FAAE Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des affaires étrangères et du développement international
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 19 octobre 2016
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Chers collègues, la séance est ouverte; conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 14 avril 2016, nous nous réunissons pour l'examen législatif de l'article 20 de la Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus.
Cet après-midi, nous allons recevoir deux témoins; l'un comparaîtra en personne, et l'autre, par vidéoconférence. Permettez-moi maintenant de vous présenter ces deux personnes. Premièrement, Mme Andrea Charron, professeure adjointe, Université du Manitoba, directrice du Centre pour le renseignement sur la sécurité et les études de la défense à l'Université Carleton. Bienvenue. Par vidéoconférence, nous recevons l'honorable Sue Eckert, agrégée supérieure de recherches adjointe, Center for a New American Security. Bienvenue à vous aussi.
J'imagine que nous commencerons par Mme Charron. Nous entendrons vos deux déclarations préliminaires l'une après l'autre avant de passer aux questions.
[Français]
Je vous remercie infiniment de m'avoir invitée à comparaître devant vous aujourd'hui.
[Traduction]
Mes commentaires portent sur le recours par le Canada à des sanctions depuis 1990 et visent à mettre en lumière quelques problèmes concernant les pratiques du Canada à cet égard. Depuis les années 1990, le taux d’application de sanctions par le Canada a été élevé en raison de la grande activité du Conseil de sécurité des Nations unies et de l’obligation du Canada de donner effet à ces mesures. Récemment, les sanctions du Canada ont toutefois été imposées davantage par choix que par obligation. Elles ont été appliquées afin de montrer qu’il était un « bon allié » de l’Union européenne, des États-Unis, et d’autres pays, plutôt qu’en vertu d’une exigence dictée par le droit international.
Le Comité se concentre uniquement sur la Loi sur les mesures économiques spéciales, la LMES, et sur la Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus, la LBBDEC, et cet objectif est à mon avis limité. D’une part, je reconnais que le sujet est immense, mais, d’autre part, nous risquons de ne pas voir la situation d’ensemble, c’est-à-dire toute la gamme des mesures de sanction.
Depuis 1990, le Canada a appliqué des sanctions dans 40 cas, mais la grande majorité des cas — 34 cas ou 85 % — ont fait intervenir la Loi sur les Nations unies, la LNU, plutôt que la LMES ou la LBBDEC. En fait, la LMES a été appliquée dans seulement 10 cas, dont quatre faisaient intervenir aussi la LNU, un, la Liste des pays visés, et un, la LBBDEC. Ce n'est que dans quatre cas que la LMES a été utilisée seule — contre Haïti, la Russie, la Syrie et le Zimbabwe — et dans seulement trois cas que la LBBDEC a été utilisée seule — contre la Tunisie, l’Égypte et l’Ukraine, ce dernier cas faisant intervenir aussi la LMES.
Examinons cette liste. Haïti était l’un des pays les plus pauvres au monde lorsque des sanctions globales ont été dictées par les Nations unies, empirant encore les conditions de vie des Haïtiens. C’est l’intervention militaire des États-Unis qui a contraint la junte militaire à abandonner le pouvoir. Quant aux mesures prises actuellement contre la Russie, la Syrie et le Zimbabwe, les sanctions du Canada ne changent rien aux calculs stratégiques des dirigeants de ces États, pas plus que ne le feraient des sanctions canadiennes plus sévères; les conséquences non voulues de mesures plus punitives ne feraient que porter préjudice à des civils innocents. De la même façon, si nous examinons les cas de la Tunisie, de l’Égypte et de l’Ukraine visés par la LBBDEC, il n'y a au Canada que très peu de biens étrangers à saisir. Comme les sanctions du Canada n’ont pas de portée extraterritoriale, tous les biens à saisir doivent suivre une filière canadienne.
Le problème concerne donc non pas les lois prises séparément, mais les cas où de multiples lois sont appliquées de façon simultanée. Imposer les mesures à plusieurs niveaux ne rend pas les sanctions plus « efficaces » ou plus contraignantes, mais fait plutôt porter le fardeau aux banques et aux entreprises canadiennes qui doivent veiller à ce que les sanctions prises par le Canada aient un véritable effet.
Vingt-deux des quarante cas du Canada sont toujours actifs aujourd’hui, y compris les sanctions contre la Somalie appliquées pour la première fois en 1992. Onze des 22 sanctions sont des sanctions exclusives des Nations unies. Les 11 autres sont une combinaison de mesures prises par les Nations unies et dirigées par un allié ou des mesures prises uniquement par des alliés. Jusqu’en 2006, toutes les sanctions avaient été dirigées par les Nations unies. Le Bélarus, inscrit sur la Liste des pays visés en 2006, a amorcé une tendance à appliquer des sanctions à l’appui d’alliés, puis ce fut rapidement le cas aussi pour la Birmanie et le Zimbabwe. Aujourd’hui, quatre cas font appel à la LNU et à la LMES à l’appui des États-Unis et de l’Union européenne, à savoir ceux contre la Corée du Nord, l’Iran, la Libye et le Soudan du Sud; trois recourent à la LMES pour appuyer des sanctions des États-Unis et de l’UE contre la Russie, la Syrie et l’Ukraine; et un autre cas fait intervenir la LBBDEC pour soutenir des sanctions de l’UE contre la Tunisie. Bien sûr, l'application de la LBBDEC est dirigée par un pays étranger, non pas par le Canada.
Cela signifie que, quand il applique la LMES, le Canada choisit non seulement le cas, mais aussi les alliés avec lesquels agir en partenariat. De façon surprenante, le Canada n’a jamais, depuis 1990, appliqué de sanctions uniquement de concert avec les États-Unis; il préfère, semble-t-il, imposer des sanctions avec 28 autres États au moins. Cela ne signifie toutefois pas que le Canada a automatiquement emboîté le pas aux sanctions dictées par l’Union européenne. Par exemple, l’UE applique actuellement des sanctions contre la Guinée et elle a pris des mesures contre des particuliers de la Moldavie, mais le Canada ne lui a pas emboîté le pas. Le Canada ne lève pas non plus nécessairement les sanctions au même moment que ses alliés. Toutes les sanctions prises contre le Liberia et la Côte d’Ivoire par le Conseil de sécurité des Nations unies ont été abandonnées au printemps 2016, mais le Canada n’a pas encore pris de nouveau règlement pour lever ces mesures.
Cette tendance à appliquer des sanctions à de multiples niveaux complique considérablement la conformité avec les sanctions. Sept cas canadiens font intervenir deux ou plus des cinq lois du Canada ayant trait aux sanctions. Et cela n’inclut évidemment pas les 28 cas qui font ou qui ont fait intervenir une interdiction de voyage, ce qui exige d’invoquer la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Les lois prévoient différentes pénalités pour la non-conformité et comportent différentes définitions des mesures appliquées, par exemple la saisie de « biens » et d’« actifs ». Les entreprises ont toujours de la difficulté à savoir quelles mesures sont en vigueur. Ainsi, en 2014, une compagnie de Red Deer, en Alberta, a dû payer une amende de 90 000 $ pour avoir vendu des anneaux toriques d’une valeur de 15 $.
Étant donné que la tendance à appliquer des sanctions à de multiples niveaux complique encore la conformité avec les sanctions, les entreprises et les banques canadiennes se trouvent devant trois options.
La première consiste à dépenser d’importantes sommes d’argent pour s’assurer de la conformité, ce qui signifie que les sanctions deviennent une pénalité pour l’entreprise ou la banque.
La deuxième consiste à prendre en compte les amendes éventuelles à payer pour des transgressions commises par inadvertance, ce qui devient un coût de l’entreprise, de sorte que les coûts pour les biens et services augmentent pour les consommateurs.
La troisième consiste à cesser complètement de faire des affaires avec l’État en question, ce qui signifie que les sanctions deviennent plus coercitives que ne l’était leur objet au départ.
Le gouvernement canadien a potentiellement carte blanche pour ce qui est des mesures qu’il peut prendre et des positions qu’il peut adopter. Évidemment, prendre des mesures exécutoires est la prérogative des gouvernements élus, mais j’aimerais mettre en lumière six préoccupations en ce qui concerne les pratiques du Canada en matière de sanctions.
Premièrement, les conséquences non voulues des sanctions — en particulier lorsqu’elles s’appliquent à plusieurs niveaux — peuvent piéger des civils innocents comme M. Abdelrazik.
Deuxièmement, le coût refilé aux banques et entreprises de la conformité avec un certain nombre de règles et de règlements.
Troisièmement, la difficulté de suivre les sanctions actuellement appliquées par le Canada. Il faut fouiller et consulter de nombreux règlements se trouvant sur des sites différents. Le fait que toutes les sanctions prises par le Canada sont qualifiées d’« économiques » induit également en erreur.
Quatrièmement, le manque de cohérence des pénalités et des définitions, par exemple la définition de « biens et actifs », dans l’ensemble des diverses lois portant sur les sanctions.
Cinquièmement, le délai considérable entre le moment où est prise la décision d’appliquer ou de lever des sanctions et l’entrée en vigueur des règlements canadiens nécessaires.
Sixièmement, la tendance du Canada à traiter les sanctions comme un outil de contrainte et à appliquer davantage de mesures. Les mesures prises par le Canada sont au mieux une indication de son désir d’appuyer la sécurité collective et ses alliés.
Voilà qui conclut ma déclaration préliminaire. Vos questions seront les bienvenues.
Bonjour à vous, monsieur le président et bonjour à vous, membres du Comité. Merci beaucoup de m'avoir invitée à participer à votre étude de la législation en matière de sanction. Je suis désolée de ne pas pouvoir me joindre à vous, mais je suis heureuse d'avoir la possibilité de discuter avec vous des lois sur les sanctions.
