NRGO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON NATURAL RESOURCES AND GOVERNMENT OPERATIONS
COMITÉ PERMANENT DES RESSOURCES NATURELLES ET DES OPÉRATIONS GOUVERNEMENTALES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 6 avril 2000
Le président (M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.)): Chers collègues, la séance est ouverte. Comme vous le savez, nous continuons notre examen de la gestion des forêts au Canada dans la perspective du commerce international conformément au paragraphe 108(2) du Règlement.
Je vous remercie tous d'être venus ici immédiatement après le vote. Nous avons seulement 22 minutes de retard. Ce n'est pas mal pour ceux d'entre nous qui utilisent les systèmes de transport technologiquement modernes.
Ce matin, nous recevons Mme Jean Arnold, représentante du groupe régional du Forest Stewardship Council pour les Maritimes.
• 1120
Si je comprends bien, madame Arnold, vous n'avez pas de mémoire, ce
qui est très bien, mais vous avez distribué certains de ces documents
dans les deux langues officielles. S'agit-il bien aussi de vos
documents?
Mme Jean Arnold (représentante, Forest Stewardship Council—Maritimes Regional Group): Oui. Puis-je dire quelques mots à leur sujet?
Le président: D'accord. Merci beaucoup. Notre procédure normale est la suivante: nos témoins présentent un exposé. Il peut durer cinq ou dix minutes, c'est comme vous voulez. Peu importe. Mais ce que les membres du comité trouvent le plus productif est le dialogue. Donc, dès que vous voulez entamer ce dialogue, vous interrompez votre exposé, et nous passons à la discussion. Nos membres sont très bien préparés, ils sont donc toujours prêts à se lancer dans la discussion.
Je vous souhaite la bienvenue à notre comité. Vous avez la parole.
Mme Jean Arnold: Vous n'aurez pas droit à du whisky si vous ne vous comportez pas comme il faut en attendant.
Merci de m'avoir invitée. Je suis directrice exécutive du Falls Brook Centre, et je vous ai apporté notre brochure. Nous sommes une organisation communautaire qui a des activités environnementales et sociales, et nous avons des terres où nous essayons d'appliquer ce que nous prêchons. Certaines des choses que nous faisons sont mentionnées dans la brochure grand format.
Nous avons été élus lors d'une réunion multipartite tenue dans les Maritimes pour constituer le secrétariat du Forest Stewardship Council dans les Maritimes en 1996. Je pensais vous parler un petit peu de cela aujourd'hui. Je ne sais pas combien d'entre vous connaissent le Forest Stewardship Council ou même, plus particulièrement, les normes régionales des Maritimes.
Certains d'entre vous ont la brochure du groupe régional du Forest Stewardship Council sur l'étiquetage des produits ligneux, et certains ont une brochure sur la certification des forêts préparée à l'intention des propriétaires de petits boisés. Il y a aussi un outil de commercialisation que nous avons réalisé pour expliquer aux consommateurs et aux détaillants pourquoi ils devraient acheter du bois portant le label du FSC. Une autre brochure indique aux propriétaires de boisés comment procéder pour obtenir la certification. Vous pouvez les examiner. Si vous n'avez pas envie de les consulter davantage, vous pouvez les laisser sur la table ou me les rendre. J'en ai encore des exemplaires si certains veulent en avoir d'autres.
Je commencerai par le début. Nous avons fait savoir à toutes les parties intéressées des Maritimes, ou tout au moins aux 800 qui figuraient sur notre liste, que quiconque s'intéresse à la certification des forêts devrait se rendre à Truro, en Nouvelle- Écosse. C'était en 1996. Les participants à cette grande réunion se sont divisés en groupes sectoriels. Il y avait l'industrie forestière dans une salle, les propriétaires de boisés dans une autre, les universitaires dans une autre et les forestiers dans une autre encore.
Deux personnes ont ensuite été élues pour représenter chacune des neuf chambres au sein d'un comité directeur pour entamer un processus régional d'élaboration de normes pour les Maritimes en ce qui concerne les meilleures pratiques de gestion forestière connues actuellement, étant bien établi que la foresterie et la science forestière sont en pleine évolution.
Ce comité s'est attelé à l'élaboration de normes en consultant la population à diverses reprises et en regroupant les nombreux intervenants de ce secteur dans les Maritimes. Deux scientifiques ont été détachés auprès de nous, un par le FCS et l'autre par le ministère des Ressources naturelles du Nouveau-Brunswick, pour nous aider à faire de la recherche et nous fournir un appui scientifique. Nous avions donc des éléments du secteur privé—y compris les Premières nations, les écologistes, les propriétaires de boisés, la grande industrie, les exploitants de scieries et le monde universitaire—et deux représentants des pouvoirs publics.
Ce processus est passé par plusieurs étapes, et nous avons maintenant des normes qui ont été approuvées. Elles l'ont été il y a environ un an, et J.D. Irving, une grande compagnie forestière du Nouveau-Brunswick qui a toujours été membre, a interjeté un appel à leur sujet. Cette entreprise avait deux représentants au sein du comité depuis le début. Elle a fait appel de la décision d'approuver les normes.
• 1125
La question a été soumise à un comité de règlement des différends au
niveau national; il lui a fallu six mois pour délibérer, faire enquête
sur la situation et faire les recherches avant de décider que l'appel
n'était pas justifié; il a donc été rejeté, et différentes
recommandations ont été présentées au comité régional pour qu'il aille
de l'avant. Le bureau international a approuvé ces normes en janvier
dernier.
Voilà, en bref, la procédure que nous avons suivie pour élaborer ces normes selon une procédure multipartite, en harmonie avec les régions avoisinantes et avec d'autres... avec la Suède et le Royaume-Uni. En procédant à cette harmonisation, nous avons constaté qu'à quelques différences culturelles près concernant l'écosystème, nos normes étaient compatibles avec celles des autres régions et acceptables par ces dernières.
Donc, après l'élaboration de normes de certification, nous passons maintenant à la certification de parcelles dans les Maritimes. À l'heure actuelle, un groupe des Premières nations est certifié à Pictou Landing. Nous avons deux ou trois types de chaînes de responsabilité qui constituent une forme d'approbation quand on peut retracer toutes les étapes par lesquelles un produit est passé, et nous avons reçu plusieurs autres demandes de la part de gens, des propriétaires de boisés et des Premières nations, qui souhaitent obtenir une certification.
Je ne sais pas réellement ce que vous savez du Forest Stewardship Council. C'est une initiative non gouvernementale. Il a été constitué parce que certains avaient l'impression que les pratiques forestières actuelles ne répondaient pas de façon adéquate aux critères à respecter pour exploiter les futures possibilités commerciales et assurer une bonne gestion des forêts. Il s'agit donc d'un sujet controversé.
Je pense qu'il faut maintenant chercher à desservir les nouveaux marchés. Le bois certifié fait l'objet d'une large demande. Nous ne pouvons pas la satisfaire. Des entreprises et des organismes publics ont manifesté une certaine résistance dans la région à l'égard du Forest Stewardship Council, ce que je trouve regrettable, parce que les temps changent, les pratiques forestières changent, le commerce international change, et je crois que tout le monde doit se tourner vers l'avenir et voir quelle sorte de gestion des ressources naturelles nous pourrions promouvoir, en tant que Canadiens, sur le marché international.
Cela dit, il est sans doute plus logique que je réponde à vos questions, parce que je pourrai ainsi avoir une idée des sujets qui vous préoccupent. Je pourrais parler de n'importe laquelle de ces choses pendant un bon moment, j'en suis sûr, mais il est sans doute plus logique, comme le président l'a suggéré, de passer à une discussion générale.
Le président: Merci beaucoup.
Les témoins suivants représentent le Forest Stewardship Council du Canada. Étant profane en la matière, j'aimerais savoir quelle différence il y a entre les deux organismes?
Mme Jean Arnold: Le Forest Stewardship Council est un organisme international. Chaque pays qui veut constituer un Forest Stewardship Council a un bureau national. Le Forest Stewardship Council of Canada est une organisation nationale qui chapeaute des initiatives régionales en matière de préparation de normes.
La région des Maritimes est la première à avoir pris l'initiative d'élaborer des normes au Canada. Les initiatives analogues ont été mises en place dans la région des Grands Lacs et du Saint-Laurent, en Colombie-Britannique, et on commence aussi à le faire dans la région boréale et, je pense, au Québec depuis peu de temps.
C'est donc dans les Maritimes que nous sommes le plus avancés. En fait, nos normes sont les premières à avoir été adoptées en Amérique du Nord. Nous en sommes très fiers. Nous avons tous commencé en même temps, dans toute l'Amérique du Nord, et, dans les Maritimes, nous avons toujours ouvert la voie.
Le président: Quels rapports avez-vous avec certains groupes écologistes? Vous avez indiqué, et je l'ai vu dans certains de vos documents, que vous avez des rapports avec tous les intervenants, y compris les groupes écologistes, par exemple le Sierra Club. Quels rapports avez-vous avec eux?
Mme Jean Arnold: Notre secrétariat est installé au Falls Brook Centre, nous avons donc les mêmes rapports avec tous les intervenants. La nature de ces rapports consiste, je suppose, à les regrouper dans un comité, à travailler avec celui-ci, à essayer de régler les problèmes et à faire en sorte que la procédure suivie soit transparente et qu'on puisse en rendre compte. Nous avons donc certainement des rapports avec ces organisations. Nous fonctionnons surtout au moyen du courrier électronique. Tout passe par notre serveur collectif, si bien que l'accès est le même pour tout le monde.
Le président: Vous vous rendez aussi sur le terrain pour contrôler l'ensemble du processus, n'est-ce pas?
Mme Jean Arnold: On entend toutes sortes de petits bruits, et vous n'êtes pas très près du micro.
Le président: Non? D'accord. Je pense que c'est probablement parce que je suis plus loin des interprètes.
Mme Jean Arnold: Oui. Surveillons-nous la situation sur le terrain?
Le président: Non, vous allez aussi sur le terrain pour surveiller la situation, n'est-ce pas?
Mme Jean Arnold: Notre secrétariat ne le fait pas, non. Nous avons pris des initiatives de ce genre, ce sont généralement les certificateurs qui s'en occupent. De façon générale, le Forest Stewardship Council est un organisme d'accréditation qui certifie les certificateurs. À l'heure actuelle, les certificateurs sont Smart Wood aux États-Unis et Scientific Certification Systems. Nous avons seulement deux certificateurs potentiels au Canada, Sylva Foundation et KPMG, qui est en train de le devenir.
Le président: Je vois.
Mme Jean Arnold: Donc, les organismes qui ont reçu la formation technique nécessaire pour effectuer le contrôle, l'évaluation et la certification ont collaboré avec nous pour examiner comment ces normes s'appliquent sur le terrain.
Le président: Pour ne pas monopoliser la période de questions, je vais m'en tenir là. Je reviendrai peut-être à la charge un peu plus tard.
Monsieur Duncan.
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Tout cela est très conceptuel, et je pense que nous n'en avons encore qu'une connaissance collective limitée. Donc, si certaines de mes questions paraissent un peu simplistes, c'est parce qu'elles le sont.
Cela me fait penser à l'histoire de la poule et de l'oeuf, et je ne comprends pas très bien. Par exemple, vous avez mentionné que des normes sont en cours d'élaboration pour la Colombie- Britannique. Les participants à ce processus prennent l'avion pour aller à Oaxaca au Mexique. Pourquoi font-ils cela au lieu de traiter avec Toronto? Je suis perplexe.
Mme Jean Arnold: Je ne connais pas tous les détails de ce qui se passe en Colombie-Britannique, mais le siège du Forest Stewardship Council est situé à Oaxaca, au Mexique. Donc, au moment de l'assemblée générale annuelle ou quand des sous-comités se penchent sur divers domaines controversés, il y a peut-être quelqu'un de Colombie-Britannique qui y participe. C'est la plus haute instance en matière d'adoption des normes—le bureau international.
M. John Duncan: Que fait donc le bureau de Toronto?
Mme Jean Arnold: Le bureau de Toronto supervise les activités qui se déroulent au Canada. Parfois, par exemple, notre organisation, le Falls Brook Centre, gère aussi le groupe de travail sur les produits forestiers non ligneux au nom de l'organisme international. Je me rends parfois à Oaxaca parce que ce groupe de travail s'y réunit. Les activités de ce sous-comité ont une portée mondiale. Peut-être quelqu'un de la Colombie- Britannique fait-il partie de l'un de ces sous-comités, qui fonctionnent à l'échelle mondiale.
M. John Duncan: De qui relève en fin de compte le FSC? A-t-il un conseil d'administration composé de membres élus?
Mme Jean Arnold: Oui, il y a un conseil d'administration international composé des différentes chambres représentant les pays du Nord et du Sud.
M. John Duncan: Comment les membres sont-ils nommés?
Mme Jean Arnold: Ils sont élus conformément à une procédure dont la dernière étape se déroule à l'assemblée générale annuelle. Nous avons un seul membre canadien dans la chambre sociale; je crois que c'est un avocat cri. Il est Canadien et c'est notre seul membre du conseil d'administration international. Mais le Canada n'est pas représenté dans toutes les chambres, ni même le monde occidental.
M. John Duncan: Qui est habilité à voter?
Mme Jean Arnold: Tous les membres du FSC.
M. John Duncan: Donc, si vous n'êtes pas...
Mme Jean Arnold: Non. Il faut répondre aux critères permettant de devenir membre.
M. John Duncan: Quels sont ces critères?
Mme Jean Arnold: Le Forest Stewardship Council est censé être une organisation d'organisations, ce sont donc, préférablement et habituellement, des organisations qui adhèrent au FSC.
Il est aussi possible d'être membre à titre individuel. Par exemple, une société forestière qui essaie d'être certifiée, mais ne l'est pas encore, peut adhérer au Forest Stewardship Council. Certaines entreprises en attente de certification envoient peut- être leur chef forestier.
Dans le cas de J.D. Irving—je peux citer cet exemple—, le chef forestier est membre du FSC, alors que la société elle-même... Une entreprise doit avoir fait certifier au minimum une certaine superficie avant de pouvoir devenir membre.
M. John Duncan: Tous les membres sont-ils égaux?
Mme Jean Arnold: Toutes les organisations membres.
Chaque chambre regroupe des membres individuels et des organisations. Les membres individuels représentent seulement 10 p. 100 des voix. Donc, oui, toutes les organisations membres sont égales, mais les membres individuels, vu qu'on cherche à les décourager, ne représentent en tout que 10 p. 100 des voix.
Il y a donc égalité dans le cadre de ce système à deux paliers.
M. John Duncan: Donc, que répondriez-vous à ceux qui disent que le FSC s'inspire de Greenpeace et est dominé par cette organisation?
Mme Jean Arnold: Eh bien, ce n'est absolument pas vrai, parce que Greenpeace a seulement une voix. Cette organisation peut faire beaucoup de bruit, mais, en fin de compte, elle a seulement une voix.
Personnellement, je pense qu'il est souvent facile d'utiliser Greenpeace comme bouc émissaire pour d'autres organisations qui partagent peut-être le même point de vue mais adoptent des tactiques plus discrètes pour le faire connaître.
