:
Bienvenue à tous, où que vous soyez au pays. Certains d'entre nous prennent un bain de soleil à la plage, alors que d'autres grattent la neige. C'est cela, le Canada.
La séance est ouverte. Bienvenue à la huitième réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes. Conformément aux ordres de renvoi des 11 et 29 avril 2020, le Comité se réunit dans l'unique but d'entendre des témoignages concernant les mesures prises par le gouvernement en réponse à la pandémie de COVID-19.
L'ordre de renvoi du 11 avril prévoit par ailleurs que le Comité peut étudier uniquement des motions concernant la sélection de témoins et l'établissement du calendrier de leur comparution, et que ces motions doivent être soumises à un vote par appel nominal. Comme vous le savez, la réunion d'aujourd'hui se déroule par vidéoconférence et sera diffusée sur le site Web de la Chambre des communes.
À titre d'information, je précise que la webdiffusion montrera toujours la personne qui a la parole, plutôt que l'ensemble des membres du Comité. Je vais maintenant énoncer quelques règles à suivre pour faciliter le travail de nos interprètes et assurer la bonne marche de la réunion.
L'interprétation de cette vidéoconférence sera très semblable à celle qui se fait dans le cadre d'une séance normale du Comité. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre la transmission du parquet ou les versions française ou anglaise. Lorsque vous prenez la parole, assurez-vous de sélectionner la langue dans laquelle vous comptez vous exprimer, et non le parquet. Nos interprètes profiteront ainsi de la meilleure qualité de son possible, ce qui est très important.
De plus, avant de parler, veuillez attendre que je vous nomme. Lorsque vous êtes prêt à prendre la parole, vous pouvez cliquer sur l'icône du microphone pour activer votre micro.
[Français]
Je tiens aussi à vous rappeler que tous les députés et les témoins devraient transmettre leurs commentaires par l'intermédiaire du président. Les députés qui ont besoin de demander la parole alors que ce n'est pas à leur tour de poser des questions doivent activer leur micro et déclarer qu'ils invoquent le Règlement. Si un député souhaite intervenir en réponse à un rappel au Règlement soulevé par un autre député, il devrait utiliser la fonction « Lever la main ». Ce faisant, il signalera au président qu'il désire prendre la parole. Pour ce faire, prière de cliquer sur « Participant » au bas de l'écran. Lorsque la liste apparaîtra, vous verrez, à côté de votre nom, que vous pouvez cliquer sur la mention « Lever la main ». Parlez lentement et clairement, et assurez-vous que votre micro est éteint lorsque vous ne parlez pas. Comme vous le savez, nous vous encourageons fortement à utiliser un casque d'écoute. Si votre casque d'écoute est muni d'un micro pendant, assurez-vous qu'il ne frotte pas contre votre chemise pendant votre temps de parole.
En cas de difficulté technique, si vous avez du mal à entendre l'interprétation ou que vous vous êtes déconnectés par accident, par exemple, je vous prie d'en informer immédiatement le président ou la greffière, et l'équipe technique tâchera de régler le problème. Veuillez noter que nous devrons peut-être suspendre les travaux à ce moment-là pour nous assurer que tous les députés peuvent participer pleinement. Est-ce que tous les participants pourraient cliquer sur le côté supérieur droit de leur écran pour s'assurer qu'ils ont une vue d'ensemble? De cette façon, vous devriez être en mesure de voir tous les participants dans une grille. Ainsi, tous les participants à la vidéoconférence pourront se voir.
[Traduction]
Enfin, comme nous le faisons habituellement, nous allons interrompre nos travaux entre les groupes de témoins ou les différents segments de notre ordre du jour.
Sur ce, nous sommes prêts à commencer. J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins.
Dans le premier groupe de témoins, nous accueillons Mme Claire Citeau, directrice générale de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire.
Madame Citeau, dites-nous bonjour pour que nous soyons sûrs de bien vous entendre.
:
Monsieur le président, membres du Comité, je vous remercie.
[Traduction]
Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. Je m'appelle Claire Citeau, et je suis directrice générale de l'ACCA, l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire.
Comme vous le savez, l'ACCA est l'association porte-parole des exportateurs canadiens de produits agricoles et agroalimentaires. À ce titre, elle représente les 90 % d'agriculteurs qui dépendent du commerce, ainsi que les éleveurs, les producteurs, les transformateurs et les exportateurs de produits agroalimentaires qui souhaitent assurer la croissance de l'économie par un meilleur accès aux marchés internationaux. Cela comprend les industries du bœuf, du porc, de la viande, des grains, des céréales, des légumineuses, du soja, du canola, du sucre, du malt et des aliments transformés. Ces secteurs représentent 90 % des exportations agroalimentaires du Canada et soutiennent environ un million d'emplois dans les collectivités urbaines et rurales partout au pays.
Il y a quelques mois à peine, au tout début de l'arrêt des activités en raison de la pandémie, j'ai déclaré à l'occasion d'un événement que nous nous inquiétions du fait que les Canadiens tenaient le libre-échange pour acquis. Aujourd'hui, je suis ici pour dire qu'il est plus important que jamais que nous ne tenions pas le commerce pour acquis.
Permettez-moi de commencer par vous donner un aperçu de la situation de l'ACCA et de ses membres afin d'expliquer comment les exportateurs canadiens de produits agroalimentaires nourrissent le Canada et le monde.
Alors que la plupart des pays du monde sont en confinement, il est devenu évident que le commerce agroalimentaire est fondamental pour notre économie et notre mode de vie. Qu'il s'agisse de nourrir les gens chez nous et ailleurs ou de soutenir les emplois grâce au rôle crucial joué par les chaînes mondiales d'approvisionnement agroalimentaire, l'expression « service essentiel » ne suffit pas à décrire à quel point les agriculteurs, les fabricants de produits alimentaires et d'autres intervenants sont indispensables dans un monde en pleine crise.
Axé sur l'exportation, le secteur agroalimentaire canadien nourrit nos familles et celles du monde entier. Si le Canada est devenu une puissance agroalimentaire, c'est précisément parce que nous nous sommes spécialisés dans la fabrication de produits que le monde veut et dont il a besoin.
Dans le contexte actuel, l'ACCA s'emploie toujours à faire progresser la libéralisation du commerce et à porter la voix des exportateurs canadiens de produits agroalimentaires. C'est pourquoi nous sommes heureux de nous entretenir aujourd'hui avec les membres du Comité.
Pour les membres de l'ACCA, la situation est loin d'être uniforme. Les producteurs de grains continuent de mener leurs activités plus ou moins normalement, mais ils subissent le contrecoup de l'augmentation des barrières non tarifaires en raison de problèmes d'accès aux divers marchés. Certains grains sont en forte demande, bien que l'impact des énormes subventions américaines accordées au maïs et au soja vient aggraver l'angoisse des producteurs canadiens, déjà aux prises avec une longue liste de problèmes. Les légumineuses sont en forte demande, et leurs prix sont à la hausse. La « normalité » signifie aussi que nos exportations de canola sont toujours bloquées par la Chine, et que celles de légumineuses et de blé dur continuent de se heurter à des barrières commerciales sur des marchés clés comme l'Italie, le Pérou et le Vietnam.
Nous constatons une augmentation des coûts et de l'absentéisme dans le secteur de la fabrication de produits alimentaires, sans compter les questions qui se posent quant à l'avenir du secteur de la restauration. C'est une période très difficile pour les éleveurs de porcs et les producteurs de bovins, qui ont des arriérés dans l'élevage du bétail.
Il y a de l'anxiété, de l'incertitude et des défis sans précédent dans tous les secteurs, qu'il s'agisse du canola, du malt, du soja, des aliments pour animaux ou, même, du sucre, dont dépendent les transformateurs d'aliments.
Malgré la crise, ceux qui font partie de la chaîne d'approvisionnement agroalimentaire ne se laissent pas abattre facilement. Toutefois, nous sommes surtout préoccupés par une chose: la crainte que cette crise entraîne de nouvelles barrières commerciales et d'autres formes de protectionnisme, et que les règles et les engagements commerciaux en vigueur soient sapés au point de ne plus être respectés. Je m'inquiète des discours sur l'autosuffisance alimentaire et le nationalisme, et je crains qu'ils n'aboutissent à une nouvelle forme de protectionnisme au nom de la « précaution ».
