CIIT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent du commerce international
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 13 décembre 2007
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Ceci est la neuvième séance du Comité permanent du commerce international pour cette session-ci du Parlement. Je tiens à souhaiter la bienvenue à nos témoins.
Conformément à notre façon habituelle de procéder, nos entendrons les déclarations des témoins. Je vais vous demander de vous en tenir à un peu moins de dix minutes. Nous allons être assez rigoureux en ce qui concerne la première série de questions. La Chambre a ajourné et donc, techniquement parlant, nous avons ajourné nos travaux ici, la Chambre ayant déclaré qu'il était à 17 h 30. C'est un terme technique qui signifie que nous sommes tous en train de faire des heures supplémentaires. Une fois que vous aurez terminé vos présentations, nous aurons probablement un tour de questions.
Je suis d'accord mais s'il nous faut plus de temps en fonction des questions et des réponses, j'espère que nous en aurons la possibilité.
Très bien. Pour l'instant je vise 16 h 30. Si à ce moment-là vous voulez que l'on prolonge la séance, nous mettrons la chose aux voix. Pour l'instant nous allons clore la séance à 16 h 30 si M. Stoffer est d'accord.
C'est ce que nous aurions fait si nous n'avions pas su quel était le calibre des témoins que nous allions entendre aujourd'hui.
Si j'ai bien compris, quatre groupes vont faire des déclarations préliminaires: les Manufacturiers et exportateurs du Canada, Jean-Michel Laurin; l'Association des produits forestiers du Canada, Marta Morgan; le Réseau des ingénieurs du Québec, Étienne Couture; et l'Association de la construction navale du Canada, Peter Cairns.
J'aimerais commencer par M. Cairns de l'Association de la construction navale du Canada. Je vous demanderais de nous faire une brève déclaration préliminaire.
Bon après-midi, mesdames et messieurs. Je tiens à vous remercier de m'offrir l'occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui à propos du projet d'accord de libre-échange Canada-Corée.
Mes remarques se fondent sur le principe selon lequel le libre-échange doit aussi être juste. C'est un aspect primordial pour les constructeurs de navires, parce que jusqu'à présent cela a été très peu évident dans notre secteur.
Que font les constructeurs de navires? Je n'ai pas l'intention de faire preuve de condescendance à votre égard, mais je constate que très peu de Canadiens sont au courant de l'étendue des activités de notre industrie. Non seulement nous construisons, convertissons et réparons des navires, mais nous construisons et fabriquons des pièces pour notre industrie gazière et pétrolière offshore. L'industrie de la construction navale du Canada a joué un rôle important dans les projets Hibernia, Terra Nova et White Rose au large de notre côte atlantique.
D'importantes entreprises comme Lockheed Martin, General Dynamics, L-3, Thales Canada et SNC-Lavalin, pour n'en nommer que quelques-unes, ont toutes des divisions qui fournissent de l'équipement perfectionné pour les navires, et certaines sont membres de l'Association de la construction navale.
Certains considèrent l'industrie de la construction navale comme une industrie traditionnelle. C'est faux. Les systèmes informatiques et les composantes intégrées dans une frégate de patrouille canadienne sont beaucoup plus sophistiqués que ceux qui se trouvent à bord des automobiles, des avions ou même de la navette spatiale.
L'Accord nord-américain de libre-échange, l'ALENA, a été très bénéfique pour le Canada. Les États-Unis ont ouvert leur marché aux entreprises canadiennes et en définitive, de nombreux Canadiens ont prospéré. Mais le secteur de la construction navale a été écarté de l'ALENA, nous privant ainsi l'accès au marché le plus important et le plus naturel. Pourquoi? Les États-Unis considèrent les navires, le transport maritime et la construction navale comme des aspects essentiels de la défense et la sécurité de leur pays. Ils ne sont pas disposés à les marchander. Dans les négociations qu'ils viennent de conclure avec la Corée, je n'ai trouvé aucune indication montrant que l'industrie américaine de la construction navale en faisait partie de quelque façon que ce soit.
Il est intéressant de constater que la réussite ou l'échec des négociations avec l'Association européenne de libre-échange, l'AELE, dépendait d'un accord sur la construction navale. La Norvège, qui est le seul pays constructeur de navires parmi les membres de l'Association européenne de libre-échange, s'est montrée intraitable sur ce point. Pourquoi? Elle voulait le libre accès à notre secteur pétrolier et gazier offshore et aux ressources qui, aux dires des analystes, se trouvent dans l'Arctique.
La Corée du Sud est le plus gros constructeur naval au monde. Si elle occupe aujourd'hui cette place, c'est qu'elle s'était dotée d'une stratégie nationale en ce sens. Dans son quatrième plan quinquennal de 1997 à 1981, elle a fait de l'industrie lourde, et en particulier de la construction navale, une priorité. Au moment de son sixième plan quinquennal, l'industrie de la construction navale affichait une croissance de 51 p. 100.
Au début des années 1990, la Corée a triplé sa capacité et était l'un des principaux responsables de la surcapacité qui a frappé l'industrie à l'échelle mondiale au cours des années 1990. Pour utiliser cette capacité, la Corée a réduit ses prix de 30 p. 100 et a ainsi porté sa part de marché à 70 p. 100.
Il est généralement reconnu que la Corée a utilisé l'argent du Fonds monétaire international pour remettre à flot son industrie de la construction navale pendant la crise monétaire asiatique de 1996. Il ne fait aucun doute que la position dominante qu'exerce la Corée dans le secteur de la construction navale est attribuable à des subventions et à une aide généreuse de la part du gouvernement.
Le problème devant lequel nous nous trouvons consiste à déterminer si nous pouvons exercer une concurrence dans le cadre de la libéralisation des échanges et comment arriver à le faire. La comparaison entre la participation de l'État dans le cas de la Corée — et en fait aussi de la Norvège — et l'équivalent ici est peu encourageante. Le résultat est que nous sommes loin d'être sur un pied d'égalité.
Je tiens à souligner que nous ne sommes pas restés assis à ne rien faire en nous tordant les mains de désespoir à propos de cette question. Lorsque le ministre Emerson portait une cravate de couleur différente et était ministre de l'Industrie, nous lui avons proposé une stratégie de transformation préconisant l'élimination des droits de douanes.
Malheureusement, avant que des mesures puissent être prises, le gouvernement a changé. Nous avons présenté une version similaire mais moins compliquée au ministre Bernier. En juin de cette année, soudainement et sans consultation, le ministre MacKay a rétabli la politique d'achat de produits canadiens et a annoncé qu'un mécanisme de financement structuré serait mis sur pied pendant trois ans, mais avec un financement minimal — selon nous.
Pour ce qui est de la taille de l'industrie, la construction navale au Canada est une petite industrie. Le nombre d'emplois directs est d'environ 5 000, mais nous faisons appel à la sous-traitance pour une bonne partie de nos activités. Si on compte ces gens de métier qui travaillent pour l'industrie de la construction navale, nos effectifs représenteraient environ 20 000 salariés directs.
L'aspect positif, c'est qu'on prévoit que le gouvernement donnera beaucoup de travail au cours des 20 prochaines années, et il faut que nous obtenions ces contrats. L'aspect négatif, c'est que le gouvernement n'a pas vraiment la réputation d'être un client fiable.
Quoiqu'il en soit, l'avenir nous inquiète. Nous avons d'excellents techniciens, d'excellents chantiers navals, mais nous n'avons jamais bénéficié des avantages qui ont fait d'un pays comme la Corée un chef de file à l'échelle mondiale. Nous commencerons en nette position d'infériorité. Nos négociateurs le savent, mais ils ne peuvent que reporter certaines mesures dans le respect du calendrier de réduction graduelle déjà convenu.
Les économistes diraient qu'il faudrait laisser agir les forces du marché, qu'il y aura des gagnants et des perdants, mais qu'en règle générale le libre-échange sera favorable au PIB. Les consommateurs en profiteront et des emplois seront perdus, mais ils seront remplacés par d'autres emplois. Cela reste à prouver. Et les économistes ne se trouvent pas en première ligne. Les emplois qui seront perdus seront des emplois du secteur manufacturier qui font appel à des compétences extrêmement spécialisées. Nous constatons déjà la disparition de ces emplois au profit de la région Asie-Pacifique. À mon avis, ce n'est qu'une question de temps avant que des emplois de haute technologie disparaissent aussi. Et c'est la raison pour laquelle l'écart entre les riches et les pauvres se creuse de plus en plus chaque jour.
La politique du Canada en matière de libre-échange doit envisager sérieusement une stratégie pour l'industrie manufacturière. Personne n'est parvenu à nous dire comment on envisage l'avenir de l'industrie de la construction navale après le libre-échange. Il n'existe aucune stratégie. D'après ce que je peux constater, le libre-échange avec l'Amérique du Nord, avec l'Europe, la Corée et Singapour, n'offrira que peu, et encore, d' avantages à l'industrie de la construction navale au Canada.
De plus en plus d'experts émettent l'hypothèse selon laquelle le passage du Nord-Ouest sera libre de glaces plus tôt qu'on ne le croit. Bien que les avions et les satellites jouent un rôle dans la protection de notre souveraineté dans cette région, le gros du travail incombera aux navires de la marine et de la Garde côtière. De façon générale, ces navires devront être construits et entretenus au Canada par des Canadiens. L'industrie de la construction navale est l'un des organes de soutien de la marine et de la Garde côtière. Elle fait partie de l'équipe qui défend les frontières maritimes du Canada.
