SPER Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Sous-comité de la condition des personnes handicapées du comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 12 février 2003
¹ | 1540 |
La présidente (Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.)) |
M. Harry Beatty («Canada Pension Plan (Disability) Working Group») |
La présidente |
M. Laurie Beachell (coordonnateur national, Conseil des canadiens avec déficiences) |
¹ | 1545 |
La présidente |
Mme Mary Ennis (vice-présidente, Conseil des canadiens avec déficiences) |
¹ | 1550 |
La présidente |
M. Laurie Beachell |
¹ | 1555 |
La présidente |
Mme Traci Walters (directrice nationale, Association canadienne des centres de vie autonome) |
º | 1600 |
º | 1605 |
M. John Young (directeur gérant, Centre-ressources pour la vie Autonome (Winnipeg), Association canadienne des centres de vie autonome) |
º | 1610 |
La présidente |
M. Guy Arseneault (sous-commissaire, Bureau du Commissaire des tribunaux de révision Régime de pensions du Canada/Sécurité de la vieillesse)) |
M. Chris Baker (vice-président, Environics Research Group Ltd) |
º | 1615 |
º | 1620 |
º | 1625 |
La présidente |
M. Harry Beatty |
º | 1630 |
º | 1635 |
º | 1640 |
La présidente |
M. Pat Iannitti (directeur, Opérations des tribunaux et communications, Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (Régime de pensions du Canada/Sécurité de la vieillesse)) |
M. Laurie Beachell |
º | 1645 |
La présidente |
M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Alliance canadienne) |
M. Laurie Beachell |
º | 1650 |
La présidente |
M. Reed Elley |
M. Laurie Beachell |
º | 1655 |
M. Reed Elley |
Mme Traci Walters |
La présidente |
Mme Traci Walters |
» | 1700 |
La présidente |
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ) |
M. Laurie Beachell |
» | 1705 |
La présidente |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
M. Harry Beatty |
» | 1710 |
La présidente |
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD) |
Mme Traci Walters |
» | 1715 |
Mme Wendy Lill |
Mme Traci Walters |
Mme Wendy Lill |
Mme Traci Walters |
Mme Wendy Lill |
Mme Traci Walters |
La présidente |
Mme Traci Walters |
» | 1720 |
M. Laurie Beachell |
La présidente |
M. John Young |
La présidente |
» | 1725 |
M. Harry Beatty |
M. Guy Arseneault |
La présidente |
M. Guy Arseneault |
La présidente |
M. Guy Arseneault |
La présidente |
M. John Young |
» | 1730 |
M. Reed Elley |
Mme Traci Walters |
La présidente |
M. Laurie Beachell |
» | 1735 |
La présidente |
CANADA
Sous-comité de la condition des personnes handicapées du comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 12 février 2003
[Enregistrement électronique]
¹ (1540)
[Traduction]
La présidente (Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.)): Je déclare la séance ouverte, même si notre parfait petit comité est loin de la perfection ces temps-ci. Nous avons été décimés les mercredis après-midis parce que les comités des affaires autochtones, de la santé et des comptes publics tiennent séance en même temps que nous, et nos membres favoris y sont dépêchés par leur caucus. C'est la dernière fois que nous nous réunissons le mercredi après-midi. C'est trop difficile!
Tous les merveilleux témoignages que nous entendons, vous le savez déjà, aboutiront au compte rendu et représenteront une importante partie de nos délibérations. Veuillez quand même nous excuser de ne pouvoir être à cinq endroits en même temps.
Sur avis de nos impressionnants conseillers de la Bibliothèque du Parlement, nous avons demandé d'entendre tout d'abord les représentants de la communauté des personnes handicapées, puis le représentant du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision et celui d'Environics. Finalement, Harry Beatty nous expliquera ce que tout cela veut dire. Cela vous convient-il, Harry?
M. Harry Beatty («Canada Pension Plan (Disability) Working Group»): C'est parfait.
Des voix: Oh, oh!
La présidente: Donc, Laurie témoignera en premier, puis Mary et Traci.
M. Laurie Beachell (coordonnateur national, Conseil des canadiens avec déficiences): Mon nom est Laurie Beachell. Je représente le Conseil des Canadiens avec déficiences. Nous sommes très heureux de pouvoir faire part de nos préoccupations à votre parfait petit comité, encore une fois. Je suis coordonnateur national du Conseil; Mary Ennis occupe le poste de vice-présidente de l'association.
Avant d'aborder plus précisément la question du Régime de pensions du Canada, je prends quelques minutes pour vous parler du sentiment d'attente prolongée, c'est le moins qu'on puisse dire, qui anime notre communauté présentement. L'attente dure depuis un long moment et nous avons beaucoup de peine à continuer. Nous restons confiants par rapport au budget fédéral de la semaine prochaine, mais le gouvernement n'a pas fait grand-chose pour nous ces derniers temps. Nous avons souvent sonné l'alarme concernant l'érosion généralisée des services et des soutiens offerts aux Canadiens avec déficiences. Je ne parle pas seulement des mesures de soutien du revenu: je parle aussi du soutien aux personnes handicapées en général, au transport, à l'emploi, etc. Nous ne voyons aucun signe d'amélioration. Si au moins tout restait au beau fixe! Au contraire, la situation se détériore.
J'inviterais les membres du comité à examiner en détail le budget de la semaine prochaine pour savoir si nous progressons un peu ou si on nous demande d'attendre, une fois encore. À mon avis, l'attente n'est tout simplement plus une option possible. Les processus mis en place, les discussions fédéral-provincial sur l'action à l'unisson, tout cela ne donne aucun résultat. Tant que le fédéral ne prendra pas d'engagement à cet égard et qu'il n'assumera pas le leadership dans le dossier… Nous savons que la ministre Stewart et d'autres se sont faits les champions de la cause et que nous assistons à des luttes d'intérêts, mais notre patience a ses limites. Beaucoup de membres de notre communauté estiment que l'attente a assez duré, et beaucoup demandent de nous débarrasser de cette position de «mendiants estropiés» et de redescendre dans la rue.
Notre patience est à bout. Le comité ne pourra plus compter sur notre collaboration encore longtemps. Nos témoignages répétées devant les comités, nos exposés successifs aux ministres et les réunions innombrables ne nous ont pas conduits là où nous le souhaitions. Nos pairs nous pressent de leur indiquer la prochaine étape à suivre.
Cela étant dit, nous reconnaissons et nous appuyons sans réserve le travail acharné du comité, qui a toujours agi unanimement pour soutenir les Canadiens avec déficiences. Vos rapports, votre collaboration et votre approche non partisane de la question nous ont permis de maintenir le feu chez certains de nos alliés au gouvernement. Mardi prochain, nous saurons si le feu a pris ou si c'était un feu de paille.
Je voulais absolument aborder ce sujet avant de revenir au RPC. Je ne tiens pas à ce que nous nous étendions sur la question, mais je ne crois pas que vous pouvez l'ignorer plus longtemps.
Je cède maintenant la parole à Mary Ennis, qui abordera certaines questions qui touchent l'aspect plus large des politiques du RPC. Nous envisageons cette question sous deux angles bien précis: les changements de fond dont la réalisation se fera à plus long terme et les éléments liés à l'administration dont le dénouement peut être plus rapide. Nous vous épargnons le détail sur les principes et les objectifs sous-jacents du Programme de prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada.
Nous savons que Michael Prince, Sherri Torjman et Michael Mendelson vous ont présenté un historique assez détaillé du Régime—une histoire marquée par une évolution et une amélioration constantes, mais qui n'est pas pour autant sans faille. Cette histoire nous rappelle à quel point certains changements de fond seront difficiles si la question du soutien du revenu des personnes handicapées n'est pas considérée dans son ensemble, du fait de son extrême complexité. En effet, quand on apporte des changements à un programme, tous les autres subissent des répercussions. Il faut donc envisager tous les éléments dans une perspective large. Sans en faire l'historique, nous allons examiner certains changements de fond.
¹ (1545)
Je passe donc la parole à Mary Ennis, notre vice-présidente. Elle vous parlera des politiques, et je reviendrai ensuite sur l'aspect administratif.
La présidente: Madame Ennis.
Mme Mary Ennis (vice-présidente, Conseil des canadiens avec déficiences): Merci, Laurie, et merci à tous.
Même si nous savons que les lois ne se changent pas en un jour, nous avons relevé plusieurs aspects qui selon nous exigent des modifications législatives.
Le retour au travail des personnes avec déficiences fait intervenir maints facteurs, et nous savons la somme de temps et d'effort qu'il faudra y consacrer. Il y a d'abord la question de la confiance en soi. Les personnes nouvellement handicapées ont besoin de temps pour accepter cet état. Il faut penser à abolir les obstacles physiques dans les lieux de travail, tenir compte des taux de chômage élevés dans certaines régions, de l'adaptation aux nouvelles techniques et du matériel d'adaptation requis compte tenu des déficiences de chaque personne. Par ailleurs, il faut du temps avant qu'une personne s'ajuste et puisse retourner au travail. Nous proposons une première modification législative qui étendrait la période d'admissibilité et faciliterait les tentatives de retour au travail.
L'obligation d'avoir cotisé pendant au moins quatre des six dernières années pour être admissible à des prestations d'invalidité du RPC ne convient pas pour les personnes avec déficiences, parce que leur condition change et pour d'autres raisons. Nous aimerions beaucoup qu'on étudie la possibilité d'un retour aux anciennes conditions d'admissibilité, soit deux années sur trois ou cinq sur dix.
Vient ensuite la question de l'imposition des prestations d'invalidité. Les bénéficiaires de prestations d'invalidité du RPC sont des gagne-petit. Or, l'imposition de prestations déjà minimes ne rejoint pas l'idée que se font l'ensemble des personnes handicapées de la justice. C'est pourquoi nous demandons avec insistance qu'on remette en question l'imposition des prestations d'invalidité.
N'oublions pas non plus que beaucoup de personnes handicapées ne peuvent, au meilleur de leur condition, occuper des emplois traditionnels à temps plein. Elles devraient avoir la possibilité de travailler à temps partiel. Il serait plus sage de leur offrir la possibilité de réintégrer le marché du travail selon le rythme qui leur convient le mieux, pour qu'elles aient une meilleure qualité de vie. Ce serait beaucoup mieux que de les obliger à se déclarer inaptes au travail, pour le restant de leurs jours, pour avoir accès aux prestations.
Depuis quelques années déjà, on discute en long et en large d'un régime complet de soutien du revenu pour les personnes avec déficiences, et un certain travail a été accompli en ce sens. Il ne faut pas perdre de vue l'idée, le concept sous-jacent. Il faut les garder vivants et se mettre à pied d'oeuvre. À mon avis, c'est faisable. Nous avons déjà discuté de la difficulté d'une telle entreprise, mais nous pouvons trouver une issue si nous collaborons.
Ce sous-comité peut avoir beaucoup de poids—il joue déjà un grand rôle. Mais il peut contribuer encore plus à la définition des enjeux plus larges et encourager notre collaboration à la recherche de solutions fortes et efficaces.
Merci.
¹ (1550)
La présidente: Monsieur Beachell.
M. Laurie Beachell: J'ajouterai que les changements importants adoptés en 1998 étaient régressifs. Nous vous demandons d'étudier toute la question de la période de cotisation déterminant l'admissibilité, et d'autres conditions qui ont été modifiées en 1998.
Du côté administratif, nous sommes à mettre au point des moyens pour améliorer les procédés, en invitant notamment les consommateurs à participer à des groupes de réflexion sur les processus de prestation des services, qu'il s'agisse de réadaptation, d'application, des révisions par les tribunaux ou des mécanismes d'appel. Nous sommes en période d'essai.
Des manuels médicaux ont été publiés mais, encore là, l'information vient de… Je n'ai rien contre les médecins, madame la présidente, mais vous savez comme moi que ces manuels sont adaptés à leurs besoins plutôt qu'à ceux de notre communauté pour ce qui est du crédit d'impôt pour personne handicapée. Tout le monde sait que les médecins ne veulent pas être mêlés à ces questions. Ils ne sont pas intéressés. Cette tâche n'entre pas dans leur champ d'expertise. Ils ne sont pas spécialistes des limitations fonctionnelles: il traitent les maladies et ils évaluent l'état de santé.
Le maintien d'un modèle médical qui, il faut le dire, est en détresse partout au pays, au bord de l'éclatement—tous les Canadiens parlent d'investir dans la santé, mais nous continuons d'envoyer les personnes handicapées chez leur médecin pour qu'il détermine leur admissibilité à tout et à rien, du crédit d'impôt au permis de stationnement en passant par les prestations du Régime de pensions du Canada—et ce modèle n'a plus aucun sens.
Nous aimerions que la rémunération admissible soit augmentée. Un fort mouvement se dessine en ce sens. Il faut augmenter cette portion.
