SPER Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Sous-comité de la condition des personnes handicapées du comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 18 mars 2003
Á | 1125 |
La présidente (Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.)) |
Dre Dana Hanson (présidente, Association médicale canadienne) |
Á | 1130 |
Á | 1135 |
La présidente |
Dr Ashok Muzumdar (président, «Canadian Association of Physicians with Disabilities») |
Á | 1140 |
La présidente |
Dr Blake Woodside (président élu, Association des psychiatres du Canada) |
Á | 1145 |
Á | 1150 |
La présidente |
Dr Lisa Doupe (co-animatrice, «Round Table Project on Safe and Timely Return to Function and Return to Work») |
Á | 1155 |
 | 1200 |
La présidente |
 | 1205 |
Dr Hillel Finestone (physiatre, Centre de santé Elizabeth Bruyère) |
La présidente |
Dr Hillel Finestone |
 | 1210 |
 | 1215 |
La présidente |
 | 1220 |
M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne) |
La présidente |
M. Larry Spencer |
Dre Dana Hanson |
 | 1225 |
M. Larry Spencer |
La présidente |
M. Larry Spencer |
Dr Lisa Doupe |
M. Larry Spencer |
Dr Lisa Doupe |
Dr Lily Cheung (présidente sortante, «Occupational and Environmental Medical Association of Canada») |
 | 1230 |
La présidente |
Dr Ashok Muzumdar |
La présidente |
Dr Blake Woodside |
 | 1235 |
La présidente |
Dr Lisa Doupe |
La présidente |
Dr Hillel Finestone |
La présidente |
Dr Lisa Doupe |
La présidente |
M. Larry Spencer |
Dr Hillel Finestone |
 | 1240 |
M. Larry Spencer |
La présidente |
Dr Lisa Doupe |
La présidente |
Dr Lily Cheung |
La présidente |
Dr Lily Cheung |
La présidente |
M. Larry Spencer |
La présidente |
CANADA
Sous-comité de la condition des personnes handicapées du comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées |
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l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 18 mars 2003
[Enregistrement électronique]
Á (1125)
[Traduction]
La présidente (Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.)): Je m'excuse de mon retard. Nous avons ces drôles de règles qui font que lorsque nos motions sont présentées à la Chambre, il faut y être. Ils sont tellement rigoureux là-dessus.
Je m'excuse aussi que notre minuscule et parfait comité soit parfois plus minuscule que parfait, particulièrement alors que cette séance a lieu en même temps qu'une autre de l'immigration... Il semble que tous ces autres comités se réunissent à la même heure et présentent des motions. Des tas de choses se passent au sujet de la «démocratie en péril» ce matin. Donc, le fait que nous soyons si peu nombreux signifie seulement qu'il y aura un test pour ceux qui ne peuvent être ici; ils devront mémoriser le compte rendu. En plus du si fabuleux Kevin, de la Bibliothèque du Parlement, nous veillerons à ce que Bill Young soit averti qu'il devra passer le test, lui aussi, parce que nous savons qu'il ne revient pas du Mexique avant ce soir.
Nous tenons à vous remercier tous de votre participation et de tout ce que vous avez fait pour nous aider avec la version électronique de la consultation. Nous savons que beaucoup de vos membres, et toutes ces autres personnes que vous avez pu convaincre de participer à la consultation électronique l'ont fait. Nous reconnaissons en tous cas que certaines solutions qui ont été présentées sont spectaculaires, dont celles offertes par les groupes qui sont représentés ici ce matin.
Nous avons reçu plus de 1 300 réponses à la consultation électronique qui s'est terminée la semaine dernière, les unes pour parler de certains situations et d'autres de solutions. Nous en sommes donc très heureux. Il y a eu plus de 175 histoires, et je pense qu'il y a eu plus de 80 000 visites du site Web. Nous espérons ainsi démontrer que la première expérience de ce genre au Parlement est un succès. L'expérience est le seul terme que nous ayons été autorisés à utiliser—non pas projet pilote—parce qu'ils ne veulent pas qu'on s'habitue à cette idée.
Alors, je vous remercie encore.
Étant donné que nous avons que peu de temps, nous pensions peut-être qu'il vaudrait mieux entendre les présentations, puis passer aux questions. Êtes-vous d'accord? Voulez-vous commencer par entendre les témoins, puis nous passerons aux questions?
D'accord. Nous accueillons des témoins compétents et chevronnés qui, bien sûr, tiendront compte du peu de temps dont nous disposons.
Allez-y donc, docteure Hanson, de l'Association médicale canadienne.
Dre Dana Hanson (présidente, Association médicale canadienne): Merci beaucoup, madame la présidente. C'est un grand plaisir que d'être ici aujourd'hui et de témoigner devant vous.
L'Association médicale canadienne vous remercie de la possibilité que vous lui offrez de participer une fois de plus aux délibérations du Sous-comité de la condition des personnes handicapées. Je suis accompagnée de M. William Tholl, secrétaire général et chef de la Direction de l'Association médicale canadienne.
Avant de commencer, je veux d'abord féliciter le comité, et en particulier sa présidente, des efforts que vous avez déployés à l'égard d'un autre programme fédéral, celui du crédit d'impôt pour personnes handicapées. Il est certain que le rapport que vous avez produit en 2002 sur ce programme, intitulé «Un système plus juste envers les Canadiens» est à l'origine de certaines des mesures importantes que le gouvernement a prises dans le récent budget général au sujet des personnes handicapées. La création du comité consultatif technique sur les critères d'admissibilité et les 105 millions de dollars affectés sur les deux prochaines années pour améliorer l'aide aux personnes handicapées constituent à notre avis des progrès importants, et nous tenons à vous en remercier sincèrement.
L'AMC apprécie cette occasion de pouvoir discuter d'enjeux qui ont trait au Régime de pension du Canada, et plus particulièrement de la prestation d'invalidité. Mon intervention d'aujourd'hui portera avant tout sur trois aspects: d'abord, l'expérience des médecins avec les programmes et les formulaires fédéraux en matière de santé; deuxièmement, la nécessité de critères communs; et troisièmement les interventions recommandées.
Même si le sous-comité doit traiter aujourd'hui du programme de pension d'invalidité du RPC, nous sommes d'avis qu'il faut orienter davantage la discussion sur l'invalidité elle-même et les programmes fédéraux en général. Les enjeux liés au programme de pension d'invalidité du RPC sont communs à d'autres programmes fédéraux d'aide aux personnes handicapées.
Je n'ai pas besoin de parler au comité, je crois, des pénuries alarmantes de médecins et d'autres professionnels de la santé au Canada. Les médecins du Canada sont taxés à la limite, et plus encore. C'est pourquoi il importe plus que jamais de gérer le temps des médecins de façon à maximiser nos contacts avec les patients. Malheureusement, ce n'est toutefois pas ce qui se produit. Les médecins passent de plus en plus de temps à remplir des formulaires. Des formulaires pour les programmes fédéraux de santé comme le RPC ou pour des demandes de paiement d'assurance privée ou de prestations de pension, d'admissibilité au crédit d'impôt, de régimes d'assurance-médicaments et de demande d'indemnisation d'accident de travail, pour n'en nommer que quelques-uns. Pour comprendre les divers formulaires et déterminer l'admissibilité des intéressés, il faut presque être un médecin, avocat et fiscaliste.
La prolifération des formulaires et leur complexité croissante empiètent sur le temps que les médecins peuvent consacrer à la raison d'être de la formation qu'ils ont reçue, soit traiter la maladie et dispenser des soins aux patients. Si vous demandiez au médecin moyen de dire ses plus grandes frustrations face au système de santé, il vous répondrait qu'il passe trop de temps à administrer le système mais pas assez à dispenser des soins aux patients.
En ce qui concerne le RPC plus précisément, nous avons entretenu, auparavant, de bons rapports professionnels avec les dirigeants du programme. Nous avons su collaborer efficacement pour améliorer les formulaires et instaurer une grande intégrité dans le programme, ce qui a réduit le nombre des recours en appel. L'AMC est d'avis que comme programme fédéral de santé, le RPC est exemplaire, en ce qui concerne à la fois les processus administratifs et la coopération qu'il faudrait implanter dans tous les programmes fédéraux dans ce domaine.
Cela dit, il y a encore grande place à l'amélioration. J'exhorte le comité à tenir compte de l'effet cumulatif que ces divers programmes de santé, comme le RPC, ont sur nos effectifs de la santé. Il faut chercher des moyens d'alléger le lourd fardeau administratif des médecins afin de leur permettre de concentrer leurs efforts sur ce qu'ils font de mieux, soit dispenser des soins aux patients.
Tout comme nous l'avons fait dans le cas du Programme de crédit d'impôt pour personnes handicapées, l'AMC recommande d'appliquer des normes de justice et d'équité dans tous les programmes fédéraux de prestation pour personnes handicapées. Il y a actuellement pour ainsi dire une définition et un mécanisme d'évaluation distincts pour chaque programme. Un patient reconnu comme étant une personne handicapée dans le contexte d'un programme ne l'est pas dans celui d'un autre programme, ce qui est une source de frustration courante pour les médecins.
Lorsqu'on regarde certains des critères communs qui déterminent le niveau d'une incapacité, le problème est très évident.
Á (1130)
Dans les critères du RPC, «grave» signifie qui «empêche le requérant d'occuper régulièrement un emploi» et «prolongé» signifie un état qui doit «durer pendant une longue période ou qui risque d'entraîner la mort». Cependant, pour le programme du crédit d'impôt pour personnes handicapées, le mot «grave» signifie qu'une personne est «limitée de façon marquée dans une activité courante de la vie quotidienne» et l'incapacité doit être «prolongée», soit durer «au moins 12 mois d'affilée». Même si au nombre des activités courantes de la vie quotidienne on compte un emploi régulier, elles englobent beaucoup d'autres aspects.
Les critères du RPC prévoient qu'il incombe au médecin de déterminer la façon de définir le long terme: six mois ou douze mois. D'autres programmes, comme celui des prestations aux anciens combattants, avec leurs critères bien différents, s'ajoutent à cette mosaïque.
C'est une source de confusion pour les médecins, les patients et d'autres personnes qui interviennent dans le processus de demande. Si la terminologie, les critères et l'information qui concernent les programmes ne sont pas aussi clairs que possible, il est alors certain que les différences peuvent prêter à des interprétations erronées de la part des médecins lorsqu'ils remplissent les formulaires. Des requérants qui, en fait, devraient avoir droit aux prestations pourraient alors être désavantagés par inadvertance. Il faut uniformiser les définitions entre les divers programmes gouvernementaux.
