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La séance est ouverte. Bienvenue à la 26
e réunion du Comité permanent des anciens combattants de la Chambre des communes.
La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le 27 octobre 2020, le Comité entame son étude sur les chiens d'assistance pour les anciens combattants.
J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins qui ont pris le temps de se joindre à nous aujourd'hui. Je vais présenter tous les témoins, puis permettre à la personne responsable de faire une déclaration préliminaire.
Nous attendons la Dre Alexandra Heber, cheffe de la psychiatrie, Division des professionnels de la santé. Nous avons avec nous Crystal Garrett-Baird, directrice générale, Politique et recherche, ainsi que Nathan Svenson, directeur, Recherche.
Madame Garrett-Baird, je crois que vous ferez une déclaration préliminaire de cinq minutes. Vous avez la parole.
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Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité.
[Français]
Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui.
[Traduction]
Je commencerai par reconnaître que je me trouve aujourd'hui sur le territoire traditionnel et non cédé de la Première Nation mi’kmaq d’Abegweit.
Je suis heureuse d'avoir l'occasion de vous parler aujourd'hui des chiens d'assistance en santé mentale. Je vous donnerai un aperçu des développements à ce jour, tant au Canada qu'ailleurs dans le monde, en ce qui concerne l'utilisation de chiens d'assistance pour aider les anciens combattants qui souffrent de troubles de santé mentale.
L'Institut national canadien pour les aveugles a été fondé en 1918, il y a plus de 100 ans, en grande partie à cause du nombre de soldats ayant une déficience visuelle qui revenaient de la Première Guerre mondiale et des nombreux Canadiens qui ont perdu la vue dans l'explosion d'Halifax. Nous serons toujours reconnaissants envers ces premiers intervenants qui ont reconnu la nécessité d'améliorer le soutien aux personnes ayant une déficience visuelle et qui sont passés à l'action.
Au cours des années qui ont suivi sa création, l'Institut national canadien pour les aveugles a fourni des chiens d'assistance aux personnes ayant une déficience visuelle et un soutien opportun aux maîtres-chiens.
À titre de soutien supplémentaire aux anciens combattants qui reçoivent un chien-guide, le gouvernement du Canada, par l'entremise du Programme des avantages médicaux d’Anciens Combattants Canada, rembourse les coûts associés aux soins et à l'entretien des chiens-guides jusqu'à un montant maximum annuel de 1 500 $, plus les frais de déplacement connexes, y compris ceux liés à l’orientation et à la formation avec un chien-guide. Les coûts associés aux autres chiens d'assistance, par exemple pour les problèmes de santé mentale, les troubles auditifs et les problèmes de mobilité, ne sont pas couverts.
[Français]
Au cours des dernières années, on a constaté un intérêt accru à l'égard des chiens d'assistance pour aider les vétérans qui souffrent de troubles de santé mentale.
[Traduction]
Les chiens d'assistance en santé mentale, ou les chiens d'assistance, reçoivent un entraînement intensif qui les amène à réagir précisément à la déficience particulière de leur maître, notamment dans le cas des personnes ayant reçu un diagnostic de trouble de santé mentale comme le trouble de stress post-traumatique. Les chiens d'assistance sont dressés pour détecter l'anxiété chez leur maître et intervenir; ils contribuent ainsi à donner à leur maître un sentiment de sécurité, à l'aider à se détendre et à favoriser la socialisation.
En 2015, Anciens Combattants Canada a financé une étude pilote visant à évaluer la sécurité et l'efficacité de l'utilisation de chiens d'assistance pour aider les anciens combattants souffrant d'un trouble de stress post-traumatique, car les recherches dans ce domaine sont limitées. Le projet a été confié en sous-traitance par l'entremise de l'Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans et a été mené par une équipe de chercheurs de l'Université Laval.
Les anciens combattants qui ont participé à l'étude pilote ont été suivis pendant une période de 18 mois, afin d'examiner les effets qu'un chien d'assistance peut avoir sur les symptômes psychiatriques, le fonctionnement social quotidien et la qualité de vie des anciens combattants atteints d'un trouble de stress post-traumatique. L'étude a pris fin en 2018.
