:
Je déclare la séance ouverte.
Chers collègues, je suis conscient que nous sommes en retard et que tout le monde essaie de s'organiser, mais par respect pour nos témoins qui attendent bien poliment, nous allons commencer sans plus tarder.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude sur l'aide aux Canadiens en difficulté à l'étranger, c'est-à-dire les affaires consulaires.
Nous accueillons aujourd'hui Mme Heather Jeffrey, du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. Elle est accompagnée de M. David Drake, directeur général de la Direction générale du contre-terrorisme, du crime et du renseignement.
De plus, nous allons également entendre M. James Malizia, commissaire adjoint, Sécurité nationale et Police de protection, Police fédérale, à la Gendarmerie royale du Canada.
Nous vous souhaitons la bienvenue à tous, et encore une fois, nous vous présentons nos excuses. Nous avons très peu de contrôle sur la façon dont les choses se passent à la Chambre, mais au moins, nous pouvons contrôler cette séance.
Je vais maintenant céder la parole à Mme Jeffrey afin qu'elle puisse faire sa déclaration, après quoi, nous enchaînerons avec une période de questions.
Madame Jeffrey, la parole est à vous.
:
Je vous remercie, monsieur le président, de nous accueillir de nouveau durant vos audiences sur les services consulaires. Tout d'abord, j'aimerais faire le point sur le travail de l'équipe consulaire depuis notre dernière rencontre en octobre dernier. Je céderai ensuite la parole à mon collègue David Drake, directeur général de la Direction générale du contre-terrorisme, de la criminalité et du renseignement, puis à James Malizia, commissaire adjoint, Sécurité nationale et Police de protection, à la GRC.
Depuis notre dernière comparution, nous avons observé une hausse constante du nombre de nouveaux cas consulaires. Même si la nature et la ventilation des dossiers sont demeurées stables, en 2017, nous avons ouvert 11 000 dossiers consulaires de plus qu'en 2016, soit une augmentation de 4 %.
[Français]
Le programme poursuit sans relâche le processus de modernisation des services consulaires en vue de composer avec la hausse de la demande. Par exemple, nous avons mené des recherches sur l'opinion publique auprès des voyageurs canadiens pour mieux comprendre comment ils se préparent en vue d'un voyage, de quelle information ils ont besoin et quelles sont leurs attentes quant aux services consulaires. Même si nous ne disposons pas encore des résultats complets, il est manifeste que les Canadiens s'attendent toujours à des services de très grande qualité, accessibles 24 heures sur 24 , 7 jours sur 7.
[Traduction]
Depuis notre dernière comparution, nous avons continué d'investir dans la formation, par exemple en organisant des cours de formation de base à l'intention de nos nouveaux agents consulaires à l'étranger. En tenant compte des tendances observées, nous avons donné des cours sur la maladie mentale et les services consulaires à environ 80 agents consulaires dans le monde entier, et veillé à ce que les agents consulaires en mi-carrière en Afrique suivent une formation avancée concernant, entre autres, l’arrestation et la détention. Ces initiatives permettent de maintenir et de renforcer le niveau de professionnalisme des services consulaires qui constituent un volet distinct du service extérieur.
Pour être à la hauteur de ces attentes, nous miserons en partie sur la technologie. Grâce à notre projet « Prendre le virage numérique », nous pourrons fournir en temps réel aux Canadiens l'information dont ils ont besoin grâce à la technologie mobile qui leur convient le mieux et nous les mettrons en contact avec les services consulaires au besoin.
Nous améliorons l'aide offerte aux Canadiens en instaurant de nouveaux services, comme l'initiative numérique « Consultez voyage », que j'ai mentionnée en octobre, et l'application « Bon voyage ».
Une version nouvelle et améliorée du système de gestion des cas, des urgences et des contacts sera mise en oeuvre en 2020. Ce système plus robuste modernisera notre système de gestion des dossiers consulaires, facilitera le repérage des tendances et des défis, et nous permettra de mieux faire le suivi des services fournis et, ainsi, de nous assurer que leur prestation est uniforme et conforme à nos normes élevées.
