FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FINANCE
COMITÉ PERMANENT DES FINANCES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 10 mai 2000
Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): La séance est ouverte. Je souhaite à tous la bienvenue à notre comité cet après-midi. Comme vous le savez tous, nous avons à l'ordre du jour une étude sur le recouvrement des coûts.
Nous avons le plaisir d'accueillir les témoins suivants de Santé Canada: Dann Michols, directeur général, Programme des produits thérapeutiques, Direction générale de la protection de la santé; des Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada: John Stewart, vice-président exécutif et directeur général, Purdue Pharma; Marc Desmarais, vice-président, Affaires gouvernementales fédérales, Rx&D; Arvind Mani, directeur, Affaires réglementaires; et de l'Association canadienne des fabricants de produits pharmaceutiques: Jim Keon, président; John Hems, directeur, Affaires réglementaires, Apotex; et Kent Major, directeur, Affaires réglementaires et recherches cliniques, Technilab.
• 1535
Comme vous le savez, vous disposez d'environ cinq minutes pour
faire vos observations liminaires. Nous passerons ensuite à une
période de questions et de réponses, et aujourd'hui nous ferons des
tours de table de 10 minutes par intervenant.
Nous allons commencer par M. Michols. Bienvenue.
M. Dann Michols (directeur général, Programme des produits thérapeutiques, Direction générale de la protection de la santé): Merci, monsieur. Je vous présenterai des observations liminaires, et je crois que des copies de mon mémoire ont été distribuées. Je n'ai pas l'intention de lire entièrement le document qui a été déposé, mais j'aborderai un certain nombre de questions.
Cet exposé vise à vous donner un aperçu du recouvrement des coûts pour le portefeuille de la santé. Nous utilisons l'expression «portefeuille de la santé», car les programmes dont nous parlerons ne sont pas seulement ceux de Santé Canada, mais aussi ceux d'une agence qui relève du ministre de la Santé sans toutefois faire partie de Santé Canada. Nous utilisons donc l'expression «portefeuille de la santé».
Cet exposé qui a été préparé pour le portefeuille de la santé vise à vous donner des renseignements généraux concernant l'introduction du recouvrement des coûts pour le portefeuille de la santé, de brèves observations sur les défis que nous avons dû relever en tant que gestionnaires au cours des cinq dernières années dans le cadre de cette introduction, et un bref aperçu des mesures que Santé Canada a prises pour relever certains de ces défis.
L'exigence de droits en échange de services, ou le recouvrement des coûts, est devenue une caractéristique de bon nombre de programmes au sein du portefeuille de la santé au cours des cinq dernières années. Le recouvrement des coûts a été introduit au sein du portefeuille de la santé dans le but de faire passer nos programmes à un mode de services, et d'utiliser de gérer plus efficacement les ressources limitées du gouvernement et d'apporter un supplément au budget des programmes qui ont été réduits afin d'atteindre les objectifs de réduction du déficit du gouvernement fédéral en déplaçant une partie du fardeau sur ceux qui causent les dépenses de programmes.
Santé Canada félicite le Comité des finances pour sa décision d'examiner les politiques de recouvrement des coûts au sein du gouvernement fédéral et le remercie de l'occasion qui lui est donnée de venir présenter ses conclusions et de parler de son expérience.
Santé Canada reconnaît avoir eu d'importants défis à relever pour mettre en oeuvre ces programmes de recouvrement des coûts, mais de façon générale le ministère a réussi à relever ces défis grâce à un processus de consultation des intervenants visés. Lorsque nous disons «intervenants visés», nous ne voulons pas parler uniquement de l'industrie qui devra ultimement payer ces droits; nous voulons parler du régime de soins de santé, des patients, des praticiens, des hôpitaux, etc., qui sont visés par le processus de recouvrement des coûts.
Aujourd'hui, je vais vous expliquer les mesures que nous avons prises pour résoudre ces problèmes et améliorer le service de tous les programmes de recouvrement des coûts au sein de Santé Canada. Dans le cadre des initiatives de recouvrement des coûts au ministère de la Santé, nous avons élaboré et nous sommes en train d'élaborer des procédures et des procédés en vue d'appuyer la gestion et la prestation efficaces des services de recouvrement des coûts.
Chaque initiative de recouvrement des coûts est unique. Comme votre comité l'a déjà entendu, l'autorisation d'exiger des droits en échange de services varie d'un programme à l'autre. Certains sont régis par la réglementation. D'autres sont régis par l'autorisation ministérielle. Pour la plupart de ces programmes de Santé Canada ou du portefeuille de la santé, les droits exigés ne permettent de recouvrer que partiellement les coûts des activités, à raison de 20 à 60 p. 100 du coût total d'un programme donné, le reste étant financé à même les crédits.
À l'heure actuelle, nous avons des initiatives de recouvrement des coûts pour les programmes suivants: le programme des produits thérapeutiques, dont je suis responsable; le programme de la santé environnementale; le programme de réglementation de la lutte antiparasitaire; le programme de salubrité alimentaire; et le programme d'examen de l'information sur les matières dangereuses.
Étant donné certains des défis que nous avons dû relever, les cinq dernières années ont été difficiles pour les gestionnaires de programmes au sein de la fonction publique fédérale en général. Non seulement nous avons réagi aux changements apportés à la suite de l'examen des programmes sur le plan de la réduction du déficit, mais nous avons aussi répondu aux nouvelles exigences en matière d'orientation et d'opération découlant de l'introduction de nouveaux produits, d'exigences réglementaires et législatives et des préoccupations publiques qui ont été soulevées au cours de cette période. Pendant toute cette période, cependant, la première responsabilité du portefeuille de la santé consiste toujours à aider les Canadiens à rester en bonne santé et à améliorer leur santé. Cet objectif a été atteint. Les normes de santé et de sécurité n'ont pas été compromises pendant toute cette période difficile. À cette fin, le recouvrement des coûts a été une stratégie importante pour maintenir les ressources des programmes en question.
• 1540
Cependant, l'introduction du recouvrement des coûts dans des
programmes établis a présenté de nombreux défis administratifs et
de gestion qu'on ne rencontre pas habituellement dans la fonction
publique. Ces défis consistaient entre autres à travailler en
tenant compte des exigences de la politique générale du Conseil du
Trésor sans toutefois disposer de lignes directrices détaillées sur
la façon dont ces diverses initiatives devaient être introduites.
Un autre défi consistait à répondre aux exigences en matière de prestation de services, en d'autres termes à établir des objectifs de services ou d'opérations pour les programmes; à tenir compte des nouvelles attentes des clients et des intervenants; et de façon générale à gérer une opération qui dépend des recettes avec les limites de la fonction publique, c'est-à-dire une opération axée sur les crédits.
L'introduction du recouvrement des coûts dans un cadre de réglementation a également été un défi. Le «service de réglementation» offert n'est souvent pas volontaire, et l'organisme de réglementation est un monopole. Cela étant dit, les concepts introduits par le recouvrement des coûts sont liés au domaine de réglementation, principalement à l'efficience de l'opération en question, et doivent être axés sur les besoins et les demandes des divers groupes d'intervenants.
Par ailleurs, un organisme de réglementation hautement qualifié constitue certainement un avantage pour une industrie réglementée. À notre avis, le fait que l'industrie qui fait un profit grâce à la vente de ses produits doive payer pour certains des coûts de l'appareil que la société à mis en place pour s'assurer que ces produits sont sûrs, efficaces et de grande qualité ne présente aucune contradiction philosophique.
Par ailleurs, obliger les industries réglementées à comprendre que la réglementation n'est pas gratuite et vise à améliorer la qualité de l'information et de l'interaction réglementaire est également une conséquence utile du processus de recouvrement des coûts.
Dans ce contexte, permettez-moi de souligner que les pays industrialisés qui ont des systèmes équivalents aux nôtres, notamment les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Union européenne, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, ont tous en place une forme de politique de droits d'utilisation, et dans certains cas leurs programmes de réglementation sont financés à 100 p. 100 par les recettes plutôt que par crédits gouvernementaux.
Le document que j'ai déposé auprès du comité explique plus en détail notre expérience pour relever ces grands défis dont je vous ai parlé, soit tenir compte des exigences des politiques du Conseil du Trésor, qui ne sont peut-être pas aussi claires que celles dont nous, gestionnaires de programmes, avons l'habitude. En ce qui concerne les exigences en matière de prestation de services, au cours des négociations avec les intervenants et les clients, certains programmes ont pris des engagements spécifiques en matière de prestation de services qui étaient fondés sur des hypothèses au sujet de la demande relativement aux programmes et sur la suffisance des ressources disponibles provenant à la fois des crédits et des droits prévus. Il est clair maintenant que dans de nombreux cas l'information à l'appui de ces suppositions était insuffisante. Par exemple, bon nombre d'études au sujet de l'impact sur les entreprises ont donné de l'information dont la qualité était incertaine, presque anecdotique. Les ministères et les organismes typiquement n'ont aucune autorisation légale pour demander des données de vente, ce qui fait qu'il est difficile d'évaluer l'impact économique des droits proposés pour une société, encore moins pour toute une industrie.
Par ailleurs, on a sous-estimé la demande des ressources disponibles. Par exemple, la dépense d'introduction du recouvrement des coûts, travailler avec les clients et les intervenants, et la négociation ainsi que la consultation publique sont tous des éléments additionnels qui ont été sous-estimés. Au sein de mon propre programme, la consultation des intervenants nous a coûté plus de 500 000 $ lorsque nous avons mis en place notre initiative de recouvrement des coûts. Le coût approximatif pour administrer le programme de recouvrement des coûts au sein de mon service s'élève à 1,5 million de dollars, et nous prévoyons que le processus d'évaluation que nous avons mis en place coûtera un million de dollars de plus.
Le troisième défi consiste à tenir compte des nouvelles attentes des clients et des intervenants. J'aimerais citer un extrait d'un document écrit par Richard Bird et Thomas Tsiopoulos, document qui a été utilisé lors du processus d'élaboration de la politique du Conseil du Trésor en 1997. Je pense qu'il expose assez succinctement l'un des problèmes que nous avons rencontrés:
-
Le premier défi, et d'une certaine façon le défi le plus
fondamental que posent les droits d'utilisation découle du simple
fait de la politique économique: lorsque des droits sont exigés
pour un service qui était auparavant fourni gratuitement, peu
importe qu'ils soient conçus de façon très rationnelle, ces droits
seront presque inévitablement considérés par les anciens
bénéficiaires comme étant tout simplement une autre taxe, étant
donné particulièrement qu'il est très peu probable que ces
bénéficiaires verront une réduction des taxes qu'ils doivent payer.
Il sera particulièrement difficile de surmonter une telle
opposition si l'une des trois conditions suivantes prévaut: 1) les
groupes de clients sont très bien organisés; 2) ils peuvent
utiliser des arguments généraux de politique publique, notamment
les soi-disant conséquences négatives des droits imposés pour la
distribution du revenu, pour appuyer leur cas; et 3) il ne semble
y avoir aucun avantage pour compenser ces nouveaux frais.
• 1545
La prestation de services avec recouvrement des coûts pose des
défis importants sur le plan des relations avec les clients et les
intervenants. Lorsque des droits sont exigés, les clients
développent souvent de nouvelles attentes, des attentes plus
grandes face à la prestation des services. Parfois les clients
s'attendent à participer davantage à la gestion du service qui est
offert, et cela peut être problématique dans le cas d'une opération
de réglementation. Cette attente est également une préoccupation
pour les intervenants qui ne sont pas considérés comme étant les
payeurs. D'autres intervenants pourraient exprimer une
préoccupation relativement à l'intégrité des services offerts,
c'est-à-dire que les services d'examen et d'évaluation du
médicament pourraient être influencés du fait que celui qui paie a
bien le droit de choisir. C'est une préoccupation très réelle dans
le cadre du régime de réglementation.
Il est par ailleurs apparu clairement que, dans de nombreux cas, les attentes ne sont pas raisonnables, étant donné la confusion des clients et des intervenants quant à la nature des services financés par ces frais. Par exemple, dans mon programme, les droits de permis d'établissement, les gens se font faussement l'idée que ces droits sont versés pour inspecter un site spécifique plutôt que pour financer de façon générale l'inspection, l'analyse des produits et les enquêtes au sein du système en général. Les fonds provenant des droits pour permis d'établissement et l'autorisation de vendre des médicaments permettent au programme de faire l'inspection et les enquêtes requises. Un avantage clé, souvent oublié par l'industrie, c'est que tout concurrent dans l'industrie peut faire l'objet d'une enquête et d'une inspection. Ils sont tous tenus de respecter les mêmes règles. Bref, cela assure des règles du jeu équitables.
Il faut souligner que les droits pour permis d'établissement sont promulgués en vertu des droits ou des privilèges prévus dans la Loi sur la gestion des finances publiques, et non par la disposition sur les services, et que par conséquent il n'est pas nécessaire d'associer des services spécifiques à ces droits.
Le quatrième grand défi a été d'élaborer et d'administrer un programme axé sur le recouvrement des coûts au sein d'un système gouvernemental fédéral qui est axé surtout sur le financement à même les crédits. Je n'entrerai pas dans les détails que vous trouverez dans le document que je vous ai remis.
