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Merci, monsieur le président.
Honnêtement, je pense que c'est la première fois qu'on reconnaît mon anniversaire au Parlement; c'est donc assez excitant.
Je suis très heureux d'être ici cet après-midi pour vous parler d'une question qui, selon Amnistie internationale, revêt un caractère important et urgent et qui tombe à point.
Il ne fait aucun doute que le résultat probablement le plus important du processus de réforme des droits humains aux Nations Unies, lancé en 2005, a été la création de l'Examen périodique universel sous l'égide du nouveau Conseil des droits de l'homme. Comme vous le savez certainement, le Canada avait vivement appuyé l'effort d'établissement de ce nouveau processus d'examen, et a continué de prôner l'intégration d'un processus solide et crédible au sein de l'ONU.
À l'époque, on fondait beaucoup d'espoirs sur cette initiative, peut-être avec naïveté. Bon nombre d'entre nous — aussi bien les gouvernements que la société civile — espéraient et rêvaient que cela marquerait la fin des tractations et du maquignonnage qui avaient paralysé tellement d'efforts au sein de l'ancienne Commission des droits de l'homme pour faire en sorte que tous les pays, notamment ceux ayant de vrais problèmes de droits humains, feraient l'objet d'un examen par la communauté internationale. La perspective d'un examen périodique universel, qui amènerait chaque pays — quelle que soit sa puissance ou sa discrétion —, à passer sous le microscope d'un examen international, s'annonçait comme un projet très prometteur et pour le moins excitant.
Le cycle pour examiner tous les États membres de l'ONU est un processus de quatre ans composé de 12 séances d'examen distinctes. Seize pays sont examinés à la fois. Nous sommes à mi-chemin du processus maintenant. Cinq des 12 séances ont eu lieu. Fait plus important en ce qui nous concerne, le Canada a récemment fait l'objet de l'examen. Cet examen a eu lieu le 3 février de cette année. Le rapport a été adopté le 5 février par le groupe de travail du Conseil des droits de l'homme, chargé de compiler les diverses recommandations formulées par des États dans le cadre de l'examen concernant le Canada. Le Canada n'a pas encore indiqué lesquelles de ces recommandations il entend accepter, mais cela ne saura tarder.
Votre séance tombe à point nommé. La semaine prochaine, en prévision de l'étude du rapport final sur l'examen périodique universel du Canada par le Conseil des droits de l'homme — qui, à notre connaissance, devrait avoir lieu le 9 juin, mais nous n'avons pas de date précise —, le Canada prévoit soumettre son rapport écrit au Conseil des droits de l'homme.
Cet après-midi, je voudrais aborder brièvement trois questions reliées à l'EPU. Je voudrais d'abord exprimer un avis général sur le fonctionnement global du système. Ensuite, je présenterai un très bref aperçu de la nature des recommandations adressées au Canada par les États. Il y en a beaucoup, et certaines d'entre elles sont assez détaillées. Je ne les passerai pas toutes en revue, mais je m'en tiendrai à un aperçu général. Finalement, je formulerai quelques recommandations sur les mesures que le Canada devrait prendre pour assurer une mise en œuvre efficace des recommandations issues de l'examen.
Comment fonctionne le processus? Amnistie internationale, par le truchement de son bureau de Genève, a suivi attentivement les quatre sessions de l'EPU qui se sont tenues jusqu'à présent et est intervenue activement dans presque chaque cas. La remarque la plus importante à faire à ce sujet, et c'est ce que me disent constamment mes collègues de Genève, est que nous devons nous garder de tout jugement précipité. Nous n'en sommes qu'au tiers d'un processus foncièrement novateur concernant l'une des questions les plus politisées et les plus controversées de l'ONU: les droits de la personne. Jusqu'à présent, 80 pays ont fait l'objet d'un examen. Certains d'entre eux, comme la Chine, n'avaient jamais fait l'objet d'un examen de cette nature auparavant, malgré de nombreux efforts déployés pendant plusieurs décennies. C'est, en soi, une réalisation notable. Cela dit, il y a encore 112 pays à examiner, et on a encore beaucoup de chemin à faire.
Les résultats obtenus jusqu'à présent sont loin d'être parfaits, même s'il y a quelques exemples de très bons examens. Deux me viennent en tête, concernant la Colombie et le Royaume-Uni.
