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NRGO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATURAL RESOURCES AND GOVERNMENT OPERATIONS

COMITÉ PERMANENT DES RESSOURCES NATURELLES ET DES OPÉRATIONS GOUVERNEMENTALES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 2 mai 2000

• 1106

[Traduction]

Le président (M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.)): Messieurs, chers collègues, j'aimerais ouvrir la séance.

Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous entreprenons un examen de la gestion des forêts au Canada dans la perspective du commerce international. Je vous souhaite à tous bon retour après un bref séjour dans vos circonscriptions. Je suis également heureux de retrouver les témoins que nous recevons ce matin car ils devraient nous aider à mieux comprendre le problème et peut-être nous faire quelques suggestions.

Nous entendrons tout d'abord M. Jim Irving, président de J.D. Irving Limited, et M. Blake Brunsdon, forestier en chef du même groupe. Bienvenue à tous les deux.

Vous savez probablement comment nous procédons et bien que nous soyons en retard, nous espérons pouvoir vous laisser environ 10 minutes pour votre exposé. Vous pouvez être plus bref ou plus long mais le temps que vous utiliserez sera soustrait du temps dont nous disposerons pour dialoguer avec vous.

Donc, sans plus tarder, je vous laisse la parole. Qui commence?

M. Jim Irving (président, J.D. Irving Limited): Bonjour. Je pense que c'est Blake qui va faire un petit exposé. Nous voulions simplement vous dire que nous sommes très heureux d'être ici ce matin et que nous nous réjouissons de pouvoir répondre à vos questions.

Le président: Merci.

M. Blake Brunsdon (forestier en chef, J.D. Irving Limited): Je ferai un exposé d'environ 10 minutes et nous pourrons ensuite passer immédiatement aux questions.

Le président: Nous sommes prêts quand vous voulez.

M. Blake Brunsdon: Très bien.

[Français]

Mon français est vraiment effroyable. Je vais donc faire ma présentation en anglais. J'espère que vous allez m'excuser.

[Traduction]

Bonjour, mesdames et messieurs. Nous sommes reconnaissants d'avoir la chance de discuter du sujet de la certification forestière avec le Comité permanent des ressources naturelles et des opérations gouvernementales. La certification est une importante question d'actualité pour l'industrie forestière canadienne.

Celle-ci s'avère un outil important pour améliorer la qualité de l'aménagement forestier au Canada. Les clients demandent des produits certifiés. La certification permet de réduire au minimum les obstacles au libre-échange. Nous sommes convaincus que les gouvernements doivent y jouer un rôle pour s'assurer que les démarches de certification sont ouvertes, transparentes et encouragées par tous.

Permettez-moi de prendre quelques minutes pour parler de notre entreprise de produits forestiers. J.D. Irving Limited est une entreprise privée familiale oeuvrant dans le domaine du bois d'oeuvre depuis plus de 100 ans. Nous sommes une entreprise régionale qui exploite des terres forestières au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse et au Maine. Nous possédons 15 scieries, une usine de pâte, une papetière, une cartonnerie et plusieurs usines de tissu.

À l'échelle mondiale, J.D. Irving Limited n'est qu'une petite entreprise. Cependant, nous sommes l'un des plus grands propriétaires de terres forestières en Amérique du Nord. Nous possédons près de 1,5 million d'hectares, surtout dans les Maritimes. Nous gérons aussi près de 1 million d'hectares de terres de la Couronne au Nouveau-Brunswick.

Nous nous occupons d'aménagement forestier depuis longtemps et sommes bien connus pour nos investissements dans le reboisement, programme que M. K.C. Irving a lancé en 1957. La direction et les employés de J.D. Irving ont à coeur de bien faire les choses et sont très fiers des activités de gestion forestière de l'entreprise.

• 1110

J.D. Irving Limited a commencé à s'intéresser à la certification forestière dès 1993, quand nous furent approchés par l'un de nos plus grands clients, Home Depot. Nos recherches nous ont orientés vers le Forest Stewardship Council pour faire certifier notre district de Black Brook au nord-ouest du Nouveau-Brunswick. En 1998, après plusieurs améliorations en aménagement forestier, Black Brook devenait la deuxième forêt canadienne à être certifiée par le FSC. Encore aujourd'hui, Black Brook est la plus grande forêt certifiée FSC au Canada appartenant à une entreprise forestière.

Depuis ce temps, nous avons décidé d'implanter la certification, dont la norme le ISO 14001, sur toutes les terres que nous gérerons d'ici 2001. En mars 1999, Black Brook devenait la deuxième forêt canadienne à être certifiée par l'ISO 14001. Depuis, nos deux districts de Nouvelle-Écosse ont été certifiés. Nous souhaitons certifier selon ISO 14001 tous nos autres districts d'ici 18 mois.

L'an dernier, nous avons soumis 200 000 hectares de terres forestières au Maine, en plus de 700 000 hectares au Nouveau-Brunswick, à des vérifications FSC. Ces districts incluent Deersdale et l'une de nos licences de la Couronne. Les normes internationales du FSC furent utilisées.

En décembre de l'année dernière, des normes régionales biaisées et anti-industrie furent sanctionnées par le FSC pour toutes les Maritimes. Ces normes n'ont pas reçu l'appui nécessaire de l'industrie, des associations professionnelles et des groupements de propriétaires de boisés privés. Les gouvernements de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick sont concernés par ces normes.

J.D. Irving Limited s'est retirée du processus FSC aux Maritimes principalement à cause de ces normes inadéquates et biaisées. Nos clients ont été avertis que nous ne produirons plus de ces produits certifiés. De plus, une commission d'enquête fut mise sur pied à la suite de nombreuses plaintes de différentes parties concernant le processus FSC.

En tant que membre du FSC, j'ai personnellement déposé une plainte au Conseil du FSC relativement à leur décision d'approuver les normes régionales des Maritimes. Mes points majeurs sont que le groupe qui a écrit les normes régionales ne représentait pas bien l'industrie; que les normes approuvées n'ont pas le support de la plupart des groupes concernés; que beaucoup sont d'avis que les normes n'ont pas de base scientifique, que les normes sont beaucoup plus sévères et ne sont pas semblables à celles d'autres régions.

Mon appel fut supporté par la plupart des autres entreprises de la région ainsi que par d'autres parties concernées au Canada et ailleurs. Le document que j'ai déposé présente plusieurs exemples et explique mes soucis. Plusieurs organismes, dont certains groupes environnementaux, ont formellement fait part de leurs inquiétudes à l'égard de ces normes régionales. Le Conseil international du FSC a aussi reconnu de graves lacunes dans le développement des normes pour les Maritimes. Il a insisté pour que le comité régional se restructure et élargisse sa représentation.

Autant nous désapprouvons les normes régionales des Maritimes, autant nous sommes impressionnés par le processus au nord-est des États-Unis. Leur processus est équitable et ouvert, les intérêts y sont bien représentés et les normes sont établies sur une base scientifique. Nous avons décidé de poursuivre nos démarches de certification FSC pour nos terres américaines. Nous devrions pouvoir faire une annonce publique à cet effet d'ici six semaines.

• 1115

Depuis un an, nous examinons de près le processus sustainable forestry initiative (SFI) de l'American Forest and Paper Association. Nous croyons que ce standard a du potentiel à devenir important. D'ici deux ans, nous espérons soumettre nos terres forestières à ce système.

En 1998, nous avons exploré la possibilité de certifier nos terres forestières avec la norme canadienne, CSA. À l'époque, nos efforts visaient surtout le FSC et ISO 14001, et c'est pourquoi nous avons jugé bon de reconsidérer la norme CSA plus tard.

La certification fut une expérience enrichissante pour J.D. Irving Limited. Les vérifications et les discussions nous ont aidés à concentrer sur les problèmes clés et à pratiquer l'amélioration continue, en plus d'agrandir notre base de connaissances.

Dans le cadre de la certification de Black Brook, nous avons mis sur pied un Comité consultatif scientifique qui a pour rôle d'identifier les lacunes de connaissances scientifiques au niveau écologique, de biodiversité et d'habitat faunique. Un groupe de sept scientifiques, reconnus au niveau international, siège à ce comité.

On peut dire que franchement la certification forestière nous a permis d'améliorer la qualité de notre aménagement forestier. Nous avons été reconnus publiquement par le Fonds mondial pour la nature (WWF) pour notre avant-gardisme au niveau de la protection des écosystèmes forestiers. L'année dernière, Home Depot nous a remis son premier prix annuel de partenaire environnemental.

Je voudrais maintenant prendre une minute pour vous présenter notre point de vue sur certains éléments importants de la certification forestière.

Tout d'abord, pourquoi notre société s'intéresse-t-elle à la certification forestière? Simplement parce que certains de nos clients demandent des produits forestiers. Cela nous intéresse donc. La certification par des tierces parties assure au public et aux clients que la foresterie est pratiquée de façon durable, socialement et environnementalement acceptable. Ce processus est crédible et nous croyons que la certification peut être une manière progressive de prévenir la réglementation excessive.

Pourquoi avons-nous initialement considéré le FSC? Les normes du Forest Stewardship Council furent sûrement le premier choix de nos clients à cause de leur crédibilité chez les groupes environnementaux. Les autres systèmes aujourd'hui manquent aussi l'assurance aux clients d'un suivi total de la chaîne du produit (chain of custody). C'est ce que garantit ce système. La plupart des autres programmes de certification ne comportent pas de véritables systèmes d'étiquetage des produits.

Sommes-nous préoccupés par le Forest Stewardship Council? Absolument. Je l'ai déjà dit. Nous sommes très inquiets de la direction du FSC au Canada et au bureau international. Même si le FSC possède un processus théoriquement impeccable. Notre expérience démontre qu'il n'est pas suivi dans le cas des Maritimes quand un groupe d'intérêts spéciaux s'est emparé du processus. L'ouverture d'esprit, la transparence, la représentation adéquate et le consensus sont des vertus propres au FSC. Malheureusement, ce n'est pas le cas ici. Nous pouvons citer de nombreux exemples où on a délibérément piétiné ces valeurs importantes.

Ceci étant dit, nous voulons toujours supporter le processus documenté du FSC et nous espérons que celui-ci pourra résoudre le manque de conformité à ses propres procédures.

Est-ce que la certification forestière a une incidence sur le marché des produits forestiers? La certification forestière est certainement une force qui influence les marchés. Toutefois, avec l'exception de certains produits de caractère particulier, il n'y a aucun prix fort pour les produits forestiers certifiés. Plusieurs clients et marchés cherchent des fournisseurs de produits certifiés. Nous sommes vraiment préoccupés par le manque d'uniformité des normes régionales du FSC, qui va à coup sûr créer des entraves au commerce.

• 1120

La grande question est à mon avis de savoir si le gouvernement a un rôle à jouer vis-à-vis de la certification forestière. Nous croyons qu'il y a un rôle défini et vital pour le gouvernement vis-à-vis de la certification forestière. Étant un des plus grands propriétaires de terres forestières, le gouvernement est certainement un intervenant majeur.

Le gouvernement devrait intervenir pour assurer l'uniformité des normes de certification locales. Il faut des normes cohérentes aux niveaux régional, national et international. Le gouvernement devrait agir comme «chien de garde» impartial pour assurer que les normes de la certification forestière sont basées sur la science, et que les décisions sont ouvertes et transparentes. Le gouvernement ne devrait pas avoir peur de s'affirmer lorsque les normes de certification sont incompatibles avec les règlements et politiques du gouvernement. Les gouvernements ne devraient pas accepter ou avaliser un seul programme de certification de la forêt.

Nous sommes prêts à répondre à toutes les questions que les membres de votre comité pourraient avoir.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Brunsdon. Vous avez assez bien respecté les limites de temps.

Je me demande seulement comment vous pouvez dire que le processus d'élaboration des décisions du gouvernement est à la fois ouvert et transparent. En tout cas, je voulais dire cela avant l'opposition.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): J'en suis ravi.

Le président: Je voulais vous lancer. Je suppose que vous êtes le premier à poser des questions. C'est cela, Werner?

Des voix: Oh, oh!

Le président: Monsieur Schmidt, allez-y.

M. Werner Schmidt: Merci, monsieur le président, et merci messieurs.

Je dois vous dire que vous nous avez fait probablement là la déclaration la plus franche qu'ait entendue le comité au sujet de ce système. Nous avons déjà entendu plusieurs témoins mais je tiens à vous féliciter.

M. Blake Brunsdon: Nous sommes en plein dedans.

M. Werner Schmidt: Même peut-être un peu plus.

Je voudrais vous interroger sur une des questions que nous nous sommes posées ici et à propos de laquelle nous n'avons toujours pas eu de réponse. À quelle science fait-on allusion? Il est très joli de dire qu'il faut que cela soit fondé sur des données scientifiques, et je suis bien d'accord, mais qu'est-ce que cette science?

M. Blake Brunsdon: C'est la science de la gestion forestière, à mon avis, et la gestion forestière, c'est un peu art et science. Ce que nous voulons dire en fait c'est qu'il faut parvenir à équilibrer la responsabilité sociale et les considérations environnementales. On débat beaucoup de questions scientifiques. Une des critiques que je ferais du FSC est qu'il semble animé par des considérations populaires ou émotives et non pas scientifiques.

M. Jim Irving: J'ajouterais quelque chose à cela.

Lorsque nous parlons de science, nous entendons vraiment science. Nous avons un comité d'experts composé d'une douzaine d'ex-doyens ou professeurs ou spécialistes dans leur domaine de gestion des forêts—poisson, faune, habitat, flore, faune et tout ce qui entre dans la gestion d'un bout de terrain forestier exploitable—de façon à ce que l'on puisse préserver la nature et l'exploitation pour l'avenir, non seulement aujourd'hui mais dans 25 ans. C'est donc l'incidence à long terme de l'exploitation qui nous intéresse.

Il ne s'agit pas de sentiments dans ce domaine parce que c'est trop vaste et varié. Tout le monde à un avis.

M. Werner Schmidt: C'est exactement ce que je voulais dire. Si on mettait 25 spécialistes des forêts dans une salle, cela nous donnerait-il 25 sciences différentes ou s'entendraient-ils sur une science?

M. Blake Brunsdon: Je pense qu'ils tendraient à se mettre d'accord. C'est un peu comme les plombiers qui sont d'accord sur un bon code de plomberie alors que les plombiers et le grand public ne sont pas forcément d'accord là-dessus.

M. Werner Schmidt: Il me semble qu'il y a également des questions d'intérêts financiers.

M. Blake Brunsdon: Tout à fait.

M. Werner Schmidt: Est-ce que les experts forestiers et les propriétaires de terrains forestiers pourraient s'entendre sur le plan scientifique?

M. Blake Brunsdon: Absolument. Nous voulons ne pas nous tromper. À long terme, nous ne pouvons nous permettre de nous tromper. Nous ne pouvons compromettre l'intégrité écologique dans la gestion des forêts parce que nous y perdrions à long terme. Donc, plus vite nous sommes en possession des connaissances nécessaires, mieux c'est.

M. Werner Schmidt: Mais c'est là précisément le problème, n'est-ce pas? Il me semble qu'on ne s'entend pas. Le fait même que vous deviez critiquer le FSC comme vous venez de le faire m'indique qu'on ne s'entend pas sur l'aspect scientifique, qu'il n'y a pas d'entente entre les propriétaires et les chercheurs.

• 1125

Ce n'est peut-être pas là où se situe la difficulté. Je n'en suis pas sûr. La difficulté doit exister quelque part, parce que j'ai été témoin de certains arguments scientifiques—soi-disant scientifiques—qui ont servi à élaborer l'entente environnementale de Kyoto, c'est-à-dire une entente internationale, et ces arguments scientifiques sont certainement contestables. Avons-nous affaire au même type d'arguments scientifiques, qui peuvent fluctuer en fonction de l'opinion publique?

M. Blake Brunsdon: Je pense que nous devons faire de notre mieux pour continuer à travailler sur une base scientifique. Il s'agit d'un continuum. Ce n'est ni blanc, ni noir.

M. Werner Schmidt: Dans ce cas comment pouvez-vous vraiment être sûrs de vos données scientifiques?

M. Blake Brunsdon: Il faut y travailler sans relâche.

M. Jim Irving: Si vous n'y voyez pas d'objection, monsieur le président, j'aimerais ajouter quelque chose.

La science a évolué. Nous faisons de reboisement, comme famille et comme compagnie, depuis plus longtemps que toute organisation privée au Canada. Au fil des ans, notre technologie et nos méthodes ont changé au fur et à mesure que nos connaissances se sont améliorées et grâce à l'utilisation des meilleures méthodes scientifiques disponibles. C'est ainsi que notre compagnie a procédé sur nos terrains forestiers exploitables, et notre démarche est restée la même.

Il ne fait aucun doute qu'il y a une grande divergence d'opinions à propos de la bonne façon de procéder. En général, les membres de l'industrie qui ont consacré leur carrière à l'étude de la faune ou de la biologie ou d'un autre aspect de cette question, finiront par s'entendre de façon générale.

Nos terres forestières sont certifiées conformément aux règlements en vigueur aux États-Unis et conformément aux règlements en vigueur en Europe du Nord. Ces règlements ne sont pas considérés satisfaisants par l'instance locale du FSC qui exige une norme beaucoup plus élevée. Nous sommes partis du principe que nous obtiendrions une certification équivalente à celle en vigueur aux États-Unis et en Europe du Nord. Nous avons voulu établir ce point de référence. Au fur et à mesure que la technologie évoluera et que le temps passera, on haussera ce point de référence et nous serons obligés de nous adapter à l'évolution de la technologie. Cela ne nous dérange pas à condition qu'on procède de façon très méthodique et logique.

M. Blake Brunsdon: Oui, et c'est le problème en ce qui concerne la certification des forêts dans les Maritimes. Nous possédons des terrains dans l'État du Maine et nous possédons des terrains dans les Maritimes. Tous ces produits sont destinés aux mêmes clients du littoral est, et ces derniers ne peuvent pas faire la différence entre le bois provenant du Maine et notre bois provenant du Nouveau-Brunswick. Le fait est que nous parvenons à satisfaire aux normes américaines et aux normes internationales du FSC, mais dans les Maritimes, nous ne pouvons pas apposer cette étiquette sur notre produit parce que nous n'arrivons pas à répondre à la norme car il s'agit d'une norme à laquelle personne ne veut vraiment satisfaire.