Au cours des cinq dernières années, les gestionnaires de chaque initiative de recouvrement des coûts ont dû déterminer comment travailler le plus efficacement possible en tenant compte des contraintes existantes et déterminer les changements nécessaires. Bien que l'attitude des gestionnaires de programmes puisse changer, pour s'axer davantage sur le rendement et le service, l'attitude des ministères et du gouvernement reste souvent axée sur le contrôle. Il n'a pas été facile ni rapide d'obtenir les changements nécessaires. Il a fallu tenir de longues négociations avec les services ministériels et les organismes gouvernementaux centraux et élaborer des propositions de financement, des ententes, et dans certains cas mettre en place une réglementation à l'appui ou apporter des modifications législatives.
J'aimerais maintenant vous donner de l'information sur nos activités au sein de Santé Canada visant à appuyer divers programmes qui participent à une initiative de recouvrement des coûts.
Au cours des cinq dernières années, il est apparu clairement que bon nombre des défis de la mise en oeuvre du recouvrement des coûts étaient difficiles à relever pour les programmes en raison de leurs ressources limitées. La direction au sein du portefeuille de la santé a donc entrepris au cours des 12 derniers mois un certain nombre d'initiatives horizontales, d'initiatives coordonnées, en vue d'aider les programmes à améliorer la gestion des programmes de recouvrement des coûts. Ce soutien ministériel additionnel visait à renforcer et à améliorer les capacités administratives et de gestion et comprend: une politique ministérielle concernant le recouvrement des coûts; un comité de gestion axé sur l'action à l'échelle du ministère pour coordonner les activités de recouvrement des coûts; des examens et des évaluations opérationnels à l'interne; un centre ministériel pour la coordination du recouvrement des coûts; des mécanismes en vue de partager l'information et de mettre en place des réseaux entre les programmes; et des activités visant à élargir les compétences des gestionnaires de programmes et des membres du personnel qui travaillent aux programmes de recouvrement des coûts.
Tout d'abord, on est en train d'élaborer la politique ministérielle de recouvrement des coûts. Forte de son expérience accumulée au cours des cinq dernières années à travailler avec différentes exigences au niveau des programmes du portefeuille de la santé, la direction est mieux à même de déterminer ce qu'il faut ajouter à la politique du Conseil du Trésor pour répondre le mieux possible aux besoins du portefeuille de la santé.
Deuxièmement, on a créé un comité de la haute direction au ministère. Le comité de recouvrement des coûts du portefeuille de la santé est un groupe de gestionnaires de programmes axés sur l'action qui a été établi pour examiner les questions horizontales et les défis qu'il reste encore à relever au sein du portefeuille. Ce comité sert de mécanisme de coordination pour transmettre de l'information et offre une tribune pour discuter des initiatives de recouvrement des coûts au sein du portefeuille et pour prendre des décisions à cet égard.
Le comité maintient un lien avec le comité exécutif ministériel et avec les sous-ministres, et les membres du comité, à titre de gestionnaires principaux, sont en mesure d'assurer des communications plus efficaces et efficientes au sein de la direction du portefeuille de la santé.
• 1550
Troisièmement, il y a l'examen interne des opérations. Dans ce
cas-ci, j'aimerais attirer votre attention sur une initiative
majeure en cours au sein de mon programme, qui, nous l'espérons,
influencera et informera les autres opérations au sein de Santé
Canada et du gouvernement fédéral.
Nous avons lancé ce que nous appelons l'examen de la phase IV du programme des produits thérapeutiques. L'objectif de l'évaluation de la phase IV de ce programme consiste à évaluer l'impact des initiatives de recouvrement des coûts sur les petites, moyennes et grandes entreprises dans l'industrie des produits thérapeutiques, y compris les secteurs de la vente au détail, de la vente en gros et de la distribution; sur les consommateurs, y compris la population canadienne en général et les ministères provinciaux et d'autres qui paient pour bénéficier du régime de soins de santé; et sur l'organisme de réglementation lui-même et ses opérations. Les résultats de l'évaluation aideront à Santé Canada à prendre des décisions éclairées quant aux solutions de rechange ou aux modifications qu'il faudra peut-être apporter à son initiative de recouvrement des coûts, y compris, mais non de façon limitative, les niveaux et la structure des frais ainsi que d'autres paramètres liés aux programmes.
Les principaux résultats de cette initiative comprennent entre autres une évaluation de l'initiative de recouvrement des coûts pour le programme des produits thérapeutiques par rapport à la politique de recouvrement des coûts du Conseil du Trésor, et des avantages privés et publics qui en découlent; une évaluation complète du modèle d'établissement des coûts de l'initiative actuelle de recouvrement des coûts utilisé par le programme des produits thérapeutiques, y compris une comparaison avec d'autres régimes de réglementation avec justification à l'appui, l'identification de toute lacune que comporte l'initiative actuelle et la contribution des droits à la prestation d'un service efficace; une évaluation de l'impact de l'initiative de recouvrement des coûts sur le rendement du programme des produits thérapeutiques en tenant compte des engagements précédents en matière de rendement, de l'expérience d'autres administrations, des options pour l'amélioration des mécanismes de communication et de rétroaction à l'intention des intervenants en vue d'encourager la transparence et la reddition de comptes, et des contraintes qui pourraient limiter la capacité de mon programme de gérer l'initiative de recouvrement des coûts et par conséquent l'opération efficace de ses programmes; une évaluation de l'impact direct, indirect et cumulatif de l'initiative de recouvrement des coûts sur les industries et les produits thérapeutiques, sur les consommateurs et sur le régime de soins de santé et sur le programme des produits thérapeutiques lui-même, et l'élaboration d'une méthode rigoureuse et de sources de données pertinentes en vue de faire une évaluation ultérieure de l'impact des droits prévus dans le domaine de la réglementation des instruments médicaux; et enfin, un examen systématique des leçons apprises des autres administrations et des solutions de rechange organisationnelles ou opérationnelles, ou les deux, et des modifications en vue d'améliorer la gestion de l'initiative de recouvrement des coûts du programme des produits thérapeutiques.
C'est un engagement que nous avons pris quand nous avons institué le recouvrement des coûts il y a cinq ans, à savoir qu'une fois le système instauré, une fois que nous aurions des données solides sur ses conséquences, nous entreprendrions d'en faire une évaluation exhaustive qui profiterait aussi bien au gouvernement qu'au programme.
Nous avons engagé sous contrat une tierce partie, KPMG, pour effectuer cette évaluation, nous avons créé un comité directeur composé d'une trentaine de représentants des parties intéressées par le programme, nous avons prévu un niveau élevé de participation intraministérielle et interministérielle à ce mécanisme, et nous croyons que le rapport devrait être rendu public au mois de juin et devrait permettre de répondre à beaucoup des questions que pose votre comité en ce moment.
Nous avons aussi commandé une étude au groupe RIAS Inc., qui s'intitule An Assessment of Challenges and Issues Facing Health Canada's Cost Recovery Initiatives. Cette étude a récemment été déposée auprès du comité du recouvrement des coûts de Santé Canada.
Les experts-conseils ont expliqué ainsi l'optique dans laquelle ils avaient fait l'évaluation:
-
Il n'est pas très utile de s'attarder au passé. L'important
maintenant est de veiller à ce que les programmes aient les outils
voulus pour relever les défis de l'avenir, pour profiter de tous
les mécanismes qui leur accordent une certaine marge de manoeuvre
et qui sont destinés à accroître l'efficience et l'efficacité, et
de s'assurer que le ministère participe à l'examen du Conseil du
Trésor dans la mesure où l'examen permet d'en arriver à des
changements pratiques et utiles.
Nous poursuivons en expliquant un certain nombre des options présentées dans ce document, et nous pouvons vous faire parvenir le document en question si cela vous intéresse.
Nous avons également mis sur pied un centre ministériel pour le recouvrement des coûts. Le bureau du revenu et de la comptabilité a été établi afin d'assurer aux programmes du portefeuille de la santé des services efficients et de qualité, notamment un soutien centralisé aux initiatives en matière de recouvrement des coûts.
Le bureau est en train de planifier un certain nombre d'initiatives destinées à soutenir une gestion améliorée du recouvrement des coûts: faire des recherches et des analyses relatives aux diverses autorisations de financement; étudier les conséquences des changements qui découleront de l'application de la comptabilité d'exercice à la prestation des initiatives en matière de recouvrement des coûts; faire des recherches et des analyses sur les objectifs en matière de revenus et de dépenses; mais surtout concevoir un modèle ou un protocole de soutien des programmes pour l'examen annuel de leurs opérations soumises aux principes du recouvrement des coûts en vue d'améliorer les services et d'abaisser les coûts.
• 1555
Comme nous l'avons déjà dit, nous avons réseauté les divers
programmes du ministère qui appliquent le recouvrement des coûts
afin de les aider à recueillir et à échanger des informations, et
nous donnons des détails à ce sujet dans notre mémoire.
Enfin, le portefeuille de la santé a entrepris d'aider le personnel à assumer les nouvelles responsabilités liées à la gestion efficiente et efficace des initiatives de recouvrement des coûts. Étant donné le peu de ressources dont nous disposons, nous avons décidé de suivre une approche stratégique pour offrir au personnel des possibilités de formation. Ainsi, au cours de la dernière année, nous avons mis sur pied un projet pilote pour évaluer les besoins du personnel en matière de comptabilité par activités et pour déterminer les approches à suivre et les aspects qui intéressent le personnel. D'autres occasions de perfectionnement seront offertes au personnel sur une multitude de sujets. Les employés apprendront notamment à travailler de façon plus efficace avec les parties intéressées afin de dresser des profils des clients, à entreprendre des analyses exhaustives des conséquences pour toutes les parties intéressées, à tenir compte des intérêts des petites entreprises et à mener des négociations et des consultations publiques efficaces.
En conclusion, ces cinq dernières années, beaucoup des programmes du portefeuille de la santé ont été soumis au recouvrement des coûts et à la politique du Conseil du Trésor à cet égard. La transition ne s'est pas faite sans de nombreux défis, notamment pour ce qui est de gérer les attentes des parties intéressées.
Santé Canada continue à reconnaître qu'il reste toujours des défis à relever relativement à la prestation de certains de nos programmes qui sont soumis au recouvrement des coûts. Comme vous nous l'avez entendu dire aujourd'hui, nous avons déjà entrepris de régler les problèmes qui se posent au fur et à mesure que nous le pouvons. On doit toutefois reconnaître que des progrès ont déjà été accomplis dans un certain nombre de programmes et que des initiatives visant l'ensemble du portefeuille ont été lancées afin de soutenir et de développer la capacité de gestion et d'administration dans les autres.
À notre avis, le recouvrement des coûts est une politique gouvernementale utile, mais les programmes doivent pouvoir compter sur les ressources et l'infrastructure dont ils ont besoin pour veiller à ce que les Canadiens et les clients profitent pleinement des avantages de cette politique.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Michols.
Nous allons maintenant entendre les Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada, qui sont représentées par M. John Stewart.
Je vous souhaite la bienvenue.
M. John Stewart (vice-président exécutif et directeur général, Purdue Pharma; Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada): Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, de nous avoir invités à vous parler des conséquences des programmes de recouvrement des coûts pour les Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada.
Je m'appelle John Stewart. Je suis vice-président exécutif et directeur général de Purdue Pharma, compagnie de recherche pharmaceutique qui a son siège à Toronto. Je suis aussi président du comité du programme des médicaments des Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada. Je suis accompagné aujourd'hui de Marc Desmarais, vice-président aux Affaires fédérales, et d'Arvind Mani, directeur des Activités réglementaires, aux Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada.
Les Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada sont l'organisation nationale qui représente les 20 000 Canadiens travaillant chez les fabricants de produits pharmaceutiques qui font de la recherche pharmaceutique au Canada. Toutes les entreprises membres des Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada ont un grand objectif en commun: rechercher et mettre au point de nouveaux médicaments pour améliorer le système des soins de santé et la qualité de vie des Canadiens.
Permettez-moi de vous dire, au nom de l'association, que nous voyons d'un bon oeil que le comité souhaite étudier le programme de recouvrement des coûts du gouvernement fédéral et que nous sommes heureux de pouvoir vous aider à en évaluer les avantages. Vous avez reçu copie de mon mémoire, et certains des documents de fond auxquels je me reporterai pour vous présenter des faits et des chiffres s'y trouvent annexés.
Permettez-moi de préciser au départ que la R-D n'est aucunement incompatible avec le principe du recouvrement des coûts. En fait, notre association appuie l'idée de payer des frais pour faire évaluer les propositions de médicaments que nous faisons depuis que le gouvernement a lancé cette idée en mai 1986. Le problème, si problème il y a, c'est que l'industrie a appuyé le principe du recouvrement des coûts sur la foi de promesses selon lesquelles l'examen et l'homologation des médicaments se trouveraient ainsi améliorés et accélérés—ces promesses n'ont toutefois pas été tenues.
Parce que les promesses en question n'ont pas été tenues, les patients canadiens doivent attendre beaucoup plus longtemps pour des thérapies fondées sur de nouveaux médicaments que les patients dans bien d'autres pays, et le Canada dans son ensemble ainsi que les Compagnies de recherche pharmaceutique en particulier ont certainement perdu ainsi des investissements importants.
Je voudrais vous faire un bref historique de l'expérience récente de l'industrie pharmaceutique relativement au recouvrement des coûts.
En 1984, comme l'a dit M. Michols, dans le cadre de l'examen des programmes du gouvernement fédéral, le PPT a entrepris un processus de consultation qui s'est traduit par l'imposition de frais annuels pour le renouvellement des identifications numériques des médicaments et des licences des installations de fabrication des médicaments. Le PPT a aussi imposé des frais pour l'évaluation des présentations de médicaments.