Étant donné les contraintes de temps, je n'ai pas de déclaration à faire pour le moment, mais je me ferai un plaisir de formuler mes commentaires et également de transmettre une déclaration pour le compte rendu.
Avant de commencer, sur une note personnelle, si je suis particulièrement heureuse à l'idée de m'adresser à votre Comité permanent de la Chambre des communes, c'est parce que mon premier emploi, le plus formateur, était à titre de membre junior du personnel du comité des affaires étrangères de la Chambre des représentants des États-Unis, où il avait justement été question de ces enjeux. J'étais à l'époque beaucoup plus jeune, mais certains de ces enjeux sont toujours d'actualité.
Monsieur le président, permettez-moi de vous faire part de commentaires sur trois aspects des sanctions des Nations unies. Je crois que Mme Charron a brossé un tableau pertinent de la situation du Canada dans le dossier des sanctions. J'aimerais parler un peu des sanctions des Nations unies. J'aimerais donc aborder trois aspects en particulier. Le premier aspect touche l'efficacité des mesures des Nations unies, et la sempiternelle question de savoir si elles sont efficaces. Le deuxième aspect touche aux conséquences non désirées des mesures, même si elles sont ciblées; toutes les sanctions imposées par les Nations unies depuis 1994 étaient en fait des mesures ciblées. Le troisième aspect, c'est l'importance de la mise en oeuvre des mesures à l'échelle nationale, dans la perspective de la conformité sur les plans juridique et administratif et de la conformité du secteur privé.
Mes commentaires ne reflètent pas nécessairement ceux du Center for a New American Security, mais s'appuient en grande partie sur toute l'expérience que j'ai accumulée au Congrès et au pouvoir législatif et pendant plus de 15 ans de travail au Watson Institute, qui m'a permis de travailler en très étroite collaboration avec le gouvernement canadien, entre autres sur divers projets de sanctions.
Premièrement, en ce qui concerne l'efficacité des sanctions, il faut savoir que, plus tôt cette année, le Consortium pour les sanctions ciblées — un projet international de recherche qui s'étend sur plusieurs années et auquel Mme Charron a participé — a publié les résultats d'une évaluation d'assez grande envergure portant sur les répercussions et l'efficacité des sanctions des Nations unies. Mais l'évaluation de l'efficacité des sanctions dépend de la définition des objectifs de ces sanctions.
L'analyse la plus courante des sanctions s'attache surtout à la question de savoir si elles entraînent une modification du comportement; il est cependant important de distinguer entre les différents objectifs des sanctions au moment d'évaluer leur efficacité. Le premier objectif, évidemment, est d'imposer de force un changement du comportement, et c'est le motif de sanction le plus couramment retenu. Le second objectif, toutefois, vise à gêner les activités de particuliers ou de groupes en les privant d'accès à des ressources cruciales comme les ressources financières, les armes, la technologie à double emploi et les ressources humaines. On pense par exemple aux cas où Al-Qaïda ou l'État islamique ne sont pas réellement gênés par les sanctions, malgré qu'il soit important pour nous de limiter les ressources auxquelles ils ont accès. Le troisième objectif des sanctions est de signaler un cas de non-respect d'une norme internationale et de stigmatiser le particulier en question.
Le Consortium sur les sanctions ciblées a, entre autres innovations, décidé de scinder les sanctions en différents épisodes. Comme Mme Charron l'a signalé, la Somalie fait depuis plus de 20 ans l'objet de sanctions des Nations unies, mais le pays a changé, au fil du temps, et c'est pourquoi il est important d'évaluer les différents objectifs au regard de cette évolution.
Permettez-moi de faire un bref survol des sanctions des Nations unies. On a jugé qu'elles avaient été efficaces, globalement, dans 22 % des épisodes; le fait le plus intéressant, à mon avis, est cependant que les sanctions visant à gêner les parties en cause ou à signaler un non-respect étaient près de trois fois plus efficaces que les mesures coercitives. En somme, les mesures efficaces sont des mesures de signalement ou des mesures restrictives, dans 27 % des cas respectivement, et des mesures coercitives dans 10 % des cas seulement. Je crois qu'il est important de ne pas perdre cet objectif de vue, au moment de concevoir les sanctions, et de concevoir ces sanctions en tenant compte des objectifs.
Cette recherche a débouché sur d'autres constatations importantes, notamment le fait que les sanctions ne sont jamais utilisées seules. On dit parfois qu'il s'agit d'une solution de rechange qui ne passe ni par la guerre, ni par les discours, car elles sont presque toujours accompagnées — dans 97 % du temps — d'autres mesures. Il peut s'agir de mesures diplomatiques, de mesures de médiation; il s'agit souvent d'activités de maintien de la paix, dans 62 % des cas des sanctions des Nations unies, ou encore du recours à la force, ce qui arrive également dans 62 % des cas. De plus, les sanctions sont le plus efficaces lorsqu'elles sont utilisées en combinaison. Les combinaisons les plus efficaces sont généralement le gel des actifs, les interdictions de voyage et les embargos sur les armes, et ce sont les trois sanctions qui sont le plus souvent utilisées ensemble.
Un autre aspect intéressant concerne les sanctions visant les denrées, qui sont surtout utilisées en cas de conflit armé et qui sont en général très efficaces.
Le second enjeu dont j'aimerais vous entretenir concerne les conséquences non désirées des sanctions. Comme vous le savez, les sanctions ciblées ont été élaborées en réaction au coût humanitaire des sanctions économiques imposées à l'Iraq. Une tendance s'est établie, et, comme je l'ai déjà dit, depuis 1994, toutes les sanctions des Nations unies sont des sanctions ciblées. Toutefois, même si elles sont ciblées, elles entraînent des conséquences non voulues.
Premièrement, on se préoccupe de la question des droits de la personne et des procédures établies. La raison en est que les Nations unies établissent des désignations. Une personne qui est, par inadvertance ou par erreur, inscrite sur cette liste aura-t-elle le moyen de faire effacer son nom? Il manque d'examens judiciaires; cependant, au fil du temps, le Conseil de sécurité a mis en place un système innovateur et créé un poste d'ombudsman qui, au sein du comité des sanctions ciblant al-Qaïda, est chargé d'examiner la désignation, et à qui les particuliers figurant sur la liste peuvent s'adresser pour faire réévaluer leur désignation. C'est un enjeu important pour le Canada, étant donné que c'est une juge canadienne, Mme Kimberly Prost, qui a fait œuvre de pionnière et établi ces procédures.
Deuxièmement, et je crois que Mme Charron a abordé cette question, les sanctions ont un effet plus important que ne le prévoit leur objectif, c'est-à-dire un effet de surconformité. Cela s'explique par le fait que les mesures sont complexes et donc, mal comprises. C'est une incertitude, compte tenu en particulier du fait que les sanctions sont imposées à plusieurs niveaux, dans les régions, et de manière unilatérale. Quand des sanctions sont imposées à un pays, elles ont un effet dissuasif sur la conformité de chacune des entreprises.
En troisième lieu, il y a la question de l'atténuation des risques. Cet enjeu a été particulièrement important et il a été officialisé récemment: les institutions financières perçoivent les clients à risque élevé comme étant des banques correspondantes, des entreprises de services monétaires, des organismes sans but lucratif, des organismes de bienfaisance, etc. Elles vont fermer des comptes, retarder des virements électroniques, etc.; mais cela a véritablement eu l'effet d'une douche froide sur la capacité de fournir une aide humanitaire. Les États-Unis ont publié un rapport — il s'agit en réalité d'une fuite — sur les graves répercussions des sanctions sur l'aide humanitaire en Syrie. Je participe actuellement à une étude de la Fondation Gates sur les organismes sans but lucratif et les répercussions sur l'accès à des ressources financières des diverses sanctions et dispositions de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes.
En quatrième lieu, l'accent mis sur la mise en oeuvre. Je crois que c'est particulièrement important, étant donné que le Conseil de sécurité des Nations unies peut certes adopter des mesures, même si les gouvernements ne les mettent pas réellement en oeuvre, le secteur privé s'en chargeant. Les gouvernements ne peuvent pas geler d'actif. Un effort a été fait, l'an dernier, quand cinq États membres se sont réunis pour présenter une série de recommandations. On l'appelle l'examen de haut niveau des sanctions des Nations unies; il est axé sur la mise en œuvre et ne s'attarde pas à chercher à savoir si nous allons ou non prendre des sanctions contre la Syrie — étant donné les politiques du Conseil de sécurité, nous n'en prendrons pas —, mais, une fois que le Conseil de sécurité a pris une décision, il faut qu'elle soit mise en œuvre en tous points, en particulier par les États membres.
C'est très important, car il est absolument essentiel, si l'on veut assurer l'efficacité des sanctions, que celles-ci soient mises en oeuvre puis levées. La collaboration avec le secteur privé est un aspect critique de la mise en oeuvre des sanctions. Nous constatons un besoin de plus en plus grand de composer avec le secteur privé et de trouver des façons de collaborer pour rendre les sanctions plus efficaces, en clarifier les objectifs, fournir des directives sur le mode de mise en œuvre et discuter de leurs impacts ou des stratégies d'atténuation des conséquences non désirées.
J'aimerais soulever un dernier point, en ce qui concerne la mise en œuvre, pour souligner le grand besoin de soutien pour le renforcement des compétences. De nombreux pays n'ont pas les moyens de mettre les sanctions en oeuvre, et cela nuit à l'efficacité de ces dernières. Une des recommandations présentées l'an dernier ciblait le renforcement des capacités de certains États membres. Le gouvernement du Canada a déjà appuyé cet aspect.