Le président: Je vous remercie, monsieur Brunsdon.

Monsieur St. Denis.

M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je tiens à vous remercier tous d'être ici. Excusez ma voix.

Comme l'a dit M. Schmidt, les observations que nous avons entendues ce matin ont été très intéressantes et très pertinentes. De toute évidence, quel que soit le processus qui a été suivi pour établir au moins la première version des normes régionales des Maritimes... J'en déduis d'après vos commentaires que l'instance internationale du FSC a ordonné qu'elles soient remaniées. Pouvez-vous nous donner quelques exemples du genre de choses que prévoyaient les normes des Maritimes qui n'auraient pas été prévues dans les normes en vigueur dans le Maine, par exemple, ou dans toute autre région où il existe une norme régionale acceptable? Il serait utile d'avoir quelques précisions à cet égard.

M. Blake Brunsdon: Tout d'abord, je tiens à préciser que le groupe international a ordonné au groupe des Maritimes de se restructurer. Il continue d'appuyer les normes en vigueur aux Maritimes. Cette commission d'enquête peut formuler des recommandations différentes, mais aujourd'hui le FSC approuve ces normes.

Ce qui nous préoccupe surtout à propos de ces normes, c'est l'absence d'ouverture du processus et le fait que les intéressés légitimes qui auraient dû être présents à la table se sont vu priver de la possibilité de participer au processus. L'industrie forestière n'a pas pu choisir ses propres représentants devant faire partie du comité.

Pour répondre à votre question concernant certains détails...

M. Brent St. Denis: Disons qu'on peut apercevoir du même coup d'oeil un arbre qui se trouve dans l'État du Maine et un autre qui se trouve au Nouveau-Brunswick. De toute évidence, la norme régionale diffère pour chacune de ces forêts.

M. Blake Brunsdon: Il existe une centaine de critères locaux et ce que je reproche aux critères locaux, c'est qu'une bonne partie ne reposent pas sur une base scientifique pour le calcul du niveau de récolte autorisé. Les conditions de récolte qui sont acceptables et celles qui ne le sont pas n'ont pas de fondement scientifique dans les Maritimes et diffèrent très nettement de celles en vigueur aux États-Unis.

• 1130

Il ne fait aucun doute que l'utilisation des pesticides est un grave problème. Dans le nord-est des États-Unis, ces normes en prévoient une utilisation sage et prudente, et exigent qu'on envisage d'autres solutions avant de recourir aux pesticides. Dans les Maritimes, les normes interdisent absolument l'utilisation des pesticides.

Dans le nord-est, nous plantons une variété particulière appelée l'épinette de Norvège. C'est un arbre qui pousse très vite et qui présente de nombreuses caractéristiques sylvicoles semblables à l'épinette blanche, mais il ne s'agit pas d'une espèce indigène. Elle pousse un peu plus vite que l'épinette blanche mais occupe le même type d'habitat. Selon les normes en vigueur dans le nord-est, il n'y a aucun problème à planter de l'épinette de Norvège. Selon les normes en vigueur aux Maritimes, il est interdit de planter des espèces qui ne sont pas indigènes, c'est-à-dire originaires de la région.

M. Brent St. Denis: Donc, si nous posions la question aux FSC... Nous devrions peut-être les inviter de nouveau à comparaître à un certain moment parce que vous êtes les premiers à avoir signalé cette absence d'uniformité au sein de leur propre organisation. Lorsque l'instance internationale du FSC examine les normes en vigueur dans les Maritimes, est-ce qu'elle n'examinerait pas automatiquement les normes en vigueur dans la région voisine? Les forêts sont contiguës, donc elles doivent présenter des similitudes. Pourquoi n'essaie-t-on pas au moins de les comparer et de les harmoniser à un certain niveau? Je suppose que c'est l'argument que vous faites valoir dans votre appel devant l'instance internationale.

M. Blake Brunsdon: C'est exactement le problème: il faut qu'il y ait uniformité et cohérence. Le FSC doit être un logo qui est reconnu à l'échelle internationale et qui signifie la même chose pour les clients, qu'ils se trouvent à Boston ou à Londres, et le FSC ne s'est pas suffisamment soucié d'assurer l'uniformité entre les normes régionales. Cela constituera un obstacle au commerce et nous empêchera d'accéder à certains marchés.

M. Jim Irving: C'est exact. Pour revenir à votre question, pourquoi? Pourquoi ces normes varient-elles? C'est là où nous revenons aux faits scientifiques. En fait, il s'agit aujourd'hui de politicaillerie locale. Cela n'a rien à voir avec ce qui se passe au niveau du sol ou des forêts ou ce qu'il faudrait faire à propos de la faune ou quoi que ce soit d'autre. Il s'agit de la politique de l'environnement, pas de la science de l'environnement. C'est ce qui est en train de se passer; c'est très fondamental, très local.

Bien que nous ne soyons qu'un petit joueur sur la scène mondiale, nous sommes un important joueur dans la région. Cela suscite certaines critiques, peut-être, et je crois que nous en sommes la principale cible. Je pense que si nous étions une grande multinationale quelque part à l'étranger ayant un siège social à Toronto ou à New York, et que nous tâchions d'agir ainsi, nous n'aurions même pas ce genre de discussion. Je pense que c'est une question très locale et régionale plutôt qu'une importante question environnementale.

M. Brent St. Denis: Je trouve très intéressant d'obtenir ce genre de précisions, parce que vous fonctionnez effectivement des deux côtés de la frontière qui sépare le Nouveau-Brunswick du Maine.

Mais je suppose que vous avez aussi des concurrents, du côté du Maine. Ils ont, du moins dans cette situation, un certain avantage, parce qu'ils peuvent obtenir la certification du FSC pour leur bois du côté du Maine. Dans votre cas, il est pratiquement impossible pour vous d'obtenir cette certification de votre côté de la frontière à cause des normes régionales en vigueur dans les Maritimes. Il s'agit donc d'une certaine façon d'un obstacle au commerce.

M. Jim Irving: Ce qui est dommage, c'est que sur le plan commercial, nous avons établi le marché pour le produit. Nous sommes les premiers en Amérique du Nord à avoir produit une quantité commerciale de 2 x 4 pour la vente au détail pour Home Depot. Nous avons établi ce marché. Nous avons du succès au niveau de l'aménagement forestier. Nous sommes en mesure d'usiner le produit. Nous en assumons la distribution au détail. Toutes ces activités satisfont aux normes environnementales les plus rigoureuses au monde.

Une fois que nous avons établi cela, alors, au niveau local, on se met à clamer que ces normes ne sont pas suffisamment rigoureuses et on cause un tel chambardement que nous devons retirer le produit et dire à Home Depot, non, nous sommes désolés. Nous sommes obligés de dire au plus important acheteur de matériaux de construction au monde, non nous sommes désolés, nous ne pouvons pas vous fournir le produit à l'heure actuelle à cause d'un problème local. C'est une situation extrêmement déplorable.

Le président: Monsieur Irving et monsieur Brunsdon, j'aimerais avoir certains éclaircissements. Nous avons entendu le témoignage ici des représentants locaux et des représentants nationaux du FSC. Si je me souviens bien, les représentants locaux ont indiqué que le processus était ouvert à tous. Je me trompe peut-être, mais je suis assez sûr que le compte rendu indiquera qu'ils considéraient que tous les intervenants avaient participé au processus, qu'il s'agissait d'un processus aussi ouvert et transparent que l'exige leur mandat. Ils ont aussi indiqué—si je me souviens bien—qu'ils s'étaient conformés de près aux principes scientifiques.

• 1135

J'ai donc écouté attentivement lorsque M. Schmidt et M. St. Denis ont tous les deux essayé de comprendre ce que l'on entend par les principes scientifiques—et je ne suis pas sûr d'avoir bien compris de quoi il s'agit. J'entends ce que vous nous dites, mais j'ai entendu les représentants locaux du FSC dirent pratiquement exactement la même chose, mais sous un angle différent. Ils ont dit reconnaître les efforts de l'industrie—en particulier la vôtre—et qu'ils essaient de s'assurer que l'industrie continue effectivement à être rentable.

M. Jim Irving: Continue à...?

Le président: Continue à être rentable. Personne ne s'intéressait—je ne suis pas sûr que ce soit exactement les mots utilisés—à ce que quelqu'un expédie du bois; ils tenaient à ce que vous puissiez prospérer dans tous les secteurs de l'industrie.

Je ne suis pas sûr si mes collègues ont autant de difficulté que moi, je l'avoue, à comprendre la situation, à savoir, vous convenez que les principes scientifiques sont d'une grande importance et ils disent qu'ils observent les principes scientifiques; ils disent qu'ils ont assuré la participation de tous les intéressés et vous dites que vous voulez faire partie du processus du FSC parce que tout le monde y participe. Maintenant, comme nous l'avons déjà entendu, nous entendons dire qu'il y a une certaine absence de transparence. Mais vous êtes l'un des intervenants dans ce système.

M. Blake Brunsdon: Puis-je répondre à cette question?

Le président: Bien sûr. Je vous en prie.

M. Blake Brunsdon: Vous avez parlé à un membre du FSC des Maritimes.

Le président: Ils ont été suivis immédiatement d'un représentant national du FSC.

M. Blake Brunsdon: Oh, très bien.

Le président: Mais vous avez raison, oui.

M. Blake Brunsdon: Je suis membre du FSC dans la région et je fais partie du comité local du FSC, donc je fais partie du processus, et je peux vous dire que d'après mon expérience, ce processus n'est ni ouvert ni représentatif.

La raison pour laquelle je le dis—il y a une foule de raisons—c'est que depuis que le comité a été restructuré en 1998, de nombreuses entreprises et de nombreuses associations de l'industrie ont demandé à en faire partie et leur demande a été rejetée. En fait, on n'a même pas répondu à leurs lettres. Le ministre des Ressources naturelles et de l'Énergie du Nouveau-Brunswick a demandé à être représenté au comité de manière à pouvoir participer au processus. On n'a même pas répondu à sa lettre. Le ministère des Ressources naturelles de la Nouvelle-Écosse a aussi demandé à participer au processus. Il n'a jamais reçu de réponse à sa lettre.

J'ai protesté haut et fort contre l'insuffisance de la représentation de l'industrie au sein de ce comité et j'ai demandé que la Nova Scotia Forest Products Association soit autorisée à désigner un représentant pour qu'il siège au comité. Le comité a fini par convenir que des représentants de l'industrie du bois de sciage devraient siéger au comité.

Au lieu de permettre à l'organisation de l'industrie de déléguer un représentant, le comité a décidé de les choisir lui-même. Donc ce comité de 19 a décidé de recruter lui-même ceux qui allaient représenter l'industrie du bois de sciage dans les Maritimes au sein du comité. Ce groupe de 19 a choisi qui allait représenter l'industrie. L'industrie a été privée de la possibilité de le faire. Le vote était de 18 contre 1. J'étais celui qui était contre. Il ne s'agit pas d'un processus ouvert, et il n'est ni représentatif, ni transparent.

L'une des conditions à remplir avant l'approbation de ces normes—le groupe international a insisté là-dessus—c'est qu'il y ait un soutien généralisé de la part des intervenants pour les normes des Maritimes. Le fait est qu'ils ne sont pas arrivés à établir l'existence d'un soutien généralisé de la part des intervenants.

Le groupe international a chargé un expert-conseil, un détenteur de doctorat de l'Université Dalhousie, de déterminer si ces normes locales bénéficiaient réellement d'un vaste appui de la part des intervenants sur certaines questions clés. Ce détenteur de doctorat a fait de la recherche et a conclu qu'il était clair que ces normes ne faisaient pas l'objet d'un soutien généralisé de la part des principaux intéressés, ce qui est un principe fondamental d'une norme du FSC.

J'ai appris que le FSC avait commandé une étude et j'ai demandé au groupe international du FSC si je pouvais avoir un exemplaire du rapport—car c'est une organisation transparente. Au début on m'a dit qu'il n'était pas sûr que ce rapport existe. J'ai réitéré ma demande. Je leur ai dit que je savais que ce rapport existait. On m'a dit qu'il s'agissait d'un rapport confidentiel destiné exclusivement au directeur exécutif et que ce rapport ne serait pas rendu public. J'ai protesté, et d'autres intervenants du secteur de l'environnement ont manifesté eux aussi leur mécontentement et ont déclaré, si nous sommes une organisation transparente, nous devrions communiquer cette information. J'ai finalement obtenu un exemplaire du rapport le 15 janvier.

• 1140

M. Jim Irving: Ce qui confirme...

M. Blake Brunsdon: Ce qui confirme que le processus n'est pas transparent.

Il existe de graves conflits d'intérêts au sein du FSC. Je ne veux pas être rabat-joie car je crois que le processus du FSC est un bon processus. Je dis qu'il s'agit d'une organisation qui traverse une crise de croissance, et qu'il y a certaines questions de leadership et de conflits d'intérêts qui doivent être réglées pour que la norme FSC soit réellement une norme de qualité. Je crois qu'elle peut le devenir.

Le président: J'ai d'autres questions. Je les poserai un peu plus tard. Je veux maintenant céder la parole à M. Cardin.

[Français]

M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ): Messieurs, bonjour. Il me fait plaisir de vous rencontrer.

Dans la dernière partie de votre intervention, vous disiez que les diverses normes, qu'il s'agisse de FSC, CSA ou ISO 14001, se ressemblent au niveau des objectifs, mais qu'il peut y avoir certains critères. C'est un peu à cela que je voulais en venir. Quand M. St. Denis vous a posé une question sur les critères régionaux, vous avez dit qu'il y avait des centaines de critères régionaux qui pouvaient s'appliquer en plus.

Vous avez parlé plus tôt des conflits d'intérêts. Ne s'agit-il pas tout simplement d'une transposition? Sur le marché, il y a des concurrents, des gens de l'industrie forestière et autres. Il y a des concurrents, mais ceux-ci se retrouvent, à un moment ou à un autre, sur un groupe de normalisation. Donc, ils transposent un peu leur compétitivité dans ces groupes de normalisation. À ce moment-là, à la limite, on n'en sortira pas. Selon les intérêts d'un individu, d'un groupe ou d'une grosse entreprise, on va peut-être se retrouver avec une norme plutôt qu'une autre. La concurrence au niveau du marché et des entreprises se répète indirectement au niveau des normes. Donc, votre recommandation est que le gouvernement intervienne et statue sur les normes. Est-ce là ce que vous dites?

M. Blake Brunsdon: Oui. Pour moi, le gouvernement a un grand rôle à jouer pour garder les normes et s'assurer qu'elles sont basées sur la science et qu'elles sont cohérentes d'une région à l'autre. Je pense que c'est le grand rôle du gouvernement.

Aux États-Unis, le SFI s'en est chargé et a créé un comité de scientifiques pour évaluer toutes les normes régionales afin de s'assurer qu'elles sont toutes basées sur la science, mais jusqu'ici, au Canada, on n'a pas encore fait cela. Pour moi, c'est un grand besoin. Les normes doivent le faire elles-mêmes et si elles ne le font pas, le gouvernement doit le faire.

M. Serge Cardin: Je reviens encore à la concurrence sur le marché. On a rencontré des représentants de Home Depot et l'un d'entre eux faisait partie de FSC. Il nous disait que vous étiez effectivement un fournisseur important et que vous aviez un produit qui respectait les normes, mais que, compte tenu que vous aurez peut-être la possibilité de changer pour la norme ISO 14001 avec un tel client, vous avez, vous aussi, des intérêts importants. Est-ce que ces intérêts importants ne finissent pas par influencer parfois un peu les normes à la baisse? Dans un autre sens, peut-être que cela devient en quelque sorte une barrière non tarifaire au niveau mondial.

Alors, on a un problème au niveau régional, au Québec et dans les Maritimes, et on a un problème aussi au niveau du Canada, puis au niveau de l'Amérique et enfin au niveau mondial. Donc, il y a une guerre de normes qui se fait selon les intérêts des grandes compagnies.

• 1145

M. Blake Brunsdon: C'est une grande préoccupation pour nous et on s'intéresse beaucoup au système SFI qui, aux États-Unis, a apporté des changements pour le mieux. Cela offre un meilleur choix aux clients. Avoir une seule norme, ce n'est pas bon du tout pour les affaires.

M. Serge Cardin: Mais à un certain moment, étant donné que les marchés sont mondiaux, est-ce qu'il va falloir finir par avoir aussi une norme qui s'applique à l'ensemble de l'industrie forestière? Après cela, qu'on le veuille ou non, il est certain que dans certaines régions, ce sera différent. Il peut y avoir des modalités différentes, mais globalement, il devrait y avoir aussi une norme au niveau mondial.

M. Jim Irving: La chose principale, c'est que la norme soit toujours basée sur la science. Ainsi, nous aurons toujours notre base. La science peut changer et la base peut progresser, mais le problème dans les Maritimes, c'est que ce n'est pas de la science. Nous avons la même base, le même règlement dans l'État du Maine, aux États-Unis, mais nous n'avons aucun problème à suivre les règlements dans notre opération forestière là-bas.

M. Blake Brunsdon: Pas du tout.

M. Jim Irving: Pas du tout. Mais quand on arrive juste de l'autre côté de la rivière, à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick, ça ne marche pas du tout. C'est parce que les normes sont influencées davantage par la politique que par la science. Je comprends que les représentants ici ont dit qu'ils se sont basés sur la science, mais je dois en demander la preuve. Je dois demander de quelle science il s'agit, parce que nous avons dépensé plusieurs millions de dollars pour créer la base d'information et de science, pour faire avancer notre cause et pour vérifier si tout ce qui est fait dans la forêt est correct.

M. Blake Brunsdon: On a fait des changements. On a fait des grands changements, mais des changements qui sont basés sur la science. Quand j'ai commencé à travailler pour cette compagnie, il y a 20 ans, l'aménagement forestier consistait à s'assurer de ne pas manquer de bois. Ce n'était pas plus compliqué que cela. Maintenant, on essaie de pratiquer un aménagement forestier écologique afin que toutes les espèces puissent en profiter. C'est un grand changement, mais c'est un changement basé sur la science.

