NRGO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON NATURAL RESOURCES AND GOVERNMENT OPERATIONS
COMITÉ PERMANENT DES RESSOURCES NATURELLES ET DES OPÉRATIONS GOUVERNEMENTALES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 6 juin 2000
Le vice-président (M. Julian Reed (Halton, Lib.)): Étant donné que nous avons le quorum, je déclare la séance ouverte. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre examen de la gestion des forêts au Canada dans la perspective du commerce international.
Nous accueillons de nouveau aujourd'hui les porte-parole du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international—nous leur sommes très reconnaissants de nous revenir—, M. Richard Ballhorn, directeur général de la Direction générale des affaires environnementales internationales, M. Wallace Dowswell, directeur général de la Direction générale des contrôles à l'exportation et à l'importation, ainsi que M. Greg Graham, coordonnateur du Programme international de partenariat en foresterie, Direction des programmes de communications et de sensibilisation. Nous accueillons également un représentant du ministère des Ressources naturelles, M. Dan Welsh, qui est directeur des programmes à la Direction générale de l'industrie, de l'économie et des programmes.
Bienvenue, messieurs.
• 1110
Je sais que vous n'avez pas de déclaration préliminaire à
faire, mais vous nous avez fait distribuer un document produit dans
les deux langues officielles, que les membres du comité trouveront
sans doute utile.
J'espère que vous en avez tous déjà une copie.
En fait, nous reprenons cet examen là où nous l'avions laissé en avril. Nous allons passer immédiatement à la période de questions. Comme à l'accoutumée, nous allons d'abord donner la parole à l'opposition officielle, puis aux représentants de l'équipe ministérielle, et enfin, à d'autres députés de l'opposition.
Monsieur Schmidt, aimeriez-vous commencer?
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup, messieurs, d'avoir accepté de comparaître de nouveau devant nous. Nous sommes heureux de vous revoir. Il nous fait chaud au coeur d'avoir ici devant nous tous ces gens compétents prêts à répondre à nos questions.
Il y a un élément qui m'obsède et qui n'est pas visé par ces statistiques, que je trouve par ailleurs très intéressantes et à propos desquelles j'aimerais vous poser quelques questions. En fait, ce que j'aimerais savoir en premier lieu, c'est où nous en sommes actuellement en ce qui touche l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux et dans quelle mesure les divers producteurs et exportateurs de produits forestiers s'entendent sur cette question?
Le vice-président (M. Julian Reed): Monsieur Dowswell.
M. Wallace Dowswell (directeur général, Direction générale des contrôles à l'exportation et à l'importation, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Où en sommes-nous en ce qui touche l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux? Comme on vous l'a expliqué déjà, je crois, nous menons des consultations depuis quelques mois auprès des différents intervenants des quatre coins du pays, depuis la côte Est jusqu'à la côte Ouest, y compris avec les groupes du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest. Nous avons donc rencontré de nombreux groupes à ce sujet.
Je crois que s'il y a un point qui fait essentiellement consensus chez tous ces groupes, c'est qu'aucun d'eux ne dit souhaiter le renouvellement de l'accord actuel. Pour le reste, on observe certaines divergences de vues.
D'ailleurs, ces consultations se poursuivent au moment où nous nous parlons, pour essayer de faire le point sur la situation. Cela m'amène à répondre précisément à votre question principale, qui portait plus particulièrement sur les producteurs de bois. Comme vous le savez peut-être, les représentants des entreprises et de leurs associations, dans les quatre provinces assujetties à l'actuel Accord sur le bois d'oeuvre résineux, à savoir la Colombie-Britannique, l'Alberta, l'Ontario et le Québec, se sont rencontrés périodiquement ces derniers mois afin de voir s'il n'y aurait pas possibilité d'en arriver à une position commune.
Ils se sont récemment réunis à Toronto, il y a environ une semaine, et ils ont indiqué avoir atteint un certain degré de consensus. Ils souhaitent qu'à tout le moins, le gouvernement fédéral entende le point de vue du gouvernement américain à propos de la façon dont nous pourrions en arriver à trouver une solution à ce problème, compte tenu de l'expiration prochaine de l'accord actuellement en vigueur. Si j'ai bien compris, ils ont l'intention de faire connaître plus précisément leur position d'ici quelques semaines. Je n'ai pas d'autres détails pour le moment à ce sujet, mais je puis vous dire qu'ils ont travaillé très fort à la recherche d'un consensus au sein de leur groupe. Ils sont censés nous apporter des précisions à cet égard dans les semaines qui viennent.
Bien entendu, le Canada atlantique ne participe pas à cet exercice, car, comme vous le savez, les quatre provinces Maritimes ne sont pas assujetties à l'Accord fédéral sur le bois d'oeuvre résineux. Elles sont régies par un accord distinct qui ne prévoit dans leur cas aucune mesure restrictive de contingentement. Dans l'accord intervenu entre le Canada et les États-Unis, il a été convenu que ces provinces n'étaient pas réputées bénéficier de subventions présumées. Je parle de subventions «présumées» parce que c'est ainsi qu'on les a qualifiées quand on a allégué que les provinces de l'Ouest, le Québec et l'Ontario bénéficiaient de subventions.
Dans le cadre de cet accord, les provinces Maritimes ne sont pas assujetties au contingentement. Elles souhaitent demeurer exemptées de toute restriction et continuer de fonctionner comme à l'heure actuelle. Voilà où nous en sommes dans le moment.
Merci.
M. Werner Schmidt: J'aimerais poursuivre, si vous me le permettez, monsieur le président.
Je vous ai entendu dire que les groupes canadiens visés par l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux ne souhaitent pas renouveler cet accord tel qu'il est actuellement. Est-ce à dire qu'ils seraient favorables à la conclusion d'un accord modifié ou différent de l'accord actuel? Ou souhaiteraient-ils plutôt en venir à un régime de libre-échange intégral? Il me semble très important d'établir si leur préférence va à la conclusion d'un accord. Peut-être que, parmi les problèmes que suscite l'accord actuel, certains ont davantage trait à des aspects techniques qu'au principe même de la conclusion de ce genre d'accord. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
M. Wallace Dowswell: Je ne voudrais pas toujours devoir essayer de parler à la place de l'industrie. Elle est en train d'établir sa position. Pour l'instant, je ne crois pas me tromper en disant qu'elle considère que l'accord actuel de contingentement est impraticable. Ces gens croient que la meilleure solution à long terme serait de s'orienter vers le libre-échange intégral, compte tenu de l'augmentation constante de la demande de bois d'oeuvre sur le marché nord-américain. Mais je crois que, pour le moment, comme je vous l'ai dit précédemment, ces gens ne souhaitent pas forcément opter pour une solution radicale et rapide, privilégier une voie plutôt qu'une autre, en oubliant tout le reste; ils tiennent à bien peser leurs décisions et leurs choix.
Dans cet esprit, ce qu'on nous dit dans l'industrie, c'est qu'on aimerait, dans un premier temps, s'enquérir auprès des Américains de ce qui, selon eux, permettrait de résoudre plus amicalement le problème de nos relations bilatérales plutôt que de s'engager dans un différend commercial impliquant l'imposition de droits compensateurs; ensuite, on pourrait peser les différentes options. Je ne saurais parler davantage en leur nom, mais c'est, me semble-t-il, ce que ces gens demandent actuellement.
M. Werner Schmidt: Merci.
Me reste-t-il du temps, ou dois-je m'arrêter ici?
Le vice-président (M. Julian Reed): Allez-y. Nous allouons dix minutes à chacun.
M. Werner Schmidt: Très bien.
Mon autre question a trait au pourcentage d'exportations canadiennes de bois dans l'ensemble du marché américain. Quelque 96 p. 100 du bois d'oeuvre importé qui est offert sur le marché américain—en réalité, c'est même davantage—provient du Canada. Quel pourcentage du bois d'oeuvre utilisé aux États-Unis est importé et quel pourcentage est produit aux États-Unis?
M. Wallace Dowswell: Je crois que nous vous avons fait parvenir il y a quelque temps, justement pour répondre à des questions comme celle que vous posez, des documents statistiques accompagnés d'un bulletin statistique trimestriel produit par Ressources Naturelles Canada. Or, comme ces documents contiennent ce genre de renseignements, je vous inviterais donc à vous y référer pour avoir la réponse à votre question.
Mais je puis vous dire, sans moi-même m'y référer—par conséquent, vous feriez bien de ne pas trop vous fier à mes chiffres et de vérifier plutôt ce qu'il en est dans les documents statistiques officiels—, que les exportations canadiennes représentent de 34 à 35 p. 100 de la consommation totale de bois d'oeuvre aux États-Unis, contre plus ou moins 1 p. 100 provenant des importations depuis d'autres pays. Le reste est produit localement.
M. Werner Schmidt: Merci.
Je regrette de devoir accaparer le temps du comité, mais je n'ai pas reçu ce matériel suffisamment à l'avance pour avoir pu en prendre connaissance. À quel endroit y trouve-t-on ces chiffres? J'y vois des chiffres à propos des exportations, mais pourriez-vous m'indiquer à quel page on nous renseigne sur le marché américain?
