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Bonjour à tous les membres.
Le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international tient sa treizième séance aujourd'hui, le mardi 12 février 2008.
À l'ordre du jour, aujourd'hui, figure une séance d'information sur la situation de la République islamique du Pakistan.
Nous accueillons des hauts fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Tout d'abord, nous recevons de nouveau M. Randolph Mank, directeur général, Direction générale de l'Asie méridionale et du Pacifique, et M. Jim Nickel, directeur, Direction de l'Asie du Sud.
Au cours de la deuxième heure, nous passerons aux travaux du comité, mais nous écouterons d'abord les témoins faire le bilan de la situation au Pakistan. Il semble que nous nous sommes vus il y a deux semaines à peine. Vous voilà de retour, et nous vous en remercions.
À titre d'information pour les membres, puisque tout cela a été organisé assez rapidement, les exposés des témoins ne s'accompagnent pas de documents écrits. L'information ne sera transmise que verbalement.
Nous vous sommes très reconnaissants d'être venus avec un si court préavis, et je tenais à le signaler. Merci d'être ici, nous avons hâte d'entendre vos commentaires.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs, j'aimerais vous remercier de l'occasion que vous m'offrez de discuter du rôle actif que joue le gouvernement auprès de celui du Pakistan et d'autres acteurs internationaux clés pour aider ce pays à renforcer sa sécurité et rétablir la démocratie.
Le Pakistan est un allié dans la lutte mondiale contre le terrorisme, et nous recherchons et recevons une grande coopération de la part du gouvernement de ce pays. Bien qu'il existe un lien évident entre le Pakistan et nos objectifs en Afghanistan, j'axerai mon exposé sur le Pakistan.
Les membres du comité se souviendront que, le 3 novembre dernier, le ministre Bernier a fait une déclaration condamnant l'état d'urgence au Pakistan et exhortant le gouvernement à abroger l'état d'urgence et à annuler le nouveau décret constitutionnel provisoire. Ces mesures étaient préjudiciables au développement démocratique et à l'indépendance du pouvoir judiciaire et entravaient la possibilité d'élections libres et justes auxquelles la population du Pakistan a droit.
[Français]
Le ministre a exhorté le gouvernement à mettre fin à l'état d'urgence et l'a incité à respecter le processus judiciaire et à restaurer le pouvoir judiciaire, à se conformer au principe de la primauté de droit et à permettre la tenue d'élections parlementaires libres et honnêtes, comme prévu. Il a également demandé à toutes les parties de ne pas recourir à la violence et de respecter les droits de la personne, et affirmé que le Canada s'attendait à ce que le gouvernement du Pakistan poursuive ses efforts en vue d'améliorer la sécurité régionale.
Le Canada a joué un rôle prépondérant au sein du Groupe d'action ministériel du Commonwealth qui a émis, le 12 novembre dernier, une déclaration exhortant le gouvernement du Pakistan à respecter ses obligations conformément aux principes du Commonwealth, en appliquant les mesures suivantes:
- abrogation immédiate des mesures d'urgence et plein rétablissement de la Constitution et de l'indépendance de la magistrature et, notamment, pleine restauration des droits fondamentaux et de la primauté du droit, qui avaient été restreints à la suite de la proclamation de la l'état d'urgence;
- démission du président Musharraf de son poste de chef d'état-major de l'armée, comme il l'a promis;
- libération immédiate des chefs et des militants des partis politiques, des défenseurs des droits de la personne, des avocats et des journalistes détenus en vertu de l'état d'urgence proclamé;
- l'arrêt immédiat de toutes les restrictions imposées aux groupes de radio-télévision privés et à la presse;
- l'instauration rapide de conditions propices à l'organisation d'élections libres et honnêtes conformément à la Constitution;
Comme vous le savez, le premier ministre Harper a pris part à la réunion des chefs de gouvernement du Commonwealth qui s'est tenue fin novembre à Kampala. Il a approuvé, tout comme les autres chefs de gouvernement, la décision de suspendre la participation du Pakistan au Conseil du Commonwealth. Le Canada a joué un rôle clé dans les discussions. Il a notamment fait valoir que, même si le Pakistan avait fait certains progrès afin de respecter les cinq conditions posées par le Commonwealth, il n'était pas parvenu à toutes les honorer. En particulier, l'état d'urgence n'avait pas été levé et le général Musharraf n'avait pas démissionné de son poste de chef d'état-major de l'armée, bien qu'il en ait fait la promesse à plusieurs reprises.