L'instauration de normes de rendement pour l'évaluation de ces présentations faisait partie intégrante de l'initiative, qui était parfaitement compatible avec la politique du Conseil du Trésor telle qu'elle était énoncée à l'époque. Le PPT s'était engagé à respecter ces normes de rendement—normes de rendement qui étaient compétitives à l'échelle internationale par rapport aux grandes agences de réglementation des médicaments, comme la FDA aux États-Unis et la MCA au Royaume-Uni. Le recouvrement des coûts devait ainsi permettre aux patients canadiens d'avoir plus rapidement accès aux nouvelles thérapies dont ils avaient besoin, l'industrie pharmaceutique devant elle aussi en profiter, puisqu'elle pourrait mettre ses médicaments sur le marché plus vite et accroître ses rentrées d'argent.
• 1600
Même s'il y avait un certain scepticisme à l'époque quant à la
capacité du PPT de respecter ces normes de rendement, la majorité
des compagnies ne s'est pas opposée à l'imposition des frais,
puisque le PPT avait répété à maintes reprises qu'il permettrait
effectivement d'accélérer le processus d'examen et d'homologation.
En fait, le PPT avait fixé des objectifs de rendement très
intéressants par rapport à ce qui se faisait alors. Il prévoyait en
fait un délai de 300 jours pour le processus d'examen scientifique
et d'évaluation, réduisant ainsi de moitié le délai antérieur.
La ministre de la Santé de l'époque, Diane Marleau, avait même dit que la tarification serait établie de manière à ce que les frais puissent être réduits si le PPT ne réussissait pas à réaliser ses objectifs de rendement. C'est vous dire à quel point on tenait à ce que les objectifs soient réalisés. Le gouvernement semblait vraiment déterminé à tenir promesse et à améliorer le rendement.
Malheureusement, le fait est que le rendement du PPT ne lui a pas permis d'atteindre ses objectifs.
Vous trouverez un transparent qui vous explique cela plus en détail. Le diagramme vous montre combien de temps il faut attendre pour qu'il y ait examen, puis approbation des nouveaux médicaments au Canada. Ce diagramme remonte à 1983. On peut constater que le délai augmente de façon constante pour ce qui est de l'examen et de l'approbation des médicaments jusqu'en 1994, année où le PPT a fait l'objet de transformations majeures dans le but de réduire considérablement ce délai: on a réussi à faire chuter le délai d'approbation de 1 142 jours à 682 jours, soit un peu moins de deux ans.
En 1995, on mettait en vigueur le recouvrement des coûts, et on commençait à imposer des frais pour l'évaluation des présentations de médicaments. Comme le montre le diagramme, le délai d'examen et d'approbation depuis 1995 n'a pas changé de façon significative, et le délai actuel, qui est de 591 jours pour 1999, est presque le double de celui qui est fixé au PPT à 355 jours et qui correspond au délai moyen d'évaluation et d'approbation.
Toutefois, au cours de ces mêmes années, les agences de réglementation des médicaments dans certains pays, tels que le Royaume-Uni, les États-Unis et la Suède, ont amélioré considérablement le rendement, ce qui fait que le Canada accusait énormément de retard dans l'accessibilité à de nouveaux médicaments. D'après le sondage annuel sur les avis de conformité de nos compagnies, que vous avez vu illustré dans notre document, le délai moyen d'approbation des nouveaux médicaments en 1999 atteignait 591 jours, soit 21 jours de plus qu'en 1998; de plus, c'était la deuxième fois au cours des cinq dernières années, c'est-à-dire pendant toute la période au cours de laquelle le recouvrement des coûts était mis en vigueur, que le délai d'approbation de ces médicaments augmentait. En comparaison, cette moyenne de 591 jours, qui équivaut à 19,4 mois, représente presque sept mois de plus que le délai d'approbation des nouveaux médicaments en 1999 par la FDA, aux États-Unis.
L'incapacité du gouvernement et du PPT d'atteindre leurs objectifs d'amélioration du rendement a eu de multiples conséquences négatives pour le Canada. D'abord, la rapidité d'exécution de l'évaluation et de l'approbation est liée directement à la rapidité avec laquelle de nouveaux médicaments deviennent disponibles pour les patients canadiens, et est aussi directement liée au seuil de rentabilité d'une industrie qui a investi substantiellement dans la R-D. La rapidité d'exécution est également indirectement liée aux diverses possibilités d'investissement, de fabrication et d'emploi—possibilités qui échappent actuellement au Canada au profit d'autres pays à causer des retards dans l'évaluation et l'approbation.
Un des exemples les plus flagrants des difficultés que posent l'évaluation et l'approbation, c'est le cas du nouveau médicament contre l'asthme, le Singulair. Ce traitement révolutionnaire, qui est le prototype d'une nouvelle catégorie de traitements de l'asthme, a été découvert et mis au point à Montréal. Bien que le Canada ait effectué la plus grande partie de la recherche et ait soumis sa demande d'approbation du médicament au PPT exactement au même moment qu'on la soumettait à beaucoup d'autres pays, ce médicament a en fait été approuvé dans 35 autres pays avant de l'être au Canada.
J'ai ici un diagramme qui vous explique plus en détail cet objectif de 355 jours dont j'ai parlé, puis qui vous donne un exemple—celui de Singulair—expliquant ce qui se passe au PPT.
• 1605
Si vous regardez la ligne noire du dessus, vous voyez que les
chiffres 10, 45 et 300 correspondent au nombre de jours que l'on se
fixe comme objectif pour atteindre les diverses étapes du processus
d'évaluation. La première partie, qui correspond à 10 jours,
concerne la réception de la demande et l'accusé de réception. Puis
le délai de 45 jours permet au PPT de s'assurer que la demande est
complète et contient toute l'information nécessaire à l'évaluation
complète de la nouvelle substance. Puis, on arrive à la cible de
300 jours. Cet objectif permet au PPT de faire l'évaluation
scientifique servant à déterminer si, preuve à l'appui, le
médicament est suffisamment sûr et efficace pour être
commercialisé.
Vers le bas, la ligne rouge montre que le délai total a été de 473 jours pour l'évaluation et l'approbation du médicament Singulair. La deuxième ligne qui se trouve en dessous vous montre que l'évaluation de la sécurité et de l'efficacité a commencé 73 jours après que la demande a été reçue et a été complétée 170 jours après réception de la demande.
Le processus d'évaluation doit également permettre d'établir la chimie du produit et de déterminer s'il correspond à des normes d'assurance de la qualité dans sa fabrication. On se demande si le produit est stable, s'il démontre une activité et une pureté appropriées en comprimés ou en inhalations. Dans ce cas-ci, l'évaluation n'a commencé que 335 jours après réception de la demande, puis s'est terminée 132 jours plus tard. Dans le cas qui nous occupe, même si l'évaluation de son innocuité et de son efficacité a été terminée dans le délai fixé, le dossier n'a pas été repris avant encore un certain temps. Autrement dit, cette autre facette importante de l'évaluation n'a pas commencé avant 335 jours après la date de la réception de la demande. Cela illustre donc abondamment ce qui se passe au programme.
Par ailleurs, ce qui se passe augure bien, puisque les délais démontrent que l'évaluation de l'innocuité et de l'efficacité peut être terminée relativement rapidement. S'il était possible de faire chevaucher les différentes étapes, le processus d'évaluation et d'approbation pourrait être très concurrentiel.
Dans la situation actuelle, étant donné que l'on impose des frais de recouvrement des coûts, mais que le ministère ne respecte pas ses engagements en matière de rendement, le milieu pharmaceutique considère les frais prélevés comme étant fondamentalement une taxe plutôt qu'un paiement correspondant à des services rendus. Il ne doit pas nécessairement en être ainsi. Aux États-Unis, une fois le recouvrement des coûts imposé pour l'évaluation des demandes de nouveaux médicaments, on a constaté que le délai requis pour l'évaluation et l'approbation avait diminué substantiellement. Dans la brochure fournie, vous trouverez un document qui vous le confirme.
Les Compagnies de recherche pharmaceutique du Canada ne s'opposent aucunement au principe du recouvrement des coûts. Nos compagnies sont disposées à payer un tarif raisonnable pour que la démarche d'évaluation et d'approbation soit effectuée dans un délai raisonnable—et nous parlons ici d'un délai raisonnable qui permettra de surmonter les conséquences négatives pour les soins de santé accessibles aux Canadiens et d'un délai raisonnable permettant à l'industrie pharmaceutique d'atteindre plus rapidement le seuil de rentabilité de ses investissements.
Pour illustrer ce qui se passe et sur une note un peu plus personnelle, sachez que plus tôt cette semaine j'ai assisté à une conférence de deux jours sur le processus d'évaluation et d'approbation des médicaments au Canada. La conférence était organisée par des regroupements de patients qui s'inquiétaient de voir leurs membres devoir attendre beaucoup plus longtemps qu'aux États-Unis et ailleurs que certains nouveaux médicaments soient approuvés. Malheureusement, les maladies dont souffrent les Canadiens ne peuvent attendre pendant que l'approbation des médicaments traîne en longueur. Pour ces gens, c'est une question de vie ou de mort.
Merci de votre attention, et je répondrai avec plaisir à vos questions.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Stewart.
Nous entendrons maintenant M. Jim Keon, président de l'Association canadienne des fabricants de produits pharmaceutiques.
M. Jim Keon (président, Association canadienne des fabricants de produits pharmaceutiques): Merci, monsieur le président. Je m'appelle Jim Keon, et je suis président de l'Association canadienne des fabricants de produits pharmaceutiques. Je suis accompagné aujourd'hui de John Hems, directeur des Affaires réglementaires chez Apotex, à Toronto; et de Kent Major, directeur des affaires réglementaires et de la recherche clinique chez Technilab Pharma, à Mirabel, juste à l'extérieur de Montréal, au Québec.
Merci de nous avoir invités. Tout comme ceux qui nous ont précédés, sachez que nous sommes ravis que le Comité des finances ait accepté de se pencher sur ce dossier, et nous espérons que les travaux du comité feront évoluer les choses.
Je suis aujourd'hui dans une situation relativement inusitée, car je dois avouer à un comité de la Chambre des communes que je souscris en grande partie à ce qu'a dit l'industrie des produits de marque. Je voudrais même préciser que l'industrie des médicaments génériques n'est pas, en principe, opposée à la perception de droits pour le recouvrement des coûts. D'ailleurs, nous les avons acceptés et négociés des normes de rendement qui s'y appliqueraient.
• 1610
Ce qui importait pour nous il y a maintenant cinq ans et qui
nous importe encore aujourd'hui, c'était les engagements en matière
de prestation de services, les questions de rendement et notre
capacité de commercialiser nos produits. J'y viendrai dans un
instant, mais j'affirme d'entrée de jeu que le manque de rendement
du ministère nuit non seulement à notre industrie et aux compagnies
pharmaceutiques, mais aussi au système de soins de santé.
Vous savez peut-être que l'Association canadienne des fabricants de produits pharmaceutiques représente l'industrie des médicaments génériques. Nous sommes un organisme national, et nos membres sont engagés principalement dans la recherche, la mise au point, la fabrication et la distribution des médicaments génériques. Certains de nos membres se sont également lancés dans la biotechnologie et dans la mise au point de nouvelles substances.
L'industrie du médicament générique représente une partie essentielle du système de soins de santé canadien. En 1999, les ventes de médicaments génériques représentaient 1,2 milliard de dollars, soit 14 p. 100 de l'ensemble du marché des médicaments d'ordonnance. Toutefois, les médicaments génériques représentent plus de 40 p. 100 des 269 millions d'ordonnances remplies au Canada en 1999. Les médicaments génériques représentent des économies de coût moyennes de 50 p. 100 par rapport aux équivalents d'origine, ce qui représente, d'après nos calculs, des économies de plus d'un milliard de dollars par année pour le système de soins de santé.
Nous employons plus de 5 000 Canadiens et dépensons plus de 170 millions de dollars par année en R-D, ce qui représente environ 14 p. 100 de nos ventes.
Nous appartenons à la coalition des gens d'affaires pour le recouvrement des coûts, la Business Coalition on Cost Recovery, qui comparaissait hier à votre comité. Nous profiterons de notre présence aujourd'hui pour vous parler du recouvrement des coûts du programme des produits thérapeutiques et de ses conséquences pour notre industrie.
Depuis 1995, Santé Canada impose cinq frais distincts à l'industrie du médicament générique. Il s'agit du prix à payer pour vendre un médicament, en 1995; du prix à payer pour l'évaluation des médicaments, imposé aussi en 1995; des frais liés aux fiches maîtresses des médicaments, en 1996; des frais liés aux certificats d'exportation des produits pharmaceutiques, que l'on a commencé à imposer en 1996; et du prix à payer pour les licences d'établissement, imposé en 1998. À ce jour, notre industrie a versé plus de 14 millions de dollars en frais de recouvrement des coûts.
Comme je le disais plus tôt, bien que ces frais soient imposants, et dans certains cas complexes, la question la plus pressante pour notre industrie n'est pas le montant exigé, mais plutôt le non-respect des engagements dans l'évaluation des médicaments génériques.
Depuis 1995, avec l'introduction des frais imposés à l'évaluation des demandes, l'absence d'efficacité dans l'évaluation de la part du PPT s'est traduite par un ralentissement dans les approbations de médicaments génériques, ce qui représente, d'après nos calculs, près de 250 millions de dollars de ventes perdues pour nos membres. Mais ce qui est sans doute plus important pour le comité et pour le système de soins de santé, c'est que ce ralentissement cause de 100 à 140 millions de dollars en pertes d'économies pour les consommateurs et pour les acheteurs de médicaments, du simple fait que les médicaments génériques arrivent sur le marché beaucoup plus tard qu'ils ne le devraient.
