FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FINANCE
COMITÉ PERMANENT DES FINANCES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 18 mai 2000
Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte et je souhaite la bienvenue à toutes les personnes présentes ici cet après-midi.
Comme vous le savez, nous étudions aujourd'hui le projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, la Loi sur la taxe d'accise et la Loi d'exécution du budget de 1999.
• 1535
Nous recevons aujourd'hui des représentants du ministère des
Finances. Il s'agit de Brian Ernewein, directeur, Division de la
législation de l'impôt, Direction de la politique de l'impôt; M.
Gérard Lalonde, chef principal, Division de la législation de l'impôt,
Direction de la politique de l'impôt et M. John Hayward, chef,
Division de l'impôt des particuliers, Direction de la politique de
l'impôt. Le secrétaire parlementaire du ministre des Finances, M. Roy
Cullen, va nous faire une déclaration liminaire.
Monsieur Cullen.
M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Je serai bref afin qu'il nous reste du temps pour les questions et observations, Paul.
Le projet de loi C-25 met en oeuvre un grand nombre des dispositions concernant l'impôt sur le revenu des particuliers et d'autres mesures d'équité fiscale annoncées dans le budget de février 1999 ainsi que des modifications fiscales supplémentaires. Chacune de ces mesures fait suite à l'engagement que le gouvernement a pris de réduire les impôts et d'assurer une meilleure équité fiscale.
[Français]
Cet engagement a été réitéré l'automne dernier dans le discours du Trône et dans La Mise à jour économique et financière de l'automne, ainsi que dans le budget de février, lorsque le ministre des Finances a donné suite à sa promesse en annonçant qu'il instaurait un plan quinquennal de réduction des impôts prévoyant les changements structurels les plus importants à être apportés au régime fiscal fédéral en plus de 10 ans.
[Traduction]
Monsieur le président, chacun des budgets que le gouvernement a présentés jusqu'ici comprenait des mesures fiscales ciblées. En 1997-1998, l'élimination du déficit nous a permis de commencer à proposer des mesures fiscales d'une plus grande portée.
Je voudrais maintenant parler plus précisément des mesures que contient le projet de loi que nous examinons aujourd'hui.
Trois mesures de réduction générale des impôts ont été annoncées dans le budget de 1999. Sous réserve de l'adoption de ce projet de loi, chacune de ces mesures est entrée en vigueur le 1er juillet 1999. Le budget de 1998 relevait de 500 $ le montant d'argent que les Canadiens à faible revenu peuvent recevoir sans payer d'impôt. Le budget de 1999 étend cette mesure à tous les contribuables et augmente encore ce montant de 175 $.
Le budget de 2000 le rehausse une nouvelle fois, mais comme je l'ai dit, c'est prévu dans une loi distincte.
[Français]
De plus, dans le budget de 1998, le gouvernement a commencé à abolir la surtaxe générale de 3 p. 100 en l'éliminant pour certains contribuables et en la réduisant pour d'autres. Le budget de 1999 ferme la boucle de ce processus en éliminant cette surtaxe pour tous les contribuables.
[Traduction]
Pour en venir aux mesures d'équité fiscale, monsieur le président, je voudrais d'abord parler des dispositions concernant le fractionnement du revenu avec des enfants mineurs, les paiements forfaitaires rétroactifs, les organismes communautaires, les faux énoncés de tiers, de même que l'imposition des REER et de FEER au décès.
Premièrement, monsieur le président, ce projet de loi instaure un impôt spécial s'appliquant aux structures conçues pour le fractionnement du revenu avec des mineurs. C'est une méthode que des contribuables à revenu élevé utilisent couramment pour abaisser leur impôt en partageant leur revenu avec des contribuables à faible revenu, généralement des membres de leur famille. Cet impôt spécial s'applique au revenu des personnes âgées de 17 ans et moins, y compris les dividendes imposables et autres avantages imposables provenant d'actions non cotées de sociétés canadiennes ou étrangères, de même que le revenu d'une société de personnes ou d'une fiducie dérivé d'une activité exécutée par un membre de la famille de l'enfant.
[Français]
Une autre mesure contenue dans le projet de loi prévoit un mécanisme spécial d'allégement pour calculer l'impôt sur les paiements forfaitaires, par exemple les prestations de retraite ou de pension et les pensions alimentaires au conjoint ou aux enfants. En vertu du régime actuel, les particuliers sont imposés l'année où ils reçoivent ces paiements même si une bonne partie de ceux-ci se rapporte à des années antérieures.
[Traduction]
Afin d'imposer à peu près au même niveau le revenu gagné par les organismes communautaires comme les colonies huttérites et le revenu agricole général, l'article 143 de la Loi de l'impôt sur le revenu est modifié de façon à permettre la distribution du revenu des deux conjoints. Cela réduira le fardeau fiscal des organismes communautaires où la distribution du revenu était limitée à un conjoint par famille tandis que les salaires versés aux conjoints dans les exploitations agricoles et autres entreprises étaient déductibles de l'impôt.
Le projet de loi C-25 prévoit également deux nouvelles pénalités administratives applicables aux tiers qui font de faux énoncés pouvant être utilisées aux fins de l'impôt.
• 1540
La première pénalité s'applique aux faux énoncés concernant les abris
fiscaux et autres dispositions de planification financière. La
deuxième s'applique aux personnes qui aident à faire une fausse
déclaration de revenu.
[Français]
Les dispositions à cet égard instaurent également un critère de «conduite coupable» établi en fonction des types de conduite pour lesquels les tribunaux ont par le passé imposé des pénalités administratives. Le projet de loi prévoit une exception aux critères de conduite coupable pour le «crédit accordé de bonne foi à l'information fournie».
[Traduction]
Une autre disposition qui doit être modifiée est l'inclusion des revenus des REER et des FEER au décès d'un contribuable. Si le REER est légué aux enfants à charge plutôt qu'au conjoint survivant, ce sont les enfants à charge et non pas la succession qui devront inclure ce revenu. Cette mesure constitue généralement un allégement étant donné que l'impôt payable par la succession dans ces circonstances est généralement plus élevé que l'impôt payable par les enfants à charge.
Ensuite, monsieur le président, je voudrais souligner les modifications apportées à trois crédits d'impôt.
Premièrement, le crédit d'impôt pour frais médicaux sera élargi de façon à couvrir les soins aux personnes gravement handicapées qui vivent dans un foyer de groupe, les traitements dispensés à ces personnes, le tutorat de ceux qui ont des difficultés d'apprentissage ainsi que les livres-cassettes dont les personnes atteintes d'une déficience de la perception ont besoin pour fréquenter un établissement d'enseignement.
Deuxièmement, les sociétés qui produisent de l'énergie électrique destinée à la vente ou de la vapeur pour produire cette électricité pourront maintenant bénéficier du crédit d'impôt pour bénéfices de fabrication et de transformation.
Et troisièmement, les sociétés à capital de risque de travailleurs, les SCRT, seront incitées à investir davantage dans la petite entreprise. De plus, le projet de loi clarifie les règles qui s'appliquent lorsqu'une SCRT est incluse dans une fusion ou une autre restructuration de société.
Les mesures budgétaires restantes que contient le projet de loi C-25 comprennent un mécanisme d'allégement permettant aux sociétés qui reçoivent des intérêts imposables sur un remboursement d'impôt et qui doivent, en même temps, des intérêts non déductibles sur l'impôt impayé de demander la compensation des intérêts.
[Français]
grâce à une nouvelle règle pour aider l'industrie canadienne des services de placement à soutenir la concurrence sur les marchés internationaux, le fait d'engager une entreprise canadienne pour fournir certains services de placement ne veut pas dire qu'un fonds de placement non résident exploite une entreprise au Canada; la prolongation de la surtaxe sur les institutions de dépôt jusqu'au 31 octobre 2000.
[Traduction]
Monsieur le président, les mesures non budgétaires que contient ce projet de loi concernent la fiscalité des Premières nations, l'indemnisation des victimes de l'hépatite C et la démutualisation.
