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SINS Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON THE STUDY OF SPORT IN CANADA OF THE STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE

SOUS-COMITÉ SUR L'ÉTUDE DU SPORT AU CANADA DU COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 28 octobre 1998

• 1541

[Traduction]

Le président suppléant (M. Denis Coderre (Bourassa, Lib)): Bienvenue tout le monde. Nous avons le quorum, soit trois députés, et nous pouvons donc entendre des témoins.

Comme vous le savez, il y a beaucoup de comités qui se réunissent à la même heure. Ne vous inquiétez pas, d'autres députés arriveront dans cinq ou 10 minutes. Ils rateront la partie la plus intéressante de la réunion, mais ce qui compte, c'est que nous sommes suffisamment nombreux pour entendre les témoins.

Nous accueillons cet après-midi M. Nolan et Mme Tremblay.

Après ma première entrevue à CPAC sur les sports, j'ai reçu un appel d'un représentant des Premières nations. Il m'a dit que les Premières nations participent beaucoup aux sports et que les sports et loisirs représentent une question très importante pour les Premières nations.

C'est pourquoi nous sommes très heureux et très fiers de vous accueillir cet après-midi pour discuter de la question. Vous représentez un élément très important pour le Canada. C'est pourquoi nous sommes très heureux de vous accueillir.

Nous avons quelque chose en commun: nous n'aimons pas beaucoup les Sabres. Nous espérons, monsieur Nolan, que vous redeviendrez le plus vite possible entraîneur à la Ligue nationale de hockey. Nous avons beaucoup apprécié votre travail et nous serons très fiers de vous voir assumer à nouveau ces responsabilités.

Comment voulez-vous procéder?

M. Ted Nolan (représentant, Assemblée des premières nations): Je commencerai par mon exposé, puis nous pourrons passer à la période des questions.

Je pensais qu'il y aurait un haut-parleur. Ma voix ne porte pas beaucoup; vous devrez donc tendre l'oreille.

J'aimerais tout d'abord remercier le président et les membres du Sous-comité sur l'étude du sport au Canada de m'avoir invité aujourd'hui. Il importe que le gouvernement collabore avec les organisations autochtones pour appuyer et améliorer la participation des Autochtones aux activités sportives.

Je vous présente aujourd'hui deux points de vue. Celui de l'Assemblée des premières nations et mon opinion personnelle à titre d'athlète et d'entraîneur membre d'une Première nation.

Afin de bien décrire les circonstances que vivent les jeunes Autochtones, j'aimerais citer un passage du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones.

    L'immense majorité des jeunes Autochtones éprouvent beaucoup de difficultés à simplement survivre. Ils sont tiraillés entre les attentes, les valeurs et les demandes de deux mondes et sont incapables de trouver un équilibre. Leur désespoir se traduit par un décrochage précoce, l'usage de drogues et d'alcool, les tentatives de suicide, le mépris de la loi et des grossesses précoces... Malheureusement, il n'existe guère de possibilités d'emploi pour ceux qui quittent l'école.

Les statistiques indiquent clairement que les membres des Premières nations ont un désavantage distinct si on les compare à l'ensemble de la population canadienne en ce qui a trait aux niveaux d'alphabétisation, au niveau d'achèvement des études secondaires, aux taux de chômage, aux niveaux de revenu et au taux d'achèvement des études universitaires.

Ainsi, 73,3 p. 100 des membres des Premières nations âgés entre 15 et 49 ans ont quitté l'école secondaire avant de terminer leur douzième année. Seulement 25 p. 100 de ceux qui sont âgés entre 15 et 25 ans qui ont décroché retournent plus tard à l'école secondaire. Quelque 13,4 p. 100 suivent des cours d'éducation aux adultes et 63 p. 100 ne retournent jamais aux études. Cela démontre clairement qu'il existe un besoin critique chez les Premières nations.

• 1545

Les statistiques démontrent que la population augmente et que le pourcentage de jeunes chez les Autochtones augmentera donc également. Par exemple, 64 p. 100 des Indiens inscrits qui vivent dans une réserve au Canada sont âgés de moins de 30 ans, alors que ce taux s'élève à 40 p. 100 pour le reste de la population canadienne. Les enfants autochtones de moins de 14 ans représentent 38 p. 100 de la population, alors que ce taux n'est que de 19 p. 100 pour l'ensemble de la population canadienne.

Il importe également de noter que 45 p. 100 de tous les Autochtones de moins de 25 ans vivent hors réserve, dans des centres urbains. Ainsi, les programmes sportifs et récréatifs doivent atteindre les jeunes qui vivent sur les réserves et à l'extérieur de celles-ci. Cela fait ressortir encore plus le besoin marquant qui existe dans nos collectivités.

Lorsque j'étais jeune, on me posait une question bien simple: comment es-tu devenu joueur de la Ligue nationale de hockey? Comment es-tu devenu entraîneur? Je répondais en disant simplement que j'étais comme n'importe quel autre petit Canadien qui vivait dans une petite ville. J'ai patiné sur des rivières et sur des étangs, j'ai joué au hockey dans la ligue mineure dans la ville, et j'ai été recruté par la Ligue nationale de hockey. Mais après avoir pensé à la question, je me suis rendu compte que ce n'était pas là la vie du jeune Canadien moyen, en raison de la vie que mènent nombre de jeunes qui vivent dans des collectivités autochtones.

Je me souviens encore du moment où j'ai quitté la réserve pour la première fois; j'avais 16 ans. Je pleurais pratiquement tous les soirs quand je me couchais, en raison du racisme dont j'avais été victime et en raison des injures qui m'avaient été adressées; de plus, je n'avais pas le meilleur matériel, et il y avait toutes sortes d'autres problèmes. Il n'a pas été facile de me rendre jusqu'à la Ligue nationale de hockey.

Moi j'ai été chanceux et j'ai pu surmonter certains de ces obstacles; cependant, il y en a des milliers et des milliers qui n'ont pas cette chance.

C'est justement ce dont nous parlons ici aujourd'hui—donner aux jeunes de toutes les races, tout particulièrement les jeunes Autochtones, une chance.

L'Assemblée des premières nations croit que les programmes sportifs et récréatifs représentent une voie saine et positive pour assurer le développement des jeunes Autochtones. Je suis parfaitement d'accord avec cette position. Pour ce qui est des sports, nous avons la même vision pour les jeunes et les enfants autochtones, qu'ils vivent dans les réserves ou à l'extérieur des réserves.

Nous aimerions que les collectivités des Premières nations aient accès à des établissements sportifs. Nous voudrions que des programmes sportifs et récréatifs de qualité soient offerts à nos jeunes, des tout-petits jusqu'aux jeunes adultes. Nous voudrions que nos jeunes commémorent le rôle traditionnel que les sports ont joué dans la culture des Premières nations et qu'ils sachent qui sont les grands sportifs et les grands représentants des sports chez les Premières nations.

Nous voulons que les jeunes Autochtones soient physiquement actifs, qu'ils soient en santé et bien équilibrés, qu'ils sachent qui ils sont et qu'ils soient fiers d'eux-mêmes; nous voulons qu'ils aient une attitude positive à l'égard de la vie en général; qu'ils puissent être des chefs de file; qu'ils sachent qu'ils ont un avenir et qu'ils soient conscients du fait qu'ils peuvent jouer un rôle important dans leurs collectivités et dans leur pays.

Nous voudrions que la participation au sport soit un choix de carrière viable pour ceux dont c'est le rêve. Nos jeunes peuvent devenir des athlètes, des entraîneurs, des officiels ou des directeurs de services récréatifs.

Nous voudrions que les athlètes des Premières nations puissent participer à des activités sportives de calibre plus élevé.

Lorsque vous parlez d'établissements ou d'installations—pour en revenir à une question à laquelle je réponds souvent—je dois avouer que j'ai joué sur des rivières ou des étangs et que j'ai joué au hockey pour m'amuser. Lorsque je suis allé à mon premier camp de hockey je regardais tous les joueurs des diverses villes et collectivités; la chose dont ils parlaient souvent, c'était les installations auxquelles ils avaient accès dans leurs collectivités—leurs entraîneurs, les établissements.

Ils parlaient sans cesse de la puissance de leurs jambes, d'haltérophilie, de vitesse, d'efforts musculaires explosifs, et de toutes sortes de choses de ce genre, parce que leur rêve était de devenir joueur de hockey professionnel. J'avais ce même rêve quand j'étais petit garçon, mais malheureusement je n'avais pas accès aux mêmes installations et services qu'eux.

