SINS Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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SUB-COMMITTEE ON THE STUDY OF SPORT IN CANADA OF THE STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE
SOUS-COMITÉ SUR L'ÉTUDE DU SPORT AU CANADA DU COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 7 octobre 1998
[Traduction]
Le président (M. Dennis J. Mills (Broadview—Greenwood, Lib.)): Mesdames et messieurs, avant d'entendre notre premier témoin—nous avons dit que nous commencerions à 16 h 15—je pensais qu'on pourrait rapidement passer en revue un certain nombre de questions liées au travail du comité.
D'abord, le sous-comité a été rétabli en bonne et due forme par le comité plénier, soit le Comité du patrimoine de la Chambre des communes. Nous avons bénéficié de l'appui considérable du président et des membres du comité en ce qui concerne le travail que nous avons réalisé jusqu'à présent. J'ai expliqué que notre intention était de continuer de recevoir des témoins jusqu'à la fin octobre et de passer ensuite à la préparation et à l'examen de nos recommandations, de façon à dégager un consensus là-dessus, de sorte que notre rapport soit prêt à la fin novembre. J'espère que vous êtes tous d'accord.
En fait, avant de vous donner tous les détails, je voudrais vous présenter un nouveau membre du comité qui représente le Parti réformiste du Canada. Il s'agit de M. Inky Mark.
Bienvenue au comité, Inky. Nous sommes bien heureux de pouvoir vous accueillir parmi nous.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Le président: Au cours de la dernière session, nous avons beaucoup apprécié le soutien de vos collègues, et notamment le porte-parole du parti pour le portefeuille des Finances, soit M. Solberg, de même que votre chef. M. Manning nous a été d'une grande utilité quand nous avons voulu rencontrer un certain nombre de propriétaires canadiens d'équipes professionnelles pour qu'ils nous expliquent les défis qu'ils avaient à relever. Donc, la contribution de vos prédécesseurs était tout à fait exemplaire.
J'aimerais également vous présenter l'un des greffiers les plus respectés du Service des comités du Parlement du Canada, M. Bernard Fournier. Il est greffier depuis un bon nombre d'années. J'ai l'impression que le leader à la Chambre des communes s'est dit que ce comité avait besoin d'un greffier très expérimenté et strict, surtout pour l'étape finale de cette étude, et il a donc décidé de nous envoyer M. Fournier pour que nous ne nous écartions pas du bon chemin.
Bienvenue, et merci d'être des nôtres, Bernard.
Je voudrais dans un premier temps obtenir certaines précisions. D'abord, est-ce que tous les membres ont reçu une copie de l'ébauche confidentielle de la première partie du rapport du comité? Nous l'avons fait livrer à vos bureaux hier en précisant qu'elle devait être remise en main propre. Donc, tout le monde a bien reçu cette ébauche dans les deux langues officielles.
Vous auriez également dû recevoir le calendrier des réunions d'ici jusqu'à l'achèvement du rapport. Est-ce que tout le monde l'a reçu? Sinon, M. Fournier se fera un plaisir de vous le donner.
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): D'ici à la fin?
Le président: Le calendrier en question vise la période d'ici à la fin novembre.
Bernard, j'ai l'impression que Mme Tremblay ne l'a pas reçu.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay:
[Note de la rédaction:Inaudible].
[Traduction]
Le président: Monsieur Cannis, avez-vous reçu l'ébauche du rapport du comité?
M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Non, monsieur le président.
Le président: Elle a été remise en main propre à un membre de votre personnel hier.
M. John Cannis: Donc, elle doit y être maintenant.
Le président: Très bien. Nous allons nous assurer que M. Cannis a bien reçu sa copie. Il est là pour représenter la ministre responsable du sport.
Monsieur Coderre.
[Français]
M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): J'ai cru comprendre qu'on avait omis, peut-être en raison d'un manque de communication au moment où on a changé de greffier, d'inscrire la comparution de Sports Québec devant notre comité. Est-ce que cette omission a été corrigée et est-ce qu'on a confirmé cette comparution?
[Traduction]
Le greffier du comité: Il est prévu que ce groupe comparaîtra le 29 octobre.
[Français]
M. Denis Coderre: Parfait. Merci.
[Traduction]
Le président: Donc, Sports Québec est confirmé pour le 29 octobre.
Avant de passer à notre premier témoin, il nous reste encore une minute. Je me dois de présenter mes excuses aux membres du comité. Mme Tremblay a soulevé cette même question au Comité du patrimoine hier; cela concerne l'article qui est paru dans plusieurs journaux nationaux pendant le week-end.
Dès la reprise des travaux de la Chambre, un journaliste qui s'intéresse beaucoup aux liens entre le sport et l'économie est venu me parler. Il m'a demandé de lui décrire en général les travaux qu'avait entrepris le comité et l'orientation que nous comptions prendre au cours des deux prochains mois. J'ai donné à ce journaliste la même explication que je vous ai fournie plus tôt; je lui ai dit: «Voilà le travail que nous comptons entreprendre au cours des deux prochains mois, et nous allons nous y attaquer dans les plus brefs délais.»
Il m'a ensuite demandé si nous avions reçu des lettres ou eu des échanges de vues en comité ou avec d'autres au sujet de l'examen de toute la question des concessions sportives professionnelles au Canada, notamment celles qui connaissent actuellement des difficultés. J'ai dit au journaliste en question que nos attachés de recherche et certains membres du comité avaient vaguement parlé de la possibilité—et je lui ai bien dit que tout cela était à l'étape de la discussion seulement pour le moment, tout comme je vous le décris aujourd'hui—d'un pacte nord-américain du sport. Je l'assimilais en quelque sorte au Pacte automobile ou à ceux qui existent dans le domaine du cinéma, de l'aérospatiale, etc. Je lui ai donc parlé de quelques idées très provisoires, pour qu'il commence à réfléchir au travail conceptuel que nous comptions accomplir et aux défis que nous aurions nécessairement à relever dans un contexte de sévères restrictions budgétaires.
Je ne lui disais pas tout cela officieusement. Je ne fais jamais ça, parce que je n'arrive jamais à me rappeler si mes remarques sont officielles ou non, et par conséquent, j'ai toujours préféré dire les choses ouvertement et officiellement. Mais évidemment, le journaliste en question, Jeffrey Simpson du Globe and Mail, s'est empressé de raconter tout ça dans son journal. J'ai dit que j'étais bien d'accord pour qu'il discute des défis à relever, et son article a ensuite suscité une réaction des plus vives.
Personnellement, j'estime—surtout que tous les journalistes savaient qu'il s'agissait d'une simple discussion, d'idées qu'on explorait mais rien de plus—que tout cela nous a permis de provoquer un bon débat sur la question. Les gens nous demandent ce que nous allons faire au sujet du sport amateur, et nous nous contentons de leur dire d'attendre.
Je voulais surtout faire comprendre à Mme Tremblay et à tous les autres membres du comité que c'était une discussion tout à fait spontanée, et non pas une fuite délibérée. Autrement dit, si vous examinez ce rapport, vous constaterez qu'aucune des recommandations dont nous discutons depuis cinq mois n'est du domaine public. Je tenais absolument à expliquer cela aux membres.
Mesdames et messieurs, nous passons maintenant à notre premier témoin, qui représente le Centre canadien pour l'éthique dans le sport.
Nous vous souhaitons la bienvenue, monsieur Lachance, et vous invitons à faire vos remarques liminaires. Merci infiniment de votre présence cet après-midi.
M. Victor Lachance (directeur général, Centre canadien pour l'éthique dans le sport): Merci, monsieur le président.
[Français]
Membres du comité, je vous remercie de nous donner l'occasion de comparaître ici aujourd'hui. En raison du court échéancier, nous n'avons pas été en mesure de vous présenter la version française de notre mémoire avant aujourd'hui et nous nous en excusons. J'espère toutefois que vous avez eu l'occasion de parcourir les premiers documents que nous vous avons fait parvenir. Si vous souhaitez obtenir des précisions, il nous fera plaisir de répondre à vos questions.
[Traduction]
Il est clair que je n'ai pas le temps, dans le cadre de l'exposé de cet après-midi, de vous décrire les complexités des divers problèmes déontologiques qui se posent dans le sport de nos jours. Mais cela n'atténue en rien l'ampleur et l'importance de l'éthique dans le sport, même si notre rôle, à mon avis, consiste à aider le comité à déterminer comment nous aborderons la question de l'éthique dans le sport sur une beaucoup plus grande échelle—c'est-à-dire dans l'ensemble des sports—et à examiner le rôle du gouvernement fédéral à cet égard.
Si nous vous aidons à réaliser ce que je considère comme notre objectif ultime, c'est-à-dire la création d'une industrie canadienne du sport saine—sur les plans à la fois économique et social—productive et en plein essor qui favorise les valeurs et les principes déontologiques qu'appuient les Canadiens, nous aurons l'impression d'avoir apporté au travail du comité une contribution valable.
Les Canadiens s'attendent à ce que l'institution du sport, aussi vaste et diversifiée soit-elle, adhère à des principes moraux et déontologiques stricts. Du développement physique et moral de notre jeunesse à la présentation de notre caractère national sur la scène mondiale, le sport représente une force sociale, culturelle et économique sans égal dans notre société.
Je dirais même qu'il s'agit d'un dépôt national, dépôt à l'égard duquel le gouvernement fédéral et les organisations sportives, à la fois amateurs et professionnelles, doivent faire preuve de diligence et de leadership pour garantir à tous les Canadiens un environnement sportif qui soit positif, productif et sain. Il conviendrait en particulier que le comité se penche sur l'incidence économique du sport.
Si le milieu sportif n'est pas un milieu qui inspire la confiance des gens, au point de vouloir faire faire du sport à leurs enfants, tout s'effondre. Si vous envisagez d'investir dans une société, vous voulez évidemment vous assurer que cette société est saine et digne de confiance. Il en va de même pour le sport.
Même si la réalité est difficile à accepter, les économistes vous diront que si quelques sports ou concessions sportives—amateurs ou professionnels—disparaissent, cela n'influera guère sur l'économie canadienne. Mais si tout le secteur du sport devait disparaître, l'incidence, non seulement sur l'industrie du sport proprement dit, mais sur la radiodiffusion, la fabrication, le tourisme, les installations sportives et tous les autres secteurs qui bénéficient du sport, serait considérable.
Et si nous nous intéressons tout particulièrement au sport professionnel—qui fait actuellement l'objet d'un débat public—c'est tout aussi vrai. Il est peut-être difficile de justifier un apport de crédits gouvernementaux pour des raisons purement économiques. Le sport professionnel est concentré sur les principaux marchés canadiens, soit à Vancouver, Toronto et Montréal, comparativement au sport amateur, qui est présent d'un bout à l'autre du pays, dans presque toutes les localités.
Mais qu'il s'agisse de sport professionnel ou amateur, si nous avons l'impression que le sport, tel qu'il est actuellement pratiqué, n'est pas intègre, sécuritaire et sans drogues, nous devrons conclure qu'il est l'inverse de toutes ces choses. Autrement dit, on ne peut être intègre, respectueux de la déontologie et sécuritaire à demi. C'est tout ou rien; vous l'êtes ou vous ne l'êtes pas. Et si vous ne l'êtes pas, la confiance du public s'en ressent et les gens, même s'ils voudraient pouvoir se dire que le sport et le milieu sportif sont dignes de confiance, n'y croient plus autant.
Je voudrais passer directement à nos recommandations, si vous permettez, car elles expliquent la corrélation qui existe à nos yeux entre l'éthique dans le sport, les aspects économiques du sport, et la valeur du sport pour la société dans son ensemble.
Notre première recommandation porte sur quelque chose qui peut sembler couler de source, à savoir que les politiques fédérales précisent clairement et clairement que le sport doit être pratiqué de façon juste et morale et que l'éthique dans le sport est une question d'intérêt public. Bien que cela puisse sembler évident, il faut que les hauts fonctionnaires qui relèvent d'un gouvernement qui représente l'intérêt de toute la population canadienne se chargent de transmettre régulièrement ce message au public et aux membres de la communauté sportive, professionnelle et amateur, pour que nous comprenions tous le contexte dans lequel le sport doit être pratiqué.
• 1625
En ce qui concerne le financement du sport, nous recommandons
que les personnes responsables des administrations de crédits
fédéraux s'assurent que tous les organismes qui reçoivent de tels
crédits soient tenus de se conformer à certaines conditions.
Une autre question sur laquelle vous allez vous pencher, à juste titre, monsieur le président, comme vous venez de le dire, est celle du financement du sport professionnel. Les règles doivent être les mêmes pour ce secteur-là également. Le comité voudra peut- être envisager d'offrir une aide différente ou encore indirecte au sport professionnel. Plusieurs programmes d'aide financière existent déjà au sein du gouvernement, et il conviendra peut-être de voir ce que peut faire le gouvernement pour le sport commercial. Mais si vous décidez de venir en aide à ce secteur, l'aide que vous lui accordez doit être assortie de certaines conditions. Elles peuvent être de nature économique, mais parmi les diverses possibilités que vous pourriez envisager, nous vous recommandons fortement d'y inclure des conditions relatives au respect des règles déontologiques.
À quoi fais-je allusion au juste? Eh bien à des éléments qui nous semblent parfaitement normaux dans le contexte du sport, du moins du sport amateur, comme les tests de dépistage des drogues. Nous voulons que le sport se pratique sans drogues. Nous voulons que le milieu sportif soit un milieu libre de harcèlement. Nous voulons que le sport soit sécuritaire pour tous.
Il ne s'agit pas d'idées nouvelles ou complexes. Il s'agit d'objectifs tout à fait réalisables, car ces choses existent déjà. Elles existent pour le bien du milieu sportif et de la pratique du sport en général, et si le comité estime qu'un apport financier est justifié, nous devons absolu nous assurer que notre investissement a des conséquences positives pour le sport en général.
Il convient également de vous signaler—et encore une fois, ce n'est pas nouveau—que le sport professionnel a des répercussions sur non seulement le sport amateur mais les valeurs que nous partageons en tant que Canadiens.
Le sport professionnel se pratique en public. En fait, les organismes de sport professionnel cherchent à se constituer un public en vendant des billets, en favorisant la participation des familles et des enfants, et en diffusant à la radio et à la télévision les rencontres des équipes sportives professionnelles. Donc il n'y a pas de véritables différences entre les deux, sauf que le sport professionnel, étant extrêmement présent dans tous les médias, touche les jeunes. Nous avons d'ailleurs les résultats de certaines études de ce phénomène, et je serais très heureux de répondre éventuellement à des questions sur l'influence que peuvent exercer les grands athlètes professionnels ou amateurs sur les jeunes.
De plus, nous recommandons que le gouvernement fédéral continue d'appuyer et de financer un organisme indépendant responsable de la promotion, de la surveillance et de l'évaluation de l'éthique dans le sport. Nous souhaitons plus particulièrement que le gouvernement assure au programme canadien de sport sans drogues un financement stable et adéquat, ce qui n'est pas vraiment le cas actuellement, du moins pas au même degré que précédemment.
Nous favorisons également l'élaboration d'une stratégie nationale, et il s'agit là d'une initiative qui s'intégrerait très bien dans le plan d'action de Sport Canada. Sport Canada est très bien placé pour jouer un rôle de chef de file dans ce domaine. Ce dernier peut se fonder sur les expériences et les succès de certaines initiatives canadiennes de lutte contre le dopage sportif ou de promotion de la déontologie dans le domaine du sport, dans le cadre du programme Esprit du sport.
De plus, la stratégie nationale devrait envisager de créer un fonds de dotation pour favoriser le respect des règles déontologiques. D'ailleurs, ce n'est pas nouveau. Nous en créons pour certains édifices ou systèmes de développement. Nous en créons également pour garantir l'accès permanent aux athlètes à l'échelle nationale. Ce n'est pas nouveau dans le secteur de la santé. La création d'un fonds de dotation spécial au profit de l'éthique dans le sport permettrait de garantir l'indépendance, la stabilité et la durabilité du programme canadien d'éthique dans le sport.
Il y a plusieurs façons novatrices de s'y prendre. Le mécanisme à privilégier n'est peut-être pas particulièrement important pour le moment, mais nous pourrions envisager d'opter pour des concepts fort simples, comme la possibilité d'émettre des obligations bénéficiant d'un traitement fiscal préférentiel ou des obligations exonérées d'impôt qui viseraient à générer des recettes pour le financement de ce genre de fonds. Il est possible que d'autres secteurs—entre autres, le secteur financier, soient prêts à collaborer avec le gouvernement afin de créer ce genre de fonds spécial pour aider nos athlètes et mettre le milieu sportif sur des assises solides en ce qui concerne le respect des principes déontologiques.
Dans le domaine du sport plus particulièrement, le gouvernement fédéral doit examiner la question de la médiatisation du sport amateur et se demander si la couverture médiatique actuelle est suffisante. Tout ce que nous pouvons faire de ce côté- là est susceptible d'avoir des répercussions économiques fort positives pour le sport amateur et d'autres secteurs également.
Susciter l'intérêt du public pose problème, et ce pour toutes sortes de raisons, entre autres la concurrence entre le sport amateur et le sport professionnel. Mais l'adoption d'une politique permettant aux manifestations de sport amateur d'être considérées comme du contenu canadien—et si c'est déjà le cas jusqu'à un certain point, il conviendrait peut-être de fixer des exigences minimales en matière de couverture médiatique—serait déjà un énorme progrès pour ce qui est de constituer un public et un marché pour l'épanouissement du sport amateur.
Il y a d'autres interventions économiques auxquelles le gouvernement pourrait éventuellement songer, telles les déductions fiscales pour les commandites privées ou des crédits d'impôt pour la participation au sport. Là je fais allusion aux parents qui doivent se mettre en frais pour que leurs enfants puissent faire partie d'équipes sportives, puisqu'il faut leur acheter de l'équipement, etc. S'il existait des crédits d'impôt de ce genre qui compléteraient les autres initiatives visant à accroître la visibilité et les possibilités de commercialisation du sport amateur, l'appui financier des entreprises serait d'autant plus important.