M. Wallace Dowswell: Vous devriez consulter le bulletin statistique plutôt que les feuilles que nous vous avons remises. Avez-vous ce document?
M. Werner Schmidt: Ça va.
M. Wallace Dowswell: L'un des tableaux porte sur le marché américain. Le tableau 1 porte sur la production canadienne et américaine, et le tableau 2 nous renseigne sur les exportations nationales.
M. Werner Schmidt: Ça va. Merci.
M. Wallace Dowswell: Très bien.
Le vice-président (M. Julian Reed): Monsieur Bélair.
M. Réginald Bélair (Timmins—Baie James, Lib.): Merci, monsieur le président.
Dans le même ordre d'idée que la question précédente, je vous rappelle qu'aux dernières nouvelles, qui datent d'environ deux ou trois mois, une centaine de membres du Congrès et de sénateurs américains appuyaient activement les groupes américains qui militent en faveur de l'abolition de l'accord de contingentement conclu il y a quatre ans. Leur appui est-il authentique, ou s'explique-t-il uniquement du fait que les États-Unis vont aller en élections cette année?
Deuxièmement, si ces membres du Congrès et ces sénateurs maintiennent leur appui à ce mouvement, appréhendez-vous qu'une absence éventuelle d'accord puisse présenter pour nous une attrape? Autrement dit, ne risquons-nous pas qu'éventuellement, les Américains aient recours au mécanisme de règlement des différends prévu dans l'Accord de libre-échange en alléguant que nous exportons du bois d'oeuvre de manière déloyale? Où en sommes-nous à cet égard?
M. Wallace Dowswell: En ce qui a trait à votre première question, oui, il y a eu—je ne suis pas sûr du terme technique qu'il faudrait employer ici—une motion, ou un genre de pétition du Congrès qui a circulé et qui a obtenu un certain nombre de signatures. Je crois que c'est au-delà d'une centaine, comme vous le dites. Ce mouvement est parrainé par certains groupes d'intérêt américains, comme l'association des constructeurs d'habitation. Sauf erreur, ce mouvement s'appelle Affordable Homes of America. Il représente les consommateurs ou utilisateurs de bois d'oeuvre aux États-Unis, de même que les groupes de détaillants du genre Home Depot. Ces gens sont convaincus qu'il n'est pas dans leur intérêt qu'on maintienne une entente de contingentement.
M. Réginald Bélair: Ils jouent un rôle important dans les négociations qui se déroulent actuellement.
M. Wallace Dowswell: Permettez-moi de rectifier un point. Nous ne sommes pas actuellement en négociation, mais...
M. Réginald Bélair: Dans les préliminaires...
M. Wallace Dowswell: ...on peut dire à juste titre qu'aux États-Unis, ces gens font connaître leurs points de vue au gouvernement américain et au Congrès à Washington. Nous croyons qu'ils ont déjà une certaine influence. Vous avez donc raison là-dessus.
Si l'Accord expire, il sera périmé et c'en sera fini de l'entente. La contrepartie, pour ainsi dire, c'était que, dans le cadre l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux, les États-Unis n'accepteraient pas de prendre des mesures commerciales contre le Canada tant que cette entente demeurerait en vigueur.
M. Réginald Bélair: Vous ne le prévoyez pas?
M. Wallace Dowswell: Si l'Accord prend fin, cette obligation sera également levée. L'industrie américaine pourrait alors, si elle le désire, demander au gouvernement américain d'intenter contre le Canada une action en recours de droits compensateurs ou quelque autre mesure de représailles commerciales, comme nous en avons déjà subi dans le passé. S'il s'agissait d'une action en recours de droits compensateurs, nous contesterions cette décision auprès de l'instance de règlement des différends, comme le prévoit l'Accord, et, éventuellement, si nous en appelions de la décision de cette instance, nous nous en remettrions au mécanisme de règlement des différends de l'ALENA ou de l'OMC, selon la voie que nous choisirions.
M. Réginald Bélair: Mais avez-vous le sentiment à ce moment-ci que les Américains n'enclencheront pas de telles procédures contre nos exportations?
M. Wallace Dowswell: Naturellement, c'est à eux qu'il appartient d'en décider. Je vous ferai remarquer que, dans le passé, ils l'ont fait. Ils soutiennent que nous subventionnons l'industrie. Nous avons toujours contesté ce genre d'accusation et eu recours aux mécanismes de règlement des différends.
Je dirais donc que, par le passé, ils ont été portés à se servir de leurs recours commerciaux comme bon leur semblait. Je n'ai pas tendance à croire qu'ils agiraient autrement.
M. Réginald Bélair: Oui.
Jusqu'à maintenant, il n'a pas été question de limites sur nos exportations?
M. Wallace Dowswell: Non, nous n'avons pas eu...
M. Réginald Bélair: Non pas de contingentement, mais de limites?
M. Wallace Dowswell: Non, nous n'avons pas eu de discussions ou de négociations sur ce genre de question.
M. Réginald Bélair: Vous n'en êtes pas encore là.
M. Wallace Dowswell: Non.
M. Réginald Bélair: Quand pouvons-nous prévoir qu'il se passera quelque chose de concret? Nous ne sommes qu'à un an de l'échéance.
M. Wallace Dowswell: C'est juste. En un sens, un an, c'est long, mais, dans un autre sens, c'est évidemment bien court.
Pour l'instant, comme je l'ai mentionné précédemment, l'industrie canadienne commence à se dire qu'il serait souhaitable que nous nous engagions au moins dans des pourparlers officieux avec les autorités américaines pour avoir une idée de la façon dont nous devrions traiter la question. Comme nous n'en sommes pas encore là, rien n'a encore été fait en ce sens. Il semble bien que nous ne saurons pas s'il se fait quelque chose de concret tant que nous n'aurons pas eu ce genre de discussion avec les Américains ou que ces derniers ne nous auront pas soumis une proposition. Autrement, il va sans dire que, si personne ne pose un geste, l'Accord arrivera à expiration à la fin de mars, et c'est alors l'Accord de libre-échange qui s'appliquera, et ce, tant que nous n'aurons pas à faire face à une action en recours de droits compensateurs, s'il y a lieu.
M. Réginald Bélair: Comme dernière question, j'aimerais que vous me disiez si vous êtes déjà entrés en communication avec le groupe qu'a mis sur pied Frank Dottori?
M. Wallace Dowswell: Le Free Trade Lumber Council?
M. Réginald Bélair: Oui.
M. Wallace Dowswell: Oui. Au cours de nos consultations, c'est l'un des groupes que nous avons rencontrés et avec lesquels nous avons eu des discussions.
M. Réginald Bélair: À moins qu'à l'heure actuelle il ne s'agisse là de renseignements confidentiels, pourriez-vous informer le comité de la façon dont ces gens voient les choses dans un premier temps? Si vous le voulez bien.
M. Wallace Dowswell: Je crois qu'en un sens, je ferais mieux de leur laisser le soin de le faire eux-mêmes. En répondant à la première question qui m'a été posée, j'ai tenté d'expliquer que les représentants de l'industrie, ceux de l'Ontario, du Québec, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique, ont tenu récemment des rencontres auxquelles Frank Dottori et le groupe Free Trade Lumber Council ont participé. Donc, ces gens cherchent à établir une position commune sur cette question. Ce groupe a fait valoir son point de vue, dont on a d'ailleurs tenu compte dans le consensus qui semble se dégager au sein de l'industrie.
Le vice-président (M. Julian Reed): Merci beaucoup, monsieur Bélair.
[Français]
Monsieur Cardin.
M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ): Bonjour, messieurs. Vous avez dit tout à l'heure que la meilleure solution, à plus ou moins long terme, serait le libre-échange et que si on n'arrivait pas à un accord d'ici le mois de mars, c'est le libre-échange qui s'appliquerait.
Dans un contexte de libre-échange, quelles pressions s'exerceraient sur le commerce? Est-ce que les pressions auraient des effets négatifs ou positifs sur les exportations du Canada vers les États-Unis? Et est-ce qu'il en découlerait des pressions sur l'environnement au Canada, sur la gestion de nos forêts et de nos autres ressources?
[Traduction]
M. Wallace Dowswell: Je dirais que, si aucun accord n'est intervenu concernant expressément cet aspect, c'est que l'accord actuellement en vigueur porte exclusivement sur l'exportation du bois d'oeuvre. Les questions relatives aux pratiques environnementales, aux quantités de coupes permises, etc. sont de compétence provinciale. Les provinces ont déjà leurs règlements concernant les quantités de coupes autorisées et les moyens et mécanismes auxquels peuvent recourir les entreprises pour intenter des poursuites en matière d'environnement.
Je crois donc qu'il n'y a pas lieu de craindre que, si on en venait au régime du libre-échange, par exemple, les activités d'exploitation n'augmentent de façon astronomique et que tout un chacun ne se mette à couper autant d'arbres qu'il le peut, car il existe tout un ensemble de lois et règlements provinciaux qui traitent expressément des incidences des coupes sur l'environnement et sur les questions de ce genre. Voilà ce que je répondrais à votre question à ce sujet.
[Français]
M. Serge Cardin: Donc, vous dites que...
[Traduction]
M. Richard D. Ballhorn (directeur général, Direction générale des affaires environnementales internationales, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): J'aimerais ajouter quelque chose.