Je suis retourné à la maison et j'ai fait mon propre programme d'entraînement. Nous avions une voie de chemin de fer derrière chez moi, et il y avait des collines et beaucoup d'arbres. Je courais sur cette voie tous les jours, pour avoir des pieds très rapides. Je ne ratais pas une seule traverse. Je marchais sur le rail pour avoir un bon équilibre. Je montais ces montagnes en courant pour avoir des jambes fortes. Je coupais des arbres au lieu de faire de l'haltérophilie. Mais ce n'est pas tout le monde qui pouvait faire cela.

• 1550

Pour chaque personne comme moi qui a été très chanceuse ou qui a gagné sa vie en pratiquant un sport, il y en a des milliers qui n'y parviennent pas. C'est justement ce dont nous parlons, tout au moins de donner aux jeunes cette chance, et d'avoir des installations et des établissements de sport où ils peuvent aller s'entraîner comme les autres jeunes au Canada.

Ainsi, l'Assemblée des premières nations, afin d'assurer qu'on puisse atteindre ces objectifs, appuie l'Aboriginal Sport Circle, qui a été mis sur pied par l'APN en 1991. L'Aboriginal Sport Circle est le porte-parole des groupes sportifs et récréatifs provinciaux, territoriaux et autochtones.

Cette organisation nationale appuie les programmes sportifs et récréatifs afin de favoriser des modes de vie actifs et sains pour les Autochtones canadiens. Elle appuie les Autochtones qui cherchent à exceller grâce au sport. Les programmes sportifs et récréatifs sont une solution de rechange à l'abus de l'alcool et des drogues. Ils empêchent l'ennui, et créent un climat où les jeunes et les collectivités peuvent apprendre et s'épanouir ensemble.

L'Aboriginal Sport Circle a élaboré une stratégie nationale pour le développement des sports chez les Autochtones qui cible les priorités suivantes: le développement d'entraîneurs chez les Autochtones; les jeux autochtones de l'Amérique du Nord; et des organismes sportifs autochtones provinciaux, territoriaux et nationaux.

Je vous ai remis le document qui a été préparé par l'Aboriginal Sport Circle.

Nous exhortons le comité à retenir les recommandations suivantes.

Comme on l'a proposé dans le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, nous recommandons que le gouvernement fédéral forme et finance un conseil consultatif autochtone des sports et des loisirs qui serait chargé de conseiller tous les paliers de gouvernement sur la meilleure façon de répondre aux besoins des Autochtones en matière de sports et de loisirs.

Nous recommandons également qu'une stratégie nationale sur les jeunes Autochtones soit élaborée afin de remplacer l'approche fragmentée actuelle dans le cadre de laquelle les Autochtones doivent chercher à obtenir des renseignements et présenter des propositions à plusieurs ministères fédéraux. Les jeunes Autochtones doivent être visés par des programmes spéciaux et distincts.

Nous recommandons que le gouvernement du Canada appuie les priorités et recommandations formulées par les jeunes Autochtones dans notre mémoire, et présentées dans la stratégie nationale pour le développement des sports autochtones préparée par l'Aboriginal Sport Circle.

Les questions dont nous avons parlé aujourd'hui sont très importantes. Je vis dans une petite collectivité du Nord de l'Ontario, et je vois certaines des choses absolument inadmissibles que vivent nos jeunes. Je suis convaincu que tous ceux qui sont ici aujourd'hui concéderont que les sports représentent un mode de vie sain pour tous; en fait nous vous demandons simplement de donner à nos jeunes la chance non pas nécessairement de devenir des athlètes professionnels—en fait si certains deviennent des athlètes professionnels, tant mieux—mais tout au moins de leur donner la chance d'être fiers d'eux-mêmes, de faire partie d'une équipe. Parce que les sports vous enseignent beaucoup de choses sur la discipline, les sacrifices et toutes sortes de bonnes choses.

Je tiens à remercier le président et le sous-comité de m'avoir écouté aujourd'hui. Je suis maintenant disposé à répondre aux questions.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Merci beaucoup, monsieur Nolan.

J'aimerais poser quelques questions avant de laisser la parole à d'autres députés.

Serait-il juste de dire qu'il faut repartir à zéro en ce qui a trait aux collectivités autochtones et à Sport Canada? Que fait Sport Canada pour vous aujourd'hui?

• 1555

M. Ted Nolan: Il est peut-être juste de dire qu'il faut partir à zéro, parce que certaines collectivités n'ont absolument rien.

Je laisserai Paulette lire sa déclaration.

Mme Paulette Tremblay (directrice de l'éducation, Assemblée des premières nations): Merci.

Je suis une Mohawk de la bande indienne des Six-Nations. J'ai été élevée sur la réserve. Comme c'était le cas de la communauté de Ted, nous avions très peu d'installations. J'ai joué à la crosse dans les champs. On se contentait d'étangs et de rivières pour patiner. Je n'ai jamais été une athlète; je m'intéressais plutôt aux études.

Nous avons compilé certaines statistiques à partir de notes que le MAINC nous a fait parvenir. Je crois que ces chiffres sont très importants pour vous permettre de vraiment comprendre les conditions. Il y a plus de 700 réserves au Canada; les dernières statistiques du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien révèlent qu'il n'y a que 131 arénas dans ces collectivités. Dans ces 700 collectivités, il n'y a que 40 gymnases, et seulement trois piscines intérieures.

Sur les 706 centres récréatifs et culturels, 40 p. 100 sont en piètre état alors que 44,5 p. 100 sont en assez bon état. Cela veut dire que la moitié sont en mauvais état. Quant aux autres ils n'ont pas encore été inspectés; donc nous ne savons pas en quel état ils sont.

Sur les 163 centres d'accueil pour les jeunes, 30,5 p. 100 sont en piètre état, alors que 47 p. 100 sont en bon état ou sont neufs. Encore une fois, certains n'ont pas encore été évalués.

Ces données indiquent simplement qu'il faut absolument avoir plus d'installations récréatives, et de meilleures installations, sur les réserves.

De plus, et je parle ici du point de vue d'une femme, je crois qu'il faut absolument faire la promotion des sports chez les jeunes femmes autochtones. S'il y a des installations où l'entraînement peut avoir lieu, cela rend déjà la tâche un peu plus facile.

Il faut commencer au niveau communautaire, parce que c'est à ce niveau que les jeunes sont exposés aux services disponibles. S'il n'y a pas de services ou d'installations—et il est clair que dans ce cas il n'en existe pas—il doit y avoir un premier jalon. Un autre premier jalon serait la création de programmes et de camps sportifs et récréatifs auxquels ces jeunes pourraient avoir accès.

Je sais que l'Aboriginal Sport Circle est en contact avec Sport Canada à cet égard; ils travaillent très fort sur ce dossier. Je ne peux pas vous donner de plus amples détails, mais il se peut qu'on en parle dans leur document. Je sais qu'il est très difficile de faire avancer ce dossier. La tâche n'a pas été facile.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Quels sont les rapports qui existent entre l'Aboriginal Sport Circle et Sport Canada par exemple? Y a-t-il des contacts? Faites-vous plutôt affaire avec le ministère des Affaires indiennes? Comment cela fonctionne-t-il?

Mme Paulette Tremblay: Nous avons fait du lobbying pendant plusieurs années, et, en 1991, l'Assemblée des premières nations a présenté une résolution faisant état du besoin réel de constituer une organisation autochtone dans ce domaine. Ainsi, l'Aboriginal Sport Circle a été mis sur pied. Je crois que cette organisation ne reçoit qu'environ 200 000 $ par année pour fonctionner. C'est là une partie du problème—le financement est très limité. Que pouvez-vous faire avec ce montant? Pas grand-chose.

Tout cela touche les sports. Je sais qu'on essaie d'établir un lien entre les deux organismes. Les contacts ont été limités.

C'est tout ce que je peux vous dire.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): D'accord.

Voulez-vous ajouter quelque chose, monsieur Nolan?

M. Ted Nolan: Nous parlons des mécanismes d'appui et de choses de ce genre. J'ai participé au secteur des sports professionnels pendant plusieurs années. Je ne m'oppose pas à la façon dont les choses se déroulent actuellement; je dis simplement qu'à l'occasion on veut bien avoir les mêmes chances que les autres.

Vous savez, il y a un bon nombre d'athlètes professionnels européens qui viennent au Canada. Quand j'étais joueur de hockey, et même à titre de témoin, j'entendais les gens dire: écoutez, donnez-leur le temps de s'adapter à la façon dont on joue; laissons-les s'adapter à la culture; donnons-leur le temps de s'adapter à la langue; donnons-leur le temps de s'adapter avant de nous prononcer.

