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SINS Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON THE STUDY OF SPORT IN CANADA OF THE STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE

SOUS-COMITÉ SUR L'ÉTUDE DU SPORT AU CANADA DU COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 21 octobre 1998

• 1534

[Traduction]

Le président (M. Dennis J. Mills (Broadview—Greenwood, Lib.)): La séance est ouverte. Bienvenue à tous.

Mme Tremblay n'est pas encore là. Elle est habituellement la première arrivée, et c'est pourquoi j'ai attendu quelques minutes avant de commencer. Elle est fidèle au rendez-vous depuis le tout début de nos travaux, il y a un an.

• 1535

Ah, la voici; nous pouvons commencer officiellement maintenant que Mme Tremblay est arrivée.

Je voudrais d'autre part remercier les représentants de l'Association canadienne des entraîneurs. Ils devaient être nos premiers témoins, mais ils ont très généreusement cédé leur place à M. Carefoote et à ses collègues, des Brasseries Molson, qui ont un autre engagement dans une autre ville. Ils ont un horaire très chargé aujourd'hui.

Nous allons donc souhaiter à M. Carefoote la bienvenue devant notre comité, qui étudie les liens entre le sport et l'économie.

Je vous laisse tout de suite la parole. En passant, si vous voulez que vos collègues se joignent à vous, vous pouvez nous les présenter officiellement.

M. Jeff Carefoote (vice-président senior, Sports et divertissement, Brasseries Molson): Avec plaisir.

Je vous présente donc Marilyn McCrae, notre vice-présidente aux affaires publiques, et Judy Davey, qui est chargée des sports et des médias au bureau national des Brasseries Molson.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, distingués invités, je vous remercie de nous avoir permis de comparaître devant vous aujourd'hui pour vous exposer nos vues sur les questions que vous êtes en train d'étudier. Permettez-moi tout d'abord de vous expliquer pourquoi Molson, une des brasseries les plus anciennes et les plus prospères au Canada, vient témoigner devant un groupe de travail parlementaire chargé d'étudier le sport au Canada.

Il y a plusieurs raisons qui nous ont poussés à venir vous rencontrer. Comme notre compagnie vend ses produits à des millions de personnes, il est essentiel que nous comprenions et que nous soutenions les activités et les intérêts des Canadiens ordinaires. Nous nous occupons également de sports et de divertissements sportifs dans le cadre de notre partenariat de radiotélédiffusion avec toutes les équipes de hockey professionnel du Canada, de même que dans le cadre d'ententes d'affaires dans les domaines de la publicité et du marketing.

Parce que nous avons conscience de nos responsabilités sociales envers la société canadienne, nous croyons à la valeur des sports pour leur contribution à la santé et à la paix sociale, ainsi qu'à notre culture, à notre sentiment d'appartenance et à notre identité en tant que Canadiens. Nous tenons à reprendre certains messages que d'autres vous ont déjà transmis au sujet des problèmes économiques de plus en plus graves qui affligent le hockey au Canada.

En bref, Molson fait partie de l'industrie du sport et du divertissement au Canada par le biais de ses investissements et de ses activités de radiotélédiffusion, de publicité, de commandite et de marketing. Mais surtout, nous sommes ici pour souligner l'importance du sport pour la qualité de vie de nos clients. Nous avons un rôle à jouer dans le soutien aux sports et aux divertissements sportifs—et nous l'avons fort bien joué dans le passé. C'est un élément important de l'économie canadienne et, en raison de notre contribution, nous avons le sentiment de bien comprendre comment tout cela fonctionne.

En même temps, nous vous félicitons de votre travail et nous espérons apporter une contribution utile à vos délibérations. Nous partageons bon nombre des préoccupations que vous avez vous-mêmes exprimées, tout comme de nombreux autres témoins qui ont comparu devant vous depuis le début de l'année. Nous sommes convaincus que le gouvernement a un rôle essentiel à jouer dans le développement du sport à tous les niveaux, qui fait partie intégrante de la culture canadienne. Et nous croyons qu'il faut des idées novatrices pour aider à résoudre les problèmes de plus en plus sérieux qui affligent le monde du sport.

Permettez-moi d'ouvrir une parenthèse pour vous dire que Molson ne croit pas que l'aide gouvernementale constitue une solution à long terme. Toutefois, étant donné la situation particulière que nous vivons actuellement en ce qui concerne le taux de change entre la devise canadienne et la devise américaine, il y a probablement place sur le marché pour une intervention gouvernementale—mais une intervention temporaire. Des mesures visant à corriger la situation à court terme permettraient aux équipes sportives, à leurs partenaires commerciaux et à leurs partisans de déterminer exactement de quel genre de stabilité à long terme ils ont besoin, parce qu'en définitive, il faut que ce soient des entreprises rentables. Molson, qui est en affaires depuis 213 ans, peut en témoigner.

Il est évident que les Canadiens s'intéressent beaucoup au sport. Près de la moitié des plus de 15 ans participent régulièrement à des activités sportives, et même beaucoup plus parmi les 15 à 24 ans.

Au Canada, le sport est également un élément crucial de notre système de valeurs et fait partie intégrante de notre vie communautaire. Les Canadiens ont indiqué dans diverses enquêtes que le sport était essentiel pour promouvoir des valeurs comme la force de caractère, l'esprit sportif et le travail d'équipe. Jusqu'à 90 p. 100 d'entre eux jugent que le sport—tant amateur que professionnel—est un aspect important de notre culture.

Des millions de Canadiens vont voir les matches d'équipes professionnelles et suivent de près les activités de leurs équipes préférées. Dans tous les groupes d'âge et dans toutes les régions, ils se passionnent pour leurs athlètes et leurs équipes favorites. Nous sommes une nation de sportifs, dont les réalisations internationales excèdent—et de loin—la taille de notre population. Nous célébrons le dépassement de soi, nous exigeons des performances exceptionnelles et, à l'occasion, nous nous décourageons quand nous ne les obtenons pas.

• 1540

Nous exigeons ce qu'il y a de mieux dans un pays où la situation économique du sport est difficile, au mieux. Et où elle se détériore rapidement. Les raisons en sont évidentes. Nous sommes en concurrence avec des nations plus grandes, qui disposent de plus de ressources et de plus grands marchés. Et nous partageons une frontière avec un pays où le sport est une marchandise comme les autres, et où la taille dicte le plus souvent le résultat.

Je vais vous en donner un exemple flagrant. Molson a le privilège de commanditer une course automobile de classe mondiale, la course Molson Indy de Toronto. Le loyer que nous devons verser chaque année pour la piste temporaire installée à l'occasion de cette course est plus élevé que pour les 17 courses Indy combinées aux États-Unis.

Pour les Canadiens, le sport est une force unificatrice qui fait partie de leur culture, et qui aurait parfois besoin de l'appui que nous accordons sans hésiter à d'autres secteurs culturels. Il nous permet également de nous afficher sur la scène internationale, que ce soit en tant qu'hôte de la course Molson Indy à Toronto ou à Vancouver—deux villes de classe mondiale—ou des Jeux olympiques comme ceux qui se sont tenus à Montréal et à Calgary.

Le sport est souvent une affaire de concurrence, et c'est pourquoi nous devons tenir compte de ses aspects économiques. Nous vivons une situation de plus en plus difficile, dont l'effet se fait sentir non seulement sur les équipes sportives, mais aussi sur les simples citoyens du Canada. Il est donc important d'élargir le dialogue sur l'avenir du sport professionnel au Canada, ce que votre comité a très bien réussi à faire. Et puisque le sport fait partie intégrante de ce que nous sommes et de ce que nous voulons être, les problèmes dans ce domaine nécessitent une approche collective. L'industrie, les gouvernements, les bénévoles et les Canadiens ordinaires doivent contribuer à cette discussion et collaborer à la recherche de solutions.

Il est temps maintenant que je prenne un peu de recul et que je replace la question dans son contexte, pour vous expliquer à quel titre Molson peut parler du rôle du sport dans la société canadienne.

Il ne fait guère de doute que le hockey est la pierre angulaire du sport au Canada; 88 p. 100 des hommes du pays s'y intéressent. C'est peut-être le meilleur exemple de la dimension culturelle du sport, mais c'est loin d'être le seul sport populaire chez nous. Le golf et la course automobile sont en plein essor, le football et le base-ball sont bien implantés, et le basket-ball gagne du terrain.

L'intérêt du public pour le sport professionnel, ou pour le sport-spectacle, est lié à la participation au sport récréatif. Les sports d'équipe et les sports individuels sont de plus en plus populaires, notamment le soccer, la balle lente, la planche à neige, la natation, la course, le jogging et la bicyclette.

Et pourquoi? Certaines raisons sont évidentes, par exemple la nécessité de se récréer et de se tenir en forme, de s'amuser et de se divertir. Personnellement, j'aime surtout l'aspect amusement et divertissement. Mais les Canadiens citent aussi d'autres raisons, par exemple le désir de camaraderie et le besoin de se sentir fier de ses propres réalisations, de sa collectivité et de son pays. Ils veulent aussi maintenir les traditions, transmettre de bonnes valeurs aux jeunes et leur former le caractère.

Pour ceux d'entre nous qui continuent la tradition chez Molson, la participation aux activités sportives est cruciale. C'est pour nous une question de conscience sociale, mais également de rentabilité commerciale. Nous ne prétendons pas être tout à fait désintéressés. Notre engagement dans ce domaine nous permet de créer des liens avec nos clients. La bière est le produit de choix pour les partisans et les participants. Le sport nous fournit donc d'excellentes occasions publicitaires; il nous offre également la chance de donner quelque chose en retour, pour remercier notre clientèle de sa loyauté. Il nous permet de montrer que notre produit peut être consommé de manière saine, et qu'il l'est effectivement.

Dans le domaine du sport récréatif, nous commanditons des centaines d'activités communautaires, dont beaucoup visent à financer des organisations de bienfaisance locales. Nous parrainons par exemple plus de 200 tournois locaux de balle lente, d'un bout à l'autre du pays, aussi bien que les championnats de hockey féminin de l'USIC. Notre tournoi canadien de volley-ball, à Ottawa, permet d'amasser des milliers de dollars pour le centre de traitement pour enfants. Et l'équipe de softball des Canadiens de Montréal recueille chaque été 250 000 $ pour des oeuvres de charité locales.

Les deux principaux programmes de responsabilité sociale des Brasseries Molson sont axés sur le sport. Notre programme «Take Care/Prends soin de toi», qui porte sur la consommation responsable d'alcool, fait appel à de grands coureurs automobiles comme Greg Moore et Patrick Carpentier.

Nous avons lancé cet été un important nouveau programme appelé «Local Heroes/ÉquipAction», dans le cadre duquel nous versons des fonds de contrepartie aux localités et aux groupes communautaires pour la remise en état d'installations récréatives. Nous voulions promouvoir l'esprit communautaire naturel des Canadiens en leur permettant de faire leur part pour bâtir des communautés sûres et en santé. Le programme a été extrêmement bien accueilli d'un océan à l'autre, et nous avons pu contribuer à quelque 600 projets dès la première année.

Enfin, nous sommes engagés à fond dans le sport professionnel au Canada, que ce soit en soutenant des équipes ou en organisant des manifestations. Les Canadiens veulent que leurs équipes leur offrent une performance de calibre mondial, et ils veulent aussi avoir accès à des manifestations d'envergure internationale. Nous avons répondu à leurs voeux.

Nous avons des intérêts, comme propriétaire ou comme commanditaire, dans plusieurs courses automobiles dont le Grand Prix de Montréal et les courses Molson Indy de Toronto et de Vancouver. Dans le domaine du basket-ball, nous sommes associés aux Grizzlies de Vancouver, aux Raptors de Toronto et à la National Basketball Association. Nous sommes les fournisseurs de bière officiels de la Ligue canadienne de football, de plusieurs de ses équipes, de ses séries éliminatoires et des matches de la Coupe Grey.

• 1545

Et puis, il y a le hockey. Nous sommes la principale brasserie associée au hockey au Canada. Nous investissons dans le hockey aux niveaux communautaire, récréatif et junior. Nous commanditons les équipes nationales, chez les hommes comme chez les femmes. Nous avons des relations de commandite avec la Ligue canadienne de hockey, les associations ontarienne et québécoise, et la Western Hockey Association. Nous sommes propriétaires des Canadiens de Montréal et du Centre Molson, et nous sommes maintenant une institution dans le domaine du hockey à la télévision, surtout grâce à notre participation de longue date à La soirée du hockey/Hockey Night in Canada. Et nous nous lançons maintenant dans un nouveau type de commandite dans le cadre de notre programme de hockey des équipes canadiennes, qui nous permettra de diffuser encore plus de hockey dans les foyers canadiens parce que nous avons acheté les droits de télédiffusion des matches des équipes canadiennes et que nous avons conclu des ententes de commandite avec toutes les concessions canadiennes de la LNH.

Mais revenons à l'économie du sport, à l'avenir du hockey et au rôle du gouvernement. L'équation est simple: le sport rapporte de l'argent, l'argent permet au sport de survivre, et le sport est important pour l'économie canadienne.

Monsieur le président, votre étude sur les retombées économiques du sport est très importante. La LNH, par exemple, a fourni à votre comité des chiffres très clairs sur les retombées de ses activités: 8 700 emplois directs et 11 750 emplois indirects. Et les manifestations comme la course Molson Indy de Toronto génèrent 74 millions de dollars en activité économique, rapportent 14 millions en taxes et impôts, et créent 800 emplois pendant une semaine. Tout ça est extrêmement important, mais c'est loin d'être garanti.

La semaine dernière encore, le ministre des Finances a déclaré que nous devions rechercher la stabilité à long terme dans la gestion de notre pays. C'est ce dont les entreprises ont besoin elles aussi. Mais la vérité, c'est qu'il est à peu près impossible d'invoquer des raisons d'affaires pour justifier un investissement dans le sport au Canada. La rentabilité de cet investissement est trop faible, même dans le meilleur des cas. Les marchés sont relativement restreints. Et l'univers des 500 canaux apporte les sports professionnels de compétition dans le salon des gens à la vitesse de l'éclair.

Pendant que les équipes professionnelles canadiennes luttent pour leur survie, il est inquiétant de constater que nous sommes en train de rendre les sports professionnels inabordables pour les familles canadiennes, tandis que la majorité des droits de commandite d'activités comme La Soirée du hockey s'en vont maintenant au sud de la frontière, dans les poches des Américains.

Diverses enquêtes ont révélé que beaucoup de partisans jugent que les sports professionnels sont tellement dominés par les impératifs commerciaux que le jeu s'en ressent. Sous l'impulsion des énormes marchés américains, les sports professionnels en Amérique du Nord risquent de devenir un passe-temps réservé aux riches.

Si la tendance se maintient, cette situation aura des répercussions économiques désastreuses. Les compagnies qui servent les consommateurs canadiens sont bien prêtes à investir dans le sport, même si les rendements sont faibles. Mais si le sport finit par devenir inaccessible pour les Canadiens ordinaires, cet investissement sera nettement moins intéressant.

La courbe de tendance est décourageante. Les équipes canadiennes sont désavantagées par rapport aux autres, et leurs partisans s'en rendent compte. Les prix des billets ne cessent de grimper, et ils sont déjà hors de portée de bien des gens. Notre dollar n'a jamais été aussi bas, et notre capacité de produire des revenus est limitée par la petite taille du marché des partisans et des téléspectateurs.

Les revenus des équipes n'ont jamais été aussi élevés. Et les prix des billets non plus. Les commandites sont nombreuses. Les suites de luxe et les recettes de radiotélédiffusion, tant au Canada qu'aux États-Unis, ont atteint des niveaux records. Et malgré tout cela, le sport est au bord de la faillite et le fardeau fiscal est très lourd.

Il est évident que la qualité en souffre. Les équipes canadiennes de la NBA en sont un bon exemple. Il y a beaucoup d'intérêt chez les partisans, mais les équipes ont du mal à survivre. Et la dernière année a été décourageante au hockey aussi, tant pour l'équipe olympique masculine que pour les équipes canadiennes qui ont participé aux séries éliminatoires de la LNH.

Le hockey est en difficulté au Canada, à tous les niveaux. Vous l'avez sûrement déjà entendu dire, mais cela mérite d'être répété. Les Canadiens s'inquiètent de voir leurs équipes plier bagage et s'en aller aux États-Unis. Ils craignent que les équipes canadiennes finissent, dans les faits, par devenir une ligue mineure servant uniquement à alimenter la ligue américaine. Nous n'appuyons pas suffisamment nos entraîneurs, tant chez les débutants qu'aux niveaux plus avancés. Nous avons laissé s'affaiblir le meilleur système de perfectionnement au monde issu de la base. Nous n'avons pas réinvesti suffisamment.

Bien franchement, nous avons supprimé une partie du plaisir du jeu par une commercialisation effrénée de ce qui était à une certaine époque une activité culturelle autant qu'une entreprise. L'image de ce sport a été ternie par des cas d'agressions et des incidents violents. Bien des parents craignent maintenant de laisser leurs enfants s'intéresser outre mesure au hockey; c'est une toute nouvelle attitude, qui aurait été impensable pour les Canadiens des générations passées.

Pour nous, le hockey garde toujours sa valeur culturelle et sociale, une valeur de tradition et d'expérience partagées. Et il conserve aussi sa valeur commerciale. Molson va continuer à soutenir le hockey à tous les niveaux et à contribuer à la recherche d'une solution qui permettra d'améliorer et de stabiliser ce sport au Canada, et d'en retrouver l'esprit d'origine. Mais nous devons nous associer pour ce faire à de nombreux partenaires de l'industrie, du monde des affaires, des milieux bénévoles et des gouvernements.

• 1550

Nous avons suivi le débat sur le soutien gouvernemental aux sports professionnels. Nous savons qu'il y a à cet égard des intérêts et des besoins contradictoires. Nous savons que nos buveurs de bière jugent qu'ils méritent des réductions d'impôt—peut-être même une baisse des taxes sur la bière—avant les équipes de hockey des ligues majeures. Nous pensons nous aussi qu'ils le méritent, et qu'ils méritent également d'être protégés contre la hausse du prix des billets pour les rencontres sportives.

