FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
STANDING COMMITTEE ON FINANCE
COMITÉ PERMANENT DES FINANCES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 6 juin 2000
Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): La séance est ouverte. Je souhaite le bienvenue à toutes les personnes présentes ici ce matin.
Comme vous le savez, le Comité des finances effectue une étude sur le recouvrement des coûts. Ce matin, nous avons le plaisir de recevoir, du Secrétariat du Conseil du Trésor, M. Richard Neville, et de l'Université de Toronto, M. Richard Bird, de la Faculté d'administration.
Bienvenue parmi nous.
Nous recevons également, du ministère des Pêches et des Océans, et plus particulièrement de la Garde côtière canadienne, le commissaire, M. John Adams, ainsi que Tim Meisner, directeur, Politiques et législation, Direction générale des programmes maritimes.
Il y a également, de l'Association des consommateurs du Canada, Gail Lacombe, présidente et chef de la direction, Jennifer Hillard, vice-présidente, Questions et politiques, ainsi que Jean Jones, présidente, Conseil national de la santé.
J'oubliais, du Conseil du Trésor, Len Endemann, directeur, Recouvrement des coûts.
Vous êtes tous des spécialistes des comparutions devant le Comité des finances. Vous savez donc comment cela fonctionne. Nous vous donnons environ de cinq à dix minutes pour faire vos observations. Ensuite, nous passons aux questions et réponses.
Nous commencerons par le Conseil du Trésor.
Monsieur Neville, une fois de plus, bienvenue.
M. Richard J. Neville (sous-contrôleur général, Secrétariat du Conseil du Trésor): Merci, monsieur le président.
Le président: On vous aime bien ici.
M. Richard Neville: Je suis toujours ravi d'être ici. J'espère que nous serons de retour ici à la demande générale.
Le président: Oui, c'est une bonne façon de voir les choses.
M. Richard Neville: Je suis accompagné de M. Len Endemann, un collègue qui est également directeur de la Division du recouvrement des coûts au Secrétariat du Conseil du Trésor.
Monsieur le président, depuis notre comparution initiale devant le comité, le 9 mai dernier, nous avons suivi avec beaucoup d'intérêt les débats du comité. J'aimerais, si vous me le permettez, vous faire part de quelques observations au sujet des questions qui ont été soulevées.
Il semble y avoir un consensus sur le fait que le recouvrement des coûts soit justifié lorsqu'un programme gouvernemental confère un avantage privé pour un groupe d'utilisateurs ou une industrie. Toutefois, certaines personnes ont remis en question la pertinence de l'application du recouvrement des coûts dans le cas de services de réglementation obligatoires. Ces personnes donneraient comme raison que le public devrait absorber le coût total de tels programmes, étant donné que ceux-ci visent à protéger le grand public, et non pas les services aux usagers du secteur privé.
Le gouvernement dispose de plusieurs programmes pour lesquels il doit engager des dépenses afin de protéger le public contre les risques liés à l'activité industrielle. Selon notre politique sur le recouvrement des coûts, une partie des coûts liés à ces programmes devrait alors être assumée par l'industrie qui est à l'origine de ces risques. Selon cette perspective, une partie de ces coûts a trait à la production de cette industrie. Ce sont les coûts de revient industriels, pour ainsi dire, et ils devraient être internalisés. C'est la raison d'être des frais de service pour les programmes d'inspection et de mise à l'essai, par exemple, et cette procédure est entièrement conforme à la politique gouvernementale actuelle sur le recouvrement des coûts.
Nous avons également noté avec beaucoup d'intérêt l'échange qui a eu lieu au sujet des niveaux de service. Il s'agit d'un sujet complexe qui va au-delà des délais d'approbation des médicaments, par exemple. La perception qu'a le secteur privé des services sera inévitablement différente de celle d'un programme de réglementation fédéral. Le secteur privé veut des résultats rapides. Les programmes gouvernementaux visent à répondre aux objectifs d'intérêt public qui sont souvent complexes et comportent plusieurs dimensions.
Des discussions au sujet des normes de service doivent avoir lieu—elles sont essentielles à nos politiques—mais elles ne seront jamais faciles. Il y aura toujours un concept fondamentalement différent des risques acceptables entre le gouvernement et le secteur d'activité touché.
Bien que le secteur privé affirme qu'il est en droit d'exiger des niveaux de service améliorés selon sa définition de «service», d'autres parties craignent que l'approche de l'utilisateur-payeur n'influe trop sur les programmes gouvernementaux et ne mine leurs fondements visant à répondre à l'intérêt public.
• 1115
Cette question comporte deux aspects, et les gestionnaires des
programmes gouvernementaux doivent parvenir à un juste équilibre qui
est adapté aux besoins des clients, mais qui ne permet pas de miner le
fondement de politique de leurs programmes. Il ne sera jamais facile
d'y parvenir.
Toutefois, les représentants du secteur privé ont le droit de faire part de leur frustration lorsque les niveaux de service convenus n'ont pas été respectés. Il faudra se pencher attentivement sur ce problème, qui constituera certainement un élément clé de notre examen de la politique.
Au cours des débats du comité, un autre sujet a été soulevé, celui des mécanismes de règlement des différends. Le terme «règlement des différends» dans la politique désigne le processus qu'une personne peut utiliser pour demander des mesures correctives ou un recours lorsqu'elle a été traitée injustement dans l'application de frais de service. Le règlement des différends ne désigne pas un mécanisme selon lequel on peut continuellement contester et remettre en question le fait que des frais de service soient appliqués.
La décision d'imputer des frais relève du gouvernement, et le recouvrement est mis en place conformément à la loi. Les personnes qui s'opposent à l'application de frais dans un secteur donné, ou qui voudraient que les frais de service soient supprimés, devraient faire part de leurs points de vue aux ministres, aux parlementaires et aux hauts fonctionnaires, tout comme la coalition des entreprises le fait de manière très efficace.
Cependant, il devrait y avoir un mécanisme de recours lorsqu'une personne se voit imposer des frais injustement ou à tort. Nous savons que les ministères et les organismes ont en place divers mécanismes de règlement des différends. Les résultats varient toutefois, et cette question sera certainement étudiée dans le cadre de l'examen de la politique. Je suis d'avis qu'il faut d'autres lignes directrices améliorées et plus claires que celles contenues actuellement dans la politique.
[Français]
Par ailleurs, au cours de quelques présentations devant le comité, on a semé le doute quant à l'engagement du Secrétariat du Conseil du Trésor à l'égard de l'examen prévu de la politique actuelle. Permettez-moi de vous préciser notre plan.
La politique actuelle renferme un engagement selon lequel nous procéderons à un examen de la politique après trois ans. Actuellement, nous mettons au point notre méthodologie en vue de cet examen et nous sommes en voie d'élaborer le mandat et les approches méthodologiques. Le travail va bon train.
Notre approche globale se déroulera comme suit. Nous commencerons par une évaluation de la performance de la politique depuis trois ans. Il faudra déterminer l'efficacité de la politique et la mesure dans laquelle les ministères fédéraux l'ont mise en application. Il s'agit d'un exercice de rétrospective dont nous devrions tirer des leçons. Nous y parviendrons en recueillant les points de vue de toutes les personnes qui ont travaillé à l'application de la politique ou qui ont été touchées par celle-ci.
Nous avons déjà recueilli plusieurs évaluations de l'application de la politique depuis trois ans, par exemple auprès de la coalition des entreprises sur le recouvrement des coûts. Leurs points de vue sont très importants et ils représenteront une partie importante de notre examen.
Le point de vue de la coalition n'est toutefois pas le seul à être entendu. Il faut qu'un grand nombre d'intervenants aient l'occasion de faire part de leur point de vue si nous voulons évaluer cette politique avec justesse et impartialité.
L'évaluation devrait nous permettre de déterminer les secteurs qui nécessitent des mesures correctives. En nous appuyant sur les conclusions tirées, nous apporterons des améliorations à la structure de notre politique. Il s'agit en fait d'un exercice distinct qui découle logiquement du premier exercice.
Nous mènerons par la suite des consultations auprès des intervenants au sujet de ces nouvelles propositions. Comme par le passé, les intervenants seraient composés de groupes qui ont déjà comparu devant le comité au cours du dernier mois et de plusieurs autres groupes. Nous vous serions reconnaissants si nous avions l'occasion de présenter ces propositions devant le comité, si tel est votre désir.
Enfin, nous demanderions l'approbation du gouvernement concernant une structure de la politique améliorée qui aurait déjà été mise à l'essai par les intervenants.
Nous croyons qu'il nous faudra toute l'année financière en cours pour terminer ces travaux, qui seront effectués de manière transparente. Lorsque le mandat sera terminé, les résultats seront probablement publiés sur le site Internet du Secrétariat du Conseil du Trésor et lorsque les rapports des experts-conseils seront achevés, ils seront également disponibles.
J'aimerais maintenant répondre aux allégations de la coalition des entreprises selon lesquelles le recouvrement des coûts aurait eu de graves répercussions sur l'économie nationale et les pertes d'emplois.
Il n'existe que deux sources de fonds pour les coûts de programmes gouvernementaux: les recettes tirées de l'impôt général et les recettes tirées du recouvrement des coûts. Toute analyse sérieuse de l'impact macroéconomique du recouvrement des coûts doit aussi tenir compte de l'autre option.
Nous avons demandé la tenue d'une telle analyse. Nous avons joint à la trousse d'information additionnelle que nous déposons aujourd'hui un résumé de ce rapport préparé par Informetrica. Les résultats du rapport ne causent pas de surprise. Ainsi, le financement des programmes à partir des frais d'utilisation par rapport à l'impôt entraîne le même résultat macroéconomique. Autrement dit, il n'existe pas de différence quantifiable dans l'impact sur les emplois ou le PIB entre les frais d'utilisation et les impôts. Le Comité des finances a entendu plusieurs allégations selon lesquelles le recouvrement des coûts serait responsable de la perte de milliers d'emplois pour l'économie. Ce n'est tout simplement pas vrai.
Il ne faut toutefois pas minimiser l'importance de l'analyse des répercussions de l'application de frais d'utilisation à différents secteurs et pour diverses industries et de l'annulation des frais lorsqu'ils pourraient nuire à la concurrence de cette industrie. Ce point est très important et est souligné dans notre politique sur le recouvrement des coûts.
Cela m'amène à poser la dernière question: pourquoi recourir au recouvrement des coûts? Parce qu'il s'agit d'une façon équitable de financer certains programmes, et parce que le recouvrement des coûts permet une meilleure discipline dans la gestion des programmes grâce à une responsabilisation accrue à l'égard des intervenants.
Monsieur le président, nous estimons que les principes énoncés dans la politique gouvernementale actuelle sur le recouvrement des coûts sont en général d'excellents principes. D'un autre côté, nous sommes également conscients que de nombreuses améliorations doivent être apportées afin d'assurer que ces principes soient mis en oeuvre comme il se doit. Nous sommes déterminés à travailler avec les intervenants à l'intérieur et à l'extérieur de l'administration gouvernementale afin d'améliorer notre rendement à cet égard.
Merci, monsieur le président. Je me ferai un plaisir de répondre maintenant à toutes vos questions.
Le président: Merci, monsieur Neville.
Nous entendrons maintenant M. Richard Bird, de la Faculté d'administration de l'Université de Toronto. Bienvenue.
M. Richard Bird (Faculté d'administration, Université de Toronto): Merci.
Contrairement au Conseil du Trésor, je n'ai pas eu l'occasion de voir les témoignages antérieurs. Ce que je m'apprête à dire risque donc d'être un peu redondant ou éloigné du sujet.
Si je comprends bien, votre comité examine la politique fédérale relativement au recouvrement des coûts. Permettez-moi de commencer mes observations de façon un peu perverse en me dissociant—moi et probablement la plupart des économistes—de ce qui semble être deux des principes cardinaux de la politique actuelle. Ce sont des principes qui, selon moi, suscitent certains des problèmes auxquels nous nous trouvons confrontés.
Le premier de ces principes est en fait le recouvrement des coûts. Je pense que l'expression se comprend, mais, à la vérité, il faut dire que le recouvrement des coûts n'a rien à voir avec le ticket modérateur. Le recouvrement des coûts vise l'utilisation optimale de ressources publiques limitées en extrayant le plus de renseignements possible de l'évolution du marché quand les usagers des services publics—et je vais utiliser une expression du jargon économique que j'expliquerai tout à l'heure—doivent assumer les coûts d'option marginaux que représente la dernière unité de service qu'ils consomment. Cela me rappelle un document que j'ai rédigé pour le Conseil du Trésor il y a six ans.
Remarquez que cela ne signifie pas nécessairement, voire généralement, que la totalité des coûts de prestation d'une unité moyenne de service sera couverte. Remarquez également, comme les représentants du Conseil du Trésor viennent de le faire remarquer, qu'il s'agit avant tout d'une proposition, non pas macroéconomique, mais microéconomique.
Bien entendu, le ticket modérateur va de façon générale produire des recettes pour le gouvernement, à moins toutefois que le service offert par le gouvernement ne soit si inutile que personne n'est prêt à payer pour l'obtenir.
De plus, il y a une difficulté, que vous avez sûrement discutée, car les gens n'ont pas le choix d'accepter ou de refuser un grand nombre des services gouvernementaux; dans le cas de ces services, c'est obligatoire. En outre, dans bien des cas ce service impératif est fourni par un monopole de l'État, moyennant quoi le ticket modérateur devient trop facilement un impôt.