Cet investissement dans la technologie ne représente qu'une partie des ressources considérables qu'Affaires mondiales Canada consacre au renforcement de sa capacité à offrir des services consulaires et de gestion des urgences de qualité.
À cet égard, je vous signale que le coût de la prestation des services consulaires dépasse toujours les recettes tirées des droits à payer pour les services consulaires. Par exemple, durant l'exercice 2016-2017, le coût des services consulaires s'est élevé à 131 millions de dollars, dont 105 millions sont le fait de droits pour services consulaires.
Nous procéderons sous peu à un examen de nos méthodes de ressourcement et d'établissement des coûts afin de pouvoir continuer à proposer un niveau de service efficace et uniforme à l'étranger.
[Français]
Les autres volets de notre stratégie concernent la coopération internationale. Les agents consulaires tiennent régulièrement des rencontres bilatérales avec leurs homologues en vue d'aplanir des problèmes généralisés ou propres à des cas particuliers, et de tirer profit de pratiques exemplaires.
[Traduction]
Par ailleurs, notre travail international progresse à un rythme soutenu. Comme nous agissons à titre de secrétariat du Forum consulaire mondial, nous entretenons d'excellentes relations avec les services consulaires de plus d'une quarantaine de pays, tant nos alliés habituels ayant des vues similaires aux nôtres que de nouveaux partenaires. Ces initiatives facilitent la coopération au titre des questions consulaires et ont engendré de nouveaux partenariats qui profitent directement aux Canadiens. Par exemple, cette année, nous avons tenu des discussions sur des sujets bien précis comme la double nationalité, les services offerts aux enfants et d'autres questions émergentes.
Sur le plan des communications, nous examinons constamment de nouvelles façons de rayonner auprès d'un plus grand nombre de Canadiens. Chaque année, l'équipe de sensibilisation aux services consulaires d'Affaires mondiales sillonne le Canada pour rencontrer des Canadiens qui voyagent et des représentants de l'industrie touristique dans le cadre d'activités, de foires et de conférences organisées par l'industrie, de même que dans les grands aéroports. L'équipe fait valoir aux voyageurs l'importance d'obtenir des conseils en temps opportun et de souscrire une assurance voyage, d'utiliser le service d'inscription des Canadiens à l'étranger, sans oublier la consultation de publications clés faisant état de renseignements importants sur les voyages.
Nous nous employons aussi à bien informer les Canadiens au moyen de campagnes de sensibilisation du public, comme la récente campagne pour la semaine de relâche qui comprenait une séance d'information technique pour les médias, des pages Web et des messages véhiculés sur les médias sociaux, le but étant de souligner certaines des principales façons d'assurer la sécurité des Canadiens durant leurs déplacements. Ce printemps, nous lancerons une campagne similaire avant le début de la saison des ouragans.
Enfin, nous tenons à remercier le Comité de l'attention qu'il accorde aux services consulaires. Nous sommes impatients d'avoir les résultats de cette étude, qui contribuera à l'élaboration de notre stratégie de modernisation des services consulaires.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions une fois que mes collègues auront présenté leurs exposés.
Merci.
Je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole devant le Comité.
Je m'appelle David Drake, et je suis le directeur général à la Direction générale du contre-terrorisme, du crime et du renseignement, à Affaires mondiales Canada. Depuis 2014, je suis directement responsable des interventions d'Affaires mondiales Canada dans les cas de prises d'otages concernant des Canadiens par des terroristes et j'en assume la supervision opérationnelle.
Si je comprends bien, le Comité souhaite avoir plus d'informations sur la coordination interministérielle en cas de prise d'otages. Je vais donc vous parler aujourd'hui de la structure d'intervention du gouvernement du Canada en cas de prise d'otages et du rôle d'Affaires mondiales Canada pour soutenir les familles des otages. Je céderai ensuite la parole à mon estimé collègue James Malizia, commissaire adjoint à la GRC, avec qui Affaires mondiales Canada collabore de façon exceptionnellement étroite quant à ces dossiers.
Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour répondre à vos questions le plus ouvertement possible et de la façon la plus complète possible. Cependant, la confidentialité des documents du Cabinet et la classification des renseignements pourraient restreindre ce que je serai en mesure de communiquer. Surtout, je ne peux divulguer aucun renseignement qui pourrait compromettre des opérations en cours ou de futures opérations ou encore mettre la vie d'otages ou d'autres personnes en danger.
[Traduction]
Je peux toutefois vous informer, et avec grand soulagement, que depuis peu et pour la première fois depuis 2017, nous ne gérons aucun dossier actif. Mais cela pourrait bien sûr changer à tout moment.
La prise d'otages est une tactique de choix des groupes terroristes et des individus qui cherchent à soutirer de l'argent à des gouvernements ou à obtenir des concessions de leur part. Les incidents sont fréquents dans les zones de conflit, ainsi que dans les États où les autorités n'exercent pas de contrôle réel ou n'ont pas la capacité nécessaire pour le faire.
La plupart des Canadiens qui se font enlever à l'étranger sont victimes du crime organisé ou de criminels qui agissent individuellement. Il arrive aussi que des Canadiens soient détenus illégalement par des milices ou des autorités responsables de la sécurité dans des circonstances similaires à celles d'une prise d'otages.
Ces incidents sont généralement gérés par mes collègues du Secteur des services consulaires, à Affaires mondiales Canada, sous la direction de Mme Jeffrey. Les cas de prises d'otages par des terroristes sont cependant gérés par une unité hautement spécialisée du ministère qui relève de ma responsabilité. Bien entendu, vous comprendrez que nous travaillons en étroite collaboration.
[Français]
Cette division du travail illustre le fait que les prises d'otages par des terroristes exigent le recours à des outils différents, de même qu'à une expertise et à des compétences spécialisées en raison de leur incidence sur la sécurité nationale.
Bien entendu, la distinction entre criminel et terroriste n'est pas toujours claire. Certains éléments des prises d'otages par les terroristes nécessitent un soutien distinct des services consulaires, alors que certains dossiers d'ordre consulaire nécessitent les services spécialisés de l'équipe des incidents critiques, soit mon équipe.
Qu'il y ait ou non des incidences sur la sécurité nationale, le gouvernement du Canada considère que la sécurité de tous les Canadiens est d'une importance fondamentale.
Depuis 2005, le gouvernement du Canada a géré plus de 20 cas qualifiés de prises d'otages par des terroristes, soit parce qu'une entité terroriste en a revendiqué la responsabilité ou parce qu'un citoyen canadien a été pris en otage à un endroit où il semblait imminent qu'il serait vendu ou échangé et se retrouverait ainsi aux mains d'un groupe terroriste.
[Traduction]
En cas de prise d'otages par des terroristes, Affaires mondiales Canada coordonne le Groupe de travail interministériel, une intervention pangouvernementale qui table sur les efforts concertés des acteurs des sphères de la diplomatie, du maintien de l'ordre, du renseignement et des activités militaires. On a également recours à des négociateurs et des enquêteurs qualifiés, ainsi qu'à des services de collecte et d'analyse du renseignement. La façon de faire du Canada dans ces cas ressemble beaucoup à celle de ses alliés et partenaires les plus proches, qui utilisent aussi des structures d'intervention pangouvernementales en cas de prise d'otages.
Tout d'abord, sachez que la responsabilité première en matière d'intervention revient au pays où a lieu la prise d'otages. On l'oublie souvent. À cet égard, le Canada travaille étroitement avec les autorités étrangères et ses alliés à tous les échelons pour obtenir la libération des Canadiens et les rapatrier. L'intervention du gouvernement du Canada comprend donc des efforts diplomatiques considérables.
La participation des familles constitue un élément essentiel de nos interventions. La Gendarmerie royale du Canada et Affaires mondiales Canada offrent des conseils et du soutien aux familles pendant toute la durée d'une prise d'otages dans le respect des lois canadiennes et des obligations juridiques du Canada à l'échelle internationale.
