:
Tout d'abord, je vous remercie de me fournir à nouveau l'occasion de vous parler brièvement des activités de Droits et Démocratie, cette fois en Haïti. Nous ne pouvons que vous remercier tous de l'engagement de votre comité en faveur de la démocratie et de sa promotion. Ce n'est pas un hasard si c'est au Canada — au Sommet des Amériques tenu à Québec, pour être plus précis — que les chefs d'État de toutes les Amériques ont décidé, en 2001, de doter l'hémisphère d'une charte de la démocratie, la Charte démocratique interaméricaine.
Il est intéressant de noter que cette charte, qui a été adoptée — c'est un hasard — le 11 septembre 2001, proclame par son article 1, et je cite :
Les peuples des Amériques ont droit à la démocratie et leurs gouvernements ont pour obligation de la promouvoir et de la défendre. La démocratie est essentielle au développement social, politique et économique des peuples des Amériques.
Les droits et la démocratie constituent le coeur du sujet lorsqu'il est question d'Haïti. Nous suivons vos travaux, bien sûr, avec intérêt et soyez assurés qu'ils sont pour nous une grande source d'inspiration. Je me réjouis d'avoir à mes côtés Mme Danièle Magloire, qui coordonne les activités de Droits et Démocratie sur le terrain à Port-au-Prince. Vous aurez donc l'occasion de l'entendre et de lui poser des questions.
En préparant cette comparution devant vous aujourd'hui, je me suis référé bien sûr à votre rapport de décembre 2006 auquel, monsieur le président, vous avez fait allusion. Je me permettrai d'en citer trois très brefs passages.
Dans le premier, on cite M. Peter MacKay, alors ministre des Affaires étrangères. Ses mots se lisent comme suit :
Ce gouvernement a l'intention de rester en Haïti tant et aussi longtemps que ce sera nécessaire, afin de compléter les tâches de renforcement des efforts internationaux avec les autres partenaires. Notre travail n'est pas encore terminé. Le Canada y sera donc pour une période indéfinie.
La deuxième citation est une partie de la recommandation 7 de votre rapport. Elle se termine ainsi :
Le Canada devrait également prêter son concours et son soutien aux organisations de la société civile. Une stratégie d’aide à long terme avec Haïti doit inclure à la fois le gouvernement et la société civile.
La dernière citation du rapport est encore une fois de M. MacKay, et elle se lit comme suit :
Peut-être le plus grand enseignement à tirer des efforts passés [des donateurs] est que les Haïtiens eux-mêmes prennent la direction et la responsabilité de la mise en oeuvre de leur programme de développement. Pour que les Haïtiens prennent leur avenir en main, il faut absolument la participation de tous les secteurs de la société.
Je n'ai pas l'intention de vous lire mot à mot le rapport que nous avons préparé pour vous et que vous avez devant vous. Je voudrais plutôt vous faire part, de façon plus globale, des grandes lignes de nos activités dans ce pays, et vous exposer le pourquoi de l'approche que nous avons adoptée. Ce n'est pas sans raison que notre rapport s'intitule Une approche du développement démocratique en Haïti centrée sur le citoyen et fondée sur les droits.
On le sait, la démocratie est revenue en Haïti en 2006. Cela a été un processus long, difficile et courageux. La tâche du gouvernement actuel à Port-au-Prince demeure — les Haïtiens sont les premiers à le dire — énorme, et pour que cette démarche dure, il faut qu'elle produise les effets que la population attend. Cette nouvelle démocratie qui s'installe doit produire des effets concrets. Pour cela, nous estimons que cette démocratie doit être appuyée et soutenue. C'est ce que nous essayons de faire, mais surtout, elle doit être appuyée de l'intérieur du pays.
Le gouvernement — je pense que Mme Magloire pourrait vous le confirmer — laissé à lui-même ne pourra pas faire seul tout ce qui doit être fait pour que ce pays vienne à bout de ses difficultés. S'il est laissé à lui-même, il ne va pas y arriver. Ce gouvernement a besoin de l'engagement de la société civile, c'est-à-dire de toutes les forces vives qu'on peut trouver et identifier en Haïti. Il faut que tous mettent l'épaule à la roue.
Il est à noter que le gouvernement lui-même souhaite que cette société civile l'appuie et l'aide. C'est précisément ce que nous avons choisi de faire. Nous avons choisi de travailler avec la société civile, qui, je le répète, est associée au gouvernement. Je le répète, c'est dans cette société civile souvent qu'on retrouve les compétences au pays. En raison des dictatures passées, beaucoup de gens ont fui ce pays, et aujourd'hui, au moment où on se parle, si on parle d'ingénieurs compétents, si on parle d'avocats compétents, si on parle de quelque secteur que ce soit, on ne les retrouve pas dans les sphères des gouvernements ni même au Parlement. On les retrouve encore aujourd'hui dans la société civile, d'où l'importance de travailler avec eux.
Le programme qu'on a établi à Port-au-Prince il y a environ deux ans vise à permettre à cette société civile d'avoir les outils qui lui permettront de dialoguer avec le gouvernement, de développer avec le gouvernement des stratégies d'action, de développer des propositions concrètes de politiques gouvernementales. Nous travaillons donc, à la mesure de nos moyens, à faire de cette société civile haïtienne un acteur constructif. Il ne s'agit pas de développer des casseurs ou des gens qui vont aller protester dans les rues, mais de développer une société civile qui, de façon constructive et comme le gouvernement le souhaite, va travailler avec ce gouvernement.
En gros, c'est l'essentiel de notre action. Vous verrez dans le rapport une description assez précise de tous les secteurs où nous avons commencé à travailler. On peut parler du secteur du droit des femmes, on peut parler de la mise en place d'un état civil. Je sais que l'un de vos membres s'intéresse à ce droit à l'identité. Vous n'avez pas idée du nombre de gens à Haïti qui n'ont pas d'identité. Sur le plan civil, ils n'existent pas, ils sont morts. Comment peuvent-ils exercer leurs droits, faire valoir leurs droits, s'intégrer à la société s'ils n'existent pas? C'est un secteur sur lequel on s'est penché.
Parlons de l'engagement des jeunes. Nous avons emmené des jeunes Haïtiens au Canada voir comment les jeunes Canadiens participent à la démocratie canadienne par l'entremise de leur association avec les partis politiques, entre autres, mais aussi au niveau municipal et au niveau régional.