Il est clair que les Canadiens s'intéressent au sport, qu'ils en font même une passion et qu'ils s'attendent non seulement à être les meilleurs, mais à voir évoluer les meilleurs joueurs. Le sport au Canada n'a ni plus ni moins de valeur que les arts ou les institutions culturelles. Les gouvernements appuient les activités professionnelles et les entreprises privées dans ces autres domaines parce qu'ils estiment que ce sont des éléments essentiels de notre identité nationale. Il y a toute une gamme de politiques gouvernementales, dont certaines sont assez innovatrices et efficaces, qui visent à les aider. Nous croyons qu'avec un peu de créativité, et la volonté de changer les choses, nous pourrons trouver ensemble les outils qui s'imposent dans le sport également.

Nous applaudissons—et nous l'avons d'ailleurs soutenue sans réserve—l'initiative prise par Ken Dryden et d'autres de créer le symposium sur le hockey, à Toronto, qui réunit des joueurs et d'autres intervenants clés désireux d'examiner la situation du hockey et d'en favoriser le développement. Nous croyons que c'est le genre d'approche concertée, fondée sur la collaboration, que le gouvernement et l'industrie doivent encourager et à laquelle ils doivent participer si nous voulons revitaliser ce sport.

Chez Molson, nous sommes prêts à consacrer nos énergies à l'établissement d'un dialogue national plus vaste sur les problèmes du sport et sur les solutions possibles, mais nous savons que ces solutions ne seront applicables que si tous les principaux intéressés participent aux discussions. La prochaine étape de ce dialogue sur l'avenir du sport doit inclure tous les paliers de gouvernement, parce que les enjeux débordent les frontières municipales ou provinciales. Il faut trouver des solutions aux niveaux national, régional et communautaire.

Le gouvernement fédéral a l'occasion aujourd'hui de prendre la direction de ce processus et d'inviter les gouvernements provinciaux et les administrations municipales—comme d'ailleurs tous les Canadiens—à discuter de l'avenir du sport, et du hockey en particulier.

Le sport professionnel doit surmonter au Canada un certain nombre d'obstacles de nature économique.

Le premier obstacle, ce sont les impôts et les taxes que les joueurs et les équipes doivent verser aux niveaux fédéral, provincial et municipal. Comme d'autres vous l'ont déjà dit, la fiscalité est un des domaines dans lesquels les équipes canadiennes sont sérieusement désavantagées par rapport aux équipes américaines. À cause de ces impôts élevés, les équipes canadiennes ont plus de mal à recruter des joueurs de talent et elles doivent faire payer leurs billets plus cher à leurs partisans.

Pour les équipes, la discussion pourrait porter par exemple sur la possibilité de déductions ou de reports d'impôt sur leurs frais d'immobilisation, ou de dégrèvements fiscaux assortis d'échéances de remboursement plus longues en fonction des seuils de succès ou des degrés de réinvestissement. Pour les joueurs, des régimes de revenu différé, une augmentation des possibilités de déduction et diverses autres mesures aideraient à compenser les désavantages qu'il y a actuellement à jouer au Canada.

Comme nous l'avons déjà mentionné, le taux de change représente une question primordiale. À cause de la faiblesse de notre dollar, les coûts augmentent, les billets coûtent de plus en plus cher aux partisans, et les équipes canadiennes ont de plus en plus de mal à soutenir la concurrence. Par ailleurs, les restrictions relatives à la commandite de certains produits influent considérablement sur la capacité d'attirer au Canada des manifestations sportives de haut niveau.

Au sujet des droits de radiotélédiffusion, l'incidence des pratiques d'appels d'offres et des droits de diffusion sur l'accès aux manifestations sportives et sur la répartition des recettes aux équipes canadiennes sont de plus en plus inquiétants. Il est très difficile de soumissionner contre des sociétés d'État comme Radio-Canada.

Quant aux taxes sur les spectacles, qui sont perçues sur tous les billets vendus à chaque match, elles augmentent sensiblement le prix des billets pour la famille moyenne.

Chez Molson, nous estimons que le résultat ultime, ce devrait être que les sports populaires demeurent accessibles pour les partisans ordinaires, et pas nécessairement que les propriétaires de franchises ou les joueurs fassent plus d'argent. Nous croyons que tous ces problèmes économiques ont un effet négatif direct sur la possibilité, pour les partisans ordinaires, de profiter des sports professionnels. C'est pourquoi nous sommes loin de nous contenter de fabriquer et de vendre de la bière. Molson est une institution canadienne depuis 213 ans en raison de son rôle dans le tissu culturel de notre pays.

Nous applaudissons l'initiative qu'a prise votre comité. Elle a déjà donné lieu à des échanges d'information importants et à un dialogue utile, mais nous pensons qu'il reste encore des choses à faire.

Nous sommes convaincus que le sport, et le hockey en particulier, fait partie de notre paysage culturel. L'engagement futur du Canada à cet égard sera le reflet de valeurs et de considérations culturelles importantes, notamment l'édification de notre identité nationale, le développement communautaire, les habitudes de vie saines et la qualité de vie.

La menace qui pèse actuellement sur le sport au Canada vise également la culture canadienne. Il est donc essentiel que les grandes institutions et les grandes organisations canadiennes prennent des mesures pour améliorer les perspectives d'avenir dans ce domaine, depuis la base jusqu'au niveau professionnel.

Mais nous ne pourrons pas réussir sans collaboration. Les tribunes communes comme le symposium de Toronto sur le hockey sont des fondements essentiels du dialogue nécessaire pour régler certains des problèmes que vit le sport au Canada. Mais pour que cette initiative soit couronnée de succès, il faudra que les représentants de l'industrie, des organisations sans but lucratif et de tous les niveaux de gouvernement y participent, et y travaillent ensemble. Et nous croyons que le gouvernement fédéral est particulièrement bien placé pour y jouer un rôle de chef de file.

• 1555

Il faut tenir compte d'un certain nombre de questions économiques dans le débat sur l'avenir du sport. Les hausses de prix pour les consommateurs et l'augmentation des coûts pour les équipes sont des symptômes autant que des causes des problèmes dans ce domaine. Il faut donc élargir le débat à la fiscalité, à l'emploi, à la commandite, à la radiotélédiffusion et aux retombées économiques du sport si nous voulons trouver des solutions innovatrices et durables aux problèmes économiques que nous connaissons. À notre avis, le débat doit inclure tous les paliers de gouvernement, de même que les entreprises et les organisations touchées.

Les Brasseries Molson sont liées de près au sport au Canada, et nous sommes déterminés à en protéger la santé à long terme. Nous devons faire notre part pour nous assurer qu'il restera des équipes de hockey professionnel au Canada. Nous allons continuer de conclure des ententes de radiotélédiffusion et de commandite avec toutes les équipes canadiennes de la LNH. Nous sommes prêts également à assumer la responsabilité de la promotion du sport récréatif dans les communautés canadiennes. Cela fait partie de nos valeurs d'entreprise, et c'est pourquoi nous allons continuer à commanditer des centaines de ligues, d'équipes et de manifestations au niveau local. Nous allons aussi continuer à promouvoir le développement communautaire grâce à des programmes comme ÉquipAction.

Notre héritage nous impose la responsabilité d'encourager le dialogue sur l'avenir du sport au Canada. Les difficultés que traversent les équipes canadiennes de sport professionnel et amateur exigent une participation active du gouvernement fédéral. Le gouvernement peut faire figure de chef de file pour revitaliser le sport, et le hockey en particulier, pour travailler de concert avec les nombreuses organisations et institutions qui se sont déjà attelées à la tâche et pour inciter d'autres intervenants clé à participer aux discussions.

Nous vous souhaitons beaucoup de succès dans vos délibérations et nous espérons que notre présentation vous aura été utile. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.

Nous avons un court vidéo qui décrit notre engagement dans le sport.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Carefoote.

Combien de temps dure votre vidéo?

M. Jeff Carefoote: Une minute, je crois.

Le président: Ça va.

Ensuite, madame Tremblay, vous serez la première sur la ligne de départ.

[Note de la rédaction: Présentation vidéo]

Le président: Merci beaucoup.

Madame Tremblay.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Je vous remercie, monsieur Carefoote, de votre présentation. Est-ce que vous pourrez remettre au greffier du comité une copie de votre texte?

[Traduction]

M. Jeff Carefoote: Oui.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Honnêtement, je ne sais pas trop par quel bout entamer le dialogue avec vous. Vous avez parlé de dialogue et je pense que c'est important. Il faut dialoguer pour essayer de se comprendre et pour finalement trouver des solutions.

• 1600

Dans un premier temps, est-ce que vous pourriez me parler un peu du symposium que se propose de tenir M. Dryden à Toronto? Savez-vous si ce projet se concrétisera, est-ce que vous en connaissez les dates et savez-vous qui y sera invité?

[Traduction]

M. Jeff Carefoote: Le projet en est encore à l'étape de la planification, mais nous nous sommes engagés à travailler avec M. Dryden pour que le symposium ait lieu l'été prochain. Il portera sur tous les aspects du hockey: l'encadrement, les techniques d'entraînement, l'aspect médical, l'élaboration de la stratégie et le perfectionnement des joueurs.

Nous espérons que ce symposium deviendra le plus grand et le meilleur au monde, et que des gens du monde entier viendront à Toronto, au Canada, pour y participer et y apprendre des choses.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Ce symposium aura une portée internationale?

[Traduction]

M. Jeff Carefoote: Oui.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Nous attendrons donc à l'été prochain pour en savoir un peu plus long.

J'ai regardé un peu comment se déroulait le début de la saison et j'ai suivi d'un peu plus près le Canadien de Montréal.

Certains joueurs ont fait la grève et par la suite signé des contrats de millions de dollars. Lorsqu'il était assis dans le siège que vous occupez présentement, M. Bettman nous a dit que jamais des cas comme celui d'Alexandre Daigle ne se reproduiraient. Mais il y a un nouveau Alexandre Daigle cette fois-ci: il s'appelle Vincent Lecavalier et il a signé un contrat de 15 millions de dollars pour trois ans. On nous avait dit que cela ne se ferait plus.

[Traduction]

Le président: D'où vient-il?

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Il a pratiqué le hockey à Rimouski. Comme vous pouvez le constater, on a de très bonnes écoles.

Mais la valse des millions fait en sorte qu'on signe des contrats avec des grévistes, des noms inconnus et des joueurs bien moins talentueux que ceux qu'on avait auparavant. Quand il y avait moins d'équipes, on écrémait et c'étaient les meilleurs joueurs qui pratiquaient ce sport. Maintenant, on ne peut vraiment pas dire que tous les joueurs ont beaucoup de talent, bien qu'il y ait sans doute des formes variées de talent. Mais quand j'entends dire qu'on en a engagé un tel joueur parce qu'on avait besoin d'un bouncer, d'un homme pour faire la loi ou pour casser la gueule des autres, je me dis qu'on est loin du hockey qu'on veut faire admirer aux jeunes.

En boutade, je disais l'autre jour à quelqu'un qu'on serait bientôt obligé de demander au CRTC de reporter l'heure du hockey au lieu de le diffuser à 19 heures pour plaire aux Américains. Il y a tellement de violence qu'on ne veut pas diffuser les joutes de hockey avant 21 heures. Il faudra donc retarder les joutes de hockey plutôt que de les devancer.

Quand on voit tout cela et qu'on voit aussi que les estrades commencent à être un peu plus vides au Centre Molson, on ne peut que constater que le hockey a vraiment un problème. Mais le hockey a créé son propre problème et c'est lui qui devra trouver, à l'intérieur de sa propre organisation, les solutions au problème qu'il s'est lui-même créé avant de venir ici pour nous dire: «Il faut que le gouvernement nous aide. Nous avons des problèmes.»

L'été dernier, je regardais chuter le dollar et je me disais que les équipes canadiennes perdraient sûrement de l'argent. Vous dites que la faiblesse du dollar se traduit par une augmentation du prix des billets. Que le dollar soit à 70 ¢, 89 ¢, 65 ¢ ou qu'on en arrive à la piastre à Chrétien à 50 ¢, le billet de 100 $ nous coûtera toujours 100 $ canadiens. La chute du dollar n'a pas d'impact sur nous, les spectateurs canadiens.

Je ne sais pas du tout où le hockey s'en va, mais il me semble qu'il a de moins en moins la sympathie des gens. Je doute fort que de nos jours, 90 p. 100 des hommes regardent le hockey. Pourriez-vous essayer de me rassurer un peu?

• 1605

[Traduction]

Le président: Avons-nous assez de temps pour une réponse courte?

Des voix: Oh, oh!

M. Jeff Carefoote: M. Bettman et les propriétaires d'équipes qui ont comparu devant vous ont sûrement abordé certaines questions selon leur propre perspective. Ce qui inquiète notre compagnie, en tant que commanditaire qui investit dans ces équipes depuis longtemps, c'est qu'elles peuvent très bien s'en aller.

Au Canada, vous savez, il y a beaucoup d'intérêt pour le sport, et un énorme taux de participation. Les journaux y consacrent de pleines pages chaque jour. Alors, quand je pense que certaines équipes sont incapables de réussir, de survivre au Canada—pas seulement de réussir, mais de survivre; il n'y a qu'à penser aux Jets de Winnipeg et aux Nordiques de Québec—je me dis qu'il y a vraiment quelque chose qui ne va pas. Le fait qu'une ville comme Nashville, où les gens ne savent même pas la différence entre un bâton de hockey et une baguette de tambour, peut facilement nous prendre nos joueurs, nous prendre notre sport... C'est inquiétant, parce que le Canada est tellement identifié au hockey...

Je suis d'accord avec vous sur bien des points, à savoir que les sommes versées à des joueurs qui ne sont peut-être pas toujours des plus talentueux dépassent tout ce que nous avons déjà vu jusqu'ici, du moins au Canada, et que ce n'est pas normal. Je suppose qu'avec le temps, la qualité des joueurs finira par s'améliorer et que la ligue fera ce qu'elle a à faire. Mais ce qui serait une honte, à mon avis, ce serait que d'autres équipes canadiennes quittent le pays d'ici à ce que les choses se tassent. C'est un aspect tellement important de notre identité, de notre culture nationale, que ce serait déplorable. Nous sommes prêts à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour empêcher ça.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: On dirait que ça ne fait plus partie de notre héritage culturel parce que c'est devenu un business. On parle juste d'argent; il y a juste l'argent qui compte. On oublie la qualité ou la dynamique du spectacle. Ils sont incapables de changer les règlements: ils avaient parlé de mettre deux arbitres, mais ils changent d'idée; ils avaient parlé d'enlever les lignes bleues, mais on ne le fait pas; ils avaient parlé d'enlever la ligne rouge, et ils ne le font pas non plus. Au hockey, ils sont assis sur ce qu'ils ont.

Ce n'est que lorsque les équipes canadiennes seront parties qu'ils vont se réveiller, mais il sera trop tard. C'est ça, le problème. Qu'est-ce qu'on peut faire? Il sera à mon avis trop tard pour tenir un symposium l'été prochain. Il est indéniable que la présente année est un moment clé pour plusieurs équipes. Ce n'est pas juste une question d'argent. Même si on mettait de l'argent, ça ne résoudrait pas tous les problèmes. Quand c'est une question de culture et que c'est accessible, les gens se déplacent. Regardez combien de gens sont allés voir Rodin à Québec. De nos jours, les jeunes ne peuvent même plus jouer au hockey parce que ça coûte trop cher. C'est ça, qui est le problème: c'est juste l'argent.

[Traduction]

M. Jeff Carefoote: C'est une entreprise commerciale.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Voilà.

[Traduction]

Le président: Merci, madame Tremblay. Nous vous reviendrons.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Oui.

[Traduction]

Le président: Monsieur Bonwick.

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Merci, monsieur le président.

Le président: Nous allons essayer de garder les questions aussi concises et aussi précises que possible pour laisser au plus de députés possible le temps d'interroger le témoin. J'ai une longue liste de noms.

M. Paul Bonwick: D'accord.

Un petit commentaire, pour commencer: j'ai l'impression que mes fils ne partagent pas l'analyse de Mme Tremblay au sujet du sport.

Le président: Excusez-moi une seconde, monsieur Bonwick.

J'aimerais bien savoir quelle serait la réponse de M. Lecavalier si Mme Tremblay allait le voir—puisqu'il vient de sa circonscription—pour lui demander de se contenter d'un demi-million, plutôt que de 17 millions, et de venir jouer à Montréal.

M. Paul Bonwick: Contrairement à ma collègue, je crois plutôt qu'il faut féliciter la ligue et ses dirigeants pour l'évolution de ce sport. J'ai grandi en regardant le hockey et je pense que le jeu a vraiment mûri. La ligue a toujours recherché un haut niveau de professionnalisme, tant sur la glace qu'en dehors de la patinoire. C'est un sport en constante évolution, mais la ligue a certainement fait un travail très respectable à cet égard.

Dennis, merci de m'avoir permis d'être ici. Vous méritez certainement des félicitations pour avoir pris l'initiative de mettre en lumière l'importance du sport pour la société et la culture canadiennes.

Plus précisément, vous avez évoqué le problème de notre taille, par rapport aux États-Unis, ce qui semble être le principal obstacle qui nous empêche d'assurer pleinement le développement de notre industrie du sport au Canada. Le dollar a toujours connu des fluctuations, mais nous devons constamment composer avec le fait que le marché américain est au moins dix fois plus grand que le nôtre, et même bien davantage dans l'économie actuelle. Mais c'est la même chose pour presque toutes les industries du Canada, et c'est pourquoi la situation est difficile, même si nous reconnaissons l'importance sociale du sport dans notre pays.

• 1610

Ce que j'aimerais savoir, c'est si vous avez des suggestions précises à nous faire sur le genre d'allégements fiscaux que nous devrions prévoir, ou si vous entrevoyez des mesures de financement qui pourraient avoir des retombées intéressantes pour le Canadien moyen, pas seulement des retombées sociales, mais aussi des retombées tangibles sur le plan économique.

M. Jeff Carefoote: Pour répondre à votre commentaire au sujet du fait que beaucoup d'autres industries sont dans la même situation, je suis d'accord avec vous; et il y a beaucoup d'industries qui ne sont pas présentes au Canada justement pour cette raison-là. Surtout d'après notre propre expérience, je vous dirais que certaines des entreprises dans lesquelles nous nous sommes lancés... Si la situation ne change pas substantiellement d'une façon ou d'une autre—soit que le dollar prendra de la vigueur, soit que les commanditaires trouveront un moyen de participer autrement qu'ils le font maintenant, soit qu'il se passera autre chose... Certaines choses vont disparaître parce qu'elles ne sont tout simplement pas viables financièrement.

