaucoup parlé de pacte fiscal. On a dit qu'il fallait essayer de trouver des moyens indirects parce que la taxation est beaucoup trop élevée. On peut parler de points d'impôt ou de toutes sortes d'autres choses. Qu'est-ce que vous envisagez comme possibilité de négociation avec le gouvernement fédéral?
Je sais que le site sur lequel vous voulez construire le nouveau stade appartient à Canada Land, donc au gouvernement canadien, et qu'il vaut 16 millions de dollars. Il y a aussi toute la question des taxes. Un sport comme la course de chevaux, par exemple, est exempte de TPS. Est-ce que ce serait une mesure envisageable? Dans le fond, il me semble que les Expos, qui sont une des organisations du baseball majeur, pratiquent un sport qui est tout à fait accessible. On ne peut pas dire que les billets soient trop chers. C'est un sport familial.
Vous nous avez aussi démontré clairement, à partir des études qui ont été faites, que 60 p. 100 des revenus d'une équipe viennent des États-Unis et que c'est de l'argent nouveau injecté dans la ville de Montréal.
Alors, quelles sont les mesures fiscales que vous envisagez de négocier?
M. Claude Brochu: Monsieur Coderre, vous me posez une question assez difficile. Je vous avoue en toute honnêteté qu'il me semble que vous êtes plus compétent que moi pour nous dire ce qui pourrait être fait, et vers quelle solution on devrait s'orienter. Jusqu'ici, nous avons fait l'évaluation de tout ce qui se faisait ailleurs. Il est évident que quelque chose pourrait être fait concernant le terrain sur lequel on a une option en ce moment.
À Montréal, notre intention n'est pas seulement de créer un stade pour le baseball. Nous voulons greffer au stade ce qu'on appelle en ce moment une aire ou un complexe de divertissement. En regardant ce qui se passe aux États-Unis, on constate une évolution importante, à savoir qu'on greffe au stade un élément de rassemblement qui crée de l'ambiance, où il y a de la musique, du divertissement, et où il peut aussi y avoir des jeux. Je ne parle pas de la Ronde parce que ce n'est pas ce genre de chose-là que j'envisage. Je vois plus une aire qui attire les gens dans ce quartier et, bien sûr, on va faire en sorte qu'ils aiment cet endroit et qu'ils y dépensent de l'argent. Ce développement va se faire en même temps que le stade.
Pour répondre à votre question, il y a peut-être des partenariats qui sont possibles dans ce contexte-là. Selon moi, cet élément devrait être encore plus rentable que le stade, mais ça fait partie de l'ensemble du projet.
Il y a toutes sortes de moyens à trouver et je ne prends pas position ni ne vous fais de suggestions. Je voudrais vous dire que l'année dernière, on a construit à Jupiter, en Floride, un nouveau stade, un nouveau complexe pour le camp d'entraînement de printemps et pour deux de nos clubs mineurs. Vous voulez savoir comment cela a été financé? Cela a été financé à 98 p. 100 par le comté. Le système fédéral aux États-Unis permet d'émettre des obligations dont les intérêts ne sont pas imposables. Ce sont des programmes d'infrastructure, si vous voulez. Et le gouvernement des États-Unis a permis au comté d'émettre des obligations de 29 millions de dollars US et les intérêts ne sont pas imposables.
Ils font cela aux États-Unis pour des routes, pour des écoles et pour la culture. Ça encourage, au niveau local, la construction d'infrastructures. Ensuite, on peut se demander comment payer cette dette. Comme ils savaient que les contribuables ne voudraient pas payer pour ça, ils ont réfléchi sur les atouts de leur comté. Ils ont trouvé que c'était le tourisme et ils ont eu l'idée d'imposer une taxe de 1 p. 100 par nuitée à chaque touriste dans le comté de Palm Beach. Il y a donc 1 p. 100 de la facture de l'hôtel qui est consacré à ce projet-là. Je dois vous dire que nous étions en compétition avec un palais des congrès et un centre de congrès, mais ils nous ont choisis, nous et notre stade.
Ceux-là ont donc utilisé une taxe hôtelière consacrée à un projet sportif. À Candem Yards, ils utilisent toujours le fameux tax exempt municipal bond et ils utilisent aussi chaque année 20 millions de dollars du système de loterie.
• 1025
Ils ont créé le Maryland Sports Authority et,
avec les 20 millions qu'ils recevaient annuellement
de la loterie, ils ont construit Candem Yards,
le palais des congrès ainsi qu'un nouveau parc
pour les Ravens au niveau de la NFL.
M. Denis Coderre: On pourrait donc établir ce genre de partenariat puisque, comme vous le savez, les loteries sont de juridiction provinciale. On pourrait établir un partenariat avec la province de Québec, par exemple, travailler de concert avec la ville de Montréal et le gouvernement fédéral pour trouver justement ce package qui pourrait permettre de régler la question du stade.
Une subvention directe, c'est un don, mais parlons d'un prêt. On semble dire qu'en donnant un montant sous forme de prêt, cela ne serait pas nécessairement rentable pour un gouvernement, parce que vos profits, de toute façon, vont servir uniquement à payer les salaires des joueurs. Si le gouvernement fédéral vous fait un prêt, est-ce que vous pouvez nous garantir que les revenus du stade, par exemple, et les profits tirés de l'activité des Expos de Montréal n'iront pas uniquement aux salaires des joueurs, mais serviront aussi à rembourser le plus rapidement possible ce prêt du gouvernement fédéral?
M. Claude Brochu: Dans la mesure où nous serons capables de rembourser, ce sera certainement le cas. On va essayer de gérer cela comme on l'a toujours fait, c'est-à-dire avec une certaine responsabilité. Si on a des obligations, il va falloir essayer de les remplir.