Tout ce que nous avons été à même d'observer un tant soit peu sur le plan environnemental, c'est que certains des groupes canadiens de défense de l'environnement se sont prononcés en faveur du maintien de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux ou des tarifs douaniers sur les produits forestiers, en ce qui touche cet important marché canadien d'exportation vers l'étranger, en invoquant le fait que de telles mesures contribuent à freiner l'exploitation forestière au Canada. C'est, entre autres choses, ce qu'ils ont affirmé, mais ils ne se sont pas vraiment montrés très actifs jusqu'à maintenant.
L'autre chose qui entre en ligne de compte à cet égard, c'est que l'Accord additionnel de l'ALENA sur l'environnement prévoit une procédure qui permet à des groupes de citoyens de déposer des plaintes dans l'éventualité où les lois en vigueur en matière de protection de l'environnement ne seraient pas respectées. Je crois qu'un des groupes environnementaux, ou un regroupement de groupes environnementaux, a effectivement utilisé ce recours concernant la gestion des forêts en Colombie-Britannique. Sauf erreur, une telle plainte a été déposée, mais je ne crois pas qu'on soit allé plus loin jusqu'à maintenant. Cette mesure permet cependant à de tels groupes d'obtenir des gouvernements l'information dont ils ont besoin, et il y a une procédure de prévue essentiellement pour faire rapport sur des questions de ce genre.
Il y a donc peut-être un lien entre cela et la question que vous posez. Il n'est pas clair que les plaintes de ces gens concernent strictement le bois de résineux, mais ils ont à tout le moins fait savoir qu'ils craignaient qu'une libéralisation encore plus poussée du commerce des produits forestiers n'entraîne une surexploitation des ressources forestières, ce qui serait dommage.
[Français]
M. Serge Cardin: Merci.
[Traduction]
Le vice-président (M. Julian Reed): Merci beaucoup.
[Français]
Monsieur St-Julien.
M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Nous avons eu de la documentation nous donnant un aperçu global des exportations. Je l'ai reçu par courrier, mais vous l'aviez transmise par télécopieur et les chiffres sont très petits et se lisent très mal. J'aimerais bien avoir à mon bureau une copie originale qui se lirait très bien, parce que ce que j'ai reçu ne se lit vraiment pas.
J'ai deux questions, dont une sur l'attribution des quotas. On sait que l'accord canado-américain sur le bois d'oeuvre a été conclu le 2 avril 1996 et qu'il se termine le 2 avril 2001. Est-ce bien en 2001 que se termine l'accord?
M. Wallace Dowswell: Oui.
M. Guy St-Julien: J'aimerais avoir des données sur le système d'attribution pour l'année 1999, ainsi que de la documentation sur les grossistes canadiens. On sait que les grossistes n'ont pas de quotas. Ce que je trouve bizarre dans tout ce qui a trait aux quotas, c'est que le système de contingentement permet aux sociétés canadiennes qui se voient attribuer des quotas de prendre des décision rationnelles et à long terme. Quant aux grossistes, il y en a actuellement qui n'ont ni employés ni usines et qui obtiennent des quotas qui nuisent à la petite entreprise, entre autres en Abitibi-Témiscamingue, où on a des exemples de cela.
• 1130
Depuis janvier ou
février, il y a eu un surplus de quotas pendant un mois
ou deux. Est-ce que vous en faites la redistribution?
[Traduction]
M. Wallace Dowswell: Bien sûr que non. S'il y a des erreurs, nous les corrigeons, d'une façon ou d'une autre, et nous l'avons fait à quelques occasions au cours des quatre dernières années, notamment dans le cas d'erreurs d'entrées ou de quelque chose de ce genre. Les parts de contingent d'une entreprise avaient parfois été mal calculées, et quand une telle erreur nous était signalée, nous prenions soin d'apporter les corrections nécessaires. S'il y a effectivement une erreur, nous la corrigeons.
Je sais que la question des grossistes fait l'objet de discussions depuis l'entrée en vigueur de l'Accord, et, comme vous l'avez mentionné, il a été décidé que les grossistes n'obtiendraient pas de parts de contingent.
Au moment de l'attribution initiale des parts de contingent, il a été convenu que les entreprises de nouvelle ouvraison seraient admissibles à l'obtention de parts de contingent. On a alors établi les critères permettant de définir quels types d'entreprises auraient droit à des parts de contingent. Or, même si d'aucuns parmi les représentants de l'industrie considéraient ces entreprises comme étant, disons, des grossistes plutôt que des entreprises de nouvelle ouvraison, il a été convenu qu'elles répondaient à certains de ces critères. Quelques entreprises de nouvelle ouvraison se sont effectivement vues allouer des parts de contingent, et la raison en est qu'elles répondaient aux critères qui avaient été établis à ce moment-là et qui avaient fait l'objet de discussions et d'un consensus parmi les groupes représentant l'industrie au moment de l'allocation initiale des parts de contingent.
Merci.
[Français]
M. Guy St-Julien: Vous parlez de critères. Est-ce qu'on peut obtenir la répartition de ces grossistes par province canadienne? On sait qu'on ne peut pas obtenir la liste des gens qui ont des quotas, mais est-ce qu'on peut obtenir le nombre de grossistes par province qui ont eu des quotas, et savoir combien ils en ont eu et combien ils en ont éliminé à la longue? Est-ce qu'il y a eu des surplus? Il y a sûrement une liste qui existe quelque part.
[Traduction]
M. Wallace Dowswell: Comme vous le savez, nous ne pouvons dévoiler le nombre de parts de contingent attribuées à chaque entreprise. Il a été décidé que ces renseignements seraient considérés comme étant des «renseignements commerciaux de nature exclusive», et ce sont là les garanties qui ont été données à l'époque. Nous avons toutefois publié annuellement, et ce, depuis la première année, la liste de tous les détenteurs de parts de contingent. Nous pouvons donc vous fournir la liste de toutes les entreprises qui se sont vues attribuer des parts de contingent. Nous allons la faire parvenir à la greffière.
[Français]
M. Guy St-Julien: Merci.
J'aimerais poser une autre question là-dessus. Comment se fait-il que des petites compagnies établies dans des villes monoindustrielles comme Barraute et Senneterre, dont le fonctionnement est lié à la foresterie, au secteur minier ou à autre chose et qui dépendent du chemin de fer, ont de la difficulté à obtenir des quotas?
Dans une ville comme Barraute, chez nous, il y a de petits entrepreneurs, qu'on appelle des re-man des «remanufacturiers», qui ont de la difficulté à obtenir des quotas pour survivre. On sait qu'ils acheminent beaucoup de leurs produits aux États-Unis. Je vais vous donner l'exemple de Précibois et d'Optibois, qui ont vraiment de la difficulté à obtenir des quotas du gouvernement fédéral. À quoi est-ce dû? Pourquoi n'obtiennent-ils pas les quotas qui sont en surplus?
[Traduction]
M. Wallace Dowswell: Comme vous le savez, bien sûr, toutes les parts de contingent ont été attribuées. En règle générale, on ne garde pas en réserve des parts de contingent pour pouvoir les attribuer plus tard. Toutefois, notamment au Québec, comme vous le savez, l'Accord prévoit que si le prix demeure au-dessus du prix de déclenchement pendant tout un trimestre, on applique alors le régime dit des «parts de bonus». Depuis l'été dernier jusqu'à récemment, nous avons reçu ces parts de bonus. Dans le cas du Québec, par suite de discussions que nous avons eues avec l'AMBSQ, il a été convenu que nous proposerions au ministre d'allouer, dans cette province, ces parts de bonus aux entreprises qui avaient de faibles ratios de parts de contingent en regard de leurs ventes, c'est-à-dire inférieurs à 50 p. 100—autrement dit, aux entreprises ayant reçu des parts de contingent d'une valeur inférieure à 50 p. 100 de la valeur totale de leurs ventes.
De concert avec l'AMBSQ, nous nous sommes donc efforcés de remédier par ce moyen à certains de ces problèmes. Comme l'AMBSQ tenait fermement à ce qu'on vienne en aide à ces entreprises, les entreprises dont le ratio était supérieur à 50 p. 100 ont renoncé à bénéficier des parts de bonus auxquelles elles auraient autrement eu droit, et, depuis l'été dernier, nous les allouons à ces autres entreprises. Si je ne m'abuse, cette décision a été très bien accueillie au Québec et a aidé considérablement les entreprises bénéficiaires de cette mesure à améliorer leur situation financière. Ces entreprises, compte tenu du fait que nous en sommes à la dernière année d'application de l'Accord et que ces parts de bonus leur permettront d'accroître leurs exportations durant presque toute l'année, sinon jusqu'à la fin de l'année, s'en trouveront, en effet, en bien meilleure posture.
M. Guy St-Julien: Quel est le montant total des bonis versés au Québec et comment cette somme a-t-elle été répartie entre les régions de cette province?