Permettez-moi de préciser cependant que cela ne signifie pas que les critères d'admissibilité doivent être identiques. Il doit toutefois y avoir un moyen d'uniformiser davantage la démarche.
Sans une définition plus uniforme, on risque fort l'incohérence dans son application et son administration. Le fait est que certaines personnes qui ont des problèmes ou des incapacités peuvent avoir droit à la prestation d'invalidité du RPC dans une région tandis que quelque d'autre qui a le même problème n'y aura pas droit dans une autre région.
Il existe de nombreux problèmes qui seraient perçus dans la société d'aujourd'hui comme une «incapacité» mais pas par le programme actuel. Le critère de gravité et de durée est rigide, surtout lorsqu'on l'applique à certains problèmes médicaux. En réalité, il est impossible d'appliquer une telle norme de façon équitable dans toutes les situations. Il faut des critères beaucoup plus souples et plus réalistes qui tiennent compte de la nature particulière de certains problèmes médicaux qui ne répondent peut-être pas aux normes d'hier.
Les médecins du Canada soumettent quatre interventions précises au comité. La première est que l'on cherche avant tout à alléger le fardeau administratif imposé aux dispensateurs de soins de santé par tous les programmes fédéraux du domaine de la santé. Dans ce processus de consultation et d'administration, le programme du RPC devrait servir de modèle du changement. Contrairement à d'autres programmes fédéraux de santé, le programme-même prend charge de ce qu'il en coûte pour faire remplir les formulaires d'admissibilité par un médecin. L'AMC est d'avis que tous les programmes fédéraux du domaine de la santé devraient en faire autant.
Deuxièmement, que l'on établisse un groupe consultatif conjoint du gouvernement et des intervenants, semblable au Comité consultatif sur le CIPH, dont on a annoncé récemment la création, afin de suivre et d'évaluer le rendement du programme d'invalidité du RPC pour s'assurer qu'il est conforme à sa raison d'être et atteint ses objectifs officiels. Le groupe consultatif serait constitué normalement de dirigeants de programmes, de dispensateurs de soins de santé, de représentants de divers organismes de personnes handicapées et de groupes de défense des intérêts des patients.
Troisièmement, que l'on uniformise les définitions entre les divers programmes gouvernementaux, sans pour autant contourner la raison d'être ni le mandat de ces programmes.
Quatrièmement, que l'on crée, à l'intention des dispensateurs de soins de santé et pour le public, une trousse d'information détaillée qui décrirait chaque programme, ses critères d'admissibilité et l'éventail complet des prestations disponibles, et qui contiendrait des exemples de formulaires, de l'information sur les paiements des services nécessaires pour procéder à un examen médical et remplir des formulaires, etc.
En terminant, l'AMC est d'avis que le RPC constitue un avantage que méritent les Canadiens qui vivent avec une incapacité. Nous félicitons de nouveau le comité des progrès qu'il a réalisés pour le compte des personnes handicapées avec les initiatives récentes annoncées dans le budget fédéral. L'AMC est impatiente de collaborer avec tous les intéressés pour améliorer le programme du RPC et tous les autres programmes fédéraux du secteur de la santé qui s'adressent aux personnes handicapées.
Je vous remercie.
Á (1135)
La présidente: Merci, docteure Hanson.
Nous laissons maintenant la parole au Dr Muzumdar.
Dr Ashok Muzumdar (président, «Canadian Association of Physicians with Disabilities»): Merci, madame la présidente.
Je suis ici pour représenter la Canadian Association of Physicians with Disabilities, qui est une société affiliée de l'AMC. Je tiens à vous remercier de nous avoir invités.
J'ai déjà fait des présentations devant ce comité auparavant. Malheureusement, mon adresse de courriel s'est perdue quelque part, on dirait, ce qui fait que je n'ai reçu l'invitation qu'à la fin de la semaine dernière. C'est pourquoi j'arrive les mains vides.
Je vais faire une parenthèse un tout petit instant seulement. Vous vous êtes excusée de votre retard, et je pense que nous pouvons tous comprendre tout le travail que vous faites, en tant que députée. Mais ne vous inquiétez pas, en votre absence, nous travaillions. Nous dialoguions, et une motion a été présentée et appuyée pour que ce soit vous qui payiez notre repas ce midi.
Revenons aux choses sérieuses. Après l'éloquente présentation de la Dre Hanson, j'ai très peu de choses à dire, mais je suis d'accord avec la position de l'AMC en ce qui concerne la quantité de paperasserie. Je pense que la plupart des médecins ont horreur de remplir des formulaires—et en tant que médecin, vous le savez certainement vous-même. Tous les formulaires à remplir sur chaque patient sont chronophages et empiètent sur nos fonctions cliniques. Je pense que c'est un aspect de la situation.
L'autre chose, c'est le manque d'uniformité qu'on remarque, et dont a, encore une fois, parlé la Dre Hanson. On le constate très rapidement.
À ce sujet, j'aimerais vous faire une proposition que vous pourrez examiner.
C'est vrai que cela s'ajoute à la charge de travail des médecins et accroît la disparité entre la quantité de travail et le nombre de requérants dans le genre de travail que je fais, principalement pour le RPC, dans ma pratique clinique. J'ai pris ma retraite l'année dernière seulement, et au fil des années, j'ai constaté une transition dans la manière dont les choses se faisaient —et je suis d'accord que le RPC s'est amélioré, comparativement à certains autres ministères, comme les Anciens combattants et d'autres programmes de pension d'invalidité administrés par divers ministères fédéraux.
Ce que j'aimerais suggérer—et ce n'est qu'une proposition dont vous pourrez discuter plus tard peut-être—, c'est qu'il serait peut-être faisable de réunir tous les programmes d'invalidité sous une seule enseigne, sous la forme d'une espèce de sous-ministère? Je suis tout à fait conscient de la lutte pour les budgets et le territoire que tout ceci engendre, mais ce que je recherche, c'est la cohésion.
Comme le disait la Dre Hanson, «grave et prolongé» peut signifier deux choses différentes pour deux organismes différents, et c'est source de problèmes. Parfois, quelqu'un n'est pas admissible dans un secteur et est facilement accepté par un autre ministère, pour la même condition, selon la même évaluation. Si ce pouvait être sous une seule enseigne, avec un seul formulaire...
Disons qu'une demande est présentée en rapport avec le Régime de pensions du Canada, ou le ministère des Anciens combattants, ou quoi que ce soit d'autre. En haut du formulaire, après les renseignements sur le patient, la case pourrait être cochée et le reste des renseignements qu'il faut donner—je parle selon la perspective d'un médecin—pourraient être les mêmes. Le formulaire pourrait être simplifié pour recueillir les renseignements les plus pertinents pour un organisme qui va examiner le dossier d'invalidité et verser les prestations, et qui n'aura pas à traiter toutes sortes d'informations inutiles que contiennent certaines de ces formulaires.
Je ne pense pas que le gouvernement fédéral soit aussi coupable, sur ce plan, que peuvent l'être les compagnies d'assurance privées, avec leurs formulaires de trois ou quatre pages qu'il faut absolument remplir, comme je l'ai fait. Parfois, un seul patient se présente avec trois ou quatre formulaires différents—l'hypothèque, les versements sur la voiture, les prêts bancaires, toutes les choses de ce genre qui, je le soupçonne, ne relèvent peut-être pas tout à fait de l'autorité de votre comité.
Ce que j'aimerais, c'est qu'il puisse y avoir, au sein des programmes fédéraux, un simple article avec une définition uniforme, mais qui ferait que les critères pourraient s'appliquer si le ministère des Anciens combattants exigeait que ces critères doivent avoir un rapport avec le travail dans les Forces armées, ou la GRC ou quoi que ce soit d'autre, plutôt que dans la population générale, par l'entremise du RPC. Ces critères pourraient être appliqués; cependant, les similitudes de base pourraient servir à réduire au minimum la paperasserie et la perte de temps dont nous sommes si nombreux à nous soucier. C'est un aspect dont je voulais vous parler, à vous et aux membres de votre comité, madame la présidente.
La deuxième chose, c'est—et ce n'est que mon opinion sur le sujet, parce que d'autres pourraient ne pas être d'accord—je pense qu'il est fantastique d'avoir une société comme celle du Canada. En tant que Canadien naturalisé depuis près de 30 ans maintenant, je tire orgueil, tout comme d'autres Canadiens, du fait que notre pays est toujours en tête des autres, sur la liste que dressent les Nations Unies au moyen d'un sondage indépendant,à la lumière de plusieurs critères.
Á (1140)
L'une des choses qu'on remarque, c'est que lorsqu'il y a des programmes sociaux de cette nature, ils créent une culture de dépendance. Je parle de ces gens, qui... Je suis moi-même handicapé, en passant; je suis malvoyant, sans espoir de traitement. Mais, laissez-moi vous donner l'exemple de la SLA, la sclérose latérale amyotrophique, ou la maladie de Lou Gehrig, qui est, à moins qu'on soit... Pour bien des patients, le taux de mortalité est très élevé. Seulement 10 p. 100 des patients vivent plus de 10 ans. C'est un état grave, très handicapant, un mal progressif, mais tous les maux ne sont pas comme celui-là. Les douleurs lombaires aiguës peuvent handicaper un patient pendant un certain temps, mais avec des mesures de gestion, les médicaments, la physiothérapie et autres choses, leur état peut s'améliorer.
On remarque souvent, en dépit du fait qu'il y a des dispositions, en vertu du RPC, pour que la réévaluation se fasse périodiquement, que cela crée une culture où les gens finissent par se sentir très à l'aise: «Je reçois un chèque tous les mois, alors pourquoi retourner au travail?». C'est pourquoi il y a des éléments de dissuasion. Il devrait y avoir des incitatifs pour pousser les gens à retourner au travail, tout en leur offrant des moyens de protéger leur revenu.
Le deuxième aspect de ceci, c'est que les gens craignent toujours que s'ils font un essai—je pense que c'est en voie de changement d'après ce que j'entends—les prestations peuvent être stoppées. Les compagnies d'assurance sont maîtres dans cet art; elles ne perdent pas de temps pour retirer leurs billes du jeu dans ces cas-là. Si quelqu'un veut faire un essai, peut-être sera-t-il concluant, peut-être pas. Mais il n'existe aucune disposition, de façon formelle, pour qu'ils puissent faire un essai sur une période de trois mois. En cas d'échec, les prestations pourraient être rétablies sans pénalité.
