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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la santé


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 12 mai 2005




Á 1150
V         La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.))
V         Dr Abram Hoffer (docteur, à titre personnel)

Á 1155
V         La présidente

 1200
V         Dr Carolyn Dean (présidente, Friends of Freedom International)
V         La présidente
V         L'hon. Robert Thibault (Nova-Ouest, Lib.)
V         Dr Carolyn Dean
V         La présidente
V         Dr Carolyn Dean

 1205

 1210
V         La présidente
V         M. Andrew Saul (collaborateur à la rédaction, Journal of Orthomolecular Medicine, à titre personnel)

 1215

 1220

 1225
V         La présidente
V         Mme Lorna Hancock (directrice générale, Health Action Network Society)
V         La présidente
V         Mme Lorna Hancock

 1230
V         La présidente
V         Mme Lorna Hancock
V         La présidente
V         M. Bayne Boyes (président, Health Action Network Society)

 1235

 1240

 1245
V         La présidente
V         Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD)
V         Dr Carolyn Dean

 1250
V         Mme Jean Crowder
V         La présidente
V         L'hon. Robert Thibault
V         Dr Abram Hoffer

 1255
V         L'hon. Robert Thibault
V         Dr Abram Hoffer
V         La présidente
V         L'hon. Robert Thibault
V         La présidente










CANADA

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 041 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 12 mai 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

Á  +(1150)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. Je suis heureuse de vous souhaiter la bienvenue à la 41e séance du Comité permanent de la santé, au cours de laquelle nous allons étudier le projet de loi C-420, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues.

    Je tiens d'abord à remercier les témoins de leur patience, puisque les membres du Comité ont dû se rendre en Chambre. Nous ne serons plus interrompus parce qu'une motion d'ajournement des travaux de la Chambre a été adoptée; nous ne serons donc plus dérangés par la cloche.

    Sur ce, je voudrais présenter notre premier témoin, le Dr Abram Hoffer, qui est ici à titre personnel pour commenter le projet de loi C-420.

    Docteur Hoffer, vous avez la parole.

+-

    Dr Abram Hoffer (docteur, à titre personnel): Merci.

    Je dois vous dire, pour commencer, que j'appuie le projet de loi C-420.

    Je me considère comme un spécialiste de la thérapie vitaminique. Voici sur quoi se fonde mon témoignage.

    Les vitamines sont généralement sûres et, quand on a l'occasion de parcourir toute la documentation à ce sujet, on ne peut certainement pas dire le contraire. Comparativement aux aliments et drogues, c'est extraordinaire. Aux États-Unis seulement, 150 000 personnes meurent chaque année à cause de la consommation de médicaments. Donc, les vitamines sont essentielles, mais je n'insisterai pas sur ce point.

    Nous devons aussi avoir la liberté de choisir parce que, dans presque tous les pays civilisés, l'alimentation n'est pas adéquate et qu'un grand nombre de patients souffrent de diverses carences alimentaires. J'y reviendrai. Je dirais que plus de 50 p. 100 de la population canadienne souffre d'une ou de plusieurs maladies associées à ces carences.

    Vous vous demanderez peut-être pourquoi c'est le cas, mais je pense qu'un des facteurs, c'est que nos étudiants en médecine n'étudient pas la nutrition. Au cours des six dernières années, j'ai reçu 40 étudiants en quatrième année de médecine à mon bureau de Victoria, pour des visites de deux jours. Ils venaient de différentes universités—d'Angleterre, d'Écosse, d'Irlande, d'Australie, de l'est du Canada—et, chaque fois que je leur ai demandé au cours de ces deux jours pendant combien d'heures ils avaient étudié la nutrition, ils m'ont tous répondu «une heure». Une heure, en quatre ans! Une étudiante m'a même dit en riant: «Nous avons failli avoir une heure.» Je lui ai demandé ce qu'elle voulait dire par là, et elle m'a répondu: «Vous ne vous êtes pas présenté.» Cela montre bien que les facultés de médecine n'enseignent pas la nutrition, qui est pourtant à mon avis un des aspects les plus importants de toute pratique moderne.

    Les vitamines sont-elles sûres? Je pense que oui. J'en prends depuis 1953. Je suis probablement la seule personne au monde qui prend des vitamines depuis si longtemps. Je ne pense pas que quiconque puisse battre mon record pour avoir consommé de grandes quantités de vitamines pendant les 50 dernières années, et pourtant, je suis encore en très bonne santé. Donc, par expérience personnelle, je peux affirmer qu'elles sont sûres.

    Je suis également très fier de vous dire que nous avons à Saskatoon la Canadienne qui se classe au deuxième rang au pays pour sa longévité. Elle a 111 ans et, il y a deux ans, elle faisait encore du ski de fond. Elle prend mes vitamines depuis 41 ans. Vous voyez donc qu'il n'est pas très dangereux de prendre des vitamines sur une longue période.

    J'ai dû traiter environ 10 000 patients depuis 1950, d'abord à Saskatoon et ensuite à Victoria. À ce que je sache, le décès d'aucun de mes patients ne peut être attribué aux vitamines. Cela ne s'est jamais produit. La documentation est unanime. Si vous lisez cette documentation, vous verrez que les vitamines sont parfaitement sûres.

    La question est de savoir à quoi on les compare. Il faut bien reconnaître que rien n'est sûr à 100 p. 100, mais comparativement au fait de traverser la rue à Ottawa, je pense que les vitamines sont très sûres. Même l'eau peut être hautement toxique.

    Le gouvernement l'a reconnu. Au Canada, il autorise l'enrichissement des produits alimentaires, tout comme aux États-Unis. En fait, l'armée américaine a découvert en 1943 qu'elle ne pouvait pas recruter suffisamment de soldats. Le tiers environ des hommes étaient incapables de répondre aux exigences de forme physique pour entrer dans l'armée. Le gouvernement américain a alors fait quelque chose de brillant. En fait, c'est tout à fait extraordinaire. En 1943, il a rendu obligatoire l'ajout de vitamine B3... Les Américains ont ajouté de la thiamine, de la riboflavine, de la niacinamide et du fer à leur farine.

    Le gouvernement a pris là une excellente décision parce qu'il y avait à l'époque une grave épidémie aux États-Unis, d'une maladie dont vous n'avez sans doute jamais entendu parler: la pellagre. C'était probablement aussi sérieux que le sida l'est aujourd'hui dans bien des pays. La pellagre est une maladie causée par une carence en vitamine B3 et, certaines années, dans le sud des États-Unis, les malades qui en étaient atteints remplissaient jusqu'au tiers des hôpitaux psychiatriques. Ces malades souffraient d'une psychose chronique, qui ressemblait beaucoup à la schizophrénie. La seule façon de faire la différence, c'était d'établir leur histoire alimentaire et, quand la niacine synthétique a été disponible, c'est ce qu'on a employé pour les tests de diagnostic.

    Au Canada, nous n'avons pas été tout à fait aussi rapides. Même après que les Américains eurent rendu obligatoire l'ajout de vitamines dans la farine, nous considérions qu'il s'agissait d'une altération. Nous nous sommes donc retrouvés dans une situation plutôt étrange parce que les troupes canadiennes outre-mer mangeaient de la farine enrichie. Et les Indiens du Canada aussi, parce que nous avions un commissaire des Indiens très intelligent. Mais tous les autres Canadiens mangeaient de la farine à laquelle aucune vitamine n'avait été ajoutée. Je trouve cette anecdote très intéressante du point de vue historique.

    Donc, à mon avis, les vitamines sont sûres.

    Il faut aussi se demander si les régimes alimentaires sont bien équilibrés. J'ai préparé un document de 25 pages, que vous n'avez malheureusement pas reçu, mais je vous en ai laissé un exemplaire papier. J'espère que vous aurez l'occasion de le lire. J'y présente certaines données. Mes collègues qui sont ici vous en présenteront certainement beaucoup plus.

    Donc, est-ce que nos régimes alimentaires sont équilibrés? D'après moi, non. Et je ne suis pas le seul à le dire; le gouvernement le reconnaît également. Autrement, il ne permettrait pas que nos aliments soient enrichis de vitamines.

