:
Je vous remercie, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, de m'avoir invité à comparaître devant vous.
Je dois préciser d'entrée de jeu que je n'ai ni expertise ni expérience dans bon nombre des domaines visés par ce projet de loi. Je présume donc que vous m'avez invité en ma qualité d'avocat associé pour la Commission Gomery. Grâce à mon travail dans ce dossier, j'ai pu me faire une idée sur plusieurs des questions abordées par le projet de loi. J'ai notamment pu interroger le greffier du Conseil privé et les sous-ministres du Conseil du Trésor, du BCP, des Finances et de TPSGC, qui m'ont permis d'y voir plus clair dans les interrelations entre la fonction publique et les dirigeants élus. Cela pourra m'aider à commenter différentes parties des modifications suggérées à la Loi sur la gestion des finances publiques. J'ai également interrogé M. Chuck Guité. Vous vous souviendrez que lors de son contre-interrogatoire qui a duré trois jours, il m'a présenté une version des faits différente de celle qu'il avait donnée au Comité des comptes publics relativement aux décisions prises et aux comptes qu'il avait à rendre. Je devrais donc être en mesure de formuler quelques observations sur les dispositions de la LGFP qui touchent la reddition de comptes.
J'ai aussi interrogé M. Allan Cutler, le dénonciateur, ce qui devrait me permettre de m'exprimer sur les dispositions de la loi à ce chapitre.
J'ai des observations à formuler sur trois parties de la loi. La première est assez particulière. Elle concerne la proposition de retirer aux employés des cabinets ministériels le droit d'être nommés sans concours. En vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, le chef de cabinet de M. Gagliano, M. Tremblay, a été nommé sans concours au sein du groupe de M. Guité avant de remplacer ce dernier à la tête de ce groupe.
Il ne fait aucun doute que plusieurs excellents fonctionnaires sont d'abord passés par les cabinets des ministres avant d'arriver à la fonction publique où ils occupent maintenant un poste de sous-ministre. Ceci étant dit, j'estime que la clause proposée serait bénéfique. Il y a une perception de favoritisme ainsi qu'une perception de conflit d'intérêts. En tout cas, c'est certainement ce qui est ressorti à mon avis devant la Commission Gomery.
En deuxième lieu, j'aimerais vous parler des dispositions touchant la protection des dénonciateurs. Il est important de pouvoir compter sur un processus équitable pour ces cas particuliers. Il faut absolument trouver le juste équilibre entre, d'une part, la nécessité d'établir un processus équitable et transparent pour les dénonciateurs, en les mettant notamment à l'abri des représailles, et, d'autre part, le besoin légitime des fonctionnaires de pouvoir s'acquitter de leurs tâches sans être intimidés ou sans craindre une chasse aux sorcières. Il faut donc offrir un processus valable pour le traitement des plaintes. Il faut pouvoir compter sur un décideur qui s'appuiera sur son expertise de tous les aspects du gouvernement pour bien jauger les intérêts de chacun; il faut aussi que le processus soit équitable et expéditif — et je dis bien expéditif. D'une manière générale, je pense que le projet de loi offre ce processus efficace.
J'aimerais insister sur la question des représailles. Les plaintes sont présentées au commissaire qui est censé posséder l'expertise voulue. L'article 19.3 proposé à la page 130 du projet de loi prévoit que le commissaire peut refuser de statuer sur une plainte si l'objet de cette plainte a été instruit comme il se doit dans le cadre d'une autre procédure ou si elle n'est pas faite de bonne foi. Je crois qu'il s'agit là d'une mesure protectrice très importante pour la bonne marche de la fonction publique dans son ensemble. Je dirais que cette fonction de sauvegarde est grandement assimilable à celle établie par la Loi sur la concurrence. Je constate d'ailleurs de nombreuses similitudes entre ces dispositions touchant les dénonciateurs et celles de la Loi sur la concurrence, un texte législatif que je connais très bien pour avoir plaidé de nombreux cas s'y rapportant.
Je voudrais aussi signaler la disposition prévue à l'article 20.4 proposé à la page 136 du projet de loi, en vertu de laquelle le commissaire peut présenter une demande au tribunal de protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles. Ce tribunal est composé de juges, ce qui est une bonne chose en soi. Ils sont au-dessus de tout reproche; ils sont à l'abri des conflits d'intérêts. Ce qui m'inquiète — en ma qualité d'avocat plaidant — c'est que la procédure peut exiger beaucoup de temps et peut être assortie d'une grande quantité de mécanismes, ce qui est à éviter absolument.
Une autre disposition importante de ce projet de loi que j'aimerais mettre en exergue est l'article 21 proposé à la page 139. On y précise que l'instruction des plaintes doit se faire sans formalisme et avec célérité. Malgré le fait que l'on s'adresse à des juges qui ont l'habitude des processus judiciaires où les règles de la preuve doivent être suivies, on prévoit une procédure rapide et sans formalisme. Pour autant que cette disposition soit respectée, voilà une préoccupation qui est réglée.
En troisième lieu, j'aimerais discuter des préoccupations concernant les modifications à la Loi sur la gestion des finances publiques qui font en sorte que les administrateurs des comptes — et particulièrement les sous-ministres — sont responsables devant le Parlement.
La modification envisagée à l'article 16.4 proposé à la page 174 du projet de loi rend le sous-ministre comptable devant le Parlement dans le cadre des attributions du ministre compétent et de son obligation de rendre compte au Parlement.
