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La séance est ouverte. Bonjour à tous et bienvenue à cette cinquième réunion du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.
Nous poursuivons notre étude des répercussions de la pandémie de COVID-19 sur le système d'immigration.
Avant d'aller plus loin, je veux rappeler aux participants sur place les règles de santé et sécurité.
Vous devez maintenir entre vous une distance d'au moins deux mètres et porter un masque jusqu'à ce que vous soyez assis. C'est une réunion hybride. Certains membres du Comité sont présents dans la Cité parlementaire, tandis que d'autres participent à distance.
Je vous rappelle à tous que vous devez parler assez lentement pour que les interprètes puissent suivre.
Le greffier surveillera les mains levées et dressera une liste d'intervenants au besoin. Conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 23 septembre, toutes les décisions doivent être prises au moyen d'un vote par appel nominal, à moins que le Comité ne décide de trancher par consentement unanime ou avec dissidence. La séance est diffusée via le Web et peut être suivie sur ParlVU.
Nous allons donc poursuivre l'audition de témoignages sur les conséquences de la COVID-19 sur notre système d'immigration.
Je veux souhaiter la bienvenue à tous les témoins que nous accueillons aujourd'hui. Merci de bien vouloir comparaître devant notre comité pour nous transmettre des informations d'une grande importance.
Nous allons entendre les représentants d'Universités Canada, soit M. Paul Davidson, président-directeur général; et Mme Wendy Therrien, directrice des relations extérieures et de la recherche. Nous accueillons également Mme Denise Amyot, présidente-directrice générale de Collèges et instituts Canada. Je souhaite également la bienvenue à Mme Debbie Douglas, directrice générale d'OCASI, le Conseil ontarien des organismes de services aux immigrants. Nous allons aussi entendre deux représentants de l'Alliance Canada Hong Kong, soit M. Robert Falconer, associé de recherche, Politique d'immigration et de réfugiés, School of Public Policy, Université de Calgary; et Mme Starus Chan.
Comparaissent de plus à titre personnel, Mme Emmanuelle Bergeron et M. Jatin Shory, avocat pour le cabinet Shory Law.
Nous passons maintenant à notre premier groupe de témoins. Chacun d'eux aura droit à cinq minutes pour nous présenter ses observations préliminaires.
Je vais débuter par Mme Denise Amyot, présidente-directrice générale de Collèges et instituts Canada.
Vous avez donc cinq minutes pour votre déclaration préliminaire. À vous la parole.
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D'accord. Je vais reprendre ma dernière phrase.
Pour que le Canada demeure concurrentiel, nous devons continuer à innover et à investir dans l'amélioration de l'expérience étudiante et dans la simplification des systèmes afin d'attirer ces étudiants et futurs citoyens.
[Traduction]
C'est au niveau des collèges et des instituts que l'on observe la croissance la plus rapide du nombre d'étudiants étrangers au Canada avec presque la moitié des permis d'études délivrés pour le postsecondaire en 2019. Ce résultat est notamment attribuable aux liens étroits entretenus par les collèges avec leur communauté et à leur offre de programmes adaptés aux besoins du marché du travail local.
Les collèges et les instituts incarnent les valeurs canadiennes et deviennent souvent des centres de services pour les nouveaux arrivants. Ce sont les véhicules grâce auxquels des résidents temporaires et permanents peuvent parfaire leurs compétences linguistiques et acquérir l'éducation et l'expérience nécessaires pour assurer leur pleine intégration au Canada. Pour que notre pays puisse repartir sur la bonne voie, nous devons absolument pouvoir compter sur l'aide de notre réseau de collèges et instituts publics pour développer, recruter et maintenir au pays tous les talents nécessaires. Je vous dirais à ce titre que 95 % de la population canadienne vit à moins de 50 kilomètres d'un collège ou d'un institut. Il en ressort que nos membres jouent un rôle essentiel en faisant bénéficier les communautés et les économies locales des avantages de l'immigration.
C'est dans cette optique que je souhaite soumettre cinq recommandations à l'attention du Comité.
La première de ces recommandations porte sur les mesures à prendre à court terme pour maintenir notre capacité concurrentielle et pouvoir attirer des étudiants. Le Canada devrait ainsi permettre la collecte des données biométriques au point d'entrée pour les étudiants en provenance de pays dont les centres de réception des demandes de visa demeurent fermés. Il devrait aussi dès maintenant prolonger jusqu'à la fin de 2021 le processus de demandes de permis d'études en deux étapes et l'application des dispositions permettant la prise en compte du temps consacré aux études en ligne aux fins de l'octroi du permis de travail postdiplôme.
Deuxièmement, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) devrait collaborer avec Collèges et instituts Canada ainsi que d'autres intervenants pour l'élaboration et la mise en œuvre d'un mécanisme qui permettrait aux agents des visas et aux établissements d'enseignement désignés de partager en temps réel des données sur les admissions et les décisions rendues relativement aux permis d'études.
Troisièmement, des points supplémentaires devraient être accordés dans le cadre du programme Entrée express au titre des études postsecondaires menant à l'acquisition de compétences techniques et professionnelles recherchées de manière à mieux suivre l'évolution des besoins du marché du travail canadien.
Quatrièmement, des services d'établissement devraient également être offerts aux étudiants étrangers désireux de faire leur vie au Canada.
Cinquièmement, il convient d'investir davantage dans la promotion du Canada comme endroit pour étudier, travailler et vivre, de telle sorte que les collèges et les instituts puissent accueillir des étudiants et de nouveaux candidats à l'immigration en provenance d'un plus grand nombre de pays.
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Merci, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du Comité.
Je suis ravie d'avoir l'occasion de contribuer à votre étude. Comme vous êtes nombreux à le savoir, l'OCASI est le conseil regroupant les organismes travaillant auprès des immigrants et des nouveaux arrivants ici en Ontario.
Il ne faut pas s'étonner des nombreux retards dans le traitement des demandes en provenance d'immigrants, de réfugiés, d'étudiants étrangers et de travailleurs migrants. Pour bon nombre de ces volets, il y avait déjà des retards avant la pandémie.
Dans tous les cas, il y a lieu de s'inquiéter de la situation des enfants à charge qui vont devenir majeurs et ne pourront plus être parrainés. Nous recommandons donc que l'âge de ces enfants soit pour ainsi dire gelé en date du 1er mars 2020 de telle sorte qu'ils demeurent visés par la demande présentée, peu importe le moment où le dossier sera rouvert.
Dans la plupart des cas, les proches au titre desquels une demande de parrainage a été approuvée ne peuvent toujours pas venir s'installer au Canada en raison des interdictions de voyage ou de la difficulté à prendre les dispositions nécessaires à cette fin. De nombreuses familles actuellement à l'étranger n'ont pas pu savoir ce qu'il adviendra lorsque leur visa d'entrée au Canada arrivera à expiration, ni de quelle manière et à quel moment un nouveau visa pourra leur être délivré. Nous recommandons à cet effet que toutes les dates limites pour l'établissement soient reportées au moins jusqu'à l'ouverture complète des frontières et à la reprise des voyages sans restriction, ou encore qu'IRCC accorde le droit d'établissement aux demandeurs étrangers par courriel, comme on commence à le faire pour ceux qui sont déjà au Canada. Ces gens-là pourraient ainsi venir s'établir dans notre pays à titre de résidents permanents, sans égard aux restrictions de voyage actuellement en vigueur.
Il y a aussi des retards dans le renouvellement des cartes de résident permanent. Certains résidents permanents dont la carte est arrivée à expiration sont ainsi bloqués à l'étranger sans espoir de pouvoir rentrer au pays. La majorité, si ce n'est la totalité, des ambassades sont encore fermées, et ces résidents permanents n'ont nulle part où aller pour obtenir de l'aide. Nous recommandons que le gouvernement du Canada diffuse un communiqué pour faire savoir aux résidents permanents se trouvant à l'étranger et à leurs proches qu'ils vont continuer à être considérés comme des résidents permanents même si leur carte est arrivée à expiration.
Par ailleurs, les niveaux établis par IRCC pour les membres de la famille d'un réfugié admis au Canada sont nettement insuffisants compte tenu du grand nombre de personnes en attente d'un regroupement familial. Étant donné ces niveaux trop faibles, les retards déjà accumulés dans le traitement des demandes et ceux qui s'ajoutent en raison de la pandémie, les gens vont devoir attendre encore plus longtemps pour une réunification familiale. Nous recommandons donc une hausse des niveaux totaux prévus pour les situations de regroupement familial des réfugiés.
Il y a des lacunes et des retards dans les communications en provenance du ministère. La seule information disponible est celle qui est affichée sur le site Web. Il s'agit de renseignements qui ne sont pas toujours clairs et qui ne traitent pas des situations particulières auxquelles les gens sont exposés en raison de la pandémie. Nous sommes conscients des efforts déployés par IRCC pour maintenir les gens au fait de la plupart des mesures qui sont prises, mais il n'en demeure pas moins qu'il faudrait communiquer des renseignements plus cohérents, clairs et complets pour faire savoir exactement quels services sont encore offerts dans nos bureaux d'immigration à l'étranger de même que dans les bureaux locaux. L'insuffisance des communications figure parmi les principales préoccupations dont nous ont fait part nos organismes membres et leurs clients. Nous croyons que le ministère devrait faire montre d'une plus grande souplesse et d'une compassion plus marquée étant donné la période difficile que nous traversons.