Nombre des enfants qui viennent des collectivités autochtones ont beaucoup de talent pour certains sports. Ils arrivent peut-être en retard à une pratique en raison de l'endroit où ils vivent, parce que les Indiens n'ont pas la même heure: vous arrivez quand vous arrivez. Ils ne savent pas très bien comment la culture fonctionne à l'extérieur de la collectivité, mais nous ne leur donnons pas la chance de s'adapter. Nous ne leur donnons pas suffisamment de temps.

Toutes les suggestions que nous formulons ici aujourd'hui sont très importantes. Étudier le taux de chômage, le taux de décrochage scolaire des jeunes. Je crois que les sports et les programmes sportifs et récréatifs pourraient permettre d'améliorer cette situation.

• 1600

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Merci.

M. Mark posera la première question.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Merci, monsieur le président.

Merci d'être venus nous rencontrer cet après-midi. Les Canadiens sont certainement fiers de tout ce que vous avez accompli, monsieur Nolan, comme joueur, et certainement comme premier entraîneur autochtone de la Ligue nationale de hockey. Vous avez tous les atouts nécessaires pour être un modèle pour tous les jeunes du Canada, pas simplement les jeunes Autochtones.

Ma circonscription compte 13 réserves. J'appuie la recommandation qui a été présentée dans votre rapport, soit qu'il faut absolument améliorer l'infrastructure de ces collectivités, pas simplement les arénas et patinoires, mais tout le système d'infrastructure.

Un des chefs de ma circonscription, le chef Murray Clearsky, est un leader visionnaire. En fait, il a acheté une franchise de la Ligue de hockey junior du Manitoba—c'est ma province—cette année, parce qu'il comprend l'importance des sports et l'impact qu'ils pourraient avoir sur le développement humain dans sa propre réserve.

Mes questions portent sur le sujet qu'a abordé le président; comme vous le savez, nous dépensons déjà, je crois, entre six et sept milliards de dollars dans le budget du ministère des Affaires indiennes. Un de nos problèmes, c'est qu'il nous faut déterminer à quoi cet argent sert, et décider à quoi il devrait servir, par exemple, pour construire de nouvelles installations, pas simplement pour les loisirs, mais pour d'autres choses. Comment déterminer les priorités?

De plus, le milieu dans lequel vivent les Autochtones en région urbaine est complètement différent de celui que connaissent ceux qui vivent dans les réserves. Au Manitoba, mon exemple, 80 p. 100 des Autochtones vivent dans la ville de Winnipeg—il s'agit donc probablement là de la plus grosse réserve au Canada.

Comment assurer l'accès aux Autochtones qui vivent dans des endroits comme Winnipeg?

Mme Paulette Tremblay: J'essayerai de répondre à vos deux questions.

Tout d'abord, vous demandez si la création d'installations fait partie des priorités de financement du ministère. Les chiffres que je vous ai donnés à l'égard des installations proviennent du ministère des Affaires indiennes. Je sais que la priorité cette année, et pour les prochaines années, et le ministère l'a dit, sera le financement du logement, en raison de piètres conditions de logement et de vie. Les montants supplémentaires, s'il y en a, seront affectés à des choses comme les égouts, etc., plutôt qu'au secteur des loisirs.

Je ne m'attends vraiment pas qu'on trouve des sous pour financer la création de nouvelles installations récréatives tant qu'on n'aura pas réglé la pénurie de logements. Je sais que le ministre Martin a clairement indiqué que le logement était une priorité; le ministère cherchera à éliminer la pénurie. Ainsi, les montants réservés aux travaux d'infrastructure et à l'aménagement d'installations seront affectés à ces secteurs.

Pour ce qui est du milieu urbain, c'est absolument différent. Je sais que Patrimoine Canada se fait le chef de file d'un programme pour les jeunes en milieu urbain, lancé en collaboration avec les centres urbains pour les jeunes, utilisant les services de centres urbains hors réserve, dans les collectivités comme Winnipeg; on cherche à créer des centres qui sont plus axés sur la recherche d'une carrière, le counselling, et certains services récréatifs. Ce serait peut-être un bon départ, d'utiliser ce qui se produit déjà.

L'Assemblée des premières nations a déjà rencontré à plusieurs reprises les représentants de Patrimoine Canada. Nous avons suggéré qu'on exploite justement ces débouchés, mais en réserve, parce que le besoin est très important là aussi.

Alors peut-être nous faut-il une tribune où, au lieu de s'adresser à toute une gamme de ministères fédéraux pour avoir quelques sous, on pourrait organiser une réunion à laquelle participeraient tous les intéressés afin de déterminer comment on pourrait s'adresser à un guichet unique.

• 1605

M. Inky Mark: Merci.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Monsieur Provenzano.

M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.): Ma question s'adresse à l'un ou l'autre des témoins. Je crois que certains des problèmes auxquels sont confrontées les réserves, dans un certain sens, en ce qui a trait aux installations sont semblables à ceux que vivent les petites villes qui ne sont pas des réserves et qui cherchent à assurer ce genre de services ou d'offrir ce genre d'installations.

Pour construire certaines installations dans une ville, si la municipalité est organisée, on se tourne vers les contribuables, on procède à des levées de fonds, et on assure la construction. Cependant, les frais d'exploitation, la prestation des programmes, c'est une tout autre histoire; Ted, vous disiez qu'il n'y avait pas de services ou de programmes dans votre réserve, par exemple la formation des athlètes.

Je crois qu'il est problématique en fait d'offrir des installations sportives dans les petits centres, qu'il s'agisse de réserves ou de petites villes. Je sais où vous vivez, parce que je vis au même endroit, et je connais les petites municipalités avoisinantes, et je sais quels problèmes elles pourraient surmonter si elles voulaient avoir par exemple leur propre aréna. Cependant, une fois que l'installation est construite, une fois que vous avez l'argent nécessaire pour assurer les frais d'exploitation, ne convenez-vous pas que les programmes devraient surtout être assurés par des bénévoles?

J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Supposons que les installations existent. Aurons-nous des problèmes quand le temps viendra de constituer le groupe de bénévoles nécessaires pour assurer les programmes dont vous parlez?

Croyez-vous, tout comme moi, que sans bénévoles ce sera impossible? Il y a trop de choses à faire. Si vous devez tout payer, vous ne pourrez pas vous le permettre.

M. Ted Nolan: Je laisserai Mme Tremblay répondre aux aspects techniques de cette question.

Pour ce qui est de la structure, nous ne cherchons pas à obtenir la construction d'installations de plusieurs millions de dollars où vous retrouvez des patinoires doubles. Cela n'a rien à voir avec les patinoires ou les choses de ce genre. C'est simplement un endroit où vous pouvez faire la promotion de modes de vie sains.

J'ai perdu nombre de mes proches alors qu'ils étaient très jeunes simplement en raison d'une mauvaise santé. J'ai récemment perdu mon frère aîné et ma soeur aînée pour des questions de santé. Je fais partie du YMCA de la petite ville de Fort Erie, en Ontario, qui ne compte que 10 000 habitants. J'y vais tous les matins et j'y vois des personnes âgées qui se servent du Stairmaster, du tapis roulant ou qui vont nager. Elles ont l'air en très bonne santé et pleines d'énergie. Les Autochtones n'ont pas ce genre d'accès et ne peuvent pas se rendre à ces centres lorsqu'ils sont dans les villes.

Ma soeur vient de finir un cours; on lui a offert un emploi en ville; elle n'a pas pu l'accepter, cependant, parce qu'elle n'a pas de moyen de transport.

Il s'agit donc de toutes sortes de questions qui présentent des problèmes; je crois cependant qu'avec des installations cela nous permettra de régler certains des problèmes de santé, qui sont fort importants, et certains des problèmes d'estime de soi que connaissent nos jeunes; de cette façon ils ne décrocheront peut-être pas à un si jeune âge. Ils commenceront à être bien dans leur peau.

Pour ce qui est de la structure, il nous faudra certainement l'aide de bénévoles pour les choses de ce genre. Le YMCA a un des meilleurs programmes au pays, et les bénévoles y font toutes sortes de choses. Je crois qu'une fois que les installations seront construites nous pourrons sans aucun doute obtenir les services de bénévoles pour les classes d'aérobie ou les autres activités.