Si ce genre de dispositions existaient dans tous les programmes de prestations d'invalidité, je pense que plus de gens retourneraient au travail. Un patient de 39 ans ne devrait pas avoir à recevoir des prestations lorsque son état n'est pas fatal, ni progressif, ou ne va pas s'aggraver pendant un certain temps. Il devrait pouvoir retourner au travail.
La dépression grave, bien que ce ne soit pas ma spécialité—je suis spécialiste de la médecine physique, physiatre de profession, et il y a d'autres physiatres dans la salle, notamment le Dr Finestone. À mon avis, quelqu'un qui souffre de dépression grave peut aller mieux améliorer et devrait pouvoir retourner au travail. Ce sont des dispositions qui pourraient être intégrées à la loi, pour que les gens ne soient pas pénalisés pour avoir tenté de retourner au travail, pour avoir essayé de s'en sortir, et il devrait y avoir des mesures de promotion de la capacité de retourner et de redevenir «contribuable» pour ainsi dire.
C'étaient les deux ou trois choses que je voulais porter à votre attention, madame la présidente. Je vous remercie beaucoup.
La présidente: Merci infiniment.
Docteur Woodside, vous avez la parole.
Dr Blake Woodside (président élu, Association des psychiatres du Canada): Merci beaucoup, madame la présidente.
Madame la présidente, membres respectés du comité, je suis Blake Woodside. Je suis le président de l'Association des psychiatres du Canada. Dans mes fonctions courantes, je dirige un programme de service aux hospitalisés à Toronto, qui offre des traitements aux personnes gravement malades qui souffrent d'anorexie mentale.
Je vous remercie de me donner cette occasion d'exprimer notre point de vue sur certains enjeux entourant la politique sociale et l'administration du programme, précisément en ce qui touche les personnes qui souffrent de maladies mentales.
J'aimerais en premier lieu féliciter le comité pour tout ce qu'il a fait jusqu'à maintenant pour recueillir les opinions des Canadiens sur ce programme, avec la table ronde préalable à l'étude et les consultations sur le Web. À en juger par votre rapport sur les consultations relatives au crédit d'impôt pour personnes handicapées, j'ai pleinement confiance que les points de vue des Canadiens qui sont exprimés devant vous seront bien représentés dans votre rapport et vos recommandations.
L'AMC a parlé de choses qui concernent tous les médecins et qui, en gros, ont rapport à l'administration du programme. Je concentrerai mes commentaires sur le programme en ce qu'il touche les déficiences psychiques et sur le rôle que jouent les psychiatres dans l'appui de ce programme.
Les personnes qui souffrent de maladies mentales sont en deuxième place sur la liste des bénéficiaires du RPC. Les cas de maladies mentales ont triplé depuis 10 ans et il est probable qu'ils continueront de se multiplier d'ici une vingtaine d'années, d'après les données disponibles sur le fardeau de l'incapacité attribuable à la maladie à l'échelle mondiale. Ceci s'applique tout autant aux sociétés d'assurance privées qu'aux systèmes publics comme le RPC.
Je vais parler de deux questions d'ordre général. D'abord, la politique sociale de soutien du revenu pour les personnes qui souffrent de troubles psychiatriques et les outils d'évaluation actuels pour mesurer un handicap et l'incapacité attribuables à la maladie mentale. Nous présenterons un mémoire plus détaillé dans les prochaines semaines.
Tout d'abord, où se situe le RPC, au plan du soutien du revenu des personnes handicapées par une maladie mentale? Le programme du RPC est l'un d'une série d'initiatives fédérales qui offrent un soutien aux personnes qui sont handicapées par une maladie mentale. Nous n'avons pas de données définitives sur la mesure dans laquelle la combinaison actuelle de programmes de soutien du revenu aide ces personnes. La multitude des programmes qui offrent ce genre de soutien complique l'évaluation pour savoir qui reçoit quoi et de quel programme.
Bien qu'environ 63 000 personnes qui souffrent de maladies mentales reçoivent chaque année un soutien du RPC—ce sont les données de l'année 2000—selon l'estimation la plus précise qu'on ait, 2 p. 100 de la population souffrent de maladies mentales, soit 600 000 personnes au Canada. Il est clair que, bien que le RPC soit un facteur important de soutien de ces personnes qui souffrent d'incapacités, il n'est que l'un des divers moyens de soutien.
Les Canadiens handicapés bénéficient généralement de trois catégories de protection du revenu. Les plus chanceux sont ceux qui sont protégés par un programme provincial d'indemnisation des travailleurs ou une assurance privée d'invalidité à long terme, ou encore les travailleurs autonomes qui souscrivent à une assurance privée. Ces gens-là sont les plus susceptibles de vivre au-dessus du seuil de pauvreté.
Quand on n'a pas d'assurance privée ou d'indemnisation des accidentés du travail, le RPC peut verser des prestations aux personnes qui ont travaillé suffisamment d'années donnant droit pension pour avoir droit à un paiement partiel ou maximum. Le programme d'assurance maladie de l'assurance-emploi permet de faire la transition de l'un à l'autre pendant les 17 premières semaines d'invalidité.
La solution par défaut, pour les gens qui n'ont pas la chance d'avoir des assurances privées ou d'être admissibles au RPC réside dans les divers programmes d'aide sociale des provinces, qui ne sont pas conçus pour offrir un soutien du revenu à long terme. Ces programmes ne sont pas bien coordonnés entre eux ou avec le système de santé dans son ensemble.
Il devrait aussi être reconnu que les maladies mentales, aussi distinctes soient-elles d'autres causes d'invalidité, se déclenchent tôt dans la vie, avant qu'une personne ait pu travailler assez d'années pour être pleinement admissible à des prestations du RPC. Ce désavantage relatif pour les personnes souffrant de maladies mentales devrait être tenu en compte.
Très clairement, tout le monde n'a pas le même accès au remplacement du revenu ou à la sécurité, bien des personnes souffrant de maladies mentales vivant sous le seuil de pauvreté, et il n'existe pas de stratégie nationale clairement établie pour régler ce problème. L'arrangement actuel de mesures disparates de soutien est déroutant pour les personnes handicapées et pour les psychiatres qui essaient d'aider les patients à accéder à des mesures de soutien auxquelles ils ont droit.
Avec quelle équité les demandes sont-elles traitées? Comparativement à d'autres catégories d'incapacité, les demandes liées aux maladies mentales semblent être approuvées à des taux similaires et, de façon générale, nous sommes assez convaincus que le programme traite les personnes qui souffrent de maladies mentales de façon équitable. Cependant, nous savons que l'évaluation des demandes de prestations pour déficience mentale est rendue plus complexe par l'absence de normes convenues d'évaluation de la déficience psychique et de l'incapacité psychique fonctionnelle.
Actuellement, le ministère n'a pas émis de lignes directrices exhaustives que les psychiatres pourraient appliquer pour organiser leurs rapports de manière à fournir l'information nécessaire pour évaluer une demande de façon appropriée. Le rapport narratif typique que fournit un psychiatre est conçu pour d'autres fins—c'est-à-dire le diagnostic et le traitement, et non pas l'évaluation de la déficience fonctionnelle et de l'incapacité.
La création d'un instrument d'évaluation, pouvant effectivement évaluer le niveau d'incapacité et le niveau de fonctionnement, pour mesurer l'incapacité, aiderait les psychiatres à mieux informer le ministère. Le rapport narratif habituel pourrait alors être un complément aux renseignements plus spécifiques qui sont fournis avec un tel instrument.
Ceci ne veut pas dire que les psychiatres n'ont pas suffisamment accès aux renseignements qui sont pertinents pour le ministère, mais plutôt qu'ils ont besoin d'aide pour extraire, de l'immense masse d'information dont ils disposent, ce qui est important pour le ministère.
Á (1145)
L'association serait heureuse d'aider le ministère à créer un instrument d'évaluation de l'incapacité relativement à la maladie mentale, un instrument qui comprendrait des critères clairs et fiables d'évaluation de l'incapacité et de la déficience fonctionnelle spécifique à la maladie mentale. Nous pensons que cet instrument devrait être distinct de celui d'évaluation de l'incapacité physique.
Nous avons deux recommandations à faire. La première est que l'actuel système disparate de remplacement et de soutien du revenu, pour les personnes qui ont une incapacité découlant d'une maladie mentale, devrait être transformé en un système cohérent de remplacement et de soutien du revenu. Les objectifs d'un tel programme seraient d'accroître la qualité de vie des personnes qui souffrent de maladie mentale, de fournir des occasions de réadaptation lorsque c'est possible et d'être clair et transparent, tant pour les personnes handicapées que pour les dispensateurs de soins.
Un tel programme serait partie intégrante d'une stratégie nationale sur la santé mentale et la maladie mentale dont nous avons déjà parlé, et il devrait prévoir le règlement des enjeux spécifiques au déclenchement précoce de la maladie mentale et aux effets qu'il a sur la capacité d'une personne de travailler à temps plein à n'importe quel moment de sa vie.
La deuxième recommandation est que des normes claires et transparentes soient établies pour l'incapacité et la déficience fonctionnelles, avec la conception d'un instrument d'évaluation de l'incapacité qui soit spécifique à la maladie mentale.
Merci beaucoup, madame la présidente.
Á (1150)
La présidente: Merci beaucoup.
Nous allons maintenant laisser la parole à la Dre Doupe, du Round Table Project on Safe and Timely Return to Function and Return to Work.
Dr Lisa Doupe (co-animatrice, «Round Table Project on Safe and Timely Return to Function and Return to Work»): Merci beaucoup.
Je m'appelle Lisa Doupe, et je codirige le Projet de table ronde de l'Ontario. Je suis accompagnée de la Dre Lily Cheung, qui est spécialiste de la médecine du travail et de l'environnement. J'ai aussi un bagage en médecine du travail et de l'environnement, la spécialité qui porte sur la relation entre le travail et la santé, et la santé et le travail.
Qui sont les personnes handicapées et que veulent-elles? Nous connaissons tous les statistiques. On estime que 3,6 millions de Canadiens—soit une personne sur huit—ont une incapacité. Mais allons au-delà des chiffres. Les personnes handicapées sont des humains. C'est «nous» et nous sommes «eux». Ces gens-là sont nos amis et nos proches.