Un de mes compagnons me téléphone tous les deux mois. Il souffre d'une déficience psychique et il ne peut pas travailler à temps plein. Il sait que s'il le faisait, il aboutirait à l'hôpital. Il ne peut affronter le stress d'un travail à temps plein, mais il travaille présentement aux deux fins de semaine. Il travaille, donc, et tous les deux mois il me met à jour. Il me téléphone et me dit: «Ils me laissent mes prestations. Tout va bien pour moi. Je conserve mes prestations du RPC, je travaille, je conduis un taxi. Ça me plaît de travailler à temps partiel.»
Si les exemptions de gains justifiant des réductions de prestations étaient augmentées, ce serait un bon pas pour nous.
Je crois aussi qu'il faut donner des ressources aux associations de défense qui viennent en aide à la population, ou trouver un autre moyen d'aider les gens qui veulent instituer un appel. La plupart sont très intimidés par le processus, même si on l'a rendu un peu plus convivial. Ils se plaignent qu'ils ne savent pas quoi faire, comment s'en sortir. Ils nous demandent notre avis. Ils aimeraient consulter un avocat ou d'autres personnes qui sont déjà passées par là.
Bien entendu, le programme, comme bien d'autres, n'est pas l'idéal pour les personnes ayant une déficience cyclique ou de nature psychique… Par exemple, les personnes souffrant de dystrophie musculaire ou d'autres affections épisodiques qui leur laissent des périodes de répit ne veulent pas se déclarer inaptes au travail, mais elles n'ont pas le choix si elles veulent conserver leurs prestations. Il faut collaborer avec les employeurs pour qu'ils abolissent les obstacles et trouver des modes d'indemnisation partielle.
Je ne sais pas où en sont les choses pour les Autochtones, mais je crois que le comité sera intéressé à les consulter. La fréquence de l'invalidité au sein de la population autochtone jette la honte sur le Canada. Le comité devrait trouver moyen d'étudier la question. Je vous y encourage tous. Nous entretenons des liens avec eux, mais nous n'avons pas la prétention de les représenter.
Selon moi, il faut continuer de nommer des personnes avec déficiences aux tribunaux de révision. Elles savent ce que c'est que de vivre avec un handicap. Elles peuvent servir de lien précieux pour les personnes handicapées, dès leur arrivée au tribunal; c'est une façon de rendre le système plus convivial. Il faudrait aussi approfondir la connaissance des arbitres sur la façon de voir des personnes avec déficiences. Le processus d'appel est le principal objet des plaintes que nous recevons. Soit la demande est refusée, soit l'assureur privé force les appelants à déposer une demande, même s'ils savent d'emblée qu'ils ne sont pas admissibles. C'est un gaspillage éhonté de ressources et, qui plus est, ces pressions faussent les statistiques sur le nombre de refus. Je sais que, si je deviens invalide, mon assureur me forcera à présenter une demande au RPC avant toute chose.
¹ (1555)
Je m'arrête ici. Je crois que Mme Head a mentionné qu'ils allaient laver leur linge sale. Ce sera très intéressant. Nous nous réjouirons d'admirer la cordée de linge à sécher!
Merci.
La présidente: Merci beaucoup.
Traci.
Mme Traci Walters (directrice nationale, Association canadienne des centres de vie autonome): Bonjour. Mon nom est Traci Walters et j'occupe le poste de directrice nationale de l'Association canadienne des centres de vie autonome. Nous nous connaissons tous, je crois.
Tout d'abord, je suis tout à fait d'accord avec les propos de Laurie en ouverture de séance. La frustration a monté d'un cran cette semaine. Les rumeurs et les spéculations au sujet des priorités du budget de cette année ont raison de notre confiance, même si nous resterons dans l'incertitude jusqu'à la semaine prochaine. Depuis dix ans que nous attendons des gestes concrets de la part du gouvernement fédéral, le glas a sonné. Ce cap des dix ans nous apparaît propice à une mobilisation des Canadiens avec déficiences. Nous avons attendu, attendu, pendant dix longues années.
Nous aimerions que le budget offre concrètement de l'aide à l'emploi aux personnes avec déficiences. Nous aimerions aussi constater un embryon de stratégie de soutien associée au marché du travail et au crédit d'impôt.
Nous avons formulé maintes propositions. Les demandeurs au PPI-RPC ne sont pas les seuls à se sentir impuissants et désespérés. Tous les Canadiens avec déficiences ont attendu patiemment pendant dix ans que les choses bougent au gouvernement fédéral, qu'on leur montre qu'ils sont une priorité. Je ne sais pas pourquoi, c'est peut-être la barre des dix ans, mais nous ressentons tous cette frustration. Nous en avons assez et nous sommes prêts, partout au pays. Si nous subissons un autre budget sans changements tangibles, nous devrons nous mobiliser. Nous ne pouvons plus endurer cette situation.
Voilà, je tenais à le dire pour commencer. Je reconnais le soutien indéfectible du sous-comité, mais nous voulons voir des gestes concrets du fédéral. Le PPI-RPC ne représente qu'une partie seulement des enjeux.
À mes côtés, M. John Young, directeur général du Centre de ressources de vie autonome de Winnipeg. Beaucoup de députés ont un centre de vie autonome dans leur circonscription.
Notre organisme de personnes handicapées est dirigé par quatre personnes handicapées qui viennent en aide à d'autres personnes dans la même condition qui sont désireuses de régler leurs problèmes et d'acquérir des habiletés pour vivre de façon autonome. Au cours des dernières années, le Centre de Winnipeg a pu compter sur des ressources suffisantes et une certaine expertise pour assister les demandeurs au PPI-RPC. Avec le temps, grâce à un modèle d'entraide entre personnes avec déficiences—nous faisons appel à d'anciens usagers du système, qui ont appris à résoudre les problèmes—, nous avons acquis une base de connaissances expertes sur le processus d'appel et son application, qui nous permet d'apporter du soutien aux usagers.
Le Centre de Winnipeg les aide à rassembler l'information clé dont ils ont besoin pour déterminer leur admissibilité légitime. C'est une évaluation qui peut être faite dès le début, avec de l'aide. Nul besoin d'attendre des années. En ce sens, le Centre fait office de tampon ou de filtre de soutien entre les consommateurs et divers organismes gouvernementaux et non gouvernementaux. Il favorise une circulation efficace et précise de l'information. Ce rôle est acquitté de plusieurs façons, par la diffusion d'information exacte et à jour, dans une langue simple et accessible, ce qui constitue un tour de force dans le cas du PPI-RPC.
Depuis l'étape préalable à la demande jusqu'à la fin du processus, nous aidons les demandeurs à faire une recherche éclairée, une recherche de renseignements médicaux. Nous leur fournissons toute l'information nécessaire, qui concerne notamment les cotisations. Nous voyons à l'exactitude de l'information inscrite sur la demande soumise au Programme. À titre de tiers, nous développons et entretenons une relation de travail de collaboration avec les demandeurs et les agents du PPI-RPC. Nous invitons nos clients à envisager d'autres mesures de soutien du revenu et de soutien aux personnes handicapées qui pourront les soulager tout au long de leur parcours, que ce soit le PPI-RPC ou non. Nous les rassemblons pour qu'ils trouvent ensemble des solutions, pour briser leur isolement et leur impuissance, des sentiments tellement courants chez les demandeurs au PPI-RPC partout au pays.
Le modèle de Winnipeg illustre l'efficacité de la philosophie des centres de vie autonome pour venir en aide aux demandeurs au PPI-RPC. Comme notre travail vise avant tout à redonner aux personnes la maîtrise de leur vie, à les amener à décider pour elles-mêmes, à prendre des risques, voire à faire des erreurs, nous avons la compétence nécessaire pour proposer un programme axé sur la sécurité du revenu des personnes avec déficiences à l'intérieur d'un cadre d'encouragement au travail.
Comme d'autres organismes de base populaire, notre travail d'aide aux individus et aux organismes—qu'il s'agisse de centres de vie autonome ou d'autres organismes d'aide aux personnes avec déficiences—nous a convaincus que nous étions des experts. Nous savons aussi que nous pouvons aider les gens à passer beaucoup plus rapidement au travers du processus, à faire un tri dans l'information recueillie. Malheureusement, nous n'avons pas suffisamment de ressources pour leur apporter cette aide.
º (1600)
Nous sommes d'avis qu'il s'agit du meilleur modèle. Je vais céder la parole à John dans quelques minutes, mais l'une des recommandations du CCD consiste à développer la capacité de défense des droits chez les organismes oeuvrant pour les personnes handicapées qui participeront à ce processus, afin que cette capacité devienne beaucoup plus rentable, beaucoup plus stimulante, à l'intérieur d'un modèle d'intégration destiné aux requérants du PPI-RPC. Donc, nous sommes en faveur de cette recommandation aussi.
Nous avons remarqué dans votre rapport, le rapport du sous-comité, que vous mentionnez six sujets de préoccupation qui sont ressortis des réunions de la table ronde nationale. Ce sont sensiblement les mêmes que ceux qui se dégagent du modèle du CVA: les lignes directrices relatives aux critères d'admissibilité sont trop restrictives et certains se voient refuser à tort des prestations auxquelles ils auraient droit; le processus de demande est trop complexe, il exige un haut niveau d'alphabétisation et de connaissances; les délais de traitement des demandes sont trop longs; l'absence générale d'information et d'aide relativement au programme représente un obstacle de taille pour les requérants; il n'existe pas véritablement de lien entre le PPI-RPC et les autres prestataires de services, y compris les régimes privés d'assurance alors que, si l'on optait pour le modèle où notre organisation offrirait ce soutien, nous pourrions travailler avec les requérants individuellement, et les aider à établir la liaison avec tous les programmes d'aide aux personnes handicapées. Par ailleurs, beaucoup de cas vont en appel, y compris des appels du deuxième et du troisième niveau, vous l'avez mentionné d'ailleurs--et nous sommes au courant de la situation, et John et le centre ont l'expérience nécessaire pour aider les requérants à s'y retrouver dans tous ces problèmes et à trouver une solution avant d'en arriver là.
Nous, les membres de l'ACCVA faisons les recommandations suivantes.
Premièrement, rendre aux requérants leur dignité et le sentiment d'être des citoyens à part entière en leur garantissant qu'ils auront leur mot à dire et pourront participer au processus de demande du PPI-RPC. Ce n'est pas ainsi que le système fonctionne actuellement.
Deuxièmement, habiliter les requérants en leur fournissant de l'information, du perfectionnement et du réseautage par l'entremise des CVA et des organismes oeuvrant pour les personnes handicapées, à la fois en ce qui concerne le PPI-RPC et pour tous les services de soutien aux personnes handicapées.
Troisièmement, réduire le volume élevé d'appels et de demandes de renseignements liés au PPI-RPC en investissant dans la capacité de promotion et de défense des droits au sein d'organisations oeuvrant pour les personnes handicapées, comme les centres de vie autonome, afin que nous puissions offrir du soutien et des services à cet égard à chaque requérant pris individuellement. À mon avis, voilà une excellente solution à une partie du problème. En effet, en fournissant ces services de soutien directement aux personnes plutôt qu'en laissant le soin aux députés de répondre à des tonnes d'appels de la part de personnes qui sont tellement isolées depuis des années qu'elles n'ont aucune idée de l'information qui existe. Si ces personnes pouvaient avoir accès directement à cette information, elles seraient mieux à même de prendre les bonnes décisions.
John, voulez-vous expliquer un peu en quoi notre modèle permet d'aider directement les personnes?
º (1605)
M. John Young (directeur gérant, Centre-ressources pour la vie Autonome (Winnipeg), Association canadienne des centres de vie autonome): Je tiens à dire que lorsque nous parlons de la défense des intérêts dans le cadre des CVA, nous n'avons aucunement l'intention de parler au nom de qui que ce soit. Nous envisageons plutôt d'habiliter les gens et de leur enseigner à se défendre eux-mêmes. Nous les faisons passer par toutes les étapes d'un processus qui va jusqu'à la simulation d'un tribunal dans nos salles de conférences afin de les habituer à ce qui va se passer parce que, en règle générale, les gens sont intimidés lorsqu'ils entrent dans la salle d'un tribunal. Après une préparation qui prend de quatre à cinq mois, les personnes sont en mesure de se défendre elles-mêmes, et elles effectuent la plupart des représentations toutes seules.
Il y a un autre programme appelé accès à la justice dans l'ouest qui est offert par l'entremise de nos... Des avocats offrent leurs services à titre bénévole afin d'aider les gens à s'y retrouver dans l'information. D'après bon nombre de ces avocats, même si le RPC décidait d'avoir davantage recours au système de l'aide juridique, cela coûterait encore beaucoup plus cher, parce que c'est un processus qui prend beaucoup de temps, et nous avons affaire à de jeunes avocats plaidants. Il faut penser à l'établissement des précédents et à tout un éventail de complications et tout cela coûte encore plus d'argent.
Dans le cadre de notre processus, les personnes participent à tout ce qui se passe. Elles maîtrisent la situation. Même la cueillette d'information pour divers types de handicaps avec les personnes intéressées--cet environnement doit être créé pour eux afin de leur permettre de recueillir les bons renseignements et de les coordonner et les contrôler de manière à produire une demande acceptable.
