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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 007 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er décembre 2020

[Enregistrement électronique]

(1200)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Je souhaite la bienvenue à nos témoins.
    Monsieur Serré, je vois que vous avez levé la main.
    J'ai un bref rappel au Règlement.
    J'aimerais seulement — par votre entremise, madame la présidente — demander à la greffière de faire une analyse de ce qui s'est produit dans la partie précédente de la réunion en ce qui concerne la reprise des votes et l'incitation à voter. J'aimerais également que nous réservions 30 minutes de la prochaine réunion pour nous réunir à huis clos avec la greffière et faire un rapport sur les procédures.
    Très bien, je vous remercie.
    Monsieur Serré, la greffière et moi-même avons également discuté de ce qui s'est produit. L'une des difficultés, c'est que je ne pouvais pas voir la main de tous les participants dans la vue d'ensemble. À l'avenir, nous tiendrons peut-être des votes par appel nominal pour veiller à ce que tout le monde puisse participer. Je ne pense pas que cela changerait le résultat, mais je pense que nous nous sentirions mieux de cette façon.
    J'ai également mentionné que les choix ne seraient plus effectués par l'équipe du comité de direction, mais par l'ensemble du Comité. Cependant, nous réserverons une demi-heure pour les travaux du Comité au début de la prochaine réunion.
    Oui. Je suis plus préoccupé par les deux votes. Je vous remercie, madame la présidente.
    C'est parfait.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins. Nous nous excusons pour les difficultés techniques. Aujourd'hui, nous étudions les défis auxquels font face les femmes qui vivent dans des collectivités rurales.
    À titre d'information pour les participants qui en sont à leur première expérience, veuillez attendre que je vous appelle par votre nom avant de prendre la parole. De plus, lorsque vous souhaitez prendre la parole, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour l'activer. Tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
    Pendant la vidéoconférence, les services d'interprétation fonctionnent comme lors des réunions de comité ordinaires. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre « Parquet », « Anglais » et « Français ».
    Lorsque vous prenez la parole, veuillez parler lentement et clairement pour les interprètes. Lorsque vous ne parlez pas, votre micro doit être en mode sourdine.
    Aujourd'hui, je suis heureuse d'accueillir Mme Vianne Timmons, de la Memorial University, Mme Angèle McCaie, de Femmes Fortes, et Mme Fern Martin, qui comparaît à titre personnel.
    Chaque témoin aura cinq minutes pour faire une déclaration, et nous passerons ensuite aux séries de questions. Chaque membre du Comité disposera d'un certain nombre de minutes. Je tenterai de mettre fin à chaque série de questions de manière juste et amicale.
    La parole est à Mme Timmons. Elle a cinq minutes.
    Je suis très heureuse de vous rencontrer sur le territoire ancestral de notre peuple autochtone à Terre-Neuve-et-Labrador.
    Je parlerai d'un sujet qui me tient à cœur à titre de rectrice de l'Université Memorial et, ce qui est plus important, à titre de femme qui a grandi dans une petite ville rurale du Labrador. Je vous parlerai un peu de mon enfance, car c'est très pertinent pour la discussion d'aujourd'hui.
    J'ai été élevée au Labrador, mais ma grand-mère a grandi sur l'île du Cap-Breton, où elle a été élevée par sa propre grand-mère. Elle a été obligée de quitter l'école en 4e année pour s'occuper de sa famille. Elle est donc devenue femme de ménage à l'âge de neuf ans dans une région rurale du Cap-Breton. C'était le pire jour de sa vie, car elle savait que l'éducation aurait pu lui permettre de mener une vie différente, mais ce n'était plus possible. À l'âge de 16 ans, elle a épousé mon grand-père. Elle a immédiatement eu ma mère et trois autres enfants.
    Ma mère a obtenu son diplôme d'études secondaires, mais elle a également été femme de ménage pendant toutes ses études secondaires. Elle a toujours voulu devenir enseignante, mais elle n'avait pas les moyens de se payer des études universitaires. Elle voulait éviter que nous nous retrouvions dans cette situation, et ses six enfants ont donc été les premiers membres de notre famille à avoir la possibilité de faire des études universitaires.