Comme vous l'avez vu sur un des tableaux, si on suit la moyenne de l'industrie—et nous ne la suivons pas nécessairement toujours—il y a un pourcentage qui est versé aux salaires des joueurs. Cependant, bien que ce soit quelque chose de frustrant, le fait d'avoir un club compétitif devient parfois un enjeu économique. Le fait d'avoir un club compétitif, qui attire les gens et qui les satisfait au niveau de l'émotion génère plus d'achalandage, plus d'assistance, plus de revenus, et c'est donc bénéfique pour l'État. Mais nous avons une responsabilité à court terme. Nous devons être responsables de nos obligations à court terme. Il faut penser aussi à ce que cela représente dans un contexte plus macro-économique.
M. Denis Coderre: Monsieur le président, en terminant, je profite de cette tribune pour vous annoncer que je serai à Washington au début de juin pour rencontrer les représentants du gouvernement américain pour discuter justement de la question de la loi antitrust. Je crois que, même si on doit trouver des solutions pour aider le club de hockey Canadiens et le club de baseball des Expos de Montréal, on doit discuter avec nos collègues américains parce qu'effectivement, la question du cap salarial nous touche également. Si on avait une incidence sur la loi antitrust, ça pourrait régler beaucoup de problèmes.
Est-ce que vous pensez que, dans la mesure où on toucherait cette loi antitrust, cela pourrait régler des problèmes de contrôle des salaires?
M. Claude Brochu: Je ne le sais pas parce que je ne suis pas expert au niveau de la loi antitrust. C'est quelque chose qui m'intéresse parce que cela a un impact énorme aux États-Unis. La loi antitrust aux États-Unis nous permet d'évoluer en tant que sport comme nous le faisons en ce moment. Cela nous permet d'avoir notre système de repêchage et de contrôler tout l'aspect de nos filiales. Si on n'avait pas de loi antitrust aux États-Unis, on ne pourrait pas faire ce que l'on fait.
Cela étant dit, cette question vaut la peine d'être étudiée et discutée. Nous avons établi une forme de cap salarial: on a un départ, un début où les cinq clubs qui ont les masses salariales les plus élevées sont quand même taxés de façon extraordinaire. On a essayé d'établir une forme de cap salarial et on s'est retrouvés avec une grève dévastatrice qui a fait très mal à l'industrie et qui a frustré nos partisans partout en Amérique du Nord.
Je pense que les clubs de hockey auraient aimé faire la même chose et je pense qu'ils ont eu, eux aussi, de la difficulté. Ils n'ont pas pu le faire.
• 1030
Je ne sais donc pas où cela va venir se placer entre
la loi sur le travail fédérale et la loi antitrust. Je
ne sais pas comment cette affaire va se régler.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup, monsieur Coderre.
Nous passons maintenant à M. Riis.
M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Merci, monsieur le président.
Monsieur Brochu, vous venez de nous faire un exposé excellent. Vous nous avez également ébranlés lorsque vous avez dit que les Expos seraient peut-être forcés de déménager, et il faut absolument que nous trouvions une solution. Je suis entièrement d'accord avec vous, et je suis certain que tous mes collègues sont du même avis. Nous devons absolument trouver des solutions.
Dans votre exposé, vous avez parlé de l'infrastructure sportive nécessaire de nos jours, et je crois pouvoir dire que c'est une crise généralisée dans les agglomérations du pays au niveau du sport amateur et au niveau du sport professionnel: de plus en plus, il devient nécessaire de créer une nouvelle infrastructure sportive. Vous avez dit que vous aviez étudié la situation dans d'autres villes et que vous vous étiez penchés sur les options envisagées ou retenues par certaines d'entre elles.
Nous étudions actuellement une série de projets pour commémorer le millénaire. Que penseriez-vous d'un projet du millénaire, peut-être en coopération avec les provinces, dont le but serait d'émettre un certain nombre d'obligations sportives qui seraient libres d'impôt, ou du moins peu imposées? Cela permettrait à tous les Canadiens qui tiennent à voir un développement de l'infrastructure d'acheter une obligation sportive dans ce but au lieu d'acheter un fonds mutuel ou une autre des multiples formes de placement qui existent. Est-ce que par ce moyen vous ne pourriez recueillir les 150 millions de dollars dont vous avez besoin pour votre stade?
M. Claude Brochu: Évidemment, je considère que c'est une idée excellente. Il faudrait bien sûr que les autorités compétentes fixent les détails et calculent les coûts. C'est une question que j'entends sans cesse: qu'est-ce qui se fait aux États-Unis? Là-bas, il y a le principe des obligations municipales libres d'impôts, ce qui est un peu ce que vous proposez, et cela semble très bien fonctionner car cela force les autorités municipales, les comtés et l'État, à prendre des initiatives et à construire une infrastructure.
M. Nelson Riis: Savez-vous que la province de l'Alberta est en train d'étudier cette option?
M. Claude Brochu: Non, je ne le savais pas, mais c'est un excellent moyen de voir les choses. Je ne connais évidemment pas les détails du projet, mais c'est forcément une mesure très positive. Là encore, si on considère l'équation, les avantages l'emportent de beaucoup sur la différence qu'on obtient lorsque les intérêts ne sont pas imposés.
M. Nelson Riis: Merci.
Vous avez dit que le stade serait utilisé pour d'autres manifestations que le base-ball. Quand on pense que cela constituerait un héritage pour les générations futures, une infrastructure pour les sports et pour les athlètes de tout le pays, ce serait un excellent projet pour le millénaire.