En imposant des frais à la réception de la demande en 1995, le PPT et le gouvernement du Canada s'étaient engagés de façon très spécifique à l'égard de notre industrie à établir des objectifs en matière de rendement et à les respecter. Laissez-moi vous citer ce qui avait été dit à l'époque.
En avril 1995, on pouvait lire dans le résumé de l'étude d'impact de la réglementation de la Gazette du Canada, partie II, ce qui suit:
-
Si les frais imposés auront une incidence certaine sur l'industrie
en augmentant ses coûts d'exploitation, la récompense sera un
processus d'évaluation des médicaments plus efficient, plus simple
et plus efficace. Ainsi, l'industrie pourra mettre ses produits
plus rapidement sur le marché, ce qui améliorera grandement sa
capacité de planification et, par le fait même, sa capacité globale
de générer des revenus...
Je cite encore:
-
Les responsables du programme s'engagent à respecter en totalité
les normes [...] au cours des trois prochaines années, [à] mettre
au point et [à] respecter des normes de rendement comparables aux
meilleures normes internationales tout en maintenant des normes de
qualité supérieures.
Voici une dernière citation:
-
Lorsqu'on aura élaboré des nouvelles normes, celles-ci seront dans
les plus brefs délais associées au barème des frais inclus dans le
présent projet de règlement. De cette façon, les frais seront
réduits relativement aux présentations qui ne seront pas traitées
dans les délais prescrits par les normes.
Évidemment, rien de tout cela ne s'est concrétisé.
L'industrie des médicaments génériques s'attendait à ce que le gouvernement respecte ses engagements. Nous avons accepté de payer ces frais, car on nous assurait que le PPT déploierait tous les efforts voulus pour réduire le délai nécessaire pour évaluer les présentations de médicaments génériques, pour publier plus rapidement des avis de conformité et pour mettre plus rapidement les médicaments sur le marché. Cela devait se concrétiser—et nous étions tout à fait d'accord—car on garantissait que l'on accorderait suffisamment de ressources au programme pour qu'il puisse s'assurer que tous les médicaments génériques répondent aux normes strictes de santé et d'innocuité. C'est ainsi que, conjointement avec le PPT et avec Santé Canada, notre secteur a élaboré des normes de rendement.
• 1615
La première évaluation d'une présentation de médicament
générique ne devait pas prendre plus de 225 jours. Si la
présentation devait faire l'objet d'une deuxième évaluation, en
raison d'une lacune quelconque, le PPT devait avoir terminé son
second examen dans les 195 jours. Or, le rapport annuel de 1999 sur
le rendement du PPT a démontré que les premiers examens des
présentations portant sur des médicaments génériques ont nécessité
en moyenne 458 jours, soit plus de deux fois la norme de rendement.
D'après ce que nous avons vu, le temps requis pour évaluer une
présentation de médicament générique est d'environ 30 jours, et
pourtant il faut au PPT 458 jours! Le reste du temps, c'est du
temps mort.
Après 1995, il y a eu initialement une amélioration du rendement du PPT, après la mise en place du programme de recouvrement des coûts en 1995 et 1996. Toutefois, le rendement du secteur des médicaments génériques a diminué depuis 1997, et les objectifs fixés n'ont jamais été atteints.
L'analyse réalisée par notre association révèle que, parce que le PPT n'a pas examiné les médicaments génériques qui lui ont été soumis selon les délais qui lui avaient été fixés, nos sociétés ont perdu 250 millions de dollars en ventes supplémentaires depuis 1995. Cette perte de 250 millions de dollars entre 1995 et 1999 a provoqué une perte de 57 millions de dollars en investissements dans la R-D et a empêché de créer 140 emplois. En outre, 73 médicaments génériques de moins environ ont été soumis au PPT.
Ces pertes de débouchés pour le secteur des médicaments génériques ont eu un effet sur le régime de soins de santé du Canada. Comme je l'ai dit au début de mon exposé, nos produits coûtent environ la moitié moins cher que leurs équivalents portant une marque commerciale. Cela représente des économies pour le régime de soins de santé, de l'argent qui peut être utilisé ailleurs. D'après nos calculs, les 73 médicaments génériques supplémentaires auraient permis au régime de soins de santé de réaliser des économies de l'ordre de 100 à 140 millions de dollars. Ce sont des chiffres importants, à une époque où le régime de soins de santé a bien de la difficulté à payer ses factures de médicaments.
Les médicaments génériques sont une solution fondamentale dont disposent les Canadiens pour atténuer le fardeau du coût élevé des médicaments. Une utilisation accrue des médicaments génériques donne une marge de manoeuvre dans d'autres secteurs du système de santé. Les gouvernements provinciaux qui offrent des régimes d'assurance-médicaments importants exigent tous, dans une certaine mesure, le recours à des médicaments génériques. Bon nombre d'employeurs, y compris le gouvernement fédéral, essaient également de tirer le meilleur parti possible de l'utilisation de médicaments génériques. Cela n'est possible que lorsque de tels médicaments sont disponibles.
Notre association estime que le PPT n'a pas réussi à atteindre les objectifs de rendement qu'il s'était fixés lors de la mise en oeuvre de l'initiative de recouvrement des coûts. Ces échecs ont eu des effets négatifs importants pour notre industrie et pour le régime de soins de santé du Canada. Il faut consacrer les ressources nécessaires à l'examen des médicaments génériques selon les objectifs fixés au PPT. Nous espérons que le Comité des finances pourra exhorter le gouvernement à respecter ses engagements et à améliorer le rendement des examens des médicaments génériques. Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Keon.
Nous allons maintenant passer aux questions. Les députés disposent de 10 minutes.
Monsieur Epp.
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins d'être venus nous rencontrer.
Je vais commencer par Santé Canada. Je vais vous poser une question personnelle. Aurait-il mieux valu éviter le recouvrement des coûts?
M. Dann Michols: À titre de chef du programme, non, je ne crois pas. Si vous regardez les tableaux qui vont ont été montrés sur le rendement du programme, vous constaterez que bon nombre des problèmes mentionnés au sujet du rendement de l'organisme de réglementation ont été imputés au recouvrement des coûts.
Durant la période de 1994 à 1996, les délais ont été réduits de moitié—ce qui représente donc une augmentation de 100 p. 100 de la productivité—alors que parallèlement les sommes affectées au programme ont été réduites de moitié. Il faudrait donc avoir deux tableaux montrant ce qui aurait pu se produire. Les délais auraient pu augmenter considérablement en fonction de la réduction des sommes affectées. Nous avons réussi à réduire les délais de traitement, ou à augmenter la productivité, alors que les sommes affectées au programme étaient réduites. Cela montre que dans les faits la productivité du programme a augmenté. Cela a été rendu possible en partie par les recettes provenant du recouvrement des coûts. Nous n'aurions jamais pu réaliser les réductions sans le recouvrement des coûts.
• 1620
Le recouvrement des coûts permet d'obtenir des revenus, et
c'est utile. Mais en outre il a un effet important sur la mentalité
des scientifiques et des personnes chargées de la réglementation au
sein du programme, car il les oblige à voir le processus de
réglementation comme un processus qui est géré et dont les clients
ont des besoins légitimes. Cela a également favorisé une
augmentation de la productivité. Je ne peux donc pas dire qu'il
aurait fallu éviter le recouvrement des coûts.
M. Ken Epp: Depuis combien de temps oeuvrez-vous pour le gouvernement dans ce secteur?
M. Dann Michols: Je dirige ce programme de réglementation depuis sept ans. On m'a embauché pour entreprendre cette augmentation de la productivité et mettre en place le recouvrement des coûts.
M. Ken Epp: Les médicaments sont plus complexes, et il y a des conséquences plus graves à approuver un médicament qui peut présenter un danger. Cela a-t-il ralenti le processus?
M. Dann Michols: C'est en tout cas une considération dont il faut tenir compte.
Permettez-moi de demander à Rx&D d'afficher le deuxième tableau sur l'exemple particulier.
Les autres témoins ont fait plusieurs critiques au sujet de l'efficacité de l'examen des demandes par l'organisme de réglementation. Ce tableau montre qu'ils ont tort. Comme on peut le lire sur la ligne du haut, nous avons des objectifs. Les deux lignes du bas révèlent le temps réel qu'il nous faut pour examiner une demande. Les donnée sur l'innocuité et l'efficacité apparaissent à la première ligne où il y a les deux points, et les données sur la chimie et la fabrication sont à la deuxième ligne. Vous constaterez qu'en fait le processus de réglementation est très efficace. L'examen lui-même, c'est-à-dire la période durant laquelle le scientifique de l'organisme de réglementation examine la demande, communique avec l'industrie et rend une décision, est plus brève que le délai prévu à notre objectif.
Comme le montre ce tableau, entre autres—et nous reconnaissons que ce sont nos données—le problème, c'est que nous n'avons pas suffisamment de ressources pour que les scientifiques de la réglementation puissent obtenir au départ les demandes. Le problème n'est pas un manque d'efficacité du processus de réglementation, mais un manque de ressources.
Vous avez parlé de complexité, mais les demandes relatives à des produits complexes peuvent être examinées en respectant les objectifs une fois qu'ils nous sont communiqués.
Le président: Si vous me le permettez, un instant...
M. Ken Epp: Bien sûr.
Le président: L'examen des données sur la chimie et la fabrication doit-il être fait à la suite de l'autre, ou les deux peuvent-ils être faits en même temps?
M. Dann Michols: D'après notre politique, ils sont faits en même temps, et le système est prévu pour cela. Les deux examens ne dépendent pas l'un de l'autre. Dans ce cas particulier, comme dans la plupart des cas, le problème, c'est que nous ne disposons des ressources nécessaires pour faire l'examen de la chimie et de la fabrication que plus tard au cours du processus. Dans les deux cas, ces retards sont provoqués par le temps de rétention dans un des aspects de l'examen. Suis-je clair?
Le président: Non.
M. Dann Michols: L'examen de la chimie et de la fabrication est distinct de l'examen de l'innocuité et de l'efficacité. On a indiqué combien de temps est nécessaire pour chacun de ces examens. Le problème, c'est d'obtenir cette partie de la demande. Si nous avions davantage de ressources pour faire l'examen de la chimie et de la fabrication, la demande pourrait être examinée plus tôt et les délais seraient plus facilement respectés.
Le président: Votre système n'est donc pas très efficace.
M. Dann Michols: Non. Ce que j'ai dit, c'est que le système est très efficace. Le problème, ce sont les ressources dont nous disposons. C'est le nombre de scientifiques qui peuvent faire les examens, et non le travail qu'ils font.
M. Ken Epp: D'où viennent vos limites financières, puisque vous obtenez maintenant des revenus, dont vous ne disposiez pas auparavant, grâce au recouvrement des coûts, et que, également, le gouvernement met davantage d'argent à votre disposition?
M. Dann Michols: Contrairement à ce qu'on a dit au sujet du système américain, lorsque le gouvernement canadien a décidé de mettre en place un régime de recouvrement des coûts...
• 1625
Pardonnez-moi, je vais formuler ma réponse différemment. Le
gouvernement canadien a décidé de mettre en place un régime de
recouvrement des coûts simultanément à la mise en oeuvre de son
examen des programmes. Cela signifie que pendant qu'on mettait en
place le recouvrement des coûts et qu'on obtenait de ce fait des
revenus, les sommes affectées à nos budgets étaient réduites. Aux
États-Unis, lorsqu'on a mis en place le recouvrement des coûts, les
sommes ainsi recueillies s'ajoutaient à l'argent qui était affecté.
Par conséquent, la FDA des États-Unis avait à sa disposition des
millions de dollars de plus que nous au Canada.
M. Ken Epp: En d'autres termes, vos crédits ont été réduits. C'est cela que vous dites.
M. Dann Michols: En d'autres termes oui, nos crédits ont été réduits.
M. Ken Epp: Monsieur Stewart, vous nous avez dit que vous considériez ces frais de service, ou le recouvrement des coûts, comme une simple taxe. Étant donné ce que M. Michols vient de nous apprendre, en l'occurrence que manifestement le volet fiscal a diminué et que vous payez désormais des frais de service, comment pouvez-vous dire que c'est simplement une taxe?
Je joue un peu l'avocat du diable en disant cela, ne vous méprenez pas.
M. John Stewart: Pas du tout.
Comme M. Michols l'a dit dans son introduction, lorsque les frais de service ont été imposés dans différents secteurs, il n'y a pas eu aux yeux du groupe une réduction d'impôt proportionnelle en contrepartie. En d'autres termes, Purdue Pharma a continué à payer des impôts sur le revenu au même barème. John Stewart a continué à payer des impôts sur le revenu au même barème, comme d'ailleurs tout le monde ici. Le recouvrement des coûts a simplement été un nouveau prélèvement qui nous a été imposé à trois niveaux: des frais annuels pour l'identification numérique, des frais annuels pour l'agrément de l'établissement et, ce qui représente la somme la plus importante, les frais en question pour l'évaluation des présentations de médicaments. Ces derniers sont élevés: nous devons payer 250 000 $ pour présenter un médicament.
Conjointement à cela, si nous parvenons à obtenir de meilleurs résultats en mettant plus rapidement ces médicaments sur le marché, l'industrie touchera plus rapidement ses bénéfices, et le patient profitera du médicament plus rapidement aussi. Mais si les choses ne s'améliorent pas à ce titre, nous considérons cela simplement comme une dépenses improductive.