Le projet de loi facilite la mise en oeuvre des accords fiscaux conclus avec les Premières nations en réduisant l'impôt fédéral pour les personnes assujetties à l'impôt sur le revenu de certaines Premières nations. Plus particulièrement, ce projet de loi donne effet aux accords de partage fiscal conclus entre le gouvernement fédéral et les Premières nations autonomes du Yukon. D'autre part, il fait en sorte que le fardeau fiscal d'un particulier assujetti au régime fiscal d'une Première nation soit le même que dans les juridictions avoisinantes.
Une autre mesure exonère de l'impôt le revenu de la fiducie qui a été établie par le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires pour indemniser les victimes de l'hépatite C.
Le traitement fiscal de la démutualisation du secteur de l'assurance fait également partie de cette mesure. Les avantages reçus sous forme d'espèces par suite de la démutualisation sont assimilés à un dividende et donneront droit au crédit d'impôt pour dividendes. Le souscripteur qui reçoit des avantages sous forme d'actions n'a pas d'impôt à payer. En revanche, une fois les actions vendues, il devra payer l'impôt sur les gains en capital.
[Français]
Monsieur le président, j'ai tenté de faire un bref survol des faits saillants du projet de loi C-25.
[Traduction]
Comme je l'ai déjà dit, chacune de ces mesures correspond au principe de l'équité fiscale. Comme je l'ai dit également, les mesures fiscales proposées plus récemment dans le budget de 2000 feront l'objet d'une loi distincte.
Les fonctionnaires du ministère et moi-même nous feront un plaisir de répondre aux questions des membres du comité.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Cullen.
Nous allons maintenant passer aux questions. Je suppose que nous allons commencer par M. Forseth.
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Merci beaucoup.
Il s'agit certainement d'un projet de loi de nature plutôt administrative. Lorsque nous examinons le sommaire des dispositions, il y en a 15 dont certaines n'ont rien de controversé, comme la fiducie pour l'hépatite C. Et nous comprenons la tendance à la démutualisation des compagnies d'assurance, un phénomène répandu dans tout le monde occidental. Mais peut-être pourrait-on nous expliquer un peu mieux pourquoi la surtaxe de 3 p. 100 sur le revenu des particuliers est éliminée.
• 1545
C'est un concept intéressant à relier avec votre phrase du début
quand vous dites: «Chacune de ces mesures fait suite à l'engagement
que le gouvernement a pris de réduire les impôts et d'améliorer
l'équité fiscale». S'agit-il d'idées distinctes? Sont- elles
contradictoires? N'y a-t-il pas un lien entre la réduction d'impôt et
l'équité fiscale? L'équité fiscale s'applique-t-elle à autre chose?
Cette idée, ce concept, cet état d'esprit se trouve dans le premier
paragraphe. Peut-être pourriez-vous donc commencer par cela et ensuite
établir le rapport avec une disposition quelque peu tardive, mais dont
je me réjouis, soit l'élimination de la surtaxe de 3 p. 100.
M. Roy Cullen: Merci, monsieur Forseth.
Je dois sans doute faire un petit retour en arrière et remonter au plan économique et financier. Notre gouvernement s'est clairement engagé à fournir aux Canadiens les outils, les moyens et le climat économique voulus pour se préparer à affronter ce siècle et la nouvelle économie mondiale. Je sais que ce sont des expressions galvaudées, mais...
Le ministre des Finances estime que, dans le cadre de cette stratégie, il faut redonner plus d'argent aux Canadiens. Le programme d'allégement des impôts d'une valeur de 58 milliards de dollars annoncé dans le budget 2000 et les mesures antérieures font certainement de la réduction des impôts un élément très important de cette stratégie financière et économique.
Lorsqu'on cherche à réduire les impôts, il faut le faire de la façon la plus équitable possible. Avant d'éliminer le déficit, nous avons cherché à alléger le fardeau fiscal des Canadiens qui avaient des besoins particuliers, comme les personnes handicapées ou les Canadiens à faible revenu. Lorsque nous avons réussi à équilibrer le budget, nous avons pu élargir davantage les mesures d'allégement en les étendant aux Canadiens à moyen revenu et à faible revenu, et surtout aux familles.
Par conséquent, l'allégement des impôts et l'équité fiscale vont de pair. Nous nous sommes engagés à alléger les impôts, mais nous voulons le faire de façon équitable.
La surtaxe de 3 p. 100 a été mise en place par le gouvernement précédent en vue d'éliminer le déficit. Le déficit est maintenant éliminé. Nous avons commencé à supprimer la surtaxe de 3 p. 100 dans le budget de 1998, je crois, et elle a été éliminée complètement dans le budget de 1999. Également, dans le budget de 2000, nous avons commencé à éliminer la surtaxe de 5 p. 100, qui était également une mesure visant à réduire le déficit.
Les dispositions visant la surtaxe de 3 p. 100 et la surtaxe de 5 p. 100 sont sans doute reliées au fait qu'il s'agissait de mesures temporaires et que nous avons maintenant la possibilité de les supprimer.
M. Paul Forseth: Je tiens seulement à dire que vous éliminez des surtaxes, mais qu'il faudrait maintenant songer à un taux d'imposition uniforme. D'après nos analyses, nous avons pu proposer un taux uniforme, ce qui représente une approche différente. Mais je me réjouis de voir que vous vous orientez davantage vers le taux uniforme. Il suffit maintenant d'éliminer les trois tranches d'imposition et nous serons dans la bonne voie.
Je constate que le président désire intervenir.
Le président: Je désire seulement une précision. Comment définissez-vous l'équité fiscale? Qu'est-ce que cela représente pour vous?
M. Roy Cullen: Il y a deux façons de le voir. Premièrement, dans le contexte de l'allégement global des impôts, nous avons ciblé au départ les personnes qui en avaient le plus besoin. Le dernier budget visait les Canadiens et les familles à revenu moyen.
Mais la Loi de l'impôt sur le revenu contient un certain nombre de dispositions qui, avec le temps, ont créé certaines injustices et doivent être rééquilibrées de temps à autre. Un régime fiscal présente toujours des anomalies et il faut le surveiller constamment.
Le président: Permettez-moi de vous poser une question. Une définition différente de l'équité... La surtaxe de 5 p. 100 a été mise en place pour combattre le déficit. Elle existe toujours? En quoi est-elle si équitable? Pourquoi est-il équitable de la maintenir?
M. Roy Cullen: Comme vous le savez, monsieur le président, elle est éliminée dans le budget de 2000 pour les revenus ne dépassant pas 85 000 $ et cette élimination se fera au cours des quelques années à venir. Comme nous avons une plus grande marge de manoeuvre, si l'économie continue à progresser comme elle le fait, nous pourrions même éliminer cette surtaxe beaucoup plus rapidement.
L'idée derrière tout cela est que nous avons profité de la marge de manoeuvre plus grande dont nous disposons sur le plan financier pour aider davantage les Canadiens à moyen revenu et à faible revenu. Vous voulez sans doute dire que si nous accordons des réductions d'impôt aux personnes qui ont un revenu élevé, nous aiderons peut-être des gens entreprenants qui contribueront à la croissance économique. C'est ce que nous souhaitons faire, mais je ne pense pas que ce soit possible immédiatement. Nous avons entamé le processus.
Le président: Pour ce que vous venez de dire quant au fait que les revenus élevés réinvestissent davantage dans l'économie, tout le monde le sait, mais cette taxe a été instaurée pour combattre le déficit et le déficit est maintenant éliminé. Laissons l'équité fiscale de côté. Pour une simple question de bonne gestion, ne serait-il pas logique d'éliminer cette surtaxe pour tout le monde et d'en tirer les avantages qui en résulteront? D'autre part, les gens reprendraient confiance dans le gouvernement si vous disiez: «Cette taxe a été mise en place lorsque nous avions un déficit; maintenant que le déficit est éliminé, nous éliminons la taxe également». Reconnaissez que ce serait une bonne chose.
M. Roy Cullen: Oui. Comme je l'ai dit, dans le budget de 2000 la surtaxe de 5 p. 100 a été éliminée en grande partie et nous envisageons d'en faire autant dans le budget de 2001 pour les revenus de plus de 85 000 $. Pouvons-nous accélérer le processus? Devrions-nous examiner les différentes tranches d'imposition, les différents niveaux...