• 1630
Comme je viens de le dire, la création d'obligations à taux
préférentiel ou exonérées d'impôt qui encouragent la participation
du public au sport serait une possibilité intéressante à explorer.
Les gens achèteraient des obligations en fonction de leur intérêt.
Ce serait une façon pour le gouvernement de déterminer le degré
d'intérêt du public pour un sport en particulier ou le sport en
général. Si tout le monde s'en fiche, au moins vous auriez un
instrument qui vous permette de le savoir; ce même instrument vous
donnerait tout de même la possibilité de prendre des mesures
concrètes si vous constatiez qu'il existe un degré d'intérêt élevé.
Il s'agit là à mon avis d'une façon novatrice de relever ce défi.
Nous recommandons en outre que les dons en nature au profit du sport amateur et les mesures à prendre pour exploiter leur potentiel fassent l'objet de recherche et d'analyse. La valeur des dons en nature des entreprises dont bénéficie le sport est très élevée. Cependant, on ne peut pas toujours en profiter, peut-être parce qu'ils n'arrivent pas toujours au bon moment, la manifestation sportive en question ne s'y prête pas ou encore le don ne convient pas.
Nous savons d'ailleurs qu'il existe déjà au Canada des systèmes d'échange et de troc des dons en nature. Ces derniers représentent une somme d'environ 70 millions de dollars. Le milieu sportif profiterait certainement de toute initiative permettant d'assurer l'échange (et éventuellement le troc) plus rapide et opportun des dons en nature dont bénéficie le sport amateur, surtout si ces derniers pouvaient être transformés en liquidités, tout en respectant bien entendu les exigences de la législation fiscale.
Par contre, il ne serait pas souhaitable qu'un système de ce genre soit mis en place sans qu'il y ait certaines restrictions; par conséquent, s'il y avait moyen d'y apporter certaines améliorations ou de réformer éventuellement la législation fiscale pour nous faciliter les choses, telle est la ligne de conduite que nous recommanderions vivement au gouvernement.
Comme nous l'avons déjà dit, toute éventuelle aide financière fédérale dont pourrait bénéficier le sport professionnel doit s'accorder en fonction de critères déontologiques stricts, et vous devriez également envisager de demander quelque chose en retour, surtout si le sport professionnel va toucher des crédits gouvernementaux.
Au Canada, nous avons l'exemple du volley-ball, et il s'agit d'ailleurs d'une initiative du milieu du sport amateur. Au Canada, l'entrée d'un athlète dans une équipe professionnelle déclenche automatiquement le versement au sport concerné d'une redevance qui permet de soutenir le système d'encouragement et de développement des athlètes en herbe.
C'est une formule qu'il faut envisager d'étendre à l'ensemble du milieu sportif professionnel, et pas seulement au profit des sports ou au milieu sportif qui favorise l'épanouissement des athlètes pour ce sport précis, car ces activités de développement se déroulent quelque part. Autrement dit, les installations, les services fournis et l'entraînement ne concernent pas un seul sport. Ces activités secondaires doivent également se développer. Dans les diverses localités, les installations ne desservent pas un seul milieu sportif. Il serait peut-être possible de faire en sorte que ces redevances profitent non seulement aux sports individuels, mais à l'ensemble du système de développement et peut-être même à des programmes comme l'éthique dans le sport.
J'ai essayé d'abréger mes remarques liminaires pour vous communiquer l'essentiel de nos recommandations, mais il va sans dire que les questions dont nous traitons dans ce contexte sont au coeur même du sport. Vous remarquerez que notre mémoire présente certaines informations qu'il convient d'examiner dans le contexte de votre étude, entre autres les conclusions du juge Dubin à l'époque où nous nous interrogions sérieusement sur le sport. Le juge Dubin a fait un travail tout à fait exceptionnel pour ce qui est de définir l'esprit dans lequel le sport doit se pratiquer et son rôle fondamental dans la société en général.
C'est une question suffisamment complexe pour que nous recommandions que ce comité devienne permanent ou qu'un secrétaire d'État soit nommé pour se charger de ce dossier, vu l'importance de son impact au Canada. Ce comité ou un autre organe gouvernemental pourrait peut-être procéder à une étude de l'éthique dans le sport.
Dix ans se sont écoulés depuis l'enquête Dubin, ou du moins les incidents qui y ont conduit. Examiner la question du sport sans drogues c'est reconnaître le caractère insidieux des comportements contraires à la déontologie, et si vous tenez compte de tout ce qui est arrivé dans le domaine sportif en 1998—bien que les nouvelles soient à la fois bonnes et mauvaises—vous comprendrez qu'il faut s'arrêter régulièrement pour réexaminer toutes ces questions importantes.
• 1635
Voilà donc la ligne de conduite que nous recommandons vivement
au gouvernement, car supposons que le sport corresponde à une
table, mettons, si nous dévissons ou maltraitons les pieds de la
table, peu importe ce qu'on mettra là-dessus, il ne résistera pas.
Il en va de même pour le sport, qui ne saura répondre ni aux
besoins du public, ni aux objectifs que vous lui fixez. On peut
dire que les pattes correspondent aux principes fondamentaux qui
sous-tendent le sport, c'est-à-dire la déontologie, le sport sans
drogues, l'équité, le respect, l'absence de harcèlement, et la
sécurité. Voilà les éléments qui représentent l'essence du sport et
qui correspondent aux attentes des Canadiens.
Nous espérons que notre exposé et nos réponses à vos questions sur des questions déontologiques précises ou l'impact économique vous seront utiles dans le cadre de vos délibérations.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Lachance. Nous allons immédiatement ouvrir la période des questions. Nous donnerons un premier tour aux représentants de l'opposition officielle, et nous passerons ensuite aux membres de la majorité.
Monsieur Mark.
M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Lachance, de votre présence cet après-midi.
Je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire que la valeur du sport est inestimable. Il s'agit pour moi d'un élément très important du développement humain à tous les âges, c'est-à-dire depuis la petite enfance jusqu'à l'âge adulte. La question que je voudrais vous poser est la suivante: comment nous comparons-nous aux autres pays du monde du point de vue de la déontologie? Sommes- nous des chefs de file dans le domaine du sport à cet égard-là?
M. Victor Lachance: À certains égards, oui. Nous avons l'avantage, monsieur Mark, d'avoir été nous-mêmes confrontés à l'une des plus importantes questions déontologiques, c'est-à-dire le dopage sportif, et nous avons tiré d'importants enseignements de cette expérience. Nous avons beaucoup appris sur les solutions; nous savons à présent ce qui est efficace. Donc par rapport à un facteur clé, c'est-à-dire avoir un système indépendant qui permet, d'une part, d'assurer des services à la communauté sportive et, d'autre part, d'agir dans l'intérêt du public, nous sommes sans aucun doute des chefs de file.
Par exemple, notre organisme, le Centre canadien pour l'éthique dans le sport est issu de la fusion de l'ancien Centre canadien sur le dopage sportif et d'un organisme du nom d'Esprit sportif Canada. Nous sommes devenus le Centre canadien pour l'éthique dans le sport à une époque où il n'existait pas d'organisme comparable dans d'autres pays. Je suis heureux de pouvoir vous affirmer que des pays comme la Norvège et le Royaume- Uni ont commencé à prendre cette même orientation, et ont même commencé à parler de «centres pour l'éthique» et de concepts semblables.
Donc, dans un sens, nous sommes effectivement des chefs de file, et c'est justement une indication de l'unicité du milieu sportif canadien. Notre approche dans le domaine du sport est assez particulière, et voilà peut-être une autre preuve de notre leadership.
M. Inky Mark: Si vous me permettez de poser une question complémentaire, je voudrais savoir de qui relève la responsabilité—je suppose qu'il s'agit d'une responsabilité collective—de surveiller l'industrie du sport et de s'assurer que le franc-jeu et le respect des principes déontologiques caractérisent la pratique du sport?
M. Victor Lachance: Votre question appelle une réponse à deux volets. D'abord, il y a nous, le Centre canadien pour l'éthique dans le sport, mais il reste qu'un petit organisme à Ottawa ne suffira pas pour créer un système sportif respectueux des règles déontologiques. Par conséquent, nous nous contentons de fournir l'expertise, les moyens et les connaissances qui vont permettre à d'autres de réaliser cet objectif.
Personne ne niera, par exemple, que les entraîneurs jouent un rôle très important dans ce contexte. Nous savons également, grâce aux résultats de diverses études, que les entraîneurs peuvent également être à l'origine des problèmes qui se présentent du point de vue des valeurs qu'ils transmettent ou non aux athlètes. Donc, il y a un certain nombre d'intermédiaires clés qui permettent ou non la concrétisation des objectifs des programmes concernés.
En fin de compte, la méthode qui donne les meilleurs résultats—et c'est celle que nous recommandons—met l'accent sur le «changement social», et vous verrez que nous donnons une brève description de cette approche dans notre mémoire. Elle repose sur la participation de toutes les parties intéressées à l'exécution d'une stratégie nationale commune visant à influencer les comportements et les croyances des jeunes dans une multiplicité d'environnement, de façon à institutionnaliser le changement.
Donc, d'une part, il existe un centre qui coordonne ces activités et, d'autre part, le succès des mesures et de la stratégie adoptée dépend de la volonté des intéressés d'assumer une part des responsabilités.
M. Inky Mark: Merci.
Le président: Merci, monsieur Mark.
Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Je vous remercie de votre présentation et de la qualité du document que vous avez déposé. Nous devrons sûrement le lire une autre fois afin d'arriver à comprendre tout ce qu'il y a entre les lignes.
J'apprécierais beaucoup que vous me parliez du rôle que votre organisme joue dans l'ensemble du Canada au niveau du contrôle de la drogue. Est-ce que vous pourriez préciser votre pensée?
M. Victor Lachance: À la suite des recommandations du rapport Dubin et d'une entente conclue entre 28 parties, où le Canada a joué un rôle de chef de file dans le développement d'une politique mondiale contre l'usage des drogues, on a confié à notre organisation indépendante la responsabilité de tous les aspects relatifs au contrôle antidopage au Canada.
• 1640
Conformément aux recommandations du rapport Dubin, nous
avons mis sur pied une organisation
indépendante du sport, du gouvernement, du public et des
athlètes. Elle joue un rôle important à titre d'organisme
au service du milieu sportif et s'acquitte de ce rôle en
faisant preuve d'indépendance afin de
bien servir l'intérêt public. Nos
interventions comprennent le dépistage, la
détection, l'éducation, la prévention, la recherche et
les relations internationales, où
le gouvernement fédéral joue le rôle de
chef de file. Nous jouons ce rôle de chef de file ici,
au Canada.
Mme Suzanne Tremblay: Vous dites que vous êtes totalement indépendants de tout le monde. D'où provient votre financement?
M. Victor Lachance: Nous obtenons notre financement de différentes sources. Le financement du programme d'éthique provient de sources gouvernementales, de la vente de nos services, de dons et de levées de fonds dans le secteur privé. Nous avons établi la fondation l'Esprit du sport, The Spirit of Sport, pour financer notre programme d'éducation. Les subventions gouvernementales servent surtout au dépistage et au contrôle antidopage, et représentent de 75 à 80 p. 100 des sommes affectées à ce programme. Nous avons constaté qu'il était très difficile de convaincre le secteur privé de contribuer financièrement au contrôle antidopage. Un peu d'urine dans une bouteille n'intéresse personne. Cela ne représente pas des activités commerciales intéressantes ou un gros marché. De plus, à ce niveau, nous avons besoin d'un certain niveau d'indépendance, ce qui justifie très nettement l'engagement du gouvernement fédéral à cet égard.
Mme Suzanne Tremblay: J'ai lu dans un article qui a paru dans un journal à la fin de l'été que vous aviez conclu une sorte de contrat de service avec l'INRS à Montréal...
M. Victor Lachance: C'est exact.
Mme Suzanne Tremblay: ...et qu'en raison de problèmes de fonds, le Canada était sur le point de perdre son accréditation auprès du CIO pour le contrôle de la drogue. On dit que si ce problème urgent ne se règle pas, le Canada devra faire faire les tests aux États-Unis ou dans un autre pays. On ne pourra plus les faire au Canada, et ce sera le seul endroit où cela se fait. Pourriez-vous m'éclairer là-dessus, s'il vous plaît?
M. Victor Lachance: Les propos que vous relevez sont exacts, madame Tremblay. Nous faisons actuellement face à une situation très difficile au niveau du financement du programme, tout particulièrement au niveau du financement du laboratoire et de l'approvisionnement en équipement nécessaire au contrôle antidopage.
J'aimerais toutefois dire aux membres du comité que le programme antidopage est toujours en bonne forme, qu'il offre des services de qualité, que les principes qui ont guidé le programme dès ses débuts continuent de prévaloir et qu'il continue de mériter la confiance que lui ont accordée les athlètes et le public. Mais, je ne vous le cacherai pas, il court actuellement des risques en raison d'un manque de fonds.
La fermeture du laboratoire de Montréal nuirait indéniablement au programme antidopage canadien. Ce serait pour nous un embarras à l'échelle mondiale. N'allez pas croire que nous réaliserions des économies; je peux vous garantir que les tests de laboratoire nous coûteraient beaucoup plus cher aux États-Unis. De toute façon, cela engendrerait des problèmes juridiques et aurait un impact économique au Canada. Si on veut tenir des jeux d'envergure internationale au Canada, il nous est très utile d'avoir un laboratoire ici, à Montréal.
En premier lieu, je voudrais souligner que lorsqu'on a fait face à des problèmes financiers, le gouvernement a été le premier, voire même le seul, à s'impliquer et à essayer de résoudre ces problèmes. J'aimerais tout particulièrement féliciter M. Norman Moyer, du ministère du Patrimoine canadien, et Sport Canada pour leurs efforts à cet égard.
Si vous me le permettez, madame Tremblay, je vais maintenant m'exprimer en anglais pour vous livrer l'image qui me vient à l'idée.
[Traduction]
En ce qui concerne la nécessité de régler rapidement divers problèmes qui surgissent, comme celui du dopage, j'aimerais, si vous me permettez, faire une petite analogie. Ce qu'il y a de plus ironique dans tout cela, c'est que nous avons maîtrisé certaines situations fort problématiques qui n'auraient jamais dû exister au départ.
• 1645
L'analogie que je voudrais faire est la suivante: mon enfant
joue sur la voie ferrée et je me précipite pour le tirer de là
avant qu'il se fasse écraser par le train. Les gens vont évidemment
me féliciter pour mon acte et peut-être même me traiter en héros,
mais je ne serais pas surpris de recevoir aussitôt après la visite
de responsables de la société de protection de l'enfance qui me
demanderaient sans doute: «Comment se fait-il que votre enfant
jouait sur la voie ferrée?»
Tout cela pour dire que nous n'aurions jamais dû avoir institué des mesures d'intervention d'urgence pour sauver un programme canadien qui est un succès mondial. Ce serait extrêmement embarrassant pour le Canada de ne pas pouvoir trouver une solution au problème que vous soulevez.
Même si j'avoue être très content du soutien de Sport Canada et des responsables du ministère du Patrimoine canadien, que ce dossier intéresse au plus haut point et qui sont résolus à intervenir dans la mesure du possible, je trouve personnellement que c'est embarrassant et même honteux qu'ils soient obligés d'intervenir de cette façon pour combler des écarts qui n'auraient jamais dû exister au départ. Je les en remercie, mais j'aurais préféré qu'ils ne soient pas obligés de le faire.
[Français]
En ce qui concerne le programme antidopage, une rencontre tenue tout récemment entre le gouvernement fédéral et l'Association olympique canadienne nous permet d'avoir un peu plus d'espoir aujourd'hui. Tout le monde reconnaît la gravité du problème. Puisque les solutions sont là, j'ai bon espoir qu'on pourra en discuter davantage, au moins à court terme, et essayer de trouver des solutions. J'espère que ce sera toujours le cas. L'essentiel, c'est de garantir que nous aurons toujours un programme efficace qui saura répondre aux besoins des athlètes.
Mme Suzanne Tremblay: J'aurais d'autres questions, mais je cède la parole à mes amis d'en face.
[Traduction]
Le président: Merci, madame Tremblay et monsieur Lachance.
Nous avons beaucoup de chance au Canada et au comité plus particulièrement d'avoir une ministre responsable du sport qui se passionne vraiment pour cet aspect de son portefeuille. Je parle évidemment de Sheila Copps, qui appuie beaucoup le travail du comité. Vous avez attiré notre attention sur un problème que nous allons certainement lui communiquer.
Nous sommes également très heureux de pouvoir compter sur la présence de M. Cannis, qui est en quelque sorte les yeux et les oreilles de la ministre au comité et qui assiste aux réunions du comité en vue d'agir sur des problèmes comme celui que vous venez de décrire. Sachez donc qu'on a pris bonne note de vos remarques.
Monsieur Coderre.
[Français]
M. Denis Coderre: Monsieur le président, j'ai tellement aimé la question de mon amie d'en face que je veux continuer à en parler.
On a beau remercier les fonctionnaires et leur dire qu'ils sont beaux et gentils, mais au bout de la ligne, on n'a pas l'argent. De combien d'argent a-t-on besoin pour régler le problème?
M. Victor Lachance: Afin d'avoir un programme antidopage semblable à ceux des autres organisations avec lesquelles nous faisons régulièrement affaire en Australie, en Grande-Bretagne, en Norvège, en Nouvelle-Zélande, en France et aux Pays-Bas, nous aurions besoin de 2,5 millions de dollars par année. Ce qui nous coûte cher, c'est évidemment le dépistage. Mais ça coûte ce que ça coûte. Je pourrais comparer cela à une police d'assurance. Si on n'a que 85 p. 100 de la prime, on est près du compte, mais au fond, on n'est pas assuré.