[Traduction]
Heureusement, des progrès ont été marqués par la suite, et nous l'avons aussi reconnu publiquement. Le 15 décembre 2007, le ministre a fait une autre déclaration selon laquelle le Canada accueillait favorablement la levée, par le président Muscharraf, de l'état d'urgence et sa démission du poste de chef des forces armées. Toutefois, le ministre a encouragé le gouvernement du Pakistan à créer les conditions nécessaires pour la tenue d'élections libres et justes, en autorisant la surveillance des élections par un groupe judiciaire indépendant, en relâchant toutes les personnes détenues au cours de l'état d'urgence et en levant toutes les restrictions imposées aux médias.
Le drame est ensuite survenu. La principale figure de l'opposition pakistanaise, Mme Benazir Bhutto, a été assassinée lors d'un rassemblement politique. Le Canada a de nouveau appelé le gouvernement et la population du Pakistan à continuer de rejeter toute forme de violence et de résister à ceux qui cherchent à déstabiliser leur pays. Les élections ont été retardées d'un mois.
Il est important de maintenir des liens étroits avec le Pakistan compte tenu de son importance en tant que pays charnière pour la sécurité régionale. Bien que le Canada ne fasse pas actuellement partie du Groupe d'action ministériel du Commonwealth par suite d'une rotation après deux mandats consécutifs, une mission des membres du Commonwealth se rendra au Pakistan après les élections législatives du 18 février pour évaluer la situation de sa réadmission aux conseils du Commonwealth.
[Français]
Les nombreuses visites bilatérales de haut niveau qui ont eu lieu ces derniers temps, telle la visite du ministre des Affaires étrangères du Canada en janvier 2007, la visite au Canada du président de l'Assemblée nationale du Pakistan en mars 2007 et, plus récemment, la visite au Pakistan du sous-ministre des Affaires étrangères du Canada en janvier 2008, illustrent la solidité de nos relations bilatérales avec le Pakistan.
Nous continuons à encourager le gouvernement et le peuple du Pakistan à rester sur la voie de la restauration de la démocratie, notamment en organisant des élections législatives transparentes, tranquilles, libres et honnêtes le 18 février 2008.
[Traduction]
Le Canada est résolu à appuyer le retour à la démocratie au Pakistan, car il croit que cela est essentiel à la sécurité et au développement.
Nous versons 1 million de dollars à un projet relevant du Programme des Nations Unies pour le développement, afin de renforcer les processus électoraux du Pakistan, et 1,5 million de dollars au Réseau pour des élections libres et honnêtes, qui regroupe plus de 30 organisations non gouvernementales réparties sur tout le territoire pakistanais.
Comme nous le faisons dans d'autres pays, le haut-commissariat du Canada à Islamabad surveillera aussi officieusement les élections par l'entremise d'agents qui se rendront dans des régions clés du pays, le jour des élections, à condition, bien entendu, que la situation sur le plan de la sécurité le permette.
Compte tenu de l'évolution rapide de la situation politique au Pakistan, nous continuons d'examiner notre engagement bilatéral afin de déterminer le meilleur moyen de favoriser un retour à la démocratie tout en restant attentifs à nos intérêts dans la région, en matière de sécurité.
En tant que partenaire dans la lutte contre le terrorisme, le Canada continue de coopérer avec le Pakistan afin de s'attaquer au problème des mouvements transfrontaliers des insurgés entre l'Afghanistan et le Pakistan. Nous reconnaissons, en particulier, les pertes que le Pakistan a subies dans cette lutte et qui se chiffrent à environ 800 soldats. Le Canada presse le gouvernement du Pakistan de résister à ceux qui cherchent à déstabiliser leur pays. Nous sommes néanmoins préoccupés de constater que l'instabilité politique du Pakistan est exploitée par les talibans, Al-Qaïda et d'autres extrémistes qui menacent l'Afghanistan, la communauté internationale et même le Pakistan.
Le Canada appuie fermement la coopération entre le Pakistan et l'Afghanistan et croit que des relations positives sont essentielles à la stabilité de la région à long terme. Le Canada appuie sans réserve le processus des jirga de paix Pakistan-Afghanistan, et reconnaît que ce processus doit être dirigé par ces pays.
Nous continuons à soutenir les efforts visant à gérer la frontière entre le Pakistan et l'Afghanistan, notamment en fournissant une assistance technique.
Nous apportons également une aide à l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, qui travaille à la gestion de la frontière et à la lutte contre le trafic des stupéfiants, et nous avons augmenté l'aide au développement dans les régions frontalières.