Je terminerai par une citation de Joseph Stiglitz, un des conseillers économiques du président Bill Clinton qui allait devenir l'économiste en chef et le vice-président de la Banque mondiale. Il a déclaré ceci: « La plupart des pays industrialisés — dont les États-Unis et le Japon — ont bâti leur économie en protégeant de façon judicieuse et sélective certaines de leurs industries jusqu'à ce qu'elles soient suffisamment fortes pour faire concurrence aux entreprises étrangères ». Le Canada aurait peut-être intérêt à envisager une stratégie similaire.
Je vous remercie.
Je vous remercie.
Nous allons maintenant passer à M. Laurin qui représente les Manufacturiers et exportateurs du Canada.
Je suis ici cet après-midi pour représenter les Manufacturiers et exportateurs du Canada. Nous sommes la principale association commerciale et industrielle du Canada. Je parlerai brièvement de la situation actuelle des manufacturiers et des exportateurs du Canada, après quoi j'aborderai certaines des difficultés, des débouchés et des priorités qui se rattachent à l'accord de libre-échange en train d'être négocié avec la Corée.
Le secteur que nous représentons est assez important au Canada puisque 16 p. 100 du PIB du Canada sont attribuables au secteur manufacturier, comme 21 p. 100 des exportations. Il s'agit du secteur économique le plus important du Canada. Un autre aspect important du secteur manufacturier, est que chaque dollar d'extrant produit 3,05 $ en activité économique d'ensemble. On le constate d'ailleurs lorsqu'une usine ferme ses portes dans une petite collectivité éloignée. Habituellement, cette collectivité connaît de graves difficultés économiques.
Notre secteur est actif dans pratiquement tous les pays du monde et il exporte vers 200 pays environ. Nous représentons environ les deux tiers des exportations canadiennes de produits et de services. Par conséquent, la politique commerciale est incontestablement une question que nos membres considèrent importante.
Comme vous le savez sans doute, les manufacturiers et les exportateurs au Canada font à l'heure actuelle l'objet d'énormes pressions pour tâcher de s'adapter à la valeur élevée du dollar canadien. À l'heure actuelle, le dollar s'échange à environ 99¢ américains. Il s'agit d'une appréciation de 60 p. 100 depuis environ cinq ans. Bien que depuis le début de l'année, la valeur du dollar a augmenté d'environ 16 p. 100. Cela est attribuable à un certain nombre de facteurs dont je vais traiter dans ma présentation.
Il faut bien comprendre qu'à l'heure actuelle, les manufacturiers ont énormément de difficultés à réaliser des profits. D'une part, ils doivent composer avec cette appréciation rapide du dollar, et il leur est très difficile d'augmenter leur prix à cause de la concurrence. En fait, si on regarde les chiffres, les prix à l'exportation ont augmenté de 4 p. 100 seulement au cours des cinq dernières années. Donc essentiellement, la hausse du dollar a durement frappé les manufacturiers. Par exemple, s'ils vendaient aux États-Unis un produit qui valait 100 $ américains il y a cinq ans, cela représentait 160 $ canadiens. Aujourd'hui, cela ne représente plus que 99 $. C'est donc un dur coup, surtout pour les manufacturiers.
D'un autre côté, il y a ce que l'on appelle la compression des coûts. Le coût des intrants, qu'il s'agisse des matériaux, des intrants ou de l'énergie, a augmenté énormément ces dernières années. Un grand nombre d'entreprises réduisent leurs frais généraux pour pouvoir poursuivre leurs activités. C'est la raison pour laquelle environ 300 000 emplois ont été supprimés dans le secteur manufacturier au Canada au cours des cinq dernières années.
Pour passer à l'accord de libre-échange en train d'être négocié avec la Corée, nous avons déterminé certains des problèmes qu'il présente. Tout d'abord, il faut bien comprendre que la priorité des manufacturiers à l'heure actuelle est de composer avec la cherté du dollar, c'est-à-dire en agissant sur les prix de revient. C'est la raison pour laquelle il y a eu beaucoup de mises à pied. C'est l'une des raisons, mais ils essaient également d'améliorer la productivité dans leurs usines pour conserver leur part de marché, au Canada comme sur leur principal marché d'exportation, les États-Unis.
Si vous en parlez aux manufacturiers, ils vous diront que la croissance future dépend de leur capacité d'investir dans la modernisation de leurs usines, dans leurs employés et dans l'amélioration de leurs compétences, dans l'innovation, dans le développement de produits et de marchés. C'est ce qu'ils doivent faire pour réussir à long terme, mais cela est très difficile à l'heure actuelle parce que leurs marges bénéficiaires sont très serrées.
J'ai inclus dans la présentation certaines données qui sont tirées de notre plus récente étude sur la gestion, qui a été publiée en octobre dernier. On y signale certains des défis actuels ainsi que les déterminants de la croissance indiqués par les manufacturiers.
Ce qui nous pose problème entre autres, c'est le moment choisi pour négocier cet accord de libre-échange. L'industrie canadienne vit à l'heure actuelle une situation très difficile. Elle fait déjà l'objet d'une concurrence accrue au Canada et aux États-Unis. On craint que cet accord de libre-échange accroisse encore plus la concurrence à l'échelle nationale et sur notre principal marché d'exportation, les États-Unis.
D'un autre côté, cet accord de libre-échange pourrait nous offrir certains avantages si les exportateurs canadiens obtiennent réellement un meilleur accès au marché coréen. Il y a des problèmes qui s'y rattachent, mais un grand nombre d'exportateurs vous diront que ce n'est même pas un marché qu'ils envisagent parce qu'il a la réputation d'être fermé et protégé. Deuxièmement, un grand nombre d'entreprises ne prévoient tout simplement pas d'élargir pour l'instant leurs activités dans cette région du monde.
Les manufacturiers et exportateurs du Canada sont tout à fait partisans des accords commerciaux s'ils offrent un accès réel aux marchés étrangers et prévoient l'élimination des barrières non tarifaires, qui représentent un gros problème lorsqu'il s'agit du marché coréen.
Maintenant, si nous passons à certains des débouchés qu'offre cet accord commercial, je crois qu'il nous offre trois principaux débouchés. Le premier est pour les entreprises qui sont déjà présentes sur le marché de la Corée du Sud. Cet accord commercial est très important pour elles, compte tenu du fait que les États-Unis ont négocié et signé une entente avec la Corée. Cet accord n'a pas encore été ratifié, mais s'il l'est, elles craignent que les prix deviennent tellement élevés qu'elles seront évincées du marché de la Corée du Sud. Donc elles considèrent qu'il est important que le Canada emboîte le pas aux États-Unis et conclue un accord.
Le deuxième débouché qu'offrirait un accord commercial, c'est que les exportateurs visent à étendre leurs activités à un plus grand nombre de marchés d'exportation. Ils ont beaucoup mis l'accent sur les États-Unis au cours des 15 à 20 dernières années. Je pense qu'un grand nombre d'entreprises visent à étendre leurs activités à l'extérieur de l'Amérique du Nord. Si vous regardez les chiffres, notre part des exportations vers les États-Unis est tombée de 87 p. 100 à 81 p. 100 au cours des cinq dernières années. Cela montre donc bien qu'un grand nombre d'entreprises se mondialisent. Dans notre étude, 8 p. 100 des entreprises sondées ont indiqué que la Corée représentait pour elles une possibilité de croissance future. C'est donc un marché qui intéresse certaines entreprises.
Le troisième débouché qui s'offre à nous c'est l'existence de possibilités d'impartition à l'échelle mondiale, quoi que limitées pour les entreprises qui envisagent d'importer certains intrants provenant d'un pays où les coûts sont moins élevés.
En conclusion, je pense que la grande priorité pour nous, en ce qui concerne les négociations commerciales en cours, c'est de régler le problème des barrières non tarifaires. Ces dernières années, nous avons consulté nos membres pour qu'ils nous indiquent quelles sont ces barrières non tarifaires, et nous avons communiqué cette information au gouvernement pour l'aider dans ses négociations. Il importe de préciser qu'ils sont très nerveux.
Pour certains secteurs, les réductions de tarifs sont à l'ordre du jour, particulièrement en ce qui concerne les matières premières ou les produits alimentaires par exemple; mais pour la majorité des autres secteurs économiques, si nous voulons réellement leur assurer un accès réel au marché coréen, il faut s'occuper de toute une série d'obstacles non tarifaires. J'ai énuméré certaines des catégories dans la présentation que je vous ai remise, en ce qui concerne entre autres les normes, les essais et les procédures douanières. Je sais que certains des témoins qui ont déjà comparu devant le comité vous ont indiqué le type d'obstacles ou de barrières auxquels ils font face dans leur propre secteur économique lorsqu'ils essaient de faire des affaires avec la Corée.
