Avant de commencer, je dois demander la permission du Comité afin que nous puissions entendre certains témoignages avant le vote, même si les cloches sonnent. Y a-t-il unanimité du Comité pour entendre les témoins?
Des députés: D'accord.
La présidente: D'accord, c'est bien. Merci beaucoup. Allons-y.
Il s'agit d'une réunion du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités. Nous sommes à la 42e législature. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous réalisons une étude sur les véhicules automatisés et branchés au Canada.
Aujourd'hui, nous recevons Jeremy McCalla, de Global UAV Technologies Limited, Bern Grush, de Grush Niles Strategic et Mark Aruja, qui est président du conseil de Systèmes télécommandés Canada.
Selon ce que je comprends, monsieur Grush, vous souhaitez nous présenter une courte vidéo à la fin des témoignages. Elle est en anglais seulement, mais vous nous avez donné la transcription, qui a été remise aux interprètes.
Y a-t-il unanimité du Comité pour permettre à M. Grush de présenter une vidéo après les témoignages? Cela vous convient-il?
Des députés: D'accord.
La présidente: Monsieur McCalla, voulez-vous commencer?
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Bonjour à tous. Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui.
Je suis fier d'être ici devant le Comité pour discuter de certains volets de l'industrie des systèmes aériens sans pilote du Canada.
Je m'appelle Jeremy McCalla. J'ai touché à presque tous les volets de l'industrie des systèmes aériens sans pilote au cours des dernières années. J'ai notamment utilisé des véhicules aériens sans pilote et géré ma propre entreprise dans ce domaine.
À l'heure actuelle, je travaille pour Global UAV Technologies, une entreprise canadienne de systèmes aériens sans pilote intégrée verticalement et cotée en bourse. Notre entreprise détient et exploite des sociétés de services qui se spécialisent dans les levés géophysiques aériens et la photogrammétrie sans pilote, un fabricant canadien de véhicules aériens sans pilote et une société d'experts-conseils en réglementation. Nous réalisons toutes nos activités en vertu de l'actuel cadre réglementaire de Transports Canada et nous travaillons très fort en vue de développer un système aérien sans pilote conforme et d'obtenir le statut d'exploitant entièrement conforme pour nos entreprises d'arpentage.
Nous réalisons la majeure partie de notre travail d'arpentage dans les régions éloignées, loin des aérodromes, des villes et même des voies publiques. Souvent, nous utilisons des véhicules aériens sans pilote à basse altitude, parfois à 10 mètres seulement au-dessus des arbres. À l'heure actuelle, ce type de levé géophysique est réalisé principalement par des aéronefs pilotés.
Le recours aux aéronefs pilotés pour réaliser les levés géophysiques est très dangereux, même pour les pilotes les plus expérimentés, étant donné la nature monotone des vols et leur faible altitude. En fait, selon l'Airborne Geophysics Safety Association, les opérations de levé ont causé entre 5 et 15 décès entre 2000 et 2017.
À l'heure actuelle, les opérations en visibilité directe pour les systèmes aériens sans pilote sont permises au Canada en vertu de certificats d'opérations aériennes spécialisées. Bien que le système soit parfois lent et puisse être complexe, il fonctionne et nous permet de réussir sur le plan économique. Toutefois, pour favoriser la croissance de l'industrie des systèmes aériens sans pilote, pour éviter les tâches dangereuses aux pilotes et pour permettre au Canada d'être un chef de file mondial dans le domaine, il faut pouvoir réaliser des opérations courantes hors visibilité directe, surtout dans les régions éloignées.
Les perspectives commerciales nationales et internationales pourraient être largement accrues si l'on fixait des délais beaucoup plus serrés en vue d'approuver les opérations menées hors de la visibilité directe et si l'on réglementait les opérations en visibilité directe, plutôt que d'y aller au cas par cas. De plus, en ayant recours à un système aérien sans pilote pour effectuer les tâches dangereuses comme les levés géophysiques aériens, on pourrait sauver des vies.
La capacité des entreprises canadiennes d'accéder aux capitaux, de planifier l'avenir et d'investir dans la recherche et le développement pourrait également être accrue par une approbation plus rapide des opérations menées hors de la visibilité directe et par la réglementation des opérations en visibilité directe.
À l'heure actuelle, sans une voie claire à suivre, les entreprises et les investisseurs sont inactifs ou cherchent à accroître leurs activités dans d'autres pays où la réglementation semble favorable à l'industrie des systèmes aériens sans pilote.
Nous comprenons que l'aviation est, et sera toujours, hautement réglementée et nous comprenons qu'il faut assurer la sécurité des passagers et de la population. Nous croyons aussi que Transports Canada a réussi à bien gérer l'importante croissance de l'industrie des systèmes aériens sans pilote du Canada avec les ressources dont il disposait.
Comme le budget de 2017 prévoit un financement accru pour Transports Canada et étant donné la présence de groupes spécialisés comme Unmanned Systems Canada et le travail de l'industrie de systèmes aériens sans pilote, le Canada a une occasion inouïe d'être reconnu à l'échelle internationale pour ses approches progressistes à l'égard de la réglementation des systèmes aériens sans pilote, ce qui profitera non seulement au Canada, mais aussi aux entreprises canadiennes, aux institutions de recherches et aux étudiants.
Nous croyons que la validation de principe relative aux opérations hors visibilité directe récemment produite par Transports Canada et que les changements proposés aux opérations en visibilité directe sont un pas dans la bonne direction. On peut toutefois faire mieux.
Nous demandons à ce que les intervenants de l'industrie participent plus activement à l'élaboration des opérations hors visibilité directe courantes et à l'élaboration de règlements sur les opérations en visibilité directe qui conviennent à tous, qui soient sécuritaires et qui permettent une croissance économique.
Nous demandons également une plus grande transparence de la part de Transports Canada en ce qui a trait à l'élaboration des règlements de même que des échéances qui pourront être respectées.
Merci.
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Bonjour. Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner une fois de plus au nom de Systèmes télécommandés Canada, l'association nationale qui représente la communauté des systèmes de véhicules sans pilote et ses 500 membres.
Aujourd'hui, je vais vous faire part des observations qui émanent de plus de 10 ans d'expérience en matière d'élaboration de politiques et de règlements dans le domaine des systèmes aériens sans pilote, qui fait partie intégrante de la discussion sur les véhicules autonomes.
Qu'ils soient dans les airs ou au sol, ces appareils mobiles font partie d'un grand ensemble relié à des systèmes de traitement des données et à des outils d'analyse par l'entremise de réseaux de communication. Cet écosystème intégré nous permet déjà d'améliorer grandement notre productivité et notre sécurité, et ce n'est qu'un début.
Aujourd'hui, je vais faire un lien entre le hockey et l'agriculture.
À titre de décideurs publics, vous devez, tout comme Wayne Gretzky, savoir où ira la rondelle. Je vais commencer par vous dire où elle se trouve aujourd'hui, en utilisant l'agriculture comme exemple, puis je vous dirai où elle a été et je ferai quelques recommandations et demandes.
Deux grandes tendances technologiques entraînent un changement qui transforme notre société: les systèmes humains de détection sont remplacés par des machines et la prise de décisions par les humains est remplacée par l'analyse des données et l'apprentissage en profondeur. À quoi ressemblera l'avenir?
Les politiques publiques efficaces nous permettront de façonner les avantages attendus pour la société, de créer des possibilités et d'équilibrer le tout grâce à une compréhension des risques. C'est ainsi qu'on se place pour recevoir la rondelle.
Où se trouve la rondelle aujourd'hui?
