AANR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 11 février 2003
¹ | 1550 |
Le président (M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.)) |
M. Warren Johnson (sous-ministre adjoint, Services fonciers et fiduciaires, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien) |
¹ | 1555 |
º | 1600 |
º | 1605 |
º | 1610 |
Le président |
M. Warren Johnson |
Le président |
M. Maurice Vellacott (Saskatoon—Wanuskewin, Alliance canadienne) |
º | 1615 |
M. Warren Johnson |
M. Maurice Vellacott |
M. Warren Johnson |
M. Maurice Vellacott |
M. Warren Johnson |
M. Maurice Vellacott |
M. Warren Johnson |
M. Andrew Beynon (avocat général, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien) |
M. Maurice Vellacott |
M. Andrew Beynon |
º | 1620 |
M. Maurice Vellacott |
M. Andrew Beynon |
M. Maurice Vellacott |
M. Andrew Beynon |
M. Maurice Vellacott |
Le président |
M. Maurice Vellacott |
Le président |
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ) |
M. Warren Johnson |
º | 1625 |
M. Yvan Loubier |
Le président |
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) |
º | 1630 |
M. Warren Johnson |
M. Andrew Beynon |
Le président |
M. Warren Johnson |
Le président |
M. Julian Reed (Halton, Lib.) |
M. Warren Johnson |
º | 1635 |
Le président |
M. Warren Johnson |
Mme Brenda Kustra (conseillère exécutive, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien) |
M. Julian Reed |
Le président |
M. Maurice Vellacott |
M. Warren Johnson |
M. Maurice Vellacott |
º | 1640 |
M. Warren Johnson |
M. Maurice Vellacott |
Le président |
M. Maurice Vellacott |
Le président |
M. Gérard Binet (Frontenac—Mégantic, Lib.) |
M. Warren Johnson |
º | 1645 |
M. Gérard Binet |
M. Warren Johnson |
Le président |
M. Yvan Loubier |
M. Warren Johnson |
º | 1650 |
M. Yvan Loubier |
M. Warren Johnson |
Le président |
Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.) |
M. Warren Johnson |
º | 1655 |
Le président |
M. Pat Martin |
» | 1700 |
M. Warren Johnson |
M. Pat Martin |
Mme Brenda Kustra |
M. Pat Martin |
Le président |
M. Pat Martin |
Le président |
M. Pat Martin |
Le président |
M. Pat Martin |
M. Andrew Beynon |
M. Pat Martin |
M. Andrew Beynon |
» | 1705 |
M. Pat Martin |
M. Andrew Beynon |
M. Pat Martin |
Le président |
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.) |
M. Warren Johnson |
» | 1710 |
Mme Anita Neville |
Mme Brenda Kustra |
Le président |
M. Maurice Vellacott |
Mme Brenda Kustra |
M. Maurice Vellacott |
M. Andrew Beynon |
» | 1715 |
M. Maurice Vellacott |
M. Andrew Beynon |
Le président |
M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.) |
M. Andrew Beynon |
M. John Godfrey |
M. Andrew Beynon |
» | 1720 |
Le président |
M. Yvan Loubier |
M. Warren Johnson |
» | 1725 |
M. Yvan Loubier |
Le président |
M. Pat Martin |
M. Andrew Beynon |
M. Pat Martin |
M. Andrew Beynon |
M. Pat Martin |
M. Andrew Beynon |
M. Warren Johnson |
M. Pat Martin |
» | 1730 |
M. Andrew Beynon |
Le président |
M. Warren Johnson |
Le président |
CANADA
Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles |
|
l |
|
l |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 11 février 2003
[Enregistrement électronique]
¹ (1550)
[Traduction]
Le président (M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.)): Bienvenue à tous et toutes pour cette reprise de nos délibérations sur le projet de loi C-7.
Nous recevons aujourd'hui des témoins du ministère, en l'occurrence M. Warren Johnson, sous-ministre adjoint aux Services fonciers et fiduciaires, Mme Brenda Kustra, conseillère exécutive, et M. Andrew Beynon, avocat général.
Bienvenue donc. Nous vous demandons de nous faire un exposé après quoi les membres du comité vous poseront leurs questions. Vous connaissez la routine. Si la question d'un député est trop longue, ce sont nos invités qui se voient couper la parole. Vous m'en excuserez, mais c'est mon devoir.
Allez-y, je vous en prie.
M. Warren Johnson (sous-ministre adjoint, Services fonciers et fiduciaires, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Je vous remercie, monsieur le président.
Nous tenons à remercier le comité de nous avoir invités à lui faire cet exposé.
Je voudrais axer mon intervention sur les questions qui exigent d'importants éclaircissements étant donné les interrogations qui ont découlé des travaux effectués par le comité jusqu'à présent sur le projet de loi C-7.
Étant donné le nombre important de commentaires, pas seulement à propos du projet de loi, mais également au sujet de sa genèse et de la chronologie de cette initiative, je voudrais pour commencer parler de ces trois questions en m'inspirant de l'exposé que nous vous avions fait en février.
Le projet concernant la gouvernance des Premières nations, puisque c'est ainsi qu'on l'appelle, a pris naissance il y a quatre ans avec l'arrêt Corbiere rendu par la Cour suprême du Canada. À l'époque, les Premières nations craignaient que les 18 mois que la Cour suprême du Canada avait donnés au gouvernement seraient trop peu pour apporter une réforme législative aux dispositions de la Loi sur les Indiens concernant l'élection des dirigeants.
Le gouvernement fédéral a donc lancé une stratégie à deux volets en commençant par une réglementation qui mettait en oeuvre les termes de l'arrêt, puis par les changements législatifs réclamés par la Cour suprême. Nous avons alors procédé à une consultation non seulement sur la réglementation qu'il fallait mettre en oeuvre pour donner immédiatement suite à l'arrêt de la Cour suprême, mais également sur la façon de procéder sur un plan législatif plus large comme la Cour suprême l'avait imposé au Parlement.
Il va sans dire qu'après 18 mois de travail, d'analyse et de consultation dans la foulée de l'arrêt Corbiere, nous avons convenu de la nécessité d'apporter à la Loi sur les Indiens des remaniements législatifs qui iraient beaucoup plus loin que la simple question des élections des dirigeants. Après cela, nous avons eu de six à neuf mois d'entretiens et d'ateliers, plusieurs fois avec la participation publique du ministre, dont nous faisions d'ailleurs état dans notre exposé devant vous en février dernier.
Par la suite, nous avons consacré quasiment une année complète à procéder à des consultations sous le titre «Les collectivités d'abord», ainsi que, par la suite, de nombreux mois à analyser les résultats et à attendre les recommandations du Comité consultatif ministériel conjoint. Tout cela fut effectué avant même que nous ne commencions à envisager un texte de loi.
Nous en sommes maintenant rendus à l'étape de l'examen en comité, avec les recommandations que vous pourriez formuler, après quoi, comme le ministre l'avait publiquement promis dès le départ, nous entamerons une nouvelle série de consultations avec les Premières nations afin d'élaborer conjointement la réglementation correspondante et d'examiner les questions de mise en oeuvre et de coût.
Une fois que la réglementation aura été adoptée, il y aura une période de transition de deux ans, ce qu'exige la loi, avant que les règlements que nous devons élaborer avec les Premières nations puissent s'appliquer à celles qui n'étaient pas prêtes ou qui n'éprouvaient pas le besoin d'adopter leurs propres codes jusque-là. Bien entendu, ces nations pourraient toujours adhérer au processus après coup, si elles le veulent.
L'ensemble du processus aura alors pris au moins sept ans.
Permettez-moi maintenant de vous parler du processus. Puisqu'il s'agit ici des questions fondamentales qui entourent la citoyenneté, comme le ministre vous l'avait signalé dans son exposé dès le départ, toutes les instances intéressées qui nous ont conseillés nous ont dit qu'il fallait élaborer un processus absolument transparent et qui nous permettrait, ainsi qu'aux dirigeants des Premières nations, de mobiliser conjointement et de façon très importante les citoyens des Premières nations. C'est cela que nous avons fait.
Nous avons invité les dirigeants nationaux, régionaux et locaux à participer aux consultations conduites dans les communautés situées dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci. Il est vrai toutefois que tous les dirigeants n'ont pas accepté d'y participer. En conséquence de quoi, nous n'avons pas pu nous rendre dans les communautés dont les dirigeants n'avaient pas accepté l'invitation de travailler avec nous et de nous laisser consulter les leurs.
Par contre, même si certains milieux ont appelé au boycott de nos travaux, nous avons réussi à mobiliser un niveau de participation plus élevé que lors de toute série antérieure de consultations avec les Autochtones, aussi bien du point de vue du nombre des communautés consultées que du nombre d'individus que nous avons rejoints. Et pour apporter une réponse précise à une autre question dont le comité a été saisi, environ 50 p. 100 des participants étaient effectivement des femmes appartenant aux Premières nations.
Si nous nous tournons maintenant vers la portée même du projet de loi C-7, il apparaissait clairement, lorsque l'arrêt Corbiere est tombé, que toute initiative législative devait aller beaucoup plus loin que la seule question du choix des dirigeants. Tous s'entendaient sur ce point. L'initiative de gouvernance des Premières nations a permis d'élargir l'initiative en y intégrant la responsabilisation financière et opérationnelle ainsi que la capacité juridique.
Il était également tout aussi évident que beaucoup de gens souhaitaient voir aborder d'autres questions. Par conséquent, dès les tout débuts de l'initiative de gouvernance des Premières nations, nous avons clairement promis d'écouter et de consigner toutes les questions évoquées pour voir ce qui pourrait être intégré au projet de loi C-7 mais aussi ce qu'il serait préférable de traiter ultérieurement ou d'une façon différente.
Ces consultations et leur produit ont été abondamment cités dans tous nos rapports. L'initiative de gouvernance des Premières nations n'était pas considérée comme un tout ou rien, mais plutôt comme un point de départ, comme une assise, à partir de quoi il serait possible de progresser dans d'autres domaines.
Parmi les principaux types de problème concernant les choses qui sortaient du cadre de la gouvernance des Premières nations, comme en ont fait état les consultations et comme l'ont souligné bon nombre de témoins que le comité a déjà entendus, il y a le statut, l'inscription et la qualité de membre, dont ont parlé en très grand nombre les participants et, en tout état de cause, les femmes autochtones.
Il s'agit en l'occurrence d'une question d'une importance au moins aussi grande que celle de la gouvernance telle qu'elle est définie dans le cadre de l'initiative. Ainsi, plusieurs intervenants, dont le ministre Nault, ont déjà signalé qu'il s'agirait de la toute prochaine étape législative à laquelle nous allons devoir nous atteler.
La question des biens immobiliers matrimoniaux était un autre grand sujet de préoccupation. Ici, nous avons commencé à travailler à la mise en oeuvre de la Loi sur la gestion des terres des premières nations. Wendy Cornet a fait remettre au comité un document de discussion à ce sujet et les gens commencent à penser à la façon dont cela pourrait être traité sans trop attendre.
Je crois savoir également que le ministre espère pouvoir faire bientôt une annonce sur la façon dont nous pourrions progresser dans cet important dossier.
Des questions plus matérielles comme le logement, l'eau potable et les égouts, l'infrastructure, le développement économique et l'éducation ont également été au centre des préoccupations. Le projet de loi C-7 peut être très utile dans certains de ces dossiers puisqu'il pourra préciser les capacités juridiques ainsi que de nouvelles options de prestation de programmes pour les Premières nations, dont je signalerai d'ailleurs quelques-unes dans mon exposé.
Cela étant, pour pouvoir travailler directement à ces dossiers, un groupe de travail national sur l'éducation a été mis sur pied dans le but de formuler des recommandations au ministre. Le fonds de développement économique de notre ministère a été relevé de 100 millions de dollars ces deux dernières années. Nous poursuivons nos efforts pour améliorer la qualité de l'eau dans les réserves. Par ailleurs, la Chambre est maintenant saisie du projet de loi C-19 qui améliorera les moyens d'action économique des Premières nations en leur permettant de tirer parti des marchés privés pour améliorer leur capacité de financement pour l'amélioration des infrastructures.
Enfin, un grand nombre de participants ont demandé à ce que la gouvernance des Premières nations aille plus loin encore de manière à intégrer d'autres questions structurelles dont parle la Loi sur les Indiens et qui entravent le progrès économique, par exemple, la gestion des terres et des ressources ainsi que la gestion des ressources financières indiennes qui sont actuellement détenues par le Trésor pour le compte des différentes bandes.
Pour répondre aux intérêts manifestés dans tous ces domaines, il aurait fallu, et c'est cela le problème, que le projet de loi C-7 survienne au même moment qu'une série de changements au niveau des obligations fiduciaires, une des choses d'ailleurs que l'Assemblée des premières nations, entre autres, nous avait demandé de promettre de ne pas faire, ce à quoi avait consenti le ministre dès le départ. Mais ici aussi, il est admis qu'il faut répondre à ce genre de préoccupation. Nous travaillons actuellement dans le cadre d'un certain nombre d'exercices conduits par les Premières nations elles-mêmes pour élaborer une législation facultative dans tous ces domaines.