Je suis persuadée que vous recevez de nombreux courriels en provenance de conjoints parrainés. On nous parle de délais d'attente qui s'éternisent et peuvent même aller jusqu'à 28 mois, comme dans le plus récent courriel que j'ai vu ce matin même. Aucune information n'est fournie, et les personnes concernées veulent savoir quand leur conjoint ou leur conjointe pourra les rejoindre au Canada.
Pour ce qui est des parents et des grands-parents, nous nous réjouissons des annonces récentes du gouvernement qui va accélérer le traitement des demandes de parrainage du conjoint, permettre l'entrée au pays de membres de la famille étendue et assouplir temporairement l'exigence relative au revenu vital minimum.
La mise en place de ce revenu vital minimum et sa majoration de 30 % par la suite ont grandement compliqué les choses à de nombreux résidents canadiens. Tant et aussi longtemps que le Canada n'aura pas réussi à combler les déficits structurels existants et à mettre fin à l'inégalité des revenus, les Canadiens racisés, et plus particulièrement les immigrantes racisées, seront exclus de façon disproportionnée du processus de regroupement familial. C'est ce que nous pouvons observer depuis six ou sept ans.
C'est dans ce contexte que nous recommandons encore une fois la suppression du revenu vital minimum de telle sorte que le régime d'immigration soit juste et équitable...
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Comme je l'indiquais, nous revenons à la charge avec notre recommandation concernant le revenu vital minimum. J'ai fait valoir que la mise en place de ce revenu minimum et sa majoration de 30 % par la suite ont causé des difficultés considérables à de nombreux résidents du Canada. C'est le cas tout particulièrement des Canadiens racisés qui, comme nous le savons, sont généralement surreprésentés parmi les petits salariés et les gens à faible revenu, et qui ont été affectés de façon disproportionnée par la règle du revenu vital minimum.
Tant et aussi longtemps que le Canada n'aura pas comblé le déficit structurel et mis fin à l'inégalité des revenus, les Canadiens racisés — et les immigrantes racisées tout particulièrement — seront exclus plus souvent qu'à leur tour du processus de regroupement familial. Nous recommandons donc la suppression du revenu vital minimum de telle sorte que le régime d'immigration soit plus juste et équitable et qu'il s'inscrive davantage dans une approche féministe visant à contrer le racisme.
Nous nous réjouissons de la réouverture du programme de parrainage des parents et des grands-parents, mais le nombre de places prévu est insuffisant. De nombreuses familles attendent depuis des années d'être réunies de nouveau. Dans bien des cas, les parents et les grands-parents sont décédés et les enfants à charge sont devenus majeurs. Le plafonnement du nombre de parents et de grands-parents parrainés est injuste, contrairement au tirage au sort, et est lourd de conséquences pour les familles concernées. Nous recommandons donc que le maximum soit supprimé et que des ressources supplémentaires soient déployées pour le traitement des demandes de telle sorte que tous ceux qui souhaitent que leurs parents et grands-parents les rejoignent et qui satisfont aux critères puissent présenter une demande en sachant qu'une décision sera rendue dans un délai raisonnable.
Je vais m'abstenir de vous parler des étudiants étrangers, étant donné la présence parmi nous de mes collègues de Collèges et instituts Canada et d'Universités Canada.
Merci, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du Comité.
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Merci beaucoup, madame la présidente. Merci pour votre invitation à comparaître ainsi que pour cette étude que vous menez et pour le travail extraordinaire accompli par l'ensemble des parlementaires pendant cette période difficile.
Je veux tout particulièrement souhaiter la bienvenue aux députés qui en sont à leurs premières armes au sein de ce comité. L'immigration est bien sûr l'un des atouts concurrentiels les plus importants du Canada, et le travail de votre comité est essentiel pour que nous puissions continuer d'en bénéficier.
Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Wendy Therrien, notre responsable en matière de politiques et d'affaires publiques. Elle pourra répondre aux questions des membres du Comité.
Comme vous le savez peut-être, Universités Canada représente les 96 universités de notre pays. Considérées dans leur ensemble, les universités canadiennes forment une vaste entreprise de 38 milliards de dollars qui contribue grandement à notre prospérité économique. Les universités procurent de l'emploi à plus de 310 000 personnes. Elles sont souvent le principal employeur au sein de leur collectivité. Elles sont en outre de véritables pépinières de talents pour le Canada.
Je suis ravi d'être des vôtes en même temps que ma collègue, Mme Denise Amyot. Je souscris sans réserve à ses commentaires de tout à l'heure. Nous conjuguons nos efforts dans différents dossiers, notamment pour favoriser l'immigration et la réussite des étudiants étrangers.
Les universités canadiennes font partie intégrante de la démarche du Canada pour lutter contre la pandémie de COVID-19. Elles contribuent aux efforts pour atténuer les risques, trouver un vaccin et un traitement, et accélérer la reprise économique. Nous sommes conscients du défi qui attend le gouvernement — et qui nous attend tous — soit de relancer l'économie canadienne tout en maintenant les directives de santé publique nécessaires pour nous prémunir contre la COVID-19.
Nous sommes très reconnaissants au gouvernement d'avoir pris des mesures pour appuyer notre secteur en veillant notamment à ce que les étudiants étrangers puissent poursuivre leurs études, que ce soit en ligne ou en personne. Au moment où ces mesures entrent en vigueur, je tiens à souligner le rôle que les universités, et les étudiants étrangers plus particulièrement, pourront jouer pour faciliter la relance de notre économie après la pandémie.
Le Canada avait déjà besoin de recruter des immigrants compétents avant la pandémie. Compte tenu du vieillissement de notre population et d'une main-d'œuvre qui se raréfie, notre capacité à accueillir des immigrants de toutes les régions du monde est essentielle à notre prospérité future. En ouvrant leurs portes à plus de 200 000 étudiants étrangers par année, nos universités deviennent une composante importante du système d'immigration au Canada. Une fois chez nous, ces étudiants sont en mesure de tirer parti des voies gouvernementales vers l'immigration.
Nos établissements peuvent être des partenaires de premier plan pour le recrutement, la formation et le maintien au pays de travailleurs de talent. À tous les niveaux, les étudiants étrangers nous font bénéficier de nouvelles perspectives, d'idées différentes et d'un précieux réseau de relations personnelles à la grandeur de la planète. La contribution annuelle de ces étudiants à l'économie canadienne dépasse les 22 milliards de dollars.
Une fois diplômés, ils sont nombreux à faire profiter différentes localités canadiennes de leurs compétences spécialisées. D'autres retournent dans leur pays d'origine en sachant très bien ce que le Canada peut leur apporter en tant que société et en tant que partenaire d'affaires.
Les étudiants étrangers jouent un rôle crucial au sein de notre écosystème de recherche et d'innovation. Notre capacité à mener des recherches et à faire des découvertes susceptibles de renforcer notre économie est tributaire d'un apport constant de talents internationaux. Il faut noter tout particulièrement la contribution des étudiants étrangers des cycles supérieurs qui sont au cœur de nos efforts de recherche.
Cependant, comme Mme Amyot l'a souligné, la pandémie a rendu plus complexe le recrutement d'étudiants étrangers. Les mesures fédérales visant à permettre l'apprentissage en ligne pour les étudiants étrangers et assurer leur retour en toute sécurité au Canada ont été très utiles, mais il faut tout de même noter une diminution de 2 % des inscriptions d'étudiants étrangers dans nos universités cette année, alors que la croissance avait été en moyenne de 10 % au cours des cinq années précédentes. Même si les chiffres cumulatifs ne semblent pas si mauvais compte tenu des circonstances, il est important de souligner que 51 universités ont enregistré une baisse du nombre d'étudiants étrangers par rapport à l'an dernier. Parmi ces universités, 26 ont accusé une diminution de plus de 10 % et 14 une réduction dépassant 20 %. Il y a des répercussions non seulement pour les universités en question, mais aussi pour les marchés d'alimentation, les concessionnaires d'automobiles et les familles qui louent des chambres à ces étudiants étrangers. C'est une perte qui se fera ressentir pendant les quatre prochaines années tout au moins.
Il y a tout de même une bonne nouvelle. Étant donné la façon dont les choses se passent dans certains pays, l'image de marque du Canada demeure forte. Il y a eu des investissements fédéraux pour récupérer des marchés traditionnels ainsi que pour établir des relations avec des marchés émergents, comme le Vietnam et les Philippines. Grâce à ces investissements stratégiques, le Canada peut damer le pion aux pays qui sont en concurrence avec lui et consolider ses liens avec des sources importantes d'étudiants étrangers. Comme on le soulignait dans le discours du Trône, ces investissements vont faire en sorte que le Canada demeure une destination de choix pour les meilleurs talents. Ces étudiants étrangers, dont bon nombre sont aux cycles supérieurs, vont contribuer à notre économie et stabiliser la reprise dans le secteur de l'éducation postsecondaire.