Une autre des choses importantes qui nous tiennent à coeur est d'être constamment aux prises avec les compagnies d'assurance... Si vous voulez obtenir des prestations d'invalidité à long terme, vous devez présenter une demande au PPI-RPC. Si vous avez épuisé tous les appels, vous devez tout reprendre depuis le début auprès d'un autre programme. Certains sont prisonniers de ce cycle perpétuel, ils n'ont pas le temps de s'arrêter pour voir s'ils pourraient améliorer leur état de santé ou trouver d'autres moyens de s'en sortir parce qu'ils sont trop inquiets de ce que l'on pourrait mettre fin à leurs prestations d'invalidité de longue durée s'ils ne présentent pas une demande au PPI-RPC.
Donc, nous avons eu beaucoup de succès à notre centre depuis 1998, soit depuis que la modification est entrée en vigueur. Nous accueillons de plus en plus de monde. Mais nous n'osons pas faire de publicité parce que nous serions tout de suite submergés. Nous ne pourrions jamais nous en sortir. Nous sommes juste à la limite actuellement, parce que 30 p. 100 de tous nos dossiers consacrés à la promotion et à la défense des droits ou à l'autonomie sociale, ont un lien avec le PPI-RPC. Nous recevons sans cesse de nouvelles demandes. Les choses ne vont pas en s'améliorant.
Mais il y a une chose que nous ne disons pas, et pourtant il faudrait en parler davantage, mais nous ne savons pas comment nous y prendre... Nous pouvons seulement estimer au jugé que, parmi tous les requérants du PPI-RPC qui s'adressent au CVA, une fois que nous avons examiné les renseignements et fait le suivi, et que les requérants réalisent que ce n'est pas pour eux, de 3 p. 100 à 5 p. 100 ne présentent même pas de demande pour votre programme. Ils s'adressent à une autre instance, à d'autres ressources de la collectivité, à d'autres programmes que nous avons au CVA.
Donc, je pense que notre travail ne se résume pas à remplir les demandes, à les présenter et à en faire le suivi; il consiste plutôt à offrir un éventail de possibilités et nous excellons dans ce domaine.
Merci.
º (1610)
La présidente: Merci beaucoup.
Nous allons maintenant entendre le sous-commissaire du Bureau du Commissaire des tribunaux de révision, M. Guy Arseneault.
Guy, voulez-vous nous présenter vos collègues?
M. Guy Arseneault (sous-commissaire, Bureau du Commissaire des tribunaux de révision Régime de pensions du Canada/Sécurité de la vieillesse)): Je vais les présenter au fur et à mesure.
Premièrement, permettez-moi de vous remercier, madame la présidente et membres du sous-comité, de nous avoir donné l'occasion de discuter avec vous du sondage sur la satisfaction de la clientèle mené pour le compte de notre bureau par la firme Environics Research Group.
Nous pensons qu'il est de notre devoir de nous assurer que les Canadiens qui ont besoin d'avoir accès à des programmes gouvernementaux y ont véritablement accès. Afin de servir plus efficacement les Canadiens, le Conseil du Trésor a mis en oeuvre la Modernisation des services pour les Canadiens et les Canadiennes. Ce programme exige de chaque ministère, organisme, conseil et commission qu'il ou elle examine ses méthodes de travail afin de s'assurer que la prestation des services s'effectue d'une manière efficace et efficiente.
Ces sondages auprès de la clientèle nous ont fourni un guide qui nous permettra d'améliorer notre service à l'intention des Canadiens qui sont nos clients. Les sondages auprès de la clientèle nous serviront de points de repère et nous permettront de mesurer nos progrès. Nous devons nous assurer toutefois, que l'amélioration d'un aspect du service n'entraîne pas la détérioration d'autres secteurs où nous obtenons de bons résultats.
Ces sondages n'ont pas été mis sur une tablette. Nous nous en sommes servis pour élaborer notre plan d'activités qui vise certains des secteurs qui pourraient être améliorés.
Nous avons l'intention de mener un projet pilote afin de voir si nous pouvons couvrir un montant plus élevé de dépenses pour les appelants que ce qui est prévu dans la politique actuelle. Le projet comprendra notamment la possibilité pour les appelants de se présenter à l'audience dans un endroit situé à proximité du lieu de résidence de leur famille ou de leur médecin spécialiste, plutôt que dans l'endroit le plus près de leur lieu de résidence, comme c'est stipulé dans la politique actuelle. Nous sommes à explorer des moyens d'accroître les possibilités pour les appelants de faire eux-mêmes des représentations lors des audiences au moyen de discussions et de coopération avec des groupes de défense et des cliniques d'aide juridique. Nous travaillons à la production d'une vidéo qui donnera aux appelants des conseils qui les aideront à mieux se préparer en vue d'assister à une audience. Nous sommes aussi en train de réviser et de corriger nos brochures et notre correspondance afin de les rendre plus accessibles aux appelants et de leur donner plus d'information sur le processus d'appel.
Nous travaillons aussi à un certain nombre d'autres initiatives. La plupart de ces initiatives ont vu le jour grâce aux résultats des sondages dont nous allons vous faire part dans quelques minutes.
Alors, voici Me Tina Head, avocate générale de notre Bureau, et M. Pat Iannitti, directeur des opérations et des communications.
Nous disons des sondages auprès de la clientèle qu'ils constituent des points de repère, mais étant donné que je suis un enseignant, je les appelle des bulletins scolaires, parce qu'ils nous donnent véritablement l'heure juste. Nous nous en servons comme des guides pour trouver des moyens de mieux servir les Canadiens et pour évaluer nos progrès à cet égard.
J'ai maintenant le plaisir de vous présenter M. Chris Baker, vice-président du Environics Research Group, qui vous présentera plus en détail les résultats des sondages auprès de la clientèle.
Nous sommes à votre disposition pour répondre à vos questions, de même que M. Baker.
Merci beaucoup.
M. Chris Baker (vice-président, Environics Research Group Ltd): Merci beaucoup de me donner la possibilité de venir témoigner devant le Comité aujourd'hui. Je suis en compagnie de Amanda Parriag, de notre bureau d'Ottawa, qui agit à titre d'observatrice.
Je vais vous décrire rapidement la méthodologie que nous avons utilisée pour recueillir l'information, puis je vais vous faire part des principaux résultats que nous avons obtenus.
Le rapport proprement dit est un document assez volumineux. Je pense que nous avons mis un certain nombre d'exemplaires à la disposition des membres du Comité et des personnes intéressées.
Essentiellement, nous avons sondé 1 400 appelants, c'est-à-dire des gens auxquels ont a refusé des prestations mais qui sont allés en appel, ainsi que 202 non-appelants, soit des personnes auxquelles on avait refusé les prestations mais qui, pour une raison ou pour une autre, ont décidé de ne pas aller en appel.
Bien entendu, chaque fois que l'on décide de concevoir un questionnaire dans un nouveau domaine ou que l'on se penche sur la prestation des services, comme l'a dit M. Beachell, il est parfois très utile de pouvoir compter sur des groupes de discussion en vue d'élaborer l'instrument de recherche. C'est ce que nous avons fait. Nous avons mis sur pied quelques groupes préliminaires, l'un formé d'appelants et l'autre, de non-appelants. Cette décision nous a permis non seulement d'éclairer nos résultats en donnant un visage plus humain à l'exercice, mais aussi nous a aidés à comprendre certains problèmes que nous avons dû affronter durant le processus.
J'aimerais également informer les membres du Comité d'un certain nombre de particularités de la recherche. Tout d'abord, il s'agit d'un échantillon très spécialisé. Ce n'est pas un échantillon général de Canadiens que nous examinons afin de déterminer l'admissibilité des personnes. Il s'agit plutôt de personnes ayant eu affaire au système et, bien entendu, étant donné qu'elles ont déjà présenté une demande en vue d'obtenir les prestations du RPC et franchi les étapes du processus lié au tribunal d'appel, il faut se montrer extrêmement attentif et prendre un soin particulier lors de l'administration du sondage. Ce n'est pas le genre de sondage où l'on attrape les gens au téléphone en vue d'obtenir leurs réponses le plus rapidement possible. Non, ce fut plutôt un processus au cours duquel nous avons pris le temps d'écouter ce que les gens avaient à dire, et avons laissé l'enquête progresser à son propre rythme.
Bien entendu, si les répondants entretenaient des préoccupations quelconques au sujet de la légitimité du sondage ou s'ils avaient des inquiétudes du genre, nous leur fournissions un numéro d'appel sans frais leur permettant d'appeler notre bureau ainsi que le bureau du commissaire afin d'obtenir des renseignements au sujet du sondage.
Naturellement, on les a aussi rassurés--et c'est l'une des caractéristiques dont nous nous enorgueillissons dans l'industrie--sur la confidentialité de leurs réponses. Aucun nom ni aucune donnée permettant d'identifier une personne en particulier n'ont figuré dans le rapport. Nous nous sommes aussi efforcés de procéder au sondage durant la journée, c'est-à-dire durant les heures où les gens sont disposés à nous parler, plutôt que, disons, aux heures où habituellement les sondages sont effectués, c'est-à-dire souvent le soir et les fins de semaine.
Je suppose que l'un des aspects gratifiants du sondage est le fait qu'une fois qu'il a été réalisé, Statistique Canada l'a passé en revue et lui a accordé dans l'ensemble de bonnes notes. Nous nous attendions à réussir l'examen avec brio, et bien sûr c'est ce qui s'est passé.
Bien entendu, nous avons recueilli divers renseignements sur les appelants et les non-appelants. Il ne fait aucun doute que les personnes âgées de 50 à 60 ans sont légèrement surreprésentées parmi les populations, mais dans les faits, nous avons trouvé des gens de tout âge.
Nous avons trouvé que par comparaison avec la norme canadienne, les appelants et les non-appelants étaient légèrement moins instruits et à l'aise pour s'exprimer que la population en général, et la majorité vivaient dans des ménages de deux personnes, y compris eux-mêmes.
Il est certain que nous désirions connaître leur perception concernant l'expérience de la comparution devant le tribunal. Comme l'ont fait remarquer d'autres témoins aujourd'hui, les premières perceptions à l'idée d'avoir à se présenter devant un tribunal sont pour une large part négatives. Il faut compter avec tout le stress lié à la préparation et à la comparution lors d'un processus d'appel, et il peut y avoir des déplacements. Il s'agit d'une approche judiciaire, et il faut tenir compte de l'élément contradictoire.
Bien entendu, lorsque les gens se présentent, ils veulent que l'on s'occupe de leurs problèmes et que l'on prenne le temps de les écouter. Ils ne sont pas nécessairement bien préparés et ne sont pas toujours prêts à subir un examen ou une enquête destinée à établir leur état de santé. C'est l'une des questions qui est ressortie dans les groupes de discussion, et que l'on a abordée durant le sondage aussi: il existait une certaine confusion au sujet du rôle du représentant du ministre durant la comparution devant le tribunal. Sans vouloir glisser sur le sujet, c'était un peu comme si le représentant du ministre agissait comme un procureur plutôt que comme un représentant, disons du ministère public.
º (1615)
Ceci dit, même si les personnes trouvent que la comparution devant le tribunal d'appel est une expérience stressante et pénible, nous avons réussi néanmoins à obtenir des commentaires plus précis sur certains aspects de l'expérience. Nous avons trouvé que les personnes ayant participé à la procédure d'appel et ayant déjà comparu devant les tribunaux avaient une perception positive des membres du tribunal et du personnel du bureau du commissaire. De bons points ont été accordés pour l'accessibilité du lieu où se tenaient les audiences—pas nécessairement parce qu'il se trouvait à proximité de leur domicile, mais parce que l'endroit choisi était accessible pour les personnes handicapées et pour d'autres raisons du même genre.
Les répondants se sont déclarés satisfaits du temps qui leur avait été alloué pour présenter leur cause. Ils se sont dits passablement satisfaits du temps qui est accordé aux appelants pour s'adresser au tribunal. On a noté, en revanche, un peu moins de satisfaction en ce qui concerne par exemple les moyens mis à leur disposition pour se préparer, particulièrement pour ce qui est d'obtenir les dossiers médicaux et autres démarches semblables. Mais par ailleurs, en ce qui concerne le mode de fonctionnement du tribunal, les répondants ont trouvé qu'ils avaient eu l'occasion de dire ce qu'ils avaient à dire.
Même s'il y a des perceptions—les appelants qui obtiennent gain de cause sont naturellement plus positifs par rapport à leur expérience que ceux qui obtiennent une décision négative—et aussi malgré certaines inquiétudes et frustrations, on semblait trouver que les membres du tribunal agissaient avec équité.
Certains témoins ont mentionné les ressources qui sont mises à la disposition des appelants. En règle générale, les appelants ou même ceux qui décident de ne pas faire appel ignorent que le Bureau du Commissaire des tribunaux de révision peut assumer une partie de leurs frais. Il peut en effet couvrir notamment des dépenses très simples comme les frais de photocopie, mais les gens l'ignoraient de façon générale. Lorsque l'on a affaire à des gagne-petit, débourser même trois cents la page peut devenir un fardeau trop lourd.
