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SCYR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Sous-comité des enfants et jeunes à risque du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 17 avril 2002




¹ 1540
V         Le président (M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.))
V         Dr Jeff Reading (directeur scientifique, Institut de la santé des Autochtones des Instituts de recherche du Canada)
V         

¹ 1545
V         Le président
V         Dr Jeff Reading
V         Le président
V         Dr Jeff Reading
V         Le président
V         M. Richard Jock (directeur exécutif, Organisation nationale de la santé autochtone)

¹ 1550

º 1600
V         Le président
V         M. Larry Spencer (Regina--Lumsden--Lake Centre, Alliance canadienne)
V         Dr Jeff Reading

º 1605
V         M. Larry Spencer
V         M. Richard Jock
V         M. Larry Spencer
V         M. Richard Jock
V         M. Larry Spencer

º 1610
V         Le président
V         Dr Jeff Reading
V         Le président
V         Mme Monique Guay (Laurentides, BQ)
V         

º 1615
V         M. Richard Jock
V         Le président
V         Mme Valerie Galley (coordonnatrice de projets spéciaux, Organisation nationale de la santé autochtone)
V         Mme Monique Guay
V         Mme Valerie Galley
V         Mme Monique Guay
V         M. Richard Jock
V         Mme Monique Guay
V         Le président
V         M. Richard Jock

º 1620
V         Le président
V         Dr Jeff Reading
V         Le président
V         Mme Monique Guay
V         Dr Jeff Reading
V         Mme Monique Guay
V         Dr Jeff Reading

º 1625
V         Le président
V         Mme Monique Guay
V         M. Richard Jock
V         Le président
V         M. Alan Tonks (York-Sud--Weston, Lib.)
V         Le président
V         M. Alan Tonks
V         Le président
V         M. Alan Tonks

º 1630
V         Dr Jeff Reading
V         M. Richard Jock
V         M. Alan Tonks

º 1635
V         Dr Jeff Reading
V         Le président
V         M. Richard Jock
V         M. Alan Tonks
V         Le président
V         Dr Jeff Reading

º 1640
V         M. Richard Jock
V         Le président

º 1645
V         Dr Jeff Reading
V         Le président
V         Dr Jeff Reading
V         M. Richard Jock
V         Le président










CANADA

Sous-comité des enfants et jeunes à risque du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 022 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 17 avril 2002

[Enregistrement électronique]

¹  +(1540)  

[Traduction]

+

    Le président (M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.)): Toutes nos excuses aux témoins. C'est un cas d'exception, puisque nous célébrons le 20e anniversaire de la Charte des droits et libertés, et qu'il a fallu y consacrer des discours et notre présence en Chambre.

    Sans autre présentation, permettez-moi de souhaiter la bienvenue à M. Jeff Reading, de l'Institut de la santé des Autochtones des Instituts de recherche en santé du Canada, et M. Richard Jock, directeur exécutif de l'Organisation nationale de la santé autochtone.

    Je crois qu'on vous a dit comment nous procédons. Nous prévoyons publier quatre rapports. Le premier, sur lequel nous nous concentrons actuellement, portera sur le statut des enfants autochtones dans les réserves jusqu'à l'âge de 6 ans. Nous essayons certainement d'en savoir davantage sur la nature du problème, tout en axant notre travail sur les solutions communautaires, sur des services intégrés.

    Cette introduction étant donnée, j'espère qu'on vous a dit que c'était à peu près ce que nous avions l'intention de faire. C'est maintenant votre tour, vous avez la parole.

    Commençons-nous avec M. Reading, puisqu'il est le premier inscrit à l'ordre du jour? Allez-y.

+-

    Dr Jeff Reading (directeur scientifique, Institut de la santé des Autochtones des Instituts de recherche du Canada): Je crois qu'il est tout à fait indiqué d'être ainsi retardé par la commémoration de l'avènement de la Charte des droits et libertés. C'est une raison bien suffisante pour passer quelques moments à la Chambre des communes.

    Merci beaucoup de nous donner l'occasion de vous parler aujourd'hui.

+-

     Je ne vais pas vous parler de toute la litanie de problèmes associés à l'état de santé des jeunes Autochtones. Je crois que mon collègue vous en parlera un peu. Il est maintenant bien connu que pour tous les indicateurs de l'état de santé que peuvent mesurer les scientifiques, il y a un fossé entre la santé et le bien-être des enfants autochtones et celui des autres enfants de la société canadienne.

    C'est vraiment une tragédie, puisque cette population connaît une croissance rapide. Environ 50 p. 100 de la population autochtone a moins de 25 ans; c'est un baby boom autochtone, que ce soit dans les centres-villes, en milieu rural ou isolé ou dans les localités semi-isolées de l'ensemble du pays. Essentiellement, si ces enfants héritent des risques de leurs parents, ce sera une tragédie que nous pouvons éviter.

    Nous en savons beaucoup au sujet du pouvoir de la prévention. Nous savons que nous pouvons faire certaines choses, dans les services de santé, pour améliorer la santé et les conditions de vie des enfants. Il y a aussi ce qu'on appelle les déterminants de la santé en amont. Nous les connaissons bien, aussi. Je ne vous apprends rien en disant qu'il y a d'autres facteurs, en dehors des services de soins de santé, qui ont une influence importante sur la santé, comme l'éducation, l'alimentation, le revenu, les possibilités d'emploi, le logement et l'eau potable. Dans bien des collectivités, ces facteurs se font rares. Il s'agit là d'idées tout simples.

    C'est en fait le seul institut du monde qui a choisi comme priorité de recherche les personnes autochtones. C'est parce qu'il s'agit de problèmes complexes, qui existent depuis déjà longtemps et qui sont assortis de circonstances politiques, sociales, historiques et économiques qui ne semblent pas évoluer rapidement.

    Si la recherche de pointe peut mener à des solutions à des problèmes complexes, il faut investir dans des programmes de recherche de pointe. C'est ce qu'on veut faire, aux IRSC et à notre institut.

    Nous n'existons que depuis un an environ et nous avons notamment, depuis, demandé des soumissions au milieu de la recherche qui investit beaucoup dans la préparation de la prochaine génération de chercheurs qui se concentreront sur la santé des Autochtones. Nous parlons des quatre domaines de recherche prévus, y compris le secteur biomédical, le domaine clinique, les sciences sociales et les services de santé pour des recherches de pointe. C'est un programme important qui prévoit un financement de 3 millions de dollars sur six ans, qui vise aussi le développement des capacités.

    Pour ce qui est des programmes de recherche précis destinés à améliorer l'état de santé des enfants autochtones, nous avons un programme axé sur la santé des enfants et des jeunes et plus précisément sur les enfants à risque. Il s'agit d'enfants qui commencent très tôt à faire l'expérience de substances comme le tabac, les solvants, et d'autres. Nous estimons qu'une démarche multidisciplinaire de promotion de la santé et de prévention de la maladie, qui comprend des activités physiques et des loisirs, conçue par la communauté au niveau communautaire, est très importante pour le développement humain des enfants.

    Nous avons constaté des cas d'obésité chez de très jeunes enfants, et l'on sait que cela peut mener au diabète de type 2. D'ailleurs, nous avons des cas d'enfants d'à peine 7 ans qui ont un diabète de type 2. Vous n'avez pas le diabète à cet âge à moins de vivre dans une situation exceptionnelle, d'être extrêmement mal nourri, d'être très sédentaire et de ne pas avoir un avenir intéressant.

    Pour lutter contre le problème du diabète, on se concentre particulièrement sur l'obésité, par la prévention primaire, des interventions, de l'activité physique et une amélioration de l'alimentation.