D'autres examens ont été extrêmement décevants, comme la Tunisie, l'Algérie et Cuba. Certains examens, comme celui de la Chine, sont un peu difficiles à juger. Les résultats n'étaient certainement pas ce que nous aurions voulu obtenir mais, comme je l'ai dit, le fait même que l'examen a eu lieu est un énorme pas en avant.
La plupart des examens se situent entre les deux et ont déjà eu des conséquences positives. Beaucoup d'États qui n'avaient jamais eu de dialogue sérieux avec leurs ONG sur les questions de droits humains ont maintenant commencé à leur parler. Plusieurs pays ont déjà pris des mesures concrètes pour améliorer leur situation ou se sont engagés à le faire, à cause de l'examen. Le Nigéria, par exemple, a signé trois traités et en a ratifié un autre juste avant le début de son examen.
À cette étape, Amnistie internationale souhaite qu'on apporte des améliorations à la procédure d'examen. Le renforcement de l'EPU viendra progressivement. Nous invitons les délégations gouvernementales à envisager d'inclure des experts indépendants en matière de droits de la personne dans les délégations qu'elles envoient à Genève. Nous demandons instamment aux gouvernements d'intégrer plus régulièrement leurs instances législatives au processus, avant et après les examens. De toute évidence, le fait que votre comité se penche sur le sujet est une très bonne chose.
Au minimum, il est crucial que les résultats des examens soient déposés officiellement devant les parlements nationaux. Au Canada, comme un certain nombre de questions liées aux droits de la personne relèvent des provinces, nous proposons que ces examens soient également déposés devant les assemblées provinciales.
Il convient aussi d'améliorer et d'élargir les consultations de la société civile et d'éviter les tactiques visant à n'encourager que les organisations favorables aux gouvernements à intervenir — une stratégie de longue date utilisée au sein de l'ONU en ce qui concerne les débats sur les droits de la personne.
Ce sont là quelques-uns des commentaires généraux ou fondamentaux. La deuxième question que je souhaite aborder concerne la nature des recommandations issues de l'examen du Canada.
Le rapport officiel adopté par le groupe de travail de l'EPU au sein du Conseil des droits de l'homme contient 68 recommandations, dont plusieurs ont été formulées à plusieurs reprises par des gouvernements différents. Il convient aussi de noter que 24 pays n'ont pas eu la possibilité de s'exprimer durant l'examen, par manque de temps, et que leurs recommandations ne figurent donc pas dans le rapport officiel. C'est l'une des règles du Conseil des droits de la personne: les recommandations sont incluses dans le rapport uniquement si vous avez eu l'occasion de prendre la parole durant la séance. S'il ne reste pas de temps avant votre tour, vos recommandations ne figureront pas dans le rapport.
Les recommandations portent sur un large éventail de sujets que les membres du sous-comité connaissent bien. Elles comprennent la nature des consultations et du dialogue avec les peuples autochtones et la société civile; l'approche adoptée pour mettre en oeuvre les obligations en matière de droits de la personne; et la position du Canada sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
On réclame également que le Canada ratifie plusieurs autres traités internationaux, notamment la convention sur les peuples autochtones de l'Organisation internationale du travail, la Convention américaine relative aux droits de l'homme, la Convention relative aux droits des personnes handicapées, la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.
Le Canada présente un assez bon bilan pour ce qui est des traités internationaux, mais comme vous pouvez le constater d'après les recommandations faites, il y a un certain nombre de traités importants que nous n'avons pas encore signés.
Bien entendu, de nombreuses préoccupations ont été exprimées en ce qui concerne les droits des peuples autochtones, y compris les taux alarmants de discrimination et de violence contre les femmes autochtones, la nécessité d'améliorer sensiblement la protection des droits fonciers et des droits touchant les ressources, les niveaux élevés de pauvreté, les logements inadéquats, l'accès égal à l'éducation et aux soins de santé, et les problèmes avec le système de justice et la protection des enfants.
Il y avait aussi une gamme de préoccupations liées à la pauvreté, notamment les recommandations visant à élaborer des stratégies de lutte contre la pauvreté, le sans-abrisme et le logement inadéquat.
Les droits des femmes étaient un sujet qui revenait souvent, notamment dans le contexte de la violence familiale, de la traite des femmes et des filles et du traitement des femmes incarcérées dans les prisons fédérales.