Si je me fie à nouveau à mon expérience avec la Commission Gomery, il est tout au moins nécessaire qu'il y ait obligation de répondre au Parlement. Le fait est que les sous-ministres répondent déjà au Parlement et aux comités parlementaires; ils peuvent actuellement être convoqués devant un comité. La disposition proposée permet de codifier cette obligation de répondre et je pense que cela pourrait — et je dis bien « pourrait » — créer une situation où il y aurait moins de risques de communications et de reddition de comptes de manière régulière et continue par un bureaucrate de niveau intermédiaire à l'extérieur de la chaîne de commandement.
Il faut toutefois établir une distinction nette entre l'obligation de répondre et la reddition de comptes, parce qu'on ne veut pas créer une dichotomie propice aux querelles entre la fonction publique — les gens non élus — et les représentants élus. Ce sont ces derniers qui doivent être responsables des politiques. En principe, il faut faire bien attention de ne pas brouiller les lignes de responsabilité et d'ainsi rendre, par inadvertance, les sous-ministres responsables des décisions politiques.
Je pense que ce projet de loi règle en grande partie ce problème. À ce titre, ses rédacteurs se sont montrés prudents sous trois aspects. Premièrement, on précise que la responsabilité du sous-ministre s'inscrit dans le cadre des attributions du ministre compétent et de son obligation de rendre compte au Parlement. Cela fait ressortir le principe constitutionnel du gouvernement responsable.
Deuxièmement, les alinéas 16.4(1)a), b), c) et d) proposés pour la Loi sur la gestion des finances publiques prévoient que le sous-ministre doit rendre des comptes à l'égard de l'affectation des ressources du ministère, de son contrôle interne, de la signature des comptes — c'est lui qui devrait en être responsable — et, l'aspect qui m'inquiète, des attributions « relatives à l'administration du ministère ».
À la lumière de mon expérience en l'espèce, l'administration et les politiques peuvent en venir à se confondre. J'estime qu'il ressort clairement des alinéas a), b) et c) proposés que l'intention de l'alinéa d) proposé était qu'il n'y ait pas responsabilisation à l'égard des politiques. Vous pourriez notamment envisager la possibilité de rendre cette prescription plus explicite.
Sous réserve de ces mises en garde, monsieur le président, j'estime qu'il s'agit là d'un très bon effort pour trouver un juste équilibre entre les intérêts de chacun. Il faut toutefois bien s'assurer de ne pas embrouiller les lignes sans le vouloir. En autant que je sache, c'est la première fois — et vous me corrigerez si je me trompe — qu'un pays où la common law est appliquée codifie ainsi cette obligation. Je ne veux pas dire par là que nous ne devrions pas nous engager sur un terrain inconnu. Christophe Colomb n'aurait jamais découvert l'Amérique s'il avait eu peur de d'emprunter des voies non balisées. Je veux simplement faire valoir qu'il faut prendre bien garde de se limiter uniquement aux problèmes visés par cette mesure.
Merci.
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Le Conseil du Trésor avait aussi volontairement omis d'appliquer les règles de surveillance qu'il devait appliquer à ce moment-là. Mme Fraser nous a dit qu'il y avait environ 72 000 règles — je ne sais pas si c'était un chiffre exagéré ou une réalité — qui concernaient la reddition de comptes, l'imputabilité, la responsabilité, etc., et qu'on en imposait d'autres maintenant.
Je vais d'abord aborder le sujet de la perception, si vous me le permettez. Selon le gouvernement conservateur, le projet de loi C-2 vise entre autres à corriger le problème de la mauvaise administration dans la fonction publique, ainsi que la perception. J'ai demandé à un témoin qui connaissait bien ce domaine si d'autres projets de loi similaires dans d'autres instances, qu'il s'agisse des provinces ou d'autres pays, avaient corrigé le problème de perception, puisqu'il s'agit d'un des objectifs visé par la loi. Or, il nous a dit que ce n'était pas le cas.
Lorsqu'on a étudié le projet de loi qui avait pour but d'instituer un commissaire à l'éthique et de créer un code d'éthique pour les députés et les ministres et un autre pour les sénateurs, j'ai entendu dire qu'il visait à corriger la perception. Deux ou trois ans après la création d'un poste de commissaire à l'éthique, je ne crois pas que la population pense qu'on a corrigé la perception. Vous dites que l'élimination des nominations sans concours corrigerait la perception du public. À mon avis, cela corrigerait la perception du public qui s'intéresse aux travaux du comité en ce moment, mais pas celle du public en général.
Donc, entre l'objectif visé par le projet de loi et celui qui sera atteint, je crois qu'il y a un monde de différence. Mais cela ne signifie pas qu'il ne faut rien faire. J'aimerais entendre vos commentaires à cet égard.
Également, vous avez parlé de ce qui fonctionne bien dans le projet de loi, notamment l'élimination des nominations sans concours des employés et la protection des divulgateurs. Cependant, si vous avez lu certains articles qui vous plaisaient moins, même si vous n'en avez pas parlé aujourd'hui, j'aimerais que vous nous fassiez part de vos commentaires, par l'entremise du président ou de la greffière, afin que nous puissions, nous aussi, bonifier le projet de loi C-2. Même si vous avez fait quelques commentaires positifs, je suis convaincu qu'à vos yeux, le projet de loi n'est pas parfait.
