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Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à la cinquième réunion du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.
La réunion d’aujourd’hui se déroule dans un format hybride, conformément à l’ordre adopté par la Chambre le 23 septembre 2020. Les débats seront disponibles sur le site Web de la Chambre des communes. La webdiffusion montrera toujours la personne qui parle plutôt que l’ensemble du Comité.
En ce qui concerne la liste des intervenants, la greffière du Comité et moi-même ferons de notre mieux pour maintenir un ordre des interventions consolidé pour tous les membres, qu’ils participent virtuellement ou en personne.
Aujourd’hui, le Comité se réunit pour étudier les répercussions de la pandémie de COVID-19 sur les femmes.
Avant de parler, veuillez attendre que je dise votre nom et, lorsque vous serez prêt à parler, cliquez sur l’icône du microphone pour activer votre micro. Tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
L’interprétation dans cette vidéoconférence fonctionne comme dans une réunion de comité ordinaire. Vous avez le choix, au bas de votre écran, de choisir l’anglais, le français ou le parquet, c’est-à-dire pour entendre la langue de l’intervenant. Lorsque vous prenez la parole, veuillez parler lentement et clairement pour les interprètes. Lorsque vous ne parlez pas, votre micro doit être en mode sourdine.
J’aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins du premier groupe.
De Bay St. George Status of Women Council, nous accueillons Sharon Williston, directrice administrative; de la Conference for Advanced Life Underwriting, nous recevons Cindy David, présidente du conseil d’administration; et de YWCA Canada, nous accueillons Maya Roy, directrice générale, et Anjum Sultana, directrice nationale, Politiques publiques et communications stratégiques.
Chaque groupe disposera de cinq minutes pour les remarques liminaires, et je vous interromprai gentiment après cinq minutes. Ensuite, nous passerons aux séries de questions. Je vais essayer d’être délicate, mais chaque membre disposera de six minutes pour la première série. Vous m’entendrez dire: « Votre temps est écoulé », et c’est ainsi que vous saurez que nous passons à quelqu’un d’autre.
Sur ce, nous allons commencer...
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Merci, madame la présidente.
Comme vous l’avez annoncé plus tôt, je travaille au sein du Bay St. George Status of Women Council en tant que directrice administrative. J’occupe ce poste depuis janvier de cette année. Ce fut certainement un baptême du feu à la mi-mars, lorsque beaucoup de choses ont changé ici à Terre-Neuve-et-Labrador.
Je voudrais décrire un peu la géographie de notre région afin que vous puissiez comprendre pleinement ce à quoi les femmes étaient confrontées avant la COVID et ce à quoi elles sont confrontées pendant la pandémie.
Je prendrai l’exemple des transports. Notre région n’est pas dotée d’un réseau de transport en commun. Les gens ont leur propre véhicule ou bien ils comptent sur les taxis ou sur la générosité de leurs amis et de leur famille pour se rendre où ils doivent aller.
La région est assez vaste. Sur la péninsule de Port au Port, pour accéder aux services dans notre région, il faut compter un peu plus d’une heure de route. Dans les régions plus éloignées, l’accès à un service de téléphonie mobile et à un service Internet fiable laisse beaucoup à désirer. Il y a de nombreuses régions où il n’y a aucun service pour ces deux moyens de connexion. Lorsque vous considérez l’isolement, vous constatez qu’il aggrave encore la situation. Ces facteurs, bien sûr, ont une incidence énorme sur la possibilité d’accéder aux soutiens communautaires depuis la COVID-19. Nous avons fait de notre mieux pour continuer à fournir des programmes par le truchement de Zoom et d’autres plateformes Internet. Nous nous sommes également rendues dans une collectivité à quelques reprises pour offrir des ateliers en personne, mais à un tarif réduit, il va sans dire.
Ce que les femmes nous disent et que nous observons, c’est que les effets de l’isolement ont été l’une des choses les plus difficiles. Pour les femmes qui vivent seules, l’incapacité de se connecter aux services communautaires et de se réunir en groupe a eu une incidence profonde sur les niveaux d’anxiété et de stress qu’elles ont connus. Dans la mesure du possible, nous avons pu nous associer à d’autres organisations pour leur fournir des téléphones cellulaires, des tablettes et autres, afin qu’elles puissent se connecter par Internet ou par téléphone cellulaire. Une fois de plus, les femmes qui vivent dans des régions où ces services ne sont pas disponibles sont profondément isolées.
Du jour au lendemain, beaucoup de femmes sont devenues les enseignantes de leurs enfants à domicile. Le niveau de stress a atteint des sommets pour de nombreuses femmes parce qu’elles travaillaient de chez elles, enseignaient à leurs enfants et essayaient d’assurer le niveau de propreté requis par la COVID-19 pour toute personne qui entrait dans la maison ou en sortait. Elles devaient jouer tellement de rôles qu’elles avaient l’impression de ne pouvoir rendre justice à aucun d’entre eux.
Encore une fois, si l’on considère ce niveau de stress et ce niveau d’anxiété, on constate une augmentation du nombre d’aiguillages vers divers services de soutien tels que le Consumers' Health Awareness Network of Newfoundland, l’Association canadienne pour la santé mentale, et les services de santé mentale et de toxicomanie.
On constate que, dans notre province, la GRC et la Force constabulaire royale de Terre-Neuve, la RNC, ont signalé une diminution réelle du nombre de cas de violence familiale. Cela ne signifie pas qu’il y ait eu une diminution des cas. Souvent, il n’était pas sécuritaire de les signaler. Il est très difficile de passer ces appels téléphoniques en étant isolé avec son agresseur. De plus, comme de nombreux propriétaires ne louaient pas à de nouveaux locataires pendant les premiers mois de la pandémie de COVID, le manque d’accès à des logements abordables a encore aggravé la situation.
Ce que nous avons vu ici, dans notre secteur, c’est que beaucoup de femmes s’installent chez des amis et des membres de leur famille, donc ces chiffres sont cachés par rapport au nombre de femmes qui quittent effectivement ces relations à long terme. Nous avons remarqué une augmentation du nombre de femmes qui quittent des relations de 15 ans ou plus et qui recommencent à zéro. Nous voyons ces chiffres à travers le nombre de demandes que nous avons reçues pour des trousses de démarrage à domicile et des meubles, et d’autres recommandations par l’intermédiaire de Newfoundland and Labrador housing ainsi que de notre travailleur de soutien au logement du Community Education Network, par exemple. Nous savons que les chiffres sont là et qu’ils augmentent dans les faits.
En ce qui concerne l’insécurité alimentaire, Food First NL avait signalé plus tôt cet automne que le coût des denrées alimentaires dans notre province avait augmenté d’environ 22 %...
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Bonjour et merci, madame la présidente, mesdames les vice-présidentes, et mesdames et monsieur les membres du Comité.
J’aimerais commencer par reconnaître que je me trouve sur le territoire non cédé des peuples salish du littoral, y compris celui des peuples Musqueam, Squamish et Tsleil-Waututh.
Je suis la présidente de la Conference for Advanced Life Underwriting. Vous vous demandez peut-être ce que cela signifie. Nous représentons essentiellement une grande partie du secteur des services financiers. Nous sommes la seule association professionnelle qui se consacre au leadership, aux solutions de planification avancée et à la défense des intérêts pour promouvoir la santé financière des Canadiens. Nos plus de 600 membres représentent les meilleurs conseillers en assurance et en finances, ainsi que des experts en comptabilité, en fiscalité, en droit et en actuariat.
Notre industrie a toujours été dominée par les hommes, mais les choses sont en train de changer. Nous avons constaté une augmentation du nombre de conseillères, qui est passé de 11 % à 13 % il y a huit ans, selon la partie du secteur que vous regardez, à 18 % environ. Bien que nous ayons encore du chemin à parcourir, les femmes sont clairement en bonne voie pour devenir des leaders dans notre secteur. Ma nomination cette année en tant que troisième femme présidente de notre organisation en près de 30 ans constitue un encouragement supplémentaire à cet égard, tout comme la présence de trois autres femmes au sein de notre conseil d’administration.
Nous sommes préoccupés par l’avancement des femmes dans les services financiers en général. Vous entendrez beaucoup de témoignages sur les effets démesurés de la pandémie sur les femmes, mais ce sont les nombreuses femmes qui commencent dans le commerce de détail, l’hôtellerie et les soins de santé — qu’elles soient clientes ou qu’elles essaient de percer dans le secteur des services financiers —, qui ont été les plus touchées.
En raison des secteurs de l’industrie dans lesquels les femmes ont tendance à travailler, elles ont dû continuer à travailler en dépit des risques pour leur santé et celle de leur famille afin que le reste d’entre nous puisse avoir accès aux services essentiels. En outre, les femmes se taillent la part du lion en matière de garde d’enfants, d’enseignement à domicile et de soins aux personnes âgées, autant de besoins qui se sont manifestement intensifiés pendant la pandémie.