    Le syndrome d'alcoolisation foetale et l'effet de l'alcool sur le foetus sont de toute évidence des problèmes qu'on peut prévenir. À cause de la situation dans les collectivités autochtones, il n'est pas si difficile de comprendre d'où vient ce problème. Ce qui est plus difficile à comprendre, ce sont les raisons pour lesquelles ce problème persiste.

    Quand j'étais étudiant et qu'on voulait parler de recherche sur le syndrome d'alcoolisation foetale, c'était comme ouvrir une boîte de Pandore. Personne ne voulait y toucher, de crainte de ce qu'on trouverait dans la boîte.

    Je crois que le Canada a commencé à se pencher sur la recherche. D'ailleurs, il y a eu en Saskatchewan une réunion de chercheurs pour parler du problème d'alcoolisation foetale et des moyens de le prévenir dans les communautés autochtones. Des scientifiques des domaines biomédical, clinique et social, de même que des professionnels des services de santé et des membres de la communauté se sont réunis et ont fixé un certain nombre de priorités. L'IRSC concentrera ses efforts sur la recherche relative au syndrome d'alcoolisation foetale.

    Nos activités portent aussi sur l'amélioration de l'accès aux soins de santé appropriés pour les groupes marginalisés. Nous savons que les services offerts aux peuples autochtones, particulièrement dans les milieux isolés, sont bien en-deçà des normes, comparés aux services offerts dans les centres urbains et même, dans les centres ruraux. Le coût élevé du transport des patients vers les centres de soins tertiaires dans les villes est un obstacle majeur à l'amélioration des services. Il faut concentrer davantage de ressources sur des moyens innovateurs d'offrir les services à la communauté, y compris un investissement accru dans la télémédecine et des possibilités de brancher les centres de soins tertiaires à des postes de soins infirmiers dans le Nord et ailleurs au Canada.

    Enfin, il y a divers types de traumatismes et d'accidents. Il y a les accidents intentionnels, découlant de la violence physique, de la toxicomanie et des mauvais traitements. Mais il y a aussi ceux qui ne sont pas intentionnels et qui se rapportent à des risques: on pourrait y remédier simplement en portant des casques en motoneige, des vestes de sauvetage dans les embarcations et la ceinture de sécurité dans les voitures. Nous pensons que les communautés autochtones ont le potentiel pour améliorer rapidement la santé, en se concentrant simplement sur la prévention des accidents, dans l'environnement physique. Il faut rendre plus sûres, particulièrement pour les enfants, des machines comme les motoneiges, les voitures et les embarcations, mais aussi, les habitations. Des tissus ignifuges pour les vêtements et la literie pourraient sauver des vies, par exemple. Ce ne sont que des exemples.

    En terminant, je voudrais parler de la très importante question du tabagisme. Si une mère enceinte fume, les toxines se retrouvent aussi dans le placenta. L'enfant à naître dépend absolument de la circulation sanguine de la mère et tout ce qui entre dans l'organisme de la mère passe dans celui du foetus en développement, par le sang. Toutes les études montrent que le tabagisme pendant la grossesse est une mauvaise chose. Il a des effets négatifs sur l'enfant et après sa naissance, il est associé à un plus grand nombre de décès associés à la mort subite du nourrisson et à des problèmes respiratoires.

    Bien entendu, à mesure que l'enfant grandit, il a des infections respiratoires et est prédisposé à être à son tour un fumeur. Je dirais que le tabagisme est probablement le principal problème qu'on peut prévenir, dans les communautés autochtones. Nous savons que le taux de tabagisme chez les Autochtones dans les réserves, au Canada, est parmi les plus élevés du monde. Pour surmonter ce genre de problème, il faut commencer à intervenir dès l'âge de six ans. Je dirais que c'est le principal problème, parce qu'on peut certainement le prévenir et parce qu'il touche le plus grand nombre de personnes.

    Voilà quelques-uns des sujets dont on pourrait commencer à parler.

¹  +-(1545)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Reading. Juste une précision: si j'ai bien compris, votre institut vient d'être mis sur pied, n'est-ce pas? Est-ce en mars dernier que...

+-

    Dr Jeff Reading: Oui, nous avons été créé l'an dernier. Richard Jock fait aussi partie de mon comité consultatif.

+-

    Le président: Où êtes-vous installé? Comment cela fonctionne-t-il?

+-

    Dr Jeff Reading: Ce sont des instituts virtuels. Je suis personnellement installé à l'Université de Toronto, où se trouvent également trois autres instituts. Mes locaux se trouvent dans le Service des sciences de la santé publique. Il existe 13 instituts répartis dans différents centres d'un bout à l'autre du pays. Nous rencontrons le président des instituts pendant deux jours par mois et nous définissons les priorités nationales en matière de recherche sur la santé.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Jock, soyez le bienvenu. Où êtes-vous installé?

+-

    M. Richard Jock (directeur exécutif, Organisation nationale de la santé autochtone): Nous sommes installés au 56 rue Sparks, à quelques coins de rue d'ici.

    Merci. J'aimerais commencer en confirmant certains arguments formulés par M. Reading.

    Lorsque je cite des statistiques, je donne la documentation dont elles proviennent, ce qui vous intéressera sans doute lors de la rédaction de votre rapport.

    Je voudrais confirmer au départ que les enfants autochtones présentent un taux de maladie anormalement élevé. On le voit nettement dans le pourcentage de la population formée par les enfants et les jeunes, c'est-à-dire de la naissance à 19 ans, et qui représente 44 p. 100 de la population autochtone. Dans ce groupe d'âge, 52,1 p. 100 des enfants de 0 à 14 ans vivent dans la pauvreté. Il faut dire les choses simplement, ces deux éléments sont des facteurs importants lorsqu'on étudie le sort des enfants autochtones.

    Au cours des études réalisées par Kue Young, qui est maintenant le collègue de Jeff, M. Young a trouvé une proportion élevée, de 30 à 60 p. 100, d'enfants dont le poids dépasse le 85e rang centile. Il en résulte des conséquences importantes quant au risque de diabète précoce et de diabète chez l'adulte, et ce problème est directement lié à la sécurité alimentaire et à la qualité de la nutrition.

    En ce qui concerne le groupe d'âge que vous visez, nous constatons qu'il y a trois sujets de préoccupation. La période prénatale, la période postnatale et la période de 1 à 6 ans.

    Pour ce qui est des problèmes prénataux, la suprévalence des grossesses chez les adolescentes autochtones pose problème; à cela s'ajoutent les problèmes de nutrition et de pénurie alimentaire qui sont essentiels dans le développement du foetus.

    Le syndrome d'alcoolisation foetale et les effets de l'alcool sur le foetus sont très importants, comme on l'a dit tout à l'heure. Par ailleurs, il est difficile d'en déterminer l'incidence ou la prévalence. Selon l'information la plus fiable dont nous disposons, dans les populations à risque élevé de Colombie-Britannique, elle peut atteindre un sur cinq. Néanmoins, que les enfants subissent intégralement ou partiellement le syndrome d'alcoolisation foetale ou qu'ils présentent des manifestations physiques ou comportementales qui résulteraient de la toxicomanie, tous ces problèmes ont une incidence considérable sur le potentiel des enfants et sur la possibilité de répondre à leurs besoins immédiats et à long terme.

    Le diabète foetal pose un autre problème. L'excès de poids à la naissance est aussi préoccupant que l'insuffisance de poids et présente un risque pour l'individu en développement.

