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NRGO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATURAL RESOURCES AND GOVERNMENT OPERATIONS

COMITÉ PERMANENT DES RESSOURCES NATURELLES ET DES OPÉRATIONS GOUVERNEMENTALES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 24 février 2000

• 0823

[Traduction]

Le président (M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.)): Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous examinons la gestion des forêts au Canada dans la perspective du commerce international. La séance est ouverte.

Monsieur le ministre, je vous remercie d'être venu et d'avoir patienté pendant que la présidence s'occupait du problème de l'équipement qui amène les participants à cet étage. Je salue également vos adjoints, MM. Hardy et Harrison.

Chers collègues, si j'ai bien compris, le ministre s'est libéré jusqu'à la réunion du Cabinet. Par conséquent, nous commencerons immédiatement.

Monsieur Goodale, je crois que vous êtes au courant de la façon dont nous procédons. Nos collègues préfèrent avoir un dialogue avec les témoins. Par conséquent, je vous demanderais de ne pas parler plus de 10 minutes.

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie. Je suis heureux de me retrouver parmi vous, cette fois pour vous entretenir de l'industrie forestière canadienne.

Je profite de l'occasion pour vous présenter mon sous-ministre, M. Peter Harrison, qui occupe ce poste depuis l'automne dernier; c'est sa première visite à ce comité. Quant à M. Hardy, du Service canadien des forêts, je suis certain que vous le connaissez tous.

Je tiens à vous remercier de votre rapport provisoire sur les pratiques d'aménagement forestier considérées dans la perspective du commerce international. Je l'ai lu avec intérêt et je suis impatient de recevoir vos recommandations finales, après que le comité aura achevé sa tournée dans l'est du Canada.

• 0825

Lorsque nous nous sommes vus en mai dernier, l'économie entrait dans une phase d'expansion, et l'heure était à l'optimisme. Neuf mois plus tard, les perspectives sont encore plus reluisantes. Au moment où nous avons franchi le seuil du XXIe siècle, le taux de chômage national était le plus bas depuis près d'un quart de siècle. Deux millions de nouveaux emplois ont été créés depuis 1993 et il s'en ajoute chaque jour. Les taux d'intérêt sont stables et l'inflation, contenue. Les impôts et la dette nationale sont en baisse. Qui plus est, les experts prévoient que l'économie connaîtra une forte croissance au Canada dans un avenir prévisible, une des meilleures performances parmi les pays du G7.

Les temps s'annoncent meilleurs également pour nos industries des ressources naturelles. Elles ont traversé une période difficile récemment, mais elles sont parvenues à demeurer compétitives malgré la faiblesse des prix des produits de base, les désorganisations du marché mondial et la foule d'obstacles environnementaux qu'elles ont dû surmonter.

La plupart des industries du secteur des ressources montrent actuellement des signes de redressement manifestes. La vigueur de l'économie américaine et la reprise des marchés asiatiques et européens devraient stimuler la demande de produits dérivés des ressources naturelles.

Voilà donc de bonnes nouvelles pour le Canada, puisque notre économie et notre société ont absolument besoin d'un secteur des ressources dynamique. Ensemble, les industries des forêts, des minéraux et de l'énergie, la géomatique et les industries connexes contribuent au produit intérieur brut du Canada pour plus de 11 p. 100, ce qui représente environ 88 milliards de dollars par an. Elles créent chez nous 780 000 emplois directs et autant d'emplois indirects. Elles représentent 22 p. 100 de tous les nouveaux investissements effectués au pays, soit environ 35 milliards de dollars par an. En 1998, elles ont généré pour 97 milliards de dollars d'exportations. Plus de 600 collectivités de toutes les régions du pays en dépendent.

Au Canada, l'industrie forestière touche plus de collectivités et plus de gens que toute autre industrie; vous l'aurez sans doute constaté lors de vos récents voyages dans l'Ouest. La foresterie ajoute 88 milliards de dollars au PIB et contribue pour 32 milliards de dollars à notre balance commerciale excédentaire; aucune autre industrie n'en fait autant.

La stratégie WINS de Ressources naturelles Canada—Réussir dans l'économie fondée sur les connaissances—stratégie dont je vous ai parlé en mai dernier, vise à faire du secteur canadien des ressources le secteur le plus ingénieux au monde dans l'intendance, la mise en valeur, l'utilisation et l'exportation des ressources naturelles, le mieux équipé en technologies de pointe, le plus écologique, le plus soucieux de ses responsabilités sociales, le plus productif et le plus concurrentiel, servant de modèle en ce qui concerne le développement durable. Je me réjouis que le gouvernement, dans son discours du Trône de l'automne dernier, ait réservé au secteur des ressources naturelles un rôle de premier plan dans la nouvelle économie de ce troisième millénaire, une économie fondée sur le savoir et entraînée par la technologie.

Le développement durable est une priorité dans toutes les politiques et tous les programmes du gouvernement en matière de foresterie. C'est la priorité de l'industrie. Nos clients l'exigent. Le Canada le met en pratique, et il en récolte les fruits. La mise en valeur durable de nos ressources forestières entraîne dans son sillage le développement durable de l'industrie, la préservation des emplois, le développement durable des collectivités et la conservation de l'environnement qui nous est si cher.

Votre rapport provisoire met en évidence quelques-uns des défis que nous avons à relever pour livrer le message du développement durable aux Canadiens et aux clients du secteur des produits forestiers à travers le monde. L'arrivée de nouveaux concurrents sur le marché, l'évolution des valeurs sociétales et le consumérisme vert sont autant de réalités fondamentales avec lesquelles le Canada doit composer à titre d'intervenant—le plus important, faut-il le rappeler—dans le commerce mondial des produits forestiers.

• 0830

Face à ces problèmes, la clé de la solution réside dans la collaboration. En effet, nous devons nous employer collectivement, dans l'esprit d'Équipe Canada, à uniformiser les règles du jeu internationales dans les secteurs de l'aménagement forestier et du commerce des produits forestiers. En nouant des alliances avec les provinces, les territoires et toute la collectivité forestière, nous parvenons peu à peu à démontrer aux Canadiens et au monde entier que le Canada pratique l'aménagement durable des forêts.

Permettez-moi de vous parler de certains événements survenus depuis notre dernière rencontre. Quelques-uns, vous le constaterez, ont un rapport direct avec deux des recommandations contenues dans votre rapport provisoire.

D'abord, je suis heureux de vous faire savoir que le Conseil canadien des ministres des Forêts a renouvelé le Programme international de partenariats en foresterie pour les cinq prochaines années, en le dotant d'un budget encore plus généreux. Le comité compte parmi les nombreux intervenants qui ont reconnu les avantages de ce programme, notamment son utilité pour contrer la désinformation dont sont l'objet les politiques et les pratiques forestières du Canada sur les principaux marchés d'exportation.

Grâce à ce programme, nous poursuivons nos efforts pour faire avorter une motion du Conseil de l'Europe dont l'adoption pourrait être lourde de conséquences pour nos exportations de produits forestiers. Cette motion, comme toute campagne de cette nature, est inspirée par de l'information erronée.

Au cours de la deuxième édition du programme, le gros de notre action sera axé sur l'Europe mais, grâce aux ressources supplémentaires à notre disposition, nous pourrons nous consacrer davantage aux marchés américains et japonais.

Votre rapport provisoire traite également de la question de la certification forestière, une mesure à participation volontaire, axée sur le marché, que nous avons mise en oeuvre pour donner aux consommateurs l'assurance que les produits du bois du Canada proviennent de forêts où l'on pratique l'aménagement durable. L'industrie canadienne relève le défi, et je suis heureux de vous dire que près de 12 millions d'hectares, soit près de 10 p. 100 des forêts aménagées du Canada, sont aujourd'hui certifiés. Cette proportion devrait augmenter à environ 60 p. 100 d'ici la fin de 2003.

Ressources naturelles Canada veille, de concert avec le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, à ce que la certification forestière ne devienne pas une barrière commerciale. En particulier, il cherche à faire en sorte que les définitions de l'aménagement durable des forêts qui sont reconnues au pays et à l'étranger soient utilisées dans les normes de certification, et encourage la recherche de principes d'équivalence et la reconnaissance mutuelle des normes, par ses interventions au sein de divers organismes de l'ONU.

Je voudrais également faire le point sur d'autres initiatives qui ont pour but de faire connaître les pratiques et les produits forestiers du Canada, à commencer par la mission de promotion du commerce et de l'investissement que j'ai dirigée en Chine en janvier. C'est la plus grande mission que le Canada ait organisée à ce jour dans le domaine des ressources naturelles; 75 entreprises privées (dont 19 du secteur forestier), des dirigeants autochtones et municipaux et trois ministres provinciaux y ont participé.

