:
Bonjour. Je déclare cette 47
e réunion du comité ouverte.
Mesdames et messieurs, je tiens à vous informer que le comité de direction a tenu une réunion hier en fin d’après-midi afin de discuter d’un plan de travail relatif à la motion qui a été adoptée jeudi. Je tiens également à ce que vous sachiez que la première question à aborder jeudi matin sera le rapport du comité de direction, qui vous sera présenté aux fins de délibérations et d’approbation.
Nous essaierons de rassembler des témoins, et avec un peu de chance, ceux-ci pourront témoigner si le rapport du comité de direction est accepté. Bien entendu, dans le cas contraire, je les renverrai. Mais je ne veux tout simplement pas perdre une journée si nous pouvons l’éviter.
Alors voilà comment nous procéderons.
Aujourd’hui, nous continuerons notre étude sur le vol d’identité, avec l’aide de témoins que nous avons déjà entendus sur d’autres questions.
Bienvenue.
Voici M. John Lawford, conseiller juridique de l’Initiative canadienne des consommateurs. Et voici la directrice exécutive de la Clinique d’intérêt public et de politique d’Internet du Canada, Philippa Lawson, accompagnée de M. Mark Hecht.
Je présume qu’il y aura deux déclarations préliminaires, n’est-ce pas? Oui, très bien.
Nous commencerons donc par Mme Lawson puis nous continuerons avec M. Lawford pour finir par la période de questions.
:
Merci, monsieur le président.
Bonjour mesdames et messieurs.
Je vais parler en anglais ce matin.
Je vous remercie de me donner la chance de parler aujourd’hui d’un problème très grave qui touche directement un nombre croissant de Canadiens et qui par le fait même, nous concerne tous.
Mon nom est Philippa Lawson. Je suis directrice de la CIPPIC, la Clinique d’intérêt public et de politique d’Internet du Canada de l’Université d’Ottawa. En décembre dernier, j’ai eu le plaisir de témoigner devant vous sur la LPRPDE, ou Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques.
Je suis aujourd’hui accompagnée de Mark Hecht, professeur en droit et principal chercheur de ce projet sur le vol d’identité de la CIPPIC.
Nous avons remis un mémoire au greffier qui, je crois, sera traduit avant de vous être présenté.
La CIPPIC participe à un projet de recherche pluri-institutionnel sur le vol d’identité financé par l’ORNEC, ou Ontario Research Network for Electronic Commerce, un partenariat public-privé regroupant quatre grandes banques canadiennes et quatre universités ontariennes. Un certain nombre de chercheurs de ces universités étudient les diverses questions entourant la définition et l’évaluation du vol d’identité, les méthodes de gestion et les solutions techniques à ce problème.
À la CIPPIC et à l’Université d’Ottawa, nous examinons les solutions juridiques et politiques au vol d’identité, et nous avons entrepris une vaste analyse comparative des mesures appliquées dans les autres provinces et territoires et là où la loi canadienne est en vigueur.
Nous avons publié une série de documents de travail portant sur divers aspects du vol d’identité, la plupart pouvant être consultés sur notre site Web — www.cippic.ca —, et nous en publierons quelques autres sous peu.
Comme vous le savez, nous avons aussi publié un livre blanc sur la notification des atteintes à la sécurité, et nous avons été très heureux de voir que nos recommandations à ce sujet ont été mentionnées dans votre dernier rapport sur la LPRPDE.
Nous avons également créé une page Web sur le vol d’identité comprenant une foire aux questions et diverses ressources pour le public.
Nous avons l’intention, après avoir effectué des recherches et des analyses plus fouillées au cours de l’été et de l’automne, de publier un livre blanc comportant de nombreuses recommandations sur la réforme des lois et des politiques. Et nous avons l’intention de le terminer d’ici la fin de l’année.
Vous nous avez devancés par ces audiences, et c’est pourquoi nous vous présentons certaines recommandations dès maintenant. Toutefois, nous en formulerons de plus détaillées plus tard, notamment dans le domaine du droit pénal, que, d’après ce que je comprends, vous n’abordez pas dans ces audiences.
Je sais que je dispose d’environ dix minutes. Ai-je moins de temps que cela? D’accord, très bien.