Dire qu'on va bûcher tout notre bois avec des chevaux, ce n'est pas scientifique. On dit qu'on n'a pas le droit de faire des coupes à blanc. Il faut savoir que la coupe à blanc est une technique basée sur la science dans certains endroits désertiques. Ce n'est pas bon pour tous les endroits, mais c'est un système qui est basé sur la science.

Le président: Merci, monsieur Brunsdon.

Monsieur Bélair.

[Traduction]

M. Réginald Bélair (Timmins—Baie-James, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

En ce qui concerne la certification, vous avez mentionné il y a un instant que vous aviez certains problèmes à l'échelle internationale, et vous avez parlé de Home Depot aux États-Unis. Est-ce le seul pays où vous avez eu des problèmes, ou vendez-vous certains de vos produits dans d'autres pays?

M. Jim Irving: Essentiellement, nos marchés généraux sont les États-Unis et l'Europe du Nord. Nous avons d'autres marchés, mais nos principaux marchés sont les États-Unis et l'Europe du Nord. Nous avons commencé à travailler avec Home Depot parce qu'il y a un certain temps ils nous ont consultés au sujet de la certification. Nous avons été les premiers à lancer cette procédure. Il s'agit d'un important client, et à sa demande nous avons lancé cette procédure auprès du FSC et nous avons mis ce mécanisme en place. Mais nous avons aussi des gens, Kimberly-Clark, Procter & Gamble, et d'autres noms bien connus du secteur de la consommation qui ont dit oui, cela nous intéresse, ou nous voulons essayer d'instaurer ce mécanisme, et ainsi de suite. Pour le Canada, dans la mesure où nous possédons la capacité technique nous permettant de le faire, c'est une bonne stratégie de commercialisation.

M. Réginald Bélair: Donc, est-ce que J.D. Irving vend à Home Depot...

M. Jim Irving: Oui.

M. Réginald Bélair: ...ou achète-t-il votre produit, devrais-je plutôt dire?

M. Jim Irving: Oui, effectivement. C'est une bonne chose qu'il le fasse parce que...

M. Réginald Bélair: Vous risqueriez de perdre votre chemise.

M. Jim Irving: Oui. Peut-être plus que ma chemise.

Il s'agit d'un important client.

M. Réginald Bélair: Comment s'est effectuée la transition étant donné que vous n'avez plus votre certification FSC?

M. Jim Irving: Il n'y a pas d'approvisionnement parce que les normes sont très difficiles à respecter. Indépendamment du problème que nous avons dans la région atlantique du Canada, les normes FSC aux États-Unis sont des normes difficiles pour l'industrie à l'heure actuelle. Les normes en vigueur dans les Maritimes sont extrêmement rigoureuses. Nous nous conformons aux normes en vigueur aux États-Unis donc nous pouvons avoir le produit, mais à ma connaissance, aucune autre société de pâtes et papiers n'a un produit certifié en Amérique du Nord de cette ampleur—ces types de produits.

• 1150

M. Réginald Bélair: J'aimerais passer à un autre sujet. Je suis sûr que vous savez que Greenpeace et certaines autres organisations écologiques ont lancé une campagne mondiale destinée à discréditer les produits forestiers canadiens. Vous a-t-on demandé de quelque façon que ce soit de contribuer au financement d'une contre-offensive?

M. Jim Irving: Une contre-offensive?

M. Réginald Bélair: Oui, pour contrer les agissements de Greenpeace.

M. Blake Brunsdon: Pour répondre à votre question, non, mais en tant que forestiers professionnels nous prenons publiquement position sur ces questions. Nous avons décidé de ne plus nous taire. Lorsque les médias rapportent des choses qui sont inexactes, nous les corrigeons, mais il n'y a pas de campagne active en cours.

M. Réginald Bélair: Une campagne a été lancée il y a un certain temps en Europe du Nord. Vous savez que Greenpeace est très actif en Europe centrale et en Europe du Nord. N'êtes-vous pas très inquiets?

M. Jim Irving: Vous voulez dire si nous sommes très inquiets au sujet de ce qu'ils sont en train de faire?

M. Réginald Bélair: Par leur campagne.

M. Jim Irving: Ce qu'ils sont en train de faire est terrible. Je trouve terrible que l'on sabote les marchés du produit canadien. Peu importe qui en est responsable, parce que comme pays et comme nation, vous perdez vos marchés; vous perdez tout ce que vous possédez. Je considère que ceux qui se livrent à ce genre d'agissements sont des êtres lamentables parce qu'ils se trouvent à saboter l'économie.

Nous ne vivons pas dans un grand pays, et comme nous sommes dispersés, nous devons nous occuper avec soin des actifs que nous possédons. Nous devrions avoir les normes forestières les plus rigoureuses au pays, au monde, faire du bon travail et vendre nos produits en fonction de ces critères. Mais nous devrions aussi nous en tenir aux principes et arguments scientifiques parce qu'il est impossible de composer avec toute l'émotivité qui existe à l'heure actuelle. Cela ne fonctionne pas. Ce dont nous avons besoin, c'est d'un leadership efficace et solide. On n'y parviendra pas avec un leadership faible et indécis comme celui que nous avons constaté de la part de certains représentants du FSC.

Le président: Êtes-vous en train de parler du leadership du gouvernement, monsieur Irving?

M. Jim Irving: Il est toujours bon d'avoir un leadership solide dans quelque secteur que ce soit, privé ou public.

Le président: Monsieur Bélair, avez-vous terminé?

M. Réginald Bélair: Mis à part votre comparution devant le comité aujourd'hui, le gouvernement du Canada vous a-t-il déjà consultés sur les mesures à prendre?

M. Blake Brunsdon: Le printemps dernier, j'ai pris la parole devant un comité du Conseil canadien des ministres des forêts pour lui indiquer où nous en étions avec la certification des forêts. Mais il ne s'agissait certainement pas de conseils; il s'agissait simplement de leur indiquer où nous en étions.

M. Réginald Bélair: Étiez-vous déjà aux prises avec vos problèmes concernant la certification FSC?

M. Blake Brunsdon: Oui. Nous en parlons depuis 1996, lorsque le comité régional a été mis sur pied.

Ce qui me scandalise vraiment, c'est que les normes aient été approuvées malgré toutes les lacunes du processus, parce que j'ai toujours considéré que le processus du FSC privilégiait l'appui généralisé des intéressés, une représentation ouverte et une prise de décision par consensus. Je considérais qu'il s'agissait d'éléments positifs du processus et qu'au bout du compte, ce processus s'imposerait.

J'ai été scandalisé, comme bien d'autres intervenants, lorsque les normes ont été approuvées Noël dernier. Dans les milieux environnementaux, bien d'autres intéressés ont été scandalisés car de toute évidence l'instance internationale du FSC a enfreint ses propres règles en approuvant ces normes locales.

Le président: Je vous remercie.

[Français]

Monsieur Godin.

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Premièrement, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue. On parlait de la certification et on parlait en même temps de la responsabilité sociale, de la responsabilité envers l'environnement, etc. Mais il n'y a pas que votre compagnie dans les Maritimes. Il y a la Stone, Fraser, NBIP, et Miramichi Pulp & Paper.

• 1155

Ensuite, vous parliez de la façon dont l'industrie pourrait nommer ses représentants au comité de la FSC. Quelle sorte de système auriez-vous dans l'industrie? Est-ce qu'il y aurait un représentant de chaque industrie ou est-ce que l'industrie elle-même aurait une association que vous choisiriez pour travailler là?

M. Blake Brunsdon: Le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse ne sont pas de grandes provinces et dans les associations de chacune de ces provinces, tout le monde connaît tout le monde. Il s'agit de donner une ou deux places à une de ces associations. Selon moi, les associations pourraient déléguer un représentant qui porterait le chapeau de chacune d'entre elles. Ce représentant devrait revenir à l'association pour savoir quelle est sa position sur telle ou telle autre question. Donc, pour moi, il ne s'agit pas que chaque compagnie soit à la table, mais les associations doivent y être et les compagnies de pâtes et papier doivent y être, de même que les petits moulins à scie et la communauté environnementale, mais pas en tant que simples individus. Il doivent être à la table à titre d'organisations, d'associations, parce qu'on doit porter le chapeau d'une grande section.

M. Yvon Godin: Parlez-nous du côté scientifique. Je sais que vous disiez que la façon dont les gens se sentent devrait paraître. C'est le côté humain. Mais du côté scientifique, on a eu une moyenne expérience avec les pêches. Vous savez que du côté scientifique, on a perdu les pêches. Êtes-vous d'accord qu'il faut un mélange de tout?

Je pense que s'il y avait des représentants de tous les secteurs intéressés réunis autour d'une même table, avec en quelque sorte une coordination assurée par le gouvernement fédéral et même par les gouvernements provinciaux impliqués, afin qu'ils soient capables d'assumer certaines responsabilités et de coordonner les opinions de chacun pour en arriver à une entente qui satisfasse tout le monde, ce serait vraiment la solution. On pourrait sortir gagnants et dire que toute la communauté a été représentée.

L'industrie, les représentants des travailleurs, les représentants de l'environnement et les gouvernements devraient s'asseoir autour d'une même table, arriver à une solution et dire: voici notre certification; nous sommes tous d'accord sur cette certification. Ne pensez-vous pas que ce serait vraiment la solution à long terme? Et cela se ferait partout, pas seulement dans la région de l'Atlantique, mais partout au pays.

M. Blake Brunsdon: C'est exactement le but de la certification: trouver un équilibre économique, social et environnemental. C'est une question d'équilibre. On ne peut pas avoir une certification à laquelle il manque un élément essentiel.

M. Yvon Godin: Je veux juste compléter mon commentaire. J'ai toujours dit que dans le domaine de la foresterie, les gens sont chanceux d'avoir une industrie où on peut replanter des arbres. Pour ma part, je viens de l'industrie minière. On ne peut pas replanter notre minerai. Si la forêt est bien tenue et bien gérée, elle sera là pour nos enfants et pour les enfants de nos enfants.

Ce sont toutes les questions que je voulais poser.

M. Jim Irving: Vous avez fait la comparaison entre la forêt et les poissons. C'est une différence dont il faut tenir compte. Avec les forêts, nous avons l'avantage de voir la situation. Il est facile de voir et de compter les arbres, alors qu'avec les poissons, c'est différent. Mais, comme Blake l'a dit, les trois aspects de FSC sont les éléments principaux: l'aspect social, l'aspect économique et l'aspect environnemental. En tenant compte de ces trois éléments, en théorie, on devrait arriver à un bon résultat, mais le problème, c'est qu'il y a un de ces éléments, celui de l'environnement, qui a pris le contrôle dans la région des Maritimes.

M. Yvon Godin: Il y a peut-être une question que je voudrais vous poser. Ne serait-il pas important que le gouvernement fédéral, puisqu'il joue un rôle national, ait la responsabilité d'essayer d'amener les joueurs internationaux, nationaux et régionaux à trouver une solution pour établir des normes qui soient acceptables? Si le FSC a des normes de toutes sortes, comme vous le dites, cela ne donne pas vraiment les normes dont nous avons besoin. N'appartiendrait-il pas au gouvernement fédéral d'assumer la responsabilité d'aller chercher ces gens afin de trouver une norme qui serait acceptable?

• 1200

M. Blake Brunsdon: Pour moi, le rôle du gouvernement n'est pas nécessairement de régler les normes, mais de s'assurer que les normes sont basées sur la science et de vérifier si ce qui se dit est vrai et si la procédure est ouverte. C'est cela, le rôle que le gouvernement peut jouer.

M. Jim Irving: C'est cela. Il s'agit de permettre à l'industrie d'adapter la science au travail afin d'être efficace et de suivre toutes les étapes qui doivent être suivies. Le gouvernement devrait trouver une façon de...

M. Blake Brunsdon: [Note de la rédaction: inaudible].

M. Jim Irving: C'est cela.

M. Yvon Godin: Les compagnies qui plantent des arbres.

Le président: Merci.

M. Jim Irving: Je comprends.

[Traduction]

Nous terminerons par M. Duncan.

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Je vous remercie, monsieur le président. Je reconnais que nous allons manquer de temps, mais nous continuerons un peu plus longtemps parce que nous avons un groupe approprié de témoins.

Des observateurs m'ont dit que de tous les systèmes de certification, le seul qui tâche vraiment de se vendre est le FSC, ce qui entraîne inévitablement la politisation. Avez-vous la même impression?

M. Jim Irving: Il est bien à mon avis que le FSC fasse valoir son système; il faut que les gens comprennent. Je considère que c'est la chose à faire. Nous ne sommes pas en désaccord avec le FSC. Nous sommes en désaccord avec lui lorsque la direction, à un niveau très local, peut tout chambouler. Si cela se faisait à un niveau très élevé, et que les normes aux États-Unis ou en Amérique du Nord étaient les mêmes, nous ne serions pas ici parce que nous serions en train de faire certifier un plus grand nombre de produits. C'est donc une bonne chose qu'ils fassent valoir l'importance de la certification parce qu'il faut que les gens y soient sensibilisés.

M. John Duncan: Serait-il préférable que quelqu'un d'autre s'en charge? Vous n'êtes pas obligés de répondre à cette question.

M. Jim Irving: Vous voulez dire quelqu'un d'autre que nous?

M. John Duncan: Oui, je veux dire les clients, tous les autres. J'ai des réserves au sujet d'une organisation qui fait elle-même la promotion de son système lorsqu'il s'agit d'une organisation chargée d'établir des normes. Les autres organisations d'établissement de normes ont pris la décision de ne pas le faire.

M. Jim Irving: Ils n'ont pas vraiment à en faire la promotion. Ils ont par exemple Home Depot, le plus important détaillant en Amérique du Nord, qui dit: «Nous voulons des produits certifiés FSC sur nos tablettes, et nous les avons et ils sont conformes aux normes les plus rigoureuses.» Comme publicité, on ne peut pas demander mieux.

M. John Duncan: Cela m'amène à ma prochaine question. Vous avez interjeté appel auprès du conseil d'administration du FSC. Sont-ils obligés d'y donner suite?

M. Blake Brunsdon: Oui.

M. John Duncan: Très bien. Donc que se passe-t-il s'ils y donnent suite et que cette réponse ne vous satisfait pas?

M. Blake Brunsdon: Ils ont recours à un processus informel où ils tâchent d'examiner la question et de la régler de façon informelle. S'ils n'arrivent pas à le faire de façon informelle, alors on procède de façon formelle et on nomme un arbitre chargé de rendre une décision.

J'ai interjeté appel, mais cette commission d'enquête examine exactement les mêmes questions sur lesquelles porte mon appel. On m'a dit qu'on retarderait l'audition de mon appel jusqu'à ce que la commission d'enquête présente son rapport, étant donné qu'il s'agit des mêmes questions. Je leur ai dit que je trouvais cela tout à fait acceptable. Mais il n'existe pas de recours auprès d'une instance supérieure après cette étape.

M. John Duncan: En bout de ligne, si vous n'obtenez pas gain de cause, vous pourriez décider d'abandonner la certification FSC. La décision rendue qui vous amènerait à opter pour cette solution, sans doute mûrement réfléchie, serait-elle probablement suffisante pour inciter un important client comme Home Depot à abandonner lui aussi la certification FSC?

M. Blake Brunsdon: Il faudrait leur poser la question.

M. Jim Irving: Ils veulent un produit certifié. Ils achètent des produits pour bien d'autres raisons que la certification, mais cela vous donne certainement un avantage.

M. John Duncan: Est-ce parce qu'il existe une telle différence entre la certification canadienne FSC et les normes américaines...? Doit-on se demander pourquoi l'aménagement est jugé meilleur aux États-Unis? Est-ce parce que le gouvernement y participe? Comment en sommes-nous arrivés là?

M. Blake Brunsdon: Je pense que les États-Unis ont connu certaines difficultés de croissance quatre ans plus tôt environ.

• 1205

Je dirais que certaines personnes qui financent le FSC aux États-Unis se sont demandé: «Pourquoi n'y a-t-il personne dans l'industrie intéressé à obtenir cette norme?» Ils ont apporté certains changements au niveau de l'administration et ils ont maintenant un leadership plus solide qu'auparavant.

M. John Duncan: Cependant, y a-t-il possibilité de contestation aux termes de l'ALENA? Avez-vous envisagé cet aspect?

M. Blake Brunsdon: Évidemment, en Europe, certains prétendent que ce programme de certification pourrait constituer un obstacle au commerce.

M. John Duncan: Merci.

Le président: Ce sera tout, mais j'aimerais vous poser une très brève question, monsieur Irving. J'ai cru comprendre que vous alliez envisager la certification ISO, mais vous n'avez rien dit, me semble-t-il, au sujet de la CSA. Pouvez-vous m'expliquer cela?

M. Blake Brunsdon: Nous visons la norme ISO et trois de nos huit districts bénéficient déjà de l'homologation ISO. Nous avons envisagé la certification CSA en 1998 mais, à l'époque, nous avons décidé de mettre l'accent sur le FSC et l'ISO. Nous allons étudier à nouveau la possibilité d'une certification CSA. À l'époque, nous jugions la CSA très bureaucratique. Elle exigeait beaucoup des intéressés, qui devaient participer au développement des critères. Les entreprises comme Home Depot n'exigeaient pas la certification CSA. Elles disaient vouloir un produit ayant une étiquette, lié à une chaîne de responsabilité et jouissant d'une bonne réputation sur le plan de l'environnement.

Le président: Je tiens à vous remercier tous deux. Vous avez fait preuve d'une grande patience à notre égard, et nous vous sommes reconnaissants de votre apport.

Je vais maintenant suspendre la séance durant quelques minutes. Étant donné que nous allons siéger durant deux heures de plus, un déjeuner a été prévu. Je prie les membres du comité et les témoins de se servir sans tarder. Nous allons ensuite reprendre nos travaux et écouter notre deuxième groupe de témoins.

Encore une fois, merci beaucoup.

• 1207




• 1215

Le président: Messieurs Johnson et Janhager, je vous prie d'être patients un peu plus longtemps, étant donné que j'ai quelques questions que je dois régler sans tarder.

