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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 010 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 16 octobre 2006

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, bonjour.
    J'aimerais déclarer la séance ouverte. C'est la 10e séance du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique. À l'ordre du jour, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions les allégations selon lesquelles les noms d'auteurs de demandes d'accès à l'information auraient été divulgués.
    Nous accueillons aujourd'hui trois témoins, dont vous avez la liste sous les yeux. Il s'agit de David Gollob, vice-président des affaires publiques de l'Association canadienne des journaux, de Ken Rubin, du Hill Times, une célébrité. Je ne veux pas vous paraître cavalier, monsieur Rubin. Nous respectons votre travail; vous êtes journaliste au Hill Times, entre autres choses. Nous accueillons également le colonel Michel Drapeau, avocat.
    Messieurs, bonjour.
    Nous vous accorderons 10 minutes pour vos exposés, dans l'ordre que je viens de vous donner—vous avez tous été présentés et vous connaissez les règles du jeu—puis nous passerons à une période de questions et d'observations de la part des membres du comité.
    Monsieur Gollob, nous allons commencer avec vous.

[Français]

     Je suis heureux d'avoir aujourd'hui l'occasion de m'adresser à votre comité. Je continuerai en anglais parce que c'est la langue que je préfère utiliser.

[Traduction]

    Comme vous le savez sans doute, l'Association canadienne des journaux est la voix des quotidiens canadiens et nous nous préoccupons de deux questions précises: notre contexte d'affaires et les menaces à la liberté de la presse.
    J'ai distribué au comité—j'espère que vous en avez tous reçu copie—une lettre de plainte de l'Association canadienne des journaux au Bureau du commissaire à l'information. Il s'agit d'une lettre datée de septembre 2005. Dans quelques instants, j'y ferai référence dans mes remarques.
    Je vous ai également distribué une photo que je tiens dans mes mains, qui vient du département de la Défense américain. Elle a été publiée à la une du Globe and Mail un jour de la semaine dernière. Elle montre la péninsule coréenne, vue du ciel, la nuit. Cette image est une preuve flagrante des différences radicales entre deux systèmes de gouvernement. Comme vous le voyez dans la photo, la Corée du Sud est illuminée comme un arbre de Noël, et la Corée du Nord est obscure comme une tombe.
    Mesdames et messieurs les membres du comité, monsieur le président, je n'ai pas besoin de vous demander laquelle de ces images vous préférez, parce que je sais que nous sommes tous d'accord sur la réponse. La différence entre le totalitarisme et la démocratie—entre un pays où l'on jouit de la liberté de la presse et un pays où ce n'est pas le cas—est si flagrante qu'on peut la voir de l'espace.
    J'aimerais souligner que si le département de la Défense américain a pris cette photographie, c'est un journal canadien qui l'a publiée en première page. Nous dépendons des journalistes pour savoir ce qui se passe dans le monde, sur terre ou dans l'espace, et surtout dans les couloirs du pouvoir. Nous dépendons des journaux et des médias électroniques pour rendre nos gouvernements responsables, pour faire la lumière sur le fonctionnement du gouvernement.
    Un monde où les médias ne font que répéter les communiqués du gouvernement, c'est le monde de Kim Jong-il. Ce n'est pas le monde que souhaitent les Canadiens. Malheureusement, les gouvernements du Canada n'ont pas toujours su montrer qu'ils avaient, comme leurs citoyens, le désir d'avoir la meilleure transparence possible, la plus grande lumière. Certains au gouvernement semblent préférer qu'on les laisse gouverner dans l'obscurité.
    À mon avis, et c'est l'avis de l'Association canadienne des journaux, ce comité ne devrait pas se limiter à déterminer si les lois sont bafouées dans telle ou telle circonstance. Il devrait, à notre sens, enquêter sur la discrimination systématique dont font l'objet les demandes d'accès à l'information déposées par un groupe en particulier qui cherche à faire la lumière sur les décisions du gouvernement, soit les médias.
    Selon la Cour suprême du Canada, l'accès à l'information est un droit quasi judiciaire et une pierre angulaire de notre démocratie. Ce comité a entendu des hauts fonctionnaires du Conseil du Trésor déclarer que la Loi sur l'accès à l'information, outil principal de transparence, fonctionne bien. Vous avez entendu le Conseil du Trésor vous dire qu'il n'y a pas de problème généralisé de manque de respect ou de mépris, au sein du gouvernement, envers l'esprit ou la lettre de la Loi sur l'accès à l'information, la loi du pays. Cependant, en mai 2002, un ancien député du parti au pouvoir à l'époque, qui détenait un important pouvoir d'accès à l'information, a écrit un article dans lequel il a décrit la création d'un « groupe secret de coordination des communications » au centre même des opérations de communications du gouvernement.
    Jonathan Murphy a écrit dans cet article, et je cite:
« Le GCC, présidé par [le directeur des communications du premier ministre], est constitué de hauts fonctionnaires libéraux appartenant au personnel des ministres, de hauts fonctionnaires du cabinet du premier ministre et de hauts fonctionnaires en communications du Bureau du Conseil privé, soi-disant non partisan, ce dernier groupe étant dirigé par le secrétaire adjoint du Cabinet (...)
Si le mandat du GCC est soi-disant de « coordonner » le message du gouvernement, en pratique, le comité passe chaque semaine le gros de son temps à discuter de façons de retarder ou d'entraver les demandes d'accès à l'information (...)
    Ce groupe secret, composé de personnel exonéré et de hauts fonctionnaires du Bureau du Conseil privé a-t-il vraiment existé? Son objectif principal était-il de bafouer les droits quasi constitutionnels des Canadiens?
(1535)
    Jason Kenney et James Rajotte, députés conservateurs dans l'opposition en 2004, ont dénoncé l'existence de ce groupe secret de contrôle de l'information à la Chambre. Ils croyaient réellement que ce groupe existait. Un tel groupe existe-t-il aujourd'hui? Ce mécanisme de contrôle de l'information a-t-il été supprimé, ou existe-t-il sous une autre forme? Nous croyons que c'est cette question plus vaste qui devrait préoccuper le comité.
    Comme vous le savez, le témoignage d'Elizabeth Thompson semble indiquer que les auteurs de demandes d'accès à l'information qui font partie des médias sont souvent nommés lors d'appels conférences entre les hauts fonctionnaires en communications au gouvernement. Cela pourrait témoigner de l'existence du groupe que j'ai décrit. Ce qui doit nous préoccuper, c'est que les auteurs de demandes qui viennent des médias sont l'objet d'un traitement particulier. Ne perdons pas notre temps à chercher à savoir si c'est une pratique répandue ou non. Après tout, il s'agit d'un petit nombre de demandes d'accès à l'information, puisque 10 p. 100 de ces demandes seulement viennent des journalistes. Pour quelle autre raison le Conseil du Trésor aurait-il prévu une catégorie spéciale pour les médias, si ce n'est pour leur accorder un traitement différent?
    Lors des témoignages à la Commission Gomery, nous avons observé que ce traitement différent peut impliquer des allers et retours entre les bureaux politiques des différents ministères et peut consister également à entraver l'accès. D'après la recherche d'Anne Rees, boursière Atkinson, il existe un système appelé code jaune. Et je crois que le comité en a entendu parler et en a déjà discuté. D'après le professeur Alasdair Roberts, dont la recherche a montré que les demandes assujetties au code jaune sont ralenties de façon considérable, les demandes qui proviennent des médias sont traitées de façon différente, ce qui est une violation de l'esprit et de la lettre du texte de loi.
    Comme autre exemple, au printemps dernier, l'Association canadienne des journaux a mené sa deuxième vérification au sujet de la liberté d'information. Il s'agit d'un test rudimentaire, fondé sur des échantillons, de la liberté d'information et des systèmes d'accès à l'information au pays. Cette année, au cours de cet exercice, nous nous sommes rendu compte que cinq des six demandes présentées au gouvernement fédéral étaient restées sans réponse après cinq mois, alors que la période fixée par la loi est de 30 jours. Ça fait bien longtemps que l'Association canadienne des journaux s'en plaint et cette question fait d'ailleurs l'objet d'une enquête officielle du Bureau du commissaire à l'information. La lettre de plainte que je vous ai distribuée dans les deux langues officielles, avec la photo, vous fournit des détails à ce sujet.
    Plus d'un an après le début de l'enquête, nous ne savons toujours pas ce que l'on a découvert, parce qu'on nous dit que les avocats du Conseil du Trésor ne veulent pas nous laisser voir les données et retardent le processus. Nous croyons qu'il faut remédier à cela. Le gouvernement conservateur a le mandat de la population pour le faire et l'Association canadienne des journaux compte sur ce comité pour s'assurer que le gouvernement tienne ses promesses.
    Merci. Je serai heureux de répondre à vos questions.
(1540)
    Si vous le voulez bien, nous ferons cela après que les deux autres invités auront fini leurs exposés, monsieur Gollob. Merci beaucoup.
    Je souhaite rappeler à nos invités que nous essayons de traiter des allégations selon lesquelles les noms d'auteurs de demandes d'accès à l'information auraient été divulgués.
    Monsieur Rubin.
    Merci, monsieur le président et membres du comité.
    Le travail du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes est un des rares changements positifs découlant de la première loi sur l'accès à l'information du Canada. Les efforts de votre comité détonnent avec la guerre constante que mène Ottawa pour minimiser l'importance des droits à l'information.
    L'objectif de vos délibérations actuelles est de déterminer si les utilisateurs de l'accès à l'information sont trop bien connus, suivis et surveillés. Je veux parler de certaines de ces pratiques improductives, comme le code jaune et le profilage des utilisateurs de l'accès à l'information, adoptées par des organismes gouvernementaux. Ces pratiques créent des obstacles à l'accès aux dossiers fédéraux et représentent une violation du droit du public à savoir ce qui se passe à Ottawa.
    Je suis sans doute l'auteur de demandes d'accès à l'information qui a le plus d'expérience et qui a l'expérience la plus diverse, ayant moi-même déposé des milliers de demandes d'accès à l'information depuis octobre ou novembre 1982. C'est sur cette expérience que je me fonde, ainsi que sur d'autres relatives à l'accès à l'information, dans ma comparution aujourd'hui.
    D'emblée, j'aimerais préciser que le fait que le gouvernement surveille les auteurs de demandes d'accès et entrave le droit du public à avoir un accès rapide, équitable et objectif aux dossiers fédéraux ne date pas d'hier. J'ai remis au comité de nombreux articles sur ce problème. En outre, ces pratiques improductives ne découlent pas uniquement de quelques incidents isolés commis par quelques personnes mal intentionnées, contrairement à ce que vous ont dit les témoins du gouvernement plus tôt.
    Il y a peu de fonctionnaires qui sont prêts à parler du vrai problème. Ils sont formés pour répondre de façon aussi superficielle que possible, très lentement — cela ressemble à mes demandes d'accès à l'information. Cela ne veut pas dire cependant que certains n'essaient pas, malgré des circonstances difficiles et de façon parfois trop timide, d'aider les auteurs de demandes d'accès à l'information.
    Selon mon expérience, le traitement des demandes et la durée de celui-ci dépendent de la catégorie d'auteurs de demandes d'accès à l'information. Mes demandes, par exemple, sont généralement mises en évidence et peuvent obtenir un traitement inégal, selon l'organisme et les fonctionnaires concernés. Je suis perçu par différents organismes de façon différente, soit comme membre du public, soit comme membre des médias, du monde des affaires, des chercheurs... à vous de choisir. Ainsi, il est important que les fonctionnaires ne révèlent pas mon identité et que mes demandes soient examinées de façon équitable, mais ce n'est pas toujours le cas. Tout cela a une incidence sur la façon dont l'information recherchée est traitée.
    Il existe deux systèmes de pistage pour surveiller les utilisateurs comme moi. Il y a un système de coordination de la gestion, soit la coordination des demandes d'accès à l'information, aussi appelée CDAI qui existe depuis 1989. Dans une entrevue au Toronto Star en 1989, j'ai remis en question la pertinence de ce système de pistage et son utilisation par l'organisme central. Pourtant, il existe toujours.
    Je me suis également interrogé sur le besoin d'autres systèmes de détection rapide qui fournissent aux responsables des communications et de la politique une occasion d'intervenir dans la divulgation de l'information. Il y a un système particulièrement odieux qui existe depuis quelques années et que l'on appelle par des noms différents comme le code jaune, l'alerte rouge, ou le processus du signal d'alerte. Il permet de catégoriser certaines de mes nombreuses demandes et d'autres comme « sensibles », « intéressantes », qui toutes méritent d'être examinées.
    Les discussions ne sont généralement pas enregistrées, du moins pas entièrement, lorsque ces demandes font intervenir des responsables des communications et de l'accès à l'information, voire des SMA, des SM et des représentants des cabinets des ministres. Cela revient donc à un système de détection rapide et à un outil de limitation des dégâts en communications, ce qui contribue à ralentir et à entraver le processus.
    Combien de fois m'a-t-on dit que ma demande était retardée d'une semaine ou deux, voire plus, étudiée par les responsables des communications, examinée par telle ou telle personne exonérée au cabinet du ministre. Cela peut être quantifié grâce à des journaux de suivi — ils n'enregistrent pas tout. Des universitaires comme Alasdair Roberts en ont parlé et des groupes de citoyens comme la B.C. Freedom of Information and Privacy Association, que vous entendrez bientôt. ont documenté les problèmes liés à l'accès à l'information qui découlent des systèmes de pistage internes. Je ne suis pas une statistique. Je suis la preuve vivante des problèmes du système.