:
Le terme « vol d’identité » est quelque peu trompeur, dans la mesure où l’activité dont nous parlons ne couvre pas seulement la collecte non autorisée ou le vol de renseignements mais bien l’utilisation frauduleuse qu’on en fait. Vous vous rendrez compte que de nombreux experts parlent de fraude d’identité lorsqu’ils font référence à l’utilisation non autorisée de ces renseignements. Ce crime comporte en fait deux volets. Il porte à la fois sur la collecte non autorisée de renseignements et sur leur utilisation frauduleuse. Nous utilisons le terme « vol d’identité » de façon générale comme on s’en sert habituellement pour faire référence à ces deux volets.
Les voleurs d’identité ont recours à de nombreuses techniques pour recueillir des renseignements personnels. Il existe des méthodes relativement simples comme fouiller les poubelles, intercepter les courriels, soudoyer des employés et se faire passer pour une personne autorisée à obtenir les informations. Il existe également des techniques autrement plus complexes comme l’écrémage, l’hameçonnage, le détournement de domaine, l’enregistrement des touches du clavier et le piratage des grandes banques de données.
Une seule personne peut faire l’objet de nombreuses fraudes avant de s’en apercevoir. En effet, il arrive souvent que les victimes de vol d’identité l’ignorent jusqu’à ce qu’elles fassent une demande de crédit et se la voient refuser ou commencent à recevoir des appels d’une agence de recouvrement des créances. Entre-temps, leur cote de solvabilité s’en trouve ruinée et elles risquent d’avoir beaucoup de difficulté à la rétablir. Les victimes font face à une myriade de difficultés pour restaurer leur réputation et recouvrer les pertes encourues, souvent sans qu’elles aient fait preuve de négligence.
Je sais que vous vous préoccupez des tendances. Une tendance qui vaut la peine d’être mentionnée est l’utilisation que font les voleurs d’identité d’Internet afin de recueillir et d’échanger les renseignements volés. Il est très facile de trouver des sites Web qui vendent des données de cartes de crédit. Des lecteurs de disque dur contenant des informations personnelles sont vendus sur eBay, par exemple. Internet, comme je suis sûre que vous le savez, est également utilisé pour duper des consommateurs sans méfiance en les amenant à transmettre les renseignements relatifs à leur compte grâce à des techniques comme l’hameçonnage et le détournement de domaine. Je peux vous les expliquer plus tard si vous le désirez.
Malheureusement, il existe peu de données fiables sur le vol d’identité au Canada. PhoneBusters publie des données fondées sur les plaintes qu’il reçoit, mais celles-ci ne représentent qu’une fraction du problème. Certains sondages d’opinion publique fournissent un aperçu du problème, mais encore une fois, ils ne sont pas complets. Nous n’avons que peu d’autres sources sur lesquelles nous appuyer.
Notre première recommandation est de créer une stratégie nationale visant à recueillir des données fiables et autant que possible complètes sur la fréquence et les formes du vol d’identité au Canada ainsi que sur les frais qu’il occasionne.
En ce qui concerne la prévention du vol d’identité, nos recherches laissent voir que les voleurs d’identité profitent autant, si ce n’est plus, de la collecte, de la conservation et de l’échange superflus de renseignements personnels par les organismes que des lacunes dans l’application des lois pénales ou de la crédulité et de l’insouciance des consommateurs. Dans de nombreux cas, les consommateurs n’auraient absolument rien pu faire pour se protéger, si ce n’est d’éviter de faire affaire avec l’organisme qui a laissé échapper les renseignements en premier lieu.
Donc, si nous voulons aborder ce problème avec efficacité, il nous faudra agir dans quatre domaines cruciaux : l’application des lois sur la protection des données, la poursuite en justice des voleurs d’identité, les droits des consommateurs et les recours à leur portée, et la sensibilisation du public.
Nous disposons d’une loi sur la protection des données relativement efficace avec la LPRPDE. Cette loi interdit aux organismes de recueillir plus de renseignements qu’ils n’en ont besoin, de les conserver plus longtemps que nécessaire et de les utiliser ou de les divulguer à des fins autres que celles autorisées par la personne visée. Elle exige aussi que les organismes mettent en place des mesures de sécurité raisonnables afin de se protéger contre les accès non autorisés et les vols d’identité.