Je me ferai un plaisir de transmettre l'information dont nous disposons à votre comité si vous considérez que cela pourrait vous être utile dans le cadre de vos délibérations. Mais je pense qu'il est important de conclure en disant que la grande priorité en ce qui concerne ces négociations de libre-échange, c'est de s'occuper du problème des barrières non tarifaires. C'est ce que les manufacturiers et exportateurs du Canada espèrent.
Je vous remercie.
Je vous remercie.
Je vous remercie de respecter le temps qui vous est alloué.
Nous allons maintenant entendre M. Couture du Réseau des ingénieurs du Québec.
[Français]
Monsieur le président, mesdames et messieurs, bonjour.
Nous sommes heureux d'être parmi vous aujourd'hui pour vous présenter le point de vue du Réseau des ingénieurs du Québec au sujet de la mise en place d'un possible accord de libre-échange entre le Canada et la Corée du Sud. Nous vous remercions de votre invitation.
Dans un premier temps, permettez-moi de vous présenter brièvement le Réseau des ingénieurs du Québec. Il s'agit d'un organisme sans but lucratif qui regroupe 50 000 ingénieurs du Québec. Ceux-ci oeuvrent dans tous les champs d'activité reliés à l'ingénierie, et la mission de l'organisation est de servir leurs intérêts communs. À cette fin, notre organisme fait la promotion de leurs intérêts et offre aux ingénieurs ainsi qu'aux étudiants en génie des services liés à la carrière et des avantages commerciaux.
En matière d'affaires publiques, le Réseau des ingénieurs du Québec s'intéresse grandement aux pressions de la mondialisation et à leurs effets. Nous avons réalisé deux importantes études à ce sujet, et plus particulièrement en ce qui a trait au travail des ingénieurs. C'est par l'entremise des conclusions et des balises de celles-ci que nous vous présentons notre étude sur l'éventuel accord de libre-échange entre la Corée du Sud et le Canada.
Pour bien vous situer, en novembre 2006, notre organisation dévoilait une étude inédite portant sur la délocalisation des emplois en ingénierie au Québec. Récemment, le Réseau des ingénieurs du Québec rendait publique une deuxième étude portant cette fois sur l'avenir du secteur industriel québécois, et nous serions heureux d'en discuter avec vous dans un autre temps.
En ce qui a trait à la signature d'accords de libre-échange, le Réseau des ingénieurs du Québec est en faveur du principe. En effet, les ingénieurs croient que le Canada et le Québec ont plus à gagner qu'à perdre dans la mondialisation. Cela va de soi, pourvu que l'ouverture se fasse de manière équilibrée, c'est-à-dire que les efforts visant à développer notre économie aillent de pair avec les efforts déployés pour rendre nos entreprises plus compétitives. De même — et c'est ce qu'indiquent nos études —, à partir du moment où l'on ne peut se soustraire à la mondialisation de l'économie, il faut tenter d'en tirer le meilleur parti.
Cela étant dit, les ingénieurs sont des gens pratiques qui, dans le cadre de leur travail, doivent savoir où ils s'en vont pour obtenir les résultats visés. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'ils proposent, entre autres, la mise en place d'une politique industrielle forte et cohérente au Québec avec des objectifs précis pour que le secteur industriel puisse s'adapter plus rapidement à la situation critique que nous vivons actuellement.
Pour ce qui est de l'accord de libre-échange potentiel entre le Canada et la Corée du Sud, les ingénieurs se demandent pourquoi on voudrait signer un accord avec ce pays et pourquoi à ce moment-ci. En effet, au-delà du principe selon lequel l'ouverture des marchés par le libre-échange est bénéfique aux économies visées, quel est le plan d'action global du gouvernement fédéral en matière d'ouverture des marchés étrangers pour nos entreprises, et est-il cohérent?
Une partie de la réponse se trouve dans le plan économique du gouvernement qui se nomme Avantage Canada et dont un des éléments clés est la Stratégie commerciale mondiale. À la lecture de celle-ci, on constate que la stratégie vise, d'une part, à mener à terme les négociations actuelles d'accords de libre-échange et, d'autre part, la conclusion d'accords régionaux bilatéraux au chapitre du commerce, idéalement avec nos partenaires de l'ALENA.
En juin dernier, le Canada signait un accord de libre-échange avec les membres de l'Association européenne de libre-échange, soit l'Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse. Il s'agit du premier accord de libre-échange signé par le Canada depuis six ans. Le Canada vient par ailleurs de lancer des négociations de libéralisation du commerce avec la Colombie, le Pérou et la République dominicaine. Il entame ou poursuit des discussions similaires avec des pays d'Amérique centrale, soit le Salvador, le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua, de même qu'avec les pays de la Communauté des Caraïbes. Le Canada espère conclure des accords de libre-échange avec la Corée du Sud et Singapour, il négocie des accords de protection des investissements avec la Chine et l'Inde, et il a engagé des pourparlers en ce sens avec le Vietnam et l'Indonésie.
Bref, devant ces faits, le Réseau des ingénieurs constate que la vision globale du gouvernement en matière d'ouverture des marchés pour nos entreprises est de poursuivre ce qui avait été débuté et de continuer dans la voie de la libéralisation des échanges commerciaux avec les pays intéressés et, idéalement, avec ceux de notre continent. Cela est bien mais insuffisant du point de vue des ingénieurs. Selon nous, il y aurait lieu de donner priorité davantage aux pays ou aux régions avec qui le Canada devrait entamer ou poursuivre des accords de libéralisation du commerce, et ce, dans le but de favoriser l'adaptation de nos entreprises dans le contexte économique actuel. Je vous rappellerai que plus d'un emploi sur cinq au Québec a été perdu dans le secteur manufacturier depuis cinq ans.
Aussi, à la suite de la réalisation de son étude sur l'avenir du secteur industriel, le Réseau des ingénieurs du Québec a déterminé deux axes prioritaires d'intervention au chapitre du développement du commerce pour nos entreprises.
Le premier consiste à faciliter les échanges commerciaux sur l'ensemble du territoire canadien pour accroître les marchés des entreprises du secteur industriel. Trop de barrières interprovinciales subsistent encore aujourd'hui.
Pour ce qui est du deuxième axe, le Réseau des ingénieurs du Québec croit que le Canada devrait poursuivre prioritairement et activement des négociations visant l'établissement d'un accord de libre-échange avec l'Union européenne. En effet, nous sommes d'accord sur la demande et les démarches du premier ministre Charest en faveur de la réalisation d'un tel accord. Le marché européen est l'un des plus gros et des plus riches de la planète. La demande pour les produits étrangers est élevée, et une telle entente pourrait entraîner une hausse des exportations canadiennes de 2,4 milliards de dollars par année. De plus, un tel accord pourrait développer des emplois de haut niveau et mieux permettre à nos entreprises de concurrencer les pays en émergence. Mais encore, les charges sociales, les charges environnementales et le niveau des salaires de l'Union européenne sont similaires à ceux que l'on retrouve ici.
Comme on l'a vu par le passé, nos entreprises peuvent concurrencer des entreprises qui jouent selon les mêmes règles du jeu. Aussi, pour éviter d'affronter la concurrence à armes inégales, le Réseau des ingénieurs du Québec recommande au gouvernement fédéral de ne pas libéraliser davantage le commerce avec les pays qui obtiennent un avantage économique indu par le non-respect de l'environnement, des droits humains, des droits du travail — dont l'exploitation du travail des enfants —, de la liberté d'association syndicale, de la propriété intellectuelle et de l'absence de lutte vis-à-vis la contre-façon.
En ce qui a trait à la Corée du Sud, ce pays est considéré comme la 11e puissance économique de la planète et il n'est plus associé aux pays en développement, mais bien aux pays développés. De même, sur le plan du respect des droits humains et autres, on ne peut l'accuser de ne pas respecter les règles de base minimales. Cependant, la question demeure: le Canada devrait-il quand même aller de l'avant avec un accord de libre-échange avec ce pays?
Les États-Unis et la Corée du Sud ont signé le 2 avril dernier un accord de libre-échange, le plus important pour les Américains depuis l'ALENA. Le Canada a un traité de libre-échange avec les États-Unis, et ceux-ci sont notre plus gros partenaire commercial. Aussi, la logique voudrait que le Canada aille de l'avant avec la conclusion d'un accord de libre-échange avec la Corée du Sud. En effet, le Canada se trouve actuellement dans une situation où il est à la remorque des États-Unis. Aussi, si rien n'est fait, cela permettra éventuellement aux entreprises américaines de jouir d'un avantage économique important sur le marché coréen face à nos entreprises. Cependant, cette situation met beaucoup de pression sur les négociateurs canadiens, car si le Canada signe un accord de libre-échange avec la Corée du Sud, celui-ci devra être au moins aussi bon que celui qui a été signé entre les États-Unis et la Corée.
Sur le plan économique, plusieurs questions restent en suspend quant à savoir si le Canada devrait signer un accord de libre-échange avec ce pays. La question centrale est de savoir si un accord de libre-échange avec la Corée du Sud va dans le sens de nos intérêts, notamment ceux du secteur industriel. Selon les données de Statistique Canada, les balances commerciales du Canada et de la Corée du Sud ont été déficitaires pendant huit ans, entre 1994 et 2003. En proportion de la valeur totale des échanges de marchandises avec la Corée du Sud, le déficit commercial est passé de 6 p. 100 en 1994 à 46 p. 100 en 2003. Le déficit commercial continue de se creuser; il a augmenté de 68 p. 100 entre 1998 et 2006 et, en 2006, le déficit de la balance commerciale s'élevait à 2,5 milliards de dollars. Déjà, avec les barrières à l'entrée au commerce, les produits coréens parviennent facilement à percer le marché canadien. Pendant ce temps, nos produits ont de la difficulté à percer le marché coréen.