Je vais arrêter cette description de ce qu'a permis de faire le programme de façon précise et concrète puisque la description complète se trouve dans le rapport.
A-t-on été efficace? Vous vous êtes beaucoup penché sur la question; c'est un peu le point de départ des études que vous avez faites il y a deux ans. Est-on efficace? On est là depuis tant d'années, et les problèmes sont encore là. A-t-on été efficace? Le hasard veut qu'au moment où nous vous parlons, les programmes de Droits et Démocratie sont en train d'être vérifiés. La loi qui a créé notre organisation prévoit qu'à chaque cinq ans, les programmes doivent être passés en revue, sur le plan de l'efficacité, par une agence indépendante.
Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international a confié cette tâche à un organisme privé. Nous avons reçu, il y a quelques jours, les conclusions de son évaluation de notre présence en Haïti. Je me permets vraiment de vous lire à toute vitesse quelques-unes des conclusions de cette boîte de vérificateurs qui est allée voir ce qu'on fait en Haïti :
La programmation de D et D parvient à intégrer de façon convaincante les droits humains et le développement démocratique;
Les domaines sur lesquels porte la programmation de D et D sont au coeur des préoccupations nationales en Haïti ;
Certains des effets des activités de D et D se font déjà sentir parmi les groupes cibles;
Les activités de D et D contribuent à créer une interface entre les intervenants de la société civile [...]
Il semblerait donc, selon ces vérificateurs externes, que le programme accomplit ce qu'il voulait accomplir et se situe bien à cette conjoncture entre le gouvernement et la société civile haïtienne. On est à un moment charnière, on arrive au bout de notre rouleau économique, de notre rouleau budgétaire, et l'année fiscale vient de commencer.
Je dois dire à tous les membres du comité qu'on est un peu inquiets parce que la programmation qu'on a soumise à l'Agence canadienne de développement international est encore en attente d'approbation. Le petit bureau que nous avons créé pourra-t-il survivre? On ne le sait pas encore. Il y a une certaine urgence. Quoi qu'il en soit, les évaluateurs disent que le plus grand risque qui guette cette programmation serait que le bureau ne puisse survivre. C'est là un risque pour le projet, pour Droits et Démocratie et pour le gouvernement canadien.
Je vous remercie pour votre patience. Avec votre permission, monsieur le président, je vous suggérerais de donner brièvement la parole à Mme Magloire. Merci beaucoup.
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Merci à tous ceux et celles qui nous accueillent aujourd'hui. Je voudrais faire le point et présenter l'enjeu du renforcement de la société civile dans un pays exsangue comme Haïti.
Tout le monde s'accorde, y compris les communautés internationales, en particulier les États-Unis d'Amérique et le Canada, pour qualifier Haïti de pays fragile ou de frail State. Il ne s'agit pas simplement d'un qualificatif. Une fois qu'on a indexé un État comme tel, il faut pouvoir traduire ce que ça veut dire. Cela veut tout simplement dire que cet État se trouve dans l'incapacité d'assurer ses fonctions régaliennes et de mener à bien un ensemble d'actions qui lui reviennent. Cet État, même s'il va mal et qu'il est fragile, se situe dans un pays où vit une population. Cette population constitue le principal atout de ce pays. À cet égard, je crois que la population haïtienne a déjà démontré sa volonté de participer.
Je rappelle rapidement pour mémoire que le principe de la participation est inscrit dans la Constitution haïtienne. Quand il y a des bouleversements en Haïti, ils sont surtout d'ordre politique. Malgré que ce soit un pays très pauvre et misérable, il n'y a pas d'émeutes de la faim en Haïti. Chaque fois que les populations se sont mobilisées, c'était pour réclamer un droit, pour dénoncer la violation d'un droit. À cet égard, la tenue d'élections est importante et nécessaire. Cependant, il est clair que la démocratie ne s'installe pas uniquement avec des formalités. Ça induit un ensemble de pratiques pour qu'elles puissent être ancrées. Or, le moyen de s'assurer de leur ancrage est d'obtenir l'engagement des citoyens et des citoyennes.
Avant même la venue de Droits et Démocratie en 2006 de manière formelle, avec un petit bureau en Haïti, la société haïtienne avait donné le ton en réalisant un ensemble d'engagements. Je veux particulièrement donner comme modèle les organisations de femmes, le Mouvement des femmes haïtiennes pour l’éducation et le développement. Je signale au passage qu'aujourd'hui, le 3 avril, c'est l'anniversaire du mouvement social des femmes en Haïti. Ce mouvement avait pris l'initiative de chercher à développer d'autres méthodes. Revendiquer, c'est très bien, mais c'est insuffisant. Il faut être capable d'articuler des propositions non pas des plus mirobolantes ou magiques, mais qui tiennent compte d'un contexte et des capacités effectives des ressources et des potentialités du pays.
Haïti va mal; nous et nos partenaires avons nos responsabilités, mais il est bien clair que les premiers responsables du malheur d'Haïti sont les Haïtiens et Haïtiennes eux-mêmes. Conscientes de cela, les organisations ont développé des pratiques de travail avec l'État. Il va mal, mais c'est quand même nôtre État. Ce n'est pas celui de quelqu'un d'autre, c'est notre État. Il nous revient donc de le bâtir.
Encore une fois, le discours n'est pas suffisant. Il faut développer des méthodes de travail. En ce sens, lorsque Droits et Démocratie a voulu s'installer en Haïti et que j'ai eu l'honneur d'être contactée par l'institution en tant que militante des droits humains, c'est cette approche que j'ai fait valoir et qui a été acceptée. Il n'est pas question de venir créer une nouvelle petite ONG, de créer de nouvelles organisations, mais bien de travailler avec celles qui existent, pour les renforcer, et de donner les outils nécessaires pour bâtir la démocratie, qui est fondamentale. Bien sûr, il y a des résultats, mais ce qui est encore plus fondamental, c'est le processus lui-même. Comme le disent certains philosophes, la démocratie, c'est d'abord une certaine manière de voyager. Soit on fait le voyage seul, soit on le fait avec la population, de telle sorte que lorsque les appuis ne sont plus présents, les gens sont eux-mêmes en mesure de pérenniser cela. Certes, des erreurs sont commises, mais on est certain d'avancer dans la bonne direction.