Le principal problème avec la LPRPDE n’est pas une quelconque lacune substantielle, comme nombre d’entre vous l’avez mentionné dans votre dernier rapport sur la LPRPDE, mais plutôt le fait que la LPRPDE n’a pas de mécanisme d’application efficace afin d’encourager les organismes à s’y conformer. Par conséquent, de nombreuses organisations recueillent beaucoup plus de données personnelles qu’elles n’en ont besoin et les conservent plus longtemps qu’elles ne le devraient, exposant ainsi les gens à un plus grand risque de vol d’identité. Je pourrais vous en donner plusieurs exemples.
Les organismes n’arrivent également pas à protéger les renseignements personnels qu’ils conservent au moyen d’un cryptage efficace, d’une sélection judicieuse de leurs employés et d’autres mesures. L’étude que nous avons effectuée l’an dernier auprès de 64 marchands en ligne et que nous vous avons présentée en décembre dernier confirme qu’il arrive couramment que même les exigences les plus simples de la Loi ne soient pas respectées.
L’obligation de notification des atteintes à la protection des données offre une certaine promesse de création de mesures incitatives, mais uniquement si cette notification est rendue publique et uniquement si les atteintes ne sont pas si fréquentes et répandues qu’elles amoindrissent l’atteinte portée à la réputation. Même alors, les règles de notification des atteintes doivent être complétées par un régime d’application qui suscite un risque réel de sanction pécuniaire en cas de collecte excessive de données personnelles ou d’autres infractions à la LPRPDE qui contribuent au problème du vol d’identité.
Dans notre présentation au comité en décembre dernier, nous avons formulé un certain nombre de recommandations visant à renforcer le régime d’application de la LPRPDE, notamment autoriser les recours collectifs contre les organismes qui enfreignent la LPRPDE, éliminer les obstacles financiers qui empêchent les victimes d’intenter des poursuites contre des organisations qui contreviennent à la LPRPDE et verser des dommages-intérêts punitifs en guise de recours possible en cas d’infraction à la LPRPDE.
Nous avons été déçus de voir qu’aucune de ces recommandations n’a été adoptée ou même mentionnée par le comité dans son rapport. À notre avis, il est indispensable de s’attaquer au problème des mesures incitatives — la plus importante lacune de la LPRPDE et un facteur décisif du problème croissant du vol d’identité — si nous voulons faire des progrès dans ce domaine.
En ce qui concerne la sensibilisation du public, il existe d’excellents sites Web et dépliants qui expliquent les tendances en matière de vol d’identité et offrent des trucs pour s’en protéger, mais le problème demeure. Les gens continuent d’être victimes de ces stratagèmes d’ingénierie sociale, tels que l’hameçonnage et le détournement de domaine. Des jeunes publient des renseignements détaillés sur eux-mêmes sur Internet, sans comprendre les risques qu’ils courent.
Nous recommandons que l’Agence de la consommation en matière financière du Canada soit mandatée pour entreprendre une campagne nationale de sensibilisation du public sur le vol d’identité, en consultation avec les institutions financières, les organismes d’application de la loi et les organismes de protection des consommateurs. Cette campagne devrait porter principalement sur les manœuvres les plus couramment utilisées par les voleurs d’identité pour obtenir des renseignements directement auprès des personnes, faire appel aux médias de masse et présenter des notices dans les communications du gouvernement, des affiches et des dépliants dans les comptoirs publics.
Sur la question de la protection des consommateurs, il convient d’abord de mentionner que les victimes de vol d’identité n’ont habituellement aucun moyen de savoir qu’un vol s’est produit avant d’en avoir subi les conséquences. Nous croyons que la notification des atteintes à la protection des données s’avérera très utile à cet égard.
Deuxièmement, même les victimes les mieux informées et les plus motivées font face à des obstacles extrêmement contrariants lorsqu’elles tentent de mettre fin aux préjudices et de se refaire une réputation. Si ces obstacles étaient supprimés, les victimes seraient capables de limiter les préjudices et de prendre des actions préventives plus rapidement. Dans certains cas, elles pourraient aussi aider la police à identifier et à poursuivre les criminels.