Dans un geste assez inédit, le Canada a convoqué des responsables du Pakistan et de l'Afghanistan (du 30 octobre au 1er novembre à Dubaï) à un atelier destiné à renforcer la confiance et les capacités. Les discussions ont porté sur la coopération bilatérale en matière de douanes, d'immigration, d'application de la loi, de lutte contre le trafic de stupéfiants et de développement économique des zones tribales. Il n'est pas toujours facile de réunir ces parties dans la même pièce, mais elles ont semblé disposées à travailler ensemble. Nous préparons maintenant cinq ateliers de suivi qui auront lieu au printemps 2008.
L'objectif de ces ateliers est d'élaborer un plan d'action portant sur le Pakistan et l'Afghanistan et de dresser la liste des priorités en matière de renforcement des capacités. Nous considérons qu'il s'agit d'un travail important et utile, qui pourrait avoir un effet positif dans les années à venir.
Cela dit, l'engagement du Canada à l'égard du Pakistan ne se limite pas à la sécurité. L'engagement du Canada auprès du Pakistan date de plusieurs décennies et vise particulièrement différents besoins fondamentaux tels que l'éducation, les soins de santé primaires, la gouvernance et l'égalité des sexes. L'aide au développement que nous avons versée au Pakistan en 2007-2008 a totalisé 43 millions de dollars, soit 30 millions de dollars en programmes bilatéraux et 13 millions de dollars en intervention depuis le tremblement de terre d'octobre 2005.
Ces dernières années, le programme canadien d'aide au développement a connu une expansion rapide. Les programmes de l'ACDI ont récemment été élargis afin d'englober la région de la frontière pakistano-afghane située dans la province du Baloutchistan et les régions tribales du nord-ouest du Pakistan, d'administration fédérale.
Le Canada a aussi mis sur pied récemment le programme canado-pakistanais de conversion de la dette, en vertu duquel l'encours de la dette du Pakistan est converti en programmes éducatifs. Il s'agit de la plus importante initiative de conversion de dette du Canada dans le monde: elle est évaluée à environ 450 millions de dollars. L'éducation est un domaine où les besoins sont manifestes, et nous espérons que cet appui aura des effets positifs.
Je vais conclure ainsi mes observations, car je sais qu'il y aura de nombreuses questions.
Nous sommes très conscients de l'importance de l'engagement du Canada auprès du Pakistan et des efforts que nous déployons pour travailler de concert avec ce pays en faveur de la démocratisation, surtout en ce moment crucial de son histoire.
Merci.
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Je vous remercie pour ces questions. Je vais les aborder dans l'ordre reçu.
En ce qui a trait aux informations sur un accord de cessez-le-feu entre les autorités pakistanaises et M. Mehsud, il va sans dire que nous en avons entendu parler. Nous n'avons aucun moyen de confirmer ces faits de façon indépendante.
Notre message au gouvernement du Pakistan se veut sans cesse cohérent : il se doit de prendre des mesures appropriées pour mettre fin à la violence dans son pays, en particulier dans les zones tribales sous administration fédérale, et il se doit de faire tout en son pouvoir pour contrôler le nombre de talibans qui franchissent cette très importante frontière, ce qui revêt, bien sûr, une grande importance pour le Canada en ce moment.
Nous n'avons pas changé nos messages aux autorités en quoi que ce soit à cet égard. Nous attendrons qu'elles expliquent si elles veulent un cessez-le-feu et ce que cela pourrait signifier par rapport à leurs propres efforts pour atteindre ces deux objectifs sur lesquels nous insistons.
Pour ce qui est du nombre de talibans au Pakistan, je regrette, mais je ne suis pas en mesure de répondre. Je n'ai pas accès à ces chiffres. Nous sommes, il va sans dire, préoccupés. La réalité, c'est qu'il y a des talibans au Pakistan et de nombreuses personnes qui franchissent la frontière avec l'Afghanistan pour des raisons historiques associées aux coutumes tribales des Pachtounes. Ces déplacements sont énormes, comme vous le savez, et font l'objet d'une grande préoccupation. Je crois que ce nombre serait très, très difficile à évaluer.
Quant à la réconciliation nationale en Afghanistan, je ne vais pas vraiment commenter les questions ayant trait à l'Afghanistan, mais il va sans dire que nous mettons l'accent sur notre appui au processus de la jirga, ce qui consiste à réunir des gens en vue d'un dialogue. Dans la mesure où il y a une volonté d'entreprendre cette initiative, nous croyons que nous devons l'appuyer, peu importe où cette activité se déroule.