Je tiens à souligner le rôle de chef de file que joue le Canada pour maintenir l'ouverture du commerce agroalimentaire. Tout d'abord, nous sommes très reconnaissants que la frontière canado-américaine demeure ouverte au commerce. Nous n'avons pas de partenaire plus important que les États-Unis. Le secteur agroalimentaire est particulièrement tributaire des intrants, des ingrédients et de la main-d'œuvre des États-Unis. C'est, entre autres, grâce au fonctionnement continu de nos chaînes d'approvisionnement intégrées que les rayons des épiceries restent pleins aujourd'hui. La mise en œuvre de l'Accord Canada—États-Unis—Mexique contribuera à maintenir une assise solide pour le commerce avec les États-Unis, et nous avons hâte que cet accord entre en vigueur le plus rapidement possible.
En ce qui concerne la préservation du commerce fondé sur des règles, nous avons également été reconnaissants, au cours des dernières semaines, du rôle de chef de file joué par le gouvernement fédéral pour garder ouvertes les chaînes mondiales d'approvisionnement agroalimentaire. Nous avons accueilli favorablement les engagements à assurer l'ouverture des voies commerciales et à s'opposer aux restrictions à l'exportation afin d'aider à maintenir la résilience et d'éviter de perturber la production et la distribution des denrées alimentaires. Nous savons que la meilleure façon de remédier aux pénuries, c'est de permettre la circulation sans entraves des produits et d'accroître la production. Bref, en ces temps difficiles, les échanges commerciaux doivent être intensifiés, et non diminués.
L'ACCA se réjouit de constater que le gouvernement fédéral a été à l'avant-garde des efforts déployés pour préserver l'OMC et le système commercial fondé sur des règles. Il y a un nouveau mécanisme d'appel provisoire, ce qui est également très positif et qui permet de rétablir un certain degré de certitude dans le système commercial mondial. Nous avons bon espoir que l'organe d'appel redeviendra fonctionnel sous peu.
Lorsque la menace de la pandémie aura disparu, notre industrie tout entière sera prête à collaborer avec le gouvernement canadien pour montrer que le libre-échange doit jouer un rôle central dans la relance économique.
En fait, l’instauration d’un commerce sans entraves dans le secteur agroalimentaire devrait être au cœur du plan de relance de l’économie canadienne. Les populations du monde entier continueront d’avoir besoin de se nourrir, et le commerce agroalimentaire est l’un des meilleurs moteurs de croissance. Le commerce sera vital, mais seulement si nous limitons le protectionnisme et si nous renforçons la coopération internationale.
Au milieu de tout ce chaos, le Canada a une occasion unique de trouver de nouvelles façons audacieuses de favoriser le commerce international et le commerce agroalimentaire. Le gouvernement fédéral est bien placé pour nous permettre d’y parvenir et nous aider à atteindre l’objectif de porter à 75 milliards de dollars les exportations agroalimentaires d’ici 2025, comme le souligne le rapport Barton.
Le gouvernement canadien devrait également se faire le champion de la modernisation de la réglementation. Les tables rondes sur l’économie ont mis en évidence la nécessité d’actualiser les règlements nationaux et de les aligner sur celles des autres pays.
Il faut maintenant mettre en œuvre les recommandations. Une bonne partie de ce qui s’impose dépend des mesures prises par d’autres pays pour favoriser notre commerce d’exportation.
Le commerce des produits finis et la mise en place de processus réglementaires peu coûteux au Canada aident à assurer la compétitivité de tous les maillons de notre chaîne de valeur. À tout le moins, les règles canadiennes devraient évoluer rapidement pour appuyer notre compétitivité.
Alors que les plans de relance sont en cours d’élaboration, nous voulons vous faire part de nos idées et travailler avec vous sur la conception de mesures qui donneront aux exportateurs la confiance nécessaire pour aller de l’avant.
Parlons maintenant des façons de maximiser et d’appliquer un commerce fondé sur des règles. Pour que nous puissions prendre notre envol, il faut que les accords de libre-échange déjà conclus donnent les résultats escomptés. Par exemple, l’Accord économique et commercial global est très prometteur pour les exportateurs de produits agroalimentaires, mais il continue de ne pas être à la hauteur. L’Union européenne ne respecte pas les engagements qu’elle a pris de supprimer les obstacles techniques qui entravent nos exportations. À la fin de cet été, trois ans se seront écoulés depuis l’entrée en vigueur de l’accord. Nos exportations demeurent inchangées, alors qu’elles devraient être beaucoup plus élevées. En revanche, les exportations agroalimentaires de l’Union européenne vers le Canada continuent d’afficher un taux de croissance à deux chiffres. Il est donc temps de trouver des solutions.
Il faut notamment parvenir à une reconnaissance mutuelle des systèmes de transformation de la viande, élaborer des protocoles de vérification des pratiques de production animale, corriger les incohérences dans la réglementation sur les produits antiparasitaires, procéder à une évaluation plus prévisible et plus rapide des technologies de semences, veiller à ce que l’application des exigences en matière d’étiquetage du pays d’origine ne fasse pas obstacle au commerce et régler la question des subventions illégales accordées par l’Union européenne à l’industrie du sucre, rendant ainsi nos exportations non rentables.
L’Italie est un exemple de pays où le Canada doit s’affirmer davantage pour défendre ses intérêts commerciaux. Les conversations discrètes n’ont pas permis de résoudre le problème jusqu’à présent. Il est important que le Canada conteste ces mesures afin que les dispositions protectionnistes de l’Italie ne débordent pas sur d’autres pays et produits.
Pour ajouter l’insulte à l’injure, les représentants de l’Union européenne soulignent que les exportateurs canadiens doivent respecter les normes élevées de l’Union européenne, alors que le Canada est le cinquième exportateur en importance de produits agroalimentaires dans le monde, et ce, pour une bonne raison. Nous avons demandé au gouvernement canadien de porter ces questions à l’attention des dirigeants politiques de l’Union européenne afin d’obtenir des engagements, assortis d’échéances, en vue d’examiner et de supprimer les obstacles qui persistent.
Le monde s’oriente vers l’application des règles. Le Canada devrait, lui aussi, intensifier sa riposte et faire pression pour que les règles soient appliquées. L’Inde, un grand marché pour les légumineuses, n’a pas suivi les protocoles convenus à l’échelle internationale et ne respecte pas ses engagements à l’égard de l’OMC. Le Pérou et le Vietnam constituent d’importants marchés où des mesures sanitaires et phytosanitaires injustifiées créent des risques et des incertitudes considérables pour les exportations de blé. Le Canada se doit d’agir de manière proactive et souple en réponse à l’utilisation accrue de barrières non tarifaires destinées à bloquer les exportations agricoles.
Je conclurai en disant que la meilleure façon d’appuyer le libre-échange, c’est de continuer à chercher des occasions d’établir de nouvelles relations commerciales plus profondes dans le monde entier. Si nous y parvenons, notre secteur agroalimentaire axé sur l’exportation pourra aider à concrétiser la reprise économique du Canada en prenant de l’avance sur les marchés mondiaux.
Avant la crise, notre secteur connaissait une croissance plus rapide que tous les autres secteurs de l’économie. Nous sommes convaincus que la prospérité économique et la force du Canada passent par un secteur agroalimentaire solide. Le libre-échange a toujours été un élément clé de la croissance du Canada, et ce sera encore le cas à mesure que nous progresserons.
Nous avons hâte de collaborer avec tous les parlementaires pour faire avancer nos objectifs communs, qui reposent sur le libre-échange, le système de commerce mondial fondé sur des règles et la conviction que le Canada peut soutenir la concurrence et réussir sur la scène mondiale.
Maintenir l’ouverture du commerce permet aujourd’hui de nourrir les gens et, de la même façon, il sera essentiel de miser là-dessus pour assurer la relance économique de demain, une fois que la vie reprendra son cours normal.
Je vous remercie. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
:
Merci, madame Sullivan.
Bonjour à tous.