Je ne propose pas que le programme antidopage soit une assurance. Je voudrais plutôt mettre l'accent sur le fait que ça coûte ce que ça coûte. Les laboratoires, les analyses et l'équipement sont tous standardisés, cela au niveau que nous avons prôné à l'échelle mondiale. Nous faisons malheureusement face à une situation où on ne peut pas respecter les normes que nous avons recommandées et qui seront adoptées sous peu par les instances sportives internationales.
M. Denis Coderre: Si je comprends bien, monsieur Lachance, vous avez besoin de 2,5 millions de dollars par année pour que ça fonctionne.
M. Victor Lachance: Oui, pour le programme antidopage.
M. Denis Coderre: Également, si on veut rester indépendant, on ne peut pas demander trop de fonds au secteur privé puisqu'on doit éviter d'avoir avec lui des liens trop étroits. Comme vous voulez vous assurer que le sport soit pratiqué de façon juste et morale et que vous parlez d'éthique, je verrais mal qu'une compagnie pharmaceutique vous finance.
M. Victor Lachance: C'est une très belle observation. Nous savons par expérience que le secteur privé s'intéresse beaucoup plus à nos programmes d'éducation, ce qui est normal. Nous y faisons la promotion des choses très positives: les valeurs du sport et l'excellence sportive. Ce sont des concepts qui se vendent, et nous connaissons du succès à cet égard. Ainsi, depuis quelques années, nous ne recevons pas de fonds du gouvernement fédéral pour développer nos programmes d'éducation et nous réussissons quand même très bien grâce à notre fondation Esprit du sport.
Quant à notre programme antidopage, grâce à la vente de nos services à des fédérations internationales, nous recueillons environ 200 000 $ par année. On aide d'autres pays de temps à autre. Quand on peut être utile à d'autres pays pour le développement de programmes antidopage, c'est rentable, mais il y a une limite.
M. Denis Coderre: Actuellement, vous demandez 2,5 millions de dollars. Combien avez-vous actuellement?
M. Victor Lachance: Du gouvernement fédéral?
M. Denis Coderre: Oui.
M. Victor Lachance: C'est une question à laquelle il est très difficile de répondre. Nous recevons 1,9 million de dollars du gouvernement fédéral, mais c'est pour tous nos problèmes d'éthique. Donc, il m'est difficile de vous dire le montant que le gouvernement fédéral nous octroie pour le programme antidopage. Ce que je peux vous dire, c'est qu'étant donné la situation qu'on vit aujourd'hui, on consacre ces 1,9 million de dollars au programme antidopage.
M. Denis Coderre: Pourquoi n'allez-vous pas aussi du côté de Santé Canada? Pourquoi avez-vous recours uniquement à Patrimoine Canada? Vous avez des laboratoires et vous faites de la recherche-développement. Pourquoi n'allez-vous pas aussi du côté de Santé Canada ou d'Industrie?
M. Victor Lachance: Je suis entièrement d'accord. On l'a déjà fait de temps en temps. Par exemple, Santé Canada nous a subventionnés pour des programmes d'éducation, surtout concernant le sida et les risques associés à l'usage des aiguilles.
M. Denis Coderre: Ne parlez que de l'antidopage.
M. Victor Lachance: L'éducation était un peu reliée à l'antidopage.
M. Denis Coderre: Vous essayez de trouver de l'argent pour vos laboratoires. Il faut se comprendre.
M. Victor Lachance: Jusqu'à maintenant, on n'a pas réussi, mais on n'a peut-être pas fait suffisamment d'efforts. Naturellement, toute aide à cet égard nous serait très utile.
M. Denis Coderre: Parlons de perceptions. C'est un peu ce que vous avez fait tout à l'heure. Vous avez dit que si on donne de l'argent au secteur professionnel, on doit en donner plus au secteur amateur. À mon avis, il est clair qu'on peut mâcher de la gomme et marcher en même temps. On peut établir un partenariat entre le secteur professionnel et le secteur amateur en imposant au secteur professionnel d'investir davantage au niveau du sport amateur.
On connaît les problèmes de la situation actuelle. Ça a commencé avec Ben Johnson. On a eu des problèmes au niveau de l'haltérophilie ainsi qu'au Tour de France dernièrement. Les gens se disent que, bien sûr, il prend quelque chose, car il est trop gros. Quelle est actuellement la réalité au Canada au niveau du sport, tant amateur que professionnel? Pour les fins de la cause, parlons du sport amateur. Êtes-vous satisfait des résultats des 10 dernières années, depuis l'événement Ben Johnson? Avez-vous vraiment le pressentiment que l'athlète est vraiment exempt de drogue? Premièrement, à mon avis, le gouvernement fédéral ne finance pas assez les athlètes. Le jour où il gagne une médaille, l'athlète a des commanditaires, mais avant cela, il vit au seuil de la pauvreté. Donc, on exerce énormément de pression sur l'athlète pour qu'il passe de la médaille au secteur professionnel. Pour y arriver, il peut tomber dans la facilité, c'est-à-dire la drogue et aussi la pilule qui cache le dopage. J'aimerais que vous me parliez un peu de cela. Quelle est la réalité de la situation actuelle? Est-ce qu'on en fait assez? Est-ce que l'athlète est laissé à lui-même? Est-ce qu'on peut dire qu'on est dans un pays vraiment drug-free?
M. Victor Lachance: C'est vraiment drug-free.
M. Denis Coderre: D'accord.
M. Victor Lachance: Le programme fonctionne très bien. Il faut voir que le but du programme est de découvrir les cas dans lesquels il y a usage de drogue. Lorsqu'on découvre une infraction, cela indique que le programme fonctionne, mais cela veut aussi dire que les athlètes qui nous représentent partout dans le monde font face à un programme qui est parmi les meilleurs. Je serais prêt à vous dire que c'est le meilleur au monde. Par exemple, pour ce qui est du nombre de tests faits hors compétition, nous sommes les premiers au monde. Le programme fonctionne. C'est là qu'est le défi et, en même temps, la frustration. Le problème n'est pas qu'on ne connaît pas les solutions. On les connaît.
M. Denis Coderre: Le problème, c'est le financement.
M. Victor Lachance: Il y a deux volets au problème. Premièrement, on n'a pas la volonté ou le courage de mettre en vigueur les solutions. Deuxièmement, il y a le financement.
M. Denis Coderre: Donc, on a aussi un problème de volonté.
M. Victor Lachance: Pas au Canada. Eh bien, il y en a un si on fait un lien entre la volonté et le financement.
M. Denis Coderre: C'est ce que vous me dites.
M. Victor Lachance: Pardon?
M. Denis Coderre: Il y a un problème de leadership.
M. Victor Lachance: Eh bien, disons qu'un peu plus de leadership...
[Traduction]
M. Denis Coderre: Autrement dit, un placement d'argent convainc plus qu'un beau discours.
[Français]
M. Victor Lachance: Oui.
M. Denis Coderre: D'accord.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Coderre. Nous passons maintenant à M. Provenzano.
M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.): J'allais vous poser d'autres questions au sujet du niveau d'investissement dans votre centre—c'est-à-dire le financement assuré directement par le gouvernement fédéral—mais finalement je préfère consacrer mon temps à d'autres questions qui portent plutôt sur le franc-jeu et la déontologie.
À mon avis, tout le monde accepte les conclusions du rapport du juge Dubin, entre autres qu'un apport financier du gouvernement dans l'industrie du sport, aussi justifié soit-il dans l'intérêt du public, ne favorise la société que si le sport, d'une part, est pratiqué conformément aux principes du franc-jeu et aux règles déontologiques et, d'autre part, traduit les valeurs et l'éthique de la nation. Le groupe de travail de la ministre est chargé de veiller à l'exécution de cette responsabilité.
Il arrive parfois que l'équité et les règles déontologiques soient écartées—d'ailleurs, c'est certainement ce qui est arrivé à certains athlètes amateurs, notamment ceux qui pratiquent le patinage artistique. Pour parler plus précisément du concours des couples et de la danse sur glace, je pense que beaucoup de gens s'accordent pour dire que c'est dans ces disciplines que le respect du franc-jeu—qui vise également les juges dont les décisions doivent également être conformes à la morale—semble un peu douteux. Des problèmes de ce genre provoquent un tollé général dans le cadre des Jeux olympiques.
Je suis convaincu que le Centre souhaite réparer des torts de ce genre, mais je n'entends jamais parler de mesures qui auraient été prises en ce sens par votre organisation. J'espère que je me trompe. On dirait qu'entre les Jeux olympiques, cette cause n'intéresse personne.
Ma question est donc la suivante: pourquoi ne poursuivons-nous pas nos efforts en faveur des athlètes canadiens, pour qu'ils évitent de subir le même traitement que celui réservé aux patineurs lors des Jeux olympiques? Et si nous sommes dans l'impossibilité de faire quelque chose, compte tenu des critères proposés par le groupe de travail Dubin relativement à l'investissement de deniers publics dans l'industrie du sport, comment peut-on justifier le financement actuellement accordé pour des compétitions de haut niveau dans ce sport en particulier et dans n'importe quel autre sport où l'on n'adhère pas au principe du franc-jeu et aux règles déontologiques?
M. Victor Lachance: C'est une question difficile que vous me posez là. J'aimerais pouvoir vous dire que vous vous trompez, mais ce n'est pas vrai. Vous avez parfaitement raison. Il n'y a guère d'interventions quand des incidents de ce genre se produisent. Les médias en parlent et les gens réagissent. Je suis souvent encouragé par leur réaction, mais cela ne règle malheureusement pas le problème.
La réponse la plus concise que je puisse vous faire serait de vous dire que c'est un problème d'intérêts incompatibles. Il y a tout simplement trop de priorités qui se trouvent en conflit. Je reviens à mon analogie de tout à l'heure: c'est comme si nous permettions que les pieds de la table rivalisent avec le plateau de cette même table. Ceux qui sont responsables de l'exécution des programmes sportifs acceptent très mal qu'on consacre autant de ressources à la structure—c'est-à-dire aux pieds—qui permet justement de soutenir l'institution du sport. Et c'est le cas non seulement au Canada mais dans le monde entier.
C'est d'ailleurs un phénomène auquel Sport Canada est constamment confronté. Et nous ne sommes pas seuls. Par rapport à l'information que nous réunissons ou les intérêts qui sont exprimés par divers groupes, nous sommes parfois appelés à représenter l'ensemble de la communauté du sport amateur.
Prenons l'exemple du harcèlement en milieu sportif. La réaction de la communauté a été tout à fait extraordinaire. Elle veut vraiment s'attaquer à ce problème au Canada, dans la foulée des révélations de Sheldon Kennedy concernant l'exploitation sexuelle des joueurs de hockey.
Mais quand on attire l'attention sur ces difficultés, à cause justement de ces intérêts incompatibles et de la façon dont les sports sont financés au Canada, les uns et les autres s'entre- déchirent. Cette priorité s'oppose à celle du soutien des athlètes. Et qui veut prendre l'argent dans la proche des athlètes pour assurer le respect des principes déontologiques dans la pratique du sport? D'un autre côté, qui veut des athlètes qui pratiquent le sport dans un environnement où l'éthique ne compte pas? On ne s'en sort pas.
C'est justement pour cette raison que nous recommandons la création d'un fonds destiné à favoriser l'éthique dans le sport—c'est-à-dire un fonds indépendant; et si ce n'est pas possible, il conviendrait de créer une source distincte de financement pluriministériel au niveau fédéral qui reconnaît l'interdépendance des différences priorités et qui permet d'intervenir quand des problèmes de ce genre surgissent.
M. Carmen Provenzano: Monsieur Lachance, si je comprends bien, vous dites que des intérêts incompatibles compromettent le franc- jeu et le respect des principes déontologiques. Vous représentez le centre qui est censé être le défenseur du franc-jeu et de l'éthique. Comment se fait-il que ces intérêts incompatibles entravent les efforts qui devraient être déployés par un organisme comme le vôtre pour réparer les injustices commises par le passé, de sorte que nos athlètes qui participent aux Jeux olympiques n'en soient plus les victimes?
M. Victor Lachance: Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je précise que ces intérêts incompatibles n'existent pas au sein de notre organisme. Mais nous sommes parfaitement d'accord. Nous désirons surtout nous attaquer à ces problèmes, et c'est la raison pour laquelle nous sommes convaincus que vous avez besoin d'un organisme centralisé mais indépendant comme le nôtre.
Vous me forcez à parler de financement, et là je dois vous dire que nous ne pouvons nous acquitter de nos responsabilités que dans la mesure où nous disposons de ressources suffisantes. C'est justement lorsque nous essayons de trouver d'autres sources de financement pour nous attaquer aux difficultés que vous soulevez que nous nous heurtons au problème des rivalités qu'engendrent des intérêts incompatibles. Comme vous, nous estimons que ce genre de situation peut difficilement se défendre, mais par contre, je n'ai pas de solution simple à vous proposer pour régler le problème que pose des intérêts incompatibles, comme celui d'aider les athlètes et celui d'assurer le respect des règles déontologiques dans la pratique du sport.
Il est vrai qu'on ne devrait pas nécessairement avoir à faire face à ce genre de dilemme. Mais la question de l'éthique dans le sport est très complexe. On se demande par quoi commencer. De plus, c'est un problème qui peut nécessiter un investissement de ressources substantielles. Voilà l'enjeu pour nous, car si nous ne trouvons pas de solution, nous aurons effectivement un grave problème.
Mais si on examine le problème du point de vue de son impact économique sur l'industrie du sport au Canada, nous aurons raison d'être optimistes, car un peu comme nous l'avons vu dans la campagne antidopage—campagne qui nous a permis de maîtriser la situation, de sensibiliser les autres pays du monde à ce problème, de convaincre les intéressés du bien-fondé de notre approche et d'aider d'autres à y faire face—nous sommes aussi tout à fait en mesure de maîtriser la situation en ce qui concerne la question de l'éthique dans le sport.
Nous y avons déjà investi certaines ressources. Nous avons mis sur pied une sorte de micro-industrie au Canada sur laquelle nous pouvons nous appuyer pour réaliser cet objectif, car du point de vue du principe du franc-jeu et des efforts antidopage, le Canada a été un véritable chef de file et a une bonne longueur d'avance sur les autres pays. Si nous voulons assumer un rôle de direction dans ce dossier, rôle qui serait bénéfique pour le Canada en nous permettant de nous entendre sur la définition des concepts et des situations—entente qui va nous unir et nous donner un sentiment de satisfaction à l'égard de la pratique du sport au Canada—tout le monde y trouvera son compte, notamment si nous élaborons le genre de stratégie nationale que nous proposons dans notre mémoire—une stratégie nationale que nous pourrions éventuellement partager avec le reste du monde.
M. Carmen Provenzano: Merci.
Le président: Merci, monsieur Provenzano.
Je passe maintenant à M. O'Brien.
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de votre exposé, monsieur Lachance.
Pour ce qui est de votre recommandation no 8, évidemment, l'une des grandes questions que nous examinons au sous-comité et qui fera l'objet de recommandations est celle de savoir si les concessions sportives professionnelles devraient bénéficier de subventions. Pensez-vous que cette idée serait bien accueillie par le public?
M. Victor Lachance: C'est-à-dire que le fait de ne pas en offrir mécontenterait sans doute le public; c'est comme ça que je vois les choses. Je ne peux pas vous garantir que si vous décidez de leur accorder des subventions, le public sera tout à fait d'accord, mais je suis convaincu que si l'on ne reconnaît pas que le sport professionnel ne se pratique pas en vase clos, la formule de l'autofinancement de ce secteur sera un échec.
Les économistes ne vont pas vous soutenir, car la plupart d'entre eux, d'après ce que j'ai pu comprendre, maintiennent que de nombreuses études indiquent que sur le plan purement économique, on peut dire que dans le cas du sport professionnel c'est le moins fort qui l'emporte. Les études menées par Statistique Canada—notamment celle faite en 1998 sur la vitalité du secteur sportif au Canada; il s'agit donc d'études assez récentes— indiquent effectivement que le sport professionnel au Canada représente environ 5 p. 100 des 6 milliards de dollars qui correspondent au PIB de l'industrie du sport. Autrement dit, le sport professionnel correspond à 5 p. 100 de cette somme et le reste est attribuable au sport amateur.
Donc, si nous envisageons de donner une aide financière à un secteur qui ne représente que 5 p. 100 de l'apport économique de l'industrie sportive en général, sans prévoir des conditions favorables pour l'autre composante de l'industrie, notre intention à ce moment-là n'est pas de favoriser l'institution du sport. Notre objectif alors serait tout autre, c'est-à-dire venir en aide à l'industrie du spectacle.
M. Pat O'Brien: Je comprends votre argument, mais je ne sais pas si vous avez vraiment répondu à ma question. À votre avis, le public serait-il en faveur de l'attribution de subventions au secteur du sport professionnel? Il va sans dire que la grande majorité des citoyens sont d'accord pour subventionner le secteur du sport amateur, et je suis convaincu que bon nombre d'entre eux—peut-être pas tout le monde—serait en faveur de l'accroissement du financement qu'on lui accorde actuellement. Mais croyez-vous que le public soit en faveur du subventionnement des concessions sportives professionnelles?
Si vous deviez me répondre par un oui ou un non, ce serait...?
M. Victor Lachance: Non.
M. Pat O'Brien: Non? Je ne comprends pas votre réticence.
M. Victor Lachance: La réponse est non, mais ma réticence découle du fait qu'à mon avis, le public pourrait éventuellement se rallier à cette cause. À mon avis, le sport professionnel pourrait faire partie du patrimoine canadien.
M. Pat O'Brien: C'est déjà le cas.
M. Victor Lachance: Non, pas vraiment, s'il est considéré comme du spectacle mais rien de plus.
M. Pat O'Brien: C'est un point de vue intéressant, mais j'estime au contraire que le sport professionnel a toujours constitué et constitue toujours un élément assez important de notre patrimoine culturel.
En tout cas, vous m'avez répondu. Merci.