(1545)
    Étant donné que récemment pour la première fois une note de service interne d'alerte jaune a été préparée ... Cela met encore davantage en doute la validité de ce système de contrôle permanent. Cette alerte jaune en particulier qui remonte à juin 2006 a fait l'objet d'un article dans The Gazette et dans The Hill Times. Elle a été déclenchée par l'une des demandes que j'ai adressées à Citoyenneté et Immigration Canada pour obtenir des documents sur l'élaboration de systèmes d'immigration intégrés entre le Canada et les États-Unis.
    Les responsables des communications, informés par les responsables de l'accès à l'information, ont été prévenus et se sont vus accorder quelques jours à l'avance pour examiner les documents devant m'être communiqués, pour leur permettre de préparer des fiches pour la période de questions à l'intention du ministre et des commentaires à faire aux médias. Certaines pages du document en question ont été indiquées — les pages 21, 52, 120, 224, etc. —, comme étant susceptibles d'être délicates ou d'embarrasser le gouvernement ou de faire l'objet de publicité indue.
    L'un des responsables qui participaient à cet exercice d'alerte jaune travaille au bureau du ministre actuel de la Citoyenneté et de l'Immigration.
    Monsieur le président, j'aimerais faire un rappel au Règlement. Tout cela est extrêmement intéressant et je pense que c'est important. Nous devrions peut-être examiner cette question, mais nous ne parlons toujours pas de ce dont nous sommes censés traiter dans le cadre de ce comité, c'est-à-dire étudier pour en faire rapport les questions concernant les allégations de divulgation des noms d'auteurs de demandes d'accès à l'information.
    Je ne vois pas où le témoin veut en venir.
    En ce qui concerne ce rappel au Règlement, monsieur le président, je considère personnellement que ce témoignage est très utile dans le cadre de notre mandat. Si les témoins sont en train de dire que lorsque l'on divulgue des noms, les demandes sont traitées différemment, cela est extrêmement grave.
    Je crois que c'est le deuxième témoin que nous entendons et nous n'avons toujours pas abordé la question qui nous a été confiée, à savoir si des noms ont effectivement été divulgués dans le cadre de l'administration précédente et de la présente administration. Est-ce ce que nous sommes en train de faire?
    C'est assez subtil. M. Peterson a soulevé une question; si vous ouvrez cette porte-là, vous pouvez aller un peu plus loin.
    Monsieur Rubin, je vais répéter ce que j'ai dit au début. Nous avons besoin de l'aide de témoins comme vous en ce qui concerne le problème de la divulgation de noms de journalistes lorsqu'ils présentent des demandes en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.
    Cependant, M. Peterson a raison. Il s'agit d'une zone grise, donc veuillez en tenir compte dans vos commentaires.
    On peut interpréter l'esprit de la loi de façon plus ou moins large, comme on peut le faire pour interpréter les influences. Ce que je veux dire, c'est qu'on peut évidemment parler des noms, mais une fois qu'un nom est entré dans le système ou qu'on applique une méthode de pistage ou de profilage, on est à l'intérieur d'un tout. Il y a du gris lorsque apparaît parfois la malhonnêteté ou le refus d'en parler de l'intérieur.
    J'ai évoqué ce dossier très complexe d'immigration. Si le feu jaune n'est pas un véritable... [Inaudible]... dans le système de divulgation d'information, c'est que certains éléments sont isolés, découpés et disséqués. Les système de ce genre en viennent immanquablement à catégoriser les demandeurs d'accès et à cibler ceux qui posent le plus de problèmes ou qui présentent de nombreuses demandes. En l'occurrence, j'ai été classifié comme membre des médias et associé à ma demande d'accès.
    On cible donc certains journalistes et certains groupes d'opposants, mais ils seront ciblés un jour, et le lendemain ou la semaine suivante, on ciblera quelqu'un d'autre. L'ancien Parti réformiste, qui présentait systématiquement des demandes d'accès sur certains sujets, a fait partie des groupes suivis et ciblés.
    Le problème s'aggrave encore lorsqu'un citoyen présente en parallèle une demande d'accès à l'information et une demande de protection des renseignements personnels, et que l'administration conteste son identité, voire ses motifs. D'après mon expérience, ce fut notamment le cas lors de demandes présentées au nom des victimes des implants mammaires Meme, au nom de scientifiques licenciés de la fonction publique qui soulevaient des questions de sécurité, et dans le cas de Maher Arar, qui tentait d'obtenir des dossiers susceptibles de l'aider à rétablir sa réputation.
    Mais il existe un autre niveau de surveillance qui va au-delà du pistage et qui me préoccupe considérablement: il s'agit de la catégorisation et de l'acheminement des réponses aux demandes d'accès. C'est là que les requérants font l'objet d'un profilage. Je viens de découvrir que j'avais moi-même été soumis à ce traitement. On a mentionné mon nom, je pense donc que les choses sont claires.
    Le 5 octobre 2006, longtemps après avoir porté plainte auprès du commissaire à l'information, j'ai reçu de l'Agence des services frontaliers du Canada une note de service, gardée secrète jusqu'alors, datée du 27 janvier 2004. Elle portait le nom du président de l'Agence. Il y était question de plusieurs demandes d'accès à l'information, dont la mienne, sur les systèmes controversés d'enregistrement d'information sur les passagers des lignes aériennes, qui fonctionnent en parallèle avec les systèmes des États-Unis. La note de service était destinée à Anne McLellan, qui était alors ministre de la Sécurité publique, mais dans la lettre du 5 octobre 2006 que m'ont adressée les fonctionnaires de l'Agence, on disait que la note en question n'avait jamais été communiquée à la ministre ni à son service, du moins par écrit.
    Mon nom apparaissait dans cette note de service, et on me reprochait de faire partie de ceux qui avaient demandé des données sur le système secret de pointage des passagers des lignes aériennes selon le risque. On signalait que le Toronto Star s'était servi de certaines données que m'avait communiquées l'Agence des services frontaliers sur ce sujet, mais les agents de renseignements des douanes qui ont rédigé la note de service ministérielle du 27 janvier 2004 ont de nouveau mentionné mon nom dans un contexte tout à fait différent, disant que je présentais des demandes d'accès à l'information pour Maher Arar et pour Monia Mazigh, qui, comme nous le savons, figuraient sur la liste de surveillance de l'Agence des services frontaliers du Canada, de même que ceux de leurs enfants en bas âge.
    C'est tout à fait inacceptable. On ne devrait pas faire de recoupement de mes données et de mes interventions dans différentes demandes d'accès pour créer un profil et pour contester la façon dont d'autres requérants ou moi-même nous servons de l'accès à l'information. Le fait que les données de ce genre soient rassemblées et disséminées à l'interne, voire transmises à un ministre, ne me semble pas relever d'une bonne conception du partage de l'information au sens de la Loi sur l'accès à l'information.
    J'ai déposé d'autres demandes concernant la base de données sur le repérage des passagers des lignes aériennes à l'Agence des services frontaliers. Elles restent sans réponse depuis plusieurs mois.
    Un autre élément inquiétant, ce sont les réunions hebdomadaires de révision des demandes tenues par de hauts fonctionnaires pendant des mois. Ce fut notamment le cas au lendemain du scandale des commandites et pendant l'enquête du juge Gomery. Des documents que j'ai obtenus révèlent que des hauts fonctionnaires tenaient des séances hebdomadaires au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux pour décider de la façon de réagir au scandale des commandites, notamment aux demandes d'accès à l'information présentées par moi-même et par d'autres.
(1550)
    Après le déclenchement de l'enquête du juge O'Connor, des hauts fonctionnaires et des sous-ministres adjoints ont tenu régulièrement des rencontres interministérielles sur le dossier Arar. Ils évoquaient la façon de traiter l'information, notamment la coordination des réponses qui allaient m'être adressées en tant que requérant, aussi bien en vertu de la Loi sur l'accès à l'information que de la Loi sur la protection des renseignements personnels, à propos de M. Arar et de Mme Mazigh. C'est une question qui préoccupe tous ceux à qui j'en ai parlé et qui me préoccupe moi-même, car on a alors partagé illégalement des renseignements personnels confidentiels et inexacts.
    Monsieur Rubin, le comité vous accorde désormais son attention.
    Les dix minutes sont largement dépassées. Voulez-vous que le témoin continue?
    Une voix: Il devrait continuer.
    Le vice-président (M. David Tilson): Est-ce que tout le monde est d'accord? Bien.
    Vous avez largement dépassé vos dix minutes. Je vous demande donc d'en tenir compte.
    Merci, monsieur le président.
    Ces systèmes de pistage ont un effet dissuasif. Ils ne présentent pas d'intérêt, sauf pour les gens de l'intérieur qui veulent cacher, retarder ou manipuler des données, voire tromper d'autres fonctionnaires. Ce sont aussi des coûts supplémentaires. Les systèmes créent des strates administratives et provoquent de l'inquiétude. Ils engendrent un véritable code du silence.
    Et qu'on ne s'y trompe pas, ces systèmes de pistage et de coordination sont situés au plus haut niveau. Dès 1986, les documents que j'ai obtenus révèlent que le premier ministre Brian Mulroney a demandé aux sous-ministres de la Défense et des Affaires extérieures, par l'intermédiaire de son personnel politique, de surveiller les chiffres qu'ils publiaient sur ses propres frais de déplacement à l'étranger. Jean Chrétien a dit la même chose lorsqu'il s'est adressé à son association de circonscription.
    De cette façon, on envoie un signal aux subordonnés, en leur demandant de surveiller plus étroitement les auteurs des demandes d'accès à l'information. Depuis le premier ministre Joe Clark, aucun premier ministre n'a même pris la peine de dire à ses fonctionnaires qu'il s'agissait avant tout de publier de l'information. Et dans le dossier Bronskill, où des journalistes font officiellement l'objet de discussions interministérielles privées aux frais du contribuable, qui gouverne ce pays? Est-ce que la population parle des journalistes en les appelant par leur nom? Est-ce qu'on s'occupe des véritables problèmes?
    Mon nom a été cité dès l'entrée en vigueur de cette loi. À l'occasion d'une demande d'accès à l'information, j'ai constaté que la Commission de contrôle de l'énergie atomique du Canada s'interrogeait sur les réseaux qui m'avaient amené à solliciter ses dossiers sur des problèmes de réglementation en matière de sécurité nucléaire. Je figurais en bonne place sur l'ordre du jour officiel de la Commission.
    Dans les années 90, des ministères comme celui de la Défense nationale — et votre comité en a brièvement entendu parler — se sont mis à observer frénétiquement certains requérants comme moi, comme le Ottawa Citizen, comme David Pugliese et comme le colonel Michel Drapeau, ici présent. Leur comportement à notre égard était entaché de graves préjugés. Je suis certain que M. Drapeau pourra en témoigner.
(1555)
    Monsieur Rubin, vous nous apportez là des éléments de grande valeur. Le problème, c'est que je dois m'en tenir aux règles, et vous avez largement dépassé vos dix minutes. Pouvez-vous conclure?
    Si cela convient au comité, est-ce que je pourrais faire quelques suggestions quant à la façon d'aborder ces problèmes?
    Vous êtes trop en retard. Je préfère que vous attendiez les questions.
    J'y suis tout à fait disposé.
    Monsieur le président, je n'ai pas d'exposé liminaire, mais j'aimerais vous présenter de façon très schématique les raisons qui m'amènent ici et qui font que je m'intéresse à l'accès à l'information.
    Lorsque j'ai pris ma retraite de l'armée en 1992, j'ai été nommé directeur général par intérim des services ministériels de gestion au quartier général de la Défense nationale. À l'époque, l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels relevaient de ma responsabilité. J'y consacrais 4 à 5 p. 100 de mon temps chaque jour. Je recevais ces dossiers verts sur mon bureau. J'avais pour mission, le cas échéant, d'informer le ministre de la Défense nationale, par l'intermédiaire de son chef de cabinet, des documents qui allaient être publiés à telle ou telle date. Je l'ai fait pendant deux ans.
    Une fois à la retraite, j'ai créé mon propre cabinet d'expert-conseils en matière d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels. Ma clientèle comprenait des députés—il y en avait même de tous les partis—des sociétés privées, des particuliers, des universitaires, etc. En moyenne, je présentais de 1 200 à 1 500 demandes par an.
    En 1996, j'ai décidé de retourner à l'école et j'ai obtenu des diplômes en droit civil et en common law. À la fin de mon stage à la Division d'appel de la Cour fédérale, j'ai compris que si l'on s'en tenait à la lettre, l'accès à l'information était un droit quasi constitutionnel... Au cours de mes recherches et des travaux que j'ai faits dans le cadre de mon stage à la Division d'appel de la Cour fédérale, j'ai constaté à la bibliothèque de droit qu'il n'y avait pas un seul ouvrage sur l'accès à l'information et sur la protection des renseignements personnels. J'ai entrepris d'y remédier, et c'est ce que j'ai fait. Avant d'être accueilli au barreau, j'ai publié la première édition d'un ouvrage intitulé Federal Access to Information and Privacy Legislation. On en est maintenant à la cinquième édition.
    Une fois admis au barreau, j'ai ouvert mon propre cabinet et je consacre une bonne partie de mes activités à l'accès à l'information et à la protection des renseignements personnels. Mes clients sont en majorité des journalistes, des sociétés privées et des particuliers. Actuellement, je consacre environ 20 p. 100 de ma pratique à l'accès à l'information. Je présente environ 600 ou 700 demandes par an, ou du moins, mes collaborateurs le font en mon nom.
    En plus de ma participation à cet ouvrage, j'enseigne également à la faculté de droit,