Les missions de type Équipe Canada s'avèrent à chaque fois un moyen efficace d'ouvrir de nouvelles portes aux échanges commerciaux et aux investissements, et celle de la Chine ne fait pas exception à la règle. Elle a donné l'occasion à la collectivité forestière, dans un élan de collaboration, de faire connaître les produits canadiens, l'innovation canadienne et l'expertise canadienne sur un des marchés les plus vastes et les plus florissants au monde. Et, veuillez me croire, nous n'allions pas laisser échapper une si belle occasion.

Lors de nos rencontres avec nos homologues chinois, nous avons discuté de l'accès au marché et fait la promotion de l'utilisation des produits du bois dans le secteur de la construction. Nous avons marqué des points au chapitre de la collaboration bilatérale dans le domaine forestier, notamment en signant une lettre d'intention sur la formation en gestion des feux de forêt. Les Chinois se sont également informés de l'expertise canadienne dans les domaines de la lutte contre les ravageurs et du renouvellement forestier, ce qui démontre bien le respect que l'on voue à l'étranger aux pratiques canadiennes d'aménagement forestier.

Durant mon séjour en Chine, j'ai eu le plaisir de participer à l'inauguration officielle, à Shanghai, d'un bureau commercial ouvert conjointement par le Bureau de promotion des produits forestiers du Québec et British Columbia Wood Specialties. Ce bureau aidera les fabricants canadiens de produits du bois qui font preuve d'innovation à saisir les possibilités commerciales immenses qui s'offrent sur ce marché en émergence.

En Corée, nous avons eu des entretiens avec le ministre de la Construction au sujet des nouveaux débouchés commerciaux pour les produits de construction en bois que fabrique le Canada et les technologies énergétiques qu'il met au point dans ce domaine. Un lotissement résidentiel de style canadien pourrait bientôt être réalisé à Séoul.

Au Japon, nous avons eu l'occasion de réitérer l'engagement du Canada à l'égard des pratiques d'aménagement durable des forêts, non seulement devant mes homologues, mais aussi devant des dirigeants de l'industrie nippone des produits forestiers et la presse japonaise.

• 0835

Cela dit, nos activités forestières sur la scène internationale ne se limitent pas à la promotion du commerce. Comme vous le savez, le Canada est le chef de file d'un mouvement en faveur de l'adoption d'une convention forestière mondiale. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et Ressources naturelles Canada ont joué un rôle de premier plan à la réunion du Forum intergouvernemental sur les forêts (FIF) des Nations Unies, il y a environ un mois, à New York. Les efforts du Canada ont permis de dégager un consensus sur la création d'un organe permanent de l'ONU, le Forum intergouvernemental sur les forêts, qui aurait essentiellement pour tâche de mettre en oeuvre les mesures volontaires qu'il propose en matière d'aménagement durable des forêts. Nous avons réalisé des progrès dans l'étude d'un processus qui pourrait déboucher sur la création d'un cadre juridique d'aménagement des forêts à l'échelle du globe.

De concert avec le Costa Rica, le Canada a tenu à travers le monde, depuis un an, une série de réunions qui lui ont permis de discuter avec 130 pays des avantages d'un instrument juridiquement contraignant pour assurer l'aménagement et la protection des forêts de la planète.

En plus de ses activités dans le cadre du FIF, le Canada mène une campagne pour faire adopter une convention forestière mondiale. Tout cela à la veille de la huitième session de la Commission du développement durable des Nations Unies, qui se tiendra en avril. Je puis vous assurer que le Canada profitera de cette occasion pour énoncer clairement et ouvertement sa position sur une éventuelle convention forestière mondiale.

À l'intérieur des frontières canadiennes, nous continuerons à collaborer au programme Branché sur le bois avec le Conseil canadien du bois et de l'industrie des produits du bois. Cette initiative vise à promouvoir l'utilisation du bois dans la construction commerciale, en renseignant les architectes, les concepteurs et les autres spécialistes du bâtiment sur les qualités du bois et les possibilités offertes par ce matériau. Des projets pilotes ont été réalisés avec succès à Prince George (Colombie- Britannique), à Chicoutimi (Québec) et à Grande-Prairie (Alberta), et d'autres sont prévus en Ontario et dans les Maritimes.

Nous poursuivons également notre action en vue d'atteindre les objectifs de la Stratégie nationale sur les forêts. Le gouvernement fédéral vient tout juste de déposer 79 plans d'action, au terme d'un effort collectif auquel ont participé une vingtaine de ministères et d'organismes. La Stratégie évoluera constamment.

Nous mettons actuellement la dernière main au premier rapport du Canada sur l'aménagement durable des forêts, où l'on emploie une série de critères et d'indicateurs scientifiques. Produit conjointement par Ressources naturelles Canada et les provinces, ce rapport sera déposé à la Commission du développement durable des Nations Unies, en avril. Il démontrera l'importance que le Canada attache à l'évaluation des progrès accomplis sur la voie du développement durable.

En terminant, je tiens à répéter à quel point j'apprécie le travail et les conseils de votre comité et son intérêt pour les enjeux très importants liés aux ressources naturelles. En ce qui concerne la foresterie en particulier, je vous souhaite une excellente visite dans les collectivités forestières de l'Ontario, du Québec et du Nouveau-Brunswick.

Je crois comprendre que le comité est sur le point d'entreprendre un examen du secteur des minéraux et des métaux, qui est confronté à des problèmes d'accès au marché d'un tout autre ordre. À cet égard, j'inviterais le comité à considérer plus particulièrement la façon dont le Canada devrait se positionner pour exploiter au maximum les possibilités qui s'offrent dans le contexte de la mondialisation. Dans l'esprit de l'Initiative minière de Whitehorse, il pourrait envisager des façons de favoriser le partenariat entre tous les intervenants du secteur minier.

Merci, monsieur le président. Je répondrai volontiers aux questions des membres du comité.

Le président: Merci, monsieur Goodale.

Je vous avais prévenu et j'avais signalé à mes collègues que, pour que chacun puisse profiter de l'occasion que représente la visite d'un ministre, les questions ne devront porter que sur le sujet à l'étude. Attendez-vous donc à ce que je reporte les questions qui s'écarteront du sujet à la toute fin, s'il nous reste du temps.

Vous êtes le premier, monsieur Stinson. Allez-y.

M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Réf.): Merci, monsieur le ministre. Je voudrais également recevoir si possible un exemplaire de votre allocution.

M. Ralph Goodale: Certainement. Nous pourrons en faire remettre un exemplaire à tous les membres du comité plus tard dans la journée.

M. Darrel Stinson: Merci. J'apprécie beaucoup.

En ce qui concerne la foresterie au Canada, l'accord sur le bois d'oeuvre a tendance à être une des principales pierres d'achoppement. Les Américains sont actuellement très préoccupés par cet accord. Ils ont proposé de s'en débarrasser pour le remplacer par un accord de libre-échange sur le bois d'oeuvre. Dans leurs interventions, il a également été question de soumissionner sur des blocs de bois d'oeuvre, ce qui inclurait l'exportation de billes brutes du Canada.

• 0840

Vous êtes-vous renseigné ou avez-vous évalué les conséquences qu'un tel changement aurait sur les emplois dans le secteur forestier au Canada?

[Note de la rédaction: Difficultés techniques]

Quelle est votre position à ce sujet?

M. Ralph Goodale: Merci.

C'est bien entendu une question très importante qui nécessitera toute notre attention d'ici mars 2001, date d'échéance de l'accord actuel.

Un diplomate canadien de haut rang, M. Doug Waddell, a été chargé il y a quelque temps de diriger les consultations internes officielles du gouvernement fédéral sur les diverses possibilités d'action que nous avons pour le compte de l'industrie du bois d'oeuvre. Les réactions obtenues jusqu'à présent grâce aux consultations de M. Waddell indiquent que pratiquement toutes les parties intéressées au Canada cherchent des alternatives au statu quo, qui n'est manifestement pas considéré comme la situation la plus satisfaisante, mais un consensus général n'a pas encore été atteint dans l'industrie quant à la nature de la formule de remplacement.

Je crois comprendre que plusieurs cadres de direction de l'industrie du sciage se sont réunis dernièrement à Québec. Ils ont convenu de continuer d'essayer d'adopter une position canadienne commune permettant d'améliorer considérablement les relations commerciales avec les Américains en ce qui concerne ce marché.

Quant aux diverses positions possibles dans le cadre des négociations avec les Américains—et les points de vue sont nombreux du côté américain également—nous les examinons et les analysons très soigneusement pour déterminer leur incidence pour le Canada. Ce processus est en cours. Il n'est pas encore terminé mais j'approuve la remarque que vous faites indirectement, à savoir que, comme les opinions et les propositions diffèrent d'un groupe à l'autre aux États-Unis, nous devons comprendre l'incidence qu'elles pourraient avoir dans chaque cas pour l'industrie canadienne, ce qui nous permettra de comprendre parfaitement les conséquences éventuelles des diverses options de rechange lorsque nous négocierons avec les Américains, d'ici quelques mois, et de discuter en toute connaissance de cause.