Une prise d'otages est un supplice horrible et inimaginable pour la famille et les proches des victimes. Les responsables du soutien aux familles font tout en leur pouvoir pour travailler le plus étroitement possible avec les familles et les aider tout au long de la pénible épreuve qu'elles traversent. Mon collègue, le commissaire adjoint Malizia, parlera du rôle de la GRC à cet égard.
[Français]
Le gouvernement du Canada examine constamment les pratiques et les procédures qu'il emploie dans ces cas complexes dans le but de cerner les points à améliorer.
Les récentes mesures prises en ce sens comprennent des entrevues avec des membres de la famille d'une victime qui ont reçu un soutien direct pendant une prise d'otages de même que des consultations auprès de proches partenaires étrangers et d'autres experts au sujet des pratiques exemplaires à adopter pour soutenir les familles.
[Traduction]
Les prises d'otages sont toutes uniques et extrêmement complexes. Elles nécessitent donc des interventions très différentes. Néanmoins, nous étudions en détail chacune d'entre elles afin de mieux comprendre leurs particularités et leurs points communs. Nous les comparons et en discutons avec nos homologues responsables des structures d'intervention dans des pays aux vues similaires aux nôtres. Nous rencontrons les familles des otages et leur demandons leurs commentaires. Grâce à ces mesures, le gouvernement du Canada renforce continuellement ses pratiques exemplaires, et il applique activement les leçons ainsi tirées.
Je vais donc m'arrêter ici et céder la parole à mon collègue de la GRC, le commissaire adjoint James Malizia.
Merci.
:
Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole dans le cadre de cette étude importante.
Mes propos d'aujourd'hui porteront surtout sur le rôle de la GRC sur la scène internationale, notamment sur la concertation avec les ministères compétents, afin d'apporter de l'aide aux Canadiens en difficulté à l'étranger. J'aborderai aussi brièvement notre rôle particulier par rapport aux voyageurs à risque élevé.
[Français]
Permettez-moi de vous donner d'abord un aperçu de notre empreinte internationale.
La GRC a une présence internationale vaste et variée, étant donné qu'elle est souvent appelée à composer avec des situations qui vont de Canadiens arrêtés ou détenus à l'étranger à des cas plus complexes, comme des Canadiens enlevés par des organisations terroristes.
Le soutien d'enquêtes criminelles au pays et à l'étranger, la participation à des opérations internationales de maintien de la paix et au renforcement de capacités, l'utilisation des réseaux d'échange de renseignements d'INTERPOL et d'Europol et, s'il y a lieu, la prestation d'aide à des Canadiens à l'étranger font tous partie du Programme de police internationale de la GRC.
Dans le cadre de ce mandat étendu, notre objectif fondamental est de collaborer avec les organismes d'application de la loi au Canada et à l'étranger pour contrer l'activité criminelle mondiale et assurer la sécurité et la protection des Canadiens, ce qui comprend ceux qui se trouvent à l'étranger.
[Traduction]
Le maintien d'une présence internationale robuste procure à la GRC un outil précieux pour servir les intérêts du Canada en matière de services de police. La GRC entretient des relations de collaboration solides avec des organismes d'application de la loi du monde entier et a ainsi accès à un réseau de soutien mondial qu'elle peut mobiliser dans des situations urgentes. Par exemple, dans des régions dans lesquelles la GRC a moins de relations établies, nous pouvons miser sur les ressources des partenaires du Groupe des cinq et d'autres pays d'optique commune afin d'étendre notre portée et notre influence.
En mars 2018, 39 agents de liaison, 4 gestionnaires régionaux et 12 analystes du renseignement criminel étaient en poste dans 26 endroits stratégiques dans le monde. Notre empreinte internationale, nos partenariats mondiaux et l'influence que nous exerçons alimentent toutefois la croyance que la GRC a la capacité d'enquêter sur des crimes ou d'aider les Canadiens dans d'autres pays, sans restrictions. C'est tout faux. Notre capacité d'intervenir sur la scène mondiale comporte quelques limitations importantes. Sans le consentement du pays hôte, la GRC n'a pas compétence pour mener des enquêtes dans un pays étranger, et le Code criminel permet d'engager des poursuites au Canada seulement pour certaines infractions commises à l'étranger.