[Français]

à la section de droit civil, un cours sur l'accès à l'information destiné aux étudiants diplômés et prédiplômés.
    Je dois également souligner que mon expérience, pour ce qui est de la violation de ma vie privée et de mes renseignements personnels — et dans certains cas, cela remonte à 1996 et 1997 —, m'a convaincu que chaque fois que je soumettais une demande, les autorités, les gens qui voulaient savoir qui était l'auteur de la demande, s'arrangeaient pour le savoir, et ce, de façon régulière.

[Traduction]

    À l'occasion d'un cocktail ou d'un coup de téléphone, ou de quelque autre façon, des gens m'ont dit qu'ils avaient appris que moi-même ou mon cabinet avions présenté une demande d'accès à l'information. J'ai donc perdu toute illusion quant à la confidentialité de mes demandes.
    Les gens s'adressent à moi ou à mon cabinet d'avocat pour présenter une demande d'accès à l'information parce qu'en plus de l'expérience que j'ai acquise au fil des années, je leur assure la confidentialité des rapports entre l'avocat et son client. Mon nom peut être divulgué, mais l'identité ou l'activité de mon client reste confidentielle. Il est dommage qu'on doive en venir là, mais nous n'avons pas le choix.
    Pour moi, la divulgation des renseignements personnels n'est qu'un des aspects du problème. Il est sérieux, mais il ne m'empêche pas de faire mon travail. J'ai appris au fil des années à m'en accommoder, tenant pour acquis que le système ne m'accorde aucune protection et que mon identité sera régulièrement divulguée selon les besoins.
    Je suis prêt à répondre à vos questions.
(1600)
    Merci, monsieur.
    Nous allons commencer par M. Peterson.
    J'aimerais rappeler aux membres du comité que le sujet à l'étude concerne la divulgation des noms des auteurs de demandes d'accès à l'information.
    Monsieur Peterson, vous avez sept minutes.
    Merci.
    Tout d'abord, monsieur, je suis sidéré d'apprendre que quatre de vos cinq demandes restent sans réponse au bout de cinq mois. Quelle voie de recours pouvez-vous invoquer?
    Normalement, le recours consiste à porter plainte auprès du commissaire à l'information. En l'occurrence, ce n'est pas ce que nous avons fait, car nous voulions prouver que les demandes d'accès à l'information présentées par les journalistes sont systématiquement retardées. Et nous ne savons pas pourquoi.
    Êtes-vous disposé à nous montrer ces cinq demandes?
    Tout à fait. Je ne les connais pas par coeur, mais je peux en faire part au comité dans le cadre de notre rapport.
    J'en suis tout à fait sidéré. Il faudrait que le comité trouve une solution à ce genre de situation.
    Merci.
    Monsieur Rubin, nous avons entendu le colonel Drapeau dire qu'il présente de 600 à 700 demandes par an. Combien en présentez-vous vous-même?
    Je ne les compte plus, parce qu'il y en a certainement des milliers. J'en présente sans doute plus de 1 000 par an. Certaines émanent de moi, d'autres de mes clients, comme dans le cas de M. Drapeau. J'ai moi aussi toute une variété de clients. Et dans certains cas, il s'agit de protection des renseignements personnels.
    Vous êtes donc également expert-conseils pour d'autres requérants.
    Oui, je fais les deux.
    Est-ce que vous recevez une demande de vos clients avant de présenter la demande d'information, ou est-ce que vous la demandez habituellement vous-même?
    Je la présente le plus souvent moi-même, mais les deux possibilités existent. Il y a tout un jeu d'échanges en matière d'information. Idéalement, on ne devrait pas avoir à en venir là, car le gouvernement devrait tout simplement donner l'information demandée.
    J'ai même vu des fonctionnaires provinciaux s'adresser à moi pour obtenir quelque chose du gouvernement fédéral... ou des organismes fédéraux qui veulent que je fasse une demande auprès d'un autre organisme fédéral. C'est vous dire à quel point tout cela est ridicule.
    Le commissaire adjoint Leadbeater nous a dit qu'il est normal qu'un ministère informe son ministre de l'identité d'un requérant, que des fonctionnaires analysent la demande, en ayant connaissance du nom du requérant, et élaborent une stratégie de communication pour faire face à cette demande. Que pensez-vous, tout d'abord, du fait que le nom du requérant soit communiqué au ministre et, deuxièmement, que le personnel prenne le temps d'élaborer une réponse destinée aux médias?
    Si vous voulez mon avis, je pense que cet usage est condamnable, parce qu'en fait, il crée un système parallèle et inutile. Il s'agit de limiter les dégâts et d'éviter que l'information ne soit manipulée à des fins politiques.
    Je me souviens de l'époque où le ministre des Finances Michael Wilson assumait lui-même la coordination de l'accès à l'information. Tout était réuni dans la même personne. J'ai demandé les résultats de certains sondages et lorsqu'il n'aimait pas les réponses fournies par des Canadiens qui critiquaient sa politique économique, il n'acceptait pas forcément de les divulguer. Il s'est exaspéré quelquefois lorsque les médias publiaient certaines informations obtenues grâce à mes demandes d'accès. Ce n'est pas de cette façon que les choses devraient normalement se passer.
    À mon avis, cela ne présente aucun intérêt et c'est pourquoi je recommande l'interdiction du déclenchement du feu jaune ainsi que la transmission hiérarchique jusqu'aux ministres. Si l'information est exacte, il n'y a aucune raison... Elle doit pouvoir entrer ou sortir; il n'y a pas à en faire tout un foin politique. Il peut y avoir des questions confidentielles — dans de très rares cas — dont certains hauts fonctionnaires doivent être informés. Mais lorsqu'on met dans le bain tout le monde et son chien... Dans cette note de service, comme dans l'affaire Bronskill, il y a tellement de fonctionnaires que la situation échappe à tout contrôle.
(1605)
    M. Leadbeater a dit qu'il était normal que le ministre soit informé de la demande et du nom de son auteur, de façon à pouvoir répondre à la période des questions ou pendant un point de presse.
    Oui. C'est comme ça que ça marche. Mais actuellement, comme l'a dit M. Drapeau, il faut s'accommoder de ce système, malgré tous ses défauts. C'est pourquoi je dis...
    Mais supposons que vous obtenez l'information dans un délai de 30 jours — ce qui me semble tout à fait légitime — pensez-vous qu'elle ne devrait passer que par un agent d'information à l'exclusion de tout autre fonctionnaire du ministère et que cet agent d'information soit tenu de ne la divulguer à personne d'autre?
    Ce serait préférable.
    Je demande notamment que tous les fonctionnaires qui interviennent sur une demande d'accès, y compris le ministre, le cas échéant, soient identifiés dans la réponse fournie au requérant. Ne tournons pas autour du pot; on a ici un système qui est normalement tenu secret.
    Mais non, je ne pense pas qu'ils doivent l'être. Celui dont le nom est fiché et qui fait l'objet d'un profilage devrait pouvoir en appeler auprès du commissaire. On devrait avoir le droit de s'en plaindre et de dire que cet usage devrait être interdit.
    J'aimerais que vous nous disiez également qui, dans un ministère, est habilité à connaître l'identité du requérant.
    Est-ce que vous dites également que le Bureau du Conseil privé ne devrait pas avoir la moindre possibilité d'intervenir sur une demande?
    Il fait partie du système de protection — non pas uniquement à cause du nom — qui coordonne les demandes d'accès à l'information. S'il est question d'un document confidentiel du Cabinet, il faut automatiquement retarder la procédure et passer par le Bureau du Conseil privé pour vérifier s'il s'agit effectivement d'un document confidentiel du Cabinet. Il y a bien d'autres raisons, indépendamment des stratégies de communications, qui obligent à retarder la procédure ou à passer par le Bureau du Conseil privé. Je considère que ce système est nuisible.
    Si, par exemple, on sait d'avance qu'il s'agit d'un document confidentiel du Cabinet, le ministère est en mesure de faire ce qu'il faut. Les fonctionnaires sont en mesure de traiter les demandes d'information qu'ils reçoivent, même lorsqu'il s'agit d'une information à caractère délicat. Il est inutile d'y ajouter ces multiples de couches de manipulation.
    Un instant. Voulez-vous parler des couches de manipulation dans la réponse fournie, ou du niveau de manipulation dans les réponses données en public à d'éventuelles questions?
    Si les ministres sont bien préparés à l'avance — et c'est la règle, ils se préparent aux frais du contribuable — ils devraient être en mesure de répondre à toutes les questions.
    Très souvent, je reçois des notes d'information qui ne portent pas sur le sujet soulevé; elles n'apportent pas de réponse de fond, mais elles contiennent de l'information sur l'auteur de la demande.
    Est-ce que vous vous plaignez de la qualité de la réponse?
    Excusez-moi, monsieur Peterson.
    Madame Lavallée, c'est à vous.