Notre mémoire mentionne un certain nombre de mesures de protection des consommateurs précises que nous croyons utiles pour amener ces derniers à se protéger.
Nous recommandons avant tout que tous les intervenants du Canada, organismes d’application de la loi, organismes de protection des consommateurs, institutions financières et groupes de défense des consommateurs, travaillent ensemble afin de corriger le problème. Il nous faut élaborer une stratégie nationale afin de combattre le vol d’identité, et j’ai sept recommandations à ce sujet.
D’abord, comme je l’ai déjà mentionné, modifier la LPRPDE afin de créer des mesures incitatives efficaces en matière de conformité.
Deuxièmement, nommer un organisme à l’échelle fédérale qui sera chargé de collecter et de divulguer des données sur le vol d’identité et de coordonner les efforts visant à combattre le vol d’identité dans l’ensemble du Canada.
Troisièmement, comme je l’ai déjà mentionné, mandater l’Agence de la consommation en matière financière du Canada d’entreprendre une campagne nationale de sensibilisation.
Quatrièmement, créer un bureau national d’aide aux victimes de vol d’identité, encore une fois avec le mandat de recueillir des données, d’analyser le problème et de formuler des recommandations en matière de réforme des lois et des politiques.
Cinquièmement, exiger des établissements de crédit qu’ils rapportent les cas de vol d’identité.
Sixièmement, accorder aux consommateurs des droits qui renforcent leur capacité à déceler et à prévenir le vol d’identité et à en réduire les effets. Ces droits doivent notamment permettre aux consommateurs d’accéder à la version de leur rapport de solvabilité sur laquelle s’appuient les établissements de crédit, ce qui constitue actuellement un problème parce qu’ils n’y ont pas accès. Il faut aussi donner le droit aux consommateurs à une limitation du crédit en leur permettant d’en faire la demande auprès des agences d’évaluation du crédit, ce qui encore une fois leur est interdit actuellement.
Finalement, nous devons réviser en profondeur les lois régissant les agences d’évaluation du crédit, les établissements de crédit et les services de police afin d’aider à prévenir, détecter et réduire le vol d’identité.
Merci.
Je suis ici aujourd’hui en tant que représentant de l’Initiative canadienne des consommateurs, dans laquelle sont regroupés six organismes qui défendent les droits des consommateurs, dont le Centre pour la défense de l’intérêt public, où je travaille, l’Union des consommateurs, Option consommateurs au Québec, l’Association pour la protection des automobilistes, et l’Alberta Council on Aging. Nous vous présentons aujourd’hui notre position commune à l’égard du vol d’identité, position sur laquelle nous nous sommes entendus au cours de la dernière année.
La chose la plus importante à retenir de notre présentation aujourd’hui est une observation qui rejoint les propos de Philippa, c’est-à-dire que nous croyons qu’il y a un grand rôle qui doit être joué par le gouvernement et le monde des affaires pour attaquer le problème que représente le vol d’identité, ce qui n’a pas été fait. Nous croyons aussi que les consommateurs doivent être informés. Mais les premières mesures que vous devriez prendre en tant que législateurs devraient permettre d’amener le gouvernement et les entreprises à s’unir pour mieux protéger les renseignements personnels, ce qui réduirait le nombre de vols d’identité.
Si vous le permettez, je vais vous faire part de quelques statistiques de PhoneBusters que votre recherchiste vous a probablement déjà fournies. L’année dernière, 16 millions de dollars en pertes ont été déclarés à PhoneBusters, pour un total de 7 000 à 8 000 plaintes formulées. Ce total représente environ le double de l’argent perdu, mais la moitié des victimes par rapport à l’année précédente. Je ne sais pas si cette tendance va se maintenir, mais c’est inquiétant puisque cela signifie peut-être que le vol d’identité est plus profitable qu’avant et qu’il y a davantage de façons de faire de l’argent par fraude liée au vol d’identité.