M. Ken Epp: Parlons-en justement. Vous avez dit...
Le président: Excusez-moi, monsieur Epp, mais M. Michols voulait également répondre.
M. Ken Epp: Oh, excusez-moi.
M. Dann Michols: J'allais simplement demander qu'on vous montre l'autre tableau et vous signaler que si la réduction de 1 200 jours à 600 jours du temps nécessaire à l'évaluation n'est pas une amélioration, je ne sais pas comment la qualifier.
M. Ken Epp: C'est exactement ce que j'allais vous demander. Le tableau en question montre qu'après 1995 le nombre total de jours nécessaires à l'évaluation a diminué de façon assez marquée.
M. John Stewart: De fait, cela s'est produit en 1995, avant l'imposition des frais de service.
M. Ken Epp: Mais vous avez pourtant dit—et j'ai une citation sous les yeux—que les délais étaient plus longs.
M. John Stewart: En effet.
M. Ken Epp: Lorsque je regarde le graphique, lorsque je regarde la période 1995-1999, je constate que nous en sommes revenus à la situation de 1983. À cette époque, en 1983, cela ne vous satisfaisait pas non plus?
M. John Stewart: C'est tout à fait exact. L'objectif visé était de 180 jours.
M. Ken Epp: Oh, je vois. Les objectifs n'ont donc tout simplement pas été atteints.
M. John Stewart: Vous avez raison.
M. Ken Epp: Mais de là à dire que les délais sont maintenant plus longs, c'est un peu de l'exagération. Ils sont encore trop longs, certes, mais ils ne sont pas plus longs qu'avant, parce que jadis il fallait 1 163 jours, comme on le voit en haut du tableau.
M. John Stewart: C'est exact, mais à l'époque il n'y avait pas de frais de service. Si le temps nécessaire à l'évaluation est passé de 1 142 jours à 682 jours, cela n'a rien à voir avec les frais de service; c'est le résultat des améliorations qui ont été apportées à un autre niveau.
Lorsque les frais de service ont été introduits, on avait déjà pris l'engagement de s'aligner sur la période correspondante dont nos concurrents profitent à l'étranger, c'est-à-dire environ 365 jours. C'est donc de cela au juste que je parlais, ces objectifs spécifiques, 365 jours, qui ont été fixés—promis, si vous préférez—par le gouvernement, même par le ministre de la Santé de l'époque, et ces objectifs n'ont pas été atteints. Ce serait plutôt l'inverse, nous semblons nous en éloigner légèrement.
Je ne veux nullement critiquer le PPT, même si j'en donne l'impression. Il n'a pas du tout profité de ces nouvelles recettes produits par les frais de service—ou, s'il en a bénéficié, son financement a été considérablement réduit.
M. Ken Epp: J'aurais une dernière question à poser avant d'arriver à la fin de mon temps d'intervention.
J'aimerais vous demander si, à votre avis, vous avez bénéficié du service offert par le gouvernement. C'est une question très générale que je vous pose là, et je pense que vous répondrez oui, mais est-ce bien vrai?
M. John Stewart: Je vous répondrai qu'effectivement, en tant que particulier, comme tous les autres Canadiens ainsi que l'industrie du médicament, je profite de cette garantie qui m'est donnée que les médicaments sur le marché sont efficaces et sûrs.
M. Ken Epp: Je vois.
Merci, monsieur le président. D'après ma montre, j'ai pas mal dépassé mon temps de parole, même en décomptant votre temps d'intervention.
Le président: Je vous ai pris une minute.
M. Ken Epp: En effet, je l'avais chronométrée.
Le président: Monsieur Cullen.
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci aussi à nos témoins.
Je pense que nous avons tous entendu qu'en principe les gens étaient favorables à la notion de recouvrement des coûts. Les compagnies de ma circonscription dont j'entends parler me disent exactement ce que ces messieurs sont venus nous dire ici aujourd'hui, c'est-à-dire qu'elles aimeraient que ces frais de service soient accompagnés d'une amélioration des résultats par rapport à la norme internationale.
Monsieur Michols, je m'y perds un peu. Vous nous avez dit que le programme de recouvrement des coûts avait démarré à peu près au même moment que l'examen des programmes. Au moment de cet examen des coûts et de leur recouvrement, avait-on envisagé que le ministère ou la direction puissent voir leurs budgets réduits, ou cela n'avait simplement pas été pris en compte dans l'équation?
M. Dann Michols: Lorsque nous étions en train d'élaborer la structure des frais de service, nous avons plutôt étudié les activités offertes et ce qu'elles coûtaient. Nous avons fixé le barème des frais de service à partir d'un certain nombre de variables, et il est évident que les ressources sur lesquelles le programme pouvait compter représentaient une de ces variables.
Nous n'envisagions pas de recouvrer 100 p. 100 des coûts associés à nos activités de réglementation. Les frais ont été fixés en conséquence. Malheureusement, la «contribution» du gouvernement, ce que le gouvernement apportait dans l'équation, a diminué, ce qui a fait que nous n'avons pas pu atteindre les objectifs.
M. Roy Cullen: Les recettes produites par le recouvrement des coûts sont-elles défalquées du crédit budgétaire, ou vont-elles directement à la direction ou à la division intéressée?
M. Dann Michols: Nous sommes ici en mode de calcul net des crédits. Les recettes vont au Trésor, mais le Parlement nous les rétrocède par voie de crédits budgétaires.
M. Roy Cullen: À 100 p. 100?
M. Dann Michols: Oui.
M. Roy Cullen: Je vois. Par conséquent, ces recettes supplémentaires ont servi à financer d'autres programmes?
M. Dann Michols: Non, elles ont été rétrocédées à notre programme, mais exclusivement aux fins pour lesquelles elles avaient été perçues, mais en revanche les ressources que nous jugions nécessaire d'obtenir à même le Trésor pour les compléter avaient disparu.
M. Roy Cullen: Je veux bien, mais je ne comprends toujours pas. Lorsque vous avez commencé à recouvrer vos coûts, j'imagine que vous y aviez réfléchi au préalable—c'est ce que vous nous avez d'ailleurs confirmé—et que vous aviez dans l'idée que l'examen des programmes risquait d'entraîner certaines réductions budgétaires. Pourquoi n'en avez-vous pas tenu compte dans votre scénario de recouvrement?
M. Dann Michols: Parce qu'à ce moment-là nous ne connaissions pas encore toute la portée de l'examen des programmes. Il s'agissait d'un processus qui a pris du temps à se concrétiser.
M. Roy Cullen: Monsieur Stewart, vous avez fait des comparaisons avec les États-Unis, et, d'après ce que me disent les compagnies situées dans ma circonscription, c'est vrai que le délai d'exécution y est plus rapide, c'est certain, mais qu'en est-il des frais? Y sont-ils plus élevés ou plus bas?
M. John Stewart: L'ordre de grandeur est à peu près le même, mais il est exprimé en dollars américains.
M. Roy Cullen: Ils sont donc légèrement supérieurs.
M. John Stewart: C'est cela.
M. Roy Cullen: Mais cela ne compense pas l'amélioration du résultat.
M. John Stewart: En effet.
M. Roy Cullen: Sur la diapositive précédente, monsieur Michols, il y a une partie consacrée à la sécurité et à l'efficacité et une autre partie consacrée à la chimie et à la fabrication. Il se fait par ailleurs que sur ce tableau...
Vous avez parlé de ressources. Ce ne sont pas les mêmes personnes qui interviennent dans les différents processus, n'est-ce pas?
M. Dann Michols: En effet.
M. Roy Cullen: Il est donc possible que cela ait pu se faire simultanément. Vous avez dit que c'était une question de ressources. Dans ce cas particulier, il se fait que l'un a suivi l'autre. S'agit-il d'un protocole normal dans votre direction, ou le fait que les deux se sont succédé dans ce cas-ci était-il fortuit?
M. Dann Michols: Non, cela montre bien ce qui s'est produit dans la plupart des cas. Le problème de ressources qui se pose dans le cas de l'examen pour le volet chimie et fabrication est plus grave que dans le volet efficacité et essais cliniques.
M. Roy Cullen: Pour en revenir à une question que vous a posée mon collègue d'en face, si vous êtes actuellement en mode de recouvrement des coûts—et je dirais en passant que, dans une certaine mesure, cela masque un peu le problème des normes de rendement—n'auriez-vous pas un bon argument commercial, si l'industrie vous épaulait, pour consacrer davantage de ressources au processus, étant donné que les frais de service vous permettraient de les récupérer?
M. Dann Michols: Pour un gestionnaire de programme, il n'y a que deux sources de financement possibles: les frais de service et les crédits votés par le Parlement. Pour obtenir davantage de ressources, je devrais soit augmenter les frais de service, soit demander une augmentation du crédit budgétaire. Ce n'est pas une augmentation du crédit budgétaire qui ferait augmenter les frais de service.
M. Roy Cullen: C'est peut-être un cercle vicieux. S'il vous faut davantage de ressources et si vous pouvez récupérer ces ressources supplémentaires par des frais de service tout en atteignant les normes de rendement réclamées par l'industrie, je ne vois toujours pas pourquoi vous ne pourriez pas le faire.
M. Dann Michols: Ce serait sans doute réalisable. Lorsque nous avons établi le barème des frais de service au tout début, c'était après un vaste processus de consultation qui avait fait intervenir toutes les parties prenantes: l'industrie, manifestement, puisque c'est elle qui payait, mais également le système de santé tout entier.
Nous pourrions rouvrir ce processus de négociation et proposer un relèvement des frais de service pour nous permettre de nous rapprocher de l'objectif. Mais je crains—et mes collègues ici présents auront certainement quelque chose à dire à ce sujet—que cela ne suscite une certaine résistance, étant donné qu'ils estiment pour leur part que le gouvernement n'a pas tenu la promesse qu'il avait faite de financer le processus et que, par conséquent, les objectifs n'ont pas été atteints. Pourquoi l'industrie devrait-elle payer davantage pour que nous atteignions des objectifs qui avaient pourtant été promis au départ? Cette résistance serait donc assez légitime.
M. Roy Cullen: Nous y reviendrons dans quelques instants, et j'aimerais maintenant que MM. Stewart et Keon nous disent s'ils seraient favorables à une intervention dans ce sens.
J'essaie également de m'y retrouver au sujet de l'affectation de ces ressources. Vous nous dites que pendant l'examen des programmes vous ignoriez où le bât allait blesser et que vous n'aviez donc rien prévu à ce titre dans votre scénario de recouvrement. Je voudrais savoir à un moment donné comment vous définissez vos frais. S'agit-il du coût total...?
M. Dann Michols: Il s'agit en effet du coût total, qui comprend les frais généraux attribuables au programme et au ministère.
M. Roy Cullen: Je vois.
Vous nous dites ensuite que les ressources qui ont été réduites pour... Est-ce tout le ministère qui a été touché? À ce moment-là, une partie de la réduction imposée vous aurait été imputée, et c'était à vous à trouver alors l'argent nécessaire pour respecter les paramètres de la réduction budgétaire.
M. Dann Michols: C'est bien cela.
M. Roy Cullen: Qui avait pris ces décisions?
M. Dann Michols: C'est la haute direction du ministère et, au bout du compte, le gouvernement.
M. Roy Cullen: Comment le comité de gestion du ministère a-t-il décidé des secteurs où il fallait réduire les budgets? En aviez-vous une idée?
M. Dann Michols: Santé Canada a manifestement procédé de la même façon que tous les autres ministères fédéraux. Le ministère a étudié ses priorités, mais aussi la façon dont les différents programmes étaient mis à contribution, et il a ainsi pu voir où les réductions budgétaires provoqueraient le moins de dégâts.
M. Roy Cullen: À l'époque, les discussions avaient-elles porté...? J'imagine que, tout comme chaque service, chaque direction du ministère, vous avez présenté un scénario catastrophe. Je le conçois facilement. À l'époque, aviez-vous dit par exemple au sous-ministre que toute réduction budgétaire se traduirait dans votre cas par une grave diminution de votre performance?
M. Dann Michols: Je pense que je résumerais les choses de façon un peu différente. Il n'allait pas y avoir une réduction grave de la performance. Ce serait plutôt que nous ne serions pas capables d'atteindre la norme voulue dans le délai initialement prévu.
M. Roy Cullen: C'est peut-être une paraphrase, mais, essentiellement, les normes de performance qui avaient été promises n'ont pas été respectées dans ce sens.
M. Dann Michols: Par rapport aux promesses, c'est exact.
M. Roy Cullen: Par conséquent, le sous-ministre et tous ses collègues en étaient bien conscients?
M. Dann Michols: Certainement.
M. Roy Cullen: Nous pouvons peut-être revenir à MM. Stewart et Keon. Si vous suivez bien le raisonnement, s'il s'agit d'un mode de recouvrement des coûts, nous accordons davantage de ressources, nous facturons l'industrie, et nous atténuons la norme de rendement réclamée. J'aimerais savoir si, dans votre cas, cela marcherait ou non.
M. John Stewart: Au départ, nous avons examiné ce que cela coûtait en heures travaillées, en heures d'examen, en frais généraux totaux, comme le disait M. Michols, pour examiner et approuver un dossier de présentation d'un médicament. Nous sommes arrivés à ces frais de 250 000 $ qui sont actuellement réclamés. Ce chiffre a en fait été calculé par le PPT et modulé ensuite selon les réactions de l'industrie.