Le président: Il y a beaucoup à faire. Je dis seulement que si le gouvernement dispose de ressources plus importantes—et je suppose qu'il en aura au cours des années à venir—l'équité fiscale et l'allégement des impôts deviennent une question de bonne gestion, car les gouvernements regagneront la confiance du public s'ils reconnaissent que les mesures prises pour remédier à une situation doivent disparaître maintenant que le problème est réglé.
Notre comité préconise l'élimination de la surtaxe de 5 p. 100 depuis déjà un certain temps et j'espère qu'elle finira par disparaître.
Monsieur Forseth.
M. Paul Forseth: Pour ce qui est de l'équité fiscale en général et de plusieurs dispositions du projet de loi, je demanderais au secrétaire parlementaire de se reporter au discours que j'ai prononcé à la Chambre au sujet de cette mesure et dans lequel j'énumérais un certain nombre de principes reliés à la question de l'équité.
Bien entendu, on fait souvent valoir le principe de la capacité de payer. Deuxièmement, il y a le principe voulant que la personne qui utilise un service doit payer et que si elle en fait un usage excessif, elle devrait peut-être payer davantage.
Il faut également éliminer la gymnastique compliquée à laquelle les gens se livrent en raison de la façon dont les règles sont conçues. C'est la transparence qui donne une impression d'équité plutôt que toutes sortes de formules compliquées.
Il y a aussi le concept du transfert de revenus, de la protection sociale mise en place au Canada, mais qui ne doit pas nous faire oublier qu'un dollar laissé dans la poche du contribuable est, en raison de son effet multiplicateur sur l'économie, beaucoup plus productif qu'un dollar gardé par la bureaucratie gouvernementale. Nous prenons un dollar, nous le faisons circuler dans la bureaucratie et nous redonnons aux contribuables 50 4 ou moins. Par conséquent, au lieu d'essayer de fournir des services, nous ferions peut-être mieux de ne pas prélever cet argent.
M. Roy Cullen: Je suis là pour répondre aux questions et pas pour en poser, mais si vous prenez votre proposition numéro 17 pour ce qui est de l'équité, comment votre parti peut-il justifier ce que nous appellerions l'absence de progressivité? Le régime fiscal actuel repose largement sur la progressivité contrairement au taux d'imposition uniforme que vous préconisez, même si vous avez une exemption personnelle de 10 000 $ qui assure une certaine progressivité. Ne pensez-vous pas que la progressivité assure l'équité de la fiscalité?
M. Paul Forseth: Toute bonne chose a ses limites et vous avez raison de dire cela, car dans le discours que j'ai prononcé à la Chambre au sujet de ce projet de loi, j'ai fait à de nombreuses reprises une comparaison entre notre proposition numéro 17 et les dispositions de cette mesure.
Le système que nous proposons est quand même progressif. Si vous prenez une famille de quatre personnes avec un seul revenu, elle pourrait gagner 26 000 $ sans avoir à payer un sou d'impôt fédéral. Le système est donc progressif. Mais l'argument que le ministre des Finances nous a servi par le passé est que, lorsqu'on passe d'un régime à l'autre, cela avantage les riches. C'est surtout le NPD qui a dit cela. En réalité, cela montre à quel point le système était défectueux au départ. Si vous passez à ce nouveau régime que je juge plus équitable, il peut arriver que ceux qui en bénéficieront le plus sont les contribuables qui se trouvent dans les tranches d'imposition supérieures, mais cela prouve seulement l'iniquité du système actuel.
J'en reviens donc aux dispositions de ce projet de loi et je conteste cette notion d'équité fiscale. Lorsqu'on utilise ce genre d'expression, il faudrait préciser clairement ce que cela veut dire. Notre parti a certainement essayé d'obtenir des éclaircissements et il nous incombe de poser des questions, surtout lorsque le secrétaire d'État vient parler, au nom du ministre, d'un engagement à réduire les impôts et à assurer l'équité du régime fiscal. J'ai posé une question générale à savoir: «Pourriez-vous nous en dire plus? En quoi ce bill correspond-il aux autres mesures et à la notion d'allégement du fardeau fiscal et d'équité?» et jusqu'ici, tout ce qu'on m'a répondu, sauf erreur, c'est que le gouvernement va atteindre partiellement l'objectif qu'il a décrit, mais qu'il ne poursuivra pas cet objectif jusqu'au bout. Votre conception de l'équité fiscale n'est pas la même que la mienne.
M. Roy Cullen: Je suppose que si. Lorsque vous parlez d'un taux d'imposition unique ou uniforme, c'est certainement le cas.
Je ne me souviens pas d'avoir dit que nous allions atteindre partiellement notre objectif. Il s'agit d'un processus d'amélioration continu pour tout le monde, y compris les gouvernements. Lorsque nous constatons des anomalies dans le régime fiscal, nous essayons d'y remédier. Mais nous voulons, dans le cadre de notre stratégie financière et économique, alléger les impôts et les réduire le plus rapidement possible et le plus équitablement possible.
M. Paul Forseth: D'accord.
Prenons le concept du fonctionnement du revenu. Le projet de loi contient, je crois, des dispositions qui s'appliquent aux étudiants et aux jeunes en dessous d'un certain âge. Si nous révisons le régime de fractionnement du revenu, pourquoi ne pas aller jusqu'au bout et permettre aux parents de jeunes enfants, qui n'ont qu'un seul revenu, de partager leur revenu?
Le Sous-comité sur l'équité fiscale pour les familles a notamment discuté de la grande disparité entre la situation de deux familles qui vivent dans le même quartier et dont la situation est à peu près similaire, mais dont l'une a une seule source de revenu tandis que l'autre en a deux. Leurs obligations et leur situation financière globale est la même, mais leurs obligations fiscales sont très différentes. L'une des discussions portait donc sur le partage du revenu.
• 1600
Je vois que ce projet de loi s'aventure un peu dans cette voie.
Peut-être pourriez-vous nous parler de l'opinion du gouvernement à ce
sujet.
M. Roy Cullen: Je vais commencer et les fonctionnaires pourront peut-être ajouter quelque chose.
Cette disposition ne porte pas directement sur la question que vous soulevez, même si c'est dans le même contexte. Le but visé ici est d'empêcher...
Prenons l'exemple d'un parent qui établirait une société privée. Il donnerait à son fils ou à sa fille une petite partie des actions à un prix nominal, mais les dividendes sur ces actions pourraient être discrétionnaires. La société accorderait alors à ce jeune de gros dividendes qui seraient imposés à un taux beaucoup plus bas, bien entendu. C'est donc une forme d'évitement. Nous essayons d'éliminer ce genre d'échappatoire.
Pour ce qui est de la question plus générale que vous avez soulevée, pourriez-vous y répondre, monsieur Ernewein?
M. Brian Ernewein (directeur, Division de la législation de l'impôt, Direction de la politique de l'impôt, ministère des Finances): Je voudrais seulement dire une chose à propos de la discussion que nous venons d'avoir. Il n'est pas nécessairement vrai que des règles s'imposent contre le fractionnement du revenu uniquement lorsqu'on a un régime fiscal progressif. Ces règles pourraient avoir aussi leur place dans un système à taux unique s'il accordait une exemption de base.
Pour vous donner un simple exemple, si un taux unique s'appliquait uniquement aux revenus dépassant 20 000 $... Pour prendre mon propre exemple, j'ai une femme et trois enfants et si j'étais le seul à avoir un revenu, le fractionnement du revenu me permettrait de multiplier cette exemption de 20 000 $ jusqu'à 100 000 $ en partageant mon revenu avec ma femme et mes trois enfants. Je veux seulement faire valoir que si vous avez une exemption de base ces règles doivent exister, car une exemption de base crée automatiquement deux taux différents.
M. Paul Forseth: Notre solution numéro 17 prévoit également d'accorder l'exemption de base de 3 000 $ pour chaque enfant. Il n'y a aucune évaluation du revenu. Si vous avez un enfant, vous obtenez 3 000 $.
Je voudrais des explications supplémentaires au sujet de la disposition concernant les paiements forfaitaires qui accorde un allégement d'impôt pour certains paiements forfaitaires reçus pour des années antérieures. Est-ce en rapport avec la disposition qui permettait à une personne qui reçoit un gros paiement une année parce qu'elle a pris sa retraite ou pour une autre raison d'en faire la moyenne sur plusieurs années? Le ministère du Revenu faisait ces calculs pour le contribuable s'il cochait une case indiquant qu'il avait reçu un paiement forfaitaire. C'était calculé par ordinateur et le ministère le faisait pour vous. C'était une forme d'étalement du revenu. Ces dispositions ont maintenant été supprimées, à ma connaissance, et je me demande si c'est la même chose.
