:
Bonjour à tous. Je déclare la séance ouverte.
Je vous souhaite la bienvenue à la 11e séance du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Conformément à l'ordre de renvoi du mardi 11 avril, le Comité se réunit aujourd'hui pour discuter des fonctions parlementaires dans le contexte de la pandémie de la COVID-19.
Avant de commencer, je tiens à informer les membres du Comité que celui-ci se réunit pour deux raisons, conformément à l'ordre de renvoi. Il est bon de garder cela à l'esprit. Je sais que nous accueillons de nouveaux témoins de temps à autre et que différentes personnes peuvent visionner la vidéo. Je souhaite donc rappeler à tous les deux raisons pour lesquelles nous nous réunissons: d'une part, c'est en vue d'entreprendre une étude et d'entendre des témoignages sur les questions reliées à l'exercice des fonctions parlementaires dans le contexte de la pandémie de la COVID-19; d'autre part, c'est en vue de préparer et de présenter, d'ici le 15 mai, un rapport à la Chambre des communes sur l'étude en question.
L'ordre de renvoi dit également que les seules motions recevables sont celles qui visent à décider des témoins et qui entourent l'adoption du rapport.
La séance d'aujourd'hui se déroule par vidéoconférence, et les délibérations seront disponibles sur le site Web de la Chambre des communes. À titre d'information, sachez que la diffusion Web montrera toujours la personne qui parle plutôt que l'ensemble du Comité.
Afin de faciliter le travail de nos interprètes et d'assurer le bon déroulement de la réunion, je voudrais vous donner quelques règles à suivre.
Pendant la vidéoconférence, le fonctionnement de l'interprétation sera très similaire à celui d'une réunion régulière du Comité. Au bas de votre écran, vous avez le choix entre le parquet, l'anglais ou le français. Si vous n'avez pas sélectionné de langue, je vous recommande de le faire dès maintenant.
Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je nomme votre nom. Lorsque vous êtes prêt à parler, vous pouvez soit cliquer sur l'icône du microphone pour activer votre micro, soit maintenir la barre d'espacement enfoncée pendant que vous parlez. Lorsque vous aurez terminé, il suffit de relâcher la barre, comme vous le feriez avec un walkie-talkie. C'est très utile pour les échanges rapides.
J'aimerais vous rappeler que tous les commentaires des membres du Comité et des témoins doivent être émis en s'adressant à la présidente. Si un membre du Comité souhaite demander la parole en dehors du temps qui lui est réservé pour les questions, il peut activer son microphone et dire qu'il a un rappel au Règlement.
Si un membre du Comité souhaite répondre au rappel au Règlement d'un autre membre, il doit utiliser la fonction « lever la main ». La présidente saura alors que vous voulez la parole. Pour ce faire, vous devez cliquer sur « participants » au bas de l'écran. Une liste apparaîtra sur le côté de votre écran avec votre nom, et la fonction « lever la main » devrait se trouver soit au bas de la liste, soit sur le côté. Vous devriez voir la fonction si vous avez réussi à cliquer.
Lorsque vous parlez, veuillez prononcer lentement et clairement. Si vous n'avez pas la parole, votre micro doit toujours être en mode silencieux. C'est essentiel dans le cadre de nos réunions, car les sons en arrière-plan peuvent être très dérangeants.
De plus, l'utilisation d'un casque d'écoute est fortement encouragée. Bien sûr, ce n'est pas un problème pour vous, monsieur Brassard; nous pouvons vous entendre même si vous n'avez pas votre casque aujourd'hui. Le son est simplement un peu plus clair et pur lorsque vous en portez un.
En cas de problèmes techniques avec l'interprétation, par exemple, ou si vous êtes déconnectés par erreur, veuillez en aviser immédiatement la présidente, et l'équipe technique s'efforcera de rétablir la situation. Veuillez prendre note que nous pourrions devoir suspendre la séance pendant ce temps, car nous devons nous assurer que tous les membres du Comité peuvent participer pleinement à la séance.
Avant de commencer, est-ce que chacun peut cliquer dans le coin supérieur droit de son écran et s'assurer d'afficher la galerie? Cette option d'affichage vous permet de voir tous les participants dans une grille. Ainsi, tous ceux qui participent à la vidéo peuvent se voir les uns les autres. C'est aussi l'affichage le plus réaliste, ou qui imite le mieux ce que nous voyons habituellement lors d'une réunion de comité. C'est le mieux que nous pouvons faire virtuellement.
De plus, si vous devez vous éloigner ou regarder ailleurs pendant un instant, je vous conseille de laisser votre écran allumé plutôt que d'éteindre la vidéo. Nous saurons ainsi que vous n'avez pas de problème technique et que vous êtes toujours là, comme vous le feriez dans une salle de Comité.
Au cours de la réunion, nous allons suivre les règles qui s'appliquent habituellement aux déclarations liminaires et à l'interrogation des témoins lors de nos réunions ordinaires. Chaque témoin aura 10 minutes pour son mot d'ouverture, ce qui sera suivi des questions habituelles des membres du Comité.
J'aimerais simplement encourager les témoins à limiter leur exposé à moins de 10 minutes, ce qui serait l'idéal. Il serait fort utile que vous puissiez retrancher une minute ou deux de votre intervention. Je ne manquerai pas de rappeler cette consigne aux témoins du deuxième groupe, car nous avons de nombreuses questions à vous poser.
Comme nous le faisons habituellement lors d'une réunion ordinaire du Comité, nous allons suspendre la séance entre les groupes pour permettre aux premiers témoins de quitter la diffusion et aux témoins suivants de se joindre à nous. Aujourd'hui, nous prendrons une pause de cinq à dix minutes à ce moment-là pour permettre à l'équipe technique de s'installer.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui.
Nous accueillons Michel Patrice, sous-greffier de l'Administration; Pierre Parent, dirigeant principal des ressources humaines; et Mélanie Leclair, directrice des Relations avec les employés. Nous recevons également Dre Barbara Raymond, conseillère médicale exécutive, Bureau de la vice-présidente, à la Direction générale de la prévention et du contrôle des maladies infectieuses de l'Agence de la santé publique du Canada.
J'aimerais que nous commencions par Michel Patrice.
Allez-y, s'il vous plaît.
:
Je vous remercie, madame la présidente.
Je suis accompagné aujourd'hui de M. Pierre Parent, notre dirigeant principal des ressources humaines, qui dirige également l'Équipe de gestion de crise de l'Administration de la Chambre.
Nous avons mis en place un certain nombre de mesures de prévention pour protéger la santé et la sécurité des députés, des membres de leur personnel et des employés de l'Administration pendant la pandémie de COVID-19.
Nos mesures reposent sur les conseils des autorités de santé publique de différents échelons, avec lesquelles notre équipe de santé et sécurité se tient en rapport constant. De plus, nous collaborons étroitement à divers dossiers avec nos partenaires parlementaires, d'autres assemblées législatives et nos partenaires de la sécurité, afin d'appuyer nos décisions sur des renseignements pertinents et à jour.
Depuis plusieurs semaines déjà, les équipes de gestion de crise et de gestion des incidents de l'Administration se réunissent régulièrement pour évaluer la situation, discuter de stratégies d'atténuation et déterminer les meilleurs moyens de soutenir adéquatement les députés et de garantir un lieu de travail sûr et sain.
[Traduction]
À l'intention des députés et des membres de leur personnel, nous avons mis sur pied un service de consultation médicale pour ceux qui ressentiraient des malaises possiblement liés à la COVID-19. Offert du lundi au vendredi, le service prend les dispositions nécessaires en vue d'une consultation téléphonique avec un médecin. Nos infirmières en santé au travail font du dépistage, assurent un suivi et répondent aux questions. De plus, l'équipe des Services en ressources humaines aux députés a donné quatre séances d'information virtuelles aux députés sur leur rôle en tant qu'employeur. Les députés ont également accès à des renseignements sur Source.
Notre Programme d'aide aux employés et à leur famille à l'intention des députés, des membres de leur personnel et des employés de l'Administration demeure accessible en permanence et offre un soutien confidentiel. Le soutien en santé mentale demeure une priorité de tous les instants, et nous veillons à ce que tous les membres de la collectivité de la Chambre des communes soient au courant des ressources à leur disposition.
Pour ce qui est des employés de l'Administration de la Chambre, je peux vous assurer que seuls ceux dont la présence physique est requise pour fournir des services essentiels se rendent sur place. Tous les autres employés travaillent de leur domicile dans la mesure du possible. Je ne cesse d'être impressionné par l'ingéniosité des employés qui trouvent des solutions pour assurer la prestation des services requis, alors qu'ils sont nombreux à prendre soin en même temps de membres de leur famille. Quant aux employés qui ne peuvent pas travailler, ils ont accès à des possibilités de congé flexibles.