L'ouverture des marchés à ce moment-ci entraînerait logiquement une augmentation des importations de la Corée. La majorité des produits expédiés au Canada par les entreprises sud-coréennes sont des produits à haute valeur ajoutée, comme les automobiles, les téléviseurs, les magnétoscopes, les électroménagers et les semi-conducteurs. Nous achetons leurs produits hautement manufacturés, tandis que les Coréens nous achètent, dans une bonne proportion, de la pâte de bois, du chardon et de l'aluminium, soit des produits peu ou pas manufacturés et de moins grande valeur ajoutée. Nous sommes déjà perdants au change sur le plan de la qualité, car on vend moins, et nous le sommes aussi sur le plan de la valeur ajoutée, car on vend moins de valeur ajoutée.
Cela mène à d'autres questions importantes. Pourquoi nos entreprises vendent-elles moins en Corée que les entreprises coréennes ne vendent ici? Et pourquoi ne vendent-elles pas de produits à plus haute valeur ajoutée? Il faut changer cette situation et travailler auprès de nos entreprises pour qu'elles soient présentes en Corée et ailleurs dans le monde. Pour ce faire, il faut soutenir davantage et mieux nos entreprises.
Il faut notamment augmenter le nombre d'entreprises exportatrices, de même que la qualité, la valeur, la diversité et la fréquence de leurs exportations. Pour ce faire, il faut augmenter la productivité générale de nos usines. Il faut développer une vision commune du développement de nos entreprises grâce à une politique industrielle forte et cohérente dont le prolongement pourra se répercuter sur nos échanges commerciaux internationaux.
Réaliser un accord de libre-échange avec la Corée du Sud ne signifie pas, par ailleurs, que le Canada pourra se reposer sur ses lauriers. Il devra, au contraire, avoir son partenaire coréen à l'oeil. Actuellement, la Corée n'a pas bonne réputation en matière d'ouverture aux produits étrangers et de liberté de commerce. Il faudra que le Canada s'assure que la Corée change son comportement actuel en cette matière s'il ne veut pas que le commerce se fasse à sens unique, c'est-à-dire de la Corée vers le Canada.
En effet, l'Index of Economic Freedom de 2007 classe la Corée du Sud au 89e rang en matière de liberté de commerce derrière, entre autres, le Kenya, la Mongolie et la Birmanie. On peut y lire ce qui suit, en anglais, sur la liberté de commerce de la Corée du Sud:
[Traduction]
Le tarif moyen pondéré de la Corée du Sud était de 7,9 p. 100 en 2005. Des tarifs prohibitifs, des règlements et des normes non transparents et restrictifs, des taxes à l'importation, la restriction des importations, une application timide des droits de propriété intellectuelle, des subventions à l'exportation et des obstacles à l'accès aux marchés des services font grimper le prix de revient.
[Français]
Quand on parle de protection de la propriété intellectuelle bafouée, cela vient nous chercher en tant qu'ingénieurs, car c'est nous qui sommes au coeur du développement des innovations.
Par ailleurs, comparativement, le Canada se classe en cinquième position en matière de liberté de commerce sur les 157 pays recensés par cet index. Aussi, on a beau avoir un accord de libre-échange qui élimine les tarifs, mais si les barrières non tarifaires subsistent et si la Corée n'adhère pas à l'esprit du libre-échange, alors les entreprises d'ici ne pourront pas en bénéficier.
En conclusion, le Réseau des ingénieurs du Québec n'est pas contre la mise en place d'une zone de libre-échange, pas plus qu'il n'est contre un accord de libre-échange avec la Corée du Sud. Cependant, les ingénieurs québécois pensent qu'un accord de libre-échange avec la Corée du Sud devrait satisfaire à certaines conditions, à savoir: s'insérer dans une vision plus précise du Canada en matière de libéralisation de ses échanges commerciaux sur la scène internationale; être aussi avantageux ou plus avantageux que l'accord de libre-échange signé entre la Corée et les États-Unis; inclure des engagements de la Corée visant à éliminer ses obstacles à la liberté de commerce pour faire en sorte que la lettre et l'esprit du traité soient respectés; et être accompagné d'un engagement formel du gouvernement de soutenir davantage les entreprises canadiennes, particulièrement celles du secteur industriel, pour qu'elles développent une plus grande présence sur les marchés internationaux.
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Je vous remercie, monsieur Couture.
Nous allons maintenant entendre Marta Morgan, de l'Association des produits forestiers du Canada.
Je vous remercie, monsieur le président.
Je tiens à vous remercier de m'avoir invitée à comparaître devant vous aujourd'hui et de me permettre d'avoir le dernier mot parmi les témoins que vous entendez aujourd'hui.
Je commencerai par dire que l'Association des produits forestiers du Canada est le porte-parole de l'industrie des produits forestiers à l'échelle nationale et internationale.
[Français]
Nous représentons des membres qui exploitent des entreprises dans toutes les provinces du pays dans les domaines des pâtes, du papier et du bois.
[Traduction]
Aujourd'hui, j'aimerais vous faire valoir trois choses.
Premièrement, l'industrie des produits forestiers du Canada est l'une des industries d'exportation du Canada qui connaît le plus de succès, et nous croyons, de façon générale, à l'utilité pour le Canada de la libéralisation tant multilatérale que bilatérale du commerce. Deuxièmement, le marché coréen, à notre avis, offre des possibilités intéressantes pour l'industrie des produits forestiers. Enfin, un accord de libre-échange entre le Canada et la Corée pourrait présenter des avantages importants à notre industrie avec le temps.
J'aborderai chacun de ces éléments à tour de rôle.
Tout d'abord, en tant qu'exportateurs importants, nous constatons chaque jour les avantages de la libéralisation bilatérale et multilatérale du commerce. La valeur annuelle des exportations de l'industrie forestière s'élève à environ 38 milliards de dollars. Nous sommes non seulement l'un des plus importants exportateurs du Canada, nous sommes aussi et de loin le plus gros exportateur de produits forestiers du monde. Simplement à titre de comparaison, le deuxième plus important exportateur de produits forestiers, ce sont les États-Unis, et nos exportations annuelles donnée représentent près du double de celles de nos concurrents américains.
Nous sommes également le plus important exportateur canadien vers la Corée ainsi que vers d'autres marchés non américains comme l'Inde, la Chine et le Japon. En tant qu'important participant aux relations commerciales du Canada, nous avons un vaste point de vue, une grande vue d'ensemble des questions commerciales et un grand intérêt pour ces questions.
Nous considérons qu'il est dans l'intérêt du Canada, en tant que petit pays qui dépend des exportations, de favoriser la libéralisation du commerce. Avec le temps, les accords commerciaux bilatéraux et multilatéraux ont contribué de façon importante à élargir et protéger l'accès aux marchés des produits canadiens. La réduction des tarifs, les règles commerciales et des mécanismes de règlement des différends sont des éléments essentiels des relations commerciales internationales.
Nous avons fermement appuyé les efforts déployés par le gouvernement pour promouvoir la mondialisation des échanges dans le cadre des discussions de Doha à l'OMC, et nous avons joué un rôle de chef de file à l'échelle mondiale au sein de l'industrie des produits forestiers en insistant pour que l'on établisse des accords sectoriels pour réduire les barrières commerciales pour les produits forestiers dans le monde entier. Mais compte tenu des incertitudes de la ronde de Doha et de la rapidité avec laquelle d'autres pays négocient des accords bilatéraux, nous croyons que les accords bilatéraux comme celui que le gouvernement du Canada envisage avec la Corée, sont des compléments indispensables aux négociations commerciales multilatérales.
Ma deuxième observation, c'est que nous croyons que le marché coréen offre des possibilités à l'industrie canadienne. En 2006, nous avons expédié vers la Corée des produits forestiers d'une valeur d'environ 500 millions de dollars. Cela représentait une augmentation de 13 p. 100 par rapport à l'année précédente, et par les neufs premiers mois de 2007, nos exportations sont déjà en hausse de 12 p. 100.
À l'heure actuelle, nous exportons surtout de la pâte, mais c'est au niveau des exportations de bois massif que nous prévoyons les plus importantes possibilités de croissance en Corée. Depuis 2005-2006, les exportations de produits de bois massif vers la Corée ont augmenté de 36 p. 100. Cela s'explique par la longue tradition de la construction en bois en Corée, et notre expérience du développement de marchés au Japon, en Chine et en Corée nous a appris qu'il s'agit d'un facteur-clé dans la création des débouchés pour les produits canadiens.
L'industrie travaille fort en Corée, grâce à l'appui du programme canadien sur le bois et des gouvernements provinciaux, pour développer ce marché. Nous avons établi des partenariats avec des associations de producteurs de bois de la Corée — la Korea Wood Building Design Association et la Korea Log Builders Association — afin d'étudier des questions comme la formation des travailleurs et le co-développement.