• 1640
Le PPT ne fait pas qu'examiner et approuver les demandes de
présentation de nouveaux médicaments. L'industrie injecte environ
25 millions de dollars par an pour l'examen et l'approbation des
demandes de présentation de nouveaux médicaments. C'est une grosse
somme. À un moment donné, cela dépassait même le montant du crédit
budgétaire.
Nous nous plaisons plutôt à croire que les crédits budgétaires ont diminué, mais que le PPT a conservé toutes ses responsabilités, et qu'en fait il est probable qu'une partie de l'argent qui devrait servir à l'évaluation des demandes de présentation de nouveaux médicaments sert, indirectement peut-être, à financer des services qui n'ont rien à voir avec cela. Dans ce sens, donc, nous pensons payer pour l'instant un montant raisonnable.
M. Roy Cullen: Pour poursuivre un peu l'argument, au risque d'être un peu cynique, on pourrait dire que si vous étiez à la tête du ministère, vous pourriez fort bien dire: nous allons diminuer les ressources, ce qui concerne le domaine privé, mais en faisant bien en sorte de garnir le volet public, là où nous avons une responsabilité générique par rapport à notre mandat d'ensemble. Peut-être pouvons-nous rogner un peu plus encore sur les services qui concernent le domaine privé. Je me fais l'avocat du diable, car j'ignore ce qui s'est passé au juste. J'ai en revanche du mal à comprendre où sont allées ces ressources et comment elles ont été distribuées ou réparties.
Si vous étiez le plus parfait des cyniques, diriez-vous que c'est peut-être cela qui s'est produit en partie? Certaines des ressources sont passées aux secteurs où les services publics, dans le cadre du mandat d'ensemble du ministère, nécessitaient un renforcement, et cela au détriment des services offerts en mode de recouvrement des coûts. Que s'est-il passé au juste? Quel est votre sentiment?
M. John Stewart: Nous pourrions revenir à la diapositive montrant qu'il y a eu très peu de changements au niveau des résultats depuis cinq ans, depuis 1995. La période d'examen était de l'ordre de 550 à 600 jours. Certes, il n'y a pas eu d'augmentation radicale des ressources accordées au volet examen et approbation des demandes de présentation de nouveaux médicaments de marque. Quant aux produits génériques, M. Keon en parlera.
Il s'agit d'un ministère complexe, qui a de très nombreuses activités, dont M. Michols pourrait parler mieux que moi, des activités qui n'ont rien à voir avec l'examen et l'approbation des demandes de présentation de nouveaux médicaments, mais qui sont néanmoins extrêmement importantes. Je pense que certains de ces domaines ont d'ailleurs connu une expansion. Je ne crois pas que leurs crédits budgétaires, leur budget, leur financement d'ensemble, aient augmenté proportionnellement pour autant.
Le président: Monsieur Keon.
M. Jim Keon: Au moment où le régime de frais de service a été introduit, la question du barème a fait l'objet de négociations longues et relativement animées. Notre industrie était favorable aux frais de service, mais uniquement parce qu'il y avait ces engagements que nous pensions très précis et irrévocables concernant le niveau de performance. Je vous dirai simplement qu'aux États-Unis, par exemple, l'industrie du médicament générique ne paie rien pour faire examiner ses demandes de présentation. Du point de vue de la concurrence, donc, il y a déjà ici une certaine inégalité.
Les crédits devaient représenter 50 p. 100 du coût d'exploitation du programme des produits thérapeutiques. Après examen des types de fonctions, on a jugé que c'était équitable. La direction a ce rôle général d'orientation des stratégies publiques et des politiques publiques, et d'élaboration de la réglementation. Il faudrait peut-être que cela soit financé pour moitié par les crédits et pour moitié par les frais de service. Pour l'instant, le financement revient à 60 p. 100 environ des frais de l'industrie.
Cette industrie serait-elle d'accord pour payer plus en échange d'un meilleur rendement? Certainement. Si les gens sont sceptiques, c'est parce qu'ils ont négocié il y a cinq ans pour avoir un meilleur rendement sur ce qu'ils payaient, mais cela n'a pas été le cas. Alors celui qui n'a pas atteint l'objectif dit: «Eh bien, si vous payez un tout petit peu plus, nous allons vraiment nous améliorer.» C'est le scepticisme total.
Moi qui appartiens à la Business Coalition on Cost Recovery, qui comparaissait hier, j'ajouterais que, quand nous participons à ces réunions, nous nous rendons bien compte que le problème n'est pas spécifique à Santé Canada. C'est un problème lié au Conseil du Trésor. On a imposé ces frais apparemment sans exiger un engagement à atteindre les niveaux de rendement spécifiés.
• 1645
On a négocié cela en 1995, et on s'est rendu compte un an ou
dix-huit mois plus tard que le rendement se détériorait au lieu de
s'améliorer. Les gens sont complètement sceptiques. Alors, quand le
gouvernement revient nous dire que si nous payons des frais plus
élevés, nous allons avoir un meilleur rendement... Nous devons voir
d'abord.
M. Roy Cullen: Puis-je poser une petite question supplémentaire?
Le président: Bien sûr.
M. Roy Cullen: Monsieur Michols, pour en revenir à la question des frais que vous réclamez pour vos services, la question des frais d'utilisateur—je crois que M. Keon en a mentionné cinq pour le secteur des médicaments génériques—est-ce qu'il n'y en avait pas du tout auparavant, ou est-ce que vous avez simplement relevé les frais en fonction de l'augmentation des coûts?
M. Dann Michols: Non, on a organisé toute cette entreprise de recouvrement des coûts à partir de zéro, en consultation étroite avec les intervenants.
Comme nous le leur avons dit, la question de savoir s'il y aurait ou non des frais ne dépendait fondamentalement pas de nous. C'était une décision qui dépendait du gouvernement. Le débat a été entièrement ouvert sur la question de la détermination de ces frais, leur modalité, la question de s'avoir s'il s'agirait d'une licence annuelle, de frais d'examen d'une demande particulière, et les intervenants ont tous convenu que c'était de cette façon qu'il fallait procéder. Mais ils étaient tous nouveaux.
M. Roy Cullen: Et ces catégories n'ont pas changé? Ce sont toujours les cinq mêmes catégories? C'est la même chose pour la recherche...
M. Dann Michols: La tarification est la même, quel que soit le secteur.
Nous avons mis sur pied ce barème de frais. Nous ne l'avons pas ajusté parce que nous attendons les résultats de la grande évaluation actuellement en cours. Celle-ci nous permettra d'avoir beaucoup plus d'information qu'au départ sur les retombées de cette initiative de recouvrement des coûts sur le bénéficiaire, sur le régime de soins de santé en général et sur nous-mêmes. Nous pourrons alors apporter des ajustements au système.
M. Roy Cullen: Mais quand vous avez dû décider sur quoi vous alliez imposer des frais—et j'imagine que vous avez réuni tous les intervenants—est-ce que vous leur avez proposé une somme globale en leur disant qu'ils n'avaient qu'à se partager cela ou... Comment avez-vous déterminé ce qu'était un bien public par opposition à un bien privé? J'imagine que vous vous êtes débattus avec ce problème.
M. Dann Michols: Bien sûr, nous nous sommes débattus avec cela, mais il n'a pas été facile de décider, naturellement, car, comme je vous l'ai déjà dit, les directives du Conseil du Trésor étaient extrêmement générales. Nous avons donc été obligés d'élaborer en grande partie notre propre théorie.
Permettez-moi de vous donner un exemple. Nous avons décidé de facturer des frais annuels pour une licence d'établissement, et d'affecter ces recettes à l'inspection des établissements conformément aux normes BPF. Mais nous avons commencé par demander aux représentants de l'industrie s'ils préféraient payer des frais pour chaque inspection, ou s'ils préféraient un régime en vertu duquel on imposerait des amendes à ceux dont l'entreprise ne serait pas conforme, par opposition aux autres, ou enfin s'ils préféreraient des frais annuels pour couvrir ces coûts généraux.
Pour toutes sortes de raisons d'efficacité au niveau de la réglementation et d'efficacité du système, etc., nous nous sommes entendus sur le meilleur mécanisme possible.
Nous l'avons fait dans le cadre d'une négociation, comme l'a dit M. Keon, dans le cadre de consultations approfondies avec le secteur concerné. Mais le fait que...
M. Roy Cullen: Une négociation à partir d'un chiffre fixe, le genre de...
M. Dann Michols: C'est vrai. Nous partions du principe que nous perdions 50 p. 100 de nos crédits dans le cadre de l'examen des programmes, et qu'il fallait essayer de récupérer au moins ce montant par le biais du recouvrement des coûts si nous voulions maintenir le même niveau de productivité. Et comme je vous le disais, nous avons en fait doublé notre productivité au cours de cette même période.
M. Roy Cullen: Mais vous venez de nous dire que vous aviez élaboré des scénarios de recouvrement des coûts en prévoyant une perte de 50 p. 100 de vos crédits dans le cadre de l'examen des programmes. Je croyais que vous aviez dit tout à l'heure que vous ne saviez pas...
M. Dann Michols: L'examen des programmes se déroulait en même temps... Nous avons dû intégrer le recouvrement des coûts à cet exercice. Le recouvrement des coûts n'a commencé que le 1er juillet 1994. Il y a eu trois phases, une première tranche de frais la première année, une deuxième la deuxième année, et une troisième la troisième année, échelonnées sur la période de cet exercice.
Les choses étaient en pleine évolution durant tout ce temps.
Le président: Quand vous parlez d'efficacité, vous n'intégrez pas le facteur temps dans cette équation, n'est-ce pas?
M. Dann Michols: Si, mais pour le responsable de la réglementation qui essaie de s'assurer que les médicaments et les dispositifs médicaux proposés aux Canadiens soient sûrs, efficaces et de haute qualité, il n'y a en fait que deux variables. D'une part le temps nécessaire pour procéder à l'examen d'une documentation souvent volumineuse, et d'autre part la qualité de cet examen. Si l'on commence à prendre des raccourcis, le travail est bâclé. Donc il n'est pas question de compromettre la qualité.
Le président: Parlons un peu de raccourcis qui ne seraient pas si dangereux que cela.
J'imagine qu'un patient américain ou anglais, c'est à peu près la même chose, non? Je veux dire, si vous avez une maladie, on va trouver un remède, et si ce remède est approuvé aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Italie, en France et en Allemagne, il le sera probablement aussi au Canada, n'est-ce pas?
M. Dann Michols: C'est probable, mais les conditions seront peut-être différentes, compte tenu des spécificités du régime de soins de santé au Canada. Dans certains cas, ce remède ne sera pas nécessairement approuvé pour les mêmes situations. Les conditions d'approbation pourront donc varier, mais, effectivement, il est très probable que ce remède sera commercialisé aussi au Canada.
Le président: Faudrait-il raccourcir ou maintenir telle quelle la durée de votre étude et du processus d'approbation? Autrement dit, si un médicament est présenté sur le marché canadien, il fait l'objet de cette procédure d'approbation. Mais si on sait qu'il a déjà été approuvé aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Italie et en France, est-ce qu'il faut quand même avoir une procédure aussi longue?
M. Dann Michols: On ne sait pas forcément si le médicament a déjà été approuvé ailleurs, car les industriels soumettent leur demande à tous ces organismes en même temps. Nous sommes donc confrontés à une demande et à des données. Les Américains ont un système un peu différent; ils peuvent recevoir ces informations un peu plus tôt. Mais nous sommes confrontés aux mêmes données et nous suivons la même procédure, et nous avons la responsabilité de nous assurer que le traitement proposé aux Canadiens est sans danger, efficace et de qualité. Nous échangeons des informations, des conclusions, etc., avec les organisations soeurs, mais nous faisons tout de même tout cet examen en même temps.
Le président: Mais les Américains ont déjà terminé le leur bien avant vous.
M. Dann Michols: Effectivement, 200 jours plus tôt en moyenne. Cela veut dire que le produit peut être commercialisé 200 jours plus tôt. Dans certains cas, cela pose un problème, parce que le produit est déjà utilisé par les Américains. Il arrive que certains patients réagissent mal au médicament ou qu'il y ait des problèmes, et dans ce cas, avant de pouvoir autoriser la commercialisation du produit au Canada, nous devons examiner cela aussi. Donc, malheureusement, ou heureusement, selon le point de vue où l'on se place, cela complique les travaux au Canada.
Le président: Ou cela veut dire aussi que l'on prive les patients de ce médicament pendant 200 jours. Tout dépend du point de vue, n'est-ce pas?
M. Dann Michols: C'est vrai. Il est très rare qu'un produit ne puisse pas être proposé aux Canadiens dans le cas d'essais cliniques, de programmes de compassion, ou d'autorisations spéciales, mais c'est vrai.
Le président: Bon.
Y a-t-il des questions?
Monsieur Brison.
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): J'ai une question sur le délai qui s'écoule entre l'approbation d'un traitement aux États-Unis, par exemple, et l'approbation au Canada.
Dans quelle mesure ce décalage désavantage-t-il notre industrie naissante de la biotechnologie au Canada, ou la grande industrie pharmaceutique? Dans les deux cas, j'aimerais le savoir.
Je veux dire, nous constatons déjà que nous sommes défavorisés par notre régime fiscal. Nous constatons que nous sommes défavorisés par le fardeau de notre réglementation. Mais dans quelle mesure le retard d'approbation d'un produit pharmaceutique entraîne-t-il un désavantage pour le secteur de la biotechnologie en particulier?