    Il faut aussi parler du problème des conséquences de la violence en milieu familial.

    En ce qui concerne la première année de vie, les problèmes sont un peu différents. Cependant, la mortalité infantile pendant la période néonatale et pendant le premier mois est deux fois plus importantes chez les enfants autochtones que chez les enfants non autochtones, et trois fois plus importante dans le cas des nouveaux-nés inuits. La mortalité de la période postnéonatale à la fin de la première année est trois fois plus élevée chez les enfants autochtones que chez les enfants non autochtones, et quatre fois plus élevée chez les enfants inuits.

¹  +-(1550)  

    Bien qu'il n'y ait pas eu beaucoup de recherches sur les causes directes de ces problèmes, je suis certain que les déterminants de la santé évoqués par Jeff...le tabagisme et la toxicomanie constituent certainement des facteurs importants.

    De la période postnatale à la fin de la première année, la mortalité imputable à des blessures est quatre fois plus élevée que chez l'ensemble des bébés canadiens. De un an à six ans, les décès en milieu préscolaire résultant de blessures chez les enfants autochtones est plus de cinq fois supérieur à ce qu'il est pour l'ensemble des enfants canadiens.

    Je voudrais également consacrer quelque temps aux solutions efficaces, en insistant sur les premiers signes de l'efficacité du Programme d'aide préscolaire aux Autochtones. Même s'il s'agit encore d'un nouveau programme, son niveau de couverture est relativement modeste. Le Programme urbain et nordique d'aide préscolaire aux Autochtones, qui s'adresse aux enfants autochtones de trois et quatre ans hors réserve, met des services à la disposition de 3 236 enfants, soit environ 12 p. 100 du groupe d'âge. Dans les réserves, le programme couvre 7 700 enfants répartis dans 305 sites, ce qui représente également une couverture de 12 p. 100.

    On en voit déjà les premiers signes de succès. La première étude de la partie nordique et hors réserve du programme semble indiquer des secteurs dignes d'intérêt. Par exemple, près d'un cinquième des enfants nécessitent plus d'attention de la part du personnel à cause de besoins particuliers comme des retards dans l'acquisition de la parole, le syndrome et les effets de l'alcoolisation foetale, des problèmes d'émotivité ou de comportement et des problèmes de vue ou d'ouïe. Par ailleurs, on signale des conditions économiques médiocres chez 38 p. 100 des enfants, de la toxicomanie—alcool, drogue et solvants—chez 32 p. 100 d'entre eux et des sévices, notamment à cause de la violence en milieu familial, chez 32 p. 100 également d'entre eux.

    Nous avons également considéré des exemples que vous ne connaissez peut-être pas. Il existe aux États-Unis un programme appelé Perry Preschool Program; c'est un programme d'intervention précoce qui a été mis en place dans les années 60. On a réalisé un étude longitudinale qui assurait le suivi des participants au programme jusqu'à l'âge adulte. On a constaté des résultats concrets en ce qui concerne le niveau de scolarité atteint: une plus forte proportion des participants obtenaient un diplôme collégial, et une moindre proportion d'entre eux se retrouvaient bénéficiaires de l'aide sociale à l'âge adulte. On a constaté des économies concrètes pour l'appareil judiciaire—moins d'arrestations chez les adultes—et également des économies au niveau des besoins spéciaux en éducation et des interventions en santé mentale. Du point de vue du taux de réussite, ce programme pourrait servir de modèle aux interventions faites au Canada auprès des enfants autochtones.

    J'ai été très heureux de vous entendre parler de la nécessité d'une approche intégrée. C'est un argument que je fais mien. Il faudrait même une stratégie intégrée de l'enfance qui répond aux besoins les plus pressants. Elle devrait comprendre une augmentation du financement des programmes actuels ou nouveaux d'aide préscolaire aux Autochtones pour en augmenter le taux de pénétration et de disponibilité, qui n'est actuellement que de 12 p. 100. L'enseignement des langues et des cultures indigènes devrait bénéficier de fonds de développement des programmes scolaires. Actuellement, ces cours existent, mais un enseignement efficace des langues exigerait un soutien pédagogique qui le rendrait plus efficace, en particulier dans la formule d'immersion.

    Par ailleurs, nous estimons intuitivement que les garderies devraient faire partie intégrante du programme. L'extension des garderies et leur disponibilité pour les enfants autochtones dont les parents sont assistés sociaux permettraient de briser le cercle de la pauvreté et du manque de stimulation intellectuelle et sociale. Des programmes de déjeuners et de dîners visant spécifiquement les enfants autochtones permettraient de résoudre certains problèmes de sécurité alimentaire et de répondre aux besoins nutritionnels de ces enfants.

    J'ajoute qu'il faudrait envisager des programmes d'activité pour stimuler le niveau d'activité physique. Il pourrait s'agir non pas nécessairement de sports de compétition, mais d'activités physiques pures et bien ciblées permettant de faire face à l'augmentation de l'incidence de l'obésité.

    Je voudrais conclure en disant qu'une telle stratégie intégrée permettrait à mon sens de répondre à certains besoins identifiables à court terme que l'on constate chez les enfants autochtones, mais qu'il faudrait envisager également des interventions à long terme sur les déterminants multiples de la santé, la pauvreté, le logement, la qualité de l'eau—tous ces thèmes dont M. Reading a déjà parlé. L'Organisation nationale de la santé autochtone considère également que l'auto-gouvernance et l'autonomie gouvernementale constituent en elles-mêmes des déterminants de la santé et que le passage à l'autonomie gouvernementale constitue un ingrédient essentiel de la santé des populations autochtones.

    Merci.

º  +-(1600)  

+-

    Le président: Merci beaucoup. Merci à tous les deux. Passons tout de suite aux questions. Larry Spencer.

+-

    M. Larry Spencer (Regina--Lumsden--Lake Centre, Alliance canadienne): Merci. Veuillez excuser mon retard; nous avons été retenus à la Chambre, où nous montions la garde. Nous craignons que les libéraux nous jouent un tour. En tout cas, nous voici.

    Je prenais note des questions que vous mentionniez, particulièrement le problème relatif aux grossesses chez les adolescentes. Ce n'est qu'un élément parmi bien d'autres, mais le problème est tellement vaste. Vous avez parlé de toutes sortes de choses, du choix du mode de vie—c'est-à-dire la consommation d'alcool, de tabac—à l'accès à la nourriture. Voulez-vous bien me dire comment un gouvernement peut-il maîtriser un problème aussi colossal? C'est comme si vous nous demandiez presque de tout faire pour ces gens. Tâche qui semble impossible. On dirait que c'est un problème qui est même plus gros que le gouvernement lui-même. Et si nous envisagions les choses sous cet angle, que pourrait-on faire? Quelle autre solution y a-t-il à part l'aide financière du gouvernement?

+-

    Dr Jeff Reading: Eh bien, ce n'est pas un problème qui a été engendré par les Autochtones eux-mêmes. C'est assez évident. C'est un problème historique et politique qui s'inscrit dans l'évolution politique du Canada vers l'État-nation. Il y a eu tout ce gâchis avec les pensionnats, où l'on a en fait échoué à assimiler ces gens de force, et en conséquence de cet échec, nous avons tout un ménage à faire.

    Il est question ici des circonstances qui ont défavorisé dès le départ les Autochtones à titre personnel et collectif. Il est tout simplement inexact de blâmer ensuite les collectivités autochtones pour ce problème et de leur reprocher d'être un fardeau pour le contribuable canadien.