M. John Duncan: Donc, au fil du temps, au fur et à mesure que de nouvelles régions seront certifiées, il y aura bien entendu de plus en plus de membres. Cela aura-t-il pour conséquence que l'appartenance du FSC sera plus diversifiée—j'emploi le terme appartenance au sens large?
Mme Jean Arnold: Comme toute organisation composée de multiples membres, ce sont ces derniers qui la contrôlent et qui déterminent en fin de compte comment elle fonctionne.
Personnellement, je pense que c'est une organisation très intéressante parce que, dans une certaine mesure, elle envisage globalement l'intégration de tous les aspects d'un secteur déterminé—la foresterie—, mais il s'agit de la foresterie et du commerce. Je pense donc personnellement qu'il est intéressant de siéger au comité qui s'occupe de l'élaboration de la procédure d'appel, de la procédure de règlement des différends, des comités permanents et de la nature du travail et des personnes qui représentent le Nord et le Sud dans les différentes chambres, parce que ce comité examine de nouvelles sortes de structures régissant nos activités.
M. John Duncan: Certains ont dit que le logo de certification aura une valeur réelle à un moment donné. Si le FSC obtient des revenus importants, comment est-il prévu de les utiliser?
Mme Jean Arnold: Le Forest Stewardship Council lui-même et les organismes régionaux ne gagnent aucun revenu. C'est un petit défaut du système.
• 1140
Le Forest Stewardship Council accrédite les certificateurs. Les
comités régionaux de normalisation, comme le nôtre, s'efforcent, dans
le cadre de leur statut d'organisme de bienfaisance à but non
lucratif, comme c'est le cas pour nous, de collecter un peu d'argent
pour faire le travail de normalisation. Quand les normes sont prêtes,
on les envoie au siège de l'organisation pour que celui-ci les
approuve, et, une fois qu'elles l'ont été, les certificateurs
commencent à certifier. Voilà ce qu'il advient de l'argent. C'est donc
un organe complètement distinct, une tierce partie dont les activités
financières sont contrôlées indépendamment, et c'est là que va
l'argent.
Vous pourriez donc vous demander ce que KPMG—que, j'en suis sûre, la plupart d'entre vous connaissez très bien—fait avec cet argent? Nous n'en savons rien. Mais la certification ne rapporte rien au Forest Stewardship Council ni aux initiatives régionales de normalisation. À l'heure actuelle, nous sommes fortement sous- financés. Ayant essayé de collecter des fonds, je peux dire que c'est très difficile au Canada, et il est presque impossible de le faire pour le Forest Stewardship Council, parce que tant de gens ont jugé préférable de l'affaiblir plutôt que de le renforcer. Je pense que c'est une façon d'envisager les choses à court terme.
Permettez-moi de vous dire ce que nous constatons maintenant, simplement pour vous donner une idée de l'ampleur du potentiel commercial. Alan McKnight, de B&Q, un petit détaillant de matériel de bricolage comme Home Dépôt, est venu dans les Maritimes annoncer son intention d'étendre ses activités. Cette entreprise vient du Royaume-Uni et possède un certain nombre de magasins dans l'Europe de l'Est. Elle a assuré à ses clients que tous les produits de bois qu'elle recevra seront certifiés par le FSC d'ici 2002; elle pousse donc l'organisation à agir, mais elle peut seulement avancer à la vitesse...
Elle a rencontré des fournisseurs au Nouveau-Brunswick, et nous avons mis sur pied une table ronde pour les entreprises qui fournissent déjà des produits à B&Q, depuis le bois brut jusqu'aux planches traitées sous pression et aux boutons pour les barbecues. Ces fournisseurs offrent toute une gamme de produits forestiers. B&Q leur a dit de participer au programme ou de s'en aller, vu son intention de faire appel à des fournisseurs que ses clients jugeront crédibles. Donc, à mon avis, les consommateurs européens sont maintenant en avance sur nous pour ce qui est de leur conscience du fait qu'ils peuvent voter avec leurs dollars au lieu d'acheter simplement n'importe quel article qui est sur les rayons. C'était donc une entreprise qui expliquait à d'autres entreprises quelle était la voie de l'avenir.
Je pense qu'il y a un potentiel énorme pour les gens... Selon moi, le Nouveau-Brunswick... Je ne vois aucun député du Nouveau- Brunswick ici, mais pourquoi diable exportons-nous des matières premières à notre époque? Pourquoi ne fabriquons-nous pas toutes sortes de produits à valeur ajoutée? Il devrait être totalement illégal de vendre des billes brutes à l'extérieur de la province. Voilà pourquoi nous travaillons avec le Forest Stewardship Council: parce que c'est un système qui essaie de restituer la richesse des ressources naturelles aux communautés qui en sont tributaires, à la différence de ce qui se passe maintenant au Nouveau-Brunswick. À l'exception de J.D. Irving, toutes nos entreprises appartiennent à des actionnaires des États-Unis et sont donc soumises à leurs caprices, et je pense que c'est vraiment une honte.
Le président: Eh bien, j'ai l'impression que vous n'avez pas d'opinions très tranchées à ce sujet.
Mme Jean Arnold: Non.
Le président: Pendant que je prends une gorgée d'eau et que nous passons à l'autre côté, je me demande simplement si vous pourriez consacrer quelques instants à nous expliquer ce que vous entendez par «norme de performance» par opposition à «norme de système de gestion».
Mme Jean Arnold: Nos 200 acres et toutes nos activités de Falls Brook Centre sont reconnues comme biologiques par tous les systèmes de certification. Nous travaillons aussi au niveau international avec le Marine Stewardship Council, la fédération internationale qui accrédite les produits biologiques en Europe. Tous les systèmes d'accréditation doivent maintenant faire l'objet de vérification par des tiers. En fin de compte, c'est ce qu'exige le marché qui est déterminant, mais, s'il y a des vérifications indépendantes réalisées par des tiers, cela fait une certaine différence par rapport à un système de gestion interne dans le cadre duquel une entreprise accepte d'adopter un certain type de comportement. Elle peut ensuite se certifier elle-même en vertu de ce système de gestion, qui, au bout du compte, n'a pas la même crédibilité. Voilà pourquoi le Forest Stewardship Council est constitué en organisme d'accréditation. Les certificateurs sont complètement indépendants. Je pense que c'est ce que nous allons examiner. On ne peut pas se certifier soi-même. Il pourrait de toute façon y avoir un risque de conflit d'intérêt.
Le président: Merci.
Monsieur Reed.
M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, monsieur le président.
Est-il possible d'obtenir une série de normes de certification? J'ai regardé les documents que vous avez fournis, et je n'y ai vu aucune indication des exigences. Le comité pourrait- il...
Mme Jean Arnold: Je pourrais vous les envoyer, vous pouvez les trouver sur notre site Web...
M. Julian Reed: Ils y sont? D'accord.
Mme Jean Arnold: ... dont l'adresse est indiquée ici. Vous pouvez télécharger cela de notre site Web, ou vous avez certainement des gens qui peuvent le faire.
M. Julian Reed: D'accord, merci.
Si je suis un particulier qui possède un boisé, combien me coûtera la certification?
Mme Jean Arnold: C'est un des petits défauts du système. On estime que cela coûtera environ 1 000 $ pour un boisé de 100 acres. Pour le moment, ce n'est pas attrayant pour les petits propriétaires de boisés. C'est donc une des choses sur lesquelles nous nous pencherons à l'avenir.
Beaucoup de nos publications sont axées sur la façon de nous adresser aux particuliers qui possèdent des boisés. Un des meilleurs systèmes envisagé actuellement est la certification de groupe; un groupe de propriétaires de boisés d'une région... Au Nouveau-Brunswick, nous avons la Fédération des propriétaires de lots boisées du Nouveau-Brunswick ou le Carleton-Victoria Marketing Board, il y a donc des systèmes en place qui pourraient nous permettre de procéder à une certification de groupe. Mais vu qu'il s'agit d'une technologie nouvelle ou d'un nouveau système, c'est assez cher, et ce sont seulement les grandes entreprises forestières qui sont venues frapper à notre porte pour avoir accès au programme. Nous constatons maintenant que les Premières nations considèrent que ce système leur convient, parce qu'elles gèrent aussi de plus grands... Bon, je ne connais aucune autre région à part les Maritimes où il y a généralement un grand nombre de petits propriétaires de boisés.
M. Julian Reed: Selon les modalités actuelles, la certification est-elle permanente ou renouvelable? Doit-elle être renouvelée chaque année?
Mme Jean Arnold: Chaque année.
M. Julian Reed: Il faut payer à nouveau 1 000 $?
Mme Jean Arnold: Non, je pense que le renouvellement coûte moins cher.
M. Julian Reed: Mais nous ne savons pas combien.
Mme Jean Arnold: Non, nous ne savons pas combien, mais nous pourrions nous hasarder à dire que c'est probablement environ la moitié. C'est cher pour le moment, et c'est en partie parce que nous n'avons pas de certificateurs canadiens. Depuis quatre ans que je m'occupe de cela, chaque fois qu'un universitaire ou un collège communautaire s'adresse à nous, je leur demande pourquoi nous ne formons personne. Il y a un grand nombre de jeunes forestiers récemment diplômés qui ont des points de vue différentes et qui ont des idées au sujet des bonnes pratiques de gestion forestière et qui veulent les mettre en oeuvre. La certification des forêts offre de bonnes possibilités d'emploi, mais les jeunes ne peuvent recevoir nulle part la formation requise pour devenir certificateurs.
Si nous pouvions avoir plus de certificateurs canadiens, et si nous pouvions en avoir dans les Maritimes, nous n'aurions pas à les faire venir de Californie en devant payer leur salaire, le billet d'avion et le temps qu'ils passent sur le terrain. Donc, comme l'a dit je ne sais qui, c'est l'histoire de la poule et de l'oeuf. Comme je le répète constamment, il faut embarquer. Le programme ne va pas disparaître, alors essayons de le faire progresser. C'est un secteur qui offre de nouvelles possibilités d'emploi.
M. Julian Reed: J'ai soulevé cette question parce que la classification du bois a été modifiée en Ontario il y a quelques années. Les petits propriétaires de boisés et les petits exploitants de scieries se sont retrouvés mis à l'écart. La bureaucratie a dit qu'elle formerait des gens pour en faire des classificateurs de bois, mais les gens ont ensuite constaté que cela coûtait 2 400 $ et qu'un renouvellement était nécessaire chaque année. On s'est donc retrouvé à la case départ. Cela va constituer un obstacle, j'en suis convaincu.
Une fois que j'obtiens la certification, puis-je devenir membre à part entière du Forest Stewardship Council et être habilité à voter?
Mme Jean Arnold: Oui, en tant que membre d'une entreprise et, donc, en tant qu'organisation.
M. Julian Reed: Dois-je être constitué en société pour le faire, ou puis-je y aller en tant que propriétaire?
Mme Jean Arnold: Vous pouvez le faire à titre de particulier, oui.
M. Julian Reed: D'accord, merci.
Mme Jean Arnold: Je pense qu'une des choses que je recommande... Il ne faut pas oublier que la région des Maritimes est la première au monde à avoir une norme régionale. La Suède a des normes suédoises, le Royaume-Uni a des normes couvrant le Royaume-Uni. Nous sommes donc aussi le premier exportateur occidental.
• 1150
Un des systèmes que j'essaie de promouvoir est qu'un des forestiers
d'une association de propriétaires de boisés pourrait être certifié et
il pourrait alors être responsable de la gestion de tout un tas de
boisés différents. Si ce forestier établissait un inventaire, ce
serait une façon de réduire les coûts au lieu de faire toujours venir
des gens de l'extérieur.
M. Julian Reed: Quand vous autorisez un entreprise, un détaillant, à utiliser le logo, cela veut-il dire que ce détaillant utilisera uniquement des produits certifiés par le FSC?
Mme Jean Arnold: Non. Cela veut dire qu'on pourra retracer la provenance des produits certifiés par le FSC qu'il vend. Les chaînes de responsabilité sont stipulées. Le bureau national connaît mieux la question, vous pourrez donc poser la question à ses représentants. Je pense qu'il y a quelque chose comme 42 chaînes de responsabilité, et d'après ce que j'ai vu de la liste, je pense que la plupart d'entre elles sont au Québec. Je suppose que les fabricants de meubles du Québec se soucient davantage de leurs débouchés, et cela constitue une valeur ajoutée, il est donc avantageux d'avoir la certification du FSC.
M. Julian Reed: Un détaillant pourrait-il arborer le logo du FSC tout en continuant à importer du contre-plaqué d'Indonésie?
Mme Jean Arnold: Eh bien, il devrait séparer les différents produits. Il devrait avoir une section séparée dans laquelle il y aurait seulement des produits certifiés par le FSC. C'est cela, la chaîne de responsabilité: on peut retracer un produit et le séparer des autres. Vous perdriez votre chaîne de responsabilité si vous essayiez de faire croire que le bois indonésien est certifié, à moins que l'Indonésie n'obtienne la certification.
Pour ce qui est de la façon dont le système fonctionne en Angleterre, j'ai vu ce qu'on fait là-bas; chez B&Q, le bois est empilé, et on indique en bas de la pile que tout ce qui est là est certifié par le FSC. Pour les articles de barbecue, il peut y avoir un petit plateau en bois et un petit bouton en bois avec une petite étiquette disant que le bois est certifié par le FSC.
M. Julian Reed: Merci, monsieur le président.
[Français]
Le président: Monsieur Canuel.
M. René Canuel (Matapédia—Matane, BQ): Je regarde votre dépliant. Est-ce que vous l'avez en français? Non? Ça me surprend, car les Maritimes, surtout le Nouveau-Brunswick, sont bilingues.
[Traduction]
Mme Jean Arnold: C'est une question de financement. Nous avons dû racler les fonds de tiroir. C'est l'argent de notre propre organisation, et nous en avons tout juste assez pour le faire en anglais. Nous ne nous plaindrions certainement pas si nous avions d'autres commanditaires, mais nous pouvons en parler dans le couloir.
[Français]
M. René Canuel: Au point de vue de la superficie de territoire, où en sommes-nous rendus pour la certification au Québec comparativement au Nouveau-Brunswick?
[Traduction]
Mme Jean Arnold: La certification n'a pas encore commencé au Québec, mais je sais qu'une équipe est en train de se constituer pour commencer l'élaboration de normes régionales. Le Québec a plus de chaînes de responsabilité que partout ailleurs au Canada, donc le secteur manufacturier fait déjà quelque chose à un certain niveau. À part cela, je n'en sais rien. J'ai un jeune stagiaire de Laval, qui prépare une maîtrise en foresterie; il est chez nous depuis plus d'un an. Il est retourné au Québec et il participe au lancement de ce processus. Je peux vous donner ses coordonnées si vous voulez en savoir plus.