Un autre facteur qui nous porte à croire qu'à moyen terme ce marché offre de solides possibilités pour les produits canadiens du bois, c'est que la Corée vient de rendre public un plan économique national dans lequel elle a indiqué son intention de modifier la situation actuelle du logement en Corée, à savoir qu'environ 75 p. 100 de l'inventaire des logements disponibles se trouvent dans des tours d'appartements, afin d'arriver à un marché du logement où 50 p. 100 de logements seraient situés dans des tours et 50 p. 100 dans des basses d'appartements multirésidentiels. Ces dernières sont précisément les types d'immeubles qui se prêtent à la construction en bois.
Ma dernière observation sera que nous croyons que l'Accord de libre-échange Canada-Corée pourrait offrir à notre industrie un certain nombre de nouveaux débouchés commerciaux dans ce pays.
Tout d'abord, en ce qui concerne les tarifs, les tarifs imposés aux produits du bois canadiens à destination de la Corée se situent à l'heure actuelle entre 5 p. 100 et 8 p. 100. Pour ces produits, que nous exportons déjà sur une certaine distance, cela peut représenter un désavantage important au niveau des prix. Comme nos principaux concurrents, comme les États-Unis et le Chili, négocient des accords de libre-échange avec la Corée, il est essentiel que nous ayons la parité avec eux.
Deuxièmement, en ce qui concerne les barrières non tarifaires, la Corée, comme la plupart des pays, possède ses propres codes et ses propres normes du bâtiment. Si nous voulons approvisionner son marché, nous devrons respecter ces normes. Nous pouvons considérablement réduire les coûts de conformisation par une reconnaissance mutuelle des résultats des essais effectués, par exemple, pour établir les normes acoustiques et d'incendie entre les établissements d'essai de la Corée et du Canada. C'est un aspect sur lequel le gouvernement du Canada travaille de près avec l'industrie afin d'élaborer une formule pour la reconnaissance mutuelle des résultats d'essais dans le cadre d'un éventuel accord de libre-échange Canada-Corée.
Enfin, en ce qui concerne les subventions, l'octroi de subventions de la part du système bancaire pour de nouvelles capacités, particulièrement en ce qui concerne l'industrie du papier couché de pâte maigre en Corée est quelque chose qui nous préoccupe. Comme nous fonctionnons sur les marchés mondiaux, une capacité subventionnée réduit les marchés et les prix pour l'ensemble des intervenants. Selon nous, il serait bon que l'accord de libre-échange Canada-Corée prévoie des mesures plus vigoureuses pour limiter le subventionnement de la capacité.
Voilà donc nos trois constats. En tant qu'importante industrie négociante dans un petit pays, nous estimons que des règles commerciales strictes, tant au niveau bilatéral que multilatéral,sont essentielles au maintien de la prospérité économique du Canada. Nous considérons que le marché coréen offre d'importantes possibilités de croissance, et nous estimons qu'un accord de libre-échange Canada-Corée pourrait traduire des résultats pour l'industrie des produits forestiers en réduisant les tarifs, en réglant le problème des barrières non tarifaires et en limitant les subventions.
Je vous remercie.
Merci beaucoup, madame Morgan.
Cela met fin aux présentations, et je tiens à remercier chacun d'entre vous. Ces exposés nous sont très utiles. Nous allons maintenant passer aux questions.
Monsieur Bains.
Je vous remercie de vous être joints à nous. Aujourd'hui, c'est notre dernière journée ici. Je suis heureux que nous ayons eu l'occasion de vous entendre et aussi la possibilité de vous poser des questions.
Nous voulons tous, et je crois que le comité le reconnaît, promouvoir le libre-échange, mais nous tenons également à nous assurer que ce libre-échange soit juste. Nous reconnaissons également l'importance du secteur manufacturier et du rôle qu'il joue dans l'économie canadienne, et de l'influence qu'il exerce sur certains secteurs qui connaissent à l'heure actuelle de très grandes difficultés. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé d'entreprendre cette étude avec la Corée du Sud.
Ma première question s'adresse à chacun d'entre vous. L'équipe de négociation ou le gouvernement qui négocie à l'heure actuelle un accord de libre-échange avec la Corée du Sud vous ont-ils consultés ou vous ont-ils demandé de présenter des mémoires ou de fournir vos commentaires?
Nous avons été régulièrement consultés par les négociateurs fédéraux de l'accord de libre-échange Canada-Corée au fur et à mesure.
Nous aussi, dans l'industrie de la construction navale. En fait, nous avons été bien représentés par nos négociateurs. Je pense que le problème, c'est tout simplement qu'il y a de graves lacunes à combler.
Je suis heureux que certains aient été consultés. Je pense que c'est un pas dans la bonne direction.
Le principal problème, et chacun d'entre vous y a fait allusion d'une certaine façon et a exprimé des préoccupations à cet égard, c'est l'accès au marché. Cela me semble être la question fondamentale en ce qui concerne ce possible accord de libre-échange. Cela me semble être le principal enjeu.
Monsieur Laurin, vous avez mentionné qu'un grand nombre de vos membres sont victimes de barrières non tarifaires. Vous avez indiqué que vous pouviez nous fournir une liste plus détaillée, parce que celle qui se trouve dans votre trousse d'information est de haut niveau... certaines des préoccupations que vous avez abordées.
J'aimerais que vous commentiez cet aspect, et si vous pouviez également nous fournir une liste détaillée d'exemples précis d'entreprises ou de compagnies qui rencontrent des barrières non tarifaires ou d'autres obstacles à l'accès au marché coréen. Cela nous permettrait de mieux comprendre ce que vivent les entreprises.
Pourriez-vous nous parler de certains des cas dont vous ont parlé vos membres?
Juste pour préciser publiquement, on nous a consultés, très tôt et pendant le processus. À mon avis, la communication avec le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international n'a pas posé problème sur cette question. Quant aux barrières non tarifaires, la liste est longue donc je ne voulais pas —
Il me ferait plaisir de partager la liste avec les membres du comité.
Pour ce qui est des problèmes que vous connaissez, certains sont liés aux procédures de dédouanement à l'importation, par exemple, où certains producteurs d'aliments déclarent que les délais avec la Corée sont quatre ou cinq fois plus longs qu'avec d'autres pays asiatiques comparables. Des normes reconnues internationalement existent pour l'exportation de produits alimentaires. Ils disent donc que cette situation constitue une sorte de barrière non tarifaire.
Les critères d'évaluation fondés sur la science sont un autre problème. Cela existe pour des produits alimentaires, et pour d'autres types de produits aussi. C'est un problème qui persiste pour beaucoup de secteurs. Parfois il s'agit d'exigences en matière d'étiquetage qui changent, et le processus n'est pas transparent.
Est-ce que ces problèmes se posent uniquement pour les compagnies canadiennes, ou selon votre expérience et ce que vous avez entendu, est-ce que ces problèmes s'appliquent à d'autres pays aussi?
Je ne peux pas vous le dire, et j'ai l'impression que ce ne sont pas uniquement des compagnies canadiennes qui se trouvent dans cette situation.
Vous avez dit que selon vous ce régime est très protectionniste, que l'environnement est protectionniste, c'est la raison pour laquelle je vous demande si les Canadiens sont directement visés ou —
Si vous regardez l'histoire économique de la Corée, vous verrez que sa propre industrie est développée autour de ses champions nationaux, ses chaebols, ses grands conglomérats.
Ils ont un lien très serré avec leurs fournisseurs. Il est donc très difficile de percer. Il a toujours été très difficile de percer ce marché. C'est plus ou moins la même chose au Japon avec les keiretsu. C'est fonction de la structure du marché. Il est très difficile de percer ces marchés en raison de la structure. Lorsqu'on essaie de percer le marché, on est confronté à des règlements gouvernementaux qui rendent les choses difficiles.
Comme je l'ai dit, il me ferait plaisir de partager la liste avec vous.
Les subventions à l'exportation posent certains problèmes aussi. Certains de nos membres disent que la Banque coréenne des importations et exportations subventionne une partie de l'industrie en fournissant des garanties non bancaires et d'autres types d'instruments financiers. Ensuite, il y a toute une liste de problèmes liés, par exemple, à la propriété intellectuelle, et nos amis du Réseau des ingénieurs du Québec en ont évoqué certains.
Beaucoup d'entre vous ont dit avoir été consultés, et vous avez eu l'occasion de fournir des commentaires. Avez-vous eu l'occasion d'examiner des analyses économiques effectués par le ministère ainsi que ses évaluations économiques et environnementales actuelles?
Et si vous avez eu l'occasion d'examiner ces évaluations, êtes-vous d'accord avec l'analyse qui a été préparée — je parle des chiffres par exemple — par Industrie Canada? Je crois que l'on nous a dit que si cet accord de libre-échange devait être négocié et conclu, les pertes d'emplois se chiffreraient à entre 5 et 32 emplois, quelque chose du genre.
Bien franchement, c'est dur à évaluer selon moi. Je ne dis pas que nous ne pouvons pas essayer de le faire. Je crois que le problème principal, lorsqu'on essaie d'évaluer l'impact de cet accord commercial, c'est qu'il est très difficile de chiffrer l'amélioration de l'accès amélioré en résultera en Corée, parce qu'on parle de barrières non tarifaires. Si on parle de barrières tarifaires, on peut facilement les insérer dans une équation, préparer un modèle économique et faire le calcul. Mais on parle ici de barrières non tarifaires, et tout dépend donc de quel genre de meilleur accès cela donnera .