Ce ne sont pas les recettes qui comptent. Il faut que les gouvernements soient comptables de l'utilisation qu'ils font des ressources en veillant à ce que les usagers estiment que ce qu'ils obtiennent a une valeur, équivalente au moins aux coûts économiques de production. Les usagers des services gouvernementaux, en principe, devraient dès lors obtenir un gain si les tickets modérateurs sont bien conçus, car dans ces conditions ils obtiennent ce pour quoi ils paient. La nation en général devrait également obtenir un gain du fait d'une utilisation optimale des ressources que les citoyens ont transférées au gouvernement.
Cela m'amène au deuxième point: tous ces beaux résultats risquent-ils de se matérialiser? Ce ne sera pas le cas à moins que les recettes obtenues du ticket modérateur ne soient étroitement liées, dans le processus budgétaire, aux dépenses faites pour les services frappés d'un ticket modérateur.
• 1125
En principe, si les recettes obtenues grâce au ticket modérateur,
auxquelles s'ajoute une quelconque subvention prédéterminée et
explicite pour tenir compte des externalités—dont je parlerai dans un
instant—ne couvrent pas les dépenses, les dépenses devront être
réduites. Remarquez que, contrairement à ce qu'on dit parfois, si le
ticket modérateur est fixé correctement, les fonctionnaires n'auraient
aucune raison de gonfler le prix de leurs services.
Toutefois, le tendon d'Achille de cet argument réside dans les services obligatoires, car il faudra surveiller de très près les fournisseurs en situation de monopole qui, disposant de budgets à la hausse, grâce à l'imposition de tickets modérateurs, seront tentés d'abuser de leurs victimes forcées.
Je pense qu'il faut bien dire que non seulement l'efficacité du ticket modérateur, mais également—et je crois que c'est ce que révèle la discussion—sa viabilité politique dépend sans doute considérablement de la mesure dans laquelle les prix imposés pour la prestation d'un service servent véritablement à financer ce service. Pour des raisons historiques très bien comprises dans notre pratique de budgétisation, ce lien n'est pas clairement établi au Canada.
Outre ces deux problèmes assez fondamentaux—un certain malentendu qui existe concernant le recouvrement des coûts et l'absence de lien budgétaire—il y a nombre d'autres problèmes de mise en oeuvre de la politique actuelle, surtout en ce qui a trait aux services obligatoires fournis en situation de monopole.
Il y a également de véritables difficultés, dans bien des cas, quand on cherche à mesurer les externalités, c'est-à-dire les avantages publics de politiques gouvernementales particulières qui justifient leur existence et qui en principe devraient aussi constituer un facteur à prendre en compte dans la décision d'imposer un ticket modérateur aux usagers directs des services visés.
Le problème est dû en partie à l'imprécision que crée le mot «public» dans l'esprit de certaines personnes qui s'intéressent à la question. De façon générale, même si cela est moins vrai depuis quelques années, bien des Canadiens pensent que dès lors qu'on utilise le mot «public» on aboutit à quelque chose de souhaitable et qui sert le bien public, alors que le mot «privé» est interprété comme égoïste, ou, pour donner un équivalent un peu moins péjoratif, comme faisant fi de tout intérêt ou préoccupation publique. Bien sûr, ce n'est pas du tout ce que ces termes signifient dans le discours économique qui, quoique imparfaitement, sous-tend la politique de recouvrement des coûts.
Je me suis montré négatif au départ, mais je vais faire volte- face et affirmer que je suis convaincu que dans toute discussion concernant l'établissement d'un prix ou d'un ticket modérateur il faut dès le départ avoir pour hypothèse que tout service fourni par un organisme public, pour lequel il existe un bénéficiaire direct facilement identifiable—ce peut être un groupe plutôt qu'un individu—devrait être payé par ce bénéficiaire, à moins—et seulement à moins—qu'on ne formule des arguments convaincants et solides militant en faveur d'un certain niveau de subventions publiques ainsi étiquetées. Autrement dit, je prends le contre-pied de l'angle sous lequel plusieurs abordent la question.
Nous allons supposer qu'on devrait toujours, suivant le discours gouvernemental, obtenir le recouvrement total des coûts définis—je l'espère—de façon exacte. Mais le fardeau de la preuve devrait toujours incomber à ceux qui réclament l'octroi de subventions, ou, autrement dit, il faudrait qu'on justifie pourquoi l'argent des autres devrait servir à fournir un service à des usagers qui en profitent personnellement.
Comme vous le savez sans doute, ou comme vous l'avez constaté en m'écoutant, les économistes utilisent parfois un jargon pour semer la confusion ou cacher ce qui est évident. Mais parfois ils utilisent ce jargon précisément pour éviter toute confusion. Dans le contexte actuel, il faut bien dire que certaines activités du secteur public donnent lieu à ce que nous appelons techniquement des «externalités». Il s'agit d'un avantage—ou d'un coût, si l'on veut; dans des conditions idéales, ils sont égaux—avantage dont on ne peut pas fixer le prix, et, par conséquent, avantage ou coût qui ne peut pas être pris comme facteur par les producteurs privés. Voilà pourquoi les gouvernements existent, dans le domaine économique.
Si l'externalité a suffisamment d'importance aux yeux de la société dans son ensemble, et cela s'exprime au niveau politique—par votre intermédiaire à vous—, le service est offert par le secteur public, à perte, et cela peut se justifier. En effet, la véritable question dans ce cas-ci est de savoir pourquoi le gouvernement offrirait un tel service en l'absence d'effets externes positifs.
Par définition presque, dans tout ce que le gouvernement fait, il y a une difficulté. On peut constater des avantages privés très nets, mais il y a également des avantages publics. On a constamment affaire au même problème: établir la distinction entre l'effet externe—ou le social, si vous voulez—et les avantages privés.
Vous avez sans doute déjà entendu cette théorie. Vous avez sans doute déjà entendu dire qu'en principe ce que des gens comme moi vous disent de faire est très simple. Cela se borne à deux choses. Tout d'abord, il faut mesurer l'avantage externe marginal que cela confère à un groupe par rapport aux autres ou à la société en général, quand un service est offert à un usager de plus. Deuxièmement, il faut fixer le ticket modérateur de telle sorte qu'il sera égal à ce coût marginal, moins l'avantage externe. Malheureusement, c'est facile à dire, mais difficile à réaliser.
En fait, il peut être extrêmement difficile de mesurer l'avantage social externe et de se convaincre de la justesse du résultat, et, dans la plupart des cas, la discussion entourant un service en particulier se réduit rapidement à des affirmations concernant des perceptions et des préférences individuelles.
• 1130
Ainsi, premièrement, et c'est sans doute ce qu'il y a de plus
fondamental, la difficulté vient du fait qu'il est très difficile de
mesurer les avantages externes.
En effet, j'ai dit que presque tout gouvernement a—je l'espère—un objectif de bien public, et s'emploie à atteindre cet objectif jusqu'à un certain point. Ce devrait être ainsi de toute façon. Cela veut dire que, vu la difficulté de mesurer les avantages externes, chaque fois qu'on tentera d'imposer un ticket modérateur dans le secteur public, on déclinera les arguments concernant l'importance relative des externalités par rapport au bien public qui découle d'un service en particulier. Ces arguments ne sont pas faciles à contrer, car il n'existe pas de mesure précise dans le cas de la plupart des externalités. Cela devient donc une question politique.
Il y a du vrai dans l'argument concernant l'objectif que représente le bien public. Le gouvernement ne devrait pas s'adonner à des activités, si ce n'est pour le bien public. Toutefois, cet élément de vérité peut trop facilement se transformer en bouclier derrière lequel se protègent ceux qui préfèrent ne pas assumer le coût des avantages qu'ils obtiennent. C'est la difficulté. Cela explique sans doute pourquoi vous tenez ces audiences.
De plus, dans bien des cas, surtout quand il s'agit de politiques de réglementation, ces questions, qui sont complexes sur le plan analytique et politique, deviennent plus nébuleuses du fait que les bénéficiaires directs non seulement n'ont pas le choix—le service étant obligatoire—mais en outre sont forcés d'utiliser le service fourni par un monopole du secteur public. Un exemple de cela dans la sphère non fédérale: les permis de conduire.
Tout monopole, public ou privé, risque d'exploiter son pouvoir économique pour tirer le maximum de ses clients forcés, s'il peut le faire impunément. Il devient donc particulièrement important de veiller à ce que les prix établis soient raisonnables, et particulièrement difficile dans certains cas de persuader ceux qui doivent payer que ces prix sont en effet raisonnables.
Étant donné cette difficulté, que peut-on faire pour établir des prix économiquement sains dans le secteur public? Il n'y a pas de réponse simple. S'il y en avait une, on peut supposer que nous ne serions pas ici.
Je pense que les principes sont faciles à concevoir et d'application universelle. La pratique est à la fois difficile et doit inévitablement s'adapter à des situations pluralistes et très particulières pour chaque service. J'ai consacré l'essentiel de ma carrière à la conception de régimes fiscaux. Cette tâche est facile. Les faire accepter est difficile. La conception de droits d'utilisation est difficile, et les faire accepter est difficile.
Ainsi, les droits d'utilisation ne peuvent être fixés que grâce à un processus politique et administratif comme celui que le gouvernement utilise. Il est donc capital, surtout quand des droits sont perçus pour des services qui auparavant étaient gratuits—et nous avons rencontré bien des cas de ce genre—et particulièrement pour des services obligatoires fournis par des monopoles du secteur public, de prévoir un processus de consultation des groupes intéressés—je pense qu'on dit parties prenantes dans le jargon actuellement—et il est aussi capital de prévoir un processus de règlement des différends et un mécanisme d'examen transparents et explicites—ce en quoi je suis d'accord avec le Conseil du Trésor—pour garantir que les prix sont raisonnables et acceptables.
Ce qui est absolument capital dans un tel processus toutefois, c'est qu'on écoute le point de vue du grand public—c'est-à-dire ceux dont l'argent est, et c'est compréhensible, convoité par un groupe particulier pour son propre profit. Autrement dit, en fin de compte, toute politique rationnelle concernant les droits d'utilisation passe par une discussion et une divulgation totales et transparentes—des audiences comme celle-ci.
En conclusion, les économistes aiment bien répéter que tout se paie. Je suis ici pour vous dire que non seulement c'est vrai mais qu'il n'existe pas de façon simple et universelle de partager les coûts entre les intéressés. Vous serez déçus si vous vous attendiez à des réponses simples. Toutefois, c'est ainsi.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Bird.
Nous allons entendre maintenant le représentant du ministère des Pêches et des Océans, de la Garde côtière canadienne, le commissaire John Adams.
Le commissaire John Adams (Garde côtière canadienne, ministère des Pêches et des Océans): Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité.
Je m'appelle John Adams. Tim Meisner est mon bras droit pour les questions de droits de services maritimes. Je vous remercie pour cette occasion qui m'est offerte de présenter au comité permanent le programme des droits de services maritimes de la Garde côtière.
Comme vous le savez sans doute, le programme des droits de services maritimes a été créé à la suite de l'examen des programmes du gouvernement fédéral, conformément aux politiques du Conseil du Trésor. C'est dans ce contexte que la Garde côtière a élaboré des plans stratégiques pour réduire ses dépenses et recouvrer ses coûts.
J'aimerais d'abord parler de la réduction des dépenses de la Garde côtière.
En tant qu'organisation, nous avons réalisé des économies, réduit les dépenses et rajusté les niveaux de service dans des secteurs où ces mesures ne nuisaient pas à l'exécution de notre mandat fondamental, qui est d'assurer la sécurité en mer et de protéger l'environnement marin, tout en assurant une utilisation économique durable des ressources.
Nos dépenses nettes sont passées de 523 millions de dollars en 1996-1997 à environ 430 millions de dollars en 1998-1999, soit une réduction de près de 20 p. 100, et cette tendance à la baisse se maintient.
• 1135
Une des initiatives de réduction des dépenses de la Garde côtière
était de cesser l'exploitation des services nationaux de dragage, sauf
le services requis par l'entente concernant les eaux internationales
des Grands Lacs. Cependant, comme de nombreux intérêts étaient
impliqués, autant du côté des ports que du côté des expéditeurs, la
Garde côtière a continué d'assurer la coordination et la gestion
globales des services de dragage dans le Saint-Laurent. Des droits de
dragage provisoires ont été instaurés pour recouvrer les coûts auprès
des utilisateurs commerciaux. Un comité consultatif a été établi avec
l'industrie pour trouver une solution à long terme d'ici à 2002, et
cet échéancier sera respecté, de concert avec l'industrie.
Le programme des droits de services maritimes inclut les droits de services à la navigation maritime et les droits de services de déglaçage. Ce programme a pour but de transférer une partie des coûts des services maritimes commerciaux du contribuable à l'utilisateur réel des services, réglant ainsi la demande.
L'industrie de la navigation commerciale a généralement accepté d'assumer une part des coûts associés aux services maritimes qui facilitent leur activité. Mais nous savons tous que l'industrie est fortement diversifiée et touche des intérêts de toutes les régions, depuis la côte Ouest jusqu'à la côte Est. Cette diversité a d'ailleurs soulevé tout un débat sur les détails du programme de recouvrement des coûts.
La Garde côtière et l'industrie ont travaillé fort pour arriver à comprendre leurs activités et leurs besoins respectifs. Nous avons écouté l'industrie, et la Garde côtière a élaboré un processus ouvert et transparent pour échanger de l'information avec l'industrie.
Les droits de services à la navigation maritime ont été instaurés en juin 1996 pour recouvrer une partie des coûts reliés aux services d'aide à la navigation et du trafic maritime offerts à l'industrie de la navigation commerciale. Les droits de services de déglaçage avaient été reportés cette année-là pour laisser à l'industrie le temps de bien se préparer, et une étude sur l'impact économique a été menée par des consultants du secteur privé.