J'aimerais donc que vous nous fassiez part de vos commentaires ou des amendements que vous aimeriez nous proposer.
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Merci, monsieur le président, et merci à vous pour votre exposé.
J'aimerais traiter des trois sujets dont vous nous avez parlé. Je vais commencer comme vous par la question du personnel politique exonéré et du mode de fonctionnement à cet égard.
Je dois dire que je ne suis pas d'accord avec mon collègue. J'aimerais que ces dispositions puissent s'appliquer rétroactivement, surtout après avoir vu encore une fois des gens être parachutés dans les différents ministères juste après les dernières élections. Je peux vous dire, en tant que résidant d'Ottawa, et en tant que député qui représente des fonctionnaires, que cela crée au sein de la fonction publique un certain ressentiment, c'est le moins qu'on puisse dire, lorsque l'on voit des gens prendre ainsi des raccourcis et accéder sans le mériter — qui dit processus concurrentiel, dit aussi principe du mérite — à des postes pour lesquels d'autres doivent attendre et poser leur candidature. C'est simplement un commentaire.
L'autre aspect que nous n'avons pas abordé est celui de la situation inverse, c'est-à-dire les gens qui viennent de la fonction publique et qui sont en détachement au sein du personnel politique. J'aimerais en discuter brièvement. C'est une chose qui arrive. Il y a des gens dans cette ville— je ne sais pas combien exactement — et j'ai parlé à certains d'entre eux, qui ne sont pas des membres du personnel politique qui passent à la fonction publique, mais plutôt des fonctionnaires qui sont détachés et occupent un poste politique. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Deuxièmement, nous avons parlé de la nécessité de compter sur un processus équitable et expéditif pour protéger les dénonciateurs contre les représailles. J'aimerais que vous nous disiez qui devrait en faire partie selon vous. Vous avez abordé la question et M. Cutler également en parlant du fait qu'un tel mécanisme ne devrait pas être composé uniquement de juges, mais inclure aussi d'autres participants, sans compter la possibilité d'avoir recours aux tribunaux en dernier ressort. Le cas échéant, quel devrait être le soutien offert aux dénonciateurs? Devrait-il être de l'ordre de 3 000 $ ou de 1 500 $, étant donné que les dénonciateurs sont parfois opposés à un ministère qui est plutôt bien nanti du point de vue des ressources?
Mon dernier point concerne vos commentaires sur les politiques et la reddition de comptes. Je constate que les recommandations du juge Gomery comportent différents éléments qui pourraient régler cette préoccupation. Si on veut codifier le tout, la recommandation 2 prévoit notamment une charte de la fonction publique, mais il y a aussi des observations au sujet de la durée de maintien en poste d'un sous-ministre. Beaucoup de gens ici croient que les sous-ministres ne sont pas en fonction suffisamment longtemps. Je peux certes y voir un problème si on demande aux sous-ministres de rendre davantage de comptes. Cela devient très difficile si vous n'êtes là que depuis six ou huit mois. Comment pouvez-vous rendre des comptes si vous n'étiez pas là auparavant? J'aimerais connaître votre point de vue à ce sujet, parce que cela faisait partie du rapport Gomery et parce que ce problème a été soulevé par d'autres décideurs et par des gens qui se penchent sur les politiques. On recommande aussi que les comités soient dotés des ressources suffisantes, de telle sorte que le Comité des comptes publics, notamment, ait accès à tout ce dont il a besoin pour faire son travail.
Je vais en rester là pour l'instant.
Merci.
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Pour votre question concernant les fonctionnaires qui occupent des postes politiques, je n'ai aucun commentaire à formuler. J'ai seulement eu connaissance de l'inverse et mes observations se limitaient à cet aspect. Sans dire si c'est une bonne ou une mauvaise chose, j'estime que cela soulève des préoccupations différentes.
Un membre du personnel politique qui passe à la fonction publique, ce n'est pas du tout comme un fonctionnaire non partisan qui accède à un poste partisan. Des problèmes peuvent survenir si le fonctionnaire retourne à son ancien poste, mais je crois que cela dépasse la portée de ce projet de loi.
Pour ce qui est de la composition du tribunal, je vous ai parlé de celui de la concurrence. C'est le tribunal que je connais le mieux; il est composé de juges de la Cour fédérale et de non-spécialistes possédant une expertise pertinente. Le quorum est de trois membres. Il doit y avoir au moins un juge et un non-spécialiste, généralement un économiste; l'autre personne pouvant être juge ou économiste. Il y a donc deux juges ou un économiste ou encore un juge et deux non-spécialistes.
Voilà donc certes une autre façon possible de procéder pour ce tribunal-ci: des gens possédant l'expertise du gouvernement et des juges qui formeraient un panel hétérogène.
Quant aux tribunaux, je ne crois pas qu'ils constituent une option valable. En fait, j'ai soutenu exactement le contraire. J'ai parlé des très longs délais et du fait que les tribunaux sont un mécanisme public ce qui, dans bien des cas, peut causer des torts épouvantables à la réputation d'une personne innocente — que ce soit le dénonciateur ou la personne dénoncée. Il serait très injuste pour cette personne de se retrouver sur la sellette pendant un processus aussi long. Ces cas doivent être réglés rapidement.
Je ne dirais donc pas que les tribunaux représentent une option.