    La vérité, c'est qu'il faudra dégager plus de ressources à court terme pour obtenir des résultats positifs à long terme. On peut continuer de jeter de l'argent dans le puits jusqu'au jour où nous aurons compris de quoi il en retourne. Mais les circonstances nous contraignent à régler ces problèmes. On vient de fêter les 20 ans de la Charte des droits. Et la Charte interdit toute discrimination fondée sur la race, les caractéristiques d'ordre géographique ou sexuel, pour aucun motif. Si les gens souffrent, et nous avons prouvé qu'il y a des gens qui souffrent, particulièrement des enfants—comme vous le savez, ils n'ont pas demandé à naître dans ces familles—que doit faire alors un pays comme le Canada?

    Le Canada pourrait éliminer ce problème assez rapidement, mais nous avons décidé de tolérer la souffrance, de lui tourner le dos; c'est la vérité. En tout cas, c'est le point de vue des Autochtones.

º  +-(1605)  

+-

    M. Larry Spencer: Oui, je comprends cela, et je ne suis pas en désaccord avec tout ce que vous dites. Mais quand je pense à ce genre de problèmes, je me rappelle certains problèmes qui se sont posés aux États-Unis dans la transition que les Noirs ont vécue. Les États se croyaient obligés d'accorder une aide sociale massive, et ils ont créé tous ces ghettos—ces quartiers qui ont fini par devenir des ghettos—où ces gens vivent. On assiste là-bas maintenant à une véritable révolution, où ce sont les gens qui décident et qui comprennent qu'ils ont été piégés et que cela a été malsain pour eux à long terme.

    Je pense qu'il faut en même temps reconnaître d'une certaine manière la nécessité d'encourager—vous avez parlé d'autonomie gouvernementale—une meilleure prise en charge de soi et l'autonomie.

    Je voulais aussi poser une question faisant suite à ce que M. Jock disait, à savoir qu'il faut étendre les services de garde aux assistés sociaux. Qu'est-ce que cela donnerait?

+-

    M. Richard Jock: Je crois que votre comité devrait vraiment étudier en profondeur le modèle des garderies. On y reçoit les enfants de l'âge d'un an à trois ans. C'est en fait un programme merveilleux qui comporte un enseignement structuré, l'initiation à l'apprentissage et l'enrichissement intellectuel. De même, les garderies permettent aux parents d'acquérir des compétences parentales. Bref, si vous prenez certains objectifs de ce programme, c'est un peu comme le programme d'aide préscolaire, sauf qu'on commence beaucoup plus tôt.

    L'avantage de ce programme, c'est que les bénéficiaires de l'aide sociale n'ont pas toujours les moyens d'exposer leurs enfants à ce genre de possibilités d'apprentissage, ce genre d'initiation à la vie en société, à l'éducation alimentaire, et aussi à la socialisation avec d'autres enfants. À mon avis, on tient là un moyen très concret d'enrichir la vie de ces enfants et de leur permettre d'échapper à ce cycle.

+-

    M. Larry Spencer: Mais comme vous dites, il faut aussi une certaine collaboration avec les parents.

    M. Richard Jock: Oui.

    M. Larry Spencer: Parce qu'à mon avis, c'est une situation malsaine si l'on permet simplement à un parent chômeur de se soustraire à toute responsabilité pendant que quelqu'un d'autre s'occupe des enfants. Est-ce qu'on intègre les parents dans le programme de garde d'enfants, est-ce qu'on les fait intervenir et est-ce qu'on leur enseigner à s'occuper de leurs enfants sur place dans le cadre des soins qu'on donne à l'enfant?

+-

    M. Richard Jock: Oui, à tout le moins dans les versions ontariennes que je connais. Je peux dire à peu près sans crainte de me tromper qu'il y a la même chose dans le modèle québécois. Donc, dans un sens, ce que je dis, c'est que lorsqu'on parle d'intégration, on parle en fait de santé et de services sociaux, du Programme d'aide préscolaire, de la garde d'enfants et d'autres initiatives, et on ne fait qu'en élargir la portée parce qu'il existe de bonnes approches.

+-

    M. Larry Spencer: Voilà qui est encourageant parce qu'il me semble que lorsqu'on parle de mauvais traitements, lorsqu'on parle de blessures—mes propres enfants auraient eu leur part de blessures s'il n'y avait pas eu quelqu'un là pour leur dire «Descends de la clôture»—et un aspect très important de cela, un élément essentiel ici, consiste à faire participer les parents à une formation parentale sur place, où ils s'occupent de leurs enfants et des enfants des autres selon un système de rotation quelconque.

º  +-(1610)  

+-

    Le président: Monsieur Reading.

+-

    Dr Jeff Reading: L'un des éléments essentiels, et l'un des six thèmes du Programme d'aide préscolaire aux Autochtones, c'est cette valeur essentielle qu'est la compétence parentale. Les parents doivent participer au programme de leurs enfants pour profiter du programme. La preuve qu'on a réunie aux États-Unis depuis les années 60 démontre que l'influence parentale est l'un des principaux éléments déterminants dans le succès des programmes comme celui du projet préscolaire Perry, dont parle Richard.

+-

    Le président: Madame Guay.

[Français]

+-

    Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Merci, monsieur le président. Merci, messieurs Jock et Reading, d'être présents parmi nous.

+-

     Il me fait plaisir que vous soyez ici et que vous nous donniez votre vision de ce qui se passe pour nos enfants autochtones à travers le pays.

    Vous avez mentionné plus tôt qu'on fêtait le 20e anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés. On a aussi d'autres événements qui sont moins gais, entre autres le 20e anniversaire du rapatriement de la Constitution. Pour le Québec, c'est un autre événement tout à fait différent.

    Cela étant dit, on a beaucoup parlé des enfants. On a eu des témoignages qui nous ont énormément touchés. Nous devons vraiment pondre un rapport afin de faire des suggestions à court, à moyen et, espérons-le, le moins possible à long terme, car nous voulons trouver des solutions le plus rapidement possible pour parvenir à aider ces enfants-là à grandir comme tous les enfants du monde, en sécurité et en santé surtout.

    Vous avez parlé, monsieur Jock, d'un programme d'aide préscolaire pour les autochtones. J'aimerais savoir depuis quand ce programme existe et où il est appliqué, et j'aimerais que vous nous donniez une description plus précise du programme comme tel. J'aimerais savoir qui administre ces programmes. Je reviendrai avec d'autres questions ensuite.

º  +-(1615)  

[Traduction]

+-

    M. Richard Jock: Ce programme de Santé Canada est financé par deux directions, la Direction de la santé de la population, qui est responsable des populations des Territoires du Nord-Ouest et des populations hors réserve, et la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, qui fournit des services aux populations dans les réserves. On a procédé à une évaluation intérimaire du volet hors réserve, qui existe depuis environ 1995, je crois. L'une des personnes qui a pris part à cette évaluation m'accompagne aujourd'hui.

+-

    Le président: Vous pourriez peut-être vous présenter et ajouter un mot à ce sujet.

+-

    Mme Valerie Galley (coordonnatrice de projets spéciaux, Organisation nationale de la santé autochtone): Je m'appelle Valerie Galley et je travaille en ce moment pour le compte de l'Organisation nationale de la santé autochtone.

    J'ai pris part à la facture du Programme d'aide préscolaire aux Autochtones pour les centres urbains et les collectivités du Nord, initiative qui a été lancée en 1995. Je crois que les projets sont entrés en marche en 1996 et 1997. En 1999, on a annoncé le financement pour la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, qui est le programme pour les réserves.

    Quelle était l'autre partie de la question?

