D'abord, je remercie les membres du comité et monsieur le président de nous avoir invités. J'ai quelques remarques initiale à vous adresser, et ensuite nous allons examiner les six promesses électorales visant à garantir une protection en béton pour les dénonciateurs.
Je pense que chacun de nous est conscient que la compréhension s'acquiert idéalement par l'expérience personnelle. Heureusement, la plupart des gens n'ont pas à subir l'expérience vécue par les dénonciateurs, mais c'est précisément ce manque d'expérience qui nous oblige à comprendre les éléments requis pour assurer une protection légale efficace. J'espère que pendant vos délibérations, vous comprendrez tout de même qu'il ne suffit pas de belles paroles ou d'un mécanisme illusoire pour garantir une protection mur à mur, mais qu'il faut enchâsser les mesures de protection dans les droits civils et légaux fondamentaux.
Je ne souhaite à aucun de vous d'être victime de représailles comme les dénonciateurs; aussi, j'espère que vous n'aurez pas à endurer le genre de tragédie qui peut se produire quant tout le monde garde le silence. Il y a une vingtaine d'années, 60 000 Canadiens ont contracté le VIH et l'hépatite C, pendant que le gouvernement débattait en secret pour décider quoi faire avec nos réserves de sang contaminé. Des milliers d'autres personnes soignaient les êtres chers et se tenaient à leur chevet pendant leur agonie longue et douloureuse, alors que le gouvernement se livrait à du camouflage. C'est grâce à eux que de nos jours, nous sommes guidés avant tout par des principes simples : le droit des citoyens de savoir, et le droit des employés de parler.
Le destin nous a offert des modèles de courage : le Dr Michele Brill-Edwards, le Dr Pierre Blais, les trois vétérinaires de Santé Canada. Ces gens ont brisé la conspiration tacite et rompu le silence pour alerter Santé Canada des dangers courus. Le diplomate de carrière Brian McAdam, qui est ici avec nous, et le caporal Robert Read de la GRC, ont prévenu le premier ministre des menaces contre notre sécurité nationale. Linda Merk, qui s'est battue héroïquement jusqu'en Cour suprême du Canada, nous a révélé les manigances des chefs de syndicat corrompus. Et Allan Cutler, que vous allez entendre, a dénoncé le scandale des commandites.
Le point commun de ces gens, c'est que leur carrière a été détruite ou gravement affectée, et qu'ils ont dû faire face à des poursuites judiciaires intentées par le ministère de la Justice.
J'ai commencé à prendre conscience des droits et de la protection des dénonciateurs à mes débuts au ministère des Affaires étrangères, quand je me suis mise à parler des extravagances et du gaspillage. Des résidences valant plusieurs millions de dollars demeuraient vacantes, alors que les contribuables payaient la note pour des habitations plus conformes aux goûts des diplomates. J'ai alerté la haute direction et le ministre, mais je me suis fait lapider et mon existence a été détruite.
En tant qu'avocate, je ne pouvais pas ignorer le traitement inacceptable réservé aux fonctionnaires consciencieux. Les employés du gouvernement avaient besoin d'une voix pour s'exprimer, de conseils et d'informations, et c'est comme ça qu'a débuté l'Initiative FAIR .
À présent, notre organisation non partisane et sans but lucratif fonctionne grâce au dévouement d'un groupe croissant de bénévoles, et nous avons une dette de reconnaissance envers nos conseillers, notamment l'honorable David Kilgour, M. Gérard Seijts du Ivey School of Business et M. David Swann, député à l'assemblée législative pour Calgary. Notre mission est triple : aider les dénonciateurs, informer les citoyens au sujet de leur rôle indispensable dans la lutte contre les actes répréhensibles, et fournir des commentaires pour la mise au point de lois efficaces.
J'ai appris une chose : au plan social, nous devons absolument compter sur un flux continu de renseignements fiables transmis par des initiés pour combattre les abus qui menacent les intérêts publics. Il y a énormément de bonne volonté parmi la population canadienne, mais les gouvernements sont plus réticents à adopter des mesures de protection poussées.
La démarche consultative du nouveau gouvernement nous encourage beaucoup, et nous rendons hommage pour son ouverture d'esprit à Pierre Poilievre, le secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor. Cette attitude marque un changement appréciable par rapport au précédent gouvernement, vu que, par exemple, le ministre Lloyd Axworthy m'avait menacée de poursuites en libelle pour avoir osé dire que quelque chose n'allait pas.
Examinons maintenant les six aspects de la promesse électorale. En guise de comparaison, je vous suggère la politique de protection des dénonciateurs de l'Organisation des États américains, dont le Canada fait incidemment partie, bien sûr. Cette organisation a ratifié la convention interaméricaine contre la corruption. Nous devrions nous inspirer de ce modèle.
La première promesse consiste à donner au commissaire à l'intégrité dans la fonction publique les pouvoirs nécessaires pour faire respecter la loi.