[Français]
Malgré la portée limitée de l'étude pilote, ses résultats ont contribué à éclairer les décisions politiques relatives aux chiens d'assistance. Sur la base des conclusions de la première phase de cette étude, le gouvernement a créé un crédit d'impôt pour les chiens d'assistance psychiatrique dans le budget de 2018.
[Traduction]
Plus précisément, l'Agence du revenu du Canada a élargi le crédit d'impôt pour frais médicaux aux chiens d'assistance en santé mentale lorsque l'animal est fourni par une personne ou une organisation dont le but principal est de fournir ce dressage spécial et que le chien est spécialement dressé pour accomplir des tâches particulières afin d'aider une personne à vivre avec une déficience grave. Les vétérans qui recourent à ces chiens profitent directement de cette mesure.
Malgré quelques avancées dans ce domaine, l'un des principaux obstacles pour déterminer l'efficacité de l'utilisation des chiens d'assistance en santé mentale est l'absence de normes nationales. L'accessibilité est de ressort provincial, mais les provinces n'ont pas toutes atteint le même niveau dans l'adoption de ces normes.
En 2015, Anciens Combattants Canada a confié à l'Office des normes générales du Canada le mandat d'établir une norme nationale pour uniformiser le dressage et la qualité des chiens d'assistance destinés aux vétérans ayant des problèmes de santé mentale. Le ministère sortait alors des sentiers battus, mais, conscient de l'intérêt croissant des vétérans pour ces chiens, il souhaitait une évolution du dossier dans un sens qui leur était favorable.
En avril 2018, l'Office des normes générales du Canada annonçait aux membres du comité que, faute de consensus entre eux sur la possibilité, pour la norme, d'atteindre les résultats escomptés, il renonçait à son élaboration, ce qui a mis fin aux travaux.
Anciens Combattants Canada persévère et continue de travailler avec les parties prenantes. En 2019, l'organisme Wounded Warriors Canada a poursuivi, grâce au Fonds pour le bien-être des vétérans et de leur famille, un projet visant à élargir son Programme de chiens d'assistance pour le trouble de stress post-traumatique.
[Français]
La recherche est un autre domaine intéressant. Anciens Combattants Canada continue de suivre l'évolution des études liées à l'utilisation de chiens d'assistance menées par des pays alliés.
[Traduction]
Depuis 2019, le ministère australien des anciens combattants mène une étude de quatre ans sur l'incidence des chiens d'assistance chez les vétérans souffrant de ce trouble.
Les États-Unis sont peut-être les plus avancés dans la recherche et les prestations versées pour les chiens d'assistance. Actuellement, la prestation de santé vétérinaire pour chiens d'assistance versée par leur ministère des anciens combattants permet aux vétérans de bénéficier de chiens d'assistance pour des problèmes d'audition, de vision et de mobilité.
Par ailleurs, ce ministère a récemment publié les résultats d'une étude de cinq ans sur l'incidence des chiens d'assistance sur les vétérans souffrant du trouble de stress post-traumatique. L'étude portait sur 153 vétérans atteints de ce trouble, certains jumelés à des chiens d'assistance et d'autres à des chiens de soutien affectif. Elle a révélé que, en 18 mois, les vétérans ayant un chien d'assistance ont signalé des améliorations plus importantes des symptômes de ce trouble, des tendances suicidaires et des réactions de colère. Le ministère n'a pas encore annoncé de changements dans son programme ni l'inclusion des chiens d'assistance dans la gamme de prestations qu'il offre. Ses éventuels changements d'orientation sont suivis de près.
Enfin, la recherche et l'activité dans ce domaine évoluent. Anciens Combattants Canada s'engage à rester en contact avec ses alliés, les chercheurs, les intervenants et les vétérans et leur famille sur la question des chiens d'assistance.
Je vous remercie pour votre temps.
Je précise d'abord que l'Office des normes générales du Canada a fait un effort concerté pour obtenir le consensus sur cette question. Il a établi un comité technique de plus de 15 membres, qui comprenait des représentants de groupes d'anciens combattants, d'associations de chiens-guides, d'organismes publics de réglementation et de dresseurs.
Au début du processus, l'apport des diverses parties prenantes a contribué à élargir l'objet de la norme des chiens d'assistance psychiatrique à l'ensemble des chiens d'assistance. Ça pourrait avoir rendu le consensus plus difficile.