[Français]

    Je veux d'abord vous remercier d'être venus au comité cet après-midi. Votre témoignage est important, d'autant plus que selon vos dires, vous seriez l'un et l'autre des victimes expertes de la Loi sur l'accès à l'information. Aucun d'entre vous, sauf erreur de ma part, ne semble remettre en question le fait que le nom d'un journaliste ayant fait une demande d'accès à l'information s'est retrouvé dans un cabinet de ministre. Si jamais vous n'êtes pas d'accord là-dessus, dites-le moi. Il serait intéressant d'entendre votre avis à titre de victime experte, si vous me permettez l'expression, sur certains sujets, qu'ils soient secondaires ou très importants.
    D'abord, il y a deux semaines, des experts du Bureau du commissaire à l'information ont comparu et nous ont dit que les demandeurs étaient divisés en cinq catégories: les corporations, le public, les organisations, les médias et le milieu de l'enseignement. On nous a indiqué la répartition des demandes sous forme de pourcentages.
    Croyez-vous vraiment qu'il n'y ait que cinq catégories et qu'il n'existe pas de sous-catégories? Avez-vous déjà considéré faire une demande d'accès à l'information pour vérifier s'il existait d'autres catégories?
    Par ailleurs, vous n'êtes pas sans savoir que notre comité a adopté une motion il y a deux semaines et demie pour demander au ministre de refaire la Loi sur l'accès à l'information. On lui a donné comme limite le 15 décembre. Il nous écoute peut-être en ce moment. Il est possible aussi que certaines personnes veuillent savoir quelles solutions vous prônez pour protéger l'identité des demandeurs. À votre avis, c'est-à-dire celui de victimes expertes, quelles sanctions devrait-on imposer aux gens qui ont divulgué le nom des demandeurs afin de s'assurer que cela ne se reproduise plus?
    Enfin, il y a deux semaines, j'ai suggéré une idée aux gens du Bureau du commissaire à l'information, à savoir que lorsqu'on répond à une demande d'accès à l'information, on envoie au demandeur, avec la réponse, la liste des personnes à qui on a dû divulguer son identité. Je ne sais pas si c'est une bonne idée. J'aimerais que vous me donniez votre avis, l'un après l'autre et dans l'ordre qui vous plaira, sur chacune des mes questions.
(1610)
    Quant à savoir s'il y a plus de cinq catégories, j'en suis absolument certain. Pour ce qui est de savoir si les catégories actuelles sont utiles, valables et exactes, la réponse est non.
    Lorsque mon cabinet soumet une demande, est-ce que cela intéresse certains médias, universités, organisations, corporations ou individus? Ces gens n'en ont absolument aucune idée. Pour ma part, j'ignore totalement dans quelle catégorie la demande est classée. L'est-elle en tant qu'organisation ou autrement? Ces chiffres valent ce qu'ils valent, et je ne vois pas l'intérêt, sur quelque plan que ce soit, de classer les demandes selon les demandeurs.
    Il m'est déjà arrivé de soumettre une demande à des fins de recherche. Dans ce genre de cas, il est possible de demander, tel que la loi le prévoit, d'être exempté des frais et des débours afférents. Dans la demande, on doit expliquer que le but de la démarche concerne la poursuite d'une recherche. Or, dans le cas de chacune de ces demandes, on a essuyé un échec. Identifier non pas le demandeur mais la catégorie à laquelle appartenait celui-ci n'a rien donné.
    Pour ce qui est d'une éventuelle refonte de la Loi sur l'accès à l'information, je vous avouerai, madame Lavallée, me sentir à la fois possessif et protecteur face à la forme actuelle de cette loi, même si j'en suis victime. Pourquoi? L'expérience qu'on a de cette loi totalise 23 ans. Si je sortais mon livre dans un instant, vous pourriez voir à quel point les cours se sont efforcées d'interpréter cette petite loi, que ce soit la Cour fédérale, la Cour d'appel fédérale ou la Cour suprême. Il n'y a pas d'équivoque: la Cour suprême a décrété qu'il s'agissait d'une loi quasi constitutionnelle. C'est un droit qui appartient à tout le monde. Selon M. La Forest, c'est une façon d'assurer que notre démocratie soit vivante et riche. En se renseignant, les simples citoyens, de même que les médias, acquièrent la capacité d'obliger les gouvernants à un certain degré de responsabilité. Je suis donc surpris que ce droit soit en cause. Aucun autre droit, que ce soit celui d'exercer sa religion ou de s'exprimer, n'est remis en question. Ces droits sont respectés par nos fonctionnaires et par tous les gens. Pourquoi cette loi-ci hériterait-elle d'un régime imprégné de je-m'en-foutisme?
     Selon moi, la loi telle qu'elle est présentement est bonne. J'y ai recours de façon régulière. Malgré la situation de victime à laquelle vous faites allusion, je finis par tirer de cette loi ce dont j'ai besoin. Il y a des problèmes beaucoup plus épineux, beaucoup plus aigus, entre autres les retards considérables. M. Peterson en a parlé plus tôt. Je pourrais vous donner deux exemples de situations que j'ai vécues, dans un cas vendredi passé et dans l'autre ce matin.
    En 2004, j'ai fait une demande auprès du ministère des Affaires indiennes de la part d'un homme d'affaire. Un mois plus tard, on m'a remis une trentaine de pages. Je savais instinctivement que ça ne répondait pas à mes besoins. Si je n'avais pas eu à ce moment-là le réflexe de porter plainte, je n'aurais reçu que ces 33 pages. Aujourd'hui, j'en ai reçu 635.
    Je vais maintenant parler du deuxième cas. En 2003, j'ai été engagé par Radio-Canada — et on parle ici du domaine public — pour faire une recherche sur l'historique associé au référendum de 1995. J'ai soumis une foule de demandes d'accès à l'information. Plusieurs ont servi, mais la totalité des dossiers — j'en ai obtenu environ 10 p. 100 — datait d'avant l'année anniversaire de 2005. La semaine dernière, j'ai reçu une boîte de cette hauteur-ci de la part du Conseil privé. Après m'être plaint, voici que j'ai reçu enfin des documents. Il est trop tard: tout ça est maintenant connu du public. Il ne fallait pas être une tête à Papineau pour deviner que mon intérêt était de nature historique.
(1615)
    Si vous ne voulez plus ces documents...

[Traduction]