Nous voulons également vous rappeler que cette situation n’est pas inévitable. Il existe un vide à l’échelon fédéral. Les consommateurs ne savent pas à qui s’adresser. Lorsqu’il y a des appels concernant le vol d’identité, je dois vraiment réfléchir et me demander où devrais-je d’abord diriger ces personnes? Vers les services de police, pour remplir un rapport de police? Vers une agence d’évaluation du crédit, pour obtenir un rapport de solvabilité? Vers l’équipe de PhoneBusters, pour déclarer le vol d’identité? Vers leur institution financière? En fait, toutes ces démarches doivent être entreprises, mais il n’existe pas encore de service à guichet unique au gouvernement fédéral, et c’est ce qui devrait être fait.
La situation est différente aux États-Unis, puisque la Commission fédérale du commerce est responsable des dossiers relatifs à la protection des consommateurs. Cet organisme a mis en place certaines mesures visant la création d’un site Web pour répondre aux préoccupations des consommateurs et des entreprises en matière de vol d’identité.
Prenons, par exemple, le guide des affaires de la Commission fédérale du commerce. Aux États-Unis, il y a maintenant un règlement concernant la protection de l’identité. Si vous êtes en possession de renseignements personnels de nature financière, vous devez respecter ce règlement. Le règlement est plutôt simple, et, en fait, il est similaire à la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques. Vous devez savoir quels renseignements sont contenus dans vos dossiers, vous ne devez conserver que le minimum d’information nécessaire, vous devez protéger ces renseignements par l’entremise de mesures de sécurité adéquates, vous devez éliminer les renseignements dont vous n’avez pas besoin et vous devez avoir un plan en cas d’atteinte à la protection des données.
Nous avons aussi un règlement comme celui-là ici, et ce, dans la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques. Mais la Loi n’est tout simplement pas appliquée. Ce qui nous préoccupe, dans le cadre de l’Initiative canadienne des consommateurs, c’est que le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada n’a pas mis ce règlement en avant, en grande partie parce que, conformément à la loi, seules des plaintes individuelles peuvent être reçues. Le Commissaire à la protection de la vie privée peut procéder à une vérification pour les entreprises pour lesquelles on a noté un grand nombre de fuites pouvant mener au vol d’identité, mais il ne l’a pas fait de façon marquée.
Dans ce cas, il nous est difficile de formuler des recommandations au-delà de celles avancées par Philippa, si ce n’est que d’accorder au Commissaire à la protection de la vie privée un plus grand pouvoir d’action et le pouvoir de donner des directives, mais ça ne fait pas partie des suggestions présentées par le comité.
Un point que nous voulions obtenir, et qui était suggéré dans le rapport sur la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, était un règlement sur la déclaration des intrusions dans les données. Selon nous, un tel règlement permettrait de réduire de beaucoup le nombre de vols d’identité, puisque compte tenu du temps requis pour procéder au vol d’identité, bon nombre des pertes surviennent au cours des deux, trois ou quatre premiers jours. Si un processus pouvait être mis en œuvre par l’entreprise pendant cette période-là, les gens pourraient prendre les mesures nécessaires afin de bloquer leurs comptes en téléphonant à leur institution financière et en avisant l’agence d’évaluation du crédit.
Un autre élément que nous avons suggéré d’inclure à la législation, en plus de ce que je viens de mentionner, est la surutilisation des numéros d’assurance sociale, et ce phénomène perdure. Le numéro d’assurance sociale constitue un élément clé dans l’obtention de nouveau crédit, et certains des cas de vol d’identité se font par l’ouverture de nouveaux comptes au nom de la victime, processus qui requiert habituellement un numéro d’assurance sociale. Le problème ici, c’est que les entreprises utilisent le numéro d’assurance sociale comme identificateur unique de la personne, et, dans la position commune, nous demandons qu’il soit indiqué dans la législation que les entreprises cessent d’utiliser les numéros d’assurance sociale à des fins d’identification et que l’utilisation des numéros d’assurance sociale soit limitée à celle d’origine, c’est-à-dire pour les démarches liées à l’emploi.