J’aimerais commencer par décrire notre secteur. Même si certains d’entre vous peuvent penser que cette description est inutile, nous avons appris au cours de cette pandémie qu’au Canada, il y a fondamentalement un manque de compréhension de la façon dont le système alimentaire canadien fonctionne. En l’absence de ces connaissances, les gouvernements sont incapables de nous appuyer adéquatement et de veiller à ce que la production du système alimentaire se poursuive.
La transformation des aliments est une étape cruciale du système alimentaire qui se déroule entre les étapes de l’agriculture primaire et de la vente au détail. La transformation des aliments représente plus de 60 % des recettes de l’industrie agroalimentaire de notre pays. Si la plupart des fruits et légumes frais passent directement de la ferme à l’épicerie, la majorité des aliments que vous et moi achetons ont subi une transformation dans l’une des entreprises que Mme Sullivan et moi représentons.
Lorsque vous pensez à votre épicerie, vous constatez qu’il y a des produits — des charcuteries, des produits de boulangerie, des fromages, des pâtes, des sauces, des viandes, de la farine, du sucre, des ingrédients à cuisson, des barres de céréales, etc. — dans pratiquement toutes les allées et les rayons qui proviennent d’un transformateur d’aliments du Canada. Le travail que nous effectuons a lieu dans des usines de fabrication. L’industrie de la transformation des aliments et des boissons constitue le plus important secteur manufacturier du Canada. Il compte plus de 7 000 installations, emploie près 300 000 travailleurs et produit 118 milliards de dollars de produits chaque année. Nos usines sont établies dans chacune de vos provinces, et leur taille va de quelques employés à plus de 10 000 travailleurs.
En ce qui concerne la COVID-19 et son incidence sur notre industrie, je dirais qu’elle a touché très durement notre secteur et nos travailleurs. Les gouvernements ont déclaré que l’alimentation était un service essentiel et une « infrastructure cruciale » et, malgré cela, nos usines ont continué d’exercer leurs activités en recevant très peu d’appréciation et encore moins de soutien.
Le travail des fabricants de produits alimentaires est pratiquement impossible. On leur a demandé de continuer d’exploiter leurs usines afin que les gens comme vous et moi puissent manger. Leurs employés et leurs travailleurs de la production ont été appelés à venir travailler quotidiennement, alors qu’on a dit à leur famille et à tous les autres Canadiens de rester à la maison. En même temps, les fabricants d’aliments ont été chargés de protéger leurs travailleurs contre un virus mortel, tout en maintenant leurs activités.
Avant la pandémie de la COVID-19, notre principale préoccupation était la salubrité alimentaire, et nos usines étaient aménagées en vue de favoriser cette salubrité. Presque du jour au lendemain, nous avons été forcés de nous réorienter et de mettre en œuvre de nouvelles mesures de distanciation sociale dans des bâtiments fermés qui n’ont jamais été conçus à cet effet.
Les entreprises ont réalisé cela en ayant recours à un certain nombre de moyens.
Elles font assurément un usage accru d’EPI, ou équipement de protection individuelle, comme des masques, des gants et des désinfectants pour les mains. Je devrais signaler que ces articles sont utilisés au cours des opérations normales, mais que leur utilisation a augmenté pendant la pandémie. Cependant, les difficultés que les fabricants rencontrent sont liées à la fois à l’accès à l’EPI et à ses coûts, qui sont exorbitants. Dans bon nombre de cas, les coûts de ce matériel essentiel ont grimpé de plusieurs centaines de pour cent au cours des deux derniers mois de cette pandémie.
De plus, ces entreprises ont recours à des outils de dépistage des problèmes de santé, comme des caméras à imagerie thermique pour déterminer si la température des employés est élevée, à l’installation d’obstacles non structurels comme des écrans en plexiglas, ce qui est possible, mais pas dans tous les environnements, et à d’autres mesures accrues, comme l’assainissement des points de contact et l’échelonnement des quarts et de l’utilisation des aires communes, comme les salles à manger et les vestiaires.
L’industrie s’est réorientée très efficacement, et un grand nombre des mesures qu’elle a prises s’inscrivent dans le prolongement des protocoles de salubrité des aliments qui étaient déjà en place. Cela dit, nous estimons que cela lui a occasionné des coûts qui dépassent 800 millions de dollars et que nous ne pouvons simplement pas refiler aux consommateurs.
En outre, nous avons observé l’effondrement presque complet de l’industrie des services alimentaires, dont seulement un tiers des achats ont été compensés par un accroissement des ventes au détail. Toutefois, ces ventes au détail mettent principalement l’accent sur des produits de première nécessité plutôt que sur des articles spécialisés. En Colombie-Britannique, en particulier, ces articles spécialisés sont produits par une industrie de 10 milliards de dollars qui est en grande partie dominée par des petites entreprises, lesquelles se spécialisent dans la fabrication de produits-créneaux novateurs et uniques. La vente de ces articles, même au détail, connaît un recul en ce moment.
Cela dit, je vais redonner la parole à Mme Sullivan qui peut parler un peu de certaines des pressions que l’industrie subit en matière de liquidités.
:
Merci, monsieur Donaldson.
L’ensemble du secteur canadien de la transformation des aliments fait face à un énorme problème, et cette crise ne sera pas de courte durée. Nous sommes aux prises avec une nouvelle normalité qui exerce des pressions extraordinaires sur les coûts, des coûts que nous devons gérer d’une manière ou d’une autre, soit en recevant une aide du gouvernement, soit en augmentant les prix des aliments. Dans l’immédiat, il n’y a aucun soulagement pour ces entreprises.
Premièrement, la plupart des entreprises alimentaires ou des fabricants de produits alimentaires ne remplissent pas les conditions requises pour être admissibles aux programmes d’aide d’urgence liés à la COVID. Les programmes comme la Subvention salariale d’urgence du Canada sont fondés sur des pertes de revenus. Bien entendu, comme nous vendons toujours des aliments, nos revenus n’ont pas chuté. Toutefois, ce qui s’est passé, c’est que nos coûts sont montés en flèche en raison des éléments dont M. Donaldson a parlé. Nous avons besoin que ces programmes d’urgence examinent l’incidence de la pandémie sur les revenus nets et qu’ils utilisent cette incidence comme véritable mesure des pertes subies.
L’autre problème que nous rencontrons, c’est qu’au Canada, il est pratiquement impossible pour les fabricants de produits alimentaires et de boissons de refiler l’augmentation de leurs coûts, même dans les meilleures circonstances, et certainement pas une hausse des coûts de cette ampleur. Notre secteur de la vente au détail est très robuste et très concentré. Cela crée un déséquilibre des pouvoirs qui est très difficile à gérer, en particulier pour les petites et moyennes entreprises. Pas plus tard que vendredi dernier, l’un des grands détaillants de notre pays a envoyé, sans préavis, une annonce aux entreprises alimentaires indiquant son intention d’imposer immédiatement des sanctions liées aux problèmes de livraison.
Nous savons que, plus tôt cette semaine, le a annoncé une aide de 77,5 millions de dollars. Toutefois, comme M. Donaldson l’a indiqué, nous estimons que les coûts d’adaptation à la COVID-19 dépassent 800 millions de dollars. Plus précisément, l’annonce de cette semaine n’est pas conçue pour régler ces manques d’argent ou ces problèmes de liquidités, mais plutôt pour permettre aux entreprises alimentaires d’investir dans leurs activités.
Les pressions permanentes que nous subissons vont sans doute détruire certaines entreprises et les mener à la faillite, ce qui aura des répercussions sur la disponibilité, l’abordabilité et la souveraineté alimentaire. Pour être franche, comme les Canadiens continueront de s’alimenter, si nous ne faisons rien, nous constaterons que les comptoirs de nos épiceries sont de plus en plus remplis de produits d’origine étrangère.
Que faisons-nous? Le 24 février, 14 associations de transformateurs d’aliments, qui représentent essentiellement la totalité de l’industrie, ont écrit au et à la afin de souligner nos préoccupations. Nous avons suggéré que le gouvernement fédéral envisage sérieusement d’élargir les programmes d’urgence en vigueur afin qu’ils soient mieux adaptés aux entreprises de notre industrie, qui subissent véritablement des pressions liées aux liquidités. Nous avons également suggéré que le gouvernement fédéral envisage de prendre des mesures plus créatives, comme des crédits d’impôt pour permettre aux entreprises de contrebalancer au moins les coûts supplémentaires que la COVID-19 leur a occasionnés.