Peu importe—et vous avez peut-être raison, étant donné les avis qui ont été exprimés à ce sujet, mais cela ne veut pas dire que le comité ne peut pas faire une telle recommandation; par contre, pourquoi voudrions-nous exiger que les équipes professionnelles s'engagent à aider financièrement le sport amateur pour obtenir des subventions? Pourquoi le gouvernement ne pourrait- il pas simplement le faire lui-même—c'est-à-dire augmenter les crédits actuellement accordés au sport amateur—et défalquer de cette somme le montant de la subvention qu'il envisage d'accorder au sport professionnel? Quel est l'avantage de l'approche indirecte que vous nous conseillez dans votre recommandation no 8?
M. Victor Lachance: D'abord—et cela répond en partie à votre première question—le public serait à mon avis beaucoup plus favorable s'il constatait que le gouvernement imposait au sport professionnel des conditions très précises plutôt que de monter une opération de sauvetage qui mette de l'argent dans les poches des propriétaires—autrement dit, s'il constatait que le sport professionnel fait effectivement partie de l'institution du sport, que le sport fait partie de notre patrimoine, et que l'esprit sportif veut qu'il y ait une certaine réciprocité. Ce serait une façon de reconnaître que le système de développement n'existe pas en vase clos.
Quant à la possibilité d'accroître l'aide accordée au sport amateur, il va sans dire que nous n'y sommes pas opposés. Par contre, il ne nous a pas toujours été facile de définir notre position à cet égard car l'approche gouvernementale dans le domaine du sport a basculé à maintes reprises, favorisant tantôt une participation généralisée et la promotion d'objectifs sociaux et nationaux et tantôt l'accumulation des médailles, la performance, le sport professionnel, etc., engendrant ainsi une forte tension entre les deux. À mon avis, ce n'est pas absolument nécessaire.
M. Pat O'Brien: Je suis d'accord. Comme j'ai une expérience considérable de l'enseignement des sports, j'estime que les deux sont obligatoires; l'un n'exclut pas l'autre.
M. Victor Lachance: Je suis d'accord.
M. Pat O'Brien: Vous n'êtes pas sans savoir évidemment que les équipes professionnelles au Canada—toutes si je ne m'abuse—apportent une contribution assez importante à l'industrie du sport, contribution qui peut prendre la forme de liquidités, d'heures travaillées par des employés, etc. Vous estimez je suppose qu'elles devraient faire plus et avoir des objectifs précis à atteindre. Est-ce bien cela que vous laissez entendre?
M. Victor Lachance: Je disais simplement que la justification du financement fédéral du sport professionnel et du sport amateur devrait être la même. Autrement dit, si vous accordez des subventions au sport professionnel, vous devriez exiger la création de programmes de tests de dépistage des drogues, de programmes de formation à la prévention des accidents, de politiques et de programmes sur le harcèlement en milieu sportif, et ce genre de chose, parce qu'on parle de l'institution du sport dans son ensemble. On ne parle plus de l'aspect spectacle mais du sport.
M. Pat O'Brien: C'est vrai. Je suis tout à fait d'accord.
Votre cinquième recommandation concerne la création d'un fonds spécial pour la promotion de l'éthique dans le sport. Pourriez-vous nous donner d'autres détails à ce sujet? De quoi s'agit-il au juste?
M. Victor Lachance: Ce serait une façon de régler le problème qu'a soulevé M. Provenzano, à savoir comment s'attaquer au problème de déontologie et ce, en permanence? Comment s'assurer que les personnes qui s'acquittent de cette responsabilité sont vraiment indépendantes et n'ont pas d'intérêts particuliers à protéger? Si un organisme indépendant n'est pas vraiment indépendant, on peut supposer qu'il n'est pas en mesure de faire des vérifications déontologiques et de faire des recommandations qui cadrent avec l'intérêt du public.
Dans le domaine du sport, le concept d'un fonds de dotation ou d'affectations spéciales... C'est-à-dire que le gouvernement pourrait jouer un rôle dans la mise sur pied d'un tel fonds, en explorer les possibilités avec d'autres et peut-être aussi encourager fortement le secteur privé, ou certains segments du secteur privé, à y participer en établissant un fonds de ce genre qui contribue à financer de telles activités.
M. Pat O'Brien: Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur O'Brien.
Chers collègues, j'aimerais avoir votre avis sur la question suivante. Nous sommes un petit peu en retard, mais il ne fait aucun doute que la question de l'éthique dans le sport est extrêmement importante. Je voudrais donc savoir si les membres sont d'accord pour permettre à certains députés de poser une autre question à M. Lachance? Très bien.
Les membres de la majorité ont déjà eu 20 minutes, alors nous allons donner un autre tour aux partis d'opposition, avant de passer encore une fois de l'autre côté. Ça va?
Donc, vous êtes d'accord pour prolonger un peu le temps qui devait être imparti à notre témoin? Vous êtes d'accord aussi, monsieur Lachance?
M. Victor Lachance: Je voudrais simplement présenter mes excuses à tous ceux que cela pourrait déranger.
Le président: J'espère que les témoins qui vont vous suivre ne se sentiront pas insultés, car il s'agit effectivement d'une question très importante que nous nous devons d'approfondir.
Monsieur Mark.
M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.
Ma question concerne la déontologie. Même si le sport professionnel ne représente que 5 p. 100 de l'industrie globale, comme vous venez de nous l'indiquer, celui-ci a tout de même une incidence considérable sur l'éthique et les comportements des amateurs. Je voudrais donc savoir si vous avez eu beaucoup de contacts avec ceux qui travaillent dans ce secteur? Dans l'affirmative, je suppose que les écarts de conduite sur le plan déontologique sont parfois assez importants. Comment donc réduire ces écarts?
M. Victor Lachance: Non, nous n'avons pas beaucoup travaillé avec le secteur du sport professionnel, en partie parce que nous avons voulu mettre l'accent sur le sport amateur. Donc, jusqu'à un certain point, c'est à cause des priorités que nous nous sommes fixées, mais pour vous dire vrai, nous n'avons pas non plus été contactés, et quand nous avons offert de collaborer, nos offres n'ont pas toujours été bien accueillies.
Il faut bien comprendre que notre rôle est tel que si un problème surgit, nous allons nécessairement nous prononcer là- dessus. C'est tout à fait normal. C'est la raison même de notre existence. Les médias viennent nous demander nos opinions au sujet de l'éthique dans le sport. Et quand nous nous prononçons sur la question, la réaction des responsables du sport professionnel est habituellement assez froide, si l'on se fonde sur les expériences du passé. D'ailleurs, notre correspondance en est la preuve; on nous répond en général en disant: «Cela ne nous intéresse aucunement de traiter avec un organisme comme le vôtre qui se permet de faire des déclarations publiques à notre sujet.» Je peux très bien comprendre leur position. C'est peut-être le prix à payer.
Mais il n'y a pas de raison que ce soit ainsi. Une fois que nous aurons adopté une approche plus globale, une stratégie nationale, et que nous aurons tenu un franc débat sur nos attentes vis-à-vis de l'institution du sport, le milieu du sport professionnel pourra certainement jouer un rôle extrêmement important et positif. Mais jusqu'à présent, nos contacts avec le milieu du sport professionnel ont toujours été assez ponctuels, c'est-à-dire quand il fait appel à nos services. Nous nous sommes toujours empressés, et nous continuerons de le faire, d'offrir nos services à tous ceux qui souhaitent y recourir.
M. Inky Mark: Merci.
[Français]
Le président: Madame Tremblay.
Mme Suzanne Tremblay: Vous avez fait allusion au divertissement tout à l'heure. J'aimerais que vous m'expliquiez un peu. Dans votre texte, vous dites que l'utilisation de la drogue pour améliorer la performance athlétique peut être permise dans le monde du divertissement mais pas dans le monde du sport. Est-ce que cela veut dire que McGuire fait du divertissement?
M. Victor Lachance: C'est justement le problème que nous a révélé l'affaire McGuire. Pourquoi n'y a-t-il pas eu de réaction aux États-Unis, comme on s'y serait attendu? Au Canada, tout le monde a réagi comme si c'était un crime.
Dans le milieu sportif, on confond le sport et le divertissement. Certaines activités sont considérées primordialement comme des activités de divertissement. Dans le cas d'une activité de divertissement, nos valeurs ne sont pas les mêmes que dans le cas du sport. Prenons l'exemple du bonhomme qui nous a préparé ce beau tableau des Pères de la Confédération. Est-ce que nous nous demandons si cette personne a pris des drogues pendant qu'elle préparait ce tableau? Est-ce que cela nous inquiète? Peut-être que non. Est-ce que nous nous demandons si les musiciens sont drogués lorsqu'ils nous offrent une performance formidable? Peut-être que non. Je ne le sais pas. On se sert d'autres critères pour les juger. Quand c'est du divertissement, les gens s'attendent peut-être à autre chose.
Le problème dans le sport, surtout le sport professionnel, c'est que leur business est la vente du sport. Notre position à cet égard, c'est que si vous êtes dans la vente du sport, vous avez l'obligation de protéger l'intégrité du sport parce que vous vendez au public quelque chose qui, pour lui, est beaucoup plus qu'un produit de divertissement. Le sport fait partie de notre culture, de notre nation, de nos valeurs. Si on se sert de cela pour vendre du divertissement, de l'amusement, il faut protéger l'intégrité du sport. C'est ce qui manque en ce moment dans le milieu du sport professionnel.
[Traduction]
Le président: Monsieur Cannis.
M. John Cannis: Merci, monsieur le président.
Bienvenue à notre comité, Victor. Je suis bien content de vous revoir.
Si vous me permettez, monsieur le président, je voudrais faire une ou deux brèves remarques avant de poser mes deux questions.
Le président: Monsieur Cannis, je dois vous interrompre. Je veux bien que vous fassiez deux brèves remarques, mais je tiens à vous signaler que je vais devoir...
M. John Cannis: Me couper la parole.
Le président: Non, pas vous couper la parole, mais je veux tout de même vous rappeler—et rappeler à M. Coderre, parce que je sais qu'il veut poser une petite question—que nous devons être conscients du temps dont nous disposons pour la séance. Rappelons- nous que d'autres témoins attendent.
M. John Cannis: Très bien.
Je voudrais commencer par vous dire à quel point je suis content de voir que vous ayez fait le lien entre le sport et les jeunes. À l'heure actuelle, même dans la province de l'Ontario—et je n'ai pas l'intention de dire qui a raison et qui a tort—beaucoup de jeunes à qui j'ai parlé sont très découragés et très mécontents du fait que les activités sportives dans leurs écoles ont plus ou moins disparu. À mon avis, nous manquons de vision puisque nous n'avons toujours pas compris qu'il faut commencer à former les athlètes quand ils sont encore très jeunes pour qu'ils puissent profiter au maximum du système. En plus, la nouvelle annoncée hier qu'un de nos athlètes olympiques, M. Ives, va s'installer aux États-Unis a été particulièrement déprimante.
Tout à l'heure, vous nous avez parlé de certains succès du CCES. Pourriez-vous nous donner d'autres détails à ce sujet? S'agit-il de réalisations d'ordre international? Quelle est la nature des relations qu'entretient le Centre avec d'autres organismes situés à l'étranger du point de vue de l'échange de technologies, de la formation, et des sources de financement?
• 1715
Je voudrais également savoir s'ils ont épousé la cause de
l'éthique dans le sport et du franc-jeu? En fait-on la promotion
sur la scène internationale? Les différents partenaires
internationaux collaborent-ils entre eux? Pourriez-vous également
nous parler de la nature des rapports entre le CIO et le CCES?
Je m'arrête là, monsieur le président.
Le président: Très bien.
M. John Cannis: Tant pis pour ma liste.
M. Victor Lachance: Sur le plan des efforts de lutte contre le dopage sportif, où nous avons réussi à nous faire une réputation internationale, il existe d'excellents liens coopératifs, comme je vous le signalais tout à l'heure, surtout par le biais d'ententes de gouvernement à gouvernement avec des pays comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, le Royaume-Uni, la Suède, les Pays- Bas, les Antilles et certains autres pays. De plus, notre centre entretient des relations de plus en plus étroites avec des organismes américains.
Nous répondons aux demandes d'information qui viennent d'autres pays du monde au sujet de nos programmes, le plus souvent nos programmes éducatifs, et notamment le programme l'Esprit du sport, qui est un excellent moyen de véhiculer des idées très positives. Nous savons que cette approche donne de très bons résultats chez les enfants—c'est-à-dire leur inculquer des valeurs et des attitudes qui, d'après les résultats de certaines études, permettent de les immuniser contre le dopage sportif. C'est une initiative extrêmement positive, et d'autres pays s'y intéressent nécessairement et veulent travailler avec nous dans ce domaine.
Pour ce qui est de l'éthique dans le sport, nos efforts commencent maintenant à susciter l'intérêt d'autres pays pour cette question. C'est là que nous avons tendance à jouer en quelque sorte un rôle de chef de file. La nécessité d'une éthique solide est bien comprise. Dans toutes les régions du monde, l'enjeu de l'éthique s'impose. Elle est devenue la condition sine qua non pour traiter en confiance avec autrui, et il en va de même pour le sport.
Par conséquent, nos activités suscitent beaucoup d'intérêt, à preuve les demandes d'information que nous recevons d'autres pays, l'utilisation de notre site Web et le nombre d'occurrences par jour, et d'autres indications de même genre.
Pour ce qui est du CIO, ce dernier défend les valeurs du mouvement olympique, qui sont l'essence même de l'éthique. Il y a d'ailleurs au sein du CIO un mouvement en faveur du renouvellement de ces valeurs, et nous nous en réjouissons.
Pour ce qui est des programmes antidopage, par le passé nos rapports ont été un peu moins positifs, mais là encore, les nouvelles sont bonnes. Le CIO a récemment annoncé son intention—et nous pensons que c'est vrai cette fois-ci—de mettre sur pied un programme mondial de lutte contre le dopage sportif. Il faudra un certain temps pour préparer le programme et convaincre la famille olympique de l'adopter, mais le CIO est prêt à le financer, et c'est ça l'élément important. Il a également défini un certain nombre de principes qui sont à notre avis ceux qui s'imposent—l'indépendance; la protection des droits des athlètes; la création de programmes de déontologie, d'éducation et de prévention; la rigueur des dispositions juridiques et des politiques appropriées.
M. John Cannis:
[Note de la rédaction: Inaudible] bénéficiera de l'appui financier du CIO?
M. Victor Lachance: C'est possible pour deux raisons. D'abord, je pense que le marché va prendre de l'expansion, expansion dont nous pourrons profiter. Cela devrait se produire à mon avis dans environ deux ans. Deuxièmement, dans l'immédiat, nous allons offrir de contribuer à élaborer ce programme et à prendre contact avec d'autres organismes.
Le problème qui se pose à cet égard est double. D'abord—et nous sommes d'accord là-dessus—ce sont surtout les pays sans mesure aucune qui ont le plus besoin de programmes. Nous allons donc essayer de venir en aide à ces pays-là, et tous les services que nous leur offrons dans ce contexte ne seront pas nécessairement gratuits; donc nous pourrons assurer un certain recouvrement des coûts de ce côté-là.
Le risque que j'entrevois, et je vais l'exprimer librement devant vous, peut-être même pour la première fois publiquement. Je crains—et j'espère me tromper—que si le CIO trouve le moyen de réunir les recettes nécessaires par divers moyens, y compris les partenariats, les commandites, etc., d'autres se désintéresseront de cette activité et voudront retirer leur apport financier. Ce serait à mon avis une grave erreur. La solution à ce problème repose sur l'action concertée. Si nous sommes des rivaux, cela ne peut que nuire à la cause.
À l'heure actuelle, les programmes antidopage représentent environ 20 millions de dollars dans le monde entier, et la proposition du CIO permettrait peut-être de quadrupler, ou du moins de tripler, la somme en question. C'est à peu près le montant qu'il faut pour mener à bien ce projet à l'échelle mondiale. Nous faisons notre part, et il faut continuer. Il ne conviendrait pas de diminuer notre effort. L'avantage, c'est que les programmes que nous exécutons ici au Canada seront reproduits dans le monde entier. Si nous maintenons notre niveau d'activité, nous les aiderons à mener à bien les projets qui sont entrepris dans le monde entier. À ce moment-là, tout le monde sera sur un pied d'égalité.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Coderre, voulez-vous poser une brève question avant que nous passions au prochain témoin?
[Français]
M. Denis Coderre: Oui. Je pense que votre ennemi n'est pas le sport professionnel, monsieur Lachance. Si on veut atteindre l'objectif primordial, qui est la qualité de vie de l'athlète et la sauvegarde du sport comme tel, il va falloir reconnaître une fois pour toutes que le sport professionnel n'est pas que du divertissement, mais surtout et avant tout du sport.
Par exemple, lorsqu'à la NBA, Michael Jordan fait de l'éducation dans les écoles ou qu'on se sert de nos vedettes pour parler d'un milieu exempt de drogue, c'est une preuve de la contribution extraordinaire que le sport professionnel peut apporter.
Si on fait la recommandation que le gouvernement fédéral injecte de l'argent au niveau du sport professionnel, il devra y avoir deux clauses primordiales: premièrement, il doit y avoir un lien avec votre organisation pour qu'on puisse vraiment parler d'éthique sportive et d'un milieu exempt de drogue; deuxièmement, on doit s'assurer que le sport professionnel investisse dans le sport amateur. Ce n'est peut-être pas politically correct de le dire, mais un athlète amateur aspire à devenir un athlète professionnel. Il faut reconnaître que le summum du sport, c'est le sport professionnel et qu'il constitue en soi un modèle. Si vous voulez vous impliquer dans cette situation, tant au niveau du hockey qu'à celui du foot-ball, enfin à tous points de vue, vous devrez nécessairement comprendre que le sport professionnel fait partie du sport et que le gouvernement canadien a un rôle à jouer là-dedans afin que vous soyez plus efficaces. Je veux avoir vos commentaires là-dessus.