Les répondants—appelants et non appelants—s'entendaient aussi pour dire qu'ils pouvaient être servis dans la langue officielle de leur choix. Une fois arrivés sur place, la procédure était simple et facile à comprendre, et les documents eux-mêmes, relativement faciles à comprendre. Il y aura toujours des gens pour se montrer agacés par n'importe quel document de l'État, et il est certain que l'on peut toujours améliorer les choses. Justement, pour mentionner certains domaines où il y aurait place à de l'amélioration, les appelants et non-appelants ont déclaré que la communication laissait à désirer entre le Bureau du commissaire et le bureau du RPC.
La brochure «brune» publiée par le Bureau du commissaire donne des renseignements utiles; mais on déplore que peu de gens connaissent son existence, savent comment se la procurer et quel est son lien avec la procédure. Des efforts devront être faits afin de mieux informer les appelants et non-appelants des ressources qui sont mises à leur disposition pour les aider durant la procédure d'appel, de leurs droits en matière d'appel et de la possibilité qu'ils ont de se faire représenter par des conseillers durant l'appel.
La plupart des appelants et non-appelants ne sont pas admissibles à recevoir d'autres prestations que celles du RPC. Par conséquent, ces personnes placent beaucoup d'espoir dans les prestations d'invalidité du RPC. Il est intéressant et pénible à la fois de constater que lorsqu'une personne obtient gain de cause dans une demande d'appel, cela peut avoir des incidences négatives sur les prestations versées par les compagnies d'assurance et d'autres sources.
Le fait que les prestations du RPC soient imposables est l'une des questions ayant été soulevées par les groupes de discussion. Certains participants ont fait valoir que lorsque la prestation était versée par un tiers, en l'occurence une compagnie d'assurance, elle n'était pas imposable, alors que les prestations du RPC le sont.
Nous avons aussi découvert que certains fournisseurs de prestations d'invalidité recommandaient aux bénéficiaires de présenter une demande de prestations d'invalidité du RPC; cette pratique était assez répandue. Mais les non-appelants ont déclaré qu'ils n'avaient pas l'impression d'avoir subi des pressions de la part de leurs fournisseurs de prestations en vue d'aller en appel de la décision négative qu'ils avaient obtenue initialement.
Nous avons trouvé que les conditions d'existence des personnes ne s'améliorent pas pour autant lorsqu'elles obtiennent une réponse positive de la part du tribunal de révision. Nous voulons parler des personnes qui vivent avec un handicap, et des répercussions que cela peut avoir sur leur niveau de vie.
Nous avons parlé de l'incapacité de travailler, de la nécessité de vivre avec le stress—de tous ces aspects qui découlent de la maladie. Mais je le répète, il peut être très agaçant d'avoir à subir les étapes d'une procédure judiciaire au cours desquelles vous devez donner des renseignements très personnels à votre sujet devant des étrangers. Il est certain que cette expérience peut entraîner de l'aliénation. Devoir franchir toute une série d'obstacles bureaucratiques, consulter des médecins—tout ce que cela comporte—nous a été décrit comme une épreuve par les personnes qui l'ont vécue en vue d'améliorer leurs conditions d'existence.
º (1620)
Ceux qui ont été déboutés ou pour lesquels le tribunal de révision a rendu une décision négative ont dû certainement éprouver des changements plus négatifs dans leur existence que ceux qui ont eu gain de cause, mais même ceux qui ont obtenu des prestations à la suite de leur comparution devant le tribunal n'ont pas vu leur vie changer du tout au tout; en effet, tout n'a pas été ensuite comme dans le meilleur des mondes. Certains ont fait remarquer que le montant des prestations est relativement modeste. Naturellement, les gens apprécient de recevoir ces prestations, mais ils se demandent par la suite pourquoi ils ont dû se faire tant de souci pour les obtenir.
L'indépendance de l'organisation est toujours un critère très important pour un organisme judiciaire ou quasi judiciaire. Les appelants et non-appelants montrent un certain scepticisme à l'égard de l'indépendance du bureau du commissaire par rapport au bureau des prestations d'invalidité du RPC. On s'inquiète notamment de ne pas être à même de constater cette indépendance. Par contre, on constate que les répondants sont convaincus que les membres du tribunal n'ont aucun lien de dépendance par rapport au bureau des prestations d'invalidité du RPC. On considère que les juges du tribunal de révision qui sont appelés à prendre une décision dans les causes d'admissibilité aux prestations agissent en toute indépendance par rapport à la bureaucratie gouvernementale.
Il est aussi intéressant de souligner qu'en matière de connectivité—c'est-à-dire d'accès à Internet et à ce genre de choses—une faible majorité des appelants et non-appelants peuvent se servir d'un ordinateur, mais moins que la moitié d'entre eux ont accès au courrier électronique et à Internet, et cela même si l'administration insiste beaucoup sur les possibilités du gouvernement en direct. Ce n'est pas la solution magique imaginée par certains.
Pour ce qui est des appelants eux-mêmes, le site Web du Bureau du commissaire des tribunaux de révision n'est pas leur première source d'information. Il y a plus de chances qu'ils prennent le téléphone ou qu'ils aient recours à d'autres moyens d'information, et bien entendu, comme dans la population en général, l'accès aux ordinateurs, à Internet et au courrier électronique diminue avec l'âge et augmente avec le revenu, ce qui est aussi un facteur dont le Bureau du commissaire devra tenir compte lorsqu'il ira de l'avant avec ce dossier, tout comme le gouvernement.
Voilà un bref aperçu des résultats du sondage. Merci de m'avoir écouté.
º (1625)
La présidente: Merci beaucoup.
À mon avis, ce genre de sondage objectif et honnête auprès de la clientèle est une bonne chose pour le Comité et probablement aussi pour tous ceux qui sont réunis ici. Je pense que ce n'est pas une façon habituelle de procéder pour tous les organismes, les conseils et les commissions. Aussi, je vous remercie de votre témoignage et des ressources que vous avez investies dans ce sondage.
Harry.
M. Harry Beatty: Merci beaucoup, madame la présidente.
Je représente le Groupe de travail sur le Programme de prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada qui est formé principalement d'intervenants oeuvrant dans des cliniques d'aide juridique et des organismes communautaires de l'agglomération urbaine de Toronto. Je pense qu'il vaut la peine de mentionner que l'un des membres fondateurs est une conseillère profane qui provient d'une organisation multiculturelle, Felicidade Rodrigues. Elle est l'un des moteurs de notre action et une merveilleuse avocate. Il y a de l'avenir pour les personnes qui se consacrent à la défense des droits d'autrui à l'extérieur des cadres officiels. Récemment, le groupe a élargi son mandat en vue d'inclure des cliniques de toute la province ainsi que d'autres groupes de défense.
Notre mémoire comporte de 50 à 60 points, mais étant donné que nous disposons de peu de temps, je n'en soulignerai que quelques-uns. D'ailleurs, bon nombre ont déjà été abordés par d'autres témoins.
J'ai été frappé d'entendre M. Baker nous présenter les conclusions du rapport de Environics parce que ces conclusions rejoignent dans une large mesure nos propres opinions. Donc, il n'y a pas eu vraiment de surprises pour nous. Et il est probable que si l'on examine les observations faites par les membres des cliniques, dont bon nombre exercent dans ce domaine depuis 15 ou 20 ans, elles iront passablement dans le même sens.
En partant, on peut dire qu'il s'agit d'un programme très modeste. En règle générale, nous constatons que les personnes qui en deviennent bénéficiaires ne considèrent pas qu'elles viennent de décrocher la timbale. Au contraire, dans bien des cas, il s'agit plutôt d'une aide de dernier recours ou alors, de la dernière étape avant de demander de l'aide sociale. Aussi, pour beaucoup, le PPI-RPC est la dernière étape avant la pauvreté.
C'est la raison pour laquelle nous commençons notre exposé en insistant sur l'importance de soutenir et de renforcer un programme public qui est à la fois transférable et souple. Il est clair que nous nous dirigeons vers une société où, pour un éventail de raisons, de plus en plus de travailleurs sont susceptibles de perdre leur emploi, et de plus en plus de personnes ne pourront se tourner vers aucune autre possibilité de recevoir de l'aide en cas d'invalidité ou de retraite. Nous pensons que ce programme doit être soutenu si nous voulons qu'il joue pleinement son rôle à titre d'élément réel et permanent du filet de sécurité sociale.
En tant qu'avocats de l'aide juridique, nous voulons insister sur le droit des clients à recevoir des prestations et des services, et cela constitue de toute évidence une préoccupation des tribunaux de révision dont nous avons entendu les représentants aujourd'hui. Mais aussi, d'une certaine manière, il s'agit de la deuxième étape du processus. Parce qu'il faut également compter avec DRHC. Il ne faut pas oublier que tout le processus commence lorsque la personne fait sa première démarche, qu'il s'agisse d'un appel téléphonique ou d'une visite au bureau. À notre avis, DRHC éprouve certains problèmes en matière de service à la clientèle, des problèmes que l'on signale depuis quelques années mais qui n'ont toujours pas été réglés, en tout cas pas complètement ou de façon satisfaisante.
L'une de mes bêtes noires est que même si le relevé des cotisations est maintenant envoyé plus régulièrement aux cotisants, ce même relevé indique souvent une inadmissibilité aux prestations d'invalidité.
º (1630)
Je ne vois pas comment un ordinateur peut en arriver à cette conclusion. Parce qu'il ne peut tenir compte d'éléments comme la clause d'exclusion pour élever des enfants, le partage des crédits, et ainsi de suite. Il n'y a aucun moyen d'intégrer ces renseignements dans le système informatique. Aussi, les citoyens continuent de recevoir des relevés qui leur indiquent qu'ils ne sont pas admissibles, en cas d'invalidité, alors qu'en réalité ce pourrait être le contraire.
Ce n'est qu'un exemple pour illustrer notre opinion comme quoi la prestation du service à la clientèle comporte des lacunes de façon générale. Nous pensons que la politique devrait stipuler clairement que si une personne désire présenter une demande en vue d'obtenir les prestations d'invalidité du PPI-RPC, on devrait lui donner la possibilité de le faire.
Il se peut que certains comprennent d'emblée qu'ils ne sont pas admissibles, et qu'il ne sert à rien de s'engager dans tout ce processus. Par ailleurs, tout conseiller expérimenté sait que dans bien des cas, des demandeurs à qui l'on avait déclaré qu'ils étaient inadmissibles ne l'étaient pas une fois que l'on eut examiné leur dossier attentivement.
Je me rappelle entre autres un de mes clients qui ne semblait pas avoir accumulé suffisamment de gains, et ce n'est qu'après avoir étudié son dossier durant un an que j'ai découvert qu'il avait effectué du travail à titre de contractuel et qu'il avait dû recevoir un T4 à cet effet, et finalement, la personne a obtenu ses prestations d'invalidité du RPC.
Pour ce qui est de tout le processus d'examen, cependant—rendez-vous à la page 2 de notre exposé—il y est question d'un cycle d'examen triannuel prévu par la loi, mais bien entendu, ce sont les aspects actuariels qui doivent obligatoirement être examinés. L'examen des prestations et des conditions dans lesquelles elles sont versées afin de déterminer si elles sont suffisantes pour venir en aide à ceux à qui elles sont destinées semble être de nature discrétionnaire, aussi nous n'avons aucun moyen de savoir s'il a lieu. Jusqu'à maintenant, nous n'avons entendu aucun ministre des Finances nous annoncer qu'il prendrait en considération le genre de questions que nous soulevons aujourd'hui.
Bien sûr, nous nous trouvons dans la dernière année du deuxième cycle d'examen triennal depuis les réformes de 1998 qui entraîné la modification des règles de l'admissibilité, comme cela a déjà été mentionné, et ces modifications visaient principalement la communauté des personnes handicapées.
En ce qui a trait à la relation avec les autres programmes, le problème de l'imposition des prestations a déjà été mentionné. Nous nous inquiétons particulièrement au sujet du programme ILD et d'autres programmes qui vont jusqu'à déduire la prestation d'enfant à charge du montant auquel le bénéficiaire a droit. Certains programmes le font, et d'autres pas. Nous comprenons que le gouvernement fédéral doit discuter avec les provinces afin d'interdire un tel état de choses, mais je le répète, de nombreux régimes ILD déduisent aussi la prestation d'enfant à charge.
Les bénéficiaires des prestations d'invalidité du RPC n'ont souvent pas les moyens de payer les services de soutien essentiels et les services médicaux liés à leur handicap. Dans certains cas, tout dépendant de la province où ils habitent et du système qui est en vigueur, il arrive qu'un bénéficiaire des prestations du RPC soit en plus mauvaise posture que s'il ne les recevait pas du tout. Je le répète, je pense que Environics a permis de jeter la lumière sur certaines de ces anomalies.