Nous remercions tous les membres du Comité de leurs efforts pour aider le Canada à se remettre de la crise de la COVID-19, et nous serons ravis de travailler en partenariat avec vous pour bâtir un Canada plus fort.
Merci encore une fois de nous avoir invités à comparaître devant vous aujourd'hui.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je suis vraiment ravi de voir tous ces témoins parmi nous aujourd'hui. J'ai déjà croisé certains d'entre vous alors que je faisais partie d'autres comités. C'est le cas de M. Davidson notamment. Voilà plusieurs années déjà que nous nous voyons sur la Colline, et c'est la même chose pour Mme Therrien, et aussi pour Mme Amyot, bien sûr. Nous nous sommes vus lors de séances d'autres comités, mais voilà que je fais maintenant partie de celui-ci.
J'ai quelques questions qui sont assez pointues. Je suis pleinement conscient de l'importance que revêtent nos étudiants étrangers. Je me souviens du différend que nous avons eu à ce propos avec l'Arabie Saoudite en 2018. Selon les données de 2016, l'apport de l'Arabie Saoudite pour ce qui est des immigrants et des étudiants correspond sans doute à 10 % de celui de la Chine.
Mes questions ne seront peut-être pas faciles, mais j'estime nécessaire d'aborder ces enjeux. Nous avons des problèmes touchant Hong Kong, Huawei et les deux Michael. Ne craignez-vous pas des représailles de la part des Chinois? C'est un équilibre très fragile. Selon les chiffres les plus récents à ma disposition, nous avons accueilli quelque 150 000 étudiants chinois à court et à long terme en 2016. Je ne sais pas si vous pourriez nous dire, monsieur Davidson ou madame Therrien, où en sont rendus ces chiffres aujourd'hui. Je sais qu'il y a une certaine diminution dans le contexte de la pandémie et [Difficultés techniques] l'importance des étudiants en matière d'immigration, de revenus, etc.
Pouvez-vous nous dire ce qu'il en est exactement de nos relations avec la Chine? C'est une question très délicate.
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Je vais commencer, puis Mme Therrien pourra peut-être vous donner les plus récents chiffres quant aux inscriptions en provenance de la Chine. Au cours des 10 dernières années, le nombre d'étudiants étrangers inscrits a augmenté aussi bien pour les collèges que pour les universités. La Chine est une source importante, et l'Inde également. Pour les étudiants universitaires, c'est la Chine qui est la source principale.
Cela dit, nous cherchons depuis plusieurs années à diversifier nos pays sources et nous nous y employons très activement de manière à ne pas devenir trop dépendants d'un marché en particulier.
Il y a certaines différences entre l'Arabie Saoudite et la Chine dans ce contexte. Il y a notamment le fait que la plupart des étudiants chinois financent eux-mêmes leurs études, alors que les étudiants saoudiens bénéficient de bourses offertes par leur gouvernement. Il faut préciser que le Canada et la Chine reconnaissent tous les deux les avantages pouvant découler d'une circulation bilatérale des étudiants entre les deux pays.
Vous avez raison de dire que nous vivons une période de changement au niveau politique. Nous en sommes tout à fait conscients, mais nous savons également que les universités ont un rôle important à jouer lorsqu'il s'agit de garder ouverts certains canaux de communication alors que d'autres ne le sont pas nécessairement, et nous comprenons aussi que des liens interpersonnels peuvent se nouer et procurer des avantages à long terme à notre pays.
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Bienvenue au Comité. Ce sont là d'excellentes questions.
Étant donné toutes nos années de collaboration dans différents dossiers et le travail accompli de concert par toutes les parties en cause pour établir et consolider nos relations avec la Chine et augmenter l'apport d'étudiants chinois au Canada, je pense que nous avons tous à coeur de trouver des solutions adaptées aux réalités actuelles. La diversification de nos sources d'étudiants est l'une des pistes que nous explorons.
Nos universités prennent très au sérieux la situation à Hong Kong, car elles croient en la libre circulation des personnes et des idées. Il y a différents défis associés à cette conjoncture et au nouveau cadre législatif qui a été mis en place à Hong Kong.
Cela dit, nous voulons nous assurer d'aborder ces défis de façon prudente, calme et objective. L'approche du Canada relativement à ces questions et aux enjeux liés à l'immigration se démarque positivement du fait qu'elle est pour ainsi dire exempte de toute partisanerie politique. Nous nous réjouissons vraiment de pouvoir considérer dans une telle optique l'évolution de la dynamique des choses, des questions de sécurité et de tout le reste au sein d'un monde géopolitique en pleine restructuration.
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Je vous remercie beaucoup de la question. Cela me fait plaisir d'y répondre.
Nos établissements sont à l'écoute des employeurs de leurs régions de même que des organisations nationales qui représentent les entreprises et l'industrie. Tous parlent du manque de compétences. Nous savons que ce sera encore un problème au moment où nous entrerons dans la phase de reprise. Nous savons aussi que les immigrants constituent la solution pour remédier à cette situation, et les étudiants internationaux sont des immigrants idéaux, puisqu'ils connaissent la langue et ils ont étudié au pays. De plus, ils ont souvent eu une expérience de travail au Canada.
Je vais vous donner l'exemple du Cégep de Sherbrooke et vous montrer comment il travaille conjointement avec d'autres secteurs pour aborder cette situation. Ainsi, le Cégep de Sherbrooke a créé un partenariat avec huit MRC de sa région. Il s'occupe des étudiants internationaux sur le plan de la formation et du soutien aux étudiants, tandis que les MRC s'occupent du logement, des stages pour les étudiants et des emplois pour les diplômés internationaux.
Je pourrais vous parler du Cégep de Matane ou du Cégep de l'Abitibi-Témiscamingue, où l'on nous a dit à maintes reprises que s'il n'y avait pas d'étudiants internationaux, l'industrie environnante dans le domaine des mines serait dans une situation difficile parce que, souvent, les étudiants internationaux étudient dans des domaines que ne choisissent pas les étudiants nationaux.
Je termine en disant qu'il y a beaucoup d'avantages à encourager l'arrivée d'étudiants internationaux en plus grand nombre et à accélérer la régularisation de leur statut afin qu'ils deviennent des immigrants.
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Je vous remercie beaucoup.
Je remercie tous les témoins pour leurs remarques d'introduction.
Ma première question s'adresse à vous, madame Amyot. Vous avez parlé des problèmes liés à la fermeture des centres de prélèvement des données biométriques à cause de la pandémie de la COVID-19. Même avant la pandémie, j'entendais parler de ces problèmes, entre autres au Cégep de Saint-Jean-sur-Richelieu, au sujet de gens venant de l'île de la Réunion, où il n'y a pas de tels centres. Ce sont ces gens qui contribuent à atténuer le manque de main-d'œuvre dans le domaine biomédical, notamment. Nous voulons attirer ces étudiants et nous ne voulons pas que les programmes soient annulés faute d'inscriptions.
Une fois que la pandémie aura pris fin, les gens venant de pays où il n'y a pas de centres de prélèvement de données biométriques pourront-ils faire prélever leurs données biométriques ici?
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Vous mentionnez un point très sensible et très sérieux.
Tous nos membres nous parlent de ce problème en ce moment, qui touche en particulier certains pays francophones de l'Afrique. Il faut trouver une solution. Je sais que le ministère avait amorcé un projet pilote de système portable de biométrie. On ne sait pas ce qui en est ressorti parce que ce projet a été interrompu.
Pour les gens de ces pays, comment vous l'avez suggéré, on pourrait prélever leurs données biométriques quand ils arrivent au Canada. Je suis tout à faire d'accord avec vous. Nous observons une baisse, chez nos membres, du nombre d'étudiants internationaux. J'aimerais pouvoir dire, comme M. Davidson, que cette baisse est de 2 %, mais, pour nos membres, c'est beaucoup plus que cela. Cela vaut pour le printemps, l'été et l'automne. Et pour l'hiver, cela ne s'annonce pas mieux. Il faut donc trouver des solutions.
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Je vous remercie beaucoup.
Ma prochaine question s'adresse à vous deux, monsieur Davidson et madame Therrien.
Je vous ai entendu parler des cours en ligne, et j'aimerais mettre les choses en contexte. Les cours en ligne, c'est bien en temps de pandémie, mais ce n'est peut-être pas une solution à conserver en temps normal. Il y a, par exemple, le décalage horaire et le fait que certains cours ne sont pas reconnus par les autres universités. De plus, si nous voulons garder les gens ici, encore faut-il qu'ils soient déjà venus ici.
J'aimerais que vous me parliez de la pertinence des cours en ligne et de l'importance à leur donner en dehors de la pandémie.
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Je disais que l'objectif de chaque étudiant international est de venir au Canada.
