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AANR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON ABORIGINAL AFFAIRS, NORTHERN DEVELOPMENT AND NATURAL RESOURCES

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES AUTOCHTONES, DU DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD ET DES RESSOURCES NATURELLES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 6 novembre 2001

• 1105

[Traduction]

Le président (M. Ray Bonin (Nickel Belt, Lib.)): Nous allons reprendre la séance. Nous sommes réunis aujourd'hui pour étudier le projet de loi C-27, Loi concernant la gestion à long terme des déchets de combustible nucléaire.

Nous avons aujourd'hui le plaisir et même l'honneur d'accueillir le grand chef Matthew Coon Come, chef national de l'Assemblée des Premières Nations. Je vous souhaite la bienvenue. Avant de faire votre exposé, je vous demanderais de bien vouloir nous présenter ceux qui vous accompagnent. Nous avons une heure. Vous avez dit que vous aviez un bref exposé à faire et nous vous accorderons donc une dizaine de minutes, après quoi nous passerons aux questions. Je vous cède la parole, chef.

Grand chef Matthew Coon Come (chef national, Assemblée des Premières Nations): Bonjour. À ma droite se trouve Peigi Wilson, qui travaille à l'Assemblée des Premières Nations, et à ma gauche Richard Powless, qui est mon conseiller en matière de politiques.

Je vais faire un exposé en bonne et due forme. Je ne m'excuse pas souvent en public, mais je présente mes excuses au comité. Nous n'avons pas eu le temps de faire traduire mon exposé en français, mais nous verrons à ce que vous en receviez copie, monsieur le président. Cela dit, je vais maintenant lire un mémoire de l'Assemblée des Premières Nations.

L'Assemblée des Premières Nations est une organisation à but non lucratif qui se consacre à la promotion et à la défense des intérêts des Premières Nations au Canada. Par l'intermédiaire des chefs réunis en assemblée, l'Assemblée des Premières Nations représente plus de 633 Premières Nations d'un bout à l'autre du Canada. Les Premières Nations sont vivement préoccupées par l'état de l'environnement.

Nos anciens nous disent que nous devons réfléchir aux conséquences de nos actes jusqu'à sept générations. Cette maxime n'est nulle part plus vraie que dans le cas de la création et de l'élimination des déchets nucléaires. La production d'énergie à partir de sources nucléaires est pleine de périls. L'élimination des déchets peut avoir des conséquences à long terme imprévues et peut-être dangereuses, même si la situation est gérée avec la plus grande prudence. Beaucoup de collectivités des Premières Nations se trouvent tout près d'une centrale ou d'un centre de recherche nucléaire, ou bien possèdent des terres ancestrales dans des régions où l'on peut envisager de stocker à long terme les déchets de combustible nucléaire.

Beaucoup de particuliers, collectivités et organisations des Premières Nations ont participé aux travaux de la Commission Seaborn, notamment l'APN, l'Assemblée des chefs du Manitoba, la Première nation algonquine de Golden Lake, les Chippawas de Nawash, la Première nation de Grassy Narrows, la Première nation de Walpole Island, et la Première nation de Sagkeeng, entre autres. Pendant les audiences de la Commission Seaborn, ces représentants se sont dit préoccupés de n'avoir pas eu l'occasion de prendre connaissance des propositions et de l'absence, dans ces propositions, des connaissances écologiques traditionnelles. Les propositions sont tout à fait contraires à leurs convictions profondes, et ils ont dit douter de pouvoir tirer le moindre avantage appréciable de l'implantation sur leur territoire d'une installation de stockage des déchets de combustible nucléaire.

Ces préoccupations ne se sont pas atténuées avec le temps. Les Premières Nations ne sont pas en faveur de la production d'énergie nucléaire. Il faut plutôt se tourner vers d'autres sources d'énergie. Les observations suivantes doivent être examinées à la lumière de notre obligation envers les générations futures.

Premièrement, au sujet de l'objet du projet de loi, on sait que l'article 3 stipule que le projet de loi vise à encadrer la prise de décision concernant la gestion des déchets nucléaires, dans une perspective globale, intégrée et efficiente. L'expression «globale, intégrée et efficiente» peut être interprétée de diverses manières. Elle est suffisamment vague et générale pour signifier n'importe quoi, selon le point de vue de chacun.

Les Premières Nations, par exemple, pourraient soutenir qu'une perspective globale et intégrée signifie qu'il faut tenir compte des conséquences sur les sociétés, les cultures et la santé humaine, de la perturbation potentielle de l'habitat animal, de sorte que la démarche recommandée sera holistique, respectueuse de l'environnement et durable. D'autres pourraient ne pas tenir compte de ces éléments pour établir ce qui est global et intégré. L'Assemblée des Premières Nations est d'opinion que la durabilité, la protection de l'environnement et la reconnaissance des droits autochtones ancestraux et issus de traités doivent être primordiaux dans l'esprit du gouverneur en conseil quand il prend sa décision sur la gestion des déchets de combustibles nucléaires, et doivent être pris en compte par la Société de gestion des déchets nucléaires pendant l'élaboration de ses propositions.

• 1110

Dans le discours du Trône 2001, le gouverneur général a déclaré:

    Le Canada peut s'enorgueillir de la beauté de ses vastes espaces et de la richesse de ses ressources naturelles. Mais ce privilège va de pair avec la responsabilité de préserver ces trésors. Un environnement sain est essentiel pour assurer une économie durable et garantir notre qualité de vie.

En outre, la Loi constitutionnelle de 1982 reconnaît et réaffirme les droits issus de traités des peuples autochtones du Canada, y compris les Premières Nations. Le gouvernement fédéral a pris des engagements dans le domaine de la protection de l'environnement, du développement durable et de la reconnaissance des droits autochtones ancestraux et issus de traités. Un énoncé clair en ce sens dans le projet de loi permettrait au gouvernement de réaffirmer ses engagements.

En conséquence, nous recommandons de modifier cet article de la façon suivante:

    La présente loi vise à encadrer la prise de décision, par le gouverneur en conseil, sur proposition de la société de gestion, concernant la gestion des déchets nucléaires, en se fondant sur les principes du développement durable et dans une perspective globale, intégrée et efficiente pour le Canada et dans le respect des droits autochtones ancestraux et issus de traités qui sont garantis par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

L'article 6 du projet de loi stipule que les sociétés d'énergie nucléaire du Canada doivent constituer une société de gestion des déchets. Cette société de gestion des déchets nucléaires n'est pas mandataire de Sa majesté du chef du Canada. Il incombe à la société de gestion des déchets nucléaires de faire au gouvernement fédéral des propositions pour la gestion des déchets nucléaires et ensuite de mettre en oeuvre la proposition retenue.

Si le gouvernement fédéral conserve la responsabilité ultime de prendre la décision, il compte sur l'industrie du nucléaire, par l'entremise de société de gestion, pour le conseiller quant aux options qui s'offrent à lui et pour mettre en oeuvre la décision. Les dispositions de l'article 14 permettraient au ministre de tenir des consultations s'il le juge nécessaire, mais cela ne garantit absolument pas que les intérêts des Premières Nations seront protégés. La mesure proposée suscite de graves inquiétudes puisque l'on confie à un organisme prétendument indépendant, mais effectivement intéressé, la tâche de faire des propositions, de les mettre en oeuvre et de gérer des matières qui comptent parmi les plus meurtrières sur terre. Il faut mettre en place des sauvegardes quand on a affaire à des substances aussi dangereuses. La structure organisationnelle proposée ne comporte pas les sauvegardes voulues.

Le gouvernement fédéral, en procédant de cette manière, abdique sa responsabilité de protéger le bien public et compromet sa responsabilité fiduciaire envers les Premières Nations. L'Assemblée des Premières Nations condamne cette approche de façon catégorique. L'Assemblée des Premières Nations recommande la création d'un organisme public, une société d'État, qui sera chargée de faire des propositions au gouverneur en conseil et de les mettre en oeuvre, laissant les arrangements financiers du projet de loi intacts. Cela permettrait une meilleure reddition de comptes et une plus grande transparence et donnerait aux Premières Nations une plus grande assurance que leurs besoins et ceux de tous les Canadiens sont protégés.

L'interprétation de l'expression «région économique» soulève des inquiétudes. L'expression région économique est définie dans le projet de loi en faisant un renvoi au Guide de l'enquête sur la population active du 31 janvier 2000. Dans ce guide, on dit que les régions «correspondent généralement aux régions utilisées par la province à des fins administratives et statistiques». Ces régions économiques peuvent coïncider avec les territoires traditionnels des Premières Nations, mais ce n'est pas nécessairement le cas. Les territoires traditionnels sont définis de façon assez vague par les Premières Nations comme étant la région dans laquelle la Première nation déployait son activité économique primordiale. Les Premières Nations ont le droit de poursuivre leurs activités ancestrales, y compris la chasse, la pêche, le piégeage et la cueillette, dans leurs territoires traditionnels, qui dépassent les limites des réserves, en conformité de nos droits autochtones issus des traités, qui sont constitutionnellement protégés aux termes de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Pour garantir le respect de ces droits constitutionnels, nous demandons que l'on apporte l'amendement suivant aux paragraphes 12(3) et (4):

    (3) Chaque proposition comporte les précisions techniques voulues et indique la région économique et le territoire ancestral retenus pour sa mise en oeuvre.

    (4) Chaque proposition fait état des avantages, risques et coûts comparatifs compte tenu de la région économique et du territoire ancestral retenus et des considérations morales, sociales et économiques sous-jacentes.