Le dialogue avec l'industrie ne s'est pas arrêté avec l'instauration des droits de services à la navigation maritime. Les discussions se sont poursuivies, et la Garde côtière a constaté qu'il fallait adopter une nouvelle approche. Des changements ont été apportés aux droits de services à la navigation maritime pour apaiser certaines des préoccupations immédiates de l'industrie en attendant que la nouvelle approche soit élaborée avec les utilisateurs.
Les droits de services de déglaçage ont été annoncés, mais ils ont été reportés pour un an afin qu'on puisse consulter l'industrie au sujet des points à régler par rapport à la structure tarifaire. Pour élaborer cette nouvelle approche, quatre sous-comités dirigés par l'industrie se sont penchés sur les principaux enjeux. Ils sont arrivés à des constatations fort valables concernant la compatibilité des coûts, le règlement des différends sur les droits de services, la structure des droits de services de déglaçage et les plans de réduction des coûts.
Indépendamment de ces groupes de travail, certains membres de l'industrie ont formé des coalitions représentant à la fois les intérêts régionaux et nationaux. Ces coalitions ont fait des recommandations au ministre concernant la gestion et la structure de la Garde côtière, les structures régionales des droits de services, la prévisibilité des droits de services, la protection contre l'impact économique et le report des droits de services de déglaçage.
En avril 1998, le ministre des Pêches et des Océans annonçait plusieurs changements au programme des droits de services maritimes: plafonnement des droits pour trois ans afin d'accélérer le programme de réduction et d'établir des niveaux de service efficients et rentables; amélioration des processus de consultation; mesures de protection économique pour les intervenants, notamment l'établissement d'un processus indépendant de règlement des différends; étude sur l'impact économique cumulatif par le Conseil du Trésor; établissement des droits de services dans une perspective régionale; et instauration des droits de services de déglaçage.
Après une consultation plus poussée auprès de l'industrie, il a été décidé de réduire les droits de services de déglaçage de 50 p. 100 par rapport aux niveaux proposés et de les mettre en application le 21 décembre 1998.
Avant de parler de l'état actuel du programme des droits de services maritimes, j'aimerais souligner quelques points pour bien mettre les choses en perspective.
Premièrement, l'étude d'impact s'est penchée sur sept initiatives maritimes qui auraient un impact de 75 millions de dollars sur la navigation commerciale. L'impact global de ces initiatives sur les navires commerciaux équivaut à moins d'un dixième p. 100 de la valeur des marchandises transportées. Les droits de services maritimes, qui génèrent présentement environ 33 millions de dollars, seraient encore moins élevés.
Mon deuxième point concerne le rapport entre les droits de services maritimes et les autres frais que paient actuellement les navires commerciaux. En ce moment, les navires paient jusqu'à 200 000 $ pour des services comme l'accostage, les droits de port et le pilotage. Les droits de services maritimes, eux, seraient de l'ordre de 5 000 $ à 10 000 $.
• 1140
Je vais maintenant vous donner un bref aperçu de l'état du programme
des droits de services maritimes.
Suivant les engagements pris par le ministre, divers mécanismes de consultation continue ont été mis en place, dont le plus important est la création d'une nouvelle commission consultative maritime que je préside à titre de commissaire de la Garde côtière.
Des commissions consultatives régionales sont là aussi pour assurer un contact régulier avec les intervenants et intérêts locaux. La Garde côtière communique également les changements apportés au programme des droits de services maritimes à plus de 2 000 intervenants par la diffusion d'un bulletin d'information.
La Commission consultative maritime (CCM) a formé un groupe de travail chargé d'examiner les systèmes et processus de la Garde côtière servant à déterminer les coûts des services et la répartition de ces coûts parmi les clients. Ce groupe se compose de représentants de l'industrie de la navigation commerciale de chaque région et aussi de représentants du ministère. En janvier de cette année, le groupe a présenté ses constatations et recommandations à la CCM. Ces travaux ont permis de mieux comprendre l'information sur les coûts de la Garde côtière. Les constatations et recommandations du groupe de travail sont à l'étude en ce moment, et elles sont mises en oeuvre lorsque la chose est possible. Un deuxième groupe de travail de la CCM a d'ailleurs été formé pour suivre de près cette mise en oeuvre.
Un groupe de travail conjoint de l'industrie et de la Garde côtière avait déjà défini les besoins de l'industrie en matière de déglaçage, et nous avons fait des ajustements pour offrir ce niveau de service. La Garde côtière est également à passer en revue les normes des niveaux de service pour chacun de ses autres programmes, en consultation avec les clients, afin de vérifier si ces normes conviennent et sont bien comprises.
La Garde côtière a mis en oeuvre un processus pour les intervenants ou les groupes d'utilisateurs clients qui veulent contester un aspect quelconque des droits de services maritimes applicables à leurs activités commerciales. On évalue d'abord la position du requérant en se fondant principalement sur l'information qu'il a fournie. Si la demande d'exemption est rejetée, le requérant peut demander au ministre de former un comité indépendant d'examen des droits de services. Jusqu'à aujourd'hui, aucune demande de ce genre n'a été reçue.
Si cela peut vous être utile, le Conseil du Trésor peut vous expliquer où en est rendue son étude sur l'impact économique, l'étude globale.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Adams.
Nous entendrons maintenant la représentante de l'Association des consommateurs du Canada, Gail Lacombe. Je vous souhaite la bienvenue.
Mme Gail Lacombe (présidente et chef de la direction, Association des consommateurs du Canada): Merci, monsieur le président.
L'Association des consommateurs du Canada est une organisation indépendante à but non lucratif formée de bénévoles créée il y a 52 ans, qui a son siège social à Ottawa et des bureaux dans toutes les provinces et territoires. Notre mandat est d'informer les consommateurs, de défendre leurs intérêts auprès du gouvernement et de l'industrie, et de travailler de concert avec le gouvernement et l'industrie pour résoudre de façon avantageuse pour tout le monde les problèmes qui se posent sur le marché.
[Français]
L'Association des consommateurs du Canada a été créée en 1947. C'est un organisme à but non lucratif indépendant qui dépend en grande partie pour son fonctionnement de l'apport de nombreux bénévoles partout au pays. Son mandat consiste à informer et à éduquer les consommateurs canadiens au sujet des questions reliées au marché de la consommation, à les représenter auprès des instances gouvernementales et des industries et, enfin, à travailler avec les gouvernements et les industries dans le but de résoudre des problèmes de consommation au bénéfice des parties en cause.
L'ACC travaille plus particulièrement dans les domaines de l'alimentation, de la santé, du commerce, des normes, des services financiers, des communications et des industries, et s'intéresse également à d'autres domaines en fonction des questions qui surgissent à l'occasion et qui ont un impact en matière de consommation.
[Traduction]
Notre exposé comprend deux parties. Notre vice-présidente chargée des politiques et des questions, Jenny Hillard, commencera par faire un exposé général sur le recouvrement des coûts et sur notre expérience quant à son application dans le domaine de la législation environnementale. Ensuite la présidente de notre Conseil national de la santé, Jean Jones, vous parlera de l'application du recouvrement des coûts dans des domaines législatifs ayant pour but de protéger la santé des Canadiens.
Jenny.
Mme Jennifer Hillard (vice-présidente, Questions et politiques, Association des consommateurs du Canada): Nous tenterons d'abord d'aborder, du point de vue du consommateur, les six éléments identifiés dans la convocation de cette table ronde, après quoi nous traiterons de cas particuliers tirés de notre expérience à titre de bénévoles.
• 1145
Le recouvrement des coûts a été introduit et encouragé, en même temps
que les compressions d'effectif et les efforts du gouvernement pour
devenir plus efficient, alors que le Canada se débattait avec un
déficit croissant et une évolution démographique qui réduira la
proportion des contribuables canadiens par rapport à ceux dont la
subsistance dépend en grande partie de l'État.
L'Association des consommateurs du Canada (ACC) ne s'est pas opposée à l'idée, étant donné que nos membres, les consommateurs canadiens moyens, exprimaient des préoccupations au sujet de la dette nationale.
Vers la même époque, le gouvernement fédéral s'est engagé à favoriser un développement durable et a reconnu que l'industrie ne pouvait plus considérer l'environnement comme un bien gratuit. Le recouvrement des coûts est devenu un élément de l'intégration des dépenses sur le plan environnemental, sur le plan de la santé et sur le plan social dans les dépenses des entreprises au Canada. On l'a généralement appliqué au travail lié à l'approbation des produits et services devant être distribués au Canada et qui pourraient avoir une incidence négative sur la société canadienne ou encore sur la santé et l'environnement des Canadiens.
On s'est constamment demandé si ces mesures allaient trop loin ou pas assez, si elles accroissaient l'efficacité ou mettaient en danger la santé et l'environnement en imposant un prix. Les points de vue exprimés dépendent beaucoup de la position des gens dans la société. Bien que les entreprises soient généralement en faveur de mesures d'efficacité et de réduction des effectifs, elles ne sont pas en faveur du recouvrement des coûts, étant donné que ce sont elles qui doivent habituellement les payer. Bien que la société civile appuie généralement le concept selon lequel les entreprises et les industries doivent payer des frais pour obtenir le privilège d'exercer leurs activités au Canada, elle se méfie des informations payées par l'industrie et craint que si les entreprises paient le gouvernement cela ne leur permette d'influencer les organismes de réglementation.
Les représentants de l'industrie mentionnent souvent que si on leur fait payer des frais pour les services obtenus du gouvernement, on devrait percevoir des frais semblables de la part des consommateurs pour les services fournis par l'État. L'ACC ne serait pas d'une manière générale en faveur d'un programme de recouvrement des coûts qui consisterait à faire payer des frais aux consommateurs canadiens pour des services obtenus.
Il est difficile de déterminer si le gouvernement a atteint les objectifs visés par la politique de recouvrement des coûts. Il s'agissait seulement d'une partie du processus visant à accroître l'efficacité. La réduction des effectifs et la réalisation d'objectifs en matière de gestion de la qualité au sein du gouvernement faisaient également partie des efforts en vue d'améliorer l'efficacité. La combinaison de ces éléments aurait dû avoir pour résultat des services gouvernementaux meilleurs et plus efficients pour tous les Canadiens, et il y a des limites à la qualité de l'évaluation qu'on peut faire de l'un ou l'autre des éléments du programme pris séparément.
L'ACC a vu le récent rapport du vérificateur général sur la mise en oeuvre de l'initiative de la qualité au sein du gouvernement fédéral, et les résultats sont quelque peu décevants. Si la qualité du service n'est pas mise en oeuvre efficacement, il y a un danger que l'efficacité du processus de réglementation se détériore et qu'on abaisse les normes afin de répondre aux exigences de ceux qui paient les coûts. En raison de l'absence de gestion de la qualité, il est difficile aux organismes de réglementation de faire un travail adéquat et efficace, surtout à cause de l'initiative de réduction des effectifs.
L'ACC estime qu'il est essentiel d'évaluer l'incidence de la politique de réduction des effectifs en même temps qu'on examine le recouvrement des coûts et la mise en oeuvre de la gestion de la qualité.
L'ACC estime qu'il existe un danger inhérent à l'établissement d'un lien trop étroit entre le régime réglementaire de surveillance et les coûts du service ainsi que la portion des coûts qu'on fait payer à ceux qui sont assujettis à la réglementation. Nous estimons que lorsqu'on essaie de faire concorder les prix demandés avec le coût réel du service fourni, le plus grand risque est qu'on expose les organismes de réglementation à des pressions excessives de la part de ceux qui sont assujettis à la réglementation. Une partie du coût de la réglementation devrait être assumée par le contribuable. Les impôts devraient servir à payer la partie du coût des services qui assure aux Canadiens la protection d'un régime réglementaire. Nous sommes d'avis que tous les coûts recouvrés auprès des entreprises seront transmis aux consommateurs, car ils seront inclus dans le prix des produits et services. L'ACC approuve le principe de la facturation des utilisateurs dans certains cas, mais il y a des services qui doivent être payés, à notre avis, à même les impôts.
L'ACC estime que la transparence et l'imputabilité de tout système de recouvrement des coûts sont essentiels à son acceptation par tous les intervenants. Les entreprises doivent reconnaître que les coûts qu'elles paient ne représentent qu'une partie des coûts réels; le reste continuera d'être payé par les contribuables. Il faut cependant communiquer clairement ce message afin que les organismes de réglementation ne subissent pas de pression de la part de ceux qui sont assujettis aux règlements. Il faut préciser qu'ils ne sont pas là seulement pour fournir des services à ceux qui sont assujettis aux règlements. Leur principale responsabilité est d'assurer la protection des Canadiens au moyen de règlements. Les consommateurs doivent avoir accès aux informations voulues sur le recouvrement des coûts afin de faire en sorte que les coûts qui leur sont transmis ne soient pas excessifs et que les organismes de réglementation continuent d'accorder la priorité à la santé des consommateurs et à la protection de l'environnement.
Les bénévoles de l'ACC, qui siègent à des comités avec des représentants des industries assujetties aux règlements et dans lesquelles on pratique le recouvrement des coûts, entendent toujours parler des effets négatifs du recouvrement des coûts sur la compétitivité du Canada. Mais si le recouvrement des coûts était éliminé, il faudrait que les revenus viennent d'ailleurs, et les mêmes personnes utilisent les mêmes arguments au sujet des impôts payés par les entreprises au Canada.