Quant à l'immigration touchant les étudiants internationaux, la venue de ces étudiants au Canada fait partie de nos objectifs en tant que pays. Comme le disait M. Davidson, les études en ligne sont très importantes, justement, afin que les étudiants internationaux puissent commencer leurs études. Sans ce mode virtuel, nous aurions pu perdre toute la cohorte.
Cependant, il sera important de favoriser la transition de tous ces étudiants qui font des études virtuelles vers des études en personne, justement afin qu'ils puissent retirer davantage de leur expérience et que nous puissions le faire également.
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Certainement. Nous avons notamment essayé de faire valoir au gouvernement dans nos recommandations la contribution que les parents et les grands-parents apportent à l'intégration socioéconomique des familles. Les grands-parents tout particulièrement servent non seulement de pont avec la culture d'origine, mais offrent un soutien concret à la famille en lui fournissant sans frais des services de garde d'enfants. Leur rôle ne se limite pas à cela, car ils deviennent de véritables piliers pour la famille. C'est tout particulièrement important pour les femmes, car cela facilite d'autant leur participation au marché du travail. C'est une situation dont tout le monde sort gagnant: aussi bien les enfants que les parrains de même que leurs parents et leurs grands-parents qui peuvent ainsi retrouver leur famille.
En renonçant à exiger un revenu vital minimum, on permettrait à plus de gens de parrainer un proche. De plus, si on élimine le plafond concernant les parents et les grands-parents tout en déployant les ressources supplémentaires nécessaires pour traiter toutes ces demandes, on se retrouvera nécessairement avec un meilleur programme. Nous ne comptons plus les fois où des familles nous ont dit avoir attendu parfois plus de 10 ans sans même être capables... C'est le cas aussi bien avec le système de tirage au sort qu'avec, comme vous le savez, le plafond établi qui était atteint, avant la pause de 10 mois que nous avons connue, dès le 1er janvier en fin de journée. Ces familles n'arrivent jamais à soumettre leur demande, quand ce n'est pas le facteur chance qui les défavorise avec le système de tirage au sort.
Nous demandons seulement que le maximum soit supprimé de telle sorte que tous ceux qui veulent parrainer un proche puissent présenter une demande. Investissons ensuite dans les ressources nécessaires pour traiter ces demandes dans un délai raisonnable, car, tout bien considéré, ces parents et ces grands-parents ont bel et bien une contribution socioéconomique à apporter.
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Merci, madame la présidente.
Je vous souhaite la bienvenue, madame Amyot, madame Douglas, madame Therrien et monsieur Davidson. J'aimerais tous vous entendre sur ma première question.
Nous savons que les étudiants chinois subissent de l'intimidation sur les campus. Je crains que ce phénomène ne s'accentue. Le gouvernement a-t-il un plan pour prévenir cela? S'il y en a un à votre connaissance, nous vous serions reconnaissants de nous en aviser.
Je peux peut-être commencer par vous, monsieur Davidson.
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C'est une très bonne question. Merci beaucoup.
Comme je le disais, compte tenu des restrictions de voyage attribuables à la COVID et de la fermeture des ambassades, nous encourageons fortement le gouvernement à tourner le regard vers l'intérieur pour repérer les personnes sans papiers ou ayant un statut d'immigration précaire sur son territoire et à créer un mécanisme pour que leur statut soit régularisé.
Les services d'établissement sont prêts à jouer un rôle de mandataire. Nous savons que certaines personnes hésiteront à faire le pas à moins qu'on ne leur garantisse clairement qu'elles ne seront pas déportées avant d'avoir eu droit à un procès équitable. Nous nous attendons à ce que le gouvernement établisse des instructions claires, et comme je l'ai déjà dit, à ce qu'il travaille avec nos organismes communautaires, qui seront là pour aider ces personnes, mais aussi pour aider le gouvernement à les rejoindre.
Nous appuyons totalement le gouvernement dans sa décision de mettre l'accent sur l'immigration dans sa réponse économique. Cela a toujours été vrai. Ce sera toujours une solution pour le Canada, tant sur le plan économique que démographique.
[Difficultés techniques] dans nos centres de soins de longue durée [Difficultés techniques]...
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Nous en avons l'expérience au Canada. Je pense que le dernier programme de régularisation remonte au milieu des années 1980. Il avait connu énormément de succès.
Comme je l'ai déjà dit, il y a déjà bien des gens ici qui voudraient rester au Canada, y compris des participants au programme des travailleurs agricoles saisonniers qui font des allers-retours entre le Canada et leur pays depuis parfois 15 ou 20 ans. Il y a des personnes ici qui ont demandé le statut de réfugiés et qui sont toujours en attente. Il faudrait accélérer le processus pour eux. Il y a des travailleurs étrangers temporaires dans nos services de santé. Ils veulent eux aussi la résidence permanente. Il y a toutes sortes de soignants, comme nous en avons parlé un peu plus tôt avec Mme Kwan, qui voudraient voir leur statut régularisé.
Il y a beaucoup de gens qui sont déjà ici. [Difficultés techniques] grâce à un processus clair, avec l'appui des organismes communautaires, y compris des groupes confessionnels, je crois qu'il serait le temps pour nous de nous doter d'un programme de régularisation pour atteindre les cibles d'immigration annoncées récemment par le .
C'est ici que se termine l'audience de notre premier groupe de témoins.
Je remercie tous les témoins, particulièrement Mme Douglas. Je sais que vous deviez nous quitter, mais nous vous sommes vraiment reconnaissants d'être restée un peu plus longtemps avec nous.
Vous pouvez tous rester parmi nous, mais s'il y a des membres du premier groupe qui doivent nous quitter, ils peuvent le faire aussi.
Nous accueillerons maintenant notre deuxième groupe de témoins.
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Mon histoire est semblable à celle de milliers de Canadiens et deCanadiennes. Je m'appelle Emmanuelle Bergeron, et je n'avais pas prévu tomber amoureuse d'un homme vivant à l'étranger. Le 7 juillet 2017, j'ai rencontré M. Ernesto Davalos Urbizo. À partir de ce moment, j'ai voyagé le plus souvent possible pour construire notre relation. Les périodes de séparation étaient et sont toujours remplies de communications virtuelles chargées d'émotions.
En février 2018, j'ai été heureuse de lui annoncer une bonne nouvelle, à savoir qu'il serait papa. À l'aube de la quarantaine, je ne croyais plus ce rêve possible. Excités de voir nos projets d'avenir prendre forme, nous avons consulté une avocate pour demander un visa temporaire. L'objectif de la demande était qu'il puisse être présent à la naissance de notre fils. Nous avions prévu retourner à Cuba quand le bébé aurait deux mois pour que j'y passe mon congé de maternité. Cela nous donnait le temps de préparer la demande de résidence permanente, dans la catégorie du parrainage. Nous avons fourni toutes les preuves et tous les documents exigés. Or, en 2018, on nous a communiqué un refus aberrant qui invoquait l'alinéa 179b) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés.
À Varadero, le 11 juillet 2018, devant famille et amis, j'ai promis de chérir Ernesto, mais aussi de tout faire pour que notre famille au complet soit réunie sous le même toit. Quelques jours plus tard, nous avons reçu un deuxième refus pour une demande de visa de visiteur dont le but était qu'Ernesto puisse m'accompagner pendant la naissance de notre fils. J'étais enceinte de six mois et mon cœur de maman était brisé. Je ne pouvais plus retenir mes larmes au moment où j'ai dû encore une fois dire au revoir à mon mari à l'aéroport. C'est avec le soutien de ma famille et de mes amis que je suis rentrée au Canada, sans lui. Le gouvernement a refusé à mon mari le droit fondamental d'assister à la naissance de son fils sous prétexte qu'il avait des relations familiales ici, au Canada, et qu'il n'avait pas réussi à convaincre l'agent d'immigration qu'il retournerait dans son pays.
J'ai rempli, payé et déposé la demande le 30 juillet 2018. Mon fils Lucas est né le 1er octobre 2018, et son papa, Ernesto, l'a appris par vidéoconférence quelques minutes plus tard. Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, ou IRCC, a ouvert l'enveloppe de notre demande de parrainage le 28 novembre 2018. L'interminable attente venait de débuter. Pendant ces longs mois de silence de la part du ministère où il y a eu des demandes de mettre à jour les documents ou les formulaires, mon fils et moi avons voyagé. Ernesto a pris son fils dans ses bras pour la première fois alors que Lucas avait deux ans.
Le 28 juillet 2019, un an après le dépôt de la demande, nous avons reçu une convocation pour passer les tests médicaux ainsi que l'autorisation d'effectuer une demande de certificat de sélection du Québec, ou CSQ. En temps normal, la réponse à cette demande aurait dû être fournie en 25 jours ouvrables. Or, j'ai reçu le document le 4 décembre 2019, soit cinq mois plus tard. Un autre document qui retardait l'avancement de notre dossier.