En ce qui concerne la question de M. Chan au sujet du secteur judiciaire. Je suis d'accord avec vous. Nous avons été très encouragés de voir l'indépendance du secteur, la façon dont ce dossier a évolué l'an dernier et, par la suite, évidemment, nous avons été aussi préoccupés par les mesures de répression visant le système judiciaire. Le ministre a exprimé publiquement les préoccupations du Canada à cet égard.
Ce dont vous parlez, l'image des manifestations d'avocats puis les sanctions répétées contre eux, notamment celle que vous avez vu récemment, nous préoccupe également. Ce n'est certes pas une image réconfortante pour quiconque observe, partout dans le monde, le Pakistan et espère y voir une réconciliation nationale et un développement démocratique. Ce n'est pas bon signe. Nous avons toujours prôné le respect du système judiciaire et, d'ailleurs, le respect de manifestations pacifiques.
Il est difficile d'appliquer des solutions durables dans cette région. En effet, le gouvernement pakistanais n'a pas beaucoup de pouvoir pour ce qui est d'influencer le développement des régions frontalières situées entre le Pakistan et l'Afghanistan.
L'approche que le Canada et ses alliés du G8 ont adoptée, de concert avec les gouvernements pakistanais et afghan, consiste à aborder cette situation très complexe de différentes manières et à opter pour des solutions qui touchent divers aspects. En matière de développement économique, par exemple, on fait face à des problèmes économiques et de pauvreté très aigus dans ce secteur. On parle ici d'encourager une collaboration accrue entre les gouvernements pakistanais et afghan en vue d'aider les peuples qui traversent la frontière librement et dont les familles sont situées de part et d'autre de celle-ci.
On se penche aussi sur le problème des réfugiés afghans qui sont dans cette région du Pakistan depuis 25 ans déjà, voire presque 30 ans. Encore aujourd'hui, 2,1 millions de réfugiés de l'Afghanistan se trouvent toujours dans cette région frontalière, du côté du Pakistan. Bien sûr, si on s'attaque à la question de la sécurité, il faut aborder le problème du trafic de narcotiques, qui est très grave dans cette région.
Le Canada, de concert avec les autres membres du G8 et avec la coopération des gouvernements pakistanais et afghan, bien sûr, essaie de traiter au moins quatre questions, soit le développement économique, les réfugiés afghans qui sont toujours au Pakistan après 25 ans, la sécurité, y compris les narcotiques, et une dernière que je n'ai pas mentionnée, soit le contrôle aux frontières. On envisage que la frontière demeure très ouverte, mais qu'un certain investissement soit fait à l'égard de la capacité des agents pakistanais et afghans pour que de part et d'autre et en collaboration, des améliorations soient apportées au contrôle des frontières.
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Merci, monsieur le président.
Merci monsieur Mank, merci monsieur Nickel de comparaître devant notre comité.
Permettez-moi de saisir cette occasion pour remercier le premier ministre de son leadership au sein du Commonwealth et le ministre des Affaires étrangères pour les déclarations très claires sur cette question.
Je veux également féliciter notre mission au Pakistan. J'y ai fait plusieurs visites et j'ai constaté qu'elle avait un bon accès et qu'elle utilisait cet accès de son mieux.
Je n'ai qu'un seul commentaire. Le Pakistan compte plus de 100 000 militaires déployés à la frontière. Quant à votre chiffre de 800, monsieur, c'est une sous-estimation. J'ai appris qu'il y avait jusqu'à 4 000 victimes. On ne veut pas révéler toutes les pertes de vie, car la population du Pakistan ne veut évidemment pas voir ses soldats mourir dans la guerre contre la terreur.
Je veux que vous compreniez les pressions accrues que mon collègue évoquait. Quelles autres pressions pouvez-vous exercer? Il est temps de travailler avec les gens, et je crois que le personnel du MAECI fait un travail extraordinaire en ce sens. Certainement, en matière de pressions, les commentaires du chef de l'opposition au sujet du retrait de la mission des Nations Unies en Afghanistan et au sujet d'une intervention miliaire au Pakistan, une puissance nucléaire souveraine… Comme vous l'avez souligné, monsieur, le Pakistan est un allié dans la campagne mondiale contre le terrorisme, campagne qui reçoit une aide considérable sur le plan logistique et miliaire du gouvernement du Pakistan. Ces commentaires sont insensés, imprudents et dangereux. Ce n'est pas là le type de pressions qu'il faut dans ce pays.