Nous savons que les employés gardent le silence pour deux raisons : par crainte des représailles, et parce qu'ils croient que ça ne changera rien. Pour contrecarrer cette attitude, il faut accorder au commissaire le pouvoir d'ordonnance, ce que malheureusement le projet de loi C-11 ne fait pas. En ce qui concerne les actes répréhensibles, le commissaire peut uniquement faire rapport au Parlement et recommander des mesures; mais nous savons que des bureaucrates et des ministres ont rejeté les réclamations de mandataires du Parlement, notamment le Vérificateur général et le Commissaire à l'information.
Pour ce qui est de la protection des dénonciateurs, le commissaire, même s'il n'a pas le pouvoir de réparation, peut soumettre la cause à un tribunal. Invariablement, c'est le début d'une série de procédures longues et coûteuses pour les dénonciateurs, qui n'ont pas le moindre contrôle sur leur cause. Par définition, les droits impliquent l'autorité nécessaire pour les faire respecter, mais l'application des mesures prévues par ce projet de loi échappe au contrôle des victimes de représailles.
Au contraire, l'ombudsman selon le modèle de l'OEA a de tels pouvoirs de correction et de réparation. Pour remplir cette promesse électorale, il faudrait pour le moins que le projet de loi oblige le ministre ou le directeur d'un service ou d'une société ou agence de la Couronne en défaut à prendre rapidement des mesures correctives si le Commissaire le recommande.
Le deuxième point est la nécessité de protéger tous les Canadiens qui signalent des torts commis au gouvernement, et pas seulement les fonctionnaires. C'est un aspect important. Il y a beaucoup de précédents, de plus en plus nombreux, qui font en gros que la protection offerte s'applique aux renseignements dévoilés par les dissidents, plutôt qu'à leurs conditions d'emploi. C'est le cas pour le modèle de l'OEA et la False Claims Act aux États-Unis. Pour remplir cette promesse électorale, il faudrait au minimum stipuler dans le projet de loi C-11 que chaque fois que le gouvernement use de représailles contre un citoyen qui s'est prévalu de sa liberté d'expression, cela constitue une violation de ses droits fondamentaux.
Le troisième point avec lequel nous sommes d'accord, c'est l'idée de ne pas faire d'exception pour les sociétés d'État et les autres organismes gouvernementaux. Notre position là-dessus est claire. Aucun ministère, aucune agence ou société d'État ne doit être soustrait à la loi. Tous ces organismes doivent bien gérer l'argent des contribuables.
Le quatrième point est la nécessité de rendre publiques rapidement les informations révélées par le dénonciateur. À cet égard, on peut affirmer que le projet de loi C-11 rate complètement la cible. Il oblige le commissaire à garder secrètes toutes les informations recueillies au cours de son enquête. Cela exclut aussi les demandes d'accès à l'information. En fait, cette exigence est plus draconienne que les dispositions proposées par le gouvernement Libéral. Cette clause, Inexcusable et digne d'Orwell, fait en sorte que le projet de loi C-11 va plutôt à l'encontre de l'idéal de transparence. Concrètement, tout dénonciateur agissant conformément à la loi se bâillonnerait lui-même et deviendrait prisonnier du secret, au moment même où la population a le droit de savoir. La loi américaine et le modèle de l'OEA contiennent des dispositions anti-bâillon. Par conséquent, le projet de loi C-11 doit permettre l'accès à tous les renseignements obtenus par le Commissaire, en vertu de la Loi d'accès à l'information; en fait, les rapports et les documents devraient d'après nous être mis dans un registre public.
Le cinquième point est primordial. Il touche la capacité pour les dénonciateurs de s'adresser aux tribunaux et d'obtenir des conseils juridiques. Là encore, le projet de loi C-11 laisse à désirer.
La première partie traite du rétablissement du droit d'accès aux tribunaux, un droit que le gouvernement Libéral avait retiré en 2003, par le biais de la Loi sur la modernisation de la fonction publique. Selon des gens bien informés au ministère de la Justice et au Conseil du Trésor, cette décision est due au fait que le gouvernement était gêné que des fonctionnaires le poursuivent pour harcèlement et abus de pouvoir. Bien qu'il prévoie la création d'un tribunal spécial pour s'occuper des cas de dénonciation, le projet de loi C-11 ne rétablit pas le droit de poursuite devant les tribunaux.
Je vais être claire. Pour confirmer la valeur d'une loi corrective, on devra au moins assister pendant un certain temps à des procédures judiciaires caractérisées par l'ouverture, la transparence, une application régulière des règles, l'accessibilité publique et la diffusion des délibérations. Je dois dire que sur ce plan, le projet de loi C-11 amène au bout du compte une régression des droits des dénonciateurs canadiens, et qu'il revient à institutionnaliser ce recul.
Soulignons qu'aux États-Unis, où les lois en matière de dénonciation, qui remontent à 40 ans, ont été grandement améliorées, les dénonciateurs peuvent se présenter en cour la tête haute et obtenir un procès devant jury, ce qui leur permet d'être jugés par les citoyens, autrement dit les bénéficiaires de leurs actions.