Le temps a passé, les voyages se sont espacés et les ressources financières se sont épuisées. Après 18 mois d'attente, nous avons reçu une lettre d'IRCC nous demandant de prouver que notre amour était véritable, authentique et public. Un mois plus tard, soit le 8 février 2020, nous avons reçu la lettre de bienvenue au Canada. Nous avons pleuré de joie. Nous étions heureux et pensions que c'était terminé. Eh bien non! Le 19 mars 2020, nous avons reçu une autre lettre disant qu'ils avaient perdu les résultats des tests médicaux. J'étais fâchée. Mon époux avait subi ces tests à Trinité-et-Tobago le 26 août 2019.
Comme Cuba n'a plus de médecin désigné depuis que les services offerts à l'ambassade du Canada à La Havane ont été réduits, j'ai dû payer le voyage, qui n'était pas planifié dans mon budget. Cela m'a coûté environ 4 000 $. Depuis ce jour, j'ai envoyé à trois reprises le document justificatif transmis par la clinique, mais je vois très bien dans mon tableau de bord, sur le site d'IRCC, que cela n'apparaît pas. J'ai dû appeler la clinique où les tests avaient été effectués. La secrétaire m'a confirmé que les résultats étaient visibles dans le système informatique d'IRCC. Elle a renvoyé le tout par télécopieur et par courriel à Mexico. Qu'est-il advenu des résultats? Nous ne le saurons jamais, étant donné qu'IRCC ne nous répond jamais.
La COVID-19 a pris de court la planète entière et les frontières se sont fermées. Honnêtement, je suis épuisée. Je ne pense pas être assez forte pour vivre une autre séparation à l'aéroport. Au total, Ernesto a pu câliner, bercer et embrasser son fils pendant 15 semaines au cours des deux dernières années. Nous attendons depuis 27 mois. Nous avons fourni tous les documents exigés, nous répondons aux critères du CSQ et nous avons payé tous les frais.
La dernière fois qu'Ernesto a pris son fils dans ses bras, c'était le 5 janvier 2020, c'est-à-dire il y a plus de 315 jours. Je suis épuisée et au bord de la dépression. Je pleure chaque fois que mon fils de deux ans m'apporte le téléphone en disant « papa, papa » parce qu'il veut voir son père. Je pleure tous les matins parce que je suis loin de mon mari. J'ai le sentiment que le gouvernement m'a volé des moments vraiment précieux, qui ne reviendront jamais. J'ai dépassé le stade de la colère. Je veux crier à l'injustice lorsque je vois des visas délivrés à des personnes dont le dossier est plus récent que le mien et qui sont sans enfant. Le fait qu'un pays qui s'est construit sur les valeurs familiales nous abandonne de la sorte me dépasse.
Aujourd'hui, je parle au nom de toutes les femmes qui ont donné et qui donneront naissance à leur enfant sans leur conjoint à leurs côtés.
, , accepteriez-vous d'être loin de votre femme à un moment aussi important que la naissance de votre enfant?
Sur quels critères un agent d'immigration peut-il prendre la décision de refuser le droit fondamental d'un père de voir son enfant naître?
Nous sommes des milliers de familles canadiennes à vivre le manque de transparence, l'incohérence et l'injustice occasionnés par le pouvoir discrétionnaire des agents, qui nous maintiennent dans l'incertitude quant à l'avenir de notre famille.
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Madame la présidente, honorables députés, je vous remercie de me permettre de comparaître devant le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration cet après-midi.
Je m'appelle Jatin Shory, et je suis avocat spécialisé en droit de l'immigration et des réfugiés au cabinet Shory Law, qui est situé à Calgary, en Alberta.
Je vois que le Comité étudie actuellement les répercussions de la pandémie de COVID-19 sur le système d'immigration. Je pense que cette étude est un pas important dans la bonne direction et je présume que les membres du Comité ont déjà entendu diverses suggestions et perspectives depuis le début de cet exercice.
Cela ne fait que sept mois que le gouvernement canadien a commencé à annoncer des mesures importantes pour contenir et gérer la pandémie mondiale de COVID-19 en ces temps imprévisibles. Dans mon univers, celui de l'immigration, cela a commencé par des fermetures de frontières et des restrictions de voyage importantes, qui ont causé la séparation de milliers de familles. Au pays, le traitement des demandes a été mis sur la glace, et les audiences de divers tribunaux ont été mises sur pause.
Le rôle des avocats en immigration est donc devenu de rester à jour sur les diverses instructions du gouvernement et les annonces stratégiques, puis d'interpréter les décrets émis, parfois chaque semaine.
Au moment où la crise a éclaté, je venais tout juste d'avoir gain de cause devant la section d'appel de l'immigration, avec le consentement de l'avocat du ministre. Mon client avait parrainé sa femme, et sa demande avait été rejetée. Il était père de trois enfants, et sa demande familiale avait été refusée après un entretien avec sa femme auquel il n'avait même pas eu la chance de participer.
Après cette victoire, bien sûr, mon client était aux anges. Cependant, le dossier de sa femme était géré depuis le bureau du Haut-Commissariat du Canada à Londres. Puis la COVID a frappé, et son dossier est toujours au point mort aujourd'hui. Mon client a trois enfants avec sa femme, et pourtant, l'authenticité de son mariage était toujours remise en question. Il attend maintenant depuis près de trois ans que sa famille soit réunie au Canada.
La plupart des appels téléphoniques que j'ai faits ou des conseils que j'ai donnés au cours des premiers mois du confinement portaient essentiellement sur la manière de faire venir un conjoint au Canada, sur la réunion des conjoints et les raisons pour lesquelles on ne laisse pas une famille vivre en paix même si elle dispose de tous les documents dont le gouvernement dit avoir besoin.
Il est devenu évident que la réunification des familles, qui fait partie des objectifs de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, devait devenir une priorité. Cela m'a beaucoup marqué comme professionnel, et je continue d'observer les solutions que le gouvernement nous présente pour l'avenir de l'immigration au Canada.
La réunification des familles est une priorité pour de nombreux Canadiens et résidents permanents. Ils se mobilisent pour exiger une plus grande transparence sur les raisons pour lesquelles leur demande de réunification avec leurs proches est en suspens. Les médias en ont beaucoup parlé et continuent de le faire aujourd'hui.
Le gouvernement a réagi en confirmant l'allocation de ressources supplémentaires au traitement des demandes soumises depuis l'étranger. Je l'en félicite. Bon nombre de mes clients qui en sont aux dernières étapes du processus commencent maintenant à recevoir les passeports demandés. Cependant, qu'arrivera-t-il aux milliers de familles qui ont été retenues pour des entretiens, puisqu'on ne sait toujours pas quand les entretiens reprendront?
L'une de mes clientes a réussi à se sortir d'une relation très violente. Elle a un enfant issu de cette relation. Pour des raisons culturelles, elle a du mal à avoir l'indépendance et la confiance voulues pour avancer dans la vie dans ces conditions. Elle s'est trouvé un nouveau partenaire de vie et a su surmonter l'adversité à laquelle bien des femmes dans sa situation sont confrontées. On nous a dit qu'il y aurait des entretiens à l'été 2020. Manifestement, ce n'est pas arrivé, et ma cliente ne sait toujours pas quand elle pourra entamer le prochain chapitre de sa vie.
À une époque où le Canada commence à évaluer comment rendre son système de traitement des demandes plus efficace, tout en protégeant l'intégrité de chacun, il me semble impératif qu'IRCC saisisse l'occasion de retourner à la planche à dessin, pour réfléchir à la façon dont les demandes sont traitées à l'étranger et les candidats sont sélectionnés pour un entretien. Il est impératif qu'IRCC saisisse l'occasion pour envisager les réformes suivantes.
La première consisterait à accélérer le processus d'entretien et de demande et la seconde, à offrir un nouveau type de formation aux agents d'immigration afin qu'ils soient plus attentifs aux conditions physiques et mentales des demandeurs, ainsi qu'à leurs origines sociales et culturelles.
L'arriéré dans le traitement des dossiers aura nécessairement pour conséquence que des familles seront séparées pendant des périodes injustifiables à cause du système actuel. Il semble nécessaire de nous tourner vers des solutions électroniques en 2020; toutefois, certains des mécanismes en place pour la réunification des familles n'ont pas changé depuis des années: dépôt papier des demandes d'ordre humanitaire, des autres demandes de parrainage et même des demandes de permis de résident temporaire, puis exigence de signatures manuscrites.
On pourrait vraiment utiliser davantage la technologie dans le processus d'entretien. Les entretiens virtuels sont une solution à l'arriéré dans le traitement des demandes. Cette solution a été intégrée harmonieusement à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada. Si l'on peut faire une plus grande place à l'intelligence artificielle dans les divers centres de traitement des visas à l'étranger, pourquoi ne pourrait-on pas mettre en place une solution de ce type pour ces demandes aussi?
Le Canada est un chef de file en matière d'immigration dans le monde. Nous devons continuer à le démontrer pendant cette pandémie.
Je vous remercie encore une fois et vous invite à me poser des questions.