En 2017, on a publié, pour obtenir les observations du public, la première ébauche de la norme. Elle énonçait des exigences pour les préposés, la détermination du handicap, des renseignements détaillés sur le dressage et le soin des chiens, les races de chiens et les fournisseurs acceptables. On a ainsi rassemblé plus de 600 pages d'observations.
L'impossibilité du consensus est attribuable à un certain nombre de partenaires et d'acteurs, particulièrement dans l'industrie. Ça concernait la durée exigée du dressage, l'âge du début du dressage des chiens et l'emploi de colliers électriques. Les sujets de désaccord étaient très nombreux. Ç'a été la véritable cause de l'interruption du processus.
Avez-vous d'autres questions?
On a lancé cette étude en 2015, en collaboration avec l'Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans. Elle était dirigée par l'Université Laval. Son objet, comme nous l'avons dit, était d'étudier l'efficacité éventuelle des chiens d'assistance en santé mentale pour les anciens combattants, précisément ceux qui souffraient du syndrome de stress post-traumatique. C'était une étude pilote. Les sujets étaient peu nombreux. Dix-huit anciens combattants sont allés jusqu'au bout de l'étude de 18 mois. Ils étaient 31 au départ, mais seulement 18 ont gardé leur chien durant l'étude et ont continué à communiquer les résultats les concernant.
En fin de compte, ils ont signalé moins de cauchemars, une qualité accrue de leur sommeil et une réduction de leurs symptômes de SSPT et de dépression. Certains ont signalé une amélioration globale de leur qualité de vie. On a également constaté une meilleure intégration sociale dans la communauté. La seule observation à ne pas montrer d'amélioration mesurable a été la diminution de la dépendance des fournisseurs de soins. On la mesure dans une étude séparée, actuellement en cours en Australie, qui vise à déterminer si on peut la mesurer séparément de façon plus robuste.
La petite taille de l'étude et l'ensemble d'écoles canadiennes participantes ont limité dans une assez grande mesure l'utilisation des résultats. Sept écoles ont participé à l'étude. Parmi les difficultés éprouvées, mentionnons d'abord l'absence de consensus entre les écoles sur les races de chiens à dresser et sur leur provenance recommandée. La plupart des chiens étaient des animaux donnés ou sauvés de la mort. La durée de leur dressage variait beaucoup, d'une école à l'autre. Certaines insistaient davantage sur les besoins particuliers de chaque ancien combattant. D'autres accentuaient davantage le dressage avant le jumelage, pour en faire ensuite très peu. Chez d'autres, encore, c'était le contraire.
Il importe également de noter la grande variation des placements et des milieux. D'un patient à l'autre, on notait des différences entre les types de logement, les relations sociales, les autres traitements et médicaments reçus, l'intérêt personnel dans des activités et la possession d'un autre animal de compagnie. Tous ces facteurs rendaient difficile toute généralisation approximative à partir des constats limités de l'étude.
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Je vous remercie infiniment, madame Garrett-Baird.
Permettez-moi d'ajouter deux ou trois choses. Tout d'abord, il n'y a effectivement pas de preuves suffisantes pour confirmer que la présence d'un chien d'assistance psychiatrique constitue un traitement ou une thérapie, en fait. Nous considérons plutôt le chien comme un traitement d'appoint ou complémentaire aux traitements fondés sur des données probantes pour le trouble de stress post-traumatique, ou TSPT, la dépression majeure ou toute autre condition pour laquelle le chien aide l'ancien combattant. Je pense que c'est le premier point important.
La deuxième chose que je veux dire, c'est qu'il s'agit cependant d'un enjeu complexe. Ce n'est pas anodin. Permettez-moi de vous raconter une anecdote. Alors que je portais encore l'uniforme en 2014, on m'a confié le dossier des chiens d'assistance. J'ai commencé à communiquer avec les organismes de chiens d'assistance au Canada pour savoir ce qu'ils faisaient et leur parler un peu des programmes.