    J'ai eu une très belle enfance, car j'ai grandi dans une petite ville dans les années 1960 et 1970. C'était une expérience merveilleuse, mais l'éducation postsecondaire représentait certainement un défi important.
    L'été dernier, je suis retournée dans ma ville natale. De nombreuses choses n'avaient pas changé, mais il y avait aussi de grands changements. J'ai beaucoup appris au sujet de l'éducation dans les régions rurales de Terre-Neuve-et-Labrador lors de mon voyage dans cette province l'été dernier. J'ai vu et j'ai rencontré de nombreux étudiants qui ont dû retourner à la maison lorsqu'on a dû fermer les campus à cause de la pandémie. J'ai découvert que les étudiants sont résilients, mais j'ai aussi appris l'importance d'une connexion Internet fiable, car sans cette connexion, un grand nombre de résidants de notre province n'ont pas accès à l'éducation.
    Un père de famille d'une petite ville de la péninsule Great Northern a envoyé ses trois enfants à Corner Brook, à 470 kilomètres de là, pour qu'ils puissent avoir accès à une connexion Internet fiable pour leurs études postsecondaires. J'ai entendu parler d'étudiants qui téléchargaient des cours après minuit tous les soirs, car ils ne pouvaient pas y avoir accès autrement. L'Université Memorial a 13 annexes, dont six campus, mais nos étudiants n'ont pas tous le même accès à l'éducation. C'est réellement un défi.
    J'ai également vu le défi auquel les femmes font face là-bas. En effet, un grand nombre de nos étudiantes travaillaient dans le commerce de détail et dans le secteur des services pour payer leurs études universitaires. La pandémie a donc représenté un véritable défi pour ces femmes. En effet, la perte de nombreux emplois dans le secteur du commerce de détail et des services leur a causé de grandes difficultés.
    J'ai vu beaucoup de chômage et un sentiment de désespoir. Je me suis aussi reconnue dans de nombreuses jeunes femmes que j'ai rencontrées dans ces collectivités. Je n'aurais jamais imaginé que je serais un jour rectrice d'université. Je suis le produit du rêve canadien, et je tiens à ce que les jeunes femmes d'aujourd'hui aient la même chance.
    Il est important de leur offrir des modèles. Nous profitons des réalisations des femmes qui sont venues avant nous. À titre de première rectrice de l'Université Memorial, je tiens à m'assurer que je ne serai pas la dernière. Je veux que les jeunes filles du Labrador puissent voir un avenir dans cette belle province et ce beau pays. Nous devons faire tout en notre pouvoir pour que ce soit possible.
    Comme l'a déclaré le sénateur Murray Sinclair, « C’est l’éducation qui nous a mis dans ce pétrin et c’est elle qui nous permettra d’en sortir. » J'ai rencontré de nombreuses jeunes femmes des Premières Nations qui ont des difficultés supplémentaires à avoir accès à l'éducation. Nous pouvons et nous devons leur fournir un accès fiable à Internet, veiller à ce que l'éducation soit abordable et accessible, offrir aux jeunes femmes des options en matière de garde d'enfants, élaborer des solutions avec les collectivités pour les collectivités, être des modèles de rôle, être à l'écoute, apprendre et travailler avec les femmes de notre pays.
    Je vous remercie, madame la présidente.
(1205)
    Merci beaucoup.

[Français]

    Nous entendrons maintenant Mme Angèle McCaie, du programme Femmes fortes.
    Madame McCaie, vous avez la parole pour cinq minutes.
(1210)
     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Bonjour, j'aimerais d'abord vous remercier de m'offrir l'occasion de parler de ma communauté et des défis auxquels font face les femmes dans mon milieu rural.
    Avant de débuter, j'aimerais souligner et reconnaître que je suis présente sur le territoire traditionnel, ancestral et non cédé du peuple des Micmacs, sur lequel je suis fortunée d'apprendre, de travailler et de vivre aujourd'hui.
    Mon nom est Angèle McCaie, je suis la directrice générale d'une petite municipalité francophone et acadienne du Nouveau-Brunswick nommée Rogersville, dont je suis aussi originaire. Dans ma communauté, il y a une population de 1 066 habitants, et elle se trouve isolée géographiquement dans le sud-est de la province.