M. Claude Brochu: Vous avez parfaitement raison. Pour ma part, je considère...
On peut toujours considérer les aspects économiques et les chiffes, et tout cela est très important, mais en même temps, il faut pouvoir rêver un peu. Quand je considère Montréal, une ville que j'aime infiniment, l'idée d'avoir un stade près de la rue Peel, l'idée de ce quartier par un soir d'été, quand les lumières sont allumées... Toute la ville saura que nous sommes là, toute la ville saura qu'on vient de frapper un circuit. Qu'on soit sur la rue Ste-Catherine ou sur la rue Sherbrooke... Ce sera une source de lumière, tout le quartier sera vivant.
Quand vous parlez aux gens et aux promoteurs urbains de Montréal, ils disent tous qu'au cours des 10 ou 15 prochaines années Montréal va forcément se développer au sud de la rue Peel vers le canal Lachine et le Vieux-Port. C'est là que Montréal va s'étendre, et nous pouvons donner le coup d'envoi. Parfois, il faut rêver un peu et essayer de se faire une image de l'avenir.
Ce genre de chose serait formidable pour Montréal. C'est la raison de mon enthousiasme.
M. Nelson Riis: Claude, je vais d'abord vous dire quelque chose, après quoi je vais vous poser une question un peu délicate, je l'avoue, mais une question qui doit être posée.
Pour commencer, une observation sur le soutien du fédéral et de la province. J'imagine que lorsque vous vendez vos 18 000 commandites à des sociétés, pour des sièges ou des billets de saison, etc., étant donné l'exonération d'impôt accordée par les gouvernements, c'est la façon dont ceux-ci encouragent les sociétés à participer à l'expansion de l'infrastructure sportive.
• 1035
On pourrait dire... je ne veux pas entrer dans ce sujet qui
est un peu délicat, mais on peut se demander dans quelle mesure il
se fait vraiment des affaires pendant les matchs, qu'il s'agisse de
hockey ou d'autre chose, mais mettons cela de côté pour l'instant.
C'est la réalité des choses, et nous nous en occuperons ailleurs.
Vous recueillez des fonds, vous obtenez des commanditaires, et vous avez mentionné qu'à ce niveau-là, beaucoup de choses n'étaient pas quantifiables. Je dois dire, avec beaucoup de respect pour mes collègues, ici à ma droite, qu'au cours des prochains mois ou d'ici un an ou deux, beaucoup de choses pourraient se produire au Québec, et cela coïnciderait exactement avec votre projet. En effet, en même temps, vous pourriez être en train de recueillir beaucoup de fonds dans le secteur des affaires pour réaliser votre projet.
Je ne sais même pas si vous pouvez commenter cela, vous ne le voulez probablement pas, et probablement que vous ne devriez pas le faire. C'est tout de même un facteur, n'est-ce pas? Après tout, avec des élections provinciales imminentes, avec ce qui pourrait se produire à la suite de ces élections, vous devez être un peu inquiet puisque vous allez devoir recueillir des fonds dans le secteur privé.
M. Claude Brochu: Je n'en ai pas parlé non plus dans mon exposé, mais lorsque nous avons consulté les gens d'affaires de la communauté, nous avons obtenu l'appui de la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain, du Bureau de commerce, de Montréal International, et de l'Office des congrès et du tourisme du Grand Montréal. Tous ces organismes sont en faveur du projet.
Nous avons également obtenu le soutien de trois dirigeants d'élite de Montréal. Depuis lors, nous avons établi une vingtaine de sous-comités, par secteur d'activité, des comités constitués d'hommes et de femmes d'affaires très connus, et tous nous appuient. Ils sont en train de constituer des comités. Nous aurons probablement de 200 à 300 entrepreneurs importants de Montréal qui vont nous aider à recueillir ces 300 millions de dollars.
À mon avis, il s'agit probablement là de la plus grande... c'est la plus importante mobilisation du secteur des affaires qu'ait connue Montréal. À mon avis, tous les intervenants jouent leur rôle parce qu'il s'agit là d'une question très importante pour Montréal, et ces gens se disent: «Nous ne pouvons pas perdre notre équipe de base-ball. Nous devons assurer la réalisation de ce projet». Ils le font comme un engagement civique.
C'est fascinant. C'est sans doute l'élément fondamental, parce que si vous regardez vers le sud sur la rue Peel à Montréal, il n'y a aucune grue. Il n'y a rien qui se passe là-bas. C'est une occasion rêvée de voir des travaux de construction dans ce quartier.
Il est intéressant de noter que Jean—Marc Léger, qui fait beaucoup de recherche pour nous—il est du groupe Léger & Léger à Montréal—m'a dit la semaine dernière: «J'essaie de le faire comprendre aux gens. J'essaie de le faire comprendre aux politiciens du Québec.» Il a dit que selon lui, ce projet, en raison de son symbolisme, s'il est vraiment lancé, permettra à Montréal d'amorcer sa relance.
Il a dit que si nous ne lançons pas ce projet, nous devrons accepter de vivre à Montréal au cours des 20 prochaines années dans une ville qui aura la réputation d'être en déclin. Il a dit qu'il s'agit là du projet le plus important dans cette ville, et que son symbolisme dépasse la construction d'un simple stade. Il a dit qu'il essayait de faire comprendre aux gens du Québec l'importance de ce projet.
Je crois que ça revient un peu à ce que vous disiez. Ce projet revêt une importance primordiale, et je crois qu'à bien des égards tout le monde en sort gagnant. C'est un projet apolitique à mon avis.
M. Nelson Riis: Je suis d'accord. C'est un projet apolitique. Il s'agit peut-être du genre de projet qui serait le plus utile, et ce pour toutes sortes de raisons.