M. John Hayward (chef, Division de l'impôt des particuliers, Direction de la politique de l'impôt, ministère des Finances): Non. Le problème aurait été moins grave avec un système d'étalement du revenu, mais ce n'est pas la seule source de difficulté. Certains contribuables peuvent se trouver dans une tranche d'imposition supérieure lorsqu'ils reçoivent un paiement forfaitaire, par exemple pour des services rendus au cours d'années antérieures. Cela pourrait résulter d'une action en justice, par exemple.
Pour rendre le régime fiscal plus équitable, cette mesure permet à Revenu Canada, en fait à l'Agence canadienne des douanes et du revenu de faire le calcul à la place du contribuable pour voir s'il est avantageux ou non pour lui que ce revenu soit imposé l'année au cours de laquelle il aurait été reçu si le paiement n'avait pas été retardé en raison d'une procédure judiciaire ou pour une autre raison. C'est simplement une question d'équité, pour rendre le fardeau fiscal plus équitable pour le contribuable.
M. Paul Forseth: C'est donc la même idée générale que celle dont je parle.
Vous vous souvenez des dispositions permettant l'étalement. Est-il nécessaire de rétablir cette disposition ou existe-t-elle toujours et quelqu'un peut-il demander qu'elle s'applique à un revenu provenant d'une certaine source?
M. John Hayward: Je ne pense pas que ce soit directement relié à cette question. La mesure dans laquelle l'étalement est avantageux, qu'il se fasse postérieurement ou antérieurement, dépend du niveau des taux d'imposition et de la progressivité de l'impôt. Dans la mesure où le gouvernement abaisse les taux et relève les seuils, le problème est moins important.
Je suppose qu'on a décidé de renoncer à l'étalement du revenu lors de la réforme fiscale. C'est en partie parce que le régime fiscal prévoit maintenant des dispositions, comme la possibilité de contribuer à un REER, qui permettent au contribuable d'étaler son revenu dans une certaine mesure. Le gouvernement a estimé que, dans ce contexte, sauf pour les situations spéciales comme les paiements forfaitaires, des dispositions supplémentaires n'étaient pas nécessaires.
M. Paul Forseth: C'est ce que je dis. Pour le moment, lorsqu'un paiement forfaitaire est versé à un contribuable, par exemple des dommages-intérêts versés par la société d'assurances à la suite d'un accident d'automobile, en Colombie-Britannique, ce paiement est-il imposable?
M. John Hayward: Normalement, ce genre de paiement n'est pas imposable. On considère que c'est l'indemnisation d'une perte en capital et ce n'est donc pas imposable.
M. Paul Forseth: Très bien.
La première disposition, qui concerne les crédits d'impôt des particuliers, ajoute jusqu'à 675 $ au montant de base et au montant pour conjoint ainsi que certaines dépenses de formation à la liste des frais médicaux donnant droit au crédit. Combien coûte chaque hausse de 100 $ de l'exemption de base? Quelle dépense fiscale cela représente-t-il pour le gouvernement? Chaque tranche de 100 $ supplémentaire d'exemption coûte plusieurs centaines de millions au gouvernement. Avez-vous des chiffres?
M. Roy Cullen: Avant d'en arriver là, je voudrais ajouter quelque chose au sujet des paiements forfaitaires. Cette disposition ne signifie pas un retour à l'étalement du revenu. Le genre de paiement auquel cette disposition s'applique est très clairement défini. S'il s'agit d'une rémunération rétroactive, par exemple, un montant que le contribuable aurait, de toute évidence, inclut dans son revenu de l'année, cette disposition s'appliquera.
La disposition permettant l'étalement était une disposition générale qui a été abolie il y a déjà un certain temps. Il n'était pas nécessaire que le revenu se rapporte à des années antérieures. Il s'agissait simplement d'une disposition d'étalement générale. Celle-ci est très précise en ce sens qu'elle se rapporte à un montant reçu relativement à des années antérieures.
M. Paul Forseth: D'accord.
M. Roy Cullen: Quant aux chiffres que vous demandez, je les ai eu souvent sous les yeux. Ils sont énormes.
M. Paul Forseth: Oui.
M. Gérard Lalonde (chef principal, Division de la législation de l'impôt, Direction de la politique de l'impôt, ministère des Finances): Si vous prenez le plan budgétaire pour 1999, vous verrez que, par exemple, l'augmentation de 175 $ du crédit personnel de base coûte, à maturité, 525 millions de dollars pour 2001-2002. Cela veut dire que pour chaque augmentation de 100 $, le coût est de 300 millions de dollars.
M. John Hayward: C'est pour le montant de base et le montant pour conjoint ainsi que l'équivalent de marié.
M. Paul Forseth: C'est tout pour le moment.
Le président: J'ai une question à poser. Au sujet de la surtaxe temporaire s'appliquant à l'impôt sur le capital pour les grandes institutions de dépôts, cette mesure va-t-elle être aussi temporaire que l'impôt sur le revenu? Voyez-vous ce que je veux dire? Quelle est sa justification? Nos institutions financières essaient d'améliorer leur productivité. Dans quelle mesure cette taxe est-elle bénéfique pour notre économie?
M. Roy Cullen: Tout d'abord, je voudrais vous dire ce que nous faisons à l'égard de cet impôt. Ces dispositions ont été prolongées dans le budget de 2000. Le gouvernement est en train d'examiner l'ensemble du secteur des services financiers. Un projet de loi sera sans doute présenté le mois prochain. Je ne sais pas si cette question va être examinée dans ce contexte, mais c'est un impôt qui fait l'objet d'un examen constant.
Quant à sa raison d'être initiale, je n'étais pas là. Les fonctionnaires savent peut-être quelle était la justification de cette mesure.
M. Brian Ernewein: Je dirais simplement que c'était une question de revenu.
Le président: Maintenant que nous avons un excédent budgétaire, pourquoi imposez-vous ces institutions de dépôt?
M. Roy Cullen: Les impôts ne sont pas tous entièrement justifiables. Prenez l'impôt sur le capital des grandes sociétés. Lorsque j'étais dans le secteur privé, je me souviens que l'industrie forestière est venue à Ottawa, mais qu'on a eu du mal à justifier cette politique. Certains impôts sont là pour permettre au gouvernement d'augmenter ses recettes et ne sont pas aussi justifiables que d'autres du point de vue politique.
Monsieur Hayward.
M. John Hayward: La plupart des impôts ne sont pas associés à des avantages économiques. Ils ont un coût économique. Leur seul avantage économique est que le gouvernement se sert de cet argent pour financer des programmes. Devant ce genre d'impôts, il faut se demander quelles seraient les autres sources de recettes. Quant à savoir s'il existe des moyens moins coûteux de percevoir ces recettes, je crois que c'est une question de jugement.
Le président: Cela représente 100 millions de dollars, n'est- ce pas?
M. Roy Cullen: Les revenus de cet impôt?
M. Brian Ernewein: En fait, il s'agit de 50 millions de dollars par an.
Le président: Quel est notre excédent budgétaire?
M. Roy Cullen: L'excédent annuel?
Le président: Oui. À mon avis, on n'envoie pas un signal très positif lorsqu'on assujettit les institutions de dépôts, le secteur des services financiers à ces impôts. Ce n'est pas un signal positif. Si c'est vraiment une mesure temporaire, vous ne pourrez plus la conserver bien longtemps. Je pourrais comprendre si c'était un mécanisme de lutte contre le déficit, mais ce n'est pas le cas maintenant. Pourquoi viser ce secteur? Pourquoi n'imposez-vous pas d'autres secteurs?
M. Brian Ernewein: Monsieur le président, c'est une question intéressante. Cela n'y répondra pas entièrement, mais j'attire votre attention sur le budget de 2000 où cette question a de nouveau été mentionnée.
Dans ce budget, on annonçait que la surtaxe serait prolongée d'un an, mais l'énoncé budgétaire de cette année, c'est-à-dire 2000, ajoute que le gouvernement réexamine l'application de la surcharge dans le cadre de l'examen du secteur financier. La décision sera annoncée lorsque le projet de loi sur le secteur financer sera déposé.