Dans les mois et les années à venir, nous devons sérieusement jeter un coup d’œil à la façon dont notre système alimentaire est structuré et appuyé. Cette pandémie a amplifié l’importance et la fragilité du système alimentaire. Elle a aussi mis en évidence quelques-uns de ses importants points faibles. Nous ne résoudrons pas ces problèmes en adoptant des approches à court terme qui maintiennent le statu quo.
J’ai remarqué que le avait annoncé ce matin la création du Conseil sur la stratégie industrielle, afin que ce conseil étudie l’incidence de la COVID-19. J’espère sincèrement que le conseil compte une personne issue du plus important secteur manufacturier du Canada, une personne qui comprend vraiment comment le système alimentaire et la transformation des aliments fonctionnent.
Je souhaite conclure mes propos en vous communiquant le message le plus important qui soit, et ce message concerne nos travailleurs. Depuis deux mois, pendant que la pandémie ravage la planète, les travailleurs de l’alimentation continuent de se rendre au travail afin que nous puissions nous procurer de la nourriture. Nos travailleurs sont des héros, mais ils ne sont pas dotés de superpouvoirs. Malgré tous nos efforts, ils tombent malades. Malheureusement, comme nous l’avons maintenant appris, trois travailleurs canadiens de l’alimentation sont décédés après avoir contracté la COVID-19. Nous offrons à leur famille et leurs collègues nos plus sincères condoléances.
Nous demandons que vous, qui êtes des chefs de file de l’industrie, nous aidiez à faire en sorte que le et le public comprennent et reconnaissent les efforts que ces travailleurs déploient et les avantages qu’ils apportent à chacun d’entre nous en s’assurant que nous avons des aliments dans nos garde-manger.
Merci beaucoup.
:
Merci, monsieur le président. Nous aimerions également remercier les membres du Comité. Nous vous sommes reconnaissants de l'occasion qui nous est donnée de nous entretenir avec vous aujourd'hui.
Je m'appelle Mary Robinson, et je suis agricultrice. Mon exploitation agricole est une ferme de l'Île-du-Prince-Édouard qui appartient à ma famille depuis six générations, et je suis présidente de la Fédération canadienne de l'agriculture, la plus grande organisation agricole générale au Canada.
J'aimerais commencer par remercier les gouvernements canadiens, de tous les ordres, et reconnaître le travail qu'ils accomplissent. Les fonctionnaires et les élus travaillent 24 heures par jour et sept jours par semaine afin d'aider les Canadiens et d'assurer notre sécurité pendant cette période difficile. Le gouvernement fédéral a conçu et exécuté de nombreux programmes à l'intention des entreprises et des particuliers canadiens. Nous discutons aujourd'hui de la façon dont nous pouvons mettre à profit cette ingénuité et cet engagement pour assurer un approvisionnement en nourriture suffisant et pour appuyer nos agriculteurs.
La première vague de la COVID-19 a exposé au grand jour les points faibles de l'accès à l'alimentation au Canada et le fait qu'ils pourraient entraîner des catastrophes. S'il y a une deuxième vague de la maladie dans les mois à venir ou si une pandémie semblable survient dans les années à venir et que nous n'avons pas réglé les problèmes de l'approvisionnement en nourriture dont nous sommes venus discuter aujourd'hui, nous risquons de vivre des tragédies économiques et humaines.
En tant que chefs de file, nous avons l'obligation de nous préparer au pire et de faire ce qu'il y a de mieux pour notre pays. Les jours et les semaines à venir seront cruciaux si nous voulons assurer la protection de notre approvisionnement en aliments canadiens aujourd'hui et demain.
Les agriculteurs travaillent quotidiennement dans le but de mettre de la nourriture de qualité sur la table de tous les Canadiens. Les Canadiens tiennent cela pour acquis, et ils le devraient, car les agriculteurs ne laissent pas tomber les Canadiens.
Cependant, la COVID a mis en péril la production alimentaire, la chaîne d'approvisionnement et l'accès aux aliments, et la crise alimentaire est susceptible de s'aggraver au cours des prochains mois si d'autres mesures ne sont pas prises de toute urgence. La FCA demande qu'un plan d'intervention en cas d'urgence soit élaboré, un plan qui, en ciblant des investissements dans certains secteurs clés, donnerait aux agriculteurs la confiance nécessaire pour surmonter leurs présentes difficultés.
D'abord et avant tout, il faut accorder des fonds d'urgence pour régler les problèmes liés à l'approvisionnement en aliments essentiels en mettant immédiatement en œuvre des programmes ciblés qui visent à aider les secteurs touchés à relever ces défis sans précédent. Il y a plus de deux semaines maintenant, la FCA a mené une enquête auprès d'organisations liées aux produits agricoles de l'ensemble du Canada et, à ce moment-là, ces organisations ont distingué des répercussions financières de l'ordre de 2,6 milliards de dollars qui faisaient peser des menaces pressantes sur l'approvisionnement en nourriture et sur la viabilité des exploitations agricoles des quatre coins du pays. Compte tenu de l'évolution rapide de cette crise, la portée et l'étendue de ces répercussions ne font qu'augmenter.
Deuxièmement, cette crise nous indique qu'il est maintenant temps de nous réveiller et de rectifier la série de programmes de gestion du risque d'entreprise (GRE) que le Canada offre aux producteurs, afin que ces programmes répondent adéquatement aux difficultés particulières que cette pandémie mondiale cause. Les agriculteurs ont besoin d'être convaincus qu'ils recevront, dans le cadre du programme Agri-stabilité, l'appui dont ils ont besoin pour poursuivre leurs activités agricoles, s'ils subissent des pertes financières importantes. La série de programmes de GRE n'a jamais été conçue pour gérer ce genre de crise, et le moment est maintenant venu de remédier à ces programmes. La prochaine fois, nous pourrions faire face à une crise alimentaire encore plus grave au Canada.
Enfin, d'autres mesures doivent être prises pour encourager les Canadiens à travailler dans les exploitations agricoles et les usines de transformation des aliments du Canada. Ces mesures comprennent des incitatifs financiers, mais aussi l'accès à des EPI. Cet accès est tout aussi important et, après le secteur de la santé, la priorité de cet accès devrait être accordée au secteur de l'agroalimentaire, afin que tous ses travailleurs se sentent en sécurité lorsqu'ils vont travailler.
Les systèmes alimentaires du monde entier sont sous pression en raison des difficultés sans précédent et des conditions d'exploitation intenables auxquelles ils font face. Ces problèmes entraînent des perturbations des chaînes d'approvisionnement, des pertes de marchés et des incertitudes en matière de main-d'œuvre qui menacent l'intégrité d'un grand nombre de chaînes d'approvisionnement du monde entier. Récemment, l'ONU a mis le monde en garde contre « de multiples famines aux proportions bibliques », et l'Organisation a indiqué que la COVID pourrait mener 130 millions de personnes au bord de la famine.
Les Canadiens et des consommateurs partout dans le monde ont toujours été en mesure de compter sur les agriculteurs canadiens pour produire des aliments, mais, aujourd'hui, les agriculteurs canadiens demandent que le gouvernement fédéral leur apporte immédiatement une aide afin qu'ils puissent continuer d'assumer cette responsabilité. Sans cette aide, les consommateurs canadiens peuvent s'attendre à voir baisser la quantité et la variété des aliments qu'ils trouvent dans les comptoirs de leurs épiceries locales et à voir les prix des aliments grimper dans les mois à venir. De plus, si les agriculteurs ne reçoivent pas cette aide, cela compromettra leur capacité d'exporter des produits et de contribuer à atténuer l'imminente crise mondiale en matière de sécurité alimentaire.
En dépit des difficultés financières qu'affrontent un grand nombre de personnes pendant cette crise véritablement mondiale, tous s'efforcent de manger trois repas par jour. Les agriculteurs canadiens veulent faire tout en leur pouvoir pour contribuer à offrir aux Canadiens l'accès à une gamme complète de produits alimentaires canadiens abordables et de bonne qualité.