Puisque certains changements mineurs ont été apportés à l'itinéraire proposé de la semaine dernière, il me faut une motion. Vous l'avez probablement tous devant vous. Donc, par consentement unanime... Il a été convenu que le Comité permanent des ressources naturelles et des opérations gouvernementales demande un ordre de renvoi de la Chambre pour voyager du 7 au 12 mai à Sault Ste. Marie, Thunder Bay—il y a eu un changement mineur dans le cas du Québec—Baie Comeau, Rimouski, et puis ensuite à Bathurst pour l'examen des pratiques d'aménagement forestier au Canada dans la perspective du commerce international.

Pour le reste, tout va bien. Ainsi, nous avons deux changements: Baie Comeau et Rimouski. Une telle motion est-elle donc proposée?

M. John Duncan: Pouvez-vous préciser si le comité prévoit voyager au Nouveau-Brunswick?

Le président: Oui, à Bathurst.

M. John Duncan: Mais nous n'allons pas à St-Léonard, une localité qui est située au centre de la zone de certification.

Le président: Non, je crois que nous avons convenu de nous rendre tout d'abord à Bathurst.

[Français]

M. Serge Cardin: Voulez-vous juste faire un rappel pour moi? J'ai été absent deux semaines et il n'y avait personne à mon bureau ici, à Ottawa, malheureusement. Donc, je suis arrivé ce matin, mais je n'ai pas vu les changements. Qu'est-ce qu'on avait comme projet auparavant et quels sont les changements importants?

Le président: Ce ne sont pas des changements éclatants. Au début, on avait pensé aller à Amos, mais le comité a déjà visité Amos, en Abitibi. Donc, on a voulu aller dans des endroits un peu différents. Au lieu de donner toujours la même impression au comité, on a pensé aller à Baie-Comeau et à Rimouski, soit pour connaître une région différente, soit pour voir une forêt qui fait l'expérience d'une certaine procédure de gestion, et aussi pour que le comité puisse voyager de façon moins problématique. C'est tout. Ça va?

[Traduction]

(La motion est adoptée)

Le président: Il y avait également une autre motion et j'aimerais en traiter très rapidement. M. Chatters souhaitait que nous utilisions une salle dotée de matériel de télédiffusion. Je crois que le comité était également d'accord. Après vérification cependant, nous constatons qu'une telle salle n'est disponible pour aucune des dates prévues. Ainsi, pour ce qui est de la motion, nous pouvons dire que nous sommes unanimes à le souhaiter, mais que la salle est déjà, semble-t-il, occupée par le comité des finances.

M. David Chatters (Athabasca, Alliance canadienne): Telle était la situation ce matin... Évidemment, il aurait pu ne pas s'agir d'une réunion du comité des finances. Il aurait pu s'agir d'un autre groupe.

Le président: J'ai demandé au greffier de vérifier hier et nous avons vérifié à nouveau il y a environ une heure. La télédiffusion, nous dit-on n'est pas disponible. La chose est impossible.

M. David Chatters: Pour les deux journées?

Le président: En effet.

M. David Chatters: D'accord, je vais donc retirer la motion.

Le président: Je vous remercie, monsieur Chatters.

Je vous remercie de votre patience, messieurs Johnson et Janhager. Nous accueillons donc M. Stephan Janhager, du Conseil canadien des normes, où il est agent principal des programmes, homologation EMS. Je vais l'inviter à l'instant à expliquer le rapport qui existe entre son organisation et l'Association canadienne de normalisation. Également, nous accueillons M. Peter Johnson, gestionnaire, Développement de l'homologation, du Quality Management Institute. Toutefois, il représente aujourd'hui l'Association canadienne de normalisation. Cela peut sembler nébuleux pour certains, mais je crois que nous allons obtenir des éclaircissements très bientôt.

Ces deux messieurs ont déjà comparu et ils connaissent donc notre mode de fonctionnement. Je crois qu'ils souhaitent nous exposer brièvement leur point de vue, après quoi nous pourrons dialoguer.

• 1220

MM. Johnson et Janhager ne sont ni l'un ni l'autre francophones et je crois que M. Johnson souhaitait accompagner son exposé d'une projection de transparents. Il a fourni un exemplaire des notes aux interprètes mais il n'a pas de mémoire écrit.

Il a un jeu de fiches? Nous attendons toujours la photocopie, semble-t-il.

J'ai expliqué à ces deux messieurs que nous tenons normalement à recevoir un document dans les deux langues. Nous allons assurer la traduction et la distribution à tous les membres du comité.

Nous avons la traduction simultanée et je vous prie donc de commencer, monsieur Johnson. Je ne puis cependant accepter les aides visuelles tant que nos traducteurs n'en auront pas un exemplaire, ce qui n'est pas le cas.

Monsieur Johnson, je vous en prie.

M. Peter Johnson (gestionnaire, Développement de l'homologation, Quality Management Institute): Bon après-midi. Je vous remercie de l'occasion qui m'est donnée de vous rencontrer.

Comme le président vous l'a dit, je m'appelle Peter Johnson et je vais m'efforcer de vous expliquer le rapport qui existe entre... Je travaille pour le Quality Management Institute, le QMI. Il s'agit d'une division à part entière de CSA International, l'Association canadienne de normalisation. Vous connaissez probablement surtout l'ACNOR (la CSA) comme agent de certification de produits. On voit le logo de la CSA sur des lampes, des fusibles, etc. L'Association compte également une division qui rédige des normes nationales pour le Canada, comme la norme CSA en matière de foresterie. La CSA compte également une troisième division, celle dont je relève, le Quality Management Institute.

Il s'agit d'un organisme de vérification qui mène des vérifications indépendantes aux fins de l'homologation par rapport à diverses normes nationales et internationales de gestion, tant au Canada qu'ailleurs dans le monde. Notre bureau chef est situé à Mississauga, en Ontario, mais nous avons des bureaux dans les diverses régions du Canada, aux États-Unis et ailleurs dans le monde. Comme la CSA International, nous agissons à titre d'organisme privé indépendant sans but lucratif. À titre d'organisme privé, nous ne recevons aucun financement public. En effet, nos revenus proviennent de nos activités de vérification indépendante auprès de tiers. Nous n'agissons pas à titre d'experts-conseils. Selon notre mandat, ou notre accréditation, nous ne sommes nullement autorisés à agir comme experts-conseils.

Notre activité essentielle consiste donc à mener des vérifications auprès de tiers et je vais aujourd'hui aborder nos travaux à cet égard qui visent l'aménagement forestier durable au Canada.

Je suis un expert forestier accrédité par la province de l'Ontario. J'ai une formation en foresterie. Après avoir obtenu un diplôme de l'Université de Toronto, j'ai obtenu ma maîtrise en foresterie à l'Université Lakehead de Thunder Bay. J'ai travaillé par la suite dans le secteur forestier. J'ai travaillé comme expert-conseil et, par la suite, je me suis joins au QMI, il y a de cela six ans, pour mettre au point les programmes d'homologation de l'organisme visant les normes relatives aux systèmes de gestion de l'environnement et à l'aménagement forestier durable. Mon travail porte sur ces aspects depuis ce moment-là.

Nous avons mené diverses vérifications de conformité à la norme ISO 14000 visant la gestion forestière au Canada et nous avons également mené deux vérifications d'homologation de conformité à la norme nationale du Canada, la norme Z809 et, dans tous ces cas, j'ai dirigé les équipes de vérification. Je suis donc en mesure de répondre à toute question qui pourrait concerner le déroulement de telles activités de vérification.

Stephan se chargera d'expliquer le rapport qui existe entre le Conseil canadien des normes, notre organisme de certification, et CSA International et QMI.

Aux fins de l'exposé, un texte proposé destiné au comité m'avait été soumis. Selon la proposition, on invitait le comité à recommander que le gouvernement fédéral, en collaboration avec les gouvernements provinciaux et d'autres parties intéressées, s'emploient à favoriser l'intégration de diverses normes d'homologation en matière d'aménagement forestier durable, tant sur le plan intérieur, auprès de la CSA et du FSC, que sur le plan international, où un certain nombre d'approches ont été mises au point ou appliquées.

J'aimerais proposer que le gouvernement fédéral et votre comité envisagent de faire porter l'attention sur les normes nationales et internationales qui ont été élaborées dans le cadre de processus de rédaction de normes et d'évaluation de conformité reconnus à l'échelle nationale et internationale. La norme CSA est la seule norme nationale au Canada en matière d'aménagement forestier durable et la norme ISO 14000 est appliquée à toutes les forêts du Canada. Le rapport évident avec l'ISO favorise la reconnaissance nationale et internationale. Nous ne croyons pas que le FSC puisse être défini comme faisant partie d'un processus de rédaction de normes et d'évaluation de conformité reconnu à l'échelle nationale et internationale.

• 1225

Mon organisation, le QMI, a étudié très attentivement la possibilité d'agir comme agent de certification selon la norme FSC. Cependant, après avoir pris connaissance du processus de structuration du FSC et constaté le manque de transparence des activités de l'organisme, les membres de notre conseil d'administration ont décidé de ne pas le faire. Nous avons donc décidé de nous tenir au courant des activités du FSC et de demeurer ouverts à la possibilité de changer d'avis dans la mesure où l'évolution de l'organisme le justifierait. Toutefois, dans la situation actuelle, le meilleur apport que nous puissions fournir à l'économie canadienne, au secteur forestier canadien et au marché international des produits forestiers consiste à mener des activités d'homologation véritablement indépendantes visant à certifier la conformité à des processus de normalisation reconnus à l'échelle nationale et internationale.

Cela dit, je cède la parole à Stephan.

M.Stephan Janhager (agent principal des programmes, Homologation EMS, Conseil canadien des normes): Bon après-midi, messieurs.

Le Conseil canadien des normes est une société d'État. Il est composé de 70 membres et il assume la gestion de l'ensemble du système national de normalisation. À titre d'exemple, nous sommes chargés d'approuver les normes mises au point par la CSA International.

Le Conseil est également membre de l'ISO et de la Commission électrotechnique internationale. En matière d'aménagement forestier durable, ce dont Peter va vous parler, nous avons, en décembre de l'an dernier, intégré la norme CSA SFM au programme d'évaluation de conformité qui relève du Conseil canadien des normes, ce qui veut dire, essentiellement, que nous avons établi un lien entre cette norme et la norme ISO 14001. Il s'agit donc désormais d'un programme forestier distinct qui est lié au système national de normalisation.

À cet égard, c'est le QMI, l'organisation que représente Peter, qui est l'agent d'homologation. Pour notre part, nous assurons la surveillance et nous veillons à ce que cette organisation applique les normes d'une façon cohérente. Le QMI est ainsi l'une des organisations canadiennes que nous certifions. Six autres organisations membres sont également agents d'homologation. Elles homologuent des entreprises selon la norme ISO 14001 et peuvent également les homologuer selon la norme SFM, si c'est ce que souhaitent ces dernières.

Merci.

Le président: Vous avez établi une nouvelle norme en matière de concision. Je vous en félicite. Certains de nos collègues vont donc pouvoir vous interroger plus longuement.

Monsieur Schmidt, qui commence de votre côté?

M. Werner Schmidt: Quelqu'un souhaite-t-il le faire? Je suis prêt si vous ne l'êtes pas.

M. John Duncan: Je puis commencer. Peu importe.

Le président: Voilà une belle unanimité au sein de l'Alliance canadienne.

Monsieur Duncan.

M. John Duncan: Je vais commencer.

Monsieur Johnson, en décrivant votre organisation, vous avez parlé de votre mandat, et vous l'avez fait de façon assez précise. Vous avez bien veillé à ne pas vous en écarter. Le Quality Management Institute s'autofinance du fait que vous avez vos propres sources de revenus.

Je crois que vous étiez présent lorsque j'ai posé aux témoins précédents une question concernant la commercialisation. Dans la même veine, j'aimerais vous demander comment vous commercialisez votre organisation?

M. Peter Johnson: Nous le faisons en ayant recours aux véhicules les plus courants. Nous disposons d'un site web. Nous encartons des brochures dans certains journaux et magazines spécialisés. Nous participons activement aux échanges et discussions qui ont lieu entre les sociétés que nous homologuons. Nous sommes le plus ancien agent d'homologation du pays. Nous jouissons donc d'une réputation établie et nous sommes également connus à cause de notre rapport avec la norme ISO. Nous sommes le plus important agent d'homologation ISO en Amérique du Nord, aussi bien pour le marché canadien que pour le marché américain.

C'est donc grâce aux sites web, aux conférences et aux publications spécialisées que nous faisons la promotion de nos services. Nous ne faisons pas la promotion de normes. Nous n'invitons pas par exemple telle ou telle société à se faire homologuer par rapport à telle ou telle norme. Les normes qui visent les systèmes de gestion, tout comme la norme Z809 ou les normes ISO, sont d'application volontaire.

• 1230

Pour qu'une organisation adopte une norme, la mette en application et se fasse homologuer, elle doit y trouver des avantages. Si ces avantages ne sont pas constatés par les clients et les fournisseurs, l'organisation ne sera pas en mesure de faire valoir la norme. On suppose que les intervenants du marché vont reconnaître la valeur d'une norme et ainsi lui permettre de s'imposer.

Si je peux me permettre d'interpréter la question, on peut se demander pourquoi aucune commercialisation de la norme CSA n'est faite. Sommes-nous un véhicule de commercialisation de la norme CSA? Nous ne le sommes pas et la CSA n'est pas un véhicule de commercialisation de ses normes.

La CSA a produit plus de 2 000 normes dans les domaines de l'électricité, de la plomberie, et dans bien d'autres domaines également. L'Association ne s'occupe cependant pas d'assurer la vente de ces normes. Il revient au marché de déterminer si elles sont valables ou non. La CSA fournit de l'information au besoin et répond certainement aux demandes d'information. Dans le cas de la norme CSA, l'Association a favorisé la tenue d'ateliers de vulgarisation un peu partout au Canada. Par contre, elle n'est pas une organisation vouée à la publicité ou à la commercialisation. Tel n'est pas son mandat.

M. John Duncan: Pourrait-on même dire que si l'Association s'adonnait à de telles activités, elle risquerait d'être critiquée par ses clients.

M. Peter Johnson: C'est fort possible. Cependant, je crois que les clients inviteraient la CSA à s'en tenir à son mandat, à son champ d'action prioritaire, et à ne pas commercialiser ou annoncer une norme davantage qu'une autre. Ceux qui critiquent le processus de normalisation et de certification qui vise le secteur forestier ne manqueraient probablement pas l'occasion d'intervenir, mais la CSA ne fait aucune promotion des normes qui visent ce secteur.

M. John Duncan: C'est bien vrai. D'après votre description, il me semble que vous respectez tout à fait les principes en vigueur dans le monde des affaires. Agir autrement serait contraire à de tels principes. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi une entreprise comme Home Depot semble avaliser à l'exclusion de tout autre un système qui semble justement aller à l'encontre de tels principes?

M. Peter Johnson: Sans pouvoir parler directement au nom de Home Depot ou de tout autre grand acheteur de produits forestiers, j'ai l'impression que cette entreprise manque d'information au sujet même de ce qu'est une norme, de son application et des avantages qu'elle confère. On n'a pas fourni l'information pertinente à cette entreprise ou encore n'a-t-elle pas cherché à l'obtenir.

Ce qui a manqué jusqu'à maintenant par ailleurs c'est la promotion qu'auraient pu faire des entreprises homologuées. Seulement deux zones forestières ont été homologuées selon la norme Z809 et cela s'est fait très récemment, soit au cours des 12 derniers mois. Il a fallu attendre longtemps avant que des entreprises ne se fassent homologuer et il faut attendre encore longtemps avant que ce fait ne soit connu.

Au moment où Home Depot ou d'autres fournisseurs étaient à déterminer quel processus de certification ils allaient favoriser, la norme CSA avait été rédigée mais n'avait pas encore été mise en application. Aucune entreprise n'avait été homologuée en conformité de cette norme. Or, à l'heure actuelle, des homologations existent et un grand nombre de processus d'homologation aboutiront au Canada au cours de la prochaine année. La norme Z809 va devenir beaucoup plus connue étant donné que les entreprises qui sont déjà homologuées et qui le deviendront prochainement vont s'employer à la faire connaître.

M. John Duncan: Comme bien des gens, je souhaite que les normes CSA soient acceptées dans le monde entier. Des efforts sont-ils déployés pour que la norme SFI—il s'agit, je crois, de celle qui est préconisée aux États-Unis—, la norme CSA et d'autres bénéficient d'une forme quelconque de reconnaissance réciproque qui en facilitera la commercialisation?

• 1235

M. Peter Johnson: En effet. Un tel processus a déjà été amorcé. La CSA s'est dotée d'un comité technique qui se charge de la norme d'aménagement forestier durable et on a créé récemment un groupe de travail sur la reconnaissance réciproque. Ses membres vont se pencher sur les divers régimes de certification en vigueur ailleurs dans le monde et sur les moyens d'harmonisation et de reconnaissance réciproque à leur égard.

À titre d'exemple, l'homologation CSA est déjà acceptée aux Pays-Bas. Une société canadienne, la Weyerhaeuser, a déjà homologué sa division North Islands selon la norme Z809. L'entreprise a formulé sa demande auprès de la fondation Kerhoot des Pays-Bas. La fondation Kerhoot applique un processus fondé sur la notion de chaîne de responsabilité et les sociétés qui bénéficient d'une évaluation favorable peuvent apposer l'appellation Kerhoot sur leurs produits.

La fondation néerlandaise Kerhoot s'est donc penchée sur le processus d'homologation de conformité à la norme CSA. Les évaluateurs se sont penchés sur le processus de vérification, les titres de compétence des vérificateurs, et ils ont constaté que la norme correspondait effectivement à un mode d'aménagement forestier durable. Il s'agit du premier cas d'acceptation à l'extérieur du Canada de la norme CSA.

M. John Duncan: S'agit-il d'une reconnaissance qui a du poids? S'agit-il d'un groupe permanent ayant son siège à un endroit précis?

M. Peter Johnson: Eh bien, je vous dirais que le groupe de reconnaissance réciproque est un groupe permanent. Il s'agit d'un sous-comité du comité technique de la CSA. Il vient tout juste d'être créé, de sorte que ses membres s'emploient maintenant à déterminer quoi d'autre...