• 1115

Les amendements proposés au paragraphe 8(2) pour donner suite à cette orientation sont décrits ci-dessous. L'article 8 stipule que la société de gestion des déchets nucléaires doit créer un comité consultatif. Celui-ci doit notamment étudier l'exposé des propositions de gestion présenté par la société de gestion des déchets. Les membres du comité «sont nommés par l'organe dirigeant de la société de gestion de manière à assurer la représentation, dans la mesure du possible... de l'organisation autochtone dont la région économique est visée par la proposition retenue par le gouverneur en conseil».

L'APN a un certain nombre de réserves au sujet de cette façon de procéder. Premièrement, les propositions formulées par la société de gestion peuvent avoir de lourdes conséquences sur les économies de subsistance, le mode de vie des Premières Nations, et aussi la santé humaine et la perturbation de l'habitat animal. Cela étant, les Premières Nations s'attendent à être représentées au conseil consultatif. Pour s'assurer qu'elles le soient, nous demandons que l'on dise plus explicitement que les Premières Nations doivent avoir des représentants conseil consultatif.

Deuxièmement, le libellé actuel de l'alinéa 8(2)c) crée un dilemme au sujet de la participation des Premières Nations aux travaux préliminaires du conseil consultatif. Tel qu'indiqué ci-dessus, le conseil consultatif doit être créé préalablement à la rédaction de l'exposé dont il est question au paragraphe 12(1). Pourtant, les Premières Nations, pour qu'elles aient un représentant au conseil consultatif, doivent être choisies selon que la proposition retenue aura des conséquences sur leurs régions économiques. Cet arrangement aurait pour résultat d'exclure les Premières Nations de l'élaboration des démarches et de la formulation des recommandations de la société de gestion, leur permettant de participer au processus seulement après que la démarche a été arrêtée.

En outre, l'article 14 ne permet pas de remédier à la situation puisqu'il prévoit seulement la possibilité de consultations du grand public par le ministre. Il n'y a aucune garantie que les Premières Nations seront effectivement consultées au cours de l'examen initial des propositions et des recommandations. C'est inacceptable pour les Premières Nations.

Troisièmement, il n'est pas fait mention dans le projet de loi des connaissances traditionnelles des Autochtones. Les Premières nations de notre pays ont énormément d'expérience et d'expertise, l'équivalent des sciences occidentales traditionnelles. Les Premières Nations connaissent l'histoire de ce territoire mieux que personne. Quand viendra le temps de prendre des décisions sur l'endroit et la manière de stocker des déchets de combustible nucléaire, les praticiens du savoir ancestral des Premières Nations seront extraordinairement utiles. Le gouvernement fédéral a pris de nombreux engagements, à la fois sur la scène internationale et au Canada, pour ce qui est de reconnaître l'importance du savoir ancestral autochtone dans le développement durable. Action 21, la Déclaration de Rio, et la Convention sur la diversité biologique reconnaissent le rôle vital des peuples aborigènes dans la gestion de l'environnement et le développement, à cause de leurs connaissances et de leurs pratiques traditionnelles. La Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999), le projet de loi C-5, la Loi sur les espèces en péril, et le projet de loi C-10, Loi sur les aires marines de conservation, reconnaissent l'importance des connaissances écologiques traditionnelles des Autochtones et font spécifiquement mention de ces connaissances.

De plus, les gouvernements des Premières Nations, en plus des organisations autochtones mentionnées à l'alinéa 8(2)c), seraient intéressés à participer aux travaux du conseil consultatif. Il existe une législation fédérale reconnaissant les gouvernements des Premières Nations, y compris la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999), le projet de loi C-5, Loi sur les espèces en péril, et le projet de loi C-10, Loi sur les aires marines de conservation. Enfin, il y a la question des régions économiques dont il a été question ci-dessus.

• 1120

Pour remédier à toutes ces préoccupations, il est recommandé de modifier le paragraphe 8(2) de la façon suivante:

    Les membres du comité consultatif sont nommés par l'organe dirigeant de la société de gestion de façon à assurer la représentation:

      a) d'un vaste éventail de disciplines scientifiques et techniques, y compris les connaissances traditionnelles autochtones, se rapportant à la gestion de déchets nucléaires;

Pour l'alinéa 8(2)c), nous proposons le libellé suivant:

    des gouvernements locaux et régionaux et des gouvernements et organisations autochtones dont [...]

Et nous ajoutons un nouveau paragraphe (3):

    Après le choix de la proposition par le gouverneur en conseil en application de l'article 15 ou du paragraphe 20(5), les représentants nommés par les gouvernements locaux et régionaux deviennent membres du comité consultatif du fait même que leur région économique est visée par la proposition que le gouverneur en conseil choisit en application de l'article 15 ou approuve en application du paragraphe 20(5). Les gouvernements et organisations autochtones doivent être membres du comité consultatif du fait que leur territoire ancestral est visé par la proposition que le gouverneur en conseil choisit en application de l'article 15 ou approuve en application du paragraphe 20(5).

Quant aux conséquences sociales et économiques importantes, l'alinéa 12(6)c) stipule que le plan de mise en oeuvre de chaque proposition doit comporter:

    les moyens qu'entend prendre la société de gestion pour prévenir ou atténuer, le cas échéant, ses répercussions socioéconomiques notables sur le mode de vie d'une collectivité ou sur ses aspirations sociales, culturelles ou économiques.

Il n'y a pas de définition de «répercussions socioéconomiques notables» dans la loi. L'Assemblée des Premières Nations a été avisée que le ministère des Ressources naturelles prévoit se reposer sur les lignes directrices et les principes pour l'évaluation de l'impact social qui ont été élaborées par le Comité inter-organisations sur les lignes directrices et les principes de l'évaluation des impacts sociaux, qui est une institution américaine, et aussi sur les lignes directrices employées par l'Agence canadienne d'évaluation environnementale pour définir les répercussions socioéconomiques importantes.

On ne sait pas très bien comment la société de gestion des déchets nucléaires interprétera l'expression «répercussions socioéconomiques notables». Étant donné que la société de gestion des déchets nucléaires aura la responsabilité de financer les mesures prises pour prévenir ou atténuer les répercussions socioéconomiques notables, en application du paragraphe 11(2), et que la société de gestion des déchets nucléaires est composée d'organisations qui sont intéressées au premier chef à limiter la responsabilité de la société de gestion, on peut imaginer que la société de gestion des déchets nucléaires s'efforcera de définir cette expression de façon étroite. L'APN craint qu'une interprétation étroite ou autrement inappropriée de l'expression «répercussions socioéconomiques notables» pourrait avoir des conséquences négatives sur les droits autochtones ancestraux et issus de traités.

L'Assemblée des Premières Nations désire participer à la définition des répercussions socioéconomiques notables pour y inclure l'étude de l'impact potentiel sur nos droits. Cette conjoncture rend encore plus impératif que les Premières Nations participent au comité consultatif dès le départ. En conséquence, l'APN recommande l'ajout d'une définition de «répercussions socioéconomiques notables» à l'article 2 du projet de loi:

    Les «répercussions socioéconomiques notables» englobent les conséquences sur les droits autochtones ancestraux et issus de traités garantis par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

En conclusion, monsieur le président, l'Assemblée des Premières Nations encourage le gouvernement fédéral à assumer ses responsabilités envers les générations futures dans l'élaboration de sa politique nucléaire. Nous encourageons également le gouvernement fédéral à assumer pleinement la responsabilité de la gestion des déchets de combustible nucléaire en créant une société de gestion des déchets nucléaires qui sera une entité publique relevant de l'État. Toutefois, quelles que soient les décisions qui pourront être prises en la matière, les Premières Nations sont déterminées à travailler avec le gouvernement fédéral pour s'assurer que les déchets de combustible nucléaire soient gérés comme il faut. Les Premières Nations seront mieux placées pour s'en assurer si leurs intérêts sont pris en compte dans la loi et si elles ont l'occasion de participer au processus de prise de décision.

L'Assemblée des Premières Nations tient à remercier le Comité permanent des affaires autochtones, du Développement du Grand Nord et des ressources naturelles de bien vouloir prendre en compte les questions que j'ai soulevées dans la présente.

Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, chef.

Le chef Coon Come est accompagné aujourd'hui de Peigi Wilson, analyste principale des politiques, et de Richard Powless, conseiller spécial du chef national. Je vous souhaite la bienvenue.

Nous allons entamer la période des questions. Le premier tour sera de quatre minutes pour la question et la réponse. À l'intention de nos invités qui ne connaissent peut-être pas le fonctionnement de notre comité sous ma présidence, je précise que nous essayons de nous en tenir aux quatre minutes. Cela nous permet de poser plus de questions. Vous aurez l'occasion de dire un mot à la fin. Si j'allume cette lampe-témoin, cela veut dire que nous avons dépassé les quatre minutes. Vous aurez amplement le temps de revenir à la charge et de terminer vos interventions ultérieurement.

Nous allons commencer par M. Elley.

• 1125

M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Alliance canadienne): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je tiens à remercier le grand chef Coon Come et les autres qui sont venus aujourd'hui nous faire part de leurs impressions sur ce projet de loi. Je pense que tous les habitants de notre pays—j'espère que tous les habitants de notre pays commencent à comprendre que nous ne pouvons pas laisser nos peuples autochtones en marge des processus gouvernementaux, que nous devons au contraire les inviter à participer aux dossiers qui les touchent, eux et tous les Canadiens.