Diverses mesures ont également été prises pour protéger les personnes sur place. Les surfaces dans les lieux les plus fréquentés, notamment les entrées, les ascenseurs et les rampes d'escalier, sont désormais nettoyées trois fois par jour. Un service spécial de nettoyage et de désinfection est prévu pour les cas présumés et confirmés de COVID-19. Le protocole établi est conforme aux avis des autorités de santé publique. Des distributeurs de désinfectant pour les mains supplémentaires ont été installés et des lingettes désinfectantes ont été mises à la disposition du personnel de première ligne. Des consignes sur les mesures d'éloignement physique et des rappels sur le lavage des mains ont été communiqués, et des affiches ont été posées un peu partout dans la Cité parlementaire. Des écrans de plexiglas ont été installés aux endroits où les possibilités d'éloignement physique sont insuffisantes. D'autres mesures simples, mais importantes ont été prises, telles que le réaménagement du mobilier dans les coins-repas. Notre équipe de Santé et sécurité continue de surveiller les lieux pour s'assurer que les consignes sont suivies et pour répondre aux questions des employés.
Les communications régulières avec les membres du personnel demeurent une priorité, et nous ne ménageons aucun effort pour rester en contact avec ceux qui n'ont pas d'appareil mobile de la Chambre des communes. Ainsi, nous communiquons par message texte, par courriel et par fenêtre éclair sur l'ordinateur bureau. Nous publions également des mises à jour sur le site Web public et nous actualisons la ligne d'information téléphonique. Nous utilisons aussi nos voies de communication habituelles pour fournir des renseignements actualisés, tels que les pièces d'identité exigées pour les déplacements interprovinciaux, les modifications apportées au calendrier des séances de la Chambre et les recommandations sanitaires des autorités. Nos infirmières en santé au travail font un suivi auprès des employés ayant présenté des symptômes et assurent la liaison avec les autorités de santé publique.
Les responsables de la santé publique que nous avons consultés nous ont informés que les employés sur place n'ont pas besoin d'équipement de protection individuel pour le moment. Compte tenu d'indications récentes quant à l'adoption possible d'une nouvelle approche à l'égard du port d'un masque et de gants, cette politique fera l'objet d'une surveillance attentive et nous l'ajusterons s'il y a lieu. Nous achetons des masques et des gants en cas de besoin, et nous préparons des fiches d'information en vue de leur distribution possible.
[Français]
Nous sommes convaincus d'être en mesure d'appuyer les activités de la Chambre des communes en réduisant les risques pour toutes les personnes concernées. Nous continuerons de suivre de près l'évolution de la situation et nous adapterons nos mesures en conséquence.
Je peux affirmer sans réserve que tous les membres de la communauté parlementaire ont le souci d'assurer la sécurité de notre lieu de travail. Les membres de mon équipe et moi-même sommes en rapport constant avec tous les bureaux des whips, et je suis convaincu que chacun contribue à l'application et au respect des différentes mesures mises en place pour nous protéger et atténuer les risques potentiels.
[Traduction]
Nous nous ferons un plaisir de répondre à toutes vos questions.
Merci.
:
Bonjour, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité. Merci de me donner l'occasion de comparaître aujourd'hui devant le Comité pour parler des questions de santé publique liées à cette étude en particulier. Je vais commencer par un aperçu ou une mise à jour sur la COVID-19 au Canada.
À ce jour, nous avons plus de 38 000 cas de COVID-19 au Canada, et plus de 1 800 décès signalés. Dans plus d'un tiers de ces cas, il s'agit de personnes âgées de plus de 60 ans. Le virus s'est révélé mortel dans 4,5 % des cas. Plus de 600 000 personnes ont subi un test de dépistage de la COVID-19. Les résultats des tests étaient positifs dans une proportion d'environ 6,5 %.
Un peu plus de 16 semaines se sont écoulées depuis la détection de la première grappe de cas de COVID-19 en Chine. Au Canada, le premier cas a été dépisté le 15 janvier, et nous avons commencé à observer ce que nous estimons être de la transmission communautaire du virus à la mi-mars, vers le 15 mars. Au Canada, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont pris des mesures extraordinaires pour répondre à la COVID-19.
Les mesures à la frontière en sont un exemple. Depuis le 3 février, l'Agence de la santé publique du Canada a promulgué un certain nombre d'ordonnances d'urgence en vertu de la Loi sur la quarantaine afin de minimiser le risque d'exposition à la COVID-19 au Canada, de réduire les risques venant d'autres pays, de rapatrier les Canadiens et de renforcer les mesures à la frontière pour réduire l'impact de la COVID-19 au Canada. Par conséquent, la facilité de déplacement que nous étions si nombreux à tenir pour acquise n'est plus du tout ce qu'elle était. Les voyages sont maintenant de plus en plus rares, et ils s'accompagnent d'une période d'isolement ou de quarantaine obligatoire de 14 jours. Cela inclut même certains déplacements d'une province à l'autre à l'intérieur du Canada. C'est vraiment un changement extraordinaire pour nous.
La distanciation physique est l'une des mesures les plus importantes à avoir été mises en place pour contrôler la propagation de la COVID-19. La nécessité d'établir une distanciation physique a transformé la manière dont nous vivons et travaillons, ainsi que nos interactions avec les autres. Les rassemblements de masses sont maintenant interdits. Cela a considérablement changé la façon dont nous nous réunissons — notamment en comités —, la façon dont nous célébrons, et la façon dont nous pleurons nos morts. Comme nous devons protéger les personnes les plus vulnérables de notre société, cela fait des semaines que nous ne pouvons pas voir bon nombre nos parents et amis. C'est vraiment difficile.
Les écoles sont fermées, ce qui a des répercussions non seulement pour les élèves, mais aussi pour les parents et les familles. Il a fallu que les éducateurs fassent preuve d'une créativité incroyable pour continuer d'assurer l'apprentissage en ligne.
En ce qui concerne la population active du Canada, tous les travailleurs sauf ceux qui sont en première ligne ont eu comme consigne de demeurer chez eux. Certains travailleurs non essentiels peuvent travailler à domicile, mais beaucoup d'autres ne le peuvent pas, ce qui a aussi d'énormes répercussions sur les personnes et les familles.
Il y a des effets sur les entreprises. Un grand nombre d'entreprises ont fermé ou ont dû modifier leurs activités, et cela aura des effets considérables à tous les niveaux.
Il est difficile de croire que nos vies ont changé si profondément en si peu de temps. Tous les Canadiens ont pris des mesures extraordinaires et ont fait d'incroyables sacrifices pour nous aider à atteindre le point où nous semblons observer un ralentissement de la propagation, du moins dans certaines régions du pays. Les données qui seront rapportées au cours des prochains jours et des prochaines semaines continueront d'être essentielles pour ce qui est de déterminer notre trajectoire, mais le rythme auquel le nombre de cas signalés double au Canada a ralenti. Au lieu de doubler tous les trois ou quatre jours, comme au cours de la période du 12 au 28 mars, le nombre a doublé tous les cinq à huit jours, au cours de la période du 29 mars au 10 avril.
Nous sommes tous impatients de reprendre une vie normale. Naturellement, tout signe de ralentissement de la pandémie nous donne espoir de retrouver cette normalité. Malheureusement, nous sommes toujours en situation de pandémie et nous devons demeurer vigilants. Notre façon de procéder sera déterminante. Tout comme nous avons renforcé nos mesures de santé publique au fil du temps, nous allons devoir les alléger prudemment et progressivement pour éviter une remontée de la pandémie.
L'Agence de la santé publique du Canada collabore avec les gouvernements provinciaux et territoriaux en vue de déterminer la manière la plus sécuritaire de reprendre bon nombre de nos activités auparavant considérées comme étant courantes. D'ici là, nous devons maintenir le cap.
À l'heure actuelle, le meilleur conseil de l'Agence de la santé publique du Canada demeure de rester à la maison le plus possible. Surtout, si vous vous sentez malade, pratiquez la distanciation physique, lavez-vous bien les mains et observez une bonne étiquette respiratoire, par exemple en toussant ou en éternuant dans le creux de votre bras ou dans votre manche et en jetant les mouchoirs utilisés dès que possible. Faites tout ce que vous pouvez pour protéger les autres contre l'infection, particulièrement les personnes les plus vulnérables.
Merci. Je serai ravie d'entendre vos questions.
Ma prochaine question s'adresse à vous deux, monsieur Patrice et docteure Raymond.
Le Comité est chargé de se pencher sur des options non virtuelles. L'autre jour, M. Dufresne est venu témoigner sur les aspects légaux et constitutionnels d'un Parlement virtuel. Il a mentionné en particulier l'article 16 de la Constitution et a dit qu'Ottawa est le siège du gouvernement et que rien n'empêche légalement la tenue de séances à l'extérieur du Parlement — il y a eu, par exemple, l'incendie de 1916.
Il y a d'autres endroits à Ottawa, par exemple le Centre Canadian Tire, qui compte 17 373 sièges. Le Centre Shaw a une superficie de 365 000 pieds carrés. La Place TD, à quelques rues du Parlement, compte 10 575 sièges.
En guise de solution de rechange, si nous retrouvons une certaine normalité et qu'il faut quand même maintenir l'éloignement physique — encore une fois, personne ne parle de faire revenir 338 députés au Parlement —, est-ce que ces endroits pourraient être des solutions à envisager? Par exemple, au Centre Shaw, pour chaque député, au nombre de 338, il y aurait 2 164 pieds carrés. Ce serait la même chose au Centre Canadian Tire, où il y a 80 sections. Est-ce que ces lieux pourraient constituer des solutions pour les séances de la Chambre?
Monsieur Patrice, j'aimerais vous entendre en premier s'il vous plaît.
:
Bonjour à tous. Je vous remercie tous les deux pour vos exposés très importants.