Par exemple, nos deux courses Indy sont parmi les plus populaires du circuit, et pourtant, il est très difficile d'en assurer la viabilité financière.

M. Paul Bonwick: Je comprends, mais encore une fois, c'est la même chose à peu près partout. Ce que je me demande, c'est si vous pourriez nous faire des recommandations précises sur les mesures de financement que nous devrions adopter ou sur les allégements fiscaux que nous devrions accorder, et à qui. Quelles recommandations devrions-nous faire, comment devrions-nous mettre tout cela sur papier et présenter des recommandations à notre groupe parlementaire, et ensuite au Cabinet?

J'ai aussi une petite question supplémentaire: avez-vous fait aussi des présentations de ce genre à des conseils municipaux? J'ai remarqué que vous parliez de plusieurs niveaux de gouvernement, quand vous comparez le coût de location des installations aux États-Unis et ici, que ce soit à Toronto, à Edmonton ou ailleurs. Est-ce que vous dites la même chose aux conseils municipaux de ces villes-là? Je suis d'accord avec vous et je comprends votre point de vue, mais nous ne pouvons pas forcer la Ville de Toronto à baisser ses prix pour que vous puissiez tenir votre course Indy.

M. Jeff Carefoote: À Toronto, il y a en réalité deux paliers de gouvernement en cause; il y a d'abord la Ville de Toronto, à qui appartient le terrain, et ensuite le gouvernement de l'Ontario, pour ce qui concerne les droits d'utilisation de la Place Ontario. Comme je l'ai dit, ces sommes sont assez élevées comparativement à ce que d'autres doivent payer dans d'autres villes.

Donc, on dirait bien que la plupart des grandes manifestations auxquelles nous sommes associés nous obligent à traiter avec un gouvernement ou un autre.

Pour ce qui est de recommandations spécifiques, j'en ai mentionné quelques-unes dans ma présentation au sujet des joueurs, par exemple; j'ai parlé notamment de revenu différé, et aussi, en ce qui a trait aux commanditaires ou au soutien populaire...

Le président: Excusez-moi, monsieur Carefoote.

Monsieur Bonwick, je ne sais pas si vous avez écouté toute la présentation de M. Carefoote, mais il nous a déjà fait huit ou neuf recommandations très précises. Donc, en toute justice pour lui et pour les autres députés qui veulent lui poser des questions, nous devrions peut-être demander au témoin de nous laisser un exemplaire de sa présentation et nous y reporter plus tard.

M. Paul Bonwick: Merci.

Le président: Monsieur Comuzzi.

M. Joe Comuzzi (Thunder Bay—Nipigon, Lib.): Merci, monsieur le président. Permettez-moi d'abord de vous féliciter.

Dennis, vous avez travaillé très fort pour notre comité et c'est grâce à vous que nous sommes ici. C'est grâce à vous que nous avons abordé une question très importante pour les jeunes du Canada, et aussi pour certains moins jeunes comme moi.

Je répète qu'il n'y a aujourd'hui rien de pire dans notre économie, comme je vous l'ai déjà mentionné et comme je l'ai dit devant le comité; nous devons faire tout notre possible pour faire en sorte que la valeur du dollar canadien augmente, de manière à ce que les équipes sportives du Canada aient au moins la possibilité de soutenir la concurrence des autres.

Je souhaite la bienvenue à M. Carefoote et à ses collègues. J'ai trouvé votre présentation fort intéressante.

Vous avez dit dès le début, monsieur Carefoote, que le gouvernement devrait offrir une aide à court terme. Pourriez-vous nous en dire plus long là-dessus et nous préciser à quoi vous songez exactement?

• 1615

M. Jeff Carefoote: Ce que je pense, c'est que si nous passons à travers la crise du dollar, qui est probablement le principal problème pour toutes les ligues professionnelles, et si nous partons du principe qu'il s'agit d'une aberration temporaire, il serait vraiment désolant que certaines équipes prennent des mesures à court terme si le problème doit se corriger plus tard. Si nous avons effectivement un problème à cause de la valeur de notre dollar par rapport à celle du dollar américain, je dirais que nous avons des problèmes structurels, peut-être très sérieux, dans notre industrie du sport. Presque tout se fait en dollars américains. Quand toutes les dépenses sont payées en dollars américains et que les recettes sont en majeure partie en dollars canadiens, c'est très difficile.

Ce que je veux dire, c'est que si nous croyons que le dollar se rétablira à long terme à ses niveaux antérieurs, il serait vraiment dommage que nous perdions une équipe ou que nous perdions des rencontres sportives au cours des deux ou trois prochaines années, parce qu'elles ne reviendront pas. Je suis à peu près convaincu qu'il y a tellement de concurrence pour les avoir qu'il serait très difficile de les récupérer—peut-être pas impossible, mais difficile.

Personnellement—et je parle aussi au nom de la compagnie—c'est une éventualité qui m'inquiète à cause de ce que cela représente. D'un point de vue d'affaires, nous concluons des ententes de marketing avec les organisations. Nous recherchons un investissement à long terme. Il est très difficile de savoir, sur une base annuelle, combien nous avons dépensé et combien nous avons obtenu en retour. Très difficile.

C'est comme sur le marché boursier; sur une certaine période, on pense avoir fait les bons choix, les bons investissements. Et c'est ainsi que nous voyons notre participation au sport. Si vous pensiez ne serait-ce qu'un instant que le marché va continuer à baisser indéfiniment, vous retireriez probablement tout l'argent que vous avez investi à la bourse.

Nous ne pensons pas que ce soit le cas; du moins, c'est ce que nous espérons. Mais les équipes connaissent effectivement des problèmes sérieux. Nous l'avons vu l'an dernier dans le cas d'Edmonton; nous nous sommes occupés très activement à ce moment-là d'essayer d'amasser des fonds pour garder l'équipe à Edmonton. Mais ce genre de chose va devenir de plus en plus difficile.

M. Joe Comuzzi: Merci de votre réponse.

Une autre question, monsieur le président.

Dans votre présentation, vous avez parlé de l'édification de notre identité et de notre unité nationales, ce qui est très important à mes yeux. L'intérêt que tous les Canadiens portent au sport est un moyen d'y arriver.

Si vous me permettez de faire une analogie—et je vous demande de faire la comparaison vous aussi—les brasseries Molson, et la Compagnie pétrolière impériale avant elles, sont synonymes de sport au Canada. Nous venons d'avoir les séries mondiales; pour le premier match, Tony Bennett avait été invité à chanter America the Beautiful. C'était magnifique. Puis, M. Sosa, un héros national, a lancé la première balle. Ce n'était pas organisé par les Yankees, ni par les Padres; c'était organisé par la National Baseball League. C'était stimulant pour le peuple américain parce que, quand on a joué l'hymne national, c'était à la télévision.

Lors du match suivant, c'est le chanteur d'opéra Robert Merrill qui était invité, et c'est la famille Maris qui a lancé la première balle. Robert Merrill a chanté l'hymne national.

Au Canada, nous semblons avoir perdu cette habitude. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Quand il y a des spectacles sportifs d'envergure nationale, que ce soient les séries mondiales, les matches de la Ligue nationale de hockey ou autre chose, les commanditaires semblent penser que c'est du gaspillage de présenter l'hymne national, que c'est un symbole inutile. La diffusion commence après la présentation des joueurs et l'hymne national. Ce n'est pas ainsi qu'on bâtit une nation, ou qu'on contribue à l'unité du pays.

Quand ce monsieur chantait l'hymne national au Forum de Montréal avant les matches des Canadiens de Montréal, c'était absolument magnifique. Mais nous ne le faisons plus. Pourquoi?

M. Jeff Carefoote: Eh bien, nous faisons jouer l'hymne national et nous le faisons chanter, mais...

M. Joe Comuzzi: Je sais que vous le faites jouer, mais nous faisons la même chose dans les petites ligues.

M. Jeff Carefoote: Je sais qu'il est joué à chaque match. Il est chanté dans les grandes occasions, mais je ne sais pas si c'est partout et à chaque match.

• 1620

Comme vous le dites, cela se faisait à Montréal, et c'est vraiment une décision...

Mme Suzanne Tremblay: A Rimouski, oui.

M. Jeff Carefoote: En effet.

C'est important, je vous l'accorde. Je suppose que c'est aux équipes de décider. En tout cas, nous faisons jouer l'hymne national lors des courses que nous commanditons, et nous invitons généralement quelqu'un de célèbre pour le chanter.

Donc, je suis d'accord avec vous.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Nous oublions les mots parfois.

M. Jeff Carefoote: Il y a un certain temps, je suis revenu au Canada après avoir passé quelques années aux États-Unis, et c'est quelque chose qui m'a vraiment frappé. C'est une importante différence culturelle, et c'est bien dommage. Vous avez raison; c'est très émotif.

Le président: Excusez-moi 30 secondes, mais j'aimerais ajouter quelque chose à ce qu'a dit M. Comuzzi. Monsieur Carefoote, votre compagnie est un des commanditaires les plus influents au Canada. Quand vous appuyez des manifestations de ce genre, qu'il s'agisse de sport amateur ou professionnel, est-ce que vous ne pourriez pas faire valoir votre expérience et soumettre par exemple une liste de choses à inclure dans ce que vous commanditez, des choses qui favorisent l'unité nationale et célèbrent le patrimoine de notre pays? Est-ce que ce serait une trop grande ingérence de votre part, en tant que commanditaire, ou si c'est une possibilité que vous pourriez envisager?

M. Jeff Carefoote: Je pense que nous pourrions certainement poser ce genre de questions. Mais je dirais que la LNH—quoique je n'en sois pas absolument certain—décide de ce qui passe à la télévision, de ce qui va être diffusé et quand, et pendant combien de temps.

Le président: D'accord.

M. Joe Comuzzi: Je ne m'attarderai pas sur la question, mais il me semble que c'est un élément que nous avons perdu de vue; nous devrions recommencer à y accorder de l'importance dans nos rencontres sportives de niveau national. Cela ne peut venir que des commanditaires, parce que les organisateurs les écoutent.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Comuzzi. Monsieur Mark.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Merci, monsieur le président.

Permettez-moi tout d'abord de vous remercier, vous et les membres de votre délégation, d'être venus. Permettez-moi aussi de féliciter la compagnie Molson pour tout le travail qu'elle a accompli afin de soutenir le sport amateur autant que professionnel.

Il ne fait aucun doute que pour nous, les Canadiens, le hockey est une activité culturelle. Mais ce dont je ne suis pas tout à fait sûr, maintenant que le hockey est devenu une grosse entreprise, c'est s'il ne s'agit plus en réalité que d'une activité commerciale ou si c'est encore une activité culturelle. J'ai du mal à définir ce qu'est devenu exactement le hockey, au milieu de tous ces impératifs commerciaux.

M. Jeff Carefoote: Je suis d'avis qu'il s'agit encore d'une activité culturelle, mais elle ne survivra pas si nous n'avons pas la base commerciale nécessaire pour la soutenir. Autrement dit, la LNH n'existerait pas, et le hockey professionnel non plus, s'ils ne répondaient pas à certaines exigences de nature commerciale.

Comme je l'ai déjà dit, je pense que les Canadiens n'ont jamais consacré autant d'argent au hockey, que ce soit à cause du prix des billets, du nombre de matches, de la publicité ou d'autre chose. Je suis sûr que les arénas n'ont jamais fait autant d'argent.

Donc, il se fait déjà beaucoup de bonnes choses, mais on a quand même l'impression que les équipes de hockey professionnel ont bien du mal à survivre.

M. Inky Mark: Je me souviens du moment où les Jets de Winnipeg ont quitté le Manitoba. Personne n'a oublié la disparition des Jets parce que c'était une attraction non seulement pour les gens de Winnipeg, mais aussi pour toute la province; tout le monde au Manitoba en était très fier.

Puisque je viens d'une administration municipale, je sais qu'il y a encore des pressions sur les municipalités pour qu'elles construisent des patinoires, parce qu'il y a encore beaucoup de gens qui s'intéressent au hockey. Mes deux fils, par exemple, pratiquent ce sport.

En même temps, quand je regarde l'évolution du nombre de Canadiens qui font partie des équipes professionnelles, et quand je pense à notre propre système d'apprentissage et à la situation mondiale, je me dis que nous allons avoir très bientôt des équipes en Europe et dans d'autres régions du monde.

C'est pourquoi je voudrais vous demander si, au niveau professionnel, le hockey est devenu inabordable pour notre pays?

M. Jeff Carefoote: Si vous voulez parler du prix des billets, il est certain qu'il a augmenté.

• 1625

En tant que commanditaire, quand nous envisageons de soutenir des activités comme les matches de hockey et les grandes rencontres sportives, nous ne nous attendons pas au même rendement sur notre investissement que pour les autres éléments de notre logistique commerciale. Nous le faisons à cause de notre culture d'entreprise et de nos convictions, et je dirais que nous n'y regardons pas d'aussi près que pour d'autres types d'activités, promotionnelles ou autres.

Mais c'est comme partout: il y a une limite à toute chose. D'après ce que je constate, et d'après ce que disent mes collègues dans d'autres secteurs, nous approchons du point de saturation, en tout cas en ce qui concerne le prix que les consommateurs sont prêts à payer pour leurs billets. Quand il faudra débourser de 400 $ à 500 $, taxes comprises, pour amener deux enfants voir un match de hockey, je ne sais pas comment les gens vont s'y prendre.

D'un point de vue égoïste, cela crée une occasion de boire de la bière, parce que nous pouvons laisser les gens aller voir un match, mais c'est difficilement... Donc, c'est important pour les consommateurs, de nos jours, et c'est tout simplement difficile à accepter. Je ne sais pas si nous en arriverons là un jour, mais j'espère en tout cas que le Canadien moyen pourra continuer à se payer un match de hockey de temps en temps.

M. Inky Mark: Si vous me le permettez, monsieur le président, je voudrais poser une toute petite question.

Le président: Une question très courte, monsieur Mark, après quoi nous allons devoir laisser la parole à M. Proctor parce que nous avons encore deux groupes de témoins à entendre aujourd'hui.

M. Inky Mark: Savez-vous s'il y a déjà eu une étude complète et approfondie sur la viabilité du hockey au Canada, par exemple pour le prochain millénaire?

M. Jeff Carefoote: Je ne sais pas.

M. Inky Mark: Pensez-vous qu'il en faudrait une? Il me semble que nous avançons à l'aveuglette ici, en cherchant seulement des solutions à court terme; nous devrions peut-être examiner aussi la solution à long terme.

M. Jeff Carefoote: En effet.

M. Inky Mark: Merci.

Le président: Merci, monsieur Mark.

Monsieur Proctor.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je voudrais vous poser en rafale quelques-unes des questions qui me viennent à l'esprit. Merci de votre présentation.

Pour en revenir à la première question de M. Comuzzi, pourriez-vous dire au comité quelles sont d'après vous les équipes professionnelles les plus menacées actuellement au Canada?

M. Jeff Carefoote: Non, je n'en sais rien. Je pense qu'à l'heure actuelle, toutes les équipes de la LNH appartiennent à des groupes relativement solides, qui ont la situation bien en main. Donc, j'espère que...

En fait, de notre point de vue, je pense qu'il ne pourrait rien arriver de pire que le départ d'une autre équipe canadienne.

M. Dick Proctor: En effet.

Il m'a semblé détecter une légère dichotomie dans certains de vos propos. Vous avez évoqué la nécessité d'un financement public accru pour le sport, mais d'un autre côté, vous avez dit que Radio-Canada semblait avoir le portefeuille mieux garni que d'autres et que cela posait un problème.

Pourriez-vous nous expliquer exactement où vous vous situez sur ce point-là?

M. Jeff Carefoote: Tout ce que je dirai au sujet de Radio-Canada, c'est que son argent profite aux 28 équipes de la LNH, et pas seulement aux six équipes canadiennes.

M. Dick Proctor: Et vous dites que ces équipes devraient en recevoir plus, ou qu'elle devraient tout recevoir?

M. Jeff Carefoote: Non, pas vraiment, mais cela renvoie à l'idée que les Canadiens dépensent des sommes substantielles pour soutenir le hockey dans notre pays. Ce serait une honte si nous n'avions plus d'équipes que nous pourrions aller voir et encourager.

M. Dick Proctor: D'accord.

Nous savons tous, comme l'a dit notre ministre des Finances, que nos fonds ne sont pas illimités. On nous le rappelle régulièrement. Si nous avons par exemple le choix de financer la ligue de hockey extérieur de Regina, Saskatchewan, ou de verser plus d'argent pour assurer la survie des Oilers d'Edmonton, je présume d'après votre présentation que vous pencheriez plutôt pour la deuxième option. Je me demande comment vous vous y prendriez pour résoudre la quadrature du cercle.

M. Jeff Carefoote: Ce n'est pas nécessairement ce que j'ai dit. Je n'essaie pas de faire passer le hockey en priorité. Je dis seulement que le hockey est à mon avis absolument crucial pour le Canada et pour les Canadiens, à tous les niveaux, et qu'il a probablement encore plus de valeur si les gens peuvent y participer et si ça fait partie de leur communauté.

M. Dick Proctor: Encore une question, monsieur le président.

Il me semble vous avoir entendu dire—ou du moins laisser entendre—qu'il y avait plus de fonds publics pour financer les arts au Canada que pour soutenir le sport. Est-ce que j'ai bien entendu? Si oui, pouvez-nous fournir des chiffres à ce sujet-là?

M. Jeff Carefoote: De notre point de vue, et en ce qui concerne plus particulièrement la radiotélédiffusion et la production d'oeuvres destinées à être diffusées, il y a d'importantes subventions versées pour la production de pièces de théâtre canadiennes et d'autres émissions que j'appellerais non sportives... Nous nous occupons de la production d'émissions sportives. Nous allons en produire près de 800 heures cette année. Mais si nous voulions en faire plus, nous devrions nous débrouiller tout seuls. En tout cas, je ne suis pas au courant de quoi que ce soit dans ce domaine.

• 1630

M. Dick Proctor: Donc, vous n'avez pas de chiffres précis, mais vous croyez qu'il y a beaucoup plus d'argent qui va aux arts qu'aux sports.

M. Jeff Carefoote: Nous pourrions certainement vous trouver ces chiffres.

M. Dick Proctor: D'accord.

Merci.