On a fait part de certaines préoccupations concernant les immigrants et les réfugiés, notamment au sujet du programme des aides familiales en résidence, un programme qui a fait les manchettes encore dernièrement au Canada; le traitement inégal des travailleurs migrants du point de vue des droits du travail; les difficultés liées à la réunification des familles; et la garde des demandeurs du statut de réfugié.
Diverses questions portaient sur le système de justice, notamment les établissements de détention des jeunes, l'utilisation des pistolets à impulsion électrique et la politique du Canada sur la clémence à l'égard des condamnés à mort. Certains pays ont également exprimé des inquiétudes quant à la lutte contre le terrorisme en ce qui concerne les questions de droit à un procès équitable, l'application aléatoire de l'interdiction d'expulser des personnes qui seront torturées et le profilage racial dans les cas de sécurité.
D'autres questions portaient sur le racisme; la discrimination; le traitement des personnes homosexuelles, bisexuelles et transgenres; le traitement équitable des personnes handicapées; et les questions reliées aux crimes haineux.
Comme on peut le constater, cette longue liste contient toute une série de préoccupations familières à la plupart des Canadiens au sujet des droits humains. La plupart ont été portées à l'attention du Canada au cours des 15 à 20 dernières années dans le cadre d'examens divers menés par d'autres organismes experts de l'ONU, comme le comité surveillant l'application des traités signés par le Canada ou les rapporteurs spéciaux, les groupes de travail et d'autres spécialistes qui composent ce qu'on appelle les procédures spéciales de l'ONU.
Ce que je tiens surtout à souligner, c'est qu'il y a là une collection de recommandations importantes et raisonnables dont la majeure partie n'a rien de nouveau pour le Canada et dont la plupart ont été formulées par les amis et les alliés du Canada.
Cela m'amène à mon dernier sujet: la mise en application. Si beaucoup de ces recommandations ont déjà été portées à l'attention du Canada dans le passé, comment se fait-il qu'elles n'ont pas été mises en œuvre et comment peut-on s'assurer qu'elles le seront cette fois?
S'il est vrai qu'il fait preuve d'un leadership extraordinaire à l'échelle mondiale en matière de droits humains, le Canada, et c'est bien regrettable, a un bilan lamentable en ce qui concerne la mise en œuvre des recommandations formulées par l'ONU dans ce domaine. En règle générale, elles disparaissent dans le labyrinthe du fédéralisme. La plupart ne sont jamais mises en application. Généralement, et c'est encore plus frustrant, il est quasiment impossible d'en déterminer le statut, de savoir quel ministère ou palier de gouvernement en a la responsabilité, et si le gouvernement a ou non l'intention d'agir à leur sujet.
Le gouvernement répond souvent que c'est le Comité permanent des hauts fonctionnaires chargés des droits de la personne, organisme existant depuis une trentaine d'années, qui assure la coordination et la mise en œuvre. Or, comme vous le savez, ce comité se compose de fonctionnaires de rang intermédiaire qui n'ont généralement aucun pouvoir de décision à l'égard de questions qui peuvent parfois être complexes et lourdes de conséquences politiques, et il mène tout son travail dans un secret total et absolu, en allant même jusqu'à refuser de divulguer l'ordre du jour de ses réunions.
En tant que groupe facilitant l'échange d'informations entre les représentants du gouvernement œuvrant sur les questions de droits de la personne, le comité permanent joue incontestablement un rôle important. Toutefois, il n'a jamais été conçu et ne devrait jamais être considéré comme un organisme assurant une mise en œuvre transparente et redevable des recommandations importantes de l'ONU dans ce domaine. Quelque chose de plus, quelque chose de différent est nécessaire.
Il ne devrait rien y avoir de secret sur les questions de droits de la personne au Canada. Les discussions concernant la manière d'appliquer les recommandations de l'ONU devraient être accessibles à tous les Canadiens et bénéficier d'un appui et d'un engagement politique de haut niveau pour faciliter une prise de décision rapide et redevable de la part des gouvernements du pays.
Je précise en passant, pour l'information des membres du comité, qu'il n'y a aucune rencontre de niveau ministériel consacrée aux droits de la personne au Canada depuis plus de 20 ans. La dernière remonte à 1988. Or, beaucoup de ces questions, concernant par exemple la santé, l'environnement et la justice, revêtent tellement d'importance qu'elles devraient faire l'objet de rencontres ministérielles annuelles. J'ose croire que les droits de la personne sont assez importants pour mériter une attention politique de haut niveau plus d'une fois tous les 20 ans.