Il ne fait aucun doute que les femmes ont été les plus durement touchées, en particulier celles qui ont un emploi précaire ou qui gagnent peu d’argent. Elles sont les moins à même d’amortir les effets de la pandémie et de s’adapter pour la surmonter.
Parallèlement, il est important de reconnaître les répercussions de la COVID-19 sur l’avancement des femmes dans l’ensemble de l’économie. Une étude récente que nous avons menée avec la Conference for Advanced Life Underwriting, la CALU, a révélé que nos membres féminins ont eu une influence bien plus importante sur leurs entreprises que nos membres masculins. Ces femmes comptent parmi les conseillers les plus expérimentés et les plus performants du Canada, mais elles sont également touchées par un déséquilibre entre les sexes qui fait que la garde d’enfants, l’éducation à domicile et les soins aux personnes âgées leur incombent de manière disproportionnée. C’est vrai pour les gens de notre secteur comme pour nos clientes.
Nous sommes très favorables à l’éducation des femmes en matière d’investissement et de création d’entreprises prospères. Nous aimerions voir beaucoup plus de femmes créer de nouvelles entreprises prospères qui leur permettent de réaliser leur potentiel de création, d’innovation et de croissance économique. C’est également vrai pour nos jeunes. Nous voulons nous assurer qu’en plus de prendre soin des femmes alors que nous essayons de survivre à cette pandémie et de réussir, nous pensons à la deuxième génération de jeunes femmes que nous aimerions former, faire évoluer et encourager afin qu’elles puissent jouer un rôle important dans l’économie des entreprises.
Tout le monde remarque le coût de la garde d'enfants. C'est un obstacle majeur à l'avancement des femmes. Il en va de même pour les soins aux personnes âgées. Une stratégie nationale pour les personnes âgées est à notre ordre du jour depuis un certain temps déjà. Nous pensons que la prise en charge des personnes âgées permettrait à une grande partie de la main-d'œuvre féminine de travailler et de contribuer à l'économie.
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Merci, madame la présidente, mesdames les vice-présidentes et mesdames et monsieur les membres du Comité.
[Français]
Je m'appelle Maya Roy et je suis la PDG de YWCA Canada.
[Traduction]
Nous sommes la plus grande et la plus ancienne organisation de promotion de l’égalité des sexes au Canada. Nous travaillons avec 300 collectivités dans neuf provinces et deux territoires, avec 34 refuges sur le terrain et 2 000 unités de logement abordable.
En ce qui concerne les répercussions de la pandémie, les témoins précédents ont parlé avec beaucoup d’éloquence du manque de transport et de l’absence d’accès à Internet.
Dans nos refuges, nous avons constaté une augmentation de la demande de 20 % à 40 % dans tout le pays. Nous avons également constaté une augmentation de la traite des personnes et des cas d’exploitation sexuelle dans des collectivités comme Niagara, St. Catharines et Halifax. Nous avons aussi observé un changement très inquiétant dans les collectivités rurales, isolées et nordiques. Par exemple, en raison du manque d’accès à Internet, nous avons vu des agresseurs refuser l’accès aux données ou au téléphone à des femmes et à des personnes de sexe différent dans le cadre de la pandémie. Comme l’ont déclaré les témoins précédents, le fait d’être confiné avec son agresseur peut être une condamnation à mort.
Un autre problème que nous avons parfois observé est celui des mesures et des messages contradictoires en matière de santé publique. Par exemple, dans les Territoires du Nord-Ouest, on demande aux femmes qui fuient la violence de s’adresser d’abord aux services de santé publique avant de quitter une relation violente et on leur demande d’appeler un numéro de téléphone. Lorsque notre personnel de première ligne a communiqué avec ce numéro de téléphone particulier, l’absence de réponse tenant compte du traumatisme, le manque de formation, signifiait que les fonctionnaires du gouvernement n’avaient pas nécessairement les compétences d’évaluation nécessaires pour aider une femme à établir un plan de sécurité. Nous étions très inquiets.
Dans les messages de santé publique, il est très important d’adopter une approche sexospécifique qui tient compte des traumatismes, d’autant plus que la violence fondée sur le sexe est à la hausse dans tout le pays. Les Nations unies qualifient cette situation de pandémie fantôme.
La pandémie nous a également donné l’occasion, en tant qu’organisation féministe, de commencer à innover et à mettre à l’essai de nouvelles solutions. Par exemple, des entreprises technologiques telles qu’Uber sont intervenues pour fournir des transports en nature aux travailleurs essentiels ainsi qu’aux femmes quittant des relations violentes pour se rendre dans les refuges. C’est très important si nous n’investissons pas dans les transports en commun dans tout le pays.
Nous nous sommes également associés à l’organisation d’aide humanitaire GlobalMedic et avons travaillé avec elle pour utiliser FedEx afin d’envoyer du désinfectant pour les mains dans les refuges de l’Arctique. Comment pouvons-nous demander aux membres des communautés de se distancier physiquement ou de se laver les mains régulièrement si plus de 60 % des réserves n’ont pas accès à l’eau courante ou à l’eau potable? Nous avons vu les Canadiens se mobiliser, et ils souhaitent travailler avec nous afin de trouver des solutions.
Nous avons également établi un partenariat avec la Rotman School of Management de l’Université de Toronto pour commencer à élaborer un cadre autour d’une reprise économique féministe.
Je voudrais maintenant céder la parole à ma collègue, Mme Anjum Sultana. Elle est la coauteure du document A Feminist Economic Recovery Plan for Canada.
Merci.
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Merci beaucoup à tous les intervenants d'aujourd'hui. Je ressens le poids des répercussions de la COVID et de la pression psychologique sur le bien-être général, le mieux-être, des femmes. Je tiens à remercier tout particulièrement les femmes du YWCA. Au cours de mes voyages, j'ai séjourné dans différents hôtels et j'ai vu les programmes qui se déroulent dans ces espaces. Je suis très heureuse de savoir que c'est le cas. Je vous remercie beaucoup.
Le thème qui revient constamment dans vos propos est celui des répercussions de l'isolement. Il a une incidence très marquée sur les tensions relationnelles. En conséquence, en me fondant sur ce que vous avez décrit, je vais me pencher sur l'étape de transition et de rétablissement associée aux problèmes de santé mentale ainsi que sur la sécurité.
Ma première question porte sur l'aspect même de la santé mentale. Je sais que certains lieux de travail offrent des services de counselling et autres, mais si vous travaillez à la maison, vous vous occupez des enfants et vous n'avez pas de lieu de travail qui offre ce service spécial, comment accédez-vous aux soins de santé mentale? Quels sont les programmes qui fonctionnent pour elles et que pouvons-nous faire de mieux?
La question est ouverte à tout le monde. Merci.
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Merci beaucoup pour cette question très importante et pour votre soutien à YWCA Canada.
Oui, nous avons certainement constaté, non seulement en tant que fournisseur de services, mais aussi en tant qu’employeur, la pression de ce triple fardeau de soins exercé sur les femmes qui doivent s’occuper des enfants et des personnes âgées. Une des choses que nous avons pu faire, comme bien des femmes fournisseuses de services, est de travailler avec, par exemple, la Fondation Telus et d’essayer de transférer tous nos services en ligne.
Il est cependant très difficile pour de nombreuses organisations de bienfaisance de faire ce travail, car beaucoup d’entre nous qui recevons du financement gouvernemental ne sont en fait pas autorisés à mettre à jour nos ordinateurs. J’ai certains collègues au pays qui utilisent littéralement Windows 95, dont notre société de cybersécurité m’assure qu’il est inviolable. Cela étant dit, il ne permet pas nécessairement d’obtenir le soutien en matière de santé mentale dont les femmes ont besoin. Nous créons des espaces en ligne, mais je pense que, si possible, votre comité devrait travailler avec la fonction publique et le gouvernement fédéral pour continuer d’investir dans les soutiens à l’infrastructure informatique partout au pays. Comme nous le savons, c’est notre nouvelle norme. Avec l’isolement social, les femmes ont non seulement besoin d’un accès à Internet, mais elles doivent aussi avoir accès aux données et à la technologie pour même obtenir ce soutien en matière de santé mentale.
Par ailleurs, nous travaillons avec les responsables des espaces de travail, par exemple certaines coopératives de crédit, partout au Canada pour commencer à créer des coopératives de garde d’enfants afin d’examiner les moyens non seulement de fournir aux femmes des services de garde d’enfants sur leur lieu de travail et à leur domicile, mais aussi de leur permettre de bénéficier d’un soutien communautaire.
Je suis tout à fait d’accord avec le Comité pour dire qu’il s’agit d’une question cruciale et que des investissements supplémentaires sont nécessaires.
C'est une excellente question. Je dirais que nous appuyons pleinement la stratégie du gouvernement qui consiste à privilégier une économie axée sur la croissance ou la relance plutôt que la hausse des impôts. On dit toujours que les deux choses les plus stressantes dans la vie sont la mort et les impôts. Je dirais que les deux sont d'égale importance, mais je vais me concentrer sur l'aspect fiscal, puisque c'est la raison pour laquelle je suis ici.