M. Roy Cullen: La rentabilité du secteur bancaire ne doit pas nécessairement influer sur cette décision, mais étant donné que son rendement sur l'investissement est, je pense, de 17 ou 18 p. 100, cet impôt ne semble pas avoir eu trop d'effets limitatifs. C'est une question qui fait l'objet d'un examen constant. Je ne pense pas pouvoir en dire plus pour le moment.
Le président: Je suppose qu'on avait besoin de ces 50 millions de dollars et que c'était le bon endroit où les trouver.
M. Roy Cullen: La majeure partie de l'impôt sur le capital des grandes sociétés est un impôt provincial, mais nous coopérons avec les provinces pour voir si elles sont prêtes à alléger cet impôt de façon générale.
Le président: Le niveau de vie est la grande question qui nous tient à coeur, n'est-ce pas? L'une des meilleures façons de relever notre niveau de vie est d'améliorer la productivité. L'imposition du capital n'augmente pas la productivité si bien que, du point de vue politique, je vois mal l'avantage d'imposer le capital ou de l'imposer lourdement. Je tiens à le dire et je l'ai déjà dit à plusieurs reprises.
M. Roy Cullen: Je peux vous dire que toute la question de l'imposition du capital, surtout dans le contexte de la nouvelle économie, fait l'objet d'un examen actif.
Le président: C'est la seule question que j'avais à poser. M. Forseth en a peut-être une. Voulez-vous que je continue?
M. Roy Cullen: Voulez-vous parler de l'impôt sur les bénéfices de fabrication et de transformation en ce qui concerne la production de vapeur?
Le président: Non, je ne cherchais pas à vous mettre des bâtons dans les roues. Je pense seulement qu'une fois qu'on décide d'aller dans une certaine direction, il faut montrer de la suite dans les idées et je ne trouve pas que l'impôt sur le capital corresponde à nos objectifs. Ce n'est pas une mesure propre à stimuler la croissance. Le simple fait que les institutions financières... cela ne veut rien dire pour moi. Vous dites qu'elles gagnent beaucoup d'argent; je préfère voir le secteur des services financiers gagner de l'argent plutôt qu'en perdre.
Ce genre d'attitude correspond également au fait que dans les pays comme le nôtre, on a tendance à pénaliser la réussite au lieu de s'en réjouir. Un changement d'attitude s'impose. Surtout quand on voit la différence de niveau de vie entre le Canada et les États-Unis et les nombreux autres défis que doit relever notre économie, je crois que ce genre de mesures produit l'effet contraire à celui que l'on recherche.
Mais c'est seulement mon opinion. Je suis certain que M. Forseth n'est pas d'accord avec moi.
M. Paul Forseth: Nous parlons de l'impôt sur le capital. Je peux témoigner des torts que ce genre d'impôt a causé à l'économie de la Colombie-Britannique. Lorsque certaines chambres de commerce et autres organismes de ce genre se sont plaints au gouvernement provincial, ils ont commencé par dire que cet impôt envoyait un message très négatif aux pays situés en bordure du Pacifique, à savoir que les entreprises n'étaient pas vraiment les bienvenues en Colombie-Britannique.
Nous sommes passés de la première place à la dixième en ce qui concerne l'investissement. Le gouvernement néo-démocrate a ni plus ni moins tué l'économie de la province. C'est vrai non seulement en pratique, mais en raison du message qu'il envoie... Si vous ajoutez à cela un climat qui n'est pas particulièrement propice à la croissance, voilà le genre de choses qu'il faut éviter.
Si nous regardons du côté des pays qui semblent bien progresser, ils n'ont pas tout cet éventail de mesures dissuasives et d'interventions gouvernementales. Ils ont une attitude et un état d'esprit différents. Bien entendu, du côté de l'opposition, nous continuons d'exhorter le gouvernement à fournir des explications et à se justifier en expliquant ses lois au public et nous lui demandons de bien vouloir s'éloigner de la tendance socialiste à vouloir redistribuer le revenu tant qu'il reste des capitalistes pour payer.
M. Roy Cullen: Monsieur le président, je voudrais placer les choses dans leur contexte. Si vous prenez la réduction de l'impôt sur le revenu des sociétés annoncée dans le budget de 2000 pour les secteurs les plus lourdement imposés, pour lesquels le taux sera réduit de 28 p. 100 à 21 p. 100, on peut dire que le secteur bancaire va largement bénéficier de ces mesures.
Si vous prenez ces mesures et l'exemple de l'Ontario, le gouvernement ontarien a suivi notre gouvernement en réduisant lui aussi l'impôt sur les sociétés si bien qu'une fois ces réductions entièrement mises en oeuvre, l'impôt sur les sociétés de l'Ontario sera, si j'ai bien compris, nettement plus faible que dans les États voisins et très près, sinon plus bas, que celui du Royaume- Uni. Comme je l'ai dit, l'impôt tombe de 28 p. 100 à 21 p. 100, si bien que le secteur bancaire bénéficiera énormément de ces dispositions.
J'ai entendu ce que vous avez dit au sujet de l'impôt sur le capital. Mais nous devons également examiner la question dans le contexte de l'impôt sur le revenu et des autres mesures importantes que nous prenons dans cette direction.
M. Paul Forseth: Je peux accepter ce raisonnement, mais pouvez-vous alors nous dire quelle est notre situation par rapport aux autres pays? Nous devons tenir compte de ce que fait la concurrence. Comme notre économie est étroitement reliée à celle des États-Unis, nous devons nous comparer avec l'économie américaine et non pas l'économie européenne. Par conséquent, pour ce qui est de ce secteur, quelles que soient les réductions que vous dites bénéfiques, où en sommes-nous par rapport à la concurrence?
M. Roy Cullen: Comme je viens de le dire, en ce qui concerne l'impôt sur le revenu des sociétés, une fois les réductions entièrement mises en oeuvre, je ne me souviens pas du chiffre exact, mais nous serons sans doute 4 ou 5 p. 100 en dessous du taux d'imposition dans les États américains voisins. Cela dépend de l'État, mais disons les États limitrophes, donc un bon nombre des grands États industrialisés. Il est vrai qu'il existe une différence au niveau de l'impôt sur le capital, mais pour ce qui est des États-Unis—je n'ai pas le chiffre exact—si vous prenez l'impôt sur le capital ou l'absence d'impôt sur le capital dans les États américains voisins, cela n'est-il pas plus ou moins compensé par la réduction de l'impôt sur le revenu des sociétés, qui sera plus bas chez nous?
M. John Hayward: Si vous examinez la question dans un autre contexte, nous reconnaissons que l'impôt sur le capital peut poser un problème. Au Canada, les provinces ont tendance à compter davantage sur cet impôt que le gouvernement fédéral. Dans le cadre de ses négociations avec les provinces, le gouvernement fédéral cherche à améliorer la structure de la fiscalité des sociétés et à assurer une meilleure coordination fiscale pour les sociétés de tout le pays. La question ne peut donc pas être réglée uniquement au niveau fédéral, mais à l'échelle du pays en consultant les provinces. Et c'est ce que nous faisons.
Le président: Il vaut la peine de le souligner et je suis entièrement d'accord avec vous. Les provinces jouent un rôle important en ce qui concerne l'impôt sur le capital. Mais nous estimons qu'il faudrait exercer des pressions sur les gouvernements provinciaux pour qu'ils reconnaissent qu'une imposition excessive du capital n'est pas compatible avec une stratégie axée sur la croissance. Et je ne vois pas comment vous pouvez le faire. Je sais que les provinces sont d'accord avec nous en ce qui concerne la santé, mais je ne sais pas où vous en êtes pour ce qui est de l'impôt sur le capital. Je crois que vous avez entamé des négociations avec les provinces et c'est donc un pas dans la bonne direction.
La fiscalité comme telle, les secteurs ou les personnes que vous imposez revêtent également une grande importance. Ce n'est pas seulement la réduction des impôts, n'est-ce pas? L'exemple que j'ai donné de la surtaxe de 5 p. 100, l'idée d'accorder des réductions d'impôt à ceux qui paient des impôts est peut-être quelque chose de nouveau, mais je crois qu'il faut vraiment réduire les impôts des contribuables. Il n'y a rien de mal à cela.