En gros, voici ce que nous essayons de faire. Je voudrais simplement indiquer deux grands champs d'intervention importants. En ce qui concerne les questions de justice, au-delà des questions de procédure, il s'agit de régler les problèmes de droits humains, auxquels sont essentiellement sensibles les organisations de défense des droits de la personne, les organisations de la société civile. Il faut s'assurer que les processus électoraux et de justice respectent les droits des personnes, de telle sorte que la construction de l'État de droit soit démocratique. Il peut paraître superflu de dire cela au Canada, mais il faut un État de droit qui soit réellement démocratique.
Ma présence ici a pour but de vous demander de continuer à appuyer ce type de processus parce qu'il est porteur. Il est peut-être petit, mais comme on dit en Haïti: « ti pas, ti pas », à petits pas, mais prenons le temps de construire et d'inscrire les interventions dans la durée.
Merci.
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Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité.
Je voudrais dire tout d'abord que le Centre parlementaire est heureux de l'engagement de votre comité envers Haïti et de l'attention que vous prêtez au défi que l'Île affronte. Nous nous engageons à appuyer le travail que vous entreprenez pour veiller à ce que la politique et les programmes canadiens relèvent bien ces défis.
Le président-directeur général du centre, Robert Miller, a comparu devant vous à l'époque où vous élaboriez votre rapport La politique internationale du Canada mise à l'épreuve en Haïti, déposé à la fin de 2006. À cette époque, quelques mois après des élections locales, législatives et présidentielles qui marquaient, indubitablement, un tournant dans l'histoire du pays, le comité reconnaissait, même si c'était une étape essentielle, c'était seulement le commencement de l'établissement d'institutions démocratiques viables et d'une bonne gouvernance en Haïti, où de telles institutions ont toujours souffert du manque d'attention, de la coupure avec la population, du dysfonctionnement et de la faiblesse organisationnelle qui caractérisent les États fragiles.
[Français]
Dans cette optique, nous avons informé le comité à ce moment que le Centre parlementaire allait lancer un important programme d'appui au Parlement haïtien de 5 millions de dollars sur quatre ans, entre 2007 et 2010. Ce programme est actuellement en marche et je veux vous en parler brièvement aujourd'hui.
Cette initiative s'insère dans le thème de la gouvernance et du renforcement de l'État, un des trois axes de la coopération canadienne en Haïti, et vise à contribuer au renforcement de la gouvernance politique et du dialogue national par la création d'une capacité renforcée et permanente du pouvoir législatif. Elle comprend quatre composantes de programmation: le développement des capacités des parlementaires, soit les députés et sénateurs et l'effectif fonctionnaire parlementaire; l'amélioration des relations entre l'exécutif et le législatif par la promotion du dialogue entre ces deux corps de l'État; l'ouverture du Parlement aux citoyens et citoyennes; une gestion et un fonctionnement plus efficaces des deux chambres parlementaires.
Comme vous le savez, l'histoire d'Haïti n'a pas été favorable à l'instrument parlementaire créé lors de son indépendance, il y a plus de 200 ans, comme l'armée de la volonté du peuple. Pourtant, la Constitution actuelle, de 1987, rédigée à la fin de la longue époque autoritaire des Duvalier, a mis en place un pouvoir législatif fort. Le résultat visé à long terme du projet actuel est d'assurer que la fonction législative devienne un élément crédible, fiable, effectif, visible et présent de façon permanente dans l'espace politique national.
À la fin du projet, notre succès pourra être jugé dans la mesure où le Parlement actuel aura réussi à transférer les rênes du pouvoir à son successeur dans un climat politique positif et de respect pour la Constitution, ce qui ne s'est jamais produit en Haïti à l'époque moderne.
Le projet prévoit des points d'entrée reliés aux fonctions normatives de tout Parlement: légiférer de façon ordonnée, contrôler l'action gouvernementale et représenter la volonté et les intérêts de la population.
Sauf quelques rares exceptions, tous les parlementaires élus en 2006 sont des néophytes dans l'administration publique et dans la fonction pour laquelle ils ont été élus. Par l'entremise des présidents des deux chambres parlementaires, c'est-à-dire la Chambre des députés et le Sénat, nous renforçons la capacité des commissions respectives d'assumer leur mandat. Nous avons mis à leur disposition des espaces afin qu'ils puissent tenir leurs réunions dans une ambiance structurée qui, malheureusement, n'existe pas dans le site permanent du Parlement. Nous avons fourni du soutien et des séances de formation pour expliquer en profondeur comment fonctionnent les travaux en commission. Cette formation s'applique également aux méthodes et aux outils de travail en séance plénière du Sénat et de la Chambre des députés.
Il est important de souligner que ces activités réunissent les élus et les fonctionnaires parlementaires autour des fonctions qu'ils partagent. Créer une ambiance positive et efficace de travail conjoint est un objectif important du projet, car cette relation est traditionnellement caractérisée par le mépris, la méfiance et la tension entre les deux parties.
Actuellement, nous appuyons la commission spéciale formée pour réviser et approuver le nouveau projet de loi électoral dans le cadre des prochaines élections pour le renouvellement du tiers du Sénat et la formation des assemblées locales et départementales. Cette initiative est importante dans la mesure où elle va assurer la continuité positive du processus de restauration des institutions démocratiques entamé en 2006.
[Traduction]
Le projet cherche également à consolider le fonctionnement efficace du Parlement au niveau de la représentation politique au sein de ces instances. Comme vous le savez, Haïti n'a pas ce qu'on reconnaîtrait comme un système de partis politiques stables. Quoi qu'il en soit, il est nécessaire pour les groupes politiques de pouvoir se réunir de façon efficace au sein de l'enceinte parlementaire pour débattre et former leurs positions.
Comme première mesure vers la concrétisation de cet objectif, le projet a décidé de fournir des locaux aux caucus pour qu'ils puissent se réunir à cette fin. Je pourrais mentionner que cette mesure visant à appuyer directement les groupes politiques au Parlement, qui n'était pas prévue dans la portée initiale du projet, est conforme aux recommandations que votre propre comité a formulées l'année dernière dans son rapport intitulé « Renforcer le rôle du Canada dans le soutien international au développement démocratique ». C'est un aspect auquel le Centre parlementaire accorde une attention accrue dans le cadre de ses programmes.
En ce qui concerne la fonction représentative très importante du Parlement, et particulièrement des parlementaires, j'aimerais mentionner plusieurs activités effectuées dans le cadre du projet. Avec l'aide de Radio Nationale d'Haïti, et en partenariat avec l'ONG canadienne Réseau Liberté incorporée, une partie des séances quotidiennes de la Chambre des députés a été radiodiffusée en direct à la population depuis la fin janvier. L'objectif vise à informer le public du programme parlementaire et de la manière dont fonctionne le Parlement, dans l'espoir d'améliorer ainsi son image en tant qu'institution importante qui travaille dans leur intérêt.