Les organismes de l’ONU réclament depuis de nombreuses années, avec une impatience croissante, que le Canada adopte une meilleure approche. Le Comité sénatorial des droits de la personne s’est souvent exprimé dans le même sens. Et nous avons maintenant de nombreux autres gouvernements qui demandent au Canada de faire mieux.
C’est cela qui est différent aujourd’hui. Cette demande ne provient pas seulement d’experts de l’ONU en droits de la personne, mais de pairs du Canada, d’autres gouvernements de la scène internationale qui ont tous souligné que le fédéralisme ne peut pas et ne doit pas empêcher l’adoption d’une approche efficace sur la mise en œuvre des droits de la personne. Le Canada a reçu ce message de nombreux pays, notamment de pays amis comme le Royaume-Uni, le Portugal, la Norvège et le Mexique.
Cette question est sans doute à bien des égards la plus importante dans le contexte de cet examen. C’est la seule qui réunit les peuples autochtones et les organisations représentatives de la société civile au Canada. Quel que soit leur domaine d’intérêt en matière de droits de la personne, tous conviennent que la réponse doit être d’élaborer un meilleur système.
Plusieurs organisations ont écrit au premier ministre, juste après l'EPU du Canada, pour l’inviter avec force à faire en sorte que le Canada, lorsqu’il retournera à l’ONU en juin, indique quelles recommandations il est prêt à accepter, et pour qu’il adopte la recommandation formulée par tant d’États sur l’amélioration de notre processus de mise en œuvre.
Permettez-moi de conclure en notant un certain nombre de points cruciaux qui, selon des ONG, devraient guider l’instauration de la nouvelle approche.
Premièrement, nous estimons qu’il est temps de tenir une réunion des ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de questions des droits de la personne dans le but d’analyser les recommandations de l’EPU et d’adopter un plan d’application commun.
Deuxièmement, il conviendrait dans ce contexte de confier à des organismes tels que le comité permanent et à un Comité des sous-ministres fédéraux existant la tâche de collaborer étroitement avec les peuples autochtones et les organisations représentatives de la société civile pour appuyer et faciliter la conférence ministérielle et le processus de décision.
Troisièmement, il conviendrait de s’assurer que les comités parlementaires et législatifs du pays analysent activement les recommandations de l’EPU dans le cadre de sessions ouvertes au public. Le fait que le Comité sénatorial des droits de la personne et le sous-comité le fassent est un bon début. Nous aimerions que le gouvernement fédéral fasse de même, même après la présentation du rapport par le Canada la semaine prochaine. Il conviendrait en outre que les provinces et les territoires s’engagent dans la même voie.
Quatrièmement, il est important que le gouvernement œuvre avec les peuples autochtones et les organisations représentatives de la société civile pour lancer un processus accessible et opportun de dialogue et de consultation sur les recommandations de l’EPU, notamment après la présentation du rapport par le Canada la semaine prochaine.
Finalement, il est tout aussi important que le gouvernement œuvre activement pour mettre en place, dans tout le pays, des solutions efficaces et accessibles aux violations de tous les droits de la personne. Cette mesure doit être l’élément essentiel du programme de mise en œuvre.
Je termine ici. Nous pensons vraiment, et je crois que c’est aussi le point de vue d’organisations nationales et internationales, qu’il y va du leadership du Canada en matière des droits de la personne alors que nous arrivons à la dernière étape du processus de l’EPU. Si nous ne réussissons pas à la franchir et à démontrer notre volonté, notre détermination et notre capacité de mettre en œuvre et de respecter les recommandations émergeant de cet examen, l’EPU, qui est, selon nous, une innovation importante mais fragile au sein de l'ONU, aura perdu un champion très important et nous aurons perdu l’occasion de renforcer sensiblement la protection des droits de la personne au Canada.
Merci, monsieur le président. J'ai terminé ma déclaration.
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Merci, monsieur le président.
Nous remercions le comité de l'occasion qui nous est donnée de faire une mise à jour sur les faits nouveaux concernant le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies et, plus précisément, sur l'examen périodique universel.