L'agriculture de précision est tout à fait révolutionnaire; elle entraîne de grandes possibilités. À compter du printemps, des véhicules aériens sans pilote réaliseront des missions automatisées au quotidien pour prendre des images précises des champs de sorte qu'on puisse détecter et caractériser chaque plant de maïs. L'imagerie est associée à de nombreuses autres sources de données. Elle est traitée et analysée, et une décision est souvent prise dans les heures qui suivent. Ces décisions au sujet de l'application de pesticides ou de l'ensemencement sont transmises par voie numérique à des tracteurs autonomes ou à d'autres véhicules aériens sans pilote qui appliquent la prescription avec précision. L'agriculture est de plus en plus fondée sur les données probantes. Les décisions qui autrefois étaient prises pour un champ en entier sont maintenant prises pour un mètre carré de terrain.
Où a été la rondelle?
En 2006, nous avons demandé à Transports Canada d'élaborer un règlement sur les systèmes d'aéronef sans pilote. En 2010, nous avions mis en oeuvre un carnet de route élaboré conjointement, de même qu'une stratégie progressive. Ces efforts ont orienté les investissements et l'innovation. En 10 ans, l'industrie des systèmes d'aéronef sans pilote est passée de 80 entreprises à plus de 1 000 entreprises. Toutefois, malgré le talent et le dévouement du personnel de Transports Canada, le ministère n'a pas eu les ressources nécessaires pour effectuer la tâche avant 10 ans, soit dans le budget de 2017.
Ainsi, en juillet 2017, on a publié la première ébauche du règlement sur l'utilisation des drones dans la partie I de la Gazettte du Canada qui, comme une rondelle entre les patins, s'est avérée désuète au moment de sa publication. Comme je vous l'avais dit en 2016, la demande économique d'aujourd'hui vise à survoler des milliers — et non des centaines — d'acres de terrain à la fois, ce qui signifie qu'il faut pouvoir aller au-delà de la visibilité directe, et ce n'est pas permis à l'heure actuelle.
Nous avons deux grandes préoccupations. Lorsque nous avons élaboré le carnet de route pour définir les objectifs gérables, nous avons connu le succès. Revenons à ce qui fonctionne. Aujourd'hui, nous n'avons pas de carnet de route de Transports Canada pour orienter les travaux urgents que nous devons réaliser conjointement. Notre capacité concurrentielle à l'échelle mondiale est sur une pente descendante: nous sommes passés derrière l'Europe, les États-Unis et l'Australie, pour ne nommer que ceux-là.
De plus, Transports Canada doit établir un processus d'évaluation des risques officiel. L'industrie a un intérêt direct dans la gestion des risques pour la sécurité et travaille depuis deux ans à développer cette capacité. Nous avons des besoins mutuels et cette lacune touchera les véhicules automatisés sur les routes également.
Comment pouvons-nous sortir la rondelle de nos patins?
Nous félicitons le Conseil consultatif en matière de croissance économique pour son rapport, qui se veut un cadre pour orienter les politiques nationales en vue de stimuler le développement des marchés et d'accélérer l'adoption des systèmes autonomes et des nouveaux processus opérationnels. Nous félicitions également le comité sénatorial pour son rapport Paver la voie visant l'établissement d'un cadre pangouvernemental d'élaboration des politiques. Tous les ministères sont visés par les changements qui sont en cours.
Nous conseillons à l'industrie des véhicules autonomes et au gouvernement d'élaborer des politiques pour décrire l'avenir. Il faut développer des pratiques exemplaires et les valider par l'entremise d'essais. Ensuite, lorsque vous serez en pleine confiance, vous pourrez élaborer des règlements. Ce processus prendra du temps... mais si vous faites le processus inverse, cela vous prendra encore plus de temps.
Il faut veiller à ce que Transports Canada ait les ressources dont il a besoin pour répondre au défi des systèmes autonomes. Je souligne l'importance de ne pas traiter les voitures autonomes et les véhicules aériens sans pilote de manière distincte dans cet écosystème commun.
Enfin, nous avons deux demandes précises à faire au Comité. Nous voulons que vous demandiez à Transports Canada de préparer un carnet de route pour permettre à l'industrie des systèmes d'aéronef sans pilote d'aller de l'avant dès maintenant et de collaborer avec l'industrie pour développer un processus de gestion du risque officiel.
Merci.
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J'aimerais commencer par vous dire quelques mots.
Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité, de me donner l'occasion de commenter les répercussions de l'automatisation des véhicules sur les villes et les réseaux de transport en commun. Je m’appelle Bern Grush. J’ai étudié les facteurs humains, la concentration de l'humain, l'intelligence artificielle et l’ingénierie des systèmes à l’Université de Toronto et à l’Université de Waterloo.
Je suis le fondateur de Grush Niles Strategic, un groupe de réflexion spécialisé dans la recherche de solutions pour le déploiement des véhicules automatisés en vue de promouvoir la durabilité environnementale, l’équité sociale et l’habitabilité des villes en ce qui a trait au transport par des humains.
[Présentation audiovisuelle]
J'aimerais faire deux observations supplémentaires au sujet de l'automatisation des véhicules, surtout pour le déplacement des gens. Premièrement, l'avenir du transport automobile comprendra deux marchés. Le marché 1 englobera la vente et l’achat de véhicules appartenant aux personnes et aux familles et le marché 2, la vente et l’achat de services de transport pour des déplacements uniques.
De nos jours, le marché 2 comprend toutes les formes de véhicules à louer, comme les taxis, les véhicules appelés à l’aide d’une plateforme électronique et le partage des véhicules, et toutes les formes de transport en commun. C'est très important, parce que ces deux marchés présentent deux visions distinctes de la planification urbaine. Les véhicules automatisés vont perpétuer la concurrence qui existe entre le mode public et le mode privé depuis 125 ans. Les deux marchés seront très importants et continueront de représenter un défi pour les urbanistes qui devront accommoder un nombre immense de véhicules personnels et, simultanément, trouver des façons de mobiliser d’énormes parcs de véhicules partagés au profit des populations urbaines.
Les urbanistes se soucient de l'efficacité et de l'environnement, et tendent à privilégier les flottes de véhicules partagés, mais la majorité des gens préfèrent posséder leur propre véhicule. Ceux qui affirment que la donne va changer dans une large mesure se leurrent et ne se fondent pas sur des données probantes. Le passage au marché des véhicules partagés ne se produira qu’en appliquant une stratégie réfléchie et en prenant des décisions proactives en matière de politiques.
Je recommande trois choses. Premièrement, que le gouvernement entame immédiatement la transition vers une réglementation qui exige des véhicules automatisés sans émission polluante, qui impose des frais d’utilisation en fonction de la distance parcourue et qui prévoit des frais de stationnement axés sur la demande pour tous les espaces publics, commerciaux et professionnels.
Deuxièmement, durant les premières décennies, l’automatisation des véhicules n'atteindra pas le niveau 5 d’automatisation selon les normes de la SAE. Le marché 1 des véhicules personnels conservera les commandes permettant au propriétaire de se rendre là où il veut. Ces véhicules augmenteront la distance et la fréquence moyennes des déplacements ainsi que l’étalement urbain en réduisant l’inconfort associé à la conduite dans la congestion routière.
Cela incitera plus de familles à se procurer ces véhicules, ce qui aggravera la congestion. Ces véhicules automatisés personnels continueront de nécessiter une moyenne de quatre espaces de stationnement chacun, puisqu’ils seront la plupart du temps encore garés à une courte distance de leurs propriétaires.
En même temps, le marché 2 de véhicules à louer sans conducteur sera limité à des zones précises pour circuler sur des routes soigneusement cartographiées. Ces taxis et ces navettes robotisés gagneront la faveur des gens qui se déplacent déjà en taxi, en véhicules appelés à l’aide d’une plateforme électronique et en transport en commun. Les véhicules partagés trouveront donc la majorité de leur clientèle auprès des utilisateurs actuels du transport en commun. Ils vont ainsi perturber les réseaux de transport en commun comme les véhicules appelés à l’aide d’une plateforme électronique le font pour les systèmes de taxis. Sans supervision gouvernementale, ces parcs de véhicules commerciaux constituent une menace pour l’équité sociale.
