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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 016 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 4 mars 2008

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    La séance est ouverte. C'est la séance numéro 16 du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. Nous sommes le mardi 4 mars 2008.
    Nous poursuivons aujourd'hui notre étude sur l'Afghanistan et sur la mission en Afghanistan. Les témoins que nous accueillons cet après-midi sont M. Alex Neve, secrétaire général d'Amnistie internationale Canada et Mme Hilary Homes, responsable de la campagne Justice internationale, sécurité et droits de la personne, pour Amnistie internationale. Nous recevons également M. Grant Kippen, directeur du The Hillbrooke Group et le colonel Mike Capstick, associé du Centre d'études militaires et stratégiques de l'Université de Calgary.
    Tel que prévu à la suite d'une brève discussion, à la fin de cette séance, nous réserverons quelques minutes aux travaux du comité. Nous devons adopter un rapport de comité directeur et examiner quelques autres questions.
    Nous vous souhaitons la bienvenue. C'est un plaisir de vous accueillir; nous sommes impatients d'entendre vos commentaires. Normalement, comme on l'a déjà signalé, lorsque nous nous réunissons, nous disposons d'une heure mais, étant donné qu'il y a un vote à la Chambre, la greffière a profité de l'occasion pour réunir tous les membres ici; nous pourrons donc prolonger la séance. Ça nous permettra de poser davantage de questions.
    Je ne sais pas très bien dans quel ordre vous voulez que l'on procède, mais vous disposez d'une dizaine de minutes pour l'exposé, puis nous poserons des questions. Et si vous preniez la parole le premier, monsieur Neve?
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Amnistie internationale est heureuse d'avoir cette occasion de témoigner.
    Amnistie a étudié, a documenté et a signalé les nombreuses et très graves atteintes aux droits de la personne commises en Afghanistan depuis des décennies, au cours des années 70, des années 80 et des années 90; elle a en outre mené campagne contre ces violations. Au cours des dernières années, nous avons attiré l'attention sur la torture systématique, sur les graves violations des droits des femmes, sur les infractions au droit humanitaire international dans le contexte de divers conflits armés, sur des problèmes fondamentaux liés au système de justice et sur de nombreux autres problèmes. Nous avons présenté des recommandations complètes en vue d'une réforme devant différentes autorités à l'échelle nationale et devant la communauté internationale.
    Le gouvernement du Canada n'avait encore jamais été engagé aussi activement en Afghanistan. Nous estimons par conséquent que c'est une occasion en or pour le Canada de s'assurer que les droits de la personne soient au sommet des priorités de notre plan d'action pour l'Afghanistan, non seulement en paroles, mais aussi en pratique.
    Ma collègue, Hilary Homes, et moi-même ferons deux types d'observations et de recommandations. Elle mettra en évidence certaines de nos préoccupations majeures en matière de droits de la personne, notamment celles qui sont associées à la protection des civils pendant un conflit armé. Je ferai ensuite des observations sur un sujet en particulier qui, comme vous le savez probablement, a été une priorité pour Amnistie internationale, à savoir le traitement des prisonniers appréhendés par les Forces canadiennes pendant les opérations militaires en Afghanistan.
    Je cède la parole à Mme Homes.
    Je suis certaine que vous êtes au courant des piliers désormais très connus du Pacte pour l'Afghanistan, à savoir la sécurité, la gouvernance, la primauté du droit et les droits de la personne, ainsi que le développement économique et social. On s'est beaucoup intéressé à la sécurité en tant que précurseur de l'exécution d'autres volets du pacte. Cependant, la véritable sécurité n'est réalisable que par un engagement envers tous les aspects de concert et par des progrès considérables dans ce domaine. L'échec persistant de nombreux acteurs, sur la scène internationale et au niveau national, en ce qui concerne l'établissement de priorités et le soutien à la gouvernance, à la primauté du droit et aux droits de la personne a finalement eu pour seule conséquence d'accroître l'insécurité en Afghanistan.
    Les violations des droits de la personne et du droit humanitaire international en Afghanistan sont une préoccupation depuis des dizaines d'années, comme l'a fait remarquer M. Neve; elles sont en tout cas encore très fréquentes. La persistance du conflit et la répression continuelle ont eu des conséquences dévastatrices. Elles ont, à proprement parler, détruit les institutions et les capacités dans cette région. Une reconstruction et un renforcement considérables sont essentiels, comme l'est aussi, de la part du gouvernement afghan et de la communauté internationale, la volonté politique nécessaire pour que ça se réalise.
    Dans le contexte du conflit armé et d'autres opérations militaires, tous les acteurs, c'est-à-dire les forces de sécurité afghanes, les groupes armés afghans et les diverses forces internationales, ont commis des abus, notamment en lançant des attaques aveugles ou en ne faisant pas suffisamment de différence entre les cibles civiles et les cibles militaires. En outre, tous les acteurs ont manqué à leurs obligations expresses de protéger les civils. Au contraire, leurs interventions ont, dans certains cas, mis des civils en danger de plusieurs façons, notamment lorsque des forces sont, par un malheureux concours de circonstances, devenues la cible d'attaques pendant qu'elles intervenaient dans des zones civiles ou s'y déplaçaient. Les civils sont de plus en plus souvent pris entre deux feux.
    Je suis certaine que vous avez lu le journal Globe and Mail la fin de semaine dernière qui contenait un reportage sur l'Afghanistan. Les chiffres mentionnés méritent d'être signalés: en 2005, le nombre de décès était de 1 000 et il a atteint 4 000 en 2006, puis au moins 6 500 en 2007. L'impact de cette situation ne se résume pas à des pertes de vies; elle entraîne en outre des déplacements de personnes, la fermeture de l'espace et de l'accès pour les groupes humanitaires, notamment l'enlèvement et le meurtre de travailleurs de l'aide internationale.
    C'est un contexte dans lequel les Afghans eux-mêmes sont souvent dévalorisés et sont considérés par les différents acteurs, nationaux et étrangers, comme des boucliers humains ou des collaborateurs possibles, comme des dommages collatéraux regrettables, hors de proportion, ou comme des menaces potentielles s'ils sont regroupés à trop grande proximité des forces étrangères ou tentent d'engager une discussion ou encore de manifester leur désaccord. Cette situation est aggravée par une incapacité d'enquêter sur les acteurs afghans et, parfois, par un manque de volonté chez les acteurs étrangers, quoique la capacité d'enquêter existe. Le résultat est une absence troublante d'imputabilité.
    La primauté du droit est un facteur essentiel de la reconstruction en Afghanistan. L'absence de respect de cette primauté, surtout dans un contexte où les institutions sont faibles, voire inexistantes, perpétue des violations généralisées des droits de la personne. Cette situation a plusieurs conséquences en Afghanistan, notamment la perpétuation de la violence contre les femmes, un regain de la marginalisation des personnes et des collectivités vulnérables, l'incarcération des prisonniers d'opinion, des procès politiques inéquitables, la torture et les mauvais traitements, des disparitions ou des exécutions sommaires et, malheureusement, l'impunité généralisée pour les violations passées et présentes. Cette situation est encore rendue plus complexe par la persistance de l'incapacité d'écarter du pouvoir les violeurs des droits de la personne.
    Quelques obstacles supplémentaires à la protection efficace des droits de la personne, de la justice et de la primauté du droit sont liés à un appareil judiciaire avec du personnel non qualifié, à une force policière qui continue d'être mal entraînée et mal rémunérée — il y a eu quelques améliorations, mais il reste bien des difficultés à surmonter —, à une force armée qui est elle-même la cible d'attaques, à des menaces à l'indépendance judiciaire, que ce soit de la part de groupes armés, de personnes titulaires de charges publiques, de seigneurs de la guerre, de particuliers ou à des procédures judiciaires inéquitables, notamment des violations du droit de convoquer et de questionner des témoins, et à un manque général de confiance ou d'accès à un système de justice officiel, qui se solde par le recours à des systèmes de justice informels, en particulier dans les régions rurales.
    En 2003, la Commission des droits de l'homme des Nations Unies a demandé au gouvernement afghan de déclarer un moratoire sur la peine de mort en raison des nombreuses lacunes procédurales et d'autre nature, dans le système judiciaire afghan. Quinze exécutions étatiques récentes ont marqué la fin d'un moratoire de trois ans sur les exécutions en Afghanistan et ont suivi de près l'exécution d'un jeune taliban de 15 ans, dans le sud du pays. La reprise des exécutions est une préoccupation en soi, étant donné qu'on a tendance à les abolir à l'échelle mondiale. Ce revirement survient dans un contexte dans lequel la faiblesse du système juridique de base est profondément troublante.
    Alors qu'on a enregistré quelques améliorations pour certains Afghans, surtout dans les domaines de la liberté d'expression et de l'accès à l'éducation et aux soins de santé, l'expérience globale en matière de droits fondamentaux de la personne demeure très faible à l'échelle du pays. Les défenseurs des droits de la personne sont exposés au harcèlement, à l'intimidation, voire à une exécution. Toute protestation ne va pas sans risques.
(1540)
    De nombreuses promesses d'amélioration de la situation sur le plan des droits de la personne ont été faites par le biais des mandats des forces internationales, des Nations Unies, de la récente Conférence de Rome sur la primauté du droit en Afghanistan et, naturellement, de la constitution afghane comme telle. Ces engagements à créer ou à renforcer les institutions et à édifier une vaste culture des droits de la personne pour assurer leur survie doivent être respectés si l'on veut que les progrès réalisés ne soient pas vains.
    Je laisse maintenant la parole à M. Neve.
    Je ferai seulement quelques commentaires au sujet de la question des prisonniers appréhendés par des membres des Forces canadiennes au cours des opérations militaires en Afghanistan.
    Amnistie internationale a soulevé pour la première fois des préoccupations à ce sujet au début de 2002, quand le Canada a commencé à déployer des forces en Afghanistan. Nos préoccupations concernaient alors la politique consistant à remettre les prisonniers aux forces américaines et la probabilité que ces prisonniers atterrissaient finalement à la base aérienne de Bagram ou à Guantanamo Bay. Cette façon de procéder a été abandonnée en décembre 2005, à la suite de la première entente entre le Canada et l'Afghanistan en vertu de laquelle les prisonniers devaient être transférés sous garde afghane; il était toutefois spécifié que le Comité international de la Croix-Rouge et la commission afghane indépendante des droits humains participeraient à la surveillance.
    Nous avons fait remarquer immédiatement que ça n'avait pas résolu le problème en raison de la pratique de la torture répandue depuis des années dans tout le système carcéral afghan. Nous avons exhorté le Canada à examiner une approche différente, une approche qui serait conforme à nos obligations internationales. Nous avons fait remarquer qu'une possibilité serait d'élaborer, de concert avec nos alliés de l'OTAN et en collaboration très étroite avec les autorités afghanes, une stratégie commune concernant la façon de traiter les Afghans qui ont été faits prisonniers au combat, allant d'une collaboration entre les parties concernées pour construire une nouvelle prison et l'administrer en commun à la collaboration dans les installations existantes. Cette proposition n'a pas été retenue.
    En février 2007, après avoir exercé en vain des pressions pendant cinq ans pour qu'on adopte une approche résolument fondée sur les droits de la personne en matière de traitement des prisonniers en Afghanistan, nous avons estimé que nous n'avions pas d'autre choix que de nous adresser aux tribunaux; nous avons donc entamé les démarches pour présenter une demande à la Cour fédérale, avec la British Columbia Civil Liberties Association. Je suis certain que vous êtes tous au courant des événements qui se sont déroulés depuis lors.
    En mai 2007, en réponse à la demande judiciaire, le gouvernement a négocié une entente bilatérale plus solide avec le gouvernement afghan, prévoyant un rôle spécifique de surveillance pour les autorités canadiennes. Au cours des mois qui suivirent, les autorités canadiennes reçurent au moins huit allégations spécifiques de torture faites, par des prisonniers, pendant des tournées dans les prisons. La dernière, qui remonte à novembre, était assez inquiétante pour que l'on prenne la décision de suspendre complètement les transferts.
    Les allégations reçues contiennent des descriptions très préoccupantes de scènes de torture extrêmement pénibles, notamment des coups répétés avec des câbles, des électrochocs, des doigts coupés et également brûlés avec des briquets ou encore forcer les détenus à rester debout ou à rester éveillés pendant des périodes prolongées.
    Les transferts ont toutefois repris vendredi dernier, le 29 février. La décision de les reprendre a été prise à la suite de plusieurs événements, notamment des accusations portées contre une personne pour l'incident de torture de novembre.
    C'est un aperçu très général, mais j'aimerais mettre l'accent sur trois faits importants. Le premier est qu'on a souvent prétendu que la surveillance réglerait ce problème. On a insisté sur le fait que la Croix-Rouge, la Commission afghane indépendante des droits humains et le gouvernement du Canada intervenaient tous les trois dans la surveillance dans les prisons où étaient détenus les prisonniers transférés et que ceux-ci seraient donc protégés de façon fiable de la torture. Si seulement c'était vrai!
    La surveillance est une bonne chose et nous exhortons régulièrement les gouvernements à adopter des systèmes plus rigoureux de surveillance dans leurs prisons, en mettant l'accent sur la prévention de la torture, mais dans un contexte comme celui de l'Afghanistan, où la torture est endémique et dure depuis des années, ça ne règle pas le problème du jour au lendemain, ni même en quelques semaines ou quelques mois. La surveillance peut aider à l'occasion à détecter la torture après coup. Elle peut même éventuellement, conjuguée à plusieurs autres initiatives, contribuer à diminuer la fréquence de la torture, voire la faire disparaître à long terme, mais ce n'est pas une solution rapide ou à court terme sur laquelle on puisse se fier pour protéger les prisonniers. Les allégations préoccupantes faites au cours des mois pendant lesquels des hauts responsables canadiens faisaient des visites de surveillance dans les prisons l'ont démontré. Certains gardiens afghans se sentaient si peu concernés qu'ils ont laissé traîner des instruments de torture dans une cellule, même en sachant que des agents canadiens venaient à l'occasion faire des vérifications.
    Ensuite, il a souvent été dit que nous préconisions en quelque sorte un système de justice parallèle en Afghanistan — une prison canadienne, un système correctionnel canadien à Kandahar, entièrement indépendants du système judiciaire afghan. Ce n'est pas du tout le cas. Nous n'avons jamais fait cette recommandation et nous ne le ferions jamais. Nous avons toujours préconisé une collaboration étroite, la coopération et le renforcement des capacités. Si c'était bien fait, ça apporterait la solution à court terme aux transferts de détenus en contribuant à long terme à améliorer le système carcéral et à mieux protéger les droits de la personne dans le système judiciaire afghan.
(1545)
    Enfin, certaines personnes prétendent que ce n'est pas important parce qu'il s'agit de combattants talibans qui sont, après tout, responsables de graves atrocités, et que nous ne devrions pas trop nous soucier de la façon dont ils sont traités. Il ne faut pas oublier que ce qui nous concerne en l'occurrence, c'est la torture, et pas les talibans. Certaines des personnes capturées sont probablement des loyalistes talibans endurcis; d'autres sont probablement des agriculteurs locaux qui se sont trouvés au mauvais endroit au mauvais moment. Toutes ces personnes devraient être protégées de la torture. Ce doit être l'approche sans équivoque du Canada. L'interdiction de la torture est une valeur fondamentale liée aux droits de la personne. C'est clairement une obligation internationale. Si notre engagement en Afghanistan n'a pas pour objet de promouvoir scrupuleusement des valeurs semblables, à quoi sert-il?
    Je vous remercie pour votre attention.
    Merci.
    Nous donnons la parole à M. Kippen.
    Monsieur le président, je vous remercie, vous et les autres membres du comité, pour cette occasion de témoigner. J'aimerais également féliciter le comité pour ses délibérations méthodiques et approfondies sur les difficultés auxquelles le Canada, la communauté internationale, le gouvernement de l'Afghanistan et le peuple afghan sont confrontés en ce qui concerne la sécurité, la reconstruction et le développement économique durable, ainsi que l'édification de structures et de processus efficaces de gouvernance.