J'ai demandé à M. Dowswell du MAECI de m'accompagner ici. Il pourra peut-être vous donner des renseignements plus précis, surtout en ce qui concerne la question du bois d'oeuvre.

M. Wallace Dowswell (directeur général, Direction générale des contrôles à l'exportation et à l'importation, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international Canada): Monsieur le ministre, je crois que vous avez très bien répondu. S'il y a d'autres questions, je pourrai répondre plus tard.

M. Darrel Stinson: Vous avez déclaré qu'avec le concours de l'industrie forestière, vous essayiez de démentir diverses opinions qui circulent en Europe au sujet de nos pratiques forestières. Il est grand temps que nous nous mettions à démentir ces rumeurs.

Quel est le degré d'engagement du gouvernement dans la campagne qu'il mène avec l'industrie forestière? Combien de fonds investissons-nous dans la lutte contre les rumeurs répandues par Greenpeace et d'autres organismes de ce genre?

• 0845

M. Ralph Goodale: Jusqu'à présent, la principale initiative est ce que l'on appelle généralement le Programme international de partenariats en foresterie. C'est une initiative du Conseil canadien des ministres des Forêts et elle est donc à la fois fédérale et provinciale. Elle a été instaurée vers 1992.

Elle devait prendre fin l'année dernière mais les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux ont réussi à renégocier non seulement son maintien mais aussi une augmentation du budget. Par conséquent, elle a été reconduite pour une période de cinq ans et le montant des frais partagés entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux est d'un minimum de 800 000 $ par an.

Nous préparons actuellement un dossier pour le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux qui pourrait porter ce montant à 1,2 million de dollars par an, pour un total global de 6 millions de dollars au cours de cette période.

Les fonds engagés ont une double destination. Ces fonds supplémentaires nous permettront d'être plus actifs sur les marchés américain et japonais en cas de campagnes d'information trompeuses; l'objectif est de réagir immédiatement et, jusqu'à présent, nous avons été actifs surtout en Europe. Le but est de ne pas laisser courir des rumeurs et de révéler rapidement les faits en s'appuyant sur des sources autorisées. Les provinces et l'industrie participent à cette contre-attaque et le message est transmis principalement par les missions diplomatiques en Europe.

M. Darrel Stinson: La tactique commence-t-elle à être efficace?

M. Ralph Goodale: Oui. Le deuxième volet de cet effort consiste à inviter nos détracteurs à venir ici et à vérifier par eux-mêmes au lieu de fonder leurs opinions sur quelques renseignements glanés sur Internet. Il consiste à les inviter à venir voir les forêts du Québec, de l'Ontario, de la Colombie- Britannique et de l'Alberta.

L'expérience a démontré que la grosse majorité de ceux et celles qui nous critiquaient à distance retournent chez eux très rassurés au sujet de la durabilité des pratiques forestières canadiennes.

Nous comptons poursuivre cet effort qui doit être collectif. Les provinces, l'industrie, les syndicats, les collectivités forestières et les organismes de défense de l'environnement doivent collaborer pour que cette défense soit efficace pour le Canada. Nous poursuivrons cet effort.

M. Darrel Stinson: Merci, monsieur le président.

Le président: Monsieur Reed.

M. Julian Reed (Halton, Lib.): À propos des questions de M. Stinson, je signale qu'hier, le Sierra Club a qualifié notre programme d'information de propagande. Il estime normal que les ONG fassent de la propagande en Europe et encaissent les chèques que celle-ci leur rapporte, mais il trouve notre propagande déloyale.

Nous avons pris bonne note du commentaire que vous avez fait au sujet des organismes voués à la protection de l'environnement, à savoir qu'il fallait en faire des alliés. C'est en effet essentiel mais, à en juger d'après les déclarations que les représentants du Sierra Club ont faites ici hier, c'est loin d'être gagné. Je me demande si vous avez des commentaires à faire à ce sujet.

M. Ralph Goodale: Je suppose que ce que plusieurs personnes prennent pour de l'information peut être considéré comme de la propagande par d'autres et réciproquement. C'est une question de point de vue. C'est bien entendu un jugement subjectif.

• 0850

Comme représentants du gouvernement du Canada, nous estimons toutefois que nous nous devons d'exposer les faits de façon assez exacte. C'est notre devoir à l'égard des Canadiens et en notre qualité de citoyens du monde responsables.

Nous faisons tout notre possible pour nous assurer que l'information publiée et diffusée par le gouvernement du Canada par l'intermédiaire de mon ministère—et principalement du Service canadien des forêts—et sous les auspices du MAECI est rigoureusement exacte et qu'elle peut résister à un examen très minutieux. Je suis convaincu que les renseignements diffusés par le gouvernement du Canada en ce qui concerne les pratiques forestières canadiennes sont exacts et fiables. Dans la plupart des cas où nous avons examiné les renseignements diffusés par nos critiques étrangers, nous avons constaté qu'ils étaient incomplets ou dépassés, ou encore que les recherches avaient été bâclées ou faites de façon sélective.

Monsieur Reed, je crois par conséquent que nous essayons de diffuser des renseignements exacts et de ne pas déformer le message en nous assurant que lorsque le gouvernement du Canada fait une déclaration, celle-ci s'appuie sur des informations et une analyse solides. Nous devons continuer à essayer d'élargir le consensus.

J'ai mentionné la stratégie WINS dans mes observations préliminaires. Nous en avons discuté pour Ressources naturelles Canada il y a environ un an. Un des éléments de cette stratégie est la recherche d'un consensus. C'est souvent une quête illusoire mais que nous devons poursuivre. Je crois sincèrement que plusieurs de vos activités peuvent être très utiles dans le cadre de cette quête car elles pourront nous permettre de nous entendre au moins sur les faits.

M. Julian Reed: Monsieur le ministre, il y a une autre déclaration au sujet de laquelle je souhaiterais que vous fassiez des commentaires, à savoir que les forêts courent un grand danger à cause du réchauffement de la planète. En a-t-on des preuves? La couverture forestière a-t-elle changé?

M. Ralph Goodale: J'ai entendu dire que cette déclaration a été faite hier et je suppose que ce que voulait dire le Sierra Club, c'est qu'en raison de la situation géographique septentrionale qui caractérise le Canada, certaines régions du pays sont parmi les régions du monde qui sont les plus exposées aux répercussions du changement climatique. C'est généralement le cas pour les autres pays qui se trouvent dans une situation géographique analogue à la nôtre.

Le changement climatique pourrait modifier considérablement les conditions atmosphériques; il pourrait entraîner davantage de sécheresses dans certaines régions et davantage d'inondations dans d'autres; il pourrait rendre les conditions météorologiques plus mauvaises et plus variables; il pourrait avoir une incidence sur l'écoulement des eaux et sur la biodiversité. Par conséquent, le changement climatique est un problème dont il ne faut pas minimiser la gravité et il convient d'agir en conséquence.

Nous avons ici un des meilleurs experts en science forestière, M. Yvan Hardy. Il a à son actif une très longue et brillante carrière dans le secteur forestier au Canada.

Yvan, avez-vous des commentaires à ajouter au sujet des forêts et du climat?

M. Yvan Hardy (sous-ministre adjoint, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles Canada): J'ajouterais peut- être quelques commentaires, monsieur le ministre.

On spécule, mais on ne peut pas prédire l'avenir avec exactitude. Le Service canadien des forêts a un programme de recherche sur le changement climatique qui est axé principalement sur deux facteurs. Le premier est la capacité de la forêt de séquestrer le carbone, c'est-à-dire que la forêt canadienne est considérée comme une trappe et non comme une source; nous en examinons en outre les incidences.

• 0855

À Sault Ste. Marie, nous faisons des recherches qui visent à simuler ce que deviendront notamment les essences forestières et l'habitat faunique selon l'hypothèse actuelle sur la rapidité du réchauffement climatique et l'effet qu'il aurait sur l'écosystème. Cette étude révèle que divers changements se produiraient effectivement mais qu'ils seraient plutôt lents. La nature s'adapterait probablement petit à petit.

Le président: Merci.

Monsieur Canuel.

[Français]

M. René Canuel (Matapédia—Matane, BQ): Monsieur le ministre, je voudrais revenir sur la question du libre-échange. Je crois comprendre que la majorité des industriels du Québec souhaitent qu'on ne renouvelle pas cette entente en l'an 2001. Je ne sais pas si les industriels de l'extérieur du Québec partagent le même point de vue. J'ai reçu des lettres de la part d'industriels québécois et j'en ai rencontré plusieurs. Ils m'ont dit qu'ils préféreraient qu'on mette fin à cette entente de libre-échange parce que certains de leurs droits ont été brimés.