L'EPU et les recommandations connexes visant à améliorer le bilan du Canada en matière de droits de la personne relèvent du ministère du Patrimoine canadien, alors, comme on l'a dit, je vais simplement traiter du cadre de travail.
Le Canada a fortement encouragé la mise en place de l'examen périodique universel, à titre d'élément clé de la réforme de l'architecture des droits de la personne de l'Organisation des Nations Unies. L'EPU est une initiative visant à effectuer un examen régulier du bilan de chaque État membre de l'ONU au chapitre des droits humains, de manière équitable et impartiale. L'EPU est un processus mené par l'État et fondé sur le dialogue constructif et la coopération. Il vise à favoriser le suivi à l'échelle internationale des engagements internationaux, permettant ainsi d'améliorer concrètement la situation des droits de la personne sur le terrain.
L'EPU a été instauré en avril 2008 et, jusqu'à présent, 64 pays ont fait l'objet de cet examen. D'ici la fin de l'an 2011, les 192 États membres de l'ONU auront été examinés au moins une fois.
Le Canada a subi son premier EPU le 3 février 2009. Tout comme les autres États membres, il fera l'objet d'un autre examen dans quatre ans. Chaque examen dure environ trois heures et prend la forme d'un dialogue interactif entre les participants à l'EPU et l'État faisant l'objet de l'examen.
Tous les États peuvent participer au groupe de travail de l'EPU, qu'ils soient ou non membres du Conseil. Les organisations non gouvernementales peuvent assister à l'examen, mais ne peuvent formuler de recommandations. Les ONG peuvent présenter un rapport écrit avant la réunion du groupe de travail de l'EPU.
Afin d'assurer l'impartialité de l'EPU, le Canada a déployé des efforts concertés afin d'émettre des recommandations précises, crédibles et mesurables à chaque État faisant l'objet de l'examen. En plus de consolider la position du Canada en tant que principal promoteur de l'EPU, cette pratique se veut un complément à notre propre processus visant à comprendre la situation des droits de l'homme dans d'autres pays, au moyen de consultations avec les directions géographiques du MAECI et les agents dans nos missions à l'étranger.
Très tôt, le Canada s'est avéré un ardent promoteur de l'examen périodique universel qu'il considérait comme l'une des innovations les plus importantes du Conseil des droits de l'homme, qui était nouveau à ce moment-là. L'universalité est la caractéristique prépondérante de ce nouveau mécanisme et constitue son plus grand atout. L'EPU est un processus ouvert et transparent enrichi par les contributions de la société civile, des organes de traités sur la protection des droits de l'homme et des procédures spéciales de l'ONU, ainsi que par les experts du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme.
L'importance accordée au dialogue franc et constructif en vue de promouvoir des progrès réels ajoute à son potentiel. Le Canada demeure déterminé à renforcer ce nouveau mécanisme dynamique au fur et à mesure que la situation évolue. Cependant, l'examen périodique universel n'en est qu'à ses balbutiements et certaines difficultés n'ont pas encore été résolues. Un certain degré de politisation demeure tant en ce qui concerne le Conseil que le processus de l'EPU du fait que certains pays tentent de formuler des plaintes, ce qui nuit à l'efficacité de l'architecture des droits de l'homme. Il s'agit, à vrai dire, d'un risque commun à toutes les instances intergouvernementales et l'universalité de l'EPU constitue la solution à ce problème.
En outre, quelques incidents isolés d'abus sont survenus dans le cadre du processus de l'EPU: certains États ont orchestré les éloges de délégations amicales, notamment en faisant circuler des questions aux alliés ou ont tenté de surcharger la liste du président afin que les interventions les plus pertinentes ne puissent avoir lieu.
Cela étant dit, l'examen est pris au sérieux par la plupart des États. À quelques exceptions près, les pays examinés se sont préparés de façon exhaustive et ont envoyé à Genève d'importantes délégations de haut niveau dirigées par des ministres et des sous-ministres pour leur EPU.
De nombreux États ont pris des mesures concrètes ou des engagements en prévision de l'examen ou à la suite de celui-ci, notamment en signant ou ratifiant des traités des droits de la personne, en acceptant des visites par les rapporteurs spéciaux et relatives aux procédures spéciales et en élaborant des plans d'action en matière de droits de la personne.