    Mon point de vue s'est formé grâce au travail que j'ai fait dans les domaines des élections et du développement démocratique en Afghanistan, et dans plusieurs autres pays de la région. Je suis certain de me faire l'écho des commentaires de nombreux autres témoins en faisant remarquer que notre engagement à l'égard du peuple afghan devrait être à long terme, comme l'exigent la nature et l'ampleur des défis à relever.
    J'estime que, dans le cadre de l'examen de son futur rôle en Afghanistan, le Canada devrait décider de faire du développement démocratique et de la gouvernance la pierre angulaire du travail que nous appuyons et dans le cadre duquel nous prenons parfois la direction des opérations.
    En janvier de cette année, j'ai écrit un article paru dans le Globe and Mail dans lequel je préconisais que le gouvernement du Canada collabore avec le peuple et le gouvernement de l'Afghanistan pour édifier une démocratie représentative vigoureuse et efficace. J'ai recommandé dans cet article que le Canada profite de la prochaine série d'élections — présidentielles, parlementaires et provinciales, prévues pour la prochaine année ou l'année suivante — et en fasse l'objectif à court terme pour aider le gouvernement afghan à édifier des structures de gouvernance et des institutions démocratiques légitimes, efficaces et durables. Je pense que la prochaine série d'élections sera déterminante pour asseoir la légitimité et la crédibilité du gouvernement afghan, aux trois paliers.
    L'euphorie de la première série d'élections en 2004 et en 2005 s'est dissipée; c'est d'ailleurs la raison pour laquelle le Canada et la communauté internationale, en partenariat avec le gouvernement afghan, doivent s'engager à faire tout ce qui est possible pour s'assurer que cette prochaine série d'élections soit une réussite. Pour cela, il sera essentiel de collaborer avec un large éventail d'intervenants et d'institutions, avec la magistrature, avec la fonction publique, y compris les forces armées et les forces policières, avec les législateurs et avec les partis politiques.
    Les suggestions concernant les domaines où nous pouvons faire une différence constructive incluent, si je ne me trompe, le financement de projets d'éducation civique dans le but d'inciter les citoyens à s'engager afin qu'ils comprennent le but et le processus des élections. En votre qualité de représentants élus, vous êtes très sensibles au fait que, dans un processus électoral, le temps est précieux; par conséquent, il est essentiel de faire tout ce qu'il faut pour mettre en oeuvre des projets d'éducation civique dans les plus brefs délais possible.
    Une suggestion consiste à établir un institut de formation de la fonction publique. C'était indiqué expressément dans le récent rapport du groupe d'étude sur l'Afghanistan coprésidé par l'ambassadeur Pickering et par le général James Jones. À court terme, il faudrait mettre l'accent sur la formation des fonctionnaires quant à leur rôle et responsabilités pendant le processus électoral. Je sais que l'ambassadeur afghan au Canada, son excellence Omar Samad, a fait plusieurs fois cette suggestion; le Centre for the Study of Democracy de l'Université Queen's et moi-même l'avons faite également.
    Une autre suggestion est d'appuyer la mise en place d'un conseil des gouverneurs dans le cadre duquel les gouverneurs des diverses régions du pays se réuniraient régulièrement pour échanger de l'information et des idées concernant le développement économique, les questions de sécurité, les difficultés qui se posent dans la prestation des services publics, etc. Il n'existe actuellement aucun organisme de ce genre dans le pays.
    Une autre suggestion consiste à élaborer des programmes pour appuyer le travail des représentants élus et des partis politiques. Comme vous l'avez appris à la Chambre aujourd'hui, une délégation de femmes parlementaires d'Afghanistan est en visite à Ottawa et je recommande fortement qu'on mette en place d'autres programmes d'échanges semblables.
    Étant donné que notre engagement et notre mission militaires sont situés à Kandahar, je recommande d'envisager de cibler nos efforts avec les intervenants mentionnés ci-dessus dans cette région. Ces efforts ne seront couronnés de succès que si nous donnons aux Afghans au niveau local la responsabilité, le pouvoir et l'imputabilité pour le processus électoral en édifiant en outre des structures et des processus de gouvernance efficaces.
    L'ex-ministre de l'Intérieur afghan, Ali Jalali, a écrit dernièrement dans un article, avec une grande perspicacité, que l'édification d'une gouvernance efficace au niveau provincial et au niveau des districts en Afghanistan était essentielle pour la légitimité et la stabilisation du pays. Il a aussi écrit qu'il était impératif que les actions non militaires aient pour principal objet de rassurer, de persuader et d'influencer la population locale en assurant la sécurité, l'aide humanitaire et les services essentiels, en établissant une infrastructure, en édifiant des institutions et en appuyant la primauté du droit.
(1550)
    La suppression des sources d'insurrection au Pakistan nécessite une nouvelle approche régionale et le règlement de plusieurs préoccupations légitimes de l'Afghanistan et du Pakistan. Le développement et l'éducation du peuple dans les zones rurales tribales des deux côtés de la frontière, la promotion des valeurs démocratiques au Pakistan et le renforcement de la gouvernance en Afghanistan sont parmi les préoccupations les plus impérieuses.
    Nous pensons qu'une stratégie militaire et d'aide au développement synchronisée est essentielle. Il faut toutefois agir rapidement si l'on veut laisser une empreinte constructive et durable. Le temps presse si nous voulons organiser un effort majeur dans cette région.
    D'autres pays et d'autres organisations se sont déjà attelés à la préparation du terrain pour les prochaines élections. Par exemple, l'Institut néerlandais pour la démocratie multipartite que vous connaissez grâce à vos travaux sur le développement économique, vient d'annoncer la mise en oeuvre d'un projet en Afghanistan.
    Malheureusement, depuis 2005, aucun travail majeur n'a été fait par la communauté internationale en matière de collaboration avec les partis politiques en Afghanistan.
    L'Agence américaine pour le développement international évalue actuellement des propositions concernant ce qui est probablement le plus vaste projet d'aide électorale en Afghanistan; une décision sera probablement prise au cours des deux ou trois prochains mois.
    Les récentes élections au Pakistan indiquent qu'il est essentiel d'investir dans le renforcement des institutions et des processus démocratiques. Bien qu'on estime que les résultats sont généralement le reflet de la volonté des électeurs, le processus électoral posera des défis considérables. Le PPP et le PML-N, ainsi que les groupes nationaux et internationaux d'observateurs électoraux, ont relevé des milliers de cas d'irrégularités électorales présumées.
    À l'occasion des élections à la Wolesi Jirga et au conseil provincial, près de 7 000 contestations et plaintes ont été déposées. Bien que la plupart d'entre elles concernent des allégations d'infractions criminelles et des violations antérieures des droits de la personne, un nombre considérable sont associées à l'intervention de fonctionnaires et à l'utilisation de ressources étatiques dans le processus. Il faudra faire davantage au cours des prochaines élections pour remédier à ces irrégularités.
    J'estime en outre qu'étant donné les nouveaux gouvernements élus aux niveaux national et provincial au Pakistan, c'est le moment parfait pour que le Canada réévalue les possibilités de soutenir les activités de développement démocratique au Pakistan. La Chambre aura bientôt l'occasion de renforcer les relations professionnelles et les dialogues avec les nouveaux homologues des assemblées nationale et provinciales au Pakistan.
    Si le Canada ne l'a pas encore fait, il devrait envisager d'établir un groupe de travail sur la diplomatie, la défense et le développement pour qu'il évalue les meilleures possibilités de réagir au nouveau programme gouvernemental.
    En votre qualité de représentants élus, vous connaissez très bien l'expression « toutes les politiques sont locales ». Elle est attribuée à Tip O'Neill, le deuxième président de la Chambre des représentants des États-Unis ayant eu le plus grand nombre d'années de service. Je pense que ça mérite d'être répété, car ça résume ce que je considère comme le travail important que fait votre comité en contribuant à déterminer notre futur rôle en Afghanistan. Voici ce qu'a dit Tip O'Neill :
J'ai passé toute ma vie dans la politique. Je suis fier d'être politicien. Aucune autre carrière n'offre autant de possibilités d'aider les gens. Il ne faut pas se préoccuper des essais qu'on a faits et des échecs qu'on a connus, mais il faut s'intéresser à ce qui est encore possible. Il ne faut ménager aucune énergie lorsque la nation et le monde peuvent être améliorés par nos efforts.
    Merci.
(1555)
    Merci, monsieur Kippen.
    Colonel Capstick, vous avez la parole.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de m'accueillir ici aujourd'hui. J'apprécie réellement l'occasion qui m'est donnée de contribuer à ce qui est, sans aucun doute, le plus important débat de politique étrangère auquel le Canada ait été appelé à participer, de toute ma vie. Avec votre permission, je m'adresserai au comité en anglais, car je ne voudrais pas massacrer la langue de Molière, et je ferai de mon mieux pour répondre à vos questions avec simplicité et franchise.
    Le 18 septembre 2005, j'étais au bureau de scrutin de la province de Logar, dans le vieux Kaboul, pour observer le déroulement des premières élections parlementaires tenues en Afghanistan depuis plus de 30 ans. Le souvenir le plus vivace que je conserve de cette journée est celui de tous ces électeurs remplis d'optimisme et des plus folles espérances. Nomades de la tribu Kuchi, villageois pashtounes, travailleurs Hazara, et certaines des femmes les plus pauvres du monde avaient tous en commun, ce jour-là, le sentiment que l'Afghanistan allait enfin tourner la page, et que ces élections, dernière étape du processus de Bonn, marquaient la fin de 30 ans de violence et de terreur. Bref, les Afghans croyaient réellement qu'ils pourraient bientôt reprendre le cours normal de leur existence, libérés enfin du poids écrasant de la peur, devenue depuis trop longtemps leur lot quotidien.
    Or, malgré l'optimisme palpable de cette journée d'élections, j'ai bientôt compris avec stupeur que le gouvernement de la République islamique d'Afghanistan et ses partenaires internationaux n'avaient pas le moindre plan réel pour la suite des choses. Le processus de Bonn était maintenant terminé, les structures étatiques étaient en place, mais sans les ressources humaines nécessaires à leur fonctionnement, et la sécurité semblait s'améliorer un peu partout dans le pays. Au bureau de scrutin de la province de Logar, je me souviens distinctement d'avoir demandé à Chris Alexander, le premier ambassadeur canadien en Afghanistan, ce qu'on ferait ensuite. Malgré sa connaissance approfondie de l'Afghanistan et sa grande influence à Kaboul, il n'a pas pu répondre à ma question pour la bonne raison qu'il n'y avait tout simplement pas de plan.
    Bien que le processus de Bonn ait été mis en oeuvre avec succès, il n'y avait pas de plan stratégique pour encadrer tout le travail à long terme que représente la construction de cette démocratie naissante qu'est l'État afghan. Cette absence de vision stratégique a eu pour résultat qu'il a fallu consacrer des mois d'intenses efforts pour en arriver à produire le Pacte pour l'Afghanistan et la Stratégie intérimaire de développement national de l'Afghanistan à temps pour la Conférence de Londres sur l'avenir de l'Afghanistan, qui s'est ouverte le 1er février 2006.
    L'Équipe de consultation stratégique — Afghanistan, que je dirigeais, avait joué un rôle mineur dans l'élaboration de ces deux documents, et j'ai assisté à la Conférence de Londres en compagnie des membres afghans de mon équipe. Cette Conférence de Londres a été un autre grand moment d'optimisme. Pour la première fois depuis la chute du régime des talibans, il existait un langage commun et un cadre stratégique reconnu à la fois par l'Afghanistan et par la communauté internationale. Des engagements ont été pris, des promesses ont été faites, et tous les espoirs étaient permis, mais pas pour longtemps. Quelques mois plus tard, le manque de vision stratégique et l'absence quasi totale de cohésion entre les instances internationales présentes à Kaboul ont commencé à ébranler les chances de succès du Pacte et de la Stratégie intérimaire. Ce manque de cohésion compromet toute l'entreprise de construction d'un État démocratique. Pour dire les choses sans détour, on peut perdre la mission afghane sur les champs de bataille de la province de Kandahar, mais on ne peut la gagner qu'à Kaboul.
    Je ne m'étendrai pas sur les erreurs stratégiques des quelques dernières années. Il en est amplement question dans le Rapport Manley et dans l'excellent rapport provisoire qu'a déposé votre comité en janvier dernier. Je vais plutôt consacrer le reste de cette allocution aux choses qu'il faut faire, à mon avis, pour atteindre le niveau de cohésion stratégique nécessaire au succès des efforts conjoints de l'Afghanistan et de la communauté internationale, et au rôle crucial que joue le Canada dans ce contexte. Je ferai aussi quelques recommandations précises sur la gouvernance et les priorités de développement essentielles, tant à l'échelle nationale que dans la province de Kandahar. Enfin, je conclurai par des remarques sur l'importance de cette mission pour le peuple afghan.
    Bien qu'il semble y avoir consensus international sur la nécessité d'une stratégie afghane cohérente, il semble n'y avoir aucune vision commune des moyens à prendre pour y parvenir. Il a récemment été question de nommer un envoyé spécial de l'ONU, ce qui est une promesse de cohérence, mais la Mission d'assistance des Nations Unies en Afghanistan, la MANUA, reste en marge de la dynamique à l'oeuvre à Kaboul. La nomination d'un haut représentant de l'ONU pourrait sans doute contribuer au redressement de la situation, mais ne parviendrait pas à elle seule à créer la cohérence souhaitée.
(1600)
    Certains des États les plus puissants représentés à Kaboul, de même que certains des plus importants organismes de développement international, nuisent systématiquement à toute possibilité de leadership de l'ONU en insistant pour servir leurs intérêts nationaux et mettre en oeuvre leurs priorités organisationnelles au lieu de s'en tenir au programme élaboré dans le Pacte.
    La racine du problème remonte à la période qui a immédiatement précédé la chute du régime des talibans. Les États-Unis ont délibérément limité le rôle de l'ONU et le processus de Bonn, avec son système dysfonctionnel de nation responsable, a nui de manière structurelle à toute forme de cohésion. Cette situation est intenable et, si l'on veut que la MANUA soit efficace, il faudra que l'envoyé spécial de l'ONU reçoive un appui politique inconditionnel, et qu'il se produise un réel changement d'attitude sur le terrain. Le Canada peut et doit faire jouer l'influence et le capital politique dont il jouit, et qu'il s'est mérité de haute lutte, pour exercer son leadership et susciter la volonté politique internationale indispensable au succès à Kaboul.
    Il est évident que l'approche pangouvernementale adoptée par le Canada a beaucoup évolué au cours des deux dernières années. La création récente d'un comité du Cabinet, soutenu par un groupe de travail relevant du BCP, promet de soutenir la cohésion de l'effort canadien. Si la motion actuellement débattue est adoptée, un comité parlementaire spécial sur l'Afghanistan pourra superviser l'ensemble de la mission et garantir la responsabilité ministérielle.
    Ces mesures très positives doivent maintenant s'accompagner d'une stratégie publique d'ensemble, qui définisse avec exactitude les objectifs que poursuit le Canada en Afghanistan — les fins —, les organismes, méthodes, priorités et étapes à franchir pour les réaliser — la manière — et les ressources, humaines et financières, qui y seront consacrées — les moyens. Cette stratégie doit être compatible avec le Pacte et devra servir de guide suprême à l'effort « pangouvernemental » du Canada. Elle permettra aux parlementaires de suivre les progrès de la mission et, du même coup, d'informer la population canadienne des objectifs nationaux que nous visons en Afghanistan et des moyens que le gouvernement entend mettre en oeuvre pour les réaliser. Tous ensemble, le comité du Cabinet, le groupe de travail, le comité parlementaire spécial et la stratégie publique sur l'Afghanistan ne pourront qu'accroître la cohérence de notre stratégie nationale.
    Cependant, par sa nature même, le système de Westminster, fondé sur la responsabilité ministérielle, ne se prête pas à une approche « pangouvernementale ». Les soldats, les diplomates, les représentants des organismes de développement international, les policiers et les agents de correction sont tous formés indépendamment les uns des autres en fonction des impératifs et de la culture de leurs organisations respectives. Les mesures décrites plus haut auront le pouvoir d'atténuer les tensions à Ottawa, mais elles doivent aussi donner lieu à des modifications structurelles sur le terrain. La stratégie afghane du Canada doit non seulement être cohérente à Ottawa, mais elle doit aussi être coordonnée de manière harmonieuse et sans rupture de continuité à Kaboul et à Kandahar.