Cependant, une fois que les gouvernements étrangers donnent leur consentement, la GRC mène des enquêtes en collaboration avec les autorités locales. Par ailleurs, la collecte d'éléments de preuve doit être conforme aux lois canadiennes et aux normes énoncées dans la Charte.
[Français]
Je voudrais à présent aborder deux ou trois domaines dans lesquels la GRC joue un rôle considérable. Je traiterai du travail que la GRC a accompli relativement aux disparitions et aux enlèvements internationaux d'enfants, et j'attirerai votre attention sur l'enlèvement de Canadiens à l'étranger par des groupes terroristes. Dans toutes ces situations, nous travaillons en étroite collaboration avec nos partenaires du gouvernement du Canada afin de mettre en oeuvre une approche pangouvernementale efficace.
Le Centre national pour les personnes disparues et restes non identifiés de la GRC intervient lorsqu'une personne enlevée a ou peut avoir traversé les frontières nationales, et il prête son concours et assure la coordination dans les affaires d'enfants disparus. Il peut aussi mener des enquêtes dans des affaires d'enlèvement d'enfants à l'égard desquelles il apporte son concours et son soutien aux organismes canadiens d'application de la loi.
La coordination à l'échelle nationale est mise en oeuvre dans les cas d'enlèvements internationaux d'enfants. Lorsqu'une enquête criminelle est lancée, nous travaillons en étroite collaboration avec des organismes étrangers d'application de la loi et avec nos partenaires canadiens pour identifier, intercepter et récupérer les enfants disparus et enlevés.
[Traduction]
L'enlèvement par le père ou la mère est une infraction criminelle au Canada, qu'il y ait ou non une entente relative à la garde. Le Centre national pour les personnes disparues et restes non identifiés prête son concours dans des enquêtes pour tenter de rendre les enfants disparus à leurs parents ou tuteur légal. Le Centre joue aussi un rôle essentiel dans les enlèvements internationaux d'enfants par le père ou la mère par l'entremise de ses liens avec tous les corps policiers du Canada et des États-Unis et la plupart des organismes d'application de la loi étrangers. De plus, le Centre a établi des partenariats solides au pays et à l'étranger avec d'autres types d’organismes, comme le Centre canadien de protection de l'enfance et la Société canadienne des enfants disparus.
Pour en venir maintenant à la question des enlèvements contre rançon, de concert avec ses partenaires du gouvernement du Canada, la GRC joue un rôle lorsque des Canadiens sont pris en otage à l'étranger par des organisations terroristes. Notre objectif principal dans ces enquêtes est de faire en sorte que les otages canadiens puissent être libérés sains et saufs. La GRC doit aussi réunir et documenter des éléments de preuve qui pourraient permettre de déposer des accusations et de traduire en justice l'auteur ou les auteurs de la prise d'otages. Le Code criminel confère aux tribunaux canadiens la compétence de juger certains actes criminels, comme le terrorisme et la prise d'otages, qui surviennent au-delà de nos frontières. Ces enquêtes figurent parmi les plus complexes, longues et voraces en ressources que nous menons.
[Français]
Les prises d'otages surviennent souvent dans des régions exposées à un risque élevé et dans des pays au bilan douteux en matière de droits de la personne. Comme je l'ai mentionné, la GRC dépend du pays hôte et doit respecter ses lois. Nous le faisons tout en essayant d'obtenir la libération des otages et de réunir les preuves nécessaires qui pourraient être utilisées un jour dans une poursuite au Canada.