L'autre aspect touche la représentation par avocat. Quelle cruelle désillusion si les victimes n'ont pas les moyens de faire respecter leurs droits. Il faudrait pour le moins que les dénonciateurs aient droit à des conseils juridiques au même titre que les contrevenants qui profitent des deniers publics pour leur défense. Je vous prie d'inviter le ministre de la Justice à expliquer quelles mesures il a prises pour mettre fin aux abus dont sont actuellement victimes les dénonciateurs en cour. La somme de 1 500 $ pour les frais juridiques est tout à fait insuffisante.
Très brièvement, je veux parler enfin du versement de compensations monétaires aux dénonciateurs. Cette question a alimenté beaucoup de débats durant la campagne électorale. Je tiens à apporter quelques éclaircissements. Il ne faut pas confondre une poursuite en dommages-intérêts avec l'octroi de récompenses monétaires. Notre point de vue est que les victimes de représailles doivent avoir le droit d'intenter des poursuites pour obtenir des dommages-intérêts exemplaires et compensatoires. L'idée est d'accorder des gratifications pour aider à panser les plaies des représailles.
Il y a aussi l'idée de permettre aux dénonciateurs de toucher une part de l'argent récupéré des individus qui ont fraudé le gouvernement. J'ajouterai que M. Poilievre a indiqué son intention d'examiner la chose, et nous l'appuyons sur ce plan. Je veux simplement dire la société s'en portera mieux si les affaires de lutte contre la corruption deviennent plus rentables que la corruption elle-même.
En conclusion, j'estime que votre comité a une occasion historique d'offrir une protection efficace aux employés qui, grâce à leur courage individuel, servent nos intérêts, ceux de la population. Comment justifier l'attribution à nos fonctionnaires de première classe, des droits de deuxième classe prévus par le projet de loi C-11? Ce n'est pas le moment de faire de l'opportunisme politique. Les décès à Walkerton, le scandale du sang contaminé et la tragédie d'Air India démontrent de façon éclatante ce qui risque d'arriver quand on néglige de promouvoir et de protéger la liberté de parole.
Je vous recommande fortement d'entendre le témoignage des représentants du Government Accountability Project à Washington. Cet organisme est le chef de file mondial par rapport aux lois et aux droits des dénonciateurs, pierre angulaire dans l'édifice des responsabilités gouvernementales. Cette fois-ci, nous devons agir de la bonne façon et sans se hâter sous prétexte de respecter des échéances arbitraires, car c'est ce que veulent les Canadiens.
Je vous remercie, et j'attends vos questions.
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Merci, Madame Gualtieri.
Je pense que la plupart, sinon la totalité d'entre nous ici présents, comprennent que l'horrible expérience que vous avez vécue accentue beaucoup les pressions pour que le Canada adopte une loi visant à protéger les dénonciateurs, une solution concrète et efficace comme vous l'avez exposée, et qui en plus servira l'intérêt public en général. Je pense qu'à ce stade-ci, les projets de loi C-11 et C-2 témoignent de votre courage, de votre détermination et de votre persévérance au cours du processus. Nous vous en remercions, et merci pour votre exposé très éclairant.
J'ai quelques questions à poser au sujet des points 1 et 4.
En ce qui concerne le pouvoir du commissaire de faire respecter la loi, malgré le modèle d'ombudsman de l'OEA que vous avez évoqué, la plupart des mécanismes du genre ne confèrent pas les pouvoirs d'application de la loi et d'imposition de sanctions, parce qu'en régime parlementaire, le responsable en question est certainement un haut fonctionnaire du Parlement chargé concrètement d'aider les députés à connaître la vérité et à la rendre publique, et d'obtenir des correctifs quelconques, soit en embarrassant le gouvernement, soit en proposant des mesures législatives directes.
Évidemment, le hic, et je soupçonne que le gouvernement avait cette idée derrière la tête avec le projet de loi C-2, c'est qu'un haut fonctionnaire du Parlement n'est pas élu et n'agit pas dans le cadre d'un processus quasi judiciaire d'application de la loi. Je suis donc porté à croire que la suggestion d'un tribunal, même si elle risque d'entraîner du retard, vise à rendre cet aspect des procédures judiciaires plus juste pour la détermination des faits puis l'imposition de sanction.
J'admets votre objection à propos du retard et de la nécessité d'accélérer les choses, mais j'ai l'impression que c'est ça qui se passe, et j'aimerais avoir votre opinion là-dessus.
L'autre aspect, que vous avez d'ailleurs mentionné, est le fait qu'en deuxième choix, si le Parlement ou le gouvernement n'a pas l'intention d'appliquer une recommandation du commissaire, il faudrait alors que le gouvernement, de façon délibérée et rationnelle, en explique la raison au Parlement. À mon avis, ça va dans dans le sens des règles appliquées pour les fonctions d'ombudsman partout dans le monde, et certainement au Canada, et cette expérience pourrait être utile.
Je vais vous donner deux exemples de résultats très efficaces : premièrement, d'après ses statuts, la Commission du droit du Canada est un organisme de réforme du droit public quoique indépendant, mais quand cette commission remet un rapport au ministre de la Justice, il faut le soumettre aussi au Parlement, et le ministre doit alors répondre raisonnablement aux interrogations des parlementaires dans un laps de temps donné.