M. Claude Brochu: C'est vrai.
M. Nelson Riis: Vous avez dit, Claude, que vous construisiez un édifice sans toit; c'est intéressant.
Ce n'est pas ce qui est à la mode. Dans un climat septentrional, dans les villes du Nord, nous avons cru qu'il valait mieux construire des stades avec un toit. Il est clair qu'on a longuement réfléchi à ce projet. Ce ne sera pas un problème, d'avoir un stade sans toit au centre—ville de Montréal?
M. Claude Brochu: Il ne s'agira pas d'un stade avec toit escamotable. Nous nous penchons actuellement sur la possibilité d'installer une structure légère qui serait simplement—nous utilisons l'expression parapluie en ce moment. S'il pleut, nous voudrions pouvoir avoir une structure qui nous permettrait de couvrir le stade pour qu'on puisse poursuivre la partie.
Nous voulons également pouvoir garantir, évidemment si c'est possible—je ne sais pas—qu'il y aura 10 à 15 concerts en plein air pendant l'été dans ce stade. Donc nous ne pouvons pas retenir la solution d'un toit permanent.
M. Nelson Riis:
[Note de la rédaction: Inaudible]
M. Claude Brochu: C'est exact. Ce n'est pas une structure sur laquelle on pourrait laisser la neige s'accumuler ou quelque chose du genre. Ce serait hors de question.
Nous voulons aussi quelque chose qui serait un peu différent. Nous aimerions par exemple assurer le chauffage des gradins à partir du plancher; nous pourrions peut-être installer un système—ce ne serait pas nécessairement très coûteux—qui permettrait d'assurer un chauffage de deux pieds et demi à trois pieds au-dessus du plancher pour permettre aux spectateurs d'être confortables. On ne porterait pas des T-shirts au mois d'avril, mais s'il fait très froid, au moins nos fans seraient confortables. Nous sommes très conscients que la température à Montréal au mois d'avril, ce n'est pas facile pour le base-ball.
M. Nelson Riis: Il est assez étonnant de constater les salaires versés aux joueurs des Expos quand on les compare au rendement des joueurs et aux salaires versés dans d'autres équipes. Je suppose que ceux qui vont aux matchs de base-ball veulent voir jouer des vedettes. Pouvez-vous établir un lien entre le nouveau stade et les revenus supplémentaires que vous espérez obtenir? Pensez-vous pouvoir vous permettre d'embaucher des joueurs dont le salaire est plus élevé?
M. Claude Brochu: Nous ne ferons jamais partie de ces clubs qui peuvent payer les salaires demandés par les agents libres. À notre avis, c'est un mauvais investissement, et les risques sont trop élevés. Le rendement n'est pas ce qu'il devrait être, tout au moins pas d'après nous.
Nous misons sur le recrutement et le perfectionnement. Il en coûte environ 4 millions de dollars à un club ordinaire pour produire un joueur venant de son système de ligues mineures pour les ligues majeures; nous pouvons le faire pour deux fois moins cher. Nous sommes une des trois grandes organisations du monde du base-ball, en ce qui a trait au nombre de joueurs produits et recrutés qui jouent maintenant dans les ligues majeures.
Nous le faisons de façon très efficace. Je préfère payer, même si c'est 3 millions de dollars par année, pour produire un jeune joueur pour les ligues majeures plutôt que de me tourner vers les agents libres et risquer 8, 9 ou même 10 millions de dollars pour un joueur. Notre objectif sera toujours le recrutement et le perfectionnement des joueurs, tout en conservant les joueurs en question. Il s'agit de joueurs auxquels nos partisans se sont faits—les joueurs de cette année, Brad Fullmer, Vasquez, Hermanson et Guerrero.
La jeune équipe de cette année me fait beaucoup penser à la merveilleuse équipe que nous avions au début de 1976. Il y avait Carter, Cromartie, Dawson, Valentine et Steve Rogers. Cette équipe de 1976, qui était un vrai désastre sur le terrain, est devenue une des meilleures équipes qu'ait connues Montréal. L'équipe que nous avons maintenant y ressemble. Tout ce que nous voulons, c'est nous assurer que ces jeunes resteront avec notre équipe et qu'ils nous permettront de gagner un championnat.
Le président: Merci, monsieur Riss.
Chers collègues, il nous reste quelques minutes. Monsieur Wood veut poser quelques petites questions, puis nous reviendrons à vous, monsieur Brien et madame Tremblay.
Cependant, j'aimerais, monsieur Brochu, en revenir à un des commentaires que vous avez faits sur la participation des entreprises; vous avez dit que vous aviez su intéresser 200 chefs d'entreprise à votre communauté. Je suppose que ces hommes et femmes font partie des grandes sociétés nationales qui ont des bureaux au Québec.
Il y a environ deux mois, nous avons accueilli le président du service des sports de CBC, M. Alan Clark. Il était bien clair que le service de télévision de CBC concentrait ses efforts exclusivement sur les Blue Jays de Toronto et n'avait pas beaucoup de temps pour les Expos. À mon avis, et vous l'avez mentionné plus tôt, vous n'obtenez pas de recettes importantes des émissions de radio et de télévision principalement parce qu'il s'agit d'une diffusion régionale plutôt que nationale.
Pourquoi la Canadian Broadcasting Corporation, ou son service des sports, ne diffuse-t-elle pas plus souvent des parties des Expos à l'échelle nationale?
M. Claude Brochu: C'est une bonne question, monsieur le président. Vous avez raison de dire que nous avons été régionalisés et limités au Québec. Certaines des parties passent sous le réseau TSN, mais ce ne sont pas toutes les parties. C'est difficile à comprendre, mais on m'explique cela en me disant que CBC juge qu'elle n'est pas en mesure de vendre le base-ball des Expos.