M. Carmen Provenzano: Je ne connais pas bien les recommandations formulées dans la stratégie nationale pour le développement des sports chez les Autochtones. Les recommandations qui y figurent touchent-elles les choses dont vous nous parlez? S'agit-il d'un document que nous devrions mieux connaître?

Mme Paulette Tremblay: Oui. Nous vous avons donné ce document.

On a parlé de certains obstacles en ce qui a trait à l'engagement des intervenants dans le système sportif et au développement des entraîneurs autochtones; certains des problèmes sont abordés dans cette stratégie en ce qui a trait à l'accès, à l'emplacement, aux programmes de cours, à la façon dont les cours sont présentés, et à la sous-représentation des entraîneurs et à toutes sortes de choses de ce genre. Certaines recommandations portent là-dessus.

• 1610

Je ne crois pas que ces recommandations sont tout à fait aussi complètes que l'aurait voulu l'Assemblée des premières nations. Nous pourrions vous faire parvenir une liste plus détaillée et plus complète en ce qui a trait aux commentaires qu'a déjà faits Ted.

J'aimerais ajouter que je crois qu'il serait possible, dans les petites collectivités qui ont des écoles, d'établir un lien entre ces services et le secteur de l'éducation. Nous pourrions peut-être établir un programme communautaire qui ferait la promotion de l'établissement de groupes de pairs, l'enseignement par les pairs, qui pourrait assurer la formation d'un groupe de jeunes comme bénévoles dans le secteur récréatif. Je crois que c'est une possibilité qu'on aurait tort d'ignorer.

Vous savez, dès que vous confiez à des jeunes une tâche qui en fait des chefs de file, ils se rendent compte que vous voulez leur confier quelque chose d'important, et ils sont fiers d'eux-mêmes. Je crois qu'un programme de ce genre serait très bien accueilli et serait efficace. Il faut donc penser à ce genre de choses.

J'improvise un peu ici, mais il me semble que dans ma collectivité, qui était toute petite et qui n'avait pas grand- chose, on a simplement agi et accompli quelque chose parce qu'on voulait pratiquer le sport qu'est la crosse. J'ai même joué au hockey—quoique je ne sois pas vraiment une partisane du hockey aujourd'hui.

Vous devez donc penser à votre situation et essayer de trouver des débouchés et des possibilités. Tout cela, à mon avis, doit être fondé dans la collectivité, et je crois qu'il faut utiliser les ressources scolaires. Nous avons des professeurs qui sont des leaders et des entraîneurs. Nous devons peut-être justement exploiter ce potentiel.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Merci.

Chers collègues, avant de continuer avec les questions, j'aimerais proposer une motion.

Comme vous le savez, l'un des principaux sujets dont nous avons parlé en comité était le plafonnement des salaires. Nous avons reçu Gary Bettman et les propriétaires, et nous avons consulté la NBA et tous les sports.

Le 10 novembre, nous pouvons rencontrer Bob Goodenow, mais il faut que ce soit à Toronto. C'est pourquoi j'aimerais présenter une motion.

Comme la procédure est assez longue—il faut la faire passer par le Comité du patrimoine et par les différentes autres étapes—j'aimerais proposer, si vous le voulez bien, que le Sous-comité sur l'étude du sport au Canada, qui relève du Comité permanent du patrimoine canadien, sollicite l'autorisation de tenir une séance télévisée à Toronto le 10 novembre 1998 en présence de l'Association des joueurs de la Ligue nationale de hockey.

M. Carmen Provenzano: J'invoque le Règlement, monsieur le président. Il faudrait également faire un peu de ménage, car ce comité a déjà indiqué qu'il ne recevrait plus de mémoires après le 5 novembre. Ce qu'il faut donc faire essentiellement, c'est prolonger la période de réception des mémoires, peut-être en précisant que la date limite est reportée au 10 novembre.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Oui. Nous la prolongeons jusqu'au 10 novembre, puisqu'il n'y a qu'une séance prévue ce jour-là avec Bob Goodenow. Le report est compris dans la motion.

Qui propose la motion?

M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): J'en fais la proposition.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): J'appuie la motion.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Qui est pour?

(La motion est adoptée)

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Monsieur MacKay, vous voulez poser une question.

M. Peter MacKay: Merci.

Je voudrais remercier Mme Tremblay et M. Nolan.

Monsieur Nolan, je voudrais commencer en disant—et vous allez certainement en entendre souvent parler—que je suis un supporter enthousiaste. Je suis un supporter du sport et de vous. Comme l'a indiqué mon collègue, M. Mark, je considère que vous avez fait beaucoup pour le sport. Vous avez concrétisé le rêve de nombreux garçons et filles de ce pays, et j'ai beaucoup d'admiration pour ce que vous avez fait. C'est extraordinaire.

Je suis également très admiratif de ce que vous faites actuellement—et ceci s'adresse également à vous, madame Tremblay—en participant à la vie de votre communauté et en informant les parlementaires et le public de ce qu'on peut faire collectivement pour aider les Autochtones. Voilà donc ce que je voulais dire en préambule à mon intervention.

Mes questions concernent certains de vos commentaires, en particulier ceux qui portent sur les installations et l'entraînement.

J'ai été élevé, moi aussi, dans une petite communauté. J'ai joué sur les rivières et les étangs; j'ai aussi joué dans les pâturages. Ce dont je me souviens, c'est que ceux qui bénéficiaient du meilleur équipement et des meilleures installations n'étaient pas toujours les meilleurs sportifs, et que ceux qui étaient moins bien équipés devaient faire davantage d'efforts. Vos débuts vous ont sans doute été très utiles pour la suite de votre carrière.

• 1615

En ce qui concerne les priorités de dépenses, je considère que le hockey—bien que j'adore ce sport—est devenu très coûteux. Reconnaîtrez-vous avec moi qu'en matière de dépenses il faudrait consacrer davantage d'argent à des bâtons de crosse ou de baseball, ou à des cerceaux, si l'on veut éviter à un plus grand nombre d'enfants la criminalité, la pauvreté, la drogue et toutes les calamités qui apparaissent lorsqu'on laisse les jeunes trop libres de leur temps?

Ne pensez-vous pas que ce serait préférable à la construction d'une patinoire, d'un terrain de handball ou d'une installation coûteuse de ce genre?

M. Ted Nolan: Merci pour ces commentaires.

Il se trouve que je me suis toujours occupé de hockey. J'aime beaucoup ce sport, mais je ne voudrais pas donner la fausse impression que je préconise la construction de patinoires de hockey. Ce que j'ai apprécié le plus dans le sport professionnel, c'est qu'il donne à l'athlète une identité qui va attirer le regard des jeunes et qui va les inspirer. Il y a un très grand nombre d'enfants qui ne peuvent pas jouer au hockey. Comme l'a dit Mme Tremblay, un très grand nombre de filles ont elles aussi besoin des mêmes installations.

En ce qui concerne l'attribution des fonds, le hockey est effectivement un sport très coûteux. Si l'on veut proposer un environnement sain à 90 p. 100 de la population, il ne faut pas envisager d'installations de loisirs fantaisistes. Il faut simplement un endroit où les sportifs puissent se rendre.

Je suis sûr qu'une bonne partie des gens qui sont dans cette salle ont des enfants. Si un jeune de 14 ou 15 ans n'a rien de prévu un vendredi soir, que fera-t-il? Il va aller briser des lampadaires dans la rue. Il faut donner à tous les jeunes un endroit où aller. Cet endroit ne sera pas nécessairement une patinoire de hockey.

J'étais à l'inauguration des nouvelles installations du chef Clearsky. Je dois vous dire que la journée fut mémorable. C'est extraordinaire de voir des gens comme le chef Clearsky faire des choses pareilles pour leur communauté. Mais tout le monde ne peut pas s'offrir ce genre d'installations. Ce dont nous parlons, ce n'est rien d'extraordinaire, mais c'est au moins une installation où les jeunes peuvent se rendre.

Pour en venir au coeur de votre question, on peut certainement convaincre un plus grand nombre de Canadiens de veiller à leur santé grâce à toutes sortes de sports, et il n'est jamais ruineux de faire rebondir un ballon de basket sur un sol en ciment ou de l'envoyer au panier. Il n'est pas très coûteux d'aménager une piste, ou quelque chose du même genre, qui va attirer un grand nombre de participants.

Mme Paulette Tremblay: J'aimerais répondre également, et vous remercier sincèrement de vos chaleureux commentaires.