[Français]
M. René Canuel: On parlait plus tôt de la formation des certificateurs. Vous dites qu'au Canada, il n'y en a pas. Quelle est la formation requise ou le cours à suivre pour devenir certificateur? C'est bien compliqué. Combien faut-il de temps? Dans quelle faculté faut-il aller pour avoir accès à ce cours? Faut-il aller en foresterie?
[Traduction]
Mme Jean Arnold: Pour le moment, personne n'offre de cours de certification. Actuellement, la seule façon d'être formé comme certificateur est de travailler comme apprenti chez un certificateur existant aux États-Unis ou chez KPMG, qui assure la certification aux normes de l'ISO. KPMG est en train de se soumettre à la procédure très stricte requise pour être reconnu comme certificateur par le Forest Stewardship Council. Donc, si une entreprise veut être certifiée, elle doit s'adresser au Forest Stewardship Council au Mexique et, ensuite, répondre à tous les critères et aux exigences en matière de pièces justificatives et de connaissances spécialisées.
M. René Canuel: Est-ce que ce ne serait pas une structure supplémentaire? J'ai travaillé avec des groupements forestiers. Nous avions des ingénieurs, des techniciens pour la protection de la forêt, des spécialistes de la faune, des aménagistes pour les rivières, et nous avions à peu près toutes les normes qui sont les vôtres. N'est-ce pas une structure supplémentaire qui vient compliquer la vie des forestiers et celle de beaucoup de propriétaires? Je vois une dizaine de normes et d'autres vont en ajouter. À un moment donné, on ne sait plus quoi faire sur son terrain, sur sa propre superficie forestière. Je voudrais bien y voir des avantages. Donnez-moi quelques avantages de la certification.
[Traduction]
Mme Jean Arnold: En premier lieu, la gestion des ressources naturelles, si nous voulons l'appeler ainsi, est beaucoup plus compliquée que cela. Je suis sûre que vous pouvez constater que toutes les choses que vous faites dans votre vie sont beaucoup plus compliquées.
Le processus de certification fait appel à des techniques spécialisées en foresterie, en biologie, en économie...
[Français]
M. René Canuel: C'est ça qui complique la vie de tout le monde.
[Traduction]
Mme Jean Arnold: Eh bien, ça...
[Français]
M. René Canuel: Ça complique la vie de tout le monde.
[Traduction]
Mme Jean Arnold: Oui, je comprends. Peut-être suis-je simplement en train de vous dire que c'est mieux si c'est compliqué.
Nous nous penchons sur des systèmes beaucoup plus complexes que nous ne le faisions autrefois, et ils peuvent maintenant être certifiés. C'est parce que les connaissances sont beaucoup plus poussées. Ne prenons-nous pas en considération la diversité biologique depuis peu de temps seulement? Du fait de tous ces éléments, on a donc une certification des forêts qui envisage la foresterie de tous les points de vue. Le groupe de travail sur les produits forestiers non ligneux dont je fais partie va examiner... Dans une forêt, 85 p. 100 de la diversité biologique est constituée par autre chose que des arbres. À l'heure actuelle, la foresterie s'occupe principalement des arbres. Il faudra donc que cela devienne de plus en plus complexe.
Le président: Avez-vous l'impression que ce processus de certification constituera une aide ou un obstacle pour la foresterie et la sylviculture au Canada ou, plus particulièrement, pour votre région des Maritimes?
Mme Jean Arnold: À court terme, je suppose que cela imposera certaines contraintes. À long terme, les consommateurs exigeront d'en savoir plus à propos de ce qu'ils achètent. Ils sont plus informés, plus sensibilisés et, peut-être, plus préoccupés. Ce n'est peut-être pas encore tellement le cas au Canada, mais il est certain qu'en Europe, avec la panique suscitée par la viande de boeuf et les OGM, la société est beaucoup mieux informée et les gens demandent l'application de régimes de gestion différents.
L'industrie forestière des Maritimes connaîtra des difficultés. Nous pouvons le constater en voyant la résistance que certains manifestent. Nous parlons d'un système de foresterie qui reconstitue la composition originelle des forêts avec leurs multiples espèces—originelle d'après ce que nous en savons, alors que l'industrie forestière des Maritimes s'intéresse surtout à la production de fibre.
• 1200
Donc, si nous passons de la production de fibre à une foresterie axée
sur la restauration, avec toutes les valeurs que fournissent les
écosystèmes mixtes et si nous cessons de produire de la fibre en
utilisant de grandes quantités de produits chimiques et en procédant à
une exportation intensive de matières premières, cela entraînera des
changements à court terme. À long terme, on peut s'opposer à ce
changement jusqu'au bout, mais je suis absolument convaincue que c'est
la voie sur laquelle va s'engager la foresterie.
Le président: Devrais-je en déduire qu'à votre avis, le marché sera beaucoup mieux disposé envers les produits des industries possédant votre accréditation plutôt qu'envers celles qui ne l'auront pas?
Mme Jean Arnold: Je pense que c'est certain. Cela commence déjà. En Colombie-Britannique, le marché évolue peut-être plus vite que dans les Maritimes. Nous n'exportons pas autant vers l'Europe. Nous desservons surtout le marché des États-Unis. Celui-ci n'est pas aussi exigeant que le marché européen. Mais nous finirons par nous retrouver dans les mêmes conditions quand les gens adopteront la même attitude.
L'image que je présente est peut-être celle de ce qui pourrait se passer dans cinq ou dix ans, alors pourquoi ne pas déjà s'y préparer? À mon avis, c'est ce que notre industrie devrait faire. Un exemple d'entreprise plus tournée vers l'avenir est Stora, en Nouvelle-Écosse. Comme son siège est situé en Suède, où il y a des normes nationales et où les produits chimiques sont interdits, le bureau canadien de Stora est incité à accepter les mêmes critères. Une fois qu'une société se sera engagée sur cette voie, d'autres en feront autant.
Nous sommes aussi en contact avec Kodak, à Rochester, qui utilise la pâte de St. Anne—Nackawic pour faire son papier. Les clients de Kodak sont maintenant plus sensibilisés. Nous leur avons conseillé d'exiger que les produits provenant de St. Anne—Nackawic au Nouveau-Brunswick soient certifiés par le FSC. La revue Time vient de publier toute une série d'annonces publicitaires dans lesquelles Pierce Brosnan ou je ne sais qui fait la promotion du FSC. Cette revue examine maintenant le papier qu'elle utilise. Au Nouveau-Brunswick, Repap fait du papier pour Time Warner. Dans l'État de New York, tous les terrains ont été certifiés par le FSC.
Cette évolution est en cours. Dans les Maritimes, nous avons constaté une énorme résistance au changement, mais je pense que la plupart des entreprises savent que le changement est inéluctable. On peut espérer que les Premières nations donneront le bon exemple. Il y a beaucoup de tensions et de difficultés dans ce secteur. Nous essayons de collaborer avec les meilleures réserves pour ce qui est de leur gestion forestière, afin qu'elles demandent la certification.
Le président: J'espère que vous n'y verrez pas malice de ma part, mais j'ai eu l'impression qu'en plus d'être un organisme s'occupant d'accréditation, vous vous occupez aussi du développement de marché.
Mme Jean Arnold: Les ONG européennes membres du Forest Stewardship Council ont tendance à diffuser leur message auprès du grand public. Les ONG canadiennes ont commencé à le faire auprès du gouvernement. Donc, en Europe, le marché est en train de s'ouvrir aux produits FSC.
À mon avis, c'est ce que la plupart des ONG feront à l'avenir au Canada. Il n'y avait aucun moyen de le faire avant que les normes aient été acceptées, mais un premier pas sur cette voie est certainement de faire connaître ce logo et d'encourager les gens à l'exiger. C'est comme la poule et l'oeuf. Si nous n'avons pas un marché pour le produit, personne ne voudra demander la certification; nous devons donc essayer de créer ce marché. Cela réduira les coûts pour les petits propriétaires de boisés et il sera plus facile d'embarquer.
Le président: D'accord.
Monsieur Provenzano.
M. Carmen Provenzano (Sault Ste. Marie, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je déduis de vos commentaires que la diversité biologique devient un facteur de plus en plus important pour la certification, n'est-ce pas?
Mme Jean Arnold: Oui.
M. Carmen Provenzano: Quel rôle joue-t-elle en matière de certification si on se fonde sur les normes du FSC?
Mme Jean Arnold: Je pense que la diversité biologique, au sens le plus large du terme, joue un très grand rôle. En particulier dans les Maritimes, notre énoncé de vision, que vous pouvez lire dans cette petite brochure, est axé sur la restauration. Les plantations pourraient être une première étape sur la voie de la restauration en vue d'un écosystème plus naturel. Dans cet écosystème plus naturel, nous protégeons nos bassins versants, notre faune et notre flore.
À l'avenir, nous constaterons—comme nous commençons à le faire au Nouveau-Brunswick—qu'un énorme marché se crée pour les produits forestiers non ligneux. Les centres de conférences de New York demandent des fougères. Nous pourrions fournir toutes les fougères et toutes sortes d'autres choses. On n'a pas encore examiné les possibilités qu'offre ce marché.
M. Carmen Provenzano: D'accord, merci.
J'ai prêté une grande attention à vos commentaires au sujet de la Suède. Je suis allé en France et j'ai vu des plantations forestières dans certaines parties de ce pays, et je suppose qu'il en va de même en Suède.
De mon point de vue, si les forêts naturelles ont été ravagées et si le paysage a été dénudé il y a longtemps, on doit apparemment compter maintenant sur les plantations forestières, et il est plus facile d'obtenir la certification du FSC pour celles-ci que pour les forêts comme celles qui prédominent au Canada. Pourquoi en est- il ainsi?
Mme Jean Arnold: Je dois dire que je connais mal la situation en France parce que le pays n'est pas, à l'heure actuelle, une composante très importante du Forest Stewardship Council. Certaines parties de la Suède ont été déboisées, tout comme au Royaume-Uni, mais on les restaure maintenant avec un assortiment d'espèces et on envisage de faire des recherches pour rétablir un équilibre entre les espèces, c'est donc la même chose.
M. Carmen Provenzano: Voulez-vous dire qu'il y a la même diversité biologique dans les plantations suédoises que dans les forêts typiques du Canada?
Mme Jean Arnold: Non, je ne pense pas qu'on puisse comparer une plantation... Il y a probablement la même diversité biologique dans une plantation canadienne que dans une plantation suédoise, cela étant dit de façon très générale et non scientifique. Mais on ne peut pas comparer une plantation forestière à une forêt naturelle.
M. Carmen Provenzano: En fait, je demande s'il y a deux séries de normes différentes, une pour les forêts canadiennes et une pour les forêts d'Europe qui sont des plantations. Elles ont été certifiées et n'ont pas autant de diversité biologique—c'est indubitable. Or, vous dites à notre comité que la diversité biologique est un facteur prééminent en matière de certification. Comment pouvons-nous vous croire? Comment pouvez-vous avancer une telle chose?
Mme Jean Arnold: Je ne peux pas être d'accord avec vous quand vous dites qu'il n'y a pas de diversité biologique...
M. Carmen Provenzano: À quel égard?
Mme Jean Arnold: ... en Suède... Leurs normes sont très semblables aux nôtres. Certains croyaient, je pense, de façon erronée que les normes suédoises étaient beaucoup moins strictes que les nôtres. Nous avons comparé nos normes de façon très rigoureuse avec les Suédois, et elles sont très compatibles avec les leurs.
M. Carmen Provenzano: Pouvez-vous nous assurer que la diversité biologique ne constituera pas un facteur plus important pour la certification des forêts canadiennes que ce n'est le cas pour n'importe quelle sorte de forêt européenne?
Mme Jean Arnold: C'est une généralisation qui va très loin. En Europe, je ne connais pas de...
M. Carmen Provenzano: Pourquoi ne pouvez-vous pas le dire? Pourquoi ne pouvez-vous pas dire que les normes de certification des forêts canadiennes seront les mêmes que pour les forêts européennes? Pourquoi ne pouvez-vous pas nous dire ça?
M. Jean Arnold: Parce que je ne connais pas toutes les normes européennes.
M. Carmen Provenzano: J'ai été intéressé par votre commentaire selon lequel il devrait être illégal d'exporter une bille brute du Canada. Je pense que c'est ce que vous disiez. Est-ce votre avis personnel ou celui du Forest Stewardship Council?
Mme Jean Arnold: Ce n'est pas l'avis officiel du Forest Stewardship Council.
M. Carmen Provenzano: Ce sont simplement des commentaires que vous avez faits.
Mme Jean Arnold: Oui.
M. Carmen Provenzano: Très bien. Cela touche, en fait, directement la politique du commerce international, n'est-ce pas?
Mme Jean Arnold: Peut-être.
M. Carmen Provenzano: Eh bien, je pense que oui. Le comité est très intéressé à apprendre si votre organisation joue un rôle quelconque vis-à-vis des questions liées au commerce international qui ont une incidence sur notre industrie forestière aujourd'hui—notamment les conditions de boycott. Quel est votre rôle? En tant qu'initiative canadienne du Forest Stewardship Council, jouez-vous un certain rôle dans le domaine du commerce international en ce qui concerne les produits forestiers canadiens? Ce rôle est-il positif ou négatif?
Mme Jean Arnold: J'espère qu'il est positif.
Nous avons un double rôle. Nous administrons le secrétariat du Forest Stewardship Council et nous sommes aussi une organisation indépendante à but non lucratif dans le contexte du Nouveau- Brunswick. Ce qui nous intéresse aussi bien au FSC qu'au Falls Brook Centre est que les forêts soient mieux gérées.
M. Carmen Provenzano: Conviendriez-vous avec moi que ces commentaires sur l'exportation de billes brutes depuis le Canada portent sur un sujet qui est du ressort de la politique du commerce international et relève des gouvernements?
Mme Jean Arnold: Non.
M. Carmen Provenzano: Vous n'êtes pas d'accord.
Mme Jean Arnold: Non, parce que je pense que, si nous continuons de nous considérer comme un pays qui exporte des matières premières au plus bas commun dénominateur, notre réflexion est à très court terme pour ce qui est de notre avenir en tant que Canadiens.
M. Carmen Provenzano: Que répondez-vous alors à la critique selon laquelle votre conseil ne se limite pas à l'intendance des forêts, mais veut jouer un rôle en matière de politique sur cette question sur la grande scène?
Mme Jean Arnold: Le Forest Stewardship Council?
M. Carmen Provenzano: Oui, qu'il ne se limite pas à l'intendance des forêts, mais se mêle de politique et va...
Mme Jean Arnold: Quand vous avez des activités liées à la foresterie, je ne pense pas que vous puissiez jamais séparer la foresterie et la politique...
M. Carmen Provenzano: Ne pensez-vous pas que cela peut avoir des répercussions sur la crédibilité de votre conseil si vous allez vous mêler de politique au lieu de l'intendance de la forêt?
Mme Jean Arnold: Je ne pense pas que le Forest Stewardship Council se mêle de politique à ce sujet dans le sens où vous l'entendez. Le Forest Stewardship Council est un organisme d'accréditation.
Le président: Je pense que vous avez dit clairement ce que vous vouliez dire, monsieur Provenzano.