• 1045
Il faut comprendre que pour avoir un réseau de langue anglaise
au Canada, il faut absolument inclure le sud de l'Ontario. Nous
avons reçu la permission de la ligue de base-ball—en fait, nous
payons des redevances aux Blue Jays de Toronto chaque année pour en
retour avoir le droit de diffuser les matchs des Expos dans le sud
de l'Ontario, parce que cette région fait partie du territoire des
Blue Jays.
Mais vous ne pouvez pas avoir un réseau au Canada sans le sud de l'Ontario. CBC se trouve à Toronto. Donc, leur orientation est sur l'Ontario. Je peux vous dire—malheureusement, je m'inspire de vieux sondages, vous aurez peut-être eu l'occasion d'obtenir des données plus récentes—mais j'ai fait des recherches il y a environ 10 ans et j'ai constaté que partout au Canada, dans tous les grands marchés, à l'exception de Toronto, les Expos étaient tout aussi populaires que les Blue Jays.
Nous sommes chanceux au Canada d'avoir deux équipes, dans deux ligues différentes. Je crois que pratiquement tous les fans auront une équipe préférée dans la Ligue nationale et une autre dans la Ligue américaine. Je crois qu'il est possible d'avoir ces deux équipes au Canada. Il est regrettable que les Canadiens ne puissent pas voir les parties des diverses équipes—et je pense ici à tous les sports—dans toutes les régions. Peu importe s'il s'agit des Oilers d'Edmonton, ou des Maple Leaf de Toronto.
Ils disent enfin qu'ils ne peuvent pas vendre les Expos. Je ne peux pas en discuter, je ne suis simplement pas d'accord.
Le président: Il serait peut-être utile si vous pouviez mettre à jour vos données en ce qui a trait à la popularité des Expos de Montréal à l'échelle nationale. Si vous pouviez le faire, nous serions heureux de communiquer ces renseignements au Service des sports de CBC.
M. Claude Brochu: Merci beaucoup.
Le président: Monsieur Wood.
M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): Merci, monsieur le président.
Monsieur Brochu, pour en revenir à ce que disait le président et aux commentaires que vous avez faits quand vous avez signalé que Montréal est une ville où le hockey reçoit la priorité et où le base-ball vient clairement au deuxième rang, j'aimerais aborder la question sous un angle quelque peu différent; vous voulez relancer le sport et intéresser plus de gens à aller au Stade olympique. Je sais que vous avez 10 000 à 12 000 spectateurs par partie. Vous avez parlé de la série entre les Blue Jays de Toronto et les Expos. Pensez-vous que les modifications qu'on propose d'apporter permettront aux Expos de susciter un plus grand intérêt? Actuellement, tout le monde joue dans la même division depuis des années. Croyez-vous que les choses iront mieux si vous pouvez convaincre plus de gens d'aller voir les matchs? Pourriez-vous donc être mieux en mesure d'atteindre les objectifs financiers que vous vous êtes fixés pour le nouveau stade?
M. Claude Brochu: C'est une question intéressante. Comme vous le savez peut-être, il y a un an, la ligue de base-ball a proposé ce qu'on appelle un rajustement radical. Les Expos seraient passés à la Ligue américaine avec Toronto dans la division de l'Est, avec les Yankees, Boston et Baltimore. Cela aurait été intéressant parce qu'il y aurait eu des rivalités naturelles, ce qui est toujours ce que vous recherchez—particulièrement avec Toronto, Boston et les Yankees.
Oui, cela serait intéressant. Cela vaudrait la peine d'être étudié.
Cela dit, les problèmes que nous avons avec le Stade olympique sont une question de site. En d'autres termes, les fans ne sont pas heureux du stade même. Ils n'aiment pas le toit pendant l'été. Nos étés sont trop courts, ils veulent être à l'extérieur. Le base-ball se joue à l'extérieur. Ce stade est beaucoup trop grand. On ne peut rien y changer.
Il y a des milliers de raisons pour lesquelles les gens ne veulent pas aller à ce stade. Notre problème est un problème de stade. Si nous demeurons dans la division Est de la Ligue nationale, si nous déménageons au centre-ville, je crois que nous pourrons régler tous nos problèmes.
Le président: Une autre question, monsieur Wood?
M. Bob Wood: Non, Merci.
Le président: Monsieur Brien puis monsieur MacKay.
[Français]
M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur Brochu, moi aussi, je suis un amateur de baseball comme beaucoup de gens et j'ai beaucoup de sympathie pour vous, mais j'ai beaucoup de difficulté à appuyer l'idée que les fonds publics ou les gouvernements puissent faire indirectement ce qu'ils ne veulent pas faire directement, c'est-à-dire investir de l'argent dans des clubs sportifs. Pour moi, l'aide indirecte et l'aide directe reviennent exactement à la même chose.
Il y a un élément des études que vous nous soumettez qui m'agace beaucoup. Vous ne le mettez pas en perspective. Vous parlez des entrées d'argent qui viennent des États-Unis, du tourisme, etc., mais il y a un autre élément à considérer. Une partie importante de la masse salariale des Expos ne peut pas être considérée comme un apport de capitaux. Si 40 p. 100 de ces salaires sont imposés, il reste 60 p. 100 de cette masse salariale qui est dépensée en très grande partie à l'étranger.
Vous dites qu'un investissement dans les Expos plutôt que dans un autre secteur d'activités n'est pas neutre. Il faut aussi prendre en considération que dans d'autres activités, la masse salariale peut rester au niveau local, alors que dans un club sportif comme les Expos, les joueurs de baseball ne dépensent pas leur salaire ici, loin de là. On ne retrouve cette donnée nulle part dans vos études. Vous ne parlez pas de cet aspect de la fuite d'une grande partie de la masse salariale, qui constitue une très grande partie de vos dépenses. J'aimerais que vous commentiez.