Tout le monde sait que ce sont les revenus élevés qui réinvestissent le plus et que les réductions d'impôt sont également surtout payantes si elles s'appliquent à l'impôt sur les sociétés, du point de vue de la croissance économique. Je ne sais pas ce qu'il en est du point de vue politique, mais les arguments économiques en faveur d'une réduction de l'impôt sur les sociétés sont très convaincants. Ils sont très solides.
M. Roy Cullen: Vous avez raison. Mais dans le budget de 2000—vous ne serez peut-être pas d'accord, mais j'espère que si—en annonçant une réduction de 28 p. 100 à 21 p. 100, le gouvernement a pris une mesure assez énergique que les excédents qui seront enregistrés au cours des années à venir permettront peut-être d'accélérer.
Vous avez dit que le gouvernement fédéral devrait exercer des pressions sur les provinces en ce qui concerne l'impôt sur le capital et je sais que le ministre des Finances a communiqué avec ses homologues provinciaux pour essayer d'atteindre cet objectif.
Le président: Je vais reformuler ma question. Il y a eu un revirement de la stratégie de croissance du gouvernement. Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir en 1993, le taux de chômage était très élevé et nous devions y faire face. Maintenant, de plus en plus de gens obtiennent des emplois...
• 1625
Ce qui se passe est que la personne qui trouve un emploi se réjouit
du simple fait d'avoir un emploi la première année, mais la deuxième
année, elle veut un revenu disponible plus important, un revenu plus
élevé. Le gouvernement devrait donc modifier sa stratégie. Il doit
l'orienter vers le relèvement du niveau de vie, l'allégement du
fardeau fiscal et l'augmentation du revenu disponible.
Les emplois sont très importants, sans aucun doute—nous ne voulons pas d'un taux de chômage élevé—mais il faut se dire: très bien, est-ce que le revenu des gens qui ont un emploi augmente, est-ce que leurs impôts ne sont pas trop élevés? Telles sont les questions fondamentales à se poser. Une fois que les gens ont obtenu un emploi, ils veulent voir augmenter leurs revenus.
Monsieur Cullen, dans quelle direction le gouvernement s'engage-t-il, selon vous? Ce changement a-t-il eu lieu? Ou est-ce que la création d'emplois demeure la raison d'être du gouvernement?
M. Roy Cullen: Un taux de 6,8 p. 100 représente toute une amélioration depuis notre arrivée au pouvoir. Je ne pense pas que les Canadiens, surtout ceux qui font partie des 6,8 p. 100 de chômeurs, souhaitent que l'on oublie le chômage, et ce n'est pas de ce que je propose. Il nous reste du travail à faire de ce côté-là, mais effectivement, on songe maintenant davantage à...
Dans le dernier budget, nous avons centré notre attention sur les Canadiens à revenu moyen. Nous avons cherché à réindexer le régime fiscal et à modifier des tranches d'imposition et certains des taux pour les revenus moyens. L'idée de laisser plus d'argent dans la poche des Canadiens reste très importante nous allons tenir des consultations à l'automne sur la façon d'y parvenir, dans le cadre de notre examen permanent.
Le président: Permettez-moi de vous poser cette question. Le gouvernement a travaillé des deux côtés en cherchant à réduire la dette et les impôts d'une part et en misant, d'autre part, sur ce qu'on appelle les investissements sociaux et économiques stratégiques. Si le revenu disponible est une question primordiale et si vous voulez rétablir une partie de ce revenu disponible, diriez-vous qu'il faut le faire en réduisant sérieusement les impôts? Seriez-vous d'accord pour qu'un plus grand pourcentage de l'excédent serve à réduire la dette et les impôts?
M. Roy Cullen: Monsieur le président, me demandez-vous mon opinion personnelle ou celle du gouvernement?
Le président: Je ne savais pas qu'elles étaient différentes...
Des voix: Oh, oh!
Le président: Maintenant que vous avez dit cela, en tant qu'ancien secrétaire parlementaire...
M. Paul Forseth: Nous commençons à entendre le même son de cloche que ce matin avec les représentants de l'industrie.
M. Roy Cullen: Au cours de la dernière campagne électorale, le gouvernement a proposé une répartition 50-50. Je crois qu'il s'est engagé à respecter cette stratégie jusqu'à la fin de son mandat. Quant à ce que nous ferons ensuite, cela fera sans doute l'objet de notre programme lors de la prochaine campagne.
Personnellement, je crois qu'il est difficile de maintenir la proportion 50-50. En fait, je n'en vois pas la logique. Je crois que ce programme a atteint son objectif.
À l'approche des élections, le gouvernement va toutefois préparer son programme et ce que nous ferons des excédents y occupera sans doute une large place. Je ne vais donc pas me perdre en conjectures quant au programme de notre parti pour les prochaines élections
Le président: Pouvez-vous m'expliquer ce que vous voulez dire? Maintenir cette proportion de quelle façon? Vous n'avez pas dit de quel côté vous voudriez pencher. Que faudrait-il maintenir...?
M. Roy Cullen: Monsieur le président, je ne pense pas être ici pour faire part de mes opinions personnelles. Je suis là pour défendre le projet de loi et parler de mon mieux au nom du gouvernement.
Le président: Vous savez qu'en ce qui concerne les prévisions fiscales sur cinq ans et certains autres investissements sociaux que nous avons préconisés, notre comité a dit qu'il faudrait chercher à réduire les impôts et la dette dans une proportion de 63-37 ou 60-40.
M. Roy Cullen: Je vais vous donner un exemple. Vous m'avez posé une question au sujet de la viabilité de cette stratégie. Si vous prenez les excédents budgétaires des années à venir, en supposant que le taux de croissance sera... peut-être pas de 4 p. 100, mais disons de 2,5 à 3,5 p. 100. Je ne pense pas qu'il serait très logique de consacrer 50 p. 100 de ces excédents à de nouvelles dépenses. Il est inutile de dépenser pour le plaisir de dépenser. Nous avons une dette considérable, nous devons réduire davantage les impôts et nous avons d'énormes investissements à faire, mais si vous faites le calcul, je ne suis pas certain que...
Vous n'avez pas une situation parallèle étant donné qu'au cours de notre mandat nous avons d'abord eu un déficit, après quoi nous avons enregistré un excédent. Si les excédents se répètent, je ne suis pas certain que... C'est une chose que le gouvernement, le parti va devoir examiner en ce qui concerne son programme électoral, mais je ne pense pas que la stratégie 50-50 va nécessairement s'appliquer à l'avenir ou qu'elle pourra être maintenue.
Le président: Merci.
Monsieur Forseth.
M. Paul Forseth: Pour en revenir au principe général de l'allégement du fardeau fiscal dans divers pays, je me souviens d'avoir lu un article selon lequel, même dans le contexte américain... Une comparaison a été faite entre des États où l'impôt est relativement élevé et ceux où il est plus bas en ce qui concerne leur croissance sur une certaine période. Je me souviens d'avoir fait une déclaration à la Chambre au sujet de cet article qui se fondait sur une étude démontrant clairement que les États où l'impôt était le plus bas sont ceux où la croissance était la plus forte. Ce principe s'applique. Vous pouvez le constater article après article dans la revue The Economist ou ailleurs. C'est un principe assez bien accepté.
Il s'agit ensuite d'examiner la situation dans l'ensemble du Canada par rapport à l'économie mondiale. Il n'est peut-être pas nécessairement rassurant de se rapprocher davantage des États-Unis pour ce qui est de la fiscalité globale, mais pourquoi n'essayons- nous pas de faire mieux, de soustraire moins d'argent de l'économie, d'en laisser davantage entre les mains du contribuable, du chef d'entreprise, du consommateur afin d'en profiter au lieu de nous contenter de nous rapprocher un peu des États-Unis?
Lorsque nous changerons d'attitude, au lieu d'une mesure comme le projet de loi C-25, qui se contente de modifier un peu la fiscalité... Il ne cherche pas vraiment à nous ouvrir la voie; il taille un peu la haie au lieu de nous tailler un chemin qui permettra de débloquer l'énorme potentiel de l'économie canadienne et des Canadiens. C'est à ce niveau-là que ce projet de loi me paraît difficile à justifier. Il débroussaille un peu ici et là. En quoi cherche-t-on à alléger sérieusement le fardeau fiscal afin que le gouvernement ne s'ingère pas autant dans l'économie?