Nous sommes fermement convaincus qu'il faudrait renforcer l'initiative de réadaptation professionnelle. Le retour sur le marché du travail de personnes handicapées ne peut être que bénéfique. Tout le monde est d'accord là-dessus, mais il semble que les personnes handicapées reçoivent un message très contradictoire. D'un côté, on leur dit qu'elles devraient retourner travailler et on les encourage à le faire. De l'autre, si elles entreprennent une réadaptation et retournent sur le marché du travail, on leur dit qu'elles seront reclassifiées comme n'étant pas suffisamment handicapées pour recevoir les prestations du programme. Je pense que l'on ne réglera rien en rabibochant de la sorte, et qu'il faudra se pencher plus sérieusement sur l'évaluation des personnes handicapées et sur les moyens qui sont utilisés pour les évaluer, et adopter une perspective plus large que le seul cadre médical, comme on l'a déjà mentionné.
º (1635)
Par ailleurs, il faut tenir compte des réalités socioéconomiques dans la définition de l'admissibilité afin que—comme le suggère fortement l'affaire Villani—l'on ne se contente pas seulement d'évaluer si une personne pourrait théoriquement faire un travail, mais plutôt tenter d'évaluer si elle peut accomplir un travail qui existe réellement dans sa collectivité et si quelqu'un est prêt à lui donner ce travail.
Plusieurs membres de notre groupe sont convaincus qu'en ce qui concerne les invalidités graduelles, ou les personnes qui, en vieillissant, cessent de travailler durant un certain temps pour prendre soin d'une autre personne—et l'on a vu des cas de personnes ayant cotisé durant 25 ans incapables de satisfaire aux exigences de «récence» en matière de cotisations, parce qu'elles n'avaient pas cotisé pendant quatre des six dernières années.
Un groupe a suggéré que les règles devraient être modifiées afin d'offrir un droit de base aux prestations d'invalidité du RPC aux personnes qui ont cotisé pendant au moins 15 ans. À l'heure actuelle, il y a des gens qui, comme je viens de le mentionner, ont commencé à cotiser avec l'entrée en vigueur du programme, en 1966, jusqu'au début des années 90. Mais par la suite, ils ont eu des problèmes d'invalidité, ils n'ont donc pas cotisé durant trois ans, et ils ne peuvent donc obtenir aucune prestation. Cette situation se répercute non seulement sur leur admissibilité aux prestations d'invalidité actuellement, mais également sur leur admissibilité ultérieure à une pension de retraite ainsi que sur l'admissibilité des membres de leur famille aux prestations d'enfant et de survivant.
Pour en venir à l'administration, je pense que bon nombre de ces questions ont déjà été abordées. Néanmoins, à la lumière des données que vient de publier DRHC, il ressort clairement qu'il est beaucoup plus difficile de se qualifier aujourd'hui qu'il y a plus de 20 ans. Si on regarde le nombre réel de demandes approuvées, en chiffres absolus, d'après les données les plus récentes disponibles, on constate qu'il est presque analogue à celui de 1980, alors que la population du Canada était moins nombreuse et plus jeune dans l'ensemble. Et l'on constate également un plafonnement des sommes qui ont été investies dans le programme depuis quelques années.
Nous nous inquiétons du fait que la définition d'«invalidité» semble changer au gré de la volonté de l'administration. Essentiellement, la définition est restée la même dans la loi depuis son entrée en vigueur, dans les années soixante. Elle n'a pas changé dans la loi, mais son interprétation a connu des hauts et des bas au Ministère, pour diverses raisons.
En tant que défenseurs, nous trouvons que les coûts liés aux rapports d'experts sont une importante question qu'il faut aborder. De plus en plus, nous constatons que, non seulement le PPI-RPC, mais aussi les autres fournisseurs de prestations d'invalidité ont de plus en plus souvent recours à des experts et à des rapports de plus en plus complexes sur le plan médical et de la santé.
Les coûts liés à la production du rapport représentent souvent un obstacle majeur. A l'intérieur du système des cliniques d'aide juridique par exemple, le Régime d'aide juridique de l'Ontario a imposé un plafond au montant qu'une clinique pouvait dépenser pour une cause en particulier, ce qui a eu pour effet de compliquer sérieusement notre capacité à obtenir des rapports. Et cet exemple ne vaut que pour l'Ontario.
Il y a sans doute bien d'autres points que j'aimerais aborder, mais je veux laisser un peu de temps pour la discussion et, comme je l'ai déjà dit, bon nombre des points que nous avons soulevés ont déjà été abordés.
º (1640)
Enfin, et peut-être en conclusion, les défenseurs de mon groupe s'inquiètent du fait que la Commission d'appel des pensions ne publie ses décisions que par l'entremise d'un service commercial, et non comme le font les autres tribunaux au moyen d'un site Web auquel tous peuvent avoir accès gratuitement. Même s'il s'agit seulement d'un point mineur, il est toujours valable de pouvoir compter sur des précédents. Bien entendu, les membres des cliniques d'aide juridique des grands centres peuvent se rendre dans une bibliothèque juridique pour consulter le rapport. Nous savons que la maison d'édition commerciale vend l'abonnement en ligne 1 000 $ par année. Je le répète, ce n'est qu'un exemple de peu d'importance, mais il traduit concrètement le genre d'obstacles qui s'opposent à ce que nous ayons un système d'appel équitable.
La présidente: Merci beaucoup.
Avant de passer à la période des questions, est-ce que l'un d'entre vous aurait eu vent d'un cas où des bénéficiaires se seraient vus couper leurs prestations d'invalidité du RPC et, dans cette éventualité, quelle est la procédure d'appel ou de quels moyens disposent-ils? Est-ce que le tribunal de révision s'occupe de cas semblables?
M. Pat Iannitti (directeur, Opérations des tribunaux et communications, Bureau du Commissaire des tribunaux de révision (Régime de pensions du Canada/Sécurité de la vieillesse)): Oui, il arrive que le Ministère réévalue la situation et décide de couper les prestations. Nous ne rendons pas beaucoup de décisions dans des causes de ce genre, mais ce sont des choses qui arrivent.
M. Laurie Beachell: Carolyn, parfois un exemple concret permet de mieux comprendre. Il y a environ deux mois de cela, j'ai reçu un appel d'une femme. Elle avait travaillé durant un certain nombre d'années, puis avait décidé de quitter son travail pour s'occuper de son fils qui était atteint d'un handicap important. Elle a choisi de rester à la maison pour prendre soin de son fils et lui offrir son soutien. Elle a été à l'extérieur de la population active durant une très longue période. Puis, son mari est tombé malade et n'a plus été capable de subvenir aux besoins de la famille tout seul. Il a demandé des prestations d'invalidité du RPC. Elle est retournée sur le marché du travail, a suivi de la formation—s'est inscrite à des programmes de formation—a trouvé un emploi à plein temps pour se voir diagnostiquer un cancer terminal. Dans l'intervalle, la période d'admissibilité et de cotisation avait changé. Elle n'était plus admissible aux prestations d'invalidité du RPC et ne pouvait demander de l'aide sociale.
Voici un exemple de ces causes où l'on constate que la personne a fait tout ce qui était humainement possible de faire. Les parents avaient décidé de s'occuper de leur fils. Elle a choisi de retourner sur le marché du travail lorsque son mari fut incapable de gagner sa vie. Elle a suivi de la formation. Elle s'est trouvé du travail. Elle a fait tout ça. Puis, elle a découvert qu'elle était atteinte d'un cancer terminal, et il lui manquait trois mois pour avoir cotisé pendant quatre des six dernières années parce qu'elle ne cotisait pas durant cette période.
Je sais que l'on se penche actuellement sur cette affaire, mais cet exemple contribue à donner un visage humain à ce que nous nous efforçons de faire.
º (1645)
La présidente: Je pense que tous et chacun d'entre nous, en tant que députés, avons des histoires à raconter. C'est pourquoi tout cela nous touche tellement. Nous connaissons des gens qui ont cotisé durant 15, 20 ou même 25 ans, qui ont été licenciés durant la récession, qui se retrouvent aujourd'hui très malades et qui ne sont pas admissibles parce qu'il s'est écoulé trop de temps depuis leur dernière cotisation. C'est une injustice.
C'est là toute la raison d'être de notre Comité. Comment concilier les divergences entre l'équité d'un système auquel tout Canadien pense avoir droit et les règles auxquelles nous devons faire face aujourd'hui?
Monsieur Elley.
M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Alliance canadienne): Merci d'être venus témoigner devant nous. Notre parfait petit comité donne davantage le ton de la conversation que celui d'un interrogatoire serré ou quelque chose du même genre. Alors, soyons décontractés, même si nous traitons d'un sujet très important et que nous ne voulons pas avoir l'air de le prendre à la légère.
Nous avons devant nous un intéressant mélange de personnes: ceux d'entre vous qui sont chargés d'assumer la responsabilité législative des examens des retombées du régime des prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada et ceux qui se portent à la défense des personnes qui sont aux prises avec ce système.
En un sens, vous illustrez le dilemme qui se présente à nous. En tant que députés, nous sommes tout aussi agacés que vous l'êtes. Et cela vaut pour tous les partis confondus. Ceux parmi nous qui sont membres du Comité sont tout aussi dépités que vous en ce qui concerne l'incapacité des gouvernements de régler ce problème qui affecte les personnes les plus marginalisées de notre société. Donc, nous sommes réellement aux prises avec ce problème.
Lors de notre réunion de la semaine dernière, nous avons tenté d'aborder la question sous deux angles différents, c'est-à-dire que nous nous sommes demandé si nous devions essayer de rabibocher le régime des prestations d'invalidité du RPC ou plutôt concevoir un modèle entièrement nouveau, qui irait au-delà de ce que nous connaissons et qui offrirait quelque chose de vraiment utile pour les personnes handicapées de ce pays. L'une des choses dont nous avons discuté, et je pense que Laurie et quelques autres en ont parlé aussi, était qu'il fallait commencer à envisager le milieu de l'invalidité plutôt que l'invalidité proprement dite. Qu'est-ce qui cause cette invalidité? Quels sont les événements dans la vie de cette personne susceptibles d'entraîner de telles circonstances? Tant que nous n'aurons pas décidé de repenser le modèle, nous ne ferons qu'effleurer le problème, et le gouvernement ne verra aucune obligation de faire quelque chose de neuf et de radical pour régler le problème une fois pour toutes.
J'aimerais connaître vos réactions à ce que je viens de dire. Suis-je sur la bonne voie? Comment pourrait se présenter ce nouveau modèle que nous devrions envisager? Nous comptons sur votre expertise pour nous faire des suggestions. Je suppose que les groupes de revendication sont mieux placés pour répondre à ma question que ceux d'entre vous qui participent à l'application et à l'examen. Mais, je vous en prie, donnez-moi vos impressions.
M. Laurie Beachell: Pour être honnête, je pense qu'un nouveau modèle présente un défi énorme. Les programmes de soutien du revenu destinés aux personnes handicapées... Ce n'est pas que l'on ne veuille pas investir dans ce domaine. Nous disposons de toute une gamme de programmes, du Régime de pensions du Canada aux programmes d'indemnisation des accidentés du travail, en passant par l'assurance emploi, les prestations d'invalidité à long terme, l'aide sociale, le droit de la responsabilité civile délictuelle et d'un éventail de mécanismes de soutien du revenu pour les personnes qui en ont besoin. Les modèles d'assurance invalidité plus complets et plus audacieux dont il a été question vers la fin des années 80 n'ont pas été retenus pour diverses raisons. Il est vrai qu'il faut s'appuyer sur des études approfondies, montrer un courage à toute épreuve et avoir une vision de l'avenir pour s'engager dans la réalisation de tels programmes.
L'examen du programme de soutien du revenu en Ontario a débouché sur quelques propositions qui se sont retrouvées dans Transitions, un rapport publié il y a quelques années où l'on suggérait de prendre comme point de départ les programmes de protection contre l'invalidité pour élaborer une initiative de plus grande envergure —que nous appellerons si vous voulez—revenu annuel garanti. Ce sont les avenues plus vastes et plus complètes dont il faut continuer à parler. Nous sommes tellement obnubilés par les particularités de cette panoplie de programmes, de définitions, de formulaires, de critères d'admissibilité, de modalités d'appel, d'affaires judiciaires et de précédents que nous négligeons de nous asseoir ensemble dans un cadre propice à la discussion et à la collaboration en vue de nous doter d'une vision d'avenir.
Nous pensons à un programme d'envergure nationale qui viendrait corriger certaines lacunes du programme actuel. Nous pensons à un programme qui serait piloté à l'échelle nationale. Sans quoi, nous allons continuer de rafistoler à la pièce à tel point que les droits à la mobilité des personnes handicapées seront encore plus restreints et qu'elles se retrouveront prisonnières du système dans lequel elles ont des droits établis. Elles ne pourront pas déménager ailleurs au pays pour y accepter un emploi, se rapprocher de leur famille ou d'amis ou seulement pour explorer une autre région de notre merveilleux pays. Si vous êtes une personne handicapée, vous devrez vivre à l'intérieur d'un certain milieu, d'une certaine région géographique où l'on aura établi votre admissibilité à des prestations et où vous pouvez trouver du travail, faire des études, voir des amis et faire toutes ces choses.