    Sans mettre en doute la compétence et l'habileté diplomatiques de nos agents des Affaires étrangères, il faut comprendre que la gestion d'une opération aussi complexe et multidimensionnelle que la mission afghane n'est tout simplement pas du ressort des ambassadeurs du Canada, ni des commandants militaires. Pour trouver une solution, le premier ministre doit nommer un envoyé spécial canadien, crédible et compétent, lui conférer le pouvoir d'agir à titre de responsable de « l'équipe canadienne » et lui donner pour mandat de veiller à la bonne coordination de la Stratégie Canada-Afghanistan. Cet envoyé devrait relever directement du premier ministre et être soutenu par une équipe de coordination stratégique formée d'environ quatre personnes. Celles-ci devraient avoir de l'expérience en Afghanistan et des compétences en matière de sécurité, de gouvernance et de développement international, ainsi que des capacités éprouvées dans les secteurs de la planification et de la coordination stratégiques. Les membres de cette équipe ne doivent pas être des soldats ni des fonctionnaires encore actifs, car il faut pouvoir garantir leur indépendance, et les soustraire aux pressions inévitables de la bureaucratie qui ne pourraient que freiner leurs décisions. Cette équipe serait chargée de conseiller l'envoyé spécial du premier ministre, de réviser les projets et activités de manière à en assurer la cohérence stratégique, et d'être les yeux et les oreilles de l'envoyé spécial, partout au pays.
    Je voudrais maintenant faire des commentaires sur la gouvernance et les priorités de développement.
    Tous les efforts que consent le Canada dans les secteurs de la gouvernance et du développement, ces deux piliers du Pacte, doivent avoir pour but de raffermir la légitimité du gouvernement afghan. Une grande partie du soutien apporté par l'Agence canadienne de développement international aux programmes nationaux a porté fruit à cet égard. Par exemple, le soutien de l'ACDI au Programme de solidarité nationale a non seulement eu les résultats positifs que d'autres témoins ont décrits, mais est aussi l'une des raisons principales pour lesquelles le ministère de la Réhabilitation rurale et du Développement, le MRRD, est aujourd'hui l'une des structures les plus crédibles du gouvernement afghan. Mettre sur pied d'autres ministères et doter la province de Kandahar d'une administration aussi efficace que l'est le MRRD, voilà ce que le Canada devrait avoir pour objectif.
    C'est pour cette raison que l'idée de réaliser à Kandahar un projet signature soulève des inquiétudes. Par exemple, rénover l'hôpital Mirwais et y planter un drapeau canadien ne fait rien pour légitimer le gouvernement afghan. On risque même, en agissant ainsi, d'envoyer aux habitants de la province le message qu'Ottawa peut en faire plus pour eux que Kaboul.
(1605)
    Cela dit, le ministre responsable de l'ACDI a déjà télégraphié au gouvernement son intention d'aller de l'avant avec la réalisation d'un projet signature. Tout projet de ce genre devra être réalisé en partenariat avec le gouvernement afghan et la population locale. Et surtout, il devra raffermir le pilier de la gouvernance et la légitimité du gouvernement afghan en soutenant le leadership afghan et en améliorant ses moyens d'action.
    Les besoins de l'Afghanistan sont si criants que tous les partenaires au développement doivent se fixer des priorités et démultiplier leurs capacités en trouvant des appuis solides. Le besoin le plus urgent, celui que citent tous les rapports sans exception, est celui de la sécurité humaine, le genre de sécurité que seul peut apporter un gouvernement honnête et efficace, soutenu par une administration publique professionnelle, un bon système judiciaire, des mécanismes de résolution de conflits efficaces, et des forces de l'ordre qui exercent leurs fonctions dans l'honneur et le sens du devoir. Le Canada devrait orienter ses compétences traditionnelles dans ces secteurs, tant à l'échelle nationale que dans les provinces afghanes.
    La réforme de l'administration publique et des structures de gouvernance à Kaboul se fait de façon fragmentée et indisciplinée depuis la chute du régime taliban. Malgré les quantités d'argent qui y sont déversées et la présence de centaines de techniciens d'aide internationale, il n'y a encore aucune stratégie cohérente de réforme du système et de ses modalités. Le Canada devrait faire preuve de leadership à cet égard et travailler en étroite collaboration avec l'ONU et la Banque mondiale à l'élaboration de la stratégie nécessaire et à la coordination des efforts de la communauté internationale.
    La forme concrète que pourrait prendre un tel effort reste à préciser, mais il pourrait s'agir d'envoyer des hauts représentants pour gérer le programme, ou donner plus de poids à l'Équipe de consultation stratégique — Afghanistan en y intégrant des professionnels de la gouvernance et en élargissant son mandat en conséquence.
    Il faut aussi, à tout prix, instaurer une gouvernance efficace dans la province de Kandahar. Toute la structure de gouvernance des provinces de l'Afghanistan pose problème, et je suis généreux. La corruption, le manque de capacité et les décisions arbitraires sont monnaie courante. Il ne fait aucun doute que les projets visant à corriger cette situation à Kandahar devraient faire partie des priorités du Canada. Il pourrait s'agir de projets visant à réformer le système d'administration publique, la police et les forces de l'ordre, le système pénal et le contrôle des finances publiques. En même temps, le Canada doit soutenir le gouvernement afghan dans ses efforts pour livrer les services de base à la population.
    Pour dire les choses très simplement, les Afghans d'aujourd'hui ne veulent rien d'autre que ce que voulaient les Canadiens en 1867: la paix, l'ordre et un bon gouvernement. Nos efforts d'aide au développement doivent miser là-dessus et les aider à y parvenir.
    J'aimerais conclure en vous disant toute l'importance que prend cette mission pour le peuple afghan. Lorsque je prends la parole en public au sujet de l'Afghanistan, je cite souvent un passage du Dialogue mélien de Thucydide, à savoir « ... la justice n'entre en ligne de compte dans le raisonnement des hommes que si les forces sont égales de part et d'autre; dans le cas contraire, l'effort exerce leur pouvoir et les faibles doivent leur céder ». Cette expression de réalisme politique caractérise l'histoire, la politique et la société afghanes depuis beaucoup trop longtemps. Il faut mettre un terme au règne des prédateurs pour que l'Afghanistan et son peuple puissent avoir un avenir. Pour cela, il faudra du temps, beaucoup de temps. C'est tout simplement impossible de réparer en quelques années les dommages causés par trois décennies de guerre. On peut facilement faire l'inventaire des dommages matériels causés aux infrastructures et aux institutions du pays et on peut les réparer avec du temps et de l'argent. En revanche, il est plus difficile de prendre la mesure des dommages que tant d'années de conflits ont causés au tissu social d'un pays, à sa capacité de garantir la sécurité humaine, la gouvernance efficace et l'autonomie individuelle. Tout cela est beaucoup plus difficile à réparer que les ponts, les routes et les écoles.
    La communauté internationale a failli à sa tâche par manque de vision stratégique et, dans certains cas, par orgueil démesuré. Elle n'a pas réussi à mettre en place les conditions essentielles à la sécurité humaine et à la gouvernance efficace. Je suis convaincu que le Canada peut contribuer à corriger cette situation en faisant preuve de leadership sur la scène internationale de même qu'à Kaboul. Les premiers pas ont été faits à Ottawa. Je suis sûr qu'en élaborant une Stratégie publique afghane, en nommant un envoyé spécial du premier ministre soutenu par une équipe de coordination stratégique, et en orientant les efforts du gouvernement vers des actions qui contribuent à légitimer le gouvernement afghan, tant à Kaboul qu'à Kandahar, on parviendra, avec le temps, à corriger la plupart des erreurs stratégiques des quelques dernières années.
    L'Afghanistan et les Afghans sont complexes et contradictoires. Fiers, travaillants et remarquablement résilients, les Afghans ont appris à survivre au pire. L'invasion soviétique, une terrible guerre civile, le régime des talibans, les bombardements américains et, maintenant, un état d'insurrection permanente ont détruit toutes les institutions du pays et les mécanismes traditionnels de résolution de conflits de la société.
(1610)
    Ma plus grande crainte serait que la communauté internationale, frustrée par la lenteur des progrès, la confusion politique et la faiblesse des gouvernements en vienne à « blâmer la victime » et abandonne de nouveau l'Afghanistan et les Afghans. Certains invoquent l'intérêt national pour s'opposer à cette mission.
    Étrangement peut-être, de la part d'un ancien soldat, j'aimerais simplement rappeler au comité que l'Afghanistan est au plus bas niveau d'à peu près tous les indicateurs de développement humain de l'ONU. Le Canada, qui est, lui, presque toujours au sommet de ces mêmes indicateurs, a pris un solide engagement en acceptant de signer le Pacte de 2006. Nous avons réitéré nos engagements quand le Conseil de sécurité de l'ONU a entériné le Pacte, et ils sont désormais scellés dans le sang des soldats qui ont fait les sacrifices dont nous ne sommes que trop conscients.
    Les opposants à la mission égrènent la liste des échecs et des difficultés comme preuve que la stabilisation de l'Afghanistan et le relèvement de son niveau de vie sont une mission impossible — comme dans l'article du Globe and Mail de samedi, ayant pour titre « Mission impossible » — et qu'il n'y a rien d'autre à faire que d'abandonner ce pays à lui-même. C'est là une erreur de jugement qui n'aura d'autre effet que de condamner les Afghans à quelques décennies de plus de prédation et de violence.
    La seule réponse moralement acceptable, à mon avis, est de tirer les leçons des quelques dernières années et d'exercer le leadership politique essentiel à la mise en oeuvre d'une stratégie efficace afghane — communauté internationale, le genre de leadership pour lequel le Canada et les Canadiens sont connus.
    Merci.
    Merci.
    Nous entamons le premier tour de table. Nous donnons la parole à M. Martin, pour sept minutes.
    Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation. Vous avez fait d'excellents exposés.
    Personne ne blâmera la victime. Nous connaissons l'histoire horrible de l'Afghanistan. Je ne peux toutefois pas m'empêcher de poser la question suivante: serons-nous finalement capables de transformer un pays islamique où règne un régime féodal et tribal en un État laïque, protecteur des droits de la personne, sans devoir intervenir pendant des générations? Peut-être est-il possible que, malgré cela, ce n'est pas une chose à faire parce que ce serait un acte d'orgueil démesuré et que ce ne serait peut-être pas possible du tout.
    Je pense qu'en définitive, notre solution la plus pragmatique consisterait peut-être à donner au peuple afghan les moyens d'assurer sa propre sécurité — en l'aidant à mettre en place un système judiciaire, une force policière, des forces armées et un système correctionnel compétents — et de lui permettre de surcroît de mettre en oeuvre les initiatives de développement qui correspondent à ses souhaits.
    Pouvez-vous nous expliquer ce que nous pouvons faire, de façon pratique, pour mettre un terme à la culture d'impunité, surtout au sein du gouvernement de M. Karzai; M. Karzai mine en effet la crédibilité de son gouvernement aux yeux de ses citoyens dans le contexte de ce dont nous avons été les témoins, avec les seigneurs de guerre, qui font le trafic de stupéfiants, et avec la corruption endémique dans ce pays?
    Pouvez-vous nous indiquer ensuite ce que nous pouvons faire, de façon pratique, pour amorcer la réconciliation tribale qui est essentielle sur le terrain, afin de rétablir les liens qui ont été détruits au cours des 30 dernières années de conflit?
    Enfin, M. Neve et Mme Homes pourraient peut-être expliquer comment nous pourrions en pratique raffermir un système judiciaire afghan qui serait conforme au contexte culturel de ce pays.
    Merci.
(1615)
    Merci, monsieur Martin.
    Voulez-vous répondre la première, madame Homes?
    Oui. Ç'est toute une série de questions!
    Nous pensons qu'il existe un gouffre entre ce que nous considérons comme des valeurs universelles en matière de droits de la personne et ce qui est possible pour l'Afghan moyen. Plusieurs organisations ont fait des études sur ce que veut le peuple afghan en matière de lutte contre l'impunité. Une de ces organisations est la Commission afghane indépendante des droits humains. Elle a publié un excellent rapport, il y a environ deux ans, intitulé « A Call for Justice », que je vous recommande vivement de lire. Il est assez volumineux. J'en ai un exemplaire que je pourrais vous laisser.
    Les membres de cette commission se sont rendus en dehors des villes pour discuter avec les gens, dans des cadres formels et informels, et leur demander quels étaient leurs souhaits. Ils ont constaté que, contrairement à ce que beaucoup de personnes présumaient, 90 p. 100 de la population était en faveur de ce que nous considérons comme des exemples très classiques de façons de lutter contre l'impunité. Ils sont en faveur de ce que nous appelons le filtrage — en d'autres termes, la révocation d'auteurs de violations des droits de la personne ou d'autres types de délits graves, pas à une date indéterminée, mais immédiatement.
    Le deuxième moyen est ce que nous appelons la recherche de la vérité — la création d'un organe comme une commission de vérité, ou d'autres méthodes moins formelles, pour savoir ce qui s'est passé. L'indemnisation est le troisième moyen, un certain type de réparation pour ce qui s'est passé. Le quatrième, ce sont les poursuites et la justice pénale.
    Par conséquent, l'écart n'est pas aussi important que nous ne le pensons. Ce sont des recommandations semblables à celles qu'une organisation comme Amnistie internationale fait constamment. Pour atteindre cet objectif, il faut notamment une formation intense de tous les secteurs du système de justice. Il est essentiel de porter son attention sur tout à la fois, depuis le système judiciaire jusqu'aux systèmes de maintien de l'ordre, le système correctionnel, la restauration, etc., et de les regrouper.
    Un des facteurs fréquents est qu'on accorde une très forte priorité à l'armée et à la police, et une priorité beaucoup moins forte à ces autres secteurs. On les laisse en quelque sorte tâtonner. C'est un aspect fondamental du problème, et c'est pourquoi les gens perdent confiance; c'est la raison pour laquelle leurs espoirs sont anéantis. Ça devient souvent la priorité secondaire. Il suffit de l'élever au rang de programme stratégique, au lieu de tâtonner. On aurait de la difficulté à vous présenter un plan exact avec toutes les 150 étapes. Je recommande de lire ce rapport; je vous laisserai mon exemplaire, si vous voulez. C'est parfait.
    Merci, madame Homes.
    Colonel Capstick.
    Je voudrais faire deux remarques sur cette série de questions.
    Ce dont il faut être conscient au sujet de la société afghane, c'est que nous en avons une vue très limitée, car nous nous intéressons surtout à la province de Kandahar, une des régions les plus rurales et les plus pauvres du pays. Ceux qui ont travaillé sur place ont constaté que la société afghane est beaucoup plus variée qu'on en a l'impression, vue d'ici.
    C'est un processus sous direction afghane. Aux élections présidentielles d'octobre 2004 et aux élections parlementaires de septembre 2005, la grosse majorité des Afghans ont voté en faveur d'une république islamique modérée; ils ont voté contre les extrêmes. Nous n'avons pas été capables de donner suite de façon satisfaisante à ce vote de confiance.
    Un des principaux problèmes — et je pense que ça rejoint la question de la culture d'impunité —, c'est que, lorsque Karzai a formé ce gouvernement, c'était le résultat de la politique de médiation classique. Ça ressemblait à la formation d'un cabinet au Canada au début des années 1900; il fallait certains représentants de tel secteur et d'autres d'un autre secteur, car il en fallait de partout. La grosse différence en l'occurrence est que les intéressés étaient armés et que certains d'entre eux avaient un passé assez lourd.
    M. Kippen est beaucoup plus qualifié que moi pour faire des commentaires sur les élus ayant un passé assez lourd. Ce qui est essentiel pour se débarrasser de cette culture d'impunité, c'est que, alors que la communauté internationale pousse le président Karzai à se prendre en main, nous devons mettre au point les mécanismes nécessaires pour le soutenir. Si j'étais à la place du président Karzai — Dieu m'en préserve, car je me demande bien pourquoi quelqu'un voudrait ces fonctions étant donné que c'est la personne qui court le plus de risques sur le plan de la sécurité, après Musharraf —, ou si j'étais ministre du Cabinet afghan, je ne sais pas très bien si je serais sûr que ce qui a été dit au moment de la signature du Pacte sur l'Afghanistan était vrai. Je ne sais pas très bien si j'en serais sûr, en particulier, en ce qui concerne l'engagement réel des pays occidentaux en Afghanistan. Toute cette hésitation est apparemment un signal très fort pour Kaboul.
    Monsieur Martin, je pense que nous ne serons jamais d'accord en ce qui concerne les réconciliations tribales. La plupart des problèmes qui se posent dans la ceinture pashtoune... Il y a des problèmes dans cette région, car certaines tribunes pashtounes — les Pashtounes sont un groupe ethnique, mais composé de différentes tribus — ont le sentiment d'être tenues à l'écart du processus parce qu'elles n'y ont pas participé d'emblée. Un pourcentage très élevé des problèmes qui se posent là-bas sont dus à la multitude de tribus pashtounes; c'est un exercice très complexe. Il y a plusieurs personnalités pashtounes au sein du gouvernement, y compris le président et le ministre Atmar. Je pourrais citer une foule d'exemples.
    Je m'arrête, mais je pourrais en discuter tout l'après-midi.
(1620)
    Merci, monsieur Capstick.
    Nous avons malheureusement dépassé de trois minutes le temps dont nous disposions. Je donne maintenant la parole à Mme Barbot.