M. Claude Brochu: Bien sûr, dans l'évaluation, il faut voir le résultat net de l'équation. On ne peut pas consacrer certains revenus à certaines dépenses. Il faut regarder l'ensemble de la situation.
Je peux me servir de cela cette année. En ce moment, on reçoit des États-Unis près de 25 millions de dollars US et notre masse salariale est de l'ordre de 9 millions de dollars. Il y en a une bonne partie qui reste au Québec. On ne peut pas tout avoir, mais dans la mesure où on en récupère une partie, c'est positif.
Donc, regardons le résultat net de tout cela. Pour ce qui est de l'utilisation de fonds publics, je crois sincèrement qu'il faut prendre une décision d'affaires raisonnée. Si on se met dans la tête que c'est donner de l'argent, on a un certain problème. Moi, je regarde cela d'une autre façon. Je regarde peut-être ça en tant qu'homme d'affaires. Je me dis que ce n'est pas une question de donner de l'argent. On doit se demander si on doit investir de l'argent. Est-ce qu'on investit un dollar pour en faire 10? Est-ce que cela a du sens? Si cela n'a pas de sens, on dit non: prenez vos revenus, prenez vos jobs, prenez vos affaires et partez. Je vais accepter cette décision. Mais je pense que ce n'est pas la bonne approche. Il faut se demander si on investit. Qu'est-ce qu'on va aller chercher, en tant que gouvernement, avec le montant qu'on va investir? Si cela a du sens, faisons-le. Si cela n'a pas de sens, ne le faisons pas.
M. Pierre Brien: On ne peut prendre les chiffres de cette année pour faire la comparaison. La masse salariale de cette année est exceptionnelle et vous allez voir que les assistances seront en conséquence aussi cette année. On ne peut pas prendre la masse salariale de cette année et la comparer à l'entrée de revenus qui vient des États-Unis cette année. Il faut la prendre sur une année-type, qui pourrait être 2002 par exemple. Là vous auriez une masse salariale de 35 ou 40 millions de dollars si vous voulez être un tant soit peu compétitifs. Près de 60 p. 100 de cette somme sera une fuite de capitaux. Donc, il faut intégrer cela dans l'équation, sur la base de 9 millions de dollars, mais peut-être plus sur la base de 35 ou 40 de dollars.
L'autre élément qui m'agace beaucoup, c'est la garantie de 25 ans que vous donnez. Vous dites que vous allez rester là pendant 25 ans. Vous nous dites que la masse salariale des clubs aura doublé dans quatre ans. Vous projetez une masse salariale de je ne sais trop combien, mais cette masse va s'inscrire dans la moyenne salariale actuelle, alors que les masses salariales vont avoir doublé. Ce n'est pas vrai qu'on va garder nos meilleurs joueurs, et vous l'avez dit dans votre présentation. On ne pourra pas davantage payer des joueurs vedettes.
Comment pouvez-vous donc nous donner la garantie que les gens vont acheter ce produit? C'est loin d'être évident qu'on va pouvoir garder les joueurs vedettes et que les gens vont s'identifier davantage au club. On aura bâti une infrastructure qui générera des retombées à court terme, mais on risque de se retrouver avec un Stade olympique vide qui sera disponible pour des salons et un stade au centre-ville qui sera peut-être aussi vide, parce qu'on n'est pas sûr de pouvoir garder le club. J'ai beaucoup de difficulté face à cette garantie de 25 ans. Si c'est déficitaire dans 10 ans, vous allez revenir ici et vous nous direz: «On a bâti tout ça et on ne peut pas laisser tomber ça. Vous devez investir d'autre argent.»
• 1055
Je crois peu en cette garantie de 25 ans.
Cela m'agace.
M. Claude Brochu: Je vais revenir sur le premier point parce que je considère que c'est important. Je répète souvent qu'il faut faire l'évaluation des entrées de fonds, que ça vienne des États-Unis ou d'ailleurs, dans un contexte où on prend le tout. Il ne faut pas se concentrer uniquement sur la masse salariale. C'est pour ça que je dis qu'il faut que l'équation soit positive. Regardons les entrées de fonds, qu'elles viennent des États-Unis ou d'ailleurs, faisons la part des choses et voyons si c'est positif. On ne peut pas regarder uniquement la masse salariale et se concentrer là-dessus, bien que ce soit un élément indirect et valable. Si 11 p. 100 de notre foule vient de l'extérieur du Québec, des États-Unis ou de l'Ontario, ce sont des entrées de fonds. Si le club n'est pas là, ça ne compte pas. Il faut faire la part des choses. Il faut aller chercher tous les éléments et ensuite arriver à une conclusion.
Je peux vous dire qu'on est absolument sûrs qu'on va pouvoir avoir un club compétitif en l'an 2002, en l'an 2007. Dans le sport professionnel, on s'attend à ce qu'à partir de l'année 2002, les salaires se stabilisent puisque toute l'infrastructure aura été refaite. On est pas mal certains de cela.
N'oublions pas que pour nous, la décision ne consiste pas à se convaincre de bâtir un stade. La pire gaffe qu'on pourrait faire, ce serait de construire ce stade-là et de s'apercevoir dans quatre ou cinq ans qu'on s'est trompés. Si nous prenons un engagement, nous serons mal pris à ce moment-là. On sera aussi pris avec l'infrastructure. Donc, nous devons être vraiment sûrs de notre affaire, et nous le sommes.
Nous ne serons jamais les Yankees de New York avec une masse salariale de 90 millions de dollars. Notre club devra toujours fonctionner avec sa philosophie opérationnelle de dépistage et de formation.