Je recommande d’adopter un système incitatif pour les fournisseurs commerciaux de services de transport afin de favoriser les déplacements en partance et à destination des points de transit, d’augmenter le taux d’occupation moyen par véhicule et de transporter les personnes handicapées et les personnes dans les secteurs non desservis, de manière à réduire plus rapidement la part des déplacements urbains effectués dans les véhicules personnels à un seul occupant et à nous préparer aux taxis robotisés qui arriveront.
Merci.
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Merci d'avoir attendu pendant la tenue de votes. Merci de vos exposés.
J'aimerais avoir vos commentaires, en particulier les vôtres, monsieur Aruja, sur l'avenir de l'intelligence artificielle dans le secteur de l'agriculture, car on voit cela, par exemple pour les tracteurs agricoles, dans beaucoup de collectivités rurales et éloignées de ma province de l'Alberta.
Quel serait le rôle des services à large bande en milieu rural dans tout cela? Je sais que cela préoccupe de nombreuses petites entreprises de la région. J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet.
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C'est une bonne question et la réponse est plutôt complexe.
Je dirais brièvement que cet accident laisse penser à une défaillance technologique. Aucun piéton ne devrait être heurté; la technologie devrait l'empêcher. Donc, soit un système quelconque était désactivé, soit il y a eu défectuosité. Nous ne savons pas ce qu'il en est et nous ne pouvons émettre d'hypothèses tant que le NTSB enquête.
Nous tardons à prévoir les changements dans la société, et c'est là la nature de mon travail. Je ne dirais pas que nous devrions intensifier les essais au Canada, par exemple, mais je pense que nous devrions réfléchir davantage au déploiement plutôt que de nous concentrer uniquement sur les essais, car il y a certains déséquilibres au Canada. Je viens de l'Ontario; la province a des programmes d'essais, mais pour la technologie elle-même. La technologie n'est manifestement pas prête. Je ne dis pas le contraire.
En outre, la réglementation en matière de sécurité de l'Arizona était clairement inadéquate. Il y avait donc des problèmes sur le plan de la technologie et de la réglementation. Je ne crois pas qu'on ait fait des erreurs liées à la réglementation jusqu'à maintenant au pays, mais je pense aussi que nous devons tenter de mieux prévoir les changements sociaux et les changements aux infrastructures plutôt que de nous limiter à la technologie elle-même, qui n'est qu'une petite partie de l'ensemble.
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Lorsque je parle d'infrastructures de transport, j'inclus notre flotte de véhicules de transport, comme vous incluez les services à large bande dans les infrastructures des véhicules aériens sans pilote.
Au cours des 100 dernières années, voire plus, les pouvoirs publics avaient la plupart du temps l'habitude d'acquérir et d'exploiter les systèmes de transport, des chemins de fer aux autobus. Cette méthode d'acquisition et d'exploitation est très lente, tandis que dans le nouveau contexte de la mobilité, les technologies évoluent très rapidement. Je propose donc, de ce point de vue, de délaisser la méthode d'acquisition et d'exploitation pour privilégier l'établissement des exigences et de la réglementation.
Nous devons utiliser les technologies existantes. Nous ne parvenons pas à prendre les décisions assez rapidement. Il nous est beaucoup plus difficile d'assurer la gouvernance du secteur des transports que ce ne l'est pour des entrepreneurs d'inventer un nouveau système LIDAR, par exemple.
Le gouvernement ne peut pas suivre l'évolution de la technologie, mais il se doit de protéger les valeurs fondamentales du transport commun, notamment la gestion de la congestion, le transport d'un grand nombre de personnes jusqu'à leur lieu de travail et l'équité sociale. Tous ces aspects doivent être protégés, et ils seront menacés si nous nous contentons d'attendre que ces systèmes relèguent le transport en commun à l'arrière-plan. C'est ma principale crainte.
J'espère que cette réponse vous suffit.
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Vous avez soulevé d'excellents points et posé d'excellentes questions, Matt.
Je pense que nous avons parfois tendance à nous attarder aux particularités de la technologie. Pour être honnête, la technologie n'est pas notre priorité. Ce n'est pas notre domaine; c'est plutôt la priorité de l'industrie. Sans vouloir faire de jeu de mots, laissons-lui le volant. Je pense que nous devrions plutôt nous assurer d'être prêts pour l'arrivée de cette technologie.
Monsieur Grush, vous avez tout à fait raison sur la question de la culture, sur l'état de préparation nécessaire grâce à des infrastructures adéquates, à l'intégration adéquate des modes de transport — qu'ils soient routiers, aériens, ferroviaires ou maritimes — et à l'intégration de tous les modes de transport qui pourraient être automatisés.
À cela s'ajoute un aspect que nous n'examinons pas toujours assez en profondeur, soit l'intégration de la gestion des données et de l'information, entre autres, dans le volet distribution. Certaines choses ne sont pas évidentes.
Ma question s'adresse à vous trois. En votre qualité de professionnels, quels aspects nous recommandez-vous d'inclure dans les discussions? Je parle des autres aspects que j'ai mentionnés plutôt que la technologie utilisée dans ces véhicules.
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La première chose à faire est de déterminer l'objectif. Je reviens encore une fois au transport en commun. Pourquoi avons-nous du transport en commun? Quels sont nos objectifs? Quelle est sa raison d'être? La question n'est pas de savoir ce qu'il faut en faire, ce que nous faisions auparavant et ce qui peut être amélioré, mais plutôt de savoir pourquoi nous avons du transport en commun au départ. Si nous n'en comprenons pas les raisons, nous ne pourrons pas le défendre contre les changements technologiques à venir. C'est le tout premier niveau.
Par exemple, si nous convenons que c'est une question d'équité sociale ou que cela vise à assurer le déplacement d'un grand nombre de personnes dans un espace densément peuplé... Si nous convenons d'accroître la densité urbaine — je ne me prononce pas dans un sens ou dans l'autre —, nous devrons alors déterminer comment maintenir le transport en commun dans ce contexte.
Je vais vous donner un exemple très précis: il est indéniable que les navettes et les taxis autonomes, notamment, menaceront nos réseaux d'autobus municipaux. On compte environ 2 000 municipalités au Canada; seulement 200 sont dotées d'un système de transport en commun. Beaucoup de ces réseaux sont maintenant menacés par les taxis autonomes, etc. Voici comment cela risque de se passer: dans les cinq ou six grandes villes qui ont un métro, par exemple, ces technologies entraîneront d'abord la disparition des services d'autobus, puis une réduction de l'achalandage des réseaux de train léger sur rail et de transport ferroviaire urbain. Ces systèmes seraient les deuxièmes à être menacés. Comment pourrons-nous maintenir l'achalandage des systèmes sur rail malgré la convivialité de taxis autonomes qui prendront les gens à domicile et feront tout le trajet de 20 ou 30 kilomètres directement jusqu'à leur lieu de travail? Je pense que c'est une grande menace. Comment pourrons-nous maintenir nos réseaux de transport sur rail?
Actuellement, beaucoup de villes investissent dans le transport sur rail. Comment pourrons-nous en préserver la valeur malgré la concurrence de taxis autonomes?
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Il y a deux ou trois aspects à cela. L'un d'entre eux — et je souscris aux propos de Bern concernant le milieu urbain — est que ce casse-tête comprend beaucoup d'aspects convergents. Je recommanderais au Comité de discuter avec les Nokia, les Erikson et les Telus de ce monde et les spécialistes de l'intelligence artificielle pour avoir un portrait de la situation, car ils jouent un rôle important dans l'ensemble.
Je reviens à l'exemple de l'agriculture. Le Conseil consultatif en matière de croissance économique a recommandé l'établissement d'une politique pour aider le Canada à passer du cinquième au deuxième rang mondial pour l'exportation de produits agricoles. Il s'agit d'un énoncé de politique très simple qui favorisera certainement l'innovation pour ces systèmes.