Á  +-(1155)  

    Il y a une chose qu'on appelle l'individualité; les êtres humains ne sont pas tous pareils. Nous ne nous ressemblons pas, nous ne pensons pas de la même façon, nous n'avons pas les mêmes gènes, et rien ne prouve que nous ayons les mêmes besoins nutritionnels. C'est différent pour chacun.

    Il est possible que la moyenne des gens, ce qui peut représenter de 50 à 60 p. 100 de la population, aient besoin de certains éléments nutritifs, alors que d'autres ont des besoins particuliers, par exemple les personnes âgées, les femmes enceintes, les mères allaitantes, les malades et les enfants. Il y a une bonne partie de la population—environ 50 p. 100 à mon avis—qui a des besoins spéciaux impossibles à combler même avec le meilleur régime possible. Ce sont ces gens-là qui doivent avoir accès aux suppléments vitaminiques.

    Il y a un rapport très intéressant de Cordain et Eaton qui vient d'être publié dans l'American Journal of Clinical Nutrition. C'est un excellent article. Les auteurs concluent eux aussi que la moitié de la population souffre de maladies liées à des carences alimentaires. C'est un article que vous devriez tous lire; il est extrêmement important.

    Mais que se passe-t-il si vous n'avez pas une bonne alimentation? Eh bien, c'est simple: vous tombez malade. Vous ne vous sentez pas bien. Dans ma pratique—je suis psychiatre et je vois seulement des patients qui me sont envoyés—, si tous les médecins généralistes insistaient, avant de m'envoyer un patient, pour qu'il commence à bien s'alimenter, qu'il abandonne les aliments vides et qu'il renonce à l'alcool, je perdrais la moitié de mes clients. C'est vraiment un aspect très important de ma pratique.

    Permettez-moi de vous donner un exemple récent. Vous avez peut-être déjà entendu parler d'une maladie appelée le rachitisme. Elle avait disparu. Il n'y en avait jamais eu au Canada. Toutes les mères savaient autrefois qu'il fallait donner de l'huile de foie de morue aux enfants pour éviter le rachitisme. Mais depuis que les dermatologues ont commencé à nous faire peur en nous disant que nous aurions un cancer de la peau si nous nous exposions trop au soleil, nous n'absorbons plus assez de vitamine D, et 80 cas de rachitisme ont été signalés au Canada au cours des trois dernières années.

    Donc, nous ne consommons pas assez de ces vitamines, et pourtant nous en avons besoin.

    Il y a tellement de choses à dire, et je vais me contenter des grandes lignes. Mais, en gros, je tiens à dire qu'il faut faire quelque chose. Nous devons d'abord et avant tout enrichir nos aliments. Nous devons faire preuve d'intelligence en ajoutant des choses à nos aliments. Nous devons continuer d'enrichir la farine. Heureusement, nous y ajoutons maintenant de l'acide folique, je pense, ce qui est extrêmement important. Nous devons maintenant autoriser l'ajout de vitamine C et d'autres vitamines. Nous devons autoriser l'ajout de vitamine D. Cela répondra aux besoins des Canadiens moyens, mais ce sera tout à fait insuffisant pour une bonne partie de la population, qui doit donc avoir le droit et le privilège de se procurer les vitamines dont elle a besoin pour compléter son alimentation. C'est extrêmement important à mon avis.

    En conclusion, ce que j'ai dit, c'est que les vitamines et les minéraux sont sûrs et non toxiques, que notre alimentation moderne n'est pas équilibrée, qu'une forte proportion de notre population souffre de diverses carences alimentaires et que la solution, c'est de permettre à notre population de vivre en santé en lui faisant manger des aliments sains et en l'autorisant à acheter les éléments nutritifs dont elle a besoin.

    Merci.

+-

    La présidente: Merci, docteur Hoffer.

    Nous entendrons maintenant la présidente de Friends of Freedom International, Mme Carolyn Dean. Je pense que Mme Dean a des diapositives à nous présenter pendant sa déclaration, n'est-ce pas?

  +-(1200)  

+-

    Dr Carolyn Dean (présidente, Friends of Freedom International): Oui, en effet, et j'aimerais avoir l'autorisation de la présidente pour le faire en anglais seulement.

+-

    La présidente: Monsieur Thibault, vous n'avez pas d'objection à ce que le témoin présente ses diapositives en anglais seulement?

+-

    L'hon. Robert Thibault (Nova-Ouest, Lib.): Non.

+-

    Dr Carolyn Dean: Je pourrais les présenter en français seulement ou en anglais seulement.

+-

    La présidente: Je pense que, pour notre groupe, nous choisirons l'anglais seulement.

+-

    Dr Carolyn Dean: D'accord, et vous avez aussi les documents que nous avons préparés, mais comme ma présentation contient des tableaux très intéressants, j'ai voulu la faire en PowerPoint. Elle portera sur la sécurité des suppléments.

    En tant que médecin et naturothérapeute, je sais que les suppléments alimentaires sont essentiels pour le grand public et qu'ils seront plus accessibles s'ils entrent de nouveau dans la catégorie des aliments. S'ils continuent d'être considérés comme des médicaments ou s'ils font partie d'une troisième catégorie associée aux médicaments, les gens pourraient avoir besoin d'une ordonnance d'un médecin ou d'un naturothérapeute pour se procurer certains suppléments ou certaines doses de suppléments. Cela coûtera beaucoup trop cher pour la plupart des gens et cela ne servira à rien.

    Serait-ce la raison pour laquelle la profession naturopathique soutient Phil Waddington? Serait-ce la raison pour laquelle la profession naturopathique est contre le projet de loi C-420, plutôt que d'appuyer les traitements fondés sur l'alimentation comme nous nous y engageons quand nous prêtons serment pour pratiquer la naturopathie?

    Mais permettez-moi tout d'abord de vous énumérer très brièvement mes titres et qualités. Je suis Canadienne, née à Terre-Neuve et élevée en Nouvelle-Écosse. J'ai obtenu mon BSc de l'Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse, en 1974 et mon diplôme de médecine en 1978. Je suis aussi naturothérapeute J'ai pratiqué 13 ans à Toronto et je vis à New York depuis 13 ans; je fais de la recherche en laboratoire, j'écris, je donne des conférences et je fournis des services de consultante.

    J'ai écrit 12 livres et des centaines d'articles, et j'ai fait des milliers de présentations dans les médias au sujet de la santé et de la liberté en matière de santé.

    Je suis présidente de Friends of Freedom International et de la Live Longer Educational Foundation, et j'ai participé à la rencontre sur le Codex à Bonn, en Allemagne, avec la délégation envoyée par Santé Canada en novembre 2004.

    J'ai écrit de nombreux ouvrages. Je ne vous les nommerai pas tous, mais le plus récent, Death by Modern Medicine, est un livre que j'aurais mieux aimé ne pas avoir à écrire, parce qu'il y est question du monopole de la médecine moderne, qui semble s'opposer à l'utilisation des suppléments alimentaires.

    J'ai aussi écrit en novembre 2003 un article intitulé «Death by Medicine». Il a été publié récemment, au printemps 2005, dans le Journal of Orthomolecular Medicine. J'y ai présenté, après avoir dépouillé des bases de données gouvernementales et des revues dont le contenu est approuvé par des pairs, des données sur les décès et leur coût.

    Dans les hôpitaux, les effets indésirables des médicaments, ou EIM, entraînent 106 000 décès annuellement. Ce sont des chiffres américains, mais en extrapolant, on obtiendrait 10 p. 100 de ce nombre pour les Canadiens. Le nombre des décès découlant d'erreurs médicales s'élève à 98 000. Les plaies de lit, les infections, la malnutrition, les EIM chez les malades ambulatoires, les interventions inutiles et les maladies liées à des chirurgies sont en outre responsables chaque année de 783 936 décès prématurés, tous attribuables à la médecine moderne.

    La diapositive suivante porte sur les risques relatifs. La question des suppléments semble se résumer au fait que les suppléments seraient dangereux et qu'ils devraient par conséquent être considérés comme des médicaments, et assujettis à la même réglementation que les médicaments. Cependant, les deux tableaux que je vais vous montrer montrent que les suppléments alimentaires pourraient bien n'être responsables que d'un décès sur 100 000. Il est possible d'associer 240 décès sur 100 000 à des causes alimentaires, et 5 180 sur 100 000 à des médicaments d'ordonnance. Quant aux erreurs de la médecine moderne, elles causent 784 000 décès par année, ce qui rend la médecine 784 000 fois plus dangereuse que les suppléments alimentaires.