[Traduction]
M. Wallace Dowswell: Ce n'est pas de cette façons que nous effectuons le calcul. Les parts de contingent sont attribuées entreprise par entreprise. La valeur totale des parts de bonus pour l'ensemble du Canada est de 92 millions de dollars. Chaque entreprise québécoise aurait normalement pu recevoir sa part au pro rata. Mais ce que nous avons plutôt fait, ça été de répartir les parts de bonus qui étaient normalement destinées à l'ensemble des entreprises du Québec uniquement entre celles qui répondaient aux critères du ratio de contingent inférieur à 50 p. 100 de la valeur des ventes. C'est pourquoi nous n'avons pas les chiffres que vous demandez. Les parts de bonus ne sont pas réparties par région, mais je puis vous assurer que les entreprises québécoises ont reçu leur juste part.
[Français]
M. Guy St-Julien: Combien d'entreprises en ont bénéficié?
[Traduction]
M. Wallace Dowswell: Je l'ignore.
[Français]
M. Guy St-Julien: Pourriez-vous nous donner un nombre approximatif?
[Traduction]
M. Wallace Dowswell: Je ne le sais pas.
[Français]
M. Guy St-Julien: Pourriez-vous faire parvenir ce renseignement à notre président?
M. Wallace Dowswell: Oui.
M. Guy St-Julien: Nous devrions pouvoir obtenir des données relatives à la somme totale des bonis versés dans chaque province, ainsi que le nombre d'entreprises qui en ont bénéficié.
[Traduction]
M. Wallace Dowswell: Le problème, comme je vous l'ai expliqué, c'est qu'alors qu'au Québec, nous avons convenu de cet arrangement pour venir en aide aux entreprises qui étaient en difficulté, dans les autres provinces, la répartition s'est faite sur une base proportionnelle. Par exemple, en Ontario, chaque entreprise a reçu sa part. Puisque chacune a reçu sa part de la quantité attribuable, personne ne demande qu'on apporte des changements au régime.
Je puis vous obtenir les données relatives au nombre d'entreprises bénéficiaires au Québec, mais je crois que, dans le cas des autres provinces, on a tout simplement réparti les parts de bonus entre toutes les entreprises. Vous le verrez d'ailleurs d'après la liste des détenteurs de parts de contingent que nous allons également vous fournir.
[Français]
M. Guy St-Julien: Merci beaucoup.
Les Cris de la Baie James invoquent la Convention de la Baie James et du Nord québécois et revendiquent le droit de siéger aux prochaines négociations. Nous avons entendu les témoignages de Me Romeo Saganash et du grand chef Ted Moses à cet effet. Est-ce que vous prévoyez convoquer les Cris à participer à des rencontres? On sait que le gouvernement du Canada et celui du Québec sont fiduciaires de cette convention. Les Cris nous ont dit qu'ils aimeraient participer aux discussions, ou tout au moins vous rencontrer en vue d'essayer d'obtenir une place à la table lors des négociations qu'entameront au cours des prochains mois le Canada et les États-Unis au sujet du commerce du bois d'oeuvre.
Est-ce que vous avez reçu des demandes de la part des Cris en vue de leur participation à la table des négociations?
[Traduction]
M. Wallace Dowswell: Dans le cours de nos consultations, nous avons rencontré entre 35 et 40 groupes, et nous avons également émis un avis de consultation à l'intention de tous les groupes qui souhaitent nous faire part de leurs observations à cet égard ou nous demander une rencontre. Je ne crois pas que les Cris aient demandé une telle rencontre. Nous avons toutefois tenu des rencontres avec divers groupes des Premières nations, y compris celui qui s'occupe des questions forestières ici même à Ottawa. Nous avons rencontré un large éventail de ces groupes ici même, de même que certains groupes de l'Ouest du pays qui ne pouvaient venir à Ottawa. Je préférerais ne pas formuler de commentaires à propos des détails du cas des Cris et de leur poursuite en instance devant les tribunaux. Comme ce n'est pas mon domaine, je ne vais pas me prononcer sur cette question.
Le vice-président (M. Julian Reed): Monsieur St-Julien, puis-je vous demander d'attendre au deuxième tour de table pour poser vos autres questions?
M. Guy St-Julien: Volontiers.
Le vice-président (M. Julian Reed): Merci beaucoup.
[Français]
M. Guy St-Julien: Merci.
Le vice-président (M. Julian Reed): Monsieur Godin.
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Je remercie nos témoins d'être venus comparaître devant nous.
On avait fixé à cinq ans la durée de l'entente relative à des quotas sur le bois d'oeuvre à laquelle en étaient venus la Colombie-Britannique et les États-Unis et qui viendra à échéance en mars. On se rappelle que les négociations avaient été très difficiles à l'époque.
• 1140
Nous nous approchons aujourd'hui de la cinquième année
de la mise en oeuvre de cette entente et de son échéance.
Ferons-nous face à des problèmes aussi difficiles cette
fois-ci? Sommes-nous prêts à envisager une entente de
libre-échange à long terme et à bien défendre nos
droits? Avons-nous commencé à nous préparer en vue de
ces négociations ou attendrons-nous que la situation
éclate, après quoi on ramassera de nouveau les
pots cassés? Bien que les intérêts des compagnies
soient importants, il ne faut pas oublier
que ce sont les travailleurs de l'industrie du bois qui
sont les victimes de toute cette guerre que se livrent
le Canada et les États-Unis.
Quelles sont les
différentes possibilités qu'on a prévues?
Serons-nous prêts à l'avance afin que lorsque nous
arriverons à la table des négociations, nous puissions
déposer des propositions concrètes? Que pourrait faire
le gouvernement fédéral afin d'être un leader dans ces
négociations au plan international?
[Traduction]
M. Wallace Dowswell: Comme je l'ai mentionné précédemment, je crois, c'est en fait ce à quoi nous nous employons—essentiellement à en arriver à un consensus, ou du moins à un quasi-consensus, à propos de l'orientation que nous allons prendre à l'approche de l'expiration de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux. C'est là l'objet des consultations que nous avons entreprises sur cette question auprès de l'industrie et des gouvernements provinciaux.
Comme vous l'avez mentionné, parmi les points de vue dont on nous a fait part, notamment chez certains groupes qui représentent l'industrie, il y a le fait qu'on tient à se bien préparer en vue de l'expiration de l'Accord pour éviter de se retrouver sans rien à proposer ou de demeurer dans l'incertitude. Ce que nous nous demandons actuellement, c'est si nous devrions avoir des discussions avec le gouvernement des États-Unis sur ce qui pourrait se produire après l'expiration de l'Accord. C'est ce que j'ai dit tout à l'heure. Les groupes qui représentent l'industrie se sont rencontrés à ce sujet, et nous prévoyons que d'ici quelques semaines nous en saurons davantage sur leur point de vue.
Mais il se trouve aussi que, si aucune décision n'est prise concernant la négociation d'un nouvel accord ou la reconduction de celui-ci, c'en sera fini de l'accord actuel. Il arrive à terme. Le cas échéant, nous nous retrouverions sous le régime du libre-échange, mais, naturellement, nous risquerions alors de devoir faire face à une action en recours de droits compensateurs aux États-Unis, si l'industrie américaine décidait d'intenter contre nous une telle poursuite.
Il nous faut donc tenir compte également de cette dimension et veiller à nous préparer à l'avance le mieux possible pour pouvoir, dans l'éventualité où nous nous retrouverions dans une telle situation—je ne veux pas dire que ce sera le cas, mais si nous en venions là—, défendre nos intérêts avec la dernière énergie, comme nous avons su le faire dans le passé.
[Français]
M. Yvon Godin: Vous nous avez parlé de différents accords, dont ceux qui ont été conclus avec la Colombie-Britannique, les provinces de l'Ouest, l'Ontario, le Québec et les provinces Atlantiques. Pourriez-vous nous décrire l'accord qu'a conclu le Nouveau-Brunswick ou qu'ont conclu les provinces de l'Atlantique?
[Traduction]
M. Wallace Dowswell: Non. Je regrette, je dois avoir... Il y a ici malentendu.
Il n'y a essentiellement que deux accords. Il y a l'accord principal sur le bois d'oeuvre résineux, qui lie l'Ontario, le Québec, l'Alberta et la Colombie-Britannique. Il s'agit d'un accord qui a été conclu par le gouvernement fédéral. Il s'applique dans ces quatre provinces et définit les parts de contingentement qui sont actuellement réparties en fonction du volume, etc.
Il y a eu un accord distinct de conclu, un échange de lettres constituant un accord, avec les Maritimes, les provinces de l'Atlantique. Dans cet accord, il a été reconnu que les Américains estimaient, pour reprendre les mots qu'ils ont employés, que les mesures adoptées dans les provinces Maritimes en matière de politique forestière étaient axées sur le marché et ne comportaient pas de subventions. De ce fait, on n'a pas tenté d'assujettir ces provinces à un régime de contingentement. Elles en ont été exemptées. Elles ont pu continuer d'exporter librement dans un marché concurrentiel normal, ouvert, sans être soumises à des mesures contingentaires restrictives.
Il y a donc en réalité deux accords. Il n'y a pas d'accord distinct pour chacune des autres provinces.
M. Yvon Godin: Je vois. Elles sont toutes liées par le même accord.
M. Wallace Dowswell: C'est juste.
M. Yvon Godin: Ça va. Merci.
Le vice-président (M. Julian Reed): Merci beaucoup, monsieur Godin.