Par exemple, la Loi sur la gestion des terres des premières nations qui offre à ces dernières le contrôle des terres et des ressources situées sur les réserves, exception faite du pétrole et du gaz, a été élargie avec l'avènement de la Commission des terres des Premières nations, un organisme consultatif, pour permettre la participation des 100 et quelques Premières nations qui souhaitent d'ores et déjà intervenir au niveau de cette loi.
Par ailleurs, comme le ministre l'a déjà déclaré, nous avons continué à travailler avec les représentants des intérêts des Premières nations dans les domaines de la gestion du pétrole et du gaz et de la gestion financière, à tel point que nous sommes sans doute à la veille de pouvoir déposer des propositions législatives dans ce sens.
Pour conclure ce volet sur la portée du projet de loi, nous avons fait de notre mieux pour respecter nos engagements, pour traiter toutes les questions évoquées pendant nos consultations avec respect, en donnant dans certains cas les suites nécessaires, comme je l'ai déjà dit, et pour faire en sorte que le projet de loi C-7 ne soit pas un tout ou rien, mais serve de fondement, d'assise et d'auxiliaire à une stratégie d'ensemble qui servira de phare de ces domaines, comme le ministre vous l'a exposé un peu plus tôt dans son témoignage.
Pour terminer notre exposé, je voudrais maintenant évoquer ce qui se trouve dans le projet de loi C-7 ainsi que certaines des questions qui semblent s'être posées à ce sujet. Par contre, il y a un autre éclaircissement qui s'impose: il ne s'agit pas ici d'autonomie gouvernementale. Là non plus, ce n'est pas un tout ou rien. Partout au Canada, nous négocions la mise en oeuvre du droit inhérent, et on nous a demandé de respecter ce processus. Certains de ceux qui sont venus témoigner devant vous semblent avoir fait valoir d'autres formules possibles, parfois en insistant sur le fait que le gouvernement fédéral n'a pas à légiférer dans ce domaine.
Cet argumentaire est non seulement contraire à ce que la Cour suprême a dit dans l'arrêt Corbiere, et dont j'ai déjà parlé, mais il semble également que ces intervenants parlent davantage de solutions autres que l'autonomie gouvernementale dans les négociations des traités actuellement en cours à 80 tables partout au Canada et qui se déroulent en parallèle à l'initiative de gouvernance des Premières nations.
Même si la gouvernance des Premières nations n'est pas l'autonomie gouvernementale, comme le dit fort justement le préambule du projet de loi C-7, ce texte de loi se veut une amélioration considérable par rapport à ce que contient actuellement la Loi sur les Indiens, et un précieux auxiliaire au service des communautés souhaitant accéder à plus long terme à l'autonomie gouvernementale.
À cet égard, trois éléments méritent un éclaircissement.
Tout d'abord, comme le signale l'article 35 du projet de loi, «il est entendu que la présente loi ne s'applique pas» aux Premières nations qui ont déjà accédé à l'autonomie gouvernementale. En deuxième lieu, selon l'article 34, le gouverneur en conseil peut, pendant la période de transition de deux ans qui précédera l'imposition de codes par défaut, «soustraire une bande à l'application de la présente loi ou de l'une ou l'autre de ses dispositions» pour une période déterminée afin de «faciliter la négociation ou la ratification d'un accord définitif sur l'autonomie gouvernementale».
Enfin, l'alinéa 18(1)b) porte qu'une bande peut déléguer les pouvoirs qui lui sont conférés par le projet de loi ou par la Loi sur les Indiens. Et le paragraphe 18(2) prévoit l'établissement conjoint d'organismes par deux ou plusieurs bandes.
Ainsi, pour la première fois, les Premières nations qui souhaitent entamer la mise en oeuvre des recommandations de la CRPA et s'attaquer au problème qui sous-tend l'édification d'une nation, composante indispensable de l'autonomie gouvernementale comme le signalait la Commission royale, pourront pour la première fois avoir les moyens de le faire en vertu d'une loi en vigueur. Par contre, les bandes pourront également mieux faire exécuter les fonctions prévues par le projet de loi ou par la Loi sur les Indiens, par exemple, arrêter une réparation au niveau tribal et assurer l'indépendance ou la prestation plus efficace des programmes et des services, par exemple, en constituant des régies régionales ou tribales du logement.
¹ (1555)
Le comité doit savoir que nous avons, dans bon nombre de ces domaines, des projets pilotes ou des discussions en cours avec les Premières nations qui tiennent absolument à se servir de ces outils à court terme et dans la réalisation de l'autonomie gouvernementale, de telle sorte que nous puissions tenir compte de leurs idées lorsque nous passerons à la prochaine phase de consultation qui portera sur les questions de réglementation et de mise en oeuvre, et pour que nous puissions nous assurer que le projet de loi C-7 soit mis en oeuvre dans le respect de l'efficience et de l'efficacité.
Pour achever mon exposé sur le contenu du projet de loi C-7, j'en reviens au thème central de notre première ronde de consultations. Je rappelle notre premier exposé devant votre comité où nous faisions état de la nécessité de modifier fondamentalement la relation entre le gouvernement fédéral, les Premières nations et leurs citoyens dans le cadre de la Loi sur les Indiens—en passant d'une relation définie par la tutelle et le contrôle... à une relation intergouvernementale moderne, définie par l'exercice d'une gouvernance des Premières nations responsable et efficace.
Ceux qui ont participé aux consultations, même s'ils ont soulevé diverses objections, semblaient tenir à ceci: les citoyens des Premières nations veulent avoir le droit d'être informés, de participer aux affaires de leur communauté et d'avoir accès à des mécanismes de redressement et autres afin d'exiger des comptes de leurs gouvernements. Dans la mesure où l'initiative de gouvernance des Premières nations permettra cela, ils veulent que leurs gouvernements disposent de moyens plus modernes et plus efficaces et ils veulent aller de l'avant en se servant d'une loi habilitante. Ces trois thèmes complémentaires, à savoir la responsabilisation des citoyens, des outils de gouvernement plus modernes et une loi habilitante, constituent essentiellement la structure et les dispositions de fonds du projet de loi C-7 que vous avez devant vous.
La majorité des dispositions de la partie 1 du projet de loi C-7 décrivent le rôle des membres des Premières nations dans l'élaboration et la ratification des codes sur le choix des dirigeants, le gouvernement de la bande, la gestion financière et l'obligation de rendre compte, comme le prévoit l'article 4. Les articles 5, 6 et 7 précisent les exigences de la loi à l'égard de ces codes qui habiliteront les membres à participer aux décisions et à obliger leurs gouvernements à rendre des comptes. Entre autres, le paragraphe 4(2) porte que tous les membres de la bande, qu'ils vivent hors réserve ou dans la réserve, ont le droit de ratifier les codes conçus par les bandes, et l'on précise au paragraphe 5(1) les règles régissant les appels relatifs aux résultats des élections, la révocation des élus, la définition de manoeuvres frauduleuses pour s'assurer que les intérêts des membres hors réserve et sur réserve sont respectés lors d'élections.
Le paragraphe 5(2) oblige les bandes qui choisissent leurs chefs en vertu de la coutume à codifier ces pratiques par écrit, à s'assurer qu'il existe une procédure et un mécanisme d'appel pour modifier le code, et à obtenir le consentement de la communauté pour demeurer assujetties aux règles issues de la coutume. Cela permettra de régler ce problème beaucoup trop fréquent qui tient au fait que, souvent, les coutumes ne sont pas écrites et sont elles-mêmes l'objet de différends au sein de la communauté.
Les exigences minimales de l'article 6 relativement aux codes confirment le fonctionnement de base du gouvernement, et obligent les dirigeants des bandes à donner avis des assemblées des conseils de bande, à enregistrer la participation des membres, à tenir des procès-verbaux, à donner avis des lois à l'étude et à permettre aux gens de se prononcer sur ces lois, et l'on fait état aussi de la séparation des rôles politiques et administratifs, des conflits d'intérêts et de l'accès à l'information.
À l'article 7, nous arrêtons les règles de base pour la préparation du budget annuel et sa présentation aux membres de la bande, le contrôle des dépenses, les prêts et les garanties de la bande, les salaires et les avantages sociaux et la gestion du déficit.
Pour les gouvernements des bandes qui décident de ne pas créer leurs propres codes, le règlement arrêtera un régime alternatif qui devra présenter les mêmes aspects. Il convient de noter ici que même si un certain nombre de bandes ont déjà incorporé certaines de ces modalités dans leur fonctionnement, il semble que ce ne soit pas généralisé, loin de là, d'après les commentaires de bon nombre de ceux qui ont participé aux consultations sur l'initiative sur la gouvernance des Premières nations. En outre, à part les règles de base sur les élections qui ne sont pas tenues selon la coutume, la vaste majorité de ces modalités ne figurent pas dans l'actuelle Loi sur les Indiens, ce qui veut dire que leur application dans la pratique est à la discrétion du chef et du conseil.
Outre ces éléments du projet de loi C-7, les articles 11 et 12 de la partie 1 obligent les bandes à rendre publiques leurs politiques et formalités administratives et à créer un mécanisme de redressement local et impartial qui pourra entendre les membres qui contesteront des décisions administratives.
Enfin, toujours au sujet de l'habilitation des citoyens, les articles 41 et 42 font que la Loi sur les Indiens n'est plus exemptée en regard de la Loi canadienne sur les droits de la personne, et l'on propose un ajout à cette loi, l'article 16.1, qui fait que toute enquête sur les plaintes doit prendre en compte les besoins et les aspirations de la communauté autochtone, mais d'une manière qui respecte l'égalité des sexes. Nous savons qu'un certain nombre de témoins ont proposé des suggestions au comité visant à améliorer ce libellé.
º (1600)
Voilà pour les principaux aspects du projet de loi C-7 traitant de l'habilitation des citoyens et de la protection des personnes. J'aimerais maintenant passer à la deuxième partie du projet de loi C-7 où il est question de l'habilitation des gouvernements.
Au coeur du projet de loi C-7 se trouve la faculté qu'ont les bandes de mettre au point leurs propres codes, et ce, afin d'éviter une approche unique, même s'il y a d'autres articles habilitants dans le projet de loi C-7, entre autres, en ce qui concerne les pouvoirs législatifs et la délégation des pouvoirs. Ces codes ne font état que d'un contenu minimum. Ils ne dictent pas à la communauté comment procéder. On ne limite pas le droit de la communauté d'utiliser des pratiques traditionnelles, sauf peut-être dans le cas des élections, où le projet de loi C-7 exige que la majorité du conseil soit élue. Il n'est fait état que des fonctions de base minimales.
On s'est donné beaucoup de mal pour assurer le maximum de souplesse, dans toute la mesure du possible, afin que les codes élaborés puissent tenir compte des traditions et pratiques locales. Par exemple, conformément à l'arrêt Corbiere de la Cour suprême, le paragraphe 5(5) permet aux bandes de tenir compte des intérêts différents des membres lorsqu'ils arrêtent leurs codes sur le choix des dirigeants.
En dehors des codes, et toujours sur ce thème de la modernisation et de l'habilitation des gouvernements des bandes, la partie 2 du projet de loi C-7 traite de la capacité juridique de la bande à l'article 15, des pouvoirs législatifs du conseil aux articles 16 à 18 et de l'application des lois aux articles 19 à 29.
Les capacités juridiques décrites à l'article 15 sont celles d'une personne physique, et l'approche et le libellé sont semblables à ceux qu'on trouve dans les ententes d'autonomie gouvernementale et les autres descriptions de la jurisprudence.
Comme nous l'avons dit plus tôt, l'article 15 contient des paragraphes qui répondent directement aux préoccupations exprimées dans les consultations Les collectivités d'abord, où les gens ont dit qu'ils ne voulaient pas que la gouvernance des Premières nations modifie le statut légal particulier des bandes, ils ne veulent pas que ces mesures aient pour effet de les constituer en personne morale ou de municipaliser les bandes, ou qu'elles modifient les obligations fiduciaires concernant les terres et l'argent des Indiens.
En ce qui concerne les pouvoirs législatifs que prévoit le projet de loi C-7, le ministre n'aura aucun pouvoir de désaveu. Le projet de loi C-7 compte plutôt sur la reddition de compte des gouvernements des bandes envers leurs membres, comme nous l'avons dit plus tôt, comme c'est d'ailleurs le cas pour tous les autres gouvernements au Canada.
Par rapport aux articles de la Loi sur les Indiens concernant les arrêtés, le libellé des pouvoirs législatifs des conseils de bande a été modernisé, généralisé et assoupli dans certains cas. Ces pouvoirs ont été divisés en deux groupes: premièrement, les pouvoirs portant sur les affaires locales dans les réserves, qui sont définis à l'article 16, et deuxièmement, les pouvoirs touchant l'administration des affaires de la bande qu'on retrouve à l'article 17.
Enfin, un nouvel article relatif aux pouvoirs législatifs qui a trait à la gouvernance de la bande, l'article 18, a été ajouté pour donner effet au code dans ce domaine.