Ces types d'enquêtes peuvent être éprouvants pour la GRC, mais ce n'est rien par rapport aux difficultés à long terme auxquelles les familles et les victimes d'une prise d'otages terroriste se heurtent. De concert avec Affaires mondiales Canada, la GRC offre le plus de soutien possible aux victimes de ces actes criminels par l'entremise des agents de liaison avec la famille. Leur rôle est de tenir les membres de la famille aussi informés que possible sur la situation et sur les efforts que le gouvernement du Canada déploie pour obtenir la libération de leurs êtres chers.
[Traduction]
Les agents de liaison avec les familles et les enquêteurs doivent aussi aider les familles des victimes au fil des différentes étapes de l'enquête, entre autres, la collecte des éléments de preuve qui peuvent être nécessaires pour faire avancer l'enquête et étayer une éventuelle poursuite. Les efforts de ces agents de liaison se poursuivent longtemps après la conclusion de la prise d'otages puisque les victimes et les membres de leur famille peuvent aussi être appelés à revivre ce qu'ils ont vécu devant les tribunaux.
Malgré les difficultés, nous avons eu du succès. Mme Lindhout a elle-même raconté la terrible épreuve qu'elle a subie aux mains de ses kidnappeurs. Notre opération d'infiltration, qui a duré cinq ans, a mené à l'arrestation, au procès et à la condamnation d'Ali Omar Ader pour sa prise en otage.
J'évoque cette affaire parce qu'elle montre que la GRC peut traduire en justice au Canada les auteurs de crimes extraterritoriaux. Nos efforts peuvent prendre des années, voire des décennies, mais notre engagement est de longue haleine.
J'évoque aussi cette affaire parce que même si elle a été couronnée de succès, nous avons pu en tirer des leçons. Nous l'avons reconnu et nous apprenons sans cesse. En puisant dans cette expérience et dans les connaissances acquises durant toutes les prises d'otages dans lesquelles elle est intervenue, la GRC s'efforce d'améliorer ses efforts.
J'aimerais aussi souligner brièvement un autre domaine dans lequel la GRC commence à jouer un rôle important auprès de Canadiens à l'étranger. Dans ce cas, toutefois, il s'agit des personnes qui se sont rendues à l'étranger pour se livrer à des activités terroristes. La GRC a le double rôle d'enquêter et de rapatrier ces personnes, qu'on considère comme étant des « voyageurs à risque élevé ».
Le fait de quitter le Canada pour participer aux activités d'un groupe terroriste est une infraction en vertu du droit canadien. Tout comme un citoyen canadien ou résident permanent qui commet un acte hors du Canada qui serait considéré comme une infraction terroriste s'il était commis au Canada. Par conséquent, nos enquêtes sur les activités d'un voyageur à risque élevé se poursuivent tout au long de son séjour à l'étranger. Notre but est de recueillir les preuves nécessaires pour l'inculper, même in absentia, mais aussi pour comprendre la menace exacte qu'il peut représenter pour le Canada et pour les Canadiens s'il devait décider de rentrer au pays.
[Français]
La Charte canadienne des droits et libertés garantit aux Canadiens le droit de revenir au Canada, malgré les activités criminelles auxquelles ils peuvent avoir été mêlés à l'étranger. Toutefois, le rapatriement de voyageurs posant un risque élevé peut engendrer des défis. Par exemple, il se peut qu'ils ne possèdent plus de passeport valide, celui-ci pouvant avoir été révoqué ou détruit sur le terrain. Ils peuvent aussi être répertoriés en application de la Loi sur la sûreté des déplacements aériens ou inscrits sur la liste d'interdiction de vol de nos alliés, ce qui les empêche de monter à bord d'un avion.
Par conséquent, les partenaires du gouvernement du Canada travaillent en collaboration pour faciliter le rapatriement de Canadiens. Le comité des retours gérés, dirigé par nos partenaires d'Affaires mondiales Canada, nous aide à coordonner cet effort de collaboration en facilitant une évaluation interministérielle du risque qu'un rapatrié peut poser. Chaque cas individuel doit être évalué et des décisions doivent être prises selon la preuve présentée. Ce processus nous permet de gérer collectivement le rapatriement de ces personnes, et d'évaluer et d'atténuer toute menace qu'ils peuvent poser durant et après leur rapatriement.