Voici un exemple vraiment simple de ce que vous pourriez faire demain; pas la semaine prochaine, mais demain matin. Vous pourriez dire que le gouvernement fédéral travaillera en partenariat avec toute province désireuse de mettre à l'essai des tracteurs automatisés sur la voie publique. Ils sont entièrement automatisés, mais ils ne peuvent se déplacer d'un champ à l'autre en passant par les routes de campagne, même si rien ne les en empêche, sur le plan technologique. Ce serait une étude de cas très simple qui permettrait de tâter le pouls de la population concernant une solution axée sur les résultats économiques. L'acceptabilité sociale dans cette collectivité cadrerait en partie avec les aspects dont Bern a parlé. Tout ne tourne pas autour de Toronto et de l'opinion de ses habitants. La population de Lethbridge pourrait avoir un autre point de vue.
Il faut choisir son combat, pour ainsi dire. Le conseil consultatif a fait un bon travail à cet égard.
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Merci, madame la présidente.
Messieurs, je vous remercie de votre présence et de votre patience.
Je suis né en 1960. Pendant ma jeunesse, nous croyions qu'en l'an 2000 les gens allaient prendre leur retraite à 55 ans, que la semaine de travail serait de quatre jours et qu'il y aurait des voitures volantes. Or ici aussi, c'est un horizon de 40 ans qu'on nous propose.
J'ai tendance à croire que l'évolution technologique au cours des quatre prochaines décennies pourrait nous amener à ce que vous nous décrivez. Cependant, quand j'observe l'autre ligne qui marque la décroissance des voitures personnelles, il me semble qu'il faut changer l'analyse. Il faut en quelque sorte faire disparaître le plaisir de conduire et le plaisir de posséder une voiture.
Comment sera-t-il possible de parvenir à ce que ces deux lignes se croisent, c'est-à-dire que la technologie permette le développement de voitures autonomes, mais aussi que les consommateurs acquièrent la volonté de délaisser leur voiture?
Ce que je perçois présentement, et ce sera sans doute la tendance pour les prochaines années, c'est que les voitures propres, les voitures électriques, suscitent un intérêt marqué. Le succès de Tesla, par exemple, nous permet de le constater.
Qu'est-ce qui va inciter les gens à opter pour une voiture autonome et les amener à perdre le plaisir de conduire?
La question se pose d'autant plus qu'à l'heure actuelle, on n'arrive pas à développer de transports en commun entre les grands centres urbains. C'est donc dire que les gens vont de toute façon se déplacer en voiture entre Montréal et Toronto ou entre Québec et Montréal. Pourquoi, une fois arrivés sur place, auraient-ils un plaisir fou à conduire un véhicule autonome?
C'est un énorme problème. La solution n'est pas de rendre indésirable la possession d'une voiture, mais de faire de l'autopartage une expérience formidable.
Les gens ont une crainte naturelle de perdre leur véhicule. J'ai une voiture, et d'après votre question, j'en déduis que vous en avez une aussi. On perd quelque chose. Vous pourriez avoir un sentiment de perte, un sentiment qui ne plaît à personne. Pour inciter les gens à changer leurs habitudes, il faut que ce qu'ils gagnent soit deux fois mieux que ce qu'ils perdent. Voilà le défi.
Inciter les gens à privilégier l'expérience d'un véhicule partagé plutôt que la propriété d'un véhicule est un défi beaucoup plus grand que de fabriquer un véhicule autonome. Jusqu'à maintenant, votre question est sans réponse. Lorsque vous entendez dire que personne ne ressentira le besoin de posséder une voiture, c'est peut-être vrai sur le plan rationnel, mais non sur les plans comportemental et économique. Du point de vue de l'économie comportementale, tout ce que vous dites est vrai. Beaucoup préfèrent garder leur véhicule, et c'est un énorme problème.
J'aimerais avoir la réponse; si je l'avais, je serais très riche.
Il y a pire encore: actuellement, au Canada, moins de 10 % des déplacements se font dans des véhicules non familiaux. Si nous parvenons à porter à 75 % le pourcentage de déplacements dans un véhicule partagé d'ici 30 ans, le parc automobile mondial sera tout de même aussi important qu'il l'est aujourd'hui, puisque la demande de déplacements augmentera. Notre richesse augmente, et c'est l'une des causes de l'augmentation de la demande de déplacements. Une faible variation de 8 % à 18 % ne fera aucune différence. La congestion routière est un problème bien plus important que quelques personnes choisissant d'utiliser des taxis autonomes. C'est un problème très grave.
Je vous remercie de la question.
En 2007, un plan commun à quatre phases a été élaboré. Nous avions presque terminé la première phase, soit la publication initiale de la réglementation dans la partie 2 de la Gazette du Canada prévue pour cet été. Nous sommes environ à mi-chemin de la phase deux, tandis que les phases trois et quatre concernent les opérations menées hors de la visibilité directe. Par exemple, comment pouvons-nous traiter de portions de territoire, comment Jeremy peut-il faire des levés géophysiques sur des centaines de kilomètres?
Nous savons que le groupe de travail mixte industrie-gouvernement est un excellent partenariat qui fonctionne admirablement bien, mais ses activités sont à l'arrêt complet. Il n'y a aucune vision. Il nous faut quelque chose. Ce n'est pas comme si nous ignorions ce que nous avons à faire, mais il n'y a aucun énoncé écrit, aucune transparence et aucune supervision des hauts dirigeants, administratifs ou politiques, pour que cela se poursuive.
Les attentes sont grandes. Nous voulons accroître la contribution du secteur agricole au PIB — 6,7 % actuellement —, mais nous sommes confrontés à divers obstacles.
Cela m'irrite au plus haut point de constater que les États-Unis n'avaient aucun plan il y a trois ans, mais que je peux maintenant aller sur leur site Web, qui sera mis à jour dans deux ou trois semaines, et avoir accès à tout cela en toute transparence. Cela vaut aussi pour beaucoup d'autres administrations.
Il faut éviter que les gens fonctionnent continuellement à l'aveuglette en fonction de besoins perçus de l'industrie. Trouvons des solutions. Certes, nous n'aurons pas un plan parfait, mais il convient de définir les paramètres, car nous devons composer avec cette évolution technologique incroyablement rapide. On ne peut se permettre d'avoir une réglementation qui ne reflète pas la réalité.
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Merci, monsieur le président.
Merci aux témoin d'être ici aujourd'hui.
Je comprends l'importance d'être proactif relativement à cette question. J'abonde dans le sens de mon collègue M. Aubin. J'adore conduire des autos. Qu'arrivera-t-il à la Ferrari de demain? Existera-t-elle seulement pour qu'on en admire le style?
Pourtant, j'ai certains doutes concernant l'automobile. Encore aujourd'hui, l'automobile peut être perçue par les gens de l'extérieur comme un signe de richesse. Je continue à croire que le besoin de posséder un véhicule n'ira pas en diminuant.
La congestion est déjà problématique. Comment les véhicules autonomes pourront-ils pallier ce problème?
Ma question s'adresse à l'un des vous trois, et j'aimerais que la réponse soit courte.
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Mon point de vue diffère peut-être un peu, et je vais vous expliquer pourquoi. Le propriétaire d'une flotte de véhicules de livraison peut acheter une application pour en suivre les déplacements. Si l'un de ses véhicules arrête plus de 15 minutes à un Tim Hortons, il en sera informé. Cette technologie fonctionne à partir d'un téléphone cellulaire.
Je crois qu'elle sera beaucoup plus facile à adopter de nos jours, plutôt que de réserver des voies et prendre d'autres mesures du genre. À l'heure actuelle, on peut l'intégrer aux véhicules traditionnels pour éviter d'emprunter une voie où se trouvent, par exemple, des véhicules autonomes. Nous avons déjà cette technologie, et nous l'intégrons maintenant aux véhicules aériens sans pilote. C'est comme fixer une hélice à un téléphone cellulaire pour suivre les déplacements.