À l'article 16, les pouvoirs législatifs locaux sont de nature générale et permettent aux conseils de bande d'adopter des lois qui seront appliquées dans leurs réserve et qui seront à tout le moins comparables aux lois des autres gouvernements locaux au Canada. Ce libellé de nature plus générale, qui s'ajoute à la capacité d'émettre des permis et des licences à l'article 16 et des contraventions à l'article 21, sont des aspects importants qui sont absents de la Loi sur les Indiens et qui expliquent pourquoi la vaste majorité des règlements administratifs, par ailleurs satisfaisants, pris aujourd'hui par les bandes, sont rejetés.
En outre, les Premières nations reçoivent avec l'article 16 un nouveau pouvoir législatif concernant les rapports propriétaire-locataire. La question est importante étant donné que les lois provinciales équivalentes ne s'appliquent pas en ce moment aux terres des réserves. Cette disposition et d'autres donneront aux Premières nations des outils importants dont elles ne disposent pas maintenant pour se doter, par exemple, de programmes de logement plus efficaces.
Avec l'article 17, le conseil de bande pourra prendre des textes législatifs pour les besoins de la bande, ce qui comprend des questions semblables à celles qu'on retrouve aujourd'hui à l'article 81 de la Loi sur les Indiens. En outre, nous avons ajouté à l'alinéa 17(1)a) un pouvoir nouveau et à caractère plus général pour la gestion des ressources naturelles de la communauté dans la réserve. Les Premières nations, en vertu de l'alinéa 17(1)c), disposeront également d'un nouveau pouvoir législatif concernant la préservation de leur culture et de leur langue.
Le dernier aspect de la partie 2 permet aux gouvernements de bande d'aborder les problèmes historiques d'application des règlements que comporte la Loi sur les Indiens dont l'absence de pouvoirs sur la délivrance de contraventions et d'avis judiciaires, la faiblesse des amendes et des pénalités imposées comparativement aux autres gouvernements environnants ainsi que la capacité de nommer des agents pour faire appliquer les règlements. Cette dernière question, particulièrement en ce qui concerne les pouvoirs de fouille et d'inspection dont il est fait état aux articles 23 à 29, a fait l'objet de certains commentaires et mérite sûrement l'attention de votre comité.
Tels sont les principaux aspects du projet de loi C-7 traitant de l'habilitation des personnes et, partant, de l'habilitation de leurs gouvernements.
º (1605)
Pour achever mon exposé, j'ajoute que les parties 3 et 4 du projet de loi ont trait à l'application du projet de loi C-7, nommément des modifications corrélatives à d'autres lois, dont la Loi sur les Indiens et la Loi canadienne sur les droits de la personne dont j'ai parlé plus tôt. Vous aurez noté que bon nombre de ces dispositions ont trait aux pouvoirs réglementaires qu'a le ministre d'adopter des lois pour les Premières nations, dispositions qui sont désormais englobées dans les articles plus généraux relatifs aux pouvoirs législatifs du projet de loi C-7 dont j'ai parlé plus tôt. C'est un autre domaine où le projet de loi C-7 supprime le contrôle dont dispose le ministre des Affaires indiennes et du Nord.
Voilà qui conclut notre exposé qui, je l'espère, a répondu à certaines questions techniques et factuelles du comité. Nous serons évidemment heureux de répondre à toutes vos questions.
º (1610)
Le président: Merci beaucoup.
Étant donné que certains de nos membres étaient retenus à la Chambre parce qu'un débat important vient de commencer, puis-je vous demander de répéter certains éléments de votre introduction, où vous avez parlé de l'effort qu'il faudra faire et du temps qu'il faudra pour arrêter les règlements, les codes, ce genre de chose? Je pense que c'est essentiel étant donné toutes les questions qui ont été posées à ce sujet par le passé.
M. Warren Johnson: Monsieur le président, nous avons dit au début que cet exercice avait en fait commencé il y a quatre ans avec l'arrêt Corbiere. À cette époque, les Premières nations se préoccupaient du fait que les 18 mois que la Cour suprême nous avait donnés étaient trop peu pour réformer les dispositions sur les élections de la Loi sur les Indiens, et voilà pourquoi le gouvernement fédéral a mis de l'avant une stratégie à deux volets afin de donner effet à cet arrêt, et nous avons commencé par la modification réglementaire, modification qui devait être suivie de modifications législatives comme l'exigeait la Cour suprême.
Donc nous avons alors procédé à des consultations, pas seulement sur les règlements qu'il fallait mettre en place pour donner effet à l'arrêt à court terme, mais aussi pour amorcer la refonte législative plus globale que la Cour suprême a exigée du Parlement.
Après 18 mois de travail et d'analyse, et après les consultations qui ont fait suite à l'arrêt Corbiere, nous nous sommes entendus sur la nécessité d'apporter des modifications profondes à la Loi sur les Indiens qui dépasseront les simples dispositions sur les élections. Par après, nous avons eu six ou neuf mois de discussions officieuses et d'ateliers, et le ministre a pris certains engagements publics et pris part à certaines discussions, dont nous avons fait état dans l'exposé que nous vous avons donné il y a environ un an de cela.
Nous avons alors pris une année pour faire des consultations, dans le cadre de Les collectivités d'abord, et nous avons pris plusieurs autres mois pour analyser ces résultats dans l'attente des recommandations du comité consultatif ministériel conjoint, et nous avons fait tout cela avant d'envisager la rédaction législative.
Après l'étude en comité, et après avoir reçu vos recommandations, le ministre s'est engagé publiquement à procéder ensuite à une ronde de consultations auprès des Premières nations pour mettre au point conjointement le règlement et discuter de la question de la mise en oeuvre et des coûts. Une fois que le règlement aura été adopté, nous entrerons dans une période de transition de deux ans comme l'exige le projet de loi, et il nous faudra cette transition pour mettre au point, de concert avec les Premières nations, ce règlement qui s'appliquera à ceux qui n'étaient pas prêts ou qui n'ont pas jugé bon de se doter de leurs propres codes. Il faut aussi savoir bien sûr qu'ils pourront toujours se doter de codes s'ils le jugent nécessaires plus tard.
Le président: Merci beaucoup.
Pour donner le ton aux questions, je rappelle que nous avons reçu ce projet de loi après la première lecture. C'est un comité qui marche très bien et où nous avons la collaboration de tous les partis. Ce n'est pas un exercice d'affrontement que nous avons ici. Tout le monde travaille dur, chacun est sincère, et nous voulons améliorer ce projet de loi.
Nous allons voyager ensemble, et nous aurons le plaisir d'avoir des conseillers juridiques avec nous, et des gens pour nous aider. Donc, dans l'esprit des amendements qui amélioreront ce projet de loi et dans un esprit de collégialité, j'espère que les questions porteront sur les enjeux dont nous avons été saisis, et j'espère que notre discussion sera le point de départ de nos amendements. Et comme je l'ai dit au ministre, et à d'autres, j'espère qu'aux termes de ces neuf semaines, nous ne passerons pas deux ou trois jours ensemble, au cours de l'étude article par article, à descendre tous les amendements de l'opposition et à voter pour tous les amendements du côté ministériel.
Si nous devons travailler ensemble, c'est ainsi que nous allons procéder, et je veux que tous les amendements reçoivent la pleine attention de tous les participants. Je pense que c'est la façon d'articuler un projet de loi après la première lecture.
Nous allons donc commencer avec un tour de sept minutes et M. Vellacott.
M. Maurice Vellacott (Saskatoon—Wanuskewin, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Merci, messieurs, et Brenda, d'être ici aujourd'hui.
Je vais poser mes questions mais pas nécessairement en ordre de priorité.
En vertu des coutumes des bandes, celles-ci peuvent se doter, si on veut, d'une sorte de système hiérarchique et non démocratique. Y a-t-il transparence? Je tiens tout simplement à signaler pour mémoire que c'est une question que nous pourrons peut-être étudier, parce que c'est une chose qui nous tient à coeur à nous, de l'Alliance canadienne, et nous tenons à ce qu'il y ait une disposition quelconque prévoyant un examen périodique des choix opérés selon la coutume pour s'assurer que la volonté des gens est respectée.
Autrement dit, les gens auront-ils la possibilité de temps en temps de repenser à cela? Ou y a-t-il quelque chose ici que je ne vois pas? J'imagine que je veux une réponse rapide à cela, même si bien sûr vous ne pouvez pas vous engager. Il y a peut-être des choses que je ne comprends pas tout à fait, mais si j'ai bien compris, une bande qui se règle sur la coutume a le droit d'adopter—du moins de mon point de vue à moi—un système hiérarchique qui n'est pas démocratique. Y a-t-il moyen d'insérer une disposition, ou un amendement, pour que l'on étudie périodiquement les choix effectués selon la coutume afin de s'assurer que la volonté des gens est respectée?
º (1615)
M. Warren Johnson: L'article concernant la coutume encourage la bande à inclure une procédure de modification dans les règles écrites concernant la coutume pour ratification par la communauté, mais il ne s'agit pas du type d'examen formel périodique dont vous parlez.
M. Maurice Vellacott: Ce que j'essaie de dire en fait...
M. Warren Johnson: On leur demande d'inclure une procédure de modification pour fournir cette possibilité.
M. Maurice Vellacott: Très bien. Je souhaiterais peut-être aller un peu plus loin. Peut-être serait-il préférable d'envisager un libellé plus ferme et ne pas se contenter de possibilité, mais plutôt d'introduire une procédure de modification qui permettrait des examens périodiques et fréquents.
L'autre question que je voudrais vous poser—je suis d'ailleurs heureux que vous en ayez parlé avant moi—concerne les commentaires qu'on a exprimés sur les soi-disant vastes pouvoirs de perquisition et de saisie. Évidemment, on les compare toujours avec d'autres administrations de notre pays.
Je ne cherche pas à connaître votre position exacte et je sais que vous vouliez ne pas vous limiter, mais admettriez-vous à l'heure actuelle que vous entendez beaucoup de gens exprimer leurs préoccupations à l'égard de ces pouvoirs d'application très vastes?
M. Warren Johnson: Non, je crois effectivement que c'est un sujet de préoccupation et, comme je l'ai souligné dans mes remarques liminaires, je crois d'ailleurs que ce comité devrait tenter de nous éclairer à ce sujet.
Je veux toutefois préciser qu'une fois que le projet de loi a été déposé au comité, nous avions profité du congé estival pour organiser des séances d'information auprès des Premières nations partout au pays pour encourager la population à l'examiner, à se forger une opinion et à comparaître devant ce comité pour faire part de leurs réflexions. Lors de ces discussions, il a beaucoup été question des pouvoirs d'application de la loi. Il est évident que la population s'interroge sur cela.
M. Maurice Vellacott: Sur un autre sujet, la plupart des démocraties progressistes, parvenues à maturité, semblent inclure dans leurs codes et leurs lois des dispositions sur l'accès à l'information et la protection de la vie privée. Encore une fois, le projet de loi parle de celles qu'on «pourrait» élaborer. Qu'arrivera-t-il si elles ne le sont pas? Comment les membres de la bande seront-ils protégés?
Il me semble qu'on peut parler de culture, de tradition, etc., mais beaucoup d'Autochtones demandent accès à l'information et certains types de lois qu'on retrouve dans les démocraties modernes. Que faire de ces dispositions qui permettent leur élaboration mais ne l'exigent pas? Comment protéger la population autochtone alors?
M. Warren Johnson: En pareil cas, nous nous retrouverions dans la même situation qu'aujourd'hui puisqu'il n'existe aucune disposition sur l'accès à l'information dans la Loi sur les Indiens ou toute autre loi en vigueur—c'est selon les pratiques de la bande.
Je ne sais pas si mon collègue souhaite ajouter quelque chose.
M. Andrew Beynon (avocat général, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): J'ajouterai une seule chose.
Le paragraphe 6(4) du projet de loi comprend une disposition qui précise que «Le code portant sur le gouvernement comporte des règles», et l'alinéa 6(4)c) traite de l'accès à l'information. Le projet de loi exige donc que les codes portant sur le gouvernement des bandes comprennent des règles concernant l'accès à l'information.
L'adoption de lois concernant l'accès à l'information est laissée à la discrétion du conseil de bande s'il veut ajouter quelque chose de plus que ce que prévoit le code adopté par la communauté.
M. Maurice Vellacott: Croyez-vous donc que la protection offerte par le projet de loi est suffisante ou des remaniements pourraient-ils être nécessaires pour assurer la pleine protection des membres ordinaires de la bande?
M. Andrew Beynon: C'est à vous de décider à titre de membres de ce comité. J'essaie simplement de vous expliquer le fonctionnement technique du projet de loi; le projet de loi exige que les codes portant sur le gouvernement étudient la question de l'accès à l'information. Ce sera donc aux membres de déterminer s'ils sont satisfaits de la proposition faite par le conseil de bande sur les règles entourant le code.
º (1620)
M. Maurice Vellacott: Les bandes doivent l'étudier, mais rien ne les oblige à faire quoi que ce soit à cet égard. Je comprends toutefois ce que vous dites; elles doivent l'étudier.