Nous reconnaissons la difficulté liée à l’établissement d’un identificateur unique qui pourrait être utilisé pour l’octroi de crédit. Cependant, en raison de l’utilisation fort répandue du numéro d’assurance sociale et ce, à tant de fins différentes, le numéro d’assurance sociale constitue une invitation à la fraude. En fin de compte, notre position est que nous aimerions que le gouvernement examine en profondeur l’utilisation que font les entreprises des numéros d’assurance sociale, et qu’il en réduise l’utilisation au minimum.
Une autre suggestion présentée dans notre position commune est que les gouvernements provinciaux examinent la possibilité de mettre en œuvre un mécanisme de limitation du crédit, pour que si vous appreniez que votre identité a été volée, vous puissiez communiquer avec l’agence d’évaluation du crédit pour empêcher l’octroi de nouveau crédit sans la mise en place de mesures exceptionnelles. Ce n’est peut-être pas de votre ressort, mais cela soulève certaines questions sur l’utilisation, par les agences d’évaluation du crédit, des renseignements concernant l’identité.
Pour l’instant, vous n’avez pas à traiter de la question des actes criminels. Le simple fait d’accumuler des boîtes et des boîtes de documents concernant l’identité ne constitue pas un crime actuellement, mais nous appuyons les efforts déployés par le ministère de la Justice pour en faire un acte criminel.
Nous aimerions également aborder une question qui revient à celle de ne pas avoir de guichet unique en place pour les Canadiens en ce qui concerne les vols d’identité. Nous n’avons pas vraiment non plus de données statistiques très détaillées concernant ce phénomène. Nous avons les données consignées dans le cadre de PhoneBusters, mais, encore une fois, les plaintes reçues dans ce contexte proviennent seulement de personnes qui savent que PhoneBusters acceptent les plaintes en matière de vol d’identité, ce qui réduit de beaucoup le nombre de cas signalés. Et beaucoup d’autres personnes ne portent tout simplement pas plainte par l’entremise de PhoneBusters.
Je sais qu’à la GRC, on a tenté de créer une base de données, nommée Signalement en direct des délits économiques, et je ne sais pas ce qu’il en est actuellement, mais il s’agit vraisemblablement d’un bon point de départ pour la centralisation de ces données statistiques. Une idée intéressante qui a été présentée aux États-Unis est de demander aux institutions financières de signaler le vol d’identité de sorte que, lorsqu’elles reçoivent une plainte en matière de vol d’identité — et elles en sont généralement informées par les consommateurs lorsqu’il y a un problème — elles pourraient signaler le cas à la GRC ou à toute autre organisation dans le but de recueillir des données à ce sujet. Nous sommes d’accord avec cette idée, même si elle ne fait pas partie de notre position commune.
Le dernier élément que nous aimerions apporter est que, dans cette situation, nous ne voulons pas que les consommateurs soient encore plus affectés par ce problème, et nous avons constaté deux tendances qui ne disent rien de bon. L’une est que les institutions financières ou autres offrent maintenant des assurances contre le vol d’identité, et nous ne croyons pas qu’il s’agit d’une bonne protection ni d’une bonne solution. Nous, au Centre pour la défense de l’intérêt public, avons produit un rapport concernant ce phénomène. Cette protection ne couvre que le temps réel passé à l’extérieur des heures de travail pour régler le problème. Elle ne couvre pas la fraude liée au vol d’identité comme tel, c’est-à-dire l’argent que vous perdez. Elle offre un certain nombre d’autres protections qui ne sont pas de grande importance, mais, à la base, nous pensons que c’est une façon d’imposer aux consommateurs les coûts et les responsabilités liés au vol d’identité, et ça va à l’encontre de ce que nous visons pour les entreprises, c’est-à-dire une protection plus complète des renseignements personnels.
La deuxième tendance qui nous préoccupe, c’est la volonté de créer une carte d’identité nationale ou d’autres identificateurs biométriques dans le but d’identifier absolument une personne. Puisque le vol d’identité est davantage un crime de nature sociale impliquant des facteurs comme la facilité d’obtention du crédit et la surcollecte de données, nous ne pensons pas que le fait d’avoir un identificateur unique lié à toutes les données améliorera la situation. En fait, ça pourrait même l’empirer.