Le président: Monsieur Proctor, pour votre gouverne, nos attachés de recherche peuvent examiner les prévisions budgétaires pour savoir exactement quelles sont les sommes consacrées aux différents domaines culturels.

Monsieur Carefoote, merci beaucoup à vous et à vos collègues. L'information précieuse que vous nous avez fournie nous aidera énormément dans nos délibérations.

M. Jeff Carefoote: Merci beaucoup de votre invitation.

Le président: Aujourd'hui, notre emploi du temps est serré. Aussi, nous allons entendre immédiatement l'Association canadienne des entraîneurs.

Bienvenue, monsieur Bales. Vous pouvez peut-être commencer par présenter vos collègues. Je vous remercie d'être venus. la parole est à vous immédiatement.

M. John Bales (président, Association canadienne des entraîneurs): Merci beaucoup de me donner l'occasion de témoigner aujourd'hui.

[Français]

Nous sommes heureux de vous rencontrer cet après-midi. Je voudrais vous présenter les membres de notre équipe: Eric King, vice-président, opérations et marketing; Carolyne Hudson, coordinatrice des promotions et des communications; et Tom Kinsman, directeur administratif de l'Association canadienne des entraîneurs professionnels. Je m'appelle John Bales et je suis le président de cette association.

La mission de l'Association canadienne des entraîneurs est d'améliorer, par la qualité de l'entraînement, l'expérience de tous les athlètes canadiens.

[Traduction]

Nous collaborons avec plus de 60 organisations sportives pour la formation d'entraîneurs aussi bien au niveau communautaire qu'au niveau compétitif. Chaque année, plus de 80 000 entraîneurs bénévoles de la collectivité suivent les cours du programme national de certification des entraîneurs. Depuis le début, le programme a formé plus de 650 000 bénévoles.

Un document intitulé «La contribution de l'encadrement sportif au Canada» contient des recherches sur les avantages que présente un système sportif et d'encadrement fort.

[Français]

«La contribution de l'encadrement sportif au Canada».

[Traduction]

Ce document fait état de plus de 140 recherches dans des domaines tels que la santé, la santé mentale, l'apprentissage, etc.

En plus d'assurer la formation des entraîneurs dans le cadre du programme national de certification, notre filiale, l'Association canadienne des entraîneurs professionnels se donne trois buts principaux: améliorer le statut de la profession d'entraîneur et le caractère professionnel de ses membres; renforcer la voix des entraîneurs dans le système sportif et proposer une autoréglementation consciencieuse du milieu, tout en offrant des services et de l'aide aux entraîneurs dans divers domaines signalés par nos membres.

Après ce petit tour d'horizon, j'aimerais me tourner vers le document intitulé «Pour un système sportif canadien plus fort».

[Français]

«Pour un système sportif canadien plus fort».

[Traduction]

Permettez-moi d'en souligner brièvement les aspects les plus importants.

La principale préoccupation du milieu sportif canadien concerne le développement des installations. Chez les jeunes, le temps d'entraînement est insuffisant et on réclame plus d'installations de sport pour eux.

La plupart des installations universitaires sont utilisées à pleine capacité. Dans le cas des athlètes de haute performance, les installations figurent au premier rang des besoins. On peut citer le cas de médaillés olympiques qui doivent partager la piste avec des simples coureurs à pied, en raison des conflits d'horaires. Trop souvent, il est impossible de donner aux athlètes d'élite suffisamment de temps pour s'entraîner.

• 1635

Dans d'autres cas, on ne dispose tout simplement pas des installations nécessaires pour permettre aux athlètes de s'entraîner pour atteindre un niveau international.

Pour cette raison, nous recommandons que le gouvernement fédéral consacre 50 millions de dollars par année pendant cinq ans à un programme d'infrastructures sportives pour la construction et la rénovation d'installations sportives. Tant que nous n'aurons pas amélioré notre réseau d'installations sportives, nous ne pourrons pas recueillir les avantages que confère la participation sportive ni former des athlètes canadiens susceptibles de prendre part à des compétitions internationales.

Le deuxième aspect qu'aborde le document concerne le financement du système sportif national. Parmi les pays développés, le Canada est celui qui consacre le financement le plus faible au sport. En tout cas, je n'ai pour le moment trouvé aucun pays développé dont la comparaison avec le Canada ne nous soit pas défavorable.

L'Australie, avec une population de 17,5 millions d'habitants consacre chaque année au sport un budget de 155 millions de dollars, par rapport au budget canadien d'environ 60 millions de dollars. La Finlande qui compte 5 millions d'habitants consacre 105 millions de dollars au sport. Quant à l'Allemagne—au sujet de laquelle vous trouverez des détails dans le document, avec une population de 80 millions d'habitants, elle consacre 322 millions de dollars au sport.

Par conséquent, les exemples ne manquent pas et il est clair, lorsqu'on compare les dépenses consacrées par différents pays au développement sportif, que le Canada est carrément hors-jeu. Notre pays n'offre tout simplement pas le soutien nécessaire pour permettre aux athlètes canadiens de participer aux activités sportives et d'atteindre un niveau d'excellence internationale.

À titre d'illustration, vous pouvez voir sur le transparent le nombre de postes d'entraîneurs subventionnés par le gouvernement fédéral en Allemagne et au Canada. Il s'agit du nombre d'entraîneurs recevant des subventions du gouvernement fédéral dans les deux pays. L'Allemagne subventionne 789 entraîneurs nationaux alors que le Canada n'en a que 99. La différence est absolument énorme.

Un des secteurs du sport canadien dont nous pouvons je crois être très fiers est celui du tout nouveau réseau de centres sportifs nationaux qui est destiné à soutenir nos athlètes d'élite nationaux. Le transparent vous présente une carte indiquant la répartition de ces centres desservant toutes les régions du pays, d'un océan à l'autre.

Cela représente certainement un progrès très important, mais ces centres manquent encore beaucoup de ressources pour pouvoir être compétitifs. Là encore, si l'on compare avec d'autres pays, dans ce cas l'Allemagne dont nous nous sommes inspirés pour la création de ce programme—nous avons étudié la façon dont différents pays s'y étaient pris pour développer cet aspect du sport de haute performance—l'Allemagne consacre à ce secteur du programme un budget dix fois plus élevé, et dix fois plus de ressources. Il est extrêmement difficile d'affronter la concurrence internationale et vous savez que dans le domaine du sport, c'est la compétition internationale qui compte.

Dans ce domaine, étant donné que le financement actuel n'est ni suffisant, ni à la hauteur de celui de pays comparables, nous recommandons que le budget de Sport Canada soit augmenté de 60 millions à 100 millions de dollars par année. Ce type d'investissement nous mettrait à tout le moins au niveau des autres pays du monde.

Le troisième domaine porte sur la création d'une structure sportive nationale efficace. Nous proposons la création d'une confédération canadienne du sport qui pourrait offrir une structure plus efficace et plus efficiente et une direction plus précise dans le sport canadien; nous proposons que les frais d'adhésion à des clubs sportifs soient déductibles d'impôt, afin d'encourager tous les Canadiens à faire du sport; et de clarifier les rôles et responsabilités des divers gouvernements ainsi que la politique officielle et la responsabilité financière du milieu sportif dans la prestation des programmes.

• 1640

C'était là les points principaux du document. Avant de passer aux questions, j'aimerais présenter quelques commentaires sur une des questions principales sur lesquelles vous vous penchez, à savoir l'appui aux licences de sport professionnel.

Le premier point, c'est que les licences de sport professionnel ne contribuent pas à développer le système sportif. En fait, elles ont besoin du système pour les fournir en joueurs, mais elles ne développent pas le système lui-même.

Deuxièmement, il faut trouver une solution à long terme au problème des licences de sport professionnel.

Le troisième point concerne le financement par la loterie comme solution au problème des licences de sport professionnel, mais également au financement général du sport au Canada.

Nous proposons de réexaminer la question du financement par les loteries provinciales. Cette question concerne à la fois le fédéral et les provinces. Les loteries relèvent du ressort provincial depuis 1979. À l'origine, les provinces s'étaient engagées à verser 3 p. 100 des fonds au gouvernement fédéral. Cet argent devait être destiné au sport, mais cela ne s'est pas concrétisé. Par conséquent, on peut sans aucun doute revenir sur ce sujet.

Par ailleurs, j'aimerais souligner que beaucoup de pays financent les sports à partir de leur loterie nationale. Dans le document que je vous ai soumis, nous faisons allusion au stade de Wembley à Londres qui est la principale installation sportive d'Angleterre. Ce stade a obtenu 300 millions de dollars provenant des fonds de loterie. Les fonds provenant des loteries servent à financer le sport en Italie—où la plupart des ligues sportives professionnelles en bénéficient—en Israël et dans d'autres pays, en plus de multiplier les possibilités pour le développement du sport amateur.

Je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de témoigner et je suis prêt à répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Bales.

Nous allons commencer par Mme Tremblay.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Je cède la parole à monsieur.

[Traduction]

Le président: Allez-y, monsieur Mark, puisque Mme Tremblay vous cède son tour.

M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

Monsieur Bales, je vous remercie d'être venu témoigner devant le comité.

Je vais commencer par revenir au sujet précédent, puisque le hockey représente une facette si importante de notre culture. J'aimerais vous demander si dans le perspective de l'encadrement sportif, nous prenons les bonnes mesures en appliquant le système du hockey junior pour l'entraînement des niveaux amateur et professionnel. Ne devrions-nous pas plutôt adopter comme aux États-Unis l'approche scolaire-collégiale?

M. John Bales: L'idéal se situe probablement entre les deux formules, mais je pense que le modèle éducatif peut offrir beaucoup d'améliorations et beaucoup d'avantages.

De manière générale, les programmes offerts dans les écoles secondaires et les universités sont sous-développés. Nos programmes universitaires sont malmenés. En fait, un nombre important de postes d'entraîneurs des universités canadiennes ont été supprimés ou réduits de temps plein à temps partiel. Il est indispensable de renforcer cet élément du système, car le sport joue un rôle extrêmement important au moment de la croissance des enfants. C'est une partie très importante du système.

M. Inky Mark: D'après votre rapport, la perception que vous avez de Sport Canada n'est pas entièrement positive. Pouvez-vous nous dire brièvement ce qui ne va pas?

Par ailleurs, vous recommandez la création d'une fédération canadienne du sport. Pouvez-vous nous expliquer comment fonctionnerait cette organisation par rapport à la structure qui existe actuellement?

M. John Bales: Le sport au Canada ne serait pas ce qu'il est s'il n'avait pu bénéficier de l'appui de Sport Canada. Cet organisme a contribué énormément au développement du système sportif depuis 25 ans.

• 1645

Ce que nous disons dans notre document, c'est qu'il est temps de nous intéresser à la structure afin de voir de quelle manière nous pouvons devenir plus efficients et plus efficaces. Il est temps de nous demander quels sont les champs d'action et les responsabilités qu'il faudrait conserver au sein du gouvernement et quels sont les secteurs de programme qu'il serait préférable de poursuivre à l'extérieur du gouvernement. À mon avis, une meilleure répartition de ces responsabilités se traduirait par d'importantes améliorations en matière de coordination et d'efficience, mais je n'ai pas l'intention de minimiser le travail extraordinaire qu'a fait Sport Canada en faveur du sport canadien depuis 25 ans. Je pense que nous devons désormais chercher à améliorer le système dans l'avenir.

Là encore, si nous comparons avec d'autres pays, nous nous apercevons que la plupart d'entre eux ont créé une structure indépendante du gouvernement pour administrer le programme sportif et qu'ils laissent au gouvernement le soin d'établir les directives, de donner les orientations, de financer et d'assumer la responsabilité financière.

M. Inky Mark: Est-ce que je peux poser une question supplémentaire?

Le président: À condition qu'elle soit brève, monsieur Mark, puisque nous devons donner bientôt la parole à notre prochain témoin. Notre horaire d'aujourd'hui est très chargé.

M. Inky Mark: Ne vous en faites pas, c'est une question brève.

Votre recommandation réclamant un meilleur soutien financier des infrastructures me paraît justifiée, mais j'aimerais savoir si vous envisagez des installations pour les athlètes olympiques ou pour les sportifs amateurs?

M. John Bales: Pour les deux, en fait. Dans notre document, je cite l'exemple de l'ovale de patinage de vitesse de Calgary. C'est la meilleure installation de ce type dans le monde. N'importe quel patineur de vitesse vous dira que Calgary est le meilleur endroit du monde pour s'entraîner dans cette discipline. Toutes sortes d'équipes internationales vont s'entraîner là-bas.

C'est une installation extrêmement bien gérée qui sert autant à l'usage récréatif qu'aux universités et aux clubs. C'est exactement ce genre d'installations que nous envisageons. Nous voulons des installations qui soient utilisables par les athlètes de haut niveau, mais également par le grand public.

Le président: Merci monsieur Mark.

Monsieur Volpe, avez-vous une question?

M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.): Je voulais tout simplement poursuivre dans cette direction. Comment est-il possible d'atteindre cet équilibre...

Le président: Excusez-moi Joe, je n'avais pas remarqué que M. Cannis avait une question. Il avait déjà demandé son tour tout à l'heure, mais je pensais qu'il avait une question pour M. Carefoote. Est-ce que nous pourrons revenir à vous après M. Cannis?

M. Joseph Volpe: Certainement.

Le président: Allez-y John.

M. John Cannis: Je n'ai pas de question monsieur Mills.

Le président: Alors allez-y monsieur Volpe.

M. Joseph Volpe: Je crois que je vais augmenter mes prix.

On se croirait dans des négociations de licences de sport professionnel.

Monsieur Bales, disons que le modèle que vous proposez est acceptable d'un point de vue théorique. Expliquez-moi comment vous allez vous y prendre pour faire en sorte que les installations puissent accueillir à la fois des athlètes de haut niveau et répondre aux besoins de la collectivité qui souhaite les utiliser pour les loisirs et des activités moins professionnelles?

M. John Bales: Il n'est pas question d'équipes professionnelles, mais plutôt d'athlètes de haut niveau, d'athlètes olympiques qui ont besoin des installations pour s'entraîner. Ces athlètes utilisent les installations environ quatre heures par jour, ce qui laisse encore une dizaine d'heures de disponibles.

Il existe d'excellents modèles, mais ils ne sont pas assez nombreux. Il est urgent de disposer de plus d'installations. Pendant longtemps, le développement d'installations sportives n'a pas été très rapide, si bien que nous devons commencer à renouveler ces installations.

• 1650

M. Joseph Volpe: Est-ce que cela tient au fait que la participation a diminué ou que l'intérêt pour certains sports a évolué, sous l'influence de la participation du public à certaines activités susceptibles d'entraîner des activités de haute performance, par exemple dans les sports olympiques—ou est-ce à cause d'autres facteurs que nous n'avons pas explorés?

M. John Bales: Les installations sont utilisées à pleine capacité. Les gens qui gèrent ces installations pourront vous dire qu'elles fonctionnent à pleine capacité. À tel point que les athlètes de haut niveau ne peuvent les utiliser assez souvent pour s'entraîner, ou pas à des heures raisonnables.

Par conséquent, je ne pense pas que les installations soient sous-utilisées ou désertées; le problème, c'est qu'il en faut plus.

M. Joseph Volpe: Une dernière question, monsieur le président.

À l'avant-dernière page, vous avez cité en exemple un certain nombre de pays. Je ne sais pas bien comment ces choses fonctionnent dans ces pays, mais il me semble que les installations offertes dans ces pays sont loin d'être au niveau de celles dont nous disposons au Canada ou même—si je peux me vanter un peu—dans ma propre ville de Toronto.

Mon interprétation est peut-être erronée ou peut-être que les gens des autres pays que j'ai rencontrés ne m'ont pas dit la vérité, ou encore, il faut dissocier les performances de l'état des installations. Parce que ces pays nous devancent malheureusement à pratiquement tous les niveaux et dans tous les sports.

M. John Bales: La Grande-Bretagne est un exemple que j'ai cité dans le document. Nous avons sans conteste de meilleures installations que la Grande-Bretagne, mais les Anglais se sont attaqués très directement à cette question. Ils consacrent 750 millions de dollars chaque année au développement des installations sportives, conscients d'être en retard dans ce domaine. Ils ont consacré des sommes importantes provenant des loteries pour rebâtir leur infrastructure.

M. Joseph Volpe: En dollars canadiens, cela représente environ 350 millions par habitant.

M. John Bales: Oui, on peut en gros diviser par deux.

M. Joseph Volpe: Très bien.

Le président: Monsieur Cannis.

M. John Cannis: Il y a une question que je voulais poser, monsieur le président. Merci de m'en donner l'occasion.

Monsieur Bales, vous avez dit, et je vous cite que «les sports professionnels ont besoin du système». Je suis d'accord avec vous.

Un peu plus tôt, nous avons entendu le représentant de la brasserie Molson. Est-ce que le milieu des affaires accorde un soutien financier à toutes les associations d'entraîneurs?

Enfin, vous avez cité le chiffre de 50 millions de dollars répartis sur cinq ans. Est-ce qu'il s'agit là des 50 millions de dollars déjà consentis à Sport Canada ou est-ce que vous réclamez un montant supplémentaire de 50 millions de dollars?

M. John Bales: C'est un montant supplémentaire. Je crois que pour pouvoir être au même niveau que les autres pays, il faut augmenter le soutien financier.

Quant à votre autre question concernant la participation du milieu des affaires, je vais demander à Eric King d'y répondre.

M. Eric King (vice-président, Opérations et commercialisation, Association canadienne des entraîneurs): Depuis une quinzaine d'années, la dépendance de l'association à l'égard du gouvernement fédéral est passée de 80 p. 100 à 60 p. 100 de son budget total. Nous y avons pallié essentiellement par des commandites. Nous avons eu la chance de bénéficier de l'appui d'un groupe de commanditaires du milieu des affaires, en particulier 3M Canada.

Permettez-moi de souligner que nous avons un objectif d'éducation, en particulier la formation des entraîneurs. Depuis 25 ans, nous avons formé quelque 700 000 entraîneurs par l'intermédiaire du programme 3M de certification nationale des entraîneurs. Nous formons chaque année environ 80 000 entraîneurs qui suivent un de nos cours. Nous recueillons environ 0,5 million de dollars par l'intermédiaire de nos commanditaires et des dons d'entreprises et de bienfaisance.