C'est la première fois qu'une telle activité permanente est entreprise au pays parce que traditionnellement, seule la comparution du chef d'État ou d'un premier ministre devant l'Assemblée nationale réunie en séance conjointe était diffusée.
De plus, les responsables du projet travaillent aux côtés d'autres organismes donateurs à la planification de la tenue d'audiences du comité parlementaire dans des collectivités locales au niveau des départements. Concevoir la méthodologie et l'organisation appropriées de telles consultations publiques est un processus complexe et délicat, particulièrement compte tenu du fait qu'Haïti ne possède pratiquement aucune expérience ni aucune tradition dans ce domaine, en ce qui concerne le Parlement.
L'un des domaines que l'on examine à l'heure actuelle est celui de l'éducation, puisque le gouvernement a manifesté son intention de réformer le format juridique du système d'éducation actuel, qui devra au bout du compte être approuvé par le Parlement. De façon plus générale, il est nécessaire d'inscrire le Parlement dans le processus de mise en oeuvre de la stratégie nationale d'Haïti, récemment approuvée axée sur la réduction de la pauvreté et la croissance. Cette stratégie représente essentiellement le nouveau plan de développement national du pays et remplace la stratégie précédente de coopération provisoire. Cette stratégie sera débattue lors d'une réunion internationale pour les annonces de contribution des donateurs qui aura lieu le 25 avril de cette année.
Il importe de signaler que jusqu'à présent, en ce qui concerne l'élaboration et les consultations publiques qui précédaient l'adoption de cette stratégie, le gouvernement ne sollicitait pas la participation du Parlement en tant qu'institution, ni de ses membres en tant que représentants de populations ou de groupes locaux. Comme on est en train d'entamer la mise en oeuvre de la stratégie, y compris son intégration dans le budget national, dont l'approbation est l'une des fonctions importantes du Parlement, notre projet vise à trouver des moyens d'assurer l'évolution formelle et permanente des commissions parlementaires pertinentes dans ce domaine pour ce qui est des collectivités locales. Il s'agit d'un domaine dans lequel le Centre parlementaire possède déjà une expérience importante, acquise dans d'autres pays.
Enfin, un aspect du travail destiné à rapprocher le Parlement des citoyens porte sur la façon dont le Parlement s'organise pour traiter des questions sexospécifiques, et de façon complémentaire, pour appuyer la voix des femmes dans les affaires parlementaires. Les responsables du projet ont indiqué qu'ils s'engageaient à appuyer la création d'un caucus parlementaire de femmes d'une manière plus officielle que celle qui existe à l'heure actuelle, et de travailler en collaboration avec un tel groupe à un programme de promotion de thèmes axés sur l'égalité des sexes dans les procédures législatives et autres, et étendre entre autres ce travail à un réseau plus général sur l'égalité des sexes auquel participeront des organisations externes, aux côtés des parlementaires.
[Français]
J'aimerais remercier le comité de nous donner l'occasion d'exposer quelques détails sur le projet d'appui au Parlement haïtien que nous, au Centre parlementaire, avons le privilège de gérer. Je vais m'efforcer de répondre du mieux que je le peux aux questions des membres du comité.
Merci.
:
Bon après-midi à tous. Avant tout, je tiens à solliciter votre indulgence. Je suis arrivé hier soir de Madrid, où j'ai présenté une conférence mettant à contribution l'Espagne et le Canada et traitant de coopération avec l'Amérique latine. Je souffre un peu du décalage horaire. Chose intéressante pour ce comité, il y a eu un bon nombre de discussions sur le rôle de l'Espagne en Haïti. L'Espagne a en effet manifesté la volonté de faire plus d'efforts en ce sens.
[Traduction]
Je pourrai revenir à cela pendant la période de questions, puisque je viens tout juste de rentrer au pays. Je ne l'ai pas inclus dans le texte que j'ai préparé et qui vous sera distribué.
J'aimerais tout d'abord remercier le comité de son intérêt et de l'invitation à témoigner, mais j'aimerais aussi d'entrée de jeu attirer l'attention sur quelque chose dont nous avons parlé la dernière fois que j'ai témoigné devant le comité, il y a deux ans, quelque chose qui s'est perdu dans la multitude des questions sur lesquelles se penchait alors le comité.
FOCAL, comme d'autres institutions et analyses qui s'intéressent à Haïti, était préoccupé par une multitude d'enjeux à l'époque, et je pense que certains des plus importants et des plus pressants ont été perdus de vue il y a deux ans. Pour que cela ne se reproduise pas, j'aimerais commencer par insister sur une chose, à laquelle je reviendrai à la fin, à savoir l'importance fondamentale de déployer des efforts considérables sur le plan de la croissance économique et de la création d'emplois. C'est une question qui a vraiment été perdue de vue. Nous avons consacré beaucoup de temps aux questions très importantes de la gouvernance, de la démocratie et de la promotion des élections. Je ne veux pas déconsidérer le travail qui a été fait sur ce plan, notamment par le Canada. Ce sont là des enjeux d'une importance cruciale, mais nous ne pouvons pas oublier pour autant la croissance économique ou la création d'emplois.
Je ne sais pas si quelqu'un a vu le numéro dominical du New York Times d'il y a deux semaines. Il contenait un article sur l'incidence de la flambée des prix des produits de base et des macrochocs qui ont de ce fait durement touché les petits États insulaires. Le monde en développement est tout entier secoué par des émeutes alimentaires, mais dans les Antilles, les effets de la flambée des prix des produits de base et des macrochocs qui en découlent ont été vraiment très sérieux. Ils touchent également Haïti. Fait intéressant, cependant, dans cet article qui portait essentiellement sur Haïti, on parlait de la réhabilitation de l'héritage Duvalier à Haïti. Il y avait une certaine nostalgie du passé. Étant donné l'absence de progrès économiques, l'absence d'améliorations réelles dans la vie quotidienne de gens, nous sommes témoins d'un questionnement par rapport aux gains réalisés.