• 1150
Où pourrait-on récupérer cette perte en revenu? L'ACC n'appuierait
pas le recouvrement auprès des contribuables de tous les coûts liés à
la réglementation. Le recouvrement des coûts et le transfert des coûts
liés à la réglementation dans le prix des produits et des services
représentent un modèle raisonnable de paiement par l'utilisateur.
Si le public a une image aussi négative du recouvrement des coûts, c'est probablement dû en grande partie au fait que les organismes de réglementation ne l'ont pas bien expliqué. Jusqu'à récemment, bon nombre de Canadiens étaient persuadés que le gouvernement faisait tous les essais et recherches nécessaires pour garantir que les matériaux et les produits vendus sur le marché canadien ne présentent pas de danger. Peu de gens savaient que dans la plupart des cas l'organisme de réglementation donne son approbation après avoir examiné les données fournies par le demandeur qui souhaite produire au Canada ou y exploiter une entreprise.
Les gens croient que c'est une nouveauté pour l'industrie de faire ses propres essais et d'en présenter les résultats au gouvernement. C'est ce qui explique, conjuguée à la méfiance de la population envers les données provenant de l'industrie, une érosion de la confiance que les Canadiens ont dans le régime de réglementation. Vu la publicité qui a été faite sur la fermeture des laboratoires du gouvernement et sur le manque de scientifiques à l'emploi du gouvernement, bien des gens croient maintenant que les organismes de réglementation mangent dans la main de ceux qu'ils sont censés régir.
Passons plus précisément aux domaines de la réglementation environnementale auxquels participe l'ACC. L'un de nos bénévoles est membre du Comité consultatif sur la lutte antiparasitaire du ministre de la Santé; il s'agit d'un comité consultatif multilatéral qui traite de toutes les questions liées à la Loi sur les produits antiparasitaires et à l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire. Ce qui nous préoccupe, en ce qui a trait à l'application du recouvrement des coûts, c'est que les membres du comité qui ont un intérêt économique en jeu ont une deuxième tribune où ils peuvent faire valoir leurs opinions. En plus de participer à un comité multilatéral, ils siègent également à un comité consultatif économique où ils peuvent donner des conseils au ministre sur des questions comme le recouvrement des coûts sans que les autres intervenants puissent exprimer d'opinions contraires.
Je signale que le Canada a fait des études comparatives avec d'autres pays sur le recouvrement des coûts, les délais de prestation des services, ainsi que l'efficacité des régimes d'enregistrement des produits antiparasitaires et d'approbation des médicaments. Toutefois, on n'a pas comparé le Canada aux autres pays industrialisés pour ce qui est de savoir comment notre régime réglementaire permet de protéger la santé humaine et l'environnement.
L'ACC est également représentée dans d'autres groupes multilatéraux qui s'occupent de réglementation environnementale. Nous constatons souvent que l'industrie réclame des délais d'approbation rapides et rigides en échange du recouvrement des coûts, qu'elle estime être un frais de service. L'industrie croit que le régime de recouvrement des coûts lui confère le droit d'exiger un certain niveau de service. La relation entre l'organisme de réglementation et l'entreprise régie se transforme en une relation de fournisseur à client, ce qui est inacceptable. Pour que le régime de réglementation demeure crédible, il est important que tous les intervenants reconnaissent que le recouvrement des coûts ne correspond pas à un frais de service et qu'exploiter une entreprise au Canada n'est pas un droit, mais bien un privilège.
Jean Jones, présidente du Conseil national de la santé, vous parlera de l'expérience des bénévoles de l'ACC qui traitent des questions liées à la santé.
Mme Jean Jones (présidente, Conseil national de la santé, Association des consommateurs du Canada): Mes observations porteront sur les trois derniers éléments mentionnés dans cette étude, en ce qui a trait au programme des produits thérapeutiques de Santé Canada.
L'ACC est heureuse de voir que cette étude examinera l'à- propos d'imposer des frais au titre des services publics liés aux mesures exigées par la loi. C'est une question essentielle qui n'avait pas été incluse dans le mandat de la phase IV de l'examen du recouvrement des coûts dans le programme des produits thérapeutiques, qui est presque achevé.
Depuis deux ans, les consommateurs expriment dans bon nombre de tribunes leurs grandes préoccupations au sujet de la dépendance par rapport au recouvrement des coûts dans le financement du processus d'examen des produits pharmaceutiques. Ils estiment que cette dépendance oblige à mettre l'accent sur le service au client et que cela va à l'encontre de l'objectif principal du processus d'examen des produits pharmaceutiques, qui est de protéger la santé du public. Les hauts fonctionnaires parlent maintenant de l'industrie comme de leur clientèle, ce qui renforce l'impression qu'ils visent davantage à desservir l'industrie qu'à protéger les consommateurs.
Les efforts pour accélérer le processus d'approbation des produits pharmaceutiques et, parallèlement, le nouvel accent que l'on met sur la gestion du risque sont perçus comme des réactions de l'industrie. L'ACC s'inquiète de ce que cela pourrait avoir provoqué un assouplissement des évaluations, et nous croyons que cela a amené les consommateurs à s'inquiéter de ce que le gouvernement a perdu de son engagement et de sa capacité à protéger la santé publique.
Il faut tenir un débat public complet sur les effets du recouvrement des coûts pour tous les intervenants.
Merci. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.
Le président: Merci. Nous allons maintenant entamer la période de questions et réponses. Nous allons commencer par M. Harris. Les députés disposent de 10 minutes.
M. Richard M. Harris (Prince George—Bulkley Valley, Alliance canadienne): Vous pourriez peut-être m'accorder tout le temps dont dispose l'opposition, puisque je suis le seul à la représenter ici.
Le président: Vous êtes l'opposition.
M. Richard Harris: Merci.
Je remercie nos témoins. J'apprécie vos observations.
Nous convenons tous, d'une façon générale, que, quels que soient les beaux termes utilisés pour décrire le recouvrement des coûts, en fin de compte c'est toujours le contribuable canadien qui paie, le consommateur canadien de ces services. Il y a très peu d'entreprises au Canada qui absorbent elles-mêmes les coûts et s'abstiennent de les transférer à leurs clients.
Nous pouvons probablement tous nous entendre pour dire que les droits d'utilisation ou les droits liés à la réglementation sont une autre forme de taxe, surtout si les Canadiens ne constatent pas de réduction des taxes actuelles. Autrement dit, si les taxes demeurent constantes et que les droits d'utilisation augmentent, la plupart des gens diront que ces droits peuvent être considérés tout simplement comme une autre taxe.
Cela me dérange que le gouvernement et les agences gouvernementales, les sociétés d'État et les entreprises privées avec lesquelles le gouvernement participe à des opérations de privatisation, comme par exemple NAV CANADA, semblent pouvoir imposer arbitrairement des droits afin d'augmenter leurs propres recettes ou de donner une meilleure image de leur ministère. Mais ce sont les Canadiens qui finissent par en payer les frais.
Quand NAV CANADA a été créée, par exemple, on a constaté tout à coup que NAV CANADA imposait des frais supplémentaires qui n'existaient pas auparavant sur les billets d'avion. Ces frais supplémentaires s'ajoutent aux taxes d'aéroport et aux frais d'amélioration des aéroports. Il faut maintenant payer ces frais supplémentaires imposés par NAV CANADA, et je suis sûr que cela faisait partie des arrangements conclus avec le gouvernement lorsque cet organisme a repris les opérations qui relevaient auparavant du ministère des Transports. Le public canadien paie de nouveau la facture, et l'impôt des particuliers ne diminue pas.
Le programme d'enregistrement des armes à feu est, je le crains, l'un des programmes dont on a actuellement perdu le contrôle. Au dernier relevé, ce programme avait dépassé son budget de 200 millions de dollars et accusait bien des mois de retard dans son travail. Il n'y a qu'une façon de recouvrer cet argent, et c'est probablement d'imposer des frais supplémentaires aux propriétaires d'armes à feu canadiens qui respectent les lois.
Lorsqu'il existe un monopole, le seul recours pour les Canadiens, ce sont les élections. Nous espérons toujours qu'ils profiteront de cette occasion, mais ce n'est pas toujours le cas.
C'est Mme Jones, je crois, qui a parlé du processus d'approbation des médicaments. C'est un processus qui prend beaucoup de temps. Il faut comprendre que même si un examen prend beaucoup de temps, cela ne signifie pas nécessairement qu'il est mieux fait. Les délais sont souvent dus à l'inefficacité, à une mauvaise gestion ou à des retards causés par la bureaucratie. Et tout cela fait augmenter les frais à payer. Il faut évidemment que quelqu'un paie la facture. Et devinez qui la paie? C'est le consommateur canadien.
Si le Canadien moyen disait que c'en est assez et qu'il faut rendre des comptes, comment le gouvernement lui rendrait-t-il compte de droits qui semblent arbitraires et issus de nulle part? Les consommateurs n'ont pas d'autre choix que de les payer, et cela ne signifie pas nécessairement qu'ils obtiennent de meilleurs services. Quelqu'un peut-il répondre à cela? Comment rend-on des comptes au public?
M. Richard Neville: Monsieur le président, je vais commencer, si vous me le permettez.
• 1200
C'est le ministre chargé du ministère qui impose les droits qui doit
rendre des comptes. Cela fait clairement partie du mandat dans lequel
les droits sont inscrits, que ces droits soient imposés au moyen d'une
loi ou qu'ils soient fixés par un ministère. C'est le ministère qui
doit d'abord rendre des comptes.
Il y a aussi d'autres degrés d'imputabilité. Le Conseil du Trésor, par exemple, a certaines responpsabilités en ce qui a trait à la politique. Le Parlement doit rendre des comptes aux Canadiens. Mais surtout, c'est le ministère en cause, celui qui a pris la décision et reçu les pouvoirs nécessaires pour mettre en place un programme de recouvrement des coûts, qui doit rendre des comptes. Au sein du ministère, les responsabilités sont réparties entre divers gestionnaires, jusqu'en première ligne. C'est à eux, probablement, que les Canadiens devraient parler en premier s'ils ont un problème particulier.
À mon avis, la reddition de comptes est bien définie. La question est de savoir si les Canadiens la comprennent bien. On peut se demander si nous avons bien expliqué nos programmes, si la façon dont nous les avons expliqués fait en sorte qu'ils sont bien compris, s'il existe des mécanismes de redressement, si tout a été clairement énoncé. Je suis encore d'avis que ces programmes, de par la façon dont ils ont été élaborés et approuvés, relèvent des ministères qui les appliquent.
M. Richard Harris: Je suis encore persuadé que le contribuable canadien moyen n'a pas grand-chose à voir avec le ministre chargé du ministère. Ce sont les groupes de protection des consommateurs, comme celui que nous entendons aujourd'hui, qui peuvent les défendre. Malheureusement, il existe toujours un écart considérable entre les ressources dont dispose le groupe de protection des consommateurs et celles du gouvernement, et cela nuit à la capacité des groupes de protection comme celui-ci de défendre les consommateurs canadiens.
C'est cela, le problème. Le gouvernement dispose d'abondantes ressources pour faire tout ce qu'il veut, et les groupes de défense des citoyens qui essaient de représenter la population auprès du gouvernement n'ont tout simplement pas ces ressources. Lorsque le gouvernement au pouvoir est bien déterminé à atteindre ses propres fins, c'est encore pire.
Je sais que ce problème existe depuis des années, mais il me semble que si le gouvernement voulait sérieusement écouter les consommateurs ou les contribuables canadiens, il favoriserait une meilleure représentation par ces groupes et les aiderait en leur donnant davantage de ressources.
M. Richard Neville: J'ai dit clairement dans mes observations préliminaires que nous sommes en train d'effectuer un examen de notre politique de recouvrement des coûts. Le dernier examen remonte à il y a trois ans. Nous sommes prêts à recevoir des commentaires et des propositions. C'est maintenant qu'il faut faire des observations.
Nous essayons de voir quels ont été les problèmes au cours des trois dernières années. Ce n'est que dans des tribunes comme celle- ci que nous pouvons déterminer les effets de la politique et des changements proposés. Nous sommes donc heureux de participer à de telles séances et nous apprécions les commentaires qui nous sont faits. Ce n'est pas la seule tribune, bien sûr; c'est la principale, mais il y en a d'autres. Nous examinons toutes les observations lorsque nous mettons la dernière touche à notre politique. Nous sommes contents de les recevoir.
Mme Jean Jones: Monsieur le président, permettez-moi de vous signaler ce que nous avons dit dans notre exposé, c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'étude qui évalue les effets de l'imposition des droits d'utilisation sur la protection de la santé de la population. Nous aimerions qu'une telle étude soit réalisée pour voir si cette protection a été accrue. C'est possible. En général, on estime toutefois que la protection du public s'est érodée. Comme je l'ai dit, si une telle étude était entreprise, cela vous aiderait grandement dans votre examen.
M. Richard Harris: J'aimerais poser une dernière question. Pour moi, quand on impose de nouveaux droits à la population, il faudrait savoir clairement quel effet cela aura sur la population et l'économie. Deuxièmement, sont-ils imposés à cause de la mauvaise gestion du ministère? Peut-on prouver que le ministère est aussi efficace que possible? Troisièmement, les droits imposés par un ministère donné peuvent-ils être compensés par une réduction de taxe ou d'impôt pour le contribuable?
Si un règlement ou des droits ne peuvent pas répondre à ces critères, il s'agit alors d'une taxe supplémentaire. Le gouvernement évalue-t-il les nouveaux droits en fonction de ces critères, ou ceux-ci sont-ils arbitrairement imposés parce que le ministère dit avoir besoin de plus de fonds?