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Je remercie le Comité de m’avoir invité. C’est un privilège et un plaisir de représenter l’Alliance Canada Hong Kong en compagnie de Mme Chan.
Le sujet d’aujourd’hui va dans le sens des propos de M. Shory sur la rapidité et la souplesse dans le traitement des demandes du statut de réfugié ou d’immigration, entre autres. Bien que nous soyons ici en tant que groupe qui met l’accent sur les Hongkongais, les recommandations que nous faisons sont très proches des siennes et pourraient avoir une incidence générale sur la communauté des immigrants et réfugiés.
Historiquement, notre [Difficultés techniques] n’est pas très souple. Depuis l’an 2000, il y a eu trois périodes où le Canada a reçu un grand nombre de demandes, et chaque fois il a fallu plusieurs années à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié pour rattraper son retard et traiter ces demandes. En passant, c’est la même chose avec la dernière hausse du nombre de réfugiés, depuis 2016 environ, et notre système peine toujours à résorber l’arriéré.
Dans la foulée de la pandémie de COVID-19, les failles du processus continuent d’avoir des répercussions concrètes sur les personnes. Je consultais des données aujourd’hui et il était évident que, depuis mars 2020, environ 44 % de tous les demandeurs du statut de réfugié ont été aiguillés vers la Commission pour une date d’audience. Et c’est en comparaison à [Difficultés techniques] pour cent pour la même période l’an dernier. Même si nous sommes tout à fait conscients que la pandémie de COVID-19 a pu miner la capacité de traitement et de transfert des demandes du statut de réfugié, il faut comprendre que, dans tout cela, il y a des vies humaines. Ces personnes ne peuvent pas obtenir de permis de travail, ni obtenir un statut au Canada, ni accéder aux services sociaux. Elles sont toutes touchées par ces délais.
De même, cela empêche [Difficultés techniques] surtout les provinces, qui, à juste titre, doivent [Difficultés techniques] la vie des demandeurs du statut de réfugié en attendant le traitement de leur dossier.
En outre, les étudiants étrangers trouvent très difficile d’intégrer le système d’immigration économique canadien après l’obtention de leur diplôme. Les diplômés d’un programme constatent que [Difficultés techniques] étudier au Canada pour exceller dans leurs études et se trouver un travail par la suite ne sont pas en mesure, bien malgré eux et strictement en raison des circonstances économiques, d’accumuler les points nécessaires pour se qualifier au système d’immigration économique.
Et maintenant, nous aimerions faire plusieurs recommandations.
Premièrement, le Canada devrait concevoir un permis de travail postdiplôme de cinq ans qui s’inspire de celui adopté en Australie pour les Hongkongais. Ce permis permettrait aux étudiants étrangers au Canada qui sont diplômés ici de disposer de plus de temps pour obtenir l’expérience de travail nécessaire au pays.
Deuxièmement, pour les personnes qui fuient l’oppression ou qui viennent d’un pays où le régime tyrannise la population, comme c’est le cas à Hong Kong en ce moment, le Canada devrait leur offrir davantage de sécurité et, au besoin, l’accès au système de demande du statut de réfugié.
Finalement, il y a la transition vers un programme de visa temporaire. Actuellement, les demandeurs du statut de réfugié, les étudiants ou les travailleurs qui passent d’un permis à l’autre, mais dont l’expiration du permis survient entretemps… D’après un statut implicite qui est [Difficultés techniques] beaucoup d’employeurs [Difficultés techniques] les étudiants et les travailleurs eux-mêmes. Le nouvel [Difficultés techniques] offre un programme de visa temporaire qui, immédiatement sur demande de la prolongation du visa ou du changement de statut sur celui-ci, délivre un visa temporaire valide jusqu’à ce que le gouvernement remette au demandeur son nouveau permis de travail, d’études ou de séjour.
En outre, [Difficultés techniques] dans notre système d’immigration et d’accueil des réfugiés serait bénéfique tant sur le plan humanitaire [Difficultés techniques] que pour la gestion de notre système d’immigration et d’accueil des réfugiés.
L’aspect [Difficultés techniques] sera présenté par ma collègue, Mme Chan. Les délais dans le traitement des permis de travail, des permis d’études et des demandes du statut de réfugié ont une incidence réelle, causant du stress, des difficultés financières et l’incapacité d’accéder aux services sociaux.
Je cède le reste de mon temps à Mme Chan.
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Merci de me donner la parole aujourd’hui.
Je suis une étudiante originaire de Hong Kong, mais aussi une militante pour le mouvement démocratique. Je suis ici pour vous parler de mon expérience.
Nous savons tous que Hong Kong n’est plus un endroit sûr pour les militants étudiants. Toutefois, ici au Canada, les Tibétains, les Ouïghours et les militants étudiants de Hong Kong sont intimidés et harcelés par des partisans pro [Difficultés techniques]. Nous craignons que nos activités soient documentées et que cela puisse mener à de possibles poursuites contre nos familles et nous.
Nous espérons sincèrement que le gouvernement adoptera des mesures d’immigration et d’asile dès que possible. Il est stressant pour les étudiants étrangers et leur famille de gérer à la fois la COVID-19 et le système d’immigration canadien tout en craignant pour leur sécurité.
Je voulais revenir sur…
Je n’étais pas [Difficultés techniques]. J’ai remarqué en lisant [Difficultés techniques]. Même si j’estime que l’annonce est une première étape, elle est insuffisante.
Du point de vue de l’intervention humanitaire, puisqu’il s’agit bien de cela, je peux comprendre la volonté de [Difficultés techniques] pour des étudiants très qualifiés. Ici encore, je salue ces mesures, mais elles créent un grand vide pour les grands-parents et les membres de la famille étendue qui pourraient ne pas être admissibles ainsi que pour les personnes qui n’ont pas fait d’études postsecondaires récemment.
Je ne suis pas certain de la période exacte, mais je crois que pour être jugé nouveau diplômé dans le cadre de ces programmes, vous devez [Difficultés techniques] un programme au cours des cinq dernières années.
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Merci, madame la présidente, et merci à tous les témoins.
Mes questions s’adressent à M. Shory.
Monsieur Shory, je tiens d’abord à vous présenter mes excuses pour mon absence à votre mariage, même si votre tante Ronie, ma femme, était présente. Je vous souhaite, à votre épouse et vous, ce qu’il y a de mieux pour les années à venir.
Monsieur Shory, vu votre profession et le milieu dont vous venez, je suis persuadé que vous entendez la même chose que nous. Si nous reculons avant 2015 et nous rendons jusqu’en 2021, quand il est question des parents et des grands-parents, le nombre de demandes que nous pouvons accepter a été multiplié par 6, passant de 5 000 à 30 000 demandes, et nous avons augmenté l’âge maximal d’un enfant dépendant de 18 à 22 ans. L’an dernier, en 2019, le nombre d’époux, de parents et de grands-parents… cette catégorie constituait 27 % de l’immigration.
Pour ce qui est des temps d’attente, ils sont passés de plusieurs années à deux ans pour les parents et grands-parents, et de presque plus de deux ans à un an pour les époux. Telle est la réduction des temps d’attente. Pour réduire les temps d’attente, tant ceux accumulés au fil des ans que ceux dus à la COVID, nous allons traiter 49 000 demandes d’époux d’ici la fin décembre.
Monsieur Shory, j’aimerais connaître votre perception de ces progrès visant la résorption de l’arriéré qui s’est accumulé au fil des ans et en raison de la COVID, de même que vos commentaires sur le nombre de demandes que nous allons accepter.
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Monsieur Dhaliwal, je vous remercie de poser la question. Vous nous avez manqué au mariage, mais ne vous en faites pas pour cela.
Je vais parler d'abord des parents et des grands-parents, et ensuite des demandes de parrainage des conjoints.
Au sujet des demandes pour les parents et les grands-parents en ce moment, elles sont toujours acceptées, et c'est merveilleux. C'est merveilleux que la procédure soit encore... Le programme est toujours en place. Toutefois, c'est un peu difficile pour moi de comprendre. L'an dernier, nous avions la situation du « Premier arrivé, premier servi », et c'était assez clair, je pense... En l'espace de sept minutes, le portail a été complètement fermé. C'était très démoralisant aussi pour beaucoup de nos clients qui tentaient d'obtenir de l'aide. C'était très démoralisant pour ceux qui n'avaient pas une bonne connexion Internet, et ceux qui étaient plus lents au clavier que d'autres.
Je crois savoir également que le gouvernement a dû régler divers cas qui se sont présentés concernant les droits de la personne, alors je peux comprendre pourquoi il a décidé de revenir cette année au tirage au sort. Je pense que c'est un système qui, avant le programme de l'an passé, avait une certaine forme de cohérence basée sur les programmes précédents. Je crois qu'il y aura cette année 10 000 demandes ou formulaires d'intérêt pour le parrainage qui seront choisis, et je pense qu'il y en aura 30 000 l'an prochain. Je ne suis pas convaincu que ce soit dorénavant le meilleur système à utiliser.