En conclusion, monsieur le président, le Canada peut être fier de son histoire de leadership et d'innovation au regard des sanctions des Nations unies.
M. l'ambassadeur Fowler a ouvert la voie lorsqu'il est devenu président du comité du Conseil de sécurité chargé de négocier avec l'Angola. Mme la juge Prost a vraiment porté le flambeau touchant les procédures établies et le droit des particuliers, et le Canada est reconnu comme un adepte convaincu de sanctions efficaces et applicables.
Je vous félicite d'avoir entamé cette étude. J'espère que vous tiendrez compte de tout l'éventail des sanctions et que votre étude favorisera une mise en oeuvre nationale plus efficace. Je me ferai un plaisir d'aider votre comité de toutes les manières possibles et de répondre à vos questions.
Merci.
Merci, madame Eckert. Les deux témoins ont présenté d'excellents exposés.
Comme d'habitude, nous passons tout de suite aux questions, car je crois qu'il est important que les membres du Comité creusent certains dossiers qui les intéressent.
Nous allons commencer par M. Kent.
Merci, monsieur le président, et merci aux deux témoins de s'être présentés aujourd'hui. Comme vous le savez, nous n'en sommes qu'au tout début de notre étude.
Les premiers témoignages, dès le premier jour, nous ont troublés. Nous avons reçu lundi des fonctionnaires d'Affaires étrangères et de la GRC de même que le surintendant des institutions financières, qui ont déclaré que les deux textes de loi directement visés par notre étude, la LMES et la Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus, laissent des trous importants dans les pouvoirs conférés au Canada. Ils ont également souligné un mauvais fonctionnement interministériel affectant la façon dont les différents ministères interprètent et appliquent ces lois.
Nous avons par exemple noté que la Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus proposait 10 définitions d'un étranger politiquement vulnérable, mais ces définitions semblaient quelque peu anachroniques et dépassées, étant donné que certains des particuliers les plus corrompus, dans le gouvernement actuel de la Russie, par exemple, n'entreraient dans aucune des catégories désignées. Certains sont des geôliers, d'autres, des agents de police, et nous savons qu'ils ont accumulé d'énormes sommes d'argent, qu'ils essaient de déplacer d'une région du monde à une autre dans l'espoir de trouver un lieu de dépôt sûr, des sommes d'argent qui dépassent de loin ce qui semblerait un revenu cumulatif total approprié à la description de leur emploi actuel.
Je m'intéresse en particulier au cas de Vitaly Malkin, qui a essayé pendant 20 ans d'entrer au Canada, qui a chaque fois été refusé par l'Immigration, qui a subi un interrogatoire serré du SCRS, et dont l'histoire est largement connue. Il existe un dossier très épais contenant des éléments de preuve crédibles selon lesquels il était impliqué dans le blanchiment d'argent, détournait des fonds d'aide des Nations unies, faisait le commerce de diamants de la guerre et recueillait les profits du crime organisé.
Mais un jour, après qu'un juge de la citoyenneté a renversé la décision d'un agent d'Immigration Canada qui avait procédé à l'entrevue et selon lequel il était interdit de territoire, il a obtenu le droit d'entrer au Canada. Il a investi des dizaines de millions de dollars dans des propriétés au Canada. On lui a quand même toujours refusé la citoyenneté et il est depuis retourné en Union soviétique; aujourd'hui, il entrerait dans l'une des dix catégories définies dans la Loi sur le blocage des biens des dirigeants étrangers corrompus.
J'aimerais que vous nous fassiez part de vos observations; il arrive très souvent que des témoins du milieu universitaire nous répondent plus franchement que ne le font les fonctionnaires des nombreux ministères responsables de l'application de cette loi.
En ce qui concerne la LBBDEC, évidemment, il ne revient pas au Canada d'imposer des sanctions. L'article 4 prévoit que: « Si un État étranger, par écrit, déclare au gouvernement du Canada qu'une personne a détourné des biens... », le Canada peut prendre des mesures. Mais le signalement doit venir de l'externe. À moins que la Russie ne nous prie d'intercepter... et cela n'arrivera pas; la LBBDEC ne représente donc pas un problème.
Quant aux 10 catégories, disons que l'Érythrée déclare qu'elle veut mettre la main sur certains individus et sur leurs actifs; je crois que si nous avons prévu dix catégories, une liste, c'est pour nous assurer de ne pas poursuivre un concierge ou un enseignant innocents, mais que nous nous intéressons à l'élite, qui a la capacité de prendre des décisions. Le problème que pose cette liste si prescriptive, par exemple, c'est qu'elle définit un « officier ayant le rang de général ou un rang supérieur »; ce n'est pas pour rien que nous avons eu le colonel Kadhafi. Cela, ils le savent et c'est pourquoi ils prennent un titre qui, souvent, leur évitera ce type de problème.
Dans le cas de la LBBDEC, sauf dans le cas où la Russie nous demanderait de saisir les actifs de ce monsieur, ce n'est pas un texte de loi que nous pouvons utiliser.
J'aimerais en fait parler du point de vue à la fois de mon expérience de la colline du Parlement et de mon expérience dans le pouvoir exécutif. L'un des outils que nous utilisions, aux États-Unis, du moins — je connais mal les dispositions canadiennes —, c'était l'International Emergency Economic Powers Act, la loi sur les pouvoirs économiques en cas d'urgence internationale. Cette loi donnait au président de très larges pouvoirs d'intervention lorsqu'une situation d'urgence se déclarait à l'extérieur des États-Unis d'abord représentant une menace pour la sécurité nationale, la politique étrangère ou l'économie des États-Unis. Notre bureau du contrôle des avoirs étrangers et notre Trésor appliquent ce texte, en réalité, pour prendre un certain nombre de mesures pour désigner des particuliers faisant l'objet de sanctions. Je crois que ces larges pouvoirs sont en fait très importants. Je ne sais pas dans quelle mesure le Canada... Encore une fois, vous vous intéressez à deux textes de loi, mais ils font partie d'un tableau plus complexe, puisque, avec le temps, ces textes ont fini par former une mosaïque. Il est bon, parfois, de prendre du recul et de réfléchir aux objectifs finaux, en tentant de les recadrer.
Il est bon également que vous ayez des normes différentes. Ce n'est pas pour rien que les Nations unies n'ont pas de sanctions plus sévères. Il y a une limite à ce que nous pouvons faire dans le contexte du Conseil de sécurité. Nous nous efforçons constamment de prévoir des sanctions le plus multilatérales possible, car cela amène davantage de pays à nous suivre. C'est important car de nombreux pays, s'ils ne font pas partie des Nations unies, ne peuvent mettre les sanctions en oeuvre. Ils s'inspirent fondamentalement des Nations unies.
En ce qui concerne, en particulier, les fonctionnaires corrompus, il ne s'agit pas d'une mesure des Nations unies. Maintenant, il se peut que des États qui ont des vues similaires soient en mesure de changer les normes. Jusqu'à un certain point, des catégories générales peuvent aider les gouvernements à faire cela.
Merci.
J'imagine que vous connaissez toutes les deux bien la loi Magnitski, que le Congrès des États-Unis a adoptée. Cela m'amène à ma question. Dans ce contexte, si l'on cherchait à combler les lacunes du contexte canadien, comment compareriez-vous l'efficacité des sanctions ciblées et celles des sanctions générales et d'application nationale?
Je pourrais peut-être commencer. Aujourd'hui, les sanctions sont en général ciblées. Que ce soit par des sanctions des Nations unies ou des sanctions nationales, nous avons essayé de cibler des particuliers et leur comportement et de cibler le type de comportements répréhensibles que nous voulons voir changer. La plupart des sanctions sont ciblées. Comme j'ai eu à mettre en œuvre les lois adoptées par le Congrès, je puis vous dire qu'il est utile de conférer au pouvoir exécutif de larges pouvoirs plutôt que des pouvoirs fragmentaires, par exemple en adoptant une loi pour la Russie, une autre pour la Syrie. Voilà pourquoi je crois qu'il est important d'examiner la situation dans son ensemble, car cela finit par devenir un problème.
Aux États-Unis, par exemple, nous avons commencé à rédiger des lois sur les sanctions pendant les années 1990, et chaque cas prévoyait un pouvoir de dérogation différent. C'est pour cette raison qu'il est devenu très compliqué de lever les sanctions. Quelles étaient les normes? S'agissait-il d'un intérêt national ou de la sécurité nationale? Tout cela est tout simplement devenu de plus en plus compliqué au fil du temps. Voilà pourquoi il est important, à mon avis, de prendre du recul. Vous avez l'occasion d'examiner ensemble tous les objectifs que vous voulez réaliser.
J'aurais quelques points à présenter.
Premièrement, le Canada ne peut pas appliquer ses lois à l'extérieur de son territoire; il faut qu'il y ait un lien avec le Canada. Étant donné que le système bancaire du Canada est de si bonne qualité, les gens n'ont pas en général tendance à cacher des biens au Canada. Nous avons déjà prévu un certain nombre d'étapes et de processus qui nous assurent que nous n'ouvrons pas la porte à des fonds d'origine criminelle, etc. Cela ne veut pas dire qu'il n'y aurait pas place à amélioration.
Oui, mais il peut être risqué d'essayer de modifier les lois à cause d'une seule personne: cela pourrait avoir des conséquences inattendues pour tous les autres. Pouvez-vous imaginer la charge de travail supplémentaire que les banques devront accomplir si on les oblige à éplucher des millions de transactions pour s'assurer qu'une personne donnée n'est pas impliquée de quelque façon que ce soit?