[Français]

+-

    Mme Monique Guay: Qui administre les programmes? Est-ce que ce sont les réseaux dans les réserves, les centres communautaires autochtones, ou est-ce qu'ils sont administrés par le gouvernement?

[Traduction]

+-

    Mme Valerie Galley: Le programme est administré par ceux qu'on appelle les commanditaires du programme. Il peut s'agir d'un centre d'amitié ou d'un organisme métis. La surveillance est assurée par l'administration centrale de Santé Canada et par les experts-conseils du programme dans les bureaux régionaux du ministère. Dans les réserves, le programme est administré directement par les Premières nations.

[Français]

+-

    Mme Monique Guay: Alors, c'est sûr qu'il y a d'autres programmes dont on nous a parlé, monsieur le président. Il va falloir qu'on voit, dans l'ensemble, lesquels... Vous nous avez dit que c'était un bon programme. Donc, il faut le maintenir, si j'ai bien compris. Est-ce que ce programme est assez large pour toutes les réserves, ou s'il y a des besoins supplémentaires pour que ce programme puisse continuer de fonctionner? C'est le moment de nous le dire, parce que nous allons faire des recommandations.

[Traduction]

+-

    M. Richard Jock: Non, c'est précisément ce que j'ai dit. Ces deux programmes ne couvrent que 12 p. 100 de l'ensemble de la population visée.

[Français]

+-

    Mme Monique Guay: Donc, les besoins sont là et il faut augmenter les ressources pour ce programme afin qu'il puisse fonctionner mieux pour... Donc, c'est une chose qu'il faut retenir à la recherche, car si on a quelque chose qui fonctionne bien, il faut essayer de l'améliorer.

+-

    Le président: Puis-je ajouter une précision?

[Traduction]

    Je vais poser ma question en anglais. Est-ce que vous voulez dire qu'idéalement, les programmes devraient couvrir 100 p. 100 des enfants visés, ou bien qu'ils ne visent actuellement que 12 p. 100 d'entre eux et qu'il faudrait, par définition, envisager un plus fort pourcentage des enfants à risque, de façon que...? Éventuellement, on pourrait le faire. C'est très bien. Est-ce que vous demandez un programme universel? Qu'est-ce qu'on pourrait considérer comme une réussite? À quelle proportion des enfants autochtones le programme devrait-il s'appliquer pour que l'objectif soit atteint?

+-

    M. Richard Jock: Je n'ai pas vraiment d'opinion à ce sujet. Je pense qu'un plus fort taux de couverture serait grandement préférable. Il en coûterait beaucoup plus d'assurer une couverture à 100 p. 100 qu'à 75 p. 100, par exemple.

º  +-(1620)  

+-

    Le président: Monsieur Reading, avez-vous un avis à ce sujet?

+-

    Dr Jeff Reading: Ce qui distingue les programmes canadiens et américains d'aide préscolaire aux Autochtones, c'est que le programme canadien ne comporte pas d'évaluation des moyens de subsistance. Aux États-Unis, il faut être très pauvre pour bénéficier de ce genre de programme. Au Canada, on suppose que les participants sont démunis, mais ce n'est pas toujours le cas.

    Je voudrais signaler aussi que l'aide préscolaire aux Autochtones prépare les enfants à se présenter en milieu préscolaire avec les mêmes aptitudes que les autres enfants. L'évaluation de l'état de préparation à l'apprentissage à cette étape de l'accès au milieu préscolaire serait un bon instrument pour déterminer ce que devrait être la portée et l'ampleur du programme.

+-

    Le président: À vous, madame Guay.

[Français]

+-

    Mme Monique Guay: On a parlé des programmes de garderies. C'est sûr que je respecte et que je souhaite que chaque province ait quand même ses programmes. Au Québec, vous travaillez avec les CLSC et il y a un succès avec les autochtones. On a des façons de faire, un respect de la culture. Il y a des programmes spécifiques pour les autochtones. Ça se fait d'une certaine façon au Québec et ça fonctionne bien. Il ne faut pas défaire ce qui se fait déjà et qui marche.

    En Ontario, vous avez d'autres sortes de programmes et dans les autres provinces, ils ont aussi leur façon de faire, dépendamment aussi du pourcentage des populations autochtones dans chacune des provinces. Ça varie énormément, donc les programmes sont tout à fait différents parce que les façons de faire ne peuvent pas être mur à mur partout. Ça dépend aussi des différentes cultures.

    On parlait des garderies tout à l'heure. Vous parliez des modèles pour les enfants de zéro à trois ans. Au Québec, on a un modèle pour les enfants de zéro à cinq ans et l'implication des parents est primordiale parce que sans les parents, c'est sûr que ça ne peut pas fonctionner.

    Alors, je ne sais pas quelle est votre opinion sur les modèles de garderies. Comment voyez-vous cela? Avez-vous des expériences? Vous m'avez parlé de l'Ontario tout à l'heure, mais dans d'autres provinces, comment cela fonctionne-t-il?

[Traduction]

+-

    Dr Jeff Reading: Tout cela relève du même programme, mais sous des formes différentes. C'est ce qu'on appelle l'éducation de la petite enfance. Les garderies n'ont pas obligatoirement d'objectifs d'apprentissage ou de programmes dans ce domaine; les différents programmes qui relèvent de l'éducation de la petite enfance visent à stimuler le développement cognitif du cerveau de l'enfant, ce qui est différent des autres programmes privés qui ne visent pas nécessairement ces facteurs.

    La recherche biologique montre que c'est une réalité, qu'il y a effectivement une activité du tronc cérébral qui résulte d'un environnement stimulant, sous réserve d'une bonne alimentation et de la présence des bons précurseurs d'un développement normal.

    Je ne connais pas tous les programmes, mais je crois qu'ils relèvent tous de la même rubrique de l'éducation de la petite enfance et qu'ils ont des résultats et des objectifs mesurables en matière de développement humain.

[Français]

+-

    Mme Monique Guay: Il y a aussi d'autres programmes qu'on doit maintenir auprès des futures mères. Est-ce que j'ai terminé mon temps, monsieur le président? J'ai une dernière question.

     Le président: Une dernière question, c'est parfait.

    Mme Monique Guay: Parlant des futures mères, vous avez dit qu'il y avait beaucoup de jeunes femmes, de jeune filles même qui ont des grossesses très jeunes. Donc, il faut faire une prévention, une éducation auprès d'elles. Est-ce que ça se fait présentement? Doit-on augmenter les programmes là aussi?

    Ma question est double. Il y a des enfants qui souffrent d'obésité. On m'a dit que c'est en train de devenir un problème sérieux chez les enfants autochtones. Est-ce que c'est vrai? Est-ce qu'il y a des choses qui se font pour corriger la situation?

[Traduction]

+-

    Dr Jeff Reading: Le problème de l'obésité n'est pas propre à la communauté autochtone. Il y est courant, mais lorsqu'on étudie l'augmentation de l'obésité en Amérique du Nord depuis 10 ans, on est frappé de voir à quel point il s'est rapidement étendu aux enfants. C'est le résultat du mode de vie, de la télévision, des voitures, de la restauration rapide. Nous le savons tous, n'est-ce pas?

    Aux ICRS, il existe un institut de la nutrition, du métabolisme et du diabète, et parmi tous les sujets auxquels il consacre ses travaux de recherche, il a ciblé l'obésité comme étant le thème le plus digne d'intérêt. C'est déjà un pas important, mais l'obésité est liée à de nombreux autres résultats négatifs en matière de santé, et elle commence pendant la première période de la vie. Il reste bien des éléments scientifiques qui sont encore mal compris.