Bern a entre autres parlé de géorepérage. Cette technologie est maintenant largement répandue. Elle permet d'éviter que les appareils autonomes ou sans pilote dépassent une limite géographique, et c'est intégré à même le système de commande. La technologie existe. Il est très simple de l'adapter à un véhicule traditionnel.
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C'est plutôt une observation.
À l'écoute des témoignages, je me demande si le gouvernement fédéral a bien établi son programme de financement des infrastructures. À titre d'exemple, le fonds pour l'infrastructure de transport en commun, qui est de 3,5 milliards de dollars, investit dans le renouvellement des parcs d'autobus. En 2012, la Toronto Transit Commission a mis au rancart ses autobus de General Motors surnommés « fishbowl buses » qu'elle avait achetés dans les années 1980. Ces autobus ont un cycle de vie de 20 à 30 ans.
J'entends parler de l'automatisation et de l'élimination d'emplois, et j'écoute des personnes comme Mark Carney, qui a parlé d'un rapport de la Banque d'Angleterre selon lequel 15 millions d'emplois allaient disparaître au Royaume-Uni. L'année dernière, PricewaterhouseCoopers a indiqué que 38 % des emplois aux États-Unis allaient être éliminés à cause de l'automatisation. J'entends également parler de la transformation rapide de la circulation automobile. Faisons-nous un bon investissement en achetant des autobus pour renouveler le parc de véhicules de nos grandes villes?
Je me demande également ce qui arrivera à tous les chauffeurs d'autobus, à tous ces emplois et à tout le reste.
C'est plutôt une observation et matière à réflexion alors que nous entamons cette étude.
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Reprenons. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité permanent des transports fait une étude sur les véhicules automatisés et branchés au Canada.
Je souhaite la bienvenue à tous nos témoins: Denis Gingras, professeur, Laboratoire en intelligence véhiculaire, Université de Sherbrooke; Scott Santens, écrivain et défenseur du revenu de base inconditionnel; et de QNX Software Systems Limited, Grant Courville, chef, Gestion de produits, et John Wall, vice-président sénior.
Je vous propose de commencer, monsieur Gingras. Vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
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Merci beaucoup de m'avoir invité à comparaître devant vous et de me donner la chance d'exprimer mes opinions sur le domaine dans lequel je travaille depuis plus de 30 ans.
Souvent, il faut se poser des questions sur la motivation qui nous pousse à faire des véhicules autonomes, entre autres. Regardons d'abord notre système de transport et nos problèmes de mobilité.
En fait, ce serait difficile d'imaginer un système de transport plus inefficace que celui que nous avons actuellement. Notre système de transport est basé sur un modèle d'affaires qui repose sur la vente de véhicules et la propriété individuelle des voitures. La croissance démographique est constante, et une partie de la population se déplace dans les grandes villes, au détriment des régions. En économie, on a utilisé la méthode du juste-à-temps. Toutes les marchandises qui étaient transportées par train sont maintenant transportées sur nos routes par des trains routiers, ce qui a contribué à détruire nos infrastructures routières. Nous n'avons qu'à regarder l'état actuel de nos routes pour le constater.
Le taux d'occupation des véhicules est de l'ordre de 5 %. Qui plus est, 80 % des gens voyagent encore de façon individuelle dans les véhicules. Il n'y a qu'à comparer le poids moyen d'une personne avec le poids moyen d'un véhicule, qui est de plus en plus élevé puisque, selon les statistiques, les gens achètent de plus en plus de véhicules utilitaires ou de camionnettes: cela ne va pas dans le bon sens du tout.
Il y a encore des problèmes liés à la pollution. Plus de 80 % des véhicules ont encore des moteurs à combustion.
De plus, le temps d'utilisation des véhicules est d'environ une heure par jour. Encore une fois, le taux d'utilisation d'un véhicule est à peu près de 5 %, ce qui est totalement inefficace. Demandez à n'importe quel chef d'entreprise s'il achèterait un équipement qu'il utiliserait uniquement pendant 5 % du temps. Personne n'investirait d'argent pour cela.
Comme nous pouvons le constater, c'est majeur.
Heureusement, le domaine du transport vit actuellement une révolution basée sur trois axes majeurs. Évidemment, il y a l'électrification des systèmes de propulsion, mais je n'en parlerai pas beaucoup aujourd'hui. Il y a aussi l'automatisation de la conduite, de même que tout ce qui est relié à la connectivité, donc aux systèmes de télécommunications. Ces trois aspects amènent une révolution dans le domaine du transport. Cette révolution aura des répercussions majeures tant sur le plan des modèles d'affaires que sur le plan des solutions possibles qu'on peut trouver aux problèmes de mobilité. Toutefois, c'est à nous de prendre des décisions draconiennes afin de changer de cap et d'améliorer nos systèmes de transport. Qu'on le veuille ou non, malgré la numérisation de notre société et l'importance des technologies de l'information, nous demeurons des êtres physiques qui manipulent des objets physiques et nous aurons toujours des besoins relativement à la mobilité.
Je parlerai maintenant de l'automatisation de la conduite.
Pourquoi veut-on avoir des véhicules autonomes? Il y a deux raisons majeures.
D'abord, c'est pour améliorer la sécurité routière, parce que les ordinateurs ont un temps de réponse beaucoup plus rapide que les humains. Aussi, grâce à la diversité des capteurs embarqués et aux systèmes de traitement actuels qui sont très perfectionnés et qui continuent de se perfectionner notamment au moyen de l'intelligence artificielle, on peut arriver à des solutions permettant d'améliorer la sécurité routière et de réduire le nombre d'accidents, de blessés et de morts.
La deuxième raison, c'est que les véhicules autonomes, dans un concept de taxis robotisés, peuvent nous amener à réduire le nombre de véhicules sur les routes. L'achalandage des routes est vraiment un des problèmes majeurs, outre les aspects liés à la dangerosité du transport routier.
Les télécommunications sont aussi un aspect intéressant, parce qu'elles nous permettent de considérer un partage de l'intelligence entre les véhicules et les infrastructures routières. Jusqu'à présent, les constructeurs automobiles ont investi tous leurs efforts pour inclure l'intelligence embarquée dans les véhicules, alors que les agences de transport, les ministères et toutes les agences publiques qui s'occupent des infrastructures routières ont très peu investi dans leurs infrastructures pour les rendre plus intelligentes. Dans la situation actuelle, il y a donc un déséquilibre. On a besoin d'exploiter davantage la capacité de communication afin d'essayer d'optimiser le partage de l'intelligence entre les infrastructures et les véhicules.
En ce qui a trait aux recommandations, je pense que nous avons un urgent besoin de procéder à un travail sérieux et détaillé sur la réglementation et la législation pour accueillir ces nouveaux véhicules, soit les véhicules communicants et les véhicules en mode de conduite automatisée.
Plus particulièrement, à court terme, il faut absolument encadrer la façon dont les projets pilotes sont exécutés sur les routes publiques et investir dans l'élaboration de procédures de tests et de validation des véhicules, notamment par l'entremise de Transports Canada et des sites de tests comme ceux que nous avons à Blainville, au nord de Montréal.
Je vais m'arrêter ici.
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Je remercie le Comité de m'accueillir ici aujourd'hui.
En 2014, j'ai fait un voyage en voiture avec ma fiancée. Entre la Louisiane et la Floride, nous avons discuté des répercussions possibles des camions autonomes. Des mois plus tard, je me suis inspiré de cette conversation pour publier à mon compte un article qui est devenu viral à l'échelle planétaire. Au cours des quatre dernières années, malgré mes propres mises en garde, j'ai moi-même été choqué par la rapidité à laquelle cette technologie s'est développée.