Cela me fait penser à l'article de Kim Richard Nossal, inspiré par James Eayrs, l'homme qui — la plupart d'entre vous le savez déjà — a toujours conseillé que la meilleure politique étrangère qui soit pour le Canada est de rester au centre. On ne se montre ni trop idéaliste ni moralisateur et on ne se prend pas non plus pour une superpuissance. Nous gardons une position bien centrée.
Vu les lois en vigueur et la restriction nous empêchant d'intervenir dans d'autres pays — et je ne crois pas que c'est un pouvoir dont nous voulons —, il n'y a pas grand-chose que le Canada peut raisonnablement faire. Cela ne veut pas dire, pour reprendre les termes de Sue Eckert, que le but des sanctions imposées est de signaler les problèmes et qu'il faut mettre au point une norme. C'est un aspect très important, mais il ne s'agit pas d'un outil visant à imposer des changements.
Merci, monsieur le président. Je vous remercie tous deux d'être venus aujourd'hui nous faire part de vos connaissances.
Madame Charron, vous avez mentionné que les anneaux toriques coûtaient 15 $. Il me semble que ce problème épineux ne s'arrête pas là... à l'exportation de marchandises prohibées au titre des résolutions des Nations unies sur l’Iran, de la Loi sur les mesures économiques spéciales et de la Loi sur les douanes du Canada. Vu la quantité de ressources qui ont été déployées afin d'amener le parti en question à la table de négociations, croyez-vous qu'une amende de 90 000 $ est suffisante pour dissuader ces entreprises de poursuivre ce genre d'activités?
À dire vrai, l'amende maximale n'est pas fixée à 90 000 $. La Loi sur les mesures économiques spéciales et la Loi sur les Nations unies prévoient différents montants. Si je me souviens bien, la Loi sur les Nations unies prévoit une amende de 100 000 $ et une peine de 10 ans de prison lorsqu'il s'agit d'une infraction par mise en accusation. Bien entendu, les juges canadiens ont le pouvoir discrétionnaire de prendre tout le contexte en considération. Je n'ai pas communiqué directement avec l'entreprise en question, mais il me semble, selon ce que les médias ont rapporté, qu'elle a réalisé — oups — qu'elle avait enfreint les lois avant de le signaler de son propre chef. Je crois que c'est cela que le juge a pris en considération lorsqu'il a déterminé le montant de l'amende à lui imposer.
Je suggérerais au Comité de peut-être étudier en profondeur un pays visé par des sanctions afin de creuser le sujet et de comprendre toutes les différentes étapes du processus réglementaire par lesquelles une personne doit passer; il lui faudrait aussi essayer d'obtenir les définitions afin de tenter de comprendre ce qu'on peut acheter ou non de ces pays et ce qu'on peut ou non leur vendre. On est arrivé au point où il est plus facile de dire, « eh bien, je ne vais rien faire », mais c'est là que les impacts pour les entreprises et les emplois canadiens se font ressentir, même si cela n'a jamais été l'intention, au départ, du gouverneur en conseil qui a décidé qu'on devrait prendre ces mesures.
Je recommanderais toujours d'agir avec prudence lorsqu'il est question des conséquences inattendues qui découlent des tentatives de faire payer le maximum à toutes les entreprises contrevenantes, parce que les effets en aval peuvent nuire aux Canadiennes et Canadiens innocents.
Eh bien, laissez-moi compléter ce qui a été dit. Je crois que cela dépend de votre objectif par rapport aux sanctions.
J'ai déjà été chargée de réglementation. J'étais responsable du contrôle des exportations à double usage pour les États-Unis et le gouvernement Clinton. Je devais déterminer quelles infractions étaient commises et ce que les gens faisaient. Je dois dire que la très grande majorité des entreprises essaient de se conformer à la réglementation. Elles n'essaient pas d'éviter les sanctions, mais les sanctions elles-mêmes sont très compliquées.
Je vous inviterais à lire le rapport sur les sanctions de l'ONU infligées à la Syrie; on y illustre à quel point la situation est compliquée ainsi que le grand nombre de normes diverses qui s'appliquent dans différentes circonstances. Ce n'est pas tout, car il y a aussi les sanctions nationales, les sanctions des États-Unis, les sanctions de l'Union européenne et les sanctions de l'ONU ainsi que toutes les normes différentes qui existent. Cela forme un tout difficile à comprendre.
Je crois qu'il est important, dans la loi, de distinguer les infractions commises volontairement et celles commises par inadvertance. Je tiens pour acquis que vous n'allez pas pénaliser une entreprise si elle commet ce genre d'infraction par inadvertance. Il peut y avoir des circonstances atténuantes. Je crois que vous devez prendre en considération le fait que, vu la nature compliquée de la situation, les entreprises ont tendance à vouloir réduire les risques à ce chapitre. Les entreprises ne se contentent pas de quitter l'industrie, ce qui est, selon moi, un problème important à lui seul, y compris pour des raisons nationales de vitalité économique; elles cessent leurs activités d'aide humanitaire et elles quittent ce secteur au complet parce que le risque est trop grand.
Je doute que ce soit une façon, au bout du compte, de réaliser les objectifs du Canada, des États-Unis ou d'autres pays en matière de politique étrangère. Nous devons gérer ces risques et aider le secteur privé à faire de même, mais à cette fin, les lois et l'orientation fournies par le gouvernement doivent être claires. Souvent, ce n'est pas le cas.
Puis-je vous raconter une anecdote personnelle à ce sujet? Les entreprises canadiennes et les banques sont très préoccupées à l'idée de commettre une infraction à cause des conséquences qui peuvent être très graves.
À l'époque où j'étais au Consortium pour les sanctions, j'ai réalisé une étude de cas sur un pays soumis à des sanctions, le Soudan. Le gouvernement de la Suisse me payait pour évaluer l'effet des sanctions de l'ONU sur le Soudan. Le chèque a été déposé dans mon compte de la Banque Royale, et le gérant m'a téléphonée pour me dire qu'il allait devoir communiquer avec la GRC parce qu'il croyait qu'il s'agissait peut-être d'un cas de non-respect des sanctions. Sur le chèque, il était indiqué « Sudan sanctions », ou sanctions pour le Soudan, afin de me rappeler d'où l'argent venait. J'ai dû me rendre à la banque avec le contrat du Consortium pour les sanctions que j'avais obtenu du gouvernement suisse pour montrer que je n'étais pas en train de violer les sanctions imposées au Soudan. « Je ne suis qu'une étudiante au baccalauréat qui a vraiment besoin de financement, et ça, c'est mon chèque. » Vous voyez à quel point la conformité avec les sanctions leur est importante.
Même s'il y a un numéro de téléphone indiqué sur le site Web d'Affaires mondiales pour obtenir de l'information, le ministère ne peut pas dispenser des conseils juridiques; vous devez retenir vous-même les services d'un avocat, et cela peut être onéreux. Cela veut dire que quelqu'un comme moi va se retrouver avec ses comptes de banque gelés et que je ne pourrai pas rembourser mon hypothèque, acheter de la nourriture ou faire quoi que ce soit d'autre parce qu'on craint tellement de ne pas se conformer aux sanctions.
Pendant que nous sommes sur le sujet des autres pays, savez-vous si les peines imposées dans d'autres pays pour ce genre d'activités sont plus sévères par rapport à ce que nous faisons au Canada?
Sue pourra peut-être répondre. Quelles sont les pénalités imposées par les États-Unis lorsqu'il y a non-respect des sanctions imposées par l'ONU?
Cela varie en fonction des conséquences. Je serais prête à dire que les sanctions imposées par les États-Unis ainsi que les mesures d'application sont très poussées. Les États-Unis prennent probablement davantage de mesures d'application que n'importe quel autre pays. Un certain nombre de banques ont déjà été visées par des pénalités de milliards de dollars. Ces millions et milliards de dollars en pénalités ont ramené cette tendance d'élimination des risques à cause de la crainte de commettre par inadvertance une infraction et d'être soumis à une amende ou d'endommager sa réputation. Beaucoup de banques refusent de faire des affaires avec ces pays en disant simplement « Nous refusons... ». Certaines banques... il y en a une dont je suis au courant qui a dit qu'elle refusait de faire des affaires en Afrique à cause du risque.
Il y a tout un éventail de risques. On peut enfreindre le contrôle des exportations, et les normes relatives à l'emprisonnement et aux amendes sont considérables. Dans bon nombre de lois données, les amendes sont de plus en plus élevées. Je n'ai pas les statistiques à portée de la main, mais je serai heureuse de vous les procurer. Il y a un certain nombre de mesures d'application en vigueur aux États-Unis.
Les pays d'Europe disposent également d'un certain nombre de mesures d'application, mais je dirais que le Canada, les États-Unis ainsi que quelques autres pays européens en ont le plus.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président.
[Traduction]
Madame Eckert, avant toute chose, je veux dire que j'ai trouvé intéressante la distinction que vous avez faite entre les conséquences prévues et inattendues. Je crois que c'est quelque chose que nous devrions prendre en considération à mesure que nous examinons ces lois.
J'ai aussi trouvé très intéressants vos commentaires à propos de la conformité excessive et du besoin de soutenir le renforcement des capacités.
Vous m'excuserez de poser mes questions dans la langue où sont rédigées mes notes. Habituellement, je me serais exprimée dans ma langue maternelle.
Nous avons vu, par exemple avec les sanctions infligées à l'Iran, des cas où les comptes bancaires d'étudiants ont été gelés ainsi que tout un tas d'autres complications. Nous venons tout juste de commencer notre étude, mais nous avons entendu des choses qui sont un peu troublantes pour les non-initiés, par exemple le fait qu'il n'y a pas de liste facilement accessible des personnes visées par des sanctions.