    Nous sommes tout à fait prêts à participer à ce programme de recherche sur l'obésité, en particulier sur tout ce qui concerne la santé de l'enfant et le diabète.

º  +-(1625)  

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Allez-y.

[Français]

+-

    Mme Monique Guay: Pour les jeunes femmes...

[Traduction]

+-

    M. Richard Jock: J'ai simplement quelques commentaires à faire.

    Je crois que certains des points que vous avez présentés sont pertinents et seront tout à fait appropriés une fois que nous commencerons à discuter du groupe plus âgé, disons du groupe de 14 à 19 ans, car en fait certaines de ces compétences parentales doivent être développées beaucoup plus tôt. Il est pratiquement trop tard pour commencer à parler de la condition parentale au moment où une jeune femme est enceinte. Il s'agit dans ce cas-là plutôt d'intervention que de prévention. Je pense que ce serait probablement un sujet qu'il faudrait aborder avec des groupes plus âgés.

    De même, quant à l'aide nécessaire pour les enfants qui ont des difficultés d'apprentissage, ces difficultés ont tendance à se manifester à l'étape préscolaire. De toute évidence, lorsque l'enfant commence à aller à l'école, ses difficultés deviennent beaucoup plus évidentes et les besoins deviennent d'autant plus pressants. Ici encore, je crois que c'est une question à laquelle on devrait s'intéresser à un stade ultérieur des délibérations du comité. Jeff a vraiment traité des aspects concernant l'obésité, et c'est probablement l'un des plus graves problèmes de santé en Amérique du Nord à l'heure actuelle.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    J'aimerais simplement faire une remarque d'ordre procédural à l'intention des membres du comité. J'en ai parlé aux témoins. J'espérais que nous ayons terminé d'ici 16 h 45 ou 16 h 50, si nous avons suffisamment de temps afin que nous puissions consacrer une dizaine de minutes à la prochaine étape de notre travail. Je crois qu'il est nécessaire de faire le point. Si vous n'avez pas d'objection à rester, l'un et l'autre, j'ai besoin d'une forme quelconque de légitimité constitutionnelle ici. Maintenant que Spencer est parti, il ne reste plus...

+-

    M. Alan Tonks (York-Sud--Weston, Lib.): Si nous ne restons pas, vous allez le faire vous-même.

+-

    Le président: Je serai porté à être d'accord avec moi-même.

+-

    M. Alan Tonks: Et vous aurez probablement raison.

+-

    Le président: Je n'aurai pas besoin de prendre l'avis de quelqu'un d'autre.

    Monsieur Tonks.

+-

    M. Alan Tonks: Je vous remercie.

    Un thème qui est revenu à plusieurs reprises au comité, c'est qu'il existe des collectivités, des Premières nations qui se débrouillent mieux que d'autres en adoptant une approche plus holistique et mieux intégrée. On ne veut pas dire qu'elles ont atteint un niveau d'autonomie gouvernementale supérieur à celui d'autres groupes. À force de tâtonnements, elles ont réussi à mettre sur pied un modèle plus efficace et à obtenir un plus grand appui. Elles utilisent la démarche adoptée au Québec dans le cas des CLSC, une approche clinique qui améliore l'accès aux services de santé dans la réserve et qui sont plus adaptés aux besoins locaux particuliers.

    Nous avons parlé des programmes qui intègrent l'acquisition linguistique et le développement des compétences et la recherche d'emploi et le soutien nécessaire pour les garderies, et ces initiatives sont administrées surtout au niveau local.

    Est-ce que vos chiffres...? Dans le cadre de ces diverses approches, le tout premier principe de réussite, c'est que la famille devienne le point central de la stratégie, et on n'essaie pas de traiter simplement un membre en particulier de la famille. On mise sur la participation des parents et on utilise les divers programmes qui existent pour appuyer les initiatives en ce sens.

    Ma première question est la suivante: selon vos statistiques, est-ce que vous examinez les stratégies dans l'ensemble du pays et est-ce que vous tâchez de quantifier ou d'évaluer la réussite? Cela ne nous permettrait-il pas alors de déterminer le meilleur modèle à utiliser?

º  +-(1630)  

+-

    Dr Jeff Reading: J'aimerais répondre à cette question. Elle est d'ailleurs fort intéressante. Ce modèle a été appliqué à l'ensemble de la population canadienne par Bob Evans, un économiste de la UBC. Il a écrit un ouvrage intitulé Why Are Some People Healthy and Others Not? Vous voulez savoir pourquoi certaines Premières nations ou collectivités autochtones sont en santé et d'autres pas; il s'agit d'une question fort alambiquée. Cette situation est en partie attribuable à des facteurs socio-économiques et des facteurs d'amont influant sur la santé; cependant, il ne s'agit pas là de la seule explication. Il y a donc une recherche fort compliquée sur cette question, et il y a certaines personnes au Canada qui se penchent justement là-dessus; dont John O'Neil de l'Université du Manitoba en collaboration avec l'Assemblée des chefs du Manitoba. Certains sur la côte Ouest se sont penchés sur l'autonomie politique et ont déterminé que l'autonomie politique grâce à un système de gouvernement local contribue de façon marquée à améliorer la santé des collectivités.

    Il s'agit des premiers signes, mais je crois qu'il y a encore beaucoup de recherche à faire à cet égard. Il serait raisonnable de juger que ceux qui exercent un contrôle sur leur vie se sentent mieux. S'ils jouissent des débouchés économiques qui découlent de ce sens de contrôle, cela devrait normalement avoir un impact sur leur bien-être. C'est comme si on faisait un grand pas vers l'avant. À mon avis, le contexte qui caractérise les communautés autochtones est le suivant: il y a eu un rapport de paternalisme avec le gouvernement qui a pris des décisions pour les Autochtones pendant bien longtemps; et la tendance des collectivités vers une plus grande autonomie devrait s'accompagner d'une amélioration de l'état de santé.

+-

    M. Richard Jock: Les données présentées à la suite d'études régionales sur la santé, lorsque les collectivités ont été étudiées en détail pendant une bonne période, démontrent que les collectivités qui sont indépendantes ou autonomes, même si elles ne sont pas l'exemple parfait d'autonomie politique, ont un meilleur état de santé. Les statistiques disponibles appuient donc cette théorie, mais elles méritent certainement d'être étudiées plus à fond.

+-

    M. Alan Tonks: Je vous remercie de ces réponses. Je ne dis pas qu'en fait des collectivités sont plus en santé que d'autres. Je ne le sais pas. J'aborde la question sous un angle quelque peu différent. Je suppose que vous utilisez certains paramètres lorsque vous vous penchez sur l'efficacité d'un programme, plutôt... Vous devez avoir un point de départ. J'aborde donc la question sous un angle différent.

    Nous avons fait des suppositions fondamentales en ce qui a trait au rapport très clair entre la fumée secondaire indirecte et le mode de vie et le diabète et les probabilités, et tout cela s'inspire de données statistiques, que les Autochtones, peu importe où ils vivent, sont plus vulnérables en raison de leur mode de vie, des choses sur lesquelles ils n'exercent aucun contrôle—ou d'autres sur lesquelles ils exercent un certain contrôle... J'aimerais savoir quels sont les programmes; comment peut-on en évaluer l'efficacité? Devrait-on employer des programmes universels et les mettre en oeuvre sous un format plus communautaire? J'entends par là avoir un programme administré par un conseil communautaire ou démocratique.