Je prendrai l'exemple de l'industrie Boisaco de Sacré-Coeur, sur la Côte-Nord, qui avait réclamé certains quotas et qui a fait une petite erreur qui lui a coûté des millions de dollars. Veuillez prendre note du fait que je ne dis pas que c'est le ministère qui s'est trompé.

Je voudrais connaître votre position, en votre qualité de ministre responsable des forêts, face au commerce international et face à ces industriels.

[Traduction]

M. Ralph Goodale: Monsieur Canuel, mon objectif est d'obtenir des possibilités d'accès maximales pour les produits forestiers canadiens sur tous les marchés étrangers. Le marché américain est certes très proche et très attrayant; c'est en outre un marché commode et lucratif, mais d'autres débouchés s'offrent à nous à l'échelle mondiale. Je crois que nos efforts doivent être axés sur des possibilités d'accès maximales.

Dans le cadre des relations commerciales, il y a bien entendu deux parties aux négociations et les Américains ont leurs idées sur ce qu'ils veulent obtenir. Selon moi, il serait souhaitable d'en arriver à un arrangement qui nous faciliterait beaucoup l'exportation vers les marchés américains.

Pour renforcer au maximum la position du Canada, il faudrait pour bien faire que, d'ici un an tout au plus, on ait adopté une position canadienne commune, tous les intervenants étant solidaires et défendant vigoureusement leur cause. Des progrès ont été réalisés dans ce sens mais je ne crois pas que l'on puisse dire d'ores et déjà que nous en sommes arrivés à une position unanime.

[Français]

M. René Canuel: Vous, personnellement, quelle est votre position aujourd'hui? Seriez-vous plus enclin à favoriser le non-renouvellement de l'entente? Je comprends très bien votre position face aux Américains, qui sont un géant. Je ne vous demanderai pas quelle est votre position puisque vous soulèveriez des éléments un peu partout, mais j'aimerais connaître la tendance que vous adopteriez.

[Traduction]

M. Ralph Goodale: Du point de vue des exportateurs canadiens, la formule idéale serait d'avoir accès au marché sans aucune restriction. C'est l'objectif qu'il faut viser. Il reste à voir, bien entendu, si les Américains verront ce point de vue d'un oeil favorable, mais d'une manière générale, les Canadiens devraient avoir le maximum d'accès au marché.

• 0900

[Français]

M. René Canuel: Vous dites qu'au Canada, la forêt se porte bien. Il y a six ans que je suis ici, et on me dit tout le temps que ça va bien. Je suis allé à Vancouver et j'ai fait un tour d'hélicoptère lors duquel on m'a montré de belles forêts. Je me suis dit que ce n'était pas si mal que ça, bien que j'aie appris par la suite qu'on ne m'avait pas montré certaines parties.

Au Québec, Richard Desjardins a produit un film que tout le monde connaît bien en Gaspésie et qui s'intitule L'Erreur boréale. Même M. Brassard nous disait que ce n'était pas si grave que cela au Québec. Il reste une chose et c'est que selon moi, la vérité se situe entre les deux. M. Desjardins est peut-être allé un peu loin, mais comme Canadiens et Québécois, nous avons le devoir de protéger nos forêts. Il incombe tout particulièrement au gouvernement fédéral, puisqu'on sait fort bien que les forêts sont de compétence provinciale, de veiller à la recherche et au développement dans ce domaine.

Nous sommes en présence d'un sous-ministre que je connais. Je reconnais qu'il est un spécialiste et qu'il fait un excellent travail. Monsieur le ministre, vous qui avez déjà été ministre de l'Agriculture, pourriez-vous nous dire pourquoi la vache qui donnait, il y a 20 ans, telle quantité de lait nous donne aujourd'hui...

Des voix: Ah, ah!

M. René Canuel: À cause de la génétique, il pourrait s'agir de la même vache. Si une vache nous donne aujourd'hui 20, 30 ou 40 fois plus de lait, c'est parce qu'on a fait des efforts en ce sens et qu'on a investi dans la génétique.

Je crois qu'en foresterie, on ne consent pas assez d'efforts en génétique. Il faut encore 40, 50 ou 100 ans à un arbre pour pousser.

[Traduction]

Une voix: Il se trompe.

[Français]

M. René Canuel: Il me semble que cette période pourrait être réduite de 20 ou 30 ans. Quel budget consacre-t-on à la génétique? Où sont nos laboratoires? Je vais vous laisser répondre à ces questions, puis j'en poserai une autre.

[Traduction]

Le président: Monsieur le ministre, j'espère que votre réponse ne sera pas trop longue, car il ne vous reste plus qu'une trentaine de secondes.

M. Ralph Goodale: Merci, monsieur le président.

Monsieur Canuel, vous avez abordé la question cruciale de la recherche-développement dans le secteur forestier. C'est une des missions très importantes de Ressources naturelles Canada et plus particulièrement du Service canadien des forêts. J'ai le plaisir de signaler que le SCF assume cette fonction depuis maintenant plus d'un siècle, avec la collaboration de divers organismes provinciaux, des établissements universitaires et du secteur privé, entre autres.

L'amélioration génétique des arbres est en fait une de nos priorités. À titre symbolique, nous produisons cette année l'arbre canadien du millénaire, qui est un produit du génie génétique canadien dans le secteur forestier.

Monsieur le président, étant donné qu'il s'agit d'un domaine extrêmement technique, je voudrais déposer, par l'intermédiaire de M. Hardy, un document indiquant les principaux aspects des activités de recherche du SCF, des recherches qu'il fait seul comme de celles qu'il fait en collaboration avec d'autres organismes. J'insisterai particulièrement sur l'amélioration de la qualité génétique de nos arbres pour qu'elle se concrétise dans l'avenir.

Le président: Le comité est impatient de recevoir ces documents.

Aviez-vous des commentaires à faire avant que nous ne passions à la question suivante, monsieur Hardy, ou pouvons-nous attendre d'avoir reçu les documents?

M. Yvan Hardy: Si vous me le permettez, monsieur le président,

[Français]

je vais dire quelques mots là-dessus.

Le président: Attendez un moment.

Pendant que le président est toujours président,

[Traduction]

avant qu'une révolution de palais n'éclate. Je regrette, mais je dois passer la parole à quelqu'un d'autre. Je dois donner la parole à M. St-Julien, mais je vous donnerai l'occasion d'y revenir, monsieur Hardy.

[Français]

M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Ma première question porte sur le libre-échange et les quotas. Un groupe de membres de la Chambre des représentants a déposé au Congrès américain, le 22 février, une résolution réclamant la levée des restrictions sur l'exploitation de bois d'oeuvre résineux canadien aux États-Unis.

• 0905

On sait que les industriels forestiers de l'Abitibi et du Québec exigent un retour au marché libre avec les États-Unis. Le Conseil du libre-échange pour le bois d'oeuvre, dont le président est Frank Dottori, veut que cet accord soit aboli à la date de son expiration, tandis que d'autres personnes affirment que le statu quo est préférable. Il y a un élément qui me paraît bizarre au niveau des quotas. Les petites compagnies forestières, qu'on appelle chez nous les «remans», sont brimées dans leurs droits.

On a de la difficulté à obtenir ces quotas. Je suis conscient que cette question ne relève pas de votre ministère, mais j'aimerais vous y sensibiliser. Depuis plusieurs années, quatre courtiers qui oeuvrent en Ontario bénéficient de quotas à profusion. Ils n'ont même pas d'employés ni d'usine, mais ce sont les Québécois et les Abitibiens qui y goûtent parce qu'ils ont de la difficulté à couvrir leurs coûts d'exploitation.

Aujourd'hui, pour la première fois, des compagnies américaines appuient le Canada et le Québec. Elles s'opposeront aux quotas tarifaires sur le bois d'oeuvre. Vous savez que l'adoption de la résolution visant leur abolition qui a été déposée au Congrès américain n'exige même pas la signature du président Clinton.

Je veux connaître votre position exacte et précise. Pourquoi les compagnies forestières de l'Abitibi, que ce soit Précisbois ou Norbord, sont-elles brimées dans leurs droits? Elles viennent à Ottawa depuis des années et nous répètent toujours la même chose: no way. Tandis que les quatre compagnies de courtiers en Ontario reçoivent des quotas à profusion, nous nous faisons planter. Pourquoi?

[Traduction]

Le président: C'est une bonne question.

M. Ralph Goodale: Je crois que je demanderai à M. Dowswell de répondre au moins à la dernière partie de cette question pour le MAECI, en ce qui concerne la répartition des quotas. Je voudrais toutefois faire deux ou trois brefs commentaires.