J'ai jeté un coup d'œil à la Stratégie pour les femmes en entrepreneuriat, et c'est fantastique. On y trouve une foule de renseignements. C'est une bonne stratégie à tous les égards. Le seul bémol, je dirais, c'est qu'il ne reste plus de fonds. C'est fini. Le dernier dollar a été versé en 2019. Il y a toute une section du site Web... On y lit partout la phrase suivante: « Nous n'acceptons plus de demandes. » D'excellentes entreprises ont reçu de l'aide dans le cadre de cette initiative, et je dirais que nous avons besoin de plus de programmes de ce genre.
Il s'agit d'aider les femmes propriétaires d'entreprise, de les appuyer lors de leur déclaration de revenus et de simplifier le régime fiscal. Beaucoup de gens craignent de ne pas pouvoir payer leurs employés. Si vous êtes une femme propriétaire d'entreprise, vous vous inquiétez des frais généraux. J'ai dépensé 20 000 $ pour installer des systèmes informatiques et soutenir mon personnel. Peu de gens peuvent se le permettre. Que faisons-nous pour les aider à mettre plus d'argent dans leurs poches afin que leurs entreprises puissent prospérer et continuer d'employer des gens? Par ailleurs, que se passe-t-il dans une situation d'urgence? Tout le monde cesse d'apprendre. Comment pouvons-nous encourager les conseillères à poursuivre leur formation et même à aider les membres de leur équipe à parfaire leur éducation en cette période d'incertitude?
Nous faisons également face à beaucoup d'obstacles en raison des lois sur le transfert de richesses et le transfert de propriété des entreprises, ce qui rend... On nous incite à vendre une entreprise à un tiers plutôt qu'à un membre de la famille. C'est une des conséquences involontaires des lois fiscales, et nous devons nous pencher sur les dispositions législatives qui ne donnent pas les résultats escomptés et qui découragent les femmes d'affaires.
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Je vais répondre à la question. Malheureusement, le micro de ma collègue ne fonctionne pas.
La recherche dont vous venez de parler a été dirigée par des femmes nouvellement arrivées et racisées. L'un des principaux thèmes qui ressortent de cette recherche — et je suis sûre que cela ne surprendra personne —, c'est que le manque de places en garderie abordables et accessibles constitue l'un des principaux obstacles à l'accès au marché du travail pour les nouvelles arrivantes, les femmes racisées et celles qui s'identifient comme Noires.
Nous avons donc examiné de très près les recommandations d'un économiste québécois, Pierre Fortin. En étudiant les investissements faits au Québec, par exemple, après 10 ou 15 ans, M. Fortin a constaté que pour chaque tranche de 100 $ investie par le gouvernement du Québec dans des services de garde universels et abordables, non seulement les recettes fiscales augmentaient, mais les gouvernements fédéral et provincial récupéraient plus de 140 $ en impôts. Les taux de participation au marché du travail augmentaient également.
Ce que nous disent les femmes qui utilisent nos services sur le terrain, c'est que nous avons besoin de modèles différents pour appuyer des services de garde abordables dans tout le pays. Beaucoup de nouvelles arrivantes travaillent dans le secteur de la garde d'enfants, mais en raison de la façon dont les subventions sont structurées, le salaire des éducatrices de la petite enfance est si bas que de nombreuses femmes racisées et nouvellement arrivées qui exercent ce métier finissent par quitter le secteur. Le salaire n'est pas intéressant, et les risques pour la santé et la sécurité dans le contexte de la COVID n'en valent tout simplement pas la peine.
Le YWCA a mené récemment un sondage...
Comme Mme Roy l'a dit, les personnes les plus touchées par cette crise sont celles qui sont déjà marginalisées, comme les femmes appartenant à des minorités, les nouvelles arrivantes, les immigrantes et les femmes handicapées.
Cette crise nous a montré que l'ancienne façon d'aborder les choses n'est plus viable et ne suffit tout simplement pas. Il nous faut de nouvelles règles du jeu pour nous attaquer à la pandémie et à ses conséquences sociales et économiques. C'est précisément ce que fait le YWCA dans le cadre de son plan de relance économique féministe. Lancé à la fin de juillet, ce plan sert de point de départ et propose une feuille de route pour passer à l'action afin de bâtir une économie plus vigoureuse et plus résiliente dans notre intérêt à tous. Le plan contient plusieurs recommandations, dont la plus importante concerne la garde d'enfants, et c'est là-dessus que j'aimerais m'attarder aujourd'hui.
En plus de la recherche mentionnée par Mme Roy, nous avons observé qu'au Royaume-Uni, l'argent investi dans les soins crée 2,7 fois plus d'emplois qu'un investissement équivalent dans la construction. Cela se traduirait par 6,3 fois plus d'emplois pour les femmes et 10 % plus d'emplois pour les hommes. Lorsque nous parlons de l'absence de rémunération adéquate, comme l'a signalé Mme Roy, l'investissement dans les soins et la création d'emplois décents pour les travailleurs de ce secteur sera bénéfique pour nous tous.
Au Royaume-Uni, un investissement de 2,5 % dans le PIB national est susceptible de créer 1,5 million d'emplois. Je sais que le gouvernement a parlé de créer un million d'emplois. Il s'agit d'un petit investissement. D'après les recherches, l'investissement dans les soins va plus loin pour les familles, les collectivités, l'égalité des sexes et, oui, la relance économique du Canada.
Pour terminer, n'oublions pas qu'en temps de crise, ce sont souvent le secteur des soins et les collectivités qui nous tirent d'affaire. En matière d'égalité des sexes, nous devrions investir dans les organisations communautaires qui y contribuent. Le YWCA souhaite surtout des investissements dans les soins et les collectivités. Cela permettrait non seulement d'atténuer les répercussions à court terme de la COVID-19, notamment les répercussions sexospécifiques, mais aussi de nous mettre sur la voie de la réussite pour les décennies et les générations à venir.
Voilà ce que j'avais à dire, et je serai heureuse de poursuivre la conversation en répondant à vos questions.
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Pour les femmes des régions rurales, l'accès aux services communautaires est l'un des plus grands obstacles auxquels elles se heurtent. Permettez-moi de vous donner un exemple d'ici, à l'échelle locale.
Beaucoup de bénévoles de notre communauté sont des personnes âgées, et ce sont les plus vulnérables dans le contexte de la pandémie de COVID-19. De nombreuses personnes âgées s'occupent de notre banque alimentaire locale. À la mi-mars, la banque alimentaire a dû fermer ses portes pendant six semaines, jusqu'à ce qu'une autre organisation prenne le relais pour s'occuper de la disponibilité des denrées alimentaires. Autrement dit, des personnes très vulnérables n'avaient pas accès à une banque alimentaire pendant plus de six semaines.
Ensuite, on a décidé de changer de méthode en offrant un service au volant. Comme je l'ai dit plus tôt, ce n'est pas tout le monde qui a accès à un véhicule ici. Les personnes âgées devaient s'y rendre à pied, car les amis et les proches ne pouvaient pas les déposer en voiture. C'était en mars — à vrai dire, c'était en avril, mais les hivers ici durent pas mal longtemps. D'ailleurs, nous revoilà bientôt en hiver. Bref, nous avons travaillé avec d'autres organisations locales pour offrir un service au volant: ainsi, nous recevions des appels, puis nous demandions à des bénévoles de venir ramasser les paniers de provisions et de les livrer à domicile.
Ce n'est qu'un exemple des obstacles auxquels font face les gens.
En ce qui a trait à la santé mentale, nous faisons tout notre possible pour accroître les capacités au sein de nos collectivités. Je travaille avec l'Association canadienne pour la santé mentale, et nous allons bientôt offrir la formation safeTALK à plus de 50 personnes dans la collectivité. Il s'agit d'un cours sur la prévention du suicide. Nous allons également organiser deux séances de formation ASIST au cours des 60 prochains jours. Je travaille beaucoup avec Eastern Door Feather Carriers, un groupe de promotion de la vie qui examine les problèmes de santé mentale dans une optique autochtone pour aider les gens à surmonter certains de leurs problèmes de santé mentale.
Les répercussions sur les femmes des régions rurales sont attribuables à l'accès, mais nous essayons de trouver des moyens ingénieux, tout en collaborant avec différentes organisations, pour surmonter les difficultés.
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En ce qui concerne la relance, nous insistons sur la résolution des problèmes sexospécifiques, par les prêteurs en particulier, qui empêchent les femmes de financer leurs entreprises. J'ai moi-même connu des difficultés liées aux prêts bancaires, du point de vue tant des femmes que des hommes. Lorsqu'il y a tant d'incertitude, cela devient tout un problème.
Pour en revenir aux impôts, il faut améliorer le régime fiscal, qui a une incidence sur les petites entreprises. Nous savons que les petites entreprises sont l'épine dorsale de notre économie et qu'elles ont été particulièrement touchées par la pandémie.