Pour ce qui est de la recommandation voulant que les sous-ministres soient nommés de manière inamovible, je ne pense pas non plus que cela s'inscrive dans le mandat de la Loi fédérale sur l'imputabilité. J'estime qu'il est plutôt préférable de procéder au cas par cas.
C'est toujours la question de l'expérience contre le besoin de changement. Parfois, c'est l'expérience que vous recherchez et vous ne voudriez pas être obligé d'apporter un changement; en d'autres occasions, vous souhaitez un changement, et vous êtes coincé.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'ai une déclaration préliminaire à faire. Je vais alterner entre le français et l'anglais. M. Hamel m'aidera ensuite à répondre à vos questions.
Le 8 mai 2006, j'ai été nommée présidente intérimaire de la Commission des relations de travail dans la fonction publique par la ministre du Patrimoine canadien, jusqu'à ce qu'un nouveau président soit nommé. La ministre du Patrimoine canadien est désignée aux fins de l'application de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.
[Français]
C'est donc avec plaisir que je me présente devant vous à ce titre, pour discuter du mandat et des responsabilités de la commission en vertu des diverses lois, principalement la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.
[Traduction]
La Commission des relations de travail dans la fonction publique est un tribunal statutaire quasi judiciaire indépendant, responsable de l'administration des processus de négociation collective et d'arbitrage de griefs dans la fonction publique fédérale et au Parlement.
Le succès de la Commission quant au mandat dont le Parlement l'a chargée repose largement sur l'impartialité et la neutralité — réelle ou perçue — qu'elle exerce dans les affaires dont elle est saisie. De façon à assurer cette neutralité, vitale à notre indépendance et notre crédibilité, vous comprendrez que je dois me garder d'émettre une quelconque opinion sur les dispositions de fond du projet de loi C-2 actuellement à l'étude, ainsi que sur toute autre disposition législative qui peut être débattue devant la Commission dans le cadre d'un arbitrage de grief. Il serait également inapproprié que j'émette tout commentaire concernant un cas particulier actuellement devant la Commission. Par conséquent, j'estime que j'ai une obligation de réserve en ce qui a trait aux affaires discutées à ce comité. J'ose espérer que le comité comprendra cette obligation.
Je réalise que l'intérêt du comité porte particulièrement sur les modifications que le projet de loi C-2 entend apporter à la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles et qui ont une incidence sur la Commission. La loi donne à la Commission la responsabilité d'entendre les plaintes de représailles déposées par des fonctionnaires. Les modifications que le projet de loi C-2 entend apporter à cette loi supprimeraient cette responsabilité de la Commission et établiraient un nouveau Tribunal de la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, chargé d'entendre ces affaires et de rendre une décision.
[Français]
Certains ont suggéré que la commission demeure le tribunal devant lequel les fonctionnaires peuvent déposer les plaintes de représailles. Pour les raisons précitées, je ne me prononce ni sur l'une ni sur l'autre de ces propositions. Cependant, permettez-moi de décrire sommairement le mandat et les responsabilités actuelles de la commission dans le but d'éclairer vos délibérations.
Comme vous le savez certainement, la commission a été créée en 1967, à titre de tribunal statutaire quasi judiciaire indépendant et, depuis, a développé une jurisprudence et une connaissance considérables en ce qui concerne les relations de travail dans la fonction publique et au Parlement.
Bien qu'une nouvelle commission ayant un mandat plus large ait été créée le 1er avril 2005, avec l'entrée en vigueur de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, il reste qu'elle perpétue le travail de l'ancienne commission.
En tant qu'organisme indépendant, la commission est un employeur distinct et fait état de ses activités directement au Parlement, par l'entremise du ministre désigné, qui est en ce moment le ministre du Patrimoine canadien.
Les commissaires sont nommés à partir de deux listes. L'une provient de l'employeur et l'autre, des agents négociateurs. Ces nominations doivent être faites de sorte que dans la mesure du possible, un nombre égal de membres soient choisis à partir de chacune de ces listes. Bien que leur nomination soit recommandée par l'une ou l'autre des parties, soit par l'employeur ou par l'agent négociateur, en vertu de la loi, les commissaires ne représentent ni l'employeur ni les fonctionnaires, et doivent se conduire de façon impartiale en tout temps après leur nomination. Les commissaires sont également guidés par un code de conduite et des lignes directrices que la commission a révisées tout récemment, soit en 2005.
Finalement, la loi dispose qu'afin d'être admissible pour occuper les fonctions de commissaire, une personne doit posséder des connaissances et de l'expérience relatives aux relations de travail.
Afin de mener à bien son mandat, la commission entend et décide des demandes et des plaintes de différentes natures, y compris les plaintes de fonctionnaires qui ont fait l'objet de représailles pour avoir exercé des droits que la loi leur donne ou après avoir participé à des activités syndicales légitimes. La commission est aussi responsable de trancher sur des questions concernant des plaintes de fonctionnaires s'estimant victimes de représailles pour avoir exercé un droit qui leur est reconnu dans la partie II du Code canadien du travail, c'est-à-dire les dispositions sur la santé et la sécurité. La commission a acquis cette compétence en 1986, et 33 affaires de ce type sont présentement devant elle.
[Traduction]
Le gros du travail de la commission consiste à trancher des griefs déposés par des fonctionnaires fédéraux qui portent sur l'application et l'interprétation d'une convention collective, sur des mesures disciplinaires qui leur sont imposées ou sur leur renvoi pour des raisons disciplinaires ou autres.