M. Andrew Beynon: Dans sa forme actuelle, la disposition prévoit qu'il doit comporter des règles concernant l'accès à l'information qui relève de la bande, la protection des renseignements personnels qui en relèvent et le droit d'accès des individus aux renseignements qui les concernent.
M. Maurice Vellacott: La règle ne pourrait-il pas préciser tout simplement qu'il n'existe aucune règle, qu'il n'y a rien de spécifique à ce sujet?
M. Andrew Beynon: Je ne suis pas certain que dire une telle chose réglerait le problème. Si je devais conseiller un conseil de bande, je crois que, comme la plupart des avocats, je l'inviterais à inclure quelque chose à ce sujet. Je vous rappellerai toutefois que le commissaire à la protection de la vie privée, lorsqu'il a comparu devant ce comité, a parlé du fait qu'il y avait lieu de faire quelque chose concernant l'accès à l'information, mais l'article ne donne pas toute une série de détails, et c'est quelque chose que vous voudrez peut-être étudier.
M. Maurice Vellacott: Merci, Andrew.
Me reste-t-il du temps?
Le président: Quinze secondes tout au plus, nous allons passer quelqu'un d'autre.
M. Maurice Vellacott: J'y reviendrai plus tard. Je veux simplement que vous sachiez que je souhaite comprendre un peu mieux le processus d'application de code par défaut et comment nous allons rassurer la population à cet égard.
Merci.
Le président: Nous aurons d'autres tours de table.
Monsieur Loubier, cinq minutes.
[Français]
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Merci, monsieur le président.
Monsieur Johnson, j'aimerais bien comprendre le fond de votre pensée lorsque vous parlez du projet de loi et des possibilités qui sont offertes aux nations autochtones. Vous parlez du jugement Corbiere et d'autres jugements de la Cour suprême et en même temps, vous dites que vous avez donné des pouvoirs aux gouvernements autochtones, que vous allez leur donner tel pouvoir, etc. Vous ne leur donnez rien si vous êtes conforme à l'esprit et à la lettre des trois derniers jugements de la Cour suprême, qui disent tout simplement qu'on reconnaît notamment le droit inhérent des nations autochtones à l'autonomie gouvernementale, que ce droit ne doit pas être éteint avec quelque projet de loi ou quelque traité que ce soit, qu'il faut respecter les traités qui ont été signés et les traités par tradition orale aussi. Mais vous ne leur donnez rien.
La prochaine étape, après ces jugements de la Cour suprême, c'est de négocier d'égal à égal avec les nations autochtones pour définir ce que veut dire le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et déterminer comment traduire les traités qui expriment leurs droits, dont un des signataires est le gouvernement fédéral, depuis plusieurs décennies.
Alors, j'aimerais que vous m'expliquiez cette prédisposition d'esprit qui vous incite à dire que vous leur donnez des choses, alors que vous ne leur donnez rien. Ils ont ces droits-là, et il faut les définir avec eux.
La deuxième chose qui me fatigue, c'est lorsque vous dites qu'ils auront des pouvoirs législatifs, alors que lorsqu'on regarde les pouvoirs qu'on a encadrés dans ce projet de loi, il n'y a pas grand-chose de plus que ce qu'une municipalité peut avoir comme pouvoirs. Or, ou bien ce sont des nations, ou bien ce sont des entités administratives comme des municipalités.
[Traduction]
M. Warren Johnson: Vous soulevez un certain nombre de questions. Je vais tenter d'y répondre dans l'ordre.
En ce qui a trait à la première série de questions, nous ne prétendons pas accorder de nouveaux droits. Ces droits existent et sont protégés par la Constitution. En ce qui a trait aux négociations sur l'application de ces droits dont vous parlez, cela fait partie de la politique du gouvernement au sujet des droits inhérents à l'autonomie gouvernementale. Je crois d'ailleurs que 80 négociations différentes se déroulent à l'heure actuelle partout au pays au sujet de la mise en oeuvre des droits inhérents.
À mon avis, la question que l'on doit se poser et qui mérite plus d'attention, c'est qu'il existe une distinction entre cela et la situation des Premières nations qui ne disposent pas encore de l'autonomie gouvernementale et sont donc régies par la Loi sur les Indiens . Si elles ne sont pas autonomes, elles relèvent de la Loi sur les Indiens.
Dans les jugements auxquels vous faites référence, la Cour suprême a déclaré que la Constitution protège les droits ancestraux ou issus de traités, et le gouvernement fédéral a reconnu que le droit inhérent est un de ceux-là et qu'il est prêt à négocier avec les Premières nations la meilleure manière de l'appliquer.
En revanche, la Cour suprême a aussi déclaré que les communautés relevant de la Loi sur les Indiens sont... le terme «électeur» a été supprimé de la Loi sur les Indiens, et que sa décision avait des conséquences bien plus importantes que le Parlement allait devoir considérer.
En termes simples—je n'ai pas le chiffre exact—les tribunaux sont saisis d'un certain nombre d'affaires qui remettent en question d'autres articles de la Loi sur les Indiens pour les mêmes raisons. Si le Parlement ne modifie pas la loi actuelle sur les Indiens qui est toujours en vigueur jusqu'à ce que les Premières nations négocient des ententes d'autonomie gouvernementale, la Cour suprême devra effectuer ces changements tant que des communautés seront régies par cette loi.
D'un point de vue pragmatique, il nous faut des mesures législatives fonctionnelles pour les Premières nations qui n'ont pas encore une pleine autonomie gouvernementale, mais qui sont sur la voie de l'indépendance. Les deux types de communautés existent pour le moment, et je crois qu'il s'agit d'une tentative...
º (1625)
[Français]
M. Yvan Loubier: J'en avais une autre. Vous parlez de pouvoirs législatifs des premières nations, mais ce que je constate, c'est qu'elles n'ont pas plus de pouvoirs qu'une municipalité peut en avoir. Or, on parle d'un accord d'autonomie gouvernementale, on parle de nations et de leur droit de se gouverner. Est-ce que c'est là votre vision de l'autonomie gouvernementale des autochtones?
J'aimerais vous poser une deuxième question. On parle souvent de codes par défaut, mais jamais personne ne nous a présenté et déposé les codes par défaut sur la table. Est-ce que ce serait possible de les voir pour qu'on puisse les examiner? Je pense que les nations autochtones seraient curieuses de savoir ce qui leur pend au bout du nez si, au bout de deux ans, elles n'ont pas défini leurs propres codes. J'aimerais les voir. Je ne sais pas si mes collègues aimeraient les voir aussi mais moi, je suis curieux de nature.
Le président: Merci.
Il faudra peut-être que la réponse soit donnée au prochain tour, parce que le temps est écoulé.
[Traduction]
Monsieur Martin, cinq minutes.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que nos invités.
Je ne vous envie pas. Je crois que vous occupez sans doute l'un des postes les plus difficiles de hauts fonctionnaires de ce pays. Vous avez reçu le mandat d'élaborer et d'appliquer quelque chose dont personne ne veut, d'après ce que je peux voir.
Je vais développer davantage dans un instant, mais je tiens d'abord à dire publiquement que je ne suis absolument pas d'accord avec certains points de votre exposé concernant les consultations. Vous dites que la première phase de vos consultations, maintenant achevée, a représenté la plus vaste série de consultations jamais entreprise auprès des Premières nations. Vous dites même que 10 000 personnes ont exprimé leurs points de vue.
À notre avis, et c'est le bruit qui court, tout le processus de consultation a été un simulacre. Ce fut un échec lamentable. La grande participation de 10 000 personnes dont on s'enorgueillit comprend également les gens qui ont assisté à ces séances publiques pour parler de logement, d'éducation, d'eau potable ou de santé et qui n'avaient rien à dire au sujet des propositions, dont elles ne savaient rien. Je ne vois donc pas comment vous pouvez prétendre les avoir consultées.
Ce qui m'agace le plus dans votre exposé, c'est que vous prétendez que ce sont les plus vastes consultations jamais entreprises. La Commission royale sur les peuples autochtones a procédé à un travail préparatoire en 1991 qu'elle a appelé la première phase. Puis, en 1992 et 1993, elle a consulté 110 collectivités pendant 178 jours de séances au cours desquelles elle a entendu 2 067 témoins bien préparés et renseignés. La Commission n'a pas posé d'affiche sur un mur disant «Il y aura une réunion publique ce soir au sujet de la Loi sur les Indiens, venez-y en grand nombre.» Vous devez regarder la définition juridique d'une vaste consultation—plus d'un millier de mémoires, cinq ans de travail et un budget de 50 millions de dollars.
Je ne peux pas vous laisser dire publiquement que c'était la plus vaste consultation entreprise auprès des Premières nations. Je ne suis pas d'accord.
Je souhaite poser une question technique aux gens qui fournissent des renseignements techniques. Nous avons entendu dire qu'il en coûterait de 110 à 120 millions pour mettre ces mesures en oeuvre—je n'ai pas pris mon dossier avec moi. Je voudrais d'abord savoir si cela fera partie des services votés d'AINC?
Ensuite, nous avons entendu dire que cela serait largement insuffisant pour imposer des mesures à 633 Premières nations qui n'en veulent pas et qui s'y opposeront peut-être farouchement. Nous avons entendu dire qu'il en coûterait plus d'un milliard de dollars, que ce sera le registre des armes à feu prise 2. Il est tout à fait irréaliste de même penser imposer ces mesures à des collectivités qui n'en veulent rien pour 120 millions de dollars.
Avant que mon temps ne soit complètement écoulé, je voudrait que vous répondiez à mes questions. À votre avis, ce montant est-il suffisant? Fait-il partie des services votés? Et pourquoi n'y a-t-il pas de disposition de non-dérogation?
º (1630)
M. Warren Johnson: Je tenterai de répondre à vos deux premières questions et laisserai mon collègue se charger de la dernière.
Je ne crois pas que nous puissions défendre la première estimation de 110 millions de dollars. C'était la première estimation faite après la première version du projet de loi.
Étant donné que les Premières nations devraient adopter certaines mesures pour respecter les dispositions de ce projet de loi, nous nous sommes engagés à les consulter à ce sujet lors de la prochaine série de consultations afin d'être plus précis une fois que nous aurons la version finale du projet de loi.
Ces 110 millions étaient donc la première estimation qui ne visait qu'à garantir la prise en considération de ces coûts dans les services votés parce que c'est à ce poste de notre budget qu'ils seraient inscrits.
Je crois que cela répond à vos deux premières questions.
Quant à la question sur la disposition de non-dérogation, je laisserai mon collègue M. Beynon y répondre.
M. Andrew Beynon: En ce qui a trait à la disposition sur la non-dérogation, on me dit que des ministres entreprennent une étude sur l'approche à adopter à cet égard de façon générale. Il n'y a pas de disposition précise sur la non-dérogation dans ce projet de loi, en raison de l'étude en cours, d'après ce que je comprends.
Le président: Monsieur Reed, vous avez cinq minutes...
M. Warren Johnson: Pardon, puis-je ajouter une chose pour répondre à la première partie?
C'est une des raisons pour lesquelles nous voulons entreprendre nos projets pilotes avec les Premières nations au sujet de la mise en oeuvre du projet de loi C-7 au plus vite comme je l'ai dit dans mes remarques liminaires. Ces projets pilotes sont nécessaires pour revoir nos estimations et pour évaluer le temps et les efforts consacrés par quelques Premières nations qui examinent déjà la question.
Nous devrons réunir différentes sources d'information et entreprendre des consultations par la suite, une fois que le comité nous aura soumis ses recommandations finales sur le projet de loi.
Le président: Merci.
Monsieur Reed.
M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci.
À titre de nouveau membre de ce comité, j'apprécie votre présence et votre exposé.
Mes questions pourront vous paraître simples, mais je voudrais savoir si ces consultations comprendront deux ou trois phases? Beaucoup de gens ont-ils participé à la rédaction de ce projet de loi, comme le chef Jules qui a témoigné devant le comité?
Même près toutes ces consultations, il semble toujours y avoir deux camps diamétralement opposés: ou on est pour, ou on est contre. Peu de gens nous ont dit que bien qu'il n'est pas parfait, il pourrait être un point de départ.
Lorsque le chef Jules a témoigné devant nous, nous avons constaté qu'il avait de toute évidence joué un rôle très actif dans l'élaboration de ce projet de loi. Combien d'Autochtones y ont-ils participé directement?
M. Warren Johnson: Pour répondre à ces deux questions, monsieur le président, je pense que nous sommes enfin engagés dans la deuxième phase du processus de consultation tel qu'il a été décrit dans les communications. C'est pourquoi le projet de loi a été renvoyé au comité avant l'étape de la deuxième lecture, afin de permettre une discussion de fond sur le libellé.
À la première étape, nous avons tenu des discussions d'ordre général avec des représentants individuels des Premières nations. Honnêtement, la plupart des gens, quel que soit le groupe auquel ils appartiennent, ne connaissent pas toutes les lois et tous les règlements qui régissent leur vie. Plusieurs Autochtones ne connaissent pas la Loi sur les Indiens.