    Les tableaux que vous avez devant vous et à l'écran montrent l'analyse qui a été faite à partir de ces chiffres. En bas à gauche du feuillet sur la sécurité, on peut voir un point à peine visible, qui correspond aux décès attribuables à des suppléments alimentaires, comparativement aux gros points bleu et violet relatifs aux décès associés à la pratique médicale.

    Nous avons une longue tradition d'utilisation de suppléments en Amérique du Nord. Le distingué Dr Abram Hoffer, que vous venez d'entendre, a commencé à traiter la schizophrénie avec de la vitamine B dans les années 1950. Les Drs Evan et Wilfrid Shute, en Ontario, donnaient de la vitamine E aux cardiaques; c'était au Canada, dans les années 1960. Et le Dr Linus Pauling a fait la promotion de la vitamine C, non seulement pour le rhume, mais aussi pour des dizaines d'autres affections.

  +-(1205)  

    En Allemagne, d'où vient la médecine moderne, on croit qu'il y a suffisamment de vitamines et de minéraux dans les aliments et qu'il n'en faut que de petites doses pour éviter les maladies attribuables aux carences. C'est à cause de ce point de vue qu'on a tendance, partout dans le monde, à placer les suppléments alimentaires dans la catégorie des médicaments. Ce biais ne tient pas compte des énormes carences en éléments nutritifs dans notre alimentation.

    Pour un des livres que j'ai écrits, The Miracle of Magnesium, je me suis intéressée à la question de l'épuisement des minéraux dans les sols. En 1900, le régime alimentaire moyen incluait 500 milligrammes de magnésium. En 2005, ce chiffre n'était plus que de 150 milligrammes. Or, le coeur et le reste du corps ont besoin d'au moins 400 milligrammes de magnésium par jour. Les carences en magnésium causent des infarctus. En temps normal, le magnésium régule la quantité de calcium dans le coeur. Sans lui, le calcium s'accumule et entraîne des spasmes cardiaques. Mais, comme notre système de santé s'intéresse d'abord et avant tout aux médicaments, et non aux éléments nutritifs nécessaires à la vie, nous causons d'innombrables décès évitables.

    Il y a aussi un livre intitulé The Magnesium Factor, du Dr Mildred Seelig. L'auteure y démontre qu'un régime alimentaire riche en calcium et pauvre en magnésium augmente les risques de maladies cardiaques. C'est pourquoi les Finlandais ont un taux annuel très élevé de décès attribuables aux maladies cardiaques. Leur régime alimentaire et leur eau potable sont très riches en calcium et très pauvres en magnésium. Les Américains ne sont pas loin derrière, et les statistiques concernant les Canadiens sont similaires. Au Japon, on ajoute du magnésium dans l'eau, et l'incidence des maladies cardiaques y est très faible.

    Il est utile de comparer l'évolution de l'incidence des maladies cardiaques avec celle de la consommation moyenne de magnésium. Depuis 1900, cette incidence a grimpé considérablement. En même temps, notre consommation de magnésium a diminué, passant d'environ 500 milligrammes en 1900 à 150 milligrammes aujourd'hui.

    Notre alimentation est pauvre en minéraux et en éléments nutritifs. Notre farine manque de vitamine E, de vitamine B6, de magnésium, de riboflavine, de niacine—une vitamine B—, de fibres, de zinc, de potassium, de fer, de cuivre, de sélénium, de vitamine B12 et d'acide folique.

    L'âge des premières dépressions majeures diminue. Nous entendons maintenant parler d'adolescents en dépression, auxquels on prescrit des médicaments. Or, nous savons que les vitamines constituent un traitement efficace contre la dépression. Les Américains souffrent de dépressions majeures en plus grand nombre et à un plus jeune âge qu'avant. C'est une découverte très importante.

    Les suppléments sont-ils dangereux? Il y a un mythe selon lequel la vitamine C cause des calculs rénaux, mais le fait est qu'il est impossible de trouver dans toute la littérature un seul cas signalé en ce sens. Il y a aussi un mythe selon lequel la vitamine E est dommageable, mais il s'agit seulement de la vitamine E synthétique. En 1941, l'industrie pharmaceutique a réussi à faire de la forme synthétique de la vitamine E la norme internationale.

    J'ouvre ici une boîte de Pandore, parce qu'il y a des suppléments naturels et des suppléments synthétiques. Ma thèse, c'est qu'en nous concentrant sur les synthétiques, nous n'obtenons pas les éléments nutritifs dont nous avons besoin. Malheureusement, si nous plaçons les suppléments alimentaires dans la catégorie des produits pharmaceutiques, il pourra s'agir de synthétiques, et nous perdrons alors les bienfaits des suppléments naturels.

  +-(1210)  

    La vitamine E synthétique sert maintenant de base pour les unités internationales de mesure de dosage. Elle a également été adoptée comme étalon pour la recherche en 1949, et elle l'est malheureusement encore aujourd'hui. Elle est fabriquée par les compagnies pharmaceutiques responsables de la fabrication de nombreux médicaments qui lui font une concurrence directe.

    Voilà une autre boîte de Pandore. La documentation montre que les compagnies pharmaceutiques ont souvent financé des études qui soulèvent des interrogations sur des produits concurrents. La vitamine E synthétique ou modifiée chimiquement a été utilisée dans toutes les études négatives récentes, y compris les 19 études consacrées à la méta-analyse de la mortalité attribuable à la vitamine et à toutes les autres causes.

    Quand on a vu en manchette que la vitamine E était nuisible ou dangereuse, c'était à la suite d'une étude sur la vitamine E synthétique. Il faut donc se demander si les compagnies pharmaceutiques financent ces études pour discréditer la vitamine E comme élément nutritif aux yeux du grand public.

    Les études indépendantes n'ont cependant pas confirmé les conclusions négatives des auteurs de cette recherche récente sur la vitamine E. Pourquoi essaient-ils de donner aussi mauvaise presse à la vitamine E? Ce sont des compagnies pharmaceutiques comme Bristol-Meyers, Pfizer et Bayer qui ont financé cette recherche négative récente sur la vitamine E.

    Mais à qui cela sert-il? Les compagnies pharmaceutiques ont convaincu le grand public que les médicaments brevetés étaient les seuls traitements contre la maladie. Tous les autres types de traitement sont passés sous silence ou contestés. Les compagnies pharmaceutiques ont tout à gagner à ce que les suppléments alimentaires soient réglementés comme des médicaments, mais le public y perdra. Je répète que les suppléments sont sûrs et qu'il n'y a aucun avantage à les garder dans la catégorie des médicaments.

    Pour finir, le régime canadien de soins de santé est fondé sur l'accessibilité pour tous. Par conséquent, pourquoi voudrions-nous limiter l'accès à des suppléments alimentaires nécessaires?

    Un dernier mot. Quand j'ai dit à des amis américains que je venais témoigner au sujet du projet de loi C-420 et de l'aspect alimentaire des suppléments, quelqu'un m'a dit que les Canadiens faisaient toujours les bons choix. J'espère que ce sera le cas aussi pour le Comité permanent de la santé.

    Merci beaucoup.

+-

    La présidente: Merci, docteure Dean.

    Nous entendrons maintenant un collaborateur à la rédaction du Journal of Orthomolecular Medicine. Nous lui souhaitons la bienvenue.

    Monsieur Andrew Saul, vous avez la parole.

+-

    M. Andrew Saul (collaborateur à la rédaction, Journal of Orthomolecular Medicine, à titre personnel): Merci beaucoup.

    En plus d'être collaborateur à la rédaction pour le Journal of Orthomolecular Medicine, de Toronto, j'ai aussi enseigné au New York Chiropractic College et à la State University of New York pendant environ neuf ans. Je suis l'auteur de trois livres traitant de nutrition, ainsi que de divers articles sur le sujet.

    Les produits de santé naturels comme les acides aminés, les herbes médicinales, les vitamines et les autres compléments nutritionnels ont une histoire d'utilisation extraordinairement sécuritaire. Aux États-Unis, par exemple, près de la moitié de la population consomme des compléments nutritionnels ou d'herbes médicinales tous les jours, ce qui constitue plus de 145 millions de doses par jour, ou 53 milliards de doses par année.