La loi prévoit que les commissaires entendent et décident des griefs et font office d'arbitres de grief, tels qu'assignés par la présidence. En ce qui a trait aux affaires de la commission, un groupe de trois commissaires peut être nommé à la discrétion de la présidence.
La compétence de la commission s'étend à approximativement 221 000 fonctionnaires regroupés dans 86 unités de négociation et représentés par 30 agents négociateurs. Le Conseil du Trésor est l'employeur de plus de 162 300 fonctionnaires. Les autres fonctionnaires travaillent pour l'un des 23 organismes distincts. À ceux-ci s'ajoutent les quelque 2 700 employés du Parlement.
La commission gère présentement 4 037 dossiers de griefs présentés en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et la Loi sur les relations de travail au Parlement.
En vertu de la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, les arbitres de griefs peuvent traiter de questions touchant aux droits de la personne dans le cadre des griefs dont ils sont saisis, ce qui n'était pas possible aux termes de l'ancienne loi. Cette compétence existe concurremment aux droits des fonctionnaires fédéraux de déposer une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne et permet à cette commission de faire des représentations devant un arbitre de griefs lorsque des questions touchant aux droits de la personne sont en jeu.
La commission offre également des services de médiation et de résolution de conflits afin d'aider les parties à résoudre leurs problèmes à la table de négociation ou à régler leurs différends sans avoir recours au processus d'audience formelle.
Dans le cadre de son nouveau mandat élargi, la commission a créé un nouveau service d'analyse et de recherche sur la rémunération afin d'aider les employeurs et les agents négociateurs lors des négociations collectives. La commission est également responsable d'administrer des régimes de relations de travail, de négociation collective et d'arbitrage de griefs pour les employés du Parlement.
Comme vous pouvez le constater, le mandat de la commission a de multiples volets et couvre un large éventail de questions relatives aux relations de travail et à l'emploi des fonctionnaires fédéraux et des employés du Parlement. La commission a aussi un rôle dans les processus de redressement à l'intention des fonctionnaires fédéraux et des employés du Parlement et fonctionne à toutes fins pratiques de la même manière qu'une cour de justice tout en s'efforçant d'agir de façon moins formelle.
Pour permettre à la commission de s'acquitter de son mandat avec efficacité, les lois confèrent à la commission et aux arbitres de griefs une gamme de pouvoirs qui s'apparentent aux attributions d'une cour de justice, y compris la compétence de sommer des témoins à comparaître, d'ordonner le dépôt de documents, d'ordonner la tenue de conférences préparatoires à une audience, de tenir des audiences, en personne ou par écrit, et de rejeter de façon sommaire une requête ou une plainte frivole ou vexatoire.
Enfin, elle peut ordonner des mesures de redressement telles que la réintégration et le versement de dommages pour réparer un tort qui a été prouvé.
[Français]
Les décisions rendues par la commission et les arbitres de griefs concernant des questions de droit touchant des principes de justice naturelle ou de compétence peuvent être soumises au contrôle judiciaire en vertu de la Loi sur la Cour fédérale.
Au fil des ans, les cours ont adopté une norme exigeante pour la révision des décisions de la commission, celle de la décision manifestement déraisonnable, cela en raison de l'expertise de la commission en ce qui a trait aux questions relatives aux relations de travail et à l'emploi, il va sans dire.
Au cours des dernières années, environ 10 p. 100 des décisions de la commission ont été portées en révision judiciaire par l'une ou l'autre des parties. La Cour fédérale a confirmé la décision de la commission dans près de 90 p. 100 de ces cas. Les décisions rendues par la commission lient les parties et peuvent être déposées à la Cour fédérale. Une telle décision est alors assimilée à une ordonnance de la Cour fédérale et peut être exécutée comme telle.
Comme je l'ai déjà mentionné, au fil des ans, la commission a également promu la résolution de conflits par la médiation. La commission s'est dotée de médiateurs qui aident les parties à résoudre leurs différends. Ces dernières peuvent également utiliser des sources externes à cet effet.
[Traduction]
Monsieur le président, j'espère que ce survol du mandat et des responsabilités de la commission vous a été utile.
Je réitère que je n'émets aucun commentaire concernant les dispositions législatives soumises à votre étude ou le nouveau régime proposé par le projet de loi C-2 à l'étude concernant la protection des fonctionnaires dénonciateurs d'actes répréhensibles. Je vous assure que la commission s'acquittera avec plaisir — à condition, bien sûr, d'avoir le niveau voulu de ressources — de tout rôle que le Parlement jugerait approprié de lui attribuer en tant que tribunal régissant les relations de travail dans la fonction publique du Canada.
[Français]
Voilà qui met fin à mon intervention, monsieur le président. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie vivement de votre exposé.
Je comprends fort bien qu'étant donné le mandat, l'autorité et les responsabilités de votre commission, vous ne pouvez pas affirmer que vous êtes capable de faire le travail que le projet de loi C-2 confierait actuellement à un tout nouvel organisme. Je le comprends très bien, et j'ose espérer que toute personne impartiale qui suit les délibérations — qu'elle se trouve dans la salle ou qu'elle suive nos délibérations à la télévision — le comprendra, quand vous décrivez l'expertise qu'a votre commission, les compétences, le genre de cas dont vous êtes saisis, le pouvoir que vous avez. Vous avez fait ressortir que vos pouvoirs avaient été élargis, que vous vous êtes adaptés à la nouvelle situation.