J'aimerais aussi faire remarquer que, du côté politique, même si nous avons été témoins de gains impressionnants au chapitre de la gouvernance et de la démocratie, il reste encore beaucoup à faire. Récemment, le vice-président du Sénat d'Haïti a été obligé de quitter le pays dans des circonstances assez difficiles. C'est là, encore une fois, une question qui mérite notre attention, mais je reviendrai à la croissance économique et à la création d'emplois à la fin de mon exposé.
Je voudrais respecter le mandat du comité aujourd'hui en vous parlant du contexte actuel à Haïti. Mes collègues ont fait un excellent travail pour ce qui est de passer en revue les enjeux relatifs à la gouvernance et aux droits de la personne, alors je voudrais explorer d'autres enjeux d'importance cruciale, qui prendront encore plus d'importance pour le Canada. Le premier est une réflexion sur MINUSTAH, sur son rôle et sur ce qui a été accompli. Il s'agit de la force de maintien de la paix des Nations Unies à Haïti.
Je suis allé tout récemment au siège de l'ONU à New York, à une réunion organisée par un groupe de réflexion espagnol qui avait pour but d'analyser les réalisations de MINUSTAH jusqu'à maintenant et ce qu'elle pourrait faire à l'avenir. Deux points intéressants sont ressortis de cette réunion qui méritent notre attention ici. Le premier, c'est ce que MINUSTAH a effectivement pu accomplir jusqu'à maintenant et ce que cela signifie pour l'avenir de l'hémisphère et pour les opérations futures de maintien de la paix dans l'hémisphère.
Nous avons une mission à Haïti depuis plus de quatre ans maintenant, mission qui compte des milliers de soldats sur le terrain, qui sont essentiellement là pour une chose, soit faire la chasse à une poignée de gangs armés. Ce qui est considéré comme la principale composante des opérations traditionnelles de maintien de la paix, c.-à-d. donner la chasse aux insurgés et séparer les camps armés qui ont des objectifs politiques, a été accompli très rapidement à Haïti. La première mission, que nous avons appelée au Canada Opération Halo, des États-Unis, du Canada, du Chili et de la France, avait à toutes fins utiles réussi à désarmer les insurgés venus de l'autre côté de la frontière. Ce qu'il restait à faire dans les années qui ont suivi, c'était les activités policières nationales.
Quand on y pense, quand on pense au montant d'argent, au nombre de soldats et au temps qui sont consacrés à Haïti à mener ce qui est essentiellement une opération contre les gangs criminels qui, en comparaison avec d'autres gangs criminels des Antilles, ne sont pas très forts, pas très professionnels ni très bien armés, cela devrait nous amener à vraiment réfléchir à l'avenir de l'hémisphère et de nos engagements, à ce qui nous attend à l'avenir si nous nous retrouvons encore une fois face à un État faible — en déroute, non viable, fragile, quel que soit le terme qu'on utilise.
Le contexte de la sécurité dans l'hémisphère évolue de façon radicale. L'époque des insurrections de style guérilla est révolue. Même les FARC en Colombie se sont transformés en une organisation dite terroriste ou narco-organisation. Ce n'est plus tellement un mouvement politique qui prône une idéologie politique.
Face à cette nouvelle donne qui définira de plus en plus l'hémisphère et, partant, nos opérations futures de maintien de la paix, il faut cesser de penser que nous serons là pour séparer les groupes armés, pour extirper les guérilleros ou séparer les combattants armés. Nos opérations seront davantage axées sur les activités policières sur le territoire. Il faut avoir cette réalité présente à l'esprit si nous voulons préparer l'avenir.
L'autre enjeu relatif à MINUSTAH est le rôle de l'Amérique latine. C'est là un enjeu qui est d'une importance capitale. Lors de la première mission à Haïti, celle des États-Unis, du Canada, du Chili et de la France, ni les États-Unis ni le Canada n'étaient en mesure de promettre le nombre de soldats nécessaires pour le temps nécessaire. Nous avons beaucoup de chance à cet égard. Nous nous faisons un devoir à FOCAL d'exprimer notre reconnaissance et nos remerciements chaque fois que c'est possible. Nous avons beaucoup de chance que les Brésiliens, les Chiliens, les Argentins, les Uruguayens, les Péruviens et d'autres aient pu venir prêter main-forte lorsque le Canada, les États-Unis et d'autres n'ont pas pu faire le nécessaire. Nous avons effectivement beaucoup de chance qu'ils aient pu assumer un rôle sans précédent pour eux, où ils étaient appelés, non pas simplement à participer à une opération onusienne de maintien de la paix, mais à contribuer suffisamment de soldats pour assumer le leadership de l'opération. Cela a eu de profondes répercussions dans la région.
Quand le Brésil est arrivé et qu'il a pris le commandement de la mission, l'appréhension était grande au Brésil et dans le Cône Sud et son entrée en scène a suscité la dérision ailleurs en Amérique latine. Personne ne pensait que le Brésil allait réussir. Tout le monde pensait qu'il allait échouer, mais c'est tout le contraire qui s'est produit. Le Brésil a réussi où d'autres avaient échoué. Cette réussite a enhardi le Brésil et les pays d'Amérique latine à envisager d'assumer une plus grande responsabilité à Haïti. Il faut que nous en soyons bien conscients, que nous encouragions et remercions les Brésiliens, et il faut les encourager à poursuivre leur rôle à Haïti.
Il est également important de savoir que cela signifie sans doute la fin de l'hégémonie septentrionale dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies. Les Brésiliens et leurs alliés ont une réussite à leur actif. On a l'impression que, si la situation se représentait et que les conditions étaient les bonnes, ils pourraient sans doute jouer de nouveau un rôle comme celui-là.
Il y a donc là une occasion intéressante pour nous, et je suis ravi que le gouvernement s'en soit rendu compte, et, plus particulièrement, que l'ACDI ait saisi l'occasion, en ce sens que nous tendons la main aux Brésiliens, aux Chiliens et aux Mexicains qui, même s'ils ne peuvent pas participer aux opérations de maintien de la paix, souhaitent se joindre à leurs collègues d'Amérique latine pour jouer un rôle plus important dans le développement d'Haïti.
Comme vous le diront sûrement les représentants de l'ACDI quand ils viendront témoigner, nous recevrons la visite la semaine prochaine à Ottawa, de responsables du développement d'Amérique latine, et nous comptons travailler avec eux pour leur expliquer la démarche canadienne en matière de développement tout en cherchant à renforcer ce qu'ils essaient de faire à Haïti.