Prenons un exemple très précis: le formulaire T2200 exige que tous les Canadiens concernés remplissent des milliers de pages, au lieu de leur demander de cocher une case. Simplifions la conformité, car chaque fois que nous faisons quelque chose, nous passons notre temps à franchir des obstacles, plutôt qu'à effectuer notre travail.
Autorisons les dépenses en capital, comme je l'ai mentionné, et l'installation de bureaux à domicile. Il y a maintenant une approche dynamique des affaires, en ce sens que tout le monde a dû rajuster le tir, et nous devons appuyer ces efforts d'un point de vue fiscal, en permettant des déductions pour les dépenses. Nous devons également encourager la continuité des activités afin que les gens puissent vendre leurs entreprises au lieu de les liquider.
Nous envisageons en particulier des mesures telles que l'exonération des gains en capital pour les petites entreprises ou même un nouvel impôt, comme un impôt sur le revenu fractionné. Depuis 2018, nous avons passé beaucoup de temps à parler de cette mesure législative extrêmement complexe. Simplifions-la pour que les gens puissent mieux comprendre comment ils peuvent respecter les règles et consacrer plus de temps à la productivité de leurs entreprises.
Comme je l'ai déjà dit, on dissuade les entreprises familiales de continuer à transférer la propriété de la première à la deuxième génération et ainsi de suite. C'est un grave problème qui touche vraiment les gens.
Avant la pandémie, la réduction des formalités administratives et la simplification de la conformité étaient, selon nous, des questions clés, et elles le seront encore plus après la pandémie.
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Merci, madame la présidente.
J'aimerais d'abord m'adresser aux membres du YWCA. Mesdames Roy et Sultana, j'ai beaucoup aimé le titre « La force de l'ambition ». Je m'accroche vraiment à l'idée que, bien sûr, le statu quo ne fonctionne pas et que nous devons le remettre en question. Nous devons changer les choses. Des idées audacieuses et courageuses nous permettront d'aller plus loin, comme cela a été le cas pendant la Seconde Guerre mondiale grâce à la création de régimes de pension, de régimes d'assurance-emploi, etc.
J'aimerais parler davantage de la nécessité de mettre en place des services de garde universels, abordables et accessibles. J'ai certainement examiné la proposition voulant que le gouvernement présente un projet de loi qui garantirait un tel régime dans l'ensemble du pays, à l'instar de la Loi canadienne sur la santé, par exemple, et qui assurerait l'égalité.
Chose certaine, le Québec en bénéficie déjà. Qu'est-ce que cela signifierait pour le reste du Canada?
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L'adoption d'une mesure législative fédérale sur le congé payé en cas de violence conjugale serait un énorme progrès. Comme beaucoup d'entre vous le savent, la violence fondée sur le sexe a des répercussions sur l'économie, ce qui se traduit par des pertes de plusieurs milliards de dollars pour de nombreuses entreprises, notamment celles avec lesquelles travaille Mme David.
En ce qui a trait au revenu minimum garanti, c'est certainement quelque chose que le YWCA est en train d'étudier. Nous surveillons les recherches et les données issues de certains projets pilotes menés au Canada, par exemple, dans le Nord de l'Ontario et en Colombie-Britannique, mais aussi dans d'autres pays, comme en Islande et au Danemark, pour nous renseigner au sujet des répercussions.
Nous savons également que la récession actuelle entraîne une augmentation des pertes d'emplois. Elle ne fera qu'accélérer les pertes d'emplois en raison de l'automatisation. Je pense donc, encore une fois, que la politique...
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Si je peux me le permettre, je voudrais ajouter quelques observations sur la question des garderies. Une des mesures que nous souhaitons, c'est l'adoption d'une approche nationale en matière de garde d'enfants, un peu comme la Loi canadienne sur la santé. Je pense qu'il s'agit d'un excellent modèle à examiner. Ce qu'il nous faut, ce sont des services de garde de qualité partout au Canada, même dans les collectivités rurales, éloignées et nordiques d'un bout à l'autre du pays. L'une des difficultés que nous avons constatées — et Mme Roy en a parlé —, c'est qu'il y a actuellement des problèmes de recrutement et de maintien en poste, si bien que nous sommes aux prises avec une pénurie. En effet, nous n'avons pas le nombre nécessaire de travailleurs en garderie. Par conséquent, on laisse tomber non seulement des collectivités, mais aussi des personnes.
Je crois fermement qu'une approche nationale s'impose. Cela permettrait d'apporter plus de clarté sur les normes, le perfectionnement de la main-d'œuvre et le recrutement de la relève. De nombreux économistes ont d'ailleurs signalé que nous entrons dans une période de croissance lente, ce qui signifie que tout le monde doit se montrer solidaire. Il faut éliminer tous les obstacles qui entravent la participation au marché du travail, et la garde d'enfants est l'un des obstacles les plus importants que nous ayons observés dans le cadre de notre travail.
En ce qui concerne la violence fondée sur le sexe, là encore, il y a un coût économique. C'est aussi une atteinte aux droits de la personne. Partout au pays, les gens de diverses communautés parlent de... En fait, il est impossible de parler de relance économique dans un climat de haine, de peur, de discrimination et de crimes haineux. Il faut nous attaquer à tous ces problèmes pour que nous puissions tous nous remettre sur pied — et, ainsi, éviter la reprise en « K » dont on a beaucoup parlé — afin qu'il n'y ait plus cette disparité, l'objectif étant de rebâtir en mieux.
Je vais m'arrêter là. Merci beaucoup.
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Je vous remercie. Pour gagner du temps, je veux tout de même m'assurer de remercier tout le monde.
Vous avez offert une multitude de points de vue pour notre étude. Le bien-être mental est un sujet très important, tout comme l'est l'isolement social des aînés. Le suicide est en hausse. Il y a eu dernièrement un cas triste à Vancouver: on a retrouvé, dans le parc Stanley, le corps d'une femme portée disparue, de la communauté chinoise, et qui souffrait de dépression. Cela a troublé beaucoup de gens.
J'en viens donc à ma question pour les témoins. Comment peut-on prévenir le suicide en cette période très difficile? Un de nos collègues a proposé la création d'une ligne d'assistance téléphonique 988, dotée de préposés ayant la formation nécessaire pour empêcher les personnes suicidaires de passer à l'acte.
Je lance la question à qui veut bien y répondre.
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Vous posez là une question très importante.
Je participe à différentes activités liées à la prévention du suicide, y compris la formation appliquée en techniques d’intervention face au suicide. Nous l’offrons aussi souvent que possible pour accroître la capacité au sein de nos collectivités. Nous cherchons ainsi à éliminer la stigmatisation associée au suicide. Les personnes ont donc ces endroits sûrs où parler du suicide, de leurs pensées suicidaires, et ne pas être jugés. Ils ont l’occasion de partager leur histoire avec quelqu’un qui les écoute et les rencontre là où ils sont. Oui, c’est excellent de pouvoir joindre ces personnes au téléphone, mais nous devons également avoir des personnes accessibles dans les collectivités pour offrir ce soutien.
Il y a différentes façons de procéder. La personne qui a suivi la formation appliquée en techniques d’intervention face au suicide peut contribuer à la désescalade de l’état de crise, si la personne projette de se suicider. Elle l’aidera ensuite à établir un plan de sécurité. En ce qui a trait à la formation safeTALK, elle est ouverte à toutes les personnes de 16 ans ou plus. C’est super de pouvoir inclure les jeunes. Ici encore, la formation permet de cerner quand une personne pourrait avoir des pensées suicidaires, de quelle façon lui poser la question difficile, soit: « Songes-tu au suicide? », et ce que l’on doit faire si la personne répond « Oui ».
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Merci, madame la présidente, et merci aux témoins d’être là.
Comme nous avons peu temps, je ne peux pas approfondir ces questions.
J’aimerais entendre Mme Williston ou Mme Roy sur les répercussions. Nous parlons beaucoup des répercussions sur les femmes et sur les personnes âgées, mais j’aimerais savoir quelles sont les répercussions de l’isolement sur les enfants qui vivent de la violence familiale, qui sont témoins de violence contre leur mère.
Quelles sont les répercussions sur les enfants? Est-ce que les enfants reçoivent la moindre aide psychologique pour gérer ces situations? La mère doit gérer ses propres problèmes, qu’ils soient psychologiques, affectifs ou physiques, dus à la violence ou aux mauvais traitements, et l’enfant est témoin de cela, mais elle doit aussi protéger son enfant.
Pouvez-vous nous éclairer un peu là-dessus? Je crois que c’est très important, car il s’agit des générations futures, et nous devons trouver une façon d’aider les enfants et de les protéger.
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D'abord, je remercie Mmes Williston, Roy, David et Sultana de leur présence.
Mesdames Roy et Sultana, je vous remercie d'avoir souligné le travail de l'économiste Pierre Fortin sur les services de garde au Québec.