Le premier élément de votre exposé est la question de la consultation. Vous insistez pour pouvoir participer activement aux consultations et aux prises de décisions au titre de ce projet de loi. Je pense toutefois qu'il y en a parmi nous, dont moi-même, qui ont besoin de quelques éclaircissements là-dessus.

Je voudrais notamment que vous-mêmes, et peut-être aussi d'autres membres du comité, me donnent une explication plus complète qui m'aiderait à comprendre en quoi, à votre avis, un Autochtone qui possède des connaissances traditionnelles pourrait se rendre utile dans le cadre du processus de consultation sur la gestion à long terme des déchets de combustible nucléaire. Comment ces connaissances-là cadreraient-elles dans tout ce contexte? Je pense que nous avons besoin d'explications là-dessus.

S'il reste du temps, j'aurai ensuite une autre question, mais je tiens d'abord à avoir une réponse là-dessus.

Grand chef Matthew Coon Come: Merci beaucoup.

Mon grand-père a 110 ans. Son père avait 115 ans. Son grand-père avant 135 ans. C'étaient des gens de la terre. Ils subvenaient à leurs besoins à même les ressources de la terre. Mon grand-père avait coutume de dire: comment ces gens-là, dans le sud, peuvent-ils tirer des plans sans jamais avoir mis le pied sur notre territoire? Ils ne connaissent pas les éléments de l'environnement, ne comprennent pas les rapports que nous avons avec les animaux, parce que cela fait partie de notre identité, en tant que chasseurs et pêcheurs, qui vivent en symbiose avec ce territoire. Ils n'ont jamais mis le pied chez nous et ils ont pourtant des ingénieurs qui font des plans.

Ce qu'il disait en fait, c'était que nous devons avoir notre mot à dire. Nous ne sommes pas contre le développement, c'est simplement que nous n'aimons pas la façon dont le développement se fait, parce qu'il y a une pratique d'exclusion et non pas d'inclusion. C'est pourquoi nous disons que nous voulons participer. Je crois que, peu importe où vous envisagez d'implanter l'installation d'élimination des déchets nucléaires, vous devez prendre en considération les gens qui habitent à cet endroit. Ces gens-là, pourvu qu'ils aient les ressources voulues, peuvent vous dire, dans le cadre d'un plan d'aménagement du territoire, comment utiliser leurs territoires. Si vous modifiez un certain secteur, ils pourront vous dire qu'il s'agit d'une frayère, ou encore d'un terrain de mise-bas et que cette installation aura des conséquences pour eux. C'est pourquoi nous ne cessons de dire que si vous nuisez aux animaux, si vous chassez les animaux, vous vous trouvez en fait à nous chasser du territoire, vous nuisez à un mode de vie.

Chose certaine, je crois que grâce à notre expérience, nous pouvons vous fournir ces connaissances par le simple fait d'être membres du comité consultatif, et non pas seulement ponctuellement, selon les besoins. Je crois qu'avec toutes les études scientifiques qui ont été faites, on a quasiment épuisé le sujet, parce que nous avons été étudiés ad nauseam. Ces gens-là ont obtenu leur doctorat parce que nous leur avons transmis nos connaissances.

Il est certain que nous progressons, en ce sens qu'il y a maintenant une reconnaissance de nos connaissances traditionnelles du territoire et notamment de nos connaissances écologiques. C'est reconnu dans divers instruments internationaux. Il est indéniable que dans le dernier projet de loi auquel nous avons participé, à savoir la Loi sur les espèces en péril, il y a une reconnaissance des connaissances des peuples aborigènes et du besoin de faire appel à eux.

Le président: Merci.

• 1130

Avant de céder la parole à M. Cardin, je peux donner un exemple de ce que vous dites. Au lac Nipissing, le niveau de l'eau était régulé par des employés qui avaient des années d'expérience, des gens pas tellement instruits, mais ils étaient capables de dire: mon intuition me dit que si l'on ouvre les vannes, on n'aura pas de problème. On leur a offert une indemnité généreuse et ils ont pris leur retraite, de sorte que nous avons maintenant de jeunes diplômés et tout est inondé. Je comprends exactement ce que vous dites. J'en suis conscient.

[Français]

Monsieur Cardin.

M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ): Merci, monsieur le président. Merci à vous, madame et messieurs, de votre présence aujourd'hui.

Je ferai un commentaire général sur l'orientation que suit actuellement le comité dans l'étude du projet de loi C-27. J'en profite, monsieur le président, pour glisser un message à propos de nos travaux. En relisant mes notes, en fin de semaine, je me suis arrêté à l'horaire de nos travaux.

Vous êtes ici aujourd'hui pour nous présenter votre point de vue et exprimer votre volonté de participer à la gestion des déchets nucléaires. Or, je vois l'étau de ce comité se refermer parce que, jeudi déjà, on en sera à l'étude article par article du projet de loi. Des gens viennent nous faire des représentations dont on devrait peut-être tenir compte pour éventuellement apporter des amendements au projet de loi. Or, je me sens déjà un peu coincé par les contraintes imposées à la présentation d'amendements ou par les délais imposés à leur présentation.

Par respect pour les témoins qui sont ici ce matin, pour les autres qui viendront ensuite et pour ceux que nous entendrons jeudi matin, je me demandais, monsieur le président, si on ne devrait pas, à la limite, prolonger nos travaux et notre réflexion sur les amendements possibles à apporter au projet de loi.

Je voudrais aussi entendre l'opinion de M. Coon Come sur l'audition des témoignages en comité et sur l'effet de ce processus sur la proposition d'amendements à un projet de loi.

[Traduction]

Grand chef Matthew Coon Come: Nous avons toujours été reconnaissants d'être invités à comparaître devant un comité permanent pour que notre voix puisse être entendue. Mais vous et moi savons que les décisions qui seront prises se situeront à l'intérieur des paramètres que vous aurez créés, qu'il s'agisse du système de gestion des déchets, de la société de gestion des déchets nucléaires ou du conseil consultatif. C'est là que se fera le vrai travail. C'est là qu'on examinera les diverses solutions, options, recommandations formelles, le type de recherche qu'il faudra faire, etc.

Il est certain que notre présence ici nous donne l'occasion de formuler ces recommandations, et je m'excuse encore une fois que vous ne l'ayez pas sous les yeux, mais cela peut accélérer notre participation et l'inclusion de nos recommandations. En fait, nous avons rédigé le libellé que nous aimerions voir. Ce ne sont pas des changements considérables; nous avons seulement ajouté deux ou trois mots et nous espérons que nos suggestions seront retenues.

Nous aurions peut-être aimé avoir plus de temps. Nous sommes conscients de l'échéancier. Ce que j'aimerais savoir, c'est ceci: les questions que nous avons soulevées seront-elles prises en compte? Nous avons fait ce que nous avons pu, compte tenu du manque de ressources financières et humaines qui nous auraient permis d'approfondir nos recherches. Mais compte tenu de l'échéancier, je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de faire un exposé, peu importe que vous décidiez ou non de prolonger cette séance.

Le président: Avant de donner la parole à Mme Grey,

[Français]

je vous dirai, monsieur Cardin, que ce qui a motivé notre calendrier d'action, c'est que vous l'avez établi ainsi. C'est le comité qui a décidé de quelle façon nous allions procéder. Ce qui met le grand chef en position désavantageuse aujourd'hui, c'est qu'il a dû remplacer au pied levé M. Charles Fox, le chef régional de l'Ontario, qui devait se présenter ici. Il y a eu de la mortalité dans la famille de ce dernier et le grand chef a eu l'obligeance de le remplacer à la dernière minute. C'est ce qui nous a un peu compliqué la vie. Mais nous recevrons un document écrit, qui sera traduit dans les deux langues, pour résoudre ce problème. Merci.

Vous pouvez donner la réplique à mes propos, si vous le désirez.

M. Serge Cardin: Monsieur le président, effectivement, c'est un calendrier que nous avions préparé. Toutefois, souvent on ne prévoit pas l'ampleur des interventions et la pertinence des propos qui seront tenus par les gens qui adressent des représentations au comité.

Je ne sais trop si on ne pourrait pas y revenir pour ne pas enlever de temps aux témoins qui sont ici. Mais, selon moi, il serait à propos de prolonger notre analyse avant d'en arriver à l'étape du rapport, afin d'apporter, de façon éclairée, d'autres amendements au projet de loi.

• 1135

Le président: Comme vous pouvez le voir à l'ordre du jour, c'est ce que nous allons faire à 13 heures aujourd'hui.

M. Serge Cardin: À l'ordre du jour modifié?

Le président: Non.

[Traduction]

Madame Grey.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, PC/RD): Merci.

Je ne sais pas si c'est vraiment le temps qui est en cause en l'occurrence. C'est probablement plutôt une question de volonté. Je soupçonne que nous pourrions étudier cette question toute l'année, mais s'il n'y a pas la volonté de faire bouger les choses, je suppose que l'on aurait beau formuler toutes les recommandations que l'on veut. J'attends donc de voir dans quelle mesure il y a volonté de progresser dans ce domaine.