Je pense que dans les réserves le problème tient aux attitudes. Qu'entend-on par la notion de bien-être? J'ai grandi dans un milieu où on n'insistait pas tellement sur l'importance de l'exercice quotidien ou de la marche. J'ai toujours été à la chasse dans le bois avec mon grand-père, mais pour moi, ce n'était pas un exercice. C'était une démarche spirituelle et parfois une exigence alimentaire.

Nous n'avons donc pas été élevés dans l'idée que les sports, l'activité physique et le bien-être sont importants, et on le voit bien à la proportion de diabétiques dans nos communautés.

Ce que Ted a dit à propos des installations et de la possibilité d'accueillir différents sports me semble très important. Il faut s'efforcer de faire changer les mentalités et de faire reconnaître la nécessité du sport. C'est ainsi que grâce à la participation on va réussir à convaincre les jeunes.

Les programmes Bon départ autochtones et le retour aux langues autochtones et à la compréhension de nos traditions peuvent être un outil de promotion. Il se passe beaucoup de choses, et il est important de faire le lien entre toutes ces activités. On parle également de nutrition, ce qui peut faire évoluer les mentalités. Les parents sont tenus de participer à ce programme.

Grâce à lui, nous faisons évoluer la mentalité des parents, ce qui permet d'espérer un renouveau et une nouvelle perspective.

Il est donc temps de construire des installations pour proposer toute une gamme d'activités, pour former des leaders et pour favoriser l'activité physique dans les communautés.

Les résultats devraient être très positifs. Nous n'avons sans doute pas besoin de montants astronomiques. Comme l'a dit Ted à plusieurs reprises, nous n'avons pas besoin de ce qu'il y a de plus cher et de plus extraordinaire.

• 1620

M. Peter MacKay: Comme je l'ai dit, j'ai été élevé moi-même dans une région rurale près de la réserve Mi'kmaw, en Nouvelle-Écosse. Je me souviens d'avoir joué dans une équipe de hockey junior, avec des joueurs autochtones venus de la réserve voisine. Je me sentais presque plus d'affinités avec eux lorsque j'étais en ville, puisque je venais de l'extérieur.

Je ne veux pas utiliser le mot «assimilation», parce qu'il a une connotation très négative, mais vous avez dit, monsieur Nolan, que lorsque les Européens sont arrivés dans la Ligue nationale de hockey on a eu l'impression qu'ils allaient devoir s'adapter et on leur a laissé le temps de s'adapter sur les plans culturel et linguistique. Ne faudrait-il pas le faire également dans les sports mineurs, dès le début, non pas pour assimiler les jeunes, mais pour rapprocher les communautés et faire jouer les jeunes Autochtones, non pas contre une équipe de non-Autochtones, mais au sein d'une telle équipe, pour éviter cette mentalité d'affrontement lorsque l'équipe de la réserve joue contre une équipe de la ville ou de la communauté voisine? Est-ce qu'on ne pourrait pas favoriser, non pas l'assimilation—ce n'est pas du tout mon intention—mais la coopération? Le mot «coopération» n'est même pas celui que je cherche—il s'agit simplement de réunir les enfants au sein d'une même équipe pour qu'ils jouent ensemble, plutôt que de les mettre en compétition les uns contre les autres.

M. Ted Nolan: Cela ne fait absolument aucun doute. Quand les jeunes arrivent dans une nouvelle ville... Finalement, il s'agit ici de toutes les structures qu'il faut améliorer. Il ne s'agit pas uniquement des installations comme telles; il s'agit de faire comprendre, dans bien des cas, aux ligues de hockey mineures ou aux entraîneurs sportifs chez les mineurs, ce que nos jeunes ont vécu, de les sensibiliser au fait que les jeunes sont un peu timides et de leur permettre de s'intégrer.

Il existe beaucoup de guides à l'intention des entraîneurs sur la façon de s'y prendre avec tel ou tel type de joueurs. Beaucoup de ces joueurs ont des difficultés à cause de leurs antécédents. Il faut donc que l'entraîneur soit sensible à ces antécédents et qu'il mette les jeunes un petit peu plus à l'aise quand ils jouent.

Chose certaine, ils devraient jouer «avec» les autres. J'ai vécu une expérience unique il y a de cela quelques années: j'ai amené un groupe de joueurs de la LNH dans une collectivité autochtone très isolée dans la région de la baie James. Nous y avons organisé un camp autochtone, un camp pour les jeunes Autochtones. Il n'y avait rien d'autre dans cette collectivité autochtone, bien entendu. Si toutefois j'ai voulu amener des joueurs de la LNH là-bas, c'était pour leur permettre de comprendre un peu ce que vivent nos jeunes, de comprendre à quel point il leur est difficile de quitter leur collectivité.

Aussi, non seulement les jeunes ont beaucoup appris, mais je crois que les entraîneurs en ont aussi appris pas mal le temps qu'ils ont été là. Ils ont compris ce que vivaient les jeunes.

Maintenant, quand ils voient quelqu'un dans la rue qui semble plutôt marginal, ils sont plus à même de comprendre.

Il ne s'agit donc pas d'assimiler qui que ce soit, mais bien de travailler ensemble, de jouer ensemble. Finalement, nous sommes tous dans le même bateau.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): En tout cas, nous avons compris que vous avez besoin d'installations. Bien entendu, on se tourne invariablement vers le gouvernement pour demander un apport financier, un investissement plus grand. J'ai quelques questions à vous poser sur la façon dont les choses se passent dans votre domaine.

Nous disions tout à l'heure comme il fallait mettre l'accent sur l'inclusion des filles. Nous avons discuté avec d'autres témoins qui disaient que le sport avait parfois un caractère un petit peu trop macho. Je voudrais savoir comment les choses se passent chez vous, je voudrais connaître le point de vue autochtone.

Deuxièmement, en ce qui a trait aux entraîneurs, nous devons naturellement faire en sorte qu'ils comprennent votre culture. De votre côté, pensez-vous que les entraîneurs jouent bien leur rôle? Y a-t-il un lien par exemple avec l'association des entraîneurs? Que faites-vous de votre côté pour veiller à ce que l'on soit plus à même de comprendre votre culture?

Êtes-vous macho, Ted?

M. Ted Nolan: Non, je ne suis pas macho. Il s'agit simplement pour moi d'un mode de vie sain.

J'avais un objectif en tête pendant tout le temps qu'a duré ma carrière comme joueur et comme entraîneur. J'avais cet objectif constamment à l'esprit. Il ne s'agit pas nécessairement de remporter des championnats, comme nous l'avons certainement fait à Sault Ste. Marie et ailleurs. Ce n'était pas là mon objectif. Mon objectif était d'aller faire partie de ce monde-là et d'aller dire à nos jeunes que, s'ils voulaient accomplir quelque chose dans la vie, ils pouvaient le faire. Mon objectif n'était pas de revenir faire la promotion du sport professionnel.

• 1625

D'après les statistiques, en Ontario, sur 25 000 enfants qui ont commencé à jouer au hockey il y a de cela 15 ans, sept seulement font partie de la Ligue nationale de hockey. Il ne s'agit donc pas de former des athlètes professionnels, mais bien de promouvoir un mode de vie sain, tant chez les filles que chez les garçons, pour que, à 30 ans, ils s'exercent sur un tapis roulant et soient actifs au lieu d'être toujours en train de boire du café et de fumer des cigarettes.

C'est de cela que nous parlons. Pour ce qui est de l'attitude macho qu'on retrouve chez les sportifs, dans ma profession il faut être très compétitif, et je n'aime pas perdre. Il y a certaines choses dans ma profession au sujet desquelles je dois être très macho.

Mais c'est difficile de le faire comprendre aux gens. Tout au long de ma carrière j'ai voulu réussir à faire comprendre aux gens que nous avons des familles comme tout le monde. Nous avons des émotions, nous avons des sentiments. Nous pleurons comme tout le monde. Quand j'avais 16 ans, je me suis endormi en pleurant pendant un mois quand j'ai quitté la maison. Beaucoup d'enfants qui veulent faire carrière pleurent parce qu'ils s'ennuient de chez eux. Je ne pleurais pas pour cette raison-là surtout; je pleurais à cause de la façon dont on me traitait. Cela fait une grande différence.

L'essentiel pour moi, c'est d'amener les gens à comprendre les autres, à connaître leurs antécédents. Les activités récréatives, le soccer, le baseball sont des activités qui nous permettent de créer des liens, de redonner la santé aux gens et de vivre ensemble.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Je suis certain que vous voulez réagir à cela.

Mme Paulette Tremblay: Oui.