M. Richard Neville: Monsieur le président, permettez-moi de répondre. J'ignore de combien de temps nous disposons. La meilleure réponse que je puisse donner, c'est que lorsque le ministère décide qu'un programme sera dorénavant assujetti au recouvrement des coûts, il existe une politique claire qui a déjà été approuvée et qui décrit la façon de procéder. Des consultations doivent permettre aux parties intéressées au premier chef et au ministère de discuter de la proposition pour que les besoins de chacun soient satisfaits. C'est ce que l'on a fait à la Garde côtière et dans d'autres ministères. Je peux vous assurer qu'il y a eu de nombreux échanges officiels et officieux et en privé pour connaître les préoccupations de chacun et les régler. On aurait tort de croire que les ministères imposent des droits sans avoir fait ce qu'il faut. Une marche à suivre doit être suivie, et c'est ainsi que l'on procède.
M. Richard Harris: Merci.
Permettez-moi de revenir brièvement sur NAV CANADA, qui s'occupe aujourd'hui de l'essentiel du trafic aérien au pays. J'imagine qu'à un moment donné NAV CANADA a dit au gouvernement qu'elle ne pouvait pas faire ce qui lui était demandé avec le budget suggéré et qu'il fallait des droits supplémentaires. «Il n'y aura pas de marché si nous n'avons pas le droit d'imposer des droits.»
Lorsque le supplément a été imposé, on en a évidemment discuté au Comité des transports et à celui des finances, mais d'après mon souvenir la population n'était pas très au courant. De fait, mon bureau et celui de beaucoup de mes collègues ont été inondés d'appels téléphoniques de gens qui demandaient ce qu'était ce supplément qui venait soudainement d'être ajouté à leur billet. On a vérifié, et, voyez-vous donc, NAV CANADA a tout à fait le droit d'imposer ces droits. De fait, je pense qu'en vertu du marché elle peut à peu près fixer le prix qu'elle veut.
• 1210
Pour moi, c'est une façon dérobée d'imposer une taxe. Ce n'en est pas
vraiment une, mais cela revient au même. À cause de la façon dont
c'est fait, c'est un supplément, et non une taxe. Quoi qu'il en soit,
cela a évidemment fait partie des négociations lors de la transaction.
Mais cela n'a pas fait beaucoup de bruit parce que les groupes de
défense des consommateurs n'ont pas les moyens d'informer la
population de ce genre de chose.
Évidemment, tous les députés de l'opposition vont en parler pendant la prochaine campagne électorale, mais il y a un intervalle de quatre à cinq ans entre les élections. Il y a donc beaucoup d'argent qui sort de la poche des contribuables entre les élections.
Le président: Je voudrais que ce soit clair. Recommandez-vous que le Trésor public finance les groupes comme les associations de consommateurs?
M. Richard Harris: Ce que je dis,...
Le président: Vous avez dit qu'ils n'ont pas les moyens nécessaires. Préconisez-vous...
M. Richard Harris: Je dis que cela devrait être plus juste. Le gouvernement perçoit tous les taxes et impôts et s'en sert pour justifier ses décisions d'imposer des droits. Il finance toutes sortes de groupes au pays, mais oublie commodément les contribuables et les groupes de consommateurs qui représentent le citoyen moyen.
Au lieu de donner l'impression d'être une brute, le gouvernement, qui est censé représenter les citoyens, devrait égaliser les chances et donner aux groupes de consommateurs et de contribuables une voix un peu plus forte quand ils discutent avec lui. C'est tout ce que je dis.
Le président: Madame Hillard.
Mme Jennifer Hillard: Je ne vais évidemment pas dire le contraire. Nous sommes un groupe de bénévoles, et nos moyens sont très limités. Nous payons tous ici de notre temps et de notre personne.
Mais je veux surtout revenir sur quelque chose qu'a dit M. Neville dans sa réponse à M. Harris, à propos du fait qu'il consulte les parties intéressées au premier chef. C'est là que le bât blesse, parce que l'on considère que les premiers intéressés sont ceux qui ont un enjeu financier. Ceux qui ont un enjeu social, comme les membres de la société civile, les groupes de consommateurs, de défense de la santé et de l'environnement, sont souvent les laissés-pour-compte de la consultation. Ce n'est pas tant le cas avec le nôtre, sinon nous ne serions pas ici, mais ce l'est dans des dossiers plus chauds. Cela se fera à deux paliers. Comme dans le cas des pesticides, il y aura un grand comité où nous irons tous comparaître, puis un petit comité où n'iront que ceux qui ont des enjeux économiques et qui pourront parler au ministre.
La société civile est désavantagée, mais les autorités de réglementation aussi, parce que cela donne à la population une impression négative de la façon dont elles traitent avec les intérêts financiers. Je suis convaincue que cela mine la confiance des citoyens dans le système de réglementation.
Aussi bien pour le gouvernement que pour nous, il faudrait ouvrir le processus, le rendre plus transparent pour que, lorsque vous parlez des premiers intéressés, vous vous souveniez que les représentants des citoyens, qu'il s'agisse des groupes de consommateurs, de contribuables ou de défense de l'environnement—selon le sujet à l'étude—doivent aussi être à la table. C'est essentiel.
M. Richard Harris: Je pourrais peut-être être encore plus clair, monsieur le président. Il y a tout un éventail de groupes d'intérêts publics ou privés financés par le gouvernement et il y a des groupes de revendication qui représentent la population dans son ensemble, tous les secteurs de la société, tous les citoyens, quelles que soient leurs convictions. Tout le monde consomme. C'est pourquoi j'estime qu'un groupe comme l'Association des consommateurs du Canada devrait figurer en tête de la liste des groupes d'intérêts particuliers financés par le gouvernement parce qu'il représente tous ceux qui dépensent de l'argent au pays.
• 1215
Je pense que le gouvernement finance certains groupes d'intérêts
particuliers assez olé olé. Vous l'admettrez bien, monsieur le
président. Je ne pense pas que cette association tombe dans cette
catégorie.
Mme Jennifer Hillard: Et nous ne sommes pas financés.
Le président: Monsieur Harris, si je vous ai posé la question, c'est que je me rappelle une chose—sans tomber dans la partisanerie politique, puisque nous sommes apolitiques, comme vous le savez—et je me demandais si votre position sur le financement par l'État d'associations comme celle des consommateurs du Canada avait changé. Vous démarquez-vous de la position de votre parti?
M. Richard Harris: Non. Nous avons toujours dit que le contribuable, le citoyen, devrait être prioritaire pour le gouvernement, et un groupe comme celui-ci, qui représente tous les contribuables, de tous les milieux, devrait figurer en tête de liste des organismes financés.
Le président: Vous n'êtes donc pas contre l'idée de financer des associations, celle-ci en tout cas. C'est tout ce que je voulais vous entendre dire.
M. Richard Harris: Si elles ont des assises larges et représentent la population canadienne, certainement pas.
Le président: D'accord.
Mme Jennifer Hillard: J'ai une brochure sur les dons pour vous; nous allons vous la remettre en sortant.
M. Richard Harris: Donnez-la à M. Cullen.
M. Richard Neville: Pour revenir sur ce que disait Jennifer Hillard, sachez que lorsque nous avons procédé aux consultations en 1997, nous avons entendu un certain nombre d'intéressés qui n'étaient pas directement touchés. Nous allons procéder de nouveau de la même façon. Nous allons entendre les intéressés qui sont directement touchés, mais aussi d'autres, qui s'occupent de santé, d'environnement ou d'autres causes. Je tenais à le souligner.
Pour ce qui est de NAV CAN, je pense que vous avez soulevé une observation intéressante. J'aimerais clarifier deux ou trois choses.
NAV CAN a versé au gouvernement fédéral 1,5 milliard de dollars pour avantages ultérieurs. Cela s'est fait au moyen d'une loi, au vu et au su de tous les Canadiens. Ce que fait NAV CAN aujourd'hui ne relève pas de nous, puisqu'il s'agit d'une entreprise du secteur privé. Nous n'exerçons donc plus sur elle l'autorité que nous avions par le passé.
Il faut examiner l'organisation qui nous intéresse et voir si cela s'applique. Nous n'avons aucune autorité sur NAV CAN aujourd'hui en matière de recouvrement des coûts.
M. Richard Harris: Je le sais.
M. Richard Neville: Merci.
Le président: Merci, monsieur Harris.
Monsieur Pillitteri, suivi de Mme Leung et de Mme Guarnieri.
M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Quand M. Harris a commencé à poser ses questions, je me suis demandé s'ils allaient se présenter devant les électeurs. Monsieur Harris, ils ne se présentent pas aux élections. Eux, ils sont toujours là. C'est nous qui nous présentons devant les électeurs. Le moment venu, c'est nous que les citoyens vont évaluer, pas eux. Eux, ce sont des bureaucrates. Eux sont là en permanence, quoi qu'il advienne. C'est nous, les politiques, qui passons.
Monsieur le président, je voulais que ce soit clair, pour les besoins du procès-verbal.
Nous avons entendu des exposés remarquables ce matin, et il y a deux groupes auxquels je voudrais poser des questions, monsieur le président.
Ils ont parlé de l'industrie comme partie intéressée et ont parlé en particulier de la lutte antiparasitaire. Il se trouve que cela m'intéresse beaucoup parce que je suis aussi un homme d'affaires. Je produis des fruits dans le secteur horticole, et je peux vous dire que depuis l'instauration du libre-échange nous savons qu'il y aurait lieu d'harmoniser les produits utilisés au Canada, aux États-Unis et ailleurs. Or, cela ne s'est pas fait parce que, pour homologuer un produit aux États-Unis, lorsque l'industrie comparaît devant les autorités, le processus prend entre un an et demi et deux ans, alors qu'au Canada il faut compter environ cinq ans.
• 1220
Voici ce qui se passe. L'industrie, avant de présenter un produit de
lutte antiparasitaire pour le faire approuver, vu les cinq ans qu'il
faut ici, étant donné que le Canada représente un petit marché... Il
arrive qu'elle ne soumette pas ses produits parce que cela coûterait
trop cher de le commercialiser à petite échelle, parce que le Canada
est un marché relativement petit par rapport à celui des États-Unis.
Avant d'homologuer un produit, parce qu'ils n'acceptent pas les
données venant des États-Unis ou d'ailleurs, nous refaisons le même
processus. Cela désavantage donc le secteur agricole canadien par
rapport aux États-Unis ou à d'autres pays.
Or, ces produits entrent au Canada. Les fruits et les légumes importés sont recouverts de produits qui ne sont pas approuvés au Canada, mais utilisés aux États-Unis, et nous les consommons. C'est le cas depuis deux ou trois ans, et pourtant nous n'y avons pas accès à meilleur marché parce qu'on ne les trouve pas ici. Ils restent là-bas pendant une éternité parce qu'il y a des fongicides et certains insecticides, qui finissent par se décomposer et qui ne durent que deux, trois ou cinq ans. Il faut toujours payer pour en avoir. Cela pénalise nos agriculteurs par rapport aux Américains ou aux Mexicains. Ces produits entrent librement au Canada parce qu'ils sont utilisés ailleurs. Quand un produit fait l'objet d'une demande, s'il a 100 usages et échoue un seul des tests, il n'est pas homologué au Canada.
Je pense que l'on devrait aussi consulter les intéressés, les producteurs de fruits ou de produits antiparasitaires au Canada pour savoir ce qu'ils ont à dire.
Par ailleurs, quels sont les pesticides qui sont vraiment nocifs pour l'humain? Il s'agit surtout non pas de fongicides, non pas d'insecticides, mais bien d'herbicides. Le Roundup est le même partout. Le fait est que nous nous lançons dans tout ce processus... Et les groupes de défense des consommateurs ont tendance à tout mettre dans le même panier. Si vous voulez bien représenter la population, vous devriez commencer par distinguer ce qui est acceptable au Canada. Si un produit est utilisé à l'extérieur du pays, c'est peut-être cela que vous devriez examiner. Si ce produit est interdit, d'autres seraient plus facilement disponibles, et le coût baisserait.
Je vous assure que, comme producteur, je suis souvent revenu des États-Unis après avoir acheté un produit, ce qui fait de moi un criminel... Je l'ai utilisé ici parce qu'on le retrouve pulvérisé sur ce que l'on consomme au Canada.
C'est une chose. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. L'autre question porte sur le recouvrement des coûts dans le secteur de la navigation.
Monsieur Adams, vous avez dit que vous avez ramené de 523 à 430 millions le coût de la navigation depuis la saison 1998-1999. La semaine dernière, nous avons entendu des responsables de la voie maritime nous dire que les coûts se sont emballés. Vous avez aussi dit que si les coûts ont baissé, c'est parce que vous avez cessé de faire du dragage; vous ne faites plus de dragage quand c'est nécessaire. Combien cela coûtait-il? Si vous éliminez cela... le coût a-t-il vraiment baissé?
Vous dites aussi faire tout en votre pouvoir pour abaisser les coûts, mais un exploitant nous a dit que pour une bouée de 1 500 $ vous faisiez payer 15 000 $... Voilà ce qui se passe sur la Voie maritime du Saint-Laurent. Les exploitants se plaignent des coûts. Pourtant vous dites avoir réduit les coûts le plus possible.
J'aimerais que les deux groupes répondent à cette question.
Mme Jennifer Hillard: Je ne me lancerai pas dans un long débat sur la Loi sur les produits antiparasitaires, mais il y a des points sur lesquels j'estime devoir vous répondre.