M. John Duncan: N'y a-t-il donc pas de représentants de la CSA qui participent à cela?

M. Peter Johnson: Si, et ils sont tous membres du comité technique. Le comité technique de la CSA est composé de divers représentants du gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux, des premières nations, du monde universitaire, d'experts-conseils...

M. John Duncan: Il est donc entièrement composé de Canadiens.

M. Peter Johnson: En effet. Il est prévu que ces gens vont entrer en rapport avec leurs homologues dans divers pays ou avec d'autres représentants de processus de certification.

M. John Duncan: Merci.

Le président: M. St. Denis.

M. Brent St. Denis: Merci, monsieur le président. Et je vous remercie, messieurs, de nous honorer de votre présence.

Certaines personnes cherchent le symbole du petit dauphin lorsqu'elles achètent du thon. Ce symbole est censé nous garantir supposément que l'on a pris soin d'éviter de capturer des dauphins dans les filets en prenant le thon. À mon avis, il n'y a pas un consommateur sur 100 qui pense aux dauphins lorsqu'il voit le petit symbole. Cela arrive à certains d'entre nous parfois, mais je ne crois pas que ce soit le cas pour le consommateur moyen.

La certification et l'aménagement forestier durable ont leur importance mais je crois que le marché est fait de consommateurs qui, pour la plupart, ne voient pas dans une étiquette autre chose qu'une étiquette. Ils n'auraient donc rien contre une étiquette symbolisant l'aménagement forestier durable. Nous parlons donc ici de la commercialisation d'un symbole et du fait de convaincre les gens que ce symbole veut dire quelque chose.

Pour le meilleur et pour le pire, le FSC semble avoir une longueur d'avance. Cependant, comme nous l'ont signalé d'autres témoins et notamment ceux qui vous ont précédés, cet organisme doit affronter des problèmes dans certains domaines, notamment à l'échelle locale ou régionale. La plupart de ceux qui sont autour de cette table souhaitent certainement qu'une norme comme la norme CSA s'impose, étant donné que nous faisons confiance à ce que représente une norme canadienne. Je sais qu'il ne vous revient pas d'en faire la promotion, mais il s'agit là d'un aspect qu'il nous faut mieux comprendre.

Certains autres témoins ont comparé la norme CSA à d'autres régimes de certification et ont déclaré qu'il s'agissait d'un système de gestion qui ne comportait aucune chaîne hiérarchique. C'est ce qui ressort de certains témoignages. Il ne s'agit pas d'une critique explicite, mais on laisse entendre que cette norme est relativement peu importante à l'échelle internationale. Nous préférerions peut-être qu'il en soit autrement étant donné que nous savons que nous faisons du bon travail.

Pourriez-vous donc nous en dire davantage sur votre façon d'envisager cette question de la chaîne hiérarchique. Comment se fait-il que certains intervenants rejettent la norme CSA? Dans tous les autres domaines—vous avez parlé des lampes—, la norme CSA est fort acceptée mais, dans le cas qui nous intéresse, on la rejette. Pouvez-vous nous faire part de vos réflexions à ce sujet, s'il vous plaît.

• 1240

Le président: Il s'agit là d'une seule et même question, messieurs. Vous n'avez pas beaucoup de temps pour y répondre.

M. Yvon Godin: Son temps sera écoulé après la réponse.

M. Peter Johnson: Je tiens tout d'abord à commenter l'accusation selon laquelle il s'agit simplement d'une norme qui vise un système de gestion. Bien qu'il s'agisse d'une accusation assez grave, elle est tout à fait sans fondement. Ceux qui formulent ce genre d'accusation n'ont aucune idée de ce qui constitue une norme visant un système de gestion. Il s'agit aussi vraisemblablement de l'un des seuls aspects par rapport auquel on pourrait critiquer la norme CSA—et encore, la critique ne serait pas fondée. Il s'agit effectivement d'une norme visant un système de gestion, mais cette norme s'appuie sur ce qu'on appelle les «éléments critiques», eux-mêmes fondés sur les indicateurs d'aménagement forestier durable établis par le Conseil canadien des ministres des Forêts. Et c'est justement à cause de cela qu'il s'agit d'une norme très concrète, bien enracinée dans la réalité de l'aménagement forestier durable.

Certains prétendent que la vérification d'un système de gestion est une vérification sur papier faite par des gens qui ne quittent jamais le bureau. Or, c'est tout à fait faux. Nos forestiers et nos vérificateurs passent le plus clair de leur temps en forêt à échanger avec des exploitants, des planificateurs et des exécutants au quotidien, à circuler dans les forêts, à les survoler pour être en mesure de constater que les activités d'exploitation en forêt correspondent effectivement aux énoncés du système de gestion. Ceux qui prétendent que la norme ne fait que viser un système de gestion essaient d'y trouver une faille qui n'en est même pas une. Il s'agit d'un régime de gestion axé sur le rendement qui fait l'objet d'une vérification et d'une évaluation sur le terrain, en forêt.

Pour ce qui est de la chaîne de responsabilité, il est vrai en effet que la norme CSA ne la vise pas, et c'est d'ailleurs voulu. Les responsables du comité technique qui se sont réunis durant pratiquement trois ans avant de formuler la norme étaient d'avis qu'il faut tout d'abord faire en sorte que le travail d'aménagement forestier soit efficace. Ainsi, l'aménagement forestier viable est un préalable à l'intégration de l'aspect de la chaîne de responsabilité.

Il s'agit donc d'une question d'ordre de priorité. Commençons par maîtriser les activités en forêt et, par la suite, envisageons la chaîne de responsabilité. Au moment même où nous nous parlons, des discussions sont en cours à très haut niveau concernant diverses notions et propositions pouvant aboutir à l'intégration d'un processus de chaîne de responsabilité à la norme CSA. Il me semble donc que le comité technique juge la chose inévitable. Ce sera donc fait en temps opportun.

Le président: Êtes-vous satisfait de cette réponse?

Une voix: Oui.

Le président: Excellent.

Je vous remercie beaucoup.

Monsieur Godin.

[Français]

M. Yvon Godin: Quand on parlait de la CSA, j'avais l'impression que c'était davantage pour la qualité du produit que pour sa provenance. Quand on parle de FSC, ça va plus loin. Il y a la question de l'environnement et toutes ces choses-là. Autrement, pourquoi avoir deux ou trois certifications? Je pense que c'est là qu'est tout le débat entre les différentes certifications. Chaque certification a sa raison d'être. C'était la même chose pour ISO 9000. C'était une question de qualité du produit. N'est-ce pas que ce qui arrive dans le cas de cette certification-ci? C'est qu'elle n'est pas reconnue par les autres.

[Traduction]

M. Peter Johnson: Les divers systèmes ont leurs particularités, c'est sûr et certain. Lorsque les gens pensent à la norme ISO, ils pensent généralement à l'aspect qualitatif—à la norme ISO 9000. En effet, des milliers de sociétés canadiennes ont la certification ISO 9000, qui a rapport à la qualité. Il existe une norme ISO qui vise l'environnement: il s'agit de la norme ISO 14000.

Bon nombre d'organismes forestiers adoptent la norme ISO 14000, et ce, pour deux raisons: pour régler les problèmes environnementaux liés à la gestion des forêts et pour créer un régime de gestion. Au Canada, l'exploitation et la gestion des forêts n'ont pas, par le passé, été effectuées selon un régime de gestion classique. Il existe très peu de documents sur ce qui se faisait auparavant. Les gens étaient formés directement, en cours d'emploi ou par leurs superviseurs. C'est ce qui se fait de façon répétée chaque année. Cela suit les saisons.

• 1245

Le régime de gestion permet maintenant de mettre en place des façons systématiques de régler les problèmes environnementaux et les questions liées à la bonne gestion. Et c'est à ce titre que la norme ISO 14000 est intéressante pour les organismes forestiers.

La norme CSA a également une petite composante liée à l'environnement, mais elle porte surtout sur les questions d'aménagement des forêts. Cette norme tient également compte des valeurs relatives à l'économie, à la société et aux Premières nations. Dans la norme CSA, il existe un mécanisme d'identification et d'inclusion de toutes les valeurs, qu'il s'agisse d'environnement, d'économie, de société, de géologie ou d'autres choses.

Il existe donc des différences entre la norme CSA et la norme ISO 14000, mais toutes les deux permettent de tenir compte tant des questions d'exploitation forestière que d'environnement. Et dans le processus FSC, on tient compte de groupes d'enjeux différents ou qui se chevauchent, dont on pourrait dire qu'ils sont entièrement liés à l'environnement ou à l'exploitation forestière. Il y a donc des différences entre les deux.

Ces différences viennent surtout de la façon dont les objectifs sont atteints. Les normes ISO 14000 et CSA constituent un régime de gestion qui établit un cadre doté de paramètres de rendement. Le processus FSC n'offre pas de cadre de gestion. Dans le processus FSC, la vérification est faite une fois pour toutes et il n'existe pas de garantie quant à la situation future.

Dans les régimes de gestion CSA et ISO 14000, la prévisibilité est garantie. Il est possible de garantir systématiquement la prévisibilité pour l'avenir.

Le président: Monsieur Johnson, pardonnez ma curiosité, mais j'aimerais poursuivre dans la même ligne de pensée que mes collègues, tout à l'heure.

Supposons pour un moment que le président du comité soit absolument persuadé par votre argument. Pourquoi dans ce cas une entreprise comme Home Depot choisirait-elle la certification FSC pour sa mise en marché? Pourquoi n'aurait-elle pas adopté la norme CSA en raison de sa prévisibilité, de son objectivité et du fait que les critères sont stables ou évoluent en fonction de la science? Une telle entreprise saurait qu'il existe une méthodologie uniforme qui ne changera pas d'une année à l'autre.

M. Brent St. Denis: Ou d'une région à l'autre.

Le président: C'est exact.

Pour commencer, pourquoi une entreprise comme Home Depot n'adopterait-elle pas ce régime? Mais plus encore, je suppose—puisqu'il faudrait poser la question à Home Depot—, pourquoi la CSA ne communiquerait-elle pas avec les distributeurs et les détaillants comme Home Depot pour les informer que le secteur forestier international a besoin du leadership qu'elle offre et qu'en n'adoptant pas ces critères, les entreprises n'offrent pas les meilleurs services possible à leur clientèle?

M. Peter Johnson: C'est une très bonne question. C'est surtout une question de temps, à mon avis, parce qu'à l'époque où ces grands acheteurs prenaient leurs décisions, il n'existait pas de régime de certification à la norme Z809 ou à la norme CSA. On aurait pu communiquer avec Home Depot, Lansing, Syntex ou les autres grands acheteurs pour leur présenter la norme, faire valoir ses avantages et montrer comment elle serait avantageuse pour le secteur forestier. En réponse, ils nous auraient demandé de pouvoir communiquer avec des entreprises certifiées ou nous auraient demandé des preuves. Des preuves, nous n'en avions pas à cette époque mais nous en avons maintenant. Et nous commençons à constater que certaines entreprises font la promotion des deux régimes de certification.

Je suis persuadé qu'il est nécessaire de réunir ces acheteurs et de leur expliquer ce qu'est et ce que n'est pas ce régime afin qu'ils puissent prendre des décisions éclairées. Ils seront peut-être pénalisés plus tard par certains de leurs clients parce qu'ils n'auront pas vraiment examiné les autres mécanismes de certification qui existent. S'ils décident de n'adhérer qu'à un régime de certification et que ce régime devient impopulaire ou cause des problèmes ou des conflits importants, ils devront justifier leur choix. Ils diront peut-être que c'était le seul qui existait ou que c'était le plus reconnu. Et je dois avouer qu'à cette époque, c'était vrai.

• 1250

Que ce soit par la CSA ou par un autre organisme, il faut faire connaître les avantages et les points forts de la norme CSA. Il faut également que le comité technique en soit informé, et la mise sur pied d'un groupe de travail des communications pour régler ce problème.

Le président: Monsieur Johnson, permettez-moi d'insister. Vous étiez présent, je crois, il y a quelques minutes, lorsque les représentants du groupe d'entreprises Irving ont déclaré qu'ils avaient dû faire face aux problèmes que vous venez de mentionner. Et pourtant, quand je leur ai demandé pourquoi ils n'adhéraient pas à la norme CSA—je ne dirai pas qu'ils ont refusé de répondre à la question, car ce n'est pas le cas—, ils ont simplement répondu qu'ils examineraient peut-être cette norme, mais peut-être pas. La CSA n'a-t-elle pas là une belle occasion d'aller chercher une société qui a déjà été certifiée et qui est prête à faire la promotion d'un régime de certification? Quel est le problème?

M. Peter Johnson: C'est une occasion de communiquer avec les sociétés, mais celles-ci réagissent à ce que disent leurs clients. M. Irving ou M. Brunsdon ont dit que leurs clients ne l'avaient pas demandé. L'adhésion est volontaire. Aussi bons que soient nos boniments, si leurs clients ne reconnaissent pas le processus de certification ou ne le réclament pas, ils auront bien de la difficulté à justifier l'adhésion à ce régime devant leur organisation, car l'adhésion et le maintien de la certification entraînent des frais supplémentaires.

Ce que nous disent les principaux acheteurs, également, c'est que peu leur importe le processus de certification, ISO, FSC ou CSA, ce qu'ils veulent, c'est que les protestataires leur fichent la paix. Nous constatons que les grands acheteurs commencent à reconnaître qu'ils ne peuvent pas mettre tous leurs oeufs dans le même panier et que, ne serait-ce que pour des raisons de crédibilité, ils doivent être au courant des autres régimes qui existent. Les sociétés en feront autant.

Le président: Lorsque notre comité a entrepris la deuxième phase de cette étude, certains membres du comité—nous travaillons dans un esprit non partisan—s'inquiétaient de ce qu'ils ne sentaient pas qu'il y avait un leadership pour faire taire les protestataires, pour reprendre votre expression, que personne ne prenait le taureau par les cornes, ne vendait les régimes de certification qui existaient et ne faisaient valoir que les produits canadiens méritent autant que les autres, sinon davantage, la certification. Comment ce leadership devrait-il être offert? Devrait-il venir de la CSA, d'un organisme gouvernemental, d'une agence indépendante du gouvernement, ou, comme l'a dit M. Duncan, du marché lui-même?

M. Peter Johnson: C'est une excellente question, à laquelle le comité et la CSA ont essayé de répondre. Chaque approche a ses avantages et ses inconvénients. Si c'est l'industrie qui joue ce rôle de leader, les gens auront l'impression que la norme est établie en fonction de l'industrie. Si c'est la CSA, il faudrait lui attribuer une nouvelle fonction car cela ne fait pas partie de son mandat. La CSA devrait-elle faire la promotion de ses codes en matière d'électricité ou de plomberie, de ses normes en matière de sécurité du matériel de terrain de jeu, et devrait-elle commercialiser ses normes également à l'échelle internationale? Cela devrait-il être effectué par...

Le président: Permettez-moi de vous interrompre, monsieur Johnson. C'est tout de même un peu différent. Vu l'importance de l'exploitation forestière, dans tous ses aspects, pour le PIB du Canada, et plus particulièrement pour ses exportations, quelqu'un doit bien être en mesure d'expliquer ce qu'il en est. Je suis persuadé qu'on ne saurait situer dans le même contexte les codes en matière d'électricité, vu l'importance du secteur forestier pour le PIB canadien, n'est-ce pas?

M. Peter Johnson: Je n'en sais rien. Je ne sais pas si l'on peut comparer l'importance des industries les unes par rapport aux autres. En tout cas, je puis transmettre votre intérêt à la direction de CSA International. Mais existe-t-il d'autres solutions? La CSA est-elle l'organisme idoine de promotion? Nous nous interrogeons également à ce sujet. Nous voulons également consulter les gens. Nous n'essayons pas d'éluder la question, mais nous ne savons pas si c'est nous qui sommes le mieux en mesure de faire ce travail.

Le président: M. Schmidt peut répondre à cela, j'en suis sur.

M. Werner Schmidt: Non, mais j'ai des questions à poser, monsieur le président.

• 1255

Le président: Vous avez environ trois minutes.

M. Werner Schmidt: J'ai deux observations à faire. Premièrement, je veux m'assurer de bien comprendre. Je déduis de vos remarques précédentes, monsieur Johnson, que vous estimez que la norme de certification FSC est inférieure. Vous avez dit, je crois, que vous ne feriez pas de vérification de cette norme parce qu'elle n'est pas suffisamment transparente. Je ne suis par certain de comprendre ce que vous entendez par là, mais ce que j'en retire, c'est que la norme FSC est inférieure et qu'elle n'est donc pas acceptable.

M. Peter Johnson: Ce n'est pas la norme qui n'est pas acceptable, c'est le processus de gestion de la norme, d'accréditation de ceux qui font la certification et des vérificateurs, ainsi que le processus d'appel. Ce qui n'est pas compatible avec notre organisation, c'est l'infrastructure sur laquelle repose la norme FSC.

M. Werner Schmidt: Vous êtes aussi habile que Jim Irving pour éviter la question. D'accord.

Le président: C'est une figure de style.

M. Werner Schmidt: Passons maintenant à la proposition contenue, dans ce document. Je la trouve assez intéressante. Elle est directement liée à la question que vient de poser le président. Il a presque fait preuve de prémonition en la posant. On dit, dans la proposition, «le comité recommande». De quel comité s'agit-il?

M. Peter Johnson: Du vôtre.

M. Werner Schmidt: Vous souhaitez donc que notre comité fasse cette recommandation?

M. Peter Johnson: J'ai examiné les renseignements qui m'ont été fournis, et ils contenaient deux propositions.

M. Werner Schmidt: Voulez les avez donc incluses également dans votre proposition. Si vous prenez la proposition de quelqu'un d'autre et l'incluez dans votre document, ne la faites-vous pas vôtre? N'est-ce pas autant maintenant votre proposition que celle du comité?

M. Peter Johnson: Non, c'est une proposition que nous présentons au comité.

M. Werner Schmidt: Vous souhaiteriez que le comité l'adopte?

M. Peter Johnson: Je souhaiterais qu'il la mette en délibéré.

M. Werner Schmidt: Vous êtes très habile.

Le président: Je dois avouer, monsieur Schmidt, que c'est ma faute, puisque M. Johnson m'a demandé s'il pouvait projeter ses propositions à l'écran.