[Français]

    Vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Je voudrais faire une petite remarque à nos invités: chaque parti dispose de sept minutes, pour les questions et les réponses; j'aimerais par conséquent que vos réponses soient concises.
    Madame Barbot.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Merci, madame et messieurs, d'être présents aujourd'hui.
    Je vais essayer de me mettre à la place de Mme et M. Tout-le-Monde qui suivent un peu ce qui se passe en Afghanistan dans les médias et par l'entremise des représentations des parlementaires. La plupart des gens constatent qu'ils n'ont pas suffisamment d'information crédible pour se prononcer sur la mission. La grande majorité de la population voudrait que les soldats rentrent à la maison. Au Bloc québécois, nous ne disons pas qu'il faut cesser la mission: nous pensons qu'il faudrait se déployer d'une autre façon, faire en sorte que les soldats canadiens fassent ce qu'ils savent le mieux faire et laisser à des pays qui, pour le moment, ne veulent pas remplir leurs responsabilités de ce côté-là le soin de faire la guerre.
    On nous dit souvent que nous abandonnons les soldats, mais c'est tout le contraire. Nous pensons qu'en tant que Canadiens, nous avons fait notre part, et nous voudrions plutôt faire ce que nous savons le mieux faire. Ce qui frappe la compréhension des gens, c'est ce qui arrive aux soldats. Nous voulons que les Canadiens qui sont en Afghanistan se comportent selon les valeurs canadiennes, les traités qu'on a signés et d'autres facteurs faisant en sorte que la population va se reconnaître.
    On a parlé de ce qu'on a appelé le scandale des soldats, c'est-à-dire des soldats qui ont été remis aux Afghans et torturés par la suite. On a cessé de remettre les soldats aux Afghans, mais on a ensuite recommencé à le faire. J'aimerais que vous me disiez, monsieur Neve, quelles mesures concrètes le gouvernement canadien ou les Forces canadiennes ont prises pour éviter qu'en remettant les soldats aux Afghans, la même chose se produise. A-t-on véritablement pris des mesures et peut-on nous garantir que la reconduction de ce programme n'aura pas exactement les mêmes effets?
(1625)
    Merci, madame Barbot.
    Monsieur Neve.