[Traduction]
La GRC a un rôle important à jouer tout au long du processus. Par exemple, nous pouvons déployer des agents à l'étranger et exiger la prise de mesures de sécurité.
En outre, il se peut que les rapatriés ne continuent pas tous de représenter une menace, car certains d'entre eux peuvent maintenant être désillusionnés par la cause. Dans de tels cas, nous ciblerons nos ressources d'enquête sur ceux qui continuent de représenter une menace tout en exploitant les initiatives de lutte contre la radicalisation menant à la violence, ou LRV, nos partenaires des corps policiers locaux et nos partenaires communautaires pour travailler avec ceux que la violence n'intéresse plus.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de parler de cet important sujet. Je serai heureux de répondre à vos questions.
:
À l'heure actuelle, 220 000 Canadiens se sont inscrits à notre programme Inscription des Canadiens à l'étranger. C'est un programme à participation volontaire. Les Canadiens fournissent de l'information sur l'endroit où ils se trouveront. Les règles de protection des renseignements personnels et de sécurité sont strictes, de sorte qu'ils peuvent être assurés que leurs renseignements ne seront pas utilisés à mauvais escient par d'autres personnes et qu'ils ne seront utilisés qu'à des fins consulaires. Nous nous fions à ces renseignements pour prévenir les gens lorsque des situations d'urgence ou des catastrophes naturelles se produisent dans le pays où ils se trouvent; pour fournir des conseils; et pour établir le contact et assurer leur bien-être. Par exemple, cette année, il y a eu environ 650 avis sur des situations d'urgence.
Cependant, nous savons que 220 000 personnes ne représentent qu'une petite proportion des voyageurs. En particulier, de nombreux voyageurs vont dans des destinations qu'ils considèrent comme étant à faible risque. La plupart des Canadiens vont aux États-Unis. C'est de loin la destination étrangère que choisissent la plupart des gens, et lorsqu'ils s'y rendent, ils ne considèrent habituellement pas qu'il est utile de s'inscrire à ce type de service. Ils s'attendent à ce que leur voyage se déroule bien.
Nous établissons le contact avec eux entre autres au moyen des médias sociaux. Nous sommes présents sur Facebook et Twitter, de plus en plus, et nous avons également de nouvelles applications de messagerie pour essayer de prendre contact avec une plus forte proportion de voyageurs, surtout ces groupes et secteurs qui ont probablement moins tendance à consulter nos sites Web ou à chercher activement de l'information. Je pense particulièrement aux jeunes voyageurs.
Nous participons également à des foires commerciales et à des conférences sectorielles, et nous avons entrepris une série de sondages auprès des Canadiens qui reviennent de voyage, dans les aéroports, cette année. Nous leur demandons directement quels types de sources ils ont le plus tendance à utiliser, quel type de format leur serait le plus utile. Nous travaillons à l'adoption d'une nouvelle stratégie de communication plus ciblée pour essayer d'établir le contact.
À ce que je sache, aucun de nos partenaires n'a de programme d'inscription obligatoire. Ce serait difficile à mettre en place, à mon avis, et je crois que notre stratégie consiste à déterminer comment nous pouvons nous assurer qu'un plus grand nombre de Canadiens sont conscients de l'utilité de s'inscrire auprès de notre organisme pour que nous puissions communiquer avec eux rapidement en cas d'urgence.
Nous venons de traverser l'une des saisons des ouragans les plus intenses que nous avons vue dans l'Atlantique, ce qui aidera à sensibiliser les voyageurs cette année. Notre défi, c'est que nous devons nous assurer de sensibiliser un plus grand nombre de voyageurs sans que des gens aient à vivre ce type de situations très difficiles.
:
Chaque mission a son plan d'urgence, bien entendu, quant à la façon dont elle interviendrait dans différentes situations d'urgence. Cela inclut toutes celles que vous avez mentionnées.