    L'argument de médecine légale le plus élémentaire est le suivant, à mon avis: où sont enterrés les corps? Pour tenter de répondre à cette question, nous pouvons nous pencher sur le rapport annuel du système de surveillance de l'exposition aux produits toxiques de l'American Association of Poison Control Centres, publié en septembre 2004 dans l'American Journal of Emergency Medicine. Ce rapport établit que quatre décès en tout ont été attribués aux compléments vitaminiques et aux minéraux en 2003. Deux de ceux-ci ont été causés par un empoisonnement au fer. Deux décès auraient donc été causés par des vitamines pendant l'année, sur plus de 53 milliards de doses. Voilà un dossier de sécurité sans égal.

    Les médicaments pharmaceutiques, par contre, ont entraîné plus de 2 000 décès par intoxication. Et il serait faux de dire que seuls les médicaments sur ordonnance tuent. En 2003, l'aspirine a causé 59 décès à elle seule. Il s'agit d'un taux de mortalité presque 30 fois plus grand que celui qui est attribuable aux compléments de fer. De plus, des décès additionnels ont été entraînés par l'utilisation d'aspirine en combinaison avec d'autres produits.

    Les décès ne sont en aucune façon limités aux médicaments. En 2003, aux États-Unis, un décès a été causé par une crème, une lotion ou un produit de maquillage, un par du détergent à lessive granulé, un par du bleu à canon, un par du savon ordinaire, un par du bicarbonate de soude et un autre par du sel de table. L'Association of Poison Control Centres a également signalé deux décès attribuables à des assainisseurs d'air en aérosol, deux à du dissolvant à vernis à ongles, deux à du parfum, trois à du charbon de bois, et trois à du détergent à vaisselle.

    En Amérique, en 2003, il y a 28 personnes qui ont succombé à l'héroïne, pendant que l'acétaminophène, plus connue sous le nom de Tylenol, faisait 147 victimes. Bien que l'acétaminophène ait tué cinq fois plus de personnes que l'héroïne, rares sont ceux qui proposeraient que cet analgésique en vente libre, généralement considéré comme sécuritaire, requière dorénavant une ordonnance. Même la caféine a tué deux personnes en 2003, un nombre égal à celui des décès attribués aux compléments de vitamines et minéraux sans fer. Or, le thé, le café et les boissons gazeuses à base de cola ne sont pas vendus sous restrictions, sous ordonnance ou dans des contenants à l'épreuve des enfants, et bien peu de gens pensent que cela devrait être le cas.

    Les compléments nutritionnels sont exceptionnellement sécuritaires. En 2003, aucun décès n'a été lié à la consommation de multivitamines sans fer. Aucun décès lié aux acides aminés. Aucun décès lié aux compléments du complexe vitaminique B. Aucun décès lié à la niacine. Aucun décès lié à la vitamine A. Aucun décès lié à la vitamine D. Et aucun décès lié à la vitamine E. Il y aurait eu, soi-disant, un décès entraîné par la vitamine C et un par la vitamine B6. L'exactitude de ces attributions est cependant douteuse, car les vitamines hydrosolubles comme celles-là ont des dossiers de sécurité exemplaires depuis des dizaines d'années.

    Soit dit en passant, le plus récent rapport du système de surveillance de l'exposition aux produits toxiques, publié en 2003, indique que ces décès sont probablement ou sans doute reliés à l'exposition à ces vitamines, une admission flagrante d'incertitude de la part des auteurs du rapport. Les allégations de problèmes reliés aux vitamines sont systématiquement exagérées et ne peuvent être confirmées.

  +-(1215)  

    Même si c'était vrai, ces deux décès censément attribuables à des vitamines sont des aberrations. Dans son rapport précédent, en 1998, l'American Association of Poison Control Centers n'a en effet signalé aucun décès lié aux vitamines C ou B6. En fait, cette année-là, il n'y a pas eu le moindre décès attribué à la consommation de vitamines. N'oubliez pas qu'il s'en consomme 53 milliards de doses par année aux États-Unis seulement. Pendant des dizaines d'années, j'ai demandé à mes lecteurs, à mes collègues et à mes étudiants de me fournir toute preuve scientifique d'un décès dont l'une ou l'autre de ces vitamines était la cause confirmée. À ce jour, je n'ai toujours rien reçu et, malgré tout, les idées et les informations fausses au sujet des vitamines persistent.

    Les articles alarmistes sur les vitamines sont excessivement populaires auprès des médias, atterrissant parfois jusque dans les pages du Wall Street Journal. En 1992, ce journal a signalé des cas de surdose de vitamine D dans des hôpitaux de Boston. Par suite de problèmes dans une grande laiterie, une partie du lait vendu à Boston contenait plus de 230 000 unités de vitamine D par pinte, plutôt que les 400 unités habituelles. Une personne est décédée par la suite, mais à cause de complications causées par les médicaments utilisés pour traiter le problème. Il s'agit du seul et unique décès lié à la vitamine D que j'aie jamais pu confirmer où que ce soit, dans n'importe quelle décennie, à n'importe quel moment et dans n'importe quel pays. Il n'y a eu qu'un décès, et il était attribuable aux médicaments, et non à la vitamine elle-même.

    Les statistiques en matière d'intoxications ne font état d'aucun décès causé par la vitamine E. En fait, les médecins canadiens Wilfrid et Evan Shute n'ont observé aucun effet nocif avec des doses atteignant jusqu'à 8 000 unités internationales par jour. On administre même aux nouveau-nés prématurés des compléments de vitamine E afin d'éviter les dommages à la rétine causés par le niveau d'oxygène dans les couveuses. Ils reçoivent environ 100 milligrammes par kilogramme de poids corporel, une dose équivalente à 7 000 unités internationales pour un adulte. Selon le New England Journal of Medicine, ce traitement n'a jamais entraîné d'effet secondaire nocif.

    Au sujet des compléments à base d'herbes, trois décès seulement ont été attribués à des produits botaniques simples et, curieusement, leur identité n'est pas dévoilée dans le rapport d'exposition aux produits toxiques, ce qui donne à penser que la cause exacte de ces décès n'est pas établie avec certitude. Le fait est que des millions de personnes consomment des remèdes à base d'herbes médicinales, et ce, depuis des générations. Les peuples autochtones, aussi bien que les peuples occidentaux, ont constaté leur innocuité et leur efficacité, qui sont également confirmées par le rapport du système de surveillance de l'exposition aux produits toxiques des centres antipoisons. Aucun décès n'est lié aux médecines culturelles, que ce soit la médecine ayurvédique, asiatique ou hispanique, ni à aucun autre remède à base d'herbes. De plus, nous constatons que le caulophylle faux-pigamon n'a causé aucun décès; le ginkgo biloba, aucun; l'échinacée, aucun; le ginseng, aucun; le kava, aucun; le millepertuis, aucun; et la valériane, aucun. Par ailleurs, les centres antipoison n'ont signalé absolument aucun décès causé par des compléments d'acides aminés.

    Afin d'illustrer l'extraordinaire importance des compléments pour les personnes dont le régime alimentaire est inadéquat, considérez ceci: les enfants qui mangent des hot dogs une fois par semaine doublent leurs risques de développer une tumeur au cerveau. Ceux qui mangent plus de 12 hot dogs par mois—à peine trois par semaine—ont dix fois plus de risques d'être atteints de leucémie que ceux qui n'en mangent aucun. C'est ce qu'on peut lire dans la revue Cancer Causes and Control, dans un article publié en 1994. Par contre, comme l'indiquait la même revue en mars 1994, il a été démontré que les enfants qui mangent des hot dogs et qui prennent des compléments vitaminiques ont des risques de cancer réduits.

  +-(1220)  

    C'est très curieux, n'est-ce pas? Tout en émettant des théories sur les nombreux dangers potentiels des vitamines, les médias choisissent souvent d'ignorer les avantages concrets que présente la supplémentation en matière de prévention du cancer.