Pour atteindre cet objectif, il faut que les agriculteurs canadiens puissent surmonter des obstacles imprévus, de nouveaux coûts exorbitants et une immense incertitude dans les mois à venir. Il est difficile de brosser un seul tableau de ces difficultés, étant donné que l'industrie agricole canadienne est incroyablement diversifiée et compte des centaines de produits différents provenant de toutes les régions du Canada.
Toutefois, étant donné cette crise sans précédent, le secteur a aussi un énorme défi à relever, puisqu’il n’existe pas de solution unique pour régler toute la gamme de difficultés qu’il devra affronter. Nous avons vu les circuits de distribution disparaître pour les producteurs de poisson, de champignons et de pommes de terre, pour ne nommer que ceux-là. Ces producteurs ont perdu leur réseau de distribution et risquent maintenant d’assister à une chute des prix et à une baisse de production tandis qu’ils restent pris avec des stocks excédentaires. Nous demeurons dans l’incertitude quant à la possibilité d’embaucher de la main-d'œuvre, ce qui force les horticulteurs à prendre des décisions délicates quant aux quantités qu’ils vont planter — si même il vaut la peine de le faire cette année — ou s’ils auront le personnel voulu jusqu'à la fin de la saison.
Nous continuons d’avoir des problèmes avec les partenaires qui nous suivent dans la chaîne d’approvisionnement. Par exemple, un certain nombre d’usines de transformation du bétail ont dû fermer, ce qui fait monter les coûts et réduit les possibilités de mise en marché. Le bien-être des animaux est aussi en cause, et bien des éleveurs risquent d’être obligés de supprimer leurs animaux, une solution de dernier recours qui serait vraiment déplorable. Pendant ce temps, les agriculteurs des quatre coins du Canada, tout comme nos partenaires de la transformation, assument des coûts exorbitants et une réduction du rendement pour mettre en place des mesures de santé publique essentielles. Ce sont eux qui assument ces coûts et ils n’ont aucun moyen de les récupérer.
Malgré la diversité du secteur, beaucoup d’agriculteurs réclament l’aide accordée en raison de la COVID-19, pour découvrir qu’ils n’y sont pas admissibles. Soit la somme de leurs revenus empêche les agriculteurs de se qualifier pour la subvention salariale, soit leur structure d’exploitation ne leur donne pas droit au Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes, soit les mesures d’urgence prises par le Canada ne s’appliquent pas à eux parce qu'ils produisent un bien absolument essentiel. Quoi qu’il en soit, les mesures existantes n’aident pas les agriculteurs à prendre des mesures urgentes en vue de parvenir quand même à mettre du pain sur la table des Canadiens.
Quant aux mesures qui ont été conçues pour aider les agriculteurs, nous voulons d’abord faire savoir que nous apprécions que le gouvernement ait fait diligence pour que les agriculteurs puissent rapidement faire venir des travailleurs étrangers temporaires. Nous savons que ce travail se poursuit. Cela dit, le risque toujours présent d’une insuffisance de permis de travail pourrait nuire à l’arrivée des travailleurs. Les agriculteurs demeurent donc dans l’incertitude.
Nous avons aussi été heureux de voir le gouvernement prendre rapidement des mesures pour régler le problème de liquidités du secteur par l’intermédiaire de Financement agricole Canada et du Programme de paiements anticipés. Malheureusement, beaucoup d’agriculteurs canadiens ne sont pas en mesure de s’endetter davantage dans un contexte aussi incertain. En pensant aux plus récentes annonces, je dois dire que nous sommes contents de voir les mesures prises pour régler un certain nombre des problèmes dont j’ai parlé, mais que force est d'admettre, après discussion avec les intéressés des secteurs touchés, qu’elles ne suffisent pas devant l’ampleur des difficultés qu’elles visent à régler.
Pour ce qui est de la gestion des risques de l’entreprise, quand je regarde la collaboration dont ont fait preuve tous les gouvernements et ce qui a été fait pour mobiliser les ressources en réponse à cette crise sanitaire sans précédent, je dois applaudir tous les ordres de gouvernement pour leur volonté de protéger la santé des Canadiens. Ils ont montré ce qu’il est possible de faire dans l’urgence, si nous travaillons ensemble.
Cependant, la grande priorité doit être de préserver et rétablir les chaînes d’approvisionnement agroalimentaires du Canada. Pourtant, quand les agriculteurs réclament que les problèmes liés à la production d’aliments soient réglés dans le cadre d’une collaboration fédérale-provinciale-territoriale, ils se font dire de se tourner plutôt vers les programmes de gestion des risques de l’entreprise. Or, les agriculteurs ont toujours dénoncé ces programmes comme étant inadéquats, et ceux-ci n’ont jamais été conçus pour répondre à une crise sans précédent touchant la totalité du secteur agroalimentaire et représentant des difficultés aussi aiguës sur le plan de la distribution.
En conclusion, les agriculteurs canadiens sont fiers de pouvoir dire qu’ils nourrissent les Canadiens tous les jours. Chaque bouchée que vous prendrez aujourd'hui, comme ce fut le cas tous les jours de votre vie, provient originalement d’une ferme. Comme la plupart des secteurs de l’économie canadienne, le secteur agricole est durement frappé par la crise sans précédent causée par la COVID-19.
Nous travaillerons toujours en partenariat avec le gouvernement pour assurer à tous les Canadiens un approvisionnement constant en aliments nutritifs et abordables.
Je vous remercie de m'avoir accordé de votre temps, et je suis prête à répondre à toute question que vous pourriez avoir.
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Oui, merci beaucoup, et je vais juste me faire exactement l'écho de ce que vous avez dit. Il ne fait aucun doute qu'au cours des huit dernières semaines... Je parle tous les jours à des entreprises alimentaires, et l'engagement de leurs travailleurs, envers non seulement les entreprises, mais aussi les Canadiens, est vraiment touchant.
À propos de ce que nous devons faire, je pense que la première chose qui m'a frappé lorsque la pandémie a commencé est l'absence totale de plan pour le système alimentaire. De toute évidence, des mesures devaient être prises pour faire face à la pandémie, et je ne les remets pas en question. L'une de ces mesures était essentiellement de fermer l'économie, si je puis dire, mais nous n'avions pas de plan sur les mesures à prendre pour l'infrastructure essentielle. Nous en avons donc besoin d'un et nous ne pouvons pas nous contenter de belles paroles. Nous devons nous asseoir pour dresser un portrait du système alimentaire, des fermes — y compris leurs intrants — jusqu'aux services de détail et aux services alimentaires, pour que nous puissions vraiment commencer à cerner les maillons faibles.
Chose certaine, il y a environ 10 secteurs distincts dans la fabrication de produits alimentaires, dont évidemment la viande, le pain et les produits laitiers. Le niveau d'intégration varie beaucoup dans chacun d'eux. Leur emplacement au pays varie également beaucoup, et je pense que nous devons y jeter un coup d'œil pour avoir une bonne idée de chaque secteur. Vous savez, nous sommes des entreprises privées. Nous pouvons faire beaucoup pour collaborer et coopérer, mais je pense que nous pouvons nous préparer, et si nous comprenons mieux ce à quoi nous ressemblons et comment nous sommes organisés, je pense que cela nous aidera.
Une autre chose que nous devons absolument faire — c'était un problème avant —, c'est innover. En tant qu'industrie, nous constituons le principal secteur manufacturier au pays, mais nous accusons un retard par rapport aux autres secteurs manufacturiers sur le plan de l'innovation et de l'automatisation, ce genre de choses.
Il est difficile de savoir le rôle que cela jouera à l'avenir, mais nous devons nous pencher là-dessus. Entre autres choses, nous devons vraiment commencer à réfléchir — nous n'y aurions probablement pas pensé avant la pandémie — à l'aménagement de nos usines de production alimentaire.
Ce n'est pas comme si nous pourrons revenir comme avant dans six mois. Nous devrons pratiquer la distanciation sociale pendant longtemps. Nous n'avons pas construit nos usines en conséquence; nous les avons construites pour assurer la sécurité alimentaire. Nous devrons maintenant intervenir, car cela changera notre façon de voir les choses...