Je passerai maintenant pendant un instant au député du Nouveau-Brunswick pour voir s'il envisage les choses de façon différente.
Monsieur Godin, soyez le bienvenu, même si vous êtes en retard et si nous n'autorisons normalement pas quelqu'un qui ne s'intéresse pas pleinement à la chose à venir. Mais, par politesse à l'égard du Nouveau-Brunswick, je vous accepte. Vous avez donc environ 30 secondes pour tout déballer.
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): C'est bien envoyé, monsieur le président, et j'apprécie vraiment cela à sa juste valeur. Mais nous avons parfois d'autres obligations dont nous devons nous acquitter. J'attendrai pour voir si le président n'arrive pas en retard un de ces jours, et je dirai que vous pouvez continuer la réunion.
Le président: C'est mon comité; je ferai ce que je veux.
[Français]
M. Yvon Godin: Certaines des choses que vous dites m'intéressent vraiment. La question est de savoir comment le faire et comment être rigide avec des choses comme celles que vous avez mentionnées quand vous avez dit qu'on devait prendre notre forêt et faire une deuxième et une troisième transformations, surtout au nord du Nouveau-Brunswick. Je viens du nord du Nouveau-Brunswick, et le peu qu'on a chez nous, ce sont des ressources naturelles.
On a du poisson, et on l'envoie directement au Japon. Je vous donne cet exemple. On a du crabe et c'est la même chose. On a du homard et il s'en va aussi. C'est toujours comme cela. On a aussi des problèmes en forêt. Je peux vous comprendre et je vous appuie. Je suis de ceux qui appuient vraiment la deuxième et la troisième transformations. Je pense que c'est la voie du futur que l'on devra suivre si le gouvernement, surtout le gouvernement actuel, ne veut pas apporter de changements à l'assurance-emploi.
Revenons à ma région dont, je pense, vous avez une certaine connaissance. Des forêts modèles avaient été créées dans la région de Sussex. Il y en avait une autre dans la région de Rivière-du-Loup. Trouvez-vous que c'est un modèle acceptable? Avant de vous demander de répondre, je dois dire que je suis convaincu qu'avec la forêt, on peut créer des emplois à long terme. Ce n'est pas comme une mine. Je suis un ancien mineur et je sais que quand on prend notre première pelletée de terre, on est en train de décider de la date à laquelle la mine va fermer. Du minerai, ça ne pousse pas sous la terre.
Par ailleurs, on a la chance d'avoir sur cette terre une forêt qu'on peut couper. Il y a des gens qui peuvent en vivre. Il y a des familles qui vivent de ça. On peut la replanter et les générations futures pourront s'en servir. Ce n'est pas juste beau pour les yeux qui veulent regarder la beauté de la nature. Il y a aussi des gens qui doivent en vivre. On ne peut pas tous vivre sur le bord d'une plage. Alors, c'est une ressource naturelle dont nos gens peuvent vivre.
• 1215
C'est peut-être ce que j'aimerais entendre le plus. Comment peut-on
utiliser cette beauté de la nature? Est-ce que les forêts modèles qui
ont été créées constituent une bonne direction à suivre pour essayer
de convaincre même les compagnies d'adopter des attitudes qui
permettront de s'assurer que les forêts restent vivantes et qu'elles
reviennent afin qu'on puisse les utiliser de nouveau?
Le président: Merci, monsieur Godin.
[Traduction]
Donc, madame, Arnold, vous avez vu deux façons différentes de poser des questions.
Mme Jean Arnold: Je ne prétends pas savoir beaucoup de choses au sujet des forêts modèles. J'ai siégé dans quelques comités s'occupant de la forêt modèle de Fundy, et je pense que, quand on a des intervenants importants qui se réunissent pour trouver une solution aux problèmes, c'est très productif.
Je pense que, peut-être, l'étape de la recherche prend trop longtemps et qu'on agit moins que je ne l'aimerais personnellement dans le système des forêts modèles, mais, dans l'ensemble, d'après ce que j'ai vu, il me semble qu'au moins, du fait qu'il y a différents intervenants qui sont ensemble—les propriétaires fonciers, les compagnies forestières, la fédération de saumon, les écologistes—, les gens dialoguent entre eux et commencent à se rendre compte qu'il y a différents groupes d'intérêt qui sont tous des utilisateurs de la forêt. On peut espérer que cela permettra de parvenir à des solutions utiles à long terme.
[Français]
M. Yvon Godin: Lors de l'un de nos voyages, on était allés en la Colombie-Britannique. On était allés à Bella Coola et ailleurs, et j'avais été vraiment impressionné de voir que le gouvernement de la Colombie-Britannique avait un règlement. Corrigez-moi si je dis des choses qui ne sont pas vraies, mais ce que j'ai compris en Colombie-Britannique, par exemple, c'est qu'il y avait une loi en vertu de laquelle on doit remplacer tout arbre qu'on coupe par trois arbres; ensuite, par le biais de la sylviculture, on prend le meilleur de tout ça et on fait une belle forêt. C'est ainsi que j'avais compris la loi. Si on fait des chemins dans la forêt, on la ramène de nouveau à la nature parce qu'il va falloir 50 ans avant que la forêt revienne. Alors, on ramène la nature et tout. J'ai trouvé que c'était très positif, même pour la Colombie-Britannique.
Malgré cela, ils font l'objet de critiques pour leurs pratiques forestières. J'ai parlé à des travailleurs de la Colombie-Britannique. Ils disent que c'est bien beau de les critiquer, mais qu'ils pensent avoir fait beaucoup, parce que la forêt est leur avenir et celui de leurs enfants.
Je ne sais pas si vous connaissez la Colombie-Britannique, mais verriez-vous d'un bon oeil qu'au Nouveau-Brunswick, on fasse des pressions pour avoir des règlements semblables afin de s'assurer qu'on puisse se servir de la forêt et que les générations futures puissent en vivre? Comme je l'ai dit, c'est beau, la nature; c'est beau pour nos yeux. C'est de cette manière que je vois les choses.
[Traduction]
Mme Jean Arnold: Je suis d'accord avec vous. Je pense que nous pourrions avoir beaucoup plus d'activités concrètes de replantation et des gens dans les forêts et que nous pourrions examiner pourquoi nous n'avons pas plus de petites scieries. Pourquoi celles que nous avons n'appartiennent-elles pas à des gens du Nouveau-Brunswick? Pourquoi n'avons-nous pas de foresterie communautaire? Pourquoi n'encourageons-nous pas la fabrication de produits à valeur ajoutée, pourquoi ne fabriquons-nous pas plus d'articles en bois? Pourquoi ce gouvernement, en ce qui concerne ses approvisionnements et services, n'achète-t-il pas plus de meubles du Nouveau- Brunswick? Il y a de nombreuses solutions.
Je ne sais réellement pas grand chose à propos de la situation en Colombie-Britannique, mais je pense que nous pourrions utiliser bien davantage les forêts tout en respectant la nécessité de maintenir l'écosystème intact pour qu'il puisse se reproduire et continuer à nous fournir de l'eau douce et des possibilités d'activité de loisir, de telle façon que les habitants du Nouveau- Brunswick puissent continuer à se promener avec plaisir dans les bois, à y vivre et qu'il y ait beaucoup de gens qui possèdent un petit boisé.
[Français]
M. Yvon Godin: Je vais terminer par un commentaire. Ce que je peux voir avec mes yeux, la marche en forêt et tout ça, c'est bien, mais il y a des gens qui doivent vivre de cette forêt. Comment peut-on trouver des solutions tous ensemble pour arriver à faire toutes ces choses-là, afin qu'on ait une forêt dont les gens peuvent vraiment se servir, comme les bûcherons de chez nous? Ce sont des gens qui ont besoin d'aller couper le bois. Si j'étais mineur, je ne voudrais pas que quelqu'un vienne me dire qu'il ne faut pas sortir le minerai de sous la terre. Ça été mis là pour que l'on puisse s'en servir, mais comment faire pour s'en servir comme il le faut? Êtes-vous d'accord avec moi pour dire qu'il y a des manières de le faire, mais qu'il ne faut pas arrêter l'exploitation forestière et faire des boycotts et d'autres choses qui font du mal à nos travailleurs et à nos travailleuses?
Le président: Je ne pense pas qu'il vous demandait réellement de commenter cela, madame Arnold.
Mme Jean Arnold: J'aimerais faire un commentaire.
Le président: Je sais, mais si vous le faites, vos collègues du Canada Forest Stewardship Council n'auront pas le temps de parler, et nous sommes déjà en retard.
Je veux permettre à tous les membres du comité d'intervenir. Étant donné que vous faites preuve d'une telle bonne volonté, surtout pour ce qui est de votre sens de la répartie, je vais demander à mes collègues de ce côté-ci s'ils veulent bien qu'on limite un peu plus le temps prévu pour leurs questions et leurs réponses.
M. Julian Reed: J'ai déjà posé ma question, monsieur le président.
Le président: Je sais. Ceux d'entre nous qui ont étanché leur soif seront probablement très accommodants maintenant, mais ceux qui veulent encore s'abreuver à la fontaine de la connaissance voient les choses différemment.
Monsieur St. Denis, allez-y, buvez à satiété.
M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Monsieur le président, merci beaucoup. Je peux être bref, comme d'habitude.
Merci, madame Arnold. Vous semblez avoir une très bonne connaissance des enjeux. Un des sujets sur lesquels j'ai interrogé tous les témoins en ce qui concerne les questions internationales relatives aux pratiques forestières canadiennes est la certification. Il y a plusieurs systèmes de certification différents dont la mise au point est plus ou moins avancée. Il y a la SFI, l'initiative pour la foresterie durable aux États-Unis; il y a le système paneuropéen de certification, il y a le FSC, la CSA, l'ISO, et il y en a peut-être d'autres que je ne connais pas. Et ils en sont manifestement tous à leurs premiers balbutiements. Aucun système n'a encore terminé son évolution et n'est encore accepté universellement.
Quel est, selon vous, l'avenir de la certification? Je pense qu'il est juste de dire que, sous une forme ou sous une autre, nous allons avoir un système de certification, et je pense que vous avez utilisé le mot «inévitable»; je ne sais pas si vous avez employé ce mot, mais c'était quelque chose de ce genre. Donc, si nous reconnaissons l'inévitabilité de la certification, pensez-vous qu'il va finalement y avoir un seul système ou que, par nécessité, il y en aura plusieurs différents dans le monde entier, qui fonctionneront conjointement, peut-être au moyen d'une sorte de protocole, de façon à ce qu'on puisse tenir compte des différences entre les régions et les climats? Comment voyez-vous la situation à long terme, si vous pouvez faire un saut de 10 ou 20 ans dans l'avenir?
Mme Jean Arnold: Quand les gens commencent à parler de l'espèce de concurrence et des espèces de tension qui existent entre les systèmes que nous avons actuellement—je ne connais pas le contexte du Canada central, mais, dans les Maritimes, on peut faire ses achats chez SaveEasy, on peut acheter directement aux agriculteurs sur le marché ou aller à Sobey's—, je dis toujours qu'on a de nombreux choix. Je pense qu'en ce moment, la certification est déterminée dans une large mesure par le type de marché sur lequel on essaie de pénétrer et les critères que celui- ci impose. Donc, pour un petit propriétaire de boisé qui a pour client le quincaillier local, il est inutile d'obtenir une certification internationale.
Je pense que c'est assurément la certification établie sur la base d'une vérification indépendante réalisée par un tiers qui aura le plus de succès parce que c'est la plus crédible. Mais je suppose que, pour des gens différents fonctionnant sous des régimes différents, nous avons trop tendance à penser qu'il y a seulement une façon correcte de faire les choses, alors qu'à mon avis—ce qui est une réponse au monsieur qui a parlé tout à l'heure et qui est parti depuis—, nous entrons dans une période de plus en plus complexe et, au fur et à mesure que nous commencerons à comprendre et à accepter cette complexité, nous pourrons choisir où nous achetons des choses selon que nous voudrons peut-être privilégier ce qui est biologique, disons, ou une forêt sans produit chimique, ou privilégier quelque chose qui encourage réellement des pratiques commerciales équitables et la foresterie communautaire, parce que ce sont les sortes de critères sur lesquels se fonde une consommatrice comme moi quand elle consulte l'étiquette pour savoir si un produit contient des ONG ou je ne sais quoi d'autre.
L'étiquetage est quelque chose à quoi les consommateurs de demain s'intéresseront. Je ne vois pas réellement de concurrence pour ce qui est de ce veulent les consommateurs. Je pense que c'est en examinant sur quels marchés vous voulez pénétrer que vous pouvez déterminer quelle sorte de certification est adaptée à vos activités.
M. Brent St. Denis: Je vais vous aider, monsieur le président. J'ai fini.
Le président: Vous êtes merveilleux, monsieur St. Denis.
Monsieur St. Julien, j'espère que vous ferez aussi bien.
M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Merci, madame Arnold, de votre témoignage de ce matin. Vous avez une bonne expérience de la foresterie. Connaissez-vous la situation forestière au Québec? On parle de forêts boréales. On parle de bonnes pratiques forestières sur les marchés régionaux et il se fait actuellement beaucoup de publicité sur les forêts boréales au Québec, compte tenu des revendications des Cris de la Baie James par la voix du grand chef Ted Moses, mais surtout du film de Richard Desjardins, qui vient de l'Abitibi, sur la foresterie au Québec. L'avez-vous vu?
[Traduction]
Mme Jean Arnold: Voulez-vous parler du film L'Erreur boréale?
M. Guy St-Julien: Oui.
[Français]
Est-ce qu'on peut avoir vos commentaires là-dessus?
[Traduction]
Mme Jean Arnold: Je pense que la situation au Québec est tellement différente de la nôtre qu'en ce qui concerne la certification dans cette province et la réalité qui est celle des Autochtones, je ne pourrais réellement faire aucun commentaire.
Nous avons récemment eu une grande réunion sur la certification au Nouveau-Brunswick, et j'ai remarqué que les forestiers et les universitaires du Québec étaient les plus nombreux. J'ai trouvé cela assez intéressant, parce que les Québécois ne se rendent habituellement pas en si grand nombre au Nouveau-Brunswick pour des manifestations de ce genre. Étant donné qu'un de mes collaborateurs était du Québec, j'ai passé les soirées avec les délégués du Québec, et j'ai constaté qu'ils s'intéressaient considérablement à la certification. Je suppose donc qu'un intérêt commence à se manifester et, à en juger par le grand nombre de chaînes de responsabilité, je suppose qu'il y a un secteur manufacturier tourné vers l'exportation qui est mieux disposé envers le système du FSC.
M. Guy St-Julien: Oui.
Mme Jean Arnold: Mais c'est une pure supposition. Vous pourriez interroger mes collègues, qui ont une meilleure idée que moi de ce qui se passe au Québec.
[Français]
M. Guy St-Julien: Merci beaucoup, madame.
Le président: Merci, monsieur St-Julien.
[Traduction]
Mme Jean Arnold: Vous qui présidez la séance, m'autorisez-vous à lui répondre au sujet des emplois ou mon temps est-il écoulé?