Il y a une autre question à laquelle il faut s'arrêter, si vous me permettez de passer de l'Amérique latine au Canada, à savoir la détermination de la population canadienne par rapport à notre engagement à Haïti. C'est là quelque chose qui nous inquiète beaucoup à FOCAL et qui en inquiète d'autres aussi. Il est difficile de l'imaginer, mais il semble qu'à certains égards nous ayons moins bien fait notre travail de communication sur Haïti que sur l'Afghanistan.
Je voyage passablement au Canada pour parler à des collectivités, des ONG, des dirigeants du milieu des affaires et des autorités publiques locales au sujet d'Haïti. Il ne s'agit pas ici d'un sondage officiel, mais plutôt d'un à-côté, car je suis très curieux de la perception qu'on peut avoir d'Haïti. Je suis arrivé à ces constatations à la suite du travail que nous avons fait, des conférences que nous avons tenues et des conversations que nous avons eues avec d'autres groupes de réflexion.
Je pose essentiellement quatre questions. Je vous les présente très rapidement.
Premièrement, quelle est, d'après vous, la situation actuelle à Haïti? Invariablement, on me répond : « Ah, Haïti? Il n'y a rien à faire. Rien ne se passe comme on le voudrait. C'est le pays le plus dangereux de l'hémisphère. Des gens y sont tués par balle tous les jours. Rien de bon ne va sortir de là. »
Ensuite, savez-vous que la sécurité s'est améliorée, qu'il y a un gouvernement qui fonctionne à Haïti, que le taux d'homicides y est plus bas que dans la République dominicaine voisine? On me répond : « Vous blaguez. C'est impossible. »
Puis, pensez-vous que le Canada devrait jouer un rôle à Haïti? On me répond le plus souvent : « Eh bien... Je suppose que oui. »
Enfin, pourquoi pensez-vous que le Canada devrait jouer un rôle à Haïti? La réponse qu'on me fait le plus souvent est : « Je ne sais pas. Parce que nous sommes là depuis toujours? Parce que c'est le pays le plus pauvre de l'hémisphère? »
Ces réponses — « Je ne sais pas », « Je suppose que oui » et « Parce que » — ce sont des réponses que l'on s'attendrait à entendre dans la bouche d'un ado autour d'un repas en famille. Ce ne sont pas les réponses auxquelles on s'attendrait de la part des Canadiens à qui l'on demande ce qu'ils pensent du pays qui vient au deuxième rang dans nos engagements dans l'hémisphère.
À plus long terme donc, ce n'est peut-être pas seulement la fragilité de l'État qui est inquiétante à Haïti mais aussi la fragilité de notre engagement envers ce pays. Il faut absolument qu'Haïti interpelle, non pas seulement le gouvernement du Canada, mais l'ensemble de notre population. Pour cela, il faudra une stratégie de communication efficace et continue sur Haïti.
Enfin, il y a deux autres questions dont j'aimerais vous parler. Vous entendrez beaucoup parler des problèmes de déboursements, surtout de la part des Haïtiens. Nous avons fait des recherches exhaustives et vérifié auprès de la Banque mondiale et de la Banque interaméricaine de développement. D'après ce que nous avons pu voir, les déboursements ne sont pas vraiment un gros problème. La Banque interaméricaine de développement a tout fait, et plus encore, pour accélérer les déboursements. Elle y a consacré des ressources tant financières qu'humaines pour s'assurer que les déboursements à Haïti sont faits plus vite que dans n'importe quel autre endroit dans l'hémisphère. Il n'y a pas grand-chose de plus qu'elle peut faire de son côté. Le problème, et ce qui retarde les déboursements, se situe du côté haïtien.
En ce qui concerne la croissance économique et la création d'emplois, deux choses méritent d'être signalées. Pour ce qui est des mesures que nous pourrions prendre, elles seraient plutôt de nature symbolique. Nos échanges avec Haïti ne sont pas très importants comparativement à ceux que nous avons avec les États-Unis ou avec la République dominicaine. Nous sommes sans doute le cinquième ou le sixième partenaire commercial d'Haïti. Il n'en reste pas moins que nous pourrions faire certaines choses qui enverraient un signal très important, notamment aux partenaires. Même si nous avons un régime d'échanges très ouvert avec Haïti et que nous avons accordé des exemptions et permis aux produits haïtiens d'entrer chez nous, nous pouvons faire plus encore.
Nous proposons un accord commercial unilatéral avec Haïti, où le marché canadien serait complètement ouvert à tous les produits venant d'Haïti — bien entendu, les exigences sanitaires et autres demeureraient. Du côté haïtien, le Fonds monétaire international classe déjà Haïti comme une des économies les plus ouvertes de l'hémisphère, si bien que nous ne pourrions pas demander à Haïti de faire beaucoup plus. Nous pourrions toutefois prendre l'initiative en ouvrant complètement notre marché à nous. Ce serait là un signal important à envoyer aux États-Unis, où les lois HOPE et HERO sont à l'étude, deux lois qui prévoient des exemptions commerciales spéciales pour les produits haïtiens. Ces exemptions sont très limitées. Je crois que 3,5 p. 100 des exportations haïtiennes seraient soumises à des tarifs spéciaux.
De notre côté, nous pouvons faire plus encore. Haïti est également le seul pays de l'hémisphère occidental qui ait droit à une exemption spéciale de l'OMC pour des accords de ce genre, étant donné que c'est un des pays les plus pauvres de la planète. Nous n'aurions donc pas à nous inquiéter que les autres pays d'Amérique latine se bousculent au portillon pour demander les mêmes exemptions. Il s'agit d'un accord qui ne s'appliquerait qu'à Haïti.
Enfin, en ce qui concerne le commerce et l'aide, nous avons beaucoup mis l'accent sur des accords commerciaux qui feraient la promotion de la croissance, du développement économique et de l'égalité dans la région, mais nous semblons avoir oublié Haïti. La mesure que nous proposons réglerait donc ce problème.
Quant au rôle de la République dominicaine, nous devrions, dans le cadre de nos négociations et de nos discussions avec ce pays, demander s'il ne pourrait pas faire plus pour Haïti. C'est ce que les États-Unis ont fait dans le cas de l'accord de libre-échange avec la Jordanie; nous pourrions faire quelque chose de semblable avec la République dominicaine. Les Dominicains seraient-ils d'accord? Peut-être pas, mais les Péruviens n'étaient sans doute pas enchantés non plus de la clause RSE que nous avons incluse dans l'accord et les Colombiens n'apprécient peut-être pas tellement les accords parallèles sur les droits de la personne, l'environnement et le travail que nous avons inclus dans l'accord. Mais nous l'avons déjà fait, alors nous pourrions le faire dans le cas de l'accord avec la République dominicaine. C'est quelque chose qu'il nous faudrait envisager de faire.