Je crois que la plupart des membres du Comité ont eu comme première impression que nous pourrions faire beaucoup plus pour aider, comme vous l'avez dit, le secteur privé à mettre en oeuvre efficacement les mesures voulues et à restreindre les facteurs de risque auxquels il s'expose. Je voulais seulement savoir s'il y avait des pratiques exemplaires ou des modèles ou n'importe quoi d'autre qui pourrait nous éclairer.
Vous avez raison pour ce qui est de la conformité dans son ensemble, cela ne fait aucun doute. Prenez, par exemple, les sanctions infligées à la Libye. Un certain nombre d'entre nous qui travaillions dans la région ont été très heureux de voir que l'ONU avait appliqué des sanctions à la Libye lorsque cela est arrivé. C'était la première fois qu'on imposait des sanctions relatives à la responsabilité de protéger les citoyens. C'était la première fois que l'ONU infligeait des sanctions de cette façon. Mais en ce qui concerne l'impact lié à l'imposition de ces sanctions, ce sont la banque centrale et les sociétés pétrolières qui ont immédiatement été visées. Cela a eu pour effet de pratiquement paralyser la quasi-totalité des étudiants dont les études étaient dans ce secteur.... Je sais qu'il y a eu d'autres exemples au Canada. Il y a eu des conséquences personnelles très lourdes.
Il existe toute une gamme de sanctions ciblées: vous pouvez geler le compte de banque d'une personne ou restreindre sa capacité de voyager. Ce sont les mesures les plus ciblées et les plus personnelles. Ensuite, il y a les sanctions sectorielles, celles qui s'appliquent au secteur pétrolier, au secteur financier, etc. On peut continuer ainsi jusqu'aux vraies sanctions globales, les sanctions qui s'appliquent à l'ensemble des secteurs économiques; elles sont moins ciblées, mais ont un grand impact sur la population. C'est donc à ce genre de sanctions que nous devons porter une plus grande attention.
La nouvelle résolution du Conseil de sécurité de l'ONU sur la Corée du Nord — je vous l'accorde, il est très important que l'ONU réagisse à la prolifération des actes d'agressivité exacerbée de la Corée du Nord — comprend des mesures qui soulèvent en fait des questions sur la portée que doivent avoir ces mesures. Je le redis, c'est un peu comme si on reconfigurait les sanctions. Il s'agit de sanctions ciblées, mais qui s'appliquent de façon très globale. Dans ce genre de situation, il faut offrir une orientation, dans une certaine mesure, au secteur privé.
Je crois que nous sommes également aux prises avec des circonstances où le gouvernement a besoin de ressources. Je reviens tout juste du Royaume-Uni, où une nouvelle équipe a été mise sur pied à partir du personnel du trésor britannique. Cette équipe a été tout spécialement créée pour s'occuper des sanctions. Dans une certaine mesure, on doit essayer de fournir une plus grande orientation et un plus grand appui pour la mise en oeuvre dans le secteur privé. Selon moi, c'est important. Il faut mobiliser des ressources à ce chapitre. Je sais que tout le monde est préoccupé par les budgets, mais il faut fournir une orientation si l'on veut que le secteur privé se conforme aux sanctions, et cela n'est pas toujours fourni. Je pense que c'est un point important sur lequel nous devrions nous pencher.
Un autre point important est la liste des sanctions. Pour la première fois l'année dernière, je crois — ou peut-être s'agit-il de l'année d'avant —, l'ONU a préparé une liste exhaustive de tous les régimes de sanctions. Si l'ONU en est capable, pourquoi notre gouvernement ne peut-il pas en faire autant?
Je sais que les sanctions sont réparties selon différents programmes au Bureau du contrôle des avoirs étrangers, mais il existe bien une liste exhaustive. Toutefois, les entreprises dépensent vraiment énormément d'argent là-dessus.
Laissez-moi vous dire que le seul secteur dans l'économie bancaire qui prospère actuellement est celui lié à la conformité. Les banques vont chercher des gens du gouvernement afin de comprendre tous ces règlements compliqués et ainsi de pouvoir s'y conformer.
[Français]
Merci beaucoup.
[Traduction]
Je vous remercie sincèrement.
Madame Charron,
[Français]
parlez-vous français?
D'accord. De toute façon, il y a le service d'interprétation. Nous sommes deux francophones. Nous allons quand même nous parler en français.
Vous parliez des sanctions, de l'idée de récupérer les biens et du risque d'affecter les gens, d'abord et avant tout. Parallèlement, n'y a-t-il pas aussi l'inverse?
Je vais prendre un exemple qui me tient à coeur, celui de Ben Ali. Le gouvernement tunisien affirme que les membres de son régime ont volé le pays pendant des années. L'un d'eux possède une maison, de l'argent et des biens au Canada. Le gouvernement tunisien supplie notre pays de les saisir et de les renvoyer en Tunisie. N'est-ce pas l'autre côté de la médaille?
Non.
Je suis tout à fait d'accord.
Je vais vous répondre en anglais, parce que je n'ai pas le vocabulaire français suffisant en ce qui concerne les sanctions.
[Traduction]
Je crois que vous avez raison, mais les sanctions sont très différentes de la Loi sur les blocages des biens de dirigeants étrangers corrompus parce que celle-ci a été invoquée par le gouvernement tunisien qui nous demande de saisir des biens au Canada, ce que, je crois, nous avons déjà fait. Je crois que des questions connexes ont déjà été posées lundi, et on a également demandé combien nous avions redonné à la Tunisie.
Personnellement, j'y vois une très grande utilité, mais d'après le nombre de fois où cette loi a été invoquée, nous voyons que cela n'arrive pas très souvent. Le Canada pourrait probablement garder les biens dans ses actifs, mais je ne crois pas que c'est le genre de chose qui va arriver souvent; le Canada n'est pas vraiment l'endroit où les gens vont aller cacher leur argent. Ils ont d'autres endroits pour cela.
Des questions peuvent quand même survenir quant à l'immobilier. Actuellement, nos définitions pour les biens immobiliers, d'un côté, sont très libres. C'est un avantage pour nous, mais, d'un autre côté, cela peut s'avérer très difficile à comprendre pour les entreprises et les banques. Devrais-je être préoccupée par la transaction immobilière qui va avoir lieu? La possibilité existe que le marché immobilier soit touché, ce qui n'était pas prévu au départ lorsque la Loi sur le blocage des biens des dirigeants étrangers corrompus a été adoptée.
[Français]
[Traduction]
Il peut y avoir de la confusion même dans un pays moderne où il y a un système de réglementation juridique... Prenons par exemple un autre pays membre de l'ONU, disons un pays d'Afrique. Il peut être très difficile pour ce pays de comprendre le but visé par les sanctions et la façon de les appliquer.
Dans le passé, l'Union africaine était une organisation régionale qui imposait ses propres sanctions en réaction aux changements inconstitutionnels de gouvernements. Elle a demandé du soutien de l'ONU: « Comment peut-on mettre un système en place? Comment peut-on appliquer des sanctions ciblées? »
La réaction globale, l'orientation, les types de documents et la façon de mettre en place des mécanismes pour la mise en oeuvre et l'application, tout cela est fourni très lentement.
Si les États-Unis et le Canada ont de la difficulté à comprendre exactement comment appliquer les sanctions, imaginez la situation pour les autres pays. Ces pays ne sont peut-être pas aussi perfectionnés que nous, mais l'embargo sur les armes les concerne en particulier, vu le très grand nombre d'armes dans divers pays d'Afrique qui contribuent à alimenter les conflits. Pour appliquer un embargo sur les armes ou sur les biens liés à la prolifération, il faut quelque chose...
Voilà donc les difficultés. Je crois que nous avons beaucoup contribué à la lutte antiterroriste depuis le 11 septembre. Nos efforts ont tous été très importants, mais pour la plupart des pays, la seule raison juridique pour laquelle on applique les sanctions, c'est qu'elles sont prescrites dans le mandat du Conseil de sécurité de l'ONU, en vertu du chapitre 7 précisément. Tous les États membres doivent s'y conformer.
Si nous voulons vraiment qu'il y ait une application multilatérale, nous allons devoir soutenir la formation et le développement des capacités. Je crois que le ministère des Affaires étrangères du Canada a financé certains programmes pour le développement des capacités dans le passé.
Madame Eckert, j'aimerais que nous revenions en arrière, parce que je sais que vous avez beaucoup écrit sur le processus d'Interlaken. Le guide issu du processus a été utilisé par un grand nombre d'États différents afin d'orienter la mise en oeuvre de leur propre régime de sanctions.
Il est ressorti de l'une des réunions qui ont été tenues dans le cadre du premier processus que l'une des conditions préalables à l'application de sanctions ciblées était la détermination claire de la cible. J'aimerais obtenir un peu plus d'information à ce sujet afin d'en connaître davantage, surtout puisque nous sommes au début de l'étude.
Selon ce qui a été écrit, la cible visée dépend largement des caractéristiques du pays ciblé. Pouvez-vous m'aider à comprendre ce que sont ces caractéristiques? Que voulait-on dire par cela à la première étape du processus?
Oui. Cela remonte à un bon moment.
Je suis contente d'apprendre qu'il y a encore des gens qui consultent le guide produit par le processus d'Interlaken. Après Interlaken, il y a eu Bonn-Berlin... on y a mis l'accent sur les embargos sur les armes, les sanctions sur l'aviation et les interdictions de voyager ciblant des personnes. Ensuite, il y a eu le processus de Stockholm, que je vous invite également à consulter.
Au début, à l'époque où le guide a été écrit, il y a eu un cas où l'ONU avait simplement indiqué « Big Freddy ». Il n'y avait aucun renseignement pour l'identification, seulement le pays et le nom « Big Freddy ». Nous avons fait beaucoup de chemin depuis. L'ONU fournit actuellement des identificateurs, du moins quand il y a un passeport... une date de naissance. L'ONU fournit toute l'information dont elle dispose dans la mesure du possible. Je crois que c'est important.