    Les critiques négligent également souvent de souligner combien les compléments sont économiques. Pour les familles à faible revenu, prendre un comprimé de vitamine C à 2 ¢ ou une multivitamine à 5 ¢, disponibles dans tous les magasins à escompte, revient en fait moins cher que d'obtenir ces vitamines par le biais d'une bonne alimentation. La dure réalité, c'est qu'il est souvent plus abordable de consommer des compléments que d'acheter des aliments nutritifs, surtout des fruits et légumes frais hors saison.

    Le public appuie fortement le libre accès aux compléments vitaminiques. Aux États-Unis, par exemple, on a déposé en 2003 un projet de loi visant à restreindre cet accès. Le Sénat n'a recueilli que quatre parrains pour ce projet de loi, qui a été rejeté en comité.

    D'un autre côté, le Congrès a reçu plus de lettres d'électeurs—plus de 2,5 millions—sur le Dietary Supplement Health and Education Act de 1994 que sur tout autre enjeu dans l'histoire des États-Unis.

    Cela montre à mon avis que les citoyens américains et les citoyens canadiens éprouvent le même vif intérêt et qu'un vote affirmatif pour le projet de loi C-420, qui définirait à juste titre les compléments comme des aliments et non des médicaments, sera bien reçu par les citoyens canadiens.

  +-(1225)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Nous allons maintenant entendre le président de la Health Action Network Society, M. Bayne Boyes. Il est accompagné de sa directrice générale, Mme Lorna Hancock.

    Monsieur Boyes.

+-

    Mme Lorna Hancock (directrice générale, Health Action Network Society): J'aimerais faire une brève introduction, si vous n'y voyez pas d'objection.

+-

    La présidente: Allez-y.

+-

    Mme Lorna Hancock: Je voudrais vous expliquer en quelques mots ce qu'est la Health Action Network Society. Je vais ensuite présenter une approche différente au sujet de la raison pour laquelle les vitamines sont retirées de la catégories des aliments.

    La Health Action Network Society est une organisation de bienfaisance sans but lucratif, vouée à l'éducation. Elle a été fondée en 1984 et est administrée par un conseil d'administration. Elle a pour mission de favoriser le bien-être individuel. Elle compte plus de 6 000 membres, qui souhaitent tous se garder en santé ou améliorer leur état de santé à l'aide de vitamines et de produits naturels. Et ils ne sont vraiment pas contents quand ils entendent des rumeurs au sujet de baisses de dosage, ce qui veut dire des coûts plus élevés. Ils ne sont pas contents non plus quand ils sont carrément privés de leurs vitamines préférées. Notre organisation a beau représenter 6 000 personnes en théorie, nous estimons que près de 60 p. 100 des Canadiens, soit 20 millions de personnes, s'intéressent à ce qui se passe au Canada dans le dossier des produits de santé naturels.

    J'aimerais vous expliquer aujourd'hui comment je vois la question des produits de santé naturels. D'abord, pourquoi a-t-il fallu les retirer de la catégorie des aliments? Je pense qu'il est important d'examiner cela.

    Le grand débat sur les vitamines et les minéraux—les produits de santé naturels—a commencé dans les années 1990. Dans le grand public, nous avons été amenés à croire que les règlements n'étaient pas suffisants et que les consommateurs se faisaient berner par des fabricants sans scrupules qui ne mettaient pas dans leurs bouteilles ce qui était indiqué sur l'étiquette. C'est ce qui a sonné l'alarme. Certains ont laissé entendre que, si les vitamines et les minéraux—les produits de santé naturels, comme on les appelle aujourd'hui pour être à la mode—avaient leur propre catégorie, tous ces problèmes disparaîtraient. Je trouve plutôt curieux que les gens qui prônaient cette troisième catégorie, qui a servi de catalyseur à cette alarme, aient eu des intentions cachées.

    Pourquoi disons-nous que le grand public veut ce changement alors que cela n'a rien à voir avec lui? Le grand public était tout à fait satisfait avant, quand il avait plus de choix qu'aujourd'hui en ce qui concerne les vitamines et les minéraux.

    Je vous renvoie à deux articles sur les aliments fonctionnels et neutraceutiques. Je ne sais pas si vous avez des copies de ces articles, que je vous ai envoyés plus tôt. Le premier s'intitule «Aliments fonctionnels et neutraceutiques: Une enquête préparatoire sur le potentiel du Canada». Il a été rédigé par Carol Culhane en 1995 pour Agriculture et Agroalimentaire Canada. Est-ce que cela vous dit quelque chose? Le deuxième, publié en 1996, s'intitule «Analyse comparative de l'incidence de la réglementation sur l'élaboration et la commercialisation des produits alimentaires fonctionnels au Canada, au Japon, dans les pays de l'Union européenne et aux États-Unis».

  +-(1230)  

+-

    La présidente: Nous ne les avons probablement pas parce qu'ils ne sont pas encore traduits.

+-

    Mme Lorna Hancock: D'accord. Je me ferai un plaisir de vous en faire des copies et de vous les envoyer, peut-être séparément.

    Je pense que ce sont des documents très importants parce qu'à mon avis, c'est cela, la motivation.

    Dans le sommaire de son rapport de 1996, Carol Culhane affirme: «Au Canada, le cadre réglementaire est tellement restrictif que la mise sur pied d’une industrie des aliments fonctionnels et, même, l’élaboration de produits fonctionnels risquent d’y être sérieusement compromises, sinon entièrement exclues.» Autrement dit, comme elle le dit ensuite, si nous ne modifions pas les règlements relatifs aux produits naturels, l'industrie canadienne ne pourra jamais être à la hauteur de cette industrie mondiale dont la valeur s'élevait à 500 milliards de dollars en 1996.

    Voici donc ce que recommandaient les auteurs du rapport: premièrement, établir une vision réglementaire favorable aux aliments fonctionnels; deuxièmement, mettre sur pied un groupe de travail industrie-gouvernement chargé de réformer la réglementation; troisièmement, créer une association canadienne équivalente à l’association japonaise des aliments de santé; quatrièmement, établir une distinction entre les allégations concernant les effets sur la santé associées aux maladies et celles associées à la promotion de la santé et du bien-être. S'ils ont fait cette recommandation, c'est parce qu'ils voulaient que les vitamines, les minéraux et les autres produits naturels soient retirés de la catégorie des aliments. Et la cinquième recommandation, enfin, était d'harmoniser les protocoles d'évaluation avec ceux d'autres États ou territoires.

    Carol disait ensuite, toujours en 1996, qu'il fallait faire vite et que le temps pressait pour relever ces défis si le Canada voulait profiter des avantages économiques—y compris des économies potentielles dans les soins de santé futurs—que pouvait offrir une industrie des aliments fonctionnels capable de soutenir la concurrence internationale. C'est ce qui a été fait, et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui.

    Mais je pense qu'il serait plus juste de reconnaître la raison pour laquelle ces changements ont été apportés. Ce n'était pas une question de sécurité.

    Je parle pour moi, même s'il y a 6 000 personnes dans notre organisation, mais je pense que nos membres aimeraient que le projet de loi C-420 soit adopté.

+-

    La présidente: Merci, madame Hancock.

    Monsieur Boyes.

+-

    M. Bayne Boyes (président, Health Action Network Society): Merci beaucoup, madame la présidente, mesdames et messieurs les députés.

    Comme l'a dit Lorna, notre groupe s'occupe d'éducation à la santé et représente un important groupe de consommateurs.

    Si vous me permettez une petite parenthèse, j'ai fait une présentation devant la cour suprême de Colombie-Britannique il y a quelques semaines au sujet du règlement du recours collectif sur les suppléments. Le juge m'a demandé pourquoi j'étais là et si j'étais payé. J'ai répondu que j'occupais en fait un de ces postes bénévoles à temps plein pour lesquels il faut payer.

    La plupart des gens raisonnables s'entendent pour dire que de bonnes habitudes de vie sont un élément clé pour se garder en santé. Cela inclut évidemment l'exercice, l'accès à l'air pur et à l'eau potable, et des aliments nutritifs. Il y a bien des années, les gens pouvaient se garder en santé parce qu'ils pouvaient facilement trouver de l'air pur, de l'eau potable et des aliments nutritifs, mais le temps a bien changé les choses.