Certains de nos membres disent vouloir des améliorations à ce niveau-là avant que nous-mêmes n' accordions des réductions de certains tarifs.
Seriez-vous en faveur d'un rétablissement provisoire du tarif afin d'atténuer certaines de ces préoccupations? Si, par exemple, on réduisait les tarifs et on signait un accord de libre-échange, mais si l'on voyait que les Coréens continuent à imposer ces barrières non tarifaires, on aurait ainsi en place un mécanisme qui pourrait automatiquement rétablir provisoirement les tarifs.
Je crois qu'il est important de faire en sorte que les échanges soient libres et justes, comme vous l'avez dit. Et il y a les mécanismes de règlement des différends. Il est assez important d'avoir quelque chose qui soit efficace pour régler certaines de ces questions.
Des précédents existent. Lorsque la Chine a adhéré à l'OMC, par exemple, des mesures ont été mises en place parce qu'il s'agissait d'un autre type d'économie.
Je crois que dans le cas de la Corée, comme nous n'avons pas l'habitude de signer des accords avec ce type de pays, il faudrait mettre en place des mesures, non pas pour protéger le marché, mais parce qu'il s'agit de...
Exactement, pour l'accès au marché, car je crois que tout le monde le dit, en réalité la grande question c'est la réduction des barrières tarifaires.
Et pour revenir à votre question initiale, à savoir si nous avions eu l'occasion d'examiner les évaluations d'impact économique, la réponse est oui. Quant à l'impact sur le Canada, encore une fois, nous n'avons pas effectué notre propre étude. Je crois qu'on tirerait des conclusions différentes. Je sais par exemple que les constructeurs automobiles ont effectué une étude et ont tiré des conclusions radicalement différentes de celles qui découlent des études gouvernementales. En fait, le gouvernement a effectué plus d'une étude sur la question, et toutes les conclusions ne sont pas nécessairement pareilles.
Je me mets à votre place. Il est vraiment difficile d'évaluer l'impact global de cet accord commercial. Encore une fois, il est difficile à évaluer, parce que des rapports différents avec des conclusions divergentes ont été publiés. Mais par contre, il est difficile d'évaluer le type de... Il faudrait voir l'accord avant de pouvoir dire s'il est vraiment avantageux ou au contraire coûteux pour l'économie canadienne.
[Français]
Bonjour. Merci de partager quelque peu vos connaissances par rapport aux différents enjeux liés à l'entente bilatérale entre le Canada et la Corée.
Vous savez qu'on a rencontré les représentants syndicaux du secteur de l'automobile. Bien sûr, ils sont contre cette entente; vous l'avez mentionné. Ils ont procédé à une évaluation quand même assez exhaustive et ont conclu qu'ils perdraient de nombreux emplois en raison de cette entente entre le Canada et la Corée.
Quant aux responsables de l'industrie, notamment l'Association des produits forestiers du Canada, ils trouvent que cette entente permettra une création d'emplois et des échanges plus positifs. Quant à l'Association des manufacturiers, elle hésite un peu, bien sûr. En effet, comme vous l'avez dit, le secteur manufacturier a perdu 135 000 emplois, seulement au Québec. On ne veut quand même pas perdre davantage d'emplois, mais plutôt en créer, peut-être. Cette entente entre le Canada et la Corée ne semble pas aller en ce sens pour l'instant.
Ma question sera brève. Je demanderai à mon collègue d'en ajouter une deuxième par la suite.
Le ministre Emerson nous a dit, lors d'une rencontre, qu'on ne pouvait pas évaluer aujourd'hui les échanges bilatéraux sur la base du surplus ou du déficit de la balance commerciale. Ce n'est pas ce qui est important. Enfin, c'est ce qu'il disait. Le fait d'avoir un surplus ou un déficit au chapitre des échanges ne constituait pas un critère important.
J'aimerais vous entendre à ce sujet. Est-ce un critère dont on devrait tenir compte lorsqu'on fait un échange bilatéral avec un pays?
D'autre part, de quels autres critères devrait-on tenir compte pour décider de faire un échange avec un pays?
En ce qui concerne la balance commerciale, c'est un enjeu et ce n'est pas le seul. Je ne pense pas qu'on puisse le rejeter du revers de la main.
Cependant, ainsi que notre collègue l'a mentionné plus tôt, comme on se bute à des barrières non tarifaires, cette libéralisation aura des impacts qui nous toucheront davantage étant donné que les barrières non tarifaires fonctionnent à l'inverse.
Il ne s'agit pas seulement d'une question de volume. En même temps, cela a un impact qu'il ne faut pas négliger.
Permettez-moi d'ajouter une chose.
Il importe de considérer la balance commerciale du Canada ou du Québec dans son ensemble. Globalement, on veut exporter davantage qu'on ne veut importer. Au Canada surtout, comme on a une petite économie, on a besoin de commercer avec le reste du monde pour maintenir notre niveau de vie. Je suis convaincu qu'il faut intensifier les échanges internationaux si notre nation veut continuer à s'enrichir comme telle.
Par contre, pour ce qui est d'un pays en particulier, il faut comprendre de quel type d'échanges il est question. Globalement, il faut exporter plus qu'il ne faut importer. Malheureusement, je crois savoir que le Québec, depuis quatre ans, importe davantage qu'il n'exporte.
Au Canada, on a toujours une balance commerciale positive, mais elle s'effrite d'année en année. Il existe quand même des occasions d'affaires au regard de certains pays. Par exemple, importe-t-on des composantes ou des matières premières auxquelles on ajoute de la valeur, ce qui nous permet d'exporter des produits, que ce soient aux États-Unis, en Europe ou ailleurs dans le monde? C'est le type d'échange en vertu duquel on peut accuser un déficit commercial avec un pays, mais qui nous permet d'avoir un échange encore plus important avec un autre pays.
C'est ainsi qu'il faut analyser ou étudier la question.
J'aimerais juste ajouter une chose.
C'est très important que des accords comportent aussi des méthodes pour régler des problèmes ou des désaccords. Souvent, les barrières les plus difficiles à franchir sont les barrières non tarifaires, qui peuvent se former d'un moment à l'autre.
Lorsqu'une barrière surgit, si on n'a pas de méthode de résolution, pas d'accord de libre-échange ni d'appui politique au plus haut niveau des deux pays pour régler ce problème, on peut alors très rapidement se voir privé d'accès à un marché, sans aucune façon de corriger la situation.
Merci, monsieur le président.
Étant donné qu'on dispose de peu de temps, je serai bref. Ce genre d'échanges avec d'autres pays pose une difficulté qui relève du fait que le Québec et le Canada sont des exportateurs de matières premières. On en a beaucoup et on en exporte.
Ne pensez-vous pas qu'il serait préférable qu'on puisse transformer ici les matières premières, de sorte qu'on puisse exporter les produits de la transformation, plutôt que d'envoyer la matière première ailleurs et d'acheter les produits finis ici?
Je trouve qu'il y a de l'incohérence à cet égard. Que pourriez-vous dire à ce sujet, monsieur Couture et les autres participants?
Certainement. En fait, on ne s'en cache pas. De toute évidence, cela représente une plus grande valeur. C'est même l'une des priorités que nous devons viser, soit de toujours assurer à nos produits exportés le plus de valeur ajoutée possible. Notamment, la modernisation de ces produits laissera place à plus d'innovation. Tel se présente l'avenir; on ne s'en sort pas. Pour ce qui est de nos produits ici, il faut absolument que les matières premières soient transformées ici, si nous voulons maintenir un certain succès commercial, que ce soit avec ou sans entente de libre-échange.
Cependant, au chapitre des innovations, dans le cas d'un pays comme la Corée du Sud, dont on parle ici, il est certain que les produits qu'elle nous envoie présentent une plus grande valeur ajoutée, étant donné qu'elle les fait grâce à une main-d'oeuvre moins coûteuse, et ainsi de suite. Cette situation existe dans plusieurs pays. Il devient alors crucial de favoriser ici les produits à valeur ajoutée, et c'est ce que nous demandions. En effet, nous demandions un engagement formel du gouvernement à soutenir davantage les entreprises canadiennes, car ce chemin reste à faire. On ne peut pas se cacher en se disant que mourront ceux qui mourront; de toute façon, une partie mourra. Cela étant dit, la transition ou le chemin doit se faire à l'aide d'un soutien.
[Traduction]
Est-ce que je peux répondre?
Nous entendons souvent que nous devrions viser l'exportation et fabriquer des produits à valeur ajoutée au lieu des produits sans valeur ajoutée. Je crois que c'est en quelque sorte une voie sans issue. Si vous examinez l'industrie des produits forestiers par exemple, vous constaterez que c'est une des industries qui exigent le plus de capitaux. C'est une des industries les plus productives et où les salaires sont les plus élevés au pays. Donc quel est le message? Le message, c'est que nous exportons des produits primaires et que nous sommes les meilleurs au monde à le faire.