Je suis certain que nous préférerions qu'il n'y ait pas de quotas. Nous préférerions un arrangement qui permettrait à tous les Canadiens d'avoir librement accès à ce marché très important. Nous ne sommes malheureusement pas les seuls à prendre la décision parce que les Américains ont le contrôle de l'accès à leur marché. Je signale qu'ils ont des obligations liées à leur adhésion à l'ALENA et à l'OMC; par conséquent, le Canada n'est pas totalement démuni de moyens de négociation.

Quand des négociations s'annoncent aussi difficiles, la meilleure tactique consiste à adopter la position la plus solide et la plus uniforme possible. Au Canada, les intervenants de l'industrie essaient de dégager ce consensus afin que tous soient d'accord sur le but à atteindre et que tous poursuivent le même objectif.

En ce qui concerne les quotas, l'arrangement actuel repose en grande partie sur un accord entre les intervenants du côté canadien. Que ferions-nous et comment répartirions-nous les quotas si nous étions coincés? C'est le genre de problème que nous aimerions éliminer; nous verrons ce qui sortira de ces négociations.

Je pourrais peut-être demander à M. Dowswell du MAECI de faire des commentaires sur la façon dont les quotas sont appliqués et sur les inégalités qui sont dénoncées entre les diverses régions.

Le président: Monsieur Dowswell, vous êtes directeur général des contrôles à l'exportation et à l'importation du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international?

M. Wallace Dowswell: C'est exact.

Le président: Merci. Allez-y.

M. Wallace Dowswell: Merci.

Monsieur le ministre, je crois que vous avez signalé que la méthode actuelle de gestion des quotas reposait en grande partie sur les consultations avec les représentants de l'industrie de toutes les régions du Canada, du moins des quatre provinces concernées. C'est le meilleur consensus que nous ayons pu dégager jusqu'à présent. Lorsque les quotas sont limités, les parties intéressées ne peuvent pas être toutes satisfaites. Bien entendu, nous avons essayé de régler le problème au cours des dernières années. De nombreuses personnes nous ont contactés pour le compte de diverses compagnies et nous avons essayé de rectifier les erreurs qui avaient été commises. Nous en avons de fait rectifié. Nous n'avons toutefois pas pu beaucoup aider les entreprises qui ne répondaient pas aux critères, par exemple celles qui n'avaient pas exporté aux États-Unis, étant donné que c'était le principal critère.

• 0910

En ce qui concerne le Québec en particulier, nous avons reçu dernièrement ce que l'on appelle des allocations bonis, en raison des prix élevés et, avec l'accord de l'association québécoise, l'AMBSQ, nous avons octroyé ces bonis aux entreprises qui ont des quotas peu élevés par rapport à leur chiffre d'affaires, afin de les faire profiter de ces bonis dans la mesure de nos possibilités. Voilà le genre d'efforts que nous faisons depuis environ six mois pour aider ces compagnies.

Merci.

M. Ralph Goodale: Monsieur le président, je crois que les questions de M. St-Julien et les autres questions sur le bois d'oeuvre indiquent qu'il est éminemment souhaitable que les Canadiens s'efforcent, au cours des prochains mois, d'adopter une position commune pour la prochaine série de négociations avec les Américains. Si nous sommes solidaires, notre position sera en fin de compte plus solide.

Le président: Monsieur Goodale, l'une des opinions divergentes est-elle caractérisée par la perception qu'en fait, le système actuel a encouragé, pas volontairement mais par la force des choses, le développement du marché secondaire dans le secteur forestier et la création d'emplois de longue durée dans le secteur des produits finis au Canada, au lieu d'exporter les matières premières aux États-Unis et ailleurs?

M. Ralph Goodale: Monsieur Dowswell.

M. Wallace Dowswell: Merci, monsieur le ministre.

Nous n'avons pas de statistiques à ce sujet mais bien des commentaires anecdotiques indiquent que c'est effectivement ce qui s'est passé, et que des entreprises de resciage se sont lancées dans la transformation de produits en amont pour ne pas être soumises au système des quotas. Ces types de livraisons se sont accrues mais nous ne possédons pas de chiffres précis à ce sujet.

Le président: Mais vous êtes en train d'en recueillir.

M. Wallace Dowswell: Oui, dans la mesure du possible.

Le président: J'imagine que c'est ce que vous faites en prévision de ces négociations parce que si cette perception est exacte, il me semble que l'on aura davantage de doutes que je ne le pensais il y a quelques instants à peine quant à l'opportunité de donner la préférence au système actuel ou de le remplacer.

M. Wallace Dowswell: Les Américains ont malheureusement tendance à croire que ça élargirait la couverture de l'accord au lieu d'être réellement avantageux pour nous.

Le président: Je donne la parole à M. Godin.

[Français]

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Bonjour, monsieur le ministre. Mes collègues ont déjà soulevé plusieurs de mes préoccupations. J'aimerais toutefois parler du côté sérieux de la surveillance et de la recherche. Hier, les représentants du Sierra Club nous disaient qu'au cours des 10 dernières années, les budgets fédéraux avaient subi des réductions de l'ordre de 40 p. 100. J'estime que la surveillance et la recherche sont très importantes et je suis d'accord avec mon collègue René Canuel, qui nous recommandait d'investir davantage afin que nos arbres puissent connaître une meilleure croissance. Vous ne serez peut-être pas d'accord avec moi, mais je maintiens que les forêts sont de compétence provinciale et que le fédéral n'y joue qu'un petit rôle. Mais bien qu'il s'agisse d'un domaine de compétence provinciale, le fédéral devrait s'engager à aider les provinces du côté de la recherche. Il est difficile de comprendre le recul qu'accuse le fédéral.

J'ai communiqué avec M. Hardy pour manifester mon intérêt quant aux forêts modèles et lui dire que j'étais intéressé à ce que ce principe soit appliqué dans notre région. Je crois que là où il a été mis en oeuvre, on a obtenu des résultats positifs. Je suis toutefois conscient que les compressions budgétaires importantes peuvent nous empêcher de réaliser de tels projets. Je crois que c'est à ce niveau que le fédéral a un rôle important à jouer.

Je vais vous poser tout de suite ma deuxième question étant donné que je crains de ne pouvoir intervenir au deuxième tour. Est-ce que le ministre serait prêt à examiner une convention internationale sur la forêt dans le cadre de laquelle on pourrait amener tous les joueurs à une même table pour qu'ils y discutent de nos programmes en matière de forêts ou des problèmes auxquels font face tous nos pays?

• 0915

[Traduction]

M. Ralph Goodale: Monsieur le président, je crois que c'est l'occasion pour moi de laisser M. Hardy exposer une partie des renseignements sur la recherche qu'il s'apprêtait à donner tout à l'heure.

Monsieur Godin, je signale que j'attache une importance primordiale à la recherche et développement, à l'innovation, à la technologie et au transfert de technologie. Ce sont des facteurs essentiels du progrès et la recherche axée sur les forêts est absolument capitale pour notre réussite, tant au Canada qu'à l'échelle internationale.

Je demanderai à M. Hardy de donner quelques informations précises et d'étoffer ce commentaire d'ordre général.

En ce qui concerne votre dernière question au sujet d'une convention internationale sur la forêt dans un cadre juridique contraignant, je signale que le Canada est en fait le principal promoteur de ce genre d'instrument international. Nous préparons le terrain depuis des années et nous poursuivrons nos efforts. Nous commençons à réaliser des progrès dans ce sens au sein des divers organismes des Nations Unies.

Je passe la parole à M. Hardy pour qu'il parle de recherche et développement.

M. Yvon Godin: Pour nous annoncer que le budget va augmenter?

Une voix: Non.

[Français]

M. Yvan Hardy: Je laisse toujours au ministre le plaisir d'annoncer les bonnes nouvelles.

M. Yvon Godin: Tu veux garder ton emploi.

M. Yvan Hardy: Lorsque le Sierra Club vous parlait de réductions budgétaires de l'ordre de 40 p. 100 et plus, il avait tout à fait raison. Il faut toutefois mettre cela dans son contexte. Au niveau de la revue de programmes, la grande majorité des réductions a porté sur les ententes fédérales-provinciales.