Je sais que le Comité n'en est pas à sa première séance. Je sais que des collègues chevronnés vous ont fait diverses suggestions, par exemple, des systèmes de tirage au sort pondéré. C'est une option qui devrait sans doute être examinée de nos jours. Des clients nous ont même posé des questions à ce sujet lorsqu'ils sont venus nous parler des différents modes d'évaluation. Ce sont des gens qui attendent depuis cinq ou dix ans pour simplement parrainer leurs parents.
Au sujet des demandes de parrainage des conjoints, honnêtement, je ne comprends vraiment pas. Sur les 49 000 demandes traitées, combien seront acceptées? Quels genres de mécanismes et de mesures de protection sont en place pour évaluer le pouvoir discrétionnaire des agents des visas et leur façon d'examiner et d'évaluer l'authenticité du mariage ou le but premier de la demande? Le cas de Mme Bergeron n'est malheureusement pas unique. Nombre de mes clients m'ont raconté la même chose. Je suis curieux de savoir comment cela se passe.
Ce sont mes préoccupations ici aujourd'hui.
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Je vous remercie beaucoup.
Bon nombre de mes questions s'adressent à Mme Bergeron, puisque nous avons l'occasion d'avoir avec nous quelqu'un qui a vraiment suivi tout le processus.
Comme avocate, j'ai vu quelques dossiers. Cependant, madame Bergeron, je pense que cela vaut la peine de vous laisser vous exprimer sur ce que vous avez vécu.
Je commence par vous poser la question suivante: pour vous annoncer que les visas avaient été refusés, vous a-t-on envoyé une réponse générique ou une réponse expliquant pourquoi on avait pris en considération certains documents et d'autres non?
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C’était une réponse générique, qui mentionnait le fameux alinéa 179b) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés.
La demande de visa a été refusée aux motifs que mon mari avait des liens, ici, au Canada, et qu'il n'avait pas suffisamment d'argent dans son compte de banque. Cela était faux, parce que j'y avais déposé de l'argent afin de m'assurer qu'il y avait bien le montant exigé par le Canada. On m'a aussi dit qu'il n'avait jamais voyagé. On ne tient donc pas compte du fait que les gens de Cuba ne peuvent pas voyager. Ce sont les mêmes raisons qui sont mentionnées dans les deux lettres de refus.
Pour les besoins de notre deuxième demande, l'avocate a vraiment bien monté le dossier. Les billets d'avion avaient été achetés d'avance, tout avait été fait selon les exigences du Canada. Nous avions justifié qu'il faisait le voyage pour la naissance de son fils. Cela a été refusé.
Sur quoi un agent peut-il se baser pour empêcher un père de voir son enfant naître? C'est moi qui ai des milliers de questions à poser aux gens de l'immigration. Je ne comprends pas pourquoi vous avez empêché cela. Qu'est-ce qui se passe? Pourquoi un père ne peut-il pas voir naître son enfant?
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Il n'y en a pas. J'ai perdu confiance dans le système.
Quand je suis allée à l'ambassade, à La Havane, pour aller chercher le deuxième refus, j'étais enceinte de cinq mois et j'ai fait une crise de femme enceinte pour pouvoir entrer et parler à un agent.
Quand j'ai finalement réussi à rencontrer à un agent qui parlait un peu anglais, il m'a expliqué que ce qui n'était pas écrit était que mon dossier avait été refusé parce que je n'avais pas payé les droits liés à la demande de résidence permanente. Le montant de ces droits, qui s'élevait à 1 200 $, était le problème. J'ai répondu à l'agent que l'on empêchait mon mari de voir son enfant naître parce que je n'avais pas encore payé les 1 200 $, que je prévoyais payer sous peu, et que c'était pour cette raison qu'on refusait le dossier.
Il m'a répondu que c'est ce qu'ils mettaient comme note au dossier. Il m'a suggéré de déposer la demande de résidence permanente et, ensuite, de faire une demande de visa de visiteur. Je lui ai demandé s'il savait ce que cela coûtait chaque demande, et je lui ai dit que j'avais accumulé des dettes de plus de 10 000 $ liées à l'immigration. Cela comprenait tous les papiers à faire acheminer et les traductions. C'est incroyablement dispendieux.
Notre relation est beaucoup plus compliquée. Il faut le reconnaître.
À 40 ans, j'aurais peut-être voulu avoir un deuxième enfant. J'ai eu 41 ans il y a deux semaines et je suis rendue trop vieille pour cela. Le système d'immigration a fait en sorte qu'il n'y aura pas de deuxième enfant pour moi. J'ai 41 ans et, lorsque Ernesto arrivera, je serai trop vieille pour être enceinte de nouveau. En plus d'avoir essuyé le refus qu'il serait présent à la naissance du premier enfant, je n'en aurai pas d'autres.
Vous choisissez l'avenir des gens et vous avez un contrôle incroyable sur celui-ci, alors que les gens vivent dans l'incertitude. De plus, je ne sais même pas s'il arrivera ou pas, cet avenir.
Au sujet des gens de Hong Kong, le ministre a parlé en fait du regroupement familial. Comme on le sait, le regroupement familial se limite aux conjoints, ou aux partenaires si on veut, et aux personnes à charge, et s'applique de façon très limitée aux parents et aux grands-parents, et nous savons déjà que c'est le hasard qui décide. Qui plus est, ce n'est déjà plus une option pour l'année en cours, alors cela ne s'appliquerait pas à la situation des habitants de Hong Kong.
Nous avions autrefois un programme dans le cadre duquel les membres de la famille élargie pouvaient se parrainer entre eux. En fait, c'est ma tante qui avait parrainé ma famille pour qu'elle puisse venir au Canada.
Selon vous, le gouvernement devrait-il élargir le volet du regroupement familial pour ne pas le restreindre aux conjoints ou partenaires et aux personnes à charge, et permettre aux frères et sœurs et aux autres membres de la famille de se parrainer entre eux?
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Je vais maintenant passer au volet étudiants, le programme du gouvernement axé sur les étudiants, dont les conditions sont extrêmement restrictives. À titre d'exemple, les jeunes qui ne font pas d'études postsecondaires sont complètement écartés du processus.
Je sais que certains étudiants qui risquent d'être persécutés sont, en fait, de niveau secondaire et, naturellement, ils ne font pas encore partie du système d'éducation postseconaire, mais cela ne veut pas dire qu'ils ne feront pas l'objet de persécutions.
Selon vous, que devrait faire le gouvernement pour que ceux qui, comme les étudiants de niveau postsecondaire, risquent d'être persécutés puissent avoir accès et les moyens de venir au Canada pour y trouver asile?
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Je suis désolé d'apprendre ce qu'on vous a répondu au bureau de votre député. Je vous remercie à nouveau de nous faire part de votre expérience.
Je veux revenir encore une fois au regroupement familial. De nos jours plus que jamais, il est tellement urgent de réunir les familles, en particulier depuis que tant de groupes de défense des droits font un travail extraordinaire pour faire la lumière sur diverses situations, et aussi en raison de la pandémie et du système actuel.
Monsieur Shory, vous avez parlé des familles qui sont contactées pour des entrevues mais sans avoir une date précise. Mme Bergeron nous a parlé des conséquences concrètes de ces délais dans la vie personnelle des gens — anniversaires et vacances ratés, par exemple. La santé mentale et la santé physique sont très importantes en ce moment, et elles sont menacées par tous ces délais. Pouvez-vous nous parler des expériences vécues par d'autres personnes et des façons d'améliorer ces entrevues?
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Oui, bien sûr, et je vous remercie de poser la question, monsieur.
Brièvement, lorsque nous nous rendons à la section d'appel de l'Immigration, par exemple, pour faire appel d'une décision, nous avons un compte rendu. Je pense que tout devrait être enregistré, même dans les bureaux des visas. Je pense que cela aiderait beaucoup à simplifier et à clarifier où les problèmes se situaient lors de l'entrevue et cela permettrait aux gens comme moi et à l'avocat du d'en venir à un règlement plus rapidement.
De plus, je ne comprends pas pourquoi on n'utilise pas encore la technologie de vidéoconférence. Je dirais que 90 % de mes clients, en particulier ceux dont les conjoints qui les parrainent sont au Canada, n'ont tout simplement pas les moyens de se rendre à l'entrevue. Leurs témoignages et leurs opinions — qui auraient sans doute permis de clarifier certains problèmes — ne sont donc pas pris en compte.
Je pense que ce sont là deux réponses rapides et évidentes qui pourraient rendre le processus plus efficace et favoriser le regroupement des familles. Noël arrive à grands pas, et beaucoup de familles... Je viens tout juste de célébrer le Diwali la fin de semaine dernière avec ma famille, et je ne peux pas imaginer à quoi cela ressemblerait de ne pas pouvoir le faire avec les membres de ma famille si j'étais dans une situation comme la leur.
Ce ne sont là que deux petites solutions qui existent et qui sont vraiment simples à mettre en œuvre.
:
D'accord. J'espère que vous avez lu les instructions qui ont été annoncées il y a deux semaines.
Je vous remercie tous encore une fois de votre témoignage.