Je crois que c'est là le facteur clé. Où sont nos avantages comparés et où seront ces avantages comparés dans l'avenir, je ne crois pas qu'il s'agit d'un compromis entre la valeur ajoutée et les produits sans valeur ajoutée. Il faut peut-être un jeu des deux, mais il ne s'agit pas vraiment d'un continuum allant du positif au négatif ou du négatif au positif. À l'heure actuelle, nous voyons la valeur ajoutée à notre économie par les ressources naturelles au plan des investissements, des industries secondaires, le haut niveau de productivité, et des emplois très bien rémunérés. Je crois qu'il faut continuer dans ce sens et en même temps mettre l'accent sur les secteurs à valeur ajoutée.
[Français]
Monsieur le président, j'aimerais tout simplement répondre rapidement à la question.
Premièrement, deux tiers des exportations du Canada sont constitués de produits fabriqués. On ajoute donc déjà beaucoup de valeur aux ressources naturelles. Le secteur des ressources naturelles joue tout de même un rôle très important. Bon nombre d'industries de fabrication sont justement situées ici, au Canada, parce qu'on a accès à ces ressources naturelles. On ne peut pas empêcher ces entreprises d'exporter leurs produits à l'échelle mondiale lorsqu'ils sont concurrentiels.
Au fond, il nous faut nous assurer d'être concurrentiels en tant que territoire ici, au Canada ou au Québec, pour attirer les investissements et pour que les ressources naturelles ou les produits soient transformés ici. C'est effectivement préférable. Toutefois, par rapport au marché mondial dans lequel on se trouve, le marché canadien s'avère souvent petit, comme on l'a dit tout à l'heure. Par conséquent, dans le domaine des ressources naturelles, si nous voulons produire en volume suffisant pour devenir concurrentiels, nous devons pouvoir les exporter aux quatre coins du monde.
[Traduction]
Merci pour vos présentations. Nous vous adressons, à vous et à vos familles, nos meilleurs voeux pour le temps des fêtes.
Vos exposés étaient très intéressants et nous vous en remercions. Bien que vous ayez soulevé un grand nombre de points intéressants, j'aimerais m'attarder sur deux choses en particulier.
Nous avons compris, je pense, que nous devons faire face au fait que nos concurrents concluent des accords de libre-échange beaucoup plus rapidement que nous et que ce phénomène dure depuis quelques temps déjà. Nous devons faire face au fait que l'attitude des autorités coréennes par rapport au commerce international a changé du tout au tout au cours des dernières années et qu'elles recherchent assidûment de nouveaux partenaires commerciaux. Nous devons comprendre que si nous ne concluons pas d'entente avec la Corée, ce sont nos concurrents qui le feront. Nous devons comprendre qu'alors nous n'aurions pas accès à l'un des grands marchés potentiels, la porte donnant accès à une région vitale, et dynamique caractérisée par sa croissance et son activité économique. Si on ne prend pas bien conscience de tous ces facteurs, je pense que nous allons de plus en plus traîner de la patte.
J'aimerais vous poser une question très simple. Il me semble évident, d'après vos témoignages, que votre préoccupation principale, ce sont les obstacles non tarifaires et j'espère que je ne m'avance pas trop en disant cela. C'est ce qui est ressorti de chacune de vos interventions jusqu'à présent. Selon vous, comment serait-il possible de régler ce problème des obstacles non tarifaires qui entravent le commerce entre la Corée et le Canada, autrement que par le biais de la négociation d'un accord de libre-échange? S'il existe une meilleure façon de procéder, j'aimerais que vous nous en parliez.
Permettez-moi de répondre rapidement.
Cela fait des années que notre secteur tente de régler ces problèmes, particulièrement en ce qui a trait aux codes du bâtiment. On sait maintenant que ce qui est important, c'est de vendre des produits que les autres désirent acheter. Nous devons leur vendre des biens qui respectent leurs codes. Pour cela, il faut travailler d'arrache-pied avec les agences de réglementation et le secteur afin de comprendre ses exigences pour pouvoir y répondre. À notre avis, un accord de libre-échange conclu entre le Canada et la Corée permettrait d'accélérer ce processus. Bien entendu, l'accord à lui seul ne permettra pas de résoudre tous les problèmes parce qu'ils sont très compliqués et qu'ils sont propres à des secteurs et des exigences particuliers. Mais je pense qu'un accord pourrait accélérer les choses et permettrait de mettre en place des mécanismes visant une résolution plus rapide des problèmes.
Je n'ai rien de mieux à vous proposer.
Nous comprenons maintenant que la plupart du temps, ces accords ne sont pas une fin. Au contraire, ils constituent plutôt un point de départ menant à l'accroissement des débouchés au profit de notre pays et à l'équité dans les échanges commerciaux. Cela m'inquiète quand j'entends certains témoins dire que dans le contexte des négociations, c'est tout ou rien, c'est-à-dire que si l'on n'obtient pas exactement ce qu'on désire on devrait s'en retirer comme si cela nous donnait un avantage ou nous mettait dans une meilleure position vis-à-vis des négociations futures. Très franchement, je trouve ce point de vue assez particulier.
Il y a autre chose à laquelle vous avez fait référence.
Et, Jean Michel, je pense que vous en avez également parlé dans vos observations.
Nous allons utiliser l'exemple de l'accord américain KORUS: les conséquences, pour le Canada, si on ne concluait pas d'accord, si on se retirait des pourparlers et si les autorités américaines, de leur côté, continuent sur leur lancée. Ce n'est pas facile, j'en suis conscient, car je vous demande d'évaluer une perte qui n'a pas encore été subie. Il s'agit donc d'une situation hypothétique. J'aimerais tout de même savoir quels seraient les inconvénients précis que subirait le Canada si les négociations échouaient et si les États-Unis et la Corée renforçaient leurs rapports commerciaux?
L'impact se ferait sentir pour les sociétés canadiennes qui exportent actuellement des produits en Corée et qui se voient imposer des tarifs douaniers, je pense qu'il s'agit essentiellement de produits alimentaires et forestiers, en ce sens qu'elles seraient évincées du marché car elles ne pourraient plus vendre à un prix concurrentiel. On sait que la plupart des concurrents sont aux États-Unis. C'est avec ce pays que se font les échanges, et leurs concurrents pourraient vendre leurs produits à un prix inférieur de 4, 5, 6, 7, voire 8 p. 100. Ainsi, certains exportateurs canadiens risquent d'être évincés du marché.
À ma connaissance la valeur des produits manufacturés exportés en Corée s'élève à environ 2 milliards de dollars par année, et bien qu'elle ne cesse de croître, on peut dire que l'impact ne sera pas si important que cela, étant donné que le Canada exporte au total 400 milliards de dollars. Cela dit, les sociétés qui vont vraiment en souffrir, ce seront celles qui... Il faut savoir que pour certains de nos membres, la Corée est le troisième ou quatrième marché d'exportations. Ainsi, il est important de bien comprendre que pour certaines entreprises, il est important que le Canada continue les négociations.
Permettez-moi un retour en arrière. Je pense qu'on devrait accorder la priorité aux négociations de l'OMC. C'est quelque chose qui est très important pour nos membres. On aimerait mieux, et de loin, que les négociations se fassent de façon multilatérale, mais étant donné le fait que les pourparlers n'évoluent pas aussi rapidement qu'on le voudrait — il faut savoir que certains pays négocient des accords bilatéraux très rapidement, et je pense notamment à la Corée — des fois il faut se dire que même si les États-Unis négocient, le fait que nos pourparlers se fassent simultanément et que nous évoluons un petit peu plus lentement n'est pas un aussi grand inconvénient qu'on aurait pu le penser. Il faudra attendre pour voir ce qu'il adviendra. En tout cas, c'est une question compliquée, comme vous l'avez dit.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais également remercier les témoins.
Permettez-moi d'ajouter quelque chose. Sur la côte ouest, en Colombie-Britannique, la porte d'entrée du Pacifique, nous sommes tous impatients. Le premier ministre, M. Campbell est un fervent défenseur de la porte d'entrée du Pacifique et de l'expansion de nos marchés en Asie. Comme vous le savez, notre secteur forestier a été trois fois meurtri par la hausse du dollar, par l'effondrement de l'économie américaine et par le dendoctrone du pin.
Madame Morgan, j'ai été encouragée par vos commentaires positifs sur le secteur forestier. Nous avons besoin d'une bouffée d'air frais. Vous êtes-vous, dans votre secteur, intéressés aux avantages de cet accord, pas seulement pour la Colombie-Britannique, mais également pour le Québec et l'Ontario où les secteurs forestiers connaissent des problèmes?
Nous n'avons pas fait l'étude quantitative des avantages de l'accord, mais nous avons déjà constaté une croissance rapide du côté des exportations de bois massif — d'environ 25 p. 100 au cours des deux dernières années. Nous estimons que cette croissance serait plus marquée si on pouvait se débarrasser de certains des tarifs douaniers qui existent à l'heure actuelle et qu'elle pourrait atteindre un minimum de 25 p. 100 par an, voire plus. À l'heure actuelle, nous exportons déjà du bois massif pour 125 millions de dollars par an, essentiellement en provenance de la côte ouest, et on peut donc dire que les avantages ne seraient pas négligeables et que cela nous permettrait de diversifier davantage nos marchés.