En 1994, on avait bâti le meilleur club du baseball majeur avec une masse salariale de 18 millions de dollars. En 1996, on a rebâti notre club avec 18 millions de dollars. Je me dis qu'avec l'argent qu'on va avoir, avec notre système, on va avoir un club qui va compétitionner. Ce ne sera pas un mauvais club.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Brochu.
Nous passerons maintenant à une question de M. Mackay puis nous reviendrons à Mme Tremblay. Nous lèverons ensuite la séance parce que je sais que nombre de députés doivent se rendre à la réunion du comité du patrimoine.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Je serai bref. Merci.
Je vous remercie d'être venu aujourd'hui. Votre exposé a été fort intéressant. Il est évident que vous avez consacré beaucoup de temps et d'effort à la préparation de ce document.
À mon avis, le meilleur outil de commercialisation d'une franchise professionnelle est une équipe qui gagne. Si ce n'avait été de la grève qui a entraîné une saison raccourcie, en 1994, vous auriez probablement gagné la Série mondiale. La bannière de ce championnat serait probablement affichée au Stade olympique ou dans votre nouveau stade.
Mais par le passé vous avez également bénéficié de la présence de plusieurs personnalités au sein de votre équipe. Je pense entre autres à Rusty Staub et Spaceman Bill Lee. Vous avez eu des joueurs, comme vous l'avez dit dans votre exposé, avec lesquels le public pouvait s'identifier. Mais je crois que votre plus grand problème n'a pas été le perfectionnement de nouveaux joueurs ni le recrutement de joueurs de qualité, mais plutôt leur maintien dans votre équipe.
Ma première question est la suivante: quelles mesures envisagez-vous à long terme pour développer d'autres joueurs, surtout des joueurs canadiens?
M. Claude Brochu: Nous nous sommes engagés à fond, évidemment, à développer des joueurs. Le complexe sportif qu'on a bâti à Jupiter, et c'est probablement parmi les meilleurs—c'est en fait le meilleur de tous—dans tout l'univers du base-ball, et d'après moi, en est la preuve. Pour nous, c'est essentiel, et nous allons continuer dans le même sens.
Du point de vue canadien, évidemment, nous aimerions beaucoup pouvoir développer un joueur canadien. Nous l'avons fait dans le cas de Larry Walker, qui était probablement le joueur de base-ball canadien le plus éminent, l'un des plus éminents que nous n'ayons jamais vus. L'année dernière, il a remporté le prix du joueur le plus utile de la Ligue nationale. Larry Walker est un champion du base-ball dans notre pays. Le plus triste, c'est qu'en 1995, j'ai dû permettre à Larry Walker de nous quitter, mais nous n'avions pas le choix, parce qu'autrement, notre club de base-ball aurait fait faillite.
• 1100
Au niveau régional, nous continuons toujours à faire beaucoup
d'effort dans le sens du base-ball amateur. Nous finançons
l'Académie canadienne du base-ball à Montréal, nous finançons aussi
Base-ball Québec annuellement pour leur permettre d'acheter de
l'équipement et d'autres choses de cet ordre, et nous faisons
beaucoup d'effort pour développer le base-ball pour les enfants.
De fait, notre réseau comprend quelques joueurs canadiens. Malheureusement, nous n'avons aucun joueur québécois à présent. Nous allons continuer à travailler au recrutement et au perfectionnement. Croyez-moi, c'est l'une de nos plus grandes priorités, celle de trouver un joueur canadien que nous pourrons garder.
M. Peter MacKay: Rhéal Cormier, du Nouveau-Brunswick, était certainement un bon candidat.
M. Claude Brochu: C'était un lanceur exceptionnel. Malheureusement, il s'est fait mal au coude, mais malgré tout, il était formidable. Il aurait très bien fait notre affaire, mais il devait s'absenter très souvent, alors c'est moins dramatique.
M. Peter MacKay: Je n'ai qu'une toute petite question.
Le président: Une toute petite question. Il ne nous reste qu'environ deux minutes, chers collègues.
M. Peter MacKay: Combien de places y a-t-il dans le nouveau stade, et est-ce que vous prévoyez aussi y faire jouer les Alouettes?
M. Claude Brochu: Il y aurait de la place pour 35 000 personnes, et l'autre réponse, c'est non. Nous voulons que ce soit un stade consacré exclusivement au base-ball. Nous ne pensons pas être capables d'accueillir un club de football.
Le président: Merci, monsieur MacKay.
Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Monsieur Brochu, j'ai encore quelques questions à vous poser.
Vous avez dit, si j'ai bien compris, que vous avez l'impression qu'en l'an 2002, les salaires vont avoir atteint leur vitesse de croisière et vont demeurer assez stables.
M. Claude Brochu: Je pense qu'ils vont se stabiliser après cela.
Mme Suzanne Tremblay: Selon les projections que vous faites, vos revenus passeraient de 27,2 millions à presque 62 millions de dollars.
Maintenant, quand vous parlez de vos revenus, est-ce que vous en parlez en dollars canadiens ou en dollars américains? Les avez-vous transposés en dollars américains?
M. Claude Brochu: On saute d'un côté et de l'autre. Malheureusement, on a souvent la mauvaise habitude de dire que les salaires sont de tant de dollars, et ce sont des dollars américains. Je dois vous dire que la totalité de nos revenus équivaut à 57 à 60 millions de dollars canadiens.
Mme Suzanne Tremblay: Canadiens.
M. Claude Brochu: Canadiens. Un nouveau stade va générer un minimum de 50 à 60 millions de dollars additionnels. Ça a été un peu le cas quand le Centre Molson a été ouvert il y a deux ou trois ans.
Mme Suzanne Tremblay: Donc, vos revenus moins les salaires que vous donnez, même s'ils doublent, vous donnent encore une grosse marge de profit. Vous avez dit dans votre présentation que vous n'étiez pas capables d'assumer la dette du financement de la construction du stade. Qu'allez-vous faire des profits? Allez-vous les partager entre les actionnaires?