Le président: Vous pouvez m'appeler président, mais c'est très bien.
Mme Jean Arnold: Monsieur le président.
Le président: J'aimerais réellement entendre votre réponse à ce sujet, mais vous n'avez pas seulement épuisé votre temps de parole, madame, vous l'avez largement dépassé. Nous avons grignoté le temps dont disposent vos collègues. Je pense pouvoir dire au nom de toutes les personnes ici présentes que nous avons apprécié cet échange de vues. Il nous a beaucoup appris—tout au moins en ce qui me concerne, je ne sais pas si c'est le cas pour qui que ce soit d'autre.
M. Yvon Godin: J'invoque le Règlement...
Le président: Une seconde...
M. Yvon Godin: J'invoque le Règlement...
Le président: Monsieur Godin, en quoi consiste votre rappel au Règlement?
M. Yvon Godin: Merci. Je pense qu'elle pourrait répondre en deux minutes, par simple souci d'équité, parce que c'est ce qui s'est passé avec les pêches. Nous avons épuisé ce qu'il y avait dans la mer et nous n'avons plus d'emplois aujourd'hui. Si elle a quelque chose à répondre, elle est là comme témoin et, que nous soyons d'accord ou non, nous sommes là pour écouter notre témoin, je vous en prie.
Le président: Sauf que, figurez-vous, il y a un autre rappel au Règlement. L'autre rappel au Règlement est que, quand vous utilisez tout votre temps de parole pour faire un préambule, vous ne laissez plus beaucoup de temps aux témoins pour répondre, et c'est ce qui s'est produit.
Je veux donner aux autres témoins la possibilité de donner aussi une réponse, madame. Je pense parler au nom de tout le monde. Merci beaucoup, cet entretien a été très agréable.
Je lève la séance pendant une minute pendant que nous faisons venir nos autres témoins.
Le président: Nous allons reprendre la séance.
Nos témoins viennent du Forest Stewardship Council of Canada, ce sont Marcello Levy, représentant du conseil, et Marty Horswill, coordinateur du développement des normes à l'initiative régionale de la Colombie-Britannique.
Messieurs, je vous souhaite chaleureusement la bienvenue à tous deux. Nous avons échangé quelques mots et je tiens à vous rappeler officiellement que nous accordons normalement cinq à dix minutes aux gens pour exposer leurs idées. Si vous n'avez pas de mémoire à nous présenter, c'est très bien. Si vous voulez nous donner un bref aperçu puis répondre aux questions de nos collègues, j'en serai heureux, tout comme, je pense, nos collègues.
Je sais que vous êtes ici depuis une quarantaine de minutes, vous avez donc entendu plus ou moins la teneur du débat qui vient d'avoir lieu. Vous pouvez vous en inspirer ou ne pas en tenir compte, à votre guise.
Qui de vous deux va commencer? Monsieur Levy.
M. Marcello Levy (représentant, Forest Stewardship Council of Canada): La certification du FSC a beaucoup progressé au cours des cinq dernières années. Elle a connu une croissance exponentielle à presque tous les égards, sauf pour ce qui est de nos budgets.
Pour atteindre ces fins, un programme de certification doit avoir une portée internationale, il doit paraître crédible aux consommateurs et être reconnu sur le marché. À notre avis, le FSC répond à ces conditions.
La clef de la réussite d'un quelconque système de certification est sa crédibilité, et le FSC est organisé selon une structure multipartite, en commençant par son conseil d'administration international; il est divisé en chambres, et les membres élisent des représentants qui orientent les activités du FSC, qu'il s'agisse des activités des initiatives nationales, comme FSC Canada, qui comporte aussi plusieurs chambres, ou des initiatives régionales qui élaborent des normes au Canada.
C'est ce qui fait la force du FSC, le processus régional d'élaboration des normes auxquelles participent toutes sortes d'intervenants. C'est sa force, parce que nous permettons à ces différents secteurs de se rencontrer pour s'entendre sur ce qui constitue une bonne gestion forestière dans leur région.
Le FSC fournit également un label reconnu au niveau international, si bien qu'il existe un lien effectif entre les conditions locales et régionales et les normes qui s'appliquent à elles, et les marchés internationaux.
• 1235
FSC Canada et FSC International sont déterminés à collaborer
avec d'autres systèmes de certification pour que les coûts que
doivent assumer les entreprises qui se tournent vers divers
systèmes de certification, ce qui arrive, en fait... Les
entreprises cherchent surtout à obtenir la certification de l'ISO
comme base, puis elles ajoutent un autre label. À notre avis, il
n'y a rien à redire à cela. Comme l'a dit Mme Arnold tout à
l'heure, chaque entreprise cherchera à obtenir la certification qui
est le plus conforme à ses besoins en matière de commercialisation.
Sur ce, mon collègue parlera d'autres questions.
M. Marty Horswill (coordonnateur, Développement des normes, Initiative régionale de la Colombie-Britannique, Forest Stewardship Council of Canada): Je voudrais d'abord vous remercier d'avoir invité le FSC à parler du FSC. Un des principaux problèmes que nous avons est que les gens ont tendance à parler à des personnes qui sont membres du FSC pour connaître leur point de vue, mais il est dans la nature de notre organisation d'avoir une composition et de prendre des décisions qui reflètent tous les points de vue concernant la question des forêts. Ces différents points de vue, on s'en doute, se traduisent par des aspirations différentes pour notre organisation. Nous qui y travaillons avons pour tâche de refléter le consensus qui s'est établi jusqu'à présent entre ces intervenants sans aller plus loin.
En réfléchissant à ce que je devrais dire ici aujourd'hui, je me suis demandé ce que les députés qui conseillent le gouvernement du Canada au sujet de la politique forestière doivent savoir à propos de la certification des forêts. Je peux vous faire part de mon impression après avoir travaillé dans ce domaine pendant un peu plus d'un an dans une province où il y a des points de vue extrêmement différents sur cette question et où, bien entendu, les résultats de la certification sont extrêmement importants pour toutes nos communautés qui sont presque exclusivement tributaires de la foresterie.
Je pense que la première chose que vous devez comprendre au sujet de la certification est que ce n'est plus un point qui clignote au loin sur l'écran de radar des futurologues. La certification est ici maintenant et est importante maintenant. La certification indépendante liée au marché et réalisée par une tierce partie est réellement la seule qui compte, parce que c'est la seule qui trouve une crédibilité auprès des consommateurs et la seule qui permet à ces derniers de faire leurs choix sur le marché—et c'est ce qui compte.
La certification est une chose importante. Je pense que si vous voulez évaluer l'importance de la certification pour la foresterie, vous ne risquez guère de vous tromper si vous considérez que c'est l'innovation la plus importante dans ce domaine depuis l'invention de la scie à chaîne. Elle aura des ramifications énormes pour la foresterie au Canada.
Le Canada est déjà en train de prendre du retard par rapport à certains de ses concurrents pour ce qui est de se mettre en position de profiter pleinement des chances à saisir sur le marché et pour éviter les risques commerciaux inhérents à la certification. Les Scandinaves, nos amis du Nord de l'Europe, sont nettement en avance sur nous parce qu'ils accueillent à bras ouverts le concept de certification et mettent en oeuvre tout le poids des ressources gouvernementales pour faire en sorte qu'elle fonctionne.
Comme dans le cas de tout marché nouveau ou en évolution, ce sont les premiers arrivés sur le nouveau marché de la certification qui en tireront les plus grands avantages. Si le Canada continue à traîner de l'arrière, nous risquons de perdre non seulement les nouvelles chances qu'offre ce marché, mais aussi une bonne part de nos marchés existants.
Le Canada vend la plus grande partie de son bois sur un marché des produits de base qui ne fait de distinction et qui est mondial par nature. Pour cette raison, la certification FSC, la seule qui soit reconnue internationalement, est vraisemblablement la seule qui donnera de bons résultats pour le Canada, étant donné la nature de notre participation à ce marché mondial indifférencié.
La certification FSC ne peut fonctionner à plein que quand des normes régionales auront été approuvées. L'élaboration de normes est une procédure complexe et coûteuse. Il n'est pas étonnant que les seuls pays à avoir actuellement des normes régionales approuvées soient ceux dont les gouvernements ont contribué au contenu des normes régionales et au coût de leur élaboration.
• 1240
Pour permettre à l'industrie forestière canadienne et au
secteur de la fabrication de produits à valeur ajoutée de faire
face à leurs concurrents sur un pied d'égalité dans le monde de la
certification, il est essentiel que le Canada ait, dès que
possible, des normes régionales FSC approuvées pour tous nos types
de forêt et nos régions forestières. Pour que cela puisse se faire
assez rapidement afin de permettre au Canada de rattraper nos
concurrents du nord de l'Europe, il est essentiel que les
gouvernements fédéral et provinciaux participent pleinement et
efficacement à la définition du contenu des normes régionales FSC
et contribuent au coût de leur élaboration au Canada.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Horswill. C'était très bref. Je vous remercie, monsieur Lévy et vous.
Si vous me le permettez, juste avant de laisser nos collègues poser des questions, j'ai deux choses à dire. Premièrement: cette partie de notre étude porte sur différentes régions, il convient donc que nous entendions un point de vue régional. Peu importe qu'il soit conforme au point de vue de qui que ce soit d'autre.
Deuxièmement, dans votre exposé, vous avez fait référence à la certification et aux vérifications effectuées par des tiers. Je me demande simplement ce que cela signifie dans ce contexte. Vous pouvez me corriger à ce sujet si vous le voulez, je vous en prie. J'ai l'impression, et je crois l'avoir exprimée tout à l'heure en parlant avec l'autre témoin, que le FSC pourrait être... J'essaie d'être très prudent dans le choix des mots que j'emploie. Le FSC semble être associé davantage avec l'environnement, avec les questions environnementales et, en fait, avec les groupes environnementaux. La CSA, un autre groupe qui s'occupe de certification est apparemment—je souligne ce mot—associée davantage à l'industrie.
Pouvez-vous alors nous expliquer, d'abord, si ce contexte est correct et, deuxièmement, ce que vous entendez par une «vérification effectuée par un tiers»?
M. Marty Horswill: Je pense que vous reflétez avec exactitude l'impression qu'ont beaucoup de gens, mais elle est erronée.
Le président: C'est une autre façon de dire que vous échouez...
M. Marty Horswill: Une des choses que je pensais faire était de parler des mythes concernant la certification. Un de ces mythes est que le FSC est entre les mains du mouvement écologiste et que nous ne sommes que des marionnettes de ce mouvement. En fait, d'importants intervenants ont exprimé cette opinion avec véhémence dans ma province.
Le président: Vous êtes de Colombie-Britannique, n'est-ce pas?
M. Marty Horswill: En réalité, le FSC est contrôlé par...
Le président: De quelle province s'agit-il? La Colombie- Britannique?
M. Marty Horswill: La Colombie-Britannique.
Le président: Merci.
M. Marty Horswill: En réalité, le FSC, à tous les niveaux, doit avoir une représentation égale d'au moins trois points de vue généraux sur les forêts: les points de vue économique, environnemental et communautaire. Ici, au Canada, nous en avons ajouté un quatrième, celui des Premières nations.
Les écologistes ont seulement 25 p. 100 des voix dans tous les organismes décisionnels du FSC. L'industrie a aussi 25 p. 100 des voix, de même que les Premières nations et les représentants du grand public et des syndicats. En vertu de ses règles internationales, le FSC doit représenter de façon générale tout un éventail d'intervenants, et c'est ce que nous faisons.
Le président: Vous n'allez donc pas parler des vérifications effectuées par des tiers...?
M. Marty Horswill: D'accord. Nous entendons par là que les gens qui vérifient si vous respectez la norme ou non sont indépendants par rapport à vous, l'exploitant ou l'entreprise, ou à nous, le FSC qui établit la norme. Quelqu'un qui est indépendant des deux parties examine la norme et ce que vous faites sur le terrain pour voir s'il y a concordance ou non.
Le président: Merci.
Je vais passer à M. Duncan.
M. John Duncan: Merci beaucoup.
Je pense que c'est Marty qui a parlé de ce que les députés pourraient vouloir savoir.
M. Marty Horswill: Ce que je pensais que vous pourriez vouloir savoir...
M. John Duncan: Vous êtes un groupe international. Vous êtes maintenant présent dans plus d'une province et vous avez votre siège à Toronto. Je pense qu'aucun de nous n'a la moindre idée ou la moindre certitude à propos de la transparence de votre organisation, de votre structure internationale, des gens dont vous relevez, de la façon dont vous rendez compte de vos activités, de la possibilité de consulter vos livres, de la possibilité de savoir qui sont vos membres et de votre statut juridique. Avez-vous le statut d'une corporation? Constituez-vous une société? Nous ne comprenons pas la nature des activités du FSC. Donc, je pense que c'est quelque chose que nous aimerions savoir. Je pense que c'est le moment approprié pour le faire.
M. Marty Horswill: D'accord.
M. John Duncan: Je ne pense pas que nous ayons le temps de le faire, parce que j'ai seulement cinq minutes.
M. Marty Horswill: Voudriez-vous que nous vous présentions cela dans un mémoire?
M. John Duncan: Oui. Je pense que ce serait une très bonne chose à avoir.
Par ailleurs, c'est la deuxième chose que veux dire, nous avons entendu beaucoup de gens dire du bien du FSC, encourager le boycott de produits forestiers canadiens et dénigrer tout ce qui n'est pas le FSC. Nous nous demandons s'ils disent cela au nom du FSC ou de leur propre initiative. Je vous ai entendu dire que vous souhaitez coopérer avec d'autres groupes, alors pourquoi ne prendriez-vous pas position contre les gens qui ont dit des choses de ce genre? Pourquoi ne le feriez-vous pas officiellement maintenant?
Le président: Monsieur Horswill ou monsieur Lévy.
M. Marcello Lévy: Je vais essayer de répondre, et vous pourrez compléter mes propos.
Je le répète, le FSC est responsable devant ses membres. Les membres du FSC ont des valeurs, des visions et des espérances différentes. Le FSC a sa propre vision et sa propre voix, qui s'expriment principalement dans ses politiques, dans ses principes et critères et dans toutes les choses qui vont de pair avec l'élaboration de ces normes.
Ce n'est donc pas notre rôle d'enjoindre un quelconque de nos membres de se taire et de ne rien dire. Je ne pense pas que ce soit notre rôle. Nous devons parfois clarifier la position du FSC à ce sujet, et c'est ce que nous nous efforçons de faire.
M. John Duncan: En ce qui concerne ma dernière question, vous essayez de collaborer avec d'autres intervenants, les gens disponibles en Colombie-Britannique quels qu'ils soient, pour élaborer des normes FSC pour cette province. Le processus a été long et tortueux et, à ma connaissance, il n'est pas encore terminé.
Une des questions que se pose le comité concerne la différence entre l'élaboration de normes pour les plantations et l'élaboration de normes pour les vieilles forêts. Le FSC parviendra-t-il à établir des lignes directrices pour l'exploitation des vieilles forêts de la Colombie-Britannique?
Je m'arrêterai ici même.