Même si on ne peut se prononcer de façon définitive sur l'efficacité de l'EPU avant le second cycle d'examens qui permettra d'évaluer la capacité des États à mettre en oeuvre les recommandations de leurs pairs, on peut d'ores et déjà affirmer que le mécanisme a un effet positif.
Le Canada s'est préparé à son examen en ayant comme objectif de servir de modèle de transparence et de responsabilité en ce qui a trait au traitement des questions relatives aux droits de la personne au niveau national. L'EPU constituait pour nous une excellente occasion d'examiner notre propre bilan et de tirer parti des observations des autres États qui participaient au dialogue interactif. Le Canada a apprécié l'apport constructif des pays participants.
En appliquant le processus de l'EPU avec sérieux et intégrité, le Canada a su améliorer sa réputation internationale de défenseur des droits de la personne et renforcer sa crédibilité en attirant l'attention d'autres pays sur leur propre bilan au chapitre des droits de l'homme. À la suite de l'examen, plusieurs délégations, de même que certaines ONG qui avaient observé le processus, ont fait l'éloge de notre approche ouverte et constructive.
Nous sommes conscients qu'aucun pays, même le Canada, n'a un dossier parfait au chapitre des droits de la personne. C'est la raison pour laquelle il est important que tous les pays soumettent leur bilan en la matière pour examen tant à l'échelle nationale qu'internationale.
L'incidence positive de l'EPU sur l'amélioration des droits de la personne se fait déjà sentir dans plusieurs pays. La mise en oeuvre des engagements pris par le Canada à la suite de son examen s'inscrira dans le cadre des efforts continus destinés à renforcer le respect des droits de la personne.
Merci.
Mes observations porteront sur la présentation que le Canada a faite à Genève le 3 février dernier. Ensuite, je vais vous parler du processus en cours visant à faire un suivi à cette présentation et à répondre aux recommandations que le Canada a reçues.
[Traduction]
En nous préparant pour notre comparution du 3 février devant le groupe de travail du Conseil des droits de l'homme, nous nous sommes rendu compte de la gamme et de la complexité, pour être franche, des questions que nous avions à traiter. En vérité, une grande partie de ces questions requièrent des mesures à multiples facettes. C'est pourquoi plusieurs ministères fédéraux et gouvernements provinciaux et territoriaux ont participé aux préparatifs du Canada en vue de l'EPU.
La société civile a aussi un rôle important à jouer. Patrimoine canadien a organisé des séances d'engagement auprès de la société civile et d'organisations autochtones en janvier, avant l'examen du Canada. Nous avons organisé une séance dans la capitale nationale, à laquelle se sont ajoutées des séances dans cinq régions, y compris une organisée par le gouvernement du Québec.
Nous savons que certains groupes de la société civile n'étaient pas satisfaits de la nature de l'engagement, ni du moment où il a lieu. Ils auraient préféré être consultés avant que le Canada présente son rapport. C'est ce que nous avions l'intention de faire, mais les séances ont dû être reportées en raison de la tenue des élections fédérales et de celles du Québec à l'automne. Malgré tout, nous nous étions engagés à organiser ces séances, et elles ont donc eu lieu en janvier, même si le rapport avait déjà été présenté.
Ces séances nous ont permis de prendre connaissance des opinions et des préoccupations d'un vaste échantillon d'intervenants. Nous avons partagé ces opinions avec tous les ordres de gouvernement; nous nous en sommes servi dans nos discussions et dans nos préparatifs en vue de la comparution pour l'EPU en février; et nous les avons aussi prises en considération dans notre examen des recommandations.
[Français]
M. John Sims, sous-ministre de la Justice, a présenté le Canada comme le chef de la délégation canadienne pour notre premier EPU. La délégation était composée de fonctionnaires de divers ministères fédéraux — Affaires indiennes et du Nord canadien, Citoyenneté et Immigration, Affaires étrangères, Commerce international, Justice, Ressources humaines et Développement des compétences, Patrimoine canadien —, ainsi que de fonctionnaires représentant les provinces du Québec et de la Saskatchewan. Comme plusieurs questions touchaient les domaines de compétence provinciale, il était important que les gouvernements provinciaux soient représentés.
[Traduction]
Un certain nombre de documents clés offerts sur le site Web de l'ONU ont été produits pour l'examen, y compris, bien sûr, le rapport national du Canada, une compilation de renseignements tirés des rapports d'organismes chargés de traités et de procédures spéciales tirées d'autres documents pertinents de l'ONU, ainsi qu'un résumé des renseignements contenus dans le rapport présenté à l'ONU par 50 intervenants.