Nous pouvons voir, aussi bien dans l'économie américaine que dans le contexte international, que c'est la façon d'y arriver qui fait la différence entre les pays riches et les pays pauvres. Cela se ramène généralement à ce que fait le gouvernement. Un gouvernement peut facilement venir piétiner un beau jardin et détruire toute une économie. Nous avons pu voir que tout ce que nous avons au Canada pouvait être facilement perdu.
Combien de fois le premier ministre a-t-il déclaré, au cours de la période des questions, à quel point nous étions au bord du gouffre en 1992, ou 1993? Même dans le contexte canadien nous avons constaté des signes très inquiétants et cela ne veut pas dire que nous n'aurons pas de difficultés à l'avenir.
Pour en revenir au concept du projet de loi, comment pouvons- nous produire le genre de mesures qui nous amèneront à souscrire davantage au principe généralement accepté partout dans le monde selon lequel les pays où l'impôt est bas vont prospérer davantage dans l'économie mondiale actuelle que ceux où l'impôt est élevé?
M. Roy Cullen: Monsieur Forseth, je ne me suis peut-être pas fait très bien comprendre. Premièrement, si vous suivez le raisonnement voulant que plus l'impôt est bas, plus l'économie est forte, etc., l'absence totale d'impôt serait la meilleure situation de toutes. Vous comprendrez certainement que certains services de base que les citoyens attendent ne pourraient pas être fournis.
Ensuite, si vous prenez les mesures prévues dans le budget de 2000 associées à celles des budgets de 1999 et 1998, en moyenne, la réduction de l'impôt sur le revenu des particuliers sera de l'ordre de 22 p. 100. Pour certaines familles canadiennes, la réduction d'impôt sera de 30 à 31 p. 100. Cela n'a rien de superficiel.
Devons-nous faire plus? Certainement. Le ministre des Finances a dit que ces réductions d'impôt de 58 milliards de dollars étaient un strict minimum. Vu la façon dont l'économie progresse, je pense que nous aurons une marge de manoeuvre qui nous permettra de prendre certaines de ces mesures.
En ce qui concerne l'impôt des sociétés, je crois qu'avec les mesures que nous annonçons... Je vais prendre l'exemple de l'Ontario, car je connais mieux les chiffres. Je crois avoir dit qu'une fois ces mesures mises en oeuvre, le taux fédéral associé au taux ontarien sera de 4 à 5 p. 100 plus bas que dans les cinq grands États américains voisins du Canada. Je ne pense donc pas que nous nous contentons de les rattraper; nous faisons mieux qu'eux d'après ce que j'ai compris.
Pourrions-nous le faire plus rapidement? J'en suis certain. Pour le moment, nous en entrevoyons la possibilité et nous le ferons. Comme vous-même et le président avez eu raison de le dire, la réduction de l'impôt sur les sociétés ne coûte pas aussi cher que la réduction de l'impôt sur le revenu des particuliers et elle contribue largement à stimuler la croissance et la création d'emplois. Notre gouvernement a certainement fait preuve de hardiesse et de courage dans le budget de 2000 en annonçant une importante réduction de l'impôt des sociétés alors que la sagesse serait de laisser cet impôt de côté tant que nous n'aurons pas entièrement réglé la question de l'impôt sur le revenu des particuliers.
Vous n'auriez peut-être pas été de cet avis, mais c'est certainement ce que pensaient beaucoup de Canadiens.
Le gouvernement a dit qu'il prendrait le risque de s'exposer à ce genre de critique parce qu'il croit que la réduction de l'impôt sur les sociétés sera bénéfique pour tous les Canadiens. Ce n'est pas que nous aimions nécessairement les sociétés. Nous ne les détestons pas non plus, mais nous pensons que si nous pouvons attirer l'investissement au Canada et l'y garder, ce sera bon pour tous les Canadiens. Nous créerons davantage d'emplois et de revenus.
Je ne crois donc pas que nous fassions du rattrapage. Nous prenons des mesures énergiques compte tenu de notre marge de manoeuvre et nous allons faire plus.
M. Paul Forseth: Peut-être pourrions-nous changer de sujet et revenir à l'une des dispositions techniques du projet de loi. Il y a là un article concernant les organismes communautaires. Il permet de répartir le revenu de certaines colonies religieuses entre tous les membres adultes de la colonie, aux fins de l'impôt. Ce problème représente-t-il un phénomène de plus en plus important dans notre société? Est-ce une question administrative très mineure ou cela présente-t-il un intérêt économique important dont il faut s'occuper parce que cela vise un segment de plus en plus important de notre économie?
M. Roy Cullen: Étant donné que les fonctionnaires n'ont pas eu tellement l'occasion de participer à la discussion, je vais demander à M. Hayward de bien vouloir répondre à cette question.
M. John Hayward: Nous considérons qu'il s'agit d'une mesure administrative relativement mineure. Cela touche environ 15 000 personnes et c'est donc d'une importance relativement mineure. Le but de cette mesure est simplement de rendre la fiscalité plus équitable pour les personnes qui vivent dans un milieu communautaire.
Les autres agriculteurs ont la possibilité de partager leurs revenus dans une certaine mesure et cela depuis un certain temps. Cette disposition leur accorde simplement les mêmes avantages qu'aux autres contribuables canadiens qui se trouvent dans des circonstances semblables. C'est une mesure mineure.
M. Paul Forseth: Pourriez-vous m'en dire un peu plus et m'expliquer quel était le problème avec les dispositions antérieures?
M. John Hayward: La façon dont les organismes communautaires sont imposés est très technique.
L'application technique des règles de l'impôt aux organismes communautaires a pour effet de rendre leur fardeau fiscal plus lourd que celui des autres contribuables. Ces changements visent à rendre les choses plus équitables, si vous voulez, afin que leur fardeau fiscal ne soit pas plus lourd que celui des Canadiens qui vivent dans des conditions plus habituelles, dans un milieu rural.
M. Paul Forseth: D'accord.
J'ai une autre question technique concernant les pénalités administratives imposées aux tiers qui font des faux énoncés ou des omissions relativement aux affaires fiscales d'autres personnes. C'est certainement un acte criminel que de certifier un faux document, par exemple. Y a-t-il là quelque chose de plus, le bras long du fisc à qui on confère un pouvoir qu'il ne devrait peut-être pas posséder? Peut-être faudrait-il s'en inquiéter si le public ne porte pas attention à cette question.
Notre parti a certainement parlé d'une déclaration des droits du contribuable lorsque des changements ont été apportés à Revenu Canada. Le gouvernement n'était pas d'accord avec nous. Je citerais seulement l'exemple de la bureaucratie équivalente aux États-Unis, l'IRS qui, selon le Congrès, échappe à tout contrôle.
Les grandes bureaucraties fédérales ont la particularité de se multiplier. À moins que les grandes organisations et les règles qui les régissent ne soient réexaminées régulièrement et soumises à une supervision politique, elles ont tendance à grossir. C'est dans leur nature.
Pouvons-nous aborder la question des pénalités administratives? Quand le propriétaire d'une petite entreprise a de la difficulté à payer sa TPS, le fisc peut aller puiser directement de l'argent dans son compte en banque. Ce n'est pas toujours fait avec la plus grande délicatesse. Quand cet argent est prélevé deux jours à l'avance alors que le patron a fait un chèque pour payer un fournisseur et tout le reste, l'entreprise se trouve acculée à la faillite.
Peut-être pourriez-vous nous parler de la portée de cette mesure et dire pourquoi elle était nécessaire étant donné que la réglementation est déjà très importante.
M. Roy Cullen: Monsieur Forseth, je vais commencer et les fonctionnaires pourront vous en dire plus.
Il ne faut pas oublier que, lorsqu'il est question d'infractions dans ce domaine ou de gens passibles de ces pénalités, le projet de loi parle de «conduite coupable» ce qui revient à un acte délibéré. Autrement dit, c'est l'acte de se soustraire à l'impôt ou d'aider quelqu'un à se soustraire à l'impôt sciemment et délibérément. Cela témoigne d'un manque de respect pour la loi ou d'un mépris de la loi. Si une personne exerce sa profession dans ce contexte, elle sera passible de pénalités.