Par conséquent, nous sommes très privilégiés par rapport à d'autres organisations nationales de sport amateur.

M. John Cannis: Par conséquent, vous ne verriez donc pas d'inconvénient à ce que le gouvernement prenne sérieusement en considération les demandes d'appui financier que nous présentent certains membres du secteur privé pour appuyer nos autres licences professionnelles, étant donné que l'aide est réciproque. Est-ce que c'est exact?

• 1655

M. Eric King: Notre situation est différente, puisque aucun brasseur ne nous commandite. Nos commanditaires sont 3M, Investors Group, The Sports Network et Wittnauer International. Je crois qu'à part TSN, aucun d'entre eux ne commandite le sport professionnel.

M. John Cannis: Merci, monsieur le président.

[Français]

Madame Tremblay.

Mme Suzanne Tremblay: Je remercie nos témoins de leur présentation.

J'aimerais que vous précisiez si les entraîneurs professionnels dont vous parlez sont des gens qui sont certifiés comme entraîneurs.

[Traduction]

M. Tom Kinsman (Consultant en arbitrage et directeur exécutif, Association canadienne des entraîneurs professionnels): L'Association canadienne des entraîneurs professionnels est une filiale de l'Association canadienne des entraîneurs qui a pour mission de fixer les normes professionnelles qui s'appliquent à un entraîneur ayant un certain degré de formation, qui est certifié par le programme de formation et qui s'est engagé à respecter le code déontologique de la profession.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Dans votre document intitulé «Pour un système sportif canadien plus fort», vous réclamez essentiellement trois choses. Tout d'abord, vous voudriez disposer de 50 millions de dollars pour des infrastructures. En quoi ces 50 millions de dollars amélioreraient-ils le sort des entraîneurs?

[Traduction]

M. John Bales: Nous pensons que le fait de renforcer le système sportif en général contribuerait à renforcer l'encadrement. Par conséquent, en développant les installations et en proposant de meilleures possibilités pour la prestation des programmes sportifs, on améliorera le niveau général du sport canadien, tant sur le plan de la participation que des performances, ce qui multipliera les demandes d'encadrement et les possibilités offertes aux entraîneurs.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Est-ce que vous avez identifié la nature des infrastructures dont il faudrait doter le Canada avec ces 50 millions de dollars? Que faudra-t-il ajouter? Faudra-t-il plus d'arénas, plus de pentes de ski, ou quoi?

[Traduction]

M. John Bales: C'est une question très intéressante car au Canada, personne ne prend l'initiative des actions en ce qui a trait aux installations. Il n'existe aucune carte indiquant les installations disponibles ni les endroits où elles sont nécessaires. Dans la plupart des autres pays, on peut s'adresser au gouvernement national ou au gouvernement provincial pour obtenir une réponse détaillée à cette question.

On peut dire que, de manière générale, nous avons laissé la question du développement des installations aux initiatives très locales de certains groupes de personnes ayant la volonté de créer une installation, en l'absence de tout plan national.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: J'aurais une toute petite question.

Le président: Oui, oui.

Mme Suzanne Tremblay: De nombreux témoins et groupes sont venus comparaître devant nous. Certains d'eux nous ont dit qu'il était moins cher d'aller s'entraîner dans le sud de la France parce qu'il y avait exactement ce qu'il fallait pour s'entraîner et que les entraîneurs y étaient meilleurs que ceux qu'on a ici au Canada, etc. D'autres nous ont dit qu'il était extrêmement difficile d'entrer dans les fameux centres d'excellence, qu'il fallait entrer par la porte arrière, sans se faire voir, et faire face à toutes sortes de complications. Est-ce qu'on manque d'infrastructures ici? Est-ce que ce serait vraiment mieux pour nos athlètes si nous pouvions ajouter des infrastructures? Cette question me préoccupe.

Vous dites qu'il vous faut 50 millions de dollars là, 100 millions de dollars ici et une confédération et qu'avec cela, ça ira mieux. Mais vous représentez les entraîneurs et je ne vois pas de lien direct entre ces éléments.

[Traduction]

M. John Bales: Je pense que le lien réside dans le fait qu'un système sportif plus fort permettrait de mieux coordonner les programmes sportifs, les programmes d'aide aux athlètes, les programmes d'étude des sports et de médecine sportive et les programmes d'encadrement afin d'offrir un service plus efficace au client, c'est-à-dire l'athlète. Je pense que nous avons besoin d'un système mieux coordonné pour pouvoir assister à des améliorations dans ces domaines.

• 1700

Pour ce qui est de s'entraîner à l'extérieur et en particulier dans le sud de la France, je crois que notre responsabilité va bien au-delà de cet aspect et que nous devons permettre aux Canadiens de pratiquer le sport au Canada. En fait, beaucoup d'athlètes canadiens vont s'entraîner ailleurs, parce qu'ils ne peuvent le faire par ici. Par exemple, beaucoup d'athlètes obtiennent des bourses pour s'entraîner aux États-Unis parce que le système universitaire leur offre là-bas des possibilités que nous n'avons pas ici.

Les entraîneurs de la plupart de nos sports d'équipe pourraient vous dire que leurs meilleurs éléments s'entraînent à l'extérieur du pays. Il n'y a pas au Canada de ligue de basketball, de volleyball, de hockey sur gazon et de toutes sortes d'autres sports. Aussi, les athlètes doivent se rendre ailleurs pour s'entraîner.

Je ne pense pas que ce soit la solution. À mon avis, le Canada devrait être capable de donner à ses athlètes les moyens de s'entraîner.

Cela ne signifie pas que l'on doive éliminer totalement les camps d'entraînement ni, bien entendu, les compétitions à l'extérieur du pays. Cependant, nous avons beaucoup à faire pour donner aux athlètes canadiens les moyens de se perfectionner. En fait, seul un petit—très petit—pourcentage des athlètes ont la chance de pouvoir s'entraîner à l'extérieur du pays. Le Canada n'offre pas aux athlètes les moyens dont ils devraient disposer pour s'entraîner.

Le président: Merci beaucoup madame Tremblay.

Monsieur Coderre, vous avez une dernière question pour notre témoin?

[Français]

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Je me sens un peu bizarre aujourd'hui. En effet, c'est l'Association canadienne des entraîneurs qui comparaît devant nous, mais on ne parle pas de coaching. Il y a toutes sortes d'écoles de pensée et, finalement, pour régler tous les problèmes, on nous dit de dépenser plus d'argent, d'ajouter une pente de ski, et on va nous arranger cela.

Il y a deux semaines, je constatais que le sport est trop macho, qu'il n'y a pas assez de place pour les femmes et que le vrai problème en est un d'accessibilité et de volonté politique, non seulement de la part du gouvernement, mais de la part de tous les acteurs qui ont un rôle à jouer. Vous avez un rôle important à jouer parce que vous êtes l'association qui représente les entraîneurs. Ces derniers sont là pour prendre un athlète au début, en faire un modèle, en faire un citoyen à part entière, pour s'assurer qu'il soit non seulement un bon athlète, un bon sportif, mais aussi un bon citoyen.

Or, le problème que je vois, c'est que vous nous demandez de l'argent. Moi, je ne vois pas de problème à ce qu'on dépense mieux l'argent. Je suis d'accord avec vous que parfois, à la lumière des témoignages qu'on a entendus, on a peut-être l'impression que Sport Canada n'a qu'un petit bureau et une table qui accumule beaucoup de poussière, et se cherche des raisons d'être. Mais en réalité, ce n'est pas vrai que le gazon est toujours plus vert chez le voisin. Vous avez une responsabilité.

J'aimerais vous entendre parler aujourd'hui—je suis une personne qui n'a pas beaucoup de tabous—des problèmes au niveau des entraîneurs et de leur encadrement. Les jeunes garçons et les jeunes filles sont présentement soumis à des problèmes importants, que ce soit des agressions sexuelles, des problèmes d'encadrement ou autres. Vous avez parlé de certification ou de professionnalisme. D'une certaine façon, monsieur Bales, j'ai malheureusement le pressentiment—dites-moi si j'ai tort; à mon âge, je suis prêt à tout apprendre encore—que le problème fondamental est que les entraîneurs ne sont pas des entraîneurs adéquats.

Je vais faire un marché avec vous. S'il faut de l'argent pour nous assurer un meilleur encadrement, je serai d'accord. Mais en réalité, ce que vous devez faire, c'est non seulement vous assurer que le sport soit plus accessible aux femmes et aux jeunes et que les athlètes deviennent de meilleurs modèles, mais aussi être des chiens de garde pour vous assurer que ces entraîneurs fassent un meilleur travail. Actuellement, ou bien les jeunes sont laissés pour compte, ou bien il y a un problème de chiens de garde entre les associations.

Finalement, au bout de la ligne, le jeune a peur parce qu'il ne se sent pas en sécurité ou parce qu'il y a un problème avec le genre d'entraîneurs qu'on a présentement.

[Traduction]

M. John Bales: La documentation que nous vous avons fournie antérieurement contient beaucoup d'informations sur le programme d'encadrement.

Nous sommes fiers du programme d'encadrement que nous avons mis en place. Comme je l'ai dit, nombreux sont les entraîneurs qui se prévalent du système. Chaque année, 80 000 entraîneurs suivent un des cours. Nous avons également créé l'Association canadienne des entraîneurs professionnels afin de tenter de fixer les normes de conduite aussi bien que les qualifications.

• 1705

De nombreux éléments du système sont déjà en place, mais nous avons encore beaucoup de travail à faire pour le suivi. C'est une chose que de montrer aux entraîneurs le comportement qu'ils doivent adopter; c'en est une autre de s'assurer qu'ils mettent vraiment en pratique ce qu'ils ont appris.

Afin d'y parvenir, nous avons créé une structure de membres professionnels qui s'étendra également au niveau des bénévoles par l'intermédiaire des organisations sportives, ainsi qu'au niveau provincial. C'est un élément très important pour nous, une de nos grandes priorités. Nous venons tout juste de terminer un important examen de notre programme de certification des entraîneurs afin de savoir comment nous pouvons le rendre plus utile et plus pratique pour l'utilisateur.

Voilà quels sont notre mandat et notre responsabilité. Nous ne pensons pas pouvoir réaliser notre mandat si nous ne disposons pas d'un système sportif fort. C'est toujours très décevant d'inculquer un code de conduite et de comportement à un entraîneur et de s'apercevoir par la suite que ces valeurs ne sont pas appliquées dans la ligue où il évolue. Il faut prendre en compte l'ensemble du système dans lequel travaille l'entraîneur aussi bien que le développement personnel de chacun.

Par conséquent, il est extrêmement important d'améliorer l'ensemble du système afin de permettre aux entraîneurs de faire un travail plus efficace.

Tom voulait ajouter quelque chose.

M. Tom Kinsman: Tous ici, autour de cette table, nous avons grandi dans le sport et si nous avons des emplois comme les nôtres, c'est grâce à l'expérience positive que nous a permis de vivre le sport. Le sport est très formateur et prépare à la vie. La génération suivante devrait bénéficier des mêmes avantages que nous.

Vous demandez pourquoi nous ne nous limitons pas au développement de l'encadrement sportif. La réponse est très simple. Nous sommes venus ici pour parler du développement du sport au Canada. Dans la plus grande partie de notre exposé, nous avons parlé de la nécessité de renforcer le système sportif.

Il est clair qu'un meilleur système sportif multipliera les activités à tous les niveaux et lorsqu'il y a plus d'activités à tous les niveaux, il y a une plus grande demande en matière d'entraîneurs. Ces entraîneurs doivent appliquer les normes et valeurs appropriées et doivent être formés de manière à s'acquitter de leurs fonctions de façon compétente.

Nous savons qu'il y a toujours eu et qu'il y aura toujours du sport au Canada. Le sport continuera sans nous. Par contre, si nous voulons que nos athlètes puissent se mesurer aux meilleurs sportifs internationaux, nous devons leur donner des entraîneurs capables de les aider à développer leurs talents à un niveau compétitif. Pour cela, il faut du soutien. Il faut des entraîneurs mieux qualifiés et par conséquent, de meilleurs programmes de formation.

Le sport nous paraît être une magnifique occasion d'apprentissage pour le développement des individus, mais cette caractéristique n'est pas inhérente à l'activité sportive. Le sport, c'est une activité impromptue. Par le passé, nous avons connu diverses formes de sport telles que les courses de taureaux, les combats de coqs et d'autres activités analogues qui ne renforçaient pas les valeurs qui nous paraissaient importantes.

L'expérience du sport devrait être fondée sur les valeurs, mais elle ne peut se réaliser si nous ne faisons pas l'effort de mettre ces valeurs dans le sport. On ne peut y parvenir qu'en formant les entraîneurs et les autres intervenants, mais ce sont surtout les entraîneurs les premiers concernés par ce genre de formation.

Au-delà de la formation, il faut fixer des normes de pratique qui sont appliquées dans le système afin qu'il soit doté de mécanismes de contrôle, de mécanismes disciplinaires ou de surveillance pour s'assurer que les entraîneurs appliquent bien ces normes dans la pratique, après y avoir été sensibilisés au cours de leur formation.

• 1710

Le président: Merci beaucoup à M. Kinsman, M. Bales et à leurs collègues. Votre témoignage nous a été très utile aujourd'hui. Merci.

M. John Bales: Merci beaucoup.

Le président: Nous avançons au pas de course aujourd'hui et nous allons passer directement à nos derniers témoins.

Je vais commencer par vous donner quelques renseignements sur notre prochain témoin. Lorsque nous avons entamé cet exercice consistant à faire l'analyse du sport dans l'économie, quelques-uns des meilleurs spécialistes du pays nous ont conseillé de consulter le rapport du Comité d'étude sur les sports au Canada. Il s'agit du comité d'étude annoncé en 1969 par le premier ministre de l'époque Pierre Elliott Trudeau. Ceux qui ont lu ce rapport estiment qu'il s'agit d'un document classique. Nous avons le plaisir d'avoir parmi nous aujourd'hui le directeur général de ce comité d'étude, M. Chris Lang. Il fut un des architectes de ce rapport et, 30 ans plus tard, nous sommes amenés à nous pencher à nouveau sur son travail.

Nous sommes heureux de vous avoir parmi nous ici monsieur Lang et de bénéficier ainsi de votre expérience dans la commandite sportive et tout le domaine du sport au pays, pas seulement du point de vue du secteur privé, mais également sous l'angle de la politique gouvernementale. Soyez les bienvenus, vous et vos collègues.

M. Chris Lang (président, Lang et Associés): Merci monsieur le président.

Mesdames et messieurs, nous aimerions prendre une quinzaine de minutes pour vous présenter un bref survol du document que nous vous avons remis. Mais auparavant, j'aimerais faire quelques remarques préliminaires.

Nous travaillons dans le domaine du sport depuis 34 ans, ayant débuté à Winnipeg en 1964 avec l'équipe nationale de hockey; puis nous avons collaboré aux Jeux panaméricains en 1967; ensuite, comme le président l'a mentionné, avec le Comité d'étude sur les sports en 1968; plus tard, à la création de l'Association des entraîneurs, à ParticipACTION, au Centre canadien d'administration du sport et de la condition physique, à Hockey Canada et au Sport Marketing Council; depuis 34 ans, nous avons également collaboré avec d'autres organisations provinciales.

Il est important de tirer certaines conclusions de notre participation et je suis certain que vous attachez beaucoup d'importance à ces conclusions.

La première et la plus importante de ces conclusions est que le sport est notre plus grand actif national et qu'il devrait être traité de la même manière que les autres actifs ou ressources du Canada. Le secteur public doit absolument protéger, surveiller et mettre en valeur les actifs nationaux. On peut parfois remettre en question le rôle du gouvernement fédéral relativement à ces actifs...

Ma conclusion principale, après avoir passé 34 ans dans le milieu du sport au Canada et dans le monde entier, c'est que nous devons définir une façon particulière de faire du sport au Canada. Nous ne sommes pas comme les Américains chez qui le sport est intégré aux études. Nous ne sommes ni comme les Européens, ni comme les Asiatiques qui ont un réseau de clubs. Nous avons notre propre manière de développer nos ressources.

Comme vous le savez, la mosaïque culturelle canadienne est extraordinaire, mais une autre caractéristique des Canadiens, c'est la prudence. Nous hésitons entre l'intervention du secteur public et celle du secteur privé. À mon avis, après avoir assisté au développement du sport depuis 34 ans, le plus profitable pour le sport, c'est une tension dynamique entre le secteur public et le secteur privé. En effet, tous deux ont un rôle à jouer dans le développement du sport.

À mon avis, le rôle du gouvernement qui est en fait le gardien de l'intérêt public, consiste à définir la politique officielle. S'il n'assume pas ce rôle, c'est le secteur privé qui l'exercera et le sport risque alors d'être géré comme les affaires.

Je sais que certaines questions ont été soulevées plus tôt au sujet de ce qu'est devenu le sport dans le hockey professionnel aujourd'hui. On ne m'a pas posé personnellement cette question, mais je dirais que dans le hockey, il y a un peu des deux. C'est un bien culturel, une partie importante du tissu canadien, comme l'ont prouvé de nombreuses et abondantes recherches sur le sujet. À l'époque du Comité d'étude sur les sports en 1968, cet aspect avait été particulièrement soulevé au sujet de la LCF, la Ligue canadienne de football. C'est véritablement à ce moment-là que l'organisation a imposé son image.

Par ailleurs, le secteur privé est probablement l'organisation qui fonctionne le mieux pour l'application pratique.

Par conséquent, le modèle canadien devrait avoir deux volets: un volet de politique officielle élaborée bien entendu avec les participants concernés, et un volet d'exécution confié au secteur privé. Le modèle proposé par l'Association des entraîneurs propose un peu ce genre de choses.

• 1715

Si l'on examine le développement du sport au Canada à partir de 1964 avec la Loi sur la condition physique et le sport amateur jusqu'à l'étude fort utile que vous entreprenez aujourd'hui, 34 ans plus tard, on s'aperçoit que le sport a hésité un peu entre ces deux pôles. À certaines époques, l'initiative est venue du gouvernement fédéral et à d'autres moments du secteur privé. Il y a toujours eu cette tension dynamique.