Aujourd'hui, j'aimerais présenter trois aspects principaux. Tout d'abord, le système qui permet d'appuyer les personnes handicapées pour qu'elles reprennent les activités de la vie courante et du travail est dysfonctionnel. Nous avons créé un système chaotique. Le gouvernement fédéral peut assumer un leadership en mettant de l'ordre dans ce chaos au moyen d'un mécanisme de collaboration comme une table ronde nationale créée sur le modèle du projet de table ronde de l'Ontario.
Deuxièmement, 15 secteurs d'intervention en Ontario oeuvrent ensemble pour créer un meilleur système et tracer un cheminement clair, de l'incapacité à la capacité de fonctionner et de travailler. DRHC a fait un bon travail avec son programme des compétences et de l'apprentissage; cependant, les médecins n'ont pas appris à aider leurs patients à naviguer dans ce système diversifié et de plus en plus complexe. La priorité devrait être d'enseigner aux médecins à composer avec les processus administratifs et de leur inculquer les compétences additionnelles nécessaires pour aider leurs patients dans cet environnement de plus en plus complexe et chaotique.
Troisièmement, il y a de nouvelles connaissances qui aideront les intervenants à créer un système cohérent et fluide. Des recherches se font maintenant qui repousseront les limites de notre pensée au-delà de la gestion de l'incapacité pour aller vers la prévention de l'incapacité. Le gouvernement fédéral peut soutenir des projets, comme la création d'un outil commun d'évaluation ou un modèle de soins axé sur la prévention de l'incapacité, sur lesquels tous les intervenants peuvent être informés et auxquels ils peuvent participer.
Avant de commencer à décrire les problèmes du système actuel, je voudrais insister sur un aspect, celui de la reprise des activités fonctionnelles et du travail; ce n'est pas seulement une question de bonne gestion médicale; c'est vraiment un test qui détermine dans quelle mesure les systèmes travaillent bien ensemble. Le rôle traditionnel de la médecine a été de diagnostiquer et de traiter. Cependant, au milieu des années 90, la situation a changé lorsque des associations médicales de l'ensemble du Canada ont publié des politiques sur le rôle des médecins dans la reprise du travail. D'autres provinces ont aussi diffusé une politique à ce sujet.
Ceci a, dans le fond, redéfini le rôle des médecins pour, du diagnostic et du traitement, désormais inclure la facilitation du retour au travail des patients. Cette étape faisait le lien entre les attentes de la société à l'égard de la médecine et les politiques en matière de médecine. Lors d'un groupe de discussion organisé par l'OMA, des intervenants ont demandé quand la médecine allait adopter cette politique.
Cependant, pour que les médecins puissent vraiment stimuler la capacité de leurs patients de fonctionner dans le quotidien, et particulièrement sur le marché du travail, un système doit être refondu selon cet optique. Les secteurs intervenants sont les groupes qui appuient les personnes handicapées, soit directement, soit indirectement. Une liste de ces intervenants figure à la page 2 de mon mémoire. Je pense que vous en avez tous un exemplaire.
Les personnes et les organisations qui travaillent dans ces secteurs ont les plus louables des intentions. Ce sont de bonnes personnes, de bonnes organisations, qui veulent appuyer les personnes qui ont des incapacités. Malheureusement, les secteurs ont évolué et ils ont conçu et géré leurs politiques et leurs programmes de façon indépendante les uns des autres. Un résultat imprévu a été la création d'obstacles pour les personnes handicapées qui veulent fonctionner dans la vie courante et reprendre le travail. Que ce soit délibérément ou non, nous avons créé un système qui contribue à l'isolement social, à la discrimination en milieu de travail, à des difficultés économiques et à la pauvreté pour les personnes handicapées.
Dans mes fonctions de professionnelle de santé et d'ex directrice médicale chez General Motors of Canada, j'ai constaté de nombreux problèmes dans le système actuel. Il y a des lacunes dans les communications et dans la coordination des mesures de soutien du retour au travail. Il y a des doubles emplois. Les secteurs ne travaillent pas ensemble, il y a manifestement de grands retards dans le système. Des aides visuels ont été intégrés à la présentation pour illustrer le complexe chevauchement des programmes et des services qui sont fournis par deux paliers de gouvernement, provincial et fédéral, à quelqu'un qui essaye d'entrer dans le système. Et ceci n'illustre que deux des 15 secteurs.
D'après ma propre expérience, je pourrais donner de nombreux exemples du mauvais fonctionnement du système. Permettez-moi de vous raconter l'une des histoires entendues lors de notre table ronde la plus récente. Un jeune homme de la classe moyenne supérieure qui a des parents qui l'appuient beaucoup—sa mère était infirmière, son père est un PDG à la retraite—a été battu dans la rue et a subi, en conséquence, une lésion cérébrale acquise.
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Il a fallu au père et à la famille plus de cinq ans et 18 évaluations pour finaliser le dossier, et ils n'y sont parvenus qu'en faisant appel au système juridique, et pourtant, le père ne connaît toujours pas tous les programmes publics qui sont à sa disposition pour aider son fils composer avec son handicap permanent. De fait, il vient sûrement d'entendre parler d'un autre programme qui existe alors qu'il assistait à une table ronde, en février.
Les problèmes recensés, que pose le système actuel, sont un défi pour des personnes saines qui ont la chance d'avoir toutes leurs capacités, alors imaginez ce que c'est pour un patient qui n'a aucun soutien ou qui vit avec un problème de santé mentale. Pouvez-vous imaginer la frustration, le désespoir et la confusion que ressentent ces patients et leur famille alors qu'ils tente de s'orienter dans le labyrinthe pour obtenir ce que bon nombre d'entre nous prenons pour acquis, soit la pleine intégration en tant que citoyen dans la société canadienne?
L'Association médicale canadienne et le milieu de la recherche ont toujours insisté sur la nécessité de collaborer pour créer un meilleur sous-système. En 1997, la Dre Judith Kazimirski, qui était alors la présidente de l'AMC, a écrit que l'élaboration d'une approche canadienne pour le retour au travail des travailleurs blessés devrait avoir la participation des médecins, des travailleurs, des employeurs et du public dans le cadre d'un système équitable et efficace qui contribue à la productivité économique du pays.
C'est aussi en 1997 que John Frank et une équipe de chercheurs de l'Institut de recherche sur le travail et la santé a écrit que d'après les données recueilles, une approche décousue pour prévenir l'incapacité, une approche qui n'est fondée que sur un intervenant ou qui ne porte que sur un aspect de l'incapacité et ne cible que des facteurs sous-jacents ne sera pas efficace.
Est-ce que les intervenants veulent collaborer pour créer un meilleur système? Oui, absolument, et ceci m'amène à mon deuxième argument. Le succès du projet de table ronde de l'Ontario est la preuve que les secteurs d'intervention veulent effectivement oeuvrer ensemble. Les objectifs du projet de table ronde sont ambitieux. Il s'agit de transférer les connaissances, de faciliter les relations de coopération et de détecter les projets et aider à les soutenir pour une reprise sûre et opportune des activités fonctionnelle et du travail.
En 1998, les représentants de huit secteurs d'intervention ont assisté à la première rencontre du projet de table ronde. La plupart d'entre eux, bien qu'ils travaillaient sur le même sujet, ne connaissaient pas l'existence les uns des autres.
À la deuxième rencontre, en 1999, les représentants de 11 secteurs ont démontré qu'ils pouvaient oeuvrer ensemble pour développer une vision et des priorités. La vision qu'ils ont formulée vise à améliorer les systèmes qui aident les personnes qui vivent avec la maladie, des blessures ou des incapacités, quelle qu'en soit la cause, pour constituer et assurer leurs autonomies sociale, personnelle et économique et pour aider les intervenants dans le domaine à cerner et à abattre ensemble les obstacles.
Lors de la troisième rencontre, qui a eu lieu en février, tout juste, les représentants de 15 secteurs d'intervention ont réaffirmé la vision et ont reconnu la nécessité de renforcer cette approche de table ronde et de travailler ensemble à la réalisation des projets. Les intervenants n'en sont encore qu'au premier stade de leur collaboration pour aider à créer un meilleur système.
Le processus est fragile. Les intervenants n'ont pas un long passé de bonne collaboration. Sur le plan pratique, comment peut-on travailler ensemble lorsque certains secteurs ont, depuis toujours, appliqué un point de vue étroit et égoïste en insistant notamment sur la réduction des coûts ou en laissant aux autres le soin de régler les problèmes? Le défi consiste maintenant à créer une organisation pour tous les secteurs. Chaque secteur doit s'engager dans la vision et se rappeler des avantages, mais aussi de la douleur des gens que nous sommes censés servir. Personne n'a toutes les réponses; nous devons chercher ensemble des solutions.
Les intervenants peuvent-ils collaborer? Le Physician Education Project in Workplace Health est un autre exemple d'initiatives à intervenants multiples pour la reprise des activités fonctionnelles et du travail. Le projet a commencé comme une initiative de l'Ontario Medical Association en matière de médecine du travail et de l'environnement, et de l'Institut de recherche sur le travail en santé, en 1994. L'organisme avait été cofondé par Lily Cheung et moi-même. Selon notre vision, le groupe intégrerait les politiques de reprise du travail des associations médicales canadiennes et ontariennes au rôle du médecin dans le retour au travail après une maladie ou une blessure. La mission du projet est d'améliorer l'éducation médicale en Ontario en ce qui concerne le travail et la santé et à mieux apparier les connaissances, les compétences et les comportements des médecins avec les besoins de patients.
En conséquence, la médecine du travail est maintenant l'une des matières enseignée aux étudiants de premier cycle en médecine dans les écoles de médecine de l'Ontario. Des progrès ont été faits dans ce domaine, et maintenant nous sommes en pleine discussion relativement à une stratégie nationale pour éduquer tous les médecins sur ces questions, et non pas seulement les étudiants de premier cycle.
D'après des résultats préliminaires, l'éducation des médecins en matière de questions de santé et de travail est rentable. En 2001, un cours de gestion de deux jours sur incapacité a été donnée à 29 médecins du Nouveau-Brunswick, au coût de 30 000 $. Après sept mois, les économies totales estimatives pour le système d'indemnisation des accidents du travail se chiffraient à environ 154 000 $, pour seulement 44 requérants.