Je dois dire que nous avons reçu des instances à l'égard des pénalités que prévoit actuellement le projet de loi. On s'inquiète au sujet de l'absence de plafonds ou de la situation des personnes à l'emploi de grandes sociétés, par exemple. Nous attendons les résultats des consultations et des témoignages. Le gouvernement est prêt à écouter et peut-être à donner suite aux recommandations qui pourraient ressortir de ces consultations.
Brian, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. Brian Ernewein: Je vais demander à Gerry de le faire.
M. Gérard Lalonde: Merci.
Ces questions se rapportent dans une large mesure aux recommandations qui nous ont été faites par le vérificateur général et le Comité technique sur la fiscalité des entreprises appelé parfois le comité Mintz. Ce sont des mesures qui visent à éliminer une échappatoire de la loi. Il y a des sanctions pénales pour les contribuables et les conseillers fiscaux qui font de faux énoncés dans les déclarations de revenu.
• 1645
Les sanctions pénales sont toutefois très graves, comme leur nom le
laisse entendre. Une sanction pénale peut avoir de graves
répercussions sur le gagne-pain et la crédibilité des professionnels
de la fiscalité. Le fardeau de la preuve est également problématique.
Lorsqu'il s'agit de sanctions pénales, vous devez prouver vos
accusations au-delà de tout doute raisonnable.
D'un autre côté, des pénalités administratives sont également prévues dans la Loi de l'impôt sur le revenu en cas de grave négligence de la part d'un contribuable. Mais jusqu'au budget de 1999, les pénalités administratives ne s'appliquaient pas aux tiers qui fournissaient de faux renseignements concernant la déclaration de revenu d'un contribuable.
C'était un sérieux problème. À l'époque, Revenu Canada a effectué une étude qui a révélé un certain nombre de cas où des professionnels de la fiscalité se sont faits les complices, si je peux dire, de déclarations de revenu frauduleuses. C'est un problème non seulement pour ce qui est des contribuables et de leurs conseillers, mais également pour la crédibilité du régime fiscal. Il est toutefois peu probable que Revenu Canada pourra poursuivre au pénal tous les gens qui sont allés un peu trop loin et on ne s'attend pas à ce qu'on le fasse dans des circonstances où les conséquences pénales seraient excessives.
Ces mesures visent à équilibrer le système en prévoyant une pénalité administrative pour les professionnels de la fiscalité, les tiers qui font de fausses déclarations alors qu'ils savent, ou devraient savoir, que ces renseignements sont faux. Nous avons proposé dans le budget que cette mesure s'applique seulement en cas de grave négligence de la part du conseiller fiscal.
On nous a fait valoir certaines objections quant à l'utilisation du mot «négligence». On craint surtout que les décisions rendues par les tribunaux dans d'autres domaines du droit, non pas le droit fiscal, fassent une interprétation de l'expression «négligence grave» comme dans des cas d'accidents automobiles ou autres, d'une façon qui pourrait modifier—à la hausse ou à la baisse—le sens que lui donne actuellement la Loi de l'impôt lorsqu'elle s'applique aux contribuables qui remplissent leur propre déclaration. Nous avons tenu compte de cette critique et nous avons rédigé le projet de loi C-25 en cherchant à utiliser les expressions dont les tribunaux se sont déjà servis lorsqu'ils ont interprété le concept de la négligence grave aux fins de l'impôt. Voilà comment nous en sommes arrivés au concept de la conduite coupable.
On nous a également fait valoir que les conseillers fiscaux ne devraient pas avoir à soumettre leurs clients à un questionnaire serré ou à vérifier tous leurs comptes pour établir s'ils ont dit la vérité. Voilà pourquoi nous avons le concept du crédit accordé à l'information afin qu'un conseiller fiscal ne soit pas assujetti à cette règle si c'est en toute bonne foi qu'il a transmis à Revenu Canada ou maintenant l'ACDR l'information qu'il a reçue de son client.
Nous avons longuement consulté l'Institut canadien des comptables agréés, le comité mixte de l'Institut et l'Association du Barreau canadien ainsi que la CGA et d'autres associations de comptables au sujet de ces mesures. Nous avons eu de longues consultations avec eux et nous avons intégré dans cette règle un certain nombre de dispositions visant à dissiper les craintes selon lesquelles un agent du fisc risquerait d'appliquer ces pénalités avec un peu trop de zèle.
• 1650
Le ministre des Finances a également annoncé que ces pénalités
s'appliqueraient uniquement après que l'administration centrale de
Revenu Canada aura examiné le dossier afin qu'un vérificateur ne
puisse pas, de son propre chef, menacer d'imposer une pénalité pour
régler un compte. Ces pénalités ne peuvent être appliquées qu'après un
examen à l'administration centrale de l'Agence. Cette dernière a
invité les associations professionnelles à l'aider à élaborer des
lignes directrices pour l'interprétation et l'administration de ces
règles.
Compte tenu de tout ce que je viens de dire, je crois que nous avons là une règle qui représente un bon équilibre entre les intérêts du régime fiscal canadien, l'intégrité de ce régime et la protection des professionnels de la fiscalité.
M. Paul Forseth: J'ai une question supplémentaire à ce sujet.
Le président: Il vous reste encore du temps.
M. Paul Forseth: Très bien.
Nous nous attendons à ce que ces pénalités soient évaluées par un fonctionnaire de l'Agence. S'agit-il d'une nouvelle série de règles qui s'ajoutent à celles qui existent déjà? Je veux dire qu'il y a déjà un système d'appel conformément aux règles de la justice fondamentale. Ce n'est pas quelque chose de nouveau.
C'est parfois le député qui se retrouve face au contribuable qui a eu maille à partir avec l'ACDR. Les gens viennent dans votre bureau avec une boîte en carton pleine de documents. Ce sont toutes sortes de documents d'affaires et les gens s'arrachent les cheveux en disant que le ciel leur tombe sur la tête, que le méchant agent du fisc leur en veut, qu'ils ont été traités injustement et qu'on leur impose toutes sortes d'amendes injustifiées. Vous essayez d'aider ces personnes qui se retrouvent dans une situation pénible.
En fait, j'ai eu le cas d'une personne à qui un bureaucrate avait imposé des pénalités qui semblaient assez injustes. J'ai écrit une lettre au nom de cette personne dont on a réexaminé le dossier et avec qui on a conclu un arrangement. Le percepteur semble avoir tout à coup changé d'attitude. Il a fait preuve d'un meilleur esprit de coopération et a pu trouver une solution et un accommodement.
J'espère que nous n'allons pas replonger dans ce genre de situation et que le projet de loi prévoit non seulement ce qui peut être fait, mais comment ce sera fait. Existe-t-il une procédure d'appel?
Dans ce que vous avez dit à la fin, vous avez mentionné une révision avant que toutes ces mesures ne soient mises en place. Je voudrais savoir comment vous envisagez la chose. Cela vise-t-il à compléter un système qui fonctionne déjà avec une vérification des règles d'équité et de justice fondamentale ou s'agit-il de quelque chose d'entièrement nouveau?
M. Gérard Lalonde: Il s'agit certainement d'une mesure complémentaire. Comme vous l'avez mentionné, l'administration centrale va examiner l'application potentielle de cette pénalité. Après cet examen et une fois qu'on aura appliqué les lignes directrices que l'ACDR va élaborer en collaboration avec les groupes intéressés, la pénalité pourra être examinée par les tribunaux. Si le professionnel de la fiscalité n'est pas d'accord avec la pénalité, même après toute cette procédure, il a parfaitement le droit de la contester devant les tribunaux.
M. Paul Forseth: C'est tout pour le moment.
Le président: Au nom du comité, je voudrais vous remercier infiniment, monsieur Cullen. Notre comité souhaite voir un programme qui va favoriser la croissance, mais je dois dire que ce projet de loi va certainement dans la bonne direction.
M. Roy Cullen: Je vous remercie. C'était une bonne discussion et ce que vous avez fait valoir aujourd'hui va certainement nous guider dans nos délibérations futures.
Le président: Merci.
La séance est levée.