    Je n'adopte donc pas l'angle de l'autonomie politique. Il s'agit là de questions politiques. À mon avis, puisqu'il s'agit uniquement de questions politiques, je ne veux pas qu'on s'enlise dans des choses de cette nature. Je veux savoir quels sont les programmes efficaces, comment nous évaluons cette efficacité, et si les ressources dont nous disposons sont limitées, comment pouvons-nous faire en sorte qu'elles soient affectées à ces programmes qui ont démontré leur efficacité? Il faut offrir ces programmes le plus tôt possible.

    Je prendrais le modèle du Québec, que je ne connais pas très bien, mais tout semble indiquer que les programmes offerts dans cette province dans le domaine de la santé ont été couronnés de succès. Pourrait-on s'inspirer de ce modèle? C'est justement ce à quoi je veux en venir.

º  +-(1635)  

+-

    Dr Jeff Reading: Il est clair que vous en connaissez long sur les dynamiques des collectivités autochtones parce que c'est justement ce que ces dernières demandent. Permettez-moi de vous donner un exemple de la façon dont l'Institut a évolué depuis sa création, qui remonte à environ 18 mois.

    Nous avons deux grands principes directeurs; la recherche de l'excellence scientifique fondée sur des normes internationales dans ce domaine et la pertinence de la recherche, soit la participation de la communauté dès le début de l'étude. La majorité des membres de mon conseil consultatif sont des représentants des groupes autochtones du pays tout entier qui offrent des conseils en matière de priorités dans le domaine de la recherche au Canada. Dans tous nos programmes de formation et dans toutes nos applications en matière de recherche nous demandons que ces deux principes, soit l'excellence scientifique et la participation communautaire, soient intégrés.

    Lorsque nous classons les propositions formulées en fonction de leur mérite, nous nous inspirons de deux critères: si l'un ou l'autre de ces critères n'est pas présent, la note donnée n'est pas très élevée et le financement accordé sera moins important parce qu'il ne faut pas oublier qu'il existe une vive concurrence à cet égard.

    Ça c'est dans le contexte de la recherche. Lorsque vous vous rendez dans les collectivités autochtones, que vous venez d'une université et que vous voulez insister sur la recherche, les gens vous diront qu'ils en ont assez de la recherche, et qu'ils ne veulent rien avoir à faire avec ce genre d'activité, parce qu'ils ont été stigmatisés, que souvent on ne partage pas avec eux les résultats découlant de ces travaux, et qu'à leur avis ces travaux de recherche n'améliorent absolument pas la santé de ces collectivités.

    La participation active à l'initiative et à la recherche dès ses débuts semble assurer une application immédiate des résultats de cette recherche afin de changer les circonstances de cette collectivité, soit par l'entremise du processus politique, soit au niveau local.

    C'est une tendance; je crois que le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones est un autre exemple d'une initiative qui assure une vraie participation des intervenants dès le départ.

+-

    Le président: Monsieur Jock.

+-

    M. Richard Jock: De plus, nous cherchons à élaborer des lignes directrices sur les pratiques exemplaires. Cela permettra entre autres choses de donner suite aux intérêts que vous avez déjà mentionnés. Il importe, notamment, d'identifier les facteurs de réussite associés à ces pratiques exemplaires. Certaines collectivités ont traité de ces questions avec succès. La préparation de documents sur les éléments qui permettent aux collectivités de traiter de la question ou d'en traiter avec succès, et l'étude des questions particulières tout comme les compétences polyvalentest, est une façon de faire en sorte que les intervenants comprennent mieux la façon dont les choses ont fonctionné et la façon d'adapter ces mêmes méthodes ailleurs.

    C'est, à mon avis, une façon logique d'obtenir de plus amples renseignements sur certaines de ces collectivités qui peuvent et doivent être de bons exemples; cela inclut également la question dont nous parlons aujourd'hui.

+-

    M. Alan Tonks: Merci beaucoup. Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: J'aimerais, si vous me le permettez, poser quelques questions. En fait, cela sert peut-être même d'introduction à la prochaine partie de notre réunion, parce que j'ai trouvé vos exposés très utiles. J'ai l'impression que nous voudrions peut-être poursuivre la discussion—pas cet après-midi, mais plus tard dans le cadre de notre étude.

    J'aimerais poser quelques questions qui portent sur ce que nous savons ou ce que nous espérons connaître, quoique je comprends très bien ceux qui disent qu'ils en ont assez de faire continuellement l'objet de recherches.

    Pouvez-vous me dire si vous évaluez les différences au niveau de l'état de santé chez les jeunes Autochtones—je sais que vous faites la distinction entre les Inuits et les Autochtones—mais faites-vous également une évaluation comparative entre l'état de santé des Indiens inscrits qui vivent dans les réserves et ceux qui vivent à l'extérieur des réserves? Faites-vous ce genre de distinctions? Est-ce que quelqu'un procède à genre d'étude?

+-

    Dr Jeff Reading: C'est vraiment un peu triste étant donné qu'en 1994, le Canada a lancé une série d'études longitudinales des cohortes visant à évaluer l'état de santé des Canadiens. L'une d'entre elles était l'étude longitudinale des enfants et des jeunes. Les Premières nations et les Inuits constituaient le seul groupe au Canada qui a été expressément exclu de cette étude. Je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi. Pourquoi exclurait-on une population dont on sait fort bien qu'elle éprouve les pires problèmes de santé? Ça ne semble pas...

    Je sais que les groupes autochtones, par l'entremise de l'Organisation nationale de la santé autochtone, se sont donné beaucoup de mal pour reprendre la place qui leur revient, pour faire faire une véritable étude longitudinale des cohortes d'enfants autochtones. On disposerait ainsi de données longitudinales. C'est comme un vidéo: on peut voir tout le film au lieu de ne voir qu'un cliché. On pourrait voir comment les choses ont évolué, dans le bon sens et dans le mauvais sens. On pourrait se pencher sur des interventions comme le Programme d'aide préscolaire. Ou l'on pourrait se pencher sur les interventions comme celles où ces collectivités qui fumaient se sont transformées en collectivités qui ne fument plus. On pourrait ainsi savoir quel a été l'effet de cette initiative locale sur la santé des enfants?

    Vous pourriez faire des études semblables sur un certain nombre de collectivités et voir quels sont les résultats pour la santé sur une certaine période. Ce serait extrêmement avantageux. Les Canadiens le savent, mais on n'a pas fait d'études semblables sur les Autochtones.

    Donc, la réponse est celle-ci: nous n'avons pas de bonnes données qui nous permettent de comparer, sur une base longitudinale, les Autochtones des milieux urbains et ruraux au Canada. Nous devons réunir ces données, mais nous devons le faire en partenariat avec les collectivités qui doivent jouer un rôle dans la recherche dès le début. Les collectivités sont prêtes à faire cela.

º  +-(1640)  

+-

    M. Richard Jock: J'aimerais faire quelques observations. Pour les Indiens inscrits qui vivent dans les réserves, il existe une étude, qui a été réalisée en 1997, dans le cadre des enquêtes régionales sur la santé, où les questions étaient assez variées. En fait, Jeff a pris part à cette enquête de concert avec l'APN. On a financé une seconde enquête, qui devrait se dérouler l'été prochain, mais avec une portée quelque peu réduite. Quoi qu'il en soit, je dois dire qu'environ 20 p. 100 de toutes les collectivités feront l'objet d'une enquête détaillée, ce qui devrait nous donner des renseignements utiles.