[Français]
Madame Bergeron, je vous remercie de votre témoignage aujourd'hui. Je suis contente de l'avoir entendu.
[Traduction]
Monsieur Falconer, un des facteurs qui nous ont incités à opter pour ces mesures à l'égard des Hongkongais est le fait que les demandes de permis de travail et d'études ont beaucoup augmenté avec le temps. Nous avons choisi de renforcer ces avenues que les Hongkongais utilisent déjà. En plus de leur offrir la possibilité de devenir résident permanent, nous leur offrons aussi ce qu'on appelle une aide parallèle.
Avez-vous pu constater que les responsables de l'immigration utilisent ces nouveaux moyens pour aider les gens de Hong Kong? Avez-vous d'autres solutions à proposer?
:
Très brièvement, j'examinerais ce que nous faisons ici au Canada pour aider les Hongkongais et les autres personnes qui se trouvent actuellement au Canada et qui risquent de perdre leur statut.
Pour l'heure, le Canada n'offre qu'un programme de permis de travail postdiplôme d'une durée de trois ans. Compte tenu des circonstances économiques actuelles et de la situation incertaine à Hong Kong, il y a de bonnes raisons d'en proposer une prolongation pour instaurer un processus de délivrance de permis de travail postdiplôme de cinq ans, semblable au modèle australien.
Par ailleurs, nous pourrions adopter la politique de visa provisoire de la Nouvelle-Zélande. À l'heure actuelle, lorsqu'une personne demande une prolongation ou un changement de son statut d'immigration et que son permis expire entretemps, elle aura alors ce que l'on appelle un statut implicite; autrement dit, la personne se trouve au Canada avec un statut, mais il n'y a pas nécessairement de preuve tangible au dossier. En Nouvelle-Zélande, lorsqu'une personne se trouve dans une telle situation, le gouvernement néo-zélandais lui délivre automatiquement un permis provisoire sur support papier qui fournit une preuve à l'employeur, à la personne elle-même, etc.
C'est donc ce que j'envisagerais de faire ici au Canada: prolonger la durée du permis de travail postdiplôme et aider ces personnes à trouver un travail qui leur permette à la fois de gagner leur vie et de faire augmenter leurs points d'admissibilité à long terme pour le système d'immigration économique et, en dernier recours, cela leur donne aussi la possibilité de présenter une demande de statut de réfugié, au besoin...
:
Je vous remercie beaucoup.
Ma question s'adressera à M. Falconer.
J'aimerais poursuivre sur ce que Mme Kwan avait commencé à aborder.
Je vais faire un parallèle. M. Carles Puigdemont, un élu catalan, s'est vu refuser son autorisation de voyage électronique parce qu'il s'était fait arrêter pour avoir participé à l'organisation d'un référendum purement politique. Les gens de Hong Kong, quant à eux, peuvent aussi être arrêtés parce qu'ils manifestent sur un sujet politique, soit la loi sur la sécurité nationale.
J'aimerais avoir vos commentaires, monsieur Falconer. Y a-t-il une crainte que les gens de Hong Kong ne puissent pas obtenir leur autorisation de voyage électronique? Les mesures annoncées par le gouvernement pour aider les gens qui sont présentement à Hong Kong sont-elles plus symboliques qu'effectives?
:
C'est la devise de 2020.
La réponse à la première question est oui. En ce qui concerne l'interdiction de territoire, la possibilité de se voir refuser l'entrée au Canada pour avoir participé, disons, à une émeute, au sens où pourrait l'entendre un autre gouvernement, constitue vraiment un sujet de préoccupation pour la communauté de Hong Kong. Beaucoup d'autres personnes dans le monde [Difficultés techniques] finissent par être accusées parce que leur gouvernement estime que leur activité politique contrevient à leurs lois.
C'est l'une des mesures que nous envisageons d'une façon plus générale, car tous les pays n'auront pas la même interprétation de ce qu'est une participation politique illégale, que ce soit à Hong Kong ou ailleurs. Nous avons un précédent en vertu duquel nous jugeons une activité criminelle en fonction de nos propres définitions. Par conséquent, les activités qui se déroulent à Hong Kong ne seraient pas retenues contre les gens.
La deuxième réponse...
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Merci beaucoup, madame la présidente. En fait, j'aimerais m'adresser à M. Shory pour un instant.
Nous avons parlé de la question de la double intention et de l'information publiée sur le site Web. À vrai dire, quelqu'un de mon bureau a téléphoné à la Direction des demandes de renseignements ministériels et a parlé à un agent. Ce dernier a affirmé qu'à sa connaissance, il s'agit essentiellement d'une note de service interne rédigée par IRCC. On y fournit des précisions pour aider à interpréter la notion de double intention, mais ce n'est pas considéré comme une politique proprement dite. Il s'agit plutôt d'une pratique recommandée et d'un guide pour comprendre ce qu'est la double intention, mais ces instructions ne sont pas là pour aider à prendre une décision. Au bout du compte, c'est à l'agent de prendre la décision et c'est au demandeur de continuer à convaincre l'agent de son intention de quitter le pays à l'expiration du visa.
Voilà comment j'interprète cela, moi aussi, et je pense que vous êtes du même avis. S'il y a une interprétation ou une quelconque directive ou politique de la part du gouvernement, je crois que c'est incorrect.
Puisque tel est le cas, et compte tenu de l'expérience de Mme Bergeron et de nombreuses personnes comme elle qui restent coincées dans le système parce que le gouvernement et l'agent ne croient pas que leurs proches retourneraient réellement, que devrait faire le gouvernement, d'après vous? Devrait-il suspendre le recours au paragraphe 179b) afin que les gens puissent effectivement faire venir leurs proches au Canada? Devrait-il également mettre en place un programme ou une mesure spéciale à cette fin?
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Je vous remercie, madame Kwan, de la question.
Pour répondre rapidement à votre question précédente, j'ai eu l'occasion de lire les instructions à ce sujet, et j'approuve entièrement tout ce que vous avez dit aujourd'hui. En effet, il s'agit simplement d'une précision à propos d'une notion qui existe depuis très longtemps. Il n'y a rien de nouveau au sujet de la double intention, d'après ce que j'ai vu dans les instructions qui ont été publiées.
Pour ce qui est de la réponse à la deuxième question, je sais que les visas de fiancé existaient il y a longtemps. Je ne sais pas si c'est une solution dans le contexte actuel. Comme nous traversons une période sans précédent, je ne vois rien de mal à envisager des mesures comme les visas de conjoint ou les visas de résident temporaire.
Dans le même ordre d'idées...
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Madame la présidente, j'invoque le Règlement, moi aussi.
Lors de la séance d'aujourd'hui en particulier, nous avons eu beaucoup de difficultés techniques, si bien que nous n'arrivions pas à entendre clairement les gens. Je ne sais pas trop quel est le problème, mais nous ne pouvions pas vraiment entendre des bouts de phrases, même si nous avons pu en déduire le sens en reliant les idées entre elles.
Je crois que les éditeurs du hansard auront beaucoup de mal à reconstituer le tout. Ils vont devoir laisser des phrases incomplètes. J'aimerais donc savoir si nous pouvons envoyer les bleus du hansard, une fois prêts, aux témoins pour qu'ils puissent passer en revue ce qu'ils essayaient de dire aux fins du compte rendu. Ils pourront ensuite corriger l'information et compléter les parties qui n'ont pas été enregistrées, de sorte que nous ayons une représentation exacte de ce que nous cherchons à faire ici.
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Merci, madame Kwan, d'avoir soulevé ce point. Je vais en discuter avec le greffier et l'analyste pour voir ce que nous pouvons faire à cet égard.
Je tiens à présenter mes excuses à tous les membres du Comité, ainsi qu'aux témoins. Je pense qu'il y a eu des problèmes de connexion et d'écho, et nous avons parfois eu beaucoup de mal à comprendre ce qui se disait. J'en ai parlé au greffier du Comité, et notre équipe technique se penchera également là-dessus. Nous ferons de notre mieux pour nous assurer que ces problèmes ne se poseront plus lors de nos prochaines séances.
J'aimerais simplement signaler à tous les témoins que s'il y a quelque chose qu'ils souhaitent porter à l'attention des membres du Comité et qu'ils n'ont pas pu le faire aujourd'hui à cause des contraintes de temps ou des problèmes de connexion, ils pourront faire parvenir leurs mémoires au Comité à mesure que nous poursuivrons notre étude sur les répercussions de la pandémie de COVID-19 sur le système d'immigration.
Sur ce, je remercie tous les témoins d'avoir comparu devant le Comité et d'avoir fait preuve de compréhension et de souplesse. En raison des votes, nous n'avons pas pu commencer la réunion à 15 h 30. Je tiens à m'en excuser auprès des témoins. Merci d'avoir été si accommodants et d'avoir accepté de terminer après 17 h 30.
Là-dessus, nous allons clore la séance. Je tiens aussi à remercier tous les membres du Comité. Nous nous reverrons mercredi pour poursuivre notre étude.
La séance est levée.