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J'en arrive à mon troisième argument. Nous avons maintenant de nouvelles connaissances qui aideront les intervenants à créer ce système cohérent et fluide. Des recherches ont été faites, maintenant, qui nous aideront à réfléchir pour, au-delà de la gestion de l'incapacité faire la prévention de l'incapacité. L'un des secrets les mieux gardés de la décennie écoulée est le modèle de prévention de l'incapacité dont les pionniers ont été le Dr Patrick Loisel et son équipe, à l'Université de Sherbrooke. Le modèle PREVICAP a été élaboré et a donné des résultats positifs non seulement au plan de la reprise du travail mais aussi de la qualité de vie, de la comparaison des coûts-bénéfices et de l'efficacité.
D'après la preuve que fournit le modèle PREVICAP, je voudrais aussi recommander que, dans tout nouveau système, les employeurs soient encouragés à empêcher les incapacités et à promouvoir le bien-être. Nous en savons assez maintenant pour ne pas nous contenter de la simple gestion d'incapacité.
L'Organisation mondiale de la santé passe maintenant d'une perspective d'incapacité à une perspective de capacité. D'après cette nouvelle approche de l'Organisation mondiale de la santé, je recommanderais que tout nouveau système fasse la promotion des activités fonctionnelles et de la capacité plutôt que de l'incapacité. En outre, la recherche nouvelle, effectuée par l'Institute of Health and Productivity Management, confirme maintenant quelque chose que nous avons toujours su de façon intuitive, à savoir que la santé de la personne et son fonctionnement conduisent à la productivité économique.
Cet accent sur l'activité fonctionnelle donnera une raison économique au gouvernement de voir les personnes handicapées comme un atout, un capital humain, plutôt qu'un coût. Si nous pouvons améliorer la santé et la productivité de toutes les ressources humaines et faire de la santé des employés un atout au lieu d'un handicap, nous pouvons alors, en tant que pays, bénéficier des avantages que donne une population plus saine et plus productive. C'est là qu'une bonne politique sociale fait la jonction avec une bonne politique économique.
Nous avons de nouvelles données et connaissances importantes. Nous avons aussi la volonté des intervenants du projet de table ronde. L'étape suivante consistera à faire l'inventaire du système ensemble de manière à créer dans notre esprit collectif une voie claire pour passer de l'incapacité au fonctionnement et au travail, et en faire une réalité. Cette voie claire part de l'insistance sur la capacité plutôt que sur l'incapacité. C'est dans ces deux directions que vont la nouvelle pensée et la recherche.
Notre vision à long terme est que le gouvernement fédéral ou les gouvernements provinciaux devront créer une approche centralisée, un service central ou un bureau comparable au Homeland Security américain, qui aura l'unique responsabilité de coordonner le processus et les résultats de la reprise des activités fonctionnelles et du travail pour tous les citoyens canadiens.
En conclusion, je voudrais réitérer quelques éléments. Nous savons, d'abord que, le système de soutien aux personnes handicapées pour qu'elles retournent à des activités et dans leur milieu de travail ne fonctionne pas. Le gouvernement fédéral peut jouer un rôle déterminant pour résoudre cette problématique. En Ontario, 15 intervenants sont disposés à collaborer pour créer un meilleur système, comme l'indique le projet de table ronde de l'Ontario et le projet d'éducation des médecins. Le gouvernement fédéral doit appuyer ces projets très valables.
Enfin, utilisons l'énergie des intervenants pour construire un système global. Il nous faut l'appui du gouvernement fédéral à ces projets. Ceci contribuera à créer une voie claire afin de passer de l'incapacité à la capacité et à aider ceux qui n'ont pas la capacité. Les avantages d'un meilleur système de reprise du travail donneront lieu à une activité fonctionnelle améliorée, à une meilleure santé et à plus de productivité à tous les niveaux, soit au niveau de l'individu, de l'organisation, de la collectivité et du pays. Le processus doit appuyer l'individu.
Je vous remercie.
La présidente: Merci beaucoup.
Nous allons maintenant laisser la parole au Dr Finestone, du Centre Elizabeth Bruyère.
 (1205)
Dr Hillel Finestone (physiatre, Centre de santé Elizabeth Bruyère): J'ai décidé de donner une présentation PowerPoint. Est-ce que tout le monde peut bien voir?
La présidente: Oui. Allez-y.
Dr Hillel Finestone: Je suis physiatre—c'est-à-dire spécialiste de la médecine physique et de la réadaptation—et chef de département, et je travaille aussi à l'université. Le Régime de pensions du Canada me demande de temps à autre d'évaluer le degré d'incapacité d'un patient.
Comme je me doutais qu'il y aurait déjà eu des «macro» analyses, j'ai adopté une approche plus «macro»—plus axée sur le processus en vigueur et les responsabilités des médecins en ce qui concerne le Régime de pensions du Canada.
J'ai l'intention de souligner les enjeux spécifiques qui touchent aux responsabilités des médecins lorsqu'ils évaluent et déterminent l'incapacité des patients pour le compte du Régime de pensions du Canada. J'ai pensé qu'il serait bon de présenter un cas typique.
Certains des dilemmes que connaît un médecin viennent de ce qu'il doit déterminer qui est admissible aux prestations et son rôle, en tant que médecin, dans ce processus.
Le cas que nous présentons est un cas de tous les jours, un parmi tant d'autres. Comme je pratiquais ma profession, auparavant, dans le sud-ouest de l'Ontario, j'ai décidé de continuer. Je suis à Ottawa depuis quelques années.
Je vous présenterai le cas d'un homme de 51 ans qui est arrivé au Canada en 1971 d'un pays de la Méditerranée, avec de grands projets. Il a immédiatement trouvé du travail comme maçon. Il n'a pas eu besoin de suivre des cours ou d'apprendre l'anglais, parce qu'il est plongé dans sa profession, il est occupé 15 heures par jour, et il réussit très bien.
Après 30 ans de métier, il tombe d'un échafaudage. Il se blesse le dos. Les radiographies sont normales. Il n'y a pas besoin d'opération chirurgicale, mais il souffre de douleurs lombaires chroniques et incapacitantes. Il demande à son médecin de famille: «Docteur, pouvez-vous remplir ces formulaires du Régime de pensions du Canada pour que j'obtienne des prestations?». Il est malheureux. Il veut retourner au travail, mais il ne voit vraiment pas comment il le pourrait.
Nous allons aller un peu plus loin. Voyons certains de problèmes, spécifiquement—non pas seulement pour ce cas-là, mais nous essaierons d'établir un lien avec lui. Voyons certains enjeux spécifiques qui entrent en compte lorsqu'un médecin fournit son aide en ce qui concerne la détermination de l'incapacité. Plusieurs facteurs pourraient avoir un rôle dans l'évaluation du même dossier dans des centaines de milliers de bureaux du Canada et, au bout du compte, dans la manière dont la documentation sera remplie.
Quels sont ces enjeux? Je pense qu'il pourrait y avoir un peu plus d'ordre, mais quand il n'y a que deux semaines... Je parlerais probablement en termes d'«interne» et d'«externe» pour la classification. Mais précisément, en termes d'enjeux médicaux, lorsqu'il y a des statistiques spécifiques sur des blessures spécifiques—par exemple il y en a une que nous appelons «lombalgie sans fracture»—nous savons qu'il y a des recherches spécifiques qui ont conclu que si quelqu'un a des problèmes lombaires qui l'empêchent de retourner au travail—il y a des données du Québec, par exemple, recueillies dans le cadre d'une analyse médicale de la documentation, selon lesquelles les chances que cette personne puisse reprendre le travail dans les six mois sont très minces.
Il y a des enjeux personnels, avec le médecin et son évaluation de cette personne qui est devant lui dans son cabinet. Il peut avoir un proche qui souffre d'une incapacité spécifique; il peut aller régulièrement au travail souffrant lui-même de douleurs chroniques au dos. Ceci influence son évaluation et c'est quelque chose que nous devons accepter. C'est la réalité.
Il y a des enjeux juridiques et sociaux qui entrent en compte dans l'évaluation du médecin, et le médecin moyen qui reçoit cette documentation envisage tout ce que cela implique. Je ne pense pas qu'il s'inquiète tellement d'être poursuivi pour ne pas avoir fait ce qu'il fallait, mais il y eu des problèmes, quand des patients ont fait le pied de grue devant des cabinets de médecins avec des affiches parce qu'un médecin refusait de reconnaître une certaine incapacité. Je n'aime pas l'expression «céder», mais elle est le pendant du genre de pression qu'exerce la société: «excessivement fortes».
En tant que défenseur, en tant que médecin responsable devant la société—je pense que dans cette situation, il est vraiment impossible de défendre la position de la société, et je ne pense pas que ce soit nécessairement une question d'être un défenseur. C'est une question de représenter l'incapacité de façon aussi objective que possible.
Entre autres enjeux, ce qui m'intéresse, par exemple, ce sont les enjeux du point de vue épidémiologique. Par exemple, je pense que les médecins—et nous en parlerons plus tard—ont besoin d'en savoir plus sur le pronostic et l'épidémiologie. Qu'arrive-t-il aux travailleurs de la construction, aux manoeuvres, aux maçons? Combien d'entre eux parviennent à travailler jusqu'à l'âge de la retraite, à 65 ans? J'ai essayé de trouver de la documentation sur le sujet, et elle est très rare. D'après des sondages qu'ont effectués mes collègues, il semble que le manoeuvre moyen n'atteint pas vraiment l'âge de 65 ans, ou c'est plus rare.
 (1210)
Donc, avec cette information en main, nous pouvons prendre de meilleures décisions parce que nos attentes seront, peut-être, moins grandes.
Il a été question de facteurs psychologiques. Je désigne plus, par là, les séquelles psychologiques d'un état d'incapacité chronique et la manière dont cet état peut amplifier, peut-être, un problème primaire, à moins que l'état primaire soit un problème psychologique. Je ne parle pas de simulation, parce que je ne pense pas que cela constitue un facteur important dans l'évaluation de l'incapacité, mais il est certain que nous devons tous y être sensible.
La dépendance sur les médecins, pour les évaluations non-médicales, est un autre problème. Nous sommes maintenant inondés de toutes sortes d'évaluations. Par exemple, on peut amener quelqu'un dans une pièce et lui dire de poser des briques dans un environnement qui est peut-être plus chaud, et on l'observe. Il y a toutes sortes d'évaluations avec toutes sortes noms, évaluation des compétences fonctionnelles, évaluation des capacités fonctionnelles, etc.