Je vous remercie encore une fois pour votre exposé. Vous avez parlé des connaissances traditionnelles autochtones, que Reed Elley a également mentionnées, vous avez évoqué les plans d'aménagement du territoire, les frayères, les lieux de mise-bas et vous avez dit que ce sont des éléments essentiels du mode de vie traditionnel. Tout cela cadre avec toutes sortes de développements, mais les déchets nucléaires étant artificiels, vos ancêtres n'en avaient évidemment jamais entendu parler. Dans ces conditions, qu'est-ce que vous recommandez en rapport avec les anciens ou les connaissances autochtones traditionnelles? Quelle pourrait être la solution? Je soupçonne que les déchets nucléaires ne vont pas disparaître et nous devons donc les gérer du mieux que nous pouvons. Je me rends compte que vous remplacez quelqu'un d'autre—Merci Ray, de nous l'avoir fait savoir—mais quelle pourrait être la solution sur le plan pratique? Il a bien sûr été question de les enterrer très profondément dans le Bouclier canadien. Y a-t-il quelque élément dans vos connaissances traditionnelles qui pourraient nous donner une piste de solutions pratiques, abordables, respectueuses de l'environnement, pour se débarrasser des déchets nucléaires?

Grand chef Matthew Coon Come: Avant de répondre à votre question, je voudrais dire que nous sommes des consommateurs et que nous avons donc besoin d'énergie; je crois donc que nous devons chercher des méthodes différentes pour produire de l'énergie. Je n'aime pas le détournement des grands fleuves, mais je pense que nous pouvons envisager d'exploiter l'énergie hydraulique. Je pense qu'il y a des solutions de rechange du côté de la demande d'énergie, en termes de programmes écoénergétiques, de cogénération, etc.

En tant que Premières Nations, bien sûr, nous estimons que si nous étions mis en cause dès le départ, compte tenu de la région où vous envisagez de stocker les déchets nucléaires, ce serait important, parce que nous sommes des consommateurs, nous utilisons de l'énergie et nous avons quelque chose à voir avec ce matériau artificiel, comme vous l'avez dit. Cela dépend de l'endroit que l'on choisit. C'est pourquoi j'estime qu'en tant que peuple autochtone, il faut tenir compte de notre point de vue, parce que ce sont les Premières Nations qui habitent sur ce territoire et qui le connaissent bien. Les anciens, qui connaissent mieux les solutions possibles, pourraient se rendre utiles en tentant de trouver un endroit sûr pour le stockage. C'est seulement si on leur permet de participer que nous serons en mesure de connaître l'étendue de leurs connaissances, mais je suis convaincu qu'ils peuvent apporter quelque chose.

Mme Deborah Grey: Le problème est tellement difficile partout au Canada—chacun pense toujours que ce serait parfait ailleurs—mais je me rends compte que c'est essentiel pour les gens de l'endroit, parce qu'ils connaissent les caractéristiques propres du territoire, par exemple s'il s'agit d'un territoire de chasse ou de piégeage; ils peuvent nous indiquer un endroit pratique, que ce soit en surface ou enfoui en profondeur.

Pour ce qui est de la différence dont vous avez parlé tout à l'heure quant à la représentation des Autochtones prévue dans certains projets de loi, pensez-vous que l'omission des Autochtones dans ce projet de loi est délibérée, par opposition aux autres mesures que vous avez nommées tout à l'heure?

Grand chef Matthew Coon Come: Je ne suis pas certain que ce soit délibéré, mais il y a une omission et nous voulons seulement rappeler au législateur qu'il doit être cohérent.

Mme Deborah Grey: D'accord.

Grand chef Matthew Coon Come: Vous l'avez fait dans d'autres mesures législatives. C'est une bonne occasion d'inclure nos peuples et de leur permettre de participer. Si vous aviez fait cela, nous aurions au moins le sentiment de participer au processus.

Mme Deborah Grey: Nous allons donc supposer que c'était une omission accidentelle, et nous allons nous en occuper le moment venu.

• 1140

Le président: Merci, madame Grey.

Monsieur Bagnell.

M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Merci.

Je veux moi aussi remercier les témoins d'être venus. En fait, nous sommes très honorés de recevoir le grand chef lui-même, sans passer par les intermédiaires.

Je conviens qu'il est important d'avoir des points de vue différents. Je l'ai dit hier à la Chambre des communes dans mon discours en faveur de la Réserve faunique nationale de l'Arctique et du mode de vie unique du peuple Gwich'in.

Je n'ai qu'une seule question pour le premier tour et elle porte sur vos préoccupations en matière de freins et contrepoids. Vous ne serez probablement pas le seul témoin à soulever cette préoccupation. De mon point de vue, une possibilité serait d'avoir un conseil indépendant comme il peut en exister dans une compagnie de services publics, ou encore le CRTC. Je trouve ce modèle assez rassurant puisque la décision ultime est prise par le ministre ou le cabinet ou un haut responsable. Dans d'autres cas, nous avons créé d'autres organismes qui ne sont pas élus et qui sont chargés de prendre ces décisions, et j'ai vu des années où l'inflation était de 3 p. 100 et nos factures de téléphone ou d'électricité augmentaient de 10 p. 100, 20 p. 100 ou 30 p. 100 et les gens n'ont personne pour défendre leurs intérêts à ces conseils. Je ne suis donc pas sûr que ce modèle fonctionne aussi bien. Au moins, dans le cas de ce modèle-ci, les décideurs auront des comptes à rendre à l'électorat s'ils prennent une mauvaise décision. Bien que ce modèle ait peut-être des défauts, je pense qu'il comporte des avantages.

J'ignore si vous avez des commentaires là-dessus.

Grand chef Matthew Coon Come: L'un des plus grands problèmes dans notre société, c'est que nous laissons toujours les promoteurs, l'industrie, en faire à leur guise. Il est vrai qu'ils ont beaucoup d'expérience, mais ils agissent dans leur propre intérêt, leur but est de maximiser le rendement sur l'investissement et de représenter leurs actionnaires. Nous avons donc besoin d'un organisme indépendant.

Mon expérience dans le projet de la Grande rivière de la Baleine m'a appris que nous ne pouvons pas nous fier entièrement à l'industrie, parce qu'ils sont les promoteurs. Il faut même envisager une option consistant à ne rien construire du tout. L'industrie refuse d'envisager cette idée, quel que soit le projet. Peut-être que nous n'avons pas besoin de construire d'autres centrales nucléaires. Mais pensez-vous qu'ils vont faire la promotion de cette idée? Je ne le pense pas. Je pense qu'il faut un organisme public qui peut mener des enquêtes publiques pour demander l'avis de la population que nous représentons tous.

Nous ne pouvons pas dépendre de l'expertise d'une seule industrie. J'ai vu cela bien souvent, des gens qui disent: nous travaillons dans le domaine depuis 50 ans et nous savons ce que nous faisons. Les temps changent, les besoins changent, les circonstances changent et d'autres intérêts sont plus importants. À l'heure actuelle, toute l'industrie nucléaire est essentielle, mais je ne crois pas qu'il soit nécessaire d'en étendre les activités.

Je crois par contre que nous avons besoin d'un quelconque organisme public, une organisation publique capable de formuler des recommandations parce qu'elle ne représente pas un secteur en particulier, qu'elle n'a pas pour but de maximiser le rendement de l'investissement, qu'elle n'est pas là pour représenter des actionnaires, mais plutôt pour représenter la population dans son ensemble. Le gouvernement du Canada peut quand même conserver ses pouvoirs à titre de gouverneur en conseil, comme vous le recommandez ici.

Le président: Reed Elley.

M. Reed Elley: Je vous remercie, grand chef, pour votre réponse à ma question. Elle m'a été personnellement très utile.

Nous avons dans notre société un grave problème, celui de l'élimination des déchets, qu'il s'agisse de déchets nucléaires ou de simples ordures ménagères. On sait ce qui est arrivé récemment quand Toronto a voulu expédier ses ordures vers le Nord. Il y a eu tout un tollé des gens qui habitent dans le Nord—et ce n'était pas tellement loin au Nord, vous savez. Mais voici maintenant que l'on évoque la possibilité que des déchets nucléaires provenant des réacteurs du Sud soient expédiés vers le Nord. Je pense qu'il y a eu il y a plusieurs années des recherches à la Commission Seaborn sur la possibilité d'enfouir tout cela sous le Bouclier canadien.

• 1145

À ce moment-là, avez-vous eu le sentiment que vos peuples participaient activement à ces décisions, ou plutôt à ces enquêtes? Craignez-vous la répétition de problèmes qui se sont déjà posés dans le passé, si les amendements que vous proposez aujourd'hui ne sont pas intégrés à la loi?

Grand chef Matthew Coon Come: Il y a eu quatre, cinq ou six Premières Nations qui ont participé aux travaux de cette Commission Seaborn et elles ont exprimé leurs préoccupations relativement aux propositions qui étaient à l'étude. J'en ai parlé dans mon exposé.

M. Reed Elley: Oui, je me rappelle que vous en avez énuméré quatre ou cinq.

Grand chef Matthew Coon Come: Il faut prendre en compte les connaissances écologiques traditionnelles et il faut s'interroger à saveur s'ils veulent accepter une installation de déchets nucléaires sur leur territoire. Tout cela devra être discuté et débattu et il est certain qu'il faudra prendre en compte les opinions des peuples qui habitent sur ce territoire. C'est pourquoi nous disons que nous devons vraiment être participants au conseil consultatif, afin d'avoir notre mot à dire.

M. Reed Elley: Avez-vous eu le sentiment, à ce moment-là, il y a trois ou quatre ans, qu'ils ont écouté ce que vous aviez à dire?

Mme Peigi Wilson (analyste principale des politiques, Assemblée des Premières Nations): En partie, ils l'ont fait, en refusant de prendre une décision.