Cela étant dit, il est également question des élections. Le général Kayani est le nouveau chef d'état-major et il a déclaré récemment qu'il n'y aurait pas d'intervention militaire. Le personnel militaire sera présent uniquement pour aider les autorités civiles à faire respecter l'ordre public. Je crois que c'est bon signe. Les politiciens avec qui j'ai discuté là-bas espèrent des élections libres et équitables. Le nouveau chef d'état-major a indiqué qu'il n'y aurait pas d'intervention. Il y aura des urnes transparentes. Il y aura des représentants de tous les partis qui prendront les décisions et compteront les votes, au lieu que le commissaire en chef des élections annonce les résultats. Les votes seront comptés.
Avec tout ce qui se passe, c'est un pas en avant. Une fois de plus, c'est le résultat de l'engagement diplomatique et des pressions diplomatiques continus du Canada et du Commonwealth.
Voici ma question: Prenez-vous d'autres mesures? L'Union européenne (UE) a des observateurs au Pakistan. Le Canada prévoit-il y envoyer des observateurs ou comptons-nous seulement sur le déploiement de nos troupes en mission au Pakistan?
Existe-t-il un plan pour le règlement du conflit dans les zones tribales sous administration fédérale (FATA)? Il existe un plan. Le Canada envisage-t-il une participation quelconque à ce plan?
Je crois que je vais poser ma prochaine question après que vous aurez répondu à ces deux-là.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie nos invités de leurs exposés.
Nombre d'entre nous continuent bien sûr de s'inquiéter de la situation au Pakistan. En soi, la situation à l'intérieur des frontières du Pakistan est préoccupante — une puissance nucléaire dont de nombreux expatriés se trouvent ici au Canada. Cependant, je ne m'inquiète non seulement de ce qui se passe à l'intérieur des frontières du Pakistan, mais aussi de ce à quoi on a fait allusion en parlant de l'effet Doppler, pour ainsi dire, soit l'effet de la situation au Pakistan sur la région.
Notre parti a écrit au ministre. Le 6 novembre, j'ai écrit au ministre pour lui demander de prendre les mesures suivantes: exhorter le gouvernement du Pakistan à rétablir un régime constitutionnel et à tenir des élections libres et justes en temps opportun, sans l'intervention opprimante des forces militaires pakistanaises; réclamer la surveillance internationale des élections; faire part de l'expérience du Canada en ce qui a trait à la surveillance des élections; permettre aux démocrates pakistanais et aux défenseurs des droits de la personne de mettre en place des instances dirigeantes civiles, indépendantes des intérêts militaires. Nous avons aussi demandé au Commonwealth de suspendre le Pakistan de ses rangs jusqu'à ce que la démocratie ait été rétablie. Je suis ravi de dire que certaines de ces mesures ont été prises.
Pour ce qui est de l'idée selon laquelle nous puissions tenir là-bas des élections ayant la même valeur que des élections canadiennes, je ne crois pas que personne ne puisse présumer que cela se produira. Mais, vous avez mentionné que les élections feront l'objet d'une surveillance non officielle. J'aimerais savoir si nous avons fourni des ressources supplémentaires aux services consulaires déjà dans la région et, si c'est le cas, quelle est l'ampleur des ressources affectées à notre mission au Pakistan depuis le début de la répression.
Par ailleurs — c'est un point connexe, mais qui pourrait sembler un peu hors de propos —, j'aimerais savoir si on a soulevé la question du pipeline proposé actuellement, qui irait du Turkménistan à l'Inde en passant par l'Afghanistan et le Pakistan. Je soulève le tout, car nous n'en avons certainement pas discuté ici, mais c'est une question de sécurité énergétique. Je sais qu'on en parlera dans le cadre des réunions de l'OTAN, au printemps. Je crois que la majorité des Canadiens ne savent pas que la sécurité énergétique est un dossier abordé par l'OTAN.
Je me demande simplement s'il y a eu des discussions, dans le cadre de notre mission, quant aux inquiétudes liées à la sécurité découlant du pipeline proposé, qui traverserait l'Afghanistan et le Pakistan.
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Je vois. Je comprends. Merci beaucoup.
Vos inquiétudes à l'égard du Pakistan en tant que puissance nucléaire et que pays confronté à d'énormes problèmes de stabilité intérieure indiquent qu'il faut demeurer en contact étroit avec ce pays et le surveiller de près, d'autant que le Canada compte de nombreux citoyens d’origine pakistanaise touchés par la situation et qu'il a d’autres intérêts dans le pays, avec lequel il a des liens depuis longtemps.