Je tiens d'abord à dire que j'ai pu siéger au premier Parlement réduit, en partie parce que je suis restée dans la région. Quand je suis revenue chez moi, en Colombie-Britannique, je me suis imposée, avec ma famille, une quarantaine de deux semaines. À mon arrivée à la maison, ma famille n'était pas là. Elle était partie chercher mon fils, à l'université, en voiture, plutôt que de lui faire prendre l'avion, pour le protéger. Ensuite, nous sommes restés à la maison. Des membres de la famille et des amis nous apportaient la nourriture. C'était très étrange. Nous avons agi ainsi parce que nous savions qu'il se passait des choses et je ne voulais certainement pas infecter accidentellement un de mes électeurs.
J'apprends aussi que certains de mes électeurs, professionnels de la santé — médecins, infirmières, et soignants — se sont isolés volontairement de leur famille et habitent leurs véhicules récréatifs. Les histoires de certains d'entre eux qui voient, au travers d'une clôture, leurs enfants jouer sans pouvoir les serrer dans leurs bras sont déchirantes. Ils ont pris la décision vraiment difficile de prendre les moyens pour soigner les membres de leur communauté et leur famille et veiller à leur mieux-être.
Parlons d'abord de l'idée lancée par M. Brassard, celle d'un lieu de réunion pour les députés, qui leur permettrait de siéger à bonne distance les uns des autres.
J'ai des questions: Qu'en est-il des employés de la Chambre des communes? Comment est le moral de ceux qui doivent venir travailler au Parlement? Combien en faut-il pour s'occuper de 32 parlementaires qui siègent? À quel degré pousse-t-on le nettoyage? On a discuté de la fréquence des nettoyages dans ces hauts lieux. Quand la Chambre siège toute la journée ou, comme nous l'avons fait, pendant la nuit, quel est le degré de nettoyage? À quoi est-ce que ça ressemble? La distanciation est-elle convenable?
Je pense à nos extraordinaires interprètes — ce qui me rappelle de ralentir le débit — tellement efficaces dans des circonstances très inhabituelles. Cette efficacité ne va pas de soi. J'ignore si ces locaux répondent à leurs besoins.
Répondez tous les deux en faisant appel à votre expérience. L'autre facteur, même si on répartit joliment 338 parlementaires sur ces surfaces, c'est l'avion. Pour moi, prendre l'avion pour Ottawa, c'est toute une expédition. Je pars de l'île de Vancouver. Pour prendre l'avion, je dois conduire sur une bonne distance et sortir de ma circonscription.
Ça prend déjà la moitié de mon temps, mais si vous pouvez aborder certaines de ces difficultés, je vous serais vraiment reconnaissante de nous éclairer tous.
Monsieur Patrice, si vous pouviez répondre, ce serait formidable.
:
Bonjour à tous et merci de l'occasion que vous m'offrez. Je tiens à poursuivre sur la lancée des observations de M. Brassard et de la Dre Duncan et peut-être m'épancher un peu.
Comme vous le savez, j'ai le plus grand respect pour tous mes collègues et confrères ici rassemblés qui se sont succédé pour poser des questions au cours des discussions, mais je tiens seulement à parler de ce que j'estime être une perception trompeuse qu'encouragent certains membres. Nous continuons de parler de retour à la normale et de la crainte de ce retour ou de ses conséquences éventuelles.
En tout respect, d'après ce que j'ai observé, ces derniers jours de discussions sur les options qui s'offrent pour des séances non virtuelles ou des options différentes, je crois que personne, ici, ne préconise le retour des 338 députés à la Chambre ni le rappel, ici, de tout le personnel, y compris de soutien. Quant aux parlementaires, ils seraient peu nombreux à le proposer. Des questions ont été posées sur le nombre de personnes rassemblées au cours d'une journée normale de travail. Je suis d'accord avec la Dre Raymond: la nouvelle normalité différera de l'ancienne.
Je suis certainement d'accord, mais je crains une perception répandue, peut-être chez des Canadiens à l'écoute, qui croient qu'il n'y a pas de distanciation physique ou que nous mettons en péril, mutuellement, notre santé en nous rassemblant toujours dans l'édifice de l'Ouest. Mme Blaney y a siégé. Je lui ai fait signe de la main, de la tribune, à la première séance d'urgence. M. Gerretsen était également présent. J'étais membre remplaçant, mais je peux témoigner, pour l'avoir vu de mes yeux, de l'excellent travail de l'Administration de la Chambre des communes, pour la protection de notre santé.
À mon avis, la distanciation physique était bien organisée. J'ai remarqué que Mme May, à un certain moment, a formulé une observation, que je respecte, sur les groupes de pression de l'opposition et certaines allées et venues de ce côté, mais je pense que les autres [Difficultés techniques].
:
Je vous en remercie. Je vous le dis, j'insisterai auprès du comité de l'industrie pour la prestation d'un meilleur service Internet dans les régions rurales, quand toute cette affaire sera terminée.
Pour revenir à ce que je disais sur les interprètes, cet aspect et certaines des difficultés me sont apparues là. Les interprètes sont déjà dans l'immeuble. La sécurité est là.
Dans un souci d'amélioration, je ferai observer que, depuis à peu près un mois, le fait des annonces quotidiennes, importantes pour les Canadiens. Je ne lui en veux pas de le faire en personne. Les ministres ont fait de même, dans l'édifice de l'Ouest, presque quotidiennement, en communiquant aux Canadiens les renseignements dont ils avaient besoin en ces temps difficiles. Je le respecte. Encore une fois, le gouvernement joue un rôle nécessaire, celui d'informer les Canadiens. De plus, dans le même édifice, nous avons quotidiennement la possibilité, nous, tous les députés ministériels ou ceux de l'opposition, de poser des questions et de nous faire les porte-parole de nos électeurs.
Pour organiser une conférence de presse, il faut de l'interprétation, un appui technique, de la sécurité, du ménage. Si on le fait sept jours par semaine sans difficultés, dans l'édifice de l'Ouest, je pense que, en respectant les consignes de distanciation physique, avec les bons protocoles d'hygiène et de sécurité, comme ceux qui ont été appliqués, il n'est pas déraisonnable de continuer avec la même proportion de députés, le nombre de ceux qui peuvent être présents sans danger. La plupart continuent de travailler à la maison, comme moi-même. Les ministres sont à Ottawa et ne sont pas susceptibles de faire la navette. Dans chaque équipe, des membres présents le font.
J'ai le plus grand respect pour la Dre Raymond et les fonctionnaires de la santé publique et pour l'Administration de notre Chambre des communes. Je tiens, en fin de compte, à ce qu'on comprenne que, dans nos discussions, nous ne préconisons pas le retour de 338 députés. Les pages ne sont pas indispensables. Notre personnel non plus. Nous pouvons fonctionner avec cette proportionnalité.
Avant de conclure, je dirai qu'il est sûr, pour une certaine proportion des ministres, de tenir des conférences de presse dans l'édifice de l'Ouest, c'est-à-dire en combinant présence physique et présence virtuelle, grâce à la technologie, mais à nous, les parlementaires, ne dites pas que nous ne pouvons pas faire de même la majeure partie du temps, par une répartition équilibrée du temps pendant lequel nous ne ferons pas la navette entre Ottawa et nos circonscriptions ou du temps où nous la ferons pendant des périodes prolongées. Quand on veut le faire sans danger, on peut.
J'ai été très fier de ces trois séances en personne. Je souhaite que, au retour à la normale, la Chambre des communes et la période des questions ressemblent davantage à ces trois séances, où il s'est posé des questions constructives, parfois difficiles, et qu'il s'est formulé des propositions à l'avenant. Je pense que, en fin de compte, en raison de cette présence à la Chambre, de ces questions et de la capacité de tous les députés de communiquer l'opinion de leurs électeurs, nous parvenons effectivement à améliorer suffisamment la politique du gouvernement. Nous avons vu les modifications apportées aux subventions salariales aux entreprises et à la prestation canadienne d'urgence pour le bien des Canadiens.
Je conclus plutôt dans la prolixité, en donnant peut-être à la Dre Raymond et à son Administration de la Chambre le temps de respirer. Je suis convaincu que tous les députés agissent de bonne foi, qu'ils souhaitent des mesures de santé et de sécurité comme celles qui sont actuellement en vigueur pendant leur séjour à Ottawa, pour se protéger quand ils s'assemblent à l'intérieur de l'édifice de l'Ouest. Je pense que c'est une question d'équilibre.
Je reviens aux pratiques des conférences de presse et de certaines autres manifestations et au personnel déjà sur place. Nous pouvons en répéter sans danger la formule en cet endroit. Je tenais à m'assurer que cette présence et ce que certains d'entre nous préconisent ne présentaient aucun danger, en dépit de la perception des Canadiens. Les trois séances qui ont eu lieu sont des modèles de perfection et d'excellence de pratiques sûres, exemplaires et perfectibles, ici et là.
Encore une fois, nous pouvons ajouter des éléments virtuels, pour...
Nous devons manifestement tenir compte de la santé publique lorsque nous planifions toutes nos activités. Nous, les parlementaires, tentons maintenant de déterminer comment nous pouvons continuer d'assumer nos rôles de représentants du peuple et ce que cela signifie pour le fonctionnement de la Chambre des communes, le déroulement des réunions de nos comités et l'exercice de toutes nos autres fonctions, que ce soit dans notre circonscription ou dans le cadre de nos fonctions politiques.