Pour ce qui est de la recherche au niveau de la revue de programmes, nous avons choisi de consolider notre organisation. On a réduit le nombre d'établissements physiques pour réduire nos dépenses en infrastructures. Nous nous sommes réorganisés en réseaux de recherche. Grosso modo, je crois pouvoir dire que nous avons conservé notre capacité de recherche à 80 p. 100 de ce qu'elle était auparavant. Nous avons fait des choix stratégiques. On a fait réduit nos activités de surveillance. Par exemple, nous avons mis fin à notre inventaire des insectes porteurs de maladies et décidé d'investir dans des domaines plus stratégiques, comme la génétique et l'amélioration des arbres, à laquelle faisait allusion M. Canuel. Je crois me souvenir que nous investissons de 4 à 5 millions de dollars par année dans ce domaine. Il y a plus de 50 ans que nous nous sommes engagés en recherche en vue de l'amélioration des arbres. Il y a au Canada un réseau de vergers à graines améliorées. Nous appliquons les meilleures techniques de biotechnologie, ce que l'on appelle l'embryogenèse somatique, soit une méthode de clonage des meilleurs arbres. Nous employons des techniques de génie génétique en vue d'améliorer les arbres par transplants de gènes. Nous avons aujourd'hui en laboratoire des épinettes qui possèdent le gène du Bt, qui leur permet de résister à la tordeuse de bourgeons d'épinettes. Par ailleurs, nous sommes capables au Canada de faire croître certaines espèces d'arbres tels que des peupliers et des mélèzes en 20 ans. Nos gens du côté de la recherche et du côté politique examinent actuellement la possibilité de planter des arbres à croissance rapide dans un contexte de changement climatique, par exemple.

[Traduction]

Le président: Merci.

Monsieur St. Denis.

M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Monsieur le ministre, je vous remercie d'être venu ce matin avec vos principaux adjoints.

Je suis heureux que dans la réponse que vous avez donnée à M. Godin, vous ayez fait allusion à l'initiative Canada-Costa Rica visant à promouvoir l'adoption d'une convention mondiale sur les pratiques forestières. D'après les commentaires qu'ont faits hier les représentants du Sierra Club et d'après ceux d'autres ONG—ainsi que d'après leurs mémoires—j'ai l'impression que ces organisations ne tiennent pas à harmoniser ni à intégrer les systèmes de certification. Il me semble que les pratiques forestières canadiennes continuent d'être dénoncées par certaines ONG, mais pas par toutes, à cause des pratiques provinciales et de celles de l'industrie. D'un côté, on veut maintenir le système de certification à part. De l'autre, étant donné sa position dominante dans le secteur forestier, le Canada essaie de diriger la campagne en faveur de la signature d'une convention. Je crois que vous avez fait une remarque pertinente l'année dernière en disant que le gouvernement fédéral ne devrait pas s'occuper de certification. Ce n'est effectivement pas sa tâche.

• 0920

Estimez-vous que nous pourrons dégager un jour un consensus—entre les ONG, l'industrie et tous les paliers de gouvernement—et adopter une position commune, un système de certification commun, non seulement sous la direction du gouvernement fédéral mais avec sa participation active, ce dernier réunissant tous les intervenants dans le cadre d'une convention internationale sur la forêt telle que celle que nous essayons de promouvoir dans le cadre de l'initiative Canada-Costa Rica?

M. Ralph Goodale: Monsieur St. Denis, je ne sais pas si les deux initiatives doivent absolument être menées de front, mais elles sont indéniablement complémentaires.

En ce qui concerne la certification, divers groupes et organismes de toutes les régions du monde oeuvrent dans ce sens depuis un certain temps. Du côté canadien, certaines normes susceptibles de cadrer avec le processus ISO sont examinées par l'ACN, c'est-à-dire l'Association canadienne de normalisation. Il y a bien entendu les normes internationales établies par des ONG, celles du Forest Stewardship Council dont le siège administratif est au Mexique. Toutes ces normes—et il y en a d'autres—ont pour objectif général l'adoption de pratiques forestières plus durables, mais elles ne sont pas uniformes. Je crois qu'il serait très utile que tous ceux et celles qui ont l'intérêt des forêts du monde à coeur puissent s'entendre sur les principes applicables à la certification.

C'est très important pour que tous les pays du monde adoptent une approche uniforme. C'est ainsi que l'on obtient le cadre d'un instrument juridique international.

Le Canada a fait des efforts dans ce sens depuis longtemps, au début par l'intermédiaire du Groupe intergouvernemental sur les forêts, puis du Forum intergouvernemental sur les forêts. Ces efforts ont débouché sur l'Initiative Canada-Costa Rica dont le but est d'améliorer la communication, de mieux faire connaître le problème et d'édifier les fondements d'un consensus international concernant l'adoption d'un instrument juridiquement contraignant, applicable à tous et dans tous les pays du monde, qui uniformiserait les règles du jeu et serait basé sur des définitions communes. Ainsi, nous saurions tous exactement où nous en sommes et nous serions évalués selon les mêmes critères.

Nous irons défendre cette cause devant la Commission du développement durable des Nations Unies au mois d'avril. Nous pensons avoir réalisé quelque progrès et être parvenus à convaincre la plupart des autres pays que ce serait une excellente initiative. J'espère qu'au cours de la réunion de la Commission du développement durable, on établira un plan d'action, pour les prochaines années, qui nous permettra de progresser sur la voie dans laquelle le Canada essaie de guider les autres pays depuis un certain temps.

Une conception commune de la certification et un cadre international ayant des effets juridiques contraignants seraient à notre avis très utiles et surtout, protégeraient l'intégrité des forêts dans toutes les régions du monde.

M. Brent St. Denis: Merci.

Le président: Monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Merci, monsieur le président. Je remercie également M. le ministre et ses collaborateurs.

Monsieur Goodale, je voudrais vous poser une question à propos d'un commentaire que vous avez fait au sujet des ventes de produits forestiers à l'étranger, notamment à propos de la réaction favorable des Européens qui ont eu l'occasion de venir ici pour observer nos pratiques. Je me demande si vous pourriez nous fournir des preuves que nos ventes ou que les échanges se sont accrus à la suite de ces visites. Il y a par exemple un groupe qui est venu ici en septembre. A-t-on remarqué un changement d'attitude d'après le nombre de commandes placées? Quelles preuves concrètes a-t-on que ces visites ont provoqué un changement d'attitude dans les relations avec le Canada?

• 0925

M. Ralph Goodale: Monsieur Schmidt, j'ignore si l'on peut établir un lien direct entre des transactions commerciales fructueuses et une visite antérieure d'observation de nos pratiques forestières. Par contre, les personnes qui sont venues nous rendre visite pour se rendre compte par elles-mêmes de la situation nous ont fait part de leurs réactions. Après avoir eu l'occasion d'assimiler tout ce qu'elles avaient vu et entendu durant leur séjour, elles nous ont fait savoir que leurs opinions avaient changé depuis lors.

Je n'ai pas les renseignements pour l'instant, mais je me ferais un plaisir de vous les fournir pour vous permettre de déterminer l'incidence qu'ont eue, sur un groupe d'acheteurs ou même un journaliste, la visite ou les autres efforts qui ont été déployés pour essayer de rétablir la vérité. J'essaierai de vous donner ces renseignements après cette séance pour montrer que le Programme international de partenariats en foresterie porte ses fruits.

M. Werner Schmidt: Merci beaucoup, monsieur le président. Monsieur le ministre, je vous remercie. Les mots ne coûtent rien, en fin de compte. Je sais que c'était le sentiment que l'on avait à la réunion. Les personnes concernées étaient satisfaites et c'est exactement l'impression que nous avions également. Je voudrais toutefois savoir quels résultats concrets ces visites ont donné. C'est bien beau de parler, mais encore faut-il obtenir des contrats.

C'est la première observation que je voulais faire.

M. Ralph Goodale: Nous fournirons ces renseignements au comité, monsieur le président, ainsi que les meilleures indications que nous avons permettant d'établir que ce genre de programmes a permis aux Canadiens de maintenir leurs marchés.

M. Werner Schmidt: Merci beaucoup, monsieur le ministre. Je pense qu'il faudrait maintenir ces programmes en permanence.

L'autre remarque que j'ai à faire se rattache à la question de M. St. Denis sur la certification. Elle concerne la multitude d'organismes certificateurs que l'on trouve dans les divers pays. On a des raisons de croire que la présence de divers organismes certificateurs se justifie, pour autant que ces organismes soient accrédités. Vous avez fait des études universitaires et vous savez que la qualité de l'enseignement diffère beaucoup d'une université à l'autre. Il y a les bonnes et il y a les mauvaises. Les universités sont en quelque sorte accréditées et, par conséquent, il y a un bloc de connaissances commun, qui est apparemment accepté ou rejeté; il en est ainsi dans votre profession et dans plusieurs autres.

Par conséquent, je voudrais savoir si ces organismes certificateurs sont accrédités par quelque organisme. C'est la première question.

En deuxième lieu, ne serait-il pas préférable que cet organisme d'accréditation, quel qu'il soit, laisse la demande déterminer ce qui est acceptable au lieu de se fonder sur une sorte de structure juridique imposant diverses règles. Ensuite, les structures d'exécution et de réglementation pourraient entrer en jeu.