    On ne peut en dire autant pour les Métis et les populations hors réserve. J'arrive d'un forum métis sur l'élaboration de politiques en Saskatchewan, et les Métis ne croient pas nécessairement qu'ils ont été étudiés à mort. En fait, on manque surtout de données pour ce groupe en particulier. Ce que Jeff a dit s'applique évidemment aux Premières nations et aux Inuits, mais il y a vraiment un vide pour les Métis et les groupes urbains qui devrait être comblé à mon avis si nous voulons répondre aux questions comme celles que vous avez posées plus tôt.

+-

    Le président Merci. J'ai deux autres questions.

    Ma deuxième question vise à concilier les observations que vous avez faites au sujet des déterminants de la santé—tous les deux, je pense—et les propos que M. Spencer a tenus. J'ai bien aimé votre première réponse à M. Spencer, mais pour être juste à son égard, je ne crois pas qu'il essayait de se dérober. Je pense qu'il disait que cette liste est tellement accablante que l'on se demande par quoi commencer.

    Quand je pense aux déterminants de la santé—et Dieu sait que j'ai travaillé assez longtemps avec Fraser Mustard pour avoir beaucoup réfléchi aux déterminants de la santé. Soit dit en passant, quand il a témoigné ici, même si je n'étais pas présent ce jour-là, je pense qu'il a présenté ce document de Colombie-Britannique sur la corrélation entre le taux de suicide chez les jeunes et les problèmes d'autonomie, étude qui est très révélatrice et convaincante. Je pense que c'est le document dont vous avez fait mention.

    Mais ce qui me frappe, dans la notion de priorisation ou d'effet de levier, si l'on peut dire, c'est que quand on songe au projet préscolaire Perry, ses responsables n'ont changé qu'une seule variable. Ils n'ont pas changé le logement dans lequel vivent les parents, ils n'ont pas modifié les taux de pauvreté; ils n'ont pas amélioré quoi que ce soit de ce côté-là. Ils se sont occupés seulement des enfants.

    Bien sûr, la preuve est faite que ces enfants sont tellement à risque que l'on obtient un rendement de sept contre un et tout le reste. Pourtant, il semblerait que même en changeant une seule variable, ils ont vraiment eu un impact énorme pour ce qui est de réorienter la vie de ces enfants.

    J'ai vu les données sur le programme d'aide préscolaire aux Autochtones de Moncton, qui sont un peu moins concluantes, et j'ignore pour quelles raisons. Dans un monde où les ressources sont limitées, même si l'on est complètement d'accord avec le fait que nous avons l'obligation morale de nous occuper de tous ces dossiers, et compte tenu du fait que nous devons rendre la vie agréable ou améliorer la qualité de vie des gens qui sont avec nous...Néanmoins, si l'on devait mettre l'accent—et c'est une question qu'on pourrait aborder tout aussi bien que n'importe quelle autre dans notre rapport—sur ce qui, je pense, est en train d'émerger comme une sorte d'ensemble intégré de services d'aide à la petite enfance au niveau communautaire, ce qui serait respectueux mais qui du point de vue fédéral permettrait de rassembler tous ces compartiments séparés d'aide à l'enfance qui sont administrés par DRHC, et tout cela est lié au fait que si l'on n'est pas présent dans la formation, on n'a pas d'emploi, on ne peut pas s'en sortir et l'assistance sociale ne compte pas... le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones, le Programme canadien de nutrition prénatale, le Programme d'action communautaire pour les enfants, et tout le reste... Si l'on créait une sorte de guichet unique, peut-être inspirée du modèle du Québec, tel que nous l'interprétons, de manière à ce que les soins de santé servent essentiellement d'effet de levier, abordant une foule de problèmes d'autonomie des Premières nations et tout le reste, pouvez-vous comprendre que même si nous ne pouvions pas nous occuper immédiatement des problèmes de logement, de l'eau, de l'emploi et des autres problèmes épouvantables qui accompagnent la pauvreté, cela, en soi, aurait un effet de levier pour ce qui est de renforcer la collectivité?

    Il y a un aspect qui semble ressortir des évaluations du programme d'aide préscolaire, à savoir que l'on semble obtenir toutes sortes d'avantages secondaires. On se retrouve avec des femmes responsabilisés qui ont travaillé au niveau communautaire et qui, tout à coup, se sentent bien dans leur peau, et elles font partie du monde des parents. Cela va bien au-delà des enfants.

    Donc, dans nos déterminants de la santé, si nous devions choisir des priorités, pourrions-nous commencer par là?

º  -(1645)  

+-

    Dr Jeff Reading: SI vous cherchez une panacée, je ne pense pas que ça en soit une.

    Le président: Non, je sais.

    Dr Jeff Reading: Il est certain que cela va améliorer les choses, mais ça ne va pas éliminer le problème.

    Je vais vous donner un exemple. Disons que vous vous concentrez sur l'hygiène dentaire, dont nous n'avons pas discuté. L'hygiène dentaire est extrêmement déficiente parmi les enfants des Premières nations, du moins dans certaines communautés des Premières nations. Quand l'hygiène dentaire est extrêmement déficiente, cela influe sur les choix d'aliments. Les gens ont donc tendance à manger des aliments qui sont moins nutritifs, ce qui influe à son tour sur l'obésité, laquelle débouche sur le diabète, qui déclenche à tour toute une série de problèmes comme la cécité à un âge plus avancé, la perte de membres, le dysfonctionnement rénal, le fait d'être prédisposé aux maladies cardiaques.

    C'est donc un cercle vicieux, et je pense que de vouloir se concentrer sur une intervention précise dans le domaine de l'éducation de la petite enfance, en s'imaginant que c'est une sorte de panacée qui va...

+-

    Le président: Je n'en fais pas une panacée, mais entre vous et moi, ne diriez-vous pas qu'il faut d'abord régler le problème du logement, puis pensez aux enfants? Non, vous non plus, ce n'est pas ce que vous diriez.

+-

    Dr Jeff Reading: Non, mais je crois qu'il faudrait une approche sur divers fronts pour s'attaquer parallèlement aux divers problèmes. Quoi qu'on fasse, il faut certainement s'occuper de l'éducation de la petite enfance, mais je crois que cela a un effet de synergie lorsque combiné à d'autres choses dont on sait aussi qu'elles améliorent les conditions de santé sur réserve et dans les milieux urbains.

    Le président: Bien sûr.

    Monsieur Jock.

+-

    M. Richard Jock: Je pense que si on élargit le champ d'intérêt pour englober les jeunes adultes, ceux qui sont aussi au niveau postsecondaire, et qu'on examine les politiques et les possibilités pour s'assurer de leur donner des occasions de s'épanouir, s'ils en ont la capacité, d'aspirer à des études postsecondaires... On a démontré que cela réduisait la demande pour les soins de santé, aussi. Je pense que cela nous aiderait aussi à répondre à nos besoins pour le marché de l'emploi de l'avenir, nos besoins de main-d'oeuvre; je crois que cela répondrait à des besoins divers.

    Mais voici la question que je pose à mon tour: comment faire participer la communauté? Peu importe les bonnes intentions qu'on peut avoir, je ne suis pas convaincu qu'un processus ou un mandat imposé de l'extérieur serait couronné de réussite.

    À mon avis, la clé du succès, c'est un bon processus qui fait participer la communauté et qui est efficace.

-

    Le président: Là-dessus, je vous remercie tous deux parce que je sais que M. Reading espère prendre le vol de 17 h 30 et nous ne voulons pas que ce soit au péril de la vie du chauffeur de taxi.

    À mesure que nos travaux avanceront, nous communiquerons de nouveau avec vous, je crois. Je vous remercie beaucoup de vos interventions, vos mises en garde et votre encouragement. Merci d'être venus, nous l'apprécions. La séance est levée.