Je n'ai pas de doctorat. Je ne suis ni programmeur ni camionneur. Je suis tout simplement un citoyen qui passe beaucoup de temps à étudier des sujets d'intérêts pour ensuite écrire des articles. Ce qui a tendance à m'intéresser le plus, c'est l'effet des progrès technologiques sur la civilisation. Dans cette optique, je souhaite prendre le temps à ma disposition pour tenter de faire comprendre les répercussions monumentales que la technologie des véhicules automatisés aura sur la société ainsi que le grand besoin de comprendre ce qui nous attend au prochain virage, pour ainsi dire.
Pour commencer, je veux reprendre des propos qui expliquent bien selon moi l'essor de cette technologie. Le directeur financier de Suncor a dit que l'éventuel recours à des parcs de camions entièrement automatisés dans la mine de la société n'avait rien de fantaisiste. Il a ensuite expliqué qu'il y aura donc 800 personnes de moins à la mine et que cela représentera en moyenne des économies de 200 000 $ par personne, ce qui donne une idée des économies qui seront réalisées sur le plan de l'exploitation.
C'est le calcul froid qui est associé à la technologie des véhicules autonomes.
Les humains coûtent cher. Leur main-d'oeuvre est dispendieuse. Les avantages qui leur sont offerts sont coûteux. Leur formation coûte cher. Ils se blessent. Ils se fatiguent. Ils font des erreurs. Ils boivent et prennent des médicaments. Ils se laissent distraire. Ils regardent leur téléphone. Ils font la grève. Ils entament des poursuites judiciaires. Ils se fâchent et souffrent de dépression. Ils ont des limites physiques et biologiques. Ils démissionnent.
Les machines ne font rien de tout cela. Ce sont des travailleurs parfaits tant que le coût est raisonnable et que le rendement est bon.
En ce qui a trait aux camions autonomes, le coût de l'essence fait également partie de l'équation. Les camions qui se conduisent eux-mêmes permettent d'économiser énormément d'essence. Ils peuvent parcourir de longues distances en moins de temps, car ils n'ont pas besoin de dormir. Ils peuvent voyager dans des convois pour accroître l'efficacité aérodynamique. Le nombre inférieur d'accidents permet de réduire les coûts humains et les coûts en capital. De nombreuses raisons mènent à l'adoption de cette technologie, notamment des économies de milliards de dollars — investis et en jeu — pour les premiers à la mettre en place.
Je prends la parole une semaine seulement après le premier décès d'une piétonne frappée par une voiture autonome. Cet accident en dit long sur l'état d'avancement de cette technologie. Elle est déjà aussi bonne que les humains, au point où les gens s'attendent déjà à ce que cette technologie possède des capacités surhumaines. Pourquoi le radar et le système au laser n'ont-ils pas vu la femme avant d'entrer en collision avec elle dans le noir? Pourquoi la voiture ne l'a-t-elle pas immédiatement détectée et n'a-t-elle pas activé les freins?
C'est une question de secondes, et le conducteur ordinaire aurait causé le même décès, comme c'est le cas 3 000 fois par jour et 1,3 million de fois par année à l'échelle mondiale. Le premier humain est mort, mais cette technologie sauvera des vies, de l'argent et du temps, et elle aura une incidence sur nos économies de sorte que les gouvernements doivent commencer à se préparer pour les années à venir.
Ne vous laissez pas leurrer en pensant qu'elle ne fera qu'éliminer des emplois. L'automatisation du transport par véhicules se répercutera sur l'économie. Pensez aux voitures et aux camions comme des globules dans un système circulatoire, dans lequel ils transportent de l'oxygène partout dans le corps sous forme de recettes et de dépenses. Des entreprises dépendent de l'argent que les conducteurs dépensent. D'autres dépendent des propriétaires de voiture, des accidents de la route, du stationnement et de la nécessité de contracter une assurance, tandis que d'autres entreprises encore dépendent des activités de ces premières entreprises, et ainsi de suite. C'est l'effet de dominos.
Le défi que les législateurs devront relever consiste à orienter ce processus de manière à ne pas décourager son progrès, mais plutôt à le favoriser, tout en permettant au plus grand nombre de personnes possible de mieux s'en porter. Cela signifie qu'il faudra non seulement aider les gens à acquérir de nouvelles compétences pour occuper de nouveaux emplois, mais aussi créer un filet de sécurité qui tient compte de la transformation du travail dans un XXIe siècle empreint d'une grande incertitude.
La meilleure façon de procéder n'est pas de demander à d'anciens conducteurs de manoeuvrer dans un pénible système de formulaires et de bureaucratie pour recevoir un revenu pendant qu'ils se recyclent et cherchent un autre emploi sur un marché du travail où un nombre croissant de personnes composent avec des emplois précaires à court terme et un revenu mensuel qui varie de plus en plus.
C'est pour cette raison que je crois également qu'il faut discuter en même temps de l'automatisation future du travail et d'un revenu de base garanti. Vous avez une longueur d'avance dans le sens où vous mettez déjà la technologie à l'essai, mais je vous prie de porter attention à son importance. L'automatisation fera sans aucun doute des gagnants et des perdants, et on ne peut pas ignorer les perdants ou s'attendre tout simplement à ce qu'ils se trouvent un nouvel emploi qui offre le même salaire, les mêmes heures, les mêmes avantages et la même sécurité, qui nécessite les mêmes compétences, qui revêt pour eux le même sens et qui se trouve à la même distance de leur domicile. En tant que législateurs, vous devez absolument veiller à ce qu'une technologie comme les véhicules autonomes — et l'intelligence artificielle qui la rend possible — fonctionne pour tout le monde, pas seulement pour les gens qui la possèdent. À défaut de mettre l'accent là-dessus, notre parcours sera risqué. C'est à vous qu'il revient de nous faire contourner les risques autant que possible, pour que nous arrivions tous à un point que nos ancêtres n'auraient peut-être même pas cru possible.
Merci.
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Madame la présidente, merci d'avoir invité les représentants de BlackBerry à venir discuter avec vous aujourd'hui des véhicules automatisés et branchés.
Comme vous le savez, l'industrie automobile connaît actuellement une profonde transformation par laquelle un ensemble d'ordinateurs, de logiciels, de capteurs, d'actionneurs et de réseaux finira par remplacer l'humain au volant. BlackBerry joue un rôle de chef de file dans cette transformation. Nous sommes fiers d'être une entreprise canadienne qui emploie de grands talents canadiens et qui innove sans cesse pour être au premier plan du progrès technologique.
BlackBerry QNX est un fournisseur de technologies de confiance pour l'industrie automobile depuis environ 20 ans. Ses logiciels sont utilisés par plus de 40 constructeurs automobiles, ils se trouvent dans plus de 60 millions de voitures et ils constitueront le fondement des systèmes de conduite autonome de demain. Les nouvelles générations de véhicules dépendront de plus en plus de logiciels et de connexions à des réseaux externes pour remplir des fonctions essentielles. Il y aura donc une augmentation des risques pour la sécurité si les systèmes automobiles ne sont pas conçus selon les pratiques exemplaires et les normes de l'industrie.
BlackBerry a établi un cadre de disciplines afin de sécuriser les voitures modernes et de limiter les risques de cyberattaques. Nous travaillons en étroite collaboration avec les constructeurs d'automobiles et leurs fournisseurs, et nous savons qu'ils prennent très au sérieux les questions de sûreté et de sécurité. Ils sont conscients des inquiétudes du public et ils savent que le fait de ne pas prendre les mesures raisonnables pour garantir la sûreté et la sécurité des véhicules aurait des répercussions néfastes sur l'adoption de la technologie, sans parler de leur réputation.