Les représentants du Régime de pensions du Canada m'ont demandé comment je les perçois, comment les médecins les abordent. Eh bien, on y a beaucoup recours, mais si vous regardez la documentation scientifique, elle ne sert pas à grand chose parce qu'il n'y a pas de solides données scientifiques pour l'étayer, même si des millions de dollars ont été dépensés.
Elles sont souvent utilisées, je trouve, de façon très péjorative—vous savez, les patients sont limités par la douleur. Autrement dit, ils ne peuvent faire quelque chose, alors ils se plaignent excessivement de leur douleur. Malheureusement, cela ne sert pas vraiment à grand-chose, si on pense au rôle de la douleur, pour faire nos évaluations de l'incapacité, bien que ça puisse aider.
Les restrictions par opposition à la détermination de l'incapacité. Je pense que c'est un problème. Je parle du fait que pour le Régime de pensions du Canada, les médecins doivent vraiment s'engager et faire une déclaration d'incapacité ou non. Et je pense que c'est juste. Je pense qu'il y a une dichotomie, ou une espèce de schisme avec les autres organisations qui nous demandent spécifiquement de ne pas faire ce genre d'évaluation définitive de l'incapacité.
Par exemple, nos collègues de la Société des postes... la documentation qui est fournie aux médecins dit spécifiquement que ce n'est pas un diagnostic qui est voulu, qu'ils ne veulent pas savoir ces choses-là, ils veulent seulement qu'on leur dise ce que la personne peut et ne peut pas faire, et la Société canadienne des postes prend le reste en charge.
L'Association médicale canadienne, pour être juste, a indiqué certaines restrictions. Autrement dit, il incombe aux médecins de dire que vous pouvez vous pencher, que vous pouvez soulever une charge d'une certaine manière, mais c'est à l'industrie, à l'employeur de déterminer l'incapacité.
Vous le voyez sur ma diapositive, je pense tout de même que quelqu'un doit le faire, et je pense que c'est une bonne chose de transmettre la responsabilité. C'est une bonne idée de faire participer l'industrie et l'entreprise, mais je pense tout de même que le médecin, actuellement, est capable—même s'il n'est pas toujours équipé pour le faire—de déterminer l'incapacité et qu'il doit jouer un rôle important dans le processus de détermination de l'incapacité.
La définition de l'«incapacité» relève du médecin, parce qu'on nous fournit des définitions d'incapacités. Cela semble très clair à première vue, comme d'autres personnes l'ont dit ici, comme quoi ce devrait être un état prolongé ou grave, qu'une personne ne devrait pas pouvoir travailler. Mais comme le dit ce document qu'on m'a fourni en préparation de l'audience—le sondage sur l'avenir de la question de l'incapacité du Régime de pensions du Canada—il y a d'autres facteurs importants, comme l'âge de la personne, son secteur d'emploi, si elle est dans une ville où il n'y a qu'une compagnie ou dans une industrie qui est en difficulté, ses compétences comme, par exemple, si c'est un ouvrier qui souffre de douleurs lombaires spécifiques. Quelqu'un comme ça aurait une incapacité plus grave qu'un employé de bureau, dont le bureau pourrait être adapté, même s'il a exactement les mêmes blessures physiologiques.
Ces facteurs n'ont pas été recensés en tant que tels. Ils sont indiqués, dans ce document, comme jouant un rôle important dans l'incapacité.
J'ai ajouté ceci, un peu par plaisanterie. Je pense que nous devrions avoir une photo, parce qu'on nous demande encore «Est-ce qu'il peut encore être gardien de parcs de stationnement?» On nous la pose encore en bout de ligne, ce qui force le médecin à faire une affirmation alors que, comme on le voit, il y a tellement d'autres facteurs. Je pense que nous devrions laisser tomber cette question.
Voici la dernière partie de mon exposé. Selon moi, elle illustre certains des pièges des déterminations que fait le médecin quotidiennement. On nous a demandé, dans certains des documents, si les critères du Régime de pensions du Canada devraient être élargis, est-ce que la réadaptation devrait être offerte, est-ce que le travail à temps partiel devrait être permis? J'ai été très impressionné que ces questions soient posées dans un tel document.
Je pense que ce sont des enjeux de la société, et ce n'est certainement pas dans un exposé de sept minutes, ici, que je vais en discuter, mais je pense que la réadaptation devrait certainement être offerte.
Comme je l'ai dit ici, je suis spécialiste de la réadaptation. Lorsque nous faisons un traitement de réadaptation ou y participons, pour un patient qui a eu un accident cérébral ou une blessure musculo-squelettique, il faut un effort intense, que déploient de multiples disciplines. Il est certain que le médecin n'est que l'un des éléments de cette équipe. Il y a souvent des physiothérapeutes, ou des thérapeutes du travail, des psychologues, des diététistes, des travailleurs sociaux et, comme vous le voyez, des conseillers en orientation professionnelle.
 (1215)
Comme l'indiquait ce document du Dr Young—et je pense que c'était un bon document—sur les questions relatives à l'incapacité, l'accès aux prestations d'invalidité est compliqué et, actuellement, difficile à... Par exemple, j'ai un peu plus de chance, puisque je suis associé à un centre de réadaptation, mais même alors, c'est difficile, et certainement pour le médecin de famille moyen, c'est très compliqué à négocier.
Vraiment, il nous faut reconnaître—et je pense que c'était un excellent forum, que tous les médecins ne s'entendront pas toujours sur ce qui constitue une incapacité et ce qui constitue l'incapacité totale. Nous pourrions faire un sondage parmi les membres de l'Association médicale canadienne... et ce sera différent, et nous savons que différents médecins ont souvent un parti pris, que certains donnent des avis plus favorables aux compagnies d'assurances, et d'autres sont plus favorables aux «plaignants de cabinets juridiques». Je pense que le Régime de pensions du Canada en est conscient et essaie de trouver les personnes avec lesquelles il est plus à l'aise pour traiter.
Enfin, y a-t-il des solutions? Je pense qu'il y en a et que nous pouvons être optimistes. Je pense que vous devez reconnaître plus largement les maladies mentales émotionnelles. Je pense que c'est un des problèmes. L'Association des psychiatres du Canada y a fait allusion, et aussi aux séquelles de la dépression qui s'installe chez une personne qui ne travaille pas, et comment cela peut même contribuer à aggraver l'incapacité.
Je pense que l'épidémiologie est quelque chose dont il faudrait s'occuper, et je pense que le Régime de pensions du Canada peut y jouer un rôle, pour déterminer spécifiquement les pronostics de diverses populations, ou sous-groupes. Par exemple, le groupe de maçons de M. S— on a besoin d'eux, nous n'en avons pas assez, et les médecins ont besoin de plus les consulter. Mais l'information, je pense, pourrait exister.
Je demande que le Régime de pensions du Canada s'efforce d'être aussi spécifique que possible en ce qui concerne l'information fournie aux médecins, parce que, par exemple, si la définition de l'incapacité de travailler n'est pas quantifiée autant que possible sur le formulaire même—et il y a certaines informations, mais elles ne suffisent pas actuellement—si nous ne pouvons pas fournir cette définition, alors, on ne peut pas s'attendre à ce que les médecins assument ce rôle.
Revenons à notre exemple, M. S. Peut-il travailler? Peut-il recevoir une nouvelle formation à l'âge de 51 ans? Peut-il raisonnablement apprendre à lire et à écrire l'anglais maintenant? Quelle est l'épidémiologie des manoeuvres de 51 ans une fois qu'ils ont été blessés? Voilà certaines des questions qui se posent. Je pense que nous pouvons trouver certaines des réponses.
J'ai dit que je pourrais parier ici qu'il satisfait aux critères du Régime de pensions du Canada en matière d'incapacité. Dans la situation actuelle, je l'appuierais, lui. Je vous remercie.
La présidente: Merci beaucoup.
C'était très intéressant—et probablement que Larry pourra nous aider—mais je pense que ce qui est arrivé, avec toute la série de tables rondes, c'est que le comité essaie de répondre aux questions suivantes : Y a-t-il des mesures à long terme que nous pourrions prendre pour régler le système maintenant de manière à ce qu'il soit plus juste, plus flexible, etc.? Y a-t-il des mesures à long terme que nous pourrions prendre, relativement à la prévention, pour l'intégration, d'après ce qu'ont suggéré certains universitaires autrement qu'en termes d'incapacité? Alors de quoi parlons-nous réellement pour ce qui est d'avoir une approche plus uniforme et plus intégrée de façon générale?
Je ne sais pas, Lisa, si les autres témoins ont vu ma diapositive préférée... Avez-vous tous vu la diapositive de la Dre Doupe, celle des 2 sur 15? L'avez-vous vue?
Comment quelqu'un pourrait-il trouver son chemin dans ce labyrinthe du système, cela me dépasse, et ce n'est que 2 sur 15; on ressent la même chose que dans nos cabinets, tous les jours, ne sachant ce qu'on peut faire. À la table ronde de février, ce couple m'a ramenée au centre-ville après le dîner. Quand on se rend compte que ces gens-là font des démarches depuis un an et demi et ne connaissent toujours pas certains des programmes qui sont disponibles, ce qui fait qu'il y a tout ce problème des gens qui ne savent pas exactement à quoi ils ont droit, c'est terriblement triste.
M. Spencer nous aidera avec... Aussi, je pense que nous pourrions espérer d'une table ronde comme celle-là, surtout avec les deux groupes que nous réunissons—et je pense que M. Spencer sera d'accord avec moi—que si quiconque veut faire un commentaire, ou s'il y a des questions à poser à une autre... Parce que je pense que des fois, ce que l'AMC est autorisée à dire... mais il est intéressant de savoir ce que vivent quotidiennement les thérapeutes du travail.
 (1220)
M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente. C'est merveilleux d'avoir ce minuscule et parfait petit comité.
La présidente: Vous voyez, vous l'avez inspiré.
M. Larry Spencer: Il faudra que je dise ça à ma femme. Je suis minuscule et parfait.
J'ai trouvé certains de vos commentaires très intéressants, surtout que j'ai examiné les conclusions de l'étude sur le crédit d'impôt pour personnes handicapées, et aussi de voir les définitions contradictoires, ici, pour le régime d'invalidité du RPC, comparativement au crédit d'impôt pour personnes handicapées. Permettez-moi de revenir là-dessus.