M. Reed Elley: Je comprends.

Mme Peigi Wilson: Sauf erreur, la Commission Seaborn a recommandé que le gouvernement fédéral reconsidère toute la question. Ce n'était pas seulement les Autochtones, mais beaucoup d'autres Canadiens ont fait savoir qu'ils ne se sentaient pas suffisamment informés, n'avaient pas l'impression d'être vraiment parties prenantes. En fait, j'ai compris que les membres de la Commission Seaborn avaient des préoccupations quand ils ont refusé de prendre une décision, estimant que la population n'avait pas suffisamment participé aux discussions, tout au moins les peuples autochtones, les Premières Nations. Oui, nous estimions alors que nous n'avions pas suffisamment de temps pour participer au dialogue et nous informer suffisamment sur le dossier.

M. Reed Elley: Merci.

Grand chef Matthew Coon Come: Monsieur le président, il est certain que nous avons de graves préoccupations au sujet du stockage de déchets nucléaires dans le nord, et je pense qu'il faut absolument investir dans la recherche sur les répercussions, parce qu'il y a beaucoup d'inconnus. Nous savons ce qui se passe ailleurs et il est certain que les Premières Nations ont exprimé leur crainte et s'interrogent vraiment sur les conséquences d'aller mettre cela sur leur territoire.

Le président: Madame Karetak-Lindell, suivie de Mme Grey, et cela mettra fin à la période des questions.

Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Merci d'être venu.

Vous avez dit que les peuples autochtones doivent être consultés à cause de leurs connaissances. Nous avons entendu les représentants de divers secteurs, et l'une des raisons pour lesquelles ils voulaient participer au processus de décision, c'est qu'ils possédaient des connaissances spécialisées en la matière. Je voulais simplement savoir ce que vous pensez de ne pas leur donner la responsabilité de gérer leurs propres déchets, parce que ce sont eux qui produisent les déchets. Je suppose que le gouvernement fédéral estime qu'ils devraient être responsables de nettoyer leurs propres dégâts, et on leur demande d'investir beaucoup d'argent pour stocker à long terme les déchets qu'ils produisent.

Je suis d'accord avec les observations que vous avez faites au sujet des connaissances traditionnelles, à savoir qu'elles doivent être prises en compte dans tout ce que le gouvernement fait. Les pêcheurs dans l'Atlantique ou le Pacifique et les agriculteurs ont acquis des connaissances sur les ressources naturelles au contact des Autochtones. Si l'on n'en tient pas compte, c'est une omission importante.

Les industriels disent donc qu'ils possèdent les connaissances et les compétences voulues pour élaborer ce plan de gestion à long terme. Je me demande ce que vous en pensez.

• 1150

Grand chef Matthew Coon Come: Je pense que personne ne nierait qu'ils possèdent des connaissances spécialisées. Nous en bénéficions tous, parce que nous sommes tous des consommateurs. Ce que nous disons, c'est que nous ne voulons pas qu'ils s'érigent en juges et jurys et décident de tout à cause de leur vaste expérience. Cette époque est révolue. Je pense qu'il faut mettre dans la balance les intérêts de plusieurs groupes de participants.

Il est certain que l'on ne peut pas nier que les représentants du secteur doivent pouvoir intervenir ou faire des recommandations. Celui qui est à l'origine d'un problème devrait avoir des solutions à proposer. Ce qui m'inquiète, dans la création de la société de gestion des déchets nucléaires, c'est que l'industrie semble commander tout le processus. On crée un comité consultatif qui n'est rien d'autre qu'une autre source de recommandations, des gens chargés d'étudier diverses options. Ce conseil est subjugué à la société de gestion des déchets où sont représentés tous les promoteurs.

Nous avons des inquiétudes quant aux répercussions sur la santé, le mode de vie, l'habitat des animaux, et il faut donc établir un équilibre afin que le grand public lui-même soit un intervenant important. C'est pourquoi nous disons que vous devez envisager de créer une organisation publique qui sera la véritable source de recommandations, un organisme équilibré, qui dispose de vrais pouvoirs et qui peut vraiment formuler de bonnes recommandations et adopter une approche équilibrée.

Le président: Madame Grey.

Mme Deborah Grey: Merci.

Je voulais seulement poser une ou deux questions sur les délais et avoir votre opinion là-dessus. La société de gestion des déchets nucléaires fera rapport annuellement au ministre et, à tous les trois ans, publiera des rapports détaillés sur les répercussions sociales, culturelles et économiques dans les régions visées. Trouvez-vous que ce délai de trois ans est trop long, trop court, ou juste ce qu'il faut?

Grand chef Matthew Coon Come: Vous conviendrez avec moi qu'il faut du temps pour faire de la recherche. Nous n'avons pas discuté des délais et de l'échéancier quand nous avons examiné le projet de loi. Nous étions davantage préoccupés par notre volonté de participer et de déterminer comment les études seront menées, dans quelles régions, comment on fera participer les Premières Nations. Nous ne nous sommes pas vraiment souciés des délais.

Mme Deborah Grey: Vous pourriez donc accepter ces délais, ou bien vous pensez que l'on pourrait assouplir cela quelque peu. Il s'agit surtout d'être consulté, peu importe quels sont les délais.

Grand chef Matthew Coon Come: Oui.

Mme Deborah Grey: Bien. Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup. Merci à tous. Chef, je vous invite maintenant à prendre la parole pour le mot de la fin, si vous avez quelque chose à ajouter. Encore une fois, je vous remercie beaucoup d'être venu témoigner aujourd'hui. Nous comptons avoir le plaisir de travailler avec vous pour étudier d'autres projets de loi, parce que nous savons que beaucoup de projets de loi sont renvoyés à notre comité. Nous comptons sur vous pour nous aider dans cette tâche.

Grand chef Matthew Coon Come: Encore une fois, je veux m'excuser auprès des membres du comité. Nous ferons parvenir le texte de nos recommandations et des changements que nous proposons. Je vous remercie encore une fois de nous avoir donné cette occasion qui nous a permis de participer, ne serait-ce que pendant une brève période, à un dialogue et un échange d'idées. Je compte recevoir une réponse favorable à nos recommandations.

Cela dit, merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup. Nous allons suspendre la séance pendant cinq minutes.

• 1154




• 1159

Le président: Nous reprenons nos travaux.

Nous accueillons maintenant la sénatrice Lois M. Wilson, qui a été membre de la Commission Seaborn. Pour ceux d'entre nous qui ne connaissent pas bien ce que représente cette Commission Seaborn, je l'ai sous les yeux et je vais essayer de ne pas accaparer toute la demi-heure pour vous en dire seulement le titre. Cela s'intitule: Rapport de la Commission d'évaluation environnementale du concept de gestion et de stockage des déchets de combustible nucléaire. Il y aura un test tout à l'heure.

Je vous souhaite la bienvenue, sénatrice. Merci d'être venue. Nous vous invitons à faire un exposé d'une dizaine de minutes ou moins, après quoi les membres du comité auront 20 minutes pour vous poser des questions.

• 1200

La sénatrice Lois M. Wilson (Ontario, Ind.): Dans ce cas, je ne lirai pas mon texte. Vous l'avez reçu. Je vais me contenter de parler. Si j'ai dix minutes, cela me donne deux minutes pour chaque point.

Le président: D'accord.

La sénatrice Lois M. Wilson: J'ai été membre de la Commission Seaborn pendant une décennie, et c'était un groupe multidisciplinaire. Nous étions deux à n'avoir pas vraiment de bagage scientifique, mais nous avions été nommés à cette commission pour y représenter les questions sociales et éthiques, ce que nous avons fait. Je dois dire qu'à la fin, nous n'avons pu en arriver à un consensus.

Mon premier commentaire porte simplement sur la politique-cadre du gouvernement, sur laquelle le projet de loi C-27 est fondé et qui a été publiée un an et demi avant que la Commission Seaborn publie son rapport, ce qui en dit long sur les groupes chargés de conseiller le gouvernement. Nous savions à l'époque ce qui se passait. Cela n'inspire guère confiance. Cette façon d'agir alimente plutôt le ressentiment et décourage les citoyens de participer à de futurs groupes de travail du gouvernement. Le principal problème, à mon avis, c'est que l'on a eu tendance à exclure bon nombre de valeurs que beaucoup de témoins ont fait valoir devant la Commission Seaborn; le législateur ne les a pas intégrées dans la loi. C'est donc le premier point, le fait que le gouvernement a tout simplement contourné le groupe de travail.

Deuxièmement, la commission en est arrivée à deux conclusions qui ont été abondamment mal citées. La première est celle-ci; elle porte sur l'évacuation ou l'élimination des déchets de mercure.

    Du point de vue technique, la sûreté du concept d'EACL a été démontrée, dans l'ensemble, de façon convaincante sur le plan théorique. Du point de vue social, elle ne l'a pas été.

Il est question de sûreté. Nous disions que la sûreté n'a pas été démontrée de façon convaincante. Je veux dire la sûreté sociale, concept généralement accepté dans les sciences sociales, mais pas auprès des scientifiques techniques. Cette expression a toujours été exclue dans toutes les communications du gouvernement à propos de notre commission. Il est donc ressorti que la commission aurait déclaré que c'était sûr du point de vue technique, un point c'est tout. Nous disions que c'était techniquement sûr, dans l'ensemble, à cette étape de la conception théorique, mais que du point de vue de la sûreté sociale, ce n'était pas sûr. La commission était partagée là-dessus. Nous n'avons pas dégagé de consensus.