À l'époque, on se disait que pour déterminer la cible, il fallait en examiner la structure au sein d'un pays donné. Il n'y a pas de solution universelle, on ne peut pas simplement cibler le chef militaire ou le chef d'État. Dans les faits, il est très rare qu'on cible un chef d'État. Doit-on cibler les membres de la famille, par exemple, qui voyagent ou qui étudient au Canada ou aux États-Unis? Il faut examiner les circonstances particulières, et il faut faire un effort pour comprendre la situation du pays.
Très souvent, le Conseil de sécurité ne fait que réagir aux situations d'urgence. Il y a peu de prévoyance. À l'époque où nous avons écrit le guide d'Interlaken, il était peut-être question de donner une grande portée aux sanctions dès le départ... On bloque, puis on libère. On bloque le plus grand nombre de biens, puis on clarifie. Contrairement à ce qui arrive lorsqu'on prend trop de temps pour appliquer les sanctions, il est plus difficile de cacher des biens dans ce cas.
Il y a quand même des problèmes inhérents avec cela. J'ai presque honte de le dire, mais on a écrit cela il y a presque 20 ans, ou peut-être 15 ou 16. L'application des sanctions a beaucoup évolué depuis. Mais, clairement, la réalité est encore que nous devons définir l'objectif afin de savoir quoi cibler. À ce chapitre, l'ONU s'est améliorée au fil du temps.
La raison pour laquelle j'ai soulevé ce point est qu'il s'agit, je crois, de la première étape en vue de la création d'une plateforme pouvant être utilisée par d'autres pays qui veulent déterminer la façon de mettre en oeuvre leur propre régime.
À propos du guide qui a été préparé dans le cadre des processus d'Interlaken I et d'Interlaken II, j'aimerais savoir ce qui a été écrit. Pouvez-vous me donner plus de détails là-dessus, parce que je crois que cela concerne nos politiques et notre économie intérieures.
L'un des articles qu'on a ajoutés au guide était « de permettre aux États appliquant les sanctions de n'être pas tenus responsables pour des infractions liées à la conformité ». J'ai une question quelque peu théorique à vous poser. Disons qu'il y ait actuellement beaucoup de pays disposant de fonds souverains ou alors beaucoup de pays où des personnes possèdent une société filiale, ou du moins un intérêt dans une filiale, au Canada, et que cela génère beaucoup d'emplois. Au pays... Comment est-ce qu'on applique cela? Je ne comprends pas comment tout cela va fonctionner.
Si on cible un pays, ou une personne qui possède des investissements dans ce pays... Lorsqu'il est question de bloquer les actifs, c'est facile à faire tant que c'est un compte. Mais qu'en est-il si on parle d'une industrie ou d'une entreprise intérieure, ou quelque chose du genre, et qu'il y a des emplois en jeu? S'il faut geler les biens ou alors la capacité de voyager des cadres qui sont effectivement en train de travailler pour faire rouler leur entreprise, comment est-ce qu'on adapte les sanctions pour réduire les pertes au Canada?
C'est une bonne question.
Je crois que les dispositions que vous avez mentionnées font partie du modèle législatif. Cela a été fait, en particulier, pour protéger les banques. Si les biens sont gelés alors que vous dépendez du gouvernement, il y a une règle d'exonération qui s'applique pour vous empêcher d'être poursuivi en justice. Dans le passé, certaines banques ont déjà pris des mesures importantes afin de pouvoir appliquer les sanctions.
Aujourd'hui, les choses sont beaucoup plus compliquées. En Libye, par exemple, nous avons ciblé les fonds souverains. Je crois que le problème tient au fait que même si nous appliquons des sanctions, il y a quand même des exemptions. J'imagine qu'il y a aussi un processus pour des sanctions unilatérales entre le Canada et les États-Unis... Même en ce qui concerne les sanctions infligées par l'ONU, il y a des exemptions. Vous pouvez demander au Comité de prendre une mesure d'exemption... En Libye, le nombre de demandes d'exemptions dépassait presque l'entendement, parce que les sanctions appliquées avaient une trop grande portée.
Je le redis, la situation est compliquée. Il n'y a pas de réponse simple. Les sanctions doivent être adaptées aux circonstances spécifiques; elles aussi doivent être souples, mais pas trop. Il ne faut pas que chaque pays les interprète complètement librement.
Je ne sais pas si cela répond à votre question, mais je serai heureuse de me renseigner sur les dispositions que vous avez mentionnées relativement au processus d'Interlaken afin de vous fournir de plus amples détails.
Bien sûr. Ce serait d'une grande aide.
J'ai une dernière question.
J'aimerais que Mme Charron y réponde. Quand pouvons-nous véritablement établir la mesure dans laquelle les sanctions fonctionnent? Le mandat de l'ONU pour ces sanctions est de les appliquer à tous les pays, à l'inverse des sanctions infligées par l'Union européenne ou l'Union africaine, comme Mme Eckert l'a déjà dit. Alors comment savons-nous que les sanctions que nous imposons fonctionnent, et est-il même utile d'appliquer un régime de sanctions s'il ne s'agit pas d'un régime de sanctions mondial?
Qu'arrive-t-il lorsque certains pays infligent des sanctions à un autre pays ou un autre État, mais que ces sanctions peuvent être renversées par d'autres pays... à mon avis, c'est tout ou rien. Il faut que tous les pays participent, peut-être par l'intermédiaire de l'ONU. Comme Mme Eckert l'a dit, le Conseil de sécurité de l'ONU joue également un rôle dans ses politiques. Au lieu d'avoir un régime mondial qui inflige des sanctions à un État, comment est-ce que d'autres acteurs inférieurs pourraient y arriver? Y a-t-il même une raison de faire cela, cela a-t-il un effet?
C'est une bonne question. La plupart du temps, ce qu'on essaie de faire, c'est attirer l'attention des décideurs. Par exemple, l'ONU a pris des mesures très novatrices en ce qui concerne la Corée du Nord. Lorsqu'elle a réalisé que le père de Kim Jong-un aimait bien les films hollywoodiens, le scotch et d'autres produits de luxe, elle a laissé à chaque État membre le soin de définir ce qu'était un produit de luxe. Ce qui est très bien par rapport à cela, c'est que le Canada peut alors étudier la question et se demander ce que le pays pourrait faire pour mettre un peu plus de pression sur la Corée du Nord.
Vous avez raison. D'un autre côté, même si le Canada voulait couper l'approvisionnement de Kim Jong-un en whisky Seagram, cela m'étonnerait beaucoup que la Corée du Nord change ses positions dès le lendemain...
... mais si tout le monde le fait, alors oui, c'est une possibilité. Parfois, avec un peu de chance, votre pays peut couper quelque chose dont un autre a absolument besoin. Dans ce cas, couper l'approvisionnement peut fonctionner. Dans d'autres cas, il faut que des mesures soient prises collectivement.
Très rapidement, j'ai quelque chose à dire là-dessus. Actuellement, il y a une interdiction de voyager imposée à Kim Jong-un, n'est-ce pas?
Il n'y en a pas. D'accord.
Disons qu'il veut quand même son whisky Seagram. Il pourrait l'obtenir de Chine, n'est-ce pas?
Pour revenir à ce que Sue Eckert a dit, on ne peut pas résumer les sanctions à un simple « si x, alors y ». On ne peut pas dire que si on applique une sanction, il va en résulter un changement de comportement. C'est une façon pour le monde de s'exprimer d'une seule voix, de dire que nous ne sommes pas d'accord collectivement avec certaines politiques et de montrer de la façon la plus concrète qui soit que nous allons cibler le whisky. Cela ne va peut-être pas mener à un changement d'opinion, mais c'est à partir de cela qu'on peut dire, tous ensemble, que la situation est inacceptable et que nous avons des preuves en ce sens.
Vous avez raison. Rien ne nous assure que, dans 10 ans, nous allons pouvoir dire que ce sont vraiment ces sanctions qui ont changé les choses. Nous ne faisons pas simplement qu'appliquer les sanctions. Il s'agit d'une panoplie d'efforts, de missions diplomatiques, de Pourparlers à six, etc. Il est impossible de vraiment isoler les effets réels des sanctions.
Pourrais-je ajouter deux points rapides à ce que vous venez de dire? Il est clair qu'un des points est... vous avez absolument raison, l'efficacité des mesures de l'ONU dépend de la façon dont, par exemple, la Chine interprète le terme « articles de luxe » et si elle l'interprète et veille à appliquer les lois à cet égard. C'est une raison de plus pour laquelle nous devons travailler de façon multilatérale.
Il y a des situations, par exemple en Iran, dans lesquelles nous avions un niveau élémentaire de sanctions, mais ce n'était pas ces sanctions qui exerçaient une pression. C'était les sanctions coordonnées des États-Unis, du Canada et en particulier de l'UE sur le pétrole et les sanctions financières qui étaient déterminantes, qui ont vraiment serré la vis à l'Iran au point qu'elles ont nui à son économie.
Elles sont peut-être compliquées. Il y a peut-être de la confusion parfois à savoir qui avait imposé ces sanctions, mais je crois que c'était une combinaison de sanctions... des États aux vues similaires ont décidé de travailler ensemble pour imposer les sanctions de l'ONU comme fondement, mais c'est en allant au-delà de celles-ci que cela a vraiment fait avancer les choses dans le cas de l'Iran.
Merci, monsieur Saini.
Nous allons passer à M. Levitt.
Nous terminons notre première série de questions, chers collègues, et parce qu'il s'agit d'un sujet important, nous passerons à la deuxième série de questions.