M. Peter Johnson: Oui.

Le président: S'il l'avait fait, il aurait pu faire le lien entre la page précédente et celle-ci, ce qui aurait expliqué son intention. Je suis désolé, parce que j'ai...

M. Werner Schmidt: Je vois les choses sous un angle différent. Je ne comprends que trop bien le lien. Ce que je veux savoir, c'est si vous êtes persuadé, à titre de gestionnaire de gestion de la qualité, que c'est bien ce que le comité devrait faire?

M. Peter Johnson: J'en suis persuadé.

M. Werner Schmidt: D'accord. C'est ce qui importe. Si c'est bien le cas, ce que vous dites, alors—et je ne vous critique pas pour cela—c'est que le processus CSA est excellent et que la consultation de divers intervenants, qu'il s'agisse des détaillants, des entreprises de commercialisation ou des exploitants forestiers, est suffisamment bonne pour que les gens adoptent ce processus. Cela revient à ce que vous avez essayé d'expliquer au sujet des ampoules électriques et des autres types de normalisation, n'est-ce pas?

M. Peter Johnson: C'est exact. Je suis prêt à défendre cette norme, l'accréditation et le processus.

M. Werner Schmidt: Merci, monsieur le président. Cela précise les choses pour moi.

M. Yvon Godin: Vous avez dit tout à l'heure que la norme CSA ne vise pas directement l'environnement. Vous avez ensuite parlé de la norme ISO 14000. Vous venir de dire maintenant monsieur Schmidt que la norme CSA sera la solution pour le marché international. C'est du moins ce que je comprends. J'aimerais que vous me précisiez ce qu'il en est.

Le président: Voulez-vous l'expliquer, monsieur Johnson?

M. Peter Johnson: Il s'agit de la norme CSA en matière d'aménagement forestier durable, dans le contexte de cette proposition.

M. Yvon Godin: D'accord. Mais ce n'est pas la même norme, et elle a maintenant préséance sur celle du FSC.

M. Peter Johnson: Vous voulez dire la norme FSC?

M. Yvon Godin: Oui.

M. Peter Johnson: La norme FSC ne peut pas s'appliquer dans ce cas-ci puisqu'elle ne s'applique pas au processus de normalisation nationale et internationale.

M. Yvon Godin: Oui, mais le problème, un peu partout au monde, c'est que des gens tiennent des protestations devant certains magasins ou déclarent que l'environnement est laissé pour compte lorsque les entreprises appliquent leurs propres normes. C'est pourquoi on essaie collectivement de mettre en place une norme qui soit acceptable pour la population, pour l'industrie et le gouvernement.

• 1300

M. Peter Johnson: La norme CSA en matière d'aménagement forestier durable mène à l'exploitation durable des forêts. Elle tient compte de l'environnement de la zone forestière en cause. Elle ne contient pas le mot «environnement», mais ces éléments sont pris en compte. Mais si l'on cherche une norme en matière d'environnement, il vaudrait mieux choisir alors la norme ISO 14000, qui conviendrait mieux que la norme Z809—la norme Z809 étant celle des forêts et de l'environnement forestier.

Le président: Merci, messieurs Johnson et Janhager, de vos témoignages. Vous avez assez bien répondu à toutes les questions. Cela nous a été très utile.

Merci beaucoup. Vous avez attendu et répondu avec patience.

M. Peter Johnson: Merci beaucoup d'avoir pris le temps de nous entendre.

Le président: Nous allons suspendre la séance pendant que notre prochain groupe de témoins prend place.

• 1301




• 1304

Le président: Nous accueillons cet après-midi notre tout premier groupe de témoins de l'Ontario. Je sais que certains s'étaient dits inquiets de ce que nous n'entendions pas de représentants de l'Ontario, que ce soit de l'industrie ou d'autres secteurs. Mais comme mes collègues le savent, certains des organismes que nous avons déjà entendus ont, semble-t-il, un bureau central à Toronto, à partir duquel ils font affaire dans d'autres provinces.

Nous accueillons maintenant le Buchanan Group of Companies, du nord de l'Ontario. Ses représentants sont Yves Fricot, vice-président et conseiller juridique principal, et Glen Swant, forestier en chef.

Messieurs, je sais que vous avez entendu le dernier exposé et celui d'avant en partie. Vous savez maintenant comment nous procédons.

• 1305

Vous disposez d'une dizaine de minutes. Vous pouvez prendre plus ou moins de temps, à votre gré, mais notre temps est limité. À vous de décider combien de temps vous voulez laisser à mes collègues pour vous poser des questions. Vous pouvez être très brefs. Nous avons tous votre mémoire. Nous aurons l'occasion de le consulter un peu plus tard.

Monsieur Comuzzi, j'ai déjà fait les présentations pour vous, je crois.

M. Joe Comuzzi (Thunder Bay—Superior-Nord, Lib.): Vous avez très bien fait cela, monsieur le président. On aurait dit que vous vous étiez exercé.

J'ai trouvé intéressant d'entendre qu'il s'agit de nos premiers témoins de l'Ontario. Pour vous situer dans le contexte, le Buchanan Group of Companies est composé de neuf ou 10 scieries indépendantes du nord de l'Ontario.

Au cours des deux dernières années, l'actionnaire unique de l'entreprise, M. Ken Buchanan, a décidé qu'il devrait apprendre comment fonctionnent les entreprises américaines. Il s'est donc rendu au Mississipi pour examiner d'autres scieries, et il compare le fonctionnement de ces entreprises aux États-Unis avec celles qu'il possède au Canada. Il serait intéressant que votre comité l'entende un jour, afin qu'il explique quelles sont les différences.

Le Buchanan Group of Companies est le plus grand producteur de bois débité de résineux de l'Ontario. Il produit de 55 à 60 p. 100 de tout le bois d'oeuvre qui est exporté vers les États-Unis. Cette entreprise est actuellement, je crois, le sixième plus important producteur de bois débité de résineux au Canada. Elle est le plus important employeur privé de l'Ontario. Sa masse salariale dépasse largement maintenant les 250 millions de dollars par année.

Avant que ces messieurs présentent leur témoignage, il importe de comprendre que ce qui est en cause, ce ne sont plus des entreprises isolées qui produisent du bois d'«uvre en 2 x 4 ou en 2 x 6. Il s'agit d'entreprises essentielles de tout le secteur forestier du nord de l'Ontario, et d'autres parties du Canada également, puisqu'elles fournissent des fibres, ces fibres nécessaires à la production de la pâte et du papier, à des sociétés comme Bowater, dans notre région, à Weyerhaeuser, Kimberly-Clark, Domtar, Abitibi, et, plus récemment, Donohue. Elles vendent des fibres à ces usines afin qu'elles puissent fabriquer d'autres produits forestiers. Il ne s'agit donc pas seulement de 2 x 4 et de 2 x 6, mais de toute l'industrie forestière du nord de l'Ontario.

Cela dit, je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Comuzzi. Vous nous avez convaincus. Nous aurons une assez bonne idée de l'industrie du bois d'«uvre en Ontario.

Qui sera le premier à prendre la parole? Monsieur Fricot.

M. Yves Fricot (vice-président et conseiller juridique principal, Buchanan Group of Companies): Ce sera moi, si vous me le permettez.

Monsieur le président, mesdames et messieurs du comité, merci beaucoup de nous accueillir.

Nous n'avons pas l'intention de vous lire notre mémoire. Je crois savoir que vous l'avez reçu et, d'après mon expérience, il n'est jamais très productif de lire quelque chose que les autres ont déjà lu ou d'écouter quelqu'un le lire. Il y a quelques points sur lesquels nous aimerions insister et il sera sans doute plus utile que nous répondions à vos questions, dans la mesure où nous pouvons le faire.

Comme M. Comuzzi l'a souligné, nous sommes une société privée. Cette société appartient à une famille. C'est dans le nord de l'Ontario que se trouve notre bureau chef et c'est dans cette région que nous faisons affaire. C'est important pour nous, car tous les employés de la société non seulement vivent dans cette région mais travaillent dans la forêt et peuvent en profiter.

Nous sommes très fiers de ce que nous sommes depuis longtemps des innovateurs dans la gestion forestière. Comme M. Buchanan nous le dit constamment, nous gérons de façon à ce que notre société existe dans 100 ans, pas seulement pour que nous ayons du travail mais pour que nos enfants et nos petits-enfants en aient aussi. Nous faisons partie intégrante des localités de notre région et nous en sommes très fiers.

• 1310

Nous avons lu bon nombre des mémoires qui vous ont été récemment présentés. Le comité doit savoir que la gestion durable des forêts en Ontario est un peu différente de ce qu'elle est peut-être dans d'autres parties du Canada. Nous ne savons pas ce qu'il en est des autres provinces, mais nous savons que la situation actuelle de l'Ontario est bien particulière. Il est important que le comité le comprenne, ou qu'il en soit du moins informé, car cela est pertinent à ce que nous avons à dire au sujet de la certification et des questions dont le comité est saisi. Puisqu'on me dit constamment que seuls les forestiers connaissent vraiment la forêt, je vais laisser Glen, notre forestier en chef, vous en parler.

M. Glen Swant (forestier en chef, Buchanan Group of Companies): Permettez-moi de prendre quelques instants pour vous expliquer où en est la gestion forestière à l'heure actuelle en Ontario. Mais avant de commencer, quand Ken Buchanan m'a engagé comme chef forestier dans son entreprise, il m'a donné des instructions bien précises. Il m'a dit qu'il avait sept petits-enfants et qu'il voulait que les forêts existent encore pour eux lorsqu'ils auraient mon âge. Voilà quel était mon travail, si l'on peut dire.

À l'heure actuelle, en Ontario, grâce aux efforts du gouvernement de la province, qui a pu réunir le secteur forestier et les écologistes par le truchement des initiatives Des terres pour la vie, nous jouissons maintenant d'une paix enviable.

Les groupes écologistes, le secteur forestier et le gouvernement de l'Ontario ont entrepris de gérer les forêts dès le jour où l'accord a été signé. Cet accord a d'ailleurs été annexé à notre mémoire. Vous y constaterez divers éléments auxquels travaillent les groupes écologistes et le secteur forestier pour mieux gérer les forêts en Ontario. Par exemple, lorsque je retournerai demain à Thunder Bay, je ferai une escale à Toronto pour rencontrer deux membres du Fonds mondial pour la nature. Nous allons mettre la dernière main à une ébauche du dernier document de tenure améliorée pour l'Ontario. Il y a des progrès réels.

Grâce aux initiatives Des terres pour la vie, nous avons créé 278 parcs et zones protégées dans lesquels la nature peut suivre son cours et où les gens peuvent se récréer en pleine nature. Pour les forestiers, c'est important. Voici un exemple qui me tient fort à c«ur. Chaque fois que je faisais un inventaire forestier, je survolais le terrain en avion et nous traversions un énorme canyon juste au nord de Thunder Bay, le Ottertooth Canyon. Nous avons protégé cette zone. Il s'agit d'une faille géologique unique dont les deux falaises ont 100 pieds de hauteur. Il n'y a qu'une différence d'environ 40 pieds entre les deux côtés de la faille. C'est un endroit unique, et la végétation qu'on trouve au fond de ce canyon est très particulière. C'est pourquoi les forestiers, les naturalistes et les écologistes ont convenu de la protéger afin que les gens puissent admirer toute sa beauté naturelle.

À cette évolution constante de la gestion des forêts en Ontario, il faut ajouter l'effet de la Loi sur la durabilité des forêts de la Couronne, qui applique le principe de l'exploitation durable des forêts en nous obligeant à respecter la biodiversité. Par exemple, nous gérons dans le nord de l'Ontario un peuplement composé à 20 p. 100 de peupliers faux trembles. Nous devons gérer ce peuplement jusqu'à sa maturité et, une fois mûr et prêt à la récolte, il doit encore être composé de 20 p. 100 de cette essence. Cela signifie que les forêts sont viables et qu'on y trouve également une grande biodiversité. Il n'y a pas que le gouvernement pour nous surveiller. Il y a aussi des vérificateurs indépendants. On trouve parmi eux des forestiers professionnels, des biologistes et des planificateurs qui vérifient régulièrement nos méthodes de planification de la gestion forestière et le travail fait sur le terrain.

• 1315

En plus de gérer la biodiversité sous le régime de la Loi sur les évaluations environnementales, nous exécutons depuis un certain nombre d'années 57 différentes lignes directrices qui visent à protéger tous les habitants des forêts. Ces lignes directrices protègent diverses espèces, du caribou jusqu'au balbuzard pêcheur.

Leur application est obligatoire. Elles sont intégrées à tous nos plans et nous consultons le public sur la façon dont la forêt et ses différentes espèces de la faune devraient être gérées.

La plus récente de ces lignes directrices, que vous connaissez peut-être, et que nous appliquons maintenant, est celle qui vise à protéger le grand pic. Nous devons maintenant laisser deux ou trois arbres par acre afin qu'ils attirent les grands pics, qui pourront venir y nicher.

Bref, voici où nous en sommes en Ontario: Nous faisons une gestion durable; nous nous sommes entendus avec les écologistes et nous faisons une gestion globale qui favorise la croissance durable de toutes les espèces de la forêt.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Swant et monsieur Fricot.

M. Yves Fricot: Si vous me permettez, j'ai deux choses à dire encore. Je suis un peu éparpillé.

Il y a deux choses que j'estime importantes. Premièrement, il est important de reconnaître le rôle des gouvernements provinciaux; je sais que vous l'avez souligné dans votre rapport provisoire et que vous avez signalé qu'il s'agit de domaines de compétence partagée. Mais même si l'on essaie déjà d'atteindre cet objectif de gestion durable des forêts, il est important que le gouvernement fédéral continue d'assumer ses fonctions, des fonctions dont il s'est bien acquitté jusqu'à présent, pour ce qui est de protéger nos intérêts à l'étranger.

En ce qui concerne la question de l'accréditation, à laquelle le comité s'intéresse depuis un certain temps, je pense qu'on oublie parfois que l'accréditation n'est pas une garantie d'une gestion durable de la forêt ou que l'absence d'accréditation ne signifie pas nécessairement qu'il n'y a pas de gestion durable de la forêt.

L'accréditation n'est qu'un instrument d'affaires. Une entreprise peut s'en servir ou se faire accréditer essentiellement pour deux raisons: premièrement, parce que cela lui permettra de mieux faire son travail sur le plan interne—autrement dit, en ayant des processus internes qui lui permettront de répondre à ses obligations d'affaires; et la deuxième raison, c'est peut-être l'accès au marché en ce sens que l'entrepreneur peut se dire: «Si je peux dire que je suis accrédité, si je me fais accréditer, j'aurai accès au marché.»

C'est à cela que sert la véritable accréditation. C'est ce service qu'elle rend. Mais ce n'est pas la fonction des systèmes d'accréditation, ce n'est pas la fonction des entreprises d'accréditation—car c'est ainsi que j'appelle le FSC—de nous dire comment gérer les forêts ni si nous faisons un travail correct. C'est au gouvernement de le faire.

Plus nous examinons les divers régimes, et plus j'entends parler ce matin, par exemple, du régime FSC et de l'expérience Irving, et plus je me sens, à titre personnel et en tant que représentant de ma compagnie, mal à l'aise face à ce que l'on fait ou à certaines choses que l'on nous présente en ce qui concerne notamment le FSC.

Votre comité a souligné dans son rapport provisoire des écarts très importants entre le régime FSC et le régime de la CSA.

Je crois que la troisième remarque que vous faites dans ce rapport, et c'est quelque chose qui a été mentionné aussi par les représentants d'Irving ce matin, est la plus importante. Tout d'abord, le gouvernement n'a pas son mot à dire dans l'élaboration des normes d'aménagement forestier durable établies par le FSC. Le gouvernement canadien, au niveau provincial ou fédéral ou autres, n'a strictement rien à dire, pas plus d'ailleurs que l'industrie en fin de compte.

Ce n'est pas le cas de la CSA. Ce n'est pas nécessairement le cas pour l'ISO, mais soit, l'ISO intervient un peu moins sur le terrain que la CSA. Ce qui nous dérange, c'est que nous avons là un régime qui vient à l'origine d'un de nos concurrents dans ce secteur, un concurrent qui vient dans notre pays nous dire que nous devons gérer la forêt d'une certaine manière si nous voulons pourvoir être accrédités. Voilà ce qui nous inquiète.

• 1320

Nous avons annexé au dos de notre mémoire des extraits de témoignages présentés au comité. Vous constaterez que ces préoccupations y ont été soulevées. Je n'ai pas la réponse à ce problème, mais nous sommes très inquiets à l'idée de demander à un membre du FSC si l'on va accréditer les forêts anciennes. Que ce soit le cas ou non, en fin de compte ce sera une décision que nous prendrons en tant que Canadiens, et c'est en définitive une décision que le gouvernement prendra en s'appuyant sur l'apport des divers intervenants, comme le gouvernement de l'Ontario l'a fait.

Un des membres du comité a posé une question. Monsieur Godin, excusez-moi de vous citer, mais vous avez posé selon moi la question la plus importante: Quel est le rôle du gouvernement, et le gouvernement ne devrait-il pas réunir tous ces gens? C'est ce qui s'est passé en Ontario. Quand on répond: «Non, le gouvernement n'a aucun rôle à jouer; vous n'avez absolument rien à dire ni à faire dans cette question», c'est très inquiétant.

Quand ce même groupe essaie de commercialiser ses produits en Europe, dans le cadre de ce qui nous semble être tout simplement une autre forme de la même attaque, en disant: «N'achetez pas ce bois s'il n'a pas ce logo»... J'en reviens aux commentaires du ministre Goodale que vous mentionnez dans votre rapport provisoire, quand il parle de préoccupations concernant la souveraineté. Nous avons ces mêmes préoccupations.