Le matin du 3 février, trois heures ont été consacrées à l'examen du bilan du Canada en matière des droits de la personne. Le Canada a eu droit à un total d'une heure pour présenter une déclaration préliminaire ainsi que pour répondre aux questions soulevées au cours de la séance interactive.
Nous avions prévu une grande partie des points soulevés par d'autres pays, points qui touchent les défis que nous avions reconnus dans notre déclaration préliminaire et dans nos réponses aux questions posées. Bien sûr, les 68 recommandations présentées dans le rapport de l'EPU du Canada portent sur différents thèmes, y compris, comme vous le savez, les questions liées aux Autochtones, la ratification d'instruments internationaux, la réduction des disparités socio-économiques, la violence contre les femmes, le racisme et la discrimination. Le rapport a été distribué largement au sein du gouvernement fédéral, des provinces et des territoires.
Alors, qu'avons-nous fait comme suivi? Le processus qui a suivi la comparution de février comptait deux objectifs clés. Le premier était de faire en sorte que notre réponse soit à la fois rapide et songée. Pour satisfaire cet objectif, nous avons dû nous adresser, dans ce qui revient à un délai extrêmement serré, aux ministères du gouvernement fédéral, aux provinces et aux territoires, ainsi qu'à la société civile et aux organisations autochtones.
Notre deuxième objectif était de préparer le terrain pour la mise en oeuvre qui devra être effectuée au cours des quatre prochaines années, avant le prochain examen. L'EPU du Canada souligne l'importance de travailler à l'horizontale avec l'ensemble du gouvernement ainsi qu'avec les provinces, les territoires et la société civile. Nous avons tenu compte de tous les intervenants intéressés dans le processus de suivi.
Permettez-moi de vous parler du diagramme que nous avons créé; je pense qu'il peut être utile. Comme la bande grise située du côté gauche de la page le montre, le délai est très serré. Remarquez les 11 cases situées au haut de la page. Pour faciliter notre examen des 68 recommandations, nous les avons regroupées selon des thèmes. Nous avons assigné chacun des thèmes à un ministère responsable, qui a travaillé à son tour avec des collègues d'autres ministères fédéraux pertinents pour examiner les recommandations et contribuer à la réponse officielle. Vous voyez donc les ministères responsables; la page suivante vous montre la répartition des 68 recommandations et leurs liens avec les ministères.
J'aimerais mentionner que nous avons conçu ce nouveau mécanisme en fonction de l'EPU, et nous le surveillons de très près. Nous nous rencontrons toutes les deux semaines, environ. Il s'agit d'un bon exemple; l'EPU nous a permis d'aborder la question des droits de la personne sous un tout nouvel angle, à l'horizontale.
Comme vous le voyez, notre comité interministériel occupe la case située juste en-dessous des thèmes. Il incombe à Patrimoine canadien, au ministère de la Justice et au ministère des Affaires étrangères d'intégrer les renseignements fournis par les ministères fédéraux, la société civile et les organisations autochtones, ainsi que par les provinces et les territoires. Tout est rassemblé, et les trois ministères travaillent ensemble pour intégrer toutes les réponses.
J'aimerais attirer votre attention sur les cases situées à la gauche. Patrimoine canadien a la tâche particulière de faire en sorte que la société civile et les organisations autochtones participent au processus. Nous avons demandé à la société civile et aux organisations autochtones leurs opinions sur les recommandations issues de l'EPU pour nous aider à formuler la réponse du Canada.
Pour maximiser le processus et obtenir l'opinion du plus grand nombre d'intervenants possible, nous avons procédé à une consultation en ligne. Le rapport a été affiché sur le site de Patrimoine canadien et une adresse électronique spéciale a été créée pour recevoir des commentaires. Nous avons ajouté une série de questions afin d'améliorer le processus et de stimuler les réponses.
De plus, deux séances en personne ont eu lieu à Ottawa les 21 et 22 avril. La première était conçue pour la société civile et l'autre, pour les organisations autochtones. Les séances, tout comme la consultation en ligne, portaient sur les recommandations et reflétaient l'approche thématique employée dans le cadre des discussions du gouvernement.