M. Claude Brochu: Je doute fortement qu'il y ait des profits. Essentiellement, il y a les salaires, mais, comme je vous l'ai mentionné, on a tout un système de dépistage et de formation au Canada, aux États-Unis et en Amérique centrale. On a aussi toutes nos opérations au baseball. Il faut se déplacer, prendre des avions, ce qui implique des coûts. Et, bien sûr, il y a toute l'opération du stade. Si on construit un stade, le fonctionnement de ce stade coûtera à lui seul 10 millions de dollars par année. Il y a aussi tous les services de marketing, d'accueil, de vente, tous les emplois qui sont reliés au stade. Il faut aussi payer cela.
Mme Suzanne Tremblay: Quand vous dites que ça va vous coûter 10 millions de dollars pour l'opération du stade, vous excluez les taxes foncières.
M. Claude Brochu: Oui.
Mme Suzanne Tremblay: Cela m'amène à une autre question. Il est paru un article dans le quotidien Le Journal de Montréal, au mois de février. Vous étiez peut-être parti pour votre camp d'entraînement. Il y a un joueur de baseball québécois qui n'a pas pu d'être transféré aux Lynx d'Ottawa, comme vous le souhaitiez, à cause du protectionnisme américain. On est dans un sport qui est très américain, qui semble avoir ses propres règles du jeu qui l'avantagent, mais qui nuisent à tous les autres qui ne sont pas dans la même perspective.
On a fait des consultations auprès de différentes personnes pour essayer de comprendre cette situation. Comment se fait-il qu'un Québécois ne puisse pas travailler à Ottawa? Remarquez que c'était une situation assez paradoxale. Donc, on s'est intéressés à cette question.
• 1105
Si j'ai bien compris,
vous avez six filiales et, étant donné que
ces filiales sont américaines, les Américains, pour
empêcher qu'il y ait trop de joueurs venant de
l'étranger, pour favoriser les Américains, pour que
le baseball reste bien américain, ont autorisé les
clubs-fermes à avoir un certains nombres de permis de
travail.
Dans le cas des Lynx d'Ottawa, vous n'en aviez
pas assez pour faire travailler un Québécois à Ottawa
parce qu'ils étaient tous pris par les non-Américains
que vous aviez envoyés aux Lynx d'Ottawa.
Est-ce que vous pouvez me démêler cette situation-là dans un premier temps, me la confirmer ou me l'infirmer et, dans un deuxième temps, me dire si, dans l'éventualité où vous resteriez, vous seriez vraiment prêts à faire un club-ferme qui soit canadien pour permettre aux joueurs québécois et des autres provinces de s'entraîner dans votre club-ferme ici, même si j'espère qu'il sera à ce moment-là à l'étranger?
Êtes-vous vraiment prêts à faire quelque chose pour que cette situation assez paradoxale ne se renouvelle pas une autre année?
M. Claude Brochu: Pour répondre à votre première question, je dois dire que le joueur québécois dont vous parlez n'a pas joué pour les Lynx parce qu'il n'était pas assez bon. C'est vraiment ça. Nous devons faire un choix, et mes gens de baseball étaient d'avis que ce joueur n'était pas suffisamment compétent. S'il avait été assez bon, il aurait joué ici.
Cela étant dit, vous avez absolument raison. C'est vraiment un système que je déplore. Nous avons des quotas de joueurs canadiens ou de l'extérieur des États-Unis qui peuvent évoluer et jouer aux États-Unis.
Nous avons 20 ou 21 quotas, et je trouve que c'est un système injuste parce que nous n'avons absolument aucun quota pour les joueurs américains qui peuvent venir jouer avec les Lynx d'Ottawa. C'est quelque chose qui, selon moi, doit absolument changer.
On en discute en ce moment à Washington et aussi aussi au legislative affairs committee du baseball. Je recommande que les Canadiens soient exemptés de toute forme de quota parce que je ne trouve pas ça acceptable.
Mme Suzanne Tremblay: J'en profiterai, monsieur le président, pour demander à l'ambassadeur qui s'en va à Washington de soulever cette question du protectionnisme auprès de nos voisins américains.
Merci, monsieur Brochu.
[Traduction]
Le président: Encore une dernière question de la part de M. Coderre et ensuite nous lèverons la séance.
[Français]
M. Denis Coderre: Merci, madame Tremblay, de m'avoir appelé ambassadeur. Si elle veut se joindre à moi, elle est la bienvenue. Je crois qu'elle a une certaine ouverture d'esprit à la suite des bons propos de M. Brochu.
Monsieur Brochu, j'aimerais que vous nous parliez de l'impact économique des franchises-écoles. Je ne veux pas faire de la «constitutionnalite» comme elle en a fait avec les Lynx d'Ottawa, mais je voudrais quand même comprendre l'importance économique du fait d'avoir un club-école. Les Expos, c'est aussi les Lynx d'Ottawa et les Expos du Vermont. Cela a un certain impact et c'est bon pour la ville d'Ottawa. Pour mieux comprendre, il serait important d'entendre ce genre de propos.
M. Claude Brochu: D'accord.
M. Denis Coderre: J'aimerais vous dire en terminant qu'on vous remercie énormément de la clarté de vos propos. Ma compréhension s'en trouve meilleure parce que je pense qu'en aidant les Expos, on aide la ville de Montréal. Merci.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Brochu et monsieur Lelay, merci beaucoup. Votre exposé a beaucoup aidé à faire avancer cette question. Nous communiquerons avec vous au cours des mois qui viennent si nous avons besoin d'autres informations.
M. Claude Brochu: Merci.
Le président: Merci. La séance est levée.