M. Marty Horswill: Je ne peux pas prédire l'avenir. Nous essayons d'y parvenir, et nous avons l'intention d'y parvenir. Mais, pour y parvenir, nous devons faire ce que nous ne sommes pas encore arrivés à faire en Colombie-Britannique, c'est-à-dire trouver une façon d'établir un vaste consensus entre les écologistes, les Premières nations, les pouvoirs publics, l'industrie, les syndicats et les communautés au sujet de ce qu'est une bonne gestion des forêts en Colombie-Britannique.
Nous devons le faire en tenant compte de la totalité des dix principes du FSC et des 56 critères du FSC. Ce ne sera pas une tâche facile. Cela ne se fera pas du jour au lendemain. Il faut s'appuyer sur une grande quantité de données scientifiques pour que tous les intervenants différents qui participent aux discussions n'aient aucune inquiétude au sujet de la façon précise dont le système fonctionnera en pratique et des répercussions qu'il aura.
M. John Duncan: Je ferai simplement remarquer que vous avez des normes FSC dans les Maritimes. C'est la seule partie du Canada où on n'exploite pas les vieilles forêts. Donc, même si c'est peut- être un problème pour la Colombie-Britannique, c'en est, en fait, un pour le reste du Canada, à l'exception des Maritimes. Je pense simplement utile de le signaler.
Le président: Merci.
Monsieur St. Denis.
M. Brent St. Denis: Merci, monsieur le président. J'aurai peut-être deux brèves questions, si vous me permettez de les poser, simplement pour ajouter à ce qu'a demandé M. Duncan.
Dois-je déduire de votre réponse, monsieur Horswill, qu'il est éventuellement possible d'avoir une norme raisonnable sur l'exploitation des vieilles forêts et que ce n'est pas totalement exclu?
M. Marty Horswill: La question à laquelle vous voulez que je réponde est celle de savoir si le FSC va autoriser l'exploitation des vieilles forêts ou non?
M. Brent St. Denis: Je pense qu'on peut résumer ainsi ma question.
M. Marty Horswill: D'accord. Je ne peux pas vous répondre parce que la norme n'a pas encore été rédigée.
M. Brent St. Denis: D'accord.
M. Marty Horswill: Mais, à ma connaissance, rien de ce qui figure dans les principes et les critères du FSC ne l'interdit. Il y est simplement dit qu'on doit atteindre tous ces objectifs. Et, quand nous élaborons les normes régionales, notre tâche est de partir des principes généraux qui existent et de les préciser, de fournir des indicateurs mesurables et de fournir des seuils minimaux sur la base desquels les examinateurs accrédités peuvent alors déterminer si une entreprise respecte ou non la norme.
M. Brent St. Denis: Vous ferais-je dire ce que vous ne voulez pas dire si je déclare qu'il est possible que la certification FSC s'applique aux forêts entières?
M. Marty Horswill: Oui, c'est possible.
M. Brent St. Denis: D'accord. Je poserai une question semblable à celle que j'ai posé à Mme Arnold pour savoir ce que vous en pensez.
Il y a le système FSC, et nous conviendrons que toutes ses composantes en sont à diverses étapes de leur développement initial. Il y a aussi la SFI, le nouveau système américain, le système paneuropéen, l'ISO, la CSA, qui ont tous des critères et des objectifs différents, et peut-être d'autres; pensez-vous que l'un d'entre eux finira par prendre le dessus?
Je ne vous demande pas si vous êtes d'accord ou pas avec Mme Arnold, mais, de votre propre point de vue, y en a-t-il un qui va prendre le dessus ou pensez-vous que dans cinq, 10 ou 20 ans, il y aura encore plusieurs systèmes, mais, peut-être, une sorte de protocole permettant aux consommateurs d'établir des liens entre eux? Que pensez-vous qu'il se passera en matière de certification dans cinq, 10 ou 20 ans?
M. Marcello Lévy: Je dirais que les divers systèmes ont des fins différentes et sont élaborés de façon différente.
Je ne veux pas rentrer dans les détails, mais la CSA et l'ISO tiennent fondamentalement compte des systèmes. Ce sont les systèmes de gestion de l'environnement qui président à ces modes de certification. Ils ont diverses fins, et les entreprises les adoptent pour diverses raisons.
La norme du FSC est plutôt basée sur la performance, les résultats atteints. Je préciserai un peu cette réponse, mais, de façon générale, nous pouvons dire que la norme du FSC est basée sur les résultats atteints et est liée au marché. C'est, jusqu'à présent, la seule à être liée au marché. D'autres présenteront probablement plus tard des labels. C'est ce à quoi je m'attends.
En ce qui concerne notre collaboration avec d'autres systèmes de certification, nous sommes d'avis qu'il y a beaucoup de chevauchements, et nous en sommes conscients. Nous devons nous assurer que les entreprises qui ont recours à plusieurs des systèmes existants—ce qui se produit déjà—ne se voient pas imposer un fardeau excessif en essayant de satisfaire différentes exigences qui sont, en fait, les mêmes.
Notre objectif sera d'essayer de réduire le plus possible, de façon très spécifique, les coûts assumés par ces entreprises qui cherchent à recourir à divers systèmes de certification. Ce que je dis est plus général. Je m'attends à ce qu'il puisse y avoir des protocoles permettant de comprendre ce que signifie chaque système, mais je n'envisage pas réellement qu'ils puissent être fusionnés en un seul.
Le président: Monsieur St. Denis.
M. Brent St. Denis: J'ai une dernière question brève. Je vole peut-être à M. Provenzano la question qu'il voulait poser, mais je pense que M. Horswill a mentionné qu'en Scandinavie, les gouvernements ont soutenu les entreprises ou collaboré avec elles pour faire progresser la cause de la certification. Un cynique pourrait penser qu'ils l'ont fait pour s'assurer une certaine avance, ce qui n'est pas une chose déraisonnable—s'assurer une avance en matière de norme et avoir davantage son mot à dire à propos de ce qui se passe sur le marché que quelqu'un qui arrive plus tard.
C'est comme en Chine. Une entreprise européenne essaie de vendre à la Chine des systèmes utilisant le courant à 220 volts, alors qu'une entreprise nord-américaine essaie de vendre un système fonctionnant avec 120 volts. Quel que soit le système acheté, le fournisseur dont le matériel utilise le courant de 220 volts vend du matériel qui fonctionne avec 220 volts et non pas 120 volts. Je pense que ce serait la même chose pour la certification.
Donc, dans quelle mesure l'influence scandinave, si elle existe, s'exerce-t-elle dans le système FSC au détriment, disons, de la foresterie nord-américaine ou canadienne? Les gouvernements ont donné leur appui aux entreprises et ont collaboré avec elles pour soutenir cette cause. Je pense que, d'après vous, le Canada devrait entrer en lice, et j'essaie de comprendre pour quelle raison.
M. Marty Horswill: Je ne pense pas que les Suédois aient l'avantage parce qu'ils ont établi la référence ou, d'une façon ou d'une autre, créé des conditions initiales qui les favorisent par rapport aux autres. Ils ont plutôt terminé ce processus, et leur industrie peut maintenant aller de l'avant et obtenir une certification sachant avec précision quel niveau elle doit atteindre. La nôtre ne peut pas le faire. Le principal problème auquel l'industrie canadienne est confrontée pour ce qui est du FSC est de ne pas savoir encore avec précision quelle est la norme du FSC; elle ne peut donc pas déterminer quelles sont les lacunes à combler et voir ce qu'il lui reste encore à faire. Par conséquent, elle est en situation d'attente.
Les Suédois s'y sont mis, le gouvernement a financé le processus, celui-ci a été terminé rapidement, et les entreprises ont franchi la ligne de départ et commencé à courir. Nous attendons encore sur la ligne. Les ressources jouent un rôle très important pour l'élaboration des normes.
Nous sommes au Canada. Au sud de la frontière, il y a de grandes fondations qui peuvent financer les initiatives de la société civile. Il n'existe absolument aucune façon au Canada de faire la même chose pour les organisations de la société civile comme le FSC. Il y a deux fondations. La seule source de financement ici est le gouvernement.
[Français]
Le président: Monsieur Godin.
M. Yvon Godin: Je vais essayer de poser une question courte pour me racheter auprès de mon président, puisque j'avais pris trop de temps tout à l'heure.
Ma question porte sur le FSC. C'est comme si vous aviez une organisation qui dit que vous êtes capable d'amener 25 p. 100 de chaque industrie, qu'il s'agisse de l'industrie elle-même, des environnementaliste, des autochtones, etc. Seriez-vous d'accord pour que le gouvernement prenne la responsabilité de dire qu'on a un problème et qu'il faut qu'il y ait une certification, et pour qu'il crée un organisme au Canada pour faire la certification et invite chacun des organismes à venir à ce comité-là, qui serait composé de membres représentatifs de notre pays, comme cela se fait pour d'autres choses? Il y aurait des certifications du gouvernement et les gens y participeraient. Comme je le disais, on inviterait des environnementalistes, des autochtones, l'industrie et les syndicats à y participer, et ce serait parrainé par le gouvernement.
Le gouvernement prendrait lui-même ses responsabilités, tandis qu'une organisation comme la vôtre serait reconnue. Plutôt que d'inviter tout le monde qui voudrait se faire reconnaître, le gouvernement refuserait et dirait qu'il va le faire, qu'il va inviter des gens et que la certification sera celle du Canada.
M. Marty Horswill: Je m'excuse, mais je ne m'exprime pas facilement en français. Je vais répondre en anglais.
[Traduction]
Cela ne peut pas arriver avec le FSC parce que, par définition, c'est une initiative non gouvernementale. Le gouvernement a un rôle à jouer, mais pas celui que vous avez décrit. Son rôle est d'être un des intervenants qui apportent une contribution importante à la discussion sur ce que devraient être des normes de certification pour le Canada et pourquoi.
Bien entendu, étant donné que la plupart des ressources dont nous parlons appartiennent aux provinces, il est essentiel qu'elles aient leur mot à dire. Mais le FSC est, par nature, une initiative non gouvernementale. Les gouvernements sont les seuls à ne pas pouvoir être membres du FSC; d'autres peuvent l'être, mais pas les gouvernements, précisément pour cette raison. Le fait est que les gouvernements ne peuvent pas résoudre nos problèmes à notre place. Nous devons le faire conjointement avec tous les intervenants, et le gouvernement a sa place comme un des principaux participants à ce processus. Bien entendu, ce que je vous dis est que nous avons besoin de votre aide non seulement pour participer à l'élaboration du contenu, mais pour apporter une contribution financière à ce processus.
M. Yvon Godin: J'ai juste une petite question.
Le président: Allez-y.
M. Yvon Godin: Je ne pense pas que vous compreniez ce que je veux dire. Pour moi, il ne s'agit pas de la participation du gouvernement en tant que membre, mais du fait qu'il soit plus chargé de chapeauter le tout, simplement de faire en sorte que nous ayons un tel système. Je ne sais pas si ce que je dis est clair. Par exemple, qui représente votre groupe? Représentez-vous les écologistes? Si c'est le cas, pourquoi alors l'industrie ne le ferait-elle pas? Comprenez-vous ce que je veux dire? Nous avons besoin de quelqu'un d'indépendant qui rassemble tous ces groupes et, en quelque sorte...
M. Marty Horswill: Marcello et moi sommes des employés, et nous sommes payés pour être des gens neutres ne faisant partie d'aucune de ces quatre chambres. Bien entendu, nous sommes des êtres humains, nous avons donc nos partis pris, mais notre rôle en tant qu'employés du FSC est d'aider à la bonne marche du processus et de rester neutres face aux intérêts qui s'opposent.
Le président: Si vous me permettez d'intervenir un instant, je pense que M. Godin parlait du fait que le rôle du gouvernement pourrait être de fournir un certain leadership. Ses questions m'ont intéressé parce que, dans son intervention précédente, il avait laissé entendre qu'un gouvernement—et, si je ne me trompe, il s'agissait du gouvernement de la Colombie-Britannique—avait fourni un certain leadership en établissant des normes pour la foresterie. Sans dire si elles étaient bonnes ou mauvaises, ne pensez-vous pas—et j'interprète ses propos, mais j'ai trouvé intéressante la question...
M. Yvon Godin: Je vous dirai si vous avez raison ou non.
Le président: Ne pensez-vous pas que le gouvernement a un rôle à jouer pour rassembler tous les intervenants et créer les conditions nécessaires pour établir des pratiques et des normes communes?
M. Yvon Godin: Oui, je suis d'accord.
Le président: Merci.
M. Marty Horswill: Parlez-vous des différents systèmes de certification ou simplement de ce que fait le FSC?
Le président: Je pense sans doute aux deux.
Vous savez probablement que le gouvernement fédéral n'a pas participé, à tout le moins, au processus de la CSA, simplement parce qu'il ne désire pas y participer. Mais j'ai eu l'impression de vous surprendre, dans une de vos interventions antérieures, à encourager en fait une participation du gouvernement, et je pensais que c'était également ce à quoi voulait en venir M. Godin.
M. Marty Horswill: Nous encourageons certainement les gouvernements à participer au processus d'élaboration des normes FSC, en particulier les gouvernements provinciaux, puisqu'ils sont de loin les plus grands propriétaires forestiers au Canada. Ce sont eux aussi qui réglementent l'exploitation des forêts, et la certification FSC a des répercussions sur la réglementation. Si le gouvernement veut que les compagnies qui exploitent des forêts dans la province puissent profiter des possibilités commerciales offertes par la certification, il doit—et je sais qu'il le fait—comprendre qu'il peut y avoir, en ce qui concerne la réglementation et la politique, des répercussions relativement auxquelles il est le seul à pouvoir agir.
Le président: Je suppose, monsieur Horswill—et je dévie un peu par rapport au chemin sur lequel vous a entraîné M. Godin, et je ne suis pas sûr qu'il partait dans cette direction, mais c'est ce que je fais—que vous envisagez certainement un rôle pour les gouvernements provinciaux. Tout cela est très bien. Mais les répercussions éventuelles, en particulier celles qui nous intéressent et qui figurent dans les paramètres de cette étude, concernent le commerce international, domaine dans lequel le gouvernement fédéral joue évidemment un rôle.
Pensez-vous qu'il y a des répercussions éventuelles sur la participation du gouvernement fédéral dans le contexte de l'établissement de normes et de l'impact qui en découlera sur le commerce international des produits de l'industrie forestière du Canada?
M. Yvon Godin: Conjointement avec différents groupes.
Le président: Oui, vous pouvez ajouter cela.
M. Marcello Lévy: Voyons si je comprends correctement votre question. Vous me demandez si l'approbation du système de certification FSC deviendra ensuite un processus réglementaire assujetti à certaines barrières commerciales ou, même s'il ne devient pas un processus réglementaire, s'il constituera en pratique un obstacle au commerce.
Le président: Je suppose que cela pourrait être un des résultats.
M. Marcello Lévy: Je pense qu'une des raisons pour lesquelles le FSC est une organisation cadre, c'est qu'en étant une organisation non gouvernementale, fonctionnant selon un système de participation volontaire, il évite précisément certaines de ces questions concernant le commerce.