L'erreur que nous avons faite, c'est que nous n'avons jamais vraiment compris nos rôles. Je ne pense pas que le gouvernement fédéral ait vraiment défini la politique officielle et je ne crois pas que les participants de l'autre côté aient nécessairement accepté cela. Je peux vous citer toutes sortes d'exemples. En 1970, Marc Lalonde qui était je crois le ministre des Sports, a empêché John Bassett et son équipe d'instaurer une ligue de football à Toronto, parce qu'il craignait que cela nuise à la Ligue canadienne de football. En voilà un exemple.

Il est clair que, de nos jours, le sport professionnel fait face au Canada... J'ai eu l'occasion de parler à un certain nombre de témoins que vous avez entendus. Dans le cas des licences sportives, il y a des différences sérieuses sur le plan de l'imposition et une disparité monétaire liée à la valeur du dollar.

Il y a également d'autres différences. La culture est une grosse différence. Je ne suis pas certain qu'on en ait parlé. Au Canada, la culture sportive n'est pas aussi fermement ancrée qu'aux États-Unis. Et nous n'avons pas le même système, en particulier dans les grands sports tels que le hockey ou le football. Quand l'équipe Notre Dame joue au football, il y a 100 000 personnes dans le stade. On peut dire par conséquent qu'il y a une différence fondamentale.

Il faut développer et maintenir l'actif que constitue le sport, tant du point de vue culturel et probablement encore plus du point de vue économique. J'ai eu l'occasion de lire la récente étude économique sur le sport. Les chiffres sont étonnamment faibles. D'après l'étude, le sport représente 2 p. 100 par rapport au PIB et au chômage. C'est absolument ridicule. Je pense que le chiffre tourne plutôt autour de 8 p. 100. Dans les autres pays, les chiffres sont beaucoup plus élevés. Pour une raison quelconque, ces chiffres ne sont pas recueillis au Canada, ou bien le travail est mal fait. Nous ne connaissons pas l'impact économique et je pense que nous n'avons pas pleinement exploré l'impact social. Voilà deux aspects que nous allons aborder dans certaines de nos recommandations.

Je vais vous parler du côté commercial et Dan Thompson qui est un ancien athlète olympique, vous parlera du côté sportif, car il faut tenir compte de ces deux aspects dans le sport. Nous vous avons fait parvenir la semaine dernière un mémoire que je ne vais pas reprendre dans les détails. Ce serait trop ennuyeux.

Cela fait maintenant 34 ans que nous nous occupons de commandites sportives et globalement, nous traitons chaque année plus de 400 millions de dollars en commandites sportives. Je ne pense pas qu'il y ait une autre firme dans le monde qui traite un montant aussi important. Ne croyez pas un seul instant que je prétends qu'il s'agit là du revenu de notre société ou que nous avons une influence sur l'utilisation de ces 400 millions de dollars, mais nous sommes bel et bien chargés de répartir un peu partout dans le monde 400 millions de dollars dans le domaine du sport.

Si vous faites une recherche aujourd'hui, vous découvrirez un certain nombre de choses. Tout d'abord, qu'il faut commencer par le consommateur. Et le consommateur, c'est vous et moi autour de cette table. Quand on y pense vraiment, il y a deux choses qui nous intéressent essentiellement: les produits de marque à bon marché et l'expérience de consommation.

Prenons comme exemple de produit de marque le Coca-Cola. La guerre des colas a été déclenchée lorsque Cott s'est introduit sur le marché et a commencé à vendre 24 cannettes de cola pour 4,99 $, ce qui a forcé Coke à baisser ses prix de 11,99 $ à environ 6,99 $. De nos jours, le public veut des produits de marque à bon marché et c'est ce qui fait la force des magasins-entrepôts tels que Wal-Mart et autres magasins géants. Les gens aujourd'hui veulent acheter à bon marché un produit qu'ils connaissent et en qui ils ont confiance.

Il est intéressant de noter qu'aujourd'hui Internet permet d'acheter à Hong Kong une paire de jeans Levi's à 26 $, et de se les faire livrer pour 6 $ par FedEx trois jours plus tard. Pourquoi se donner la peine d'aller au magasin? On connaît la qualité des produits Levi's. Pourquoi se donner la peine d'aller chez Eaton, à La Baie ou chez Zellers? Mais il y a autre chose que les consommateurs recherchent.

Les consommateurs recherchent l'expérience et c'est ce qui se passe avec Starbucks. Pourquoi aller prendre un café à 2,50 $ chez Starbucks alors qu'un autre magasin au coin de la rue propose le même café pour 1 $? C'est parce que vous êtes prêts à payer 1,50 $ pour l'expérience. Quelle est la différence entre l'eau Perrier et un club soda? Il n'y a guère de différence, sinon que la première est plus chère que l'autre.

Notre exposé repose sur le principe que, du point de vue commercial—et Dan vous parlera plus tard du point de vue sportif—le sport doit commencer par prendre en compte ce que recherche le consommateur. Il y a différentes façons de considérer les industries, mais on peut de manière générale les regrouper en trois catégories. Il y a les industries orientées vers le produit, les industries axées sur la distribution et celles qui sont axées sur le consommateur.

• 1720

Selon la rapidité de la technologie et son influence sur votre entreprise, si vous prenez du retard par rapport au consommateur, votre entreprise risque de connaître de grandes difficultés, par exemple si vous êtes toujours axés sur le produit et si le consommateur, de son côté, a suffisamment d'informations pour effectuer l'achat parce qu'il sait remonter les filières de distribution, ou parce qu'il achète sur Internet.

Un livre très intéressant écrit par un professeur de MIT vient tout juste d'arriver sur le marché. Il s'intitule Clock Speed. La thèse de cet ouvrage est très simple: l'animal qui a probablement la plus grande incidence sur l'étude des êtres humains est la luciole.

La luciole a trois caractéristiques. La première, c'est qu'elle est petite, si bien qu'on peut en mettre énormément dans une bouteille; la deuxième, c'est que sa durée de vie n'est que de deux semaines; la troisième, c'est qu'elle partage avec l'être humain, certaines caractéristiques. Je ne sais pas exactement lesquelles, mais les biologistes ont découvert en étudiant la luciole, qu'une de ses caractéristiques était la rapidité. Par conséquent, l'auteur de l'ouvrage se demande quelles sont les industries qui se comparent à la luciole.

Si l'on s'arrête à la vitesse de la technologie, l'industrie dont la durée de vie est la plus courte, celle qui est la luciole du secteur privé, c'est le cinéma. En effet, si un film ne rentre pas dans ses frais la première fin de semaine de sa sortie, il ne sera jamais rentable. C'est prouvé.

À l'autre extrémité, l'industrie qui a le cycle de vie le plus long, c'est l'industrie de fabrication des fuselages d'avion. La société Boeing continue à vendre des 747 trente ans après le premier vol de l'appareil. L'industrie de l'automobile se renouvelle tous les six ans. Les industries qui ont le cycle de vie le plus rapide aujourd'hui sont celles de la technologie et des communications. On sait à quelle vitesse les choses évoluent dans ce domaine. La technologie est le grand support de l'information et l'information est vraiment ce sur quoi les gens comme vous et moi, les consommateurs, fondent leur décision au moment d'acheter un produit.

Ce que nous voulons souligner au sujet de la commandite, c'est que 25 millions et quelques de consommateurs canadiens recherchent deux choses lorsqu'ils font l'achat de produits et services: ils veulent des produits de marque à bon marché et ils sont également à la recherche d'une certaine expérience. Les sociétés disposent de nombreux véhicules pour ajouter une expérience de consommation aux produits qu'ils vendent. Ils peuvent se tourner vers les arts, la culture, la science, les oeuvres de bienfaisance et le sport pour ajouter un attrait supplémentaire à leurs produits. D'après les recherches dont on dispose aujourd'hui, un seul de ces aspects donne des résultats spectaculaires et c'est le sport.

C'est vrai que les oeuvres de charité représentent une cause intéressante. Si vous proposez un produit compétitif dont la plupart des caractéristiques—qualité, prix, service, etc., sont aussi bonnes que celles des produits concurrents, c'est peut-être son association avec la Fondation des maladies du coeur, Jeunesse j'écoute ou une autre oeuvre, qui fera vendre votre produit. Mais le sport est de loin le meilleur argument de vente.

Cela s'explique par le fait que 90 p. 100 de la population s'intéresse au sport. Les gens s'intéressent aussi à d'autres domaines, mais le sport exerce un attrait puissant et est source de grandes émotions—il suffit, pour saisir la profondeur de cette émotion, de feuilleter les magazines de sport ou de suivre les émissions de sport à la télévision... Écoutez les conversations au moment des grands événements qui se produisent à intervalles réguliers, au moment de la Coupe Stanley ou des Séries mondiales. Nous ne sommes pas très nombreux à suivre les matches de baseball, mais nous sommes tous des experts du baseball au moment des Séries mondiales ou des experts du football au moment des éliminatoires ou de la Coupe Stanley.

Le sport a donc un attrait extraordinaire auprès du public et représente un atout commercial sans pareil. À notre avis, cet atout est mal exploité, aussi bien dans le sport amateur que dans le sport professionnel. L'essentiel de nos recommandations découle en fait de cette constatation.

La bonne nouvelle, c'est que nous avons un atout. Évidemment, il y a toutes sortes de mauvaises nouvelles et vous les avez entendues dans la bouche de tous les témoins qui ont défilé devant vous depuis deux ou trois mois, évoquant les tribulations du dollar et l'incapacité des propriétaires d'équipes de limiter les salaires de leurs joueurs. La bonne nouvelle, c'est que le sport est le meilleur atout de notre pays.

Le problème, c'est que nous ne savons pas le développer suffisamment. Nous devons nous pencher sur la question afin d'éviter les erreurs du passé. Nous devons procéder différemment. C'est ce que nous vous proposons aujourd'hui. Nous devons briser le vieux moule et nous débarrasser des vieilles traditions.

Il est bon de se demander si les grandes sociétés ou si les grandes licences de sport amateur ou professionnel savent vraiment comment commercialiser le sport. Nous pensons qu'il y a d'innombrables façons d'utiliser les différentes caractéristiques du sport sans pour autant le défigurer.

Le simple message que j'ai à vous livrer—qui est mentionné dans la première partie du document que vous avez en main—c'est que sous l'influence de la technologie et des communications, les sociétés sont incitées de plus en plus à cultiver une relation avec leurs clients. De leur côté, les consommateurs recherchent des produits de marque au meilleur prix, et une expérience de consommation. Quel est le meilleur véhicule qu'un fabricant peut choisir pour améliorer et renforcer l'attrait de son produit?

• 1725

Vous avez entendu avant moi le témoignage de Jeff Carefoote qui représentait Molson. Il est clair que si Molson a choisi l'image du hockey, c'est pour mieux vendre son produit. Le brasseur se sert du hockey pour atteindre le consommateur et lui transmettre son message, à cause de l'auditoire qu'il représente et de l'intérêt inhérent évident du public pour le hockey, intérêt qui va bien au-delà des tendances de consommation du produit. Les amateurs de hockey ne sont pas uniquement des amateurs de bière. Ce sont des gens qui s'intéressent beaucoup plus au hockey que de simples buveurs de bière et le hockey est un sport qui réunit des gens de tout âge. Le brasseur s'adresse tout simplement au segment d'âge et au segment de consommateurs qu'il cherche à attirer.

En conclusion, ce que nous voulons vous dire, c'est que la technologie évolue très rapidement, entraînant une diffusion rapide des informations qui force à son tour les sociétés à commercialiser leurs produits de manière différente. Les fabricants doivent communiquer, quelle que soit la valeur du dollar et la santé de l'économie.

Dennis, vous venez du milieu des affaires et vous savez que lorsque le marché est morose, il faut se battre pour garder sa part du marché. Le dernier poste budgétaire à éliminer, c'est celui du marketing. On peut sabrer partout ailleurs, mais lorsque l'économie est ralentie et que les consommateurs se font rares, les entreprises intelligentes augmentent leur budget de marketing pour éviter de perdre les consommateurs, quitte à augmenter éventuellement leurs prix. Mais ce qu'elles veulent à tout prix éviter, c'est de perdre leur part du marché.

Voilà le scénario auquel nous faisons face actuellement à court terme. Nous pensons que c'est le bon moment pour les commandites sportives et nous croyons que les possibilités sont nombreuses. Nous vous recommandons de procéder de manière très attentive. Le gouvernement a un rôle à jouer pour la définition de la politique officielle et le secteur privé, de son côté, doit intervenir sur le plan de l'exécution. La bonne nouvelle, c'est que le sport est un moyen très efficace de communiquer avec le public et les entreprises vont s'en servir de plus en plus.

Maintenant, Dan va vous présenter le côté sportif et ensuite, nous vous soumettrons des recommandations précises.

M. Dan Thompson (directeur principal, Architectus, Lang et Associés): Merci, Chris.

Monsieur le président, mesdames et messieurs, j'aimerais pour ma part vous parler d'actifs. La communauté sportive en fait partie. Dans ce contexte, l'actif s'entend d'une manifestation, d'une activité ou d'installations dont le succès financier dépend de la commandite. La communauté sportive entre certainement dans cette définition.

Des représentants de la LNH, de la Ligue majeure de base-ball, de la NBA et de la Ligue canadienne de football sont venus vous parler du statut des sports professionnels au Canada. Je préfère plutôt mettre l'accent sur le sort du sport amateur.

Bon an mal an, Architectus, une division de Lang qui offre des services de consultation aux propriétaires plus particulièrement, parle de commandite à plus d'une centaine d'entre eux. La moitié de ces propriétaires environ proviennent du monde du sport amateur. L'impression que nous avons, c'est que le monde du sport amateur n'est pas prêt à répondre aux demandes du marché du XXIe siècle.

Chris vous a parlé de la nécessité pour les propriétaires d'opter pour un dialogue ouvert et des programmes qui touchent directement les consommateurs. À l'heure actuelle, dans la majorité des cas—pas tous, parce qu'il y a des sports où on s'en tire bien—la communauté du sport amateur ne sait pas faire la part des choses en ce sens que la marque n'est pas bien définie. Les associations sportives sont inconscientes de leurs atouts et de la valeur de ces atouts et ne savent pas comment maximiser les revenus.

Il y a un manque d'intégration et une difficulté à concevoir des programmes quadriennaux qui réunissent une série de manifestations ou d'épreuves en un tout bien présenté. Il y a eu très peu d'études de marché et on comprend mal l'importance de la recherche sur les consommateurs, les caractéristiques du sport, le profil des participants, les spectateurs, les acheteurs et leurs habitudes d'achat. On n'a pas une bonne idée de la situation.

La communauté sportive est incapable de faire face à la concurrence. Elle a de la difficulté à anticiper. Elle est incapable d'évoluer au rythme du marché et nous savons à quel point le marché change rapidement à l'heure actuelle.

Elle manque d'actifs mesurables. Autrement dit, elle est incapable de faire comprendre ce qu'elle vaut à une entreprise.

Chris parlait de l'image et de la sensibilisation par opposition aux ventes et à l'image de marque, et il y a un manque de personnalisation. On est en général incapable d'avoir des idées qui veulent dire quelque chose à l'entreprise et, ce qui est plus important encore, à ses clients.

À notre avis, pour bien tirer profit du marché du XXIe siècle, la communauté sportive devra prendre les mesures qui suivent.

Bien énoncer les attributs de la marque associée à un produit. Pourquoi le patinage artistique est-il important pour les consommateurs? Quelles sont ses caractéristiques que les consommateurs aiment? C'est ce que les promoteurs d'autres sports devront arriver à faire et à vraiment comprendre.

Donner aux commanditaires un profil complet du spectateur-téléspectateur-participant.

Contrôler les circuits de distribution—sur place, radiotélévision, permis, communications, etc.

Démontrer la valeur des actifs.

Présenter les actifs de manière à en tirer les meilleurs revenus possibles—autrement dit, savoir comment mettre les actifs en vedette, ce qu'ils valent et comment maximiser ce potentiel.

Mettre l'accent sur le marketing plutôt que sur des aspects techniques et participer à des initiatives de marketing en collaboration avec les promoteurs d'autres sports et la communauté sportive.

• 1730

J'aimerais maintenant vous présenter très brièvement cinq grandes recommandations, et il y en a toute une série d'autres que nous vous ferions sûrement si nous avions plus de temps.

La première a trait aux incitatifs fiscaux, dont vous avez d'ailleurs parlé au cours de vos audiences. Il n'y a pas suffisamment d'encouragements pour la communauté du sport amateur. Des déductions d'impôt pouvant aller jusqu'à 200 p. 100 devraient être accordées pour les droits versés pour la commandite. De plus, ces déductions devraient comporter des taux variables de manière à avantager les sports moins connus et moins solidement établis. En outre, il faudrait qu'une distinction soit faite entre les organisations sportives à but non lucratif, ou le sport amateur, et les organisations à but lucratif, ou le sport professionnel.

Ces stimulants offriraient aux plus petites entreprises l'occasion de s'occuper de sport amateur étant donné surtout le fouillis qui règne actuellement sur le plan des commandites sportives et l'intérêt des consommateurs pour les programmes communautaires à saveur locale.

Des déductions d'impôt devraient aussi être offertes aux organisations de sport amateur qui investissent dans la recherche pour être mieux préparées lorsqu'elles vendent leurs produits à des entreprises. C'est la tendance générale que nous observons. La communauté sportive est incapable de faire valoir ses actifs aux commanditaires.

Notre deuxième recommandation concerne la création d'une fiducie canadienne des commandites. La communauté du sport amateur a besoin d'une ressource à laquelle puiser pour relever le niveau de son expertise de la commandite. Une fiducie canadienne des commandites serait une source de financement à laquelle les organisations satisfaisant à des critères prédéterminés auraient accès. Une gamme de fournisseurs qualifiés offrirait des services de commandite, de vente et de gestion des ventes. Les partenaires de la communauté sportive rembourseraient la fiducie lorsqu'ils auraient tiré des profits de la vente de commandites de manière à la regarnir. La fiducie aiderait les organisations à mieux faire la part des choses et à profiter de l'expertise intellectuelle transférée des agences à l'interne au fil des années. Ce concept pourrait également s'appliquer à d'autres organisations—par exemple à la communauté artistique.

La troisième recommandation est celle d'une société canadienne des sports. À l'heure actuelle, la communauté sportive est comme un navire sans gouvernail. La communauté du sport amateur n'a pas de porte-parole. Par surcroît, les sociétés la considèrent comme un prolongement du gouvernement. Elles hésitent à la financer en raison de son association avec le milieu gouvernemental.