M. Victor Lachance: Je suis entièrement d'accord, et nous sommes à votre disposition.
[Traduction]
Le président: Monsieur Lachance, je vous remercie de votre présence aujourd'hui et surtout des recommandations très précises que vous nous avez faites. Bon nombre d'entre elles ont déjà été incorporées dans notre document de travail, et je pense que c'est de très bon augure pour la dernière étape de notre étude. Encore une fois, merci pour votre contribution.
[Français]
M. Victor Lachance: Cela m'a fait plaisir, monsieur le président. C'est moi qui vous remercie de m'avoir donné l'occasion de comparaître aujourd'hui.
[Traduction]
Le président: Nous passons tout de suite à nos prochains témoins. Des Jeux olympiques spéciaux du Canada Inc., nous accueillons M. Jim Jordan, président, et Mme Deborah Bright, directrice nationale des programmes.
Bienvenue au comité et excusez-nous de vous avoir fait attendre. Nous vous invitons tout de suite à faire vos remarques liminaires. Merci.
M. Jim Jordan (président, Jeux olympiques spéciaux du Canada Inc.): Merci, monsieur le président. Nous sommes très heureux d'avoir été invités à comparaître devant le comité.
Comme vous, la question de l'éthique dans le sport nous passionne, et cela ne nous a donc pas dérangés que vous consacriez un peu plus de temps à cette question. J'ai un peu peur que nous n'arrivions pas à prendre notre avion à 19 heures, mais autrement, toute cette discussion nous a beaucoup intéressés, comme vous, d'ailleurs.
Nous comparaissons aujourd'hui à titre de représentants des Jeux olympiques spéciaux, soit l'organisme national directeur de sport pour les athlètes qui ont une déficience intellectuelle. Nous sommes là pour défendre cette population-là. Même si nous n'avons pas beaucoup de recommandations à vous faire, nous nous sommes fixé comme objectif aujourd'hui d'insister auprès des membres du sous- comité sur l'importance de l'incorporation des athlètes ayant une incapacité mentale dans le milieu sportif canadien qui reçoit l'appui du gouvernement fédéral. Voilà le seul objet de notre visite de cet après-midi, et nous sommes très heureux que vous nous ayez donné l'occasion de présenter nos vues sur la question.
Je suis sûr que tous les mémoires que vous avez reçus font allusion à la valeur fondamentale du sport, non seulement pour la vie de tous les jours des citoyens individuels qui le pratiquent mais pour l'ensemble de la société canadienne. Tous les arguments à ce sujet sont doublement vrais pour la population d'athlètes que nous représentons.
Le sport est pour nous un moyen essentiel de donner à nos athlètes le sens de leur valeur personnelle et de les intégrer dans le courant principal de la société canadienne. Nous nous servons du sport pour exploiter les capacités des personnes ayant une déficience intellectuelle, capacité qui ne serait peut-être jamais prouvée ou exploitée autrement.
• 1725
Le sport est pour nous un moyen de renforcer la confiance des
personnes qui ont une déficience intellectuelle, afin que ce qu'ils
apprennent à la piscine, sur la piste de course ou sur la patinoire
puisse leur servir dans d'autres aspects de leur vie, pour
favoriser leur intégration sociale. Nous avons les résultats
d'études qui indiquent que ces programmes sportifs sont extrêmement
efficaces pour ce qui est de réaliser de tels objectifs.
Le sport est également pour nous le moyen de favoriser le développement humain, et à cet égard, l'idéal à l'origine des Jeux olympiques spéciaux et ce que nous essayons d'accomplir par l'entremise du sport correspondent en réalité à l'objet fondamental du sport en général, non seulement pour ce segment de la société qui a une déficience intellectuelle, mais pour l'ensemble de la population.
Il importe que les membres du comité et que les représentants du gouvernement du Canada, quels qu'ils soient, reconnaissent l'importance de cette question et qu'ils se rendent compte que la population en général constitue une importante composante de notre population. Rares sont les familles au Canada qui ne sont pas directement ou indirectement touchées par le phénomène de la déficience intellectuelle, à titre de parents, de frères, de soeurs, de tantes ou d'oncles, de grands-parents, ou tout simplement comme voisins de l'enfant trisomique qui habite trois maisons plus loin.
Cette question revêt une grande importance pour notre culture et pour le sport en général. Nous sommes ravis de constater qu'au cours des deux ou trois derniers mois, et notamment au cours des deux dernières années, nous avons réalisé de grands progrès dans le cadre de notre collaboration avec Sport Canada pour nous assurer que les programmes que nous offrons aux enfants et adultes atteints d'une déficience intellectuelle sont vraiment bien intégrés et bien acceptés dans la culture sportive canadienne.
Maintenant j'invite Deborah Bright à vous parler de certains de ces programmes, du point de vue de leurs effets—y compris les effets économiques—non seulement sur les individus mais sur la société en général.
Deborah, c'est à vous.
Mme Deborah Bright (directrice nationale des programmes, Jeux olympiques spéciaux du Canada Inc.): Merci.
Ce sur quoi je veux surtout insister, qu'on parle du sport amateur ou professionnel, c'est le fait que le sport constitue en lui-même une industrie, industrie qui représente non seulement un apport économique mais des emplois, et qui fournit à certains un gagne-pain.
Pour vous donner un petit exemple de l'apport économique de notre organisme, nous avons organisé les Jeux d'été nationaux à Sudbury, en Ontario, en juillet dernier, et les responsables municipaux nous ont dit que l'administration, la planification et l'exécution de ces jeux ont valu à l'économie locale un apport financier d'environ 2 millions de dollars.
Grâce au soutien permanent assuré par le gouvernement fédéral au sport amateur à tous les niveaux, nous avons la possibilité d'établir des partenariats avec les sociétés commerciales et de nous assurer ainsi que cet apport économique est maintenu. Nous sommes fermement convaincus que le gouvernement fédéral se doit d'être le partenaire d'autres organismes pour soutenir le sport amateur.
Depuis sa création, les Jeux olympiques spéciaux du Canada, en tant qu'organisme, s'appuient dans une très large mesure sur les sociétés, les organismes de service social et les donateurs individuels pour 90 p. 100 de leur budget de fonctionnement, non seulement pour les activités nationales mais pour celles de l'ensemble de nos 12 sections.
Nous considérons le gouvernement fédéral comme non seulement un partenaire mais un important bailleur de fonds. En plus du soutien économique que peut nous assurer le gouvernement fédéral—et là je me permets de répéter ce qu'a dit Jim—la contribution la plus importante que peut faire le gouvernement fédéral vis-à-vis des athlètes ayant une déficience intellectuelle, c'est de reconnaître qu'il s'agit effectivement d'athlètes.
Le 21 avril 1997 a été une journée particulièrement importante pour notre équipe nationale. C'était la première fois que des athlètes ayant une déficience intellectuelle ont été reconnus à la Chambre des communes. Vingt-cinq athlètes et environ 10 entraîneurs de toutes les régions de ce merveilleux pays étaient présents, et leur contribution a été dûment reconnue par le Président de la Chambre et l'honorable Sheila Copps.
Les membres du comité ne se rendent peut-être pas compte de l'importance de ce geste pour les athlètes qui ont une déficience intellectuelle. Cette reconnaissance a également aidé nos commanditaires à reconnaître l'importance de leur rôle au cours des 30 dernières années pour ce qui est de garantir que ces personnes puissent se trouver sur le terrain de jeu. De plus, les journaux communautaires, leurs amis, leur famille et leurs collègues ont tous reconnu leurs réalisations.
• 1730
Vous et le gouvernement fédéral disposez ainsi d'un outil de
la première importance, outil qui vous permet de faire preuve de
leadership et de vision en vue de s'assurer que tous les Canadiens
puissent pratiquer le sport.
Jim, c'est à vous.
M. Jim Jordan: Pour les athlètes que nous représentons, le sport constitue un outil de développement social beaucoup plus radical et critique que pour les athlètes valides, tout en contribuant à améliorer l'état de santé de nos athlètes, qui auraient une vie beaucoup plus sédentaire que la population générale en l'absence des programmes que nous leur offrons. C'est surtout pour cette raison, d'ailleurs, que notre programme a été mis sur pied au départ.
Dans les années 50 et 60, le Dr Hayden, un chercheur torontois, a remarqué que les personnes ayant une déficience intellectuelle semblaient avoir plus de problèmes d'obésité et de développement moteur. Il s'est rendu compte que ce n'était pas à cause de leur déficience intellectuelle, mais plutôt en raison de leurs mauvaises habitudes de vie et de leur inactivité. C'est donc pour améliorer la condition physique et l'état de santé de cette population que ce programme a été mis sur pied au départ, et au fur et à mesure que le programme prenait de l'ampleur, on s'est rendu compte, bien entendu, des résultats spectaculaires de l'introduction du sport dans la vie de tous les jours de cette population.
Nous insistons donc auprès des membres du comité sur l'importance du sport pour ce segment-là de la population. Deuxièmement, nous insistons sur le fait qu'en incluant les athlètes ayant une incapacité intellectuelle dans le milieu sportif fédéral, le gouvernement transmet à tous les Canadiens un message très important sur lequel il devrait mettre l'accent tous les jours—à savoir la valeur intrinsèque de tout citoyen.
Comme Deborah vous l'a fait remarquer, l'hommage rendu par les Canadiens de toutes les régions du pays à nos athlètes à la Chambre des communes était très important, tout comme il est important que ces athlètes reconnaissent que leur gouvernement s'efforce de s'occuper d'une population facilement marginalisée et victimisée. Je me permets donc de répéter que c'est pour cette raison que nous sommes tellement ravis de notre inclusion dans le groupe de Sport Canada, pas parce que c'est ce dernier qui constitue notre principal source de financement, car au contraire nous ne dépendons aucunement des crédits gouvernementaux pour survivre, mais parce que Sport Canada a choisi d'inclure, plutôt que d'exclure, nos athlètes et d'encourager leur pleine participation aux activités du milieu du sport amateur canadien.
Nous nous présentons donc devant vous pour bien insister sur la valeur de ce soutien pour un important segment de la population canadienne et nous vous encourageons à vous assurer que cette situation positive se maintienne. Merci beaucoup.
Le président: Merci, monsieur Jordan.
Merci, madame Bright.
Monsieur Mark, vous avez la parole.
M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.
Je voudrais vous remercier tous les deux pour votre présence devant le sous-comité. Comme j'ai travaillé pendant une bonne partie de ma vie avec les enfants ayant une déficience intellectuelle, je dois vous dire à quel point je félicite votre organisme pour le travail et les efforts qu'il a déployés à leur profit, afin qu'ils soient reconnus comme des citoyens canadiens à part entière, peu importe leur déficience.
Ayant travaillé dans ce domaine depuis une trentaine d'années et acquis un bon nombre de connaissances spécialisées, je me demande si cette spécialisation sportive peut être exportée à d'autres pays du monde?
M. Jim Jordan: Oui, absolument.
Nous sommes d'ailleurs fiers du fait que l'idée originale des programmes sportifs des Jeux olympiques spéciaux à l'intention des personnes ayant une déficience intellectuelle et ait été élaborée par un chercheur canadien. Comme cela arrive souvent au Canada, il n'a pas pu se procurer suffisamment de soutien financier, et s'est donc adressé à la Fondation Kennedy, qui y voyait une idée tout à fait géniale. C'est donc la Fondation Kennedy aux États-Unis qui a développé le concept des Jeux olympiques spéciaux, et les premiers Jeux ont été tenus à Chicago en 1968. Ils ont été dirigés par un Canadien, le Dr Frank Hayden, qui agit à nouveau à titre d'expert- conseil spécial auprès de notre organisme.
Ce programme a été exporté vers 180 pays du monde, et le Canada enverra l'été prochain une équipe aux Jeux mondiaux, qui se tiendront à Raleigh-Durham, en Caroline du Nord, jeux qui attireront 8 000 athlètes de 160 pays différents. On peut donc dire que ce concept se répand comme une traînée de poudre dans le monde entier.
Le président: Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Bonsoir et merci pour votre présentation.
Pouvez-vous me dire si vos services sont accessibles assez facilement en région?
[Traduction]
Mme Deborah Bright: Oui, tout à fait. Nous avons 12 bureaux régionaux dans chacune des provinces, et de plus, grâce aux efforts extraordinaires de nos bénévoles, il existe normalement un programme de Jeux olympiques spéciaux dans chaque grand centre urbain ou grande ville, et parfois même dans de petites régions de nos provinces et des deux territoires. Donc, nos services sont facilement accessibles par les particuliers, ou encore par l'entremise des écoles, des associations des centres de vie autonome ou d'organisations sportives particulières.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Si je comprends bien, ce sont des Jeux olympiques spéciaux pour des personnes qui ont un handicap mental, mais est-ce aussi pour les personnes qui ont un handicap physique? Est-ce que ce sont les mêmes jeux ou si ce sont des jeux différents?
[Traduction]
Mme Deborah Bright: En fait, c'est tout à fait à part. Les athlètes qui ont une déficience intellectuelle peuvent également souffrir de handicaps physiques, mais notre organisation est surtout au service des athlètes qui ont une déficience intellectuelle.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Est-ce que vos athlètes sont allés aux Jeux de Nagano?
[Traduction]
Mme Deborah Bright: Oui, certains athlètes qui ont une déficience intellectuelle ont participé aux Jeux de Nagano. Entre autres, deux athlètes de la province du Manitoba. Ces athlètes participent également aux compétitions...
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Excusez-moi. Est-ce qu'ils ont participé aux jeux réguliers ou aux jeux spéciaux?
[Traduction]
Mme Deborah Bright: À Nagano, il s'agissait des Jeux paralympiques, mais certains athlètes qui ont une incapacité mentale y ont participé.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Quand on avait rencontré le président canadien des Jeux para-olympiques, il nous avait dit que le fait que les jeux se déroulaient après les jeux réguliers causait beaucoup de problèmes. Si on veut vraiment les intégrer à la population, pourquoi continue-t-on à faire de la discrimination et à tenir ces jeux après les vrais jeux? Pourquoi faut-il qu'il s'écoule une semaine entre les deux jeux?
[Traduction]
M. Jim Jordan: On parle en réalité de deux jeux tout à fait différents. Dans le cadre des Jeux olympiques spéciaux, des compétitions sont organisées aux niveaux d'abord provincial, ensuite national et évidemment international. Il existe également un organisme qui se charge des Jeux paralympiques, qui n'est pas le même que le nôtre.
Les Jeux paralympiques, qui se tiennent parallèlement aux Jeux olympiques, comprennent certaines compétitions qui s'adressent aux athlètes ayant une déficience intellectuelle. Tous les athlètes qui représentent le Canada dans cette catégorie bénéficient de l'entraînement qu'offre l'organisation des Jeux olympiques spéciaux, mais ils participent aux Jeux sous des auspices différents. La question de savoir pourquoi les Jeux olympiques spéciaux et les athlètes ayant une déficience intellectuelle ne sont pas pleinement intégrés dans les Jeux olympiques est surtout une question politique qui dépasse notre responsabilité pour le moment, mais vous avez parfaitement raison de dire que la création d'un maximum de possibilités de pleine intégration est un objectif auquel nous devrions tous aspirer.
Je voudrais justement aborder la question de la distinction qui est faite entre les deux groupes pour ce qui est des possibilités offertes. La raison en est la suivante: l'objet fondamental du programme sportif des Jeux olympiques spéciaux est de garantir que des athlètes de tous les niveaux puissent participer aux compétitions à des niveaux différents. Il est donc essentiel, du point de vue des Jeux olympiques spéciaux, d'assurer la représentation de plusieurs niveaux de performance différents au sein de l'équipe qu'on envoie aux Jeux olympiques spéciaux mondiaux. Autrement dit, ce ne sont pas nécessairement les meilleurs athlètes qui sont choisis pour y participer. Certains sont très performants et d'autres le sont moins.
La philosophie qui sous-tend les Jeux olympiques, de même que les Jeux paralympiques, est différente. Tous les athlètes doivent pouvoir se conformer à certaines normes pour y être admissibles. Ce n'est pas une mauvaise chose, en ce qui nous concerne; mais il s'agit tout simplement d'un mode de fonctionnement qui diffère de celui qui caractérise les activités quotidiennes des Jeux olympiques spéciaux.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Il y a quelque chose que je ne comprends pas très bien. Quand et où les Jeux olympiques spéciaux ont-ils lieu? Qu'entend-on par les Jeux para-olympiques? Est-ce une troisième catégorie d'olympiques?
[Traduction]
Mme Deborah Bright: C'est exact.
M. Pat O'Brien: Ces jeux se tiennent dans des villes différentes. Les athlètes viennent de partout et participent à leur propre compétition.
Mme Deborah Bright: Oui, il s'agit d'une entité tout à fait distincte. Il y aura des Jeux mondiaux à l'intention des athlètes ayant une incapacité intellectuelle—c'est-à-dire les Jeux olympiques spéciaux mondiaux—en 1999 à Raleigh-Durham, en Caroline du Nord. Nous venons de tenir nos Jeux nationaux à Sudbury, en Ontario. Ils sont donc organisés en fonction d'un cycle quadriennal à des moments et dans des lieux qui diffèrent de ceux choisis pour les Jeux olympiques ou les Jeux paralympiques.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, madame Tremblay.
[Français]
Monsieur Coderre.
M. Denis Coderre: Merci beaucoup. Je pense que la beauté des Olympiques spéciaux, c'est qu'on a une occasion en or d'ouvrir l'âme et l'esprit au moyen du sport. Il est très clair que dans un contexte d'intégration, les gens qui ont certains handicaps peuvent vraiment avoir l'impression d'être des citoyens à part entière. Le sport crée cela.