Ces personnes ne nous ont pas fourni de libellé précis ou de recommandations législatives détaillées. Je pense avoir dit, dans mon exposé préliminaire, qu'on nous a suggéré des concepts et on nous a dit dans quels domaines les citoyens voulaient obtenir plus de pouvoirs afin de pouvoir participer au gouvernement et ils nous ont dit quels genres de pouvoirs ces gouvernements devaient avoir.
Les résultats de la consultation ont été documentés et ont été rendus publics lorsque nous les avons déposés auprès du comité en février, lorsque nous avons fait notre première présentation. C'est à ce moment-là que nous les avons rendus disponibles.
Ce que je voulais dire, et qui a déjà été dit, c'est que bien d'autres questions ont été soulevées. Elles ont été documentées elles aussi. J'espère que les rapports qui ont été rendus publics étaient assez bien équilibrés. Du moins, nous n'avons pas entendu dire qu'ils ne reflétaient pas fidèlement ce que nous avons entendu.
Pour ce qui est de ceux qui ont participé, je ne peux pas parler pour le chef Jules. Mme Kustra pourrait peut-être vous en dire plus long.
Le Comité consultatif ministériel conjoint—dont les deux coprésidents ont déjà comparu devant ce comité—représentait diverses personnes, soit au niveau organisationnel ou régional, ou des coalitions de Premières nations. Les Autochtones de la Colombie-Britannique ont participé assez activement.
Personnellement, je ne sais pas quel rôle le chef Jules a joué dans ce processus, mais...
º (1635)
Le président: Je peux répondre à cette question. Le chef Jules a dit qu'il avait participé de très près à l'élaboration du projet de loi C-19, mais qu'il n'avait pas du tout participé au projet de loi C-7.
M. Warren Johnson: Je demanderais à Mme Kustra de répondre à cette partie de votre question.
Mme Brenda Kustra (conseillère exécutive, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien): Je pourrais peut-être apporter quelques précisions.
Le ministre a créé le Comité consultatif ministériel conjoint afin de fournir des conseils sur la structure et la teneur du projet de loi C-7. Lorsque le Comité a été créé, le ministre a invité les organismes autochtones nationaux à choisir des représentants qui seraient membres du Comité. Comme M. Johnson l'a dit, M. Aldridge et M. Bird ont coprésidé le Comité. Parmi les membres du Comité, il y avait des représentants du Congrès des peuples autochtones, de l'Association nationale des femmes autochtones, du ministère de la Justice ainsi que des membres des Premières nations qui ont une longue expérience de la gouvernance.
En outre, on a invité l'Assemblée des premières nations à participer aux travaux du groupe qui a été constitué pour examiner les conseils et la réflexion issue du processus de consultation populaire, mais aussi pour s'en inspirer et formuler des conseils précis à l'intention du ministre quant à la structure du projet de loi.
Ce sont là quelques renseignements additionnels sur la participation de certains organismes.
M. Julian Reed: C'est très utile. Merci.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
Monsieur Vellacott, nous aurons un autre tour de cinq minutes.
M. Maurice Vellacott: Merci à vous trois.
Comme je l'ai déjà mentionné, j'aimerais vous poser une question sur les codes qui s'appliqueront par défaut afin de comprendre le processus. Je crois savoir qu'il doit y avoir au préalable un processus de consultation. Premièrement, est-ce exact—je ne voudrais pas que nous nous attardions trop longtemps sur ce point—puis j'aimerais faire quelques suggestions. Mais ai-je raison de croire qu'il y aura un processus de consultation plus tard?
M. Warren Johnson: Oui, je pense que c'est plus qu'une perception; c'est un engagement que le ministre a pris dès le premier jour. C'est en fait la troisième phase du processus, pour répondre à la question précédente.
J'aimerais préciser quelques points, dont certains ont été soulevés dans notre exposé—les codes qui s'appliqueront par défaut seront prescrits dans la réglementation et devront répondre exactement aux mêmes conditions que les codes qui seront élaborés par les bandes. En d'autres mots, les dispositions minimales—comme nous le disions tout à l'heure—qui devront se retrouver dans les codes devront également se retrouver dans les règlements. Ainsi, les règlements ou codes par défaut et les codes que pourront rédiger les bandes si elles le souhaitent devront respecter ces conditions minimales.
Lorsque nous aurons en main le libellé définitif du projet de loi et les recommandations du comité, nous nous engageons à le rédiger de concert avec les Premières nations.
M. Maurice Vellacott: Très bien.
Permettez-moi de vous présenter un scénario qui a été évoqué par d'autres. Si, pour diverses raisons, mais peut-être tout simplement parce qu'ils rejettent le projet de loi C-7, les Autochtones boycottent ces «consultations» futures—c'est possible, du moins concevable—serait-il utile de prévoir que ces codes par défaut soient renvoyés à notre comité puisque les Autochtones devront tout de même se soumettre à ces règles, à ce régime qui leur sera en quelque sorte imposé? Peut-être qu'alors certains se manifesteront et diront nous serions mieux de participer et d'essayer d'arranger des choses si possible. Est-ce qu'il serait utile que ces codes soient renvoyés à notre comité?
C'est une suggestion que je fais, pour voir ce que vous en pensez, afin d'éviter de vous donner carte blanche au cas où le processus ferait l'objet d'un boycott. Je me demande si notre comité pourrait alors donner une deuxième chance à ces personnes de se faire entendre si elles décident, sur le tard, qu'elles doivent participer afin d'atténuer les choses puisqu'elles devront se soumettre à ces codes par défaut.
Comprenez-vous ma question?
º (1640)
M. Warren Johnson: Oui, je comprends la question, mais c'est un peu difficile d'y répondre, car elle porte un peu sur les mécanismes.
Je crois savoir qu'il y a normalement un processus législatif et que les exigences et les règlements sont passés après l'adoption de la loi. Les ministères intéressés tiennent alors des consultations afin d'élaborer les règlements et de les modifier de temps à autres.
Le processus comporte deux phases, car après leur rédaction, les règlements sont publiés dans la Gazette du Canada afin que les intéressés puissent les examiner.
M. Maurice Vellacott: Je comprends, mais je ne suis pas sûr s'il y a une règle qui empêche qu'un comité parlementaire examine les règlements et participe à ce processus.
Je ne sais pas, à moins qu'il y ait une raison d'ordre technique; peut-être qu'il y en a. Je suggère une méthode légèrement différente, et je pense que cela fait certainement partie du mandat du comité d'examiner et d'approuver ces règlements.
Le président: Monsieur Vellacott, il existe un précédent. Le Comité de l'immigration vient d'entreprendre un examen semblable...
M. Maurice Vellacott: Eh bien, voilà. Formidable.
Cela étant, peut-être que cela ne se fait pas couramment, mais comme le président vient de nous le dire, cela semble être possible.
Alors, c'est ce que je suggère, afin de rassurer les intéressés et de leur donner une deuxième chance d'intervenir.
Le président: Très bien.
Monsieur Binet, vous avez cinq minutes.
[Français]
M. Gérard Binet (Frontenac—Mégantic, Lib.): Merci, monsieur le président.
Bonjour à vous tous. Je viens du milieu des affaires et ce que j'ai trouvé le plus difficile, lorsque j'ai débuté en affaires, c'était de voir la quantité de papiers qu'il fallait compléter. Au début, pour éviter des frais, on les complète soi-même, mais après avoir passé plusieurs heures dans les papiers, on décide d'aller voir quelqu'un de compétent.
Dans nos régions, nous avons la chance d'avoir des bureaux qui travaillent seulement temporairement pour plusieurs compagnies, et nous nous servons d'eux pour compléter nos papiers. Mais sur les 600 communautés, il y en a qui ne sont vraiment pas populeuses. La vérificatrice générale, dans son rapport de décembre 2002, a souligné l'importance du fardeau que cela imposait aux collectivités des premières nations. Lors de sa comparution devant le comité le 28 janvier dernier, elle a ajouté que le projet de loi C-7 augmente les exigences imposées aux conseils de bande en matière de rapports à leurs membres, mais ne change pas les exigences en matière de rapports dans les accords de financement. Bon nombre des dispositions qui touchent les accords de financement ont été intégrées au projet de loi et auront donc force de loi.
Je vais vous poser mes deux questions tout de suite. Est-ce qu'il y a un effet sur le projet de loi C-7? Je voudrais aussi connaître votre réaction sur la déclaration de la vérificatrice générale.
Merci.
[Traduction]
M. Warren Johnson: Je pense que c'est plutôt la question contraire qui se pose. C'est-à-dire que les exigences en matière de rapports, mentionnées par la vérificatrice générale, concernent diverses modalités de programme et de financement que les Premières nations ont établies avec les ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux. C'est de là que viennent ces exigences en matière de rapports.
On a dit que s'il était possible de préciser un certain nombre de questions relatives aux pratiques financières, au processus budgétaire, etc., au sujet desquelles les Premières nations doivent rendre des comptes à leurs propres collectivités, cela pourrait soulager ceux qui ont des ententes financières avec les Premières nations de leur responsabilité de préparer leurs propres rapports sur ces mêmes ententes—c'est l'une des questions dont il faudra discuter sérieusement avec les Premières nations lors de la prochaine étape. Ces ententes financières font déjà l'objet de rapports et le public a accès aux rapports de vérification, etc.
Il est donc possible de simplifier ces exigences. Je pense que la vérificatrice générale disait que ces rapports font double emploi avec ceux que les Premières nations sont tenues de présenter. Mais une part du problème tient au fait que certaines Premières nations ne répondent pas à ces exigences. Il y a peut-être des Premières nations qui s'occupent de ces tâches volontairement, mais je pense qu'il n'y a qu'une seule disposition de la Loi sur les Indiens qui traite du financement.
La création de codes financiers et d'information, la disponibilité de l'information, les rapports annuels, les relevés de dépenses, etc., aideraient à soulager considérablement le fardeau et permettraient de simplifier ces modalités. Il est clair que cela suscite beaucoup d'intérêt. Nous avons déjà abordé avec l'APN et d'autres la manière de modifier ces exigences lors de discussions sur les questions financières.
Je suppose qu'en bout de ligne, nous déterminerons le moyen de consolider ces exigences afin d'éviter les recoupements dans les rapports; cela s'appliquerait davantage aux ententes financières qu'aux ententes de transfert de programme. Le projet de loi C-7 n'aura pas d'incidence directe sur ces questions qui relèvent des ententes financières et non pas des dispositions législatives, mais nous espérons qu'il permettra de simplifier les ententes qui sont en train d'être élaborées à l'heure actuelle par divers groupes, et qu'il aboutira à une discussion à long terme sur le moyen de rendre ces ententes financières plus efficaces.
J'espère avoir répondu à votre question.
º (1645)
[Français]
M. Gérard Binet: Est-ce assez pour satisfaire la vérificatrice générale du Canada?
[Traduction]
M. Warren Johnson: Ce serait assez pour satisfaire la vérificatrice générale qui a fait des observations bien senties à cet égard, mais ceux d'entre nous qui ont des rapports importants avec les représentants des Premières nations partagent leur sentiment de frustration face à la quantité de travail et à la paperasserie qui leur est imposée. Honnêtement, un certain nombre de dirigeants des Premières nations m'ont dit de façon très éloquente, lors des séances de consultations auxquelles j'ai participé, que si le projet de loi C-7 ne permettait pas de réaliser des progrès à long terme à cet égard, nous aurions raté une occasion en or.
Le président: Monsieur Loubier, vous disposez de sept minutes.
[Français]
M. Yvan Loubier: Merci, monsieur le président.
Monsieur Johnson, je suis toujours étonné des réponses que vous m'avez données tout à l'heure et que vous avez données à mon collègue de l'Alliance aussi concernant les codes par défaut. Étant donné que c'est une pièce maîtresse du projet de loi C-7, on se serait attendu à ce que, en même temps qu'on étudie le projet de loi C-7 et en même temps qu'on informe la population sur les délais prescrits pour l'établissement de codes par les nations autochtones, on sache aussi ce qui pourrait s'appliquer par défaut. Moi, j'étais sûr qu'il y avait déjà, sur votre table de travail, certains scénarios définis sur les codes par défaut. Là, vous nous apprenez qu'il n'y en a aucun.
Deuxièmement, je vous ai posé la question tout à l'heure: quels sont les pouvoirs autres que les pouvoirs municipaux qu'on a prévus pour les nations autochtones? Parce qu'en matière d'autonomie gouvernementale et en matière législative, je crois que les nations autochtones, en tant que nations, comme la nation canadienne, comme la nation québécoise, s'attendent à davantage que cela en termes de pouvoirs définis par la Cour suprême, car elles ont ce pouvoir-là, le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et à ce qui découle des traités.
Je vous poserai une dernière question par rapport à ça: pourquoi ne pas avoir accéléré les négociations avec les premières nations, qui n'ont pas encore d'accord d'autonomie gouvernementale, plutôt que de présenter le projet de loi C-7? Pourquoi n'avons-nous pas employé les ressources justement pour définir ensemble, de nation à nation, ce qu'est l'autonomie gouvernementale, quels sont les pouvoirs que les premières nations ont déjà et qu'elles voudraient exercer tout en respectant le droit coutumier, par exemple? Il me semble que ça aurait été plus simple.