Nous réclamons une nouvelle Loi sur les produits antiparasitaires depuis plus de 10 ans. Le processus a fait l'objet d'un examen, et nous attendons toujours les changements que nous réclamons. Si nous ne les avons toujours pas obtenus, c'est parce que le secteur des produits chimiques veut obtenir beaucoup de changements au moyen du règlement et que les changements que d'autres veulent exigent une modification de la loi. Pour une raison quelconque, M. Rock ne semble pas prêt à bouger pour le moment.
Lors de l'examen de la réglementation, l'Association des consommateurs du Canada s'est fait pas mal d'ennemis chez certains groupes d'intérêt public parce que nous étions vigoureusement en faveur d'utiliser les données américaines, les données mondiales, lorsqu'elles étaient pertinentes, et de ne procéder qu'aux tests canadiens supplémentaires qui portent sur l'innocuité de l'eau, l'efficacité et nos propres tests environnementaux. Nous avons appuyé de tout coeur les agriculteurs, en particulier les horticulteurs, qui ont demandé que soient homologués les produits à emploi limité sans suivre la filière habituelle, ainsi que les homologations demandées par les utilisateurs, en particulier les horticulteurs.
Je pense qu'il y a maintenant un accord avec les États-Unis pour mettre en commun les données relatives à la réévaluation de produits plus anciens.
Je pense donc que c'est vous qui nous avez mis dans le même panier que d'autres groupes, et je pense honnêtement que ce n'est pas juste.
Je vais vous laisser ma carte au cas où vous voudriez me téléphoner et discuter à une autre occasion de la Loi sur les produits antiparasitaires.
Mais la question du recouvrement des coûts reste entière. Aux yeux de la population, l'industrie semble avoir l'oreille du ministre et des autorités de réglementation. Ce n'est pas une perception positive du système de réglementation canadien.
M. Gary Pillitteri: Pour répondre à ce que vous avez dit, je ne vous ai pas mis dans le même panier; je suis plutôt aux prises avec ce processus de cinq ans qui m'interdit d'obtenir le produit.
Je veux être certain. Peut-être sommes-nous en train de dire tous les deux la même chose, et peut-être pourrions-nous dire au ministre d'accepter les travaux de recherche réalisés à l'étranger, ce qui n'est toujours pas le cas.
Mme Jennifer Hillard: Surtout s'il nous donne une nouvelle loi.
Le président: Ce n'est pas contre vous. C'est ce qu'il a dit.
Monsieur Adams.
Comm. John Adams: J'aimerais répondre à certaines choses qui ont été dites.
Les 423 millions que nous avons dépensés en 1998-1999 couvraient tous les éléments de la Garde côtière, et non pas seulement les services maritimes, les activités reliées aux droits pour les services maritimes. Cela comprend la recherche et le sauvetage et tout le reste, et cela n'est pas assujetti aux droits.
En ce qui concerne la réduction des coûts, pour le dragage, vous avez tout à fait raison; la somme a été déduite de notre résultat net et a été transférée au secteur commercial. Mais on parle ici de 3 à 4 millions de dollars, et non de sommes phénoménales. C'est la situation dans le Saint-Laurent.
Pour ce qui est des initiatives de réduction des coûts, nous avons fait passer de 43 à 22 le nombre de centres de contrôle maritime et de trafic maritime. Nous avons supprimé 1 400 emplois et ramené de 189 à 106 le nombre de navires, car nous avons amalgamé les trois flottes. Et ce n'est pas tout. Toutes ces mesures nous ont permis de réduire nos coûts de 20 à 30 p. 100.
Nous avons aussi lancé un programme de modernisation des aides maritimes. Les armateurs que vous avez entendus la semaine dernière parlaient de dispositifs bien précis, peut-être sur le fleuve ou dans les lacs; je ne suis pas sûr. Le programme de modernisation des aides maritimes nous a permis d'économiser environ 23 millions de dollars.
Nous n'avons pas terminé. Nous continuons de chercher des moyens plus efficaces et plus rentables d'offrir des aides maritimes. Mais en ce qui concerne les grands dispositifs, vous avez tout à fait raison: ils sont extrêmement coûteux. Mais ils doivent être extrêmement performants, à cause de notre climat et de la glace. Nous allons continuer de travailler avec le secteur pour réduire ces coûts.
Le président: Merci, monsieur Pillitteri.
Madame Leung.
Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Merci, monsieur le président, et je vous remercie tous de vos excellents exposés.
J'ai un certain nombre de questions sur les frais d'utilisation. Beaucoup estiment que ces droits sont en fait une taxe. Je comprends, comme M. Bird l'a expliqué, combien il est difficile de calculer les frais d'utilisation. Toutefois, j'aimerais donner l'exemple de la taxe d'établissement de 975 $ pour les nouveaux immigrants ainsi que celui des droits pour les visas.
• 1230
Les députés ont entendu beaucoup de plaintes. Les droits de visa pour
les voyageurs venant d'Asie sont très élevés. Dans le cas de la taxe
d'établissement, il faut tenir compte du fait que ce sont de nouveaux
immigrants et qu'ils n'ont peut-être pas de ressources financières.
Je pose ma question au Conseil du Trésor. Comment avez-vous choisi de calculer ces frais?
Je suis heureuse de la suggestion de Mme Jones. Nous devrions avoir une étude qui les justifie. On ne devrait pas se contenter d'un chiffre, comme un peu moins de 1 000 $ comme taxe d'établissement. D'où vient le chiffre, et comment le justifiez-vous? Je pense que c'est important, et j'aimerais le savoir.
M. Richard Neville: En ce qui concerne la taxe d'établissement, cela faisait partie de la loi de finance votée par le Parlement; sa création et son évolution ont donc été faites au grand jour.
Pour ce qui est des droits de visa, de passeport, des droits consulaires, des services, etc., cela existe depuis pas mal de temps déjà. C'est Mme Jennifer Hillard, je crois, qui a dit que le recouvrement des coûts est la conséquence des réductions de l'examen des programmes. Malheureusement, ce n'est pas juste. Le recouvrement des coûts existe depuis de nombreuses années, que ce soit à Parcs Canada, qu'il s'agisse des visas, de la santé, de la R-D, peu importe.
Tout ce que j'ai à dire en ce qui concerne les droits de visa, c'est que cela a changé avec le temps. Nous avons un fonds renouvelable et nous calculons le coût associé au service et nous le répartissons entre ceux qui font une demande de visa ou de passeport. Cela représente donc la valeur du service: le coût divisé par le nombre de visas délivrés. C'est le calcul que nous essayons de faire.
Mme Sophia Leung: Faites-vous des études pour arriver à cela?
M. Richard Neville: C'est curieux que vous me posiez la question. Pas plus tard que la semaine dernière, j'ai comparu devant les ministres du Conseil du Trésor pour parler d'une proposition relative aux fonds renouvelables, et l'un d'eux était le fonds renouvelable des passeports.
Oui, il y a des études en cours auxquelles participent le Conseil du Trésor et le ministère visé pour s'assurer que la politique est bien suivie. Cela ne met pas en cause uniquement la politique de recouvrement des coûts; il y en a d'autres. Par exemple, s'il y a une politique qui porte sur les recettes et les pouvoirs de dépenser, cela aussi entre en jeu dans le calcul des droits.
Mme Sophia Leung: À qui doit-on s'adresser si l'on a des plaintes ou des objections fondées?
M. Richard Neville: Il faut d'abord s'adresser à la personne avec qui on fait affaire. Si cela n'aboutit pas, on peut s'adresser à son supérieur; cela finira par se retrouver dans le bureau du sous-ministre ou du sous-ministre adjoint, puis dans celui du ministre.
Pour nous, les ministres sont responsables des programmes que leur confie le premier ministre. C'est donc le ministre le premier responsable.
La politique prévoit que si un intéressé n'est pas satisfait des résultats, le président du Conseil du Trésor doit l'écouter et essayer de trouver une solution juste et raisonnable. Évidemment, c'est un cas de figure que nous essayons d'éviter le plus possible. Nous laissons aux ministères le soin de régler le problème. Mais comme cela était le cas en ce qui concerne la Garde côtière, nous avons travaillé ensemble avec l'intéressé pour essayer de trouver une solution. Il arrive donc parfois que nous intervenions à ce niveau.
M. Sophia Leung: Merci.
Le président: Merci, madame Leung.
Madame Guarnieri.
Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Merci, monsieur le président.
Un homme d'affaires assez désabusé m'a un jour décrit de façon imagée la différence entre le gouvernement et le secteur privé. Voici ce qu'il m'a dit. Lorsque vous achetez une pomme sur le marché, vous payez 1 $ en échange de la pomme. Lorsque c'est le gouvernement qui fourni les pommes, il vous donne la pomme que vous payez ensuite le reste de votre vie en taxes et impôts.
• 1235
En ce qui concerne les services gouvernementaux non essentiels—je
crois que M. Harris emploie un terme plus pittoresque pour décrire les
services gouvernementaux non essentiels—comment peut-on prétendre que
les consommateurs seraient avantagés s'ils payaient indirectement pour
ces services par le biais de taxes et d'impôts plutôt que de payer
directement pour les services dont ils se prévalent? Cette question
s'adresse à celui qui voudra bien y répondre.
M. Len Endemann (directeur, Recouvrement des coûts, secrétariat du Conseil du Trésor): Le professeur Bird a abordé cette question fondamentale. Il a bien décrit la situation.
Il y a une différence entre le financement des programmes gouvernementaux par la méthode d'imposition générale et le financement par le biais de frais d'utilisation; cela peut avoir une incidence sur la quantité totale de ressources dont dispose un certain secteur de l'économie. Si des frais sont associés à une entreprise en particulier, le coût de son produit est directement touché, ainsi que, présume-t-on, la demande de produits de cette entreprise. Si c'est fait convenablement, cela pourrait améliorer l'affectation des ressources, de façon générale, au sein de l'économie.
C'est une réponse générale à une question très générale.
M. Richard Bird: C'est une assez bonne réponse qui vaut A moins.
Mme Albina Guarnieri: J'espère que vous n'attribuez pas de note à nos questions.
Alors, monsieur, est-ce que vous nous attribuez des notes pour les questions que nous posons?
M. Richard Bird: Non, en fait, je tire un enseignement de vos questions. La discussion a été très intéressante car elle prouve ce que j'ai dit: en fait, ce sont les détails de ces questions dans les différents domaines qui donnent lieu à toutes sortes de problèmes et de difficultés. C'est la première fois qu'on discute de façon générale de cette question.
On a bien décrit ma position: rien ne justifie que le secteur public me fournisse des pommes. Si je veux une pomme, je n'ai qu'à en acheter une. Si le secteur public estime que mon revenu n'est pas suffisant, il peut créer un programme de transfert de revenu et faire ainsi augmenter mon revenu, ce qui devrait me permettre d'acheter la pomme. Peu importe qu'il s'agisse d'une pomme ou d'un billet d'avion Edmonton-Ottawa. Cela n'a pas d'importance. C'est moi qui prend l'avion, c'est moi qui mange la pomme et c'est donc moi qui devrait profiter de ce programme.
La plupart de nos discussions n'ont pas porté sur ce genre de services. Elles traitaient plutôt de services réglementaires et ce sont ces services qui comportent le plus de problèmes importants. On en a bien discuté ici aujourd'hui. Je n'ai rien à ajouter.
Mme Albina Guarnieri: Monsieur Neville, est-ce qu'il serait bon, pour les consommateurs collectivement, que le gouvernement établisse un lien étroit entre les revenus et les coûts qu'entraîne un service particulier et détermine ensuite s'il vaut la peine d'offrir ce service en fonction de la volonté de payer des consommateurs.
Si je vous ai bien compris, vous avez dit que certains services devraient être payés par les contribuables. J'aimerais savoir ce que vous considérez comme un service essentiel. Est-ce que les contribuables devraient aussi payer pour les services non essentiels?
Mme Jean Jones: J'ignore de quel service non essentiel vous parlez. Je suis particulière préoccupée par ce que je considère comme un service des plus essentiels, soit la protection de la santé des Canadiens.
Mme Albina Guarnieri: C'est certainement un service essentiel.
Mme Jean Jones: En fait, ce devrait être la fonction première de tout organisme réglementaire. Sinon, à quoi sert la réglementation?
Mme Albina Guarnieri: Lorsque je travaillais pour Parcs Canada, nous savions que nous pouvions imposer les frais que nous voulions au Parc national de Banff. La demande était telle que nous pouvions exiger les frais nécessaires pour financer les services offerts dans le parc, mais aussi pour subventionner les parcs avoisinants et des initiatives en matière de faune. Que pensez-vous de l'idée d'exiger des frais permettant de faire des profits grâce à un service gouvernemental très populaire afin de subventionner d'autres domaines qui ne génèrent pas de recette?
Mme Jean Jones: Dans l'exemple que vous donnez, les activités sont étroitement reliées. Vous utilisez le parc. Si une partie des frais que vous versez pour l'utilisation du parc sert au maintien du milieu écologique permettant au parc de continuer d'exister, cela me semble un usage toute à fait indiqué. Toutefois, je crois que les contribuables n'aimeraient pas payer pour quelque chose qui ne soit pas lié intrinsèquement à ce pourquoi ils paient. C'est plus discrétionnaire que la protection de la santé.
M. Richard Neville: J'ai compris votre question autrement. J'ai cru que vous demandiez si vous aviez la possibilité à un parc en particulier—en l'occurrence, disons que c'est le Parc national—de profiter de l'importante demande pour accroître vos recettes, et, que vous le fassiez afin de compenser les coûts des autres parcs. Est-ce l'exemple que vous avez donné?
Mme Albina Guarnieri: C'est exact.