Le président: Vous en êtes absolument sûr?
M. Marcello Lévy: Pas mal sûr.
M. Marty Horswill: Disons que c'est l'avis de nos avocats.
Le président: Nous sommes politiciens, et nous comptons aussi des avocats parmi nous. Nous ne les aimons pas du tout.
M. Yvon Godin: Il y en a sûrement trop.
Le président: Monsieur Chatters.
M. David Chatters (Athabasca, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
• 1305
Je me contente, en quelque sorte, de suivre cette conversation et les
questions. Il me semble que si vous mettez en place un processus,
comme je vous ai entendu le dire, dans le cadre duquel un groupe
composé de quatre intervenants étudie des normes, avec 25 p. 100 des
voix pour l'industrie, 25 p. 100 des voix pour les Autochtones, 25 p.
100 des voix pour les écologistes, et 25 p. 100 des voix pour quelque
chose que vous appelez la «communauté»... Je ne sais pas très bien ce
qu'est cette «communauté». Je suppose que ce n'est pas celle où vivent
les exploitants forestiers, mais peut- être celle où vit la communauté
universitaire. Nous avons appris que les universitaires étaient allés
au Nouveau-Brunswick participer au processus d'élaboration des normes.
Le gouvernement est censé fournir de l'argent et avoir son mot à dire dans l'élaboration de ces normes, mais il n'est pas autorisé à adhérer à votre organisation. Pourquoi diable l'industrie devrait-elle accepter de soutenir de son plein gré ce processus alors que ses intérêts et ceux des exploitants forestiers ont manifestement bien peu de poids par rapport aux autres intérêts? Pourquoi se joindrait-elle à ce processus à moins que, bien entendu, vu votre association avec des groupes écologistes européens, vous ne puissiez encourager le boycott des produits forestiers canadiens, ce qui forcerait l'industrie, si elle veut vendre son bois en Europe, à adhérer à ce processus et à se joindre au mouvement? Les dés me paraissent tellement pipés que je ne vois pas comment vous pourriez vous attendre le moins du monde à ce que les gens de l'industrie soient tout excités et disent qu'ils veulent le faire.
M. Marty Horswill: Je ne dirais pas qu'ils sont tout excités, mais ils participent certainement au processus en Colombie- Britannique.
M. David Chatters: À cause des boycotts en Europe et ailleurs.
M. Marty Horswill: C'est peut-être une de leurs motivations. Le fait est qu'ils y participent. Je pense que si vous parlez aux dirigeants de l'industrie forestière, tout au moins dans ma province, ils vous diront qu'à leur avis, la certification est absolument inévitable. Ils reconnaissent également qu'il est essentiel de trouver une sorte de solution au problème non encore réglé que leur posent les écologistes si nous voulons continuer à conserver nos débouchés.
Le FSC est la seule tribune existante pour ce type de discussion. Les dirigeants de l'industrie forestière qui voient loin pensent que le FSC constitue un moyen très important de trouver une solution à ce qui constitue jusqu'à présent un problème absolument impossible à résoudre. Les écologistes ne vont pas disparaître. Il faut régler ce problème.
M. David Chatters: Oui. Je suppose que c'est de ce point de vue qu'ils voient loin. Cela ne veut pas dire que nous devons le faire parce que c'est juste. Nous devons le faire si nous ne voulons pas perdre notre part du marché.
M. Marty Horswill: J'ai assisté à une conférence sur la certification à Victoria le week-end dernier, et M. Baskerville, un universitaire qu'on considère généralement comme un des penseurs les plus éminents du Canada pour ce qui est des forêts et qui n'est certainement pas, de quelque façon que ce soit, un ennemi de l'industrie forestière, a dit qu'à son avis, la certification des forêts était une des initiatives les plus encourageantes qu'il ait vues dans sa vie. Elle apporte automatiquement des solutions. Elle peut être avantageuse pour tout le monde.
Le président: Merci.
Monsieur Provenzano.
M. Carmen Provenzano: J'ai une question du même genre. Je pense qu'elle est dans le prolongement de celle de M. Godin.
Vous dites que le FSC est, en somme, le seul organisme de certification constituant une tribune qui permet d'instaurer le dialogue nécessaire pour établir en fin de compte la norme de certification pour le Canada. Pourquoi le gouvernement ne peut-il pas jouer un rôle en créant une tribune où les organisations, les ONG...? En dehors du fait que le gouvernement ne devrait peut-être pas être membre, pourquoi ne pourrait-il pas faciliter la discussion entre les ONG?
Il y a trois processus de certification. La distinction entre eux est qu'ils sont basés sur les systèmes ou sur les résultats obtenus. En fin de compte, il faudra probablement avoir quelque chose qui combine ces normes. Pourquoi le gouvernement ne peut-il pas jouer le rôle légitime consistant à fournir cette tribune pour rassembler tous les acteurs de la certification, tous les intervenants et mettre au point une norme?
Ce que vous demandez est que le gouvernement appuie l'initiative du FSC. Eh bien, il s'avérera peut-être finalement que c'est une bonne initiative, mais, en tant que parlementaire, avant d'accepter cela sans réserve, j'aimerais savoir pourquoi nous devrions soutenir votre initiative plutôt que la norme ISO 14000 ou celle de la CSA. J'aimerais savoir pourquoi. Si nous devons en choisir une, j'aimerais qu'on me dise sur quoi ce choix doit être fondé.
• 1310
J'aimerais beaucoup mieux—et c'est à ce sujet que j'attends vos
commentaires—que le gouvernement contribue à la bonne marche de ce
processus, qu'il rassemble le FSC, l'ISO et la CSA ainsi que tous les
intervenants. Élaborons une norme qui soit à l'épreuve des exigences
du marché mondial et passons ensuite à l'étape suivante. Pour moi,
c'est un rôle légitime pour le gouvernement.
Le président: Je suppose que vous attendez seulement un commentaire, n'est-ce pas, monsieur Provenzano?
M. Carmen Provenzano: Oui.
M. Marty Horswill: Je ne vois aucun problème à ce que le gouvernement joue un tel rôle et rassemble les intervenants et les différents systèmes de certification pour essayer de discuter de la façon d'harmoniser les choses et d'aider, de façon générale, le Canada à utiliser la certification. Si vous vous attendez à ce que ce processus débouche sur la fusion de tous ces systèmes différents de certification en un seul système de certification canadien, cela ne se fera pas. Je ne pense pas que ce soit nécessaire.
M. Carmen Provenzano: Bon, ce pourrait être facultatif.
M. Marty Horswill: Une des idées fausses concernant la certification est qu'il y a une concurrence entre les différents systèmes. Celui de l'ISO est très différent et ne fait absolument aucunement concurrence à celui du FSC. Selon moi, il est certain que toute grande société qui veut obtenir la certification FSC doit disposer d'un système de gestion environnementale, et c'est avec le système de l'ISO qu'on peut le faire. La certification ISO garantit que vous avez mis en place un bon système de gestion environnementale et que vous l'utilisez de façon efficace, ce qui est une étape importante sur la voie de la certification FSC. Il n'y a pas la moindre concurrence entre les deux.
La CSA se situe un peu entre les deux, mais il n'y a pas non plus de concurrence. Un système n'exclut pas l'autre. Il y a de nombreuses entreprises en Colombie-Britannique qui cherchent maintenant à obtenir à la fois la certification CSA et la certification FSC.
Je pense que ce qui serait réellement utile dans ce rôle de contribution à la bonne marche du processus serait probablement de corriger un grand nombre d'idées erronées concernant la nature de ces différents systèmes et d'éliminer les craintes et l'anxiété qu'éprouvent beaucoup de gens. Oui, je pense que le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle très utile à cet égard, simplement en rassemblant tout le monde pour en parler davantage.
C'est ce qui se passe de toute façon. Depuis 12 mois que je suis associé aux activités du FSC, j'ai constaté un énorme accroissement de l'intérêt pour la certification. Pendant les premiers six mois, j'ai été invité à prendre la parole peut-être deux ou trois fois, mais on m'invite maintenant deux ou trois fois par mois à prendre la parole devant différents groupes. Le niveau de sensibilisation augmente très rapidement, et je pense que le niveau de méconnaissance de la situation diminuera nécessairement quand il y aura davantage de possibilités de parler avec les gens. C'est un bon exemple.
Le président: Merci.
Monsieur St. Denis, soyez bref.
M. Brent St. Denis: Merci. Votre présence est très utile et nous permet d'apprendre beaucoup de chose.
Je voudrais vous lire ce court paragraphe. C'est une recommandation que notre comité a présentée dans son rapport intérimaire sur cette question. Vous l'avez peut-être lue, mais je vais en donner lecture en vue de son inclusion au procès-verbal. Je vous demande si cette recommandation va assez loin, ne va pas assez loin ou est tout à fait à côté de la plaque. C'est dans le contexte des dernières discussions qui se sont déroulées autour de cette table.
Je cite la recommandation du rapport intérimaire:
-
Le Comité recommande que le gouvernement fédéral, de concert avec
les gouvernements provinciaux et les autres intervenants,
intervienne activement en faveur d'une intégration des différentes
normes de certification d'aménagement forestier durable, tant à
l'échelle nationale avec la CSA (Canadian Standard Association) et
le FSC (Forest Stewardship Council), qu'à l'échelle internationale
où plusieurs approches sont aussi développées ou mises en oeuvre.
La recommandation est-elle pertinente, à côté de la plaque, va-t- elle trop loin, pas assez loin? Elle dit que le gouvernement devrait intervenir activement «en faveur d'une intégration».
M. Marcello Lévy: Je dirais qu'elle va trop loin. Comme l'a expliqué Marty, le rôle du gouvernement est peut-être d'aider à comprendre les enjeux et à déterminer les lacunes existantes afin de pouvoir parvenir à une sorte de réciprocité. Nous saurons à ce moment-là que les normes de la CSA signifient telle chose. Si vous voulez passer à l'étape suivante, vous devrez prendre telles autres mesures. Et si vous voulez avoir la certification de l'ISO, vous devrez faire telles autres choses. Ce serait très utile, mais...
M. Brent St. Denis: Donc vous parleriez d'intervenir en faveur d'un «dialogue» plutôt que d'une «intégration»?
M. Marcello Lévy: Oui, c'est ce que je dirais.
M. Brent St. Denis: C'est logique.
M. Marty Horswill: Je préférerais qu'on parle de la «mise en oeuvre» de toutes ces normes.
M. Marcello Lévy: Oui.
M. Marty Horswill: L'industrie forestière du Canada a besoin de pouvoir avoir pleinement accès à tous les systèmes de certification existants de façon aussi peu coûteuse que possible.
Le président: Monsieur Horswill, je me demande si... Je ne veux pas vous interrompre.
M. Marty Horswill: C'est très bien. Merci.
Le président: Monsieur St. Denis, avez-vous terminé?
M. Brent St. Denis: J'ai terminé.
Le président: D'accord, merci.
En foresterie, si une entreprise voulait certifier sa forêt conformément aux normes du FSC, avez-vous calculé approximativement combien elle devrait dépenser pour se conformer ou essayer de satisfaire à certaines de ces normes—vos dix principes plus, je crois que c'est ce que vous avez dit, 56 autres choses? Avez-vous une idée du coût? Je ne parle pas de l'envoi d'un certificateur pour le faire. Il est évident que l'entreprise doit apporter certains changements. Avez-vous envisagé la question sous cet angle?
M. Marty Horswill: Eh bien, non. Je veux dire d'abord que je ne suis pas compétent pour le faire; je n'ai reçu aucune formation de ce type. Je pense que les entreprises envisagent la chose sous cet angle, certainement.
Le président: Est-ce une question déloyale?
M. Marty Horswill: Western Forest Products, une des plus grandes sociétés de la côte de la Colombie-Britannique, a pris la parole lors de la même conférence sur la certification à Victoria le week-end dernier. Elle dit qu'elle a consacré jusqu'à présent entre 600 000 et 700 000 $ aux efforts qu'elle a entrepris en vue de la certification. Je crois qu'elle essaie d'avoir les trois, mais elle a engagé à plein temps un agent environnemental chargé de la certification, et il y a toutes sortes d'activités en cours. Il semble que la plupart de ces frais concernent la formation. Il s'agit de sensibiliser les employés aux changements qu'ils doivent apporter à leur travail pour respecter ces normes.
Le président: Permettez-moi de changer de sujet pendant un instant et de revenir sur une question soulevée tout à l'heure par M. Provenzano. Si vous n'avez pas fait ces calculs, mais s'ils sont importants pour les entreprises, avez-vous une idée des répercussions qu'ils peuvent avoir pour ce qui est, disons, de la différence entre ce qu'une entreprise pourrait avoir à payer pour une plantation ou pour un reboisement?
M. Marty Horswill: Eh bien, non.
M. Carmen Provenzano: Les plantes autres que les arbres représentent 14 p. 100 de la diversité biologique.
M. Marty Horswill: Oui, j'ai entendu les questions que vous avez posées tout à l'heure à Mme Arnold.
Il ne fait aucun doute qu'ici au Canada, avec toutes les forêts naturelles que nous avons, notre situation est différente, et je ne pense pas que nous voulions changer cela. Je ne pense pas que nous voulions imiter ce qu'ont fait les Européens il y a 400 ans et supprimer toutes les forêts naturelles en perdant non seulement la diversité biologique, mais toutes les autres valeurs et les avantages économiques qui découlent de l'existence de nos forêts telles qu'elles sont. Mais cela nous impose un fardeau plus lourd en ce qui concerne les composantes des principes et des critères du FSC concernant la diversité biologique, parce que nous avons là des valeurs que, dans le cadre du système FSC, nous sommes obligés de protéger.
Je ne pense pas que cela entre en conflit avec ce que nous attendons de nous-mêmes. Cela ne fait que nous donner un moyen non seulement de prouver que nous le faisons par l'entremise d'une vérification indépendante, mais également d'en tirer profit sur le marché. Donc, en fin de compte, c'est à notre avantage si nous faisons en sorte que cela marche.
Le président: Monsieur Horswill, supposons que tout le monde se trouve exactement dans la même situation. Supposons un instant que tout le monde, en principe, en est exactement au même point. Vu le simple fait que vous reconnaissez que cela imposerait un fardeau plus lourd à ces pays—et, en l'occurrence, au Canada, vu la nature de ses forêts—, n'avons-nous pas pris en considération l'impact de ce fardeau supplémentaire sur le marché international, ne serait-ce que pour tenir compte des conséquences concrètes de l'obligation de se conformer au 10 principes et au 56 normes?
M. Marty Horswill: Premièrement, nous ne sommes pas le seul pays qui ait des forêts naturelles. Le Brésil et beaucoup d'autres ont les mêmes obligations. Mais il y a chaque fois des différences, et cela a des conséquences variées.
Le président: Je m'en rends compte. Pardonnez-moi si je ne tombe pas dans le piège de l'argument selon lequel tous les autres le font. Je veux avoir une idée de la situation afin de pouvoir comprendre ce que cherche l'industrie et ce que visent les processus de certification tout en veillant à ce que les avantages concurrentiels—ou, tout simplement, la compétitivité—des produits canadiens soient préservés.