Il y a un énorme défi à relever pour ce qui est de la vision de l'avenir, et je ne prétends pas que les groupes de défense peuvent répondre à toutes ces questions. Nous continuons de fonctionner étape par étape—et je pense que l'expression de gradualisme incessant inventée par Sherri Torjman traduit bien ce dont il est question—et ce n'est pas l'approche que nous privilégions. Commençons par nous assurer que nous n'aggravons pas les choses. Je pense que cela fait partie du Serment d'Hippocrate, n'est-ce pas? Ne rendons pas les choses encore plus difficiles pour les personnes visées durant notre exploration d'une vision plus large. Nous constatons que nous devons mener des combats qui laissent des séquelles à certaines personnes, à des personnes auxquelles nous sommes loin de garantir l'intégration complète dans la société canadienne.
Je n'ai pas de réponse à vous donner, mais vous posez la bonne question, et le Comité lui aussi se pose la bonne question. C'est la façon dont nous allons procéder pour explorer tout ça ensemble qui nous fera progresser.
Le grand défi? Il se situe à l'échelle des relations fédérales-provinciales. Le débat des dernières semaines autour des paiements de transfert pour les soins de santé nous aura au moins permis de réaliser une fois de plus que le véritable défi à relever se situe à ce niveau.
º (1650)
La présidente: Je pense, Laurie, que ce que M. Elley voulait dire, dans le contexte des prestations d'invalidité du RPC, que l'on devrait éliminer le mot «invalidité» et parler plutôt d'un certain critère qui rendrait admissible à une retraite anticipée. Cela reviendrait à dire que l'on doit cesser de s'attendre à ce que ces personnes subviennent elles-mêmes à leurs besoins, parce que même avec de la formation, elles en seront incapables. Nous devrions tout simplement classer leurs dossiers et leur venir en aide. Est-ce bien cela que vous vouliez dire la semaine dernière, Reed?
M. Reed Elley: C'est en partie ce dont nous avons parlé en effet, mais je ne voudrais pas limiter le débat à cela, parce qu'il y a des personnes avec lesquelles nous travaillons qui pourraient être admissibles aux termes de cette définition.
M. Laurie Beachell: Si nous empruntons cette direction, les implications du soutien sont sous-entendues. Il y a eu, dans les années 90, un mouvement en vue d'englober des personnes dans la catégorie des bénéficiaires de prestations d'invalidité du RPC, des gens qui normalement n'auraient pas été admissibles dans la catégorie des personnes handicapées, notamment des travailleurs âgés qui avaient été mis à pied, etc., et de les inclure dans une interprétation socioéconomique plus large.
Ce n'était pas nécessairement une mauvaise chose, mais en bout de ligne, en 1998, notre groupe a été ciblé. On nous a dit que l'on allait effectuer des compressions dans ce programme, que l'on allait cesser d'offrir ces prestations parce que le nombre de participants est beaucoup trop élevé. Le rapport actuariel montre que la compression ciblée, soit 20 p. 100 de ce programme qui était alloué aux prestations d'invalidité par comparaison à la compression ciblée de 80 p. 100 qui visait les prestations de retraite, était importante. Nous avons été les plus touchés, et on a décidé que ce serait notre groupe qui subirait les compressions au niveau des prestations et qui devrait vivre avec des critères d'admissibilité plus sévères.
Dans l'initiative globale, j'espère que l'on aura le courage d'augmenter les ressources et de dire qu'elles sont destinées également à soutenir ce programme, afin qu'en lui donnant plus d'ampleur on ne risque pas de nuire davantage à ceux qui ont déjà été laissés pour compte.
º (1655)
M. Reed Elley: Voulez-vous réagir?
Mme Traci Walters: Je m'inquiète pour la personne... Nous nous réunissons, nous comparaissons devant des comités, nous présentons les résultats de nos recherches, nous faisons un échantillonnage ici et là afin de savoir comment se sentent les gens et nous avons des questionnaires. Quoi que nous fassions, que nous nous contentions de raccommoder le programme ou que nous décidions de le renouveler, il faut faire quelque chose dès aujourd'hui pour les personnes handicapées, pour ceux qui demandent des prestations d'invalidité du RPC. C'est injuste pour les députés et c'est aussi injuste pour tous ces gens.
Je sais que tous ceux qui sont réunis ici aujourd'hui, et que j'ai déjà rencontrés, sont remplis d'idées et d'approches novatrices, et que certaines pourraient faire l'objet de projets pilotes immédiatement afin de venir en aide aux personnes handicapées.
Nous remettons sans cesse à demain nos interventions afin de pouvoir dire quelles seront les conséquences de nos décisions, et pourtant il y a des choses qui pourraient être faites dès maintenant et des crédits qui pourraient être débloqués tout de suite—je sais que c'est faisable—afin d'offrir un soutien aux personnes qui sont visées par tout ce processus. Cela devrait être notre plus grand souci. Qu'avons-nous fait toutes ces années pour n'importe lequel de ces individus, pour ces familles? Nous n'avons rien fait d'autre que de nous asseoir ici et de produire des études.
Qu'en est-il de l'engagement que nous avons pris envers la population? Je pense que certaines solutions pourraient être mises à l'essai et nous pouvons aller de l'avant même pendant que vous réfléchissez à la forme que pourrait prendre le nouveau régime qui pourrait voir le jour d'ici une dizaine d'années. Je connais le rythme du changement au sein du gouvernement, je sais qu'il faut beaucoup de temps pour faire changer les choses.
La présidente: Pour ce qui est de l'étude, nous espérons déposer un rapport d'ici le mois de juin.
Est-ce que vous êtes en train de dire, Traci, que même avec les questions que nous avons mises sur le site Web vous invitant à nous soumettre vos propositions, vous pensez que l'on devrait répartir les interventions entre celles à court terme et celles à plus long terme? Voulez-vous dire que vous aimeriez voir des solutions mises en oeuvre dès maintenant, des solutions faciles à mettre en application pendant que nous rêvons en couleurs de la forme que pourrait prendre un programme de soutien du revenu qui concrétiserait l'intégration des personnes handicapées? Voulez-vous que nous posions les questions autrement?
Nous obtiendrons les bonnes réponses, dans la mesure où nous poserons les bonnes questions.
Mme Traci Walters: Demander aux gens ce qui pourrait être fait dès maintenant? Vous avez raison. Qu'est-ce qui pourrait être fait pour les aider? Nous savons qu'ils ont besoin d'information pertinente, de la comprendre, et de savoir quoi en faire.
Pouvez-vous imaginer ce que c'est que de vivre avec une déficience? Quand vous avez une déficience, vous devez lutter pour vous transporter, constamment chercher des moyens. Vous devez décider si vous avez besoin de soins à domicile, si vous allez… tous les jours. Pouvez-vous vous imaginer la vie de ces personnes? J'ai accompagné nombre d'entre elles dans ce processus, à titre d'amie, à titre d'aidante et d'intervenante, quand je travaillais dans un centre de vie autonome.
Au cours de leur vie—vous le savez parce que vous en entendez parler dans vos circonscriptions—, ces personnes doivent se battre pour tant de choses au quotidien, simplement pour survivre, et le seul fait de revenir ici encore une fois aujourd'hui… Nous savons que des idées circulent. Nous savons qu'il existe d'autres façons de les aider, dès maintenant, de leur fournir le soutien dont elles ont besoin, de les aider à comprendre le système et à passer au travers en moins de cinq ou trois ans. Ces personnes ont besoin d'acquérir des habiletés et d'obtenir du soutien de base.
Je vous ai dit que je me sentais un peu triste aujourd'hui parce que nous célébrons le dixième anniversaire de rien. Depuis dix ans que je fais ce travail, rien de concret ne s'est produit. La situation devient vraiment démoralisante. Je n'aime pas du tout penser que nous allons continuer à siéger ici pendant d'autres longues années, en essayant d'imaginer la situation dans dix ou vingt ans. Qu'avons-nous fait pour les Canadiens qui font une demande? Je ne sais pas.
Peut-être est-ce une question de court et de long terme, mais je suis convaincue qu'il y a moyen d'unir nos efforts pour proposer des solutions, des outils pour aider les usagers du système dès maintenant, pendant que nous serons cloués ici pour qui sait combien d'années encore.
» (1700)
La présidente: Je suis médecin de famille et je crois que la réforme des services de soins de première ligne constitue le premier jalon vers un système à guichet unique. Un employé pourra au moins les renseigner sur les ressources offertes dans la communauté. La plupart du temps, les médecins de famille ne savaient pas ce qu'ils faisaient. Je suis tout à fait d'accord avec vous.
Jocelyne.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Je remercie d'abord ma collègue que je remplace aujourd'hui.
Je suis très heureuse d'être ici. Tout ce que j'entends de la part des gens qui défendent les droits des personnes handicapées, je l'entends chez moi depuis des années. Je m'aperçois, comme madame, qu'on dit des choses et des choses, mais que ça tourne toujours à la contestation au lieu de mener à la réalisation d'objectifs précis pour résoudre les problèmes actuels des personnes handicapées.
Vous avez dit tout à l'heure, monsieur, que la défense des droits n'avait pas toutes les réponses. Mais vous avez des réponses, et ces réponses-là sont présentes et elles sont adaptées aux besoins réels des individus.
Chez moi, au Québec, on a la Régie des rentes du Québec. On appelle ça le pendant du Régime de pensions du Canada. Présentement, la Régie des rentes du Québec n'est pas parfaite, mais elle voit le revenu d'une façon d'intégrée. La Régie des rentes s'occupe de l'aide sociale, de tout ce que touche le revenu d'une personne handicapée. Pensez-vous que le RPC devrait être fait de la même manière?
Les prestations que touchent ces gens sont très minimes. Présentement, comme l'a dit madame, c'est un vrai fouillis. Pour aller chercher de l'information, on ne s'adresse pas à des gens... Comme le disait monsieur, dans les grands centres, on peut avoir accès à l'Internet, à des bibliothèques, à des consultants, mais on parle ici de la situation partout au Canada. Il y a de petites communautés qui n'ont accès à rien. Est-ce que vous pensez qu'il devrait y avoir de la publicité, de l'information?
Vos organismes donnent de l'information et de l'aide à ces gens. La bureaucratie comprend-elle les mots «aide», «présent», «immédiat», ou si c'est toujours à refaire? C'est toujours très complexe d'ouvrir un dossier, même s'ils disent, comme le disait monsieur dans son sondage, qu'ils sont très contents de la façon dont ils sont traités. Ces gens-là les traitent bien , mais ce sont les critères qui ne changent pas. Eux doivent travailler avec les critères de la loi. Je pense que ce sont les critères qui devraient être adaptés aux réalités présentes.
Est-ce que ça va prendre encore des décennies, comme le disait madame? Je pense que ces gens-là auront le temps de mourir deux fois avant d'avoir de l'aide. Au lieu de faire de grandes réformes, qu'est-ce qu'on pourrait faire immédiatement, avec ce qu'on a présentement, pour améliorer les services et pour que les gens aient accès à ce petit pécule auquel ils ont droit en tant que personnes handicapées?
[Traduction]
M. Laurie Beachell: Pour les Canadiens avec déficiences, l'enjeu clé concerne les mesures de soutien, soit les moyens mis à leur disposition pour qu'ils puissent réaliser leurs ambitions, que ce soit d'aller à l'école, de trouver un travail ou de fonder une famille. Ces mesures sont fondamentales. Le Programme des prestations d'invalidité du RPC représente une infime partie de ce dont les personnes handicapées ont besoin pour devenir des citoyens à part entière. Il s'agit d'un programme essentiel parce que tous les travailleurs canadiens qui paient des cotisations y ont accès. C'est une première étape essentielle.
La comparaison de Sherri Torjman entre le Régime de rentes du Québec et le RPC est très éloquente. Je ne prétends pas être un spécialiste du RRQ, mais je comprends qu'il ne s'agit pas d'un régime de premier payeur, au contraire du RPC. Son fonctionnement soulève de nombreuses questions, y compris les bénéfices réels pour les particuliers.
Chaque fois que je prends connaissance d'un régime d'avantages sociaux collectif et de son volet de prestations d'invalidité, tout a l'air décent en surface. Mais toujours, la première étape est la demande au PPI-RPC. Or, ces prestations sont imposables, alors que les prestations d'invalidité de longue durée ne le sont pas. Pourtant, les prestations brutes du PPI-RPC constituent toujours la base du calcul de mon revenu brut assuré. Cela pose problème. Les modifications apportées à l'interface entre le Programme de prestations d'invalidité et les régimes de retraite sont aussi préjudiciables pour beaucoup.
Au Québec, j'ai constaté que la régionalisation du système d'information était plus réussie et que les collectivités étaient mieux informées à l'échelon local, parce que vous avez créé un système régional beaucoup plus solide que dans d'autres parties du pays. La population a accès à l'information, et cette information leur donne du pouvoir. Il n'existe pas d'autres systèmes du genre ailleurs au pays. Au contraire, les systèmes centralisés sont très puissants dans beaucoup d'autres endroits.