M. Richard Neville: Bien. J'y ai fait allusion plus tôt lorsque j'ai parlé des autres genres de procédures et de politiques qui entrent en jeu.
En ce qui concerne le Parc national de Banff ou, plus précisément, Parcs Canada et ses différents parcs nationaux, ces parcs ont été regroupés. Six parcs ont été regroupés en un seul fonds renouvelable, d'après notre terminologie, qui représente une entité comptable. L'inter-financement est permis entre les six parcs, mais seulement pour les parcs. Les recettes générées par les parcs ne peuvent pas servir à autre chose, mais les recettes provenant d'un parc peuvent servir à financer un autre parc faisant partie du même fonds renouvelable.
Il existe aussi une autre politique très importante, celle de la réaffectation des recettes. Cette politique s'appliquerait à votre exemple.
Mme Albina Guarnieri: Merci de cette précision.
M. Richard Neville: Je veux vous rassurer que vous faites ce qui doit être fait.
Mme Albina Guarnieri: Il y a d'autres enveloppes qui transcendent les recettes générales.
J'en viens à ce que disait M. Bird tout à l'heure; j'espère ne pas me tromper en disant qu'il assimile la taille des profits à la taille des coûts qui équivalent aux recettes pour ce qui est des profits. Le gouvernement tente-t-il de faire en sorte que ses dépenses soient égales pour que les gens acceptent, du point de vue politique, de subventionner certaines initiatives?
M. Richard Neville: La politique est très claire. Nous devons recouvrer les coûts, et non enregistrer un excédent.
D'ailleurs, nous surveillons cela. S'il y a un excédent de recettes, ça signifie que nous exigeons des frais trop élevés. C'est aussi simple que cela. Nous prenons donc des mesures correctives.
Selon la politique, les coûts doivent être égaux aux recettes ou les recettes doivent être égales aux coûts, selon la formulation que vous préférez. D'une façon ou d'une autre, les deux doivent s'équivaloir. Il faut néanmoins être réaliste. Il y a un cycle économique. Le cycle économique peut durer deux ou trois ans, selon la nature de l'activité. Il faut savoir que, dans un cas comme celui-là, il faut tenir compte dans le calcul des frais d'utilisation.
Cela dit, nous y veillons certes et nous avons, dans certains cas, pris des mesures afin d'examiner la facturation des services.
Mme Albina Guarnieri: Le gouvernement tient-il compte du fait que, s'il paie pour un service non essentiel—et je ne parle pas ici de choses telles que les soins de santé—qui coûte plus que ce qu'il vaut, les consommateurs n'en assumeront pas les frais à moins que ceux-ci ne soient inclus dans leurs taxes et impôts? Le gouvernement tient-il compte du fait que les gens n'acceptent pas toujours, du point de vue politique, de consacrer l'argent qu'ils ont gagné à la sueur de leur front à des services non essentiels?
Je semble insister sur ce point, mais j'espère vous le faire comprendre.
M. Len Endemann: La question de savoir ce qui est un service essentiel ou non dépend du point du vue de l'intéressé. D'ailleurs, lorsqu'on décide d'imposer des frais d'utilisation, le client ou le groupe cible constate parfois que certains services ne sont plus aussi essentiels qu'ils l'ont déjà été.
Ainsi, à l'Agence canadienne d'inspection des aliments, on inspecte des aliments à bien des fins et on fait différents genres d'inspections et de classements. Lorsqu'on a décidé de recouvrer pleinement les coûts occasionnés par certains services parce qu'on estimait, par exemple, que le classement de certains aliments se faisait entièrement au profit du producteur... Ce classement ajoutait à la qualité marchande car il représente une sorte d'attestation de qualité. Le secteur a décidé de se débrouiller seul. Puisque l'Agence ne voulait plus dispenser ses services gratuitement, le secteur a décidé de s'organiser pour le faire lui-même. Voilà donc un service qui a échappé à l'Agence. Une discussion sur les frais d'utilisation est une autre façon de déterminer quels sont les services non essentiels.
Mme Albina Guarnieri: Merci.
Monsieur Bird, je vois que voulez intervenir.
M. Richard Bird: Oui, j'aimerais faire une remarque. Le cas de l'Agence d'inspection des aliments est un cas intéressant que j'ai en fait examiné; votre interprétation de l'affaire est très juste. Mes amis de l'Association des consommateurs du Canada vous diront peut-être que l'on a permis à l'industrie de s'auto-réglementer. Mais il s'agissait ici de classement. Ça n'avait rien à voir avec la protection du public ou autre chose du genre, et cela semblait tout indiqué.
Toutefois, je ne suis pas d'accord avec ce qu'a dit M. Neville dans une remarque très intéressante lorsqu'il a affirmé que, s'il y a des recettes excédentaires, c'est que les frais sont trop élevés. En fait, cela signifie que le niveau de service est trop bas. Il faudrait dispenser davantage de services, à moins, bien sûr, qu'il s'agisse d'un monopole. C'est en fait de cela qu'il s'agit ici.
La discussion sur ce sujet, notamment avec le secteur privé, porte surtout sur la question de savoir quels sont les coûts qui sont recouvrés. J'ai assisté à beaucoup de ces discussions auxquelles participaient les représentants de la Voie maritime et d'autres, et tous, sans exception, estiment que toutes les toilettes des bureaux gouvernementaux sont plaqués or et que tout coûte beaucoup trop cher. Ils commencent toujours par dire que les coûts qu'on tente de recouvrer sont beaucoup trop élevés, et que le gouvernement n'est pas efficient.
Il est très difficile de répondre d'emblée à ce genre d'allégation, car l'une des raisons qui vous pousse à imposer des frais d'utilisation, c'est précisément pour être un plus efficient. Parfois, cela signifie que vous en faites moins, parfois, que vous en faites plus. Mais si ce message n'est pas clair, et notre système gouvernemental ne réussit pas toujours à transmettre ces messages, comme je l'ai dit dans mon exposé, cette politique n'est pas pleinement rentable.
Si vous habitez à côté du Parc national des hautes terres du Cap-Breton et que vous estimez avoir le droit d'y aller n'importe quand gratuitement, vous serez mécontent lorsqu'on vous demandera des frais d'utilisation. C'est votre point de vue personnel.
J'aimerais mentionner une chose à laquelle les représentants de l'Association des consommateurs ont fait allusion, je crois, et sur laquelle j'aimerais insister. J'estime que les fonctionnaires fédéraux parlent trop souvent des «clients». Ils interprètent mal ce terme de «client». Je vous donne un exemple qui ne relève pas du fédéral. Si je réglemente le secteur des taxis, mes clients ne sont pas les chauffeurs de taxi ou les propriétaires de taxis. Ce sont les consommateurs. La comparaison est parfaite. Dans la plupart des cas, les clients ne sont pas ceux avec lesquels vous faites affaires directement. Ce sont en fait les Canadiens. Voilà pourquoi j'ai dit au début qu'il est essentiel—et je suis d'accord avec tout ce qui a été dit à ce sujet—que ces groupes soient écoutés.
Par ailleurs, il est absurde de croire qu'il y ait deux niveaux de discussion distincts, un niveau où l'on discute de façon vague et générale et un autre où l'on s'attarde aux aspects économiques et financiers. Ces derniers aspects sont tout aussi flous, et la discussion d'ordre général porte aussi sur les questions économiques et financières. Il n'y a donc pas deux niveaux de discussion, mais un seul. Si on se dirige vers un processus de discussion à deux niveaux, cela ne me semble pas une bonne idée.
Je ne vous apprends rien en vous disant à vous, les politiciens, que lorsqu'on participe à une discussion politique, on tourne en rond longtemps avant d'arriver à quelque chose. Souvent, on ne va nulle part et c'est très bien ainsi. C'est la nature même du processus.
Ce qui est bien, c'est que cette politique de recouvrement des coûts nous a amenés à aborder certaines de ces questions. C'est tout nouveau au Canada; on commence à peine à en discuter après un siècle de silence à ce sujet. Il nous faudra peut-être en discuter encore pendant 90 ans avant de régler la question.
Mme Albina Guarnieri: Vous nous avez aidés à préciser la discussion. Merci.
Le président: Monsieur Szabo, voulez-vous tourner en rond avec nous?
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Certainement. En fait, j'ai plutôt l'impression qu'il s'agit d'un hexagone, car on s'arrête souvent en chemin. Il est vrai qu'on se retrouve souvent là où on a commencé. On en revient souvent aux mêmes questions et je me demande si dans le cadre de dialogues comme celui-ci...
• 1250
Monsieur Bird, nous pourrions entrer dans les détails, mais lorsque
cette politique a été adoptée, on est parti du principe qu'elle était
fondamentalement judiciaire et que c'est plutôt sa mise en oeuvre qui
a fait problème. Revenons-en aux principes: demandons-nous d'abord si
la politique est fondamentalement rationnelle. Il s'agit ici pour le
gouvernement de rendre des comptes relativement aux services qu'il
dispense et d'améliorer cette reddition de comptes par une imposition
de frais d'utilisation et le recouvrement des coûts. Est-ce un bon
principe?
M. Richard Bird: Oui, mais vous avez raison de dire que le problème tient à la mise en oeuvre. Voilà où je voulais en venir. C'est en tentant de mettre en oeuvre cette politique que nous apprenons à améliorer la mise en oeuvre. C'est un processus d'apprentissage.
M. Paul Szabo: Je vois.
M. Richard Bird: Les principes sont bons, on les reconnaît et on en discute. On s'aperçoit que tout cela n'est pas si simple. C'est vrai, nous le savions. Nous remettons en question quantité de nos pratiques traditionnelles, et c'est très bien. Certains n'aiment peut-être pas certaines des réponses, mais nous allons continuer de discuter de ces questions. Cela fait partie du processus en cours.
Votre comparaison avec un hexagone est bien, sauf que l'hexagone a trois dimensions.
M. Paul Szabo: Parlons plutôt alors d'un polygone...
M. Richard Bird: Oui.
M. Paul Szabo: ... ou même d'un polygone à trois dimensions, auquel cas nous pourrions nous diriger dans toutes sortes de directions.
Cela m'amène à ma dernière question qui s'adresse à M. Neville. La voici. Si tout le monde délaisse l'aspect macroéconomique et s'attarde aux détails, les députés seront partis à la discussion; une étude est en cours. Vous et moi avons déjà parlé, entre nous et dans d'autres comités, de la participation des députés aux discussions sur une mise en oeuvre efficace de ces principes. Ce qui est frustrant, ou plutôt, le défi, c'est que les députés ont chacun leurs intérêts et leur consensus à défendre, et il sera difficile de les amener à se concentrer sur ces questions.
Il va donc y avoir un processus d'examen. Avez-vous songé à la façon d'y faire participer les députés de manière utile, plutôt qu'en semant davantage la confusion?
M. Richard Neville: Je crois que le fait que nous sommes ici ce matin pour une deuxième fois augure bien de la manière dont on obtiendra le point de vue des parlementaires sur la façon dont nous nous sommes comportés par rapport à la politique et à sa mise en oeuvre.
Je dirais même que nous avons hâte de lire le rapport. Je crois que cela aura beaucoup de poids lorsqu'il s'agira pour nous de préparer d'autres recommandations.
Je crois que nous pourrions aussi avoir des tables rondes avec les députés, ce qui donnera à chacun de vous l'occasion de préciser sa pensée. Nous le ferions volontiers et nous serions ravis d'animer bon nombre de tables rondes de ce genre. Je crois vraiment que, sans la participation des parlementaires, la consultation serait incomplète. C'est donc une chose que nous voulons faire.
M. Paul Szabo: Nous avons tous hâte de participer à ce processus. Merci.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Szabo.
J'ai quelques questions.
J'aimerais obtenir votre opinion. Le comité pourrait recommander ce qui suit: que l'information sur les frais supplémentaires soit facile d'accès pour toutes les parties intéressées et comprenne la formule utilisée pour calculer les frais d'utilisateur, des précisions sur la nature obligatoire des frais aux entreprises, sur les sommes ainsi perçues et sur le rendement prévu pour chacun des programmes faisant l'objet de frais d'utilisateur—il faudrait préciser aussi une estimation des avantages pour les secteurs public et privé, ainsi qu'une justification. Les recettes découlant des frais seraient divulguées annuellement, avec le budget—en donnant les données pour chaque type de frais. Des normes uniformes seraient fixées par le Conseil du Trésor et appliquées par tous les ministères. Tout écart par rapport à ces normes devrait être justifié par les ministères et organismes. Que pensez-vous de ces idées?
Madame Hillard.
Mme Jennifer Hillard: Elles me semblent bonnes. Pour nous, il y a une chose qui vous a échappé. Quand vous faites des tests, des études, des examens visant à comparer le Canada avec d'autres pays, à comparer les aspects financiers, comme les règlements gouvernementaux visant à protéger la santé et l'environnement, il faut aussi considérer l'aspect prestation de service. Il ne suffit pas de comparer les coûts; il faut aussi examiner les résultats. Si les coûts sont un peu supérieurs au Canada mais que les résultats sont aussi supérieurs, tant mieux.
Nous avons vraiment de très bons modes de réglementation au Canada. N'allons pas les saboter pour épargner quelques dollars. Il ne faut pas non plus taxer les gens trop lourdement, mais il ne faut pas penser seulement à l'argent en faisant fi de la qualité des services. C'est ce qui commence à se produire et qui nous effraie.
Le président: Puisque vous avez la parole sur ce sujet, vous avez exprimé des plaintes au sujet du programme de recouvrement des coûts. Je me demande si c'est là l'indice d'un problème plus vaste à l'échelle gouvernementale, soit une lourdeur excessive de la réglementation des entreprises canadiennes. Ces règlements sont-ils efficaces?