J'aimerais cependant que vous me parliez de choses plus terre à terre, des infrastructures. Je pense que tout le monde est d'accord qu'il faut les encourager. J'aimerais plutôt parler de notre attitude face aux gens qui participent à ces jeux-là. Est-ce que les infrastructures sont actuellement adéquates partout au Canada ou dans des provinces particulières? Est-ce que cela fonctionne bien? Est-ce qu'un jeune athlète qui veut s'épanouir dans son sport a actuellement tout ce qu'il lui faut ou s'il est victime d'une certaine discrimination à cause de son état?
[Traduction]
M. Jim Jordan: À l'heure actuelle, ces possibilités existent dans l'ensemble. Il faut que les députés se rendent compte que les Jeux olympiques spéciaux ne se contentent pas d'organiser des compétitions. En fait, notre principal instrument d'exécution des programmes sont des clubs sportifs situés dans les différents quartiers des villes canadiennes et il en existe des milliers et des milliers dans tout le Canada, surtout en Ontario, et je sais aussi que le député sera content de savoir que le programme que nous exécutons au Québec est en plein essor.
Donc, l'accès ne pose pas de problème pour la majorité de nos athlètes. Comme tout organisme, nous devons nous battre pour pouvoir utiliser la patinoire, le gymnase et la piscine, mais en collaboration avec Sport Canada, nous essayons d'accroître le niveau de compétence de nos entraîneurs bénévoles, pour que nos athlètes soient bien encadrés et puissent bénéficier d'un entraînement qui va leur permettre d'atteindre le niveau qui correspond à leur potentiel.
[Français]
M. Denis Coderre: Dans ma propre circonscription, il y a eu en fin de semaine la course du flambeau. C'était pour amasser des fonds. Les policiers de ma circonscription ont fait une course pour amasser des fonds pour les Olympiques spéciaux. Malheureusement, il y a eu une crise cardiaque. On a perdu un policier, mais on a quand même amassé des fonds. C'est une cause qui nous tient à coeur.
Est-ce que le taux de participation augmente? On parle de 20 000 athlètes au Canada. Est-ce qu'il y a de plus en plus d'athlètes qui participent à vos programmes? Mon collègue disait qu'il travaille depuis 30 ans avec des gens qui ont certaines incapacités mentales. Est-ce que le sport ne pourrait pas faire partie d'une certaine éducation ou d'une certaine thérapie? Est-ce que le sport n'ouvre pas des horizons à des jeunes athlètes pour leur permettre de s'en sortir? J'aimerais que vous nous parliez de ces deux aspects.
[Traduction]
M. Jim Jordan: Permettez-moi de vous parler en tant que parent d'une fille qui a une incapacité mentale. Elle est maintenant âgée de 12 ans, et jusqu'à cette année, elle a toujours été très bien intégrée dans le milieu sportif communautaire. Elle n'avait pas besoin des Jeux olympiques spéciaux. Mais elle sera bientôt adolescente, et l'écart sur les plans à la fois social et intellectuel entre elle et ses amies non handicapées commence à se creuser. Par conséquent, ma femme l'a inscrite pour la première fois aux Jeux olympiques spéciaux de notre localité.
Est-ce que le programme prend de l'expansion? Oui, absolument, car bon nombre de parents, comme moi, constatent qu'il s'agit d'une dimension très importante du développement humain de l'enfant, pas seulement parce que ça lui permet de faire du sport, mais parce qu'en tant qu'être humain, il peut se sentir solidaire des gens qui sont comme lui.
Le programme prend rapidement de l'expansion au Canada. Depuis que je participe aux Jeux olympiques spéciaux—cela fait une dizaine d'années—le nombre d'inscription a doublé, passant de 10 000 à 20 000 athlètes, et ce nombre continue de croître rapidement. Comme je vous le disais tout à l'heure, vu la vigueur du programme au Québec, le potentiel d'expansion du mouvement nous semble des plus encourageants. Dans l'ensemble, donc, le programme est en plein essor d'un bout à l'autre du pays.
M. Denis Coderre: Merci.
Le président: Monsieur O'Brien.
M. Pat O'Brien: Merci, monsieur le président. Je voudrais simplement faire une observation.
J'ai eu une certaine expérience des Jeux olympiques spéciaux dans ma ville natale de London, en Ontario, et je trouve intéressant que vos témoignages suivent notre discussion sur l'éthique, car j'ai justement constaté que les athlètes qui participaient aux Jeux olympiques spéciaux étaient plus fidèles à ces idéaux qui sont l'essence même du sport et de l'esprit sportif que tous les autres athlètes que j'aie jamais observés ou avec qui j'ai eu l'occasion de travailler. J'ai donc été très impressionné, et il serait bon de pouvoir transmettre cette attitude à tous ceux qui participent aux sports à tous les niveaux.
J'ai juste une question à vous poser. Combien d'argent le gouvernement fédéral accorde-t-il à l'équipe nationale des Jeux olympiques spéciaux lorsqu'elle participe à une grande compétition?
Mme Deborah Bright: Cette année, il nous a donné 185 000 $.
M. Pat O'Brien: Très bien. J'ai une autre petite question connexe. Souvent une réponse entraîne une autre question.
En tant que Canadien, je dois dire que cette somme ne me semble pas particulièrement importante, et malgré tout vous ne semblez pas vous plaindre d'un manque de financement. Pourquoi le gouvernement fédéral n'accorde-t-il pas plus de crédits aux Jeux olympiques spéciaux?
Mme Deborah Bright: Nous sommes très contents de l'apport financier du gouvernement fédéral dont nous bénéficions par l'entremise de Sport Canada. Sa contribution se situe au même niveau que nos commanditaires nationaux. Cette année, la somme en question va servir directement au lancement d'une nouvelle initiative, à savoir notre programme destiné à l'équipe nationale. Nous sommes convaincus qu'il peut devenir un chef de file, et grâce à sa vision et son aide financière, nous allons créer un nouveau programme qui contribuera à renforcer les programmes que nous offrons dans toutes les régions du pays.
M. Pat O'Brien: La formule prévoit-elle un rapport de un à un? Autrement dit, l'apport financier du gouvernement est-il égal à celui du secteur privé?
M. Jim Jordan: Non.
D'abord, comme Deborah l'expliquait tout à l'heure, la tradition de notre organisation, depuis notre création, d'ailleurs, c'est que nous finançons nous-mêmes la grande majorité de nos activités. Disposons-nous d'une financement suffisant? À notre avis, non, et nous cherchons constamment de nouvelles sources de revenu. Nous n'avons jamais été très bien financés par le gouvernement fédéral jusqu'à tout récemment, lorsque nous avons établi de nouvelles relations avec Sport Canada, relations dont nous sommes très satisfaits, comme vous le constatez vous-même.
Quand nous nous sommes adressés à Sport Canada, nous avons bien insisté sur le fait que l'élément financier de la contribution de Sport Canada n'est pas l'élément le plus important, et que nous aimerions que le gouvernement assure un financement qui correspond à celui d'un de nos principaux commanditaires privés. Le financement accordé à l'organisme national par nos principaux commanditaires privés—et nous en avons 10 en tout—est de l'ordre de 150 000 $ par année. Nous avons donc demandé à Sport Canada de s'en servir comme repère, ce qu'il a fait, et Sport Canada nous a demandé en retour de consacrer ces 150 000 $ aux trois grands domaines, soit le perfectionnement des entraîneurs, le développement d'une équipe nationale et nos Jeux nationaux.
L'élément important de notre coopération avec Sport Canada est d'ordre social, c'est-à-dire d'être accepté comme membre à part entière de la communauté sportive canadienne. Telle était notre premier objectif. Ce n'était pas d'obtenir des crédits, car nous savons fort bien que l'aide financière qu'on reçoit va nécessairement dépendre des moyens dont dispose le gouvernement, et nous ne voulons dépendre de ce dernier pour financer nos activités. Par contre, nous voulons que le gouvernement participe.
M. Pat O'Brien: Merci pour ces explications.
Si jamais vous vous rendez compte que vous avez besoin de plus de crédits fédéraux, j'espère personnellement que vous reviendrez et que votre demande sera bien accueillie. En ce qui me concerne, nous ne devrions aucunement hésiter à offrir aux athlètes qui participent aux Jeux olympiques spéciaux la même aide financière que nous accordons à ceux qui participent aux Jeux olympiques ordinaires. Ce sont des citoyens canadiens au même titre que les autres qui méritent tout autant d'accéder aux fonds fédéraux pour financer leurs activités, car ils apportent une contribution tout aussi valable. Donc, n'hésitez pas à revenir s'il le faut.
M. Jim Jordan: Dès notre retour, nous allons préparer une proposition.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Merci, monsieur O'Brien.
Voulez-vous poser une brève question avant...?
M. John Cannis: En fait, mon collègue, M. O'Brien, a posé la question qui m'intéressait concernant le niveau de financement que vous recevez du gouvernement fédéral, mais je voudrais tout de même faire une brève observation.
C'était un grand privilège pour nous que de pouvoir vous accueillir sur la colline du Parlement. L'impact de votre visite sur les Canadiens de toutes les régions a dû être considérable, car c'était l'occasion pour eux de vous entendre parler des réalisations de vos athlètes et du plaisir que cela leur procure; je suis convaincu que cela annonce une période de grande collaboration entre notre gouvernement, les députés et votre organisation. Donc, pour répéter ce qu'a dit M. O'Brien, nous sommes extrêmement fiers d'avoir pu vous accueillir aujourd'hui.
J'ai une toute petite question à vous poser. La Fondation Kennedy appuie-t-elle une représentation internationale—autrement dit, des athlètes canadiens—ou cherche-t-elle surtout à répondre aux besoins de citoyens américains?
M. Jim Jordan: La Fondation Kennedy n'accorde plus de financement direct aux Jeux olympiques spéciaux. C'est elle qui a lancé le mouvement aux États-Unis. Les Jeux olympiques spéciaux sont ensuite devenus une personne morale distincte dont la raison sociale est Special Olympics International, et tout comme l'organisation canadienne responsable des Jeux olympiques spéciaux, elle cherche d'autres sources de financement, notamment dans le secteur privé. Donc, je sais que les Jeux olympiques spéciaux ne reçoivent plus de financement direct de la Fondation Kennedy.
M. John Cannis: Sur la scène internationale, on a toutefois l'impression que la Fondation Kennedy—et je vous dis cela avec le plus grand respect—a été le fer de lance de cette merveilleuse initiative, mais pour être juste envers tout le monde, il conviendrait peut-être d'informer le public que ce sont les grandes sociétés et le gouvernement qui financent les Jeux olympiques spéciaux, et pas nécessairement la Fondation Kennedy.
M. Jim Jordan: Plus maintenant.
Le président: Sur ce point précis, monsieur Jordan, vous avez parlé de 10 sociétés canadiennes commanditaires.
M. Jim Jordan: Oui.
Le président: Pouvez-vous nous indiquer le nom de ces sociétés?
M. Jim Jordan: Oui.
Le président: Pourriez-vous nous les nommer?
M. Jim Jordan: Oui. J'espère que je ne vais pas en oublier.
Le président: Prenez votre temps. Il nous suffirait de connaître le nom des principales sociétés... De qui s'agit-il?
M. Jim Jordan: Coca-Cola Canada; Business Depot, qui est un excellent partenaire privé; Sprint Canada; Mackenzie Financial; et la Banque royale du Canada.
Nous avons aussi trois partenaires médiatiques. Grey Advertising s'occupe gratuitement de toute notre publicité et de nos activités de relations publiques, ce qui correspond à un don de plus de 150 000 $; le magazine Maclean's nous donne l'équivalent de 200 000 $ d'espace publicitaire national; et The Sports Network est l'un de nos meilleurs et plus anciens partenaires.
Le président: Vous parlez de TSN?
M. Jim Jordan: C'est exact.
Il y a également la Fondation Foster. Red Foster, un grand homme d'affaires et entrepreneur canadien, est en réalité celui qui a fondé les Jeux olympiques spéciaux au Canada, et sa Fondation continue de nous aider. Bien sûr, Toyota Canada est un excellent partenaire depuis maintenant sept ans. Le réseau des Clubs Progrès du Canada nous accorde également une aide financière par l'entremise de sa fondation.
Voilà donc nos commanditaires privés.
Le président: Je pensais que les collègues apprécieraient qu'on prenne une minute ou deux pour reconnaître la contribution de ces chefs de file du secteur privé qui sont...
M. Jim Jordan: Puis-je en nommer un autre?
Le président: Bien sûr. Nous n'hésitons jamais à faire de la publicité nationale pour des sociétés de cette qualité.
M. Jim Jordan: Nous avons un autre partenaire très important, et si je suis là aujourd'hui, c'est grâce à sa générosité; il s'agit du Air Miles Loyalty Group. Air Miles nous accorde 375 000 milles de voyage chaque année à utiliser dans tout le Canada dans le cadre de nos différents programmes, et par conséquent, il s'agit pour nous d'un partenaire très important.
Le président: Au nom du comité, j'aimerais vous remercier de votre présence parmi nous aujourd'hui. Vous avez fait une contribution importante à nos délibérations.
M. Jim Jordan: Merci.
Le président: Chers collègues, nos derniers témoins pour aujourd'hui seront les représentantes de l'Association canadiennes pour l'avancement des femmes, du sport et de l'activité physique. Notre greffier, M. Fournier, me fait savoir que nous avons rattrapé le retard de tout à l'heure et que nous respectons à nouveau notre programme.
Bienvenu, mesdames.
Madame McGregor, peut-être pourrais-je vous demander de nous présenter vos collègues, et vous pourrez ensuite nous faire vos remarques liminaires.
Mme Marg McGregor (directrice générale, Association canadienne pour l'avancement des femmes, du sport et de l'activité physique): Avec plaisir. Merci beaucoup. Nous sommes ravies de pouvoir comparaître devant vous aujourd'hui.
Je suis accompagnée de certaines de mes estimées collègues qui m'aideront à faire notre exposé et à répondre à vos questions. Tina Walter est membre du conseil d'administration de l'Association canadienne pour l'avancement des femmes, du sport et de l'activité physique; Karin Lofstrom est directrice des opérations à l'ACAFS; et Carolyn Hudson travaille comme bénévole à l'ACAFS, et possède une expertise particulière dans le domaine de l'entraînement.
[Français]
L'Association canadienne pour l'avancement des femmes, du sport et de l'activité physique a été créée en 1981.
[Traduction]
Nous existons essentiellement pour encourager les jeunes filles et les femmes à abandonner les gradins pour les terrains de jeu, les patinoires, les piscines, les vestiaires et les salles du conseil du Canada. Nos activités ouvrent la voie aux jeunes filles et aux femmes qui veulent jouer. Notre objectif est de faire en sorte que les femmes et les filles participent à part entière aux activités sportives, en tant qu'athlètes, entraîneuses, représentantes officielles du milieu sportif, responsables d'activités bénévoles et dirigeantes professionnelles dans le monde du sport.
• 1755
Nous avons de nombreuses raisons d'être contentes des années
90. Comme on dit, nous en avons fait du chemin. Pour vous faire un
peu l'historique de cette évolution, aux premiers Jeux olympiques
de l'antiquité, une femme qu'on trouvait dans les gradins était
jetée du haut d'une falaise. Ce n'était donc pas une bonne chose
d'être présente aux Jeux olympiques à cette époque-là. Plusieurs
centaines d'années plus tard, quand les Jeux olympiques modernes
ont été fondés en 1896 par le Baron De Coubertin, ce dernier a dit
que les femmes avaient effectivement un rôle important à jouer dans
le monde du sport, à savoir applaudir les réalisations des hommes
qui y participaient. Alors si nous avons effectivement fait du
chemin depuis, étant donné qu'on ne nous jette plus du haut d'une
falaise, l'égalité est encore loin d'être acquise.
Nous sommes maintenant dans les 1990, et je suis sûre que vous avez été ravis de voir les performances de nos athlètes féminines aux Jeux olympiques et aux Jeux paralympiques. Nous avons des athlètes féminines au Canada d'un calibre extraordinaire qui sont des modèles pour les jeunes du Canada. Donc, nous avons de nombreuses raisons de nous réjouir de la situation actuelle.
Pour ce qui est des moyens par lesquels l'ACAFS cherche à faire évoluer les choses, j'insiste sur le fait que nous travaillons de façon positive—c'est-à-dire que nous mettons l'accent sur les solutions, et nous bénéficions d'un partenariat à la fois solide et positif avec Sport Canada. De l'avis de notre association, nous sommes tous logés à la même enseigne. Toutes les femmes ne sont pas des victimes et tous les hommes ne sont pas des sales types. Nous travaillons ensemble pour édifier un système sportif qui permet aux filles et aux femmes de profiter au maximum de l'activité sportive et physique. Comme d'autres témoins vous l'ont certainement déjà dit, rien ne peut remplacer le sport. Chaque jeune fille et chaque femme méritent de faire du sport dans sa vie, car c'est quelque chose qui peut changer à tout jamais votre vie.
Je voudrais rapidement parler de la corrélation entre les femmes et le sport et l'économie, puisque cette question intéresse tout particulièrement le sous-comité. Plus les jeunes filles et les femmes participent au sport et à l'activité physique, mieux c'est pour l'économie. D'ailleurs, certains fabricants de matériel sportif sont tout à fait conscients de cette réalité. Récemment on a commencé à vraiment mettre l'accent sur l'élaboration de produits pour les femmes et la création de plus de possibilités pour elles, pour maximiser le potentiel commercial qui correspond à ce groupe.
Nike a lancé une campagne publicitaire qui est vraiment bien faite. Elle indique bien l'incidence du sport sur la vie des femmes, et si vous me permettez, je voudrais vous lire le message que véhicule Nike dans sa campagne. Voilà:
-
Laissez-moi jouer, je m'aimerai davantage, j'aurai une plus grande
confiance en moi, je me laisserai moins abattre par la dépression,
et je réduirai de 60 p. 100 mes chances de cancer du sein.
-
Laissez-moi jouer, j'aurai de meilleures chances de quitter un
homme qui me maltraite, j'aurai moins de chances d'avoir des
enfants avant d'en vouloir, je saurai ce que c'est que d'être forte
si vous me laissez faire du sport.