L'idée serait de transférer le budget de 50 ou 60 millions de dollars de Sport Canada à une société non gouvernementale à but non lucratif chargée de la gestion des intérêts des secteurs public et privé dans la communauté du sport amateur, d'où l'idée d'une société canadienne des sports.

Une société canadienne des sports maximiserait l'accès des entreprises aux actifs de Sport Canada ainsi que le potentiel de revenu de ces actifs, qui sont actuellement sous-utilisés. La société faciliterait le développement du sport amateur comme partie intégrante du patrimoine culturel du Canada et serait le fer de lance du mouvement visant à repositionner le sport comme un service social important. Une société canadienne des sports fonctionnerait comme une entreprise et serait habilitée à utiliser comme levier financier les actifs actuels de Sport Canada: les Jeux du Canada, le Programme d'aide aux athlètes, les centres d'entraînement nationaux, etc.

Une société canadienne des sports aiderait d'autres partenaires de la communauté sportive à entreprendre des initiatives de marketing en collaboration pour aller chercher des revenus de commandite en faveur d'un programme national de sport amateur à caractère communautaire du genre de celui dont il a été question dans le rapport de 1992 intitulé Le sport, un pas d'avance.

La quatrième recommandation concerne la législation préventive. Il faudrait que les droits de la communauté du sport amateur soient mieux protégés et qu'elle soit à l'abri des empiétements des fédérations internationales. Il faudrait légiférer en vue d'interdire les activités des organismes internationaux qui ne bénéficient pas de la sanction, de l'approbation ou de la participation de l'organisme directeur de sport au Canada.

Prenons la relation de l'Association canadienne de patinage artistique avec l'Union internationale de patinage. Lors de son dernier congrès, l'Union a adopté un règlement qui lui permet de sanctionner une épreuve dans un pays, par l'intermédiaire d'une tierce partie, sans avoir obtenu l'autorisation de ce pays. Même si aucune mesure n'a encore été prise suite à ce règlement, il constitue une menace pour le potentiel de revenu de l'ACPA depuis son entrée en vigueur.

La cinquième et dernière recommandation dont j'aimerais vous parler aujourd'hui est celle d'une banque de recherche. D'après notre expérience, la communauté du sport amateur doit avoir accès à des renseignements à jour sur les consommateurs et les entreprises. De toute évidence, les organismes de sport ont de la difficulté à faire valoir l'importance de leur sport aux commanditaires et aux consommateurs. La banque de recherche consisterait en un fonds ou en un service qui faciliterait la mise au point de profils des caractéristiques de tous les sports, l'accumulation de données psychographiques sur les consommateurs, les enquêtes relatives aux attitudes et la mise à l'essai de nouveaux concepts d'activités et d'épreuves sportives. La banque de recherche est essentielle pour que les organismes puissent offrir au XXIe siècle des produits qui répondent vraiment aux besoins des consommateurs.

• 1735

En conclusion, nous croyons que le nouveau millénaire marquera un tournant pour la communauté du sport amateur. Elle aura besoin de se doter d'une image de marque forte qui soit crédible, de pouvoir offrir des programmes à l'échelle nationale et de se trouver un porte-parole. Mis à part le sous-comité sur le sport au Canada, et sans vouloir offenser l'AOC, aucun groupe n'est vraiment le porte-parole de la communauté du sport amateur.

Pour le moment, la Fédération canadienne du sport et le Centre canadien d'administration du sport et de la condition physique ont été à toutes fins utiles démantelés et la communauté sportive elle-même n'a pas comblé le vide sur le plan du leadership. Sans leadership, il sera impossible d'avoir une vision du sport. Le temps est venu de donner à la communauté du sport amateur les outils dont elle a besoin pour établir ses propres partenariats avec le gouvernement et le monde des affaires grâce à des concepts comme la société canadienne des sports.

Sinon, la communauté du sport amateur aura besoin d'acquérir une expertise en marketing, notamment la capacité de comprendre la valeur de ses actifs, de les mettre à profit et de développer des produits qui répondent aux besoins des consommateurs. Si vous deviez donner suite à une seule recommandation, notre conseil serait d'assurer à la communauté du sport amateur l'expertise en marketing qui servira de complément à ses capacités techniques de niveau international. À tout le moins, nous aurions ainsi un système qui répond aux besoins des consommateurs et satisfait aux demandes des participants, des spectateurs et des téléspectateurs.

Nous vous remercions de nous avoir écoutés et nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Thompson.

Monsieur Provenzano, la parole est à vous.

M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.): Ce sont là des concepts très intéressants. Je devrais peut-être me faire l'avocat du diable.

Le président: Allez-y.

M. Carmen Provenzano: La notion d'une société canadienne des sports qui gérerait et débourserait peut-être 100 millions de dollars est intéressante. Je trouve aussi intéressante l'idée d'une législation préventive qui, entre autres, interdirait aux organismes internationaux d'organiser des activités sans la sanction, l'approbation ou la participation de l'organisme directeur de sport au Canada.

Je pourrais vous répondre que cette législation associée à la création d'une société des sports contribuerait à l'établissement d'un monopole, à l'intronisation d'un tsar du sport qui exercerait une influence et un contrôle énormes sur le sport au Canada. Le seul fait de tenir les cordons de la bourse lui conférerait des pouvoirs immenses, non seulement celui de débourser des fonds au cours d'un exercice donné, mais aussi celui de contrôler la destinée de certaines organisations, voire même l'orientation du sport au Canada.

Quant à l'étude de cas que vous nous avez présentée, je pourrais vous répondre qu'il n'y a rien de mal à ce que l'Union internationale de patinage organise une épreuve ici au Canada sans la permission d'une fédération membre, l'Association canadienne de patinage artistique, je présume.

J'irais même jusqu'à dire que ça s'est fait ailleurs, dans le domaine du hockey. Dans le cas de l'Association canadienne de patinage artistique et de l'Union internationale de patinage, la distinction entre amateurs et professionnels est moins nette et je ne comprends pas vraiment bien les répercussions que cela pourrait avoir, mais deux équipes de la Ligue nationale de hockey viennent de disputer un match hors-concours au Japon. Je m'offusquerais s'il fallait obtenir la permission de la Fédération japonaise du hockey sur glace ou du gouvernement japonais pour louer un stade dans ce pays et y disputer un match.

• 1740

Il a aussi été question que des équipes de football et de basket-ball disputent des matches en Europe. Je m'offusquerais du fait que les équipes canadiennes doivent obtenir la permission de qui que ce soit si elles voulaient louer un stade dans n'importe quel pays pour y disputer une épreuve sportive et aller chercher des revenus pour être plus rentables.

Le type de législation dont vous parlez est un couteau à deux tranchants. J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet, surtout sur la possibilité de créer un monopole et un tsar du sport.

M. Chris Lang: Je pourrais me faire l'avocat du diable moi aussi et vous dire que je serais très surpris que la LNH n'ait pas eu à obtenir la permission de l'IIHF et de la Fédération japonaise du hockey sur glace pour disputer ce match au Japon. Je serais très surpris. Je suis certain qu'il lui a fallu l'obtenir.

M. Carmen Provenzano: J'aimerais bien le savoir moi aussi.

M. Chris Lang: Nous pouvons vérifier, mais je serais prêt à parier que c'est ce qui est arrivé parce que la LNH et l'IIHF sont partenaires aux Olympiques et n'empiéteraient pas sur le territoire l'une de l'autre.

Le problème, si on reprend l'exemple du patinage artistique, c'est qu'à l'heure actuelle les règles du jeu ne sont pas uniformes. Une seule organisation a un tel règlement au Canada, et c'est l'Association olympique canadienne.

Une loi a été adoptée au Canada en 1977—et Dick Pound y a été pour quelque chose—loi qui protège les droits de l'AOC et n'autorise pas le CIO à organiser des Jeux olympiques ici sans l'approbation de l'AOC. C'est le seul organisme directeur de sport au Canada qui jouit de ce droit qui est enchâssé dans une loi. Tous les autres évoluent sur un marché libre.

Il existe une loi semblable aux États-Unis à l'heure actuelle qui interdit aux fédérations internationales d'empiéter sur un territoire local. Ce n'est pas une question de monopole; elle a tout à voir avec le territoire. Qu'arriverait-il si une fédération internationale pouvait décider d'organiser une épreuve au Canada qui mettrait fin aux jours de la fédération canadienne? Ce n'est donc pas une question de monopole.

Je le répète, dans les sports, il doit y avoir certaines règles. Ce serait comme essayer de jouer au hockey sans règles. Il faut savoir quelles sont les règles du jeu.

Pour ce qui est d'accorder trop de pouvoir à une organisation, il y a déjà deux exemples que je pourrais vous citer au Canada. Il y a celui de l'Association de développement olympique de Calgary qui a eu droit à un pourcentage des revenus tirés des Olympiques; elle dispose d'un fonds important. Il y aussi l'Association canadienne qui gère le Trust Olympique du Canada. Il y a donc déjà en place des organismes qui ont des actifs et qui distribuent des fonds.

Je suis d'accord avec vous: c'est l'argent qui, dans une grande mesure, décide de tout. La préoccupation qui a été émise—assez timidement, je dois dire, par l'Association canadienne des entraîneurs—ce n'est pas que Sport Canada ne gère pas bien l'argent, mais qu'il serait peut-être préférable que les gens qui ont leur mot à dire sur l'affectation des fonds aient aussi collectivement leur mot à dire sur la façon dont ceux-ci sont distribués, qu'on procède de manière un peu plus démocratique. Notre idée, c'est que les fonds devraient être mis en commun. Cela ne veut pas dire que le gouvernement n'aurait aucun rôle à jouer. Il serait en quelque sorte un partenaire à part égale, au même titre que les fédérations, par exemple.

Je sais qu'on peut se faire l'avocat du diable et réfuter un argument. Il est parfois difficile de prendre un exemple en particulier pour prouver un principe. Loin de nous l'idée de prôner l'intronisation d'un tsar du sport qui tiendrait les cordons de la bourse et déciderait de la façon dont l'argent est dépensé.

Les Canadiens sont très démocratiques. Prenons, par exemple, la candidature de Toronto aux jeux de 2008. Je pense que le conseil est rendu à 96 et le comité exécutif à 16 et que les chiffres continuent à grimper dans les deux cas, ce qui est assez démocratique si on regarde qui sont tous ces gens. Et c'est chaque jour le tour d'un nouveau groupe de dire qu'il ne se sent pas concerné.

Il y a toujours eu beaucoup de démocratie dans le sport et je ne pense pas que le processus dont nous parlons y changerait quoi que ce soit.

M. Carmen Provenzano: Qu'arriverait-il des commanditaires qui ne voudraient pas se retrouver sous l'égide d'une société canadienne des sports?

M. Chris Lang: C'est ce qui arrive déjà. Je le répète, cette organisation ne s'occuperait pas nécessairement de commandite. Ce que nous voulons dire, c'est que si nous mettions les ressources, la recherche et les efforts de marketing en commun pour relever le niveau de tout le monde, nous serions plus forts.

Si vous vous reportez aux principales recommandations faites par le groupe de travail en 1968, vous verrez qu'elles disaient essentiellement qu'il fallait sortir le sport de la cuisine et se mettre sérieusement à parler affaires. Nous avons essayé de nous en remettre au Centre canadien d'administration du sport et de la condition physique et de faire bouger les choses du côté des entraîneurs, de changer les attitudes avec ParticipACTION et de faire le ménage dans le hockey en créant Hockey Canada.

• 1745

En fait, tout ça a déjà été fait. L'Association canadienne des entraîneurs existe toujours; Hockey Canada a fait son travail puis a disparu; le Centre canadien d'administration du sport et de la condition physique se laisse gagner par le sommeil; les fédérations sont de plus en plus fortes et certaines partent, comme celle du ski pour Calgary; et ParticipACTION existe toujours. Tout change constamment.

Je pense que s'il devait y avoir une incidence, ce serait en réalité une incidence positive sur la commandite. Comme Dan l'a indiqué, la difficulté que nous avons à l'heure actuelle dans le domaine du sport, c'est qu'un nombre beaucoup trop grand d'organisations parlent de ce qu'elles ont à offrir plutôt que des avantages que cela représente pour les commanditaires.

Aujourd'hui, les grandes entreprises... La situation est plus difficile pour elles aujourd'hui étant donné la valeur du dollar et la conjoncture économique et tout ce dont elles se plaignent. Parce que les choses sont plus difficiles pour elles, elles doivent en avoir pour leur argent. Donc, toute recommandation qui ferait qu'elles en auraient plus pour leur argent les inciterait à se montrer plus généreuses.

M. Carmen Provenzano: Merci, monsieur le président.

Le président: Monsieur Coderre, puis madame Tremblay.

[Français]

M. Denis Coderre: On travaille à l'étude de ce dossier depuis plusieurs mois.

[Traduction]

Le président: Un an.

M. Denis Coderre: Un an? Déjà?

[Français]

Ça passe trop vite! La raison pour laquelle on est ici, c'est qu'en 1969, on mettait sur pied un groupe de travail et qu'on se rend compte aujourd'hui que ce travail n'a toujours pas été fait presque 30 ans plus tard.

[Traduction]

Laissez-moi vous lire un extrait de la page 5, de la première partie de votre rapport:

    Le sport canadien traverse une période très difficile.

Est-ce que ça vous dit quelque chose?

    De nombreuses données recueillies au Canada et à l'étranger nous ont convaincus que seule l'aide du gouvernement fédéral nous permettra de surmonter bon nombre des problèmes auxquels le sport se heurte au Canada.

[Français]

Chaque fois que j'entends des témoins, et depuis le début de votre intervention, il y a trois concepts qui me viennent à l'idée:

[Traduction]

Le partenariat, le leadership et l'imputabilité. Je suis surpris de voir que tous ces témoins veulent notre argent et nous disent: «Laissez-nous faire le travail. Nous allons nous en occuper.»

[Français]

Étant donné que j'ai M. Sponsorship en face de moi, je me permets de lui demander s'il croit que la transition qu'il nous propose, nommément la corporation qu'il nous propose, consiste finalement à nous dire:

[Traduction]

«Nous nous y connaissons. Donnez-nous l'argent et nous allons nous en occuper.»

[Français]

Le problème que je constate depuis le début, c'est que d'une part, on parle de l'argent des contribuables et d'autre part, de corporations dont le but premier est de faire des profits. Si on veut s'assurer qu'il y ait un partenariat entre les corporations et l'argent des contribuables, pourquoi à ce moment-là ne pas créer un ministère du Sport, ou revenir au concept du ministère du Sport, et s'assurer qu'en respectant l'imputabilité, the accountability, on puisse vraiment établir un leadership? On pourrait ainsi s'assurer que toutes les erreurs des 30 dernières années ne se répéteront pas. En se penchant sur la situation actuelle et sur ce qu'a vécu le groupe de travail en 1969, on se rend compte qu'il faut effectivement qu'il y ait une politique et un leadership beaucoup plus serrés pour qu'on puisse répondre aux besoins, notamment du sport amateur. Je reviendrai au sport professionnel par la suite.

[Traduction]

M. Chris Lang: Cinquante deux des 54 recommandations du groupe de travail ont été mises en oeuvre. La seule qui ne l'a pas été concernait le droit à une déduction fiscale.

Je suis d'accord avec vous pour dire qu'on pourrait reprendre l'introduction du Comité d'étude sur les sports au Canada mais, soit dit sans vouloir vous offenser, je pense qu'on pourrait faire la même chose 30 ans plus tard dans n'importe quel domaine. Tout ce que ça veut dire, c'est que les choses changent, évoluent constamment. Ce que nous proposons, c'est de changer la manière de s'y prendre.

Je suis d'accord avec vous pour dire que ces trois mots—le partenariat, le leadership et l'imputabilité—sont importants, mais nous pensons qu'il serait préférable d'avoir un organisme autonome, de faire les choses un peu différemment.

Il faut mettre la chance de son côté pour réussir. Dans l'avion qui m'amenait ici aujourd'hui, j'étais assis à côté d'un homme...

Une voix: Vous feriez mieux de surveiller ce que vous allez dire.

M. Chris Lang: Oui, vous avez raison.

Des voix: Ah, ah!

M. Chris Lang: Vous n'avez pas arrêté de nous faire rire. Laissez-moi vous raconter une autre histoire. Je ne vous dirai pas le nom de cet homme, mais...

Des voix: Ah, ah!

• 1750

M. Chris Lang: C'était très intéressant, parce qu'il travaille pour une société d'État, une société de l'annexe III, je pense, qui gère les terres dont le gouvernement n'a pas besoin. Je crois que le gouvernement fédéral est le plus grand propriétaire foncier au Canada.

Une voix: La Société immobilière du Canada.

M. Chris Lang: Oui, la Société immobilière du Canada.

Je lui parlais de son travail. Le gouvernement a jugé bon de prendre les 11 millions d'acres que... C'est une organisation à but non lucratif qui achète les actifs. Elle les revend et fait des profits parce que c'est à elle que revient le bénéfice net.

C'est à peu près ce que nous proposons. Il y a donc un précédent, pour les terres et pas pour le sport, mais c'est quand même un précédent.

Le sport était à son apogée en 1976 lorsque nous avions un ministre des Sports; la première a été Iona Campagnolo, puis nous nous sommes désintéressés. J'imagine que le dernier ministre des Sports a été Otto Jelinek.

Mme Suzanne Tremblay: Jean Charest.

M. Chris Lang: Jean Charest, je suis désolé, après Otto Jelinek. Le sport a perdu de son importance et je ne sais pas où il se situe actuellement dans la structure.

Il y avait un certain nombre de joueurs à ce moment-là tant dans le secteur privé que le secteur public. Ce que nous proposons, c'est que vous les réunissiez tous à la même table, y compris le gouvernement, pour essayer de voir s'il ne serait pas plus efficace d'avoir un seul organisme.

Quant à savoir jusqu'où aller, s'il faut le privatiser entièrement ou en faire une société de l'annexe III, il y a des gens bien plus malins que nous pour en juger.

[Français]

M. Denis Coderre: Monsieur Lang, je crois que si on veut s'assurer qu'il y ait imputabilité et que le gouvernement joue pleinement son rôle de leader en adoptant une politique efficace—et là je parle en termes de policy—tant au niveau de l'éthique qu'à celui de la préservation du sport et même à celui de la proposition que vous faites sur les déductions fiscales, je pense qu'il est important...