Nous avons par contre atteint un consensus quand nous avons dit:

    À l'heure actuelle, il n'a pas été démontré que le concept d'EACL pour le stockage géologique en profondeur a l'appui du public.

Il me semble donc très important que vous compreniez bien la différence, parce que cela me fatigue énormément. Les journalistes sautent là-dessus et s'empressent de dire que c'est techniquement sûr, qu'il suffit maintenant de convaincre la population canadienne de l'accepter. Ce n'est pas ce que nous avons constaté après neuf ans d'étude.

En bref, parmi les recommandations de la commission qui n'ont pas été reprises dans le projet de loi C-27, la première est que le gouvernement fédéral doit mettre immédiatement en branle un processus doté d'un financement suffisant pour assurer la participation des peuples autochtones, qui devraient concevoir et mettre à exécution eux-mêmes ce processus. Les gens qui se sont exprimés le plus clairement de tous ceux qui ont comparu à nos audiences étaient les Autochtones. Leur spiritualité était claire. Leurs valeurs étaient claires. Ils ne pouvaient pas comprendre tous les graphiques techniques qu'on leur montrait, pas autant que certains d'entre nous, mais ils savaient très clairement ce que tout cela signifiait pour leur mode de vie. Nous avons fait certaines consultations auprès des Autochtones, mais c'était loin d'être suffisant et c'est pourquoi nous avons dit clairement qu'à notre avis, le gouvernement devait mettre en branle ce processus avant de rédiger le projet de loi et de créer l'agence de gestion des déchets, ce qu'il ne va manifestement pas faire.

En lisant le projet de loi, on constate que les peuples autochtones doivent être consultés sur les options, mais il me semble que cela arrive après le fait. Une fois que le cheval est déjà sorti de l'écurie, on se met à consulter les gens qu'il aurait fallu consulter bien avant. J'insiste beaucoup là-dessus. Nous avions une personne autochtone à la commission. Il a fallu deux ans, et quand elle est arrivée, nous avons commencé à comprendre que les peuples autochtones n'étaient pas de simples victimes passives de ce projet d'évacuation, mais qu'ils avaient au contraire beaucoup à offrir, parce que leur système de valeurs n'est pas celui de la culture dominante. Ils nous ont été très utiles.

Troisièmement—j'en arrive maintenant à ce qui est, je suppose, mon argument principal—nous recommandons que la société de gestion des déchets nucléaires soit indépendante des compagnies d'électricité et d'EACL. Le projet de loi C-27 en fait une créature des compagnies et d'EACL. La raison pour laquelle nous avions formulé énergiquement cette recommandation—et il y avait unanimité là-dessus—est qu'après dix ans d'audiences, il nous est apparu évident à tous que ni les compagnies d'électricité ni EACL n'avait la confiance du public, ce qui est un prérequis pour faire accepter le concept par le public après en avoir démontré la sûreté. Nous étions d'avis qu'il faut un degré de confiance plus élevé dans le cas d'une organisation chargée d'une fonction de gestion, et il nous semblait que les compagnies d'électricité et EACL ne l'avaient pas. Elles étaient critiquées pour leur manque d'ouverture et de transparence, leur insensibilité à un vaste éventail d'intervenants, et leur défaut de garantir une participation publique suffisante au processus. Nous étions donc d'avis que ces institutions n'auraient pas au bout du compte la confiance du public, pas suffisamment pour permettre la réalisation d'un programme quelconque. Nous avons donc recommandé de repartir du bon pied en créant une toute nouvelle organisation et le projet de loi C-27 ne le fait pas.

• 1205

La Commission Seaborn a recommandé que le conseil d'administration nommé par le gouvernement fédéral soit représentatif des intervenants clés. C'est le cas dans le projet de loi. Ce que je vais dire est probablement trop détaillé pour l'étude du projet de loi, mais je tiens à dire que si vous lisez en détail notre rapport, vous constaterez que nous avons identifié les intervenants clés; nous précisons que ce sont les intervenants qui représentent les intérêts des gouvernements fédéral et provinciaux, des compagnies de production d'électricité, des communautés des sciences du génie et des sciences sociales. Je ne sais pas si ce sera fait.

En outre, nous avons recommandé que le comité consultatif représente un vaste éventail de personnes intéressées dans divers domaines: sciences du génie, sciences de la santé et sciences sociales, peuples autochtones, groupes éthiques et religieux, groupes de défense de l'environnement, les localités touchées et les organisations internationales. Nous étions d'avis que le comité consultatif devrait être nommé en même temps que les membres du conseil d'administration par le gouvernement fédéral. Le projet de loi C-27 confie la tâche de nommer les membres du comité consultatif aux membres du conseil d'administration, et je crains beaucoup que ceux-ci vont rétrécir leur éventail de choix et nommer au comité consultatif des gens dont le champ d'intérêt est purement technique, alors que cette question, comme j'espère l'avoir démontré, touche de nombreuses facettes de notre vie commune et est trop importante pour être confiée exclusivement à la communauté scientifique. Ce dernier aspect est très important, mais il faut mettre dans la balance d'autres points de vue également.

Au lieu de cela, le projet de loi C-27, au paragraphe 8(2), stipule que le comité consultatif sera nommé par l'organe dirigeant de la société de gestion des déchets nucléaires. Il faudra «dans la mesure du possible»—ce ne sera donc pas obligatoire—assurer la représentation d'«un vaste éventail de disciplines scientifiques et techniques», et «au besoin» d'autres sciences sociales connexes. Autrement dit, on pourra les inviter à dire leur mot, mais on pourra aussi laisser faire. Je trouve que c'est inacceptable et que cette indication doit être plus ferme. Nous avions jugé essentiel que des personnes d'autres sciences sociales soient nommées, parce que ce dossier est loin d'être purement technique, comme le gouvernement va le constater quand il en arrivera au choix d'un site. En outre, aucun mandat n'a été donné à ce comité consultatif et l'on ne donne pas non plus la moindre indication de son pouvoir.

Le dernier point est que nous avons recommandé de multiples mécanismes de révision pour s'assurer que des freins et contrepoids soient intégrés au processus pour bâtir la confiance et la crédibilité auprès du public canadien. Nous sommes peut-être allés un peu trop loin, mais je pense que le gouvernement n'en a pas fait assez. Nous avions prévu un contrôle réglementaire fédéral relativement aux travaux scientifiques et techniques, des garanties financières, des examens publics périodiques par le Parlement. Le projet de loi C-27 ne recommande rien de tout cela, tout ce qu'il exige en fait de révision, c'est que le ministre sera tenu de faire une déclaration publique sur chaque rapport qui lui sera remis. Je siège au Sénat depuis assez longtemps pour savoir que ce n'est pas une bonne manière de contrôler quoi que ce soit. On a une déclaration d'un ministre, qui se fait ensuite poser quelques questions. Pour commencer, il faut que les comités s'en mêlent et fassent une étude approfondie. Nous avons aussi recommandé un examen par le vérificateur général et par le commissaire à l'environnement et au développement durable, et un rapport annuel présenté aux comités parlementaires.

Nous sommes aussi quelque peu irrités de constater que la société de gestion ne sera pas assujettie à la loi fédérale sur l'accès à l'information, à cause de la nature même de ce projet de loi. Nous comprenons cela, mais le principal problème qui est revenu dans toutes nos audiences était le secret entourant ce dossier et l'impossibilité d'obtenir des renseignements précis autant des promoteurs que des adversaires du projet. Nous avons dit d'une même voix: les déchets nucléaires sont là, en plein milieu de la pièce, et comment pouvons-nous, en tant que Canadiens, nous en occuper? Pour tenter de sortir de cette dialectique contradictoire, alors que chaque partie tente de marquer des points contre ses adversaires, nous disions qu'il fallait plutôt adopter la position suivante: nous avons un problème commun, c'est un problème très grave, ce sont des matières toxiques, et nous devons tous examiner la question.

Nous estimons donc que le mécanisme du rapport annuel au ministre ne sera pas satisfaisant et nous sommes convaincus que quand viendra le temps de choisir l'emplacement où l'on déversera les déchets, le public réagira avec fureur et colère. Vous savez que dans d'autres pays, notamment en Allemagne, en France et en Angleterre, cette question a provoqué de profondes divisions sociétales. Ma thèse est que le projet de loi C-27, dans sa forme actuelle, conduit le Canada tout droit vers la création de telles divisions profondes et exacerbées dans notre pays. S'il y a un moyen quelconque d'éviter cela, je pense que vous devriez y réfléchir très sérieusement et vous efforcer d'apporter des amendements qui aideraient à résoudre ce problème.

Le président: Merci beaucoup.

Nous allons commencer le premier tour en donnant quatre minutes à M. Elley.

• 1210

M. Reed Elley: Merci beaucoup, sénatrice, d'être venue et d'échanger avec nous. Il est évident que vous possédez des connaissances approfondies que peut-être la plupart d'entre nous autour de cette table ne possédons pas, et j'espère donc que vous pourrez jeter un peu de lumière sur le sujet.