Pensez-vous qu'il est peut-être temps, au lieu de se pencher uniquement sur la question du recouvrement des coûts, d'avoir ce que j'appellerai une commission sur les tracasseries administratives, où nous nous pencherions sur l'évaluation et la simplification des règlements? Nous pourrions par exemple vous débarrasser des règlements désuets. Je ne sais pas à quand remonte le dernier examen des règlements par le gouvernement, mais je suis convaincu que certains sont désuets et n'ont plus de sens. Quand fera-t-on le ménage?
Mme Jennifer Hillard: La Direction générale de la protection de la santé a des règles qui datent de 1895, je crois, et qui portent sur la mise en quarantaine de certains animaux. Oui, il faudrait faire un ménage dans certains règlements.
Ce qui nous préoccupe, c'est que lorsqu'on se met à compartimenter les questions, on envisage les coûts ici, l'efficience là, l'efficacité ailleurs, il devient assez facile de dire que cela coûte trop cher et que ce n'est pas très efficient. Alors on réduit les coûts, on fait des compressions, on procède à des recouvrements et on se retrouve avec un système boiteux.
Ce qui nous préoccupe, c'est qu'on a eu tendance à cloisonner l'examen. Si quelqu'un réussit à voir ces trois aspects d'un coup, c'est fantastique, mais n'allons pas détruire un bon système de réglementation canadien, dans ce qu'il a de bon et qui fonctionne, étant donné qu'il protège la santé et l'environnement des Canadiens et maintient en place une bonne structure sociale. Il ne faut pas le détruire parce qu'il a l'air peu inefficient ici ou là ou parce qu'il produit un peu de supplément de recouvrement des coûts. Il faut arriver à un équilibre. On ne peut pas laisser pencher la balance d'un côté ou de l'autre.
Le président: Monsieur Bird.
M. Richard Bird: Je veux formuler un commentaire. En fait, c'est ce que font les économistes, si je ne m'abuse. Pour examiner quelque chose comme cela, nous devons d'abord savoir quel effet est recherché, quel programme est souhaité. Il faut ensuite trouver la façon la plus efficiente de les réaliser. Pour ce genre d'activité gouvernementale, il faut toujours commencer par décider de ce qu'on veut faire.
Dans certains ministères, des cloisonnements les empêchent peut-être d'y arriver, mais c'est la raison d'être des organismes centraux. C'est censé être leur rôle, n'est-ce pas? Mais vous avez raison, bien entendu, c'est ce que nous essayons de faire.
Le président: Dans le milieux politiques, la question du rôle du gouvernement, qu'on voudrait réinventer, est tout à fait d'actualité. Même lorsqu'on parle de recouvrement des coûts, de réglementation, de prestation de services à la population...
Est-ce qu'il y a un échange des meilleures pratiques entre les organismes, par exemple? Quelles mesures avez-vous prises pour abattre les cloisons entre les organismes? Utilisez-vous un langage convivial et simple? Facilitez-vous l'observation des règlements en offrant aux Canadiens des outils qui les y aideront. Quel genre de partenariat avez-vous avec les communautés? Je parle en termes généraux, au sujet du rôle du gouvernement.
M. Richard Neville: Je le répète, nous avons un centre décisionnel consacré uniquement au recouvrement des coûts. C'est M. Endemann qui le dirige. Il y a là une compétence qui est sollicitée quotidiennement par divers ministères, que ce soit dans le contexte de la mise sur pied d'un nouveau programme pour lequel il y a recouvrement des coûts ou pour l'examen de programmes existants pour lesquels les politiques doivent être interprétées. Ce peut être aussi pour savoir comment mieux consulter les intéressés ou, plus prosaïquement, pour le choix de la méthode de calcul des coûts.
• 1300
Je pense qu'on peut dire qu'il y a divers échanges et lieux de
discussion entre les professionnels, dans ce domaine. Nous y
contribuons par diverses réunions et par l'envoi de documents.
Je vais laisser mon collègue John Adams vous donner le point de vue du ministère. Je ne veux pas vous mettre sur la sellette, John, mais dites-nous ce que vous en pensez. Pensez-vous qu'il y a des forums ou des lieux d'échanges où les membres de votre personnel peuvent parler des questions qui les préoccupent et qui se rapportent au recouvrement des coûts?
Comm. John Adams: Je ne voudrais accorder aucun mérite particulier au Conseil du Trésor, puisque ces organismes centraux nous mettent des bâtons dans les roues, à nous des ministères responsables, qui faisons du vrai travail. Bien franchement, j'en discute régulièrement avec mon personnel.
Le président: Voulez-vous que cela soit supprimé du compte rendu?
Des voix: Oh, oh!
Comm. John Adams: Nous gardons des liens étroits avec Len et son personnel, à tous les niveaux, pour nous assurer que nous mettons en oeuvre la politique d'une manière constante, partout. Autrement, nos clients ne seront pas contents. Dans mon cas, l'industrie maritime encaisse non seulement les effets de ce que je lui impose, et ne se gênera pas pour me dire immédiatement s'il y a des incohérences ou si nous sommes moins efficaces ou moins bien organisés que d'autres organismes ou d'autres ministères. Nous nous fions beaucoup au centre pour nous garder au courant de ce qu'il faut faire, de ce qu'il ne faut pas faire, et de ce qui se fait partout ailleurs.
Le président: Comment réagissez-vous aux commentaires faits par Mme Hillard au sujet de règlements qui remontent au XIXe siècle?
Comm. John Adams: Eh bien, on en a aussi. Notre ministre est responsable de la Loi sur la protection des eaux navigables qui n'a pas été revue depuis plus de 60 ans. Cette mise à jour est en cours. Les règlements qui en découlent sont bien entendu fondés sur une loi aussi ancienne.
Tous ceux d'entre vous qui se sont intéressés à l'emploi de l'eau savent que l'aquaculture est un domaine en forte expansion au Canada et que la Loi sur la protection des eaux navigables limite cette expansion. Nous travaillons le plus rapidement possible pour apporter les changements nécessaires, mais chaque changement que nous faisons pour contenter un groupe a inévitablement des effets secondaires, et parfois négatifs, sur d'autres groupes. Si nous adaptons la Loi pour faciliter l'aquaculture, cela aura une incidence sur les gens qui sont plus près de moi, soit les propriétaires de bateaux, qu'il s'agisse de bateaux de plaisance ou de bateaux commerciaux.
C'est donc un exercice délicat constant. En général, les changements sont demandés par notre clientèle, les personnes touchées. Nous ne cherchons pas à apporter des changements à moins que quelqu'un nous dise qu'un changement est nécessaire. J'ai reçu beaucoup de demandes de ce genre au sujet de la Loi sur la protection des eaux navigables. Nous comptons sur les personnes touchées pour nous faire comprendre qu'il faut bouger.
Le président: Si nous avions une commission sur les tracasseries administratives, qui se concentrerait sur la création d'une économie plus efficace à l'échelle nationale, sur de meilleurs services à la population, des services axés sur la clientèle. Cela donnerait une orientation aux travaux du comité, visant à mettre à jour les règlements au Canada.
Partout où je vais, au Canada, il y a toujours quelqu'un qui vient me dire qu'un règlement est insensé ou qu'il n'est pas applicable. Compte tenu du fait que notre société est axée sur la technologie, que nous vivons dans une nouvelle économie où les gouvernements voient les citoyens comme des clients, je pense qu'il faut procéder à une réforme de la réglementation, pour moderniser le système. Ce serait fantastique si nous pouvions annoncer aux Canadiens que nous avons fait le ménage dans nos livres, dans 20 ou 30 p. 100 des règlements et que nous sommes maintenant à jour.
Je ne sais pas quelle est votre réaction à ce genre de proposition. J'aimerais bien la connaître.
M. Richard Bird: Ma réaction est double. À mesure qu'on vieillit, on constate avec plaisir qu'il n'y a pas de tendances, que ce sont plutôt des cycles. Nous avons déjà vu cela auparavant. Avant que vous mettiez tous vos oeufs dans ce panier-là, je vous suggère de voir ce qui s'est fait dans le cadre du dernier examen très détaillé et très approfondi, qui a été fait au gouvernement fédéral il y a une vingtaine d'années, et que vous jetiez un coup d'oeil sur les merveilleux résultats de ce travail.
Deuxièmement, au sujet de ces nombreux règlements et de ce que vous voulez en faire, cela me rappelle une simplification fiscale; déjà, vous voulez que je passe à autre chose. Au premier abord, cela semble une bonne idée, tout le monde est emballé, c'est facile à vendre, mais quand on s'y attaque vraiment, qu'on commence à y regarder de près, on voit que c'est incroyablement difficile à réaliser, précisément pour les raisons qu'a si bien données M. Adams: le bonheur de l'un fait le malheur de l'autre. Je suis protégé contre vous mais cela signifie bien entendu que vous m'empêchez d'avancer. C'est l'effet de bon nombre de ces règlements.
C'est une sorte de codification législative et administrative du système politique, qui change et qui évolue avec le temps, et dont quelques restes traînent ici et là. L'ancienneté d'un règlement ne signifie pas qu'il est mauvais, ni non plus qu'il est bon. J'espère que ce commentaire ne vous semblera pas trop politique, mais il est peu probable qu'un secrétariat sur les tracasseries administratives à Ottawa soit bien plus efficace que celui de Toronto.
Merci.
Comm. John Adams: J'aimerais formuler un commentaire, d'ordre plus théorique qu'autre chose. On me demande, après mes 40 années de travail pour le gouvernement, quel est le plus grand changement, qu'est-ce qui rend la vie intéressante et plus complexe et difficile. On me pose la question parce que je suis sans doute un des doyens de notre ministère assurément. Je vais vous le dire. C'est le contact avec les citoyens. C'est un défi phénoménal, particulièrement pour quelqu'un comme moi qui a été pendant une éternité un bureaucrate anonyme. Vous n'êtes plus anonyme; vous y êtes désormais confronté chaque jour.
Selon le point de vue, on peut se dire que ce sont les frais qui y ont contribué. Parce que les gens paient, ils parlent. Et c'est à vous qu'ils veulent parler. Je consacre énormément de temps à traiter avec les gens, et c'est ce qui va susciter des changements. Ils vont régulièrement s'en prendre à nous, certainement à moi, pour ce qui es des questions maritimes. Et nous ne pouvons pas nous défiler, ils sont là, ils nous parlent directement.
Bien honnêtement, c'est un défi assez particulier pour nous, et nous comprenons certainement ce que vous vivez, puisqu'ils s'en prennent plus souvent à vous qu'à nous, étant donné que vous êtes davantage en contact avec le public. Mais je crois que c'est ce qui sera le plus efficace, probablement que, sauf votre respect, une démarche comme celle que vous venez de présenter. Les gens sont là, et ils s'en occupent; ils sont mobilisés et on ne peut les éviter. C'est particulièrement vrai dans mon domaine, où il y a beaucoup d'entreprise qui sont plutôt modernes. Elles se modernisent de plus en plus et se font volontiers entendre dans des forums publics comme votre sous-comité.
Le président: Et à votre avis, où se font-ils entendre?
Comm. John Adams: Pour vous donner un exemple, l'an dernier, pour la première fois, il y a eu en cette ville une journée des Maritimes, pour que les gens des Maritimes aient davantage d'importance politiquement. On a fait venir bon nombre de PDG et on leur a obtenu des audiences auprès d'une brochette de hauts fonctionnaires et de ministres. Au fait, ils étaient ici, devant vous, il y a une semaine environ. Il n'y a pas si longtemps, ils ne seraient pas venus. De nouvelles associations ont été mises sur pied. Il y a ici même une Association des armateurs canadiens. La Chambre de commerce des Maritimes est représentée ici. Ils savent désormais beaucoup mieux comment faire connaître leur position et sont très bien intégrés au... Comme le ministère est régionalisé, à tous les niveaux, il nous a fallu créer des groupes de contact pour qu'ils puissent venir nous présenter leur position.
Le président: Je ne comprends pas, puisque essentiellement, ces groupes se présenteraient devant notre comité, ou devant un autre comité de la Chambre, ou un comité spécial qui examinerait la question de la réglementation au Canada. Ces groupes auraient une occasion de s'exprimer, tout comme à ce comité-ci.
• 1310
Là où je veux en venir, c'est qu'il faut donner aux gens l'occasion
de s'exprimer. Quand ils vous parlent, je ne suis pas au courant des
conversations téléphoniques que vous avez. J'aimerais que les faits
soient présentés devant un groupe d'élus qui sont responsables, en fin
de compte. Nous avons besoin de canaux pour savoir ce que disent les
gens.
Je crois qu'il y a un accord, ou du moins un consensus, sur le fait que les règlements du Canada présentent certains problèmes. Il n'y a aucun doute là-dessus.
Je ne vois donc pas pourquoi vous ne seriez pas en faveur d'une telle démarche.
Comm. John Adams: Oh, ce n'est pas que je ne suis pas en faveur de cette démarche. Que je sois en faveur ou non importe peu. Si cela ajoute à la capacité des gens de faire connaître leur position, il n'y a pas de problème. Je dis simplement que c'est peut-être moins nécessaire maintenant que par le passé. Mais je vous gênez pas...
Le président: Non. Je tiens tout simplement...
Comm. John Adams: Ah non, je ne m'y opposerai pas.
Le président: Monsieur Bird, vouliez-vous ajouter autre chose?
Au nom du comité, j'aimerais vous remercier tous d'avoir participé à cette table ronde très intéressante.
La séance est levée.