M. John Stewart: Je vais essayer de répondre à votre question.
Parlons de la grande industrie pharmaceutique. Parlons de Purdue Pharma, qui est en fait une compagnie pharmaceutique de taille moyenne.
Ces décalages ont d'importantes répercussions au niveau de ce que j'appellerais les mandats de fabrication, les mandats de recherche sur les produits. Je l'ai expliqué bien des fois à M. Michols: les pays qui sont les premiers à autoriser des produits, les pays qui le font constamment et qui sont constamment à la pointe des programmes de recherche et qui en plus accélèrent la procédure d'examen et d'approbation des essais cliniques, deviennent les leaders. C'est dans ces pays que l'activité se concentre.
• 1655
Nous savons comment fabriquer des médicaments ici. Nous
faisons certaines des premières recherches. Nous recevons plus de
questions, nous avons plus d'activités. Mon entreprise exporte un
de nos produits au Japon parce que nous avons pu le faire approuver
au Canada nettement plus tôt qu'aux États-Unis. Or, les Japonais
voulaient ce produit. Ils avaient besoin d'une proposition sur
laquelle fonder leur propre proposition. Ils se sont servis de la
proposition canadienne. Grâce à cela, nous avons pu occuper un
important créneau d'exportation vers le Japon. Malheureusement, ce
n'est pas le cas la plupart du temps.
D'autre part, pour être équilibré, il faut dire qu'il y a beaucoup d'activités de réorganisation dans l'industrie pharmaceutique et que les entreprises ne bénéficient pas toutes de cet exemple particulier, mais il y en a.
Pour ce qui est de la biotechnologie, sans être une entreprise de biotechnologie, nous avons des investissements dans ce secteur. Ce sont des entreprises qui sont soumises à des difficultés économiques graves en permanence. En général, on évalue une compagnie de biotechnologie en fonction de son rythme de dépense, c'est-à-dire du montant d'argent dont elle dispose et de la rapidité avec laquelle elle l'épuise. Si à un moment donné vous manquez d'argent et que vous êtes obligé de retourner sur le marché, vous risquez de perdre votre société, parce que la valeur de vos actions va s'effondrer.
Il est donc très important pour ces groupes d'obtenir un examen et une approbation rapides de leur produit biologique quand ils veulent le mettre sur le marché.
M. Scott Brison: Sachant qu'on évalue ces entreprises de biotechnologie en fonction de leur capacité d'attirer des capitaux, de l'état de leurs recherches et du rythme d'épuisement de leurs finances, n'est-il pas logique pour une entreprise de biotechnologie canadienne aux ressources limitées de se tourner vers la FDA américaine, dans la mesure où il y a un décalage, au lieu de perdre son temps à attendre une autorisation au Canada? Pourquoi une entreprise canadienne chercherait-elle à obtenir une autorisation au Canada, compte tenu de l'ampleur du marché et des ressources limitées dont disposent ces entreprises?
Est-ce un facteur? Est-ce que cela arrive? Est-ce que des entreprises canadiennes contournent les mécanismes d'autorisation au Canada ou passent outre à ces dispositifs et se soucient plus d'obtenir l'autorisation de l'administration américaine?
M. John Stewart: Je ne peux pas me prononcer là-dessus. Je sais que notre entreprise soumet ses demandes dans tous les pays en même temps. Certes, on s'aperçoit souvent que les produits de nombreuses entreprises de biotechnologie sont commercialisés plutôt sur le marché américain, mais c'est peut-être simplement parce que la procédure d'examen et d'approbation est plus rapide, et non pas parce que ces entreprises choisissent délibérément les États-Unis ou un autre pays plutôt que le Canada. Je pense qu'en fait c'est le cas.
M. Scott Brison: Les demandes sont probablement présentées simultanément.
M. John Stewart: Oui. Mais il est certain que, quand on a un produit biotechnologique, on ne néglige pas le marché des États-Unis.
M. Scott Brison: Non.
Monsieur Michols, quand vous essayez de réduire les délais d'approbation, tenez-vous compte de considérations de compétitivité? Certes, les notions de sécurité et d'efficacité sont essentielles, mais tenez-vous compte aussi du fait que la réduction du délai peut contribuer à améliorer la compétitivité de nos industries biotechnologiques ou pharmaceutiques?
M. Dann Michols: Bien sûr. Le contexte général dans lequel s'inscrit l'industrie canadienne est un facteur bien réel. Cela dit, notre mission consiste à protéger la santé et la sécurité des Canadiens, à veiller à ce que les médicaments qui leur sont proposés soient sans danger, efficaces et de haute qualité. C'est notre mission numéro un. Si nous pouvons élaborer un processus de réglementation ou un régime qui nous permet de le faire en pénalisant moins l'industrie canadienne ou en lui permettant d'être plus compétitive, nous en serons enchantés. Mais avant, nous sommes là pour protéger la santé et la sécurité des Canadiens.
M. Scott Brison: Je vais me faire l'avocat du diable un instant. Dans les zones de libre-échange au moins, disons dans l'ALENA, ne serait-il pas vraiment logique que les pays qui ont des accords de libre-échange suivent une procédure commune pour l'approbation des demandes, au lieu d'avoir chacun sa propre procédure, ce qui, j'imagine, entraîne énormément de travaux qui font double emploi et qui entravent les activités de ces entreprises? Encore une fois, le secteur auquel j'ai le plus été associé était celui de la biotechnologie.
• 1700
Ne serait-ce pas la logique même d'adopter un régime unique de
réglementation?
M. Dann Michols: C'est extrêmement logique en effet, et cette notion d'harmonisation des procédures internationales et de coopération internationale a été au centre de la stratégie de réorganisation que nous élaborons depuis cinq ou six ans. L'industrie se mondialise, et il est donc absurde que les réglementations ne se mondialisent pas en même temps.
Le problème, ou le défi en l'occurrence, surtout dans ce secteur, c'est qu'il y a beaucoup d'entreprises basées en Europe et beaucoup d'entreprises basées aux États-Unis. La réglementation européenne est assez différente de la réglementation américaine. Le Canada a contribué à essayer de rapprocher ces deux grands blocs et de les amener à s'entendre sur une démarche commune qui faciliterait énormément les choses—pour nous en tout cas. Mais nous ne sommes qu'un tout petit pion sur un très grand échiquier, et nous pouvons simplement les encourager, mais nous ne pouvons les obliger à faire quelque chose.
M. John Stewart: J'aimerais répondre à votre question et à une question que le président a posée tout à l'heure.
Votre proposition est tout à fait logique. En fait, c'est ce qui est en train de se produire actuellement dans l'Union européenne, qui regroupe 13 pays qui ont chacun leurs propres organismes de réglementation. Ce qui se passe, c'est qu'un ou deux de ces organismes évaluent à fond le produit et distribuent ensuite leur conclusion et leur constat aux autres pays, qui s'en servent pour décerner leurs propres autorisations. La procédure d'approbation est beaucoup plus courte dans ces autres pays. Je crois qu'ils ont 90 jours pour le faire.
Il y a donc beaucoup à gagner à mettre en commun nos moyens sur le plan international, et c'est une idée qu'il faudra approfondir.
M. Scott Brison: Nous pourrions même envisager de regrouper les scientifiques qui s'occupent, disons, de recherche sur le cancer ou de cardiologie, etc. Comme la distance ne compte plus, grâce aux télécommunications, ils n'auraient peut-être même plus à être regroupés au même endroit. Ce serait très sensé.
Toutefois, comme les gens s'inquiètent de voir décliner le rôle de l'État-nation et redoutent la mondialisation, la question pourrait être très controversée politiquement. Même si l'idée est sensée, les gens comme Maude Barlow ne sont peut-être pas aussi enthousiastes que moi. Le comité, lui, pourrait examiner sérieusement les moyens de raccourcir les délais grâce à un régime conjoint d'approbation réglementaire dans certains domaines. Cela a beaucoup de sens.
M. Jim Keon: Beaucoup de pays en développement qui n'ont pas de mécanismes d'approbation réglementaire acceptent les produits canadiens approuvés par le programme des produits thérapeutiques. Souvent, le certificat pour exportation et la licence d'exportation dont on a parlé tout à l'heure suffiront pour vendre nos produits dans ces pays. Cela nous ramène donc à la question de la compétitivité, si nous pouvons faire approuver nos produits ici.
Le Canada est perçu comme un pays qui a une industrie de produits génériques très vigoureuse et de très bonne qualité. Beaucoup de pays en développement tiennent beaucoup à obtenir nos produits parce qu'ils sont de bonne qualité et sont vendus à prix raisonnable. Tout ce qu'il nous faut, c'est un certificat, un avis de conformité et l'approbation de Santé Canada; nous pouvons alors vendre dans ces pays sans avoir à suivre une filière d'approbation distincte là-bas. Le document de Santé Canada nous est donc très précieux et influe directement sur la compétition et la compétitivité de notre industrie.
M. Scott Brison: Merci beaucoup.
Le président: Merci, monsieur Brison.
Monsieur Szabo, suivi de M. Solberg.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur Michols, nous avons entendu des représentants du Conseil du Trésor et d'autres témoins lors de la dernière réunion que nous avons tenue sur le sujet. Il y a consensus des témoins sur les principes du recouvrement des coûts. Ils trouvent que l'idée est bonne et l'acceptent. Mais ils trouvent que son application dans la pratique au ministère n'est pas efficace ou ne correspond pas aux principes. C'est une histoire d'application.
• 1705
Êtes-vous de cet avis? Vous faites partie de la Direction
générale de la protection de la santé. Je ne sais pas si vous
pouvez parler au nom de tout le ministère, mais y a-t-il un
problème de responsabilité et de transparence à cause de la
division des fonctions entre le Conseil du Trésor et les ministères
qui doivent appliquer la politique?
M. Dann Michols: Je ne suis pas sûr que c'est la conclusion que je tirerais. Comme vous l'avez dit, il ne fait pas de doute que les principes du recouvrement des coûts, les efforts faits pour que les programmes soient plus efficaces et répondent mieux aux besoins des intéressés sont louables, et nous le reconnaissons.
La mise en pratique a été un problème. Comme je l'ai dit dans ma déclaration, le plus difficile a été de fixer ces principes et de confier aux administrateurs du programme le soin de fixer des objectifs et de mesurer le rendement en l'absence d'infrastructure d'appui. C'est encore le régime des crédits parlementaires.
Souvent, par exemple, cela va me prendre plus de temps pour embaucher le scientifique qui va procéder à l'évaluation en suivant la filière de dotation en personnel du gouvernement que pour respecter le délai qui m'a été imposé pour procéder à l'évaluation. Autrement dit, l'attitude du gouvernement lorsqu'il a adopté ces politiques n'existe plus quand vient le moment de faciliter le travail de l'administrateur qui essaie d'appliquer le recouvrement des coûts.
Les systèmes d'information dont mes gestionnaires ont besoin pour contrôler les opérations n'existent pas. On a parlé tout à l'heure du recouvrement intégral du coût des activités. Les systèmes et mécanismes qui sont d'usage courant—peut-on supposer—dans le secteur privé pour calculer les prix et autres éléments ne sont pas à notre disposition dans le secteur public.
Cela fait partie de la crise de croissance. Depuis l'adoption de la comptabilité d'exercice, il faut plus d'un an pour passer en revue une demande. Il n'y a pas de méthode comptable me permettant de reporter des fonds d'une année à l'autre. Cela signifie que le régime de crédits parlementaires est décalé par rapport au système de recouvrement des coûts, et le gestionnaire est pris entre les deux, ce qui crée de graves difficultés.
M. Paul Szabo: On nous a dit la même chose à propos de la disponibilité des données et de la responsabilité. Même les représentants du Conseil du Trésor nous disent que, d'une part, on veut être efficace et productif et que, d'autre part, vous demandez toutes sortes d'études, de rapports et d'analyses.
Il faut concilier cela. Savoir ce qui se passe et disposer des données devraient aller de pair avec une gestion efficace et productive. Or, cela ne semble pas être le cas.
Ma dernière question est simple. Je voudrais avoir l'avis des deux représentants de l'industrie pharmaceutique.
Un des principes veut que les droits à acquitter soient proportionnés au service reçu. Estimez-vous que les droits exigés pour l'examen des médicaments correspondent au service obtenu?
M. John Stewart: Si les objectifs de rendement étaient atteints, nous estimerions que les droits valent le service. On l'a dit tout à l'heure: c'est au moment où le médicament est approuvé pour la mise en marché que l'entreprise commence à faire des recettes.
De fait, au début des discussions, il a été admis que le service aurait moins de valeur si l'objectif de rendement n'était pas atteint. Diane Marleau a déclaré que nous allions créer un programme où les droits seraient légèrement réduits, mais quand même réduits, si l'objectif de rendement était dépassé, en reconnaissance du fait que la valeur ne serait plus la même.
Malheureusement, ce n'est jamais arrivé. Mais en réponse à votre question, je dirai qu'actuellement nous n'estimons pas en avoir pour notre argent parce que l'objectif de rendement n'est pas atteint.
• 1710
Par exemple, l'étude de l'innocuité et de l'efficacité du
médicament a été achevée en 180 jours. L'ennui, c'est que la
demande a traîné pendant des mois avant qu'on y donne suite, puis
il a fallu attendre plusieurs autres mois avant de commencer
l'étude de la chimie et de la fabrication du médicament.