» (1705)
La présidente: Madame Girard-Bujold.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Monsieur Beatty, vous disiez tout à l'heure que vous vouliez donner au mot «handicapé» une définition universelle. Quelle serait cette définition qui nous permettrait d'avoir enfin le même langage?
[Traduction]
M. Harry Beatty: Je ne sais pas si j'ai parlé d'une définition universelle, mais le problème est réel. Comme nous venons de le dire, le fait que chaque programme soit assorti d'une définition différente et d'un processus d'évaluation distinct pose certainement problème. Chaque fois qu'ils soumettent une nouvelle demande, les bénéficiaires doivent retourner voir leur médecin, comme Traci l'a déjà mentionné, pour lui faire remplir un nouveau formulaire.
J'aimerais à tout le moins qu'on examine les programmes et les disparités entre eux pour établir si elles sont fondées, ou s'il existe une possibilité non pas de normaliser l'approche, mais du moins de rendre certains aspects plus uniformes.
Par ailleurs, si on parle de définitions, je crois que l'équation entre déficience et inaptitude au travail dans des régimes comme le PPI-RPC impose d'énormes obstacles. Si on pouvait commencer par modifier la législation de sorte à ce que les personnes qui suivent une formation ou qui vont à l'école puissent retourner au travail avec moins de risques de perdre leur admissibilité… L'exemple de Laurie concernant les soignants qui deviennent inadmissibles simplement parce qu'ils ont voulu s'aider eux-mêmes ou venir en aide à un membre de leur famille est tout aussi frappant. Ces gens sont pénalisés parce qu'ils ont fourni ces efforts. En fait, on leur donne le message suivant: restez dans la dépendance, ne faites rien.
Voilà certains des problèmes communs à tous les programmes. Il faudrait au moins examiner les programmes du gouvernement fédéral, des provinces, des assureurs privés, pour déterminer si les disparités sont justifiées et s'il y a lieu de faire des recommandations à cet égard. À l'heure actuelle, les programmes semblent subir un «effet de silo», pour employer le jargon à la mode. Pis encore, quand des améliorations sont apportées à l'un d'entre eux, les promoteurs des autres se frottent les mains en pensant aux économies qu'ils réaliseront en transférant le coût.
» (1710)
La présidente: Wendy.
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Merci beaucoup d'être venus nous rencontrer.
Je suis désolée de mon retard. J'étais au sous-comité de l'enfance et de la jeunesse, auquel je siège aussi. Mon nouveau chef a décidé que j'étais tellement indispensable qu'il faudrait me cloner pour que je siège à deux comités à la même heure.
Le comité discutait des jeunes Autochtones à risque. Vos derniers propos sont d'un grand intérêt, Traci, parce que la Commission royale sur les peuples autochtones—une étude très approfondie sur les peuples autochtones, envers laquelle on s'est engagé, on a prêté serment, entretenu énormément d'espoir—n'a pas été instituée. Et voilà que Matthew Coon Come et beaucoup d'autres représentants des collectivités autochtones défilent de nouveau devant le comité, et bien d'autres, parce qu'ils en ont long à dire.
Je vous comprends bien, Traci, quand vous dites que rien n'a changé. C'est très décourageant. Je me souviens de notre première rencontre, au tout début de mon premier mandat de députée, voilà plus de cinq ans. Vous parliez alors du rapport La volonté d'agir, présenté en 1996 par le groupe de travail d'Andy Scott. Vous étiez très enthousiaste. Toutefois, nous apprenions au même moment, lors d'une conférence de presse, que seulement 6 des 56 propositions avaient été réalisées.
Un autre modèle, complètement différent, me vient à l'esprit. Pourquoi nous embêter à refaire l'exercice ad nauseam? Pourquoi ne pas tout simplement partir du texte que nous avons en main, auquel nous avons tous plus ou moins adhéré, qui nous semble valable, pour creuser et aller plus loin? Bien entendu, ce n'est pas la Bible. La volonté d'agir n'est pas parole d'évangile. Cependant, si tous ont convenu que le modèle était bon, pourquoi ne pas en faire notre outil de travail, pour ne jamais l'oublier et pour qu'il ne soit jamais mis sur la tablette, en dessous d'un autre?
Je lance cette idée en l'air. Pourquoi ne pas reprendre le travail du groupe d'Andy Scott pour vérifier ce qui avait été dit à ce moment, mettre l'information à jour, et continuer de faire pression sur les décideurs pour qu'ils accordent le suivi nécessaire aux travaux des groupes de travail parlementaires, des commissions royales?
Nous passons vraiment beaucoup de temps ensemble, alors que nous aurions tous beaucoup mieux à faire. Vous avez certainement mieux à faire. Cela fait partie de notre travail, mais il n'est pas juste de vous faire revenir sans cesse pour nous répéter les mêmes choses, en y mettant toujours plus de passion chaque fois. Je vous lève mon chapeau pour ce travail acharné, mais je vous propose quand même d'essayer un autre modèle.
Mme Traci Walters: Puis-je répondre?
Wendy, au début de la séance, le CCD et l'ACCVA nous ont prévenus que leur limite était atteinte. Qu'il s'agisse du PPI-RPC ou des autres demandes que nous avons faites au fédéral, les personnes handicapées méritent mieux. Elles méritent certainement mieux que dix années d'inaction. Après tant d'années, nous en sommes venus à nous demander si, comme je l'ai déjà mentionné, les personnes handicapées représentent une priorité dans ce budget—des rumeurs, c'est tout. Rien ne se passe. Pourquoi nous infligeons-nous cela? Comme Laurie l'a dit, nous venons ici pour nous voir vieillir les uns les autres.
Des infrastructures sont déjà en place, qu'il s'agisse des organisations de personnes handicapées ou d'autres groupes communautaires qui pourraient aider les demandeurs à passer au travers du processus sans perdre des années sur des inepties. Ces organisations peuvent les aider à passer au travers, à trouver le matériel requis, à accélérer le processus. Les recherches le prouvent. Vous le savez bien.
Pourquoi ne pas utiliser les infrastructures en place pour donner du soutien individuel aux demandeurs? C'est un geste concret à notre portée. Je ne parle pas d'une infrastructure en particulier. Nous voulons travailler en partenariat avec le PPI-RPC. Nous avons proposé aux personnes handicapées une infrastructure de soutien individuel. C'est quelque chose de possible maintenant—un outil concret, très efficient. Nous pouvons aider les gens à obtenir l'information dont ils ont besoin et à développer les habiletés essentielles pour accélérer le processus.
Le groupe de travail a rassemblé des milliers de Canadiens avec déficiences. Laurie et moi-même avons assisté à chacune des réunions du groupe. Pourquoi redemander aux personnes handicapées de quoi elles ont besoin alors qu'elles nous l'ont déjà dit? Nous avons parcouru le pays de long en large. Je faisais partie du groupe. Nous entendions toujours les mêmes choses. Pourtant, le rapport repose bien au chaud, inutilisé.
Vous savez sans doute que le gouvernement fédéral vient de publier un autre rapport, le 3 décembre dernier, où on parle de l'inclusion des personnes ayant des déficiences—encore une dissertation qui tourne autour des problèmes. Pourquoi dépenser l'argent des contribuables pour discourir sur les problèmes? Je ne comprends pas. Pourquoi ne faisons-nous rien au lieu de produire tous ces rapports? C'est si simple. Si limpide. Si concret.
» (1715)
Mme Wendy Lill: Carolyn, pourquoi ne pas organiser une conférence de presse pour annoncer que nous en avons assez, que la coupe déborde? Notre comité est petit, parfait, mais tous les groupes de personnes handicapées du pays en ont ras le bol.
Mme Traci Walters: Voilà, c'est assez!
Mme Wendy Lill: Ils ne viendront plus sur la Colline. C'est terminé, ils ne le feront plus.
Mme Traci Walters: C'est vraiment trop! Et tout cet argent dépensé pour venir ici! Vous nous conviez, nous faisons le voyage, et nous répétons notre litanie—tant de rapports! Je suis désolée, je ne suis pas de bonne humeur aujourd'hui. Laurie et moi, nous nous transmettons le flambeau de la mauvaise humeur. Quel gaspillage de deniers publics, et quel mauvais service pour les Canadiens avec déficiences.
C'est assez. Je sais que la communauté en a ras le bol. Si nous apprenons la semaine prochaine que nous avons, encore une fois, été oubliés dans ce budget… Assez, c'est assez. Aujourd'hui, nous sommes venus dire que nous voulons de l'action. Nous en avons assez des belles paroles, des rapports et des dossiers. Et les gens dans tout ça?
Voilà comment je me sens aujourd'hui. Merci.
Mme Wendy Lill: Effectivement, tout cela soulève la question du budget et de ce que ce parfait petit comité fera s'il n'y a rien de concret dans le budget pour résoudre les problèmes qui nous préoccupent.
Nous avons travaillé avec tellement d'acharnement sur ce petit… Non, le crédit d'impôt pour personnes handicapées n'est pas un petit dossier. Les progrès, que nous avons gagnés à l'arraché… La seule annulation de deux modifications qui auraient rendu les conditions encore plus punitives—elles n'avaient même pas été appliquées—a drainé des efforts colossaux. Je le souligne simplement pour démontrer à quel point le processus est lent et laborieux.
Nous arrivons à un point critique, et l'explosion est annoncée pour la semaine prochaine si le budget ne contient aucun élément d'inclusion...
Mme Traci Walters: Ensemble, le comité et la communauté des personnes handicapées peuvent arriver à quelque chose. Nous devons faire front commun.
La présidente: Vous le savez, c'est de notoriété publique, les problèmes sont dus pour beaucoup à l'impasse fédéral-provincial. Que nous parlions de la question des femmes, de la réforme de la santé, de n'importe quoi, tout ce qui nous tient à coeur est géré par trois ministères au moins, à trois échelons de gouvernement au moins. Nous sommes pris au piège. Nous avons besoin d'aide.
Le fédéral peut très bien s'occuper de la question du soutien du revenu. Nous n'avons jamais été capables d'utiliser le régime fiscal pour y arriver. Cependant, les mesures de soutien et les services relèvent du provincial. Le budget de la semaine prochaine contiendra des crédits pour les garderies. Combien de milliers d'années a-t-il fallu attendre pour que cette impasse fédéral-provincial puisse aboutir à des crédits pour les garderies? Pourtant, le Québec y arrive fort bien depuis un bon moment.
J'espère que les personnes handicapées tireront bénéfice de ces crédits aux garderies. Après bien des peines, nous obtiendrons enfin gain de cause la semaine prochaine. Parce que les députés n'ont pas cessé de faire pression pour dénouer l'impasse. Les collectivités et tous les merveilleux intervenants du milieu des garderies au Canada ont fait pression. Il faut unir nos efforts: deux et deux font cinq, c'est connu.
Je comprends bien votre frustration. Nous la ressentons autant que vous. La rencontre des premiers ministres la semaine dernière ne m'a pas remplie d'espoir et de lumière. J'avais plutôt un goût amer quand j'ai vu que 13 personnes faisaient alliance contre une.
Nous ne pouvons rien sans votre appui. Cependant, vous devez aussi être représentés dans chacune des capitales provinciales parce que les solutions aux problèmes des personnes handicapées sont fortement liées aux mesures de soutien et aux services.
Mme Traci Walters: Carolyn et Laurie pourront élaborer. Les provinces vont se retirer parce que le gouvernement fédéral ne fera rien pour améliorer les mesures de soutien offertes aux personnes handicapées et il ne participera pas au mouvement «À l'unisson». Nous sommes si près du but. Les provinces vont se retirer du dossier parce que le fédéral ne fait rien.
Laurie, pouvez-vous élaborer sur cette question?
» (1720)
M. Laurie Beachell: Les changements ont été lents. D'autres groupes ont mené des luttes longues et épiques. Nous saluons leur travail et nous apprenons d'eux. Nous nous réjouissons que des crédits soient octroyés aux garderies la semaine prochaine. Nous aimerions que les Canadiens autochtones obtiennent plus d'avantages, ainsi que beaucoup d'autres communautés.
Toutefois, nous aimerions bien entendu que les personnes avec déficiences obtiennent aussi leur part de ce gâteau. Pour ce qui est de l'autre gâteau, la question des garderies intéresse beaucoup de gens, et particulièrement ceux qui ont des enfants handicapés. Les Autochtones s'inquiètent particulièrement du fait que tant de membres de leurs collectivités sont handicapés. Il faut adopter une approche intégrée. C'est un défi de toujours, qui prend encore plus d'ampleur quand des personnes avec déficiences sont en cause, parce que les enjeux ne sont pas nets ni bien délimités.
À l'échelon provincial, le défi est énorme. Tellement énorme que les gens commencent à s'identifier eux-mêmes non plus comme des Canadiens, mais comme des Ontariens, des Manitobaines, des Britanno-Colombiens ou des Néo-Écossais. Cela s'explique par l'incidence extrêmement limitée des mesures du fédéral sur la vie des gens. Nous assistons à l'érosion du sentiment d'être Canadien.
Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une avenue positive ni dans la méthode, ni dans la forme, ni dans le format. Nous comprenons la soif d'autonomie et la volonté d'une plus grande maîtrise à l'échelon local, qui sont propices à la résolution de certains problèmes. Cependant, nous avons besoin de normes nationales pour garantir l'accès aux mêmes avantages pour la population de l'Île-du-Prince-Édouard et celle de l'Alberta.
C'est le rôle du gouvernement et c'est le défi posé à nos élus au fédéral: habiliter les Canadiens, pas seulement les personnes avec déficiences, à jouir de leurs pleins droits de citoyens. La tâche est énorme.
La présidente: Le bibliothécaire m'a rappelé que c'était précisément l'objectif de cette étude du régime le plus visible du fédéral. Nous n'avons pas le choix de viser juste parce que les résultats auront des conséquences pour un nombre incalculable de Canadiens. C'est pourquoi nous avons besoin de votre aide.
John veut ajouter un commentaire, et Reed aura peut-être une autre question.
M. John Young: Je disais que, même si les bénéficiaires reçoivent un montant forfaitaire rétroactif après un long processus de deux ou trois ans, cet argent est instantanément engouffré par les compagnies d'assurance. Les bénéficiaires devraient pouvoir garder les deux, mais c'est impossible. Nous remettons l'argent pour bénéficier de prestations ILD, ce qui est juste. Cependant, si on offrait le choix de conserver ce montant forfaitaire versé en un coup, il pourrait servir à d'autres fins au lieu d'être engouffré par les compagnies d'assurance. Il pourrait servir à l'aménagement du domicile, au lancement d'une entreprise, à la formation ou à l'éducation.
J'ai lu dans un rapport que 36 millions de dollars avaient ainsi été remis à quelques compagnies d'assurance privées en moins de 5 ans, des sommes qui provenaient toutes de paiements forfaitaires. Si cet argent nous avait été versé, nous aurions pu l'utiliser pour des projets, et choisir de le remettre à l'assureur ou non… Les compagnies d'assurance peuvent nous dire pendant combien de temps nous recevrons des prestations ILD, que ce soit 2 ou 20 ans. Elles y arrivent presque quand nous sommes sur le point de rendre l'âme. Il existe pourtant une solution bien simple qui consisterait à établir un petit budget et à réserver une partie des versements mensuels au remboursement du montant forfaitaire, et d'utiliser l'argent à d'autres fins. Cela ne nous coûterait rien.
La présidente: Cette proposition soulève l'intérêt du comité—le RPC étant un régime de premier payeur, au contraire du RRQ.
Nous aurons besoin des lumières de Kevin pour comprendre pourquoi les prestations d'invalidité du RPC sont imposables alors que les prestations ILD ne le sont pas.
Avez-vous une explication, Kevin, ou devrons-nous étudier la question et faire rapport? Ou peut-être Harry pourrait-il nous éclairer.
» (1725)
M. Harry Beatty: Merci de ce privilège.
En réalité, les prestations ILD sont imposées à moins que la cotisation n'ait été versée en dollars après impôt. Ainsi, les cotisants ou les acheteurs de plans individuels reçoivent généralement des prestations exemptes d'impôt. Cependant, dans le cas des régimes collectifs, la plupart des prestations sont imposables.
Il faut donc tenir compte de cette distinction: les prestations sont parfois imposables, parfois non.
M. Guy Arseneault: Le comité sera peut-être intéressé de savoir que, à la suite de notre comparution le printemps passé, ainsi qu'à l'invitation de la présidente et d'autres membres du comité, le commissaire s'est engagé à transmettre certaines recommandations fondées sur l'expérience des membres. Nous répondions à une demande du comité. Nous avons par conséquent créé des groupes de travail constitués de membres d'expérience chargés d'interroger d'autres membres au sujet de leurs expériences. Les interrogations portaient notamment sur l'assurance, de même que sur les politiques de fond, les règles législatives et autres thèmes de cette nature, y compris la communication.
J'ai le plaisir de vous annoncer que ces groupes de travail et comités sont prêts à faire leur compte rendu au comité. Ils pourront répondre à certaines questions sur les mesures immédiates à prendre. Ils feront sans doute quelques recommandations. Quelqu'un a demandé ce que nous pouvions faire et s'il fallait formuler des recommandations. Il y en aura certainement, mais je ne veux pas anticiper parce que ces recommandations émanent des groupes de travail et non de la Commission ou du Commissaire. Nous pourrons comparaître devant le comité quand il le jugera à propos.
La présidente: Le Commissaire acceptera de comparaître de nouveau devant le comité pour présenter les résultats des travaux de ces groupes?
M. Guy Arseneault: Oui, le Commissaire sera à votre disposition. J'ai compris entre les branches que nous serons prêts vers la fin de vos délibérations. Nous soumettrons alors des documents très complets, qui vous seront des plus utiles, nous l'espérons.
Notre groupe vous offre sa collaboration et sa coopération dans toute la mesure du possible. Si le gouvernement souhaite mettre en oeuvre des projets pilotes, nous serons très ouverts et nous les examinerons, dans la limite de leur conformité législative. Notre organisme a été constitué en application de la loi, et nous devons nous y conformer. Nous devons user de prudence et agir en toute neutralité. Deux parties se présentent devant nous: le gouvernement et les appelants. Nous nous trouvons entre les deux, et notre mission consiste à écouter la version de chacune.
Nous sommes assujettis à la loi, je tiens à vous le rappeler.
La présidente: Pour ce qui est du groupe spécial sur l'impôt et l'assurance—des particuliers ont affirmé qu'ils avaient dû verser le montant forfaitaire au complet à leur assureur, et qu'ils avaient en plus payer de l'impôt. Ils étaient choqués surtout d'avoir eu à payer de l'impôt. Est-ce possible?
M. Guy Arseneault: À ma connaissance, il n'y a jamais de double imposition. Cependant, cela peut arriver si, par exemple, un appelant peu informé remplit des formulaires de réclamation, en ne sachant pas s'il a payé de l'impôt ou non, parce qu'il ne connaît pas les règlements ou qu'il n'est pas en mesure de les connaître. Il faut se rappeler que beaucoup des appelants ayant des déficiences ne sont pas aptes dans certains domaines. Dans ce cas, il peut arriver qu'ils ignorent les règlements et qu'ils aient à payer de l'impôt.
La présidente: John, vous voulez ajouter quelque chose?
M. John Young: Des consommateurs nous ont affirmé qu'ils payent de l'impôt sur le montant forfaitaire et que, si la compagnie d'assurance le leur demande, ils lui remettent l'argent. Ils reçoivent alors une lettre leur indiquant un manque à gagner parce qu'ils ont reçu des prestations pendant la période d'attente des prestations du PPI-RPC.
» (1730)
M. Reed Elley: Nous allons retourner à nos activités, chacun de notre côté, à 17 h 30. Aujourd'hui, je tiens à le souligner, les témoins ont beaucoup parlé de ce qu'ils ressentaient, et c'est une chance pour nous de recevoir ces témoignages. Nous partageons certains de ces sentiments, mais nous ne sommes pas dans votre peau. Je suis père d'un enfant handicapé, et je connais bien cette réalité. Cependant, je ne suis pas dans la peau d'une personne qui vit chaque jour la différence, qui veut simplement exister.
Traci, je voudrais répondre à votre élan du coeur. Si nous voulons régler un problème d'une telle ampleur, nous devons faire confiance à des visionnaires et à des gens plus pragmatiques. Vous faites partie de ces derniers.
Peut-être avons-nous entendu les visionnaires la semaine dernière, quand nous parlions de la situation générale et de la possibilité de changer le modèle. Nous cherchions à savoir s'il existait des méthodes plus efficaces, s'il était temps de faire un changement de paradigme, toutes ces choses qui intéressent les visionnaires. C'est un exercice essentiel.
Une partie du travail du comité consiste à voir plus loin, à assurer le leadership qui fait défaut à l'échelon fédéral. C'est le rôle de ce comité—assurer le leadership, dans la mesure du possible, et forcer le gouvernement d'agir. Ceux d'entre nous qui sont pragmatiques, vous par exemple—et certains membres du comité—affirment qu'il faut faire pression pour que les choses bougent tout de suite. Qu'il faut utiliser le système en place pour faciliter la vie des personnes handicapées.
Bref, deux voies parallèles mènent au même but. Le comité doit rester centré sur cette réalité. Nous avons à coeur de vous assurer notre collaboration pour faire avancer les dossiers. Si, après le budget de la semaine prochaine, la perspective reste sombre, nous discuterons ensemble des moyens à prendre pour donner une vitrine nationale à cette question, qui dépassera les limites de ce petit comité, si parfait, si rangé.
Mme Traci Walters: Ce serait un merveilleux présent. Encore mieux si, avant même l'annonce du budget, on commençait à voir poindre une forme de stratégie… Je me réjouis de vous entendre décrire ainsi le rôle du comité. C'est très rafraîchissant. Je suis heureux de constater que vous collaborerez avec les collectivités pour faire bouger le gouvernement fédéral.
Il m'arrive de ne plus savoir au juste. Si le comité confirme son rôle, c'est un très bon début. Il est très motivant de savoir où nous allons. Nous devons nous préparer—peut-être la semaine prochaine. Pourquoi n'avons-nous pas de plan commun, un plan conjoint entre le comité, si c'est votre rôle, et notre communauté?
Vos paroles me réconfortent. Merci.
La présidente: Oui.
M. Laurie Beachell: Madame la présidente, nous avons commencé en parlant de la situation canadienne. Si vous m'accordez encore une minute, j'aimerais brosser un portrait rapide de la situation internationale. Pour les personnes avec déficiences—les conflits et la guerre ont pour résultat d'augmenter le nombre des personnes handicapées. La paix et la déficience sont liées, puisque les conflits armés sont des interventions qui handicapent encore plus de personnes. Par conséquent, les sociétés qui les vivent ont encore plus besoin de moyens comme le RPC et d'autres mesures pour lesquelles elles devront se battre.
Nous aimerions que le Gouvernement du Canada et les partis politiques n'occultent pas ces conséquences quand ils réfléchiront à la conjoncture actuelle et à notre avenir dans les prochaines semaines ou les prochains mois.
Hier, Venus Ilagan, présidente de l'organisation mondiale des personnes handicapées, se trouvait à Ottawa. Vous et d'autres membres l'avez rencontrée, madame la présidente. Elle nous a rappelé à tous que cette question en est une qui touche la déficience, que la paix et les négociations en vue de concilier nos différences sont de loin préférables au largage de bombes sur des populations civiles ou militaires, peu importe leur allégeance.
Rappelons que les premières mesures de soutien aux personnes handicapées s'adressaient aux anciens combattants, qui continuent d'ailleurs de bénéficier de beaucoup de soutien. Si un conflit éclate, il faudra nous préparer à ce que nos programmes d'aide et de développement internationaux puissent fournir le soutien voulu aux pays en reconstruction. Nous devrons aussi nous préparer à fournir le soutien voulu aux Canadiens déployés à l'étranger, quelle que soit leur mission.
Nous espérons que nous n'en viendrons pas là. Ne perdez jamais de vue, dans vos délibérations et vos discussions, que de tels événements font augmenter le nombre de personnes handicapées, à qui il faudra offrir plus de mesures de soutien et de services, de même que plus de possibilités d'être des citoyens à part entière, quelle que soit la société dans laquelle ils vivront.
Je vous remets notre petit plaidoyer pour la paix. L'Organisation internationale des handicapés l'a adopté en 1983, lors de la réunion d'Hiroshima. Nous l'avons pour notre part adopté en 1987. Nous tenons à vous le rappeler aujourd'hui. Nous l'avons présenté à la table ronde, à l'assemblée publique organisée par le ministre Graham à Winnipeg vendredi dernier. Nous le présenterons à l'assemblée publique de Montréal la semaine prochaine. Nous demanderons aux personnes handicapées qui participent à des tribunes publiques de rappeler à tous les intéressés qu'il ne s'agit pas simplement de résoudre un conflit. La façon que nous choisirons pour le résoudre aura un impact énorme sur la société civile et sur la vie de chacun et leur accès à la pleine citoyenneté.
Merci.
» (1735)
La présidente: Merci beaucoup à chacun d'entre vous.
On ne pouvait rêver d'une meilleure conclusion. Je voudrais confirmer de nouveau le rôle du comité, qui doit faire tout en son possible pour permettre à tous les Canadiens de devenir des citoyens à part entière. Comme Laurie l'a souligné, la prévention fait aussi partie de notre rôle, qu'il s'agisse de sécurité au travail, de déficiences congénitales ou de la paix.
Je vous remercie tous. Comme toujours, cette réunion a été extrêmement édifiante. Merci à vous tous qui vous présentez ici, qui comprennent ce rôle très important du Parlement de demander des comptes au gouvernement. La raison qui a motivé et qui continuera, je l'espère, de motiver notre souci d'efficacité est l'importance que nous accordons à cette responsabilité, sans aucune partisanerie. Encore une fois, merci beaucoup.
La séance est levée.