Monsieur St. Denis.
M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Merci, monsieur le président.
• 1145
Merci, messieurs, de votre présence parmi nous. Je vous prie
de m'excuser si quelqu'un a déjà posé cette question avant moi,
mais j'aimerais savoir si l'accord actuel prévoit qu'à une certaine
date, les parties devront se demander si elles souhaitent négocier
un nouvel accord, ou s'il appartiendra au gouvernement du Canada ou
à celui des États-Unis de dire «Discutons de la possibilité de
conclure un nouvel accord». Si personne ne va au-devant de l'autre,
est-ce à dire qu'il ne se produira rien?
M. Wallace Dowswell: Oui, tout à fait.
M. Brent St. Denis: Donc, l'Accord ne prévoit pas la tenue de discussions?
M. Wallace Dowswell: Non, pas dans ce sens. L'Accord comporte des dispositions prévoyant des consultations sur des questions relatives à l'application de l'Accord...,
M. Brent St. Denis: Je vois.
M. Wallace Dowswell: ...mais pas dans le sens où vous l'entendez.
M. Brent St. Denis: Donc, rien ne se produira, à moins que l'une des deux parties ne signifie son intention d'engager des pourparlers et que l'autre ne lui manifeste son accord.
Pour le compte rendu, j'aimerais que vous nous rappeliez comment les choses se sont passées la dernière fois. Si j'ai bien compris, la position du gouvernement reflète le consensus de l'industrie. Le gouvernement n'a pas dicté sa vision à l'industrie. L'industrie en est arrivée à un consensus par les moyens qu'elle a trouvé convenables, et le gouvernement en a fait part au gouvernement des États-Unis au nom de notre pays. Dit simplement, est-ce ainsi que les choses se sont passées la dernière fois? Peut-on présumer que ce sera de nouveau le cas cette fois-ci, que l'industrie fera savoir au gouvernement du Canada ce qui lui semble raisonnable?
M. Wallace Dowswell: Eh bien, je crois...
M. Brent St. Denis: Est-ce que ce pourrait être A, puis B, et enfin...?
M. Wallace Dowswell: Absolument. Ce serait commode de pouvoir négocier aussi simplement, mais, hélas, les choses ne se passent pas toujours de cette façon, en ce sens que, selon moi, comme c'est habituellement le cas dans ce genre de situation, notamment dans un cas comme celui-ci où, d'une part, les relations fédérales-provinciales sont passablement compliquées, les forêts étant du ressort provincial alors que le commerce international relève bien entendu du gouvernement fédéral, et où, d'autre part, vous avez une industrie imposante qui joue un rôle très important dans l'économie de notre pays et de nombre de nos régions, notamment de nos régions non urbaines... Vous avez là trois groupes très distincts.
La dernière fois, je crois que les trois groupes en question—les provinces, l'industrie et le gouvernement fédéral—ont collaboré très étroitement pour essayer d'en arriver au meilleur consensus possible afin de faire avancer les choses. Ils l'ont fait dans le cadre de consultations qui ont mené à des négociations qui, à leur tour, ont débouché sur cet accord.
En dernière analyse, je crois, le gouvernement fédéral en est venu à la conviction que la proposition de conclure un arrangement prévoyant l'imposition de contingents quantitatifs recevait l'appui ferme de l'industrie. Cette option n'était pas nécessairement celle que privilégiait le gouvernement fédéral dans sa politique, mais, compte tenu de toutes ces considérations et de la position de l'industrie et des provinces concernées, c'est ce à quoi on a abouti.
C'est pourquoi je crois que, si nous devions nous engager dans pareilles discussions ou négociations—je ne veux pas dire que nous en sommes déjà là ou que c'est ce que nous ferions—, je suis sûr que nous consulterions les provinces, comme nous le faisons normalement, ainsi que l'industrie et les parties prenantes qui ont un intérêt dans ce domaine, pour, cette fois encore, tenter d'en arriver à un solide consensus pancanadien.
M. Brent St. Denis: Me permettriez-vous une autre question brève, monsieur le président?
Le vice-président (M. Julian Reed): Oui.
M. Brent St. Denis: Merci.
Monsieur Dowswell, dans vos observations d'ouverture, vous avez fait allusion aux consultations que vous et votre équipe avez menées auprès des gens de l'industrie. Vous avez dit croire, si j'ai bonne mémoire, que, dans les semaines qui viennent, l'industrie demandera officiellement au gouvernement du Canada de s'enquérir de la vision du gouvernement des États-Unis. Est-ce sensiblement ce que vous avez dit?
M. Wallace Dowswell: Oui.
M. Brent St. Denis: L'industrie fera-t-elle cette demande au moyen d'une lettre au ministre du Commerce ou...? De quelle manière s'y prendra-t-elle pour poser cette question? Le fera-t-elle tout simplement à l'occasion d'une rencontre?
M. Wallace Dowswell: C'est à elle qu'il appartient d'en décider.
M. Brent St. Denis: Y aura-t-il à un moment donné un document qui, en quelque sorte, lancera—pour ainsi dire—officiellement les discussions? Jusqu'à maintenant, l'heure a été au calme et aux consultations, et c'est très bien, mais en viendra-t-on un jour à coucher le résultat de ces consultations sur papier? Essentiellement, quand mettra-t-on l'affaire en route?
M. Wallace Dowswell: Je ne saurais dire si les gens de l'industrie mettront quelque chose sur papier ou non. C'est à eux d'en décider. Comme je l'ai dit tout à l'heure, ils se sont rencontrés. Ils ont récemment écrit au ministre pour faire le point sur leur position. Quant à savoir s'ils lui feront parvenir une autre lettre ou s'ils voudront le rencontrer pour lui exposer leurs vues, je ne saurais le dire. C'est une autre possibilité, comme vous le dites.
Ce dont il s'agit, naturellement, c'est d'un avis que l'industrie communiquera au ministre et que celui-ci prendra ensuite en considération. D'autres parties prenantes lui feront également connaître leur opinion, après quoi il prendra une décision sur ce que sera la prochaine étape. J'imagine que cela ira probablement à la fin de juin. Je crois que les gens de l'industrie ont l'intention de se réunir de nouveau au début de juillet, de sorte que, selon ce que je prévois, ils auront vraisemblablement quelque chose à nous communiquer après cette rencontre.
M. Brent St. Denis: Cette lettre qui a été envoyée au ministre est-elle du domaine public? En a-t-on fait état publiquement? Je n'ai rien vu de tel dans les journaux. S'agit-il uniquement d'une correspondance confidentielle entre l'industrie et le ministre? Si cette lettre est du domaine public, je me demande si nous pourrions en obtenir copie. Si elle est confidentielle, eh bien, je n'irai pas plus loin.
M. Wallace Dowswell: Oui. En principe, c'est leur lettre à eux. Je ne crois pas pouvoir me sentir libre de vous en dévoiler le contenu.
M. Brent St. Denis: C'est tout ce que je demandais. Donc, il n'y a pas eu de communiqué de presse à ce sujet.
M. Wallace Dowswell: Pas à ma connaissance.
M. Brent St. Denis: Souvent, c'est le cas. On s'amène à un journaliste en disant: «Voici notre lettre et voici ce que nous disons au ministre». Cette lettre n'a jamais été rendue publique?
M. Wallace Dowswell: Pas que je sache.
M. Brent St. Denis: Ça va.
Merci, monsieur le président.
Le vice-président (M. Julian Reed): Merci.
Monsieur Keddy.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Merci, monsieur le président.
J'aurais une remarque à formuler à l'intention de Brent. Le secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles aurait peut-être plus facilement accès à cette lettre que n'importe qui d'autre d'entre nous. Peut-être pourriez-vous y jeter un coup d'oeil.
M. Brent St. Denis: Oui, et avec un dollar, on peut se procurer une tasse de café.
Des voix: Oh!
M. Gerald Keddy: Il y a deux ou trois choses qui me sautent aux yeux dans cette conversation, messieurs. La première, c'est qu'alors que l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux expirera à la fin de mars 2001, nous sommes assis ici à parler de possibilités de négociations. De toute évidence, l'industrie en est déjà à l'étape des négociations, et, d'après moi, elle s'attend à ce que le gouvernement des États-Unis intente contre elle une action en recours de droits compensateurs à l'expiration de l'Accord. Je ne vois aucun plan. Tout ce que je constate, c'est que nous sommes ici à attendre, alors qu'à mon avis, nous avons tort de ne pas nous doter d'un plan.
Qu'y a-t-il de changé? J'aimerais savoir ce qu'il y a de nouveau depuis le dernier accord. Les scieries américaines continuent d'avoir besoin de billes rondes. Elles n'ont pas encore pu acheter de l'Ouest canadien tout le volume de billes rondes qu'elles souhaitent obtenir. Aujourd'hui comme alors, les petites associations d'exploitants de scieries constituent un puissant lobby dans l'industrie américaine du bois d'oeuvre. Cette situation n'a pas changé. Ces gens continuent de voir chaque pièce de bois qui traverse la frontière comme une menace à leur industrie. Ils ont leurs propres problèmes aux États-Unis, en raison des lois de protection des espèces menacées et de tous ces règlements qui leur rendent difficile l'accès à tout le bois qui pousse sur leur territoire.