Cela signifie que les entreprises devront investir beaucoup de capitaux. Un soutien sera peut-être aussi nécessaire. Vous savez, c'est difficile. Dans le cas d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, je pense que le ministère a environ 4 000 employés très fidèles, mais peut-être environ 50 parmi eux se concentrent sur la fabrication de produits alimentaires et de boissons. À Industrie, Sciences et Développement économique Canada, il y en a peut-être quatre. Une fois de plus, ils sont extrêmement intelligents et dévoués, mais nous devons en augmenter le nombre.
Si nous prenions vraiment au sérieux le système alimentaire, tant du point de vue de la sécurité alimentaire que de celui de la contribution économique et des possibilités d'exportation, nous devons maintenant commencer à joindre le geste à la parole, et je pense que nous ne l'avons pas toujours fait avant.
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Merci beaucoup de nous recevoir aujourd'hui.
Le Conseil de la transformation alimentaire du Québec, le CTAQ, est le principal regroupement d'entreprises dans le secteur de la transformation des aliments et des boissons. Sa mission est d'appuyer les entrepreneurs dans l'atteinte de leur plein potentiel pour assurer la pérennité de l'industrie alimentaire au Québec.
C’est le secteur qui achète plus de 70 % de tous les produits agricoles et presque 100 % des produits issus de la pêche au Québec. C'est aussi celui qui les valorise, les transforme et les emballe pour offrir des aliments de qualité et facilement accessibles aux citoyens et aux citoyennes par l'intermédiaire des épiceries, et ce, à longueur d’année. C'est le maillon crucial de la chaîne, qui se trouve entre l’agriculture primaire et le commerce de détail.
Les transformateurs d’aliments et de boissons doivent relever, depuis le début de la pandémie liée à la COVID-19, d’immenses défis immédiats, alors qu’ils gèrent la santé de leurs travailleurs et répondent à l’impératif de maintenir l’approvisionnement alimentaire du Canada dans un environnement en évolution constante et rapide.
Alors que la première phase active de la pandémie se poursuit, de nombreuses entreprises alimentaires ont cessé ou réduit leurs activités en raison de problèmes de liquidité, de l'incapacité à gérer les considérations liées à la santé ou à l'absentéisme accru des travailleurs. Ces défis auront des répercussions importantes à moyen terme et à long terme.
Dans le contexte de cette situation en évolution, il est encore tôt pour bien comprendre le risque de fermetures d'entreprises et toutes les répercussions de la crise, mais certaines entreprises signalent déjà certaines choses.
Tout d'abord, les revenus diminuent en raison de la réduction importante des ventes dans les services alimentaires. Restaurants Canada estime d'ailleurs que 53 % des restaurants ont fermé temporairement leurs portes en raison de la COVID-19 et que, dans le cas d’un restaurant sur dix, cette fermeture sera permanente. Cela a eu une incidence importante sur les transformateurs d'aliments et de boissons, et de façon encore plus marquée sur le secteur des services alimentaires. Plusieurs transformateurs alimentaires vivent la même baisse de revenu en raison des fermetures d’écoles et d’hôtels et de l’arrêt des transports aériens et des transports par train.
Par ailleurs, l'augmentation des coûts associés à la COVID-19 est directement liée à plusieurs éléments: l'augmentation de l'absentéisme; la pénurie de main-d'œuvre, les primes salariales qui ont dû être données pour conserver les employés; l'utilisation accrue de l'équipement de protection individuelle; les changements d'horaire, y compris des quarts de travail décalés et des vitesses de chaîne réduites pour obtenir un plus grand éloignement physique; l'espacement accru des travailleurs, qui réduit la capacité de production et augmente les coûts unitaires; les modifications non structurelles temporaires au sein des usines pour protéger les travailleurs là où l'éloignement physique n'est pas possible; l'achat d'outils de dépistage de problèmes de santé; l'augmentation des avantages sociaux, telles les subventions pour la garde d'enfants; et le recours à des services d'experts-conseils.
Dans le secteur des protéines animales, le besoin et le coût potentiels de l'abattage des animaux devraient également être préoccupants, comme les fermetures d'usines et le ralentissement de leurs activités, qui entraînent une réduction de la capacité de transformation.
L'industrie se dit reconnaissante des programmes de soutien d'urgence annoncés par les différents ordres de gouvernement pour aider les entreprises à surmonter la pandémie de la COVID-19. Ces programmes profiteront à plusieurs entreprises alimentaires et de boissons. Cependant, certaines entreprises ne sont pas admissibles.
Le secteur alimentaire a su maintenir un approvisionnement continu tout au long de la crise, mais plusieurs entreprises arrivent au bout de leur résilience. La toute récente annonce fédérale promettant une aide de 252 millions de dollars est nettement en dessous des besoins formulés par l’ensemble du réseau. La Fédération canadienne de l’agriculture demande un fonds d’urgence estimé à 2,6 milliards de dollars, et nous avons estimé à 820 millions de dollars les coûts et les pertes pour les transformateurs alimentaires à l’échelle canadienne depuis le début de cette crise, pour la période de mars à aujourd'hui. Seulement pour les besoins en équipement sanitaire destiné à la protection des employés, on estime que les coûts atteindront 70 millions de dollars d'ici la fin de l’année 2020. Les programmes actuels ne répondent pas adéquatement aux situations exceptionnelles que nous traversons.
Notre objectif à court terme et pour les mois à venir est de faire en sorte que le plus grand nombre possible de fabricants de produits alimentaires soient admissibles aux programmes de soutien financier relatifs à la COVID-19. Si les entreprises alimentaires ferment leurs portes, rien ne garantit qu'elles rouvriront lorsque les crises sanitaire et économique se stabiliseront. Soutenir les entreprises dans l'immédiat nous donne de meilleures chances de préserver les entreprises et de garantir la solidité du système alimentaire au-delà de la pandémie.
Les mesures de sécurité supplémentaires, la fermeture complète ou partielle de maillons importants, comme les abattoirs, l'effondrement du marché de l'hôtellerie, de la restauration et des institutions — qui représentait 35 % des ventes — et les perturbations sur les marchés représentent des coûts importants, voire insurmontables, pour des milliers d'entreprises de transformation alimentaire.
Du jour au lendemain, une portion importante de ces marchés a disparu, ce qui a créé un déséquilibre dans les chaînes d'approvisionnement. Cette précarité met sous pression l'intégrité de l'offre alimentaire aux citoyens, laquelle dépend de la capacité de chaque maillon à jouer son rôle efficacement.
Le contexte de la main-d'œuvre est paradoxal. Au Canada, le taux de chômage est de 13 %, alors qu'au Québec, ce taux atteint maintenant 17 %. Sept millions et demi de Canadiens se sont inscrits à la Prestation canadienne d'urgence, mais les entreprises connaissent une pénurie de main-d'œuvre. Cette grave pénurie va nécessiter un réajustement des programmes en vigueur pour maintenir un nombre minimum de travailleurs, nécessaires au bon fonctionnement des entreprises. Le gouvernement du Canada doit mettre en place des programmes pour inciter les gens à retourner au travail.
La crise actuelle fait appel à des mesures exceptionnelles. Accomplir notre mission comme transformateurs alimentaires demande que nous ayons accès à des programmes d'aide plus généreux, mieux adaptés et surtout flexibles pour tenir compte de la réalité changeante d'une coexistence avec la COVID-19. En plus de vivre et de réagir aux répercussions de la présente crise, nous devons assurer un approvisionnement adéquat et être compétitifs sur les marchés. Les aides annoncées à ce jour ne peuvent répondre à l'ensemble des besoins.
Des programmes d'aide financière flexibles pour les producteurs agricoles et les transformateurs alimentaires doivent donc être mis en place pour limiter les répercussions à long terme et celles visant la chaîne d'approvisionnement et pour assurer la sécurité alimentaire des citoyens. Le Programme des travailleurs étrangers temporaires doit être plus flexible et permettre d'échanger des travailleurs entre entreprises, selon les besoins, ou de déplacer des travailleurs entre la production agricole et la transformation.
Le gouvernement du Canada doit agir dès maintenant pour soutenir l'ensemble du secteur agroalimentaire, qui est également un secteur créateur d'emplois et un acteur économique majeur et essentiel pour la vitalité des régions. Il est plus qu'urgent d'être cohérent sur une question aussi essentielle et vitale pour notre société et pour la résilience d'une partie importante de notre économie et de nos territoires.