Vous avez abordé différents domaines où les femmes sont disproportionnellement affectées par la pandémie. Vous avez vraiment relevé l'importance de faire avancer de nombreux dossiers pour favoriser une relance économique féministe, que ce soit la Loi sur l'équité salariale, qui n'est toujours pas appliquée, l'Internet, qui est reconnu comme étant un service essentiel tant pour les femmes que pour les aînés, l'accès à de l'eau potable dans les réserves autochtones, ainsi que la violence conjugale. Il faudra trouver des façons d'aider les femmes à sortir de ce cycle de violence.
En somme, quelle est l'importance d'inclure une analyse sexospécifique dans toutes les mesures qui seront prises pour la relance économique au sortir de la COVID?
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D’après les recherches ainsi que notre expérience sur le terrain dans 300 collectivités au pays, une relance est mathématiquement impossible si nous ne tenons pas compte des expériences et des besoins des femmes. Il faut mobiliser tout le monde. Le moindre obstacle, fondé sur le genre, la race ou l’incapacité, sera néfaste pour tous.
Je tiens à insister sur l’impossibilité mathématique d’avoir une relance économique si nous n’adoptons pas une perspective genrée et féministe.
Nous devons également commencer à mesurer ce qui compte. Chaque mois, je consulte les chiffres sur la main-d’œuvre et vérifie si les emplois reviennent à leur niveau d’avant la pandémie.
En outre, nous devons nous pencher sur la qualité des emplois. S’agit-il d’emplois permanents? D’emplois à temps plein? Offrent-ils de bons avantages sociaux et une rémunération convenable? La COVID amplifie les risques des personnes qui occupent un emploi précaire, car elles ne peuvent pas reprendre le travail ni être là pour leur famille, ce qui affecte toutes les collectivités.
Un autre aspect de ce phénomène est… J’apprécie vraiment l’accent que ce comité met sur la violence fondée sur le genre de même que sur le logement et l’itinérance, car, souvent, la relance économique ne se concentre que sur le PIB et les statistiques sur l’emploi. Nous constatons que, lorsque l’itinérance et la violence fondée sur le genre sont en hausse, la relance économique est bloquée. Quand on considère notre avenir collectif, il faut, compte tenu de la réalité sur le terrain, changer les mesures de la réussite utilisées afin qu’elles soient plus englobantes.
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Je peux vous en dire un peu, puis je céderai la parole à ma collègue, Mme Roy.
La cible de 33 % des investissements afin de soutenir des projets qui répondront aux besoins uniques des femmes et des filles est une des choses que nous sommes heureux de voir dans la Stratégie nationale sur le logement. C’est le genre de mécanisme qui nous permettra d’avoir davantage de maisons d’hébergement de deuxième étape.
Le problème, c’est que nous n’avons pas encore vu le plein déploiement de ces fonds. Ce que nous souhaiterions, c’est que tous les investissements, tout ce qui est lié au logement, comprennent cette perspective genrée, car, quand elle n’est pas là, on constate une hausse de l’itinérance cachée, comme l’ont mentionné certains témoins aujourd’hui. Souvent, il y a sous-représentation de l’itinérance, donc nous devons consciemment adopter cette perspective genrée.
Je cède la parole à ma collègue, Mme Roy.
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C’est une excellente transition vers notre prochain groupe de témoins.
Je tiens à remercier les témoins de ce groupe. Vous êtes fabuleuses.
Nous allons maintenant conclure et accueillir le prochain groupe de témoins.
Kate Tennier, porte-parole du Canadian Childcare Network, sera la première à prendre la parole.
Nous accueillons aussi Andrea Mrozek, de Cardus.
Vous aurez toutes les deux cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire avant que nous passions aux questions.
Madame Tennier, allez-y, je vous prie. Vous avez cinq minutes.
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J’ai un petit problème. Je porte des appareils auditifs et cela cause de la rétroaction acoustique. Je n’arrive pas à m’entendre. Je vais essayer de nouveau.
Je suis d’accord avec un point soulevé par Mme David. Il y a quelques années, j’ai lancé une association de quartier qui met l’accent sur les petites entreprises. Deux femmes formant un couple marié sont parmi nos propriétaires d’entreprises les plus appréciés. Ce qui les affecte le plus pendant la pandémie, c’est qu’elles n’ont plus les moyens de payer leurs employées. On parle de femmes qui aidaient des femmes. C’est quelque chose que je comprends tout à fait.
Mes observations s’adressent aux libéraux, qui essaient une fois de plus d’instaurer un système national de services de garde d’enfants pour les Canadiens, un système qui est aussi mauvais maintenant qu’il l’était l’année dernière et l’année avant cela. Je suis plutôt en faveur du renforcement du réseau de services de garde qui existe déjà au Canada, dans lequel les parents choisissent leurs services avec succès depuis 40 ans.
Les études en faveur d’un tel système que vous présentent vos conseillers triés sur le volet sont fondées sur des recherches menées il y a longtemps qui n’ont jamais soutenu leurs affirmations. Des groupes de réflexion réputés, comme l’Evidence for Policy and Practice Information and Co-ordinating Centre ou EPPI-Centre, de l’université de Londres, a déclaré que les politiciens et décideurs devraient arrêter de fonder l’élargissement de la prestation d’un ensemble de possibilités d’apprentissage, de soins et de développement pour la petite enfance sur des données anciennes, inexactes et décontextualisées quant à ses retombées économiques à long terme. James Heckman, lauréat du prix Nobel et expert de renom en matière d’analyse coût-avantage des services de garde, affirme avoir l’impression que les partisans de l’apprentissage précoce croient nécessaire de faire front commun, ce qui n’est qu’une illusion. Nous avons besoin de programmes qui se font ouvertement concurrence.
Pourquoi proposez-vous ce programme? Je vous pose la question parce que nombre de vos raisons sont gravement problématiques. Vous dites vouloir aider les femmes à faible revenu en particulier. Voulez-vous vraiment fournir des services de garde à ces femmes pour qu’elles puissent aller travailler au salaire minimum dans une chaîne d’alimentation qui refuse d’offrir assez de travail à temps plein et qui a éliminé la prime COVID, même si ses profits sont en hausse pendant la pandémie?
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Voyons si cela va aider. Je vais simplement continuer mon propos.
Dans le Discours du Trône, vous avez dit que la main-d’œuvre est d’accord et que vous voulez créer plus d’emplois. Vous ne voulez honnêtement pas utiliser des enfants de 2 ou 3 ans, c’est-à-dire les mettre dans un système non éprouvé simplement pour créer des emplois pour les adultes, qu’il s’agisse de construire des garderies ou d’y mettre des travailleurs. Vous dites que vous voulez favoriser l’égalité des femmes.
La Suède, où 91 % des jeunes enfants sont en garderie, a l’un des taux les plus élevés au monde de ségrégation selon le sexe lié au marché du travail. La chercheuse Patricia Morgan a écrit que, 20 ans après la mise en œuvre du réseau universel de garderies en Suède, la ségrégation selon le sexe de sa main-d’œuvre était supérieure à celle aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Allemagne. Elle est même supérieure à celle dans des pays asiatiques comme la Chine, voire à Hong Kong ou en Inde.
Même 30 ans après le déploiement du programme, l’OCDE a déclaré qu’il y avait encore un écart salarial important qui ne semble pas vouloir se résorber.
Ce phénomène du ghetto rose, qui a fait l’objet de nombreuses analyses partout dans le monde, mais qui n’est jamais mentionné par nos partisans de l’universalité, est le fruit de l’obligation pour toutes les familles d’envoyer les deux parents sur le marché du travail, laissant aux mères le soin d’assumer les emplois moins intéressants.
Il y a un autre point crucial. Vous dites que vous voulez fournir des soins et une éducation de qualité, surtout aux enfants canadiens qui sont le plus dans le besoin. Toutefois, un mémoire sur le financement des services de garde cosigné par Armine Yalnizyan, l’un de vos conseillers, propose d’envoyer les enfants de 4 et 5 ans à la maternelle à temps plein partout au pays, ce qui n’est pas une bonne idée. La mise en œuvre de celle-ci en Ontario n’a jamais été appuyée par un corpus d’études évaluées par les pairs. Il y a, toutefois, un fait incontestable: tous les enfants de 4 et 5 ans se sont soudainement retrouvés toute la journée avec un rapport élèves-enseignant de 2 à 15 fois pire que celui qu’ils auraient eu en dehors des demi-journées scolaires.
En tant qu’enseignante spécialisée au primaire qui a principalement enseigné en première année, je sais d’expérience que presque tous les enfants tirent plus d’un faible rapport élèves-enseignant avec un adulte qui, faute d’être parfait, est très bon, que d’un enseignement dans de grandes classes par une professionnelle comme moi.
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D’accord. Il ne me reste qu’un paragraphe, donc je vais poursuivre.