Par exemple, comme je le fais souvent en période non électorale, j'avais prévu de passer beaucoup de temps à visiter les gens de ma circonscription, afin d'entendre leurs préoccupations et leurs suggestions de questions à aborder en leur nom au Parlement ou ailleurs. Toutefois, cela n'a pas été possible au cours des six dernières semaines. Habituellement, je l'aurais fait assez souvent pendant deux semaines de relâche à la Chambre. La situation actuelle a donc des répercussions sur un grand nombre de nos activités. Et comme nous sommes politiciens, nous exerçons manifestement tous une fonction politique. Il faut également en tenir compte.
Je me pose donc une question. Docteure Raymond, nous sommes manifestement dans un contexte de gouvernement minoritaire et des élections sont toujours possibles dans un tel contexte, et ce, à n'importe quel moment. Étant donné les enjeux engendrés par la crise actuelle, j'aimerais que vous nous brossiez un portrait de la situation si des élections se tenaient cet été ou cet automne. À votre avis, cela serait-il possible dans les trois, quatre ou cinq prochains mois? Le cas échéant, quelles précautions faudrait-il prendre pour la tenue d'un tel événement?
Êtes-vous là, monsieur Duncan?
Monsieur Gerretsen?
Puisqu'il est 12 h 31 et que nous avons un grand groupe de témoins, j'aimerais que nous reprenions le plus rapidement possible. J'espère que MM. Duncan et Gerretsen ne sont pas trop loin et qu'ils peuvent au moins nous entendre.
Bienvenue à nouveau. Nous allons commencer.
Je veux seulement vous rappeler de cliquer sur le côté droit supérieur de votre écran et de vous assurer que vous avez une vue d'ensemble. C'est la meilleure façon de nous voir tous en même temps.
Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être transmis par l'intermédiaire de la présidente. Lorsque vous prenez la parole, parlez lentement et clairement, et lorsque vous ne parlez pas, assurez-vous que votre micro est éteint. En fait, tout le monde a très bien suivi cette consigne au cours des dernières réunions, mais il semble que nous oublions parfois d'activer le micro, alors veuillez ne pas l'oublier. Je vous encourage fortement à utiliser un casque d'écoute.
J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous nos témoins à la 11e séance du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. C'est un honneur pour nous de vous accueillir tous. Vous possédez beaucoup de connaissances que vous pourrez nous transmettre.
Dans le deuxième groupe de témoins de notre 11e séance, nous accueillons M. Marc Bosc, ancien greffier par intérim de la Chambre des communes; M. Emmett Macfarlane, professeur agrégé de l'Université de Waterloo; et l'honorable Peter Milliken, ancien Président de la Chambre des communes. Je vous souhaite encore une fois la bienvenue.
Nous accueillons également M. Benoît Pelletier, professeur à la Faculté de droit de l'Université d'Ottawa. Enfin, notre dernier témoin, mais non le moindre, est M. Gregory Tardi, directeur exécutif de l'Institut de droit parlementaire et politique.
Je souhaite la bienvenue à tous les témoins. Du temps vous est accordé. Je crois qu'on vous a dit que vous disposiez de 10 minutes. J'espère que certains d'entre vous seront en mesure de nous aider et de réduire d'une à deux minutes la durée de leur déclaration préliminaire. Si, possible, essayez de le faire, s'il vous plaît.
Nous entendrons tout d'abord M. Bosc.
:
Madame la présidente, mesdames et messieurs, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui.
[Français]
C'est un honneur d'être invité à contribuer à vos travaux.
[Traduction]
Il est rare que la Chambre des communes et ses comités soient confrontés à des questions existentielles comme celles dont ils sont saisis aujourd'hui. Il est donc nécessaire de prendre du recul et de réfléchir aux grands principes dont vous devrez tenir compte lorsque vous formulerez vos recommandations.
Le Président a énoncé certains de ces principes. Le Comité devrait en tenir compte puisqu'ils donnent vraiment l'heure juste quant aux aspects pratiques liés à l'expérimentation d'une Chambre des communes virtuelle. J'ajouterais un principe fondamental — il faut que l'organe législatif du gouvernement soit actif durant la crise.
Dans trop de pays, les organes exécutifs font de l'ombre au Parlement. Les Parlements finissent alors par être plus faibles et moins pertinents. On doit corriger ce déséquilibre, particulièrement en période de crise. Il faut que la Chambre des communes fonctionne et qu'elle soit perçue comme étant une Chambre des communes qui fonctionne.
[Français]
Je veux être clair: le Parlement, particulièrement la Chambre des communes, est un service essentiel pour le pays.
Les députés sont également des travailleurs essentiels, malgré le fait que, pour respecter les normes de santé publique, les partis aient sagement décidé de réduire le nombre de députés qui assistent aux séances, tout comme l'a fait l'Administration de la Chambre, limitant au strict minimum la présence des fonctionnaires absolument nécessaires au fonctionnement de celle-ci. Je souligne, à titre d'information, qu'en 1916, la Chambre a siégé le lendemain de l'incendie qui a détruit l'édifice du Centre, et qu'en 2014, la Chambre a siégé le lendemain de la fusillade du 22 octobre.
[Traduction]
Il était donc encourageant de voir, lundi, que la Chambre a pris des mesures pour reprendre ses activités. C'est un début, mais il est possible d'en faire plus.
Le Comité a déjà été bien informé de la capacité limitée qu'a l'Administration de la Chambre d'organiser une Chambre virtuelle rapidement. En effet, les défis techniques sont immenses et ont été mis en évidence lors de la réunion du Comité il y a deux jours. Manifestement, les députés ne pourront pas tous participer à la séance de mardi prochain.
[Français]
Malgré les efforts surhumains déployés par le personnel de la Chambre, dirigés du côté technique par l'équipe de M. Stéphan Aubé et du côté de la procédure par l'équipe du sous-greffier André Gagnon, les limites physiques et techniques d'une Chambre virtuelle sont importantes et nombreuses. Je suis convaincu que ces personnes vont tout faire pour que ce projet puisse éventuellement réussir, mais je vous demanderais d'être indulgents à leur égard et de comprendre que cela relèvera de l'art du possible.
[Traduction]
Compte tenu de cette réalité et de la nécessité de tenir pleinement compte des considérations juridiques, procédurales et constitutionnelles, il serait préférable d'adopter rapidement un modèle hybride de séances de la Chambre. J'entends par là la tenue de séances en personne avec une participation virtuelle, et le nombre de participants augmenterait graduellement à mesure que les capacités de l'Administration de la Chambre augmentent. Comme cela a été fait jusqu'à maintenant, la tenue de séances en personne avec un nombre limité de participants qui est conforme à la proportion des sièges évite toute question liée aux articles 16 et 48 de la Loi constitutionnelle, c'est-à-dire concernant le siège du gouvernement et le quorum.
Soit dit en passant, je ne comprends pas pourquoi pour le comité spécial dont la création a été acceptée lundi, le quorum n'est fixé qu'à sept membres, alors qu'en fait, il s'agit pratiquement d'un comité plénier, dont le quorum est de 20, comme pour une séance de la Chambre.
Une approche hybride présente l'avantage de maintenir pour les députés et la Chambre la souplesse et la marge de manœuvre que leur accordent les séances en personne, tout en étant conforme aux lignes directrices de santé publique grâce à l'ajout d'une participation virtuelle qui offre l'avantage d'assurer une représentation de toutes les régions du pays de façon sécuritaire. Au fil du temps, le nombre de participants au volet virtuel augmentera et le processus sera plus efficace. De cette façon, les Canadiens continueront de voir la Chambre en action de façon régulière et seront rassurés de constater que leur institution démocratique principale fonctionne et, par conséquent, qu'un retour à la normale commence modestement. La confiance du public est renforcée lorsque les mesures prises par l'organe exécutif sont remises en question régulièrement. À mesure que les représentants de tous les partis et de toutes les régions seront entendus, les Canadiens auront le sentiment que leurs points de vue et leurs préoccupations sont exprimés.
[Français]
Naturellement, il reste d'innombrables détails de procédure à considérer, particulièrement en ce qui concerne les séances virtuelles. Comment le Président pourra-t-il savoir à quel ministre accorder la parole dans une période des questions virtuelle? Comment seront traités les rappels au Règlement et les questions de privilège? Que fait-on des périodes de questions et observations dans le contexte d'un débat? Qu'en est-il des votes par appel nominal? La liste de questions continue et elle est longue.
Je suis cependant tout à fait persuadé que l'équipe des Services de la procédure saura appuyer le Président et la Chambre afin d'arriver à des solutions créatives pour la majorité de ces questions. Une chose est cependant claire: toute approche exigera une contribution collaborative, patiente et constructive de chacun des partis et de tous les députés. Les choses peuvent être et doivent être simples afin que l'on se concentre sur la véritable fonction de notre assemblée: légiférer, étudier les travaux des subsides et exiger des comptes du gouvernement.
[Traduction]
En ce qui concerne les votes, une solution possible à examiner consisterait à s'appuyer sur la pratique des votes appliqués, qui est déjà couramment utilisée, surtout lorsque la Chambre se retrouve avec un grand nombre de votes. D'autre part, si l'on préfère opter pour une solution purement technologique, je suis sûr que le personnel de la procédure et l'équipe technique de la Chambre pourraient conseiller le Comité sur la façon d'élaborer une méthode de vote à distance pour les participants virtuels.