Je me dois de vous dire que quand nous avons formé une équipe dans notre réserve, quand j'étais jeune, nous prenions tous ceux qui pouvaient jouer. Nous voulions avoir le bon nombre. Que nous importait qu'un joueur soit un peu plus jeune, qu'il soit homme ou femme, à condition de pouvoir courir, jouer et attraper la balle. Et même si un joueur n'y parvenait pas, c'était la participation qui comptait le plus, d'aller sur le terrain jouer et de s'amuser.

Il me semble que les sports organisés sont empreints d'une attitude machiste. Personne ne saurait le nier, je crois. Certains sports sont plus compétitifs que d'autres. Pour ma part, je préfère encourager la participation dans le but d'améliorer le mieux-être globalement en améliorant la santé physique, intellectuelle, spirituelle et émotive. C'est très important.

Je pense que les nôtres aiment s'amuser. Nous avons toujours aimé les jeux, les sports, la participation à des activités collectives. C'est une base nationale qui peut nous servir de point de départ.

Pour ma part, la question du sexe ne posait pas problème. J'ai toujours cru pouvoir chasser et pêcher mieux que tous les autres. Quand j'ai servi dans la marine américaine—j'ai profité du traité Jay—je tirais au pistolet, j'étais tireur expert. J'ai ma médaille.

Cela tient à ma culture. Mon grand-père m'amenait chasser et pêcher, et j'ai toujours su bien tirer. Est-ce un sport masculin? Je ne le crois pas. Et je crois que nos collectivités ne voudraient pas que l'on fasse une telle distinction.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Monsieur Easter.

M. Wayne Easter: Merci, monsieur le président.

Même si j'ai manqué l'exposé liminaire, j'ai lu le mémoire, et il renferme des données très intéressantes.

M. MacKay vous a posé des questions sur la façon de favoriser une meilleure compréhension, malgré l'aspect compétitif des sports, et cela m'amène à dire que les gens ont des leçons à apprendre des autres. Peu importe à quel niveau se fait le contact. Je suis de l'Île-du-Prince-Édouard, et, quand j'étais plus jeune, la compétition était entre les équipes rurales et urbaines. Les jeunes de la ferme affrontaient les jeunes de la ville, et l'idéal, c'était de le faire sur une patinoire de hockey.

Au niveau international, les Jeux olympiques créent des liens entre les sportifs et les jeunes de tous les pays. Les pays peuvent se faire la guerre, mais le sport permet de mieux se connaître et d'apprendre des autres.

• 1630

Pour revenir à ce que disait Peter, avez-vous des suggestions à faire sur la construction d'installations sportives et la compétition sportive dans le but d'améliorer les rapports entre les gens?

Je veux parler d'un processus plus que d'autre chose. Faut-il que le gouvernement intervienne? Faut-il que le gouvernement fédéral intervienne aux côtés des collectivités autochtones? Qu'est-ce qui nous permettrait de nous rapprocher de l'objectif, à savoir utiliser le sport pour aider les gens à mieux se connaître les uns les autres?

M. Ted Nolan: C'est sans doute l'un des objectifs les plus difficiles à atteindre. Il me vient spontanément quelques suggestions à vous faire. Cela tient pour l'essentiel à l'éducation.

Pour ce qui est des entraîneurs d'équipes de sport mineur au Canada, je pense qu'il faut avoir un certificat de niveau un ou deux pour pouvoir travailler dans le cadre de certains programmes sportifs. Je n'ai pas pu agir comme entraîneur de l'équipe de hockey de mon fils l'an dernier parce que je n'avais pas le bon certificat. Je suis allé m'en procurer un pour 50 $. Je n'ai pas suivi le cours; j'ai acheté le certificat.

Les gens qui structurent ces programmes doivent tenir compte d'un grand nombre de facteurs, et notamment d'où viennent les enfants, s'ils sont de centres urbains, des quartiers plus durs du centre-ville ou des réserves autochtones. C'est l'un des aspects qu'il faut bien saisir.

Nous, les membres des collectivités, devrons comprendre cela, parce que nous devons partir et monter dans la hiérarchie des organismes sportifs si nous voulons faire carrière. Il nous faut aussi partir pour faire des études. Je veux parler là des jeunes que nous réussissons à garder aux études; à l'heure actuelle, 63 p. 100 de nos jeunes abandonnent les études.

C'est l'un des problèmes que nous voulons corriger, et nous voulons faire comprendre à nos enfants ce qui les attend lorsqu'ils partiront, parce que la situation ne changera pas du jour au lendemain. Nous ne ferons pas disparaître le racisme du jour au lendemain. Nous ne ferons pas cesser les quolibets du jour au lendemain. Mais nous pourrions au moins faire des efforts d'éducation et de promotion et tenter de changer certaines choses pour que les responsables de la conception des programmes aient des connaissances plus solides et pour que ceux qui quittent nos collectivités sachent mieux à quoi s'attendre.

M. Wayne Easter: Ainsi, la clé de voûte doit être l'éducation et la communication.

J'aurais une deuxième question, monsieur le président.

On a beaucoup parlé ici d'installations, mais quels sont les besoins prioritaires? S'agit-il d'installations, de capacité d'entraînement, ou encore, comme quelqu'un l'a dit plus tôt, de bâtons de crosse?

Je sais que dans ma région, quand j'étais à l'école secondaire, les écoles secondaires consacraient d'importants budgets au football. Les équipes de hockey existent toujours, mais le football dans les écoles secondaires est chose du passé, parce que c'était devenu trop coûteux. Maintenant le sport le plus populaire est le soccer, parce qu'il est relativement peu coûteux à pratiquer et ne nécessite pas d'installations ou d'équipements coûteux. Ce sport gagne en popularité, du moins à l'Île-du-Prince-Édouard. C'est une bonne forme d'exercice, une occasion de compétition et de rapprochement.

Si vous deviez dresser une liste de priorités, de quoi aurait-elle l'air? Accorderiez-vous la priorité à l'entraînement, aux installations, à l'équipement, par exemple?

M. Ted Nolan: Vous pouvez presque accorder la priorité à tout cela en même temps. Nous manquons de tout à l'heure actuelle.

En ce qui a trait aux installations, pour ma part c'est une question de santé. Comme je l'ai déjà dit, j'ai perdu beaucoup de membres de ma famille en raison de mauvais états de santé. Si les gens avaient eu accès à des installations, s'ils avaient pu s'y rendre à pied ou autrement, ils auraient peut-être pris l'habitude de faire du tapis roulant. Ils se seraient peut-être mis tout à coup à prendre des suppléments vitaminiques. Ils auraient mieux surveillé leur alimentation. Grâce aux sports, nous pourrions améliorer tous ces aspects-là de la santé.

• 1635

Pour ce qui est d'améliorer la qualité de l'entraînement sportif de nos enfants—parce que nous avons beaucoup de bénévoles—il faut améliorer les techniques d'entraînement, nettoyer le terrain de football pour pouvoir organiser des parties de soccer, avoir des lieux propices à la pratique des sports.

À l'heure actuelle, tout est très éparpillé. Personne ne prend le contrôle. Mais là où il y a un point de ralliement, un point de référence, tout à coup apparaît une installation, tout à coup survient un directeur... nous pouvons créer nos propres directeurs, des directeurs de la programmation sportive dans certaines collectivités, et ils réussissent à organiser des programmes de soccer. Ces directeurs peuvent organiser des camps de base-ball, ou je ne sais quoi. Cela n'implique pas nécessairement d'importantes mises de fonds, mais cela favorise des modes de vie plus sains.

Mme Paulette Tremblay: J'aimerais ajouter à cela.

Il existe dans tout le pays des situations très diverses selon qu'il s'agit de réserves ou de centres urbains—il y a des centres d'amitié, des centres culturels, des gymnases ou autres installations récréatives; par exemple, le Centre d'amitié Odawa, ici à Ottawa, a un gymnase qui peut être utilisé, auquel la population a accès—nous devons savoir très bien quelles installations existent, dans quelles collectivités, où le besoin reste à combler, et il faut mener l'action sur plusieurs fronts.

Où existe le plus grand besoin? Dans les collectivités du Nord, qui sont dépourvues de tout. Y a-t-il un endroit central où nous pourrions construire une installation quelconque? Dans les centres urbains, y a-t-il un centre d'amitié ou un centre culturel qui possède des installations auxquelles auraient accès les jeunes Autochtones des Premières nations?

Je ne crois pas qu'il y ait une solution unique pour tous, étant donné la diversité des problèmes. La solution devra être adaptée aux besoins de chaque collectivité.