Pour moi, ce message prouve de façon très convaincante l'importance que revêt l'activité physique et le sport dans la vie des filles et des femmes. Nous savons pertinemment, par exemple, que les femmes qui sont actives sont moins susceptibles de souffrir de problèmes de santé tels que l'ostéoporose, les crises cardiaques, le diabète d'adulte, et le cancer du sein. La liste est très longue, mais ce qui est plus important, ce sont les répercussions psychosociales très positives de l'activité physique sur la vie des jeunes filles et des femmes. Elles deviennent fortes, puissantes et sûres d'elles, ce qui a le potentiel de changer radicalement leur vie.
Il ne fait aucun doute que les effets et surtout les avantages économiques pour le Canada d'une population en bonne santé sont considérables, et plusieurs études le démontrent. Une étude menée par l'Institut canadien de la recherche sur la condition physique et le mode de vie indique que si les Canadiens étaient plus actifs, les économies que nous réaliserions, uniquement par rapport aux soins associés aux maladies cardio-vasculaires, seraient de l'ordre 775 millions de dollars par année. Cette statistique nous offre une preuve très convaincante de la valeur du sport.
Il s'agit donc de savoir comment nous pouvons encourager plus de jeunes filles et de femmes à faire de l'activité physique, et comment des organisations comme la nôtre, qui est une organisation non gouvernementale, peuvent travailler en étroite collaboration avec le gouvernement pour créer le genre de synergie et d'effets multiplicateurs qu'il faut pour profiter de l'élan actuel et faire progresser encore la situation? Nous avons 11 recommandations à vous faire qui, à notre avis, vont nous permettre de maintenir cet élan et d'aider davantage de jeunes filles et de femmes à faire du sport.
Je passe tout de suite à nos recommandations.
La première est extrêmement importante.
[Français]
que le gouvernement du Canada continue à financer le sport amateur à long terme
[Traduction]
et que le gouvernement du Canada utilise les 50 millions de dollars injectés dans le système sportif canadien au profit des groupes sous-représentés et, par le fait même, pour donner aux filles et aux filles, aux athlètes qui ont une incapacité, aux athlètes autochtones, etc. la possibilité d'être sur un pied d'égalité avec les hommes et les garçons.
• 1800
Nous avons été ravies de constater que l'un des engagements du
Livre rouge était de consacrer 50 millions de dollars de plus au
sport, et nous sommes fermement convaincues que, dans le cadre de
ce financement accru, il convient de réserver une certaine
proportion des crédits pour les groupes sous-représentés. Il
importe également d'établir un mécanisme qui nous permette de
savoir en fin de compte quel montant, sur les 50 millions de
dollars d'argent frais, a été consacré à des programmes tels que
les Jeux olympiques spéciaux ou à ceux destinés aux Canadiens
aveugles ou aux femmes.
Nous encourageons également le gouvernement à accorder aux organismes qui assurent des services équitables des avantages particuliers en matière de financement, et à infliger des sanctions à ceux qui ne le font pas. On reconnaîtrait ainsi les efforts déployés par certains organismes pour répondre aux besoins des groupes sous-représentés en leur offrant des programmes appropriés.
Le gouvernement du Canada est également l'une des principales sources de financement des centres sportifs nationaux situés dans toutes les régions du pays. Il joue un rôle de plus en plus important dans l'exécution des programmes de sport de haute performance au Canada. Nous recommandons que le gouvernement, par le biais d'une pression morale et de ses mécanismes de financement, favorise une représentation considérablement accrue des femmes aux conseils d'administration des centres sportifs nationaux et dans des postes de cadres supérieurs. Quand les femmes sont représentées, on les entend et leurs préoccupations sont abordées, alors que ça peut ne pas être le cas si elles ne sont pas présentes.
Nous encourageons également le gouvernement à s'assurer que les centres sportifs nationaux dispensent des programmes qui répondent aux besoins uniques des femmes et d'autres groupes sous- représentés, tels que les athlètes ayant une incapacité ou les athlètes autochtones.
Nous encourageons également le gouvernement du Canada à s'assurer qu'un nombre accru de possibilités d'apprentissage et d'emploi soient offertes aux entraîneuses par l'entremise des centres sportifs nationaux. Pour encourager davantage de jeunes filles à poursuivre leurs activités sportives, il faut que plus de femmes fassent de l'entraînement, et ce serait l'occasion, par le biais des centres sportifs nationaux de s'assurer que plus de femmes fassent de l'entraînement et continuent d'en faire.
Nous étions très contentes de voir que le gouvernement canadien avait été choisi pour organiser la Conférence mondiale de l'an 2002 sur les femmes et le sport. Cette conférence se tiendra dans la région d'Ottawa-Hull en mai 2002. Elle nous offre une occasion unique de créer une sorte de fonds de dotation pour les femmes et le sport. Nous encourageons le gouvernement du Canada, et plus précisément Sport Canada, à travailler avec d'autres ministères fédéraux, notamment ceux qui sont responsables des questions relatives à la santé des femmes, la violence faite aux femmes, et aux droits de la personne, pour s'assurer qu'un fonds de dotation sera créé à la suite de la conférence de l'an 2002 qui se tiendra au Canada.
Notre septième recommandation concerne l'importance incidence positive des athlètes canadiens qui participent aux Jeux olympiques et paralympiques sur les jeunes Canadiens, car ils sont pour eux des modèles. Quand mes filles ont regardé les Jeux olympiques et paralympiques et ont vu les réalisations extraordinaires des athlètes féminines canadiennes, elles étaient absolument épatées et elles se sont imaginées dans ce même rôle, en train de représenter le Canada un jour.
Les familles des athlètes olympiques et paralympiques ont à supporter un énorme fardeau financier, et nous encourageons le gouvernement à envisager d'offrir aux familles des athlètes d'élite des dégrèvements fiscaux pour qu'ils puissent continuer de faire du sport.
Nous reconnaissons également que le sport au Canada devient moins accessible. Les programmes sportifs des écoles sont en train d'être éliminés, à tel point que le principe paie qui profite devient de plus en plus courant dans le monde du sport, ce qui nous inquiète beaucoup. Bon nombre de ménages canadiens, surtout les familles monoparentales, ne peuvent pas se permettre de payer l'activité sportive. Vu la valeur de l'activité physique, nous aimerions que le gouvernement envisage de créer des dégrèvements fiscaux pour aider les familles monoparentales en leur permettant de déduire les frais des activités ludiques et de s'assurer que leurs enfants pourront continuer à participer au sport et ne seront pas exclus à cause de frais d'utilisation.
La sécurité personnelle est une autre préoccupation importante, et Victor Lachance vous en a déjà parlé tout à l'heure. La question du harcèlement et de l'exploitation dans le monde du sport préoccupe au plus haut point l'ACAFS, et nous avons travaillé en étroite collaboration avec Sport Canada plus tôt cette année pour lancer une campagne de lutte contre le harcèlement et l'exploitation. Quand on demande aux jeunes filles et aux femmes pour quelle raison elles ne font pas de sport, bon nombre d'entre elles indiquent qu'elles ont fait l'objet de harcèlement ou d'exploitation sous une forme ou une autre dans le milieu sportif. Il est donc essentiel de faire en sorte que le sport puisse être une activité sécuritaire pour tout le monde.
• 1805
Nous encourageons par conséquent le gouvernement du Canada à
faire fond sur l'initiative visant à éliminer le harcèlement et
l'exploitation, initiative qui a été lancée en janvier 1997, en
continuant de soutenir toute activité qui permette de faire du
monde du sport un lieu plus sécuritaire et accueillant pour les
jeunes filles, les femmes et tous les participants.
Je voudrais également aborder la question de l'infrastructure dont d'autres ont déjà parlé tout à l'heure. L'accès aux patinoires, piscines et terrains de tous genres devient vraiment problématique au Canada. La hausse spectaculaire du niveau de participation des femmes à des sports comme le hockey sur glace a créé un véritable goulot d'étranglement. Le fait est qu'il n'y a tout simplement pas assez de place pour tout le monde. Les patinoires sont constamment utilisées et tout le temps d'utilisation subventionné est déjà attribué, surtout aux garçons et aux hommes qui font partie d'équipes de hockey.
Par conséquent, nous encourageons le gouvernement du Canada, en collaboration avec d'autres paliers de gouvernement et le secteur privé, à envisager d'entreprendre une campagne de collecte de fonds à l'intention de l'infrastructure sportive, pour permettre, d'une part, la construction de patinoires et de piscines supplémentaires au Canada et, d'autre part, la participation d'un plus grand nombre de Canadiens à l'activité sportive.
Notre dernière recommandation concerne la conception et la mise au point d'équipement. Depuis de nombreuses années, les jeunes filles et les femmes se voient dans l'obligation d'utiliser le vieil équipement de leurs frères ou celui conçu pour les hommes quand elles font du sport. Ce n'est que tout récemment qu'on a commencé à fabriquer des équipements qui correspondent à la physique et aux besoins des femmes. Pour nous, il s'agit là d'un progrès très important et positif. Pour assurer leur propre sécurité, les femmes devraient pouvoir accéder à des équipements qui sont conçus en fonction de leur physique tout à fait unique.
Le problème, c'est ce que coûte cet équipement... Je vous donne l'exemple des patins de hockey pour femmes: ils coûtent parfois deux ou trois fois plus cher que les patins de hockey pour hommes. Nous constatons par conséquent que les femmes recourent souvent à de plus petites pointures de patins pour hommes plutôt que d'acheter de l'équipement conçu pour les femmes. Encore une fois, nous encourageons le gouvernement du Canada à envisager d'offrir des avantages ou dégrèvements fiscaux aux fabricants canadiens qui conçoivent, commercialisent et exportent de l'équipement sportif que peut utiliser une femme, de sorte que lorsqu'une jeune fille va s'acheter des patins, elle puisse effectivement acheter des patins pour filles.
En conclusion, je voudrais simplement vous remercier de votre attention et de l'intérêt que vous portez à tout ce domaine. Le sport a d'énormes conséquences positives pour notre économie, notre santé, et le bien-être de nos jeunes. Et plus les femmes font du sport, plus tout le monde est susceptible d'y trouver son compte.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, madame McGregor. Nous ouvrons immédiatement la période des questions.
Monsieur Mark.
M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.
Je voudrais tout d'abord vous remercier de votre présence. On pourrait difficilement se trouver en désaccord avec la plupart de vos affirmations. Et il va sans dire que nous appuyons vivement l'ensemble de vos initiatives.
J'ai quelques brèves questions à vous poser. D'abord, j'aimerais connaître votre position sur la mixité des activités sportives. Deuxièmement, vous êtes-vous fixé un objectif numérique pour la participation des femmes aux sports au Canada? Et enfin, quels liens l'ACASF maintient-elle avec d'autres organismes à l'étranger?
Mme Marg McGregor: Pour répondre à votre question relative à notre position sur l'activité sportive mixte, il est clair en ce qui nous concerne que cette formule donne très souvent de bons résultats. Il n'existe pas de régime qui soit toujours bon ou toujours mauvais. Cela dépend dans une très large mesure de l'activité concernée, de l'âge des participants, de la qualité et du calibre des entraîneurs, et des facteurs de sécurité qui peuvent entrer en ligne de compte.
Certaines études indiquent que lorsque des garçons et des filles jouent ensemble au gymnase, l'entraîneur prête souvent plus d'attention à ce que font les garçons. Ils dominent au jeu et les filles ont tendance à ce moment-là à se retirer un peu du jeu ou à devenir passives. Il est évident que ce n'est pas le genre d'exemple ou de scénario qui peut être jugé souhaitable. Mais avec de bons entraîneurs, il y a moyen de contourner ce problème.
De façon générale, nous souhaitons que les jeunes filles et les femmes puissent avoir leurs propres équipes sportives à un niveau élevé de compétition et bénéficier d'entraînement de haut calibre à l'intérieur de ces équipes de jeunes filles ou de femmes. C'est cette expérience-là qui leur serait sans doute la plus profitable. Mais c'est en fin de compte à l'athlète de choisir ce qui lui convient le mieux.
Je pense que votre deuxième question concernait notre objectif en matière de participation féminine. Eh bien, les femmes représentent environ 52 p. 100 de la population canadienne, et nous aimerions par conséquent que toutes les jeunes filles et femmes canadiennes puissent participer d'une façon ou d'une autre—pas nécessairement comme athlètes d'élite ou participantes à une activité sportive; il pourrait s'agir simplement de faire une promenade de 20 minutes tous les jours. Voilà ce que nous visons, et nous voulons surtout examiner les obstacles à la pleine participation des femmes.
• 1810
Le troisième élément de votre question...
M. Inky Mark: Oui, je vous ai demandé quelles relations vous entreteniez avec le reste du monde pour ce qui est de défendre la participation des femmes à l'activité sportive.
Mme Marg McGregor: Oui, c'est ça. Le Canada est en fait un chef de file dans ce domaine. La ministre Copps, par l'entremise de Patrimoine canadien et de Sue Neill qui est rattachée à Sport Canada, est coprésidente d'un groupe qui s'appelle Women Sport International. Nous sommes conscientes du fait que nous avons beaucoup de chance de vivre dans un pays où le gouvernement du Canada respecte le principe de l'équité, et par conséquent, nous avons pu faire beaucoup plus de choses que la plupart des autres pays du monde.
Nous avons déjà quitté le bloc de départ et avons fait la moitié de la piste. Nous n'avons pas encore atteint la ligne d'arrivée au Canada, mais nous y arrivons rapidement.
M. Inky Mark: Merci.
Le président: Madame Tremblay.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Est-ce que votre association a des ramifications au niveau des provinces? Comment fait-on pour devenir membre de votre association?
[Traduction]
Mme Marg McGregor: Nous travaillons en collaboration avec les administrations provinciales et les organismes sportifs provinciaux d'un bout à l'autre du pays, de telle sorte que nous pouvons recourir à un réseau de personnes—à la fois hommes et femmes—dans toutes les régions qui partagent nos préoccupations. Nous sommes un petit organisme et l'ACAFS n'a donc pas d'affiliés régionaux dans chaque province, mais nous travaillons très fort pour obtenir l'appui de gens qui occupent des postes de direction et peuvent nous aider à défendre notre cause.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Est-ce que vous avez des contacts ou des rencontres avec le monde musulman, où les femmes font du sport complètement à part des hommes, avec l'organisation sportive des femmes musulmanes?
[Traduction]
Mme Marg McGregor: Vous posez une excellente question. Par le biais de notre participation à des conférences internationales, nous avons pu prendre contact avec des femmes musulmanes et les associations sportives qui les représentent. J'arrive d'ailleurs des Jeux du Commonwealth qui, comme vous le savez, ont été tenus dans un pays musulman, et j'en ai profité pour rencontrer des femmes et d'autres personnes qui défendent le sport en Malaysia. Nous reconnaissons qu'elles ressentent le besoin de suivre un autre modèle de participation sportive et qu'il est important que leur culture en tienne compte.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Maintenant, comment votre association est-elle financée?
Mme Marg McGregor: On reçoit des subventions du gouvernement du Canada, plus précisément de Sport Canada et de Santé Canada. Il y a aussi les frais d'adhésion, le marketing et les activités de levée de fonds.
Mme Suzanne Tremblay: Est-ce que les femmes deviennent membres de votre association à titre individuel ou en tant que membres d'une équipe? C'est la première fois que j'entends parler de votre association.
[Traduction]
Mme Marg McGregor: Notre organisme n'a pas de membres.
Mme Suzanne Tremblay: Non?
Mme Marg McGregor: Non, nous avons plutôt ce que nous appelons un réseau, et quiconque souhaite travailler pour accroître la participation au sport des jeunes filles et des femmes demande à faire inclure son nom sur notre liste d'envoi de façon à faire partie du réseau. Mais nous n'avons pas vraiment de membres. Nous formons plutôt des partenariats avec tous les autres organismes du monde du sport pour les aider à comprendre comment ils peuvent modifier leurs programmes pour attirer davantage de filles et de femmes. Nous sommes un petit organisme, et nous ne voulons pas avoir à assumer la responsabilité de ce problème; nous voulons plutôt que le monde du sport l'assume.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Savez-vous si l'organisation des Jeux olympiques a décidé que, pour les prochains jeux, une discipline quelconque ne sera reconnue que si les femmes y participent? Est-ce qu'on a décidé de ne plus permettre qu'il y ait aux Olympiques des sports réservés aux hommes? Faudra-t-il que les hommes et les femmes participent?
[Traduction]
Mme Marg McGregor: Le Comité international olympique essaie d'augmenter le nombre de manifestations sportives pour les femmes. Pour le moment, nous sommes loin d'avoir une proportion égale d'événements pour femmes et pour hommes, mais c'est l'objectif que s'est fixé le CIO.
Et ils n'insistent pas pour que ce soit des épreuves parallèles. Par exemple, le softball pour femmes est maintenant une épreuve olympique; mais pas le softball pour hommes; la natation artistique pour femmes est également une épreuve olympique, mais pas celle pour hommes; le saut à ski pour hommes est une épreuve olympique, mais pas le saut à ski pour femmes. Donc, le CIO n'insiste pas pour avoir toujours des activités parallèles, et c'est une approche qui nous semble tout à fait logique. Les femmes et les hommes n'ont pas envie de participer aux mêmes activités. Les femmes peuvent ne pas avoir envie de faire de la boxe; les hommes, oui. Les femmes peuvent vouloir faire de la natation artistique. Donc, cette approche nous semble très positive.
• 1815
Ils ont toute une série de contingents et d'objectifs qu'ils
ont fixés de telle sorte que d'ici l'an 2010, ils voudraient que
10 p. 100 des postes de direction soient occupés par des femmes, et
ils vont augmenter le nombre progressivement pour que d'ici 50 ou
60 ans, le taux de participation soit de 50 p. 100.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay: Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, madame Tremblay.
Monsieur Coderre.