Voici ce que nous proposons concrètement comme solutions pour soutenir les producteurs agricoles et les transformateurs alimentaires: un fonds particulier qui répondrait aux besoins des transformateurs en ce qui a trait à la perte des marges et à la disparition de certains marchés; une aide propre aux petites entreprises dont le marché principal est le milieu de l'hôtellerie, de la restauration et des institutions; une aide au soutien des stocks et à la congélation; une aide au secteur de la transformation pour couvrir les coûts supplémentaires liés à l'équipement de protection et à l'adaptation des chaînes de production; un programme pour inciter le personnel à retourner au travail; et, finalement, un plan de relance économique consacré au secteur manufacturier, et ce, dès cet été.
Je vous remercie.
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Je remercie le président et les autres membres du Comité de cette occasion de donner le point de vue des détaillants sur la réponse canadienne à la pandémie de COVID-19.
Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas le Conseil canadien du commerce de détail, nous représentons les petits, les moyens et les grands commerces de détail et nous sommes présents dans toutes les collectivités du pays. Nos membres sont à l'origine de plus de 70 % du volume de l'industrie du commerce de détail. En tant que porte-parole des détaillants depuis 1962, nous représentons fièrement plus de 45 000 magasins de toutes les tailles, y compris des grands magasins, des magasins spécialisés, des magasins de rabais, des détaillants indépendants, des cybercommerces et — c'est surtout ce qui nous intéresse dans le contexte — des détaillants en alimentation.
Le commerce de détail emploie plus de deux millions de Canadiens, ce qui fait de nous le principal employeur du secteur privé au pays. Les détaillants ne sont certainement pas les seuls à être gravement touchés par la COVID-19. Nous savons que votre comité examine la grave combinaison de difficultés auxquelles se heurtent les transformateurs d'aliments, les producteurs, les importateurs et les entreprises de transport de marchandises. Même si les détaillants en alimentation ont poursuivi leurs activités dans ce contexte, ils font face à une multitude de défis opérationnels, ce qui comprend des problèmes liés aux ressources humaines et à la sécurité dans les magasins, à l'approvisionnement en équipement de protection individuelle, à l'adaptation rapide des milieux de travail aux nouvelles règles des autorités sanitaires et aux augmentations importantes des coûts structurels, ainsi que des difficultés liées au transport et à l'expédition de même que, enfin — et c'est important dans le contexte —, des difficultés associées aux chaînes d'approvisionnement.
J'aimerais me concentrer sur le dernier point.
[Français]
L'éclosion de la COVID-19 a provoqué un choc sans précédent dans le système d'approvisionnement alimentaire au Canada. Nous avons vu la demande d'aliments diminuer considérablement dans les restaurants, les hôtels et des institutions comme les écoles. En revanche, nous avons observé une hausse notable de la demande dans le commerce de détail, étant donné que les Canadiens demeurent et mangent désormais à la maison.
Le Conseil canadien du commerce de détail a travaillé en étroite collaboration avec des groupes de producteurs, de transformateurs et d'importateurs canadiens tout au long de la crise pour s'adapter à l'évolution des comportements et des demandes des consommateurs. Nous reconnaissons le travail que le gouvernement du Canada a accompli à ce jour et nous y applaudissons. Cependant, il faut en faire davantage afin d'assurer que le Canada soit en mesure de relever les nouveaux défis que connaît et connaîtra notre approvisionnement alimentaire dans le contexte de la pandémie liée à la COVID-19, et ce, à moyen et à long terme.
Bien que le programme d'aide d'urgence destiné aux agriculteurs et aux transformateurs d'aliments, qui a été annoncé mardi dernier et qui se chiffre à 252 millions de dollars, soit un pas dans la bonne direction, il est essentiel, alors même que nous cherchons à comprendre quels sont les effets à plus long terme de l'épidémie sur l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement, que le gouvernement du Canada continue de travailler et de soutenir tous les maillons de la chaîne alimentaire, soit les producteurs, les transformateurs d'aliments, les importateurs, les transporteurs et les détaillants.
[Traduction]
De plus, il est essentiel que le gouvernement du Canada mette en place des mesures proactives pour accorder plus de latitude en matière d'approvisionnement à mesure que la situation liée à la COVID-19 évolue rapidement. Nous savons que l'Agence canadienne d'inspection des aliments s'efforce d'assouplir temporairement les restrictions pour permettre aux détaillants qui exercent leurs activités au Canada de vendre de la viande dans une province autre que celles pour lesquelles ils ont un permis, et pour que la viande et d'autres aliments produits et étiquetés pour d'autres marchés, comme les États-Unis et d'autres pays, puissent être vendus au Canada.
Nous appuyons sans réserve ces mesures et nous exhortons le gouvernement du Canada à les adopter immédiatement de façon proactive et temporaire plutôt que de tenter de gérer après coup les possibles perturbations de la chaîne d'approvisionnement. L'adoption de ces mesures de manière proactive aiderait à garantir l'approvisionnement alimentaire du Canada maintenant et tout au long de la crise de la COVID-19 et, au bout du compte, à minimiser les perturbations et les répercussions sur l'abordabilité des aliments pour les consommateurs en ces temps difficiles.
Enfin, j'aimerais personnellement remercier les agriculteurs, les transformateurs d'aliments et les employés des commerces de détail du Canada qui continuent d'assurer l'approvisionnement en aliments et le bien-être des Canadiens pendant l'éclosion de COVID-19.
Monsieur le président, distingués membres du Comité, merci.
Je serai heureux de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, d'avoir invité la Canadian Cattlemen's Association à vous faire part des défis auxquels les producteurs de bœuf canadiens font face, ainsi que des solutions possibles, dans le contexte de la COVID-19.
Je m'appelle Bob Lowe, et je suis le président de la Canadian Cattlemen's Association. Je suis accompagné de Tyler Fulton, un des membres de notre conseil d'administration, également producteur de bovins du Manitoba, ainsi que de Fawn Jackson, notre directrice des affaires gouvernementales et internationales.
Au début de la semaine, le gouvernement du Canada a annoncé du financement pour le secteur canadien du bœuf. J'aimerais d'abord dire que nous sommes reconnaissants de cet investissement initial, mais nous devons souligner que ce qui a été annoncé répond à une seule de nos trois demandes immédiates, et nous avons vraiment besoin d'une réponse à nos deux autres demandes pour pouvoir surmonter les difficultés que la COVID-19 occasionne à notre secteur.
Premièrement, j'aimerais présenter au Comité une mise à jour de la situation dans l'industrie du bœuf, car elle change fréquemment. Notre système d'approvisionnement en bœuf est en ce moment engorgé par 100 000 bêtes qui devaient être acheminées à l'abattoir, mais qu'il est maintenant impossible d'envoyer où que ce soit. Il en coûte en moyenne 4 $ par jour pour nourrir une bête qui est prête pour le marché. Cela représente donc pour notre industrie un coût additionnel de 400 000 $ par jour. Même si les installations de Cargill sont à nouveau fonctionnelles, le travail se fait à un rythme nettement réduit. Nous estimons que nous ajoutons chaque jour 5 000 têtes à l'arriéré. Comme vous pouvez le voir, la situation est grave.
Les 50 millions de dollars qui ont été annoncés pour le programme de retrait sont assurément utiles. Nous travaillons d'arrache-pied en ce moment, de concert avec les gouvernements, à établir ce programme le plus rapidement possible. Nous sommes aussi reconnaissants pour les 77,5 millions de dollars qui seront investis dans la transformation. Nous savons que l'Est du Canada en particulier a besoin d'une plus grande capacité de transformation et que les installations de transformation du Canada continuent de prendre des mesures d'adaptation pour la COVID-19. La pénurie de services de transformation est le nœud du problème auquel nous faisons face, et c'est donc un investissement judicieux.
J'aimerais exprimer notre profonde reconnaissance aux travailleurs de ces usines, qui sont des membres à part entière de notre communauté et qui forment un élément essentiel du fondement du système alimentaire canadien.