Ce qu'on ne cesse de constater, c'est que parce que nous exportons tellement vers les États-Unis, lorsque le dollar fluctue ou que nous avons un différend commercial, nous sommes moins vulnérables si nous avons d'autres marchés d'exportation importants.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je suis heureux d'être parmi vous. C'est la première fois que je siège au comité du commerce international.
Il nous suffirait de bâtir des grands navires en bois, dont la moitié pourraient être construits au Québec et exportés, pour régler notre problème. Vous devriez peut-être vous en reparler après notre réunion.
Comme vous le savez, les Américains ne pourrons signer un accord de libre-échange avec la Corée qu'après les prochaines élections présidentielles. C'est en partie la controverse autour des conséquences de cet accord sur l'avenir des Américains qui explique ce retard.
Il y a quelque chose qui se fait aux États-Unis mais pas ici. Depuis 1924, date du premier accord de libre-échange américain, dans tous leurs accords de libre-échange sans exception les autorités américaines excluent et refusent même d'aborder la question de la construction navale parce qu'il s'agit d'un secteur vital pour leurs régions côtières ainsi que le reste du pays. Pourtant, au Canada, il y a un ancien ministre des Finances qui a dit que la construction navale était un secteur en déclin. Ce n'est pas vrai. Moi, je viens d'une région du pays qui va sans doute continuer pendant longtemps à construire des navires. C'est un secteur où abondent les emplois de haute technologie, et je ne parle pas uniquement des ouvriers qui manient l'acier, les riveteuses et les marteaux, il y a aussi des salariés dans les secteurs informatique et technologique. Je vous rappellerai que dans les années 1980, à l'époque du programme des frégates à Saint-Jean, l'Ontario et le Québec profitaient de 25 p. 100 des retombées, et nous sommes sur le point de tout perdre.
Cela m'amène à ma question. Si le fait que les autorités américaines concluent un accord avec la Corée nous inquiète, comme l'a dit M. Pallister, et si cet accord est signé mais passe sous silence un segment très important de leur économie, le Canada ne devrait-il pas faire la même chose pour protéger ce qui, selon moi, est un secteur vital au Canada?
Je vais en profiter, avant que vous ne répondiez, pour poser une deuxième question car autrement, je ne pense pas que j'aurai le temps de le faire. Chaque fois qu'on négocie nos accords de libre-échange, les droits des travailleurs, les normes environnementales, etc. sont toujours traités en marge de l'accord. La réalité, c'est qu'il est très difficile de négocier un accord commercial avec la Chine alors que les Chinois gagnent une fraction de ce qu'on gagne ici. Et ces travailleurs ne sont sans doute pas syndiqués, ils ne bénéficient sans doute pas des mêmes normes en matière de santé que nous. Ne pensez-vous pas que cela met nos producteurs et nos travailleurs dans une situation précaire lorsqu'on négocie avec des pays où les salaires et certaines lois relatives; par exemple, à l'environnement sont différents.
De plus, et je me fais l'avocat du diable, dans le cadre de nos négociations en vue de ces accords de libre-échange, ne devrions-nous pas tenter d'améliorer les normes de travail et les prestations de maladie des travailleurs étrangers? Nous avons essayé de le faire dans le cas du Mexique mais cela n'a pas tout à fait bien marché. Quand on négocie de tels accords, ne pensez-vous pas qu'on devrait faire en sorte que, et pas en marge de l'accord, dans l'accord lui-même, les normes relatives au travail et à la santé ainsi qu'à l'environnement soient aussi bonnes que les nôtres?
Merci.
Permettez-moi de répondre à votre première question.
Ce serait bien d'avoir une loi comme la Jones Act.
Je sais qu'il y a beaucoup de gens au Canada, non seulement les constructeurs de navires mais aussi les armateurs qui seraient bien contents.
Pour être juste, nous avons presque une loi comme celle-là. C'est la Loi sur le cabotage, et elle protège les exploitants de navires au Canada. Pourtant, les constructeurs de navires n'y figurent pas. C'est la seule vraie différence entre les États-Unis et le Canada dans ce domaine. Il y aurait une solution, qui consisterait simplement à nous intégrer à la Loi sur le cabotage. Alors, si j'ose le dire, nous serions tous aux anges.
L'ennui, c'est que cela nous empêche d'entrer aux États-Unis. Comme vous venez de le dire, c'est notre plus grand marché. Alors nous restons là, au nord du 49e parallèle, bloqués derrière des obstacles géographiques. Nous n'avons pas de voisin comme la Roumanie qui peut fournir du soudage à bon marché. Il y a beaucoup de choses que nous ne pouvons pas faire. Autrefois, en Nouvelle-Écosse, à l'époque des grands voiliers, la géographie ne posait aucun obstacle, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Je veux donner suite à ce que mon collègue vient de dire. Personnellement, je suis d'accord avec lui en ce qui concerne l'OMC. Je ne suis pas économiste, comme vous pouvez le voir dans ma façon de m'exprimer, mais un économiste vous dirait que ces accords bilatéraux nuisent effectivement à l'ouverture du monde au libre-échange. Les accords bilatéraux déforment entièrement le tableau du commerce mondial. Personnellement, je crois que l'OMC serait la bonne solution, mais malheureusement, les gens n'ont pas la patience d'attendre.
Ai-je oublié une question?
Pas nécessairement, mais vous avez évoqué l'Accord de libre-échange que nous avons conclu, et vous savez que la Norvège a généreusement subventionné son industrie pendant de longues années. Maintenant que les choses vont bien et qu'ils ont aboli les subventions, ils sont prêts à rivaliser...
Un aspect intéressant de l'industrie de la construction navale, qui nous distingue entièrement de tous les autres réunis ici autour de cette table, c'est que nous n'appartenons pas à l'OMC. Nous n'avons pas de règles. Nous ne sommes pas vraiment soumis aux règles de l'OMC. Nous sommes parmi les derniers survivants de l'époque du wild west. Les pays et les gouvernements peuvent agir à leur guise, il n'y a pas vraiment de règles.
L'OCDE a échoué dans sa tentative de réglementer l'industrie de la construction navale. L'Union européenne est en train d'essayer d'imposer des règlements, mais jusqu'ici, c'est un échec. La Chine, le Vietnam, la Corée et le Japon, au départ, ressemblaient tout à fait au wild west. Les gagnants sont ceux qui y consacrent les plus gros efforts et les pays qui dépensent le plus. Nous sommes dans la même situation.
Il nous est très difficile d'accepter que ces gens-là sont passés par là, qu'ils se sont établis et que leurs industries marchent à plein régime, alors que nous demandons toujours comment faire. Dans les négociations bilatérales de libre-échange, la Corée n'offre rien à l'industrie de la construction navale canadienne. Le Canada offre beaucoup de choses à l'industrie de la construction navale coréenne, mais la Corée ne nous ouvrira jamais les portes. Nous n'y arriverons jamais. Personne ne nous attendra... C'est une barrière non tarifaire, mais il y a aussi d'innombrables autres manières d'arriver au même résultat.
Les subventions. Ils disent tous qu'ils n'octroient pas de subventions. La Corée n'en octroie pas, la Norvège n'en octroie pas. Ce ne sont que des balivernes. Comme vous l'avez justement remarqué, tous les pays asiatiques financent leurs industries en leur offrant des prêts à des taux inférieurs au taux du marché. De plus, ces prêts sont consentis pour des raisons politiques, et n'ont rien à voir avec l'évaluation du risque. Si vous voulez voir de la documentation, j'en ai à vous montrer.
Monsieur le président, pour conclure, je sais que la remise en état et le réapprovisionnement de divers navires qui appartiennent à l'armée, à la Garde côtière, à nos flottes des lacs, nos traversiers, etc. coûteront environ 20 milliards de dollars. Toutefois, si nous concluons un accord de libre-échange tel que celui avec la Corée, cela entraînera fort probablement la fermeture d'autres chantiers navals. Si c'est le cas, nous pourrions perdre la capacité de construire notre propre flotte navale.
C'est un danger, car les chantiers navals ont besoin d'investissements et de plans à long terme, non seulement en ce qui concerne leur structure financière et leur amortissement, mais aussi en ce qui a trait aux travailleurs. Il faut s'assurer que la main-d'oeuvre est bien formée pour pouvoir effectuer ces travaux. Je regretterais énormément s'il nous fallait un jour construire de nouveaux navires de soutien interarmées, par exemple, et qu'il faudrait les faire construire ailleurs tout simplement parce que nous n'avons pas les moyens de le faire. Ce serait vraiment triste.
Je vous souhaite à tous un joyeux Noël.
Merci, monsieur Stoffer, je suis content de voir que vous avez pu ajouter cela. J'avais pensé que nous serions obligés de vous faire revenir à titre de témoin.
Je veux remercier tout le monde de sa contribution aujourd'hui. Je pense que c'était extrêmement utile. J'ai beaucoup apprécié vos présentations. Pour les greffiers, si vous les avez sur support électronique, nous serions heureux de les recevoir pour nous aider dans nos travaux.
Cela étant dit, je remercie encore une fois les témoins d'avoir comparu aujourd'hui.
La séance est levée.
Joyeux Noël et nous nous reverrons l'an prochain.