Ce ne sont là que quelques-unes des questions que le Comité et, en fin de compte, la Chambre des communes devront prendre en considération dans les jours, les semaines et les mois à venir. À mon avis, l'échéance qui a été imposée à votre comité dans le contexte actuel n'est pas réaliste si votre comité souhaite examiner en profondeur la question des séances virtuelles. Il s'agit d'une question extrêmement complexe qui a de vastes répercussions et qui gagnerait à être étudiée plus longuement, plus en profondeur. À ce titre, votre comité voudra peut-être présenter un rapport initial et poursuivre l'étude de ce sujet au-delà de la période prévue par son mandat.
[Français]
Cela met fin à mon allocution.
Je suis disponible pour répondre à vos questions.
:
Mesdames et messieurs les membres du Comité, je veux vous remercier de m'avoir invité à me joindre à vous aujourd'hui. Dans le mémoire écrit que je vous ai soumis, j'aborde quelques enjeux et principes constitutionnels qui, j'ose l'espérer, sauront guider votre processus décisionnel relativement aux activités virtuelles de la Chambre.
Dans le contexte de la pandémie actuelle, il importe que tous les députés puissent jouer leur rôle parlementaire aussi intégralement que possible dans les circonstances. Comme il n'est pas envisageable pour l'instant, et sans doute pendant un bon moment encore, de réunir la totalité des députés à la Chambre, il convient d'étudier sérieusement toute la gamme des activités virtuelles possibles, y compris le vote à distance.
Un parlement en régime minceur ne peut pas nous offrir des débats et des délibérations aussi vastes et approfondis avec possibilité de poser des questions et responsabilité de voter sur les projets de loi et les motions pour tous nos représentants élus, qu'ils soient membres d'un parti reconnu ou indépendants.
On peut aussi avoir des réserves quant à la forme squelettique prise par le Parlement jusqu'à maintenant du fait qu'elle ne permet pas de s'assurer que l'ensemble des régions et des provinces sont adéquatement représentées. Bien que le Sénat soit considéré à juste titre comme la chambre assurant la représentation régionale, et que la représentation régionale ou provinciale au sein de la Chambre des communes ne soit pas nécessairement une exigence juridique formelle pour une séance donnée, assurer une telle représentation à la Chambre m'apparaît conforme au principe plus général du fédéralisme d'un point de vue politique et dans un souci de légitimité.
En outre, malgré l'importance capitale des partis politiques au sein de notre système, notre Chambre des communes est fondée en définitive sur l'apport de chacun des représentants élus dans les différentes circonscriptions. Aucun électeur dans quelque circonscription que ce soit ne mérite d'avoir un représentant qui ne peut remplir que partiellement le rôle qui lui incombe dans l'ordre normal des choses. Optimiser ce qui peut être fait virtuellement est le meilleur moyen de favoriser la pleine participation des élus pendant cette situation d'urgence qui perdure.
Notre Constitution représente peut-être l'un des plus grands obstacles au vote en ligne par les députés. Bien que la plupart des activités virtuelles puissent être rendues possibles par des modifications au Règlement, l'autorisation du vote à distance exigera sans doute un amendement formel à la Loi constitutionnelle de 1867, étant donné plus particulièrement le libellé des articles 48 et 49. L'article 48 indique que la « présence » des députés est « nécessaire pour constituer une assemblée de la Chambre dans l'exercice de ses pouvoirs », et le libellé de l'article 49 laisse assurément entendre qu'une présence physique à la Chambre est requise pour pouvoir voter. Quoi qu'il en soit, le Parlement a le pouvoir irréfutable d'amender ces dispositions unilatéralement au moyen de la formule de modification générale. Ainsi, l'adoption d'une loi par le Parlement peut permettre d'apporter les modifications nécessaires à l'instauration du vote en ligne pour les députés.
Certains observateurs ont par ailleurs fait valoir que les rencontres virtuelles font en sorte que la notion de privilège parlementaire devient plus floue. Il est vrai que les tribunaux sont réticents à étendre l'application de ce privilège au-delà des activités parlementaires. Cependant, ils ont toujours fondé leur analyse à cette fin sur la teneur de l'activité ou de la fonction parlementaire dont il est question, plutôt que sur l'endroit où elle est exercée ou le processus qui est utilisé.
Bien que je ne sois pas un expert de la question du privilège parlementaire, je peux difficilement voir comment on pourrait refuser d'étendre ce privilège aux fonctions parlementaires principales des différents députés dans un contexte virtuel. Reste quand même que l'officialisation des processus virtuels au moyen de modifications au Règlement ou même à la Loi sur le Parlement du Canada pourrait contribuer à faire en sorte que ces activités soient considérées par les tribunaux comme essentielles au processus législatif officiel.
Pour ce qui est des considérations d'ordre pratique et technologique, il est clair qu'il y a encore beaucoup de questions à régler. Différents spécialistes, dont Nicole Goodman, ma collègue en sciences politiques, ont traité des moyens à prendre pour mettre en place des mesures comme le vote à distance. Cela fait même l'objet d'une recommandation dans un rapport récent de l'Association parlementaire du Commonwealth. Les chercheurs de Samara Canada ont également abordé certaines des difficultés à surmonter dans ce contexte, mais je conviens avec eux qu'il existe des pistes de solution.
Je suis d'avis que l'officialisation des dispositions permettant les activités virtuelles, y compris le vote, s'impose non seulement pour les prochains mois, mais aussi dans l'éventualité d'une nouvelle situation d'urgence. J'estime par ailleurs que tout changement au Règlement ou à des lois comme la Loi du Parlement du Canada ou même à la Loi constitutionnelle, en vue de faciliter les processus virtuels devrait s'inscrire explicitement dans un cadre de mesures d'urgence.
Les dispositions permettant la participation virtuelle devraient être considérées comme des mesures palliatives temporaires permettant au Parlement de continuer à jouer son rôle fondamental autant que faire se peut. Elles ne peuvent toutefois pas remplacer les travaux menés sur place par le Parlement dans l'ordre habituel des choses.
Enfin, je n'ai pas d'opinion quant à la fréquence des séances de la Chambre pendant la pandémie. Il y a des facteurs évidents qui militent en faveur d'une poursuite des séances et des activités du Parlement de manière aussi soutenue que possible, mais on ne peut pas vraiment se prononcer d'un point de vue scientifique sur des questions comme le nombre de jours de séance par semaine ou la durée des pauses entre les séances. Il est donc préférable de laisser les différents partis en débattre entre eux.
Je vais en rester là pour l'instant. Je serai ravi de répondre à vos questions.
:
Je n'ai pas vraiment d'expertise en cette matière. Cela dit, j'ai participé récemment à de nombreuses séances semblables à celle-ci à titre de membre du conseil d'administration de différentes organisations communautaires ou caritatives. Je l'ai fait à maintes reprises au cours des dernières semaines, et même pendant les mois qui ont précédé, car il arrive que ces organisations se réunissent ainsi virtuellement.
Je veux parler d'une réunion comme celle que nous tenons aujourd'hui où l'on peut voir le visage ou le nom de chacun à l'écran. C'est selon moi une caractéristique importante de cette façon de procéder qui rendrait les choses très difficiles pour une séance de la Chambre dans son ensemble. Je ne crois pas qu'il serait possible d'avoir ainsi plus de 300 personnes sur un écran. Ce serait difficile à tout le moins.
J'ai pris le temps de réfléchir à ces questions lorsqu'on m'a demandé de témoigner à ce sujet. Je voudrais dire une chose d'entrée de jeu. J'estime que cette formule pourrait fonctionner relativement bien pour les comités. Si un comité souhaitait se réunir pour examiner un projet de loi, il pourrait tenir une séance dans l'une des salles prévues à cette fin sur la Colline parlementaire avec la présence de quelques députés s'adonnant à être en ville ou à proximité, tous les autres membres étant connectés au moyen de l'un de ces appareils. La séance pourrait se tenir de façon quasi normale de cette manière.
Par « quasi normale », j'entends que le président du comité peut voir qui est là, les membres peuvent indiquer en levant la main qu'ils veulent prendre la parole, comme nous le faisons pour certains des conseils d'administration dont je fais partie, et le président peut donner la parole à celui ou celle qui désire poser une question ou faire une déclaration avant de passer au prochain intervenant, et ainsi de suite.
En revanche, pour une séance de la Chambre des communes, les choses risquent de se compliquer grandement avec tous ces députés qui pourraient vouloir prendre la parole à différents moments et sur différents sujets, et avec les votes qui exigeront un décompte par quelqu'un pouvant voir l'image vidéo de chacun des députés pour consigner son vote. Ce sera, à mon avis, un processus d'une grande complexité qui risque de ne pas être particulièrement utile. Comme certains l'ont fait valoir avant moi, dans une situation comme l'urgence sanitaire qui frappe le pays actuellement, nous devons toutefois faire le nécessaire pour que le Parlement puisse continuer à s'acquitter tout au moins de certaines de ses fonctions et à régler les questions législatives d'importance. C'est peut-être la seule façon d'y parvenir.