Enfin, dans deux semaines, les 16 et 17, nous recevrons à Ottawa une délégation du secteur privé haïtien. C'est quelque chose qui ne s'est jamais vraiment produit auparavant. Les dirigeants du secteur privé progressiste participent chaque année à des missions d'information à Washington, D.C., où ils rencontrent des congressistes, des sénateurs et des responsables du gouvernement américain. Ce sera la première fois qu'ils viendront à Ottawa. Beaucoup d'entre vous ont déjà reçu une invitation, et nous espérons vous voir dans deux semaines.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président.
En tout premier lieu, je voudrais demander à nos invités de bien vouloir nous répondre par écrit. En effet, les cinq minutes allouées aux questions et réponses ne vont pas nous permettre d'obtenir toutes les réponses. Or, nous aimerions bien les obtenir.
Ma question s'adresse aux organismes Droits et Démocratie et FOCAL. J'aimerais d'abord féliciter M. Hubert, même s'il occupe son poste par intérim, et surtout lui souhaiter bon succès. Je suis aussi très heureux de souligner la présence de Mme Magloire et le fait que depuis deux ans déjà, Droits et Démocratie a un bureau à Port-au-Prince.
Monsieur Hubert, Droits et Démocratie soutient en outre le Groupe d'Appui aux Rapatriés et Réfugiés dans une perspective de « réalisation du droit à l'identité par l'enregistrement universel de l'état civil et l'identification nationale ».
Le mois dernier à Washington, vous avez présenté les résultats de vos recherches dans le cadre d'un partenariat avec le Robert F. Kennedy Memorial Center for Human Rights. Pourriez-vous nous donner quelques détails sur ces recherches ainsi que sur les recommandations?
[Traduction]
J'ai aussi une question pour M. Dade.
J'ai lu avec beaucoup d'intérêt le rapport spécial d'une délégation conjointe qui s'est rendue à Haïti, un rapport qui été remis par FOCAL à Inter-American Dialogue et qui s'intitule Haiti: Real Progress, Real Fragility.
Comme nous le savons tous, le Canada joue un rôle très important dans les élections à Haïti. Dans votre rapport, vous avez dit :
La stabilité politique de Haïti est menacée par la possibilité d'élections qui sont susceptibles d'être retardées indéfiniment.
Nous savons qu'il y a eu des élections à cinq reprises au cours des 18 derniers mois à Haïti, le coût ayant été chaque fois de 15 millions de dollars US, pour un total de 150 millions de dollars, et que les sixièmes élections, en décembre dernier, ont été remises et ont entraîné la mort d'un autre sénateur. Ainsi, il reste 19 sénateurs sur 30, et il n'est plus possible de modifier la constitution.
Ma question concerne cette élection sénatoriale. Haïti pourrait-elle de nouveau être la proie de l'instabilité de ce fait? Pensez-vous qu'il y a du travail qui se fait au niveau du gouvernement haïtien en vue de modifier la constitution archaïque du pays? Car, si l'on veut modifier la constitution, les modifications doivent être adoptées par une majorité des deux-tiers des deux chambres, puis elles doivent être ratifiées par la législature suivante pour ensuite entrer en vigueur après la fin de la troisième législature. Cela veut dire que rien ne va se faire.
La constitution doit être modifiée. Savez-vous s'il y a du travail qui a été fait là-dessus?
Merci.
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Merci, monsieur le président. Je vous remercie de m'avoir invitée à prendre la parole devant le comité afin de rendre compte des progrès accomplis en Haïti depuis le dépôt de la réponse du gouvernement, en février 2007. Je ferai d'abord brièvement le point sur la situation actuelle. J'attirerai aussi votre attention sur certains changements constructifs dont nous sommes témoins et, enfin, j'évoquerai quelques-uns des grands thèmes de notre action tournée vers l'avenir en Haïti.
Il y a maintenant un an que le gouvernement a déposé sa réponse au rapport du comité. Dans l'intervalle, nous avons été témoins d'une amélioration concrète de la situation dans ce pays. Or, le Canada joue un rôle important dans le maintien de ces acquis, notamment par son engagement soutenu, son soutien et son dialogue politique avec les autorités haïtiennes, et la poursuite de ses efforts pour amener la communauté internationale à maintenir le cap sur ses objectifs.
Toutefois, dans tous les secteurs, la stabilité demeure fragile en Haïti. Dans ces conditions, nous devons garder constamment à l'esprit la nécessité d'envisager le progrès dans une perspective graduelle et nous devons continuer à exercer une vigilance constante et à être toujours prêts à adapter notre approche au besoin. L'engagement canadien en Haïti touche trois grands thèmes : la gouvernance démocratique, la sécurité et la prospérité.
Pour ce qui est de la gouvernance démocratique, nous constatons, avec beaucoup de satisfaction, la légitimité dont jouit le gouvernement haïtien actuel, par suite de la tenue d'élections crédibles en 2006. Depuis son élection, le président René Préval a tiré parti de sa victoire retentissante, avec un accent particulier sur la participation de tous à la vie politique du pays. À cela s'ajoute une volonté manifeste de s'attaquer aux nombreux problèmes sociaux et économiques auxquels est confronté ce pays. Cela se traduit par une stabilité politique qui, bien que fragile, est sans précédent depuis l'an 2000. La réputation même du président Préval, considéré comme un médiateur honnête et incorruptible, y est pour beaucoup. On sent une volonté réelle d'améliorer la situation.
Sur le plan de la sécurité, les améliorations sont spectaculaires et très visibles. Pour la première fois depuis des années, le gouvernement a repris le contrôle de quartiers marginalisés des centres urbains, notamment Cité Soleil, dont on entend beaucoup parler, et Martissant, autrefois en proie à l'anarchie et sous l'empire des bandes criminelles. Cette amélioration est si importante que le premier ministre Harper a pu visiter Cité Soleil lors de son passage en Haïti, en juillet 2007. Il s'agissait alors de la première visite du genre d'un dirigeant étranger.