Nous commencerons par M. Levitt et ensuite M. Kmiec.
Bon après-midi.
Le Canada a la réputation d'être un défenseur des droits de la personne partout dans le monde. On a soulevé la préoccupation ici, et je la partage, selon laquelle notre régime de sanctions actuel n'a pas l'efficacité juridique ni la capacité d'application de la loi nécessaires pour tenir responsables tous les auteurs de violations des droits de la personne.
Vous avez entendu parler plus tôt de la loi Magnitsky adoptée par le Congrès des États-Unis. C'est quelque chose qui a aussi été soulevé dans le contexte canadien, pour être appliqué non pas uniquement à la Russie, mais à l'échelle mondiale. J'attends vos suggestions. J'attends vos commentaires. Si notre but est d'être en mesure de tenir responsables les auteurs de violations des droits de la personne dans d'autres pays, comment pouvons-nous le faire? Quelles suggestions avez-vous sur la façon dont nous pouvons prendre des mesures qui ont du mordant et qui nous permettront de tenir ces personnes responsables?
C'est difficile parce que si les violations des droits de la personne sont commises ailleurs, à moins que les auteurs de celles-ci aient violé une loi canadienne, c'est très difficile d'essayer de promulguer une loi qui les punirait. Je dirais, souvent, que dans le cas des droits de la personne, plutôt que des sanctions, il faut adopter des mesures qui encouragent à continuer d'accepter des étudiants étrangers afin d'éduquer une autre génération sur le fait de respecter les droits de la personne pour qu'ils puissent retourner chez eux avec ces connaissances. C'est donc un changement qui a lieu dans le pays même.
Je sais qu'il y a un désir de punir les transgresseurs, mais, souvent, si le but ultime est d'améliorer les droits de la personne, les sanctions ne sont pas nécessairement le bon outil, particulièrement de la façon dont le Canada les utilise. Je crois qu'il y a d'autres choses que le Canada peut faire qui auront cet effet.
Je ne crois pas qu'il s'agit du seul outil dont nous disposons pour nous acquitter de notre engagement à l'égard des droits de la personne à l'échelle mondiale et canadienne, mais certainement le fait d'être en mesure de tenir responsables les coupables, à l'échelle internationale est quelque chose qui pose problème.
En tant que professeure, j'ai accès à des centaines d'étudiants. Je crois que les gens comme moi ont un effet intangible sur des choses comme comprendre ce que sont les droits de la personne. Sue? Je ne sais pas comment répondre à cette question.
Lorsqu'on utilise de plus en plus des sanctions de l'ONU — lorsque nous avons effectué l'évaluation relative à l'impact et à l'efficacité — les droits de la personne ne sont pas le but principal en général, mais ils le sont pour nombre de régimes de sanctions que l'ONU met en oeuvre. De fait, il y a eu une évolution qui nous a aidés à préciser nos objectifs concernant les violations des droits de la personne. La violence sexuelle et sexiste est devenue un fondement des désignations. Par exemple, le fait de travailler avec des ONG dans la région, en fournissant de l'information à un groupe d'experts et aux gouvernements nationaux... eux peuvent fournir ce type d'informations pour cibler les personnes qui violent les sanctions.
Je crois que c'est très important, mais c'est difficile, et ce n'est pas le seul... Nous avons tendance à nous concentrer sur les sanctions parce que c'est quelque chose que nous pouvons imposer et que les gouvernements peuvent mettre en place, mais il y a un éventail de choses différentes qui peuvent être faites. Je crois qu'il s'agit d'un problème lorsque nous nourrissons des attentes trop élevées à l'égard des sanctions. Dans la mesure où ce que nous pouvons faire est de travailler multilatéralement afin que les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU soient les plus contraignantes possible, je crois qu'il est important d'attirer l'attention sur les violations des droits de la personne et ensuite de mettre en oeuvre les sanctions. Cela nous ramène à la mise en oeuvre. Il y a des dispositions dans les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU que de nombreux États membres ne mettent pas en oeuvre, alors à un moment donné, vous devez fournir la capacité d'aider à la mise en oeuvre. Au bout du compte, ce n'est pas une chose populaire auprès de beaucoup de gouvernements, mais si elles ne sont pas mises en oeuvre, alors on doit penser à des sanctions secondaires.
Je le répète, ce n'est pas une notion populaire auprès d'un certain nombre de gouvernements, mais je crois qu'il est difficile de comprendre le but des sanctions secondaires, cependant, parce qu'on ne sait pas si les gouvernements ne s'y conforment pas en raison d'un manque de capacité ou s'il s'agit de violations volontaires. Si nous sommes très sérieux pour ce qui est de la mise en oeuvre, alors il doit y avoir une application de la loi; il ne faut pas se borner à préciser les objectifs et laisser les gens faire ce qu'ils veulent.
Je voudrais seulement ajouter que la préoccupation, je suppose, avec l'ONU à cet égard, c'est que parfois nous avons des pays qui utiliseront leur droit de veto ou qui feront ce qu'ils veulent pour ne pas mettre en oeuvre les résolutions, et que — bien sûr — c'est un obstacle auquel nous faisons face... Encore une fois, c'est une des raisons pour lesquelles nous envisageons de renforcer le régime de sanctions canadien pour nous permettre d'être en mesure d'aborder certaines de ces situations.
Je vous recommanderais aussi l'examen de haut niveau des sanctions de l'ONU qui a été effectué et publié en novembre passé. Il y a un processus d'examen qui commence cette année. Il y avait 150 — je sais que cela semble intimidant — recommandations qui pourraient être appliquées par les organisations internationales de l'ONU relativement aux sanctions, aux États membres et au secteur privé. Je vous encourage à regarder ces recommandations parce que je crois que certaines d'entre elles peuvent être utiles.
Merci.
Nous avons dépassé un peu le temps alloué, alors, chers collègues, soyez brefs.
Monsieur Kmiec, vous avez cinq minutes.
Merci à vous deux d'être venus.
Je veux parler de la loi américaine Magnitsky. Je suis heureux que mon collègue en ait parlé. Madame Eckert, vous l'avez mentionnée brièvement au cours de votre déclaration préliminaire, mais vous n'avez pas approfondi le sujet. Est-elle une réussite aux États-Unis? Quelle est l'opinion des experts en politiques là-bas?
Je ne sais pas si je peux décrire l'opinion des experts en politiques. C'est la législation du Congrès que le pouvoir exécutif met en oeuvre. Quel est son objectif? Contraindra-t-elle les personnes? Je ne suis pas certaine que nous ayons vu qu'elle a été particulièrement efficace en matière de contrainte. Elle vise la stigmatisation de ces personnes. Je crois que c'est important. Cela envoie un signal selon lequel le type d'activités qu'elles exercent est incohérent avec les normes.
Je préférerais vous revenir là-dessus si vous n'y voyez pas d'inconvénients. Je connais les listes, et je sais qu'elle est mise en oeuvre, mais je n'ai pas vraiment examiné son efficacité. Dans le cadre de notre travail, nous avons examiné la mise en oeuvre des sanctions de l'ONU pour ce qui est de leurs impacts et de leur efficacité. Encore une fois, on parle de l'objectif. Je crois que les contraintes peuvent être très efficaces pour signaler ou stigmatiser des personnes, et je crois que ces désignations appartiennent à la deuxième catégorie.
Je veux parler de comportements coercitifs par rapport à la privation de ressources. Vous avez parlé de ce qui était le plus efficace. Madame Charron, vous voulez peut-être aussi commenter l'exclusion en tant que forme de pénalité comme un outil parmi tant d'autres que le Canada pourrait utiliser. Il pourrait y avoir des interdictions de déplacement, l'interdiction, pour certaines personnes, de participer à l'économie canadienne ou une interdiction de territoire. Ces restrictions ne devraient-elles pas faire partie des outils que nous utilisons pour lutter contre les criminels étrangers ou des personnes avec lesquelles nous avons d'énormes différends en matière de politiques en raison de leurs violations des droits de la personne dans d'autres pays? L'exclusion est une forme de pénalité, mais elle sert aussi à indiquer aux autres pays les normes sociales et politiques que nous voulons que les autres acceptent. L'exclusion ne devrait-elle pas faire partie de ce que nous faisons?
Si vous voulez dire par « exclusion », les empêcher d'entrer au Canada, c'est certainement possible. Je veux établir un lien entre cela et votre question concernant la loi Magnitsky. Une des conséquences inattendues, lorsqu'on fait ces deux choses trop souvent, et pour de nombreuses personnes, c'est qu'on légitimise en réalité ces personnes. Dans certains cas, l'interdiction d'entrer au Canada peut être un badge d'honneur; cela peut leur donner plus de légitimité dans leur pays. Nous devons penser à ne pas leur offrir une tribune en faisant cela. Oui, nous pouvons interdire à ces personnes d'entrer au Canada, mais nous ne pouvons pas interdire à des Canadiens de revenir au pays. C'est une possibilité, et nous faisons cela. Notre liste tend toujours à concorder avec celle des États-Unis et celle de l'UE.
J'allais parler de ces conséquences inattendues. Je discutais avec ma collègue auparavant. Nous parlions du début de la levée de certaines des sanctions visant l'Iran. Nous avons posé une question au gouvernement, et il n'a pas pu dire laquelle de ces sanctions avait été levée. En réalité, nous avons dû vérifier la liste des États-Unis, qui était plus facile à trouver. Nous avons comparé les deux et avons ensuite en quelque sorte compris ce qui se passait. J'ai demandé à la GRC s'il y avait une façon facile pour une entreprise de trouver une liste de toutes les sanctions au Canada; elle m'a répondu que cette information n'était pas accessible. Est-ce quelque chose que les entreprises vous demandent? Est-ce quelque chose qui est couramment demandé?