    Merci, colonel Drapeau.
    Monsieur Martin.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également nos témoins.
    Nous avons entrepris cette étude parce que nous avons été scandalisés d'apprendre que le nom d'un journaliste avait été divulgué dans le contexte d'une demande d'accès à l'information. La plupart des députés que je connais ignoraient ce genre de choses et nous avons été scandalisés d'apprendre, grâce à votre témoignage et grâce aux témoignages de fonctionnaires du Conseil du Trésor et du commissaire à l'information, qu'il est courant qu'un ministre, ou du moins des hauts fonctionnaires ministériels, découvrent l'identité de l'auteur de la question. Il semble même aller de soi que lorsqu'un ministère reçoit une plainte difficile ou portant sur un préjudice subi, le cabinet du ministre demande tout d'abord qui est l'auteur de la plainte. Je trouve cela scandaleux. Si le droit de savoir est de dimension quasi constitutionnelle, cela signifie que les droits constitutionnels sont systématiquement et massivement violés.
    L'intérêt premier de notre étude, c'est donc de savoir si ces choses se produisent effectivement. D'après ce que nous avons entendu, nous sommes convaincus qu'elles se produisent. Nous voulions savoir si elles étaient fréquentes et largement répandues, et nous avons obtenu réponse. Nous voulions savoir si cela se produisait du temps du précédent gouvernement et sous le gouvernement actuel. Ken a même indiqué que c'était une pratique largement répandue et très ancienne.
    J'aimerais vous poser une question — et j'en apprends tous les jours, et plus j'en apprends, plus je suis déçu et scandalisé — sur ce que Ken vient de dévoiler, à savoir que non seulement on se renseigne sur le nom de l'auteur de la demande, mais en plus, on produit un profil détaillé de l'auteur, en indiquant le niveau de menace que peut représenter la question pour le gouvernement.
    Pouvez-vous nous donner des détails sur la fréquence de ce type de profilage? Quand il est question non seulement du nom de l'auteur, mais également de ses activités, du type de questions qu'il peut poser et des causes auxquelles il a déjà adhéré, s'agit-il là d'un élément nouveau? Ces renseignements supplémentaires m'inquiètent et ajoutent toute une nouvelle dimension au problème. Je trouve proprement ahurissant qu'on se renseigne non seulement sur l'identité du requérant, ce qui à mon avis porte atteinte à l'intégrité même du système, mais que l'on demande également des renseignements personnels confidentiels à son sujet.
    N'y a-t-il pas là une infraction à la Loi sur la protection des renseignements personnels?
    Je ne me considère pas comme une victime ou une cible. J'exerce mes droits à l'information, ce qui constitue un acte légal. Le problème, c'est que certains fonctionnaires ont décidé que ce droit n'existait pas, qu'il s'agit simplement d'un privilège qu'ils peuvent manipuler et négliger. Il est bien malencontreux qu'on en soit là.
    Le profilage est exactement à l'opposé de ce à quoi l'on s'attend lorsqu'on fait une demande d'accès à l'information, en particulier si on le fait au nom de citoyens qui sont en conflit avec le gouvernement, qu'ils veulent rétablir leur réputation ou qui sont aux prises avec un site contaminé par des déchets toxiques.
    Et que font les fonctionnaires? Ils essayent de se renseigner sur le requérant, au lieu de s'en tenir à l'esprit de la Loi sur l'accès à l'information. Voilà le problème.
    Je ne pense pas que ce soit le premier exemple que j'aie rencontré. Comme on vous l'a déjà dit, ces choses se font le plus souvent oralement et je constate souvent, à l'occasion d'un événement social ou d'un rassemblement, que dès que je m'approche, certains disent: « Je ne peux plus rien dire, voici Ken Rubin ».
    Voilà le problème qui se pose.
    Mais la garantie de confidentialité n'était-elle pas un élément clé du texte de loi initial, dont elle faisait partie intégrante?
(1620)
    Si.
    Je sais que la loi n'a jamais été révisée, mais êtes-vous d'accord pour dire que l'anonymat du requérant et la garantie de confidentialité font partie intégrante de la loi?
    Oui, et en tant que députés, vous vous occupez des préoccupations des gens de votre circonscription et vous savez à quel point ce sont parfois des problèmes délicats et sensibles. Vous êtes au courant.
    Je pense qu'il serait préférable d'apporter une modification à la Loi sur la protection des renseignements personnels, qui permet à des tierces parties d'accéder à des renseignements personnels, que de modifier la Loi sur l'accès à l'information. Il faut une meilleure protection des renseignements personnels dans les codes de divulgation, avec un mécanisme de contrôle indépendant. Actuellement, la protection est insuffisante, et un changement serait très utile.
    Merci de cette proposition, mais j'aimerais savoir quand et comment les choses se sont détériorées. Quand s'est produit le déraillement à partir de l'adoption de la loi en 82 ou 83? Quand a-t-on perdu cette garantie de confidentialité qui, à mon avis, fait partie intégrante de la loi?
    Puis-je ajouter quelque chose à ce qu'a dit Ken? Les témoins précédents ont également signalé que dans certains cas, les fonctionnaires peuvent deviner l'identité d'un requérant lorsqu'il s'agit d'un journaliste, car si je me souviens bien — et il ne s'agit pas d'une citation mot pour mot — on sait qu'un tel a fait des articles sur tel ou tel sujet, pour lequel le ministère reçoit une demande d'accès à l'information; elle émane d'un journaliste, ce doit donc être Fred. Je ne sais pas exactement combien il y a de journalistes au Canada, mais ils ne sont pas des milliers à faire des demandes d'accès à l'information; au contraire, ceux qui en font sont en nombre limité. Il s'agit d'un petit groupe, et dès qu'on sait qu'une demande émane d'un journaliste, on a de bonnes chances de pouvoir deviner sans grand risque d'erreur qu'il s'agit de Jim Bronskill, car il a déjà fait des articles sur les avions de la CIA.
    Donc même si on n'utilise pas le nom, mais seulement les renseignements indiquant que...
    C'est pour cela qu'il est préjudiciable de catégoriser une demande comme une demande des médias et de soumettre cette demande à un traitement spécial. D'ailleurs, c'est cela le sujet de notre plainte, comme je l'ai déjà mentionné.
    Monsieur Martin, vous avez demandé quand cela a commencé. Je crois que cela a commencé au tout début. Les deux lois ont été promulguées en même temps, le 1er juillet 1983...
    Quelles deux lois?
    La Loi sur la protection des renseignements personnels et la Loi sur l'accès à l'information. J'ai fait beaucoup de recherches sur tous les débats à la Chambre des communes ayant eu lieu dans les dix ans qui ont précédé la promulgation de ces deux lois. Quand les lois ont été promulguées et les deux commissaires nommés — M. Grace en tant que commissaire à la vie privée et Mme Hansen en tant que commissaire à l'information — il n'y avait aucun programme d'éducation publique, aucun système pour dire aux fonctionnaires qu'il s'agissait d'un droit comme tous les autres. Il n'y avait aucune indication que les fonctionnaires seraient tenus de respecter des normes, aucune indication qu'il y aurait des pénalités, dans les politiques, et non dans les lois. On se serait attendu que les fonctionnaires sachent tout cela. Il n'y avait aucune attente, et aucun changement de valeurs. Le traitement de ces dossiers est maintenant passé des fonctionnaires au public, pour ainsi dire.
    Merci, monsieur le colonel.
    Merci, monsieur Martin.
    M. Stanton est le suivant.
    Merci, monsieur le président.
    Avant de poser ma question, concernant les commentaires de M. Martin qui portaient sur les questions posées... Enfin, j'y reviendrai dans quelques secondes.
    Ma première question s'adresse à M. Rubin. Monsieur Rubin, nous avons entendu des témoignages et des allégations sensationnels portant sur des systèmes de contrôle internes, et des questionnements qui se font au sujet des raisons qui sous-tendent beaucoup de demandes. Vous en avez parlé dans votre témoignage. Pour ce qui est des systèmes, il est raisonnable de supposer que tout ministère doit avoir un moyen de suivre les demandes et les données, et de catégoriser les demandes pour être efficace. De quoi parlez-vous vraiment? Que voulez-vous dire au juste, et quelle preuve auriez-vous qui indique que ces systèmes de contrôle, de suivi, ne sont pas vraiment utilisés à bon escient?
    Ce sont les gens du ministère qui les appellent des systèmes de pistage et je vous ai offert de la documentation. Je ne fais pas d'allégations. J'ai de la documentation du gouvernement même qui fait ces choses-là.
    Avant que je l'oublie, il y a un autre exemple. À part le Parti réformiste qui était visé, le Bloc Québécois était aussi visé pendant les négociations de l'Accord du lac Meech, et quand il soumettait des demandes portant sur le scandale des commandites. Cela veut dire que le système est déformé. La déformation dépend du dossier en question, et du gouvernement au pouvoir.
    J'essaie de faire des commentaires positifs. Je veux simplement que ces renseignements sortent sans être filtrés. Si vous voulez éviter les coûts supplémentaires engendrés par ces gens-là assis à des tables pour discuter de moi et de mon problème avec l'accès, si vous voulez mettre en oeuvre les politiques d'un gouvernement efficace de façon moins compliquée, voilà un moyen qui nous permettrait de nous assurer que le gouvernement fonctionne mieux. Fournissez l'information. J'ai une loi que j'aimerais présenter au comité; elle s'appelle la loi sur le droit public d'accès à l'information. La loi indique que l'aspect le plus important de toute l'affaire c'est la divulgation proactive. Éliminons toute cette bureaucratie compliquée, et tout ce pistage parallèle des citoyens et de leurs demandes d'accès à l'information.
(1625)
    Je vois.
    Je voulais signaler un élément à la suite de la question de M. Martin. D'après ce que j'ai entendu, le ministre n'exige pas cette information. D'après les témoignages que nous avons entendus dernièrement, les ministres ont la possibilité d'obtenir ces renseignements et je serais heureux de me pencher sur les bleus pour le confirmer. Mais ce que nous avons entendu aujourd'hui en réponse à certaines de nos questions diffère de ce que nous avons entendu précédemment, c'est indubitable.
    Il va sans dire que notre comité tient à ce que l'accès à l'information ait lieu de façon objective; que, quelle que soit la catégorie dans laquelle une personne est classée, la requête soit traitée de façon professionnelle; et que les renseignements soient fournis dans le respect de la Loi sur l'accès à l'information et de la Loi sur la protection des renseignements personnels.
    Il y a 25 000 demandes d'accès à l'information. Il y en a 36 000 autres relevant de la Loi sur la protection des renseignements personnels. On a parlé du peu d'empressement à fournir l'information demandée. Mais il convient de mettre les choses en perspective: l'opération est de taille. Quelque 500 fonctionnaires fédéraux s'occupent exclusivement des questions d'accès à l'information.
    D'après les témoignages que nous avons entendus, oui, effectivement, il y a eu certains problèmes. Le Secrétariat du Conseil du Trésor prend des mesures pour remédier au problème, assurant une formation et faisant ce qui doit être fait. Vu le volume de travail, il est inévitable qu'il y ait des glissements ou des accidents en matière d'information. Mais dire que c'est généralisé, à mon avis, tel n'est pas le cas. Qu'en pensez-vous?
    Le système d'accès à l'information a fait l'objet d'une étude par un groupe de travail gouvernemental en 2002. L'étude a montré que le gouvernement consacrait environ 800 millions de dollars aux communications. Je parle là de messages diffusés par le gouvernement pour faire connaître son fonctionnement, sa politique et ses programmes.
    Nous ne savons pas quel est le budget affecté au traitement des 25 000 demandes d'accès à l'information — ce serait pourtant intéressant. Selon moi, il serait de beaucoup inférieur toutefois aux 800 millions de dollars consacrés à ce que certains pourraient considérer comme des efforts pour se faire bien voir. N'empêche que fournir de l'information en réponse aux demandes est une exigence au vu de la Constitution et des lois.
    S'il existe des problèmes, c'est en bonne partie parce que, souvent, les gens sont mal préparés à affronter un tel volume de travail, comme le disait le colonel Drapeau; de plus, tout le système manque de ressources.
    En 1977, le ministre de l'époque, l'honorable Francis Fox, a déposé un livre vert sur l'accès à l'information. Son introduction et l'essentiel des données qu'il contenait étaient inspirés par l'expérience américaine. La Freedom of Information Act a pris force de loi aux États-Unis dans les années 1960. D'après les estimations du livre vert, inspiré par l'expérience américaine, nous aurions dû nous attendre à 100 000 demandes d'accès à l'information par an.
    Avec des calculs partant du principe que les Canadiens n'étaient pas tout à fait aussi curieux ou aussi entreprenants que leurs cousins américains, on a révisé le chiffre à la baisse et estimé qu'il serait de 70 000 demandes. C'était en 1977. Et c'est ce chiffre qui a été utilisé pour la dotation de départ en matière d'accès à l'information, dans les différents ministères et institutions. Nous n'en sommes donc même pas à la moitié du volume escompté par le gouvernement canadien en ce qui concernait les demandes d'accès à l'information.
(1630)
    Puis-je vous poser à chacun une question simple? Y a-t-il des circonstances où un ministre devrait pouvoir connaître le nom de la personne faisant la demande?
    Monsieur Gollob, oui ou non?
    Non.
    Que le ministre, à l'occasion, puisse devoir connaître le nom de la personne faisant la demande ne me dérange pas.
    Monsieur Rubin?
    Oui.
    Fort bien.
    Au sein du ministère, quelqu'un d'autre que le dirigeant de l'information devrait-il pouvoir être au courant?
    La personne qui encaisse le chèque doit manifestement être au courant.
    Cela fait donc deux personnes.
    Et cela devrait s'arrêter là — deux personnes.
    Seules deux personnes au ministère doivent être au courant, sauf, parfois, le ministre?
    Eh bien, parfois plus de deux personnes auraient besoin de savoir — l'agent à la coordination de l'AIPRP et son personnel. Alors je dirais le personnel de l'agent à la coordination de l'AIPRP et quiconque... Parfois un conseiller juridique pourrait avoir besoin de savoir — et je parle d'un conseiller juridique du ministère de la Justice — et celui qui encaisse le chèque.
    Je considère que l'information ne devrait être communiquée qu'à ceux qui en ont besoin pour traiter la demande.
    J'imagine qu'il faudrait aussi quelqu'un pour déterminer si certaines dispositions de la loi prévoient l'exclusion de certaines informations.
    Je vous ai donné l'exemple d'un conseiller juridique. Parfois — et je dis bien parfois — lorsque quelqu'un fait une demande en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, le conseiller juridique aura besoin de confirmer l'identité du demandeur et, à cette fin, il faudrait lui communiquer certaines informations.
    Monsieur Drapeau et monsieur Rubin, pourriez-vous nous dire quel pourcentage de vos demandes sont traitées dans les délais prévus?
    Entre 10 et 15 p. 100.
    Monsieur Rubin?
    Je dirais 5 p. 100, et parfois je dois attendre trois ou quatre ans.
    Et normalement vous portez plainte?
    Je fais des plaintes ponctuelles, mais le commissaire à l'information est aussi aux prises avec un manque de ressources et ça prend beaucoup de temps. Il existe plusieurs procédures de plaintes: on peut se plaindre aux ministres, à la presse, et aux députés. Comme je l'ai dit d'entrée de jeu, l'existence de votre comité est une bonne chose. Alors puisque vous vous penchez sur la question de l'accès, vous devriez peut-être réserver une réunion pour faire une analyse poussée des retards, des exemptions excessives, du nombre croissant d'exclusions, et de nombreux autres problèmes à cet égard. Vous découvrirez des situations surprenantes.
    Monsieur Rubin, vous avez de nombreuses recommandations à nous faire; je vous demanderais d'en faire part au comité.
    Très bien.
    D'abord, l'accès à l'information devrait être un droit constitutionnel et non pas un privilège conféré par une loi qui peut être modifiée.
    Deuxièmement, vous devriez instaurer un service de divulgation proactif, avec un mandat spécifique, sous l'égide d'un ministre. L'article du projet de loi C-2 qui porte sur les services d'accès à l'information n'a pas assez de mordant et est hypocrite.
    Troisièmement, il s'agit de bannir le recours systématique au feu jaune en matière de profilage. Il faudrait aussi bien préciser les responsabilités des agents à l'intégrité de l'AIPRP; ne plus permettre aux agents de l'AIPRP d'avoir deux rôles, par exemple de travailler à la fois sur le pistage et sur des dossiers ministériels classifiés; et s'assurer que ceux qui traitent et examinent les demandes d'accès à l'information et statuent à leur sujet puissent être identifiés.
    Quatrièmement, les pratiques secrètes de pistage et de profilage devraient constituer un motif d'appel.
    Cinquièmement, les pouvoirs du commissaire à l'information devraient être exécutoires, notamment le pouvoir d'examiner les agences responsables du pistage et du profilage des demandeurs d'accès.
    Sixièmement, le pistage et le profilage des demandeurs devraient constituer des infractions entraînant des sanctions et des peines d'emprisonnement. En plus, il faudrait réduire, de façon significative, les exemptions, notamment les exemptions générales, et mettre fin aux retards entraînés par le pistage et le profilage des utilisateurs du système d'accès à l'information.
    Enfin, il faudrait modifier la Loi sur la protection des renseignements personnels afin de restreindre l'accès de tierces personnes aux renseignements personnels, d'offrir davantage de protection des renseignements personnels, et d'assujettir les codes d'utilisation et de divulgation à un examen indépendant.
(1635)
    Merci, monsieur Rubin.
    Monsieur Wallace.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être venus cet après-midi.
    J'ai quelques questions, et vous êtes tous libres d'y répondre. Commençons avec M. Gollob. Le rapport que j'ai ici, et que j'ai pu feuilleter une fois, a été publié en 2005, lorsque les libéraux étaient au pouvoir. Est-ce bien le cas?
    Oui.
    Avez-vous été surpris de constater la consternation de certains de mes collègues de l'autre côté devant les retards, etc.? Il s'agit d'un problème qui existe depuis plusieurs années, n'est-ce pas?
    Vous faites référence à quoi exactement?
    Eh bien, mon ami M. Peterson a dit...
    Ne les provoquez pas, monsieur Wallace.
     ...qu'il était choqué d'apprendre que vous deviez attendre si longtemps avant de recevoir une réponse à vos demandes.
    S'agit-il d'un problème qui existe depuis notre arrivée au pouvoir le 23 janvier, ou s'agit-il d'un problème qui existe depuis des années?
    C'est un sujet qui suscite des préoccupations croissantes chez les commissaires à l'information, des préoccupations qui ont été évoquées dans les rapports annuels des commissaires depuis le commissaire Grace, en fait...
    Au tout début.
    ...qui a été, je pense, le deuxième commissaire.
    Le problème des retards est bien connu parmi les journalistes. En effet, il y a des journalistes qui ne voient pas l'intérêt de faire une demande d'accès à l'information car ils s'attendent à ce que l'information soit désuète avant qu'ils la reçoivent.
    Malheureusement, je n'ai pas pu assister aux réunions du comité la semaine dernière, j'étais en déplacement avec le Comité des finances.
    Je vais vous citer M. Leadbeater, le sous-commissaire à l'information, et j'aimerais entendre votre réaction. Il a dit:
Nous ne trouvons rien à redire à ce que les fonctions de communications gouvernementales ou le personnel ministériel sachent quels renseignements vont être divulgués en vertu de l'accès à l'information afin de leur permettre de préparer des fiches parlementaires, des Q et R, etc., tant que ce processus ne porte pas préjudice au demandeur en retardant la réponse ou en augmentant le degré de censure du document, etc. À mon avis, un tel processus peut se dérouler sans qu'il y ait d'échange d'identités — et certains ministères le font très bien.