De plus, les gouvernements provinciaux imposent des clauses compensatoires en justice voulant que quand une commission indépendante a recommandé une hausse des dédommagements — et je doute qu'une commission ait jamais recommandé une baisse de la rémunération des juges — si le gouvernement refuse de l'appliquer, là encore, il doit donner au Parlement une réponse rationnelle qu'un tribunal pourra vérifier pour voir si elle est fondée. Ça fait donc un modèle supplémentaire.
L'autre point que je veux aborder brièvement concerne les restrictions à la diffusion des renseignements. J'admets certainement, comme vous, qu'il faut examiner très soigneusement les restrictions accrues dans le projet de loi C-2, des exemptions en réalité, qui limitent la diffusion prescrite par plusieurs dispositions. Il faudrait au moins que l'intérêt public prime ou bien le consentement, au minimum le consentement, mais l'intérêt public devrait aussi prévaloir, en plus d'une démonstration des torts causés, pour que ce ne soit pas simplement une exemption générale.
Je souhaiterais que vous répondiez à ces remarques.
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Merci de vos questions.
Je dois avouer que vous êtes bien plus que moi un expert du régime parlementaire. Je sais, j'ai des amis qui ont vanté le travail que vous faites.
Le point à souligner ici, c'est qu'on doit envoyer un signal clair que des mesures correctives s'appliqueront probablement. Et je pense que le projet de loi C-1... Nous les Canadiens, nous craignons que les recommandations déposées au Parlement n'aboutissent à rien. J'ignore les modalités, et c'est difficile de décider si un haut fonctionnaire du Parlement aura le droit d'émettre un décret ou une ordonnance qu'un ministre serait obligé de respecter. À franchement parler, ce sont des problèmes pour lesquels je n'ai pas de réponse toute faite. Mais à mon avis, l'exigence minimum est que les ministres devraient être tenus plus responsables de quelque manière aux termes de cette loi, et ça ne paraît pas encore le cas. On devrait au moins exiger qu'ils expliquent pourquoi des mesures correctives n'ont pas été prises.
Quant à la diffusion de l'information, je pense que c'est un enjeu crucial, parce qu'en gros, ça écarte carrément l'objectif des dénonciations, qui visent ultimement à promouvoir l'intérêt public. Ça me semble très dangereux. Pendant l'enquête de la Commission Gomery, à laquelle les Canadiens se sont beaucoup intéressés, le premier ministre a rendu publics une grande quantité de documents du Cabinet qui nous en ont beaucoup appris. C'est un autre aspect que je n'ai pas abordé.
Je vais fournir aux membres du comité une analyse détaillée qui indique point par point les clauses nécessaires pour obtenir une loi qui protégera efficacement les dénonciateurs.
Je crois qu'il ne faudrait pas accorder une exemption absolue pour les documents du Cabinet et les renseignements assujettis au secret professionnel des avocats. Je pense que ce serait dangereux. On a assisté à la dégringolade d'un président aux États-Unis à cause de la publication d'informations qui, au bout du compte, auraient dû rester secrètes. Je pense que les citoyens avaient le droit de savoir ce qui se passait. Pareillement, les Canadiens ont le droit de savoir ce qui s'est passé dans le scandale des commandites.
Enfin, il n'y a pas d'exemptions que le commissaire serait tenu d'évaluer; il a un devoir à remplir. Selon la formulation, « il doit garder secrets » tous les documents recueillis, un passage à modifier à mon avis.
Merci.
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Joanna, ça fait plaisir de vous voir ici aujourd'hui.
Je tiens à clarifier certains points qui me paraissent importants.
Tout d'abord, le tribunal se composera de juges de la Cour fédérale et de juges de la Cour supérieure des diverses provinces. Par conséquent, ce n'est pas simplement une bande de favoris du premier ministre triés sur le volet. C'est un groupe de juges. Et ces gens qui ont foi dans l'indépendance de l'appareil judiciaire doivent par le fait même croire en l'indépendance de ce tribunal, parce qu'il est formé de juges.
D'autre part, ni le premier ministre, ni le gouvernement ne pourra décider quel juge siégera dans une cause donnée. Cette décision relève du chef du tribunal, lui-même un juge. Je répète, si nous croyons en l'indépendance de l'appareil judiciaire, il faut croire forcément à l'indépendance de ce tribunal.
Deuxièmement, le bureau du commissaire aura le pouvoir d'émettre des ordonnances. Il pourra aussi imposer des sanctions, et accorder réparation. Ce sont là deux pouvoirs que n'aurait pas eu le bureau avec le projet de loi C-11, mais qui lui sont consentis par la Loi sur l'imputabilité, puisque le bureau du commissaire englobe le tribunal, qui lui possède de tels pouvoirs.
J'ai avec moi le libellé des articles : l'article 21.7 proposé confère le pouvoir de réparation; et l'article 21.8 proposé donne le pouvoir d'imposer des mesures disciplinaires, autrement dit le « tordage de bras ». Le tribunal pourra sanctionner directement un individu qui traite de manière abusive des dénonciateurs, par des procédures totalement apolitiques, complètement distinctes du bras politique et du bras exécutif du gouvernement. Tous ces pouvoirs sont accordés à un groupe de juges indépendant.