Vous devrez expliquer à tous les Canadiens comment les grands-mères, les voisins, les amis de confiance, les coopératives, les bonnes d’enfants, les écoles Montessori, les petites écoles francophones, toutes les garderies privées — les petites comme les grandes —, les services de soins à domicile de quartier, les jardins d’enfants, les personnes qui se relaient auprès des enfants, et même les parents comme tels, qui assurent tous à leur façon de services de garde et d’apprentissage pour la petite enfance, vont s’étioler dans la foulée de votre réattribution des fonds à un système obligatoire. Vous devez être ouverts et transparents avec la population canadienne à ce sujet, ouverts et transparents par rapport à ce recul qui n’est absolument pas progressiste.
Merci.
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Merci beaucoup, madame la présidente. J’ai appris que vous aviez publié un livre, donc merci de l’avoir annoncé à plusieurs reprises.
Cardus est un groupe de réflexion à but non lucratif. Depuis plus de 10 ans, entre autres choses, des travaux de recherche évalués par les pairs sur la garde d’enfants, nous réalisons des sondages sur les préférences des Canadiens relatives à la garde d’enfants et rédigeons des articles comme la publication récente intitulée « Positive Vision for Child Care Across Canada », fruit d’un effort collectif.
Aujourd’hui, j’aimerais formuler des observations à propos de données sur la garde d’enfants, puis explorer des pistes de solution pour les familles pendant et après la pandémie.
La garde d’enfants consiste à prendre soin d’un enfant, peu importe qui s’en occupe. La garde d’enfants est non seulement une question touchant les femmes, mais aussi une question d’ordre familial. Partout au Canada, nous avons accès à une riche diversité de services de garde, que les familles utilisent et choisissent en fonction de leur culture, de leurs coutumes, de leurs traditions et de leurs exigences sur le plan du travail.
Les données de Statistique Canada révèlent que, avant la pandémie, les besoins des parents à cet égard étaient, pour la plupart, comblés. Deux tiers des parents ont déclaré qu’ils n’avaient « pas de difficulté » à trouver un mode de garde pour leurs enfants. Seulement 3 % des parents ont déclaré que le manque de places faisait partie des raisons pour lesquelles ils n’avaient pas recours à un mode de garde par une personne autre qu’un parent.
Toujours selon Statistique Canada, à l’échelle nationale, environ 60 % des enfants âgés de moins de 6 ans sont confiés à une personne autre qu’un parent. Nous n’en savons pas beaucoup sur ces 60 %, s’ils fréquentent ces services pendant 5 ou 55 heures, mais parmi ceux-ci, environ la moitié sont dans un centre de la petite enfance ou inscrits à un programme préscolaire. Cela signifie que de tous les enfants de moins de 6 ans au Canada — ceux confiés à la garde d’un parent et ceux gardés par une personne autre qu’un parent —, seulement 31 % d’entre eux fréquentent actuellement un service de garde ou suivent un programme préscolaire.
Selon les enquêtes et les sondages réalisés au fil des ans, les parents n’accordent pas de préférence aux services de garde pour leurs enfants. Cela signifie que la grande majorité des enfants au Canada ne profitent pas des fonds publics destinés à financer les places en service de garde.
Par sa structure, le financement public des places en service de garde va à l’encontre du principe de l’équité pour toutes les familles. Je dirais que cette iniquité est particulièrement flagrante en période de pandémie. Pendant que les mères — qu’elles aient un travail rémunéré ou non — ont plus que jamais besoin d’aide à la maison, l’argent sert à financer des places qui demeurent vides, car nous sommes tous confinés à la maison.
Les données révèlent par ailleurs que ce n’est pas le manque de places en service de garde qui empêche les mères de retourner sur le marché du travail. En Ontario, 93 % des garderies étaient rouvertes à la fin du mois de septembre, mais à certains endroits, comme à Brampton, seulement 20 % de ces places étaient occupées. J’ai les données pour l’Alberta. La province a déclaré que 94 % des garderies étaient ouvertes et que leur taux d’occupation était d’environ 50 %. Cela indique que la disponibilité des places en service de garde n’est pas le seul facteur déterminant de quelle façon et à quel moment les mères retournent sur le marché du travail, surtout pendant et après la pandémie.
Je crois que le gouvernement fédéral dispose de nombreuses solutions pour aider les familles. Je vais en proposer quatre aujourd’hui.
La première est sans doute la plus importante: commencer à consulter à plus grande échelle un très grand éventail de collectivités, de parents et de spécialistes du développement de l’enfant.
Gordon Neufeld est un trésor national et un psychologue du développement établi à Vancouver. Il se spécialise dans l’attachement de l’enfant. De même, les différents économistes dont les travaux évalués par les pairs démontrent des problèmes de qualité, plus particulièrement au Québec, soit M. Steven Lehrer, M. Kevin Milligan, M. Michael Baker et M. Jonathan Gruber, bref toutes ces personnes doivent être consultées et participer aux discussions.
Les recherches et les opinions dont je vous fais part aujourd’hui représentent en fait une majorité de Canadiens. La plupart des Canadiens souhaitent bénéficier d’une souplesse en ce qui a trait à la garde d’enfants, afin que les familles puissent faire ce qui leur convient.
Deuxièmement, je propose au gouvernement d’améliorer les programmes fédéraux déjà mis en œuvre, comme l’Allocation canadienne pour enfants.
Troisièmement, j’envisagerais la possibilité de modifier les congés de maternité et les congés parentaux de manière à ce qu’ils soient plus souples.
Enfin, les ententes bilatérales fédérales-provinciales, particulièrement celles conclues avec les Premières Nations, devraient accorder le plus de liberté et de souplesse possible afin de respecter le patrimoine unique, ainsi que la culture, l’histoire et les traditions des différentes cultures partout au Canada.
Il existe peu de données probantes démontrant que l’augmentation du nombre de places aidera les mères à retourner sur le marché du travail après la pandémie.
Il est évident qu'il existe au Canada un écosystème de services de garde d'enfants parentaux et non parentaux qui n'est ni bien compris ni pris en compte, et il risque d'être réduit à néant au sein d'un système dit universel. Le gouvernement fédéral devrait chérir et défendre l'ensemble disparate de services de garde d'enfants qui existe déjà au Canada et qui offre une excellente variété de choix.
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Je pense qu'il y a plusieurs raisons à cela.
Tout d'abord, Mme Mrozek a mentionné le rapport publié par Michael Baker, Jonathan Gruber et Kevin Milligan, que les conseillers libéraux ne vous ont pas présenté, ce qui est choquant. Ce rapport fait état de graves préoccupations liées à des problèmes de santé mentale et de comportement qui ont été observés, et il y a eu 20 années de programme universel au Québec.
Je suis une vraie féministe. Ma mère a lutté contre les religieuses de l'Université de Toronto, il y a 70 ans, afin d'obtenir ses diplômes en commerce et en finances, puis elle a obtenu un diplôme d'études supérieures en économie. J'ai quatre sœurs. Il faut que je mentionne que je suis vraiment progressiste.
Ce que l'on constate relativement à ces programmes universels, que je connais en ma qualité d'ancienne enseignante, c'est que lorsque l'on prend des enfants habitués à un faible ratio enfants-adultes et qu'on les entasse vraiment dans des garderies à un très jeune âge, les problèmes n'apparaissent souvent que plus tard, à l'adolescence. Voilà ce qui se passe. Il y a tellement d'autres résultats d'études que je pourrais vous lire, mais malheureusement, notre temps est compté.
Les Suédois ont constaté, à de nombreuses reprises, que les problèmes se manifestaient au cours de l'adolescence. Même leur propre ministère de la Santé est très préoccupé par le taux élevé de suicide, de problèmes comportementaux et de dépression enregistré chez les adolescents. Le plus grand groupe de parents militants de la Suède a en fait voulu se joindre à notre groupe et déposer une plainte auprès des Nations Unies afin d'indiquer qu'à moins que les parents n'aient le droit de s'occuper de leurs propres enfants, les problèmes qui ne se manifestent qu'à l'adolescence découleraient d'un programme universel.
Pour dire les choses simplement, vous ne faites pas participer suffisamment d'adultes à la vie des petits enfants. En fait, vous les rassemblez pour les élever à moindre coût.
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J'ai parlé longuement du respect des cultures, des traditions et de l'histoire uniques des lieux d'où nous sommes originaires. Le Québec a plutôt une histoire sociale-démocrate. C'est peut-être le seul endroit au Canada où un tel système pourrait fonctionner de façon plus efficace.
J'appuie la compétence provinciale, et elle revêt une grande importance dans ce dossier. Par conséquent, le Québec est certainement libre de suivre un modèle qui lui convient. Mais le Canada hors Québec n'a pas les mêmes traditions. Nous n'avons pas la même volonté de conformité, la même volonté de devenir Québécois. Nous n'avons pas d'objectifs linguistiques. En revanche, nous avons une diversité d'immigrants, de nouveaux arrivants et de réfugiés, des gens provenant de différents endroits et ayant différentes origines ethniques, qui souhaitent élever leurs enfants de façons très diversifiées. Je crois qu'il est très peu probable que nous ayons un jour assez d'argent pour financer ce genre de diversité pour le reste du Canada.