Cela est attribuable au leadership solide du président Préval et à la contribution essentielle de la MINUSTAH, la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti. Par leurs efforts pour amener Haïti à mieux faire face aux enjeux sécuritaires, le Canada et d'autres donateurs poursuivent une action qui renforce ces réalisations. Mes collègues, à la fois de la GRC et du ministère, pourront vous en parler plus en détail. Qui plus est, nous avons tiré des enseignements de notre expérience antérieure en Haïti, y compris du retrait prématuré de la force des Nations Unies, avant même que le travail ne soit terminé. Voilà pourquoi le Canada continue d'appuyer une présence durable de la MINUSTAH, y compris un mandat grâce auquel celle-ci pourra répondre efficacement aux besoins sur le terrain. Dans cette optique, nous nous réjouissons tout particulièrement du renouvellement du mandat pour une période de 12 mois, en octobre 2007, toujours avec la possibilité d'un mandat renouvelé et un nouvel accent sur la gestion des frontières.
[Traduction]
D'importants progrès sont également faits sur le plan de la situation macroéconomique suite aux réformes amorcées en 2004. L'inflation a été maîtrisée, de sorte qu'elle se situe désormais entre 8 et 10 p. 100; le taux de change est stable; et les réserves de devises ont doublé. Par ailleurs, en 2007, pour la troisième année consécutive, l'économie haïtienne a connu un taux de croissance positif de 3,2 p. 100.
Toutefois, ces progrès — conjugués à l'amélioration des perspectives pour l'investissement privé et les investissements internationaux massifs dans l'infrastructure — ne se traduisent pas par la création de nouveaux emplois, ni par l'amélioration des conditions de vie de la population haïtienne. En conséquence, le défi du gouvernement haïtien consiste à s'assurer que la population locale bénéficie concrètement des « dividendes de la paix ». C'est là un objectif auquel le Canada demeure fermement attaché, car il garantira le retour durable et constructif de l'investissement.
Nous voyons à quel point la présence du Canada en Haïti et la place de ce pays au coeur de l'engagement renouvelé du gouvernement dans les Amériques sont bien accueillis par nos partenaires de l'hémisphère. La poursuite de notre action au profit du gouvernement et du peuple haïtiens est l'occasion de montrer à tous ce que le Canada peut offrir, pour le continent, les États fragiles, la stabilisation, la reconstruction et un développement durable. Haïti donne en outre au Canada la possibilité de montrer qu'il peut tenir ses promesses, y compris mener une action ciblée et exercer un leadership concret dans tous ces domaines.
Cela comporte cependant un risque : si nous ne mobilisons pas toutes les ressources nécessaires au succès de nos efforts actuels, y compris ceux de nos partenaires, en Haïti, notre crédibilité pourrait en souffrir. Comme l'a noté le premier ministre Harper lors de sa visite en juillet :
... l'ensemble de la région bénéficiera d'une sécurité plus stable en Haïti. Et une meilleure économie dans ce pays servira à atteindre l'objectif du gouvernement canadien d'accroître le commerce et les possibilités d'emplois au profit de tous les peuples des Amériques.
Au cours des 12 derniers mois, le Canada s'est imposé avec force comme un chef de file en Haïti. Nos efforts suscitent la confiance du gouvernement haïtien, et le respect de la communauté internationale. En juillet 2007, le premier ministre a effectué la première d'une série de visites de haut niveau et à grande visibilité dans ce pays. Les ministres des Affaires étrangères, de l'ACDI et de la Sécurité publique ont suivi, en témoignage de l'effort pangouvernemental mené dans ce pays. Ces visites ont pour effet de renforcer notre rôle de premier plan dans ce pays.
Lors de sa visite, le premier ministre a annoncé une augmentation de la contribution canadienne pour un total de 555 millions de dollars de 2006 à 2011. Ce niveau d'engagement est le deuxième en importance, après celui de l' Afghanistan.
La dimension pangouvernementale de notre action a également été soulignée par le lancement, en mars 2008, de consultations élargies Canada-Haïti. C'est ainsi qu'une délégation de 18 membres, représentant cinq ministères et trois organismes gouvernementaux, et le gouvernement du Québec, s'est rendue dans ce pays pour participer à un dialogue de haut niveau et des échanges de vues avec les autorités haïtiennes sur les priorités pour l'avenir.
Des donateurs confirmés, tels que les États-Unis et l'Union européenne, apprécient la contribution de notre pays à la stabilisation de l'un des États les plus fragiles de la planète. fis se réjouissent également que nous mettions à contribution notre expérience, dans le cadre d'une action qui vise à rompre, une fois pour toutes, avec les échecs du passé. L'un des aspects uniques des efforts actuels tient au fait que, pour la première fois, la force des Nations Unies en Haïti est constituée en majorité d'effectifs de pays d'Amérique latine. Et ces mêmes pays entreprennent désormais des activités de développement en Haïti. De nouveaux donateurs au sein de notre continent même, tels que le Brésil, le Chili et le Mexique, nous considèrent de plus en plus comme un partenaire, et comptent sur nous pour les guider dans leurs efforts en Haïti.
Ces partenariats auront à leur tour un effet salutaire dans la poursuite d'objectifs bilatéraux. C'est ainsi que l'action canadienne en Haïti a un impact dans ce pays et au-delà dans l'hémisphère.
Par sa détermination à apporter une contribution durable et à exercer un rôle d'impulsion en Haïti, le Canada fait figure de chef de file et de partenaire actif dans la promotion de la prospérité, de la sécurité et de la gouvernance démocratique à l'échelle du continent. À l'heure où nous nous attachons à mieux cibler nos efforts, afin d'améliorer concrètement la situation en Haïti, ce sont d'ailleurs des thèmes que nous souhaitons continuer à promouvoir.
[Français]
Je vous remercie encore une fois de m'avoir donné cette occasion de prendre la parole et de vous parler de nos efforts actuels en Haïti. Mon collègue Robert Derouin, du Groupe de travail sur la stabilisation et la reconstruction du ministère, pourra répondre à vos questions concernant les ressources déboursées en Haïti au titre du Fonds pour la paix et la sécurité mondiales, notamment les initiatives annoncées récemment par le ministre Bernier lors de sa visite de février 2008. Mes collègues de l'ACDI parleront plus en détail des activités de développement, tout particulièrement dans le contexte de la stratégie nationale haïtienne pour la croissance et la réduction de la pauvreté. Les représentants de la Gendarmerie royale du Canada pourront fournir des précisions sur le déploiement d'officiers de police canadiens auprès de la MINUSTAH et la contribution canadienne à la réforme de la Police nationale haïtienne.