Je crois que nous sommes sérieusement dans l'embarras ici. Nous sommes à un an de l'expiration de cet accord. Si l'on pense qu'on va passer tout bonnement en régime de libre-échange sans que... Ça n'a pas été le cas dans le passé. Ce lobby est encore bien présent. La demande de billes rondes est encore là.
D'après les gens à qui j'ai parlé aux États-Unis, les Américains comptent sur le bois d'oeuvre du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve, peut-être pas tellement de Terre-Neuve, mais, singulièrement sur celui de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick, qui ont augmenté considérablement leurs exportations vers les États-Unis. En fait, ces provinces ont plus que doublé leurs exportations à destination des États-Unis. Les Américains disent vouloir que ces provinces soient également assujetties à l'Accord, car elles pénètrent furtivement leur marché.
Les droits de coupe n'ont pas augmenté de manière exponentielle dans l'Ouest canadien. Ils ont augmenté, mais pas suffisamment pour satisfaire l'appétit des Américains, selon moi.
Donc, où en sommes-nous? Dites-moi où je fais erreur.
M. Wallace Dowswell: Vous avez bien résumé la situation. Oui, l'industrie américaine voit les choses de cette façon, mais je vous ferai remarquer qu'elle n'en a pas moins besoin de notre bois. Elle ne peut pas se passer des importations canadiennes. Si nous fournissons leur marché à hauteur de 34 ou 35 p. 100, vous pouvez fort bien imaginer ce qui se produirait si nous leur coupions soudainement les vivres.
M. Gerald Keddy: Exactement, mais...
M. Wallace Dowswell: On peut donc dire que ces choses jouent dans les deux sens.
L'autre élément, c'est que je ne crois pas que moi-même ou qui que ce soit d'autre, à ma connaissance, du moins du côté du gouvernement, ayons dit qu'à l'expiration de l'Accord, nous n'aurions qu'à nous engager dans la voie du libre-échange, et qu'il n'y aurait pas de problème. Ce que nous avons dit, c'est que si, à son échéance, l'Accord n'est remplacé par rien d'autre, les règles commerciales normales de l'ALENA s'appliqueront, autrement dit, que nous passerons en régime de libre-échange. Mais je suis persuadé que nous devrions nous attendre à ce que l'industrie américaine, exactement pour les raisons que vous avez mentionnées, invoque alors les lois américaines sur les recours commerciaux probablement pour intenter contre notre industrie une action en recours de droits compensateurs, comme elle l'a fait à plusieurs reprises dans le passé. Nous nous retrouverions alors en plein différend, pour ainsi dire.
• 1155
Dans l'examen de la situation à ce stade-ci, il nous faut
essayer de prévoir ce que nous ferions dans une telle éventualité.
Nous ne savons pas si c'est ce qui se produira, mais il nous faut
nous préparer à cette possibilité et nous demander comment, le cas
échéant, nous pourrions réagir devant un différend commercial et
défendre efficacement notre position.
L'autre chose, c'est que certains entrepreneurs au sein de l'industrie nous disent que, plutôt que de simplement nous engager immédiatement dans cette voie, ils préféreraient que nous intervenions officieusement auprès des autorités américaines pour nous enquérir de ce qui leur semblerait valable comme base d'un nouveau règlement. On explore donc également cette piste. En un sens, c'est ce à quoi on s'emploie à l'heure actuelle. Ce que je veux dire, c'est que nous ne savons pas encore comment les choses tourneront à la fin de mars prochain.
M. Gerald Keddy: En réalité, le point que j'essaie de faire valoir, c'est qu'en vous écoutant parler, je constate qu'à un an de l'expiration d'un accord commercial majeur entre le Canada et les États-Unis, nous n'avons pas encore de plan cohérent et n'avons pas engagé non plus de négociations. Tout au plus disons-nous à l'industrie d'aller de l'avant et d'entamer de telles discussions, et c'est ce qu'elle fait.
Je ne partage pas votre point de vue. Les Américains ont besoin de notre bois, certes, mais, comme cela a toujours été le cas dans le passé, ils veulent nos billes rondes pour alimenter leurs scieries. Nous leur expédions notre bois vert, et c'est tout une différence.
Bien sincèrement, l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux a été un bienfait pour l'est du Canada. Cet accord nous a été d'un grand secours, car nous avions perdu le marché européen et nous l'avons remplacé par le marché américain. Nous pouvons expédier du bois vert aux États-Unis.
Il serait très problématique que, tout d'un coup, l'Est du Canada devienne assujetti à cet accord, ou que cet accord prenne fin sans que nous ayons un plan. Personnellement, je ne vois rien qui puisse amener les Américains à modifier leur position concernant les billes rondes ou contrer les efforts du lobby des États du Centre-Sud et du sud des États-Unis, comme le Mississippi et la Louisiane. Il y a aux États-Unis d'importants producteurs de bois d'oeuvre qui alimentent les mêmes marchés que nous dans le nord-est et le centre du pays.
Je crois que, dans la position où nous nous trouvons, nous devrions poursuivre activement ces discussions pour nous faire une idée de ce vers quoi nous nous dirigeons. Je pense instinctivement que nous sommes retournés à la case départ. Si tel est le cas, il nous faudrait en quelque sorte un plan que nous pourrions mettre en oeuvre pour éviter ne nous retrouver devant une action en recours de droits compensateurs, de voir nos camions interceptés à la frontière et d'assister au chaos le plus complet dans l'industrie, ce qui serait inacceptable.
Le vice-président (M. Julian Reed): Merci, monsieur Keddy, de votre déclaration.
M. Gerald Keddy: Merci, monsieur le président.
Une voix: Bon discours!
Le vice-président (M. Julian Reed): Monsieur Comuzzi.
M. Joe Comuzzi (Thunder Bay—Superior-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je crois que les membres du comité savent tout cela, mais permettez-moi simplement de vous rappeler qu'au moment de la mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange, il a été plutôt traumatisant de constater que nous nous engagions dans un régime de contingentement.
Je tiens à faire l'éloge de tous ces messieurs qui prennent place au bout de la table, de ceux qui étaient ici. C'est un exercice très compliqué que d'attribuer les parts de contingent dans l'ensemble du Canada. Ils ont manifestement accompli un travail remarquable, car nul n'était content des parts de contingent qu'il avait reçues, mais les entrepreneurs s'en sont accommodés et ils ont découvert comment percer des trous dans le bois de colombage pour voir si cela permettrait de contourner... Mais ils y sont vraiment parvenus, et je remercie tous ces messieurs pour leur excellent travail, pour l'admirable façon dont ils représentent le Canada en ce qui a trait à cet accord commercial.
Permettez-moi simplement de formuler quelques observations concernant les droits compensateurs, car c'est ce vers quoi nous nous dirigeons si nous ne parvenons pas à conclure un nouvel accord. Je crains que ce ne soit vraiment ce qui nous attend. Nous avons été témoins d'histoires d'horreur à propos de droits compensateurs. Ces droits sont perçus à la frontière, peu importe leur taux ou la façon dont on en établit le montant, puis l'argent finit par aboutir dans les coffres des gouvernements provinciaux. Corrigez-moi si je me trompe.
M. Wallace Dowswell: Dans un cas normal d'imposition de droits compensateurs, c'est la loi américaine sur le commerce qui s'applique. S'il y a décision d'imposer de tels droits sans que cette décision soit révoquée par suite d'une contestation, tout se passe essentiellement comme s'il s'agissait de droits sur les importations—x p. 100, qui s'en va dans le Trésor américain.
M. Joe Comuzzi: L'argent va au Trésor américain?
M. Wallace Dowswell: Tout à fait.
M. Joe Comuzzi: Est-ce à dire que le Canada perd entièrement cet argent?
M. Wallace Dowswell: C'est juste, à moins que nous n'ayons gain de cause, naturellement, et que la décision ne soit renversée, auquel cas, nous recouvrerions ces sommes.
M. Joe Comuzzi: Je vois. Dans l'intervalle, l'argent est gardé dans un fonds fiduciaire jusqu'à ce qu'une décision soit rendue concernant l'action en recours de droits compensateurs, n'est-ce pas?
M. Wallace Dowswell: Oui.
M. Joe Comuzzi: Donc, dans un premier temps, l'argent ne s'en va pas dans le Trésor américain, pas plus d'ailleurs que dans le Trésor canadien, ni dans celui des provinces ou...? Il est donc conservé dans un fonds fiduciaire jusqu'à ce qu'une décision soit rendue concernant l'action en recours de droits compensateurs? Est-ce bien ainsi?
M. Wallace Dowswell: Plus ou moins, oui.
M. Joe Comuzzi: Aux termes de l'entente Carney, cet argent a été retourné à...
M. Wallace Dowswell: Une enquête était alors en cours concernant les droits compensateurs, puis les deux pays en sont venus à un arrangement négocié, à une sorte de protocole d'entente, en vertu duquel le Canada a convenu d'imposer une taxe à l'exportation en échange de l'abandon par le gouvernement des États-Unis de son recours en droits compensateurs.