Il y a un autre élément qui m'inquiète tout particulièrement dans ce contexte. Je me demande comment le Président de la Chambre pourra se servir de cette configuration d'écran pour déterminer qui, par exemple, pourra prendre la parole ou poser des questions. Comme je l'indiquais, la situation demeure gérable pour une séance de comité avec un nombre restreint de participants, mais dans le cas de la Chambre dans son ensemble, comment le Président s'y prendra-t-il pour savoir notamment qui sera le prochain à prendre la parole et c'est au tour de quel parti?
Je conviens qu'il y a pour la période des questions un ordre prédéterminé en fonction des partis, mais il faut quand même savoir qui exactement va poser les questions, sans compter les rappels au Règlement qui surviennent de temps à autre. Comment un député pourra-t-il indiquer qu'il souhaite invoquer le Règlement ou soulever une question de privilège en parvenant à retenir l'attention du Président sur un écran comme celui-ci sur lequel l'image vidéo d'un si grand nombre de personnes pourrait se retrouver? J'ai bien l'impression que ce sera difficilement possible, mais je ne suis pas un expert en la matière.
:
Je suis d'accord. On utilisait l'application Zoom pour la plupart des réunions auxquelles j'ai participé. Je la connais donc assez bien à certains égards. Mais, comme je l'indiquais, avec un écran beaucoup plus grand où pourraient apparaître au moins 10 fois plus de participants, il sera très difficile de rester à l'affût pour voir quelles fenêtres sont activées, à moins que la technologie ne permette de placer en tête de file les interventions de ceux qui appuient sur le bouton en question...
J'ai aussi constaté lors de nos réunions qu'il était possible de désactiver la mise en sourdine pour commencer immédiatement à parler. C'est ainsi que les membres de ces conseils pouvaient s'interrompre fréquemment les uns des autres, un peu sans le vouloir, si bien qu'ils étaient deux ou trois à parler en même temps. La personne assumant la présidence doit alors calmer le jeu et choisir un intervenant pour lui donner la parole en premier en demandant aux autres de bien vouloir se taire. Les choses ne sont pas toujours aussi simples qu'on pourrait le croire. Je crains seulement qu'elles deviennent encore plus complexes si le nombre de participants augmente.
Il y a un risque que les participants se mettent à chahuter, comme ils le font en Chambre. Vous désactivez la fonction sourdine et vous vous mettez à chahuter celui ou celle qui tient des propos auxquels vous n'adhérez pas, ou bien à l'interpeller carrément. Un grand nombre de députés se mettent dès lors de la partie, car lorsque l'un d'eux ouvre le bal, il y en a toujours d'autres pour répliquer qu'il n'est pas censé prendre la parole et qu'il devrait se taire. La situation peut ainsi dégénérer de temps à autre, comme c'est le cas en Chambre. À mon avis, il sera extrêmement difficile pour le Président de gérer un tel cafouillis sur un écran de cette taille. À mes yeux, tout va dépendre du nombre de participants.
Il y a une autre possibilité que j'entrevois pour une période de crise comme celle-ci. On pourrait convenir d'un arrangement qui verrait la Chambre ne siéger par exemple qu'une journée par semaine. Cette journée-là, on présenterait les nouveaux projets de loi qui seraient immédiatement renvoyés aux comités. On ferait la même chose la semaine suivante, mais on aurait alors peut-être reçu également certains rapports de comité proposant des modifications au projet de loi étudié. Alors, avec l'accord des partis, on pourrait tenir un vote en troisième ou en deuxième lecture, avec approbation des amendements, et aller de l'avant en évitant les débats prolongés à ces étapes de l'étude du projet de loi. C'est une autre option envisageable. Il est possible que cette solution soit jugée acceptable, tout au moins pour les questions d'importance nationale dont le Parlement pourrait être saisi, s'il devait être trois ou quatre mois sans siéger en raison de la pandémie actuelle.
Ce sont des options qui s'offrent à nous pour éviter des séances trop longues en Chambre. Il en ressortirait également que le travail des comités compterait pour la plus grande partie de celui qui est effectué en ligne. Comme je l'indiquais, les comités, compte tenu de leur taille, peuvent selon moi fonctionner raisonnablement bien dans ce contexte, comparativement à la Chambre. Un comité peut tenir une séance comme celle à laquelle nous participons actuellement. Ainsi chaque parti peut exprimer ses points de vue, chaque membre du comité peut avoir son mot à dire, des témoins peuvent être convoqués et interrogés par les différents membres, et le président du comité peut voir qui sera le prochain à intervenir en fonction des couleurs qui apparaissent sur les écrans des participants qui appuient sur le bouton. De telles séances pourraient se gérer assez facilement en raison du petit nombre de participants.
C'est ce que je peux vous dire pour avoir participé à ces réunions et en avoir observé le déroulement. Ce n'est pas que je préconise vraiment cette façon de faire de préférence aux réunions en personne, mais c'est une solution qui demeure acceptable, d'après mon expérience, si ce n'est le problème du manque de contrôle quant à savoir qui peut prendre la parole. Plusieurs personnes peuvent le faire en même temps, si bien qu'il est nécessaire que quelqu'un puisse rétablir le calme en demandant à tous d'attendre que la première personne ait fini de parler, car on ne peut rien entendre si tous s'expriment simultanément. C'est une chose qui arrive également à la Chambre, mais cela demeure une situation différente.
Voilà donc pour les suggestions que j'ai pensé vous soumettre. Il va de soi qu'il faudra pouvoir compter sur des mécanismes efficaces, via la caméra et l'image, pour l'identification des participants. À mon avis, il est essentiel de voir qui est en train de parler pour être bien certain que ce n'est pas quelqu'un d'autre qui le fait à la place du député.
J'estime en outre important que les options permettant d'intervenir dans la discussion soient limitées d'une manière ou d'une autre si les débats doivent se tenir sur une tribune semblable.
Il n'est pas nécessaire de prévoir une longue période de questions et commentaires à la fin du discours d'un député. Il n'est pas essentiel que des questions de privilège ou des rappels au Règlement soient soulevés très fréquemment, mais ce sont des choses qui arrivent sans que l'on puisse vraiment exercer quelque contrôle que ce soit. Il faudra trouver une solution à ce chapitre. Il sera peut-être un peu plus difficile pour le Président de la Chambre de gérer les situations semblables, car on ne voit pas toujours très bien ce qui se passe derrière la personne qui apparaît à l'écran. Il peut y avoir d'autres individus avec lui dans la pièce qui lui crient des choses, lui passent des notes ou lui demandent de faire ceci ou cela, ce qui ne manquerait pas de causer une certaine désillusion pour une partie de ceux qui seraient témoins d'une telle scène.
J'y vois donc une option qui pourrait se révéler problématique, mais qui demeure importante du point de vue de la Chambre pendant cette période prolongée où il nous sera impossible de nous réunir ou de nous tenir tout au moins à proximité les uns des autres en raison de cette maladie qui frappe notre pays et la plus grande partie de la planète...
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Je vous remercie de m'avoir invité à cette réunion. J'en suis très honoré.
J'ai un peu l'impression de participer à la création de droits nouveaux. Je dois dire que j'ai abordé le sujet d'aujourd'hui sous un angle constitutionnel. Je suis davantage connu comme constitutionnaliste que comme juriste dans d'autres matières.
J'ai réfléchi à la question de savoir si les travaux du Parlement pourraient se poursuivre de façon virtuelle sous un angle beaucoup plus global que ce que vient de faire M. Milliken. J'apprécie beaucoup son approche pratique. Seul un ex-président de la Chambre des communes a des connaissances comme celles-là. Ce sont des connaissances que je n'ai pas.
En ce qui me concerne, j'ai abordé la question du point de vue du droit constitutionnel et je me suis concentré sur la Chambre des communes. Autrement dit, je ne me suis pas concentré sur le Sénat. Bien que mon examen ait porté sur la Chambre des communes essentiellement, les propos que je tiendrai sont applicables mutatis mutandis au Sénat du Canada.
Pour mon étude, j'ai examiné un certain de nombre de sources normatives. Évidemment, j'ai examiné la Loi constitutionnelle de 1867, la Loi constitutionnelle de 1982, la Loi sur le Parlement du Canada, la Loi électorale du Canada, les règlements élaborés par la Chambre des communes elle-même, la jurisprudence, ainsi que les conventions constitutionnelles, celles-ci étant extrêmement importantes en matière parlementaire.
Je peux vous dire d'emblée que je n'ai trouvé aucune contrainte constitutionnelle à ce que les travaux de la Chambre des communes se déroulent de façon virtuelle. La conclusion à laquelle je suis arrivé est qu'il n'y a absolument rien dans la Constitution qui empêche la tenue de travaux virtuels. Cependant, la Constitution contient un certain nombre de principes qui doivent être respectés. Dans la mesure où ils sont respectés, les travaux du Parlement peuvent être tenus virtuellement.
Je rappelle que, même si la Constitution devait contenir des exigences ou des conditions incontournables en ce qui touche les travaux parlementaires, il y a toujours une possibilité pour le Parlement du Canada de modifier certaines dispositions constitutionnelles.
Parmi les conditions incontournables prévues par la Constitution, il y a évidemment l'obligation pour le Parlement de tenir au moins une séance une fois l'an. Cela découle de l'article 5 de la Loi constitutionnelle de 1982.