Le Dr Finestone a dit, et quelqu'un d'autre l'a confirmé, que le but, pour verser ces prestations d'invalidité du Canada, c'est de savoir s'ils peuvent travailler. Par contre, l'objet du crédit d'impôt pour personnes handicapées est de savoir s'ils peuvent rester en vie. Ensuite, ils se contredisent en disant que quelqu'un qui peut très bien rester en vie et même travailler, comme le Dr Muzumdar avec sont handicap visuel, peut très bien travailler. Bien des handicapés visuels peuvent très bien travailler, mais sont tout de même admissibles à un crédit d'impôt pour personnes handicapées. Tandis que M. S.—et en passant, c'est moi, je suppose—ne peut pas travailler et serait tout de même admissible selon une partie de votre définition, il ne peut pas exercer son métier mais il peut encore faire quelque chose, peut-être, mais il ne serait pas admissible à l'autre, parce qu'il peut très bien vivre.
Donc, lequel de ces critères correspondrait, selon vous, à votre définition? Pensez-vous que le crédit d'impôt pour personnes handicapées est plus près de la définition juste, ou pensez-vous que celle-ci, qui dit que la capacité de travail est une fonction primaire de la vie, est-ce ce dont nous devons tenir compte?
Dre Dana Hanson: Nous devons d'abord examiner deux éléments, selon moi. Premièrement, nous devons voir où en est rendue la science. Je conviens avec le Dr Finestone que la science est encore en évolution quand il s'agit d'établir ce qu'est une incapacité sur le plan technique. Nous devons examiner comment nous mesurons une incapacité et comment nous pouvons le faire, en nous appuyant sur les méthodes utilisées depuis le début du programme. Nous devons élaborer des mécanismes qui nous permettent de tenir compte des nouvelles façons de faire, des différents moyens d'évaluer les personnes, et de nous assurer que ces méthodes sont raisonnables. C'est ce que nous devons faire d'abord.
Ce que nous devons faire ensuite concerne votre deuxième question à propos de la meilleure définition. Je crois que nous devons examiner le but du programme et voir comment la définition s'applique à celui-ci. En même temps, nous devons nous demander quel est le but du crédit d'impôt pour personnes handicapées et celui du Régime de pensions du Canada. Si les buts sont différents, je crois qu'il faut...
Comme nous l'avons dit dans notre mémoire, nous ne devrions pas uniformiser; chaque programme a son propre but. C'est pourquoi nous devons faire preuve de souplesse, comme la Dre Bennett l'a signalé à de nombreuses reprises. Nous devons voir quelle est la meilleure façon de faire étant donné le but du crédit d'impôt pour personnes handicapées.
 (1225)
M. Larry Spencer: C'est vrai, mais le crédit d'impôt pour personnes handicapées vise à assurer la capacité de payer des impôts. Nous avons trouvé plutôt drôle que l'incapacité de travailler n'ait aucune incidence négative sur la capacité de payer des impôts.
J'ai deux autres questions à poser. Je ne veux pas enlever du temps aux autres membres du comité, alors je vais faire vite.
La présidente: Allez-y. Je dois avouer qu'on est sur le point de me faire revenir à la Chambre.
M. Larry Spencer: J'ai deux questions à poser à propos de ce que la Dre Doupe a mentionné. Comment proposez-vous de promouvoir le fonctionnement et la capacité plutôt que l'incapacité?
Dr Lisa Doupe: Grâce au nouveau système de classification élaboré par l'Organisation mondiale de la santé. Il s'agit de la classification internationale du fonctionnement et du handicap, qui vient juste d'être publiée. Cette classification met l'accent sur la capacité plutôt que sur l'incapacité. La nouvelle version englobe le milieu de travail. Maintenant, on tient compte du fait qu'une personne est un travailleur de la construction ou un médecin.
Un autre avantage de la nouvelle classification, c'est qu'elle porte sur la résolution du problème original. Auparavant, ce n'était pas le cas. Cette nouveauté est très excitante, car on se penche maintenant sur le milieu de travail et sur la résolution du problème.
M. Larry Spencer: Je viens de penser à un de mes électeurs qui est atteint de la maladie de Parkinson. Vous parlez d'un système selon lequel on ne s'attarde pas tant au nom de la maladie ou du handicap qu'aux répercussions sur la vie de la personne ou sa capacité de travailler.
Dr Lisa Doupe: Nous nous attardons aux capacités que la personne possède.
Dr Lily Cheung (présidente sortante, «Occupational and Environmental Medical Association of Canada»): Je crois que la nouvelle définition concerne le milieu de travail, ou n'importe quel autre milieu dans lequel se trouve la personne, ainsi que le niveau de fonctionnement. C'est pourquoi la politique de l'Association médicale canadienne est conçue de façon à ce que l'employeur joue un rôle dans la détermination de l'incapacité. Une personne dont le niveau de fonctionnement est diminué peut ne pas être considérée comme inapte au travail si l'employeur peut lui confier un autre travail, ou un travail similaire dont la rémunération est la même. Si l'employeur peut effectuer des changements pour conserver un tel employé, cette personne peut travailler.
J'ai contribué au retour au travail de certaines personnes qui n'avaient pas travaillé depuis sept ans. Ces personnes sont très heureuses de retourner au travail. Un homme atteint d'une maladie psychiatrique bien traitée était tellement heureux de retourner au travail qu'il me saluait lorsque j'étais encore deux coins de rue plus loin. Il était très reconnaissant.
Je me souviens d'un homme qui est devenu paraplégique à la suite d'un accident de voiture et qui ne savait pas que son entreprise pouvait continuer à l'employer. Il a cessé de travailler pendant trois ou quatre ans, car il n'était pas au courant de notre programme de retour au travail. Son retour au travail a exigé l'aménagement d'une toilette spéciale, et des gens doivent l'aider dans son travail, mais il accomplit une tâche utile. Bien que ses capacités soient restreintes, que son niveau de fonctionnement soit diminué, il n'est pas considéré comme inapte au travail selon la définition. Il gagne un salaire et il paie des impôts. Ses capacités sont peut-être restreintes et son niveau de fonctionnement diminué, mais il n'est pas inapte au travail.
Le Dr Muzumdar constitue un autre exemple. Étant donné son milieu de travail, il peut exercer sa profession, bien qu'il affirme être retraité. Il est en mesure de travailler. Bien que son niveau de fonctionnement soit diminué, il n'est pas considéré comme inapte au travail selon la nouvelle définition.
Donc, tout dépend de la façon dont le milieu peut être adapté à la personne dont le niveau de fonctionnement est diminué, que ce soit en raison d'une maladie psychiatrique ou physique. Nous devons tenir compte de cela.
Avant de terminer, je veux faire écho au point de vue supposément personnel du Dr Muzumdar au sujet de la Loi sur le Régime de pensions du Canada. Je suis également d'avis que les prestations du Régime de pensions du Canada—selon ce que j'ai constaté—ont empêché des personnes de retourner au travail. Pour pouvoir continuer à recevoir des prestations, les prestataires consacrent toute leur énergie à prouver qu'ils sont incapables de travailler, car ils ne veulent pas perdre les prestations.
La loi devrait être modifiée de façon à permettre aux prestataires de retourner au travail à temps partiel tout en conservant leurs prestations jusqu'à ce qu'ils soient en mesure de retourner au travail à plein temps. Cette modification devrait être apportée, et les prestataires qui retournent au travail devraient être récompensés par une augmentation de leurs prestations...
Les prestataires ont peur de perdre leurs prestations, qui s'élèvent à 1 000 $ par mois. S'ils retournent au travail à temps partiel et ne touchent pas un salaire qui équivaut à cette somme, ils ne voudront pas retourner au travail. La loi doit donc être modifiée pour régler ce problème.
 (1230)
La présidente: Docteur Muzumdar, la parole est à vous.
Dr Ashok Muzumdar: Madame la présidente, je crois qu'à l'aube du XXIe siècle, il s'est produit un changement fondamental dans la philosophie, comme l'a fait remarquer la Dre Lisa Doupe. L'accent porte maintenant sur la capacité. On nous enseignait à l'école de médecine à mettre l'accent sur la capacité d'une personne, c'est-à-dire sur ce qu'elle peut faire, plutôt que sur ce qu'elle n'est pas en mesure de faire. Il est bien de constater que l'Organisation mondiale de la santé met cela en pratique, à savoir examiner la capacité d'une personne même si on tient compte de son incapacité, de ce qu'elle ne peut pas accomplir. C'est pour cette raison que la philosophie a changé.
Cela me fait penser au système judiciaire de certains pays. Le système judiciaire canadien est conforme à celui des Britanniques, selon lequel une personne est innocente jusqu'à preuve du contraire. Par contre, dans certains pays, principalement dans les pays hispanophones je crois, une personne est coupable jusqu'à preuve du contraire. La philosophie des deux types de système est donc fondamentalement différente. De même, il existe une différence fondamentale entre mettre l'accent sur l'incapacité ou bien sur la capacité.
On a fait valoir—et je crois qu'il s'agit d'un des bons points que votre table ronde a soulevés—qu'il faudrait mettre l'accent dès le début sur la prévention de l'incapacité. De nombreux états peuvent être prévenus. Certains ne le sont pas, bien sûr. Certains sont permanents et ne peuvent être guéris. Ceux-là devraient être classifiés de façon distincte. Certains états ne peuvent être traités, mais un grand nombre peuvent l'être. S'il s'agit d'un état qui peut être traité, cela signifie que les personnes concernées prendront du mieux. Certains états peuvent aussi être prévenus dès le début, et nous devrions voir à la prévention dès le départ.
Il devrait exister des mesures qui incitent les gens à reprendre le travail. Il faut aussi que leur revenu soit assuré pendant qu'ils sont inaptes au travail de façon temporaire ou partielle. Ces personnes savent qu'elles ne seront pas inaptes au travail pour le reste de leur vie; elles ne devraient pas toucher des prestations d'invalidité jusqu'à la fin de leurs jours. Il faut promouvoir la philosophie selon laquelle lorsqu'une personne est inapte au travail, et que cela est prouvé médicalement, son revenu est protégé, mais une fois que cette personne est rétablie, elle doit retourner au travail, où elle bénéficiera de tous les avantages que nous pouvons lui offrir, qu'il s'agisse de thérapies, de médicaments et de tous les soutiens nécessaires.
Monsieur Spencer, je vous confirme qu'en effet je suis malvoyant depuis au moins dix ans. Ma vue a baissé graduellement; je l'ai perdue petit à petit. Sans un système de soutien, je n'aurais pas été en mesure de fonctionner, surtout à la maison. Je considère mon épouse comme la gestionnaire de la maison. Elle s'occupe de tout. Au travail, des gens me lisent mes dossiers. En ce qui concerne l'informatique, je suis un néophyte, ou je devrais plutôt dire un homme des cavernes. J'estime que grâce à un système de soutien approprié, les gens comme moi sont en mesure de fonctionner.