Or, ces pouvoirs étaient inexistants dans le projet de loi C-11 précédent, mais ils s'appliqueront avec cette nouvelle Loi sur l'imputabilité. Vous admettrez sans doute que le fait d'octroyer à un groupe de juges indépendant les pouvoirs de sanction et de réparation est une amélioration comparativement au projet de loi précédent des Libéraux, qui laissait ces pouvoirs entre les mains des politiciens et des hauts fonctionnaires.
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Merci, monsieur le président.
Je ne vais pas vous parler longuement de mes expériences. Il suffit de rappeler que j'ai plusieurs fois discuté avec Joanna. Nous avons vécu une expérience très semblable, et je sais ce qu'est l'isolement. Nous portons tous les deux les cicatrices de la bataille, même si vous ne pouvez pas les voir.
Je veux entre autres mentionner que je suis ici au nom de l'Association des droits civils. Je fais partie de cette association, et j'ai collaboré aussi avec eux pour préparer mes commentaires. C'est à ça que je veux en venir.
Je désire vous remercier. Je tiens à remercier tous les membres du comité de nous avoir écoutés et laissés parler encore une fois d'un sujet extrêmement passionné et qui nous touche particulièrement, un sujet qu'on ne peut pas esquiver. Nous n'avons pas pu l'éviter au départ, et il demeure incontournable.
Je veux d'abord faire des remarques à propos du projet de loi C-11, qui est le précurseur de celui-ci. J'affirme ouvertement que ledit projet de loi C-11 était fondamentalement et irrémédiablement vicié. Et je le crois réellement.
Les membres du comité qui a précédé le vôtre ont essayé très fort d'ébaucher un bon projet de loi, mais selon le point de vue d'un dénonciateur, ils ont carrément échoué. Mais ils ont fait de gros efforts, et nous les en remercions.
Quand je lis le projet de loi, et je sais que c'est aussi le cas pour Joanna, c'est dans l'optique de quelqu'un qui se demande s'il aurait été protégé. Et le projet de loi C-11 ne répondait pas à mes interrogations, il y avait plusieurs omissions.
La deuxième question que je me pose en lisant ce texte de loi, c'est si les modifications apportées représentent une amélioration. Le projet de loi C-2 contient des améliorations, mais il reste encore des failles importantes à corriger.
Ces modifications n'ont pas répondu à deux de mes objections vis-à-vis C-11. Premièrement, le projet de loi, et c'est un aspect crucial du point de vue d'un dénonciateur, laisse le fardeau de la preuve au dénonciateur en matière de représailles. Il suffit pour les responsables de prétendre que les cas sont différents, et que c'est au dénonciateur que les deux situations sont reliées, autrement dit la dénonciation et les représailles. Il n'y a aucun délai prescrit faisant que quand la période achève, les gestionnaires doivent accepter leur responsabilité, et que le fardeau de la preuve leur revient. À mon avis, c'est une faille majeure dans le projet de loi.
Ma deuxième objection, et le projet de loi ne vise pas à corriger cette situation, c'est qu'il s'applique uniquement aux fonctionnaires fédéraux et aux gens qui travaillent en relation avec le gouvernement. Il ne protège pas tous les citoyens canadiens.
Réfléchissez un instant : si Enron avait été une compagnie canadienne, une telle loi n'aurait protégé personne, elle n'aurait aidé personne à oser dénoncer les affaires louches chez Enron. Il n'y a pas de protection. En fait, c'est surtout la loi américaine Sabarnes-Oxley datant de 2002 qui protège au Canada les dénonciateurs en dehors du gouvernement fédéral. Donc, c'est une loi américaine qui nous protège, parce qu'il n'existe pas vraiment de loi canadienne pour nous protéger.
Dans le cas du projet de loi C-11, j'ai déclaré publiquement qu'une loi est dans le meilleur des cas une mauvaise loi. Et selon moi, le projet de loi C-11 était une mauvaise loi.
Avec les modifications que j'ai constatées dans le projet de loi C-2, on est encore loin de la perfection. Je ne l'approuve pas sans réserve, mais je lui accorde une note de passage conditionnelle. Il est certainement beaucoup amélioré.
Mon bagage d'expérience porte sur les négociations, et j'en viens aux résolutions conjointes. La formule basée sur la conciliation adoptée dans ce projet de loi coïncide exactement avec les méthodes de résolution des conflits que je connais bien et que j'apprécie, et qui n'étaient pas prévues dans le projet de loi C-11. Ceci pour moi marque un grand pas en avant, le fait d'essayer de trouver des solutions, de ne pas laisser la situation dégénérer.
Les procédures judiciaires ont leur place, mais d'après moi, c'est une solution en dernier recours, et non une première option. Mais si tous les autres recours échouent, le dénonciateur devrait tout de même avoir le droit de poursuivre.
Je suis sûr que Joanna pourrait dire exactement la même chose, que des dénonciateurs ont communiqué avec elle et qu'elle est au courant de plusieurs incidents du genre dans la fonction publique fédérale à cet instant même. Je connais certains incidents, dans d'autres cas on m'en a parlé, et pour d'autres, j'en ai entendu parler dans le passé.