Une des travailleuses avec qui j'ai discuté m'a raconté une histoire. L'organisme avait entraîné un chien d'assistance pour un ancien combattant ou un membre actif. La personne avait ramené ce chien chez elle. Il y a habituellement un suivi pendant un certain temps pour voir comment le patient se porte. Lorsque les responsables se sont présentés au domicile, ils ont constaté que le chien d'assistance n'avait pas été nourri et que la personne était vraiment inapte. Je me demande si elle ne souffrait pas d'une dépression majeure. Elle était incapable de sortir du lit. Elle ne prenait pas très bien soin d'elle-même et n'était pas en mesure de s'occuper du chien. J'ai demandé à la travailleuse ce qu'ils ont fait. Elle a répondu: « Nous avons repris le chien. » Bien sûr, je lui ai ensuite demandé ce qu'il est advenu de la personne qui avait été laissée dans la maison. La travailleuse ne le savait pas. Elle n'a pas été capable de me répondre.
Je pense que l'histoire illustre simplement que la question est loin d'être simple. Pour avoir un chien, une personne doit être suffisamment rétablie pour s'occuper de l'animal et assumer cette responsabilité. Je pense que les anciens combattants peuvent être aux prises avec un certain nombre de problèmes relatifs au bien-être qui les empêchent de le faire. Il n'est pas anodin de confier un chien à quelqu'un. Je pense qu'il y a beaucoup d'enjeux à considérer ici.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence aujourd'hui et de leur témoignage.
Il y a beaucoup de choses à assimiler. J'ai entendu un témoin dire qu'il doit être prioritaire de faire ce qu'il faut pour les anciens combattants, et je suis tout à fait d'accord.
Je dois dire qu'en raison de l'absence de normes nationales, la situation est dans un état lamentable. Ce que nous voyons, c'est une multitude de domaines et de façons d'entraîner les animaux au pays, ce qui crée un manque d'uniformité. Certains anciens combattants essaient d'obtenir le soutien dont ils ont besoin, mais ne reçoivent pas nécessairement des chiens entraînés convenablement. Nous constatons également que, souvent, les patients ne peuvent pas les emmener dans des lieux publics parce que ces derniers ne sont pas considérés comme de véritables chiens de soutien. Nous savons que les chiens ne peuvent pas monter à bord d'un avion.
J'ai personnellement eu affaire à ce problème dans ma circonscription. Un ancien combattant qui possédait un chien d'assistance n'arrivait pas à trouver un foyer parce qu'aucun ne lui permettait d'amener son chien, étant donné que celui-ci n'avait pas de certification de chien d'assistance. Il a donc « choisi » d'être sans abri parce qu'il ne pouvait pas fonctionner sans son chien d'assistance à ses côtés.
Quand j'entends ce genre de chose, je conviens que l'enjeu est complexe et que la plupart des choses sont compliquées, mais le problème, c'est l'absence de normes nationales. Pour cette raison, personne n'est tenu de rendre des comptes, et les anciens combattants ne reçoivent pas ce dont ils ont désespérément besoin.
J'ai tellement de questions, mais la première se rapporte à l'Office des normes générales du Canada. Ce que je crois avoir entendu, c'est que l'organisme prévoyait faire une étude, mais qu'il n'est pas parvenu à un consensus. J'aimerais en savoir un peu plus sur ses principaux soucis, voire les trois premiers. Je crois savoir que l'Office a élargi la portée de l'étude, ce qui a complexifié le dossier.
Je suis persuadée que vous n'aurez pas d'opinion sur le sujet, mais je me demande simplement s'il ne serait pas plus judicieux de rester sur la route à une voie pour au moins finir le premier volet, avant de passer à l'étape suivante?
Est-ce qu'un témoin peut répondre à la question? Je suis désolée, mais j'ignore à qui m'adresser. Je vous laisse décider.
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D'accord, parlons de ce volet.
Nous voulons des normes nationales. Si ACC compte travailler avec Wounded Warriors Canada dans le cadre de son programme de chiens d'assistance, ne pourrions-nous pas aider l'organisme à établir une sorte de norme nationale que nous pourrions soumettre à l'examen d'un autre comité?
J'ai l'impression que c'est de plus en plus déroutant. J'ai entendu ce que la Dre Heber a dit tout à l'heure, et je comprends parfaitement. Cependant, en l'absence de normes nationales, lorsqu'un ancien combattant se voit confier un chien, il n'y a aucun processus de vérifications d'usage. C'est là où le bât blesse.