J'ai trouvé très intéressantes certaines de vos observations. Vous avez soulevé la question de la participation des Autochtones. Bien sûr, nous venons tout juste d'entendre le grand chef Matthew Coon Come, et l'élément central de son exposé était justement qu'il faudrait une plus grande participation des Autochtones. Ensuite, vous avez évoqué le manque de confiance du public envers les organismes qui s'occupent maintenant de ce dossier, EACL et d'autres, et vous avez ajouté qu'il y avait un manque d'ouverture et de transparence dans ces organisations, du moins d'après la perception du public. Je vous mets peut-être sur la sellette, quoique je sais que vous l'avez été bien des fois dans votre vie et que vous vous en êtes toujours tirée, mais pourquoi, dans ce cas, le gouvernement n'accepte-t-il pas, d'après vous, la recommandation que vous et d'autres ont formulée, à savoir que cet organisme soit indépendant de l'industrie?

La sénatrice Lois M. Wilson: Je pense que vous devrez poser la question au gouvernement.

M. Reed Elley: Mais je suis certain que vous avez une opinion là-dessus.

La sénatrice Lois M. Wilson: Il y a deux ans, un document du cabinet qui avait fait l'objet d'une fuite m'est tombé entre les mains; les auteurs de ce document avaient procédé à certaines manipulations médiatiques de plusieurs éléments avant de transmettre le tout au cabinet. Par exemple, sur la question de savoir si c'était vraiment parfaitement sûr, on disait simplement qu'il fallait rendre le tout acceptable aux yeux du public, et ce n'est pas ce que nous avions dit. Deuxièmement, on y disait qu'il fallait vraiment faire passer ce projet si l'on voulait que l'industrie nucléaire canadienne puisse survivre. Je pense qu'il s'agit là de lobbying, de défendre des intérêts économiques. Je n'ai aucune donnée pour le prouver, mais vous m'avez demandé mon opinion.

M. Reed Elley: Et je vous remercie de votre franchise.

C'est très important pour nous, l'élimination des déchets nucléaires.

La sénatrice Lois M. Wilson: Je sais.

M. Reed Elley: Et la façon dont la société réagit à ce dossier est très importante. Comme vous le dites, cela pourrait provoquer de profondes fissures dans notre société et nous avons déjà suffisamment de potentiel à cet égard. Pensez-vous qu'il y a eu de la part du gouvernement un effort pour faciliter la tâche de l'industrie, peut-être en tentant de minimiser les retombées politiques, au lieu de prendre acte des très graves préoccupations que vous avez exprimées au sujet de la sécurité, de la transparence, etc.?

La sénatrice Lois M. Wilson: Je pense que c'est en partie de l'opportunisme, et en partie des impératifs économiques. Vous avez le premier ministre qui essaie de vendre 10 réacteurs au Royaume-Uni, et nous allons en vendre d'autres en Chine, sans se demander comment ces gens-là vont se débarrasser ensuite des déchets nucléaires. Je ne pense pas que cela ait jamais fait partie de l'équation et j'en impute vraiment la faute au Canada.

Comme vous le dites, il s'agit là d'un très important problème pour l'humanité. Cela transcende complètement les partis politiques, mais je ne suis pas certaine de connaître la raison pour laquelle ils ont procédé ainsi. Je pense simplement que cela ne nous prépare rien d'autre que des problèmes. Par exemple, pour la participation du public, on utilise l'expression habituelle: on dit que ce sont des groupes d'intérêts spéciaux et c'est ainsi qu'on dénigre quelqu'un qui a un point de vue opposé au vôtre.

M. Reed Elley: Je sais.

La sénatrice Lois M. Wilson: Oui, ce sont des groupes d'intérêts spéciaux: ils ne veulent pas que leurs petits-enfants soient annihilés par des déchets toxiques. La participation du public aux audiences de la Commission Seaborn a été très riche, beaucoup plus poussée que dans d'autres dossiers, mais je pense que depuis, on a réduit de beaucoup les interventions publiques et j'ignore ce que l'avenir nous réserve si ce sont les compagnies d'électricité et EACL qui ont la mainmise sur tout cela.

Le président: Je laisse courir ce type de débat parce que je veux que chacun puisse dire que nous avons été ouverts aux commentaires de tout le monde. Ce n'est guère juste envers nos témoins que de leur demander pourquoi le gouvernement veut procéder d'une certaine manière. Les représentants du gouvernement et du ministère témoigneront et pourront répondre à ces questions, dont la réponse est de toute manière du domaine public.

La sénatrice Lois M. Wilson: Merci.

Le président: Si mes collègues deviennent trop partisans, je vais intervenir, et je suis plus généreux pour l'opposition. Je veux qu'on le sache.

M. Reed Elley: Nous vous en sommes reconnaissants, monsieur le président.

La sénatrice Lois M. Wilson: Eh bien, j'ai un avantage. J'ignore qui est qui.

Le président: Monsieur Cardin.

[Français]

M. Serge Cardin: Merci, monsieur le président.

• 1215

Madame Wilson, bonjour et merci d'être là aujourd'hui. Je poserai quelques courtes questions bien rapides. Vous disiez avoir été membre de la Commission Seaborn. Pendant combien d'années l'avez-vous été?

[Traduction]

La sénatrice Lois M. Wilson: J'en ai fait partie pendant huit ans et demi, et il a fallu ensuite un an pour publier notre rapport. Il s'est donc écoulé toute une décennie avant que notre rapport soit publié.

[Français]

M. Serge Cardin: Donc, c'est bien cela. Je me souviens des acétates que nous avait présentées le ministère des Ressources naturelles portant justement sur le projet de loi C-27. Il nous disait que cela avait été fait, que le projet avait été élaboré en se basant sur les travaux de la Commission Seaborn qui avait duré 10 ans. Vous en avez donc été membre pendant toute sa durée et vous avez été à même, en toute impartialité, dit-on, de juger des tenants et aboutissants de ce processus. Cependant, comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, les recommandations de la commission ne sont pas nécessairement appliquées dans le projet de loi C-27.

C'est la question que je me pose, surtout en ce qui a trait à l'indépendance de l'organisme. On sait très bien que tout le monde est intéressé à obtenir de l'eau chaude le matin quand la bouilloire est branchée et reconnaît que l'énergie est importante. Mais quand il s'agit d'énergie nucléaire, les déchets aussi sont importants et il faut être conscient du fait qu'on produit des déchets quand on utilise de l'énergie.

Quant à l'indépendance de l'agence vis-à-vis de l'ensemble du processus, je partage votre point de vue et je vous le dis. Je crois qu'il faudrait qu'il y ait une indépendance totale pour qu'on puisse en faire une évaluation aussi très complète. Il se fait aussi des choses ailleurs, mais les gens sont... Pour faire la comparaison et l'évaluation, les gens qui sont à l'intérieur et ne sont pas indépendants ont toujours des considérations économiques. Donc, le danger existe et est bien réel.

Je partage, bien sûr, votre opinion quant à l'indépendance et quant à la participation du public. Je ne sais pas comment, ensemble, on pourrait avoir une influence sur la présentation d'amendements afin que le projet de loi soit modifié en ce sens-là. J'attends vos commentaires.

[Traduction]

La sénatrice Lois M. Wilson: Je ne suis pas d'accord avec l'honorable Ralph Goodale quand il dit que cela s'inspire des recommandations de la Commission Seaborn, et j'ai passé en revue tout le dossier point par point pour montrer les contradictions qui existent, la principale étant qu'il faut un organisme indépendant par rapport aux compagnies d'électricité et à EACL.

Quand ce projet a été rendu public, nous, les membres de la commission, nous sommes bien sûr tous précipités sur le téléphone pour dire: voyez ce qu'ils ont fait, ils ont tout donné aux compagnies d'électricité et à EACL, ils n'ont rien fait de ce que nous voulions. Nous étions unanimes sur ce point-là également. On a évoqué une foule de possibilités, peut-être une société d'État, peut-être ceci, peut-être cela, comment pourrait-on s'y prendre? Nous en sommes arrivés à notre conclusion parce que c'est trop important pour la perception du public et la confiance du public. C'est pourquoi nous estimions qu'il fallait que ce soit indépendant. Cela pourrait constituer à mon avis l'un des amendements.

J'en ai mentionné d'autres, par exemple la conclusion du gouvernement que le projet est techniquement sûr et qu'il ne reste plus qu'à le rendre acceptable aux yeux du public, ce qui m'apparaît être la prémisse non pas d'une campagne d'information du public, mais plutôt d'une campagne de relations publiques. C'est à vous qu'il incombe de proposer des amendements, mais notre principale objection, c'est l'organisation elle-même, le fait qu'elle ne soit pas indépendante.

Le président: Madame Grey.

Mme Deborah Grey: Merci. Si vous le voulez bien, je serai absolument partisane et je dirai que je suis ravie de rencontrer quelqu'un qui sait comment prononcer le mot nucléaire en anglais. En disant cela, je redeviens le professeur d'anglais que j'étais; excusez-moi, mais je dois dire que c'est un plaisir.

Vous avez dit que les compagnies de services publics, EACL et d'autres intervenants n'ont peut-être pas la confiance du public, comme si le gouvernement pourrait l'avoir, cette confiance, s'il reprenait en main le dossier. Nous devons d'une manière ou d'une autre trouver un équilibre, c'est certain. Mais quand vous dites que ce conseil consultatif devrait comprendre des représentants de la communauté scientifique, c'est sûr qu'il le devrait. Nous qui travaillons dans le domaine des sciences sociales n'avons pas la moindre idée des aspects scientifiques, et nous en sommes conscients. Mais comme je suis moi-même une personne qui a une formation en sciences sociales, je suis contente d'entendre dire que vous étiez membre de ce comité ou vous serviez de contrepoids, si l'on peut dire. Il y a aussi les peuples autochtones, dont nous venons de parler, et les communautés religieuses qui sont importantes, parce qu'il y a aussi des préoccupations d'ordre moral qu'il faut régler.