Votre travail est essentiel et il ne passe pas inaperçu. Vous êtes certainement nos héros de l'alimentation.
J'aimerais aussi exprimer notre reconnaissance aux entreprises de conditionnement des viandes qui continuent d'investir et d'innover en ces temps difficiles.
Nous allons continuer de nous efforcer d'utiliser la meilleure information dont nous disposons et de prendre les mesures appropriées, et nous allons certainement tirer des leçons de la COVID-19.
Nous tenons à dire que nous avons été impressionnés par le degré de coordination et de collaboration dans l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement, de l'équipe du Secrétariat à l'accès au marché, qui a contribué à veiller à ce que nous ayons toute l'information nécessaire pour poursuivre le commerce international, et l'ACIA, qui s'est rapidement mobilisée pour veiller à ce que nous ayons des services d'inspection adaptables, aux usines, qui ont mis en oeuvre les meilleures pratiques, et aux travailleurs de première ligne du secteur alimentaire, qui se sont continuellement adaptés à cette situation difficile. Cela n'a pas été facile, et ce ne le sera probablement pas pour longtemps, mais je peux vous dire qu'Équipe Canada est une équipe formidable à laquelle appartenir.
Encore une fois, je dois souligner que nous, producteurs de bovins, avons des défis à relever et que nous devons agir rapidement. Notre conseil est résolument axé sur l'avenir et sur nos jeunes producteurs, et nous savons que la COVID-19 est particulièrement nuisible à la santé financière de leurs exploitations agricoles.
Je vais maintenant céder la parole à M. Fulton, un de nos jeunes producteurs au conseil, qui va vous parler de nos deux autres demandes.
Premièrement, nous souhaitons vous indiquer les programmes de gestion du risque qui fonctionnent pour les producteurs bovins, ainsi que les programmes qui ne fonctionnent pas en ce moment. Je dirais, rapidement, que l’assurance des prix fonctionne, mais Agri-stabilité comporte toujours de nombreux problèmes dans sa forme actuelle. Pourquoi le programme Agri-stabilité ne fonctionne-t-il pas pour les producteurs de bovins? La réponse se situe dans l’infrastructure du programme et dans la structure de l’industrie du bœuf. Les limites de marge de référence sont l’une des principales raisons pour lesquelles Agri-stabilité ne fonctionne pas bien pour les producteurs de bovins. Je ne veux pas trop entrer dans les détails, mais c’est lié au fait que de nombreux producteurs, en particulier les éleveurs-naisseurs, ont de faibles dépenses admissibles en application de ce programme, et nous produisons souvent nous-mêmes nos fourrages et avons de faibles coûts de main-d’œuvre. En conséquence de cela, il faut que notre marge diminue plus que pour les autres produits avant que nous puissions nous prévaloir des avantages du programme.
Depuis longtemps, la CCA demande des changements au programme afin de le rendre plus équitable et efficace pour les producteurs de bovins. Cela inclut le retrait de la limite de marge de référence — le problème que M. Lowe a décrit tout à l’heure —, le retrait des plafonds de paiement et l’augmentation du seuil de déclenchement à 85 % de la limite de marge de référence. Nous n’avons pas de données plus récentes sur le taux de participation, mais en 2017, seulement 31 % des exploitations agricoles se sont prévalues du programme Agri-stabilité, et nous croyons que très peu de ces exploitations étaient des fermes bovines.
Nous comprenons que la souligne l’importance d’utiliser les programmes existants, mais il faut comprendre que ces programmes existants, en particulier Agri-stabilité, ne sont pas principalement utilisés par les producteurs de bovins. Le principal outil de gestion du risque pour les producteurs de bovins est le Programme d’assurance des prix du bétail dans l’Ouest, le Programme de gestion des risques de l’Ontario et l’ASRA du Québec. Il faut souligner que nos collègues producteurs des provinces de l’Atlantique n’ont accès à aucun outil approprié. Nos recommandations immédiates aux gouvernements fédéral et provinciaux sont axées sur ces programmes.
Le Programme d’assurance des prix du bétail est un programme solide sur le plan actuariel. C’est une chose dont les membres de notre industrie sont très fiers. C’est un outil qui fonctionne très bien à très faible coût pour le contribuable canadien. En ce moment, les éleveurs-naisseurs comme moi contractent généralement leur assurance de prix. Malheureusement, le coût des primes est lié à la volatilité du marché, et nous savons tous que le marché est d’une volatilité exceptionnelle en ce moment. Les primes pour les veaux seraient normalement de 10 $ à 15 $ par bête, mais à cause de la COVID-19, les primes ont grimpé pour se situer entre 50 $ et 70 $ par bête. Les éleveurs-naisseurs ont jusqu’au 28 mai pour décider de souscrire une assurance des prix ou non. Pour bon nombre d’entre nous, c’est trop cher.
Nous demandons aux gouvernements fédéral et provinciaux de couvrir une part des primes avec nous pour cette année, comme ils le font pour l’assurance-récolte. Ainsi, la participation au programme sera maintenue et les producteurs qui font face à beaucoup d’incertitude quant aux marchés vont pouvoir tenir malgré la tempête.
Pour notre exploitation, j’estime que l’assurance de prix est l’outil le plus important auquel nous avons accès. Sans cela, nous n’avons aucun contrôle sur le pire risque auquel notre exploitation est exposée, soit le risque lié aux fluctuations du marché. Étant donné que je suis un jeune exploitant et que ma dette est élevée, mes prêteurs exigent que j’aie un moyen d’atténuer le risque lié aux prix. Cela permet aux jeunes producteurs de s’assurer d’un prix plancher pour le bétail et les aide à garantir l’avenir de leurs exploitations bovines en croissance. De plus, les jeunes producteurs sont généralement très endettés et n’ont aucune valeur nette sur laquelle miser en période de ralentissement sur le marché du bétail, ce qui constitue une menace pour la sécurité alimentaire à long terme du Canada. Cela met en évidence l’importance de gérer le risque lié aux prix au moyen d’un programme opportun et constituant une valeur sûre, et c’est ce que fait l’assurance des prix du bétail.
Comme vous pouvez le voir, l’assurance des prix est un outil très important, mais nos voisins de l’Atlantique fonctionnent toujours sans cela, ce qui limite leur capacité de gérer le risque et de faire croître le secteur du bœuf. La région a les terres et le fourrage qu’il faut pour augmenter le troupeau, mais elle n’a pas cet important outil de gestion du risque qui favorise l’expansion du troupeau. L’accès à un programme d’assurance des prix est essentiel à l’atteinte de ces objectifs d’expansion.
Les producteurs de bovins du Canada et des Maritimes aimeraient souligner au Comité qu’il est de la plus grande importance d’établir un indice de règlement pour l’Est, dans le cadre du Programme d’assurance des prix du bétail. Un tel indice contribuerait à une couverture d’assurance des prix nationale, à l’échelle du Canada.
L’Ontario n’a pas d’assurance des prix du bétail, mais ils ont leur Programme de gestion des risques, ou PGR. Ils ont demandé que le plafond du programme soit augmenté, car l’année dernière, leur capacité de transformation a été insuffisante, ce qui a exercé des pressions financières non négligeables sur leur industrie. Le plafond de financement du programme en limite gravement la capacité de fournir des niveaux de soutien adéquats, particulièrement pendant les années difficiles.
C’est pourquoi nous recommandons que des montants additionnels soient consacrés à améliorer les principaux outils de gestion de risque utilisés par les producteurs de bovins du Canada: l’assurance des prix du bétail et le PGR.
Notre troisième recommandation est d’améliorer le Programme de paiement anticipé en augmentant pour les bovins la partie sans intérêt de l’avance à 500 000 $, en augmentant le plafond de l’avance de fonds totale à 3 millions de dollars et en prolongeant la période de remboursement pour les bovins à 36 mois.
Étant donné que l’industrie connaît en ce moment une capacité de transformation réduite et une grande incertitude quant à la durée de la pandémie de COVID-19, ces améliorations donneraient aux producteurs de bovins plus de liquidités et de flexibilité concernant la mise en marché de leur produit au meilleur moment et au meilleur prix. Elle pourrait aussi leur permettre de conserver plus de bovins de reproduction dans leurs troupeaux de vaches.