Je dois vous avouer que quand on parle d'agences ou de sociétés de la Couronne, cela me donne de l'urticaire. Le problème qu'on voit de plus en plus, c'est que si on n'est pas capable d'avoir cette imputabilité ou accountability, on trouve des histoires d'horreur sur le terrain.

Je ne suis pas socialiste; je suis libéral. Si on veut s'assurer qu'il y ait un équilibre entre l'argent des contribuables et le rôle qu'un gouvernement, nommément les élus, peut jouer pour s'assurer qu'on respecte la politique canadienne et qu'on soit plus efficace au niveau du sport amateur, entre autres, il faut nécessairement qu'il y ait un lien gouvernemental beaucoup plus solide et serré que celui qu'on pourrait retrouver dans une société de la Couronne ou une corporation qui n'aurait plus rien à voir avec le gouvernement d'une certaine façon. Même si on désigne une personne pour siéger à un conseil d'administration, cela ne représente qu'un vote. Vous savez mieux que moi comment ça fonctionne. Cela ne veut pas dire que nous aurons nécessairement notre mot à dire.

Monsieur le président, je crois que pour assurer ce partnership, ce leadership et cette imputabilité, il faut des projets rassembleurs. Parlons de 2008 à Toronto, de 2010 à Québec et de la coupe du monde de soccer.

Le président: Oui, le soccer.

M. Denis Coderre: Oui, je passe mon message. Croyez-vous que cela pourrait être une façon d'assumer ce leadership et de le concrétiser par la suite dans une politique efficace, au niveau du sport amateur d'abord et par la suite au niveau du sport professionnel?

[Traduction]

M. Chris Lang: Je vais répondre à la première partie de votre question et laisser Dan répondre à la deuxième au sujet des jeux eux-mêmes et de l'impact qu'ils pourraient avoir.

Il s'agit de voir quelle forme cette société pourrait prendre. Nos recommandations concernaient le fond plutôt que la forme. La réalité qui se cache derrière ce que nous vous disons, c'est que le gouvernement fédéral ne joue pas un rôle assez fort dans le sport. Si vous voulez avoir un ministre des Sports et voir à quel point il peut être efficace, allez-y.

Les Américains contrôlent le sport à coups de lois. Ils terrorisent les organismes du sport professionnel et amateur. Chaque fois qu'ils vont trop loin, que font-ils? Ils les convoquent à Washington et menacent d'invoquer une loi anti-trust contre eux. Ils ont des lois là-bas que nous n'avons pas ici.

• 1755

Le fait est que vous ne jouez pas un rôle assez fort. De quelle structure auriez-vous besoin pour le faire? Nous n'avons pas les compétences qu'il faut pour vous le dire. Nous pensons simplement que vous devez davantage jouer le rôle d'un leader, mais en vous appuyant sur le partenariat. Les recommandations que nous vous avons faites concernent le fond, principalement du côté des commandites. Nous vous avons soumis les mesures qui, selon nous, sont nécessaires pour que le sport soit mieux financé.

Par ailleurs et pour reprendre ce que l'Association des entraîneurs vous a dit en réponse à une question que vous lui avez posée, je crois, au sujet de l'entraînement des athlètes, si on n'a pas la forme qu'il faut à un moment donné, on pourra faire tout ce qu'on voudra pour ce qui est du fond, mais ce sera peine perdue si le bon climat n'y est pas. Les entraîneurs ont dit qu'on leur enseigne toutes sortes de choses à propos de l'éthique, de la morale, des compétences et j'en passe, mais ils évoluent dans un milieu où ce n'est pas apprécié.

C'est en partie ce qui est arrivé et c'est pourquoi le sport amateur ne bénéficie pas du financement d'entreprises. Je ne dis pas qu'il y a un lien direct et nous n'essayons pas de blâmer le gouvernement. Ce n'est pas parce que nous n'avons pas de ministre ou de sous-ministre des Sports que ce n'est pas une grande priorité. D'après nous, si on pouvait faire remonter le sport sur la liste des priorités jusqu'au premier ou au deuxième rang et s'assurer qu'il y a en place un mécanisme fondé sur le partenariat, il serait possible d'obtenir plus de fonds.

L'Association des entraîneurs vous a dit qu'elle avait besoin de 40 millions de dollars, d'installations et de programmes d'entraînement. Nous vous disons quant à nous que vous devez investir dans le marketing. Vous allez devoir prétendre que vous êtes le bon Dieu et vous prononcer entre l'oeuf et la poule. Nous considérons que nous sommes la poule dans ce cas-ci: il faut d'abord avoir de l'argent pour pouvoir ensuite faire ce qu'ils réclament.

Le problème, c'est que le sport amateur n'est pas assez solide, d'un point de vue financier, au Canada pour pouvoir mettre de l'ordre dans ses propres affaires. C'est pourquoi nous sommes ici, en amateurs, en train de vous supplier de nous donner plus d'argent. Si j'étais vous, je poserais la question suivante: «Qu'avez-vous fait avec les actifs que vous avez? Essayez-vous de tirer la plus grande valeur commerciale possible de ce que vous avez?» Je pense que nous pourrions vous répondre ceci: «Nous avons besoin d'aide pour le faire.» Nous vous relançons donc la balle.

Je suis d'accord avec vous. Je suis fatigué moi aussi de voir le secteur privé constamment demander l'aide du secteur public. La structure est une chose que vous connaissez beaucoup mieux que nous.

Dan, pourriez-vous essayer de nous expliquer l'impact que les Jeux olympiques de 2008 ou de 2010 ou une Coupe du monde pourraient avoir sur le développement de la structure des sports?

M. Dan Thompson: Pour revenir à ce que vous disiez, une des raisons pour lesquelles nous avons proposé une société canadienne des sports, c'est que les grandes entreprises hésitent à donner de l'argent à tout ce qui s'apparente au gouvernement. C'est pourquoi nous avons besoin d'un organisme non gouvernemental.

Aussi, lorsque nous regardons les 50 à 60 millions de dollars que le gouvernement investit dans le sport, nous nous disons que ces actifs n'ont pas un effet de levier et ne peuvent pas en avoir un parce qu'ils sont trop près du gouvernement. Le programme d'aide aux athlètes coûte sept millions de dollars. Il pourrait y avoir création, parallèlement au programme d'aide aux athlètes, d'un programme faisant appel à la participation des sociétés, ce qui est impossible pour le moment à cause de la structure actuelle. C'est la même chose pour les centres d'entraînement nationaux.

Nous ne proposons pas la création d'une société qui n'aurait aucun compte à rendre et qui ferait la pluie et le beau temps. Si vous deviez donner à une société ou à un groupe accès à 50 ou 60 millions de dollars, ce serait à certaines conditions. Nous comprenons votre point de vue et cela faisait partie du marché. Mais s'il existait une entité pouvant se faire le porte-parole de la communauté sportive, il y aurait une plus grande continuité lorsque nous irions parler en faveur de certains des programmes les plus importants, comme les Olympiques ou les installations qu'il faudra aménager, etc.

Les sociétés seraient peut-être prêtes à donner et cet organisme pourrait inciter les Canadiens qui veulent faire une contribution au Canada à le faire.

M. Chris Lang: Il est ironique que la ville de Toronto doive réussir à recueillir 40 millions de dollars pour poser sa candidature aux Jeux olympiques de 2008 et que le secteur privé et les trois groupes du secteur public se disputent pour savoir qui va payer. Personne n'est prêt à investir et, pourtant, l'impact économique serait de deux milliards de dollars.

Le projet n'a peut-être pas été bien présenté, mais on devrait pouvoir arriver à prouver qu'il est rentable. Il faudrait s'appuyer sur des faits. On s'arrête trop aux détails. Va-t-il avoir un impact économique? Aura-t-il une influence sur le pays d'un point de vue culturel? Quel sera l'impact financier? On devrait pouvoir arriver à faire une analyse de rentabilisation qui montre qu'un investissement de 40 millions de dollars vaut la peine.

• 1800

Sans vouloir vous contredire, les trois paliers de gouvernement consacrent plus de 40 p. 100 du PIB à toutes sortes d'investissements. Pourquoi le sport n'est-il pas un investissement valable? Nous ne sommes peut-être pas arrivés à vous le prouver, mais vous ne nous l'avez pas demandé non plus. À qui est-ce la faute? Nous sommes tous à blâmer.

Le sport nous appartient à tous. Votre devoir de législateurs est de nous dire: «Prouvez le bien-fondé de votre requête. Arrêtez de venir nous demander l'aumône.» Et ce serait à nous de vous dire: «Vous avez manqué le coche. Vous dépensez pour toutes sortes de choses qui sont loin d'avoir le même impact social et économique.» Et j'espère que nous pourrions arriver à vous le prouver.

À vrai dire, nous n'avons pas l'information qu'il faut pour vous le prouver et vous allez peut-être nous répondre que nous parlons pour parler. Je sais cependant que les Championnats mondiaux de patinage artistique qui vont avoir lieu à Vancouver en 2001 auront un impact économique d'au moins 10 millions de dollars. On va pouvoir se servir de cet argument comme levier pour inciter la ville et la province à investir et on a déjà réussi d'ailleurs à obtenir une certaine somme d'argent de la ville.

Nous n'arrivons pas très bien dans le domaine du sport—tant professionnel qu'amateur—à faire valoir le bien-fondé de ce que nous faisons. Nous passons trop de temps à parler de sport comme tel au lieu de parler d'affaires.

Le président: Madame Tremblay.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Dans le même ordre d'idées que mon ami de Bourassa, j'aimerais soulever un élément de crainte de plus face à une société canadienne des sports: chat échaudé craint l'eau froide. Quand ça fait partie du Canada, on a du mal à avoir du bilinguisme; quand ce sera complètement autonome, comment pourra-t-on nous garantir le respect des deux langues? On a déjà vu toutes les difficultés qu'éprouvent certains athlètes à s'entraîner ici et là-bas, et à être sélectionnés pour faire partie des équipes. Certains ont été obligés de se présenter devant des juges. Ça me fait énormément peur, cette autonomie totale et cette absence d'imputabilité. Cette question d'imputabilité me préoccupe beaucoup.

Quel argument invoque-t-on pour supprimer l'imputabilité? Qu'en pensez-vous? Pourquoi est-ce comme ça?

[Traduction]

M. Chris Lang: Nous ne proposons pas une pleine autonomie, mais laissez-moi d'abord répondre à la première partie de votre question.

Le Québec représente 30 ou 35 p. 100 du marché canadien. Si le secteur privé doit financer le projet en partie et que des entreprises s'intéressent à ce marché, je ne vois pas en quoi le bilinguisme pourrait poser un problème. Je pense que ce serait plutôt le contraire. On pourra mieux garantir le respect des deux langues, parce que je pense que les grandes entreprises cherchent l'occasion de vendre leurs produits au Québec, et le sport en fait partie. C'est pourquoi je dis que ce serait plutôt le contraire.

J'ai l'impression que nous nous arrêtons trop ici à la forme de notre recommandation au détriment du contenu. Nous n'avons pas les compétences qu'il faut pour parler... Nous vous avons fait valoir que le sport est un actif national et que le partenariat est le meilleur moyen de le mettre en valeur. Comment favoriser ce partenariat, avec quel mécanisme? Nous ne le savons pas trop au juste, mais nous avons besoin d'un plus grand partenariat.

Vous êtes beaucoup mieux placés que nous pour essayer de voir la forme qu'il pourrait prendre. Vous y excellez, comme législateurs. Nous vous avons présenté une proposition. Nous avons eu l'idée d'une société. Nous vous avons exposé notre philosophie d'un partenariat et la façon dont il pourrait fonctionner. Je sais que nous avons beaucoup de mal ici à faire en sorte que ça fonctionne, mais je peux vous dire que c'est le cas dans le domaine du sport. Nous faisons parfois des erreurs, mais le partenariat fonctionne habituellement pour le sport. De manière générale, si vous preniez les équipes, vous verriez que les deux sexes y sont habituellement bien représentés, que la langue...

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Si on créait une société canadienne des sports, serions-nous les premiers à prendre une telle initiative ou est-ce que ce modèle existe ailleurs?

[Traduction]

M. Chris Lang: Nous pourrions prendre l'Australie comme modèle. Les États-Unis ont un modèle différent. Nous pourrions examiner tout ce qui se fait ailleurs dans le monde, mais il nous faudrait concevoir notre propre modèle qui soit adapté à notre propre situation.

Les États-Unis ont un modèle entièrement différent. Le gouvernement fédéral n'investit pas directement dans le sport. Il facilite la tâche, il cajole et il adopte des lois, mais ce sont surtout le système d'éducation et le Comité olympique américain qui financent le sport aux États-Unis, et les organismes directeurs de sport vont chercher ce qu'ils peuvent. Ils ont un modèle différent et l'Europe a elle aussi son propre modèle.

Nous pourrions examiner d'autres exemples, mais il faudrait veiller à ce que nous trouvions une solution vraiment canadienne. Une autre caractéristique typiquement canadienne, à part d'être une mosaïque et de toujours protéger nos arrières, c'est que nous avons tendance à aller voir ailleurs. Nous avons tendance à penser, pour des raisons étranges, qu'il faut aller voir ailleurs pour réussir. Pourquoi ne pas trouver notre propre solution?

• 1805

Nous nous en sommes très bien tirés dans les sports. Malgré les problèmes dont nous avons parlé, nous avons été très performants à Nagano. Nous nous en tirons très bien, mais nous pourrions faire beaucoup mieux encore si nous arrivions à nous serrer les coudes. Oui, allons voir ce qui se fait ailleurs, mais essayons ensemble de trouver une solution qui soit vraiment canadienne.

Le gouvernement fédéral doit jouer le rôle d'un leader et, soit dit sans vouloir vous offenser, vous ne jouez pas pour le moment un rôle aussi grand que celui que vous pourriez ou devriez jouer.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Votre proposition qui porte sur la création d'une société canadienne des sports ressemble à une proposition que nous a présentée l'Association canadienne des entraîneurs. C'est pourquoi je vous demandais si une telle société existait ailleurs. Je désirais savoir si nous faisions preuve d'originalité. Par contre, j'ai vu dans l'autre proposition des éléments qui m'inquiètent encore bien plus, dont la proportion de membres qui votent, etc. On n'entrera pas dans tous ces détails à cette heure-ci, mais c'est un pensez-y-bien.

[Traduction]

Le président: Notre dernier intervenant aujourd'hui sera M. Mark.

M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

Je veux poursuivre dans le même ordre d'idées. Au Manitoba, nous avons un ministre provincial responsable des Sports. Vous avez recommandé la création d'une société canadienne des sports. Est-ce que vous préféreriez cette solution à la nomination d'un nouveau ministre des Sports au niveau fédéral?

M. Chris Lang: On nous avait demandé de venir vous présenter nos observations du point de vue de la commandite. Comme Dan vous l'a indiqué, il y a des limites à...

Le gouvernement fédéral est propriétaire de certains des plus grands actifs du sport, comme le programme d'aide aux athlètes, et il a des intérêts dans les centres d'entraînement nationaux. Il pourrait trouver des commanditaires, mais c'est difficile pour lui parce qu'il est justement le gouvernement. Vous avez donc des actifs que vous ne mettez pas en valeur.

C'est un argument qui milite contre lui. D'autres arguments militent peut-être en sa faveur. Nous n'avons pas la compétence qu'il faut pour examiner toutes les options. Selon nous, il faut qu'il y ait un partenariat et que le gouvernement fédéral joue un rôle de premier plan. Il pourrait y avoir un ministre des Sports et le marketing pourrait venir de l'extérieur, mais je ne connais pas au juste les mécanismes.

La question à se poser est la suivante: comment arriver à faire ce que nous essayons de faire? On nous a demandé de venir vous proposer des solutions pour que le sport, professionnel et amateur, soit mieux financé. Nous vous avons dit que le mécanisme actuel s'y prête mal pour le moment compte tenu surtout du fait que vous êtes propriétaires de certains actifs.

Dan, pourriez-vous...

M. Dan Thompson: Je ne pense pas non plus que le système sportif arrive à aller chercher le capital intellectuel qui existe actuellement dans le monde des affaires canadien. Des gens très puissants et bienveillants aimeraient intervenir dans le système sportif. Ce serait pour eux un excellent moyen de transformer la communauté sportive.

Je ne pense pas que nous leur ayons donné... Ils peuvent le faire par l'entremise de différentes associations et des conseils d'administration d'organismes omnisports, mais il n'existe pas de mécanisme à l'échelle nationale pour créer une vision nationale des sports et un plan national. Ce serait un outil très puissant.

M. Chris Lang: Comme je l'ai dit à votre président, ce que vous devriez faire pour avoir plus de renseignements, c'est convoquer Dick Pound. C'est l'homme le plus puissant du domaine du sport au Canada et probablement un des cinq plus importants dans le monde. Il connaît tous ces systèmes. Demandez-lui de venir vous rencontrer. Il a aussi eu un rôle à jouer dans la loi de 1977. C'est un avocat et il pourrait donc vous parler d'imputabilité et d'autres choses du genre.

Nous sommes peut-être allés trop loin en vous recommandant des structures. Nous avons essayé de vous proposer des moyens d'amener des commanditaires à investir dans le sport. En fait, l'argent qu'ils y investissent permet en fin de compte de rejoindre le consommateur. Que ce soit le public ou les sociétés qui donnent, c'est pour la même raison. C'est dans ce sens-là que nous vous avons fait nos recommandations.

Nous n'avons pas les compétences techniques qu'il faut. Nous ne connaissons pas assez bien le système sportif et nous ne nous en occupons pas beaucoup non plus. Nous sommes en marge. Nous l'observons du point de vue du marketing. Nous vous avons proposé des moyens pour que les ressources investies dans le sport soient utilisées à meilleur escient d'une manière légèrement différente de la façon dont elles le sont actuellement.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Lang et merci aussi à votre collègue.

• 1810

Je tiens à vous dire, monsieur Lang, que vous devriez être fier que le comité essaie de faire fond sur les travaux auxquels vous avez participé à la Chambre des communes il y a 30 ans. Nous vous en remercions une fois de plus et nous vous remercions de nous avoir présenté vos vues aujourd'hui. Ça nous a fait grand plaisir.

La séance est levée.