Je croirais que le nombre de blogueurs sur le monde des affaires fournissant aux entreprises de l'information mise à jour concernant les sanctions canadiennes est une indication qu'il n'existe pas une liste qu'elles peuvent consulter. On en parle beaucoup sur Internet: « Qu'est-ce que c'est que cette mise à jour? »
Par exemple, lorsque nous imposions des sanctions à la Russie, nous mettions à jour la liste presque aux deux jours. Cela signifie qu'aux deux jours, une banque devait revoir tous ses comptes. Il en allait de même pour les entreprises. Nous voulions montrer que nous sommes sérieux à l'égard de la Russie, mais en agissant de manière parcellaire, nous imposions un fardeau beaucoup plus important aux banques et aux personnes, alors il aurait peut-être été préférable d'avoir une liste et de la publier. Je comprends que nous voulions montrer à la Russie à quel point nous étions sérieux relativement à ses actions. Toutefois, la conséquence inattendue était que nous imposions un fardeau plus important aux banques et aux entreprises canadiennes que celui imposé à la Russie.
J'ajouterais seulement que je crois que les sanctions ont été une bénédiction pour les avocats et les consultants. Personnellement, lorsque j'étais au Capitole et lorsque je faisais partie du pouvoir exécutif, j'estimais que les gens ne devraient pas avoir à payer pour s'assurer qu'ils respectent la loi. Les organismes de réglementation devraient être obligés d'être clairs sur ce que sont les règlements, ou, s'il y a des questions, être en mesure de répondre à celles-ci et de fournir ce type d'orientation. Plus la situation s'est compliquée, moins le pouvoir exécutif a été en mesure de répondre à certaines de ces circonstances, même aux États-Unis.
Les sociétés déboursent des sommes d'argent importantes — je parle de millions et de millions de dollars — pour respecter les lois. Elles utilisent des logiciels. Vous avez parlé d'une liste consolidée. Si vous allez voir un fabricant de logiciels qui fait ce type de choses, il y a World-Check, Thomson Reuters et il y a même les outils et les logiciels utilitaires de SWIFT. Ils existent, mais vous devez payer pour les utiliser. Quant à ce qu'ils font, ils sont mis à jour quotidiennement, et c'est ce que les institutions financières utilisent pour filtrer les transactions, mais encore une fois, pensez au volume de transactions qui passent dans les systèmes informatiques de messagerie pour ce qui est de transferts financiers. C'est très volumineux. Chaque fois qu'il y a une requête touchant l'une d'entre elles, cela signifie qu'une personne doit l'examiner et décider quoi faire à cet égard.
Je crois que nous devons savoir que ces types d'outils, ces outils de politique étrangère, bien qu'importants, ne sont pas gratuits. Essentiellement, ce que nous faisons, c'est transférer le coût au secteur privé. Comme j'ai déjà fait partie d'un organisme de réglementation, je crois que c'est le travail du système de réglementation de fournir ce type de clarté. On ne devrait pas avoir à embaucher toute une équipe, mais malheureusement, c'est ce qui s'est produit au cours des dernières années.
Merci.
Nous passons maintenant à la dernière question avec M. Fragiskatos pendant cinq minutes, et ensuite nous terminerons là-dessus.
Monsieur le président, je sais que mon collègue s'intéresse aussi à ces enjeux, et je crois qu'il a attendu patiemment, alors je vais céder mon temps de parole à M. Wrzesnewskyj, membre associé du comité.
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de me donner l'occasion de parler, monsieur Fragiskatos.
J'aimerais poursuivre sur la lancée de mon collègue au sujet des sanctions ciblées concernant les personnes, comme les sanctions prévues par la loi Magnitsky. Dans un autre comité, au cours de l'été, nous avons entendu des témoignages horribles sur des arrestations et de la torture extrajudiciaires en Crimée dans les villes de Donetsk et de Luhansk, contrôlées par la Russie. Dans un cas, ces arrestations extrajudiciaires, la torture et les meurtres ont été ordonnés pour terroriser la population locale. Dans le cas de la Crimée, le témoin a été transporté en Russie pour y subir un procès bidon. La torture était un moyen d'obtenir un faux témoignage contre l'auteur ukrainien d'un documentaire et son collègue.
Lorsque nous avons entendu ce témoignage, il est devenu évident que des noms pouvaient être nommés. Ils ont nommé des responsables qui ont infligé cette torture. Ils ont nommé des responsables du FSB, les responsables de l'organisme de renseignements russe. Dans certains cas, ils dirigeaient la torture, et dans d'autres, c'est eux qui l'infligeaient.
Nous savons que Mme Eckert nous reparlera de l'efficacité des sanctions qui visent très directement les auteurs de violations des droits de la personne, mais j'aimerais poser cette question à Mme Charron. Pour ce qui est des interdictions de déplacement et des gels des avoirs dans les cas comme celui de la Russie, où on a non seulement une dictature qui émerge de nouveau, mais aussi une kleptocratie, avec ces responsables et les membres de leur famille qui voyagent à maintes reprises vers l'Occident — souvent, ils ont des actifs importants en Occident — ma question est la suivante: des sanctions ne seraient-elles pas efficaces?
Il semble, à en juger d'après la réaction du côté russe, que ces sanctions ciblées individuellement contre des tortionnaires, des gardes, des procureurs et des juges dans le cadre de procès bidon semblent être efficaces. Une des choses que le témoin a dites clairement, c'est qu'il voulait qu'on nomme publiquement les personnes qui avaient commis ces horreurs contre eux, et d'une façon qui ferait en sorte qu'elles ne puissent pas se cacher.
Madame Charron, en 2005, vous avez écrit un article intitulé « Canada's 3T's of non-Trade Sanctions' Employment: Tertiary, Timid and Tepid ». Ces sanctions semblent être l'opposé; elles sont très ciblées. Êtes-vous toujours d'accord pour dire que le régime de sanctions du Canada est tertiaire, timide et tiède comme vous l'avez écrit en 2005? Ne sont-elles pas un outil efficace d'après ce que nous avons vu jusqu'à maintenant avec la Russie?
Premièrement, l'article a été écrit il y a plus de 10 ans, et il renvoyait aux sanctions de l'ONU et à leur application par le Canada. Ces trois T s'appliquent au temps qu'il nous faut après avoir reçu une résolution de l'ONU pour créer le règlement. Si les sanctions visaient l'Afrique, cela pourrait prendre 100 jours pour mettre en place le règlement. Si elles étaient contre l'Irak, nous pourrions le faire instantanément. Ce que je soulignais, c'est l'incohérence des mécanismes qui sous-tendent notre application des sanctions.
Je crois que ce que vous décrivez est répréhensible. Bien sûr, nous ne pouvons que sanctionner des actifs qui ont un lien canadien. Nous pourrions certainement dresser une liste de personnes pour les empêcher de venir au Canada, mais la mise au pilori de ces personnes est le travail qu'Amnistie internationale et d'autres organisations des droits de la personne font jour après jour. Il y a d'autres façons dont le Canada pourrait soutenir le fait de s'assurer que cette pratique d'arrêter les gens sans une application régulière de la loi... Mais je ne crois pas que les sanctions du Canada vont nécessairement arrêter cela. Je sais que ce n'est pas ce que vous voulez entendre.
J'ajouterais simplement qu'il y a un rôle à jouer, avant les sanctions de l'ONU. Je suis d'accord. Je crois qu'il est très important d'obtenir le plus d'États membres possible engagés dans les sanctions, mais même en l'absence d'une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU, il existe d'autres façons pour les États de coordonner des États aux vues similaires, et c'est ce qui a donné lieu aux sanctions visant la Russie. Elles ont été le fait d'États aux vues similaires, soit les États-Unis, le Canada et l'Europe.
Je crois qu'elles ont un effet. Je pense que certaines de ces mesures individuelles ou celles qui visent précisément le commerce ou les mesures financières frappent probablement le plus durement. Nous devons effectivement être prudents parce qu'il y a quelquefois une mobilisation de ceux qui sont visés. Nous avons vu cela en Irak, et je ne sais pas à quel point cela est devenu un phénomène en Russie.
Même si nous ne pouvons pas obtenir de sanctions de l'ONU, le fait que les pays aux vues similaires utilisent ces mesures, les coordonnent et tentent d'avoir le plus d'uniformité possible peut les rendre plus efficaces.
Merci beaucoup, chers collègues.
Mesdames Sue Eckert et Andrea Charron, je vous remercie beaucoup de votre temps. Nous en avons pris un peu plus que prévu et nous aurions probablement pu en prendre davantage, mais je voulais d'abord vous remercier au nom du Comité de nous avoir transmis cette information précieuse.
Je vais répéter en quelque sorte ce que M. Kent a dit. Une des choses que nous souhaitons faire est d'examiner cette loi en détail pour observer son efficacité. Ce que nous recommandons au Parlement en ce qui concerne cette loi est évidemment très important pour le Canada, et il faut favoriser une meilleure compréhension des sanctions et de leur signification, non pas seulement pour nous au pays — eh bien, certainement, pour les banques et d'autres dans la communauté des affaires —, mais aussi dans notre relation avec d'autres pays dans le monde.
Il s'agit d'une discussion et d'un débat extrêmement importants, et nous apprécions votre temps. Si, selon vous, il y a toute autre information qui pourrait être utile au comité, n'hésitez pas à communiquer avec nous et à nous la transmettre; nous vous aiderons à le faire.
Merci beaucoup. Nous avons beaucoup apprécié vos témoignages cet après-midi.
Merci, monsieur le président. Nous sommes heureux de faire tout ce que nous pouvons pour vous aider.
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