Dans votre lettre, vous proposez des mesures. Je suis très heureux de dire que nous nous entendons sur la plupart de ces mesures. Il s'agit de mesures que nous croyions devoir prendre, et le ministre a décidé que nous devions réclamer, par exemple, une intervention du Commonwealth, qui a finalement eu lieu. La participation du pays aux conseils du Commonwealth est toujours suspendue.
Comme je l'ai dit dans mes observations, nous avons en fait apporté une contribution financière en vue d'appuyer le processus électoral. Nous souhaitons vivement un retour à la démocratie, et nous travaillons en ce sens, en plus de favoriser, comme il convient, la sécurité frontalière.
Vous avez demandé si on a fourni des ressources supplémentaires pour les services consulaires dans le cadre de la mission. Je ne crois pas que du personnel supplémentaire ait été déployé là-bas, mais nous avons examiné de très près la situation des services consulaires. Nous avons envoyé une petite équipe chargée de la planification de mesures d'urgence, comme pour nos autres missions dans le monde, pour veiller à ce que tout soit en ordre au cas où il faudrait mettre les mesures en oeuvre.
Pour ce qui est du pipeline, nous sommes bien sûr au courant des discussions, mais nous n'y participons pas. Nous attendons de voir comment la situation évoluera. La sécurité énergétique est évidemment un sujet important pour tous les pays de la région, voire tous les pays du monde ces temps-ci. Il s'agira d'une partie importante de l'avenir des pays de la région sur le plan économique.
Encore une fois, la question du nombre de soldats qui ont été déployés au Pakistan pour stabiliser les régions tribales est discutable. Les autorités pakistanaises sont la meilleure source de données exactes à cet égard, et je ne veux pas deviner ou critiquer après coup ce que l'ambassadeur, le haut-commissaire auprès du Pakistan, a dit à ce sujet.
Comme je l'ai mentionné dans mes observations, nous travaillons avec nos alliés et, évidemment, avec le Commonwealth, afin de faire pression sur le Pakistan. À notre avis, aucun effort n'a été ménagé bilatéralement, régionalement avec nos alliés ou multilatéralement, par l'intermédiaire de l'ONU, pour convaincre le Pakistan de reprendre le chemin de la démocratie.
Bien entendu, ce que font les voisins influence la situation du Pakistan, et nous les encourageons à s'occuper de leurs oignons et à laisser le Pakistan relever ses propres défis en matière de sécurité et de coopération avec les pays qui veulent l'aider de façon positive, comme le Canada.
Pour ce qui est du rôle de la Direction du renseignement interservices, comme vous l'avez dit, pour arrêter d'appuyer l'insurrection et pour ce qui est d'amener la Direction à accepter la démocratie...
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En ce qui a trait à la modification, comme je le disais avant la fin de la réunion, ma motion initiale portait sur l'offre de produits alimentaires au Canada et son efficacité au Canada. La modification proposée aborde un autre sujet distinct. Nous en élargissons maintenant la portée en y rattachant d'autres pays ainsi que des pays en développement. Cela diminue l'étude globale de ce que le Canada allait faire. Je ne l'ai pas, en principe... une autre motion présentée par le Bloc à un moment donné pour étudier les résultats potentiels, ce qui serait une étude distincte.
À mon avis, combiner cette étude avec ce qui serait une étude canadienne rendrait les choses confuses. Je n'ai aucune idée de l'orientation de cette étude et je ne sais pas à qui nous demanderions de témoigner. Faudrait-il alors que nous nous rendions à l'étranger pour déterminer si les pays en développement possèdent la capacité de production nécessaire? Nous aurions besoin de voir la structure et de connaître la situation de ces pays. Nous nous retrouvons donc avec deux aspects totalement différents de cette étude, et c'est pourquoi nous hésitons à approuver cette modification.
Étant donné mon expérience en la matière, je peux parler de la capacité de développement de ces pays. Mais auparavant, je souhaite faire un commentaire sur ce qu'a dit mon collègue du Parti libéral au sujet du Pakistan. La question de la capacité de production des pays en développement s'applique tant au Pakistan qu'à l'Afghanistan. La guerre et l'insécurité dans ces pays ont nui considérablement à la capacité de production locale.