Ce problème est endémique dans les grandes organisations. Il y aura toujours des problèmes dans une grande organisation, et la quasi-totalité de ces problèmes sont ce que j'appellerais des problèmes systématiques ou des cas de gestion abusive.
Ce ne sont pas des problèmes politiques. Ces incidents deviennent des problèmes politiques uniquement s'ils ne sont pas réglés assez vite; par conséquent, si on adopte une bonne loi qui incite les dénonciateurs à agir résolument, cela permettra de régler un tas de problèmes pour n'importe quel parti au pouvoir. Ça aidera tout le monde.
J'ai lu dans le document, et chacun de vous l'a lu j'en suis sûr, que les citoyens font assez peu confiance au gouvernement. Il faut rétablir cette confiance.
La confiance a une importance cruciale pour le commissaire à l'intégrité. Si les intéressés n'ont pas confiance en cette personne, son service sera inefficace. Les dénonciateurs ont besoin d'avoir confiance en ceux à qui ils ont affaire. Ils sont isolés, victimes de harcèlement et de représailles; ils ne savent pas où se tourner et à qui s'adresser. Ils ont besoin de quelqu'un auquel ils se fient, et si le commissaire ne leur inspire pas une grande confiance, ça ne marchera pas.
Mais il faut aussi parler de l'aspect éthique. À cet égard, il y avait une disposition dans le projet de loi C-11, la clause 6, qui est restée inchangée, et je vais vous demander de la supprimer et de la modifier. Cette clause stipule que chaque ministère établira son propre code d'éthique.
Des fonctionnaires de certains ministères auraient-ils une éthique plus sévère ou moins sévère que les autres? Pourquoi auraient-ils besoin d'un code d'éthique différent? Pourquoi un code d'éthique conçu par le Conseil du Trésor ne conviendrait-il pas à tous les ministères? Pourquoi est-ce que tout le monde devrait...?
Selon moi, c'est une idée pour faire travailler du monde, c'est totalement superflu. Il suffit d'un ensemble de règles. Le projet de loi C-2 n'a pas corrigé cette disposition particulière qui se trouvait dans le projet de loi C-11; je vous demanderais de la modifier pour qu'il y ait un seul code d'éthique s'appliquant à l'ensemble du gouvernement.
J'ai d'autres observations à propos de la section du projet de loi C-2 qui traite des dénonciations, mais auparavant, je vais vous parler d'autres aspects que je connais bien et qui me tiennent beaucoup à coeur.
La partie 4 porte sur les erreurs administratives et l'imputabilité. D'après moi, c'est une grande amélioration de rendre le sous-ministre responsable des activités au Ministère et des mesures prises, y compris les mesures qui visent à exercer un contrôle interne efficace. Je trouve que l'idée de charger la personne qui assume les responsabilités légales, et pas seulement celles au plan administratif, de voir à ce que le travail soit bien exécuté, représente une excellente proposition.
Mon autre point concerne les fonctions d'approvisionnement et de passation des contrats. Je suis spécialisé en approvisionnements. L'idée d'un vérificateur des approvisionnements est intéressante; mais je vous demanderais d'envisager la possibilité d'élargir son mandat d'une façon comparable à celui du Vérificateur général, et de permettre à ce responsable de vérifier les méthodes d'approvisionnement dans tous les services gouvernementaux et les sociétés d'État.
Dans l'ensemble de l'appareil gouvernemental, on observe des cas d'actes abusifs involontaires et de la méconnaissance. Des problèmes se posent pour une foule de raisons. Le titulaire de ce poste devrait être apte à examiner tous les contrats qui mettent en cause des fonds gouvernementaux, et pas seulement les principaux ministères, c'est-à-dire ceux du gouvernement fédéral; je vous prierais donc d'au moins envisager la possibilité d'élargir le mandat de ce commissaire, et si nécessaire, de lui donner le statut de haut fonctionnaire du Parlement, choisi par le Parlement et relevant du Parlement. Je n'aurais aucune objection à cela.
Nous allons maintenant passer au projet de loi C-2, puisque j'ai dit tout ce que j'avais à dire sur le projet de loi C-11.
Je souhaiterais que l'on ajoute dans le préambule une déclaration à l'effet que les fonctionnaires ont l'obligation de signaler les actes répréhensibles quand c'est dans l'intérêt public. Si c'est l'objectif du projet de loi, il faudrait alors l'indiquer expressément au début, parce qu'en lisant le préambule, je ne saisis pas le but premier du projet de loi. C'est simplement un énoncé de faits.
Je vais lire encore quelques-uns des points dont je voulais parler. Je ne lirai pas tout. J'ai demandé au greffier de les faire traduire pour qu'on puisse plus tard distribuer le document à tout le monde, mais je vais vous les lire.
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Merci pour votre présence, monsieur Cutler. Je pense que nous sommes tous bien au courant des luttes que vous avez menées, et nous apprécions votre façon courageuse de lutter en essayant d'aider le gouvernement, franchement, pour mieux servir l'intérêt public.