M. Joe Comuzzi: C'est ça, une taxe de 15 p. 100.
M. Wallace Dowswell: Essentiellement, cette taxe de 15 p. 100 à l'exportation remplaçait les droits compensateurs. En vertu de cet arrangement, le gouvernement fédéral a convenu avec les gouvernements provinciaux de transférer ces fonds aux provinces.
M. Joe Comuzzi: C'est ça.
Je vais maintenant parler de ce qui s'est passé avant la conclusion de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux. Nombre des scieries canadiennes, ou du moins certaines d'entre elles, appartiennent à des entrepreneurs indépendants. L'histoire d'horreur, dans leur cas, c'est qu'il leur fallait payer des droits compensateurs qui s'en allaient dans un fonds fiduciaire, ou je ne sais où, et attendre parfois deux, trois, voire quatre ans avant que la cause soit instruite ou qu'un jugement soit rendu. Entre-temps, ces entrepreneurs épuisaient leur fonds de roulement à un point tel qu'ils n'en avaient plus assez pour améliorer leur productivité ou leur équipement. Dans certains cas, le versement de droits compensateurs a même compromis la rentabilité de l'entreprise.
Je me souviens que, la dernière fois qu'on a imposé de tels droits, une entreprise à laquelle j'attache beaucoup d'importance, parce qu'elle est le plus gros employeur privé du Nord-Ouest ontarien, s'est vue convoquée par ses banquiers qui rappelaient leur... Autrement dit, les clés étaient sur la table. L'entreprise en était rendue au point où elle se voyait pratiquement forcée de cesser ses activités en raison des droits compensateurs.
Je n'imagine tout simplement pas que nous puissions nous permettre de nous diriger de nouveau vers une telle situation. Je n'ai aucune idée de ce que pourrait être la solution, mais c'est une histoire d'horreur qui risque de se répéter si jamais l'Accord sur le bois d'oeuvre arrive à expiration et que, six mois plus tard, on intente contre nous des actions en recours de droits compensateurs. C'est vraiment cette menace qui guette actuellement l'industrie canadienne. Je suis sûr que vous aussi, messieurs, êtes conscients au même titre que nous de cette menace et de l'importance de nous efforcer d'en arriver à un règlement négocié.
La semaine dernière, nous avons eu l'occasion de rencontrer les 10 sénateurs et les 104 membre du Congrès américain—du moins certains d'entre eux—, et je leur ai posé une question bien précise: «Si vous consentiez à ce qu'on arrive à l'expiration de l'accord actuel sans en avoir négocié un nouveau, ne consentiriez-vous pas également à faire pression sur les gens de votre industrie pour leur demander de renoncer à intenter contre nous des actions en recours de droits compensateurs et d'accepter qu'on s'en tienne au jeu du libre-échange?» Je crois que ce serait un bon compromis.
C'est une démarche que, selon M. Keddy, nous devrions envisager d'effectuer, et je serais curieux de connaître votre opinion à ce sujet. Bien que ces élus américains soient en année d'élections et qu'ils répondent à toutes les demandes des lobbyistes, s'ils veulent un accord de libre-échange, souscrivons-y nous aussi. Nous sommes tous prêts à accepter cette solution, mais faisons tout en notre pouvoir pour les empêcher d'intenter contre nous des actions en recours de droits compensateurs comme celles à propos desquelles nous avons eu trois fois gain de cause dans le passé.
• 1205
Ce qui me tracasse dans tout ce processus, c'est que la
Colombie-Britannique, en raison de l'importance de son industrie du
bois d'oeuvre, a invariablement cherché à négocier son propre
accord. Le fait qu'elle soit responsable de 60 à 70 p. 100 de nos
exportations de bois d'oeuvre vers les États-Unis place en quelque
sorte les autres provinces en position de faiblesse. On finit
toujours par en arriver à un accord, mais, même dans le cadre du
processus des négociations de l'accord actuellement en vigueur, la
Colombie-Britannique avait négocié un arrangement en marge. Nous
avons tout cela dans nos notes d'information, mais je n'ai pas en
mémoire tous les détails de l'affaire.
Il semble que ce soit la Colombie-Britannique qui dirige l'attaque. Ses représentants cherchent par des moyens détournés à négocier en marge de notre processus pour finir par affaiblir notre position en traitant directement avec les États-Unis, car c'est effectivement ce qui se produit, et nous nous retrouvons éventuellement tous ensemble à la table. Il me semble que notre position s'en trouve affaiblie. Nous ne nous présentons pas à la table des négociations en parlant au nom de l'ensemble du Canada. Quelqu'un nous y a déjà précédé, un important acteur, qui parle au nom du Canada. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
M. Wallace Dowswell: Sans vouloir formuler de commentaires à propos du cas d'une province particulière, je dirais que l'effort du gouvernement fédéral—et c'est pourquoi nous menons ces consultations auprès du plus grand nombre possible de parties prenantes dans tout le Canada—vise à en arriver à un consensus pancanadien aussi solide que possible. Autrement, comme vous le dites, nous risquerions de voir notre position minée ou déclassée en cours de négociation. C'est un processus qui demande beaucoup de temps, car les parties ont souvent des points de vue et des intérêts divergents, et nous devons nous employer à aplanir ces divergences.
Je ne voudrais pas profiter de son absence, mais ce n'est pas comme si nous n'avions pas de plan du tout. Des consultations sont en cours. Le ministre a rencontré plusieurs des groupes concernés. Du côté des fonctionnaires, nous l'avons fait aussi, et, comme je l'ai déjà dit, diverses possibilités s'offrent à nous, qu'il s'agisse d'apporter des correctifs à nos façons de voir les choses, d'examiner d'autres options ou d'essayer de nous orienter dans la bonne direction.
Les efforts que nous déployons actuellement ont pour objet de nous permettre de nous positionner le plus solidement possible avant l'expiration de l'Accord et d'en arriver à un consensus qui rallie non seulement l'industrie, mais également les gouvernements provinciaux, dont relève aussi cette ressource, sur l'orientation que nous entendons prendre. Sans revenir sur le passé, je dirais que c'est ce que nous efforçons de faire.
M. Joe Comuzzi: Il m'apparaît éminemment important que nous négociions en position de force.
M. Wallace Dowswell: Vous avez raison.
Le vice-président (M. Julian Reed): Merci beaucoup, monsieur Comuzzi. Si vous avez d'autres questions, je vous demanderais d'attendre au deuxième tour de table.
M. Joe Comuzzi: Volontiers.
Le vice-président (M. Julian Reed): Merci.
Monsieur Bélair. Nous en sommes au deuxième tour de table, et nous allons procéder comme nous le faisons normalement.
M. Réginald Bélair: C'est que Joe vient tout juste de poser la question que j'avais à l'esprit, mais je tiens quand même à répéter qu'il est extrêmement important que nous présentions un front uni, car, comme vous vous en rappellerez sans doute—et il n'y a pas lieu de se le cacher—, la dernière fois, il y a quatre ans, la Colombie-Britannique avait déjà négocié son propre accord, ce qui a vraiment miné le processus et n'a nullement servi les intérêts de notre pays, du Canada tout entier. Si vous n'étiez pas de la Colombie-Britannique, vous avez été traité injustement. Voyons les choses en face. C'est ce qui s'est passé.
Par conséquent, est-ce qu'il est en votre pouvoir cette fois-ci de prendre les moyens de prévenir une telle situation, pour que nous puissions faire front commun? Vous êtes le négociateur en chef.
M. Wallace Dowswell: Non.
M. Réginald Bélair: Nous avons besoin de savoir. Je vous pose la question.
M. Wallace Dowswell: Je m'empresse de clarifier ce point. Non, je ne suis pas le négociateur en chef. Pour l'heure, c'est à Doug Waddell, qui est notre chef de mission adjoint à l'ambassade du Canada à Washington et qui a dirigé l'opération consultations, que le ministre a demandé d'assumer cette fonction. C'est lui qui détient ce titre enviable, pas moi.
Pour répondre à votre question, c'est naturellement ce que nous faisons. Le gouvernement fédéral dirige ces consultations et réunit tout le monde pour essayer d'en arriver à un consensus. Nous allons poursuivre dans cette voie.
M. Réginald Bélair: Merci, monsieur le président.
Le vice-président (M. Julian Reed): Merci beaucoup, monsieur Bélair.
Nous en sommes au deuxième tour de table. Monsieur Cardin, ou quelqu'un d'autre...?
Pourquoi pas vous, monsieur Commuzzi?
M. Joe Comuzzi: Je n'ai que deux ou trois points à soulever, monsieur le président.
Vous savez, c'est vraiment étrange; le bois d'oeuvre résineux qu'on extrait d'un arbre ne représente que 25 p. 100 de la matière de cet arbre. Tout le reste est transformé, notamment en fibres. Dans le cas qui nous occupe, nous avons un arbre... et nous ne nous demandons pas qui paie les droits de coupe, ni si on est exempté du paiement de ces droits, ni encore si cet arbre appartient à l'entreprise privée. Nous négocions tout au plus un accord sur le quart du produit de cet arbre. Nous expédions outre-frontière notre pulpe, notre papier, notre kraft et toutes sortes d'autres produits que nous fabriquons, sans qu'aucun accord ne vienne encadrer de telles activités.