Parlons maintenant brièvement de la culture du pavot en Afghanistan. La capacité agricole en Afghanistan s'est effondrée durant toutes ces années de guerre. Cela a permis l'essor de la culture du pavot, ce qui a nui de toute évidence à la capacité agricole dans ce pays. J'ai donc été un peu surpris lorsque le Bloc a refusé d'accepter une modification visant à discuter des questions de sécurité au Pakistan. Ces questions de sécurité ont elles aussi une incidence sur le développement, une incidence agricole dans ce pays. Tout cela fait partie du dossier.
Franchement, puisqu'il s'agissait d'une proposition du Parti conservateur, les membres du Bloc ne veulent pas l'appuyer, ce qui montre bien la nature de la politique partisane qui existe dans notre comité. Même si on propose une motion sensée, il y aura de l'opposition tout simplement par principe. Ce n'était pas justifié.
Après avoir affirmé leur opposition, ils ne se sont pas rendu compte de leur erreur. Par conséquent, les libéraux ont proposé de tenir une réunion du comité ouverte à tous les partis. Mon ami de l'autre côté est vice-président du groupe d'amitié Canada-Pakistan. Il aurait pu très facilement s'adresser à son propre groupe et demander au ministère d'agir, mais nous sommes un comité indépendant de la Chambre des communes, et nous pouvons décider quoi faire.
Le refus du Bloc d'accepter une très bonne motion sensée me laisse perplexe... nous avons communiqué avec des gens du ministère. Tout repose sur la capacité locale.
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Monsieur le président. La question est très sérieuse. Nous voulons discuter de l'aide alimentaire apportée par le Canada. Nous voulons obtenir le point de vue des intervenants canadiens. Nous voulons en savoir plus à ce sujet. L'idée d'étudier la capacité de production des pays en développement ne fait que brouiller les choses, car le sujet est très vaste.
Parlons brièvement de la capacité des pays en développement. Je veux expliquer pourquoi une telle étude est très différente de ce que je propose et pourquoi la proposition de Mme Barbot change tout.
Selon la proposition de madame... Elle tient peut-être cette idée de la convention, ce qui est bien. Je m'intéresse plutôt à l'étude que j'ai proposée sur l'efficacité du programme canadien d'aide alimentaire et sur ses répercussions sur les intervenants canadiens.
Le développement des capacités est un sujet très vaste. Chaque pays en développement est différent. Il n'y a pas d'uniformité. Comme je l'ai déjà dit, nous avons entendu des représentants du Kenya nous parler du changement climatique, qui provoque un effondrement du système agricole dans ce pays.
À Nairobi, j'ai pu constaté moi-même que l'herbe dont se nourrit le bétail, dont les vaches laitières, est contaminée. Le Canada est venu en aide à ce pays parce que la production de lait commençait à chuter, ce qui avait une incidence sur les gens pauvres de la région. C'est ce dont il est question quand vous parlez d'accroître la capacité de production, du moins pour le premier pays, dans ce cas le Kenya.
Passons maintenant à un deuxième pays, la Tanzanie. Le système de distribution s'est effondré lorsque le programme Ujama a été mis en place et que le gouvernement a forcé plus d'un million de personnes à habiter des villages collectifs. En fait, le système de distribution agricole s'est écroulé, et le pays a été obligé de commencer à importer de la nourriture. On pourrait mener une étude afin de déterminer ce qui s'est produit en Tanzanie et pourquoi la capacité de production de ce pays en développement a diminué.
En fait, parlons du Zimbabwe, le pays préféré d'un de mes collègues, qui aime en parler, et....
Une voix: Combien de temps lui laissera-t-on encore la parole?
M. Deepak Obhrai: Vous refusez de vous inquiéter au sujet du Canada, parce que vous ne comprenez pas le but de ma motion. Parlons du Canada. Parlons du Québec. De ce qui se passe. C'est parfait. Vous n'avez qu'à ne pas changer ma motion et à ne pas aborder la situation des autres pays.
Cependant, vous voulez examiner la situation des autres pays. Discutons de ce qui se passe au Zimbabwe. La dictature de Mugabe et le déplacement des agriculteurs de race blanche a complètement freiné la production de céréales alimentaires dans ce pays. Que faire? Comment aborderons-nous la question de la production alimentaire dans ces pays? Et cela ne vaut que pour le Zimbabwe.
Pour l'instant, l'Afrique du Sud a en place une politique agricole efficace, qui contribue de façon importante à l'économie du pays. Dans les pays en développement, comme l'explique Gerald Shcmitz qui a écrit un très bon livre sur le développement international, l'agriculture est le principal moteur de la croissance économique. N'êtes-vous pas d'accord? Par conséquent, l'augmentation de la capacité est essentielle. C'est d'ailleurs pourquoi l'ACDI apporte une aide alimentaire.