Le point à retenir — je vais le dire, puisque vous ne le pouvez pas —, c'est que, si notre comité, dans sa grande sagesse, décide que plutôt que de créer un tout nouvel organisme, nous allons conférer les pouvoirs qui auraient été donnés à cette structure, à ce tribunal, à votre commission, elle sera parfaitement capable de les exercer avec toute l'efficacité voulue. Vous avez le savoir, l'expérience, les personnes qualifiées — vous avez tout. Il n'y a pas de différence dans les nominations, puisque les juges sont nommés par le gouverneur en conseil, tout comme les membres de votre commission. La différence, c'est qu'ils sont nommés à vie, jusqu'à l'âge de 75 ans, alors que ce n'est pas le cas de vos membres. Pour demeurer en fonction, il faut être compétent et continuer de l'être.
Ai-je épuisé mes deux minutes?
À notre connaissance, personne n'a fait part à la commission de préoccupations de ce genre.
Par ailleurs, il faut faire certaines distinctions concernant les responsabilités supplémentaires dont vous avez parlé. En vertu de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, de nouvelles responsabilités ont été confiées à la commission à l'égard du traitement des plaintes visant les droits de la personne. Autrefois, la compétence de la commission s'arrêtait à partir du moment où les droits de la personne étaient en cause, par exemple au cours de l'étude d'un grief.
La Loi sur la modernisation de la fonction publique et la nouvelle loi font en sorte que l'arbitre chargé d'entendre un grief peut désormais continuer à explorer toute la question. En fin de compte, on a décidé qu'il s'agissait d'une question de droit du travail et de relations de travail, et que les choses se passaient en milieu de travail. Si, dans le cadre d'un grief, il est à la fois question de droits de la personne et de facteurs disciplinaires, la commission a maintenant le pouvoir de continuer son examen du dossier. C'est à cela que je faisais allusion lorsque je parlais d'un mandat élargi.
En ce qui concerne certains éléments qui se trouvent dans les projets de loi C-2 et C-11, la chose devrait être précisée. Pour le moment, cela n'est pas de notre ressort. Comme je l'ai expliqué déjà, nous avons une longue expérience en matière de mesures de représailles. Les 33 dossiers que nous étudions présentement ne nous sont soumis qu'en vertu du Code canadien du travail. Cependant, nous analysons aussi les mesures de représailles reliées à des pratiques ayant cours pendant les périodes où les conventions collectives sont négociées. Toute cette relation de même que l'examen des divers dossiers nous reviennent.
Il serait intéressant, à mon avis, que tous sachent comment se définit l'arriéré. Plus de 3 000 dossiers ont été reportés de l'année précédente. Actuellement, nous nous occupons de tous ces dossiers. Une grande partie des plaintes seront réglées ou feront l'objet d'une audience dans très peu de temps. Si vous entendez parler d'un arriéré à la commission, il serait plus exact selon moi de s'arrêter à ce que nous vivons actuellement sur le plan de la gestion habituelle de nos dossiers, en ce sens que les dossiers clos respectent la norme et ne s'ajoutent pas...
Nous réussissons à fermer les dossiers, par exemple, en quatre mois. Nous nous efforcerons de faire cheminer toutes les autres plaintes dans les cinq mois. Donc, à ce stade-ci, les ressources des deux parties, l'agent négociateur et l'employeur, sont insuffisantes, ce qui explique la raison pour laquelle nous devons remettre à plus tard l'étude de certains dossiers.
Pour résorber cet arriéré, nous nous efforçons d'innover et de modifier la procédure prévue pour les deux parties. Nous avons élaboré un processus accéléré d'arbitrage. Nous avons périodiquement recours à des conférences préalables aux audiences de manière à aider les parties à abaisser peut-être le nombre de jours dont elles pourraient avoir besoin, ce genre de choses, et d'essayer d'obtenir d'elles qu'elles fixent une date pour la tenue des rencontres.
Par conséquent, nous sommes très actifs sur ce plan et nous n'estimons pas être du tout débordés. Comme je l'ai dit, les nombres sont stables, et nous réussissons à gérer tous ces dossiers.
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Nous avons tenu des audiences au sujet du projet de loi C-11 pendant plus d'un an et nous avons entendu une foule de dénonciateurs. Or, aucun d'entre eux n'a dit qu'il souhaitait que la Commission des relations de travail soit l'organe chargé de les protéger contre des représailles — pas un seul. J'ai pris la liberté de communiquer avec un grand nombre d'entre eux la semaine dernière pour savoir s'ils avaient changé d'avis, et j'ai une liste, qu'a demandée M. Sauvageau, de fonctionnaires qui sont des dénonciateurs et qui ne croient pas que la Commission des relations de travail est indiquée pour cette fonction.
En fait, j'ai ici l'opinion de Joanna Gualtieri, qui affirme que la Commission a été tout à fait inutile dans son cas. J'ai aussi l'opinion de Shiv Chopra, de Margaret Haydon, d'Allan Cutler, de Brian McAdam, de Selwyn Peters et de Joanna Gualtieri, qui ont tous affirmé qu'ils préféraient que pareil cas soit confié à un tribunal composé de juges plutôt qu'à la commission.
Voilà ce que disent les fonctionnaires dénonciateurs. Les syndicats, qui exercent un certain contrôle sur la composition de votre commission, seraient peut-être d'un autre avis, mais je préfère me fier à l'opinion des dénonciateurs pour lesquels a été rédigé le projet de loi à l'étude et dans l'intérêt desquels il est censé agir. C'est là mon premier point.