C'est peut-être un peu jouer sur les mots quand on demande si c'est efficace ou pas, mais, pour moi, un système où il faut six mois avant de commencer, où on fait une étude pendant un bout de temps, puis on l'abandonne pendant des mois pour la reprendre et la terminer ensuite, ce n'est pas foncièrement un système efficace. Si tout s'emboîtait, ça irait, parce que chaque élément, lui, est efficace.
M. Jim Keon: L'industrie pharmaceutique, celle des produits génériques en tout cas, veut un examen minutieux, veut que Santé Canada, par l'intermédiaire du PPT, garantisse l'innocuité et l'efficacité de nos produits. Nous voulons que la population ait confiance. Nous reconnaissons que cela nous profite à nous et qu'il faut en payer le prix.
Nous n'avons pas vu les diagrammes pour les produits génériques, mais là non plus je ne pense pas que l'on ajoute à l'innocuité d'un médicament si l'on prend 458 jours pour l'étudier et si 428 de ces jours-là sont passés à attendre et qu'on fasse l'étude dans les 30 derniers jours. S'il y avait suffisamment de moyens pour éliminer l'arriéré, les délais pourraient être respectés, et pourraient l'être de façon constante. Le gros du problème, c'est donc l'arriéré.
Nous ne nous plaignons pas de la lourdeur des droits, mais plutôt du fait que dans l'essai de la phase IV un des problèmes dont M. Michols a parlé est l'effet de ces droits sur l'entreprise. C'est une drôle de question. C'est comme si un vendeur de voitures vous demandait quel effet les 20 000 $ que vous avez payé pour votre voiture ont eu sur votre budget familial? Ce n'est pas vraiment là la question. La question est de savoir: en avez-vous eu pour vos 20 000 $? Est-ce que c'est une bonne voiture? Est-ce que c'est un bon examen du rendement? C'est cela qui ne nous satisfait pas. Ce n'est pas la lourdeur des frais, c'est ce que ces frais ne nous ont pas permis d'obtenir.
M. Paul Szabo: Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
Monsieur Solberg, puis Mme Guarnieri.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Merci beaucoup, monsieur le président.
Le recouvrement des coûts suppose que lorsque l'on acquitte un droit, on reçoit un service en contrepartie. Cette équation semble être absente non seulement à la Direction générale de la protection de la santé, mais aussi dans toute l'administration.
Je veux délaisser ce dont on a parlé jusqu'à présent et vous poser une question sur les attitudes que vous rencontrez.
Tout d'abord, l'un d'entre vous a-t-il eu l'occasion d'en discuter avec le ministre? Est-il au courant? Vous êtes membres de la coalition en faveur du recouvrement des coûts; à ce titre, avez-vous pu en discuter avec le président du Conseil du Trésor pour lui faire sentir l'importance que vous attachez à la question?
Certains voient dans cette question une affaire d'argent, mais de toute évidence ce n'est pas le cas pour vous. Il s'agit plutôt d'obtenir les approbations dans un délai raisonnable. Que pouvez-vous me dire à ce sujet?
M. Jim Keon: Je peux commencer.
Pour les compagnies de produits génériques, oui, nous avons rencontré M. Rock pour en discuter. Nous lui avons écrit. Nous l'avons rencontré l'an dernier pour discuter de rendement. Il nous a fait part de son inquiétude. Il nous a dit que ce n'est pas acceptable et nous a garanti qu'il allait examiner la question et prendre des mesures pour améliorer la situation.
Nous n'avons toujours pas vu ces améliorations. Nous espérions voir des crédits supplémentaires dans le dernier budget, et nous espérons qu'il y aura des sommes supplémentaires et un système nettement amélioré très prochainement.
Oui, le ministre nous a rencontrés et est au courant de nos préoccupations; mais, non, nous n'avons toujours pas d'améliorations.
M. Monte Solberg: Je veux revenir sur ce que vous venez de dire. Vous avez dit que s'il y avait des crédits supplémentaires, il serait peut-être possible d'atteindre les objectifs. Je suis désolé, je n'étais pas ici pour entendre tous les exposés, mais, monsieur Michols, vous pourriez peut-être m'aider. Le principe du recouvrement des coûts, je le pensais, c'est que l'argent versé, à la Direction générale de la protection de la santé dans ce cas-ci, servirait expressément à obtenir ces approbations, à effectuer les essais, etc. Ici, il ne faut pas oublier que le recouvrement des coûts s'ajoute aux impôts que la population paie déjà pour les services de base de la direction générale. Si c'est le cas, je me demande pourquoi il faudrait des crédits supplémentaires si des droits sont déjà acquittés pour vous donner les moyens de procéder aux essais dont les témoins ont besoin.
M. Dann Michols: Il y a plusieurs facteurs. Tout d'abord, les droits perçus en vertu de chaque régime sont affectés aux activités pour lesquelles ils ont été perçus. Il n'y a pas de vase communicant vers d'autres activités. Le problème, c'est que l'activité à laquelle les fonds sont affectés n'est pas couverte à 100 p. 100 par les droits perçus, de sorte qu'il faut la financer à l'aide de fonds publics supplémentaires, les crédits budgétaires.
La variable de l'équation, c'est le délai, comme on en a parlé tout à l'heure. La qualité ne peut pas être abaissée; ce sont donc les délais qui varient. S'il n'y a pas de fonds pour l'activité, c'est le délai qui est rallongé.
M. Monte Solberg: Quel pourcentage du coût provient des frais versés par ces entreprises?
M. Dann Michols: Cela varie en fonction des activités, puisque certains droits sont beaucoup plus élevés que d'autres. Cela varie entre 20 et 80 p. 100, selon l'activité et les droits.
M. Monte Solberg: D'accord.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
Madame Guarnieri.
Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Merci.
Je crois savoir que la sonnerie va bientôt se faire entendre. J'ai entendu dire qu'il y aura des votes aujourd'hui.
Le président: Dans dix minutes.
Mme Albina Guarnieri: Je vais essayer d'être brève pour vous donner le temps de répondre.
Ma question s'adresse à M. Michols. On entend souvent dire que les changements apportés à la Loi sur les brevets ont coûté—je vois des sourires; vous auriez été déçu de ne pas vous faire poser la question—des millions de dollars aux consommateurs canadiens. Est-ce que Santé Canada suit l'effet de ces changements en surcoût pour le consommateur et les budgets provinciaux de la santé?
M. Dann Michols: Il est évident que Santé Canada s'intéresse globalement à la santé du système de soins de santé. Certaines directions générales du ministère analysent le coût du système. La Loi sur les brevets ne relève pas de moi à proprement parler, sauf pour l'application de certains règlements qui subordonnent la délivrance des avis de conformité au statut du brevet. Je ne suis pas compétent pour répondre.
Mme Albina Guarnieri: M. Stewart a parlé du fait que votre ministère s'occupe de beaucoup d'activités complexes. Mais vous avez sûrement accès aux études qui suivent les conséquences que cela a eues pour les prix que paient les Canadiens?
M. Dann Michols: Oui, dans la mesure où il y en a, mais moi-même je ne le sais pas.
Mme Albina Guarnieri: Accepteriez-vous de vous engager à mettre ces études à notre disposition?
M. Dann Michols: Encore une fois, j'ignore s'il y a des études, mais s'il y en a sur cette question, nous serions prêts à les mettre à votre disposition.
Mme Albina Guarnieri: Merci.
On entend souvent des gouvernements dire qu'un des meilleurs moyens d'avoir un système de santé public vigoureux, c'est de réduire le coût des services. Pourriez-vous nous dire si les médicaments génériques sont un élément essentiel d'un système de santé abordable, ou est-ce que cela ne relève pas non plus de votre compétence aujourd'hui?
M. Dann Michols: C'est à moi que vous posez la question?
Mme Albina Guarnieri: Oui.
M. Dann Michols: Je pense que la question s'adresse davantage aux fabricants de produits génériques. Ce n'est pas la fonction du régulateur.
M. Jim Keon: La réponse est oui.
Mme Albina Guarnieri: Ce n'est pas étonnant, mais il y a longtemps que l'ACFPP estime que les citoyens sont les bénéficiaires directs de votre réussite, grâce aux prix plus bas des médicaments. En remontant en arrière, pouvez-vous nous donner une idée du montant total économisé par les citoyens grâce à l'activité des compagnies de produits pharmaceutiques génériques?
M. Jim Keon: Nous estimons qu'en moyenne les médicaments génériques au Canada—il y a 3 900 produits différents sur le marché—sont vendus à peu près moitié moins cher que les produits de marque équivalents. Nous avons aussi calculé que cela fait économiser au système de santé plus d'un milliard de dollars par année, soit 15 p. 100 des dépenses pour les médicaments au Canada. C'est le cas chaque année dans le régime actuel.
Évidemment, il y a des études, et je serais heureux de vous les remettre, sur ce qu'ont coûté la modification de la Loi sur les brevets et le règlement relatif aux médicaments brevetés appliqué par M. Michols. Nous avons réalisé des études que je serais heureux de communiquer au comité, si cela peut vous être utile.
Mme Albina Guarnieri: Merci. Comme on nous dit souvent que l'une des stratégies essentielles du gouvernement pour favoriser un système de santé public vigoureux—et Monte y a fait allusion—consiste à limiter le coût des services, nous serions très heureux de pouvoir consulter ces études.
Une dernière question. Est-ce que le règlement sur les médicaments brevetés retarde encore plus l'arrivée des produits génériques sur le marché que le rendement du PPT? Qu'est-ce que vous en pensez, ou lequel de ces deux éléments nuit le plus à votre rendement?
M. Jim Keon: C'est une très bonne question. Le règlement sur les médicaments brevetés retarde indiscutablement l'arrivée des produits génériques sur le marché. Parmi les données que le PPT publie chaque trimestre, on trouve les avis de conformité des produits génériques qui sont retenus, c'est-à-dire des produits génériques qui ont été approuvés à l'issue du processus d'examen et qui sont retenus pour des raisons juridiques liées au règlement sur les médicaments brevetés. Depuis quatre ou cinq ans, il y en a eu des dizaines, et, encore une fois, tout cela coûte très cher.
Dans la mesure où nous pouvons améliorer le rendement du PPT, les médicaments génériques ne sont pas tous bloqués par ce règlement, et certains d'entre eux sont commercialisés malgré lui. En ce qui concerne la réduction des coûts, nous aimerions voir une amélioration du rendement du PPT. Par ailleurs, nous aimerions que l'on apporte au règlement sur les médicaments brevetés des changements importants qui le rendraient plus juste et qui feraient diminuer le nombre des produits génériques retenus, tel qu'il est annoncé chaque trimestre.
Mme Albina Guarnieri: Merci.
Le président: J'ai une question destinée à la fois aux fabricants de médicaments génériques et aux fabricants de médicaments de marque. Vous abordez le marché selon des perspectives différentes et avec des intérêts différents. La formule des frais d'utilisation pourrait vous faire changer de comportement les uns vis-à-vis des autres. Pensez-vous que cette formule menace vos deux groupes de façon équivalente, et qu'est-ce qui vous permet de l'affirmer?
M. John Stewart: Je crois que la formule des frais d'utilisation et des normes de rendement devrait s'appliquer équitablement aux deux groupes. Le délai d'étude et d'approbation des nouveaux médicaments de marque est plus complexe. Il est aussi plus long—actuellement, c'est 355 jours. Je ne sais pas exactement ce qu'il en est pour les produits génériques, mais c'est un délai plus court. Je crois que les normes de rendement visent à uniformiser la période nécessaire à un examen efficace, sans qu'il y ait de délai d'attente. De ce point de vue, je peux dire que la situation est équilibrée. On ne privilégie pas un secteur de l'industrie par rapport à l'autre.
Le président: Monsieur Keon.
M. Jim Keon: Pour ce qui est des frais d'utilisation, nous avons déjà dit que si nous obtenions des délais de rendement, les frais correspondant au recouvrement des coûts seraient raisonnables par rapport aux objectifs de rendement.
Nous sommes tout à fait favorables à une analyse efficace et à des délais d'approbation pour les nouveaux médicaments, et ce, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, lorsqu'un nouveau médicament représente une amélioration thérapeutique, il importe de le rendre disponible sans délai. Sur un plan plus pratique et d'un point de vue commercial, si le médicament de marque est commercialisé plus tôt, il sera plus difficile d'exercer des pressions pour obtenir une prolongation de la période de protection des brevets. Nous pensons que la protection et la valeur marchande du médicament doivent être considérées au tout début. Il n'est pas bon de prolonger indéfiniment certains brevets. À un moment donné, il faut que les produits génériques arrivent sur le marché à des prix concurrentiels, de façon à atténuer le fardeau financier qui pèse sur le système.
Il y a donc certains avantages, et nous pensons qu'il faudrait améliorer les normes de rendement des produits génériques et des produits de marque. Ce serait équitable pour les deux composantes de l'industrie, et ce serait aussi une amélioration nette pour le système de soins de santé.
Le président: Merci.
Avant de vous laisser partir, je tiens à vous signaler que les membres du Bloc québécois auraient bien aimé être présents à cette séance. Malheureusement, cela ne leur a pas été possible. Ils me prient de vous transmettre leurs excuses pour leur absence aujourd'hui.
Au nom des membres du comité, je tiens à vous faire part de notre très sincère gratitude. J'estime que cette table ronde a été très intéressante. Elle nous sera très utile dans notre réflexion sur cette question. Espérons que d'ici à la fin de l'exercice nous pourrons produire un rapport qui permettra d'améliorer la situation.
Ce dont je suis certain, c'est que cette étude est absolument nécessaire, compte tenu des défis que vous avez à relever.
Merci. La séance est levée.