    Quelques-uns des plus grands médecins et chercheurs en médecine—nous avons entendu aujourd'hui le Dr Hoffer, la Dre Dean et le Dr Saul, qui vous ont cité des statistiques... Entre 1994 et 1996, au Canada, 1,4 milliard de tonnes de produits chimiques toxiques ont été libérés dans l'environnement, ce qui inclut environ 280 millions de tonnes de substances cancérogènes connues. Selon le Dr Samuel Epstein, qui est très réputé, nous avons aujourd'hui dans notre organisme 500 composés différents qui n'existaient même pas avant 1920.

    Il y a 30 ans, l'Organisation mondiale de la santé affirmait que 89 p. 100 des cancers étaient causés par des toxines, des pesticides et divers autres produits chimiques toxiques présents dans l'environnement. Nous sommes convaincus que la maladie est causée par l'affaiblissement de notre système immunitaire parce que nous sommes exposés tous les jours, dès notre naissance, à des produits chimiques et à des toxines dans l'air, l'eau, les aliments, les vêtements, les produits de toilette et tout ce qui nous entoure, mais aussi parce que nous consommons chaque jour nettement moins d'éléments nutritifs qu'avant. Nous ne fournissons tout simplement pas assez d'éléments nutritifs à notre système immunitaire, qui doit composer avec des doses de toxines beaucoup plus élevées qu'avant.

    La quantité de minéraux et d'éléments nutritifs que nous consommons a diminué d'environ 50 p. 100 depuis 20 ans. Notre consommation de fer a baissé de 70 p. 100 et notre consommation de magnésium, de 30 p. 100. Par rapport à 1920, on retrouvait en 1968 dix fois moins de minéraux essentiels dans les céréales. Il faut aujourd'hui 500 boisseaux de céréales pour produire la même quantité de minéraux essentiels que 50 boisseaux en 1920. Et, bien sûr, les choses ont sûrement bien changé depuis 1968.

    Ce qui est encore pire, c'est que la proportion des aliments transformés dans notre régime alimentaire a augmenté en flèche. En Amérique du Nord, notre alimentation se compose aujourd'hui à 90 ou 95 p. 100 environ d'aliments cuits ou transformés. Quand on transforme les aliments, on détruit 100 p. 100 des enzymes et environ 80 p. 100 des éléments nutritifs qui s'y trouvent.

    Mais quel est le rapport avec le projet de loi C-420? Eh bien, les suppléments sont essentiels à la santé. Nous croyons que le projet de loi C-420 sera utile à cet égard.

    Pourquoi sommes-nous inquiets? La Direction des produits de santé naturels reflète le modèle pharmaceutique dans sa structure et dans ses mécanismes d'approbation et d'octroi de permis, et cela nous préoccupe beaucoup. Le bilan de Santé Canada n'est pas rassurant. Le ministère a approuvé des médicaments qui n'auraient pas dû l'être. Il a retiré du marché de nombreux suppléments importants ces dernières années. Il a créé de sérieuses difficultés pour un certain nombre de fabricants de suppléments et de propriétaires de magasins de vitamines. En fait, un de ces propriétaires et ses employés, à Victoria, ont été menottés récemment par des gens de Santé Canada.

    L'industrie des suppléments vit actuellement une transformation structurelle majeure. La taille des fabricants et des détaillants augmente. C'est le résultat, comme l'a dit Lorna, des pressions de l'industrie des aliments fonctionnels et neutraceutiques. Cette concentration de pouvoir s'est déjà produite dans l'industrie pharmaceutique, avec des conséquences déplorables.

    Je pense que nous vous avons remis un exemplaire—mais vous ne l'avez peut-être pas reçu—d'un rapport très intéressant déposé le 5 avril dernier par le comité de la santé de la Chambre des communes britannique. C'est un rapport très complet, dont les 48 recommandations devraient avoir des répercussions majeures sur l'industrie pharmaceutique et médicale au Royaume-Uni.

  +-(1235)  

    J'aimerais vous en lire un paragraphe, qui est très intéressant pour démontrer le sérieux de ce rapport:

Nous nous préoccupons d'abord et avant tout du volume, de l'ampleur et de l'intensité de l'influence de l'industrie

—il s'agit de l'industrie pharmaceutique—

non seulement sur la médecine et la recherche cliniques, mais aussi sur les patients, les organismes de réglementation, les médias, les fonctionnaires et les politiciens. Il est donc d'autant plus important d'examiner d'un oeil critique les effets de l'industrie sur la santé et de se prémunir contre des dépendances excessives et dommageables.

    Je vous recommande fortement de prendre le temps de parcourir ce rapport.

    Il serait très néfaste à notre avis que ce qui s'est passé dans l'industrie pharmaceutique se reproduise dans le domaine des suppléments alimentaires. J'aimerais vous donner un exemple de ce qui pourrait arriver. Helke Ferrie est rédactrice scientifique. Elle est allée voir sa mère en Allemagne il y a quelques années et elle s'est rendue dans une pharmacie du quartier pour obtenir de la vitamine C. Le pharmacien, que la famille connaissait depuis 25 ans, lui a offert 12 comprimés de vitamine C synthétique de 10 milligrammes chacun pour 10 $. C'était il y a quelques années.

    Je prends moi-même de fortes doses de vitamine C. J'en prends 12 grammes, et c'est de la vitamine C naturelle, donc, c'est utile. Mais c'est 100 fois la dose qu'elle a obtenue. Cela veut dire qu'en théorie, il m'en coûterait 1 000 $ par jour. L'Allemagne a adopté le modèle des produits pharmaceutiques depuis des années pour les suppléments, et voilà ce qui est arrivé aux prix. Personnellement, je paie 30 ¢ par jour pour 12 grammes, alors que, d'après le modèle allemand, cela me coûterait théoriquement 1 000 $ par jour.

    D'après un rapport produit par le gouvernement du Canada en 1994 sur les coûts de la réglementation des suppléments alimentaires et un autre rapport publié dix ans plus tard, la plupart des fabricants devraient abandonner le tiers environ de leur gamme de produits, ce qui fait que quelque 20 000 suppléments ne seraient plus accessibles aux citoyens du Canada. Les auteurs de ces rapports ont également indiqué—ce qui est renversant—que 80 p. 100 des petits et moyens fabricants et détaillants disparaîtraient. Mais pourquoi est-ce qu'on cherche ainsi à détruire les entreprises canadiennes? Pourquoi est-ce qu'on ne s'occupe pas plutôt des secteurs où nous avons une assise raisonnable, par exemple les marchés des aliments biologiques ou du développement de produits à base d'herbes?

    Même si Santé Canada prétend que son programme de normes de preuves concernant l'innocuité et l'efficacité des produits de santé naturels est souple, et même s'il se dit prêt à accepter les résultats des recherches récentes, nous sommes d'avis qu'il n'y a absolument rien qui nous permette d'appuyer ce genre de programme. Il n'y a pas de cadavres dans les rues. Comme d'autres l'ont déjà dit, les suppléments ne présentent aucun risque, et je pense que c'est là-dessus que nous devons concentrer nos efforts. Il y a huit fois plus de décès causés par des piqûres d'abeilles que par la prise de suppléments.

    Voici donc nos recommandations; il y en a cinq.

    Nous estimons qu'il devrait y avoir un moratoire immédiat visant le programme relatif aux normes de preuve applicables aux produits de santé naturels et que le ministre de la Santé devrait être invité à mettre fin à ce programme.

    Nous croyons aussi qu'il faudrait réintroduire certains suppléments. Comment? Premièrement, un certain nombre de suppléments qui ont été retirés du marché permettaient à des gens d'endurer la douleur, de se maintenir en santé et même de se garder en vie. Il devrait probablement y avoir un comité indépendant chargé d'étudier les suppléments qui ont été retirés du marché et de recommander qu'ils soient réintroduits lorsque ce serait approprié.

  +-(1240)  

    Oui, l'industrie des aliments fonctionnels et neutraceutiques est une grosse industrie. Elle croît rapidement et est fort probablement nécessaire. Nous croyons qu'il y a une telle différence entre les aliments fonctionnels et neutraceutiques et les suppléments alimentaires qu'ils devraient entrer dans deux catégories distinctes. La Direction des produits de santé naturels devrait en fait réorienter ses activités vers les aliments fonctionnels et neutraceutiques, et les suppléments alimentaires devraient demeurer dans la catégorie des aliments.