Votre remarque à propos de la conciliation m'a plu. Selon moi, si on considère la gouvernance de manière systémique — vous avez mentionné vos compétences en négociations et en résolution de conflits — il faut mettre en place des mesures dans divers services gouvernementaux, et des moyens de résolution des conflits pour les négociations. D'abord et avant tout, pour épargner à tout le monde beaucoup de temps, d'argent et de maux de tête, il faut instaurer un système interne ouvert et efficace, basé sur les responsabilités, qui permet de révéler les problèmes au grand jour sans dénonciation, autrement dit sans que quelqu'un ait à sortir du système.
Aucun système n'est parfait, mais si on peut établir efficacement les bases d'un système de gestion transparent, on évitera une foule de problèmes. Ainsi, les gens se comprendront mutuellement. Il n'y aura pas d'employés frustrés en pensant que quelque chose va mal simplement peut-être par manque de connaissance vu que la cohésion gouvernementale suppose que certains aspects leur échappent, des connaissances qui les auraient rassurés peut-être s'ils avaient été informés. Mais cela favorisera une meilleure gouvernance. D'ailleurs, dans le domaine de la résolution des conflits, il faut toujours recourir à la conciliation et à la médiation, puis à un processus de détermination des faits, que ce soit par le biais d'un tribunal, d'une cour ou quoi que ce soit. Je voudrais avoir votre avis là-dessus.
La question porte sur les aspects en aval, la façon de résoudre le problème une fois que quelqu'un poussé à bout s'est senti obligé de tirer la sonnette d'alarme. Je pense réellement qu'il est nécessaire aussi d'améliorer beaucoup les aspects en amont.
Je suppose que dans un bon système de gestion interne, il y a des procédures à suivre en premier, avant qu'une personne s'empresse de dénoncer, qui lui permette de mieux s'informer et de ne pas s'exposer à des soucis ou à des représailles. Je présume que quand quelqu'un veut faire une dénonciation, et je constate que ça s'est répété plusieurs fois, il agit de bonne foi. Pour moi, c'est en quelque sorte une condition incontournable.
Je souhaiterais entendre votre avis sur ces deux aspects des structures de gestion interne qui pourraient être améliorés, et aussi à propos de la bonne foi de quelqu'un qui sort des rangs pour dénoncer des actes douteux.
:
Merci, monsieur le président. Nous sommes heureux d'être ici parmi vous et nous vous remercions de nous donner l'occasion d'assister à une séance aussi importante.
[Traduction]
Vous avez présenté mes collègues.
Nous avons préparé une déclaration, que l'on est en train de distribuer. Je ne vais pas la lire par manque de temps.
Monsieur le président, pour passer des divulgateurs à l'accès à l'information, nous avons mis en relief, je crois, certains points importants dans la déclaration qui est en train d'être distribuée. Je tiens simplement à souligner trois points principaux.
Premièrement, ce projet de loi aura d'importantes incidences sur EDC. Nous n'avons jamais été assujettis à la Loi sur l'accès à l'information, et cela constitue un changement énorme et important pour nous. Je tiens à assurer le comité que nous consacrons les ressources et la planification nécessaires, et que nous respecterons en tous points l'esprit et la lettre de ce projet de loi de la même façon que nous répondons aux demandes des gens concernant notre mission.
Nous avons déjà commencé. Nous communiquons volontairement divers résumés d'opérations. Nous avons publié des résumés de 1 200 opérations l'an dernier. Nous publions les dépenses et les frais d'hébergement des membres de notre conseil d'administration et de moi-même deux fois par année. Il ne fait aucun doute que ces renseignements seront demandés plus souvent en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.
Nous publions ces données volontairement. C'est la vérificatrice générale du Canada qui nous vérifie. Nous publions son examen spécial des vérifications d'EDC et d'autres vérifications, y compris nos programmes environnementaux, et nous publions plusieurs documents internes que nous estimons être d'intérêt public.
Cela étant dit, je suis au gouvernement du Canada depuis plus de 30 ans et j'ai travaillé avec les responsables de la Loi sur l'accès à l'information; il ne fait aucun doute que ce projet de loi constituera un changement majeur dans notre façon de fonctionner et nécessitera beaucoup de publications de documents. C'est une bonne chose et nous travaillons actuellement très fort pour être prêts.
La deuxième chose que j'ai cru devoir faire dès le départ, monsieur le président, c'est de vous parler un peu d'Exportation et développement Canada. Nous sommes une société d'État commerciale. Nous n'avons pas été assujettis à la Loi sur l'accès à l'information pendant de nombreuses années, et cela s'explique. Nous sommes assujettis à certaines dispositions spéciales de la Loi, plus particulièrement les articles 18 et 24, et non sans raisons.
En ce qui concerne le contexte de nos activités, l'année dernière, nous avons fourni plus de 57 milliards de dollars au chapitre du commerce et des investissements provenant du Canada grâce à nos programmes d'assurance, à nos programmes de prêt, à l'assurance contre les risques politiques et à d'autres événements. Nous comptons 7 000 clients répartis dans tout le pays, dans tous les secteurs de l'économie, qu'il s'agisse du secteur des ressources, de l'industrie des services, du secteur manufacturier, et 90 % de nos clients sont de petites entreprises. L'an dernier, nous avons obtenu le plus haut taux de satisfaction de la clientèle à l'égard de nos programmes. Les entreprises canadiennes apprécient ce que nous faisons et leurs attentes sont plus nombreuses, surtout compte tenu des conditions actuelles du marché mondial et de notre dollar à 90 cents.