Alors voilà ce que nous voulions présenter au comité aujourd’hui, et c’est avec plaisir que je répondrai aux questions, en anglais ou en français. Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Merci à vous, mesdames et messieurs les témoins, pour vous être présentés de nouveau.
On dirait bien qu’il s’agit là d’une solution à trois volets.
D’abord et avant tout, nous devons sensibiliser les consommateurs, et je suis d’accord avec votre recommandation. Je crois que ce serait plus prudent ainsi et qu’il faudrait s’y mettre très bientôt, et nous devrions en prendre l’initiative.
Deuxièmement, oui, je crois que les sociétés et les institutions qui manipulent les informations sur le crédit devraient avoir une certaine responsabilité.
Troisièmement, nous ne devons pas négliger un élément qui doit être continuellement considéré en société, à savoir l’élément criminel. Il existe un projet de loi d’initiative parlementaire, le projet de loi . Le connaissez-vous? Savez-vous qu’il porte sur l’hameçonnage et, je crois, sur la sollicitation téléphonique, qui vise à soutirer des informations personnelles. Qu’en pensez-vous? Sommes-nous sur la bonne voie? Sommes-nous trop enthousiastes à ce sujet?
:
Merci, monsieur Martin.
Quelqu’un d’autre? D’accord, je prendrai la relève.
Madame Lawson, vous avez dit qu’à votre avis, l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, je le dis dans mes mots, devrait être mandatée pour lancer une campagne de sensibilisation massive. Cela s’inscrit en quelque sorte dans la même ligne de pensée que celle de M. Stanton.
D’abord et avant tout, peut-être pourriez-vous nous parler un peu de l’Agence de la consommation en matière financière du Canada, ce qu’elle est, qui la dirige, à qui elle rend des comptes. Nous avons entendu le groupe d’Industrie Canada la semaine dernière, le Comité des mesures en matière de consommation, qui semble avoir une bonne relation de travail avec ses équivalents provinciaux et territoriaux, parce que bien entendu il s’agit d’une situation intergouvernementale, un point que nous n’avons vraiment pas abordé avec vous. Si nous les avons déjà, et je crois vous avoir entendu dire qu’ils faisaient du bon travail, pourquoi faudrait-il que l’Agence de la consommation en matière financière du Canada intervienne?
Donc, deux questions. Qu’est-ce que l’Agence de la consommation en matière financière du Canada et pourquoi lui demander d’intervenir si le CMC fait du bon travail?
:
Merci d’avoir soulevé le point. Je suis persuadé que nous n’allons pas épuiser le temps prévu, donc laissez-moi m’en charger. Ce n’est pas un rappel au Règlement, mais une question légitime. J’allais m’en occuper d’ailleurs.
Tout d’abord, c’est le comité qui décide de ce qu’il va faire, non pas le comité de direction. Le comité de direction formule des recommandations. Le comité de direction s’est effectivement réuni, et il a élaboré des recommandations, que nous allons faire circuler.
Le premier point à l’ordre du jour jeudi sera le rapport du comité de direction. Il reviendra au comité de décider s’il veut adopter ce rapport, dans sa forme présentée ou dans une forme modifiée.
Si jamais le comité décide d’adopter ce rapport du comité de direction, tel quel ou avec modifications, nous avons un témoin qui a confirmé sa présence — un seul jusqu’à maintenant — pour jeudi. M. Jeff Esau est un journaliste pigiste dont le reportage a été publié dans le Globe and Mail. Il a présenté deux demandes d’accès à l’information sur la question.
Bien entendu, il sera présent afin que nous ne perdions pas de temps. Si nous passons toute la réunion à discuter du rapport du comité de direction, qu’il en soit ainsi. Ce sera la décision du comité. Mais le témoin sera ici au cas où la décision se prend assez rapidement. Si nous n’avons pas le temps de l’entendre, il sera accessible une fois que le comité aura pris une décision finale.
À l’heure actuelle, la décision du comité est d’aller de l’avant en ce qui concerne le vol d’identité. Mais comme on a insisté sur le caractère pressant de cet examen, j’inscris le rapport du comité de direction au premier point à l’ordre du jour de jeudi matin à 9 heures.
Est-ce que cela répond à votre question?