J'aimerais aussi souligner que Dr. Keyserlingk, qui assure la supervision de la protection des dénonciateurs au Canada, bien qu'il dispose de pouvoirs limités, croit lui aussi qu'un tribunal de juges, non pas la commission, conviendrait parfaitement.
Enfin, j'aimerais faire remarquer que c'est une fausse dichotomie, parce que ce que propose la loi de responsabilisation, c'est de donner aux fonctionnaires le choix d'aller soit devant votre commission, soit devant un tribunal composé de juges. Nous sommes d'avis que les dénonciateurs devraient continuer d'avoir ce choix et, si d'autres parties veulent le leur retirer, ce sera leur décision, et ils devront l'expliquer aux dénonciateurs.
J'aimerais mieux comprendre votre mandat actuel. Avez-vous le pouvoir de prendre des mesures disciplinaires?
J'ai ici une lettre de l'AFPC qui affirme carrément que votre commission ne peut pas prendre en charge des cas de harcèlement. Ainsi, dans le cas de Mme Gualtieri, l'AFPC lui a écrit pour lui dire que votre commission n'avait pas compétence en matière de harcèlement à moins que celui-ci ne la pousse à quitter son emploi, ce qui reviendrait alors à un congédiement déguisé.
Donc, toute une foule de situations de harcèlement pourraient survenir avant même que la commission ait compétence en la matière. Ainsi, la commission ne pourrait pas, dans la situation actuelle, remédier aux situations où quelqu'un n'a pas perdu son emploi, mais qu'il a été victime de harcèlement grave. Il existe toute une série de situations qu'en vertu du statu quo, la commission ne pourrait pas prendre en charge. Je me réjouis que nous ayons pu apporter ces éclaircissements.
J'aimerais aussi aborder la question de l'expertise, parce que certains ont laissé entendre que les juges demeuraient là, le regard vide, parce qu'ils n'ont pas l'expertise voulue. Je rappelle que les juges ont l'habitude d'entendre des éléments de preuve provenant de l'analyse de l'ADN, des renseignements scientifiques, des questions criminelles, des divorces, des preuves médico-légales, des données de comptabilité financière, des questions environnementales, des questions de santé. D'une cause à l'autre, ils changent de domaine de compétence. Ne seriez-vous donc pas d'accord avec moi pour affirmer qu'il est parfaitement raisonnable de s'attendre à ce qu'un juge puisse interpréter des questions liées à des représailles contre un dénonciateur?
Je m'appelle Angela Regnier. Je suis la vice-présidente nationale de la Fédération canadienne des étudiants et étudiantes. Je vous présente notre coordonnateur des relations gouvernementales, Ian Boyko.
J'aimerais remercier le comité de nous avoir invités à prendre la parole aujourd'hui au sujet de ce projet de loi et du milieu universitaire.
Notre fédération regroupe plus d'un demi-million d'étudiants d'universités et de collèges répartis un peu partout au pays. Parmi ses membres figurent plus de 60 000 étudiants des cycles supérieurs. C'est en partie en raison de ceux-ci que nous avons demandé à venir témoigner ce soir.
Les étudiants diplômés et les boursiers de recherche qui reçoivent des subventions fédérales sont exclus du projet de loi C-2, un oubli que nous exhortons vivement votre comité à examiner. Le gouvernement fédéral distribue bien au-delà d'un milliard de dollars par année aux boursiers de recherche des universités et aux établissements associés à de la recherche. Les Canadiens sont conscients de l'utilité de la recherche de calibre mondial puisqu'ils en constatent les bienfaits à court et à long terme tous les jours -- des médicaments meilleurs et plus sûrs, des innovations technologiques d'origine canadienne comme l'incroyable réussite entrepreneuriale de Research In Motion et, grâce à la recherche en science sociale, le grand public et les décideurs connaissent mieux les forces sociales, économiques et culturelles qui forment notre monde.
Les Canadiens investissent lourdement dans le domaine du savoir et, la plupart du temps, ils en tirent un rendement très respectable. Malheureusement, les exemples d'une politique fédérale de la recherche qui a déformé la recherche universitaire sont nombreux. De plus en plus, une vue étroite de la commercialisation, de l'introduction de nouveaux produits sur le marché, est en train de devenir le mentra de la recherche parrainée par le gouvernement fédéral. L'établissement de liens trop étroits entre les résultats de la recherche universitaire et les besoins à court terme de l'entreprise privée nuit non seulement à l'innovation, mais également aux sciences.
On entend de plus en plus parler de première main de chercheurs qui ont dû modifier les résultats de leurs recherches dans les rapports qu'ils soumettent afin de satisfaire les commanditaires de l'industrie. Je songe notamment à une expérience d'alimentation publique en eau potable au sujet de laquelle un étudiant diplômé a tenté de dénoncer la suppression et la falsification de données dans les résultats de la recherche. Deux chercheurs auraient présenté de manière inexacte les résultats d'une étude sur l'eau potable afin de produire des résultats favorables au commanditaire. Santé Canada est en train de mettre à jour ses lignes directrices en se servant de ces conclusions, qui auraient été falsifiées. Ce qu'il y a d'étonnant, dans cette affaire, c'est que l'université n'a pas défendu l'application rigoureuse de la démarche scientifique. Elle s'est plutôt efforcée d'étouffer tous les efforts déployés en vue de mettre en lumière cette interférence, y compris en menaçant l'étudiant diplômé de le poursuivre pour diffamation.