Ma réponse est toujours de profiter de ce qui existe déjà pour faire mieux. Je vous encourage à ne pas oublier qu'il y a de nombreux bénévoles, de nombreux Autochtones, qui ont les qualités et les titres requis, qui sortent du rang et qui pourraient aller à ces camps d'entraînement. Ils peuvent se mettre au service de la collectivité. C'est peut-être un autre élément à prendre en compte lorsque l'on assure la formation des bénévoles.

Il me semble toutefois que le premier besoin à combler en est un d'information concrète qui nous dirait quels besoins existent et où. Il n'y a pas de réponse unique.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Madame Karetak-Lindell, et nous passerons ensuite à M. Solomon.

Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Merci beaucoup.

D'abord, j'aimerais me faire l'écho de M. MacKay et vous féliciter à mon tour. J'ai quatre garçons et je passe 90 p. 100 de mon temps libre dans des arénas. Bien entendu, nous avons suivi de très près l'évolution de votre carrière, parce que mes garçons sont Autochtones. Nous avons vu votre émission à Radio-Canada et nous nous sommes reconnus dans ce que vous disiez et, malheureusement, dans les attaques raciales que vous avez dû essuyer. Mes garçons ont vécu cela. Malheureusement, c'est la réalité dans les sports aujourd'hui.

Je me souviens d'une chose que vous avez dite lors de l'émission, à savoir qu'un athlète autochtone doit être bien meilleur qu'un joueur moyen pour se distinguer des autres. C'est malheureux, mais c'est le cas, parce qu'il y a beaucoup de talents naturels dans nos collectivités.

Je suis la députée du Nunavut, et nous avons les mêmes préoccupations que vous face au manque d'installations dans les très petites collectivités. Et cela ne concerne pas que le hockey. Je vois des jeunes qui pourraient s'entraîner pour faire partie de l'équipe de lutte, ou de gymnastique, parce qu'ils ont la conformation physique et le talent naturel voulu.

Comment s'y prendre pour obtenir de l'entraînement pour ces jeunes? Comment leur garantir l'accès à ces autres sports qui ne se pratiquent pas actuellement dans le Nord? Nous parlons de hockey, de ballon panier, de volley-ball, mais le coût de la vie dans ces localités éloignées est tel qu'on ne peut offrir l'accès à la gymnastique ou aux autres sports que nos jeunes pourraient pratiquer avec brio.

• 1640

J'étais membre de l'organisation Sport North, et mon époux et moi-même avons travaillé pendant de nombreuses années pour convaincre nos jeunes d'adopter des modes de vie plus sains en faisant notamment du sport. Je peux honnêtement dire que mon jeune de 16 ans ne serait pas aujourd'hui en 11e année s'il n'avait pas joué au hockey. Nous avons pu soutenir son intérêt pour les études en appuyant son intérêt pour le sport. C'est une façon saine d'encourager nos enfants à poursuivre leurs études tout en participant à des sports d'équipe et en améliorant leur estime de soi.

Lorsque j'étais à Sport North—c'est l'organisme qui recueille tout l'argent provenant du territoire et qui le répartit entre les différentes collectivités—j'étais très déçue de voir que dans nos valeurs traditionnelles le sport n'est jamais une priorité pour nos chefs. Dans ma langue maternelle, le sport est assimilé au jeu; c'est une chose qu'on peut faire à ses moments perdus si on est prêt à y consacrer de l'argent. Le sport n'est pas considéré comme une activité normale ni comme quelque chose d'important pour la santé et le bien-être des Canadiens.

J'ai deux questions. Tout d'abord, comment convaincre les chefs... Je sais que c'est une réflexion que nous devons tenir entre nous, à l'intérieur de nos groupes. Mais j'aimerais savoir comment vous vous y prenez avec les Premières nations.

Deuxièmement, comme je l'ai dit, j'ai fait partie de Sport North, et j'étais très déçue de voir les faibles montants qui parviennent à rejoindre effectivement les collectivités. Comment faire en sorte que l'argent qui nous parvient du gouvernement fédéral ou du gouvernement territorial se rende au niveau de la collectivité? Avez-vous une idée de la façon dont il faut s'y prendre?

On peut affecter un certain montant à tel programme ou à tel autre, mais le montant qui parvient au niveau souhaité, c'est-à-dire à la base, dans les collectivités, reste minime.

M. Ted Nolan: Je crois que Mme Tremblay a répondu à la deuxième partie de votre question, sur la façon de faire parvenir les fonds jusqu'à la base.

Quant à vos commentaires sur nos talents naturels, il est ici question de ressources, et je pense que nos meilleures ressources naturelles sont nos jeunes, nos enfants. Les enfants qui ont du talent ne manquent pas. C'est bien cela qui est contrariant, car on rencontre un très grand nombre d'enfants pleins de talents.

Lorsque je jouais au hockey, je connaissais une vingtaine ou une trentaine d'enfants qui avaient plus de talents que moi, mais qui ne pouvaient se rendre sur le pouce jusqu'à la patinoire de Sault Ste. Marie pour jouer au hockey. Ce n'est pas donné à n'importe quel enfant de faire ce genre de chose.

J'avais peut-être une raison particulière pour le faire, mais c'est sans doute pour cela que je suis ici aujourd'hui. Dans la vie, les choses se produisent souvent pour une raison précise. C'est peut-être pour cela que je ne suis pas entraîneur et que nous sommes ici en train de parler de ce qu'il faudrait faire pour améliorer le sort des jeunes des Premières nations dans l'ensemble du pays.

Il faut travailler pour organiser des camps d'été destinés aux jeunes des collectivités éloignées, mais parfois, une fois qu'on a constitué un conseil consultatif, on voit tout d'un coup... Je visite beaucoup les collectivités du Nord et je vois souvent le fanion des Maple Leaf de Toronto ou des Canadiens de Montréal accroché dans les fenêtres. Les gens des Premières nations sont les supporters les plus enthousiastes des équipes de hockey. Si un joueur comme Vincent Damphousse allait passer une semaine l'été dans une collectivité autochtone, il serait une source d'inspiration incomparable pour les enfants.

En basket-ball, on pourrait demander à un autre joueur de faire le voyage, de passer un certain temps là-bas et de parler de son expérience aux jeunes de l'endroit.

Nous parlons ici d'éducation. Lorsque je suis parti, je ne comprenais pas à quel point l'esprit de compétition était fort... pour en revenir à vos commentaires. Nous faisons du sport parce que nous aimons jouer, et non pas pour en faire une carrière. Nous aimons jouer.

• 1645

C'est dans des camps d'été que j'ai pu mesurer cet esprit compétitif. Tous ces jeunes qui fréquentent les camps d'entraînement suivent des programmes de contrôle du poids. De mon temps, ils pesaient 210 livres, alors que j'en pesais 155, ce qui ne me facilitait pas la tâche. Voilà comment ils pratiquent l'esprit de compétition.

Pour éduquer certains enfants qui veulent faire carrière, c'est cela qu'il faut leur expliquer. Ce n'est pas la peine de commencer avant d'être en pleine forme, parce qu'on est sûr de se faire battre. L'éducation est très importante.

Je vais laisser Mme Tremblay répondre à la question sur la façon d'acheminer les fonds au bon endroit.

Mme Paulette Tremblay: Je comprends parfaitement vos commentaires et je vous en remercie; votre expérience est tout à fait semblable à la mienne.

Nous nous heurtons chaque jour à ce problème. Comment faire en sorte que...

Le financement est un problème essentiel. Les collectivités n'en reçoivent pas suffisamment. C'est manifestement vrai.

Je n'ai pas de panacée à proposer. J'aimerais participer à la recherche d'une solution et à un débat sur la façon de procéder, peut-être en décidant de financer certaines initiatives et en veillant à ce que les fonds se rendent à destination. C'est un sujet important, qui mérite qu'on s'y attarde.

Deuxièmement, comment changer l'état d'esprit de nos chefs? C'est vrai qu'ils n'ont jamais considéré le sport comme une activité viable. On faisait du sport pour s'amuser. Le sport n'a jamais été considéré comme une possibilité de faire carrière. On ne le jugeait pas essentiel au bien-être.

Je pense qu'en passant du mode de vie traditionnel où l'activité physique faisait partie du quotidien—chacun faisait de la marche, de la chasse, de la pêche et devait se déplacer constamment—pour adopter le mode de vie de la société moderne où les Autochtones sont parqués dans les réserves, on constate que la télévision devient le loisir essentiel.