[Traduction]

    Il existe probablement plusieurs options possibles pour s'assurer que notre approche en ce qui concerne le traitement des prisonniers en Afghanistan est conforme à nos obligations légales internationales. Nous sommes absolument d'accord et acceptons que certaines des mesures prises — l'amélioration de la surveillance, le fait qu'un haut responsable ait été traduit en justice, la mise en place d'une certaine formation — sont des pas qui nous mènent dans la bonne direction.
    Cela veut-il dire que nous estimons avoir atteint une étape où le risque de torture a diminué dans de telles proportions que le Canada puisse maintenant reprendre les transferts d'une manière conforme à ses obligations légales internationales? Ce n'est pas le cas, à notre avis. La torture en Afghanistan dure depuis trop longtemps et est trop systématique pour disparaître aussi rapidement; les types de réformes qui sont nécessaires sont des réformes à long terme.
    Nous avons soumis au gouvernement — pas seulement au cours des derniers mois de controverse, mais depuis plusieurs années — l'idée d'une stratégie corrective conjointe fondée sur la collaboration avec les autorités afghanes. Les médias ont souvent rapporté qu'Amnistie internationale demandait au Canada de construire lui-même une prison dans les régions sauvages de l'Afghanistan. Ce n'est pas du tout la recommandation que nous avons faite. Nous pensons que c'est une initiative qui devrait être prise à l'échelle globale par l'OTAN. Nous estimons que ça pose problème qu'il y ait 34 stratégies différentes et que chaque pays adopte une approche spécifique en ce qui concerne le traitement des prisonniers. Une approche globale concertée de l'OTAN est essentielle; il faut qu'elle soit mise en oeuvre avec la collaboration du gouvernement afghan et que tout se déroule de façon à ce que ça ait un impact durable en entraînant une réforme pénale.
    C'est une des plus graves préoccupations sur le plan des droits humains, pas seulement en ce qui concerne les prisonniers de guerre, mais toutes les personnes qui échouent dans le système carcéral afghan. La torture, la détention arbitraire, les traitements cruels et inhumains, des conditions de vie horribles dans les prisons, tout cela mérite notre attention. Ça fait partie du programme du pays en matière de droits de la personne et une approche fondée sur la collaboration nous permettrait d'atteindre cet objectif.
    Y a-t-il d'autres réponses?
    Monsieur Capstick.
    Bien que ce soit effrayant, je suis entièrement d'accord avec les porte-parole d'Amnistie internationale, mais il faut se montrer très prudents. Il s'agit du problème que j'ai évoqué dans mon exposé. Nous n'avons pas élaboré la stratégie de gouvernance appropriée. Le système carcéral, malgré son importance, n'est qu'un de la centaine de systèmes inefficaces en Afghanistan. La capacité humaine manque. Elle est absente. On perd la trace des prisonniers parce que les gardiens sont analphabètes. On ne peut pas faire un suivi. On ne peut pas suivre les gens à la trace quand on est incapable d'écrire leur nom.
    Dans tout ceci, ce qu'il faut comprendre, c'est que les personnes en question, les prisonniers concernés, sont pour la plupart des citoyens afghans capturés en territoire souverain afghan. Pour le gouvernement afghan, ce sont des criminels afghans, ni plus ni moins.
    Il faut être très prudents dans notre conceptualisation. Ce n'est pas le même cas que celui des prisonniers de guerre allemands que nous avions envoyés à Petawawa en 1944.

[Français]

    Mais y a-t-il une façon de traiter des prisonniers afghans et une autre de traiter des prisonniers français, par exemple? Quelle est la différence?

[Traduction]