Donc, non, tant que les délais sont respectés et que la loi est correctement appliquée, nous n'avons pas d'objection à ce que des « demandes de caractère délicat » passent par la fonction de communications d'un ministère.
    Voilà ce qu'a dit le sous-commissaire à l'information, et j'aimerais entendre la réaction de nos trois témoins.
    Je n'ai rien à redire à ce que le gouvernement développe, en parallèle, une stratégie de communications afin d'expliquer les motifs qui sous-tendent une décision au moment où elle sera rendue publique, pourvu qu'une telle stratégie ne porte pas préjudice au processus et qu'on respecte les délais de traitement enchâssés dans la loi; et — comme M. Leadbeater l'a dit — pourvu qu'elle n'entraîne pas une augmentation du degré de censure du document ou une augmentation dans le nombre de demandes de modification ou d'obstruction des dossiers, comme cela a été le cas lors de la Commission Gomery.
    On a constaté que les demandes étaient renvoyées d'un service à l'autre. On nous a expliqué en détail comment les demandes d'accès à l'information déposées par les journalistes passaient du coordonnateur au bureau politique pour retourner ensuite au ministère. Elles étaient renvoyées d'un service à l'autre pour essayer de déterminer ce que le demandeur visait par sa demande et ce qu'ils pouvaient ne pas divulguer en matière de... et tout ce processus prenait des semaines entières.
    Nous avons des préoccupations à l'égard des retards et nous craignons que cette stratégie porte préjudice au processus et entraîne des retards.
(1640)
    Vous disposez d'une minute, monsieur Rubin.
    Écoutez, si cette loi était vraiment utilisée, si un million de Canadiens utilisaient cette loi, croyez-vous que ce système parallèle ne s'effondrerait pas? Je considère que le système est déjà défaillant. Je ne suis pas d'accord avec le sous-commissaire à l'information. Je ne crois pas que ce soit nécessaire. Je crois que cela crée tout simplement des problèmes. Cela favorise la censure, les retards, et trop de choses sont dites qui ne sont pas mises par écrit...
    J'ai vu trop de plans stratégiques de communications qui exigeaient des communiqués discrets ou qui tâchaient de modérer les attentes. Si un gouvernement veut gouverner, qu'il gouverne. Qu'il ne nous fasse pas perdre notre temps en mettant sur pied ces mécanismes parallèles.
    M. Wallace, puis M. Laforest.

[Français]

[Traduction]

    Vous êtes sur la liste. Voulez-vous prendre la parole?

[Français]

    Monsieur Drapeau, vous avez dit plus tôt détenir des boîtes contenant de l'information sur le référendum. J'aimerais vous offrir d'aller les chercher et d'en passer moi-même le contenu à la déchiqueteuse.
    Pour en revenir à des choses plus sérieuses, j'aimerais reparler du sujet que nous avions entamé, plus particulièrement des solutions. Même si vous dites ne pas vous sentir victimes, il reste que c'est ce qui vous réunit aujourd'hui. Le ministre est en train de moderniser et de renforcer la Loi sur l'accès à l'information. Vous avez certainement des solutions à proposer.
     M. Rubin nous a fait part plus tôt des changements qu'il voudrait voir apporter à cette loi. J'aimerais entendre ce que M. Gollob a à dire à ce sujet. Le fait que le ministre ait accès au nom du demandeur serait-il un point à modifier?
    Monsieur Drapeau, j'aimerais que vous me disiez très brièvement à quel moment exact il devient selon vous essentiel pour un ministre, aux fins de la conduite des affaires de l'État, de connaître le nom d'un demandeur.
    Enfin, puisque vous avez tous été victimes, j'aimerais savoir quelles sanctions devraient être imposées à ceux qui transgressent ces règles. Il semble que dans la loi actuelle, rien ne soit prévu à cet égard.
    Monsieur Drapeau, je vous demanderais de me répondre très brièvement, afin de permettre aux autres de répondre également.
    À mon avis, il s'agit de remettre la responsabilité au ministre. La loi dit que le ministre en est le responsable. Il délègue la totalité de son autorité. Je vois le ministre comme un membre du Conseil privé que les affaires de l'État obligent, dans des cas exceptionnels, à connaître le nom d'un demandeur. Ici, je précise bien que c'est le rôle du ministre, et non celui de son personnel ou d'autres fonctionnaires. Quoi qu'il en soit, je ne peux pas me mettre à sa place et déterminer le moment exact.
    Pour ce qui est des outils devant être utilisés, je pense que la coordinatrice ou le coordinateur de l'accès à l'information est au coeur du problème. Cette personne devrait s'attendre à ce que son rendement soit mesuré à la fin de l'année. Cela devrait être rapporté. On devrait ensuite déterminer si lui ou elle répond aux exigences de la loi. Présentement, cela ne se fait pas.
    Monsieur Gollob, pourriez-vous me parler des changements que vous aimeriez voir apporter à la Loi sur l'accès à l'information?
    L'Association canadienne des journaux a appuyé les amendements proposés par l'ancien commissaire à l'information, M. Reid, ainsi que celles du juge John Gomery. Ce dernier a lui aussi appuyé les recommandations de M. Reid.
    En outre, nous avions à l'époque appuyé le programme énoncé par M. Harper dans un éditorial du journal The Montreal Gazette publié en juin 2005 et dans lequel il donnait essentiellement son appui aux mêmes propositions.
    Dans le cadre des projets que vous avez appuyés, est-ce qu'on parlait de sanctions à imposer à ceux qui transgresseraient les règles, particulièrement dans les cas où l'identité des requérants serait divulguée?
    Nous n'avons pas étudié cette question, à ce moment-là.
    À mon avis, on peut faire une analogie entre l'étude que vous faites dans le cadre de ce comité et une fenêtre brisée dans un appartement. La fenêtre est brisée parce qu'un cambrioleur est entré dans l'appartement. Ce qui nous préoccupe davantage que la fenêtre brisée, c'est le cambrioleur et le vol qui a eu lieu. Le vol, dans cette analogie, c'est tout le système de suivi des demandeurs et le processus visant à mettre à part les demandes des médias.
(1645)
    Je ne suis pas certaine d'avoir bien suivi. Quand vous parlez d'un cambrioleur, est-ce qu'il s'agit de la personne qui a divulgué l'information du journaliste?
    Bien sûr. J'ai parlé d'un comité qui, selon le témoignage d'une personne qui était membre du Parti libéral à cette époque, existait en 2002. Ce comité, qui avait comme objectif de freiner l'accès à l'information, tenait des réunions où on parlait des demandes faites par des journalistes.
    Je suppose qu'au cours de ces réunions, ces gens mentionnaient les noms des journalistes qui avaient fait des demandes. Selon moi, ce n'est pas là l'essentiel du problème, mais bien le fait qu'ils ont essayé de bloquer l'accès à l'information.
    Il reste que...

[Traduction]

    Monsieur Van Kesteren.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'ai quelques brèves questions. En ce qui concerne les deux premières, vous pouvez simplement répondre par oui ou par non.
    Je crois avoir bien compris: pour modifier la Loi sur l'accès à l'information, monsieur Gollob, vous êtes tout à fait d'accord.
    Monsieur Drapeau, vous dites non, que ce n'est pas nécessaire.
    Monsieur Rubin.
    La prochaine question.
    Qu'ai-je dit?
    Je suis désolé. Vous avez dit que nous avions tout à fait besoin... et je pense que vous nous avez présenté dix recommandations.
    C'était uniquement pour ce problème en particulier. Je pense que nous avons besoin d'une loi entièrement nouvelle. On ne peut tout simplement pas modifier cette loi-ci; elle ne fonctionne pas.
    Très bien, donc, vous dites qu'il nous faut une nouvelle loi.
    M. Ken Rubin: Oui.
    M. Dave Van Kesteren: J'aimerais revenir à la question initiale, la raison même pour laquelle nous avons décidé de tenir cette séance: est-ce que l'on divulgue les noms des auteurs de demandes d'accès à l'information? Je pense que la question est claire.
    Monsieur Gollob, croyez-vous que les noms des auteurs de demandes d'accès à l'information sont communiqués?
    Nous croyons que c'est chose courante.
    Très bien.
    Monsieur Drapeau.
    Oui, et je sais que c'est effectivement le cas.
    Très bien.
    Oui, et en ce qui concerne cette question, après trois fois, c'est fini pour vous.
    Très bien.
    Nous pouvons donc en conclure que c'était pratique courante de la part du gouvernement précédent. La question que l'on se pose aujourd'hui est la suivante, est-ce que cela se fait encore? Si oui, nous voulons y mettre fin.
    J'aimerais citer M. Dale Eisler en ce qui concerne l'affaire Bronskill:
Il n'y avait aucune connaissance d'une demande d'AAI de la part d'un journaliste en particulier. Nous n'avons jamais accès à cette information. En l'occurrence, il y a eu une discussion au sujet de dossiers d'AAI qui étaient divulgués concernant les allégations de survols par la CIA.

Il est bien connu que M. Bronskill avait déjà écrit plusieurs articles sur la question et qu'il avait fait appel à la Sécurité publique et à d'autres organismes pour obtenir des commentaires et des clarifications. Dans ce cas, l'hypothèse était que, compte tenu de son intérêt particulier pour la question, il rédigerait un autre article.

Rétrospectivement, il n'était pas convenable qu'une telle hypothèse soit formulée.