Pourriez-vous faire des commentaires à ce sujet?

M. Ralph Goodale: Comme vous l'avez laissé entendre dans votre question, on pourrait disposer de diverses normes de certification, selon les fins. Le recours à des approches différentes par des organismes différents poursuivant des objectifs très différents pourrait se justifier. Par conséquent, je note le commentaire que vous avez fait au sujet de la diversité des approches en matière de certification.

Par contre, le sérieux de la certification est un facteur important. Cette question pourrait être réglée, en partie du moins—et je pense que c'est ce que laissait entendre la question de M. St. Denis—dans le contexte d'une convention internationale sur la forêt. Par conséquent, nous aurions une idée précise de ce dont on parle; en outre, le processus aurait quelque uniformité et quelque transparence.

• 0930

M. Werner Schmidt: Sera-ce la pierre angulaire de cette convention?

M. Ralph Goodale: Ce pourrait être la pierre angulaire d'une partie de cette convention. Nous n'avons pas terminé notre travail et nous essayons d'obtenir un consensus international. L'objectif serait toutefois de clarifier les définitions et d'adopter des approches ou des méthodes uniformes d'évaluation des progrès.

M. Werner Schmidt: Monsieur le ministre, j'insiste sur cette question parce qu'elle est au coeur même du problème. Ce sont les pratiques d'aménagement durable des forêts qui sont en cause. C'est ce qui détermine dans une large mesure l'importation et l'exportation de produits particuliers.

Monsieur le ministre, je crois que vous avez déclaré que vous vouliez un consensus entre les ONG qui sont vouées à la protection de l'environnement et les autres parties qui veulent l'exploiter à des fins lucratives. Vous en avez parlé comme si les deux n'étaient pas conciliables. Vous parlez d'obtenir un consensus—et j'apprécie beaucoup vos efforts—mais n'est-ce pas précisément une entente qui est la principale cause de ce conflit?

M. Ralph Goodale: C'est certainement un facteur très important, monsieur Schmidt, mais il y en a d'autres également. Par contre, si nous arrivions à persuader les principaux intervenants du secteur forestier de s'entendre sur un système de certification sérieux et légitime, ce serait un grand pas en avant.

M. Werner Schmidt: Comptez-vous essayer?

M. Ralph Goodale: Nous ne cessons de faire des efforts dans ce sens. Nous avons quelquefois un peu de difficulté à rallier certains des intervenants.

M. Werner Schmidt: C'est ce qui me préoccupe. Étant donné qu'une conférence aura bientôt lieu et que ce sujet est au coeur du problème, pourquoi ne serait-ce pas une des principales questions à l'ordre du jour?

M. Ralph Goodale: Parlez-vous de la réunion de l'ONU qui doit avoir lieu au mois d'avril?

M. Werner Schmidt: Oui.

M. Ralph Goodale: Je n'ai pas esquivé la question, monsieur Schmidt, parce cette remarque est très pertinente. J'estime toutefois qu'il serait peut-être un peu prématuré d'en discuter. Le fait sur lequel il faut attirer l'attention des autres pays, au mois d'avril, est la nécessité d'instaurer un processus qui pourrait déboucher sur l'adoption d'une convention internationale. Je ne pense pas que nous en soyons arrivés au stade précis dont vous parlez. Je crois que c'est un détail très important, mais la première étape consiste à guider les divers pays sur la voie de l'adoption d'une convention. Nous n'en sommes encore qu'à ce stade-là.

Nous avons de nombreux alliés et partisans de notre côté. Nous l'avons compris clairement dans le cadre du processus Canada-Costa Rica au cours des 18 derniers mois. Plusieurs pays ne sont toujours pas de notre avis et préféreraient se passer d'une convention internationale. Le défi auquel nous sommes confrontés dans l'immédiat consiste à dégager un consensus sur la nécessité d'un instrument international juridiquement contraignant qui établisse une série de règles et de définitions communes et uniformise les règles du jeu pour tout ce qui touche au secteur forestier.

Lorsque nous arriverons à nous mettre d'accord sur cet objectif général, nous pourrons nous occuper des questions de détail comme celle que vous avez mentionnée. Elle est indéniablement très intéressante. En effet, si tous les outils de mesure manquent d'uniformité, les règles du jeu ne seront pas uniformisées.

M. Werner Schmidt: Nous n'aurons pas de consensus non plus.

M. Ralph Goodale: C'est exact. Je comprends ce que vous voulez dire et j'estime que c'est effectivement un problème. C'est notamment pour résoudre ce genre de problème de façon à pouvoir célébrer une victoire que nous voudrions une convention internationale.

M. Werner Schmidt: Le message est passé. Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur le ministre. Il vous reste quelques minutes, n'est-ce pas?

M. Ralph Goodale: Oui.

Le président: Monsieur St-Julien.

[Français]

M. Guy St-Julien: Monsieur le ministre, je sais que vous êtes un homme d'action et que vous travaillez fort. Il y a des collectivités ici, au Canada, dont l'économie repose uniquement sur le secteur forestier. Des problèmes existent tant au niveau international que national. Les compagnies forestières de l'Abitibi en sont venues à la conclusion qu'on ne pouvait pas entièrement expliquer les pénuries de diesel ou d'essence ou l'augmentation de leur prix au cours des derniers mois par les problèmes qui existent au niveau international.

• 0935

On sait qu'il y a quelques années, le gouvernement fédéral avait haussé, en raison du déficit, la taxe d'accise de 8,5¢ à 10¢ le litre. Puisque nous bénéficions aujourd'hui de surplus, le gouvernement du Canada devrait-il réduire cette taxe à 8,5¢ le litre, afin que puissent en bénéficier nos compagnies forestières, nos camionneurs forestiers au Canada et au Québec, ainsi que toutes les familles? Tout va s'enchaîner en fin de compte.

En dernier lieu, j'aimerais vous nommer des compagnies qui bénéficient de quotas de bois plus élevés et qui portent atteinte au système au Canada. Il y a Hughes Lumber à Richmond Hill, Maxwood à Fort Erie et la compagnie F.L. Bodogh Lumber à St. Catharines. Ces compagnies ne possèdent pas d'usine et elles n'ont pas d'employés. Elles achètent le bois et l'envoient chez des «remans». Elles ne font pas d'investissements, tandis que nos compagnies forestières d'Abitibi se font encore planter. Allez vérifier ces trois compagnies-là.

[Traduction]

Le président: Monsieur le ministre, vous pouvez toujours répondre à la première de ces deux questions, si vous le voulez, mais je crois qu'il s'agissait davantage d'une remarque. Peut-être pourriez-vous plutôt répondre brièvement à la deuxième question.

M. Ralph Goodale: Je prends note du nom des compagnies que M. St-Julien a mentionnées. Je ne crois pas qu'il me soit utile à ce stade-ci de mentionner des compagnies bien précises. Je signalerai toutefois vos commentaires aux responsables du MAECI et je leur demanderai d'examiner la situation.

Je suppose que vous considérez qu'il s'agit d'injustices dans l'attribution des quotas de bois d'oeuvre.

[Français]

M. Guy St-Julien: Merci.

[Traduction]

M. Ralph Goodale: Je demanderai au MAECI d'examiner la situation.

En ce qui concerne le prix du carburant et le taux de taxation sur le diesel, je signale que les taxes fédérales sur le diesel se chiffrent à environ 7,9¢ le litre. C'est plus que la taxe d'accise. Il faut ensuite y ajouter la TPS. La taxe d'accise sur le diesel n'est que de 4¢ le litre et elle n'a pas changé depuis six ans. L'augmentation de 8,5¢ à 10¢ concerne l'essence et pas le diesel. Par conséquent, il y a une différence entre les taxes sur le diesel et les taxes sur l'essence.

La situation est devenue problématique pour les consommateurs cet hiver à cause d'un concours de circonstances. La hausse est d'abord due, bien entendu, à la décision de l'OPEP. Je signale qu'une autre réunion de l'OPEP est prévue d'ici environ un mois et l'on pense que les dirigeants de cette organisation pourraient modifier leur position. On verra bien. Bien entendu, le Canada ne fait pas partie de l'OPEP. Par contre, cette organisation tiendra bientôt une réunion au cours de laquelle elle pourrait changer de tactique en matière d'offre.

Le deuxième facteur, surtout en ce qui concerne la côte est des États-Unis, est que le mois de janvier a été particulièrement froid et pénible, ce qui a effectivement eu une influence sur l'offre et la demande prévues par l'industrie. Les températures plus froides, surtout dans la région de Boston et de la Nouvelle- Angleterre, ont déséquilibré l'offre et la demande. Diverses difficultés d'approvisionnement, dues à l'évolution des règlements environnementaux en Europe, ont eu des répercussions en Amérique du Nord. De toute façon, la crise devrait commencer à se tasser bientôt.