[Français]
M. Denis Coderre: Non seulement j'appuie toutes vos aspirations, mais je suis aussi de la génération qui profite des batailles de ses aînés. Pour moi, il est clair que lorsqu'on parle d'égalité et d'accessibilité, cela ne devrait pas être un débat mais une garantie. Maintenant, il y a encore des gens qui fonctionnent comme s'ils étaient à l'âge de pierre. Il y a encore des problèmes très certains. Le but du comité est d'apprendre quelle est la situation sur le terrain. Vous faites vos recommandations au sujet de l'accessibilité, et on doit travailler d'arrache-pied en ce sens, mais il y a des choses qui m'inquiètent beaucoup. Il y a toute la question du harcèlement sexuel et ainsi de suite.
Quelle est la situation actuelle au Canada? Est-ce que vous connaissez des histoires d'horreur? Est-ce un problème que l'on vit actuellement ou si vous pensez qu'il y a une solution à ce problème étant donné que c'est beaucoup moins tabou et qu'on en parle beaucoup plus ouvertement? Parlez-moi de ce qui se passe au Canada à cet égard, pour les jeunes filles et les jeunes femmes.
[Traduction]
Mme Marg McGregor: En ce qui concerne le harcèlement et les abus, une série d'études a été menée pour essayer de déterminer le nombre de victimes—c'est-à-dire combien de personnes qui participent aux activités sportives font l'objet d'une forme ou d'une autre de harcèlement, d'exploitation ou d'abus. Toutes ces études reposent sur un petit échantillon. Aucune d'entre elles ne résisterait à l'application des normes rigoureuses qui caractérisent les thèses de doctorat pour ce qui est de leur fiabilité ou validité scientifique.
Tout cela pour dire que les études en question indiquent qu'entre 40 et 50 p. 100 des personnes—hommes et femmes—qui font du sport font l'objet de harcèlement sous une forme ou une autre. Cela ne veut pas dire qu'il s'agit d'une forme aussi extrême de harcèlement ou d'abus que dans l'exemple Sheldon Kennedy, mais il peut s'agir d'incidents où ils font l'objet de vives réprimandes de la part de leur entraîneur ou on les oblige à faire des tours de piste jusqu'à ce qu'ils vomissent, etc.
C'est une grande préoccupation pour nous qui travaillons dans le domaine du sport. C'est un pourcentage beaucoup trop élevé. Cela veut dire qu'une personne sur deux n'a pas l'impression de se trouver dans un milieu qui favorise son estime de soi; ces personnes abandonnent l'activité sportive en ayant des sentiments négatifs à l'égard de leur expérience. C'est tout simplement inadmissible.
En tant que membres de la communauté, notre collaboration de janvier dernier nous a permis de reconnaître que ce problème n'est pas la responsabilité du milieu du hockey; c'est la responsabilité de toute la communauté. C'est un problème courant, et nous devons donc conjuguer nos efforts pour trouver une solution commune.
En conséquent, nous avons préparé un certain nombre de documents et lancé une campagne intitulée Speak Out, et il ne fait aucun doute que de plus en plus de gens n'hésitent pas à parler franchement de ce problème. Nous commençons à sensibiliser les parents et les athlètes au genre de comportements qui peuvent être considérés appropriés, et nous sensibilisons également les entraîneurs, afin qu'ils connaissent les limites. Nous travaillons également à l'établissement d'une procédure de traitement des plaintes pour que les gens puissent se sentir en sécurité s'ils veulent porter plainte et bénéficier d'une écoute impartiale qui respecte les droits du plaignant et de la personne accusée du harcèlement.
Cette question est maintenant du domaine public et fait l'objet de diverses initiatives, mais il va falloir y consacrer un effort considérable au cours des prochaines années pour faire baisser ce pourcentage.
[Français]
M. Denis Coderre: Le fait d'en parler constitue un début de solution. Il faut sortir des sentiers battus. On est maintenant sensibilisés à la question.
[Traduction]
Mme Marg McGregor: C'est exact.
[Français]
M. Denis Coderre: Comment percevez-vous le leadership du gouvernement canadien dans la cause de l'avancement des femmes au niveau du sport, à tous points de vue? J'ai un peu de difficulté lorsque vous parlez d'infrastructures. Vous savez qu'il y a 50 p. 100 de femmes. Je pense qu'il faut se battre beaucoup plus pour l'accessibilité que pour les installations, parce que de toute façon, même pour les jeunes garçons, il y a présentement un manque d'installations. Il y a là un problème sérieux.
Donc, comment percevez-vous le leadership du gouvernement canadien dans la cause de l'avancement des femmes dans le sport? En êtes-vous satisfaits? Trouvez-vous qu'on devrait aller beaucoup plus loin? Êtes-vous d'avis qu'on ne fait que mettre un plaster sur une jambe de bois, comme on dit chez nous? Est-ce qu'on vous donne un petit montant d'argent pour se donner bonne conscience ou si vous avez vraiment l'impression qu'on fait ce qu'il faut pour régler le problème?
[Traduction]
Mme Marg McGregor: Il importe de reconnaître l'appui de la ministre Copps et de Sport Canada dans tout ce dossier. En 1986, Sport Canada a approuvé une politique sur les femmes et le sport. J'ai l'impression qu'il faut maintenant intensifier les efforts de ce côté-là et passer à l'étape suivante.
Sport Canada est le principal organisme de patronage des organismes nationaux de sport. Il peut exercer énormément d'influence sur les pratiques de chaque organisation sportive. Cela rejoint d'ailleurs une de nos recommandations: nous encourageons Sport Canada à être ferme avec les organismes sportifs, c'est-à- dire à reconnaître les efforts de ceux qui s'efforcent d'inclure dans leurs programmes les athlètes qui ont une incapacité et les femmes, ou encore de sanctionner ceux qui ne font rien. Jusqu'à présent, il y a eu peu d'initiatives de ce genre.
C'est un moyen pour le gouvernement d'intervenir directement pour réduire l'écart qui existe; il s'agirait non seulement de dire que c'est important mais de prouver, en réduisant le montant du chèque, que c'est important. Ce genre de méthode donne de bons résultats chez les organismes sportifs.
[Français]
M. Denis Coderre: J'aimerais poser une dernière question. Il est clair que la médaille d'argent de l'équipe féminine de hockey a fait beaucoup avancer la cause de la femme. J'aimerais que vous me parliez des autres sports. Le hockey, c'est bien beau, mais il y a d'autres sports. Dans quel domaine sportif la cause des femmes avance-t-elle le mieux présentement?
[Traduction]
Mme Marg McGregor: Il y a une corrélation directe entre notre performance aux Jeux olympiques et l'intérêt qu'on porte à notre pays, tout simplement à cause du public mondial que nous amène la télévision dans le contexte des Jeux olympiques. Notre équipe d'aviron est un excellent exemple de ce phénomène. La performance des hommes et femmes qui font partie de nos équipes d'aviron a été extraordinaire lors des derniers Jeux olympiques, et la participation est aussi montée en flèche.
Un autre exemple serait le patinage de vitesse. Ma fille a vu la performance de Catriona Lemay-Doan, et donc quand elle a eu un Tamagochi elle l'a nommé Catriona. Les enfants en bas âge s'identifient à des héros de ce genre. Nous n'avons pas suffisamment de héros au Canada, et nos athlètes peuvent certainement jouer ce rôle.
La natation est un autre exemple encore. Aux Jeux du Commonwealth, Joanne Malar était tout à fait extraordinaire, non seulement pour sa performance mais parce qu'elle est un excellent modèle. Elle était chef d'équipe, et c'est elle qui a pris les plus jeunes athlètes sous son aile.
Il y a donc une corrélation directe entre les sports où nous avons une excellente performance et l'intérêt des jeunes enfants canadiens, qui s'imaginent qu'ils peuvent peut-être répéter les exploits de Catriona Lemay-Doan.
Le président: Je voudrais simplement prévenir mes collègues et nos témoins que nous devons lever la séance dans environ quatre minutes et demie.
Monsieur O'Brien.
M. Pat O'Brien: Je vais essayer d'être bref.
Nous avons beaucoup de héros au Canada; le problème, en ce qui me concerne, c'est que nous ne les considérons pas comme des héros, en tout cas pas assez, qu'on parle du sport ou d'autres domaines.
Mme Tremblay vous a peut-être déjà posé cette question, et je m'en excuse d'avance si c'est le cas. Mais je n'ai pas bien entendu la réponse. Votre organisme est-il constitué uniquement de bénévoles? Avez-vous des employés à plein temps? Et où se trouve votre siège social?
Mme Marg McGregor: Notre siège social, de même que celui d'une quarantaine d'autres organismes de sport nationaux se trouve au Centre canadien d'administration du sport et de la condition physique. Nous sommes surtout un organisme de bénévoles. Nous avons deux employés rémunérés à plein temps et nous faisons aussi appel à quelques entrepreneurs, mais nous dépendons surtout des efforts d'une véritable armée de bénévoles, hommes et femmes, qui sont résolus à faire augmenter la participation des filles et des femmes aux activités sportives.
M. Pat O'Brien: Merci.
Vous avez parlé du coût de l'équipement sportif pour femmes. Moi-même je jouais au hockey par le passé. Pourquoi des patins pour femmes devraient-ils coûter deux ou trois fois plus cher à fabriquer que les patins pour hommes?
Mme Suzanne Tremblay: On parle de patins qui sont faits pour jouer au hockey, et non pas de patins ordinaires pour les filles.
M. Pat O'Brien: Si j'ai bien compris, vous avez dit que les patins de hockey pour femmes coûtent deux ou trois fois plus cher que ceux pour hommes, et je ne comprends pas pourquoi c'est le cas.
Mme Marg McGregor: C'est la même chose dans d'autres domaines: les femmes paient plus cher pour se faire couper les cheveux.
Des voix: Oh, oh!
Mme Marg McGregor: C'est une fonction du nombre. On fabrique des millions de patins pour hommes, de sorte que les filles ont de plus en plus tendance à acheter des patins junior pour garçons.
M. Pat O'Brien: Ah, bon. Je comprends. C'est plutôt fonction de la demande. Ce n'est pas parce qu'ils sont fabriqués différemment...
Mme Marg McGregor: Non.
M. Pat O'Brien: Très bien. J'ai mal compris. Merci pour cette mise au point.
Mes antécédents comprennent des charges au sein d'une administration municipale. Je trouve ça formidable que vous soyez là—vraiment. Nous avons besoin d'une vision nationale dans ce domaine. Mais pour assurer le traitement équitable des femmes et des jeunes filles dans le milieu sportif, nous avons surtout besoin d'initiatives au niveau local. Cela veut dire que votre conseil municipal doit s'assurer que le temps d'utilisation des patinoires est réparti de façon plus équitable, pas seulement aux filles qui font du patinage artistique—même si c'est très bien—mais à celles qui font partie d'équipes de hockey sur glace.
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À propos, monsieur le président, si vous me permettez d'ouvrir
une petite parenthèse, M. Lachance a fait une distinction entre
l'aspect spectacle et l'aspect sportif que je n'ai pas vraiment
comprise ou acceptée. Il y a un élément de spectacle dans le sport,
et je dois avouer que les meilleurs matchs que j'ai vus depuis
longtemps sont ceux de l'équipe nationale féminine de hockey. D'un
point de vue technique, il y a peut-être mieux, mais en ce qui me
concerne, ce sont les matchs qui sont les plus intéressants à
regarder. Et même sur le plan technique, elles jouent bien.
J'ai une question à poser et une proposition à faire. Votre organisme a-t-il jamais songé à s'adresser à la Fédération canadienne des municipalités pour qu'elle intervienne auprès des conseils municipaux de tout le Canada pour agir sur ce problème? Je devrais m'arrêter là. Avez-vous déjà essayé de faire ça?
Mme Marg McGregor: Non, pas encore, et c'est une excellente suggestion. Nous avons travaillé assez étroitement avec l'Association canadienne des loisirs/parcs, mais non...
M. Pat O'Brien: Merci. Si vous me permettez, je pense que vous devez vraiment faire pression sur les personnes qui se présentent à un poste au sein du conseil municipal de London, en Ontario, et de Toronto et Montréal, pour être absolument sûre que les jeunes filles aient la part qui leur revient du temps d'utilisation des patinoires.
C'est tout pour moi, monsieur le président.
Le président: Très bien.
Monsieur Cannis, vous avez à peu près une minute et demie.
M. John Cannis: Récemment j'étais censé prononcer un discours à la Conférence d'Athènes, en compagnie de Sue Neill, mais je suis sûr qu'elle a fait un excellent travail. Mon emploi du temps ne me permettait pas d'y assister. Je suis également très content que la conférence de l'an 2002 se tienne ici.
J'ai l'impression que votre organisme fait surtout fonction de centre d'information, si je peux le dire ainsi. J'étais très ému quand j'ai rencontré Karen Nystrom il y a quelques années. Quand nous avons parlé dans mon bureau, elle m'a dit que toutes les jeunes filles payaient leurs propres dépenses d'entraînement. Elles ne bénéficiaient d'aucune aide financière à l'époque.
Bien sûr, nous savons qu'elles reçoivent de l'aide à présent. Mais n'oublions pas qu'il a fallu des championnats du monde, entre autres, pour sensibiliser les gouvernements et les représentants municipaux à ce problème et obtenir d'eux qu'ils accordent une aide financière à telle ou telle équipe, surtout que nous avons été si fiers d'elles lors des Jeux olympiques.
Je présume que vous n'accordez pas de soutien financier à des organismes sportifs, comme ceux qui se chargent du hockey pour femmes. Peut-être pourriez-vous me donner quelques éclaircissements à ce sujet?
Mme Marg McGregor: Vous citez un bon exemple. Non nous ne finançons pas ces organismes-là. Notre budget ne le permet pas. Nous sommes un tout petit organisme. Mais nous avons travaillé assez étroitement avec l'Association canadienne de hockey au cours de la dernière année pour faire comprendre à ses dirigeants les changements qui s'imposaient dans le secteur du hockey, car ils ne savaient pas vraiment ce qu'il fallait pour faire de leur organisme un organisme équitable. Ils n'ont pas l'expertise voulue dans ce domaine.
M. John Cannis: Donc, vous allez les voir en leur disant: «Votre sport est reconnu, et voilà ce que vous devez faire pour obtenir une aide financière du gouvernement.»
Mme Marg McGregor: Oui, nous les aidons à obtenir du soutien et à exécuter des programmes équitables.
M. John Cannis: Je voudrais faire une dernière observation en guise de conclusion, monsieur le président.
Un élément en particulier qui a été mentionné par tous les témoins aujourd'hui—et je vous remercie d'avoir insisté là-dessus, vous aussi—c'est le fardeau financier que doit supporter la famille; vous avez recommandé que les gouvernements envisagent de leur offrir des dégrèvements fiscaux.
C'est peut-être justement le moment d'en parler, étant donné que les consultations prébudgétaires sont actuellement en cours. En tant que parent de trois enfants, je sais ce que cela me coûte pour faire participer ma fille et mes deux garçons aux activités sportives, ce qui les garde loin des centres commerciaux et à l'intérieur des arénas pendant l'hiver ou encore sur les terrains de soccer en été. Mais je pense que nous serions encore plus motivés si nous savions qu'il existe des mesures d'encouragement.
Merci infiniment pour votre observation.
Mme Marg McGregor: Nous avons un certain nombre d'exemples dans d'autres pays du monde. Au Royaume-Uni, par exemple, ils ont mis sur pied un programme en vertu duquel le gouvernement offre des encouragements aux gens qui touchent l'assurance-chômage, pour qu'ils participent à un programme d'activité physique. Donc, en créant des dégrèvements fiscaux, ils insistent sur la valeur sociale de l'activité physique.
M. Pat O'Brien: Pourriez-vous nous envoyer de l'information sur l'initiative que vous venez de mentionner?
Le président: Oui, sur l'expérience de ce programme qui s'adresse aux chômeurs.
Mme Marg McGregor: Avec plaisir.
Le président: Monsieur Mark, avez-vous une observation de 30 secondes à faire?
M. Inky Mark: J'ai une toute petite question.
Nous avons parlé de discrimination sexuelle aujourd'hui, et j'aimerais savoir dans quel segment de la société ce problème semble être le plus présent. Est-ce le milieu préscolaire, le système d'éducation en général, le monde du sport amateur ou post- amateur? Avez-vous des études indiquant où tous ces problèmes, entre autres celui de l'égalité d'accès, auxquels font face les femmes sont les plus présents?
Mme Marg McGregor: Ce que nous indiquent nos statistiques, c'est que la participation des filles et des garçons aux activités sportives est assez équitable jusqu'à l'âge de 12, 13 ou 14 ans, et ensuite il y a une baisse radicale.
Le président: Madame McGregor, merci infiniment, et merci à toutes vos collègues d'avoir accepté de venir témoigner aujourd'hui. Vos remarques et vos recommandations nous seront grandement utiles dans le cadre de nos délibérations. Merci donc de votre présence.
Chers collègues, avant que je lève la séance, je voudrais vous rappeler deux choses. Le 21 octobre, dans cette même salle, nous recevrons les représentants de l'Association canadienne des entraîneurs et de l'Association des joueurs de la Ligue nationale de hockey. Je vous encourage à lire certaines sections de notre première ébauche pour nous assurer que nos recommandations sont cohérentes.
Monsieur Mark.
M. Inky Mark: Monsieur le président, le programme indique que le comité siège la semaine prochaine. Mais c'est la semaine du congé parlementaire. Ces réunions vont donc être annulées, je suppose?
Le président: Non, c'est le 21 octobre.
M. Inky Mark: Le programme indique le 14 octobre.
Le président: Non, vous avez un vieux calendrier. Notre prochaine réunion se tiendra le 21 octobre.
M. Inky Mark: Y a-t-il une possibilité de conflit avec la visite qui est prévue ou les activités organisées par l'autre comité, c'est-à-dire le comité plénier?
Le président: Non, il n'y a pas de conflit.
M. Inky Mark: Très bien. Merci.
Le président: La séance est levée.