Cette discussion s'est déroulée seulement entre hauts fonctionnaires. Le personnel politique n'y a pas pris part et le rapport de cette discussion est une pratique établie par l'ancien gouvernement. Ce genre de pratiques a pris place dans l'ancien cabinet du premier ministre et son équipe de communications.
    Nous avons donc ici un haut fonctionnaire du BCP qui décrit essentiellement des fonctionnaires en train d'émettre des hypothèses à propos d'un nom et qui ensuite l'incluent dans le compte rendu de leur réunion, compte rendu qui a été distribué également au personnel politique. Croyez-vous qu'il s'agit là d'une preuve d'une infraction délibérée à la loi de la part du personnel politique?
    J'aimerais donc avoir une réponse de chacun d'entre vous.
    Je n'ai pas suffisamment d'information pour répondre avec certitude par l'affirmative.
    J' y ai répondu plus tôt lorsque j'ai dit que si on repère les demandes qui proviennent des journalistes et qu'on les mette de côté quand on sait que seulement cinq personnes auraient pu faire ce genre de demande — qu'il a seulement cinq personnes qui présentent régulièrement des demandes au ministère sur ce sujet — et qu' un journaliste a écrit sur ce sujet, vous allez deviner correctement l'identité du journaliste en question.
    Une voix: Et alors?
    M. Gollob: Alors, l'argument que l'on fait valoir c'est que dès que l'on sait qu'une demande émane d'un journaliste, il y a eu jusqu'à un certain point infraction, parce que l'identité de l'auteur ne devrait pas influer sur le traitement de la demande.
(1650)
    Monsieur Rubin.
    La question n'est pas vraiment de déterminer dans quelle mesure vous êtes une personnalité ou la quantité d'information que l'on peut dénicher à votre sujet. La question que l'on doit se poser c'est si l'on doit leur permettre d'obtenir l'information? Vous sentez-vous libre de leur fournir cette information? Et va-t-on faire perdre le temps de tout le monde en faisant des suppositions, ou allez-vous faire votre travail, qui est de gouverner le pays?
    C'est une chose de supposer que la demande provient probablement d'un journaliste à cause du sujet dont il est question et d'apprendre précisément l'identité de la personne en question.
    C'est la raison pour laquelle je n'ai pas répondu de façon catégorique à la question de savoir s'il s'agissait d'une infraction. Le fait de deviner l'identité de la personne ne représente pas une atteindre à la vie privée, mais la divulgation du nom de l'auteur de la demande serait une atteinte à la vie privée si par la suite ce nom était utilisé à d'autres fins sans le consentement de l'intéressé.
    Oui, c'est ce que nous tâchons de déterminer.
    Monsieur Peterson.
    Je vous remercie.
    Je pense qu'il serait très utile au comité — en raison des excellentes compétentes que vous possédez tous les trois — si vous pouviez nous indiquer, par écrit, les changements que nous devrions apporter, à votre avis.
    Est-ce que cela vous dérangerait?
    Ce serait un honneur.
    Je vous remercie.
    Simplement pour m'assurer d'avoir bien compris, deux d'entre vous ne sont absolument pas d'accord avec le sous-commissaire Leadbeater qui considère qu'un ministre ne devrait pas être mis au courant d'une demande même s'il risque de devoir y répondre en public.
    Monsieur Gollob.
    Mis au courant de l'identité de l'auteur de la demande.
    L'identité de l'auteur et de la teneur de la demande.
    Je ne me souviens pas d'avoir formulé d'objection en ce qui concerne la teneur, mais en ce qui concerne l'identité.
    Très bien.
    Monsieur Drapeau.
    J'ai de la difficulté avec la façon dont vous avez formulé la chose. Je n'approuverai certainement pas qu'un ministre puisse ou doive connaître l'identité pour répondre en public. J'estime que pour des raisons d'État, il pourrait s'agir de raisons de sécurité nationale, une question d'immigration, il pourrait s'agir de toute une gamme de questions. Exceptionnellement, un ministre a également le droit de savoir pour des raisons d'État. J'ai dit que dans des cas très exceptionnels, il peut demander à la personne à qui il a délégué ce pouvoir, dans un cas très précis, à connaître l'identité de la personne. Il doit la connaître pour une raison précise et ce pourrait être un cas sur 10 000. Il ne s'agirait pas d'une divulgation habituelle.
    Donc, si je comprends bien, on peut communiquer au ministre et/ou à ses collaborateurs la teneur de la demande au lieu de l'identité de l'auteur de la demande. Vous n'y voyez pas d'objection?
    La teneur même? Bien sûr que non, puisque cela sera rendu public.
    Monsieur Rubin.
    J'ai encore de la difficulté à accepter le système parallèle que vous décrivez. Si le ministre — et vous avez été ministre vous aussi — connaît bien ses dossiers, il devrait pouvoir se défendre à la Chambre et on peut préparer des fiches pour la période de questions. Transposez tout cela dans un tout nouveau système d'accès à l'information me semble être un énorme gaspillage des deniers publics. C'est un système de gestion du risque, ce n'est pas un système de bon gouvernement où l'on doit répondre aux questions posées à la Chambre des communes.
    Vous ne voulez certainement pas que le ministre connaisse l'identité de l'auteur de la demande, n'est-ce pas?
    Oui.
    Dans les circonstances mentionnées par le colonel Drapeau, vous ne seriez pas d'accord avec lui à ce sujet — que dans un cas sur 10 000, l'identité de l'auteur de la demande devrait être divulguée?
    Je ne le crois pas. Je continue de considérer qu'il y a beaucoup d'autres genre de demandes que le gouvernement peut recevoir, autrement que par la voie de l'accès à l'information. Que va faire le gouvernement? Est-ce qu'il va préparer des fiches pour la période de questions chaque fois qu'un Canadien veut savoir quelque chose? C'est ridicule.
    Je tiens à m'assurer de bien comprendre. Le personnel d'un ministre peut-il être mis au courant de la teneur de la demande?
    Non.
    Comment une question peut-elle relever de la sécurité nationale? La réponse...
    Il ne fait aucun doute qu'en tant que ministre on veut souvent savoir ce qu'on va nous sortir le lendemain à la période de question ou la prochaine fois lors d'un point de presse. Si votre ministère répond à une demande d'accès à l'information, le public sera au courant avant vous, et vous serez pris au dépourvu. Vous pourrez uniquement répondre que vous ignorez tout de la question et que vous devrez vous renseigner. Si c'est ce que vous voulez dire, j'aimerais m'en assurer.
(1655)
    Si nous voulons confier à un ministre des secrets, la gestion d'un portefeuille et le rôle de conseiller privé, il peut donc arriver à l'occasion qu'il doive connaître l'identité de l'auteur d'une demande en particulier — pas en prévision d'un point de presse, ni de la période des questions, ni de sa rencontre avec la presse, mais pour des raisons d'État. Donc, la porte est entrouverte, et je parle du ministre parce que c'est lui qui détient tout d'abord le pouvoir — la totalité du pouvoir.
    Je comprends. Je vous remercie, colonel.
    Monsieur Rubin.
    Votre temps est écoulé.
    Monsieur Stanton.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Dans la même veine, nous avons entendu des témoignages la semaine qui a précédé la pause au sujet de cette question même. Les témoins qui ont comparu ont indiqué assez clairement, à mon avis, qu'il est tout à fait conforme aux dispositions de la Loi sur la protection de la vie privée que les ministres et les fonctionnaires du ministère connaissent le nom de l'auteur de la demande — cela est prévu par le paragraphe 8(2). Il s'agit de la disposition habilitante à cet égard. Il existe une dizaine de catégories pour lesquelles cela est autorisé. Cela revient au point que j'avais soulevé plus tôt en ce qui concerne l'argument présenté par M. Martin, à savoir que même si une chose est autorisée, cela ne signifie pas qu'elle se produira forcément.
    La même question m'est venue à l'esprit lorsque certains d'entre vous, dans le cadre de votre témoignage, ont parlé des différents cas où l'on tombait sur de l'information qui semblait indiquer que vous aviez appris d'une façon quelconque que quelqu'un dans un ministère connaissait le nom de l'auteur de la demande. Ce fait même ne signifie pas nécessairement qu'il y ait eu irrégularité. Il était fort possible que la communication de cette information ait été faite conformément aux dispositions de la Loi sur la protection de la vie privée. Je m'interroge sur la raison pour laquelle on arriverait à une conclusion différente.
    Dans vos témoignages, vous avez également proposé certaines façons de modifier la Loi sur l'accès à l'information, et c'est parfait. Ce qui nous intéresse aujourd'hui, c'est d'arriver à mieux comprendre comment procèdent les ministères en ce qui concerne le nom des auteurs de demandes. C'est le contexte de notre discussion d'aujourd'hui.
    En ce qui concerne la communication du nom au ministre, combien des cas dont vous avez parlé pourraient être tout à fait légitimes dans le cadre de la Loi sur la protection de la vie privée, telle qu'elle existe aujourd'hui?
    Ces cas existent probablement aujourd'hui. Mais pour revenir en arrière, lorsqu'une personne présente une demande à une institution, et que cette demande renferme des renseignements personnels la concernant — son nom, son adresse, sa date de naissance — ces renseignements sont fournis dans un but précis: pour qu'elle ait accès aux documents faisant l'objet de la demande. Si l'on utilise ces renseignements personnels à des fins autres que celles prévues, c'est-à-dire répondre à la demande, vous pouvez alors procéder d'une ou deux façons. Vous pouvez demander le consentement de l'intéressé en disant: « Est-ce que vous consentez à ce que cette information soit divulguée? », ou vous le faites en invoquant l'intérêt public. La Loi sur la protection de la vie privée prévoit que vous pouvez divulguer des renseignements personnels s'il s'agit d'une question d'intérêt public.
    Si la divulgation a lieu dans un autre contexte que ceux qui viennent d'être mentionnés, il s'agit alors d'une infraction à la Loi sur la protection de la vie privée. Si vous avez l'intention d'utiliser cette information pour mettre au courant votre personnel des communications ou n'importe qui d'autre — les sous-ministres ou le personnel politique — par exemple que John Smith a présenté cette demande pour telle ou telle raison, cette information n'est pas nécessaire pour traiter une demande et communiquer des documents, et il s'agirait alors d'une infraction à la loi.
    Certains des demandeurs se voient également demander leur numéro d'assurance sociale, leurs empreintes digitales, selon la nature des dossiers.
    Quand cela s'est-il produit?
    C'est pratique courante si vous demandez par exemple un dossier criminel ou certains autres dossiers. La personne doit fournir d'autres renseignements permettant de l'identifier.
    Comment détermine-t-on la quantité de renseignements à fournir? Je reviens à ce que j'ai déjà dit, soit que lorsque l'on crée des systèmes parallèles, cela soulève des préoccupations en matière de protection de la vie privée et de surveillance, et en intégrant ces deux aspects, les erreurs de jugement et les pertes de temps sont inévitables. Cela nuit énormément au fonctionnement du système.
    Les témoins qui représentaient le gouvernement ont dit que la solution réside simplement dans la formation. Je suis désolé, mais j'ai comparu devant ce comité et celui du Sénat pour faire adopter la seule modification apportée à la Loi sur l'accès à l'information, qui prévoit des sanctions dans les cas de destruction ou de falsification de documents, après le camouflage des incidents survenus en Somalie et après la destruction par le comité de documents. L'amendement proposait des peines d'emprisonnement et des sanctions pour les personnes qui falsifiaient des documents.
    Voilà une situation qui aurait dû être traitée de façon sérieuse. Vous pouvez avoir toute l'information au monde, mais lorsque vous avez un système de formation interne qui se trouve à des lieux de là, nous vous dirons et vous rappellerons que cela est loin d'être suffisant. Il faut qu'il y ait des incitatifs. Il faut prévoir des sanctions et qu'on se rende pleinement compte qu'il est possible de ruiner des réputations, sinon vous perdez tout simplement votre temps, vous faites du sur-place.
(1700)
    Oui, nous comprenons cela. Tout ce que je dis...
    Monsieur Stanton, cela met fin au deuxième tour.
    Nous avons maintenant M. Peterson, pour l'opposition officielle.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'aimerais revenir à vous, monsieur Rubin. Je comprends votre position. Vous tenez à ce qu'on ne divulgue jamais l'identité de l'auteur au ministre ni à ses collaborateurs en dehors du petit groupe des agents d'information. Que pensez-vous de ne jamais divulguer la teneur de la demande au ministre?
    Le ministre s'occupe d'une énorme gamme de questions et est responsable de divers textes de loi. Il a de nombreux collaborateurs qui doivent le renseigner à propos de ces questions. Si vous connaissez à fond vos dossiers, il n'est pas nécessaire de s'en écarter et demander quel est...
    Êtes-vous en train de dire qu'un ministre ne devrait jamais être au courant du contenu d'une...
    Il le lira dans les journaux, ou différents groupes s'en serviront de différentes façons. Je ne crois pas qu'il soit pertinent qu'il sache...
    Je ne suis pas d'accord avec vous. Si vous avez communiqué la teneur à une personne de l'extérieur, à ce moment-là ne devriez-vous pas au moins mettre le ministre au courant de ce qui a été divulgué? Pourquoi cela serait-il incorrect?
    Une fois que l'information est communiquée, bien entendu — tout le monde devrait être au courant. Il serait incorrect de le faire avant que soit communiquée la demande d'accès à l'information; il y aurait alors un risque d'ingérence.
    Il existe également un autre scénario, à savoir que lorsque des tiers cherchent à obtenir votre identité — peut-être que des sociétés tiennent à la connaître,-- cela pose également certains problèmes. Par contre, il arrive qu'il y ait plus d'une personne qui cherche à connaître votre identité parfois — et qui présente des demandes d'accès en ce sens.
    Je suis désolé, je ne vous suis pas. Pouvez-vous expliquer ce que vous voulez dire?
    Il arrive parfois que des gens présentent des demandes strictement pour savoir qui a présenté des demandes, y compris les miennes. Cela vous indique à quel point le système peut devenir ridicule.
    Oh. Je vous remercie.
    C'est au tour de M. Kenney.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'ai présenté la motion qui a donné lieu à ces audiences, donc j'aimerais relire au comité et aux témoins la motion en question, parce que nous sommes en train de nous écarter nettement de son objet. Il s'agit d'une motion très simple, restreinte et discrète: « Que le Comité examine les allégations selon lesquelles les noms d'auteurs de demandes d'accès à l'information auraient été divulguées à du personnel politique à l'emploi du gouvernement actuel ou des gouvernements antérieurs, et qu'il fasse rapport sur le sujet. »
    Il ne s'agit pas d'une discussion générale et ouverte sur la politique d'accès à l'information. Nous avons déjà tenu cette discussion au comité; nous pourrons la tenir à l'avenir. Je comprends qu'il s'agit d'une question qui fait l'objet d'un débat perpétuel. Mais nous ne sommes pas ici pour discuter des digressions et de toutes les autres pratiques qui semblent être parfaitement légales, selon les bureaux des commissaires à l'information et à la protection de la vie privée, qui ont comparu devant nous. Nous sommes ici pour discuter des allégations selon lesquelles les noms d'auteurs de demandes d'accès à l'information auraient été divulgués au personnel politique.
    J'ai une question simple, et je pense que c'est la seule question pertinente à poser en fait aux témoins, et je ne suis pas sûr de la raison pour laquelle nous entendons des témoins qui ne semblent pas s'en tenir directement à la teneur de la motion; j'aimerais qu'on s'applique à le faire. En fait, ces audiences ont lieu parce que l'opposition a prétendu que le gouvernement avait délibérément enfreint la Loi sur la protection de la vie privée dans au moins un cas. J'aimerais savoir si cela est vrai.
    J'ai donc une simple question à poser aux témoins. Avez-vous des preuves concrètes, précises et tangibles que vous pouvez fournir au comité quant aux noms des auteurs de demandes d'accès à l'information qui ont été communiqués à du personnel politique?
(1705)
    Monsieur Kenney, ne nous punissez pas si nous n'avons pas de noms précis à vous fournir.
    Je ne vous punis pas. Je vous pose une question.
    Votre motion a ouvert une boîte de Pandore, parce que ce qui est parfaitement légal, comme certains témoins l'ont dit, ce qui constitue des lignes directrices tout à fait bonnes ne sont peut-être pas appropriées, et c'est là-dessus qu'ont porté nos témoignages.
    Mais vous avez eu l'occasion de présenter votre témoignage pendant à peu près deux heures. Je pose une question précise. Vous pouvez répondre par oui ou par non: Avez-vous de l'information sur cette pratique?
    Dans mon témoignage, j'en ai déjà proposés certains exemples, effectivement.
    Vous avez donc des preuves concrètes que vous pouvez nous fournir.
    Si quelqu'un veut des renseignements supplémentaires à l'information que j'ai déjà donnée, je la leur fournirai, mais il est très difficile d'obtenir les documents.
    Vous n'avez donc pas de preuves documentaires.
    J'en ai certaines.
    Pourriez-vous nous la fournir, je vous prie?
    Si c'est ce que veut le comité...
    Je suis une personne qui veut obtenir des résultats.
    J'ai demandé au début de la réunion si je pouvais déposer certains des documents en ma possession.
    Je vous y invite.
    Est-ce qu'il ne faut pas...?
    Ai-je des preuves documentaires d'un récent...[Note de la rédaction — Inaudible]? La réponse est non. Ai-je la conviction que ce genre de chose a eu lieu, qu'elle a lieu en ce moment même? Oui.
    Vous croyez que les noms d'auteurs de demandes d'accès à l'information sont communiqués au personnel politique.
    Oui, les noms sont communiqués au personnel politique, au personnel administratif.
    Vous croyez que ce genre de chose se produit, colonel Drapeau, même si vous n'en avez pas la preuve.
    La preuve dont je dispose est empirique. Elle remonte à plusieurs années. Dans certains cas, je ne serais pas en mesure de vous la communiquer. Cette conviction de ma part provient de l'expérience que j'ai vécue au quotidien.
    Ma question ne portait pas sur votre conviction. Vous venez de dire que vous aviez des preuves empiriques. En quoi consistent-elles?
    Des preuves empiriques d'observations faites par des tiers.
    Des rumeurs.
    Non, ces observations m'ont été adressées, et je savais qu'une demande avait été faite par moi-même ou par une personne en mon nom à un ministère en particulier. Cela s'est produit plus d'une fois.
    Donc vous êtes en train de parler d'observations faites par des tiers, mais vous n'avez aucune preuve, rien que vous puissiez nous fournir pour confirmer le fait que cette pratique a eu lieu.
    Cela dépend de ce que vous entendez par preuve. Est-ce que je connais quelqu'un qui a appris que j'avais présenté une demande ou que quelqu'un qui me représentait avait présenté une demande sur ce sujet particulier, oui.
    Est-ce que vous pourriez nous fournir leurs noms, de l'information concernant leurs contacts? Pourriez-vous fournir les lettres provenant de ces personnes?
    J'aimerais beaucoup le faire, mais la réponse est non.
    Monsieur Gollob, avez-vous des preuves?
    Monsieur Kenney, dans mes remarques, j'ai mentionné une déclaration que vous avez faite à la Chambre en 2004. Elle concernait l'existence d'un groupe central de communications divulgué par une personne du nom de Jonathan Murphy. Vous vous en rappellerez peut-être. Le rôle de ce groupe, comme l'a allégué M. Murphy dans un article publié dans le Globe and Mail , était de discuter des demandes d'accès à l'information et de faire ce qu'il pouvait pour les retarder et les empêcher d'aboutir.
    Si un tel groupe existait effectivement — et je n'ai aucun doute qu'il existait, même si je n'ai d'autres preuves que ce qui a été publié, il est difficile d'imaginer qu'il n'aurait pas discuté de l'identité de chaque auteur des demandes et du fait qu'ils faisaient partie des médias. Je trouve cela difficile à croire.
    La question que je pose aux membres du comité et au gouvernement, c'est de préciser si un tel groupe existe toujours. Fait-il partie du mécanisme de suivi dont nous avons parlé? Ce mécanisme de suivi ou de surveillance existe effectivement et les demandes émanant des journalistes, par comparaison aux autres types de demandes, font effectivement l'objet de discrimination. Dans le cadre de ce type de gestion de demandes provenant des journalistes, il est probable qu'on parlera de leur identité même si je ne dispose pas de la preuve documentaire que vous demandez. Je tiens simplement à tirer l'affaire au clair.
(1710)
    Voici le problème auquel est confronté le président. D'une part, les trois témoins disent qu'on n'a pas droit à cette information; d'autre part, s'il y a un problème, le comité a besoin d'exemples précis. Nous vous demandons donc de contredire précisément ce que vous nous demandez de ne pas faire. Cela nous place dans l'embarras. Essentiellement, vous nous demandez de vous faire confiance, de croire qu'il y a bien des exemples, mais dont « vous ne pouvez pas nous parler ».
    Monsieur Laforest.