[Traduction]
M. Warren Johnson: En réponse à votre dernière question, cela nous ramène, je pense, aux commentaires que nous avons faits pendant l'introduction. Il ne s'agit pas, ni pour le ministre ni pour quiconque au ministère, d'un choix à faire. L'amélioration du processus de négociations pour obtenir des résultats plus efficaces touchant au droit inhérent est une question que traitent en même temps le gouvernement fédéral et des groupes comme le bureau de négociations des traités de la Colombie-Britannique qui a formulé diverses recommandations à cet égard. Cela se fait indépendamment du processus du projet de loi C-7. Je pense que notre ministre a constamment réitéré l'engagement du gouvernement fédéral à l'égard de cette priorité.
º (1650)
[Français]
M. Yvan Loubier: Juste une seconde, monsieur Johnson. Quelle est la logique de vouloir imposer un projet de loi comme le C-7 et de drainer des ressources extraordinaires pour réaliser les exigences du projet de loi C-7 auprès des nations autochtones qui n'en veulent pas? Quelle est la logique d'imposer un accord comme celui-là plutôt que d'utiliser toutes ces ressources, le temps, l'argent et les énergies, pour favoriser une plus grande négociation des accords d'autonomie gouvernementale? Expliquez-moi la logique.
[Traduction]
M. Warren Johnson: Eh bien, on pourrait envisager cela sous différents angles; si nous ne le faisons pas, alors la Cour suprême s'en chargera. C'est donc en réaction à la Cour suprême, et pour assurer entre-temps aux Premières nations une situation stable et pragmatique pendant que le travail se poursuit.
Deuxièmement, une grande partie de ce qu'il y a ici est loin de représenter l'autonomie gouvernementale et ne prétend pas le faire, comme je l'ai déjà dit. Je pense que c'est la réponse à votre deuxième question. Mais c'est en grande partie un travail que les Premières nations devront de toute façon faire pour atteindre l'autonomie gouvernementale en élaborant des constitutions, des codes et des procédures internes.
Pour répondre à l'autre question que vous avez posée, oui, le projet de loi C-7 est loin de répondre aux attentes des Premières nations et est très loin de ce que nous négocions en matière de droit inhérent et d'autonomie gouvernementale. C'est parce qu'il ne s'agit pas des négociations sur le droit inhérent et l'autonomie gouvernementale.
Il y a divers aspects que je pourrais signaler, mais vu le moment—et je m'en remettrai à la décision du président à ce sujet—où cette question échappe à l'autorité municipale, c'est bien en deça des pouvoirs qui sont négociés dans les ententes d'autonomie gouvernementale ou qui existent, par exemple, dans l'accord Nisga'a. Mais c'est parce qu'on ne prétend pas du tout le faire ici. Si nous l'avions tenté, nous aurions suscité beaucoup d'opposition, car comme le projet de loi l'énonce clairement, la présente loi n'a pas pour but d'anticiper l'issue des négociations.
Le président: Madame Karetak-Lindell.
Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Merci, monsieur le président.
Nous avons entendu des témoins nous dire à maintes reprises qu'ils sont très préoccupés par l'absence de disposition de non-dérogation et j'aimerais que vous nous en parliez. Beaucoup de témoins nous ont aussi parlé de l'échéancier, qu'ils estimaient trop court.
Pour ce qui est de témoignages faits par des femmes, notamment les représentantes de NAWA, elles n'étaient pas du tout satisfaites des pouvoirs de mise en application. Elles estimaient qu'ils dépassaient ceux dont disposaient actuellement les autorités. On nous a aussi dit à maintes reprises qu'elles estimaient ne pas avoir l'assurance de disposer des ressources voulues pour mettre en oeuvre bon nombre de ces nouvelles pratiques qui verraient le jour avec cette mesure législative.
M. Warren Johnson: Je répondrai à quatre des questions, et demanderai à M. Beynon de répondre à celle qui a trait à la non-dérogation.
Pour ce qui est de l'application, comme nous l'avons dit plus tôt, cette question s'est posée dans différents secteurs. Divers témoins experts ont comparu devant le comité et ont dit qu'en tâchant de rassembler diverses fonctions, qui sont des fonctions spécialisées d'application, d'inspection, de perquisition et de saisie d'autres organismes gouvernementaux, dans les mains d'un seul agent, si l'on veut, ou d'un groupe d'agents d'application comme c'est dit ici, le projet de loi est peut-être allé trop loin et pourrait peut-être soulever certaines importantes contestations fondées sur la charte.
C'est un domaine important, comme nous vous le disions, que doit examiner le comité. Naturellement, certains aspects doivent être examinés à cet égard. Par exemple, faudrait-il être plus spécifique pour écarter ces risques? Devrait-il y avoir séparation? Il y a au fond deux fonctions ici. La fonction normale d'inspection des lois des Premières nations dans ce domaine qui ont trait au zonage ou tout ce qui peut avoir trait aux questions d'intérêt local.
Puis il y a une fonction d'inspection, qui diffère assez de la collecte d'éléments de preuve en droit jurisprudentiel, où il peut s'agir de questions de mandat, de l'opportunité ou non de l'intervention policière, par exemple. Il se peut qu'en ayant essayé de fusionner toutes ces fonctions, les rédacteurs du projet de loi C-7 soient allés trop loin et n'aient pas suffisamment tenu compte de ces distinctions. C'est pourquoi, il me semble, il importe qu'on examine cet aspect.
Pour ce qui est de l'échéancier, on comprend les préoccupations qu'ont les gens, mais comme je viens de le dire, quand nous en aurons terminé, sept ans se seront écoulés. Le problème, c'est que je ne sais pas à quel point les tribunaux se montreront patients. Bien franchement, nous le sommes, étant donné que le gouvernement fédéral doit comparaître quand une mesure législative est contestée, qu'il est question d'activités visant à moderniser la législation comme le projet de loi C-7 ainsi que d'autres activités qui se poursuivent, de l'examen de ces dernières par le Parlement, comme partie défenderesse dans des affaires en instance. Jusqu'à quel point les tribunaux seront-ils patients et combien de temps tout cela peut-il prendre sont d'importantes questions.
Nous en sommes presque à la moitié maintenant. Voilà environ quatre ans que nous y travaillons et nous en avons encore pour trois ans. Ceux qui avaient peut-être d'autres priorités et ne souhaitaient pas négocier leur participation à un moment ou l'autre en ont encore la possibilité. Une invitation a été lancée. Au moins six ou sept lettres du ministre ont été adressées à chacun des chefs et des conseils de tout le pays à chaque étape et où on leur disait: «Voici où nous en sommes, cela vous intéresse-t-il?», et on leur disait avec qui communiquer et tout ce qui s'ensuit.
Nous allons poursuivre cet effort jusqu'au bout. J'ai exposé les étapes que nous devrons franchir même selon la direction actuelle, avec au moins trois ans de travail encore à effectuer.
Pour ce qui est des ressources, un engagement a été pris dès le début. La preuve en est que le ministre a commencé il y a environ deux ans à accorder une augmentation annuelle de 5 p. 100 au financement du soutien des bandes, celui-ci étant le programme du ministère des Affaires indiennes et du Développement du Nord qui assure le financement visant à assurer l'efficacité de la gouvernance des collectivités des Premières nations, qui se situe annuellement aux environs de 300 millions de dollars. C'est pourquoi le ministre, même s'il ne s'agissait là que d'une estimation préalable qui devait être précisée avec les Premières nations à la ronde de consultations suivante, a parlé publiquement de 110 millions de dollars pour que les gens sachent que nous prenions la question au sérieux.
Nous prévoyions dès le départ un montant important. Nous devrons les rencontrer et discuter avec eux... jusqu'à ce que nous arrivions à l'étape suivante et nous y mettions, faisions ce travail, examinions certains des projets pilotes en cours, et discutions sérieusement avec ceux avec qui nous devrions en parler.
º (1655)
Le président: Nous vous demanderons de revenir nous parler de non-dérogation.
Monsieur Martin, vous avez cinq minutes.
M. Pat Martin: Merci, monsieur le président.
Monsieur Johnson, j'ai remarqué qu'à deux reprises dans votre rapport vous dites que la Loi sur les Indiens repose sur des principes coloniaux dépassés. Eh bien, les gens avec qui je parle croient que tout ce processus du projet de loi C-7 repose sur des principes coloniaux dépassés et qu'on impose aux gens quelque chose dont ils ne veulent pas. En fait, aujourd'hui j'ai rencontré les représentants de la Première nation crie de Samson à Hobbema, et ils ont dit entre autres choses qu'on sentait dans tout le projet de loi C-7 cette mentalité d'agent des sauvages, et qu'on y trouvait des relents du livre blanc de 1969.
Il s'agit du remaniement le plus complet de la Loi sur les Indiens—qui, nous le reconnaissons tous, est un document fondamentalement mauvais, qu'il faudrait un jour abolir, et je sais que c'est l'objectif—depuis au moins 50 ans. C'est le plus important remaniement de la Loi sur les Indiens, et ce qu'on me dit redouter, c'est qu'on est en train de rater le coche. On passe à côté de toutes les choses importantes dont il faut traiter. On s'occupe de rafistolage administratif, et on le fait de telle sorte qu'on parvient à offenser tout un chacun. On fait reculer les relations entre le gouvernement fédéral et les Premières nations 50 ans en arrière en procédant de cette façon.
Dites-moi, de qui vient cette idée? Je sais que ce n'était pas l'idée de hauts fonctionnaires parce que c'est ce que nous avons su, qu'ils n'étaient pas enthousiasmés de se lancer là-dedans quand il y avait tant d'autres priorités. Je sais que l'idée n'est pas venue des représentants légitimement élus des peuples autochtones parce qu'ils boycottent ce processus. Tout ce qu'on peut faire c'est de créer de nouvelles associations de peuples autochtones pour participer, comme l'association NAWA.
Alors pourquoi gaspiller des milliards de dollars à essayer d'imposer quelque chose dont aucune des 633 Premières nations ne veut? Pour quelle raison? À votre avis, qui veut qu'on fasse cela?
» (1700)
M. Warren Johnson: Je dirais simplement que c'est la Cour suprême, le gouvernement du Canada, et tous les gens qui ont participé jusqu'à maintenant aux consultations.
M. Pat Martin: Tous ceux qui ont participé aux consultations appuyaient d'emblée les détails techniques du projet de loi C-7? À ce que j'ai su, beaucoup d'entre eux sont venus parler d'eau potable, de plomberie, de soins de santé et d'éducation, et non pas de la façon dont ils s'y prennent pour tenir leur livre, rendre des comptes ou élire leur chef et leur conseil.
Mme Brenda Kustra: Je pense qu'il faut ici apporter une précision importante. Quand nous sommes allés consulter les Premières nations d'un bout à l'autre du pays pour trouver des idées pour rédiger le projet de loi C-7, ce dernier n'existait pas encore. Nous n'avions pas de texte législatif quand nous avons entamé les consultations. Nous sommes allés parler aux gens des types d'outils modernes de gouvernance dont ils avaient besoin dans leurs collectivités, des types de systèmes de responsabilisation qu'ils souhaitaient avoir en place, et de certaines des difficultés qui se posaient en matière de sélection des dirigeants et d'administration de leur gouvernement. Ce que nous avons entendu constitue la base du travail qui a abouti à la rédaction du projet de loi C-7.
M. Pat Martin: Alors vous avez arrêté quelqu'un dans la rue, vous avez passé un micro devant cette personne et vous lui avez demandé: Qu'est-ce qui ne pas dans la Loi sur les Indiens? Ce sont-là tous les préparatifs que les intéressés ont pu faire, parce qu'il n'y avait pas de financement pour les aider à se préparer à présenter leurs points de vue. Vous avez reçu 5 000 $ pour que le ministère puisse venir vendre sa salade dans votre collectivité, mais on n'a rien eu du tout pour préparer un mémoire, alors que nous nous apprêtons à apporter à la Loi sur les Indiens des changements extrêmement techniques.
Je ne comprends pas.
Le président: Monsieur Martin, je veux bien qu'on étoffe les questions, mais nous sommes saisis d'un projet de loi. Nous pourrions passer les sept prochaines semaines qui nous restent à critiquer le processus et à y revenir sans cesse, mais nous avons un projet de loi à examiner. Je veux bien que vous ayez dit cela, mais j'espère que vous allez revenir au projet de loi. Les représentants du ministère sont ici pour ça.
M. Pat Martin: À quoi voulez-vous en venir? Que voulez-vous que je fasse d'autre?
Le président: J'aimerais que vous parliez du projet de loi C-7 de temps à autre.
M. Pat Martin: Je parle du projet de loi C-7. C'est ce qu'il y a de plus important à son sujet, soit que personne au Canada à ma connaissance ni personne qui se présente à mon bureau ne semble en vouloir sauf...
Le président: La Chambre nous l'a renvoyé de toute façon, et j'ai un travail à faire.
M. Pat Martin: D'accord.
Nous allions parler un peu plus de la disposition de non-dérogation. N'est-il pas raisonnable que ceux qui s'opposent au projet de loi C-7 craignent que leurs droits inhérents puissent être réduits ou faire l'objet d'une dérogation en raison de ce projet de loi si ce dernier ne contient pas de disposition ayant l'effet contraire?