Il y a des écrits reconnus dans les ouvrages universitaires du Québec qui traitent d'objectifs assimilationnistes et d'uniformité pour les personnes qui immigrent au Québec, et ce genre de choses n'existe pas dans le reste du Canada. D'un océan à l'autre, la population est diversifiée et, je le répète, il y a de gens qui viennent d'ailleurs et qui souhaitent élever leurs enfants de manières très diversifiées et uniques. Ils ne devraient pas être victimes de discrimination parce qu'ils ne souhaitent pas utiliser les places disponibles au sein d'un système de garde d'enfants.
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Merci, madame la présidente. Je remercie également tous les témoins de leur présence.
En tant que membre du Comité, je sais que cette année marque le 50e anniversaire du rapport de la Commission royale d'enquête sur la situation de la femme, une étape importante qui nous rappelle ce qui a été accompli depuis, ainsi que le travail qui reste à accomplir pour faire progresser l'égalité des sexes. Nous tenons souvent pour acquis le chemin qu'il nous reste à parcourir, et le rapport indique expressément qu'il est crucial de développer les services de garde d'enfants.
Je viens de Brampton, et rien que dans ma circonscription, 24 000 enfants bénéficient de l'Allocation canadienne pour enfants. Nous savons que nous devons en faire plus, et quand je parle avec les résidents de ma circonscription, je constate qu'ils le savent. Quand 24 000 enfants sortent de la pauvreté grâce à l'Allocation canadienne pour enfants, cela apporte une grande aide.
Quel rôle le gouvernement fédéral jouerait-il dans les rouages des provinces et des territoires pour faire en sorte que les familles puissent trouver des services de qualité? Les garderies ne sont pas ouvertes parce que les parents craignent la COVID-19. Comment le gouvernement fédéral peut-il jouer un rôle à cet égard?
J'adresse ma question à Mme Mrozek. Pouvez-vous m'expliquer cela?
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Je pense que le rôle du gouvernement fédéral consiste à établir des normes très souples afin que, dans tout accord bilatéral, les provinces puissent choisir la façon dont elles utiliseront les fonds que le gouvernement fédéral leur verse.
Vous avez mentionné l'Allocation canadienne pour enfants. Il ne s'agit pas expressément d'une allocation pour la garde d'enfants, mais plutôt d'une somme d'argent destinée aux parents. C'est aussi un moyen très efficace de veiller à ce que les gens disposent de ressources accrues pour créer et mettre en place dans leur collectivité la diversité de soins qu'ils préfèrent.
Vous avez également dit que vous veniez de Brampton. Je pense que des soins intergénérationnels sont prodigués dans des foyers là-bas, étant donné que les grands-parents vivent avec des familles et leurs enfants. Là encore, une partie de ces soins est fondée sur des préférences culturelles.
Je pense que les services universels de garde d'enfants ont toujours été une mauvaise idée, mais qu'ils le sont particulièrement en période de pandémie, car dans ces circonstances, les parents empêchent leurs enfants d'aller à l'école et d'occuper des places en garderie afin de protéger les personnes âgées vivant chez eux. C'est faire preuve d'un manque de vision que d'essayer de tirer profit de la pandémie pour créer un système dit universel que les gens ne choisissent pas d'utiliser.
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Bon nombre de résidents de ma circonscription travaillent dans le secteur du camionnage, dans l'industrie de la transformation alimentaire et dans l'industrie manufacturière, et la plupart de ces ménages comptent des aînés qui peuvent assurer la garde des enfants. L'argent de l'Allocation canadienne pour enfants aide également ces familles.
Je sais que nous avons besoin de services de garde d'enfants. C'est la raison laquelle ils étaient mentionnés dans le discours du Trône. J'ai été très impressionnée lorsque j'ai entendu cela.
Le « Rapport d’étape national sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants (2017 à 2018) » indique ce qui suit:
Nombre de recherches montrent que des services de garde d'enfants de grande qualité favorisent l'obtention de résultats positifs sur le plan du développement de l'enfant, en particulier chez les enfants issus de familles défavorisées. Des études montrent par ailleurs que des services d'apprentissage et de garde des jeunes enfants (AGJE) de grande qualité ont des effets positifs sur le développement cognitif et social des enfants, améliorent la préparation à l'école et jettent les bases de l'apprentissage tout au long de la vie.
Madame Mrozek, pouvez-vous dire au Comité si, de manière réaliste, les femmes durement touchées par la pandémie, qui n'ont pas le luxe de pouvoir s'offrir des soins privés et qui ne peuvent pas compter sur des membres de leur famille, seront en mesure d'intégrer le marché du travail grâce à un système de garde d'enfants soutenu par l'État?
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Vous avez parlé longuement de la qualité des soins. Ce que nous avons constaté dans le cadre de recherches évaluées par des pairs, c'est que nous ne créons pas des soins de haute qualité en mettant en oeuvre un système universel. Je crains fort que nous reproduisions essentiellement des soins de qualité médiocre pour les familles de l'ensemble du pays.
Je crois que nous devons nous tourner de nouveau vers les données. Lorsque nous étudions les personnes qui, en ce moment, n'ont pas accès à des services de garde, nous constatons, d'après Statistique Canada, que même si cela peut être très stressant et qu'un tiers des parents disent avoir des difficultés, seuls 3 % d'entre eux affirment ne pas trouver les services de garde dont ils ont besoin pour retrouver les conditions de travail qu'ils souhaitent.
Vous avez également mentionné les aînés qui prennent soin des enfants. Il se trouve que je ne vis pas près de ma famille, mais je pense que la garde par des proches parents est un aspect très important de la garde des enfants. Des recherches évaluées par des pairs semblent indiquer que la garde par des proches parents est plus efficace et de meilleure qualité que les places offertes dans les garderies. Je plaide fortement en faveur du versement de fonds supplémentaires afin que les familles puissent soutenir des personnes âgées en tant que membres de la famille et de la communauté, et que ces personnes puissent aider à répondre aux besoins en matière de garde d'enfants dans des structures parentales et non parentales.
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Merci, madame la présidente.
Je remercie les témoins qui ont le courage d'affirmer leur point de vue.
Vous comprendrez cependant que, en tant que députée du Québec, je ne peux pas être d'accord sur l'ensemble des propos tenus aujourd'hui. L'une ou l'autre des témoins pourra répondre à mes questions.
Je vais commencer par mon point de vue. Il faut reconnaître que le Québec a fait le choix d'établir un service de garde. Il a effectivement eu la volonté de mettre en oeuvre beaucoup plus de mesures sociales-démocrates, et de prendre soin de son monde. Je pense que c'est un caractère propre au Québec et que nous nous démarquons des autres provinces canadiennes. Au Québec, nous avons clairement fait ce choix.
J'ai recueilli ce qui suit sur Pierre Fortin, que je connais bien étant donné que je viens du Québec et que j'ai lu plusieurs de ses études, notamment économiques. Il a travaillé très fort pour démontrer les effets positifs qu'engendre un système de garde. Je vais vous faire part de quelques chiffres, vu que l'étude date de quelques années à peine. On y dit ceci:
Le Québec s’est simultanément démarqué en ce qui regarde l’évolution de l’activité féminine. En 1996, le taux d’activité des mères au Québec était inférieur de 4 points à celui de leurs compatriotes des autres provinces. Depuis cette date, il a progressé beaucoup plus rapidement qu’ailleurs, au point qu’en 2011 il avait dépassé la moyenne canadienne. La hausse de l’emploi des femmes au Québec a touché tout particulièrement les mères d’enfants de moins de 15 ans et les chefs de famille monoparentale.
Des femmes qui étaient chefs de familles monoparentales et qui n'auraient pas pu se sortir du cercle vicieux de la pauvreté ont réussi à le faire grâce à ce système de garde.
On dit ensuite ce qui suit:
Notre revue des études publiées jusqu’ici sur la question nous a conduits à estimer à environ 70 000, pour l’année 2008, le nombre de mères au travail qui peut être attribué spécifiquement au programme québécois des services de garde à contribution réduite. Nous avons estimé que cet afflux de femmes en emploi a entraîné une majoration d’environ 5,1 G$ du revenu intérieur (PIB) du Québec dans la même année.
Ce n'est pas négligeable. Par contre, j'aimerais vous entendre. Il est clair que nous, au Québec, avons fait ce choix. Les provinces du Canada pourront décider ce qu'elles veulent faire, mais nous voulons un droit de retrait avec pleine compensation afin de respecter ce modèle, qui suscite même l'envie à l'échelle internationale.
Des entrepreneurs de chez nous m'ont parlé de la difficulté à obtenir des places dans les services de garde alors que les gens retournent au travail. Je rappelle que le modèle du Québec en matière de politique familiale a été cité en exemple partout dans le monde. L'Organisation de coopération et de développement économiques le souligne dans son plus récent rapport sur les inégalités sociales.