Donc, nous sommes une société d'État commerciale très différente d'un ministère, et ce, non seulement dans la façon dont nous traitons avec nos clients. Nous sommes financièrement autonomes. Nous générons de notre mieux suffisamment de recettes pour soutenir nos activités et notre croissance sans crédits budgétaires du gouvernement. Nous n'avons pas demandé de crédits budgétaires du gouvernement depuis plus de 10 ans. Mais il y a encore place pour plus d'ouverture et de transparence quant à la façon dont nous utilisons les recettes que nous tirons de nos clients, et ce projet de loi nous obligera à le faire. C'est une bonne chose.
Non seulement nous traitons avec nos clients sur une base commerciale et nous protégeons leurs renseignements de cette nature, mais nous réalisons plus de 60 % de nos activités en partenariat avec d'autres institutions financières du Canada et du monde entier. Ces institutions sont également exploitées comme des entreprises.
Cela m'amène à mon dernier point. Nous sommes tout à fait d'accord avec l'approche du projet de loi voulant que l'on applique l'accès à l'information à EDC, mais pas à nos clients. Il est essentiel que nous continuions de protéger des renseignements commerciaux confidentiels de nos clients contre leur publication.
L'article 24 est en place. Il a réussi, pour Exportation et développement Canada, à protéger l'information que nous fournissent nos clients, et cet article nous servira encore également.
Sans cela, des milliers d'entreprises canadiennes risqueraient de perdre notre service. Nous devons obtenir beaucoup de renseignements commerciaux confidentiels de nos clients et nous assurons bien la prestation de nos services, tout en générant un rendement commercial. Nous travaillons directement avec nos clients, et nous travaillons consciencieusement également, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, avec plusieurs institutions internationales commerciales du secteur privé.
Étant donné que plus de 60 % de notre travail se fait avec des partenariats à l'étranger, ces institutions ne vont tout simplement pas faire affaire avec nous si nous ne les assurons pas de protéger l'information qu'elles nous fournissent en toute confidentialité. En fait, on nous demande régulièrement, convaincus de notre honnêteté, de signer des accords interdiant la transmission de renseignements et de confirmer que l'information n'est pas assujettie à la Loi sur l'accès à l'information.
Je peux vous donner quelques exemples de la nature de cette information. Ce pourrait être lorsque nous offrons de prêter de l'argent, ou d'assurer une entreprise à une société aérienne américaine. Consciencieusement, nous devons nous assurer que nous protégerons les investissements des exportateurs canadiens dans ce marché, et nous pouvons, à juste titre, exiger de voir les ententes de partage de codes avec d'autres sociétés aériennes commerciales aux États-Unis. Il s'agit là d'information extrêmement confidentielle, et en toute honnêteté, s'il y a quelque risque que ce soit que cette information devienne publique, nous ne l'obtiendrons pas. Cela ne fait pas que nuire à EDC, cela compromet également notre capacité d'appuyer les exportations de moteurs, d'hélicoptères ou d'avions canadiens. C'est donc là un exemple très important.
Deuxièmement, il nous arrive à l'occasion de prêter de l'argent à des sociétés étrangères. La mine de cuivre Codelco est un cas important. C'est la plus grosse mine de cuivre au monde. Nous participons au financement de Codelco pour l'encourager à acheter davantage de ses biens et services au Canada, ce qui constitue un débouché particulièrement vital pour les petites entreprises. Il y a cinq ans, Codelco n'avait que deux ou trois fournisseurs canadiens. Actuellement, nous avons accentué nos relations et nous comptons 125 fournisseurs canadiens; le Canada est le deuxième fournisseur en importance de Codelco, la plus grosse mine de cuivre au monde.
Cela ne fonctionnera tout simplement pas si on s'adresse à un groupe d'institutions financières et qu'on leur dit : « Nous voulons consciencieusement protéger notre investissement, mais nous ne pouvons pas vous assurer que les renseignements que vous nous donnez ne seront pas rendus publics. »
Compte tenu de la nature de nos intérêts et de la façon dont nous menons nos affaires, du mode de travail des entreprises canadiennes pour réussir à l'échelle internationale, les exportateurs canadiens étaient extrêmement inquiets que nos programmes soient assujettis à la Loi sur l'accès à l'information.
Compte tenu du projet de loi dont le comité est saisi, mon conseil à toutes les parties intéressées, c'est que le projet de loi met essentiellement l'accent sur l'information d'EDC et protège celle des clients.
Je suis très heureux d'avoir l'occasion de vous rencontrer et de mieux vous expliquer les raisons pour lesquelles il est si essentiel de protéger les intérêts des entreprises canadiennes en cette période très difficile pour les exportations. Mes collègues et moi sommes à votre disposition pour répondre à vos questions sur le sujet.