Je recommande vivement aux membres du comité ou au personnel de recherche d'aller passer quelques minutes sur le site web du FSC s'ils ne l'ont pas déjà fait. C'est très instructif. C'est une organisation impressionnante, mais elle a 600 membres. Il n'y a pas beaucoup de représentants de l'industrie, ce n'est pas non plus une émanation du gouvernement. C'est une organisation qui vient essentiellement de Suède. On n'y trouve pas beaucoup de membres qui viennent de Finlande ou de Norvège ou d'un tas d'autres endroits. Mais ils ont réussi très habilement à convaincre le monde ou certaines parties du monde qu'ils détenaient la réponse.

Je ne veux pas dire que ce que veut faire le FSC n'est pas bien. Comme n'importe quelle autre entreprise canadienne, nous essayons tous les jours et nous allons continuer d'essayer de gérer nos forêts de manière durable. C'est comme cela que nous travaillons.

Monsieur le président, vous avez posé une question aux représentants de la CSA. Pour paraphraser votre question, vous leur avez demandé en gros: «Pourquoi n'allez-vous pas sur le marché?» L'idée que ces organisations qui définissent des normes interviennent sur le marché nous inquiète. À notre avis, elles n'ont rien à faire dans ce secteur commercial, car sinon cela veut dire que si vous n'appartenez pas à l'organisation, vous allez être traités différemment. Comme je l'ai dit au début, ce n'est pas parce qu'on appartient ou on n'appartient pas à une organisation que la forêt est gérée de façon durable. C'est donc inquiétant.

Je suis préoccupé par une question que vous avez posée, monsieur St. Denis, au représentant du FSC, et j'en ai repris un petit extrait dans notre annexe. Dans la première partie de cette question qui n'y figure pas, vous avez cité un exemple qui me semble très intéressant. Vous avez parlé de vendre des ampoules électriques en Chine, je crois, ou des installations électriques, et vous avez dit que si on était les premiers, on décidait si le réseau serait en 220 volts ou en 120 volts, et que tous les autres après cela seraient obligés de faire la même chose.

Ce qui est intéressant dans le cas qui nous concerne, c'est qu'on a décidé en Suède d'utiliser un régime particulier. Cela s'est fait avec la collaboration du gouvernement et du secteur forestier dans le cadre d'une démarche qui répondait aux pressions des groupes d'écologistes. Mais maintenant on ne nous dit pas: «Si vous voulez venir en Suède, vous devez utiliser notre système», on nous dit: «Nous exigeons que tout le reste du monde utilise notre système», et ce n'est pas du tout la même chose. Cela nous inquiète.

• 1325

Quel devrait être le rôle du gouvernement à note avis? Premièrement, le gouvernement devrait s'assurer que l'organisme qui s'occupe de l'accréditation, que ce soit la CSA, l'ISO ou le FSC, n'essaiera pas de se substituer au gouvernement à quelque niveau que ce soit.

Le deuxième rôle que doit jouer le gouvernement—et il l'a joué ce rôle, et c'est un rôle que certains témoins vous ont aussi recommandé d'avoir—consiste à élargir votre travail actuel au plan international pour lutter contre ce qui se passe à l'étranger, et aussi contre ce qui se passe au Canada. Nous approuvons sans réserve cette recommandation. C'est probablement l'une des plus importantes. Au Canada, nous sommes beaucoup trop souvent sur la défensive. Nous avons l'un des meilleurs systèmes, et franchement c'est le contraire qui devrait se passer.

Avant de conclure, j'aimerais aller un peu plus loin sur une des questions qui ont été posées à M. Brunsdon ce matin. Je crois que vous recommandiez à titre préliminaire dans votre rapport provisoire d'harmoniser les systèmes. Maintenant que vous avez entendu les représentants du FSC, vous devriez peut-être revenir sur cette recommandation. Les systèmes ont des mérites différents, car en fin de compte, ils peuvent servir les intérêts de certaines entreprises, ou ne pas les servir dans le cas d'une entreprise particulière. À notre avis, ce serait une erreur de vouloir les harmoniser.

À propos de la discussion que vous avez eue ce matin, M. Brunsdon vous a dit: «Écoutez, nous nous sommes retirés de cela parce que le système n'était pas ouvert, n'était pas représentatif, et nous avons fait appel.» Je vais vous parler de cela de façon très générale. L'un des députés lui a demandé: «Et si vous perdez en appel?». Il a répondu: «Eh bien, nous nous retirerons», parce qu'ils ont le choix.

Mais si le gouvernement avait décrété que c'est le seul système, qu'il s'agisse d'un système harmonisé ou non, ou simplement parce que c'est le régime que souhaite avoir le gouvernement du Canada, quelle serait la conséquence pour Irving? Irving à l'étranger serait vraiment coincée, même si elle fait du bon travail.

Voilà pourquoi il est important en fin de compte de se demander si les régimes de certification répondent au besoin d'une entreprise particulière. C'est une décision d'affaires. Et cela ne devrait être que cela. Le fait d'appartenir à un régime peut aider à gérer la forêt. Mais ce n'est pas quelque chose d'obligatoire.

Excusez-moi. J'ai probablement dépassé mes 10 minutes, monsieur le président, mais je dirais que c'est la faute de M. Comuzzi qui a empiété un peu trop sur mon introduction.

Le président: Très bien, merci.

Monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt: Merci, monsieur le président, et merci messieurs.

Les choses s'accélèrent ce matin, monsieur le président. Nous cernons de plus en plus de problèmes. Je ne sais pas si quelqu'un avait vraiment planifié cela, mais en tout cas je le félicite car cela a très bien marché.

Le président: Tout était soigneusement planifié.

M. Werner Schmidt: Surtout par vous, monsieur le président.

Le président: Nous travaillons au moins avec quelques personnes. N'est-ce pas, monsieur le président?

Des voix: Oh, oh!

M. Werner Schmidt: La remarque que je voulais faire—et c'est une excellente remarque qui a été faite à la fin par M. Fricot—est la suivante. Au départ, dans toute cette volonté d'imposer l'accréditation, on semble sous-entendre qu'il n'y avait pas auparavant de pratiques d'aménagement forestier durable. Ce n'est pas vrai, car si je me souviens bien, monsieur Swant, l'une des premières choses que M. Buchanan vous a dite, c'est: «Écoutez, mon vieux, si vous voulez rester là, j'exige que cette forêt soit préservée». Si c'est ce qu'il a fait, on avait bel et bien affaire à de telles pratiques, et c'est de cela qu'il s'est toujours agi.

Toute cette question de la certification a été montée en épingle non pas parce que les autorités responsables des forêts le voulaient, n'ont pas parce qu'il n'y avait pas une bonne gestion des forêts, mais simplement parce que quelqu'un s'est mis dans la tête qu'il fallait le faire parce que... Je ne sais pas pourquoi. Enfin, nous savons que c'était en partie pour des raisons écologiques. Il y avait peut-être aussi des raisons de concurrence. Il s'agissait peut-être d'obtenir une part du marché qu'ils perdaient parce que d'autres concurrents arrivaient, et que c'était un moyen de les empêcher de continuer.

• 1330

J'ai l'impression qu'il y a ici une question de concurrence entre divers autres intérêts qui n'ont rien à voir avec l'industrie forestière—l'industrie du ciment, la sidérurgie, par exemple, qui sont en concurrence avec la matière ligneuse pour les matériaux de construction. Il y a donc ces dimensions et des dimensions mondiales aussi. Plus la technologie progresse, plus on peut exploiter efficacement les forêts.

Étant donné tout cela, ce qui doit motiver Buchanan et les autres entreprises, c'est l'argent. En dernière analyse, tous ces gens-là veulent faire de l'argent, et ils doivent le faire en servant la société tout en répondant aux autres préoccupations environnementales.

Maintenant, si l'on doit vraiment passer par l'accréditation—et je crois que c'est ce qu'a dit M. Fricot—, si l'accréditation est le moyen de garantir une attitude équilibrée sur le marché de manière à ce que les gens qui achètent du bois sachent ce qu'ils achètent... Ils n'ont pas besoin de savoir à qui ils l'achètent, mais simplement de savoir que le bois vient de telle entreprise, avec tel système de gestion. C'est tout ce qu'ils veulent savoir. Ils veulent avoir la garantie qu'il s'agit d'une gestion écologique, qu'il y a de bonnes pratiques d'exploitation, de bonnes pratiques de reboisement, etc. Est-ce que c'est tout?

M. Yves Fricot: Je voudrais rectifier simplement quelque chose. En tant qu'entreprise, nous ne sommes pas nécessairement convaincus que la certification soit la bonne solution. Au niveau de l'entreprise, nous avons examiné la question avec soin et décidé que, vu la façon dont nous gérons nos activités et sachant que nous faisons bien ce que nous faisons, nous n'avions pas à nous faire accréditer, en tout cas pas pour l'instant.

M. Werner Schmidt: Si c'est le cas, et si vous perdez une part du marché à cause de cela, qu'allez-vous faire?

M. Yves Fricot: Nous devrons prendre des décisions à ce moment-là. Pour l'instant, ni nous, ni nos clients n'avons de problème avec notre façon de gérer durablement la forêt. Il y a deux raisons à cela: premièrement, la nature du contexte politique et de la réglementation que nous avons en Ontario, et dont M. Swant a parlé; et deuxièmement, le fait que nous n'avons pas hésité à montrer à nos clients ce que nous faisons.

En fait, je crois que l'une des choses dont nous sommes fiers dans notre organisation, c'est notre très grande rapidité de réaction aux problèmes, qu'il s'agisse de gestion forestière ou d'autres choses. Nous sommes très fiers de ce que nous faisons, et nous ne le cachons pas. À notre avis, l'accréditation n'est absolument pas nécessaire pour nous améliorer ou pour convaincre nos clients de ce que nous faisons.

M. Werner Schmidt: Bon, mais si tout le secteur opte pour la certification et que vous êtes les seuls à ne pas le faire, que se passera-t-il? Non, non, sérieusement.

M. Glen Swant: Il faut bien voir la réalité dans la région du monde dont nous nous occupons. Joe en a parlé. Contrairement à ce qui se passe dans d'autres régions—c'est peut-être à peu près la même chose en Colombie-Britannique—, nous fonctionnons dans le cadre de la licence de quelqu'un d'autre. Il y a beaucoup de gens qui fonctionnent dans le cadre de cette licence et qui régénèrent cette forêt. Pour que la personne responsable de cette licence s'accrédite, il faudrait que nous tous, nous soyons aussi accrédités, et ça pourrait être une tâche colossale. C'est aussi une des raisons pour lesquelles nous n'avons pas opté pour l'accréditation.

Comme l'a dit M. Fricot, nous pensons faire du bon travail. Les forêts sont durables. Notre dossier là-dessus est solide. En plus, quand je parle à mes collègues d'autres entreprises dans le nord de l'Ontario, je me rends compte que nous aurions beaucoup de mal à appliquer l'accréditation tout simplement à cause des difficultés d'intégration de l'ensemble des compagnies.

M. Werner Schmidt: Je dois poursuivre là-dessus car les choses ne sont pas si simples, comme vous le savez. Nous avons des entreprises qui ont des créneaux bien délimités à cause du marché international, et qui ne survivraient pas si elles n'optaient pas pour l'accréditation. Elles l'ont fait simplement pour s'assurer un marché. Si les choses évoluent de cette façon... Et je sais que les pressions sont peut-être excessives. Elles n'ont peut-être rien de scientifiques. C'est en tout cas ce que je crois, j'en suis convaincu. Mais il reste qu'elles sont là, et c'est cela le problème.

• 1335

M. Yves Fricot: En réalité, je n'en suis même pas sûr—dans notre secteur en tout cas. Dans l'industrie du papier et de la pâte à papier, qui est axée sur l'Europe, les pressions sont peut-être...

M. Werner Schmidt: Nous parlons de la Colombie-Britannique.

M. Yves Fricot: Pardon. Franchement, j'ai beaucoup de sympathie pour les gars de Colombie-Britannique, car quand on voit leur code de pratiques forestières, comme vous le soulignez dans votre rapport provisoire, on sait bien que c'est un des codes les plus exemplaires dans le monde.

Prenons donc un peu de recul et soyons honnêtes: les raisons pour lesquelles on s'en prend à nous n'ont rien avoir avec la gestion de la forêt. Ce sont des intérêts commerciaux et des groupes environnementaux qui s'en prennent à nous. Le comité s'en rend bien compte. Alors prenons cela pour ce que cela vaut.

Dans le cas de ce groupe particulier, c'est là-dessus qu'il faut concentrer la réponse. Quand je vois ce qui se passe en Colombie-Britannique, tout le travail qu'ils ont fait sur leur code et tout le travail qu'ils font constamment pour essayer de parvenir à une entente entre les groupes d'écologistes, les organisations sociales et l'industrie forestière, je vois bien que c'est un effort permanent et que même quand ils réussissent à s'entendre, cela ne les fait pas avancer. Franchement, je ne vois pas quelle est la solution pour la Colombie-Britannique.

En Ontario, nous avons eu beaucoup de chance, étant donné l'attitude qu'a prise le gouvernement provincial. Je sais que le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial ne s'entendent pas toujours. Votre comité devrait peut-être essayer de voir comment on pourrait mieux intégrer les responsabilités aux niveaux fédéral et provincial pour répondre à certaines de ces attaques qui sont totalement déplacées.

Le président: Monsieur St. Denis.

M. Brent St. Denis: Merci, monsieur le président.

Merci messieurs, d'être venus nous rencontrer. Pardonnez-moi ma voix.

Je vous remercie de ce que vous avez dit du rapport provisoire, monsieur Fricot. Nous avons vraiment essayé de dire quelque chose et d'obtenir des réactions. Vous avez bien montré qu'il s'agissait d'une question très complexe.

Je crois que l'un des problèmes de notre comité, c'est que certaines régions concentrent actuellement toute l'attention. Prenez les relations entre Irving et Home Depot: dans une certaine mesure, la situation du consommateur dépendait de leurs efforts d'accréditation. Certains secteurs que représente M. Duncan, et il y en a d'autres dans le pays, ne seront peut-être jamais sous les feux de la rampe, ou au contraire le seront peut-être un jour.

Nous essayons de comprendre ce que vous pourriez faire avec un problème qui est peut-être relativement régional maintenant mais qui pourrait aussi devenir un problème national à l'avenir. Nous convoquons des témoins pour nous informer. Si je me souviens bien de ce que vous avez dit il y a quelques minutes, vous estimez que le gouvernement devrait intervenir pour résoudre ces problèmes. Dois-je comprendre qu'à votre avis il vaudrait mieux que le gouvernement fédéral intervienne dans la solution de ces questions régionales et ne participe pas aux efforts pour aider les intervenants à s'intégrer ou à harmoniser leur accréditation? Ou vaut-il mieux que le gouvernement...?

Vous pensez actuellement que vous n'avez pas besoin d'être accrédités. Ça ne sera peut-être jamais le cas, mais vous reconnaissez vous-mêmes que vous devrez peut-être un jour vous y résoudre. Vous n'en savez rien. Par conséquent, le gouvernement fédéral va-t-il revenir sur la recommandation provisoire—vous avez dit que nous devrions peut-être la revoir, et je crois que nous devrions le faire, d'ailleurs ce n'est qu'un rapport provisoire—, cette recommandation où nous disions que le gouvernement fédéral, en collaboration avec le gouvernement provincial et les autres intervenants, les producteurs, les premières nations, etc., devrait encourager activement l'intégration des diverses normes d'aménagement forestier à l'échelle nationale, etc.?

Comment feriez-vous pour sortir de ce dilemme si vous étiez dans notre situation? Vous voulez que le gouvernement fédéral joue un rôle? Quel rôle?

M. Yves Fricot: C'est là qu'on tombe dans le merveilleux magma des divers secteurs de compétence, comme je l'appelle.

Le gouvernement s'est engagé à l'échelle internationale, si nous revenons un peu en arrière, à gérer ses forêts de manière durable. Concrètement, c'est quelque chose qui se fait au niveau provincial par le biais de la législation et de la réglementation de chaque province. Le problème se pose au niveau fédéral lorsque les produits obtenus dans le cadre de ce système de gestion et de production arrivent sur les marchés internationaux et sont attaqués, ou quand d'autres intérêts viennent s'en prendre à nous sur notre propre terrain.

• 1340

Je crois que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer dans ce cas-là, et que pour cela il doit tout d'abord pouvoir affirmer que nous gérons nos forêts de manière durable et que nous le faisons—et quand je dis «nous», je veux dire le gouvernement fédéral—de manière à pouvoir défendre les intérêts canadiens à l'étranger lorsqu'ils sont attaqués en Colombie-Britannique ou en Alberta.

Si les choses sont trop tranchées, je pense que vous allez avoir un gros problème de conflits de compétence. Je ne pense pas que le gouvernement fédéral ait la moindre hésitation à défendre à l'échelle internationale ce que nous faisons dans notre secteur provincial, de la même façon que le gouvernement fédéral était très fier de montrer en exemple le code de pratiques forestières de la Colombie-Britannique. Je suis sûr qu'on pourrait en dire autant des autres provinces, bien que ce soit là les deux seules que je connaisse vraiment bien. Voilà donc un rôle pour le gouvernement fédéral.

Deuxièmement, je pense qu'il est important que le gouvernement fédéral soit prêt, quand des provinces, comme c'est notre cas, gèrent déjà la forêt de manière durable, à réagir très fermement quand quelqu'un, que ce soit un groupe ou un autre dans un an ou dans trois ans, viendra dire: «Pour que nous puissions approuver un produit canadien à l'étranger, vous allez devoir faire les choses de telle ou telle manière au Canada.» Traditionnellement, il y a des différences entre les barrières commerciales gouvernementales directes et indirectes. Le gouvernement a eu tendance à dire: «Écoutez, dès qu'il s'agit d'organisations non gouvernementales, ce n'est plus notre domaine.»

Peut-être le gouvernement fédéral devrait-il au contraire dire qu'il a un rôle à jouer auprès de ce genre d'organisations. Quand je vois ce que l'on finance dans le pays d'un de nos concurrents avec l'argent de son gouvernement, quand je vois une organisation non gouvernementale s'en prendre à ce que nous faisons très bien en tant que Canadiens, je me dis qu'il est légitime que les Canadiens se tournent vers le gouvernement fédéral et lui demandent de venir à leur aide. Le fait que ce ne soit pas ce que j'appelle une barrière commerciale traditionnelle... peut-être devrions-nous élargir nos horizons. Ce n'est peut-être pas le bon terme. Je suis désolé d'utiliser cette expression, mais peut-être devrions-nous voir les choses de manière un peu différente et nous rendre compte que c'est tout simplement une attaque contre l'industrie canadienne, contre la gestion de notre ressource, contre quelque chose que nous faisons en fait très bien.