Pourquoi, ici comme chez nos interlocuteurs étrangers, ne s'est-on préoccupé à cet égard que de 25 p. 100 de l'arbre?
Je vous vois tous sourire.
M. Wallace Dowswell: Je ne tiens pas à m'aventurer sur ce terrain.
Des voix: Oh!
M. Wallace Dowswell: Mais ça ne figurera pas au compte rendu.
M. Joe Comuzzi: Eh bien, tenons-nous-en alors à la question des billes de sciage.
M. Wallace Dowswell: En réalité, je crois que les gens de Ressources naturelles Canada seraient mieux placés que moi pour vous en parler. Je ne suis pas certain que vous ayez raison de parler de 25 p. 100.
M. Joe Comuzzi: C'est à peu près cette proportion.
M. Wallace Dowswell: Je l'ignore. En tout cas, ce que je veux dire, c'est que ces gens pourraient mieux que moi vous renseigner sur les chiffres en question.
M. Joe Comuzzi: Vous n'avez pas à... C'est tout simplement un sujet que nous avons déjà abordé.
Cette question des billes de sciage est importante. La semaine dernière, je me suis entretenu avec des gens du Ghana. Les forêts de ce pays ont été exploitées dans une très large mesure. Il se trouve par ailleurs que nous avons envoyé un groupe d'environnementalistes canadiens au Ghana. Or, selon ces experts, environ 10 p. 100 des billes de sciage qu'on utilise dans ce pays, notamment des billes d'érable, proviennent du Canada. C'est donc dire que nous exportons des billes de sciage.
Cela fait ressortir l'importance vraiment cruciale de valoriser cette ressource naturelle. S'il y a un aspect de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux qui a été pour nous un élément de stabilité, c'est bien le fait qu'il ait permis à nos entreprises d'investir dans la fabrication de produits à valeur ajoutée. Ce n'est pas en exportant des billes de sciage brutes—ce que nous ne devrions jamais permettre—que nous allons fabriquer des produits à valeur ajoutée, et je sais que cette question est un grand sujet de préoccupation en Colombie-Britannique.
Nous avons pu pénétrer le marché des produits à valeur ajoutée grâce aux colombages percés et aux autres produits que nous fabriquons, comme le bois d'oeuvre «pretest» destiné au marché des maisons mobiles et le bois d'oeuvre de quatre pieds qui sert à la fabrication de produits spéciaux aux États-Unis, autant de produits qui ne sont pas assujettis aux mesures de contingentement.
Si nous avons pu effectuer une percée sur ce marché, c'est, selon mois, grâce à la stabilité que celui-ci a connue ces quatre ou cinq dernières années de même qu'à sa rentabilité. Que faisons-nous pour empêcher l'exportation de billes de sciage du Canada vers d'autres pays, notamment vers les États-Unis?
M. Wallace Dowswell: L'exportation de billes canadiennes vers les pays étrangers est régie par la Loi sur les licences d'exportation et d'importation. Sauf depuis la Colombie-Britannique, ces produits peuvent être exportés tout à fait librement.
Les statistiques officielles montrent que nous sommes un important importateur net de billes, et non pas le contraire. Ce type d'importation est extrêmement important pour certaines des provinces Maritimes, qui achètent, par exemple du Maine, des quantités considérables de billes, ainsi que pour nos scieries qui sont situées à proximité de la frontière américaine, notamment au Québec.
Étant donc nous-mêmes de gros importateurs nets de billes de bois, le libre commerce de ce type de produit de part et d'autre de notre frontière constitue pour les entreprises concernées un avantage commercial considérable.
M. Joe Comuzzi: Mais nous ne devrions pas exporter nos billes. Je n'ai rien contre le fait que nous en importions, car cela fait partie du processus d'échange. Il y a les billes que nous coupons, mais que nous en exportions nous-mêmes, vous savez...
M. Wallace Dowswell: Je ne suis pas un expert en la matière, mais, à ma connaissance, ce qui devrait nous intéresser à cet égard, ce sont les considérations d'ordre économique plutôt que nos simples états d'âme qui nous amèneraient à vouloir bloquer toute exportation de bois brut. Dans ce cas-ci, les considérations d'ordre économique sont très importantes, étant donné qu'il n'est pas rentable de transporter par camion des billes de sciage sur de très longues distances.
Quand on se penche sur cette question, il faut, selon moi, prendre en considération cet aspect—laisser jouer les régulateurs normaux du marché sur les volumes qui vont et viennent.
M. Joe Comuzzi: Je vous en reparlerai un autre jour.
Merci, monsieur le président.
Le vice-président (M. Julian Reed): Merci beaucoup, monsieur Comuzzi.
Monsieur St. Denis, vous aviez une très brève question.
M. Brent St. Denis: Eh bien, je vais essayer d'être le plus bref possible.
J'inviterais les membres du comité à se reporter au titre de notre étude, «Examen de la gestion des forêts au Canada dans la perspective du commerce international», et à s'interroger sur les postulats sur lesquels reposent leurs questions concernant l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux, à se demander dans quel cadre elles s'inscrivent. Je ne m'entends pas avec certains autres membres du comité sur la question de savoir si ces questions sont pertinentes ou non à notre étude.
On a fait valoir tout à l'heure qu'en fait, l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux—et c'est là un argument qu'ont avancé d'autres personnes—a sur le commerce international du bois d'oeuvre résineux une incidence qui dépasse le cadre de l'Amérique du Nord. Or, pour moi, ce lien est plutôt ténu, car il se peut qu'en raison, disons, de la nature quelque peu artificielle de tout accord, le bois d'oeuvre soit tout au plus déplacé d'une région A à une région B.
L'Accord sur le bois d'oeuvre résineux a-t-il une incidence sur les exportations canadiennes à l'extérieur de l'Amérique du Nord, par exemple vers l'Europe? N'assistons-nous pas à une dislocation du marché du bois d'oeuvre qui...? Nous savons que, si le bois d'oeuvre est expédié au Nouveau-Brunswick pour remplacer celui que cette province exporte aux États-Unis, cette activité se passe sur le marché national, mais a-t-elle une incidence ailleurs? N'y aurait-il pas moyen de lier l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux à notre étude à propos de la pression internationale qui s'exerce sur nous à cause de la façon dont on prétend que nous gérons nos forêts?
M. Wallace Dowswell: Oh, sur ce plan, non, je ne le crois pas, quoique Dick aimerait peut-être ajouter quelque chose à ce sujet.
Pour ce qui est de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux, qui porte sur les échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis, aucune de ses dispositions ne restreint ou limite les possibilités qu'a l'industrie d'exporter ses produits où que ce soit ailleurs dans le monde.
M. Brent St. Denis: Mais au-delà de ses règles, l'Accord a-t-il eu des incidences indirectes sur le commerce international? J'imagine que non.
M. Wallace Dowswell: Je crois que sur le plan directement commercial, si l'on exclut les considérations d'ordre écologique, je ne vois aucun lien de ce genre. À mon avis, ce sont plutôt les prix en vigueur sur les marchés qui sont habituellement le facteur déterminant dans la décision de l'industrie d'exporter vers tel endroit plutôt que vers tel autre. Vous constaterez probablement, à l'examen des statistiques...
Par exemple, comme vous le savez, les exportations de bois d'oeuvre des Maritimes vers les États-Unis ont augmenté ces cinq ou six dernières années. Ces provinces exportent moins vers l'Europe. Je crois que cette évolution découle de divers facteurs, et non pas uniquement de l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux. Si vous jetez un coup d'oeil aux statistiques, vous aurez peut-être tôt fait de voir quand ce changement s'est produit.
Si j'ai bonne mémoire, au début de cette période, par exemple, il y a eu, dans les Carolines, je crois, ou je ne sais trop où, un ouragan majeur qui a entraîné un accroissement considérable de la demande américaine de bois d'oeuvre. Naturellement, les Maritimes sont bien placées pour répondre aux besoins de ce marché.
Par conséquent, on peut très difficilement isoler cet élément particulier pour affirmer que l'Accord sur le bois d'oeuvre résineux a eu telle ou telle incidence. Je crois que plusieurs facteurs sont ici en cause. Comme vous le savez, en ce qui concerne nos échanges avec l'Europe, d'autres facteurs, dont nous avons déjà discuté, ont eu une incidence sur certaines de nos exportations vers ce marché.
Il y a donc toute une variété d'influences qui entrent ici en jeu.
M. Brent St. Denis: Merci.
Le vice-président (M. Julian Reed): Merci, monsieur St. Denis.
Je remercie les témoins qui ont accepté de venir ici aujourd'hui nous éclairer sur une question qui touche toutes les circonscriptions de notre pays. Que les membres du comité en soient conscients ou non, même les circonscriptions suburbaines et urbaines sont très influencées par ce qui se passe dans ce secteur. Cette question, qui est l'une des plus importantes dont nous ayons à traiter, ne peut que nous préoccuper vivement.
Donc, je vous remercie et je vous suis reconnaissant de vous être déplacés pour venir nous faire profiter de votre sagesse.
Chers collègues, la date de la prochaine réunion vous sera communiquée plus tard. La séance est levée.