M. Marty Horswill: Bien entendu, cela préoccupe beaucoup l'industrie. Dans le cadre du système FSC, tout est axé ce que nous appelons dans notre jargon l'«harmonisation», c'est-à-dire l'exigence que tous les processus régionaux de normalisation examinent les autres normes dans les écosystèmes adjacents et même dans ceux qui sont plus éloignés et puissent expliquer, le cas échéant, pourquoi il y a des différences.
Le président: Mais vous n'avez pas calculé ce que cela représente en dollars.
M. Marty Horswill: Il est évident que ce calcul ne peut être fait que par chacune des entreprises en fonction des caractéristiques de son terrain, de sa structure de coût, etc. Nous n'avons certainement absolument pas les ressources nécessaires pour le faire.
Peut-être la province de la Colombie-Britannique essaie-t-elle de faire de tels calculs en ce qui concerne l'ensemble de l'industrie. Je n'en sais rien. Il serait probablement prudent de le faire, mais nous n'avons pas les ressources nécessaires.
Le président: Monsieur Horswill, sans vouloir vous offenser, votre organisation et d'autres ont établi une série de principes et de normes qui doivent être respectés pour obtenir la certification. Pour s'y conformer, il faut dépenser une certaine quantité d'énergie qui, à un moment donné, peut être évaluée en dollars, mais vous aurez déjà mis en place toutes les ressources pour les établir, et on serait tenté de dire que c'est même très bien.
Mais, dans ce processus, vous vous êtes également rendu compte que, dans un certain contexte, l'industrie peut beaucoup plus facilement se conformer à ces normes que dans un contexte différent, le contexte canadien.
En supposant que, dans le contexte canadien, l'industrie est tout aussi bien disposée que celle des pays où l'on pratique la plantation, l'ampleur du fardeau est bien différente dans le contexte canadien de ce qu'elle est dans le contexte des plantations. Mais vous me dites que vous n'avez pas eu l'occasion d'évaluer, même de façon approximative, l'impact que cela aurait dans le contexte canadien. J'ai un peu de mal à comprendre cela, tout simplement parce que vous êtes tellement allés au bout des choses pour tout le reste. Est-il injuste de ma part de...?
M. Marty Horswill: Merci pour le compliment.
Le président: Mais vous êtes allés au bout des choses, et je me demande donc pourquoi, ce faisant, vous n'auriez pas aussi inclus l'examen des questions concernant l'aspect commercial de cette réflexion approfondie.
M. Marty Horswill: Tout ce que je peux dire est que nous sommes incapables de faire le travail que vous demandez vu sa complexité, parce que...
Le président: Permettez-moi de vous interrompre, monsieur Horswill. C'est le comportement normal du président. Il a certaines prérogatives, notamment le fait qu'il veut réellement obtenir une réponse.
Je tiens vraiment à prendre position à ce sujet, mais s'il est injuste de s'attendre à ce que vous le fassiez, est-ce également injuste d'attendre cela de la part de l'industrie?
M. Marty Horswill: Je pense que l'industrie comprend qu'elle doit faire face à la situation qui existe sur le marché, quel que soit celui-ci. Le fait est que les choses comme la certification FSC ont pour conséquence de modifier la nature du marché, et l'industrie s'adapte à ces changements.
Le président: Vous êtes donc aussi d'accord avec le témoin précédent, qui disait qu'en plus de forcer les gens à s'adapter aux conditions du marché, vous mettiez en place un marché différent?
M. Marty Horswill: Oh, oui. À sa fondation, quand on a élaboré ce concept au début des années 90, l'objectif fondamental du FSC était de créer une incitation économique efficace à une bonne gestion des forêts sur le marché. C'est ce à quoi cela se résume.
Le président: C'est ce qui, je crois, nous pose un peu un problème. Si vous voulez créer un incitation économique, vous devez tenir compte de tous les facteurs économiques. Je suis un peu perplexe que quelqu'un qui va à ce point au bout des choses n'ait pas tenu compte des facteurs économiques.
M. Marty Horswill: Je pense que les fondateurs du FSC étaient convaincus que le libre marché, qui s'ajuste et réagit aux exigences qui existent sur le marché de par sa nature même, réglerait tout cela. En fait, c'est ce qui se passe.
Bien entendu, ce n'est pas facile. Si j'étais chargé de vendre aujourd'hui les produits d'une entreprise forestière canadienne sur le marché européen, bon sang, tout est en train de changer. Ce n'est plus du tout comme il y a dix ans. Mais les marchés évoluent. Il y a toutes sortes de raisons à ces changements. En l'occurrence, c'est l'existence d'une certification indépendante effectuée par un tiers, mais je pense que nous nous ajusterons très bien à cela. Je ne peux pas vous dire que...
Le président: Vous dites à nouveau que c'est ce que vous pensez.
M. Marty Horswill: ... ce que cela va exactement coûter à une entreprise déterminée, mais elle saura rapidement de quoi il retourne.
Le président: D'accord, je ne veux pas monopoliser le temps de parole. Nous avons déjà dépassé l'heure prévue, mais M. Godin et M. Chatters voulaient tous deux ajouter de brefs commentaires.
Monsieur Godin.
M. Yvon Godin: Premièrement, je dois poser une première question avant de poser la seconde, mais elle est très brève. Ces documents viennent-ils du FSC?
M. Marcello Lévy: Certains d'entre eux oui, d'autres...
Le président: Juste une seconde. Aux fins du procès-verbal, je préciserai qu'il s'agit de la brochure présentée durant l'intervention précédente.
M. Marcello Lévy: C'est la seule élaborée par FSC Canada.
M. Yvon Godin: Le FSC?
M. Marcello Lévy: Celle-ci porte l'indication FSC, mais je pense qu'il s'agit du FSC des États-Unis.
Le président: Non, ce sont les brochures qui étaient sur la table pendant l'exposé du groupe régional du FSC des Maritimes. Elles sont imprimées sur papier glacé dans les deux langues officielles. Il y en a deux, et ce sont des dépliants.
M. Marcello Lévy: D'accord, et l'autre a été réalisée par le Falls Brook Centre. Elle vient du FSC Canada.
Le président: Et le document jaune de deux pages vient de chez vous?
M. Marcello Lévy: Oui.
Le président: D'accord.
M. Yvon Godin: Bon, c'est pure curiosité de ma part.
Le président: Certainement.
M. Yvon Godin: Ma question porte sur vos convictions, ce que vous pensez qu'il faudrait faire et les choses auxquelles vous participez. Je n'ai pas l'impression que ces documents soient imprimés sur du papier recyclé. Si je ne me trompe, cela va à l'encontre de vos convictions à propos de ce qui devrait se passer en foresterie.
M. Marty Horswill: Dans l'idéal, nous imprimerions cela sur du papier certifié par le FSC, mais on n'en trouve pas...
M. Yvon Godin: Non, mais il existe néanmoins du papier recyclé. Normalement, il porte un logo. Je ne veux pas en faire toute une histoire, mais je veux simplement savoir ce que vous en pensez. Si vous êtes les auteurs de ce document et s'il n'est pas imprimé sur du papier recyclé et si vous insistez beaucoup sur l'écologie, l'environnement, etc., comment pouvez-vous expliquer cela?
M. Marty Horswill: Touché.
M. Yvon Godin: Touché? Merci. C'est tout ce que je voulais dire.
Le président: Monsieur Chatters.
M. David Chatters: Je voudrais dire une ou deux choses. Je suis un peu gêné, c'est tout au moins l'impression que j'ai, au sujet de l'équité de tout ce processus dans lequel nous sommes engagés, parce que vous êtes en train de créer un marché international sensible à la certification. Vous faites cela délibérément et de façon très efficace au moyen d'un système de boycott au niveau de la consommation. Vous appliquez certaines normes à l'industrie forestière canadienne qui est présentée en Europe et aux États-Unis comme le mal personnifié.
• 1330
Vous imposez à l'industrie forestière canadienne des normes
auxquelles l'industrie forestière européenne ne pourrait jamais se
conformer, or, les forêts européennes sont certifiées alors que les
forêts canadiennes ne peuvent apparemment pas ou n'ont apparemment pas
pu obtenir cette certification. Si vous appliquiez les mêmes normes de
diversité biologique aux forêts européennes qu'aux forêts canadiennes,
les forêts européennes ne pourraient jamais respecter cette norme de
certification. Je ne vois pas en quoi cela est juste ou en quoi cela
constitue une façon de mettre tout le monde sur un pied d'égalité; je
parle de cette norme arbitraire fixée à des niveaux différents dans
différentes parties du monde principalement par les écologistes.
Mon autre question est de savoir comment vous pourriez arriver à faire fonctionner cette norme de certification pour le système d'exploitation basé sur le volume utilisé en Colombie-Britanique?
Le président: Monsieur Lévy.
M. Marcello Lévy: Pour ce qui est de la première partie de la question, le FSC considère au moins trois choses: les conditions environnementales, sociales et économiques. Donc, s'appuyer seulement sur des exigences concernant exclusivement la diversité biologique, sans tenir compte de l'histoire, sans tenir compte des aspects culturels de ce qui s'est passé en Europe il y a 500 ans, c'est...
M. David Chatters: Mais si vous prévoyez une certaine souplesse quant à l'application des normes pour la foresterie, pourquoi ne prévoyez-vous pas une certaine souplesse pour le marché; or, vous ne le faites pas. Il y a un marché international dans lequel vous travaillez et auquel vous appliquez vos normes.
M. Marcello Lévy: Oui, et je comprends les difficultés que cela pose, parce que ce que le FSC essaie de faire est, d'une part, de respecter réellement les conditions locales de chacune des forêts du monde, tout en essayant de les regrouper par rapport au marché mondial. Je comprends les difficultés inhérentes associées à cela, mais c'est ce que le FSC essaie de faire.
Le FSC, comme Marty l'a déjà dit, a mis en place un processus d'harmonisation, ce qui ne veut pas dire que les choses seront plus faciles, mais ce que nous essayons de faire avec cette harmonisation est précisément de comprendre les différences entre les normes aux niveaux national et international.
Nous procédons à notre harmonisation à l'intérieur de nos régions au Canada, et il y aura une réunion la semaine prochaine pour tout le pays. Nous avons une réunion en Europe précisément pour régler certaines des questions entourant l'harmonisation de nos normes, par exemple ce que signifient les normes en Suède pour les entreprises suédoises et le pays dans son ensemble et ce qu'elles signifient au Canada. Nous essayons de comprendre cela.
Le président: Merci, monsieur Lévy.
M. David Chatters: Il reste la question du régime d'exploitation basé sur le volume.
M. Marty Horswill: C'est un gros problème, et je pense que le gouvernement de la Colombie-Britannique en est tout à fait conscient. Il a constitué un comité consultatif sur la certification. Il a deux représentants au sein de notre équipe d'élaboration des normes, qui sont tout à fait au courant de tout ce dont on discute et peuvent en faire part au gouvernement.
Je crois que la province se rend compte qu'elle doit apporter certaines modifications au régime existant pour tenir compte des réalités de la certification, et elle va le faire. Nous n'allons pas élaborer une norme qui rejettera toute certification pour l'exploitation basée sur le volume. Nous élaborerons une norme énonçant de façon générale ce dont on doit pouvoir faire la preuve pour obtenir la certification. Si on peut en faire la preuve pour une exploitation basée sur le volume, c'est très bien, mais la difficulté est que le FSC impose des exigences en ce qui concerne la responsabilité de la gestion à long terme des terres, et, avec le régime d'exploitation basé sur le volume, cette responsabilité incombe en réalité à la Couronne.
Il y a deux façons possibles de contourner le système. La Couronne pourrait être partie à la demande de certification et s'engagerait donc à respecter le plan de gestion à long terme prévu, ou on utilise un régime basé sur les superficie exploitées plutôt que sur le volume. Mais je pense que les pouvoirs publics, tout au moins le gouvernement de la Colombie-Britannique, sont bien conscients que des changements vont se produire et ils se préparent en conséquence.
Le président: Monsieur Provenzano, je vais vous laisser poser la dernière question.
M. Carmen Provenzano: Les normes de certification basées sur les résultats atteints peuvent avoir un impact négatif sur la capacité d'alimenter le marché. Je pense que cela ne fait guère de doute. Au Canada, cet impact négatif pourrait être très réel étant donné que les pratiques forestières utilisées sont les mêmes que pour la culture des carottes; cela prend simplement plus de temps. On cultive les arbres comme les carottes et on les récolte à un moment donné.
• 1335
La capacité ou la possibilité d'intervenir sur la capacité
d'alimenter le marché est beaucoup plus limitée. On peut appliquer les
mêmes normes de performance, mais cela n'a fondamentalement aucune
répercussion sur la possibilité d'influencer la capacité de ce type de
foresterie à alimenter le marché. Nous avons donc là à nouveau une
situation dans laquelle une discrimination semble d'exercer sur
l'application de normes basées sur la performance aux forêts
canadiennes quand on envisage cela sous l'angle des
approvisionnements.
M. Marty Horswill: Cela dépend de ce qu'on attend comme résultat. Je pense qu'il y a, de façon générale, un malentendu en ce qui concerne la certification des plantations. Le FSC exige qu'elles satisfassent à tous les autres critères de la certification FSC ainsi qu'à ceux du principe 10, qui porte spécifiquement sur les plantations.
Les exploitants d'une plantation doivent prendre des mesures pour rétablir la diversité biologique sur leurs terres s'ils veulent conserver la certification. Donc, dans les faits, les exigences sont telles qu'une gestion limitée à l'utilisation d'une seule espèce comme dans le cas de la carotte ne sera pas conforme à la norme du FSC. Il faut assurer une diversification.
Dans le cas de la Suède, si vous lisez les normes suédoises, non seulement les exploitants doivent gérer les forêts de façon à rétablir la diversité biologique, mais ils doivent aussi remettre 5 p. 100 de leurs terres dans un état aussi proche que possible de l'état naturel compte tenu des limites de ce que la science ou nos connaissances permettent.
Nous n'avons pas une telle exigence au Canada. Il n'y en aura pas... Bon, peut-être dans les Maritimes, si ce que j'ai entendu dire ici aujourd'hui est vrai, c'est-à-dire qu'il ne reste plus de forêt naturelle dans les Maritimes, les normes exigeront probablement une certaine restauration. Mais, en Colombie- Britannique, nous n'exigerons pas de restauration. Nous avons beaucoup de forêts naturelles. Nous devons simplement veiller à les protéger de façon adéquate.
Le président: Monsieur Horswill et monsieur Lévy, vous avez fait un travail remarquable, excellent. Merci beaucoup de nous avoir fait part de vos idées.
Je pense que, comme avec l'autre témoin, nous avons eu un très bon échange de vues. Je ne sais pas si qui que ce soit a convaincu quelqu'un d'autre, mais cette discussion était très utile pour nous. Nous vous remercions beaucoup de votre patience et de votre franchise.
Je remercie aussi les membres du comité.
La séance est levée.