Le président: Monsieur St. Denis, nous vous redonnerons la parole si nous pouvons.

[Français]

Monsieur Cardin.

M. Serge Cardin: Bonjour, messieurs. Je vous remercie d'abord de nous avoir remis une version française de votre présentation. Je me sens toutefois obligé de porter à votre attention une erreur qui s'est glissée à la page 2. Je crois qu'on aurait dû lire que vous versez annuellement plus de 65 millions de dollars à la Couronne, plutôt que 65 milliards. Lorsque j'ai lu ce chiffre, je me suis dit que le gouvernement avait sûrement les moyens de vous aider.

M. Yves Fricot: Oui, vous avez raison. Il semble qu'il y ait eu erreur.

M. Serge Cardin: D'autant plus que vous mentionnez que votre chiffre d'affaires s'élève à quelque 240 milliards de dollars. Vous avez des intérêts, quoi.

M. Yves Fricot: Je m'en excuse.

M. Serge Cardin: Il n'y a pas de problème. Il me semblait important de corriger ce point.

Vous avez évidemment parlé de l'importance de la certification, ainsi que du rôle important que doit jouer le gouvernement. Je ferai des commentaires plutôt que de poser des questions et je vous inviterai à exprimer votre point de vue si vous le désirez.

On sait qu'il y a des groupes environnementaux qui forcent l'industrie à se prendre en main et à établir des normes de certification. On sent aussi que l'industrie défend certains intérêts au niveau de la certification. Différentes pressions s'exercent et elles varient selon les intérêts qu'on défend. Il faut aussi tenir compte des pressions à l'échelle mondiale.

Mais dès qu'on parle de la protection de l'environnement, on ne peut pas vraiment se fier à l'industrie seule pour assurer la protection des forêts, la biodiversité, etc. Je pense que c'est une responsabilité beaucoup plus grande. Bien que les industries aillent et viennent, les besoins de la population demeurent. Il va sans dire que la protection de l'environnement est très importante.

• 1345

Tout en respectant la compétence des gouvernements provinciaux et territoriaux, le gouvernement fédéral devrait donner une orientation aux normes relatives à la protection de l'environnement. S'il le faisait, il pourrait de plus défendre ces normes, ainsi que l'industrie, à l'échelle internationale. Telle est ma vision. D'ailleurs, le gouvernement dispose des moyens financiers pour le faire. Vous disiez qu'à lui seul, votre groupe versait à la Couronne quelque 65 millions de dollars. Je crois donc que les gouvernements ont la responsabilité de protéger l'environnement, ainsi que les moyens de défendre l'industrie sur le plan international.

M. Yves Fricot: Oui, certainement. Un élément important de tout bon système de certification ou de gérance est un regard indépendant des activités, dans ce cas-ci dans le domaine de la forêt. Comme vous le disiez, une partie ou l'autre ne peut pas se contenter de dire simplement à la fin qu'elle a fait du mieux qu'elle le pouvait et qu'elle a respecté les règles. Je tiens à souligner que ce n'est pas ce que nous faisons actuellement. En Ontario, nous avons établi des normes, et les activités de nos usines font l'objet de vérifications menées par des firmes indépendantes, qui sont distinctes du gouvernement. Nous respectons déjà les normes FSC et nous avons mis en oeuvre notre propre système de vérification. Nous avons à répondre de nos actes à la fois au public et au gouvernement. Nous croyons que le gouvernement a d'abord un rôle à jouer et que nous avons par la suite la responsabilité de maintenir notre système.

Les avantages que cherchent à promouvoir certains groupes qui comparaissent devant vous existent déjà dans le système qu'on a implanté. Bien que je ne sache pas si de tels systèmes existent partout dans le pays, je puis vous dire que c'est déjà une réalité chez nous. Lorsque les normes sont établies, elle le sont à la suite de consultations avec tous les groupes qui ont des intérêts dans la forêt.

On aurait tort de prétendre que l'industrie cherche simplement à protéger ses intérêts et qu'elle fait ce qu'elle veut. Ce n'est pas le cas en Ontario. Nous tenons des consultations auxquelles participent des personnes représentant divers intérêts, y compris des représentants de l'industrie et des groupes environnementaux. À la fin, c'est le gouvernement qui doit, dans le cadre de sa compétence, rendre une décision, et non pas quelqu'un qui a un bureau au Mexique.

Le président: Merci.

Monsieur Godin.

M. Yvon Godin: Vous nous avez dit que ce système avait été importé de la Suède et qu'on vous obligeait à appliquer un système venu d'ailleurs. Les représentants de J.D. Irving, qui sont venus comparaître, nous ont dit autre chose. Ils ont affirmé que c'est un système venu d'ailleurs qu'on mettait en oeuvre ici, mais que diverses régions en changeaient les règles. Ils nous ont dit que le système FSC qu'on met en oeuvre aux États-Unis n'est pas le même qu'ici. Il semble y avoir contradiction entre vos points de vue. Si nous avions un système uniforme, il serait peut-être acceptable à l'échelle mondiale.

M. Yves Fricot: Ce sont les deux aspects du problème qu'on éprouve face à ce système-là. D'abord, les normes et critères originaux, comme on en a témoigné devant vous et comme vous pourrez le constater à la lecture de la dernière page en annexe de notre mémoire, ont été établis par l'industrie suédoise, qui a été par la suite appuyée par le gouvernement. Les Suédois ont fait deux choses: ils ont d'abord contribué à construire le système suédois, puis ils se sont naturellement engagés dans l'établissement de critères généraux qui sont appliqués dans tous les pays.

• 1350

Lorsqu'on arrive dans un pays ou dans une certaine région, on lui dit qu'il ou elle doit créer des normes relatives à chaque critère qu'on a identifié. Alors, d'une part, on a établi un système qui comporte une foule de normes et qui émane d'un pays où on ne les applique même pas, alors qu'on voudrait qu'on les impose chez nous. On confie à des groupes tels ceux auxquels faisait allusion M. Irving ce matin la tâche d'établir des normes régionales, bien qu'il ne s'agisse pas de groupes qui invitent ceux qui le désirent à participer à leur élaboration et qui ont, à mon avis, le droit d'y participer. On constate donc qu'il y a des problèmes de part et d'autre.

M. Yvon Godin: Est-ce que vous recommanderiez, comme je l'ai fait au cours des réunions précédentes, que les gouvernements fédéral et provincial interviennent afin qu'on puisse concilier les demandes de l'industrie et celles de tous les autres intervenants, et afin d'assumer un leadership à l'échelle mondiale, non pas pour nous dicter notre approche, mais plutôt pour jouer un rôle de coordonnateur et réunir à la même table tous les joueurs?

M. Yves Fricot: Oui. Nous pouvons d'ailleurs dire que ce rôle se dégage déjà en raison de nos normes ACNOR, qu'ont appuyées les ministres et le Conseil canadien des ministres de la Forêt. On peut voir l'application de ces normes en Ontario. Ces normes sont un exemple du genre de consensus qui est nécessaire, bien que pour l'instant, elles ne reflètent qu'un consensus canadien. On retrouve ce consensus dans nos lois, bien qu'on n'impose pas ces normes à l'industrie avant que cette dernière ait été appuyée par le gouvernement fédéral ou provincial.

M. Yvon Godin: Merci.

[Traduction]

Le président: Monsieur Duncan.

M. John Duncan: Merci, monsieur le président.

Je vais partir dans une autre direction: Le groupe Buchanan a-t-il une position officielle sur le renouvellement ou le non-renouvellement de l'accord sur le bois d'oeuvre?

M. Yves Fricot: Je me fais un plaisir de répondre à cette question et, si vous me le permettez, monsieur Duncan, j'aimerais prendre un peu de recul.

Le débat actuel est essentiellement présenté en ces termes: «Les gens sont-ils en faveur d'un quota ou en faveur du libre-échange.»? La première chose qu'il faut comprendre, c'est qu'il n'y a plus de libre-échange dans le domaine du bois d'oeuvre depuis très longtemps. Il y a eu des mesures compensatoires, il y a eu un protocole d'entente, il y a eu des menaces d'autres mesures compensatoires, et il y a maintenant un accord sur le bois d'oeuvre.

Ce que l'on dit peut-être pas très souvent à propos de cet accord, c'est qu'il a permis d'assurer une certaine stabilité depuis un certain nombre d'années. C'est important pour deux raisons. Premièrement, c'est important parce que cela nous permet de gérer nos entreprises, notre commerce avec les États-Unis et le reste. Cette stabilité est importante aussi au niveau du prix de notre produit.

Alors quand on vient maintenant nous dire qu'il faut jeter cet accord à la poubelle et le remplacer par le libre-échange, il faut bien comprendre que rien n'est gratuit. Ce que cela veut dire, c'est qu'il y aura des mesures compensatoires dans le cadre des nouvelles lois américaines, que ces gens-là espèrent qu'ils gagneront la bataille dans quatre ou cinq ans et que d'ici là on ne peut pas vous dire ce que cela vous coûtera. Selon certains, cela ne nous coûtera que 1 ou 2 p. 100, mais si on parle aux mêmes personnes qui avaient la même argumentation lorsqu'elles réclamaient un régime de quota, ce sera au moins 30 p. 100. Vouloir tout liquider, c'est vraiment plonger dans l'inconnu.

Où en est notre société? Nous souhaitons et nous préconisons avec soin que, avant de décider de supprimer le système actuel, nous examinions les options possibles pour le moderniser ou le modifier afin de tenir compte des préoccupations exprimées tant par nous que par les Américains, par souci de justice puisqu'il s'agit, je suppose, d'un accord.

• 1355

Certaines des principales préoccupations—et elles concernent les autres questions—portent sur le fait qu'il y a eu une énorme incursion de producteurs étrangers sur le marché américain. Il est donc très facile de dire au Canada qu'il doit limiter ses expéditions et accueillir à bras ouverts la Suède et le bois certifié par le FSC. Où encore il est très facile de dire: «Désolé, Canada, mais vous ne pouvez pas obtenir encore votre certification car les normes ne sont pas sous forme écrite».

M. John Duncan: Il y a un lien...

M. Werner Schmidt: Oui, absolument.

M. John Duncan: Je ne veux pas que vous passiez tout le temps qu'il reste à discuter de cette question, car nous en avons déjà beaucoup parlé. J'en connais tous les aspects. Je veux simplement savoir qu'elle est votre position.

M. Yves Fricot: Nous ne sommes pas convaincus à l'heure actuelle que toutes les solutions qui débouchent sur la suppression de l'accord soient vraiment les bonnes qu'il faille envisager.

M. John Duncan: Oui, et il faut bien avouer que les gens qui font valoir l'argument ne présentent pas des positions aussi polarisées que vous; ils comprennent l'aspect des mesures compensatoires.

M. Yves Fricot: Oui.

M. John Duncan: La principale différence, ce sont les groupes d'intérêts américains qui participent désormais au débat et sont partie prenante, outre la Coalition for Fair Lumber Imports dans ce pays. Ils considèrent qu'il s'agit donc d'une taxe très visible. Ils joindraient leurs efforts à ceux des producteurs canadiens qui s'opposent à cette taxe très visible qu'on appelle droit compensateur.

M. Yves Fricot: L'an dernier, l'industrie canadienne et les dirigeants des principales sociétés canadiennes ont consacré beaucoup de temps et d'énergie à l'étude de cette question. Ils l'ont fait avec l'aide du gouvernement fédéral, comme vous le savez. Il y a eu des réunions à Ottawa. Certains gouvernements provinciaux y ont participé. Vous avez raison de dire que le débat n'est pas polarisé, mais il faut néanmoins examiner de façon minutieuse les deux options. Nous craignons que, parfois, ce que vous préconisez semble à première vue une solution très simple alors que, comme vous le savez, puisque vous l'avez examiné...

M. John Duncan: Un outil de communication...

M. Yves Fricot: Oui, un outil de communication, et comme pour l'autre question dont nous discutons aujourd'hui, nous nous inquiétons généralement des outils de communication.

M. John Duncan: En second lieu, vous avez de toute évidence suivi d'assez près les témoignages reçus par notre comité. Êtes-vous au courant du mémoire et de la proposition de la Forest Alliance of British Columbia et de la section locale de IWA relative à la promotion des ventes, le programme de 1,1 million de dollars? Ces gens-là demandent une somme de 400 000 $ au gouvernement fédéral. Êtes-vous au courant?

M. Yves Fricot: Je n'ai pas lu le mémoire en question; j'ai lu les témoignages. Nous n'avons pas pris le temps de réfléchir aux détails de la proposition pour voir s'ils répondaient convenablement à la question. Il va sans dire que, sur le plan du principe, nous convenons qu'il n'y a aucune raison de ne pas faire la promotion de nos activités. Parfois, l'attaque est la meilleure défense qui soit.

D'après mes renseignements, d'ailleurs, le gouvernement de l'Ontario a entrepris ce genre d'initiative. Ce qu'il faudrait peut-être faire—je ne sais pas dans quelle mesure cela s'est fait en Colombie-Britannique—c'est de confier au gouvernement fédéral le soin de coordonner certaines de ces initiatives, car les parties prenantes ont des intérêts communs aux deux paliers de gouvernement et dans les provinces.

M. Glen Swant: Si je peux ajouter quelque chose, le ministre des Ressources naturelles de l'Ontario, John Snobelen, doit se rendre en Europe cet été avec deux représentants de l'industrie pour présenter le même discours que celui que j'ai ici aujourd'hui, que nous avons...

M. John Duncan: L'un des...

Le président: Désolé, monsieur Duncan...

M. John Duncan: Ce n'est pas une question, mais une observation.

Le président: Je vous demanderais d'être très bref, car nous avons déjà dépassé l'heure prévue.

M. John Duncan: Si je posais cette question, c'est parce qu'on a l'impression que les bureaucrates sont actuellement d'avis que la certification va résoudre tous les problèmes et qu'il est inutile de se lancer dans une compagne de promotion dynamique. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

Le président: Monsieur Fricot.

M. Yves Fricot: Je peux vous le dire en quelques mots.

Si vous remontez à quelques années en arrière, les gens disaient qu'il fallait modifier le code de pratiques d'aménagement forestier en Colombie-Britannique ou en Ontario, parce que ce que nous faisions était vraiment néfaste et que si on le modifiait, à l'instar des autres provinces... Le problème n'a pas disparu. Il y a maintenant celui de la certification, qui est censée résoudre le problème.

• 1400

Tout comme il nous faut continuellement améliorer nos activités courantes sur le terrain, ce que nous continuerons de faire à l'avenir, le problème ne va pas disparaître du jour au lendemain parce que quelqu'un autorise une personne à apposer un logo sur un produit. Je regrette, mais je ne suis pas d'accord sur ce point.

M. Glen Swant: Si vous me permettez une brève intervention étant donné que je ne reviendrai sans doute jamais ici... Yves pourra...

M. Yves Fricot: Non, merci.

M. Glen Swant: Pour répondre à M. Schmidt, nous avons créé notre société à partir de presque rien. C'est une société privée. Nous voyons d'un mauvais oeil les gens qui viennent chez nous nous dire ce que nous devons faire. C'est pourquoi nous laissons traîner les choses. Nous prenons tout notre temps lorsque nous sommes confrontés à ce genre d'ingérence.

M. Yvon Godin: L'environnement n'est pas votre seule propriété, toutefois...

M. Glen Swant: C'est exact.

M. Yvon Godin: ...il appartient à toute la population.

M. Glen Swant: C'est exact. Vous avez raison.

M. Yvon Godin: C'est la partie...

Une voix: Je pense qu'il veut dire...

Une voix: [Note de la rédaction: Inaudible]... plus de groupes.

Le président: Monsieur Fricot, je vais permettre à M. Cardin de prendre la parole car il voulait faire une remarque.

[Français]

M. Serge Cardin: Oui, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Allez-y.

[Français]

M. Serge Cardin: Je voulais à mon tour remercier les témoins d'avoir déposé des documents dans les deux langues officielles. J'aimerais que notre greffier dise clairement à nos témoins qu'ils doivent arriver ici avec des documents dans les deux langues officielles, ce que certains témoins n'ont pas fait dernièrement. Lorsqu'un député ne reçoit pas un document dans sa langue maternelle, il est défavorisé et il ne dispose pas des mêmes outils que ses collègues afin de pouvoir travailler efficacement au sein du comité. De plus, il arrive souvent qu'on doive attendre longtemps avant d'obtenir une traduction. Je souhaite donc qu'on exige désormais que tous les documents soient déposés dans les deux langues et que cette règle soit respectée le plus souvent possible.

Le président: Merci.

[Traduction]

Monsieur Comuzzi, nous avons 30 secondes.

M. Joe Comuzzi: Pour faire suite aux remarques de M. Cardin, monsieur le président, et ceci n'est pas directement en rapport avec le témoignage que nous avons entendu, on a tellement travaillé à la traduction française de ce document que, lorsqu'il a été envoyé au greffier—il a été traduit à Thunder Bay—, on a oublié d'y joindre la version anglaise. Celle-ci n'est parvenue qu'hier.

C'est tout. Je vous remercie.

M. Yvon Godin: Cela va finir par des milliards de dollars.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Monsieur Fricot et monsieur Swant, je dois vous dire que nous avons écouté votre témoignage avec le plus grand intérêt. Vos remarques ont été pertinentes et très utiles, surtout dans le contexte de certaines choses dont nous avons entendu parler ce matin.

Au nom de tous mes collègues, je tiens à vous remercier non seulement d'avoir présenté votre allocution dans les deux langues officielles, mais aussi de nous avoir fait part avec beaucoup de franchise de votre expérience personnelle. Cela nous sera très utile, j'en suis certain.

M. Yves Fricot: Merci, monsieur le président.

Je remercie les membres du comité.

Le président: La séance est levée jusqu'à nouvel ordre.