Ce que j'entends, c'est que nous avons un crédit d'impôt. Eh bien, c'est formidable. Mais qui en profite réellement? Pouvez-vous nous donner des chiffres? Combien de personnes ont réellement eu accès à ce crédit? L'autre chiffre que j'aimerais connaître est le nombre de personnes qui ont essayé de l'obtenir, mais qui n'ont pas pu, et les raisons. Avons-nous des renseignements à ce sujet?
Je suppose que deux questions se posent. D'une part, étant donné que Wounded Warriors Canada reçoit déjà un soutien d'ACC, l'organisme serait-il bien placé pour commencer à établir de telles normes nationales, même de façon préliminaire? Nous pourrions ainsi faire avancer les choses et voir comment tout se passe. Voilà la première question.
D'autre part, savons-nous combien de personnes ont réellement bénéficié du crédit d'impôt? J'ai parlé plus tôt d'un ancien combattant sans abri qui avait un chien d'assistance. Il n'avait pas de milliers et de milliers de dollars à avancer pour obtenir un chien. Il a perdu son animal il n'y a pas si longtemps. Qui a accès au crédit d'impôt? Combien de personnes ont essuyé un refus? Pourrions-nous obtenir ces chiffres?
Ce sont mes deux questions. J'espère qu'elles sont claires.
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Je vous remercie, monsieur le président.
J'écoute les délibérations, et je suis de plus en plus frustré. Chaque jour, je reçois un appel téléphonique ou un message d'un ancien combattant qui des difficultés. Tous les jours, je reçois un appel ou un message d'un membre d'une famille qui a perdu un être cher. J'ai vu de mes propres yeux les effets que les chiens d'assistance peuvent avoir sur nos anciens combattants et nos premiers répondants, et je trouve absolument ahurissant que ceux qui devaient s'occuper des anciens combattants ayant servi notre pays viennent devant le Comité et pointent du doigt les provinces ou...
Docteure Heber, vous avez parlé d'un ancien combattant qu'un de vos collègues a trouvé en situation de détresse évidente, après quoi vous n'avez pas pu savoir comment il se portait... C'est incroyable. Quatre années se sont écoulées. Il y a des pays qui offrent des services exceptionnels et dont nous pouvons nous inspirer. Nous avons Wounded Warriors Canada, qui élabore ses propres normes, et pourtant... C'est tellement frustrant. Nous voyons maintenant de nos propres yeux pourquoi les anciens combattants qui traitent avec ACC se font répondre froidement. Je trouve la situation vraiment choquante. Nous devons sérieusement faire mieux. C'est tout simplement incroyable. Nous avons assurément assez de gens instruits.
Docteure Heber, vous avez une tonne de diplômes et de certificats, et je suis certain que tous nos témoins sont issus d'éminents établissements d'enseignement. Nous devons certainement pouvoir établir des normes ou nous entendre sur celles-ci afin de fournir à nos anciens combattants le soutien dont ils ont tant besoin. Ne seriez-vous pas tous d'accord pour qu'il y ait un traitement prescrit que vous approuverez, ou peut-être une protection...? Je n'en suis pas sûr, mais j'ai l'impression que c'est ce qui est sous-entendu. Si l'animal évite que certains anciens combattants s'enlèvent la vie, ne devrions-nous pas faire tout en notre pouvoir pour fournir un chien? Ne devrions-nous pas tout faire pour éviter que nos anciens combattants ne finissent en situation d'itinérance, et pour qu'ils aient tout le soutien dont ils ont besoin? Je suis renversé par votre témoignage d'aujourd'hui.
Madame Garrett-Baird, depuis combien de temps travaillez-vous à ACC?
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Exact. C'est une excellente question.
En réalité, il s'agit de comparer l'incidence des chiens d'assistance — les chiens d'assistance psychiatrique, en l'occurrence — par rapport aux chiens de soutien émotionnel. Les chiens de thérapie peuvent être présents pendant le traitement, mais l'ancien combattant ne peut pas les avoir avec lui en permanence. On en revient à ces deux catégories, les chiens d'assistance et les chiens de soutien émotionnel.