M. Andrew Beynon: Je pourrais tâcher de répondre à ces deux questions. D'abord, je dirais à l'appui de ce qu'a dit Mme Karetak-Lindell que divers témoins ont laissé entendre qu'ils avaient des préoccupations au sujet d'une clause de non-dérogation.
Je reviens donc à ce que je disais au début. Le gouvernement examine, si je comprends bien, quelle devrait être l'approche globale à prendre face à la question de la non-dérogation.
Je peux apporter certains éclaircissements techniques quant à la façon dont ce projet de loi fonctionnerait en l'absence de clause de non-dérogation; autrement dit, comme les choses se passent maintenant. Il serait vraisemblablement interprété de la même façon qu'un bon nombre d'autres lois fédérales qui n'en contiennent pas. Je pense qu'il est important—
M. Pat Martin: Parlez-vous des lois fédérales ayant trait à la Loi sur les Indiens?
M. Andrew Beynon: Non. Je parle généralement des lois fédérales qui ne contiennent pas de clause de non-dérogation.
La Constitution même contient une mesure de protection des droits ancestraux et issus de traités. C'est ce que fait l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
» (1705)
M. Pat Martin: Dans ce cas, est-ce que la non-dérogation est censée faire partie de toute mesure législative en raison de l'article 35?
M. Andrew Beynon: Comme il fait partie de la Constitution, l'article 35 fait partie du droit suprême du Canada et sert donc à l'interprétation de toutes les lois fédérales. Toute loi fédérale est assujettie à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Cela veut dire que tous les droits ancestraux et issus de traités «sont reconnus et confirmés», selon le libellé de l'article 35.
Quand les tribunaux examinent un texte législatif fédéral, si une Première nation soutient avoir un droit ancestral et issu de traité qui à son avis lui permet de faire quelque chose de différent de ce que dispose la loi fédérale, la première question que le tribunal doit examiner c'est de savoir si c'est effectivement le cas ou non. D'abord, existe-t-il un droit ancestral et issu de traité? Et le fardeau de la preuve incombe à la Première nation.
La deuxième question qui se pose est celle-ci: la loi prévoit-elle autre chose que ce que l'exercice du droit ancestral et issu de traité permettrait? À ce propos, si le tribunal décide que le libellé de la loi irait à l'encontre d'un droit ancestral ou issu de traité, alors il incombe au gouvernement d'établir quel est l'objectif législatif substantiel et impérieux qui sous-tend cette disposition particulière.
Troisièmement, il incombe aussi au gouvernement de prouver qu'il y a lieu d'empiéter ainsi sur ces droits.
Or, parmi les juristes il y en a qui...
M. Pat Martin: Une clause de non-dérogation sert souvent à apporter des précisions. En cas d'ambiguïté ou de mésentente ou d'impasse, on peut se reporter à la mention où il est dit «Pour plus de précision, rien dans le présent document ne doit être interprété comme annulant ou primant sur... etc.», n'est-ce pas?
Le président: Le débat pourra reprendre plus tard aujourd'hui ou à un autre moment. Vous avez épuisé vos huit minutes.
La parole est à Mme Neville pour cinq minutes.
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.
J'espère que vous me donnerez un peu de latitude et l'autorisation de répondre à mon collègue du Manitoba qui a dit que personne n'aimait ce projet de loi. J'ai parlé à beaucoup de membres de ma communauté, et il y en a beaucoup qui effectivement aiment ce projet de loi. Malheureusement, à cause du climat politique entourant ce projet de loi dans de nombreux milieux, on craint de se prononcer publiquement en faveur de ces aspects du projet de loi. Il est malheureux qu'une si grande partie en soit éclipsée par l'aspect politique.
Je voulais d'abord vous demander de nous expliquer l'alinéa 18b) et le paragraphe 18(2).
Mais j'aimerais en savoir plus long sur une observation que vous avez faite, je crois, monsieur Johnson, en réponse à quelqu'un qui disait que ce projet de loi allait au-delà de l'autorité municipale dans bien des cas. J'aimerais savoir où cela se trouve.
M. Warren Johnson: Pour répondre à votre première question, les pouvoirs législatifs figurent à trois articles de la LGPN. L'article 16 est celui qui s'apparente le plus aux pouvoirs législatifs des municipalités. C'est là qu'on prévoit notamment le pouvoir de légiférer en matière de location à des fins d'habitation, ce qui comprend l'expulsion des locataires. C'est un pouvoir provincial et non pas municipal.
Il y a bien d'autres pouvoirs qui outrepassent les compétences des municipalités. Ainsi, les municipalités ne disposent d'aucun pouvoir semblable à ceux prévus à l'article 17. Ces pouvoirs sont uniques puisqu'ils permettent aux bandes de prendre des textes législatifs pour les besoins de la bande. C'est là un pouvoir unique qui n'a aucun équivalent au niveau provincial.
L'article 17 traite notamment de la protection et de la conservation des ressources naturelles. Dans la réserve, autant les terres que les ressources appartiennent à la collectivité. Ce sont là des pouvoirs qui n'ont aucun équivalent, sauf peut-être le droit qu'ont les provinces de gérer les terres de la Couronne ou les terres fédérales dans le Nord.
Ce sont donc là des pouvoirs législatifs dont ont besoin les Premières nations pour la gestion de leurs ressources communales selon les souhaits de la collectivité. L'alinéa 17(1)c) en est un bon exemple puisqu'il porte sur «la préservation de la culture et de la langue de la bande». La culture et la langue ne sont pas de compétence municipale. Je crois que vous constaterez qu'il en va de même pour tous les autres domaines énumérés à l'article 17.
En ce qui a trait à l'article 18, j'ignore comment on pourrait caractériser ces pouvoirs. Il s'agit de pouvoirs dont disposent à peu près tous les gouvernements pour assurer leur bon fonctionnement, notamment le pouvoir de légiférer et le pouvoir de déléguer. La situation des conseils de bande dans les réserves est unique puisqu'ils disposent de droits ancestraux et de droits inhérents liés à la nature communale des terres et des ressources.
Vous trouvez donc toutes sortes de pouvoirs législatifs qui sont actuellement exercés par différents paliers de gouvernement, toutefois pas dans la mesure où les Premières nations les exerceront à l'issue des négociations qui se tiendront conformément à leurs droits inhérents.
» (1710)
Mme Anita Neville: Le paragraphe 18(2) dispose que les conseils de plusieurs bandes peuvent prendre des textes législatifs prévoyant l'établissement conjoint d'un organisme «pour l'application de l'alinéa 1b)». D'après les consultations que vous avez menées dans les collectivités autochtones, est-ce une source de préoccupation? Est-ce là une mesure qu'on souhaite?
Mme Brenda Kustra: Pendant les consultations, bon nombre d'intervenants ont indiqué que les petites communautés, plus particulièrement, n'ont pas toujours la capacité ou le souhait de se doter de fonctions gouvernementales en leur sein même. Elles seraient donc tout à fait disposées à envisager l'octroi de certains de leurs pouvoirs à un organisme qui les exercerait en leur nom.
Pensons notamment au droit de recours. Une petite collectivité de 50 ou 60 personnes ne souhaitera pas nécessairement se doter d'un organisme d'appel; cela pourrait être difficile pour elle. Elle voudra peut-être déléguer ce pouvoir de création d'un organisme compétent à un conseil tribal ou s'unir à une autre collectivité pour qu'elles puissent ensemble établir un organe commun. Voilà un exemple bien précis.
Le président: Merci.
Monsieur Vellacott, vous avez quatre minutes.
M. Maurice Vellacott: Justement, à ce sujet, Brenda, il faut trouver le juste milieu. Il y a beaucoup de dédoublements et de chevauchements. S'il y a plus de 600 ombudsmans ou organismes de ce genre à l'échelle du pays, je ne suis pas sûr que ce soit viable ou même souhaitable.
Est-il vraiment avantageux pour une petite collectivité d'avoir son propre ombudsman?
Je sais qu'un article le prévoit, mais il serait peut-être préférable de préciser le libellé de façon à ce que ce soit un conseil tribal ou un organisme régional plus important qui exerce cette fonction.
Mme Brenda Kustra: Le libellé du projet de loi est tel que les collectivités et leurs dirigeants pourraient tenir compte de tous ces aspects au moment d'établir le fonctionnement de leur gouvernement et de ces différentes agences. Cela m'apparaît préférable à un mode de fonctionnement dicté par le gouvernement dans un projet de loi.
M. Maurice Vellacott: En l'occurrence, il me semble qu'on pourrait être un peu plus précis pour garantir la protection des libertés et droits individuels.
J'ai une question à vous poser. Le projet de loi ne précise pas quel tribunal entendra les appels, du moins, selon mon interprétation, de toute décision prise par cet «organisme impartial», mais il ne comporte pas non plus de disposition privative qui interdirait toute forme d'appel ou d'examen judiciaire. J'aimerais donc savoir à qui on en appellerait des décisions de ces organismes ou ombudsmans?
M. Andrew Beynon: Peut-être pourrais-je répondre à votre question. Vous avez raison de dire que le projet de loi ne prévoit aucune disposition privative, ni de réponse précise à cette question.
J'ai noté avec intérêt que, lors de sa comparution devant votre comité, Raymond Morris a indiqué qu'il serait probablement utile de donner une indication assez claire dans le projet de loi.
En l'absence d'une telle indication, on pourrait assister à toute une gamme d'avis juridiques divers, mais je dirais que, à tout le moins, cet organisme impartial serait probablement considéré comme un tribunal, une commission ou un conseil fédéral au sens de la Loi sur la Cour fédérale et, par conséquent, c'est à ce tribunal qu'il incomberait probablement d'examiner les décisions de l'organisme. Autrement dit, on pourrait demander à la Cour fédérale de déterminer si l'organisme impartial ou l'ombudsman a, par exemple, fait preuve de partialité ou n'a pas tenu compte de tous les documents. Certains éléments d'équité procédurale pourraient faire l'objet, fort probablement, d'un examen judiciaire par la Cour fédérale.
J'aimerais ajouter une chose. Le projet de loi contient une disposition indiquant que, si dans son code, la collectivité prévoit un droit d'appel et qu'elle a donc décidé que c'est ainsi que seraient tranchés les appels, c'est cette procédure-là qui prime. Les plaintes ne sont pas transmises à l'ombudsman ou à l'organisme impartial.
» (1715)
M. Maurice Vellacott: Oui, je suis d'accord. Je crois qu'il serait utile qu'un article précise quel organisme ou tribunal sera saisi des appels.
Du point de vue juridique, vous nous avez indiqué qui à votre avis entendrait ces appels, mais ne serait-il pas difficile pour les Autochtones de déterminer à qui s'adresser? Si le libellé est trop vague et ambigu, une disposition plus précise ne serait-elle pas utile?
M. Andrew Beynon: Je dirais que la plupart des juristes, à la lecture de ce projet de loi fédéral et compte tenu de la nature de cette activité particulière, abonderaient dans le même sens que moi. Mais, je répète, le texte ne le précise pas. Il vous incombe à vous, les membres du comité, de décider si ce devrait être plus clair.
Le président: Monsieur Godfrey, vous avez quatre minutes.
M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Bienvenue, et je m'excuse si je pose des questions qui compte tenu de cet étrange après-midi d'allées et venues, vous obligent par inadvertance à reprendre ce que vous avez déjà dit. Je suis sûr que le président me le signalera.
Mes questions concernent en fait des considérations sur le processus et sur les aspects juridiques.
La première question que je vous adresse, monsieur Beynon, porte sur le processus préalable de consultation avec le comité consultatif ministériel conjoint. Et j'ai l'impression, monsieur Beynon, que vous y étiez peut-être.
Il est intéressant de constater le temps que le CCMC a passé à examiner diverses options de non-application, jusqu'à sept options, et a fini par s'entendre sur l'option six.
Donc la première question que je vous poserai est la suivante: est-ce que l'on risque de perdre quelque chose si nous ajoutons une disposition, pour plus de certitude, qui correspond à l'option six, même si elle risque d'être superflue, si cela permettait de rassurer ceux qui prennent cette question au sérieux? Je sais que ce n'est peut-être pas une mesure très appropriée sur le plan juridique mais qui l'est sur le plan du processus.
Ma deuxième question porte sur une proposition pertinente faite par certains témoins. Je songe au chef Merasty du Grand conseil de Prince Albert, puis ce matin le chef des Kaska. Je crois que dans certains cas ils aimeraient avoir la possibilité de participer.
L'une des solutions qu'ils proposent est une disposition d'adhésion volontaire. La question que je vous pose est la suivante, et elle peut s'adresser à nouveau à M. Beynon: Une telle modification, une telle proposition répondrait-elle aux exigences dans l'arrêt Corbiere, ou n'a-t-elle aucun sens sur le plan juridique? Quelle est la situation à propos d'une disposition d'adhésion? La loi nous empêche-t-elle de prévoir une telle disposition?
Ce sont donc les deux questions que j'avais à poser.