Cela ne veut pas dire pour autant que le gouvernement n'a pas un rôle important à jouer. Les gouvernements ont la responsabilité de garantir que la prochaine génération de véhicules soit mise en service de façon sécuritaire et qu'elle n'entraîne pas de risques déraisonnables. Les gouvernements doivent se charger d'harmoniser les réglementations des différents territoires afin d'éviter qu'on se retrouve avec un ensemble disparate de lois et de normes divergentes. Pour y arriver, il faudra assurer une bonne coordination entre les divers ministères et gouvernements, y compris étrangers. L'échange des résultats d'essais, des idées et des expériences entre les organismes et les gouvernements permettra également aux gouvernements de se tenir efficacement au courant des changements technologiques rapides.
Merci.
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Merci pour la question.
C'est un peu difficile de faire des prédictions précises — il nous faudrait une boule de cristal —, mais il y aura certainement une sorte de parc hybride. Si vous regardez le rythme auquel la technologie évolue, aujourd'hui, des SCA — des systèmes de conduite automatisée — de niveaux 2 et 3 sont offerts sur le marché. Je présume qu'en 2030, c'est-à-dire dans 12 ans, on vendra probablement des véhicules de niveau 4, mais sûrement pas de niveau 5. J'en doute fort.
Il y a tellement de facteurs qui entrent en ligne de compte par rapport au modèle commercial: l'acceptabilité sociale, la stratégie de commercialisation que les FEO vont utiliser pour vendre les véhicules automatisés et autonomes, la réaction des sociétés d'assurances, l'évolution de la législation, la collaboration entre les responsables des infrastructures routières et les responsables des véhicules, les différentes stratégies de mobilité partagée...
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Je suis tout à fait d'accord. On parle beaucoup de la conduite autonome de niveau 5, mais c'est encore très loin, et nous ne serons pas rendus là en 2030. Le niveau 5 signifie que le véhicule peut aller partout, en tout temps, dans n'importe quelles conditions.
Nous travaillons actuellement à des programmes de niveaux 3+ et 4. Ils devraient être prêts d'ici à 2023-2024. Normalement, la technologie finit par se retrouver dans les véhicules les plus abordables. Si j'avais à deviner, selon les programmes auxquels nous travaillons, je dirais qu'à ce moment-là, probablement 30 % des véhicules seront de niveaux 4 et 4+, 30 % de niveaux 3 et 3+, et 40 % de niveau 2. Il y a simplement différents niveaux de dispositifs de sécurité.
Les FEO avec lesquels nous discutons parlent de conditionner le public au moyen de dispositifs de sécurité empêchant les accidents — pas nécessairement pour la conduite autonome, mais pour la conduite automatisée, qui est...
Je vous en prie.
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Merci, madame la présidente.
Je dois souligner qu'il s'agira d'un processus monumental qui durera probablement plusieurs décennies. Je veux vous poser les mêmes questions que j'ai posées aux témoins précédents qui étaient ici il y a environ 30 minutes.
Cela n'est pas nécessairement lié à la technologie, car deux éléments feront avancer la technologie: d'un côté, le client et ses besoins, et de l'autre, l'industrie même, qui devra tenter de répondre à ces besoins au moyen de la nouvelle technologie. Ce dont j'aimerais parler, c'est de la façon dont nous, le gouvernement, en collaboration avec des partenaires américains, pouvons nous préparer pour la nouvelle technologie en favorisant les investissements dans les infrastructures.
Nous devons également faciliter l'intégration des divers moyens de transport routier, ferroviaire, aérien et maritime, car il n'est pas seulement question des voitures, des autobus et des camions sur les routes; il est aussi question des navires sur l'eau, des trains sur les voies ferrées et des avions dans les airs.
Le dernier aspect est la logistique commerciale et la distribution. Il faut veiller à ce que les groupes de pression, les véhicules et les moyens de transport circulent aux échelles nationale et internationale, ainsi qu'à ce que l'intégration des moyens de transport inclut également les divers intérêts relatifs à la logistique commerciale et à la distribution.
J'ajouterais un autre élément: les sources de revenus. Il est indubitable que la nouvelle possibilité de recueillir des données offrira de nouvelles sources de revenus aux gens de l'industrie, mais ce qui est aussi important, voire plus important encore, c'est que les clients pourront employer leurs propres moyens pour recueillir des données et s'en servir à leur guise afin de se créer des sources de revenus individuelles.
Tout cela étant dit, j'aimerais maintenant savoir ce que vous pensez de tous les aspects que j'ai soulevés. Quel rôle le gouvernement doit-il jouer et comment doit-il faire pour devenir partenaire et pour se préparer sur les plans de l'infrastructure, de l'intégration, de la logistique commerciale et de l'intégration des données?
La parole est à vous.
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Sur le plan des profits, bien que nous parlions tous de la conduite autonome et automatisée, d'après moi, le plus grand changement que nous verrons dans le secteur de l'automobile touchera l'architecture du véhicule. Il y aura un écosystème conçu pour la voiture.
La meilleure comparaison que je puisse faire, c'est de dire qu'il y aura un Android pour la voiture comme pour le téléphone. Il y aura deux ou trois écosystèmes, tout comme nous avons aujourd'hui iOS et Android, mais ce ne sera pas Android parce qu'il y a des caractéristiques très précises liées à la sûreté et à la sécurité.
Toutefois, je pense qu'il y a des possibilités énormes. Les constructeurs d'automobiles considèrent un tout nouveau modèle commercial pour produire des revenus dans l'avenir. Les données en font partie, ainsi que la façon de vendre des services dans les voitures. Dans l'avenir, les gens posséderont leurs voitures très différemment. Ils auront peut-être une décapotable en été et un véhicule utilitaire sport en hiver, mais ils voudront que les caractéristiques de leurs véhicules les suivent d'une voiture à l'autre — la position des sièges, par exemple. Les gens parlent d'un téléphone intelligent muni de roues; c'est bel et bien la direction dans laquelle nous allons.
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Merci, madame la présidente.
Cette discussion est passionnante. Je vais donc plonger tout de suite.
Monsieur Gingras, dans votre présentation, vous avez allumé une lumière dans mon esprit quand vous avez parlé du modèle juste-à-temps, que nous avons lancé à une époque où les gaz à effet de serre n'étaient pas tellement un problème connu.
Est-ce que ces développements technologiques en matière de transport entraînent aussi une réflexion sur le besoin de réviser nos modèles économiques, ou est-ce qu'on s'en tient strictement aux notions de transport, de véhicules et d'automatisation?
Je tenais simplement à mentionner que pour ce qui concerne la capitalisation des données, je trouve important de souligner, par rapport à l'avenir, que les gens sont propriétaires de leurs données. Si, en votre qualité de législateurs, vous établissez un précédent selon lequel les gens possèdent leurs données, alors il sera logique, du point de vue de la protection des renseignements personnels, non seulement que les données ne puissent pas être divulguées et revendues, mais aussi que lorsqu'elles sont vendues avec la permission de leurs propriétaires, leurs propriétaires doivent recevoir quelque chose en retour.
C'est aussi intéressant qu'il y a non seulement ce que tous considèrent comme des données, mais aussi les données ambiantes, les données que nous produisons sans rien faire, en étant simplement nous-mêmes, en marchant près d'une caméra dans la rue. Il existe beaucoup de données qui ne sont pas considérées comme telles, mais qui le sont bel et bien.
Messieurs Courville et Wall, j'ai une question plus technique à vous poser.
Nous entendons toujours dire que les véhicules automatisés offrent une plus grande sécurité, puisque leur ordinateur réagit plus vite que l'humain. Cependant, tous les exemples que l'on me donne en sont où la voiture, pour éviter un accident, s'arrête plus rapidement que je ne l'aurais fait.
Or l'an dernier, j'ai réussi par miracle, mais aussi grâce à ma technique de conduite, à éviter d'être impliqué dans un carambolage causé par la glace noire. Dans ce cas précis, la solution n'était pas d'arrêter, mais bien d'effectuer un dérapage contrôlé. Est-ce que les véhicules automatisés sont capables de faire cela?