    Non, je n'ai pas voulu insinuer que c'était vrai. Ce que je dis, c'est que d'un point de vue afghan, il s'agit d'un problème afghan. La solution est celle suggérée par M. Neve, à savoir le renforcement de la capacité du système pénal afghan.
    Il faut passer de la parole aux actes en y consacrant les fonds et les effectifs nécessaires. Ça pose des problèmes d'ordre pratique. Il n'y a que juste assez d'agents au Service correctionnel du Canada pour administrer les systèmes correctionnels canadiens. Ils ne sont pas légion. On ne peut pas en envoyer une centaine en Afghanistan en les chargeant d'aider les Afghans à administrer deux prisons dans la ville de Kandahar. Il faut trouver des solutions.
    Merci.
    J'ai un tout petit commentaire à faire à ce sujet. C'est, à mon sens, la raison de la nécessité impérieuse de reconnaître qu'il s'agit d'un problème relevant de l'OTAN, dont la solution passe par l'OTAN, et que la responsabilité ne repose pas uniquement sur les épaules du Canada.
    Merci.
    Nous donnons la parole à M. Goldring.
    Merci, monsieur le président.
    Colonel Capstick, vous avez fait des commentaires sur l'efficacité des projets. Vous avez signalé une structure qui est efficace, le ministère de la Réhabilitation rurale et du Développement. Nous sommes, naturellement, au courant de nombreux autres projets qui ont été mis en oeuvre, même au Parlement, en ce qui concerne le nombre de femmes représentées, et aussi par la création de comités communautaires. Vous avez fait remarquer que c'était une des structures les plus crédibles, en recommandant de faire en sorte qu'un plus grand nombre de ministères et d'administrations deviennent aussi efficaces que ce ministère-là.
    Quelles sont les difficultés en ce qui concerne cette efficacité? Il est en fait question de gouvernance, d'administration et d'infrastructure. La gouvernance et l'administration sont indispensables pour la gestion et l'administration générale du pays. Pourriez-vous signaler certaines des difficultés, outre celles qui l'ont déjà été, qui seraient davantage liées à la compétence, à l'analphabétisme et aux questions culturelles, au sujet desquelles vous pourriez faire des recommandations?
(1630)
    Oui, et c'est une question importante.
    À la fin de 2001, à la chute du régime des talibans, il n'y avait pratiquement aucun appareil gouvernemental fonctionnel, comme on pourrait le prendre pour acquis. Il n'y avait personne dans les ministères. En fait, il y avait bien dans les ministères quelques fonctionnaires qui continuaient de travailler sous le régime des talibans. Ils n'étaient pas rémunérés. Ils avaient été formés au cours de la période communiste et avaient une façon très intéressante de concevoir l'administration publique. L'une des armes les plus puissantes entre les mains d'un bureaucrate afghan est un tampon. Les Afghans adorent la bureaucratie, mais celle-ci était pratiquement inexistante.
    Une espèce de coup de sang à la tête qui a entraîné la réforme de tous ces ministères est survenu en 2002. De nombreux expatriés afghans sont revenus au pays. Certains étaient très instruits, d'autres moins. Ces expatriés se sont mis à occuper ces postes.
    Il existe probablement quatre échelles salariales différentes dans la fonction publique afghane. Les employés financés par un projet obtiennent un taux de rémunération. Les expatriés en reçoivent un autre tandis que le pauvre Afghan qui a passé toute sa vie en Afghanistan et qui s'est engagé dans la fonction publique ne reçoit qu'un quart de la paye de son collègue revenu du Canada ou des États-Unis. C'est la pagaille.
    Il existe une stratégie de réforme de l'armée nationale afghane. Un pays en est responsable: les États-Unis. Tous les autres pays contribuent, mais un seul homme est en charge et c'est le général américain « deux étoiles ».
    Il n'existe pas de programme équivalent pour la réforme de l'administration publique. On retrouve par contre partout de petits programmes dont la Banque mondiale devrait assurer la coordination.
    On a ici deux ou trois modèles qui sont apparemment efficaces et progressent de cette façon — des modèles canadiens élaborés et soutenus par l'ACDI. Est-ce qu'on ne pourrait pas prélever certaines de ces caractéristiques et les étendre à d'autres projets? Est-ce de ressources supplémentaires que nous avons besoin pour cela? Le fait-on graduellement? Je pense que ce devrait être comme vous l'avez mentionné.
    Nous avons besoin d'un chef et d'une stratégie qui recouvre absolument tout, de A à Z, dans la fonction publique afghane.
    Estimez-vous que le noyau de développement est là? Vos commentaires portent sur ce qui est encore possible.
    Non. Le MRRD est un ministère très efficace pour deux raisons. Deux bons ministres se sont succédé à sa tête, M. Haneef Atmar et M. Ehsan Zia. Ce sont des professionnels, et ils n'ont, on ne sait trop comment, pas été corrompus par le contexte dans lequel ils se trouvaient.
    Il y a des ministères, comme le ministère de l'Intérieur... Tout le monde sait que la plupart des responsables au ministère de l'Intérieur sont de vrais bandits. Ce sont d'anciens chefs de guerre.
    Lorsque nous avons eu nos discussions sur le développement et la démocratie, sur le développement et la gouvernance et sur d'autres questions, en ce qui concerne d'autres pays, il a beaucoup été question de planification à long terme et de stratégie. Ça concorde avec le commentaire qui a été fait tout à l'heure au sujet du développement à partir du système éducatif.
    Je pense plutôt que ça commence avec des enfants d'âge scolaire, qu'on fait leur éducation et qu'on voit quelque amélioration une génération plus tard. Est-ce une stratégie que vous considérez comme une stratégie à long terme et sommes-nous capables de mettre graduellement en place la capacité nécessaire pour travailler à long terme?
(1635)
    Oui. La véritable solution à long terme commence au niveau du système éducatif, avec les enfants, puis passe par les universités. Il faut toutefois malgré tout combler le creux d'ici une vingtaine d'années, d'ici à ce que ces diplômés sortent des universités. Ce qui est surtout important, c'est qu'il faut établir le contexte de sécurité humaine qui permet aux parents d'avoir l'impression de pouvoir envoyer leurs enfants dans une école du centre de Kandahar sans qu'ils soient exposés par inadvertance à un engin explosif improvisé ou à un attentat suicide à la bombe; il ne faut pas que les enfants soient interpellés dans la rue par un homme portant un turban noir qui leur demande pourquoi ils vont à l'école. C'est le type de considérations qui sont importantes.
    Par conséquent, il faut que tout change simultanément. Vous avez toutefois raison. C'est la stratégie à long terme fondée sur l'éducation qui permettra de résoudre le problème.
    J'aimerais signaler qu'il y a déjà de nombreux Afghans instruits. Ce sont ceux qui ont passé leur jeunesse et ont fait des études en Iran et au Pakistan, puis sont revenus dans leur pays. Il y a une profusion de talents qu'il suffit d'exploiter.
    Sont-ils en quelque sorte « déconnectés » s'ils ont fait leur études et ont vécu dans un autre pays? Sont-ils capables à leur retour de s'assimiler à...
    Non, je ne dirais pas qu'ils sont déconnectés. Ils n'ont toutefois aucune possibilité d'intervenir.
    Un excellent rapport préparé il y a un an ou deux par l'unité afghane de recherche et d'évaluation sur la réforme de l'administration publique en Afghanistan expose de façon très succincte les difficultés à surmonter pour que la fonction publique soit dynamique. Les commentaires du colonel Capstick concernant la coordination générale sont très pertinents; on n'a effectivement pas encore pris d'initiatives à l'échelle internationale pour que ça se fasse.
    Merci, monsieur Kippen.
    M. Dewar a la parole.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également les témoins.
    Je pense que je poserai d'abord une question à M. Neve au sujet des prisonniers, car c'est le sujet de l'amendement que nous avons apporté à la motion gouvernementale et libérale qui est à l'étude à la Chambre et que cela a un rapport avec l'étude que nous sommes en train de faire sur la question des prisonniers.
    J'ai une question toute simple à vous poser. La procédure de transfert des prisonniers du Canada est-elle actuellement moins transparente que celle des États-Unis?
    Oui, elle est moins transparente à de nombreux égards. On a eu beaucoup de difficulté à obtenir de l'information fiable sur l'approche canadienne, notamment par comparaison à d'autres pays qui sont beaucoup moins avares de renseignements. Le gouvernement américain publie des communiqués de presse concernant les détentions, dans lesquels des dates et des chiffres sont mentionnés.
    Nous n'avons jamais prétendu qu'il était essentiel que nous ayons accès à des renseignements opérationnels très précis, mais nous estimons qu'il est important qu'on divulgue des informations assez précises pour que nous puissions vraiment savoir ce qui se passe et nous assurer que l'approche est conforme aux normes internationales.
    J'ai vu M. Capstick faire un geste. Selon votre point de vue, si on accepte l'hypothèse... On nous a déjà signalé que notre système était moins transparent que le système américain. Les États-Unis donnent de l'information sur Internet. On peut obtenir des renseignements précis sur les prisonniers sur leur site Web.
    Monsieur Capstick, pourquoi le Canada est-il moins transparent que les États-Unis en ce qui concerne le transfert de prisonniers?
    Je ne le sais pas. C'est le symptôme de trois gouvernements successifs accusant de graves lacunes dans la communication aux Canadiens d'informations sur nos activités en Afghanistan.
    M. John Manley l'a fait remarquer et, par conséquent, je ne prends pas trop de risques en donnant cette réponse.
    Il l'a effectivement fait remarquer.
    Il est essentiel que nous nous ressaisissions pour ce qui est de l'information que nous donnons au sujet de l'Afghanistan; une stratégie publique nous y aiderait beaucoup.
    Une des questions abordées par M. Capstick est celle des préoccupations au sujet de la torture. Je signale que, quand on abordait le sujet à la Chambre, on était considéré comme un sympathisant des talibans. Monsieur Capstick, vous avez mentionné que ce sont des citoyens afghans. À mon point de vue, nous ne voulons pas devenir l'ennemi, en quelque sorte. Par conséquent, c'est extrêmement important.
    Monsieur Neve, en ce qui concerne le modèle, si le Canada ne se met pas à construire et à administrer des prisons — et je ne le souhaite pas —, vous préconisez une approche axée sur la collaboration et sur la transparence au sujet de nos transferts de prisonniers. De toute évidence, nous devrions être transparents, comme le sont d'autres pays, et avoir davantage de personnes sur le terrain.
    Les Afghans ont-ils actuellement des ressources suffisantes pour assurer la supervision en ce qui concerne les droits de la personne? Nous savons que c'est la Commission afghane des droits humains qui en est chargée. A-t-elle actuellement des ressources suffisantes?
(1640)
    Il y a de toute évidence plusieurs domaines dans lesquels on peut considérer que les ressources sont insuffisantes; en ce qui concerne la capacité de contrôle du respect des droits de la personne et les institutions dans ce domaine, on relève de grosses lacunes.
    La Commission afghane indépendante des droits humains est une institution extrêmement importante dans le pays; elle a fait de l'excellent travail. Mme Homes a attiré l'attention sur un de ses rapports. Elle a fait beaucoup de travail, et pas seulement sur la question des prisonniers de guerre, qui n'est qu'un des nombreux problèmes qui se posent au niveau des droits de la personne.
    Par conséquent, des ressources supplémentaires sont absolument essentielles, et pas seulement un peu, mais beaucoup plus.
    Monsieur Kippen, je voudrais vous faire intervenir dans la discussion.
    Je suis allé en Iraq l'été dernier. C'était dans le contexte du travail qui avait notamment été accompli par votre équipe... Le thème de la conférence était le fédéralisme pratique. Nous avions en Iraq des discussions sur les problèmes qui se posaient depuis le début, sur le fait qu'il n'y avait pas eu dans ce pays de débat sur les modèles de gouvernance et que des personnes considérées comme des ennemis pour la gouvernance de l'Iraq étaient tenues à l'écart.
    Quand on considère Kaboul comme le centre en quelque sorte et dans un lieu comme Kandahar, a-t-on envisagé de modifier les modèles de gouvernance, à savoir d'adopter la notion de fédéralisme? En a-t-on le moindrement discuté? Est-ce qu'un certain travail se fait à ce niveau en Afghanistan et parmi les personnes qui réfléchissent aux options en matière de politiques?
    Dans le gigantesque débat constitutionnel de 2003-2004, on avait discuté de la meilleure forme de représentation et du type de régime qui serait efficace. Comme vous le savez, l'Afghanistan est un pays pluri-ethnique, constitué de différentes cultures; il n'est pas homogène du tout. Toutes ces ethnies cherchent leur place dans la société et veulent y être représentées adéquatement.
    Je pense que c'est un débat auquel le Canada pourrait participer et qu'il pourrait faciliter, mais nous n'en sommes qu'aux premières étapes.
    Absolument. Ça ne fait aucun doute.
    Je suis d'accord avec M. Capstick, en ce sens que les institutions doivent être édifiées. Je pense qu'il est essentiel que les Afghans eux-mêmes comprennent ce que le système fera pour eux.
    La communauté internationale avec les hauts responsables afghans, a présenté la démocratie comme ce qu'il y avait de mieux depuis le pain en tranches; des élections ont été tenues et on peut maintenant aller de l'avant. Des élections ne font pas une démocratie. Il est essentiel que nous restions pour le long terme, que nous facilitions cette compréhension, cette éducation et que nous renforcions les capacités. Je pense que la communauté internationale a de nombreuses attentes à l'égard des Afghans en ce qui concerne leur propre gouvernance et dans d'autres domaines, mais je pense que nous n'avons pas du tout été à la hauteur pour ce qui est de leur apporter les compétences, les connaissances et les capacités nécessaires.
    Merci beaucoup.
    Puis-je poser une question au colonel Capstick au sujet des projets d'aide signature?
    Dix secondes.
    Je présume que vous n'êtes pas en faveur de ces projets.
    Non. Ce qu'il faut, c'est que nous sachions ce que nous faisons dans le contexte d'un projet d'aide signature et que nous veillions à développer les capacités afghanes.
    Bien. Merci beaucoup.
    Nous donnons maintenant la parole à M. Khan, pour entamer un deuxième tour de cinq minutes.
(1645)
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, messieurs. Ce fut une conversation très intéressante et très franche. C'est une des meilleures séances sur le sujet.
    Je ne m'attarderai pas trop sur la question du développement, mais je signalerai que la plus grosse partie du travail accompli en Afghanistan concerne les droits de la personne. Qu'il s'agisse d'éducation, de renforcement de la capacité économique, de développement et d'infrastructure communautaires, de santé, de déminage, de primauté du droit, de soutien à la Police nationale afghane, de liberté d'expression, tout cela revient à apporter une capacité d'édification de droits de la personne, à reconnaître les droits humains dans différents domaines.
    Le fait que nous nous concentrions sur un seul domaine en négligeant les autres me laisse un peu perplexe. Je félicite le gouvernement d'avoir augmenté de plus de 200 millions de dollars l'aide au développement. C'est un pays complexe, si on peut appeler ça un pays. La tâche est difficile. J'estime qu'il est essentiel non seulement de s'intéresser à certains domaines précis, mais aussi d'avoir une vue d'ensemble. Il faut voir ce qui peut être réalisé dans ce pays de façon globale.
    Je ne prétends en aucun cas que c'est très bien et que tout a été parfait. Pas du tout. Il ne faudrait toutefois pas que la communauté internationale, et en particulier le Canada, relâche ses efforts. Lorsque je suis allé en Afghanistan, j'y ai rencontré le ministre du Développement rural; j'étais heureux de constater que les membres canadiens des équipes de reconstruction provinciales emmenaient ce ministre dans des régions où le gouvernement afghan n'avait pas la capacité de se rendre. Les Canadiens aidaient le ministre dans ces régions dangereuses.
    En outre, lorsque j'ai rencontré le général McNeill, qui était alors le commandant de la FIAS, il ne tarissait pas d'éloges à l'endroit des Canadiens. Il a dit que nous étions un des seuls groupes... que les agents de développement avançaient avec les militaires en ce qui concerne la province de Kandahar. On peut en rire ou plaisanter, mais il ne faut pas oublier que sans l'établissement de l'ordre, il ne peut y avoir de sécurité, et que, sans la sécurité, il ne peut y avoir le respect des droits humains que nous souhaitons tous.
    Sans plus tarder — je ne dispose pas de beaucoup de temps, mais je pourrais faire beaucoup de commentaires —, j'aimerais poser une question à M. Kippen, et aussi à M. Capstick.
    Vous avez fait des commentaires sur les élections au Pakistan. Depuis 1947, trois dictatures et plusieurs gouvernements se sont, comme vous le savez, succédé. Je pense que le peuple pakistanais a envoyé un signal très clair. Chaque fois qu'il y a eu des élections libres et équitables, et je pense que c'était le cas de celles-ci — peut-être pas entièrement, mais dans une large mesure —, les partis religieux, les partis fondamentalistes ont été complètement rejetés, ce qui est formidable. Le gouvernement a été défait et les partis laïques l'ont remporté. Je pense que, dans le cas présent, il faut également attribuer une partie du mérite au nouveau chef d'état-major de l'armée, le général Kayani, qui a fait savoir à tous les commandants de corps et à toutes les agences du renseignement, jusqu'aux personnes qui assuraient les fonctions de nasim, comme on les appelle — les maires dans les petites localités —, qu'il prendrait des mesures très sévères envers tous ceux qui interviendraient, surtout les militaires. Par conséquent, ils ne seront là que pour aider et maintenir l'ordre et la loi; ils n'interviendront pas. C'est une des principales raisons pour lesquelles nous avons eu ces élections.
    Ce que j'aimerais vous demander, monsieur Kippen, c'est quelle devrait être l'étape suivante.
    Très brièvement, colonel, nous avons abandonné l'Afghanistan en 1989, ce qui nous a amenés là où nous sommes aujourd'hui. Qu'arriverait-il si nous l'abandonnions maintenant?
    Merci, monsieur Khan. Il vous reste une dizaine de secondes pour une réponse.
    Monsieur Kippen.
    Pour ce qui est des étapes suivantes, j'en ai parlé dans mon exposé. Je pense que les parlementaires canadiens et le gouvernement du Canada ont une occasion en or d'établir des relations professionnelles avec les nouveaux parlementaires, tant ceux de l'Assemblée nationale que ceux des assemblées provinciales, surtout au Béloutchistan qui, c'est connu, partage une frontière avec la province de Kandahar. Je pense que le temps presse et qu'il faut saisir cette occasion très rapidement.
(1650)
    Merci, monsieur Kippen.
    Colonel Capstick.
    Pour répondre de la façon la plus succincte possible, je pense que si nous abandonnions l'Afghanistan, ce serait absolument tragique. Ce serait le chaos.
    Merci, monsieur Capstick.
    Nous donnons maintenant la parole à M. Wilfert; il dispose de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je m'excuse de ne pas être arrivé à temps pour les exposés, mais c'était entièrement indépendant de ma volonté.
    Colonel Capstick, vos derniers commentaires, que j'ai entendus, portaient sur l'absence de vision stratégique et la nécessité de mettre la priorité sur la légitimité à long terme du gouvernement afghan, et d'essayer de rectifier certaines des erreurs stratégiques; ça prendra des années.
    C'est une mission placée sous la direction de l'OTAN avec davantage de mises en garde que toute autre mission antérieure de l'OTAN. Pensez-vous qu'il y ait volonté politique de réussir en Afghanistan, de la part de l'OTAN et de la part du gouvernement afghan?
    Quelle est votre opinion sur la question du renforcement des capacités au niveau des villages? Nous avons fait beaucoup de travail au niveau national, mais nous avons omis d'inculquer des valeurs concernant des questions comme de l'eau salubre, des emplois, etc. En fin de compte, ce n'est pas ce que fait le gouvernement à Kaboul qui importe, à mon sens, mais la situation au niveau des villages.
    Pourriez-vous faire des commentaires à ce sujet?
    Merci, monsieur Wilfert.
    Monsieur Capstick.
    Je pense qu'il faut être clair en ce qui concerne la structure de la mission afghane. C'est une mission placée sous la direction des Nations Unies. Ce sont les responsables de la mission d'assistance des Nations Unies en Afghanistan qui doivent normalement coordonner les piliers de la gouvernance et du développement.
    C'est ce qu'ils sont supposés faire.
    L'OTAN est en charge du pilier de la sécurité et, par conséquent, ce n'est pas l'OTAN qui est responsable du développement et de la gouvernance.
    J'aurais dû dire que c'était sous la direction de l'OTAN.
    Seulement en ce qui concerne l'aspect militaire, cependant. Pour les autres aspects, il s'agit de la MANUA et de grandes organisations multilatérales comme la Banque mondiale, le Fonds monétaire international — les différents organismes participants.
    Y a-t-il une volonté politique? C'est plutôt vous qui pouvez répondre à cette question.
    Je pense davantage à la volonté politique en Afghanistan et chez les partenaires de l'OTAN.
    J'ai beaucoup de difficulté à en juger moi-même. Je pense qu'il y a une volonté politique en Afghanistan. Elle s'est exprimée au cours de deux élections. Elle s'est exprimée dans les différents sondages qui ont été faits. Elle se manifeste en outre par la présence des personnes réellement compétentes qui travaillent pour le gouvernement de l'Afghanistan, à tous les paliers.
    On a la perception que tous les Afghans sont corrompus et que ce sont tous des criminels. C'est absolument faux. Il y a des personnes extraordinaires en Afghanistan qui s'efforcent de faire progresser le pays.
    Je serais prudent en ce qui concerne les mises en garde. J'ai déjà cité l'exemple suivant. J'ai commandé le contingent canadien en Bosnie-Herzégovine avec la force de stabilisation de l'OTAN en 1997-1998 et j'ai eu besoin de l'approbation du ministre de la Défense nationale pour faire passer la frontière à une compagnie d'infanterie afin de soutenir le groupement tactique britannique qui était à côté de nous, sous le même commandement divisionnaire. Par conséquent, il faut être très prudent et éviter de critiquer ces avertissements. Nous ne sommes pas innocents comme l'enfant qui vient de naître.
    En ce qui concerne les villages, vous avez raison. Il est essentiel que les Afghans voient les résultats et que leur gouvernement les serve là où ils vivent, à savoir dans les villages. Ce qui est toutefois encore plus important que cela, c'est d'établir le sentiment de sécurité humaine que j'ai évoqué. On peut creuser autant de puits qu'on veut, mais si un père a toujours peur d'envoyer ses enfants à l'école, c'est la preuve qu'on n'a pas fait ce qu'il fallait pour que les changements soient durables.
    Merci.
    Voudriez-vous faire des commentaires, monsieur Kippen?
    Non. Je suis entièrement d'accord avec le colonel Capstick.
    Je ne pense pas que nous ayons déjà fait tout ce que nous pouvions au niveau national. Il faut faire plus. Comme nous le savons tous, les besoins sont énormes en Afghanistan. Comment répartir les ressources que la communauté internationale est disposée à y consacrer?
    Il faut faire davantage au niveau des villages. Le Programme de solidarité nationale et les conseils de développement communautaire sont des exemples parfaits. Les fonds sont malheureusement trop limités pour pouvoir mettre en oeuvre plusieurs projets à la fois dans un même village, surtout en ce qui concerne le Programme de solidarité nationale. Actuellement, lorsqu'un village a reçu de l'argent pour un projet, il doit attendre pour l'étape suivante.
(1655)
    Merci, monsieur Kippen.
    M. Lebel a la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Je vous remercie pour l'excellente et intéressante présentation.
    J'essaie de bien saisir l'ensemble de ce qui nous est présenté aujourd'hui. Par contre, j'ai bien compris, concernant le sort de l'Afghanistan, que l'implication des Afghans n'était pas impensable. C'est ce que tout le monde dit depuis longtemps. En ce qui a trait au projet de signature, M. Capstick a dit plus tôt que si ça ne se faisait pas avec les Afghans, il fallait néanmoins que ce soit pour nous un levier de développement. J'ai bien noté que vous n'étiez pas contre le projet. Il s'agit donc de demander aux Afghans de réaliser quelque chose avec nous, même si plusieurs partis de l'opposition ont dit à l'époque qu'il fallait former les Afghans, les soldats, l'armée, etc.
    D'après ce que je comprends de votre message, nous devons faire en sorte que nos actions dans ce pays incluent obligatoirement les Afghans. Pour ce qui est du projet de signature, la coordination n'est pas évidente. En effet, vous disiez plus tôt que plusieurs actions devaient être coordonnées simultanément. Que nous recommandez-vous de faire, en tant que politiciens, pour que les objectifs en matière de développement soient atteints? C'est toujours au centre de nos préoccupations.
     Ma question s'adresse à M. Capstick.