Il y a un coordonnateur des urgences dans chaque mission. Les plans sont élaborés et mis en oeuvre en collaboration avec l'administration centrale, où nous avons un centre de surveillance et d'intervention d'urgence accessible en tout temps qui travaille avec une structure de commandement des interventions qui peut être élargie par l'intervention de membres du personnel du centre d'appel — plusieurs centaines, par exemple, dans le cas des ouragans — avec un service par rotation offert en tout temps.
Dans tous les pays, chaque mission a un plan pour les situations d'urgence qui risquent le plus de se produire, et ces situations diffèrent d'un pays à l'autre. À certains endroits, il y a des risques sismiques. Dans d'autres, il s'agit plutôt de troubles civils, et ailleurs, il peut s'agir d'une autre forme de catastrophe naturelle. Ces plans sont mis en oeuvre, et nous avons un processus très rigoureux des leçons apprises lors de situations qui se sont déjà produites.
Par exemple, nous mettons déjà en oeuvre, et nous avons mis en oeuvre, les leçons tirées des ouragans, ce qui inclut le recours accru à des plateformes mobiles. Nous voyons des gens qui utilisent de nouveaux médias et les textos. Les gens n'appellent plus aussi souvent qu'auparavant. Ils veulent communiquer par d'autres moyens. Ce n'est qu'un exemple.
Toutes les leçons tirées d'évacuations et d'interventions précédentes, qu'il s'agisse de l'évacuation au Liban ou d'autres situations, sont intégrées aux plans d'urgence, qui se raffinent d'une fois à l'autre. Cette discipline et ce processus de planification des urgences et d'intervention sont très importants, et nous assurons la coordination ici, à Ottawa, avec le Centre des opérations du gouvernement pour établir des liens avec toute la panoplie de services.
:
Votre temps est écoulé, madame Vandenbeld, mais merci d'avoir posé la question.
Mesdames et messieurs, cela nous mène probablement à la fin de notre discussion de la dernière heure environ. Nous aurons besoin de nous réunir une vingtaine de minutes à huis clos pour examiner d'autres questions.
Je pense que c'est une discussion extrêmement importante. Nous savons que le Sénat s'est penché sur la question et envisage apparemment de l'étudier de nouveau sous un autre angle. Les affaires consulaires suscitent donc un intérêt considérable.
Je pense que c'est parce que le monde devient de plus en plus petit et qu'il y a beaucoup de voyageurs. De toute évidence, les Canadiens qui peuvent se permettre de voyager se déplacent constamment en grand nombre, et je pense que l'importance du travail que vous accomplissez deviendra de plus en plus prononcée au regard de ce qu'il se passe dans certaines régions du monde. Par exemple, je passe beaucoup de temps en Amérique du Sud, une destination de plus en plus prisée des voyageurs, mais des problèmes se posent toutefois dans ce genre de région et de pays.
Merci beaucoup de nous avoir donné l'occasion de passer du temps avec vous.
Je voudrais que vous répondiez à une question que se pose le Comité. Certains témoins ont évoqué la possibilité d'établir avec d'autres États ou pays des processus et des ententes officiels en vertu desquels nous pourrions aller dans ces régions pour collaborer avec nos organismes, et ces pays pourraient faire de même chez nous. Ils ont proposé d'envisager la possibilité d'instaurer des mesures officielles au lieu d'intervenir au cas par cas et de peut-être devoir demander l'autorisation d'aller à l'intérieur du pays. J'aimerais beaucoup savoir si les affaires consulaires et Affaires mondiales étudient d'autres manières d'agir qui faciliteraient votre travail. Je voudrais obtenir des renseignements de base à ce sujet à un moment donné.
Une fois encore, au nom du Comité, merci beaucoup. Je suis certain que vous attendrez notre rapport avec impatience, comme la GRC et Affaires mondiales le font toujours. Merci. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir comparu.
Chers collègues, nous prendrons une brève pause, puis nous nous réunirons à huis clos. Merci.
[La séance se poursuit à huis clos.]