[Français]

    Je respecte l'opinion de M. Kenney, à savoir qu'on cherche à déterminer s'il existe des situations permettant de déterminer si des noms ont été transmis au ministre, mais je me rallie aussi à l'affirmation de M. Gollob voulant que le mandat du comité, bien que ce ne soit pas celui qu'on s'est donné dans le cas présent, est aussi de s'assurer que les lois sont respectées. Je veux bien croire qu'on ne soit pas nécessairement en mesure de trouver un ou des coupables, mais il faut à tout le moins éviter que d'autres situations de ce genre se produisent. Dans ce sens, je pense que le débat est important.
    La Loi sur l'accès à l'information est en vigueur depuis plus d'une vingtaine d'années. Je pense qu'au cours de cette période, on s'est rendu compte qu'elle donnait lieu à des effets collatéraux non désirables pour les gouvernements. À mon avis, le système de contrôle voulant qu'à des fins statistiques on classe les demandeurs d'information par catégorie a généré d'autres formes d'information. Je pense que c'est devenu un obstacle au droit du public à une saine information.
    Toutes les raisons sont bonnes pour expliquer la situation. Cette loi prévoit très peu de sanctions à l'endroit du personnel, bref elle n'a pas de mordant. Certaines personnes sont prises entre l'obligation de respecter la confidentialité des demandeurs en vertu de la loi et le désir d'obtenir des promotions. En ce sens, je suis convaincu que ce système, qui fait en sorte que de nombreux fonctionnaires se retrouvent assis entre deux chaises, est drôlement difficile.
    La question que je vous pose à tous les trois est la suivante. Selon vous, s'il y avait une refonte de la Loi sur l'accès à l'information, est-ce qu'on ne devrait pas y inclure des dispositions spécifiques, beaucoup plus claires que ce qui existe présentement, afin d'empêcher la divulgation des noms des demandeurs? En plus, est-ce qu'on ne devrait pas prévoir des sanctions visant à neutraliser l'effet d'attirance que peut avoir sur les fonctionnaires l'idée d'obtenir une promotion, effet qui les incite parfois à ne pas faire grand cas de la loi?
    La réponse est oui. Je pense que dans le cadre d'une éventuelle refonte de la loi, il serait nécessaire de préciser clairement que l'information demandée par les Canadiens qui exercent leur droit quasi constitutionnel appartient à ces demandeurs. On doit faire un virage à 190 degrés à cet égard, de façon à ce que le fonctionnaire, lorsqu'il reçoit une requête d'un citoyen, ait l'obligation de donner à celui-ci l'information qu'il demande.
    La loi, dans sa forme actuelle, est un bijou à plusieurs égards. Le paragraphe 2(2) dit que la Loi sur l'accès à l'information n'est qu'un complément. Nos pères et nos grands-pères n'avaient pas accès à une telle loi, mais ils arrivaient à obtenir de l'information en faisant tout simplement une demande. Aujourd'hui, lorsque vous demandez un renseignement, si banal soit-il, un fonctionnaire vous oriente vers la loi, avec ce que cela comprend de délais et ainsi de suite. À mon avis, c'est là que se trouve le coeur du problème.
    Monsieur Gollob.
    Je crois que la loi devrait comporter des mesures explicites visant à protéger l'identité du demandeur. De plus, on devrait imposer des sanctions explicites, comme on le fait lorsque des gens font de l'obstruction ou cherchent à cacher de l'information.
    Monsieur Rubin.

[Traduction]

    Oui, la situation est telle que nous agissons à l'intérieur d'un cadre très limité — et il faut que cela change. Alors quand vous regardez le système, il faut que vous disiez, où se situe les coordonnateurs de l'accès à l'information dans ce nouveau système en vertu de ces nouvelles lignes directrices; où le commissaire à l'information se situera-t-il avec ses pouvoirs de contrainte; comment allons-nous appliquer ces sanctions et déterminer ces infractions? Pour faire tout cela, il vous faut un arrangement tout à fait différent parce que, comme l'ont signalé des témoins précédents, il est parfaitement admissible en droit pour le ministre, sous réserve de certaines règles, de connaître l'identité et de trouver les utilisateurs; le feu jaune est parfaitement légal.
    Pour résoudre la situation — parce qu'il y a plus que l'identité, c'est la poursuite et la surveillance ensemble qui devient mortel pour ceux qui essaient d'exercer leur droit à l'information — il faut que vous leur donniez de meilleurs droits à l'information et donniez aux autorités le mandat d'avoir un ensemble différent de lignes directrices sur la prodivulgation et donner au commissaire à l'information le mandat de s'en servir comme motif d'appel, ce qu'il peut examiné au moyen de ses pouvoirs de contrainte, et d'imposer des sanctions au besoin.
(1715)
    Les députés ministériels.
    J'invoque le Règlement.
    Un rappel au Règlement. Il y a longtemps qu'on en a eu un. Allez-y.
    Je veux seulement obtenir le consentement de déposer un document. Puis-je le faire, s'il n'y a plus d'autres questions?
    L'opposition officielle? Non?
    Allez-y.

[Français]

     Monsieur le président, dès que j'apprends que des documents sont pertinents au mandat du comité dans le cadre de cette étude, je tiens à transmettre ces renseignements à tous les membres du comité. J'aimerais porter à votre connaissance un courriel daté du 21 septembre provenant de Chris Froggatt, chef de cabinet au Secrétariat du Conseil du Trésor. Il s'agit tout simplement d'un rappel destiné aux ministres du gouvernement et à leurs chefs de cabinet. Je vais en citer une partie:
En vue des questions récentes au sujet de la divulgation du nom d'un requérant qui a soumis une demande en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, il est important de rappeler aux ministres et à leur personnel exonéré les règles et règlements en ce qui concerne les lois sur l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels.

[Traduction]

    Il est dans les deux langues.
    Quelqu'un d'autre a-t-il quelque chose à dire?
    Comme il n'y a personne, j'aimerais maintenant vous remercier tous les trois. Tous vous avez déjà comparu devant le comité. Nous apprécions la sagesse de vos propos et nous vous remercions d'être venus. Merci, messieurs.
    Je m'adresse aux membres du comité. À un moment donné, il faudra discuter de ce que nous voulons faire. Je propose de réserver du temps mercredi à 17 heures pour discuter de la suite de nos travaux.
    La séance est levée.