[Traduction]

    Allez-y, monsieur Capstick.
    Merci.
    Je pense que ce qui est crucial, comme je l'ai laissé entendre dans mon exposé — en fait, je ne l'ai pas seulement laissé entendre, mais j'ai été assez direct —, c'est que le Canada ait une stratégie publique: la stratégie canadienne pour l'Afghanistan. Il est essentiel d'établir clairement nos objectifs.
    Ce ne sont pas seulement les militaires qui réagissent sur les ordres des dirigeants démocratiquement élus de notre pays. Les fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères et les agents de développement sont, en définitive, sous le contrôle politique du Parlement, lorsqu'il se réunit. Par conséquent, il est essentiel que nous énoncions très clairement les objectifs que nous voulons atteindre et les méthodes que nous comptons utiliser. Je pense qu'alors, ça commence à s'organiser.
    Je ne pense pas que nous ayons le temps de donner des informations plus détaillées que cela.

[Français]

    Vous avez dit qu'il devrait y avoir un plan canadien mettant à contribution les partenaires qui sont présents là-bas. Comment le Canada doit-il gérer la promotion de ce plan auprès des Afghans, de même que les relations avec tous les autres pays?

[Traduction]

    Les mécanismes de gestion sont en place. Lorsque le Pacte pour l'Afghanistan a été signé et que la Stratégie de développement national de l'Afghanistan a été présentée, une structure de régie complète a été mise en place au sein du gouvernement de l'Afghanistan. Elle se termine par une commission mixte de coordination et de surveillance coprésidée par la mission de l'ONU et par le gouvernement de l'Afghanistan.
    On a beau mettre en place toutes sortes de structures, le comportement des parties concernées reste inchangé. C'est pour cela qu'il faut un leadership politique et c'est ce qu'on peut accomplir avec un envoyé spécial des Nations Unies ayant une certaine influence et un envoyé spécial du premier ministre du Canada qui peut faire remarquer à l'ambassadeur des États-Unis qu'il faut passer à l'action dans ce domaine.
    C'est tellement complexe qu'un agent du service extérieur canadien peut se charger du volet diplomatique, mais qu'il ne faut pas s'attendre à ce qu'il coordonne la diplomatie, le développement, la défense, les services correctionnels et la réforme des forces policières. C'est une opération extrêmement complexe.
    La volonté politique d'accomplir cette tâche est essentielle.
    Merci, monsieur Capstick.

[Français]

    Monsieur Carrier, vous disposez de trois minutes.
    Je vous félicite également pour la belle présentation que vous avez faite. C'était très instructif. En effet, ce dossier nous intéresse tous, chacun dans sa circonscription.
    Par contre, j'ai été surpris d'apprendre, en entendant le témoignage des gens d'Amnistie internationale, qu'il y avait beaucoup de victimes civiles, que des droits civils étaient brimés et que les prisonniers subissaient encore de la torture. Ça me décourage un peu de voir le peu de bonnes actions qui ont pu être réalisées dans ce pays depuis que nous y sommes, c'est-à-dire depuis cinq ans.
    Le colonel Capstick recommandait qu'un envoyé spécial fasse un rapport sur l'ensemble des interventions de notre gouvernement. Je pense que ça améliorerait la situation. Actuellement, les seules informations que l'on reçoit concernant la guerre en Afghanistan touchent l'aspect militaire, les soldats qui se font tuer. Éventuellement, on pourrait peut-être entendre parler de réalisations, d'une gouvernance qui s'est améliorée en vue de permettre à ce pays de mieux fonctionner. Par contre, quand on parle du nombre d'années que ça va prendre, je suis perplexe.
    Mon collègue Lebel a posé la question que j'avais en tête. On voudrait améliorer les choses en chargeant un envoyé spécial de la coordination, mais comment peut-on s'assurer que ça se fera avec l'ensemble des pays de l'ONU? Nous pourrions appliquer une belle perspective canadienne dans le cadre de nos interventions, mais si tous les pays s'en allaient chacun dans sa direction, nous n'obtiendrions pas nécessairement de meilleurs résultats.
(1700)

[Traduction]

    Merci, monsieur Carrier.
    Monsieur Capstick.
    Dans mon exposé, j'ai fait remarquer explicitement que, peu importe la nature de la stratégie du Canada, il fallait qu'elle soit en harmonie avec le Pacte pour l'Afghanistan. Il est en outre essentiel qu'elle soutienne la Stratégie de développement national de l'Afghanistan, qui, si elle contient certaines lacunes, est malgré tout un document très complet. Cette stratégie a été élaborée en quelques mois, ce qui démontre le talent qu'on peut trouver chez les Afghans. C'était une initiative placée sous la direction des Afghans, et le fait que cette stratégie ait été élaborée en trois mois environ est renversant; elle nécessite toutefois quelques retouches.
    Ce qu'il est essentiel que nous soyons capables de faire, c'est transmettre la volonté politique d'Ottawa à Kaboul et mettre en oeuvre toutes nos compétences et toute notre influence diplomatiques et les capacités d'un Canadien très en vue, quelqu'un comme John Manley, pour rassembler les chats à Kaboul, si je peux m'exprimer ainsi. C'est la seule façon d'y parvenir, car personne ne suit les ordres; les ordres, ça n'existe pas.
    C'est ce que je suggère.
    Merci, monsieur Capstick.
    Nous vous remercions d'avoir accepté notre invitation. À l'instar de plusieurs collègues des différents partis, je trouve que ce fut une des séances les plus instructives sur cette question. Merci pour vos exposés.
    Nous suspendrons la séance pour environ une minute. Nous avons des votes et la sonnerie retentira dans dix minutes; nous avons aussi des questions internes à régler.
    Merci beaucoup d'être venus.