C'était la question clé dans le cadre de l'étude du département des Anciens Combattants des États-Unis. Il a jumelé 88 anciens combattants avec un chien d'assistance, et 65 anciens combattants avec un chien de soutien émotionnel. C'est le nombre de personnes qui ont participé à l'étude. C'était une étude échelonnée sur deux ans. Le ministère a constaté que les chiens de soutien émotionnel avaient une incidence semblable à celui des chiens d'assistance sur la qualité du sommeil, le niveau de dépression et les aspects mentaux de la qualité de vie. Cependant, il a constaté plus précisément que les chiens d'assistance psychiatrique avaient une incidence beaucoup plus importante pour ce qui est de l'amélioration des symptômes du syndrome de stress post-traumatique et des réactions de colère et, dans une certaine mesure, des tendances suicidaires, comparativement aux chiens de soutien émotionnel.
Ce sont là les conclusions de l'étude qui viennent d'être publiées il y a quelques mois.
Quand nous nous sommes penchés sur le travail des chiens d'assistance, nous avons examiné ce que font les différentes provinces et leur niveau de maturité. Comme je l'ai mentionné, nous avons en Colombie-Britannique un cadre législatif très perfectionné, ce qui n'est pas forcément le cas dans d'autres situations.
Compte tenu des demandes de renseignements que nous recevions à propos des chiens d'assistance pour les anciens combattants, c'est la raison pour laquelle, en 2015, nous avons conclu un contrat avec l'Office des normes générales du Canada pour établir cet ensemble de normes nationales afin qu'il y ait une harmonisation dans le dressage et la qualité des chiens d'assistance utilisés pour aider les anciens combattants souffrant de problèmes de santé mentale. C'est en grande partie parce que nous étions conscients de l'intérêt croissant pour les chiens d'assistance au sein de la communauté des anciens combattants et que nous voulions faire avancer le dossier pour soutenir ces anciens combattants. Malheureusement, comme nous l'avons mentionné, l'Office a avisé les membres du Comité en avril 2018 qu'il retirait son intention de produire une norme parce qu'il n'y avait pas de consensus et que la norme ne pourrait pas être réalisée en ayant une incidence positive, donc on a abandonné le projet.
Cependant, nous avons poursuivi les recherches et, par l'entremise du Fonds pour le bien-être des anciens combattants et de leur famille en 2019, nous avons fondé Wounded Warriors Canada pour élargir le programme de chiens d'assistance pour le trouble de stress post-traumatique. Il fait vraiment un travail incroyable à ce chapitre, tant pour élaborer des lignes directrices et des critères...
Nous devons vraiment résoudre ce problème pour nos anciens combattants. Je pense essentiellement que notre problème, c'est qu'il n'y avait pas de consensus au sein de l'Office et du groupe qui travaillait là-dessus, alors ils ont abandonné le projet. Quelles sont les circonstances qui nous ont menés là? C'est l'objectif même de l'Office des normes. Il traite de toutes sortes de questions compliquées. Quel a été le problème?
Bien franchement, d'après ce que j'ai compris, il y avait des conflits d'intérêts en raison des voies qu'un certain nombre de ces organisations avaient empruntées. Comme vous l'avez dit, elles n'ont pas réussi à se mettre d'accord sur le fait qu'il y a une énorme différence entre un chien d'obéissance et un chien d'assistance.
Je pense vraiment qu'il est important que nous trouvions les personnes qui ont la crédibilité et qui ont fait les recherches — et nous les avons au Canada — pour reprendre le flambeau et faire ce qui s'impose. Les personnes qui n'ont pas d'argent en jeu et qui n'ont pas reçu de fonds directement du gouvernement pour financer les chiens d'assistance peuvent établir les normes que, nous le savons, nous pouvons avoir au Canada pour ces chiens.
Je vous encourage à y réfléchir. Nous allons certainement nous pencher sur la question au Comité. L'absence de consensus n'était pas due à la complexité du problème, mais à des conflits d'intérêts, je crois, au sein de l'Office. C'est un point essentiel lorsque vous essayez d'établir des normes. Vous devez prendre du recul et faire appel à des personnes qui ne font pas partie de cette dynamique au point de ne pas pouvoir examiner la question de manière objective.
Je ne sais pas si vous diriez que cela faisait partie de la dynamique ou non, ou si vous êtes prêt à vous aventurer sur ce terrain.