• 1220

Si le projet de loi C-27 devait être adopté, compte tenu de la frustration des membres de la Commission Seaborn, comment pouvons-nous maintenant intervenir pour améliorer ce projet, maintenant que le cheval est vraiment sorti de l'écurie, comme vous l'avez dit? Recommandez-vous seulement d'apporter des amendements, ou bien demandez-vous aux députés ministériels ou d'opposition de dire haut et fort que c'est un projet invendable? C'est un dossier d'une vaste portée, il est évident que des gens essaient de vendre de l'énergie nucléaire aux quatre coins du monde. Comment pouvons-nous dire, dans la situation actuelle, que nous pouvons améliorer les choses, même après la présentation de ce projet de loi?

La sénatrice Lois M. Wilson: Pour répondre à l'une de vos remarques, nous avons aussi recommandé fermement qu'avant de faire quoi que ce soit, on établisse un cadre éthique et social, ce qui ne figure pas, bien sûr, dans le projet de loi. Car bon nombre de ces questions consistent à se demander si nous devrions laisser aux générations futures la possibilité de faire des choix dans le domaine de la morale. Nous nous sommes débattus avec beaucoup de ces questions et l'on n'en voit pas la trace nulle part. C'est comme si tout le projet était complètement neutre sur le plan des valeurs, alors que ce n'est pas le cas.

Je ne sais pas trop quelle procédure vous devriez adopter. C'est à vous d'en décider.

Mme Deborah Grey: Je vous l'accorde.

La sénatrice Lois M. Wilson: Mais il faudrait des amendements en profondeur, à mon avis, surtout quant à l'identité des responsables de la gestion du dossier. C'est l'élément clé et vous pourriez tenter quelque chose de ce côté. Le projet sera ensuite envoyé au Sénat et j'espère être membre de ce comité, mais on verra bien ce qui se passera au Sénat. J'espère qu'il n'y sera pas simplement adopté sans aucun changement, car alors les carottes seront vraiment cuites pour le Canada.

Mme Deborah Grey: En quelle année avez-vous été nommée au Sénat, Lois? Je ne m'en rappelle plus.

La sénatrice Lois M. Wilson: Oh, c'était en juin 1998.

Mme Deborah Grey: Et les dix ans dont vous avez parlé, la décennie entière, c'était avant votre nomination au Sénat, n'est-ce pas?

La sénatrice Lois M. Wilson: Oui, bien avant. Le rapport a été publié en 1998, et c'est donc vers 1988 que j'ai été nommée membre de cette commission.

Mme Deborah Grey: Je vois.

La sénatrice Lois M. Wilson: Comme je l'ai dit, nous étions trois à la commission à représenter les sciences sociales, y compris une femme autochtone qui avait coutume de me dire: tous ces tableaux, tous ces graphiques qu'on nous présente, je ne comprends pas ce que tout cela veut dire, mais je pense que celui qui est en rouge en est un bon. Mais elle avait des valeurs claires et nettes. Ce sont des valeurs que nous recherchons ici.

Mme Deborah Grey: Merci.

Le président: C'était un échange partisan.

Mme Deborah Grey: C'était vraiment partisan, et vous savez, monsieur le président, si je porte du rouge, ce n'est pas parce que je suis libérale, mais parce que c'est la couleur de mon drapeau. Je mets cette couleur en vedette, comme le fait aujourd'hui ma bonne amie la sénatrice.

Sénatrice Lois M. Wilson: Je ne suis pas libérale non plus. Je suis sénatrice indépendante.

Mme Deborah Grey: Voilà.

Le président: Et c'est pourquoi je porte du bleu. Comme ça, nous sommes quitte.

Monsieur Bagnell.

M. Larry Bagnell: Merci.

Je vous remercie d'être venue, sénatrice. Je pense que nous sommes tous d'accord sur la gravité de cette question et je pense que nous discutons surtout du processus, mais je voudrais faire rapidement quelques observations sur vos six points.

Premièrement, pour ce qui est d'avoir contourné la commission, je m'inscris en faux contre cette déclaration. Je ne pense pas que les gens perdent confiance simplement parce que nous avons accepté un certain nombre des recommandations, mais que nous ne les avons pas toutes acceptées. Cela arrive souvent dans les affaires publiques.

Pour ce qui est de l'enfouissement en profondeur et de la sûreté technique, c'est bon que vous ayez tiré cela au clair, mais je ne pense pas que ce soit une question qui se pose aujourd'hui, parce que c'est dans le cadre du processus qu'on décidera du mécanisme choisi. Ce projet de loi ne vise pas à choisir un mécanisme, mais plutôt la façon de le choisir.

Vous avez dit que l'on n'a pas précisé quel était le mandat du comité consultatif, mais cela se trouve pourtant au paragraphe 8(1), qui explique essentiellement quelles seront les tâches du comité consultatif. Comme Mme Grey l'a dit, nous avons entendu ce matin un bon exposé d'un représentant des peuples autochtones.

Mais votre principale préoccupation porte sur le processus. Je pense que nous sommes tous d'accord sur l'objectif à atteindre, à savoir s'assurer que l'industrie ne soit pas la seule à avoir son mot à dire dans tout cela, qu'elle n'ait pas le pouvoir de décision exclusif. Le débat que nous avons maintenant porte sur le processus et comme je l'ai dit au témoin précédent, je ne suis pas certain qu'une société indépendante donnerait des résultats satisfaisants. Je pense qu'il est possible que le processus décrit dans ce projet permettra d'atteindre les mêmes objectifs, parce qu'il y a trois éléments empêchant que la décision définitive soit prise par l'industrie; de plus, celle-ci n'est pas la seule à intervenir dans le processus, puisque nous avons l'intervention des scientifiques, et aussi des Autochtones, avec leurs connaissances traditionnelles et leur savoir social dont nous avons besoin.

Premièrement, il faudra des consultations publiques obligatoires qui permettront de tenir compte de tout cela. Deuxièmement, il y a le comité consultatif, qui a le mandat de tout examiner et dont on précise tous les aspects. Troisièmement, il pourrait même y avoir des particuliers nommés membres de la société de gestion des déchets nucléaires, car c'est une option dont les producteurs peuvent se prévaloir.

Et la décision ultime appartient bel et bien aux élus, qui auront des comptes à rendre. Comme je l'ai dit, j'ai déjà eu affaire à des organismes indépendants où la décision n'était pas prise par des élus et il en est résulté des augmentations énormes des factures de téléphone ou d'électricité. Ce système ne fonctionnait pas bien non plus. Le débat tourne donc autour de deux processus qui visent à atteindre le même objectif.

• 1225

Le président: Sénatrice, je vous invite à répondre à cela, après quoi vous aurez le mot de la fin. Vous avez cinq minutes.

La sénatrice Lois M. Wilson: D'accord.

La raison pour laquelle j'ai dit que l'on avait contourné la commission pour mettre en place la politique-cadre, et que l'on n'avait pas fidèlement reproduit ce que nous avions dit, que ce n'était pas sûr, se contentant de dire que la baisse de confiance envers le gouvernement... Vous dites que peut-être que ce sera le cas, peut-être que non, mais il n'en reste pas moins que notre confiance a bel et bien été ébranlée par tout cela.

Quant à la participation du public, à un moment donné, à la commission, il était question, pour assurer la participation du public, d'afficher un avis au bureau de poste et d'attendre de voir si les gens viendraient se présenter, ce qui était à mon avis absolument inacceptable. Je n'ai aucune raison de croire que ce sera le moindrement mieux.

C'est en effet une question de processus, mais vous devrez passer par des élections avant que ce projet soit mis en branle. Certains d'entre vous seront réélus, d'autre pas, et il y aura de nouveaux visages. Qu'est-ce qui garantit la continuité dans ce dossier, pour que des gens puissent vraiment suivre ce qui se fait? Car cela va prendre 25 ans. C'est ce qui m'inquiète. Certaines ONG, qui sont rangées dans la catégorie des groupes d'intérêts spéciaux, vont certainement suivre le dossier. Je n'en suis pas aussi sûre quand il s'agit des parlementaires.

Le président: Avez-vous d'autres observations dont vous voulez nous faire part?

La sénatrice Lois M. Wilson: Je ne le crois pas, j'ai dit ce que j'avais à dire. J'aimerais bien vous rencontrer dans 10 ans, pour voir ce qu'il est advenu du dossier.

Nous n'avons pas fait ces recommandations-là à la légère. Nous avions des divergences, nous étions tout le temps à couteaux tirés. Je me rappelle qu'un homme m'a dit en partant: vous êtes la femme la plus détestable que j'ai jamais rencontrée. Je lui ai répondu: je suis désolée que nous ne soyons pas d'accord. Nous avions notre franc parler. Nous n'étions pas polis, parce que c'est un dossier tellement important. J'espère donc que vous l'examinerez attentivement, parce que c'est l'avenir de vos petits-enfants qui est en jeu. Je n'ai rien d'autre à ajouter.

Le président: Merci beaucoup. Si tout le monde était d'accord, nous n'aurions pas besoin de gouvernement, alors continuez d'être vous-mêmes. Merci.

Chers collègues, nous allons reprendre la séance à huis clos dans cinq minutes.

[Note de la rédaction—La séance se poursuit à huis clos]

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