(1705)
    Très bien, nous poursuivons nos travaux.
    La première chose à l'ordre du jour dans les travaux du comité est la ratification du rapport de notre comité directeur.
    Vous avez la parole.

[Français]

    J'aimerais demander qu'on traite d'abord de la motion portant sur le cas d'Omar Khadr, étant donné que c'est un sujet très présent dans l'actualité et que le procès se tient présentement.

[Traduction]

    Je le sais.
    Madame Barbot, nous devons d'abord ratifier ce rapport. Nous ratifierons le rapport du comité directeur, puis nous examinerons les motions.
    En ce qui concerne la motion relative à M. Khadr, nous...

[Français]

    Je demande justement qu'on fasse une exception et qu'on parle de la motion traitant du cas d'Omar Khadr avant de s'attaquer à la suite.

[Traduction]

    Non, le rapport du comité directeur passe en premier, puis nous examinerons les motions.

[Français]

    Mais pourquoi, monsieur le président? Je demande au comité de bien vouloir traiter de toute urgence la motion au sujet de Khadr parce que si elle est adoptée, il va y avoir des changements à l'horaire.

[Traduction]

    Une voix: J'invoque le Règlement.
    En ce qui concerne le rappel au Règlement, je prendrai une décision sans... attendez un peu.
    La semaine dernière, nous avions déjà mentionné que nous voulions ratifier rapidement le rapport du comité directeur. Ça nous prendra peut-être une ou deux minutes, puis nous examinerons les motions.
    Cependant, si la motion concernant M. Khadr est la première sur la liste, nous pourrons l'examiner. Si elle est en deuxième, troisième ou quatrième place, il y a une procédure à suivre. En attendant, nous ratifierons le rapport du comité directeur.

[Français]

    Si cette motion est adoptée, l'horaire du comité directeur va être modifié. C'est pourquoi je demandais qu'on commence par la motion.

[Traduction]

    Votre motion concernant M. Khadr n'est même pas la première motion.

[Français]

    Oui, mais c'est justement le but, monsieur le président. Je demande au comité s'il est d'accord pour qu'on en fasse une motion urgente, étant donné les circonstances.

[Traduction]

    Très bien. Je demanderai s'il y a consentement unanime.
    Consent-on à l'unanimité à ce qu'on attende pour examiner le rapport du comité directeur pour étudier...

[Français]

    Ça prend la majorité, monsieur le président.

[Traduction]

    Non, il n'y a pas de consentement.
    Revenons au rapport du comité directeur. Nous aurons peut-être encore le temps d'examiner la motion, mais il faut se dépêcher et ratifier le rapport du comité directeur.
    Le mardi 26 février, le comité directeur s'est réuni pour discuter des travaux de notre comité. Vous avez le rapport devant vous.
    Bien que ce ne soit pas précisé dans le rapport, j'aimerais également vous signaler que le sous-comité est maintenant fonctionnel. Les noms ont été proposés et il se prépare à se réunir. Il a en fait tenu sa première réunion aujourd'hui et il a élu son président. Nous félicitons donc tous les membres de ce comité.
    Savez-vous qui en est le président?
    Je pense que c'est Scott Reid.
    Scott Reid en est le président. Nous le félicitons pour sa nomination.
    Y a-t-il des questions relatives au rapport du comité directeur?
    Madame Barbot.

[Français]

    Monsieur le président, étant donné que je serai en mission le 8 avril prochain, serait-il possible de changer la date du rapport sur Haïti pour le 3 avril. C'était la date prévue pour le Soudan et la Birmanie. Serait-il possible de faire l'inverse?

[Traduction]

    Monsieur Obhrai.
    Le calendrier qui a été établi indique très clairement toutes nos dates, jusqu'au 29 avril. Est-ce bien cela?
(1710)
    C'est exact.
    Par conséquent, il ne reste aucun temps libre?
    Sauf si on veut bien supprimer quelque chose.
    Sauf si nous décidons d'apporter un changement, n'est-ce pas? Le comité directeur en a toutefois déjà terminé avec ceci.
    Malgré tout le respect que nous devons à Mme Barbot, le problème est qu'il y a toutes les autres activités prévues, et je ne comprends pas pourquoi nous devrions modifier le programme du 8 avril pour... Je suis certain qu'elle peut laisser le collègue qui la remplace faire l'étude sur Haïti. Je sais qu'elle est de Haïti et qu'elle aimerait y participer.
    Ne hochez pas la tête quand je fais des commentaires, madame. Vous n'avez jamais été d'accord sur quoi que ce soit avec moi.
    Pourtant, c'est ainsi.
    Monsieur Obhrai, je vous remercie pour cette intervention.
    Voyons si nous ne pouvons pas accéder à cette demande. Je pense que nous essaierons de le faire.
    Je ne le sais pas.
    Vous ne le savez pas?
    Eh bien, je prends la décision que s'il y a moyen de faire quelque chose, par égard envers Mme Barbot, nous devrions le faire. Nous essaierons de changer ces dates. Les témoins n'ont pas encore été contactés ou leur présence n'a pas encore été confirmée.
    Y a-t-il d'autres questions au sujet du rapport?
    Monsieur Patry.
    Monsieur le président, je voudrais poser une question, pas sur la dernière motion, mais sur l'avant-dernière, celle concernant l'ambassadeur du Japon.
    Inviterons-nous l'ambassadeur du Japon et des hauts fonctionnaires du ministère à la même séance? Je pense que c'est une question pertinente. On invite l'ambassadeur ou alors les représentants du ministère des Affaires étrangères, ou bien on consacre une heure à chacun.
    D'après la façon dont la motion est rédigée, nous les accueillerons en même temps.
    Non; il y aura une heure, puis l'heure suivante.
    Je vais vous apprendre que l'ambassadeur du Japon ne sera pas disponible à ce moment-là; je renonce donc à ma motion pour le moment. J'ai de toute façon une autre rencontre avec lui, à laquelle vous serez invités; nous pouvons donc laisser la motion en suspens.
    Bien.
    Nous n'avons jamais eu l'intention de recevoir en même temps les porte-parole du ministère et l'ambassadeur. Je ne pense pas qu'ils viendraient. Ça peut être changé, de toute façon.
    Y a-t-il d'autres questions, monsieur Patry? C'était une question pertinente.
    Qu'entend-on par « relations diplomatiques »? S'agit-il de relations économiques? Ou de relations sociales? Qu'entendez-vous par là? S'agit-il uniquement de diplomatie sur la fermeture du bureau consulaire d'Osaka? Je n'en ai pas la moindre idée.
    C'est la motion de M. Wilfert.
    Je voudrais seulement comprendre.
    Il ne viendra pas.
    Il ne viendra pas. Bien.
    Mais s'il vient, je veillerai à ce que vous soyez là. J'aurai autre chose pour vous.
    Bien.
    Très bien.
    Y a-t-il d'autres commentaires sur...
    J'ai une question.
    Je m'excuse, monsieur Obhrai, mais je ne vous avais pas vu.
    C'est bien ça.
    Après la remarque de M. Patry, dois-je comprendre que nous ferons une étude sur le Japon?
    Non.
    Il faut s'en tenir strictement au sujet pour avoir le temps d'examiner la motion. Non, il n'y a pas...
    Ne nous poussez pas dans le dos. Nous voulons en discuter. Des motions sont des motions, mais il faut les examiner et les débattre.
    Je retire celle concernant le Japon.
    Non, je veux savoir quel est son objet. Voulez-vous nous expliquer l'objet de cette motion?
    Nous pensions que l'ambassadeur serait disponible alors qu'il ne l'est pas. M. Wilfert a demandé qu'on l'invite ici, mais ça ne marchera pas.
    Dois-je comprendre que le 17 avril est libre?
    C'est ce que j'ai fait remarquer plus tôt. Cette date est maintenant libre.
    Ah oui?
    Oui, monsieur.
    Très bien, nous pouvons...
    Nous pouvons donc prévoir d'autres témoins.
    Je voudrais m'occuper de Mme Barbot. Continuez donc, monsieur Obhrai. Ou alors avez-vous terminé?
    Non, je n'ai pas fini. Comment pourrais-je avoir fini?
    Monsieur le président, je voudrais revenir en arrière. Maintenant, la date du 17 avril est libre...
    Nous ne devons pas prendre de décision à ce sujet. Le comité directeur pourra prendre une décision. C'était ce qui était proposé.
    Nous pouvons donc choisir les dates plus tard. Est-ce bien cela?
    Oui. Est-ce tout?
    Présente-t-on une motion proposant d'accepter le rapport de M. Dewar?
    Des voix: D'accord.
(1715)
    Nous examinons maintenant nos motions. La première qui figure à l'ordre du jour est celle de M. Dewar.
    Madame Barbot.

[Français]

    Monsieur le président, je propose que la motion sur le cas d'Omar Khadr soit traitée en premier lieu, étant donné l'urgence de cette question et le fait que le procès a lieu actuellement. Il est donc relativement urgent qu'on prenne une décision à cet égard.

[Traduction]

    Mme Barbot a présenté une motion proposant de modifier l'ordre de priorité. Sa motion est une des avant-dernières motions qui ont été présentées.
    Cette motion est à débattre. Mme Barbot a proposé que la motion concernant M. Khadr soit débattue immédiatement :
Étant donné que le jeune Canadien Omar Khadr devra faire face très prochainement à une commission militaire sur des allégations de crimes de guerre, qu'il est le seul ressortissant étranger...
    Et ainsi de suite.
    Attendez. Qu'entendez-vous par « et ainsi de suite »?
    Vous avez la motion sous les yeux :
... et que le procès contre lui constituerait le premier cas dans lequel un tribunal se prononcerait sur des crimes de guerre commis par un enfant soldat, il est proposé :
Que le Comité invite à comparaître, dans les plus brefs délais, dans un premier temps, les avocats d'Omar Khadr et des experts afin qu'ils puissent expliquer pourquoi ils demandent le rejet de toutes les accusations pesant contre Khadr;
Dans un deuxième temps, invite à comparaître le ministre des Affaires étrangères et les représentants du gouvernement concernés afin que ces derniers fassent état des démarches entreprises dans ce dossier.
    Voilà le problème. La sonnerie retentit. Nous avons maintenant besoin d'une motion et nous devons avoir le consentement unanime pour continuer.
    Nous nous en remettrons à la greffière qui pourra nous exposer la procédure à la Chambre.
    Conformément au paragraphe 115(5) du Règlement, le comité doit avoir une motion adoptée au consentement unanime pour pouvoir continuer à siéger lorsque la sonnerie d'appel retentit.
    Nous n'avons malheureusement pas le temps d'examiner les autres motions. La sonnerie retentit. Donc, je vous remercie pour votre présence.
    La séance est levée.