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Oui, d'après moi, les algorithmes seront assez élaborés pour comprendre la glace noire, le dérapage des roues, etc. Ils pourront déterminer plus rapidement que vous ce qui arrive au véhicule du point de vue de la géométrie.
C'est aussi une des raisons pour lesquelles selon moi, l'avènement de la conduite autonome est moins proche qu'une entreprise comme Uber, par exemple, le prétend. Uber veut des véhicules autonomes pour des raisons commerciales. C'est son modèle d'entreprise. Uber ne survivra pas sans cela.
On fait très peu d'essais de conduite autonome au Canada. Nous avons une voiture autonome à QNX, et elle se comporte très différemment en hiver, sur la neige et la glace. Nous sommes loin d'être prêts à maîtriser ces situations. Les gens sont encore meilleurs que les véhicules dans de telles situations, mais je pense que grâce à l'apprentissage machine et à l'intelligence artificielle, la technologie finira par être en mesure de réagir adéquatement aux situations de ce genre.
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Merci, madame la présidente.
Un des témoins du groupe précédent a devancé ma question en décrivant la période où la voiture et le cheval circulaient ensemble sur les routes. C'est incroyable que nous soyons en train de parler de véhicules sans conducteur.
J'ai lu un rapport publié en 2017 par la Chambre des lords du Royaume-Uni, intitulé: Connected and Autonomous Vehicles: The future? Le rapport se penche sur la période de transition où les véhicules traditionnels partageront la route avec les véhicules branchés et autonomes. On y constate que les effets de cette coexistence ne sont pas pleinement compris et on recommande au gouvernement du Royaume-Uni de produire des modélisations à ce sujet avant d'établir les politiques.
Ma première question est la suivante: a-t-on produit des modélisations pour évaluer l'impact de la coexistence, sur les routes du Canada, des véhicules autonomes et non autonomes? Dans l'affirmative, quelles sont ces modélisations?
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C'est très admirable. Nous sommes absolument d'accord avec cette recommandation, parce que les humains sont par définition imprévisibles. Vous avez tout à fait raison. La réalité est telle que la flotte sera mixte, comme on l'a déjà dit.
Pour revenir à ce que John disait un peu plus tôt, nous menons des essais dans des conditions météorologiques difficiles parce que tous ces capteurs fonctionnent très bien quand tout va bien, mais c'est plus difficile quand la situation devient imprévisible et s'envenime. Ils doivent pourvoir s'adapter aux imprévus; nous devons comprendre comment y réagir intelligemment. Les voitures pourraient-elles communiquer entre elles? John a mentionné l'intelligence artificielle, et nous sommes tout à fait d'accord.
Une partie de notre travail avec les capteurs vise à gérer les obstacles imprévus. C'est l'une des raisons pour lesquelles il nous reste encore beaucoup de travail pour parvenir au niveau 5. Nous avons tendance à dire qu'il y a les voitures connectées, qu'il y a les voitures automatisées, puis qu'il y a les voitures autonomes. On a tendance à voir les voitures autonomes tout de suite après les voitures connectées, mais il y a toute l'automatisation entre les deux, qui représente une étape majeure. On voit déjà beaucoup de fonctions automatisées dans les véhicules. Les voitures sont de plus en plus sécuritaires, et ce sont autant de petits pas vers la voiture autonome.
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Les problèmes d'interaction homme-machine (IHM) sont au coeur de la problématique. Il y a beaucoup de détails inconscients dans nos interactions entre humains, tout le langage corporel, par exemple. Prenons le simple piéton qui traverse la rue. Il jettera probablement un regard à la voiture et au conducteur. Sans qu'ils n'échangent un mot, il aura compris que le conducteur l'a vu et il se sentira en confiance parce qu'il verra que la voiture ralentit. Nous n'avons pas encore ce genre d'interaction avec une voiture totalement autonome, et nous n'avons encore aucune idée de la façon de le prévoir avec précision.
On déploie beaucoup d'efforts pour établir avec des psychologues spécialisés en connectivité et des mathématiciens des modèles des comportements des chauffeurs et des IHM pour rendre les interactions plus sûres entre les véhicules très autonomes ou les fonctions de conduite très automatisées et les humains.
Pour vous donner un exemple, il y a des constructeurs d'automobiles allemands qui ont mis au point des interfaces graphiques afin d'afficher un grand sourire devant la voiture pour montrer au piéton que la machine l'a vu et qu'il peut traverser la rue en toute sécurité. Nous étudions toutes sortes de solutions du genre.
Ce n'est pas banal, mais ce n'est qu'un problème minuscule dans l'océan des problèmes à surmonter pour parvenir à une solution mature et entière de niveau 5. Nous n'y sommes pas encore.
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Merci de votre question.
En fait, j'étais au Centre d'essais pour véhicules automobiles de Transports Canada et de PMG Technologies à Blainville depuis deux jours. Nous y avons tenu un atelier de travail dont le but était de créer, en collaboration avec le Conseil national de recherches du Canada et Transports Canada, ce que l'on appelle une communauté de praticiens, c'est-à-dire un réseau composé de tous les intervenants canadiens des secteurs du transport routier et des véhicules intelligents dans le but d'en arriver à une stratégie nationale dans ce domaine.
L'atelier regroupait donc des experts du CNRC et de Transports Canada ainsi que de certaines universités comme celles de Waterloo et de Sherbrooke. Il s'y trouvait également des représentants de certains organismes du Québec et de l'Ontario, mais aussi de la Ville de Calgary, puisque des essais y sont faits.
C'est l'une des choses que nous testons. Quand un humain conduit sur une route de campagne où il n'y a pas d'indicateurs, comment fait-il pour se situer en plein milieu d'une tempête? Nous regardons probablement les arbres, les poteaux hydroélectriques, les fossés, etc. Nous devons enseigner aux machines, aux ordinateurs dont sont munis les véhicules, à penser un peu comme nous pour agir de façon sécuritaire, comme on le disait plus tôt.
Ce sont des problèmes de base. Si l'on regarde ce qui se passe en Californie, au DMV, on voit qu'il y a tout un désengagement à l'égard des voitures autonomes. Pourquoi? La plupart des problèmes sont simplement liés à la pluie. Dès qu'il commence à pleuvoir, les capteurs cessent de fonctionner.
Nous nous sommes rendu compte ici, à Ottawa, par exemple, parce que la météo est parfois intéressante ici, ce qui est fantastique pour réaliser des essais, soit dit en passant, que les lidars ne fonctionnent pas très bien dans la neige, dans la pluie ou quand il y a de la gadoue sur le pare-chocs, où se situe le radar. Nous nous sommes rendu compte que les lignes jaunes produisent de bien meilleurs résultats que les lignes blanches. Je veux simplement dire que nous apprenons toutes sortes de choses grâce à nos essais, comme vous pouvez le constater.
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Pour vous donner un exemple très simple, je peux vous faire part de quelques-uns de nos constats, mais si vous en parlez avec des ingénieurs qui font de la recherche, ils vous diront que ces systèmes peuvent reconnaître les lignes jaunes bien mieux que les lignes blanches, surtout quand il neige.
C'est un peu la question de l'oeuf et de la poule. On trouve aujourd'hui des systèmes de communications dédiées à courte distance, des systèmes CDCD, qui peuvent se parler sans fil mais qui ne peuvent échanger qu'avec les autres voitures, sauf que les constructeurs automobiles ne peuvent pas rentabiliser un investissement dans cette technologie parce que l'infrastructure n'est pas là, donc cela n'apporte pas nécessairement grand-chose au consommateur. Ce n'est qu'une illustration de la situation actuelle.
Si les intersections étaient munies d'appareils de ce genre, soudainement, on pourrait offrir une fonction qui ajouterait à la sécurité des véhicules et dont bénéficierait le consommateur.