Je peux vous donner un très bon exemple. Quand j'étais jeune, en Tanzanie, des Canadiens sont venus et ont dit : « Nous allons vous apprendre à faire pousser du blé. » Ils sont venus avec leur programme d’aide alimentaire. Ils ont apporté de gros camions. Ils ont transformé de vastes champs de maïs en champs de blé, et cela a été considéré dans le monde comme le pire désastre engendré par un programme d’aide alimentaire dans un autre pays. Pourquoi? Parce qu’on n’avait pas la capacité locale.
Ce que je veux dire, c’est que chaque pays, sans aucune exception, a un problème. Nous ne pouvons pas tous les mettre dans le même panier et nous demander quel pays en voie de développement nous voulons choisir? Est-ce l’Égypte? Quel pays voulons-nous?
Aujourd’hui, ils se battent au Tchad. De nombreux experts qui sont revenus en parlant du Darfour disent que, là aussi, c'est une question de réforme agraire, c'est une question de capacité de production alimentaire. C’est une autre guerre importante qui sévit là-bas. Et maintenant, elle s’est étendue au Tchad. Je reviens du Mali, et c’est la même chose. Alors, de quel pays parlerons-nous, en ce qui concerne la capacité de production des pays en voie de développement?
Quand j’aurai fini, mon collègue parlera de Haïti. Il a préparé un rapport détaillé sur Haïti. Vous savez ce qui s’est passé en Haïti.
Une voix: Le comité a préparé le rapport.
M. Deepak Obhrai: Oui, vous avez raison. Le comité a préparé le rapport. Je vous le concède. Le comité a préparé le rapport, et ce rapport parlait de déboisement et d’agriculture, de perte de capacité en Haïti, ce qui est en soi un sujet important.
Nous pouvons préparer un rapport sur le Zimbabwe. Nous pouvons préparer un rapport sur chacun de ces pays. Comment diable pouvez-vous régler le problème? C’est ce que je veux savoir. Alors, à ce titre, je demande que cet amendement soit retiré.
Je n’ai même pas encore parlé de l’Amérique latine, alors parlons de l’Amérique latine. Quand j’ai présenté la motion, j’ai seulement parlé de l’Afrique. Alors qu’en est-il du renforcement de la capacité en Amérique latine?
Je n’ai parlé que de cinq pays.
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Monsieur le président, je dois dire que je suis d'accord avec mon collègue et souligner que cet amendement change radicalement la motion originale. Je donnerai deux exemples pour illustrer ce point.
Si nous examinons le cas de Haïti, nous allons déterminer sa capacité de production locale. Si nous examinons la situation dans plusieurs autres pays — nous pourrions aussi parler du Guyana —, quelle est sa capacité de production locale? Sans analyser le Guyana et comprendre la nécessité des systèmes de digues et de barrages pour avoir une capacité de production quelconque... En d'autres mots, une analyse à plusieurs niveaux devrait être effectuée pour chacune des situations. Au Guyana, comme en Hollande, la capacité de production a été créée grâce à la construction de barrages et de digues dans les océans. Et dans le cas de Haïti, quelle est sa capacité de production, compte tenu de toute l'érosion qui s'y est produite? Il faut faire quelque chose au sujet du reboisement. L'érosion entrave la capacité de production du pays.
Chaque pays peut avoir différents éléments. Si nous essayons d'analyser la capacité d'aide du Canada pour chaque pays et que nous nous enlisons en essayant d'analyser la capacité de production de denrées alimentaires de chacun des pays qui reçoit une aide, nous parlerons de deux initiatives complètement différentes. J'ai bien peur que l'amendement proposé à la motion engendre en fait une étude très inefficace comparativement à la motion initiale.
Cela dit, sans examiner chacun des différents pays, des 180 pays, il existe certainement suffisamment d'exemples pour constater que chacun d'entre eux, que chaque région, a des variables qui lui sont propres et qui devraient être examinées. Il peut s'agir, comme je l'ai mentionné, de la construction de digues ou de barrage, d'érosion, il peut aussi s'agir de besoins d'irrigation ou même d'usines de désalement afin d'obtenir une quantité d'eau quelconque pour être en mesure de produire quoi que ce soit.
Alors, si nous essayons d'inclure cet amendement, la complexité de l'étude qui en résultera sera tellement grande que l'étude en question deviendra pratiquement inefficace.