• 0940

En ce qui concerne l'intervention gouvernementale, il y a, bien entendu, les problèmes de taxe que vous avez mentionnés. Je ne tiens toutefois pas à faire d'autres commentaires à ce sujet. Ces questions relèvent des ministères des Finances et je ne tiens pas à faire de commentaires.

La réglementation des prix de détail relève des provinces.

La question de la concurrence relève de la compétence du gouvernement fédéral. Elle a été examinée et on n'a découvert aucune preuve de comportement monopolistique passible de poursuites en justice. Il y a bien entendu les dispositions d'urgence qui interviennent lorsque la sécurité nationale est compromise, mais il ne semble pas que ce soit le cas en l'occurrence.

En ce qui concerne le prix de l'essence, mon ministère essaie depuis un certain temps de trouver une solution pour que tous les intervenants fassent ensemble une analyse approfondie de la situation afin que les consommateurs soient au moins parfaitement informés. Nous avons déjà réussi à certaines occasions. À d'autres, nous n'avons pas pu inciter les intervenants à se mettre d'accord sur le genre d'étude ou sur la façon de procéder. Nous poursuivons toutefois nos efforts pour essayer d'analyser à fond la situation et de révéler tous les faits afin que les Canadiens soient parfaitement informés sur les facteurs qui entrent en ligne de compte dans l'établissement des prix et sur les conséquences pour eux.

[Français]

M. Guy St-Julien: Monsieur le président, juste une petite seconde.

[Traduction]

Le président: Plus tard. Je suis heureux que vous ayez abordé le sujet, mais je veux que l'on continue à discuter de foresterie.

Allez-y, monsieur Stinson.

M. Darrel Stinson: Ma question concerne les parcs nationaux et leurs forêts. Dans bien des régions, ces forêts sont malades. Elles sont victimes d'incendies et des insectes. Nos parcs sont par conséquent plus exposés aux feux de forêt. Je me demandais si vous aviez fait des vérifications sur l'abattage sélectif des chablis.

M. Ralph Goodale: Monsieur Stinson, je demanderais à M. Hardy s'il peut faire des commentaires à ce sujet. C'est une question qui relève en partie de la compétence de Patrimoine Canada et de Parcs Canada, mais c'est Ressources naturelles Canada qui possède les compétences scientifiques dans ce domaine.

Monsieur Hardy, avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?

M. Yvan Hardy: Oui. Parcs Canada a en quelque sorte changé d'attitude au fil des ans. Au début, ce service ne s'intéressait qu'à la conservation et à la préservation. En fait, certaines de ces forêts sont devenues surannées et elles sont devenues sensibles à plusieurs insectes et maladies. Parcs Canada a modifié sa politique depuis environ un an; il crée maintenant des conditions propices aux incendies naturels qui facilitent la régénération de la forêt, comme dans le cycle naturel. Nous fournissons à ce service l'expertise dont il a besoin. Il possède en outre des ressources personnelles en matière de gestion forestière. Voilà en ce qui concerne les parcs.

En ce qui concerne les forêts en général, le SCF participe très activement à l'élaboration de nouvelles méthodes de contrôle, surtout de méthodes biologiques de lutte contre les insectes ou les maladies et des systèmes de gestion des feux de forêt, qui consistent à prédire au jour le jour où les prochains feux éclateront, à prédire le comportement d'un feu après qu'il a éclaté ou à donner l'instruction de déménager l'équipement de lutte vers telle ou telle région du pays, sachant que celle-ci est plus exposée que les autres. Par conséquent, nous avons participé activement à la recherche.

M. Ralph Goodale: Monsieur Stinson, j'ajouterais que la technologie canadienne en matière de lutte contre les feux de forêt est en demande dans le monde entier.

M. Darrel Stinson: Je le sais.

M. Ralph Goodale: Aux États-Unis, au Mexique et en Asie, ainsi qu'à la suite de la récente mission en Chine, nous avons pu constater que les Canadiens ont une excellente réputation en ce qui concerne la gestion de ce genre de problème.

• 0945

Le président: Merci.

Le tour est terminé et il nous reste encore cinq minutes. Par conséquent, je permettrai à trois personnes de poser une deuxième série de questions; elles auront environ une minute et demie chacune. Je vous demanderais d'être très brefs, tant en ce qui concerne les questions qu'en ce qui concerne les réponses.

Monsieur Reed.

M. Julian Reed: Étant donné ma paranoïa ascendante, je sais que le Canada est un chef de fil en matière de pratique d'aménagement forestier et qu'il s'efforce constamment d'améliorer la situation. Par contre, je sais aussi que plusieurs pays continuent à abattre systématiquement et sans discernement leurs forêts, et semblent trouver tout de même un marché pour leurs produits. Dans le même temps, nous sommes critiqués en Europe et bien des pressions sont exercées soudain pour que l'on cesse d'y importer des produits canadiens. J'estime que c'est exagéré.

M. Ralph Goodale: Ça l'est, monsieur Reed, et c'est une des raisons pour lesquelles nous préconisons l'adoption d'une convention internationale sur la forêt.

Si l'on remonte la filière, on peut également constater que, dans certains cas, les critiques dirigées contre le Canada servent les intérêts commerciaux de ses détracteurs et que les motifs sont parfois moins altruistes qu'il ne semble de prime abord.

Nous devons faire la promotion des intérêts du Canada en nous fondant sur des renseignements et des données scientifiques solides. Je pense que nous avons des arguments probants.

Le président: Merci.

Monsieur Canuel.

[Français]

M. René Canuel: Mon intervention sera très brève, monsieur le ministre. J'aimerais qu'on prenne note de l'injustice qu'a subie Boisaco, à Sacré-Coeur, et qu'on fasse une vérification.

A-t-on l'intention de poursuivre le programme des forêts modèles? Comme l'a indiqué mon collègue, il est très important d'investir dans nos forêts au Canada, d'autant plus qu'il y a des terres forestières dans nos circonscriptions.

Est-il vrai que le marché de la pâte est sursaturé? Certaines compagnies, particulièrement au Québec, nous disent qu'elle ne peuvent plus produire beaucoup parce qu'il y a déjà trop de pâte.

[Traduction]

Le président: M. Hardy voudrait répondre.

[Français]

M. Yvan Hardy: Monsieur Canuel, il reste encore deux bonnes années avant que nous ne procédions à l'évaluation du programme des forêts modèles, comme nous le faisons toujours pour les programmes d'une durée de cinq ans, après quoi nous décidons de continuer à la même vitesse, au ralenti ou de façon accélérée. Je puis vous dire que le programme fonctionne très bien.

M. René Canuel: Est-ce que vous en mettrez d'autres en oeuvre?

M. Yvan Hardy: Le budget prévu pour la période de cinq ans en cours est engagé en totalité. Nous le ferons peut-être lors d'un prochain exercice.

M. René Canuel: D'accord.

M. Yvan Hardy: Je crois qu'on a raison de dire qu'il y a une surcapacité mondiale de production de pâtes.

Le président: D'accord, merci.

Monsieur Godin, à vous la dernière question.

M. Yvon Godin: On a parlé de la réduction des budgets fédéraux. On n'a pas répondu à ma question relative à la surveillance. Je vous avais demandé si le gouvernement était disposé à investir davantage au niveau de la surveillance des forêts.

[Traduction]

M. Ralph Goodale: Monsieur Godin, la surveillance nécessite automatiquement un effort concerté des divers paliers de gouvernement en raison des questions de compétence. Dans le cadre de la lutte contre le déficit, tous les organismes fédéraux ont, comme vous le savez, assumé leur part de sacrifices. Ce fut le cas en ce qui concerne Ressources naturelles Canada et le Service canadien des forêts.

• 0950

Il est extrêmement important pour l'avenir de posséder une base de connaissances suffisantes sur nos ressources naturelles. Nous avons besoin de ces renseignements. Nous avons besoin d'études scientifiques. Nous avons besoin de recherche. Nous avons besoin de la nouvelle technologie et du transfert de technologie. J'ai l'intention de faire de mon mieux pour que nous disposions des outils nécessaires pour gérer convenablement le capital ressources extrêmement précieux du Canada, y compris les ressources financières.

J'ai dit au début de mon allocution que nous devions aspirer à devenir le pays le plus ingénieux au monde dans l'intendance, la mise en valeur, l'utilisation et l'exportation des ressources forestières, minérales, énergétiques et géoscientifiques. Pour atteindre cet objectif, il faut prendre les engagements financiers qui s'imposent et c'est le but que nous ne cessons de poursuivre.

M. Yvon Godin: Nous verrons bien lundi.

Le président: Monsieur Goodale, je vous remercie. Merci à vous également, messieurs.

La séance est levée.