    Notre quatrième recommandation, c'est justement que les suppléments continuent d'être considérés comme des aliments. Leur sécurité est établie depuis longtemps. Il n'y a eu aucun décès attribuable avec certitude à des produits de la catégorie des aliments. Ce serait en outre conforme au DSHEA, aux États-Unis. Si le projet de loi C-420 est adopté, le problème devrait se régler. Mais s'il est rejeté, il faudrait décréter un moratoire immédiatement, en attendant que les suppléments alimentaires puissent être inscrits dans la catégorie des aliments.

    Enfin, en ce qui concerne les allégations relatives aux suppléments, nous croyons qu'il faudrait autoriser des allégations raisonnables pour ceux qui sont sur le marché depuis longtemps, comme cela se fait aux États-Unis. Si les compagnies veulent passer par un processus d'approbation pour pouvoir faire des allégations au sujet de nouveaux suppléments qui ne sont pas sur le marché depuis longtemps, nous serions également d'accord.

    Nous tenons à souligner qu'il y aura des millions de Canadiens mécontents quand ils se rendront compte qu'ils ne peuvent plus avoir accès aux suppléments qu'ils consomment depuis des années. Ils vont être fâchés contre les médias généralistes, qui ne les auront pas mis au courant. Ils vont être très fâchés contre leurs représentants politiques, qui n'auront pas protégé leurs droits. Il est essentiel que les suppléments demeurent accessibles à faible coût.

    Merci beaucoup.

  +-(1245)  

+-

    La présidente: Merci, monsieur Boyes.

    Nous allons maintenant passer aux questions.

    Madame Crowder, avez-vous des questions?

+-

    Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD): J'en ai une, mais c'est probablement plus un commentaire qu'une question.

    Nous avons eu cette semaine une présentation très intéressante des producteurs laitiers sur la Colline. La plupart d'entre nous reconnaissent, je pense, qu'il est extrêmement important que les consommateurs canadiens aient accès à des suppléments sûrs et de qualité et qu'ils comprennent ce qu'ils consomment, quel en est le dosage, quelle en est la qualité—tous les éléments énoncés dans les BPF.

    Je me considère comme une consommatrice relativement avertie, mais une des choses qui m'ont choquée cette semaine, c'est que les Canadiens consomment ce qu'on appelle des produits de lait modifié dans des aliments comme la crème glacée et le fromage. En fait, ils ne savent pas vraiment ce qu'ils consomment.

    Il me semble—même si je reconnais qu'il est important que les suppléments soient facilement accessibles—que nous n'abordons pas le problème sous le bon angle. Nous devons vraiment examiner nos disponibilités alimentaires pour nous assurer que les aliments que nous consommons sont sûrs, qu'ils ne contiennent pas d'organismes génétiquement modifiés ni d'éléments comme des hormones de croissance bovine, qui se retrouvent dans les produits de lait modifiés qui nous arrivent de l'autre côté de la frontière. Et nous ne pouvons pas nous y opposer parce que l'article 28 du GATT n'est pas appliqué.

    J'aimerais savoir ce que vous pensez du fait que nous ne faisons qu'appliquer une solution symbolique et temporaire en nous intéressant aux suppléments plutôt qu'à la qualité de nos disponibilités alimentaires.

    Madame Dean, je vois que vous approuvez de la tête. Pourriez-vous commenter?

+-

    Dr Carolyn Dean: Merci beaucoup, madame Crowder.

    Quand on regarde la version originale de la Loi sur les aliments et drogues, on constate qu'elle précise que les aliments ne doivent pas être dénaturés par l'ajout de sucre, de sel ou d'autres produits chimiques. En fait, comme l'a dit Mme Crowder, cela inclut l'aspartame. Pourtant, le NutriSweet a été autorisé dans des milliers de produits de régime. L'aspartame est composé notamment de méthanol, qui est de l'alcool de bois. Mais pourquoi diable voudrions-nous ajouter un adultérant comme le méthanol dans nos produits alimentaires?

    Il y a 15 ou 20 ans, quand ce produit a été autorisé, la personne qui l'a approuvé pensait la même chose que moi. Quand j'étais petite, je n'avais droit qu'à une boisson gazeuse par semaine, mais il y a aujourd'hui des enfants qui boivent des litres et des litres de boissons-diète. Les gens qui ont un surplus de poids en boivent en espérant que cela leur fera perdre du poids, alors qu'en fait, l'aspartame affecte leur système endocrinien de telle façon que cela leur en fait prendre.

    Je suis d'accord pour dire que nous avons changé notre angle de vision et que nous considérons maintenant les suppléments alimentaires comme un problème, alors que l'alimentation est aujourd'hui un gros problème pour les Nord-Américains. Comme nous l'avons déjà dit, quand nos aliments proviennent de sols qui ne contiennent pas d'engrais auxquels ont été ajoutés des minéraux, ils ne peuvent pas contenir les minéraux dont nous avons besoin.

    Je voulais vous montrer une diapositive du cycle de Krebs. C'est un cycle qui concerne la fonction métabolique du corps. J'ai appris à la faculté de médecine que pour chaque voie, dans ces 13 étapes, le cycle de Krebs requiert un ou deux vitamines et minéraux différents. Si vous n'avez pas les vitamines et les minéraux nécessaires dans votre alimentation ou dans vos suppléments alimentaires, votre système ne fonctionne pas. C'est la raison pour laquelle les gens sont fatigués et malades. Ils se présentent chez le médecin avec les symptômes d'une carence en magnésium, et on leur prescrit un produit pharmaceutique.

    Je n'ai rien appris sur la nutrition à la faculté de médecine. On m'a dit que nous trouvions tout ce qu'il fallait dans notre alimentation. Et la formation médicale n'a guère changé depuis ce temps-là. C'était au milieu des années 1970, il y a 30 ans. On nous disait que tous les éléments nécessaires étaient présents dans notre alimentation, mais ce n'est pas vrai. La médecine ne l'a pas encore compris.

    Je suis vraiment désolée d'avoir eu à écrire ce livre au sujet de la médecine moderne. Mais si les médecins ne reconnaissent pas les besoins des gens en matière d'éléments nutritifs et s'ils sont devenus uniquement des machines à prescrire des médicaments brevetés, ils ne méritent plus la confiance du public.

  +-(1250)  

+-

    Mme Jean Crowder: Merci.

    Je pense que ce sera tout pour moi.

+-

    La présidente: Merci, madame Crowder.

    Monsieur Thibault.

+-

    L'hon. Robert Thibault: Madame la présidente, je voudrais faire quelques commentaires, après quoi j'aimerais entendre la réaction du Dr Hoffer, s'il le veut bien.

    Premièrement, je tiens à m'excuser pour le petit nombre de députés présents aujourd'hui. Il est inacceptable, à mon avis, que les parrains de ce projet de loi d'initiative parlementaire ne soient pas ici pour entendre vos déclarations, pour vous poser des questions et pour approfondir le sujet. Je pense qu'ils auraient aimé être ici, mais ils ont dû se plier à la discipline de parti et ils n'ont pas pu venir, ce qui est très regrettable.

    Mais je vous remercie d'être venus.

    Quelques personnes ont suggéré que ces produits ne soient plus assujettis à la réglementation visant les aliments et qu'ils soient considérés séparément. En fait, ils ont toujours été assujettis à la réglementation concernant les médicaments. Il leur faut une identification numérique et il y a ensuite un transfert; il y a un programme de transfert en vigueur jusqu'en 2010.

    Je reprends la question suivante parce qu'elle a été soulevée par bon nombre de nos témoins: est-ce que nous avons toutes les forces en place pour faciliter cela, pour faire en sorte que cela se réalise dans les délais prévus? Je pense que c'est une question valable, que nous allons certainement évoquer de nouveau avec les gens de Santé Canada.

    L'autre élément que je voulais souligner, c'est que, quand on regarde le projet de loi C-420—et je pense en particulier à la déclaration du Dr Hoffer—, il ne s'agit pas de savoir si nous croyons ou non aux suppléments, aux additifs et aux produits de santé naturels, ou encore à la médecine et à une saine alimentation. Beaucoup de vos déclarations allaient dans ce sens-là. Mais là n'est pas la question, il me semble.