M. Andrew Beynon: Je répondrai à la première.
Pour ce qui est de la non-application, je crois que vous avez lu le rapport du CCMC, ce sur quoi le CCMC a mis l'accent, quelle est l'intention et l'objectif d'une disposition de non-application? Vous avez demandé s'il faudrait inclure une telle disposition simplement par souci de réconfort parce que cela représente peut-être un geste de bonne volonté ou parce que certains pensent qu'elle pourrait être utile jusqu'à un certain point, mais aurait-elle une réelle incidence? Je crois...
M. John Godfrey: Ou aurait-elle une incidence négative?
M. Andrew Beynon: J'estime qu'il est très important que les membres du comité se penchent sur cette question. L'intention qui sous-tendrait l'élaboration d'une telle disposition est d'une grande importance. Si l'intention est d'assurer un certain réconfort, une certaine indication de l'importance de cette question, ou de sensibiliser d'autres Canadiens à propos des droits ancestraux et issus de traités, ces types de fonctions, il faudrait alors adopter une approche particulière pour ce qui est de l'élaboration de la disposition.
Mais je ferai une mise en garde—et je ne peux pas jouer le rôle de conseiller juridique auprès du comité—et c'est qu'en règle générale les tribunaux qui auront à examiner la loi plus tard ne seraient pas portés à considérer qu'il s'agit simplement de dispositions destinées à rassurer et qui n'ont aucune signification. En règle générale, les tribunaux détermineraient si ces dispositions ont des incidences concrètes sur le fonctionnement de la loi. C'est ce qu'envisage le rapport du CCMC.
En ce qui concerne la deuxième question que vous avez posée, à propos de la disposition d'adhésion, cela mérite peut-être une réponse un peu plus approfondie et un peu plus détaillée. Je dirais toutefois de façon générale que compte tenu des lacunes de la Loi sur les Indiens indiquées par M. Johnson, et qui font à l'heure actuelle l'objet de contestations devant les tribunaux, il est légalement possible de recourir à un mécanisme comme une disposition d'adhésion, et je pense que la plupart des avocats seraient du même avis, mais ceux qui refuseraient l'adhésion continueraient d'être assujettis aux anciennes dispositions de la Loi sur les Indiens, dispositions qui font l'objet de contestations devant la Cour suprême du Canada.
Donc ici encore il est possible de régler un problème en prévoyant une disposition d'adhésion, offrant la possibilité aux Premières nations d'opter pour cette solution si elles le veulent, mais cela ne permet pas de remédier aux lacunes de la Loi sur les Indiens qui doivent être éliminées si on veut réduire les risques.
Simplement sur cette question d'adhésion, je conviens que la loi n'est pas rédigée d'une façon qui s'y prête, mais en ce qui concerne l'idée de permettre aux collectivités de développer leurs propres codes au lieu d'être assujetties à un règlement par défaut, je n'essaie pas de dire que c'est la même chose qu'une disposition d'adhésion mais au moins cela permet aux collectivités de prendre des mesures différentes de ce que prévoirait le règlement par défaut.
» (1720)
[Français]
Le président: Monsieur Loubier, quatre minutes.
M. Yvan Loubier: Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir sur ce que M. Godfrey a dit. Est-ce que vous n'avez pas un peu peur en ajoutant une clause facultative? Le projet de loi n'est tellement pas populaire et ne correspond tellement pas aux besoins des nations autochtones que personne ne va se prévaloir des dispositions qui sont contenues dedans, premièrement.
Deuxièmement, j'aimerais reprendre là où M. Martin du NPD a laissé plus tôt. Il a demandé d'où venait la demande pour que ce projet de loi aille dans cette direction-là; les fonctionnaires étaient mal à l'aise, les nations autochtones n'en veulent pas. M. Johnson a répondu que la demande émanait de la Cour suprême. Je trouve que c'est très facile de répondre de cette façon. La Cour suprême a demandé plusieurs choses, mais elle n'a pas demandé de faire n'importe quoi.
La Cour suprême a dit tout d'abord que les autochtones avaient des droits, dont le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et les droits qui découlent des traités. Ça, c'est la première chose que la Cour suprême a dite dans ses récents jugements rendus à cet égard.
Elle a dit aussi que la meilleure voie était de négocier avec les nations autochtones la meilleure façon d'exercer les droits qu'elles ont, le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale et les droits découlant des traités.
Troisièmement, la Cour suprême a dit qu'il fallait arriver à des ententes dans l'honneur et le respect. Elle parlait d'harmonie, de paix et de relations constructives. Quand il n'y a pas d'harmonie ni de relations constructives, quand il n'y a pas de paix parce que vous venez de jeter de l'huile sur le feu dans les relations avec les autochtones, il me semble que cela ne répond vraiment pas à l'esprit et à la lettre de ce que la Cour suprême a demandé. Quand vous ne considérez pas non plus les nations autochtones d'égal à égal, vous passez à côté justement d'une règle fondamentale qui a été mise sur la table par la Cour suprême dans ses nombreux jugements.
Alors, comment prétendez-vous répondre à la Cour suprême à partir d'un projet de loi comme celui-là, alors que presque toutes les conditions qu'elle a mises sur la table ne sont pas respectées?
[Traduction]
M. Warren Johnson: Il semble s'agir de deux questions, l'une sur la disposition d'adhésion et l'autre sur la Cour suprême.
Il n'y aucun débat en ce qui concerne les questions étudiées par la Cour suprême concernant les droits ancestraux et issus de traités, et mon collège en a parlé relativement à l'article 35. Mais dans la décision que la Cour suprême a rendue dans l'arrêt Corbière, elle a effectivement indiqué que certaines dispositions de la Loi sur les Indiens, en particulier la définition d'électeurs, était anticonstitutionnelles, et a demandé au Parlement du Canada de procéder à une réforme législative dans les 18 mois. On a considéré que ce délai était trop court et nous sommes maintenant en train de nous occuper de cette question qui prendra probablement sept ans.
Il s'agit donc d'une question d'une plus grande portée que des questions d'élection en général, en fonction des discussions initiales que nous avons tenues avec l'ensemble des Premières nations au sujet de l'arrêt Corbiere et des discussions subséquentes que nous avons tenues avec des particuliers. Je crois que c'est également une question dont doit tenir compte en partie le comité lorsqu'il discute par exemple de la disposition d'adhésion.
La disposition d'adhésion représente effectivement le statu quo étant donné qu'un grand nombre, sinon l'ensemble, des dispositions importantes du projet de loi C-7 se trouvent maintenant dans la Loi sur les Indiens.
» (1725)
[Français]
M. Yvan Loubier: Oui, mais est-ce que vous vous rendez compte, monsieur Johnson, qu'en répondant de cette façon, vous mettez justement la table pour occuper la Cour suprême pendant les 100 prochaines années? Il va y avoir des contestations incroyables par rapport au projet de loi C-7, surtout si vous imposez aux nations autochtones des choses dont elles ne veulent pas, si vous refusez le droit coutumier et des pratiques ancestrales, et si vous leur imposez un système dont elles ne veulent pas. Ne pensez-vous pas que les nations autochtones vont se retrouver devant la Cour suprême pour contester cette approche aussi paternaliste que la Loi sur les Indiens, qui ne réglera absolument rien? Il me semble que c'est clair quand la très grande majorité des nations autochtones, les premières personnes concernées, disent non à votre approche. Il me semble que c'est clair. On ne se prépare pas à l'harmonie et à la deuxième phase, on se prépare à des contestations judiciaires supplémentaires. Il me semble qu'il y en a assez. On n'en a pas besoin d'autres.
[Traduction]
Le président: Merci.
Dernière intervention, monsieur Martin. Vous avez quatre minutes.
M. Pat Martin: Je vous remercie, monsieur le président. J'ai une question à poser au nom des représentants de la Première nation crie de Samson et Hobbema que j'ai rencontrés plus tôt aujourd'hui.
Un grand nombre de Premières nations ont indiqué qu'elles refusent qu'on leur impose le projet de loi C-7. Étant donné que la vérificatrice générale indique que les Premières nations font l'objet de vérification à outrance en ayant à produire 168 formulaires et documents par année, et que la plupart des bandes et conseils ont déjà de la difficulté à joindre les deux bouts et à répondre à leurs besoins fondamentaux, si elles ne s'y conforment pas, simplement parce qu'elles ne le veulent pas ou n'arrivent pas à se faire à ce changement fondamental, et que les codes par défaut entrent en vigueur, que se passera-t-il si elles ne se conforment à ces codes?
Quelle est l'autorité qui leur sera alors imposée—la gestion par des tiers? Si ce scénario devait se produire dans une collectivité ou plus qui ne peuvent pas ou ne veulent pas coopérer, même en ce qui concerne les codes par défaut, quelles en seraient à votre avis les conséquences?
M. Andrew Beynon: Je pourrais peut-être faire une proposition. Le projet de loi ne prévoit aucun recours particulier en cas de non-conformité au règlement ou à l'exigence concernant les codes.
M. Pat Martin: Qui alors en assurerait l'application?
M. Andrew Beynon: Les avocats peuvent peut-être diverger d'opinion à ce sujet mais je crois que les membres de la collectivité qui tiennent particulièrement à s'assurer qu'un code soit élaboré, que l'on respecte les exigences de la loi quant à la teneur d'un code, ou que l'on respecte le règlement par défaut, pourraient s'adresser aux tribunaux pour obtenir un recours, et...
M. Pat Martin: Et si personne ne le faisait? Le ministre pourrait-il alors justifier de leur imposer une gestion par des tiers?
M. Andrew Beynon: Un instant; j'aimerais revenir en arrière si vous me le permettez pour donner un éclaircissement.
Le projet de loi renferme aussi une disposition qui permet aux particuliers de recourir au mécanisme de redressement s'ils considèrent que le code n'est pas respecté et qu'ils aimeraient que l'on redresse la situation.
En ce qui concerne la situation concernant les ententes de financement et ainsi de suite, ce n'est pas à moi d'y répondre.
M. Warren Johnson: Si vous permettez, cette question est traitée de façon très pertinente à l'article 10 du projet de loi où on énumère tous les cas dans lesquels le ministre peut intervenir. On mentionne notamment la détérioration de la situation financière de la bande; le refus de mettre à la disposition du public les états financiers ou la récusation d'opinion. C'est ce que l'on trouve en effet aux alinéas 10(3)a), b), et c): le ministre peut donc intervenir pour apporter des mesures correctives dans l'un ou l'autre de ces trois cas.
Vous aurez remarqué que dans une disposition précédente, il est possible aux membres mêmes de la bande et au conseil de s'en occuper, plutôt que de passer à la gestion de tierces parties. Il s'agit ici d'une situation financière qui peut résulter de circonstances telles que celle que vous avez décrite plus tôt, mais il s'agit ici du seul recours mentionné à cet égard.
M. Pat Martin: Je suppose qu'on pourrait considérer cela comme une stratégie. Si on se heurtait à une opposition généralisée ou à des mesures politiques, une option pourrait être de refuser carrément toute coopération. Mais cela ne prendrait-il pas des années avant de se faire sentir pleinement sur la communauté?
Faute de coopération, les codes par défaut s'appliqueraient. Puis, s'il y avait toujours refus de coopérer et que personne dans la communauté ne s'en plaignait ou ne déposait de grief, cela pourrait prendre 5, 10 ou même 20 ans avant que...
Est-ce possible?
» (1730)
M. Andrew Beynon: Avez-vous posé une question? Tout ce que je puis dire, c'est que la loi envisage l'imposition de codes et prévoit un mécanisme de redressement. Mais si personne n'y a recours, cela revient au même qu'avec toutes les autres lois. Dès lors que personne ne cherche à la mettre en vigueur, elle ne sert à rien.
Le président: Merci beaucoup.
Nous vous invitons à faire des observations finales, si vous en avez. Toutefois, auparavant, j'aimerais vous remercier de votre aide qui nous a été très utile. Qui sait, le comité pourrait songer à vous inviter à nouveau, ce que je recommanderais fortement.
M. Warren Johnson: Je ne suis pas sûr d'avoir des observations finales, monsieur le président, mais j'aimerais apporter une précision. À plusieurs reprises au cours de la discussion, on a semblé confondre les mesures de redressement, d'une part, et le rôle de l'ombudsman, d'autre part. En fait, il existe une distinction technique entre la fonction de redressement, qui permet de renverser une décision ou d'en prendre une autre, ou encore de supplanter une décision déjà prise... Voilà les deux formes classiques de redressement qui existent, et le projet de loi C-7 propose la première. Par ailleurs, la fonction d'ombudsman est bien différente et prévoit d'habitude deux paliers. C'est ce qui existe dans la plupart des provinces et territoires.
Je sais que le comité se penche sur cette question, mais j'ai pensé qu'il valait la peine d'apporter cette précision, puisqu'on n'en a pas eu l'occasion cet après-midi. Il est arrivé à plusieurs reprises que l'on confonde les deux. Ces deux mesures se complètent d'habitude dans d'autres provinces, et le comité se posera sans doute la question au sujet du rôle de l'ombudsman.
Le président: Merci beaucoup.
La prochaine séance est à 15 h 30 demain.
La séance est levée.