Il y a aussi une recherche contemporaine qui est unanime: le système universel de services de garde éducatifs à l’enfance à bas tarif lancé par le Québec il y a 20 ans a eu un formidable effet de levier sur l’utilisation de ces services et le taux d’activité des mères de jeunes enfants. L'économiste Pierre Fortin lui-même est venu exposer cette bonne nouvelle ici même en 2017. Le Québec est devenu le champion mondial en ce qui a trait au taux d'activité des jeunes femmes, devançant les Suissesses, ainsi que les précédents leaders, les Suédois.
Je comprends qu'au Québec, on a fait ce différent choix, mais cela a fonctionné pour nous. J'aimerais entendre les témoins là-dessus, car il a été démontré que ce qu'on fait au sujet des enfants est important pour la relance économique. Pendant la pandémie, la charge mentale des femmes a été exacerbée, puisqu'elles ont dû gérer beaucoup de choses en même temps. Je pense au télétravail et au fait d'avoir les enfants à la maison, sans parler des normes sanitaires. Tout cela a eu une incidence sur leur charge mentale. De nombreux organismes se penchent là-dessus.
J'aimerais donc vous entendre sur la charge mentale des femmes qui sont maintenant à la maison.
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Merci, madame la présidente.
Je tombe d'accord avec ma collègue du Bloc québécois pour dire que vous êtes venues toutes les deux nous faire part d'un point de vue très différent. En tant que membres du Comité, nous entendons toutes sortes de points de vue, et nous les respectons. Cependant, le fait que je ne partage pas votre avis n'a probablement rien d'étonnant.
Je trouve cette situation difficile, étant donné que tout au long de notre étude, et certainement lorsque nous avons entendu des témoins au cours de l'été, ils ont dit le contraire à maintes reprises. Ces témoins provenaient de tous les secteurs et avaient tous des visions différentes, qu'il s'agisse d'experts en matière de garde d'enfants, d'intervenants dans le domaine, des témoins que nous avons entendus plus tôt aujourd'hui ou de représentants de la chambre de commerce. Comme nous l'avons entendu dans les médias de la part du vice-président de la CIBC, la garde d'enfants, et qui plus est, une garde d'enfants universelle et abordable, est une nécessité. Je trouve qu'il est très difficile de juxtaposer cela à vos propos d'aujourd'hui.
En ce qui concerne les choix, je suis d'accord pour dire qu'il est vrai que nous n'avons pas investi suffisamment de fonds dans les services de garde d'enfants pour les rendre universels. Nous devons certainement en faire beaucoup plus pour garantir que, lorsque nous parlons des choix des parents, ils ont réellement le choix.
Mme Sidhu parlait des personnes qui doivent travailler, comme les ménages à double revenu qui touchent des salaires minimums, des salaires qui ne sont certainement pas assez élevés. Ces parents doivent travailler; ils n'ont pas le choix. Des services de garde d'enfants abordables leur offrent en fait un plus grand nombre de choix. Ceux qui ont des revenus, une richesse et un pouvoir plus élevés, ceux qui jouissent des privilèges que notre société leur offre ont des choix, mais pas les personnes à faibles revenus.
Pour nous assurer que des options existent, nous pouvons comparer toutes sortes de systèmes universels. Nous pourrions comparer notre système de soins de santé à celui des États-Unis. Là-bas, les gens doivent faire des choix très difficiles et leurs proches doivent hypothéquer leur maison pour leur offrir les soins de santé dont ils ont besoin. Je connais des parents et des amis, qui ont vécu au Québec, puis en Ontario, et ils ont vu leurs frais de garde d'enfants passer de 8 $ par jour à 60 $ par jour.
À mon sens, il ne s'agit pas de véritables choix liés à un programme universel. Je conviens que notre système n'est pas universel, mais il est probable que nous soyons forcés de le supprimer au lieu de le soutenir davantage.
Je voudrais vous poser toutes deux une question. Il a été question de la façon dont les enfants grandissent. Je sais que, dans ma collectivité, il y a un groupe extraordinaire appelé Childreach, qui croit au fait que le développement des enfants est basé à la fois sur ce que les enfants apprennent de leurs pairs et sur ce qu'ils apprennent des adultes, et il croit à l'importance que cela revêt.
Nous parlons de l'isolement de parents qui peuvent se permettre de placer leurs enfants dans de plus petits groupes. Ils peuvent offrir des cours particuliers à leurs enfants. Mais que diriez-vous aux enseignants qui se trouvent dans une situation difficile? Dans ces cas-là, ils ne bénéficieraient pas du soutien qu'ils recevraient normalement dans un espace de travail protégé par un syndicat ou par différents types de lois provinciales, comme le droit du travail. Comment régleriez-vous ce problème?
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Tout d'abord, je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que les services de garde d'enfants doivent devenir plus abordables et que nous devons aider beaucoup plus les parents.
La forme de garde d'enfants la plus abordable est celle que nous avons actuellement, madame Mathyssen, et ce dont nous avons besoin, c'est de fonds supplémentaires. L'Allocation canadienne pour enfants est fantastique. Franchement, même si j'ai écrit une lettre d'opinion pour le journal The Globe and Mail qui disait « Financer les enfants », j'aurais procédé autrement. J'aurais accordé la moitié du montant pour le deuxième enfant, au lieu de la totalité du montant, parce que des économies d'échelle sont réalisées dans l'éducation des enfants, et vous auriez alors... Non, non, non, ce n'est pas que le deuxième enfant soit moins important. C'est que l'argent aurait pu être réparti plus largement.
Nous avons besoin de crédits d'impôt remboursables, mais il n'y a pas... Malheureusement, je pense que les personnes dont vous avez entendu parler au cours de l'été.... Qu'entend-on par « expert »? Je vois que les conseillers triés sur le volet du gouvernement libéral.... Je connais les informations qu'ils communiquent au gouvernement, et elles ne sont pas exactes ni complètes. C'est...
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En ce qui concerne les parents, les mères et les pères à la maison qui font des choix pour les services de garde de leurs enfants, je pense que même le versement de sommes substantielles d’argent aux parents pour qu’ils aient des choix est une décision stratégique plus efficace que l’instauration d’un système bureaucratique au terme duquel les fonds ne se rendent jamais jusqu’à la majorité des enfants.
Si nous envisageons d’examiner des modèles — nous parlons beaucoup de la Suède, par exemple —, je voudrais proposer celui de la Finlande, qui finance des places en garderie, mais qui verse aussi des sommes substantielles aux parents, qui peuvent décider de la manière dont ils préfèrent les utiliser pour un enfant de moins de trois ans. C’est un choix également. Il ne s’agit pas de financer seulement des places en garderie, car alors le parent A obtient de l’argent parce qu’il a choisi ce genre de service, mais le parent B ne reçoit rien parce que n’est pas le genre de service qu’il préfère.
Les préférences des parents constituent un facteur clé ici, et je crains qu’il n’existe pas suffisamment de sondages et de statistiques à ce sujet. Rick Augus, analyste des politiques publiques de l’Université de la Saskatchewan, a réuni des années de données issues de sondages et a écrit sur les préférences parentales, et ce ne sont pas les places dans des centres qu’ils préfèrent. Or, c’est le genre de service qu’ils obtiennent quand le gouvernement fédéral finance un prétendu régime universel. Nous devons abandonner cette voie pour offrir aux parents les solutions qu’ils disent choisir et préférer. Je suis très favorable à cette approche également.
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Le temps que nous pouvions accorder à ce groupe de témoins est malheureusement écoulé. Nous devons encore examiner brièvement les travaux du Comité.
Je tiens à remercier les témoins, à qui je présente mes excuses pour les problèmes techniques survenus aujourd’hui. Comme je l’ai indiqué, si vous voulez présenter quoi que ce soit au Comité, je vous encourage à transmettre l’information à la greffière.
Le point que nous devons maintenant examiner concerne la comparution de la au sujet du Budget principal des dépenses, qui doit avoir lieu de 11 à 13 heures mardi. Vous vous souviendrez que la séance devait durer trois heures, mais malheureusement, en raison d’une exposition à la COVID, notre dernier témoin, qui représente les agents de police de première ligne, ne peut témoigner comme prévu.
Au nom du Comité, je veux remercier tous les travailleurs et les travailleuses de première ligne pour les services extraordinaires qu’ils offrent en ces temps difficiles.
Ce contretemps signifie que notre séance ne durera que deux heures mardi. Jeudi, si le Comité l’accepte, nous voulions que le Sous-comité de FEWO se réunisse pour discuter de l’ordre de priorité des prochaines études. Si vous avez des propositions à ajouter aux motions que nous avons reçues, je vous demanderais de nous les faire parvenir.
Je voulais juste connaître la volonté du Comité. Est-ce le Sous-comité ou l’ensemble du Comité qui se réunira jeudi pour discuter de la question?