    Tout ce qui compte à mon avis, c'est que, comme consommateur, si on cherche à me vendre quelque chose en tant que médicament et non en tant qu'aliment, pour guérir ou pour prévenir une maladie, je veux être certain que c'est effectivement le produit qu'on prétend, qu'il fait ce qu'il est censé faire, qu'il est fabriqué selon des pratiques appropriées et qu'il a fait l'objet d'un certain niveau d'examen scientifique pour vérifier les dires du fabricant. Je veux de l'information sur la posologie. Je veux une étiquette claire. Y a-t-il des risques? Y a-t-il des possibilités d'interactions si je prends une trop grande quantité d'un acide aminé, d'une préparation ou d'un concentré à base d'herbes médicinales, ou de quoi que ce soit d'autre? C'est parce que je ne suis pas un expert dans le domaine.

    Je ne peux pas me faire de tort en mangeant des bananes. Il y a du potassium dans les bananes, mais c'est un aliment. Je ne pense pas qu'il soit possible de manger suffisamment de bananes pour faire une surdose de potassium, mais si je prends du concentré de potassium sous forme de poudre ou de liquide, peut-être que je peux me faire du tort. Je ne le sais pas, alors il est raisonnable à mon avis de faire ce que beaucoup de nos témoins ont suggéré, à savoir que cela reste dans la catégorie des médicaments.

    Ma question pour le Dr Hoffer est la suivante. Une des suggestions qui nous ont été faites à maintes reprises, c'est que l'annexe A et les dispositions exécutoires soient abolies de manière à ce qu'il soit possible de vanter les avantages des produits pour la santé, à partir de preuves scientifiques raisonnables, dans des domaines où ce n'est pas permis actuellement. Vous pratiquez la médecine traditionnelle et vous prônez aussi une saine alimentation. Seriez-vous d'accord avec moi sur ce point? Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet-là?

+-

    Dr Abram Hoffer: Je pense que cette observation est absolument vitale. Nous devons être certains que nous achetons bien les produits annoncés sur l'étiquette. Nous devons avoir toutes les garanties que nous exigeons actuellement pour les médicaments, et peut-être même plus. Nous devons aussi avoir les garanties que nous exigeons pour nos aliments. Le principal problème, à mon avis, c'est que l'application de la Loi sur les aliments et drogues relève surtout de gens qui ne connaissent pas très bien la nutrition et les vitamines et qui cherchent par conséquent à appliquer aux vitamines les mêmes critères qu'aux médicaments.

    Il y a bien des années, par exemple, on pouvait facilement se procurer de l'acide folique sans ordonnance au Canada, en comprimés de 25 milligrammes, mais depuis 10 ou 15 ans, il faut une ordonnance. Il est encore possible d'acheter des comprimés de 800 microgrammes d'acide folique, mais rien de plus fort.

    Des études récentes réalisées par la faculté de médecine de Harvard ont démontré que l'acide folique à fortes doses—25 milligrammes par jour—était excellent contre la dépression, presque aussi efficace que les médicaments antidépresseurs et peut-être même plus, sans aucun effet secondaire. Je peux donner de l'acide folique à mes patients parce que je suis autorisé à rédiger des ordonnances, mais d'autres personnes qui aimeraient en prendre ne peuvent pas le faire. C'est à cause de données qui remontent à 30 ou 40 ans, et selon lesquelles l'acide folique, à aussi fortes doses, pourrait être dangereux parce qu'il pourrait masquer les symptômes de l'anémie pernicieuse. Or, les données récentes montrent que ce n'est pas le cas; c'était fondé sur un ou deux cas qui n'ont pas été validés dans les textes récents.

    Je reconnais qu'il faut une certaine sécurité. En ce qui concerne les allégations relatives aux bienfaits des produits, je n'y fais pas vraiment attention. Je pense que les gens doivent prendre ces allégations au sérieux, mais aussi que les vitamines doivent être disponibles même sans cela. Je ne crois pas que nous devions appliquer aux vitamines les mêmes critères stricts qu'aux médicaments.

  -(1255)  

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    L'hon. Robert Thibault: Si vous me permettez de vous interrompre, nous avons entendu un témoin qui a comparu à titre personnel, mais qui avait dans sa famille des gens souffrant de maladie mentale; il était très inquiet. Quand je parle des allégations concernant les bienfaits des produits, c'est de ce point de vue-là: c'est quand un consommateur achète un produit qu'on lui présente comme étant bon pour la santé sans que cela soit fondé sur des données scientifiques. Ce n'est pas nécessairement vrai.

    Vous êtes psychiatre. Vous avez une formation médicale et vous vous servez de ces produits de santé naturels dans votre pratique, mais certainement pas pour tous vos patients. Je suis sûr qu'il y a des patients pour lesquels l'acide folique ne sera pas utile et qui auront besoin d'autres thérapies, d'un autre type d'aide. Ce qui est inquiétant, c'est que s'il y a sur le marché de l'acide folique—ou n'importe quel autre composé d'un produit de santé naturel—qui n'est pas réglementé et qui est présenté comme ayant des bienfaits pour la santé, des gens qui sont atteints d'une maladie mentale grave et qui auraient besoin de votre aide, ou de l'aide d'un membre de votre profession, pourraient croire qu'ils se traitent efficacement parce qu'ils en consomment. À mon avis, c'est cela que les gens craignent.

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    Dr Abram Hoffer: C'est un risque, en effet. Je pense qu'il n'est pas très grand parce que la plupart des gens qui souffrent d'une maladie mentale grave voient d'abord un médecin. Dans ma propre pratique, je prescris aussi des médicaments. En fait, j'ai été un des premiers à prescrire le premier tranquillisant nord-américain, l'Haldol, dès 1956. J'ai commencé à prescrire du lithium en 1952, avant même qu'il soit disponible. Je donne à mes patients les produits, quels qu'ils soient, qui les aideront sans leur faire de tort.

    Ce que j'utilise, c'est une combinaison appropriée de suppléments alimentaires et de nutrition. Je dois souligner que les suppléments alimentaires ne remplacent pas les aliments. Il est extrêmement important que l'alimentation demeure primordiale. Nous devons tirer tout ce que nous pouvons de nos aliments, et nous servir ensuite de suppléments seulement si ces aliments ne répondent pas à nos besoins particuliers.

    Mais votre observation est tout à fait valable. Au sujet des allégations concernant les bienfaits des produits, je préférerais qu'on autorise uniquement les allégations généralement acceptées et que toute nouvelle allégation doive être présentée dans des revues spécialisées en médecine et en nutrition.

    J'ai été directeur de la recherche psychiatrique pour le gouvernement de la Saskatchewan de 1950 à 1967, à l'époque de Tommy Douglas. Nous avons réalisé les premières expériences de contrôle à double insu de toute l'histoire de la psychiatrie et nous avons démontré qu'il était possible de récupérer beaucoup plus de patients schizophrènes en leur donnant tout de suite un traitement appelé «orthomoléculaire».

    Soit dit en passant, je suis président de l'International Schizophrenia Foundation et, si vous êtes libres la fin de semaine prochaine, je vous invite à passer nous voir au Château Laurier. Nous tenons notre assemblée annuelle vendredi, samedi et dimanche matin. Vous serez les bienvenus.

    Je pense effectivement qu'il faut des garanties et qu'il ne faut pas autoriser les allégations complètement fallacieuses.

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    La présidente: Merci beaucoup.

    Merci, monsieur Thibault.

    Au nom de mes collègues, je remercie tous les témoins. Je dois malheureusement mettre fin à la séance parce que certains d'entre nous avons une séance à 13 heures, pour laquelle nous sommes quelques minutes en retard. Merci à tous d'être venus et de nous avoir fait part de vos réflexions approfondies sur ce sujet très sérieux.

    M. Thibault veut présenter un avis de motion.

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    L'hon. Robert Thibault: J'ai remis la motion à la greffière, et elle m'a dit qu'elle était appropriée.

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    La présidente: La motion porte sur l'approbation de la nomination du Dr Bernstein à la tête des IRSC. Nous sommes censés étudier cette question. Il a déposé une motion en ce sens. Nous nous en occuperons la semaine prochaine.

    Madame Crowder et monsieur Thibault, merci de nous avoir permis d'atteindre le quorum en l'absence des membres des deux autres partis.

    La séance est levée.