Deuxièmement, le mandat maximal de la Chambre des communes est de cinq ans, sauf quelques exceptions prévues par la Constitution. Cela découle de l'article 4 de la Loi constitutionnelle de 1982.
Le Président de la Chambre doit présider à toutes les séances, selon l'article 46 de la Loi constitutionnelle de 1867. Le quorum est de 20 députés, le Président étant compté comme un député, selon l'article 48 de la Loi constitutionnelle de 1867.
Les questions doivent être décidées à la majorité des voix, selon l'article 49 de la Loi constitutionnelle de 1867.
Il doit y avoir usage de l'anglais et du français dans les débats, les archives, les procès-verbaux et les journaux de la Chambre des communes, selon l'article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867.
Le gouverneur général dispose en tout temps d'un pouvoir de dissolution, selon l'article 50 de la Loi constitutionnelle de 1867.
Le principe de gouvernement responsable doit être respecté. C'est une convention constitutionnelle qui a probablement acquis au fil du temps un statut supralégislatif. Cela doit être respecté.
L'immunité à l'égard des interventions faites à la Chambre demeure. Cela veut dire que l'immunité absolue dont jouissent les députés quant à ce qu'ils disent ou à ce qu'ils font à la Chambre demeure, parce que cette immunité vise les travaux de l'Assemblée législative et non pas le lieu physique où celle-ci se tient habituellement.
Cela vise donc les travaux, et non pas les parties d'un édifice. Cela vise également les travaux des commissions parlementaires.
Je note également au passage qu'en vertu des articles 7 à 9 de la Loi sur le Parlement du Canada, l'immunité dont bénéficie la diffusion des travaux parlementaires doit également être respectée et doit rester une caractéristique essentielle de la Chambre des communes.
Je note également qu'il doit y avoir une publication des travaux parlementaires, en vertu de la Loi sur la publication des lois et de la Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Évidemment, les tâches qui relèvent du Service de protection parlementaire ne changent pas. Le Service de protection parlementaire s'occupe de la sécurité, partout sur la Cité parlementaire et sur la Colline du Parlement.
Cependant, deux considérations sont, à mon avis, un peu plus difficiles à conjuguer avec la tenue des travaux parlementaires de façon virtuelle. La première considération, c'est le caractère public de la Chambre. Je crois que c'est l'essence même de la Chambre des communes que d'avoir ce caractère public. La Chambre des communes a une fonction législative et une fonction délibérative. Elle a également pour fonction de contrôler le gouvernement. Or il ne faut pas oublier qu'elle a aussi comme caractéristique essentielle d'avoir un caractère public. Si jamais les travaux de la Chambre procèdent virtuellement, il va falloir s'assurer que ce caractère public de la Chambre des communes est respecté.
La dernière condition, vous l'aurez deviné, concerne évidemment les médias. Il est tout à fait essentiel que la Chambre des communes poursuive ses travaux sous l'œil des médias. Dans le contexte où la Chambre fonctionne de manière virtuelle, il faut trouver une façon de s'assurer qu'il n'y a pas d'entraves au rôle des médias, que rien n'affecte le rôle des médias. Évidemment, cela fait aussi partie des caractéristiques essentielles de la Chambre des communes.
Quand je regarde l'essence de la Chambre, les dispositions constitutionnelles applicables à la Chambre, les conventions constitutionnelles et les lois applicables, je ne vois rien qui, à priori, empêche que les travaux de la Chambre se déroulent virtuellement. Bien sûr, un certain nombre de conditions, dont je viens de parler, doivent néanmoins continuer d'être respectées.
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J'aimerais remercier le Comité de m'avoir invité à participer aux délibérations d'aujourd'hui. La présidente a mentionné que je représente l'Institut de droit parlementaire des politiques, mais à cela s'ajoutent 15 ans d'expérience à titre de légiste parlementaire. J'espère que cette expérience vous sera utile dans cet exercice.
Compte tenu du temps relativement court dont je dispose, j'aimerais aborder brièvement le mandat que le Comité s'est donné aujourd'hui. J'ai envoyé une version écrite de mes observations plus détaillées au greffier. Je crois comprendre que le document est actuellement à la traduction.
Pour commencer, je pense qu'il y a des raisons constitutionnelles pour lesquelles Ottawa a été choisie pour être la capitale du Canada. À cela s'ajoute le fait que la capitale d'un pays devrait être, en temps normal, le siège de son gouvernement, y compris de ses institutions législatives, exécutives et judiciaires. On peut donc s'attendre légitimement à ce que le Parlement se réunisse à Ottawa, mais cette attente est réfutable. Je crois que je partage le sentiment et les observations exprimés il y a quelques jours par Philippe Dufresne.
Nous pouvons nous demander, premièrement, en quoi consiste le travail que les parlementaires doivent accomplir. Plus précisément, on peut se demander qu'est-ce qui permet aux parlementaires d'effectuer ce travail. La jurisprudence récente de la Cour suprême nous informe que les députés de la Chambre des communes sont là pour légiférer, délibérer et exiger des comptes du gouvernement. La condition essentielle à ce que les députés puissent s'acquitter des diverses tâches qui leur incombent est la présence du quorum.
Cela nous mène à ce que je vois comme le coeur de la question. Le coeur de la question à laquelle nous devons répondre aujourd'hui est celle de la validité d'une proposition que la Chambre des communes siège et que les députés fassent leur travail en ce qui est qualifié dans le mandat du Comité de « différents lieux ». Dans une certaine mesure, l'étude du Comité peut sembler vaine à la lumière de la décision prise par la Chambre, le lundi 20 avril, de diviser son travail entre des séances en personne à Ottawa et des séances virtuelles, y compris en différents lieux au Canada. Quoi qu'il en soit, la présente étude demeure constructive pour appuyer solidement cette décision en droit.
La validité juridique de la tenue de séances à la fois à Ottawa et en différents lieux ou de tenir des séances virtuelles à l'échelle du pays repose sur l'interprétation actuelle du concept du quorum. À mon avis, l'essence de la question, c'est que si en 1867, il était entendu que le quorum sous-entendait la présence physique des participants, ce n'est plus le cas aujourd'hui. Compte tenu des avancées technologiques qu'on connaît en 2020, il est désormais possible, et sans doute plus approprié, de voir le quorum non plus comme la présence physique simultanée des participants, mais la participation elle-même, soit la rencontre virtuelle des esprits, si l'on peut dire, où que les députés en question se trouvent.
Cette notion de la participation qu'on trouve à la base du concept du quorum se fonde en fait sur l'analyse juridique de deux angles mutuels d'application. Le premier est l'approche téléologique adoptée par la Cour suprême du Canada ces dernières années. Ce qui compte, c'est l'objectif général d'une règle, comme en ce qui concerne le quorum. L'objectif doit être interprété selon les conditions réelles du moment — c'est-à-dire d'aujourd'hui — et non en fonction du monde tel qu'il était en 1867. Ensuite, la tenue de séances en différents lieux, ou l'utilisation de la technologie pour permettre la présence virtuelle est, je crois, conforme à l'interprétation que fait la Cour suprême de l'urgence nationale pour l'application de la doctrine de la paix, de l'ordre et du bon gouvernement.
La COVID-19 a incontestablement créé une situation d'urgence d'envergure nationale. La Chambre des communes a donc toutes les raisons nécessaires, à mon avis, de recourir à des mesures extraordinaires. Je soutiens que l'interprétation du quorum que je viens de vous présenter est conforme aux concepts du privilège parlementaire. Les modalités des séances font partie de l'organisation interne de la Chambre et par conséquent, elles ne relèvent que des décisions de la Chambre.
Sur une note séparée, mais liée, la Chambre devra porter une attention particulière aux autres aspects du privilège parlementaire lorsque des séances virtuelles se tiennent en différents lieux. Il sera notamment important qu'elle détermine si elle considère que les privilèges de la liberté d'expression s'appliquent aux députés participant aux séances depuis différents lieux au pays, plutôt que depuis le parquet de la Chambre des communes, à Ottawa.
Enfin, ce qui transparaît du mandat du Comité, c'est qu'il est très important — et je pense que M. Milliken vient de le souligner — de comprendre que le soutien technique nécessaire à la tenue de séances en différents lieux doit être absolument sans faille, dans la mesure du possible. Les questions soumises au Comité aujourd'hui requièrent une analyse de plusieurs autres aspects importants. Je les creuse d'ailleurs plus en détail dans mon mémoire écrit.
[Français]
Je suis prêt à répondre à vos questions en français ou en anglais, comme vous le voudrez.
[Traduction]
Merci, madame la présidente.
:
Merci, madame la présidente.
Je n'ai que quatre questions, environ, et j'aimerais les poser toutes les deux à M. Bosc et à M. Milliken. Je vous demanderais de me répondre par oui ou non à la première question, après quoi nous pourrons peut-être entendre brièvement les réponses de chacun des trois autres témoins.
Monsieur Bosc, vous avez indiqué dans votre déclaration préliminaire qu'à votre avis, l'idée de tenir des séances virtuelles n'était peut-être pas nécessairement la meilleure, puis vous avez évoqué un modèle hybride. J'aimerais que vous me confirmiez tous les deux — je pense que cela se dégageait assez clairement de vos exposés, mais je veux être certain d'avoir bien compris — que vous estimez qu'il serait assez difficile et peut-être pas judicieux d'organiser des séances virtuelles pour l'ensemble des députés, compte tenu de l'empressement dans lequel nous sommes tenus d'agir et du fait que nous n'envisagions que cinq séances pour étudier des centaines d'années d'expérience parlementaire et trancher.