Nos rencontres avec les ONG et les organisations autochtones nous ont permis de recueillir des opinions et des suggestions importantes et songées. Un point particulièrement important qui a fait l'objet de discussions est la manière dont le Canada traitera les recommandations qui portent sur l'efficacité de la mise en oeuvre et sur l'engagement continu au cours des quatre prochaines années.
Nous étions ravis d'entendre ce qu'ils avaient à dire à ce sujet, non seulement pour guider la réponse immédiate du Canada au Conseil, mais aussi les discussions sur les manières de continuer à inclure la société civile et les groupes autochtones à l'avenir.
Bien entendu, les ministères et les gouvernements consultent déjà régulièrement la société civile et les organisations autochtones pour parler des questions précises abordées dans les traités internationaux sur les droits de la personne. Nous devrons faire en sorte de ne pas reproduire ou supplanter les discussions qui ont déjà lieu, mais plutôt de nous concentrer sur les écarts afin de traiter tout besoin additionnel lié à la nature horizontale de l'EPU.
J'aimerais maintenant attirer votre attention sur les cases rouges situées du côté droit de la page, ainsi que sur la nécessité de la participation des provinces et des territoires.
Le gouvernement du Canada consulte les provinces et les territoires par le biais du Comité permanent des fonctionnaires chargés des droits de la personne, un mécanisme de consultation fédéral-provincial-territorial en place depuis longtemps et présidé par Patrimoine canadien. Le comité joue un rôle clé. Il incombe à chacun de ses membres d'obtenir et d'intégrer les opinions de tous les ministères qui relèvent de sa compétence et qui sont touchés par les recommandations. Grâce au comité, les provinces et les territoires ont aidé à rédiger le rapport du Canada, et ils aident maintenant à formuler la réponse du pays.
[Français]
L'information obtenue grâce à tous ces mécanismes au sein du gouvernement fédéral, à l'aide des consultations fédérales-provinciales-territoriales et au moyen de nos consultations avec la société civile et les organisations autochtones a été retransmise aux ministères clés, c'est-à-dire Patrimoine canadien, Justice et Affaires étrangères, qui continuent à travailler en étroite collaboration avec le cadre du suivi de l'EPU et qui préparent la réponse du Canada. L'ébauche de la réponse devra être approuvée prochainement par nos trois ministres.
[Traduction]
Une fois que la réponse du Canada sera en forme finale et approuvée, elle sera transmise aux Nations Unies par la mission du Canada à Genève. Nous l'afficherons ensuite sur le site Web de Patrimoine canadien afin que le public y ait accès.
La comparution du Canada devant le Conseil des droits de l'homme est prévue pour le 9 juin. Nous espérons transmettre notre réponse au cours de la semaine précédente, préférablement le 2 juin. C'est la date que nous visons.
La séance du 9 juin durera une heure. Le Canada aura 20 minutes pour présenter officiellement sa réponse. Des organisations de la société civile et des organismes nationaux de défense des droits de la personne auront aussi 20 minutes pour présenter des exposés. Pendant les 20 dernières minutes, les États membres et observateurs feront des déclarations. Trois fois vingt minutes feront donc une heure.
À la séance de juin, le Conseil prendra une décision sur l'adoption du résultat de l'examen périodique universel du Canada. Il est question ici de trois documents: le rapport du groupe de travail, qui contient les 68 recommandations; la réponse du Canada; et, finalement, un résumé de la discussion plénière de juin, la séance d'une heure. Ces trois documents formeront en fait le résultat de l'examen du Canada. Une fois que tous ces documents seront produits, le ministre du Patrimoine canadien les déposera au Parlement.
En conclusion, nous avons dû travailler très fort au cours des derniers mois. Des fonctionnaires de tous les niveaux travaillent avec empressement pour que nous respections notre échéance. Franchement, la préparation d'une réponse qui convient à tous constitue un défi étant donné le nombre d'administrations touchées. Cependant, j'aimerais souligner que bien que nous nous concentrions pour le moment sur la préparation de la réponse du Canada, nous comprenons certainement que le processus ne se termine pas là. Nous nous trouvons en fait au début d'un cycle de quatre ans qui se terminera avec le prochain rapport d'EPU du Canada. En fait, la réponse sert à préparer le terrain pour les quatre prochaines années.
Voilà la fin de mon exposé. Maintenant, je peux certainement répondre à vos questions; nous pouvons tous le faire.
Merci.