Je n'ai pas été élevé avec la télévision, et je ne l'apprécie pas beaucoup, mais c'est maintenant un élément important de la vie quotidienne, avec lequel le sport entre en concurrence. Ensuite, il y a d'autres secteurs où les besoins sont criants, que ce soit le logement, les emplois trop rares, et tout le reste; les chefs s'efforcent tout simplement de faire de leur mieux avec ce qu'ils ont.

Je crois que les états d'esprit vont changer progressivement grâce aux divers programmes et activités que nous proposons et que les gens acceptent. À mesure que les Autochtones accèdent à l'éducation—beaucoup n'y accèdent pas, mais quelques-uns font des études, comme Ted, moi-même et tous les professionnels autochtones—on en trouve de plus en plus qui font tout ce qu'ils peuvent pour promouvoir l'épanouissement et le bien-être de leurs concitoyens. On fait beaucoup de ressourcement dans nos collectivités, et c'est l'occasion idéale pour parler des initiatives que nous proposons et pour y ajouter un message sur le sport.

À mon avis, il faudrait faire de la publicité et de la promotion. On pourrait organiser des campagnes pour rehausser l'image du sport dans les collectivités autochtones, de façon à donner aux Autochtones une compréhension plus holistique de la réalité.

Nous pouvons le faire et mentionner aussi toutes nos autres activités par l'intermédiaire du programme autochtone Bon départ et des centres urbains pour la jeunesse.

Nos jeunes savent que l'activité physique est importante. Ils le savent mieux que les adultes.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Merci.

Monsieur Solomon.

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, excusez-moi d'être arrivé en retard. Je devais faire un exposé devant un autre comité dans une salle voisine à 15 h 30.

J'ai eu l'occasion de lire vos propositions et vos commentaires, monsieur Nolan, et je tiens à vous en remercier sincèrement.

Permettez-moi de me présenter: je suis un député de la Saskatchewan. Je connais bien la Fédération des nations indiennes de la Saskatchewan. J'ai assisté aux Jeux autochtones nord- américains de Prince Albert en 1993. Je n'y ai passé qu'un jour, mais j'y étais.

• 1650

J'ai l'impression qu'en Saskatchewan—je ne sais pas ce qu'il en est dans les autres provinces, mais je suis de la Saskatchewan et je sais ce qui s'y passe; par ailleurs, je me suis renseigné—le système est très bon; on pourrait certainement l'améliorer, mais c'est un excellent système, qui a été mis en place dans les différentes réserves à l'initiative de la Fédération des nations indiennes de la Saskatchewan. Nous avons un certain nombre de programmes qui incitent les jeunes à faire de l'activité physique. Vous avez tout à fait raison de dire que c'est une question de santé; c'est aussi une question d'éducation. Les adultes ne le comprennent pas toujours, mais les jeunes veulent toujours jouer.

Mon fils en est le parfait exemple; il vient d'avoir 14 ans et il joue au hockey. L'été dernier, je faisais divers travaux à la maison et je lui ai demandé de m'aider. Il m'a regardé dans les yeux et a dit: «Papa, soyons clairs. Tu veux me faire travailler, mais c'est ton travail. C'est à toi de travailler. Mon travail à moi, c'est de jouer.» Il est parti jouer, et c'était très bien comme cela.

Des voix: Oh, oh!

M. John Solomon: Mais il ne l'a fait qu'une fois. Je l'ai laissé faire, car j'ai trouvé cela drôle sur le coup. Il est allé jouer au soccer et considérait que c'était ce qu'il avait de mieux à faire. J'ai trouvé qu'à l'occasion il n'était pas mauvais de le lui permettre.

Tout cela étant dit, je voudrais vous poser une question concernant l'Assemblée des premières nations: est-ce que vous avez parlé avec la Fédération des nations indiennes de la Saskatchewan du sujet dont nous traitons aujourd'hui et est-ce que les représentants de la Fédération vous ont dit que nous avons fait en Saskatchewan des choses très profitables pour nos jeunes, en particulier nos jeunes Autochtones, qu'il reste encore beaucoup à faire, mais qu'au moins on s'en occupe, que les jeunes qui participent aux Jeux autochtones nord-américains sont des jeunes extraordinaires, même s'ils ne deviennent pas tous des athlètes professionnels? En fait, rares sont ceux qui le deviennent. Ils apprécient la compétition et les relations qu'ils établissent entre eux.

Voilà le sens de ma question.

Mme Paulette Tremblay: À l'Assemblée des premières nations, je fais partie de l'équipe de direction du portefeuille de la jeunesse, que je partage avec mon collègue, Art Dedam. Il s'occupe du développement social. Je suis arrivée à l'Assemblée des premières nations en mars dernier, et je suis encore en train de me mettre dans le bain.

Il y a beaucoup de travail à faire en ce qui concerne les jeunes. Nous nous plaçons du point de vue des jeunes, en tenant compte de leurs besoins et de leurs exigences. Nous travaillons en coopération avec les autorités sportives de la Saskatchewan. Nous avons des prix appelés «Héros de notre temps». L'un de ces prix est une bourse Tom Longboat. Nous collaborons avec les responsables de cette bourse.

Je ne pense pas qu'il soit essentiel d'envisager de ce point de vue-là les différents modèles d'activité que nous proposons. Nous travaillons en collaboration avec l'Aboriginal Sport Circle, puisque c'est l'organisme qui représente le sport autochtone, et nous l'appuyons de l'extérieur.

On semble nous demander d'intervenir plus activement, de donner une perspective nouvelle et de faire de la recherche dans ce domaine. Nous pouvons le faire en nous plaçant du point de vue des jeunes.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Merci beaucoup.

Monsieur Mark, pour la dernière question.

M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

Lorsque l'association de l'éducation physique a comparu devant ce comité, elle a parlé du problème de l'accès aux installations publiques. Comme vous le savez, la communauté autochtone prend progressivement le contrôle de l'enseignement. J'aimerais savoir quel est le rôle de l'école dans les réserves en ce qui concerne l'acquisition de compétences et la création d'un environnement propice à la santé?

Mme Paulette Tremblay: Je crois que c'est très clair. Les écoles des réserves enseignent toujours le programme arrêté par la province. Donc, dans la mesure où le sport fait partie du programme du ministère provincial, il est présent dans les réserves.

Certaines réserves n'ont pas d'école, et les enfants doivent se déplacer en autobus. C'est un problème sérieux, car ils ne peuvent pas rester à l'école après la classe pour participer à des activités sportives.

J'ai dû moi-même prendre l'autobus scolaire pour aller à l'école secondaire; il n'y avait aucune installation sportive dans ma réserve, et comme je prenais l'autobus scolaire, je ne pouvais pas rester pour faire du sport après la classe. J'aimais le volley-ball et j'ai fini par faire de la gymnastique; j'ai même fait fonction d'entraîneur pendant un certain temps. Je comprends donc parfaitement votre remarque. C'est un obstacle considérable qui existe effectivement.

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Pour ce qui est des installations publiques, je crois que c'est une bonne idée de chercher à s'en servir. Tant qu'il existe des écoles et des installations, comment pouvons-nous—et c'est là la question à laquelle il nous faudrait répondre—au niveau communautaire trouver un moyen de mettre en oeuvre des programmes, des programmes parascolaires et des programmes pour adultes, avec l'aide de bénévoles?

Comme nous le disions tout à l'heure, il s'agit d'un tout. Il nous faut non seulement avoir les installations, mais aussi les bénévoles qui ont l'information voulue pour pouvoir s'occuper d'une activité en particulier, pour en assumer la responsabilité.

Il serait tout à fait possible d'accomplir quelque chose de ce genre. Cela se fait déjà dans certaines collectivités; on peut se rendre à l'école le soir et participer à une classe de conditionnement. Il faudra peut-être voir à quelles autres fins les locaux pourraient servir. La marche est une excellente activité physique. On peut ensuite en faire un sport, en s'adonnant, par exemple, à la marche intensive ou à la course à pied.

Pour ce qui est de l'acquisition de compétences dans les écoles, je crois qu'il n'y en a pas pour l'instant, mais est-ce une possibilité pour l'avenir? Absolument. Je crois que oui.

Le président suppléant (M. Denis Coderre): Merci beaucoup.

Je peux supposer que les mots clés sont accessibilité, compréhension et installations. Bien entendu, nous tiendrons compte de tout cela. Soyez assurés que les collectivités des Premières nations seront bien représentées dans les rapports que nous ferons.

Je tiens à vous remercier tous deux pour votre témoignage.

Bon succès, monsieur Nolan, avec une future équipe. C'est dommage que les Canadiens aient déjà un entraîneur.

La séance est levée.