Est-ce une bonne façon de résumer votre opinion à tous les deux, estimez-vous bel et bien que ce n'est peut-être pas la meilleure idée que de nous empresser de tenir des séances virtuelles?
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie également nos témoins, particulièrement mon prédécesseur, M. Milliken, qui est ici aujourd'hui.
Monsieur Milliken, j'ai une petite question à vous poser rapidement.
Lors de la dernière séance, il y a deux jours, nous avons entendu l'actuel Président de la Chambre. Je lui ai demandé si, compte tenu des conseils prodigués par Santé Canada et du fait qu'il est l'ultime responsable des employés de la Chambre des communes, il lui incombait de faire respecter les recommandations et d'appliquer la règle de la distanciation sociale le plus possible à la Chambre des communes, étant donné le poste qu'il y occupe. Il m'a répondu que oui.
À titre d'ancien Président, auriez-vous vous aussi suivi les conseils de Santé Canada et fait tout en votre pouvoir pour les respecter?
:
Je vous remercie beaucoup, madame la présidente.
Je tiens tout d'abord à remercier nos témoins de leur présence. Je me sens particulièrement choyée de pouvoir m'adresser à eux.
Je vais faire un petit préambule avant de poser ma première question.
L'un des privilèges parlementaires des députés est de se rendre à la Chambre pour prendre la parole. Par contre, dans le contexte de la crise, certains députés plus âgés ou ayant une santé plus précaire pourraient décider ne pas se rendre sur place et préférer les séances virtuelles.
Ma question va toutefois dans l'autre sens. Certains parlementaires ont dit que le fait d'être là à distance ou de façon virtuelle peut nous aider à échanger des notes et à recevoir des suggestions de réponses, de sorte que la reddition de comptes serait moins bonne.
Existe-t-il une forme de privilège parlementaire selon laquelle, même si notre question passe par la présidence, nous pouvons nous attendre à ce que la personne qui y répond soit physiquement devant nous?
Au cours de la dernière réunion avec le légiste parlementaire et le greffier de la Chambre, ils ont parlé de ce que nous pouvons faire pour créer un processus à suivre au besoin. La situation nous a, en quelque sorte, pris par surprise. Nous essayons de nous adapter aussi rapidement que possible. Nous tenons de multiples réunions de comité. Nous nous efforçons de trouver des façons d’examiner et de remettre en question le gouvernement, tâche qui nous incombe en tant que partis de l’opposition et que, selon moi, le gouvernement respecte. Il comprend qu’elle contribue à son bon fonctionnement.
Alors que nous essayons de déterminer à quoi ressemblerait un Parlement virtuel, je me demande simplement si on a envisagé une approche par étapes. Lorsque nous aborderons initialement la question — et je pense que c’est ce que nous verrons la semaine prochaine dans le cadre d’un comité de la Chambre qui discutera de certaines questions relatives à la COVID-19 — l’idée était de faire en sorte que le gouvernement rende compte de ses décisions.
Il s’agit d’une courte période. Existe-t-il une approche qui pourrait se faire par étapes? La situation présente des difficultés particulières que vous avez tous les deux mentionnées: les questions de privilège et les rappels au Règlement. Attirer l’attention du Président. Avez-vous quelque chose à dire concernant une façon d’aborder ces questions dans le contexte d’une approche par étapes?
Ma question s’adresse à M. Bosc et à M. Tardi. Monsieur Tardi, peut-être que vous pouvez commencer?
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C’est simple: la meilleure façon de procéder est par étapes.
Une des façons de le faire et, qu’en fait, on a déjà adoptée avec la reprise des travaux des comités, est de procéder par sujet. Je pourrais facilement voir, disons, une période des questions sur un thème. On pourrait dire qu’on aura trois ministres une journée et trois autres la semaine suivante, et ainsi de suite, pour reprendre graduellement tous les travaux. Au fur et à mesure que la technologie est adaptée à la situation et que la situation sanitaire s’apaise, vous pouvez continuer à travailler de cette façon.
Pour ce qui est de la procédure, je suis persuadé que l’équipe qui entoure le Président, l’équipe des Services de la procédure, sera en mesure d’examiner toutes ces questions — les questions pratiques auxquelles l’ancien Président, M. Milliken, a fait allusion — et de trouver des idées. Du moment que les partis sont d’accord et sont prêts à faire preuve de patience et à collaborer, je pense que cela peut fonctionner.
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Je vais d'abord vous répondre en français, puis ajouter quelques mots en anglais, puisque je suis plus à l'aise en français, tout simplement.
La règle initiale prévue dans la Constitution, en 1867, était que les privilèges et les immunités de la Chambre des communes ne devaient pas excéder ceux du Royaume-Uni. Par la suite, cela a été changé de sorte que les privilèges et les immunités de la Chambre des communes ne puissent pas excéder ceux du Royaume-Uni au moment de l'adoption de la loi fédérale canadienne déterminant ces immunités et ces privilèges.
Maintenant, le Canada peut effectivement adopter des privilèges et des immunités qui excèdent ceux du Royaume-Uni, en vertu de l'article 44 de la Loi constitutionnelle de 1982. Ainsi, les privilèges et les immunités qui sont aujourd'hui prévus dans la Loi sur le Parlement du Canada peuvent, dans certains cas, excéder ceux du Royaume-Uni sans qu'ils soient pour cela déclarés inconstitutionnels.
[Traduction]
Les privilèges prévus dans la Loi sur le Parlement du Canada pourraient excéder ceux qui existent au Royaume-Uni sans être invalides, sans être déclarés inconstitutionnels, en raison de l’article 44 de la Loi constitutionnelle de 1982.
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Merci, madame la présidente.
La question dont le Comité est saisi sur la question concerne la nature temporaire de ce que nous devons recommander. Je pense qu’un certain nombre d’entre vous ont dit cet après-midi que la date butoir du 15 mai ne laissait pas suffisamment de temps.
L’autre jour, on a mentionné pendant notre réunion que, non seulement nous cherchons à prendre une mesure temporaire au plus fort de cette crise de santé publique pour essayer de trouver un modèle, mais nous pensons aussi à l’avenir et aux éléments déclencheurs qui pourraient nous faire passer aux séances virtuelles dans le cas d’une autre pandémie, par exemple.
Je sais, monsieur Bosc, que vous avez parlé de mesures temporaires. Quel danger potentiel pourrait-il y avoir si, en fait, le gouvernement au pouvoir apporte des modifications au Règlement pour donner plus de permanence à ces types de séances virtuelles comparativement au modèle que nous avons actuellement?
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Merci, madame la présidente.
Je vous remercie tous de vous être joints à nous aujourd'hui.
J'ai trois questions à poser. Je vais commencer par une question qui me laisse perplexe depuis assez longtemps.
Je pense que nous entendons souvent les termes « travail essentiel » ou « travailleurs essentiels », et nous entendons par là les professionnels de la santé de première ligne, les commis d'épicerie, les travailleurs de la construction, etc. Il y a un élément très physique qui existe dans l'exercice des fonctions de tous ces travailleurs et qui est, je crois, essentiellement absent de nos fonctions parlementaires et de nos rôles.
Je suis un nouveau député, alors pardonnez-moi si ma compréhension de mes fonctions est simpliste. On m'a dit que nous étions ici pour débattre des questions, légiférer, nous occuper des travaux des subsides et des travaux des comités, ainsi que demander des comptes au gouvernement.
Je me demande, messieurs Tardi et Pelletier, si, en principe, l'une ou l'autre de ces fonctions exige que nous soyons physiquement présents à Ottawa.
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La réponse que je vous donnerai comporte trois parties. Premièrement, en ce qui concerne la partie nécessaire du Parlement et, en particulier, de la Chambre des communes, je pense que l'aspect encore plus fondamental de cet enjeu, c'est le fait que la démocratie est en question. S'il n'y a aucun Parlement, s'il n'y a aucun compromis et s'il n'y a aucune communication entre les gouvernants et la population, la démocratie tombe essentiellement en panne, à mon avis. La démocratie requiert un Parlement, c'est-à-dire une institution législative viable, en tout temps.
La deuxième partie de ma réponse concerne votre argument au sujet de la présence physique des députés qui, on pourrait dire, s'affrontent presque. Je suis d'avis — et je tiens à le répéter maintenant — que ce qui compte encore plus, c'est une rencontre des esprits.
[Français]
Là-dessus, je pense que je rejoins les propos du professeur Pelletier.
[Traduction]
Je crois que lui et moi sommes sur la même longueur d'onde à ce sujet.
Enfin, il y a un argument que j'essaie de faire valoir pour donner une réponse à plusieurs personnes qui ont remis cela en question, et il s'agit de la nature temporaire de la solution, quelle qu'elle soit, que la Chambre des communes décidera d'adopter à ce sujet. À un moment donné, cette pandémie prendra fin. Dans le pire des cas, nous pouvons utiliser la grippe espagnole comme exemple. Cette grippe a duré deux ans. En théorie, cela pourrait nous amener...