Il n'y a pas au Canada de chien de garde fédéral pour veiller à l'intégrité de la recherche. Bien qu'ils aient en place une politique déontologique pour la recherche qui réglemente les établissements financés par eux, les organismes subventionnaires fédéraux ne sont pas mandatés pour protéger les dénonciateurs. Parfois, les universités sont complices de l'inconduite des chercheurs, particulièrement quand ce sont des étudiants qui font des allégations. D'autres pays ont mis en place des organismes fédéraux pour surveiller la recherche publique. Par exemple, aux États-Unis, l'Office of Research Integrity reconnaît explicitement que la dénonciation est essentielle pour protéger l'intégrité de la recherche financée par le gouvernement.
La Loi fédérale sur l'imputabilité offrirait au gouvernement la structure et l'occasion voulues pour garantir l'intégrité de la recherche grâce à quelques simples modifications: offrir aux chercheurs les protections prévues dans le projet de loi sur la protection des fonctionnaires dénonciateurs d'actes répréhensibles, y compris aux étudiants qui fréquentent des établissements publics postsecondaires et affiliés à de la recherche. Pour refléter cette portée élargie, il faudrait renommer la loi, en faire la loi sur la protection des dénonciateurs d'intérêt public, et renommer le poste de commissaire dont le titre deviendrait commissaire de l'intégrité dans l'intérêt public. Nous proposons qu'un sous-commissaire de l'intégrité de la recherche soit nommé pour travailler en étroite collaboration avec les universités, les établissements de recherche et les organismes subventionnaires fédéraux en vue de promouvoir l'intégrité de la recherche. Nous proposons également que soient modifiées les listes de représailles et d'actes répréhensibles de manière à mieux tenir compte des formes d'inconduite en matière de recherche qui ont cours dans les universités et que soit élargie la liste des recours dont dispose le tribunal.
Également, en tant qu'étudiante, j'aimerais féliciter le gouvernement d'avoir soumis la Fondation des bourses du millénaire à un examen public, puisque peu après sa création, des étudiants étaient déjà préoccupés par cet organisme.
Je vous remercie de nous avoir invités à prendre la parole.
Je répondrai avec plaisir à vos questions.
J'ai plusieurs questions et je vous remercie de votre exposé.
Premièrement, avez-vous des notes ou un document écrits pour votre exposé d'aujourd'hui? Si oui, en avez-vous fourni copie à un membre de notre comité, à un membre du personnel de n'importe quel membre de ce comité ou au personnel de tout le ministre ou du président du Conseil du Trésor, ou à un membre de la fonction publique qui travaille pour le Conseil du Trésor ou pour un autre ministère fédéral? C'est ma première question.
Deuxièmement, je ne vous ai pas entendu dire qui était M. Ian Boyko. Pouvez-vous répéter le poste qu'occupe M. Boyko au sein de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants?
Ma troisième question se rapporte au point... Si je ne me trompe, vous avez parlé d'un moyen pour les étudiants du troisième cycle — ou pour tout étudiant qui travaille sur un projet particulier de recherche et qui reçoit un financement fédéral, qu'il le reçoive directement sous forme de subvention ou par l'entremise d'une université, du fait qu'un professeur a fait une demande de fonds pour la recherche, etc. — de faire de la dénonciation si, à leur avis, les choses ne sont pas ce qu'elles devraient être; je crois que c'est une idée excellente.
Voici ma question. On vous a demandé un peu plus tôt si vous avez actuellement la possibilité de déposer une plainte auprès de la Commission des relations de travail dans la fonction publique. De toute évidence, ce n'est pas le cas. Toutefois, le projet de loi C-2 permettrait la création d'un tribunal qui aurait le pouvoir de s'occuper des dénonciateurs qui travaillent à la fonction publique fédérale, ainsi que dans diverses sociétés d'État fédérales; il pourrait également répondre aux plaintes provenant des entrepreneurs du secteur privé, par exemple, ou du secteur à but non lucratif, qui ont obtenu des contrats avec le gouvernement fédéral, soit par suite de demandes de propositions ou de soumissions.
Plusieurs organisations ont présenté des mémoires indiquant qu'elles aimeraient que les pouvoirs conférés par le projet de loi C-2 à un nouveau tribunal le soient à la commission qui existe déjà. Le mandat, les pouvoirs de la commission seraient élargis afin de répondre au secteur privé qui se plaint que l'appel d'offres est faussé ou autre chose, ou afin de répondre aux plaintes du secteur à but non lucratif ou encore d'un membre de la fonction publique.
Étant donné que vous demandez de disposer d'un moyen à cet égard, si notre comité, dans sa sagesse, décidait que vous devriez avoir un tel moyen et que nous conférions le pouvoir à, par exemple, la Commission des relations de travail dans la fonction publique — dont l'appellation pourrait changer, car son mandat serait élargi — pensez-vous que par rapport à ce pouvoir, qu'il soit conféré à cette commission ou à une autre, la question reste à savoir quelle instance aura le pouvoir de recevoir la plainte, de mener une enquête adéquate, de tenir une audience et de prendre effectivement des ordonnances qui seraient exécutoires? C'est ce que vous demandez, n'est-ce pas?