Les employeurs appartiennent à une autre catégorie. Certains employeurs feront des pieds et des mains pour répondre aux besoins de leurs employés, mais il y en a d'autres qui leur montreront la porte s'ils sont incapables d'effectuer le travail. Cette situation existe. La loi peut avoir une incidence sur les façons de gérer le personnel.
La question comporte différents aspects. Si nous mettons dorénavant l'accent sur la capacité plutôt que sur l'incapacité, il s'agit là d'un changement très fondamental et il s'agit d'une très bonne philosophie, je crois. C'est tout ce que j'ai à dire.
La présidente: Merci.
Docteur Woodside, vous avez la parole.
Dr Blake Woodside: Les questions touchant les limites sont surtout particulières aux maladies mentales et elles sont assez inquiétantes lorsqu'on pense à la proportion de personnes atteintes d'une maladie mentale qui sont dirigées vers le programme d'aide sociale, qui ne met pas l'accent sur la réadaptation. Le mémoire que nous vous ferons parvenir dans quelques semaines porte notamment sur ce sujet, mais je tenais aujourd'hui à signaler qu'il s'agit d'un problème très important dans le domaine des maladies mentales.
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La présidente: Nous aimerions savoir comment, selon vous, nous pourrions aider les gens dans le cadre d'un programme intégré. Lorsqu'un patient affirme qu'il est suivi par une fourgonnette brune, nous pensons qu'il est paranoïaque, mais il est en effet suivi —il est suivi par quelqu'un qui tente de lui enlever ses prestations d'invalidité versées en vertu du Régime de pensions du Canada. Cette approche au programme ne semble pas être raisonnable.
Quand je pense qu'on retourne une personne atteinte d'une maladie mentale dans un milieu de travail considéré par un médecin de famille comme étant tout à fait néfaste pour cette personne... Il est impossible que cela fonctionne à moins d'obtenir la collaboration de... Vous pouvez dire à cette personne de se trouver un autre emploi, mais cela cause un stress. De toute évidence, il y a du travail à faire. Peut-être que Lisa peut nous parler des travaux de la table ronde sur ce sujet.
Dr Lisa Doupe: Les médecins et les prestataires de soins de santé peuvent emprunter la bonne voie, mettre l'accent sur les capacités et sur les soins appropriés, mais si le milieu de travail ne collabore pas, la qualité de leur travail importe peu. Les employeurs doivent élaborer des programmes d'adaptation. Non seulement les P.-D. G. doivent-ils élaborer une politique à cet égard, mais ils doivent aussi faire en sorte que les superviseurs de premier niveau la mettent en oeuvre. Sinon, la personne qui retourne au travail ne sera pas affectée à l'emploi approprié et son retour sera un échec. C'est pourquoi toutes les parties doivent s'entendre sur la façon d'organiser le système et sur le rôle de chacun.
La présidente: Êtes-vous en train de dire...? Vous décrivez-là un modèle fondé sur la collaboration et l'aspect volontaire. Mettriez-vous en place un cadre législatif pour obliger les employeurs à collaborer?
Dr Hillel Finestone: Le régime ontarien d'indemnisation des travailleurs, par exemple, est un bon modèle. Selon ce régime, l'employeur est obligé, pendant deux ans, de modifier les fonctions d'un employé qui retourne au travail. Selon moi, l'obligation est la seule façon d'obtenir ce que nous souhaitons. Je ne crois pas que nous pouvons nous en remettre à la bonne volonté des entreprises; il faut une loi. Le régime ontarien n'est qu'un modèle parmi d'autres. L'obligation concerne les cas d'employés qui se sont blessés en milieu de travail, mais elle ne s'applique pas à un travailleur qui a tombé en bas d'un escalier à l'extérieur du milieu de travail ou qui a subi un accident de voiture. Dans un tel cas, l'employeur n'est pas tenu de respecter l'obligation.
La présidente: C'est vrai, mais cette règle ne peut-elle pas être utilisée conjointement avec la Loi sur l'équité en matière d'emploi quand vient le temps de décider s'il faut apporter des changements aux tâches d'un employé? A-t-on déjà évalué quel modèle fonctionnerait? J'ai déjà dit lors d'une autre séance du comité que je ne sais pas ce que sont des travaux légers. Tout ce que je sais, c'est qu'il est pratiquement impossible d'affecter une infirmière auxiliaire à des travaux légers sans créer du ressentiment à son égard qui finit par lui rendre la vie misérable.
Dr Lisa Doupe: Si vous êtes à la recherche d'un modèle, le Dr Loisel propose le modèle de la médecine du travail. Il a effectué de la recherche à ce sujet. Ce modèle prévoit l'intégration du prestataire de soins de santé dans le milieu de travail afin que les mesures d'adaptation nécessaires puissent être prises.
La présidente: Pourrions-nous envisager ce modèle? De toute évidence, nous pourrions communiquer avec le Dr Loisel, ce qu'aimeraient certainement les attachés de recherche.
M. Larry Spencer: J'ai un commentaire à formuler et une question à poser. Vous avez dit que l'obligation est le seul moyen d'arriver à ce que nous souhaitons, mais je ne suis pas convaincu que ce soit tout à fait vrai. Par exemple, pourquoi le programme n'aiderait-il pas les employeurs à prendre soin de leurs employés lorsqu'une situation se produit? Pourquoi une partie de notre argent ne servirait-elle pas à permettre aux gens de travailler plutôt qu'à payer des personnes qui ne peuvent pas travailler? Ne devrions-nous pas aussi penser à cela?
Dr Hillel Finestone: C'est une mesure qui doit toujours fait l'objet de recherches, d'écrits et d'essais. Ils agiraient s'ils recevaient des fonds, pour remplacer les gains perdus ou quelque chose du genre.
 (1240)
M. Larry Spencer: Mais on ne forcerait personne à agir; on leur viendrait en aide, ce qui est fort différent.
La présidente: Le groupe a-t-il envisagé ce à quoi un programme fédéral pourrait ressembler, s'ils n'ont plus à verser leur contribution au RPC ou si une sorte d'incitatif est offert aux employeurs pour le recyclage ou ce genre de choses? Ensuite, que faut-il encore ajouter pour qu'un programme favorise vraiment le retour des employés au travail? Des fonds de formation doivent-ils être associés au régime de pension d'invalidité du RPC? Avez-vous besoin de plus de formation, et que dire des prescriptions? Avez-vous...?
Dr Lisa Doupe: C'est une équipe multidisciplinaire, et c'est un des problèmes actuellement. Il n'y a pas assez d'intervenants dans chacune des nombreuses disciplines qui doivent se concerter.
La présidente: J'allais demander... et vous avez peut-être une certaine expérience. Quand j'ai été nommée présidente du comité, on m'a remis un gros cartable expliquant l'appareil gouvernemental, le cadre de responsabilités des divers programmes. On évalue le nombre de personnes qui ne reçoivent plus de pension d'invalidité du RPC, sans indiquer ce qui leur est arrivé par la suite. Je ne sais pas si la personne aveugle a obtenu le formidable appareil qui lui a permis de retourner au travail ou si elle touche maintenant l'aide sociale de la municipalité.
Nous ne pouvons pas évaluer le programme sans entrevues de départ pour nous permettre de déterminer si les gens qui ne reçoivent plus de pension d'invalidité doivent demander l'aide sociale de la municipalité. Avez-vous une idée de ces chiffres, du nombre de personnes à qui on a cessé de verser une pension d'invalidité du RPC? Est-ce que les médecins ont...?
C'était tout à fait traumatisant pour moi quand un de mes patients n'avait plus droit à un programme. Je me sentais tout simplement impuissante et je pense que nous avons exactement le même sentiment en tant que députés, dans nos bureaux de circonscription. Les gens à qui on cesse de verser des prestations nous demandent de l'aide, et nous ne savons pas quoi faire.
Dr Lily Cheung: Il faut songer à offrir des incitatifs aux employeurs; la CSPAAT de l'Ontario en offre un dans le cadre du programme «Work Well». Les gens ne s'en servent pas beaucoup. On encourage les employeurs à offrir des aménagements et il y a un incitatif. Il serait utile que le gouvernement fédéral offre quelque chose du genre. On incite les employeurs à réintégrer l'employé, à lui offrir des aménagements. Ce serait utile.
C'est pour les maladies et les blessures indemnisables, mais il n'y a pas de programme parallèle—des entreprises comme celle où je travaillais avant offrent le même programme pour les cas non indemnisables, mais pour d'autres...
La présidente: Donc, il n'y a rien pour le patient de M. Spencer qui a la maladie de Parkinson, mais si vous tombez d'un échafaudage, alors...
Dr Lily Cheung: J'ai travaillé pour une très grosse entreprise ou il y avait toutes sortes de maladies, sclérose en plaques, maladie de Parkinson, dépression—dépression, dépression, dépression. On communiquait avec eux pour les informer qu'il y avait un programme d'aménagements et on les encourageait à revenir au travail. On leur offrait tous les aménagements possibles... et ils étaient tous heureux, même s'ils n'étaient pas au courant et avaient peur de revenir travailler. C'est très naturel pour les gens qui ont arrêté de travailler et c'est un problème. Ceux qui ne travaillent pas ont peur de revenir travailler, et il faut les encourager à le faire. Plus on leur permet de ne pas travailler, moins ils seront portés à retourner au travail. Si on offrait un incitatif du genre, ce serait utile.
La présidente: M. Spencer veut intervenir, et on veut ensuite me traîner à la Chambre. Je tiens à vous dire que toutes nos délibérations vont être diffusées sur le site Web dans les témoignages. C'est notre façon de communiquer à la population du Canada ce que nous avons entendu et comment nous allons prendre nos décisions, dans un modeste effort de transparence.
M. Larry Spencer: Je veux tout simplement vous remercier de votre témoignage d'aujourd'hui qui arrive comme une bouffée d'air frais. Vous connaissez les gens. Vous êtes en contact avec la réalité et nous sommes sensibles à votre point de vue, qui est bien différent de l'attitude défensive adoptée dans le cadre d'un quelconque régime administratif avec des formulaires à remplir. Donc, merci encore de votre témoignage.
La présidente: Merci beaucoup à tous d'être venus nous rencontrer. La séance est levée.