    J'aimerais vous parler du programme « Femmes fortes », que nous avons créé à Rogersville, qui tente de régler plusieurs enjeux auxquels les femmes et les filles de ma communauté rurale font face.
    Il y a deux ans, le commentaire d'une femme récemment devenue veuve m'a vraiment troublée. Elle m'a dit que, depuis le décès de son conjoint, elle se sentait impuissante et inutile. Elle m'a dit qu'elle réalisait maintenant à quel point elle était dépendante de son mari pour l'accomplissement de tâches traditionnellement masculines, comme la mécanique et l'entretien de la maison. À la suite de cette discussion, j'ai constaté à quel point la réalité des femmes du milieu rural peut causer des défis importants, puisque plusieurs services ne sont pas facilement disponibles à proximité et dans leur langue. En conséquence, beaucoup de femmes peuvent se sentir isolées et seules. Quoique l'indépendance et la confiance en soi puissent être des défis pour une grande partie de la population, il me semble que les femmes en milieu rural sont particulièrement susceptibles de rencontrer des barrières à leur développement et que leurs besoins particuliers peuvent passer inaperçus en société.
    Notre projet « Femmes fortes » est né d'un besoin déterminé par une citoyenne en particulier, mais il a pu prendre de l'ampleur lorsque nous avons réalisé que le besoin était beaucoup plus grand que prévu. Nous avons consulté une grande portion de notre population, et des femmes et des filles de tous âges nous ont exprimé leurs besoins. Le concept de « Femmes fortes » est simple: offrir des ateliers, des cours et des séances gratuites et en français à toutes les femmes et les filles de notre communauté sur des sujets variés, qui abordent plusieurs facettes de la santé physique et mentale de l'individu. Des ateliers sur la construction, la mécanique, la dépression, le deuil, les enjeux des LGBTQ2+ sont seulement quelques exemples parmi les plus de 100 séances qui ont été offertes et qui continuent de l'être gratuitement au cours des deux dernières années à Rogersville.
    Notre municipalité a une certaine responsabilité sociale envers ses citoyennes et citoyens quant à leur développement. Le projet « Femmes fortes » est un outil pour la municipalité, afin d'appuyer nos femmes et nos filles pour assurer une prochaine génération d'individus plus confiants et indépendants, tout en valorisant les connaissances des femmes d'âges et de contextes variés. À mon avis, il est inacceptable qu'une femme se sente incapable d'accomplir une tâche simplement parce que certaines normes de genre de la société ont été préétablies. Nous pouvons et nous devons en faire plus pour nos femmes. En outillant nos femmes et nos filles, nous assurons la continuité de nos efforts en matière d'action communautaire. Ces dames vont transmettre de nouvelles compétences acquises, pendant les ateliers, à leurs proches, qui pourront ensuite se servir de ces outils pour s'engager dans la communauté.
    Le programme « Femmes fortes » vise à trouver des moyens novateurs pour rendre une collectivité rurale plus résiliente face à l'époque de l'instabilité économique et sociale que nous vivons. De plus, le fait d'offrir ces séances gratuitement augmente la possibilité pour les femmes de tous les niveaux de santé économique, psychologique et physique de participer et d'avoir les mêmes services qui pourraient être offerts dans des centres urbains.
    Il est facile de constater l'impact de ce projet sur les citoyennes et les citoyens de notre communauté. Beaucoup de participantes et de présentatrices nous ont dit à quel point c'était rassurant de réaliser qu'elles n'étaient pas seules dans leurs insécurités et leur vulnérabilité. Ce projet a créé une communauté de femmes qui se soutiennent et s'appuient, au lieu de se juger et de se critiquer. Lorsque nous outillons nos femmes, nous sommes tous gagnants.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Madame Martin, veuillez activer votre micro, dans le bas de l'écran. Vous y verrez l'icône d'un microphone. Cliquez dessus.
    C'est réussi.
    Madame Martin, vous disposez de cinq minutes.
    Je l'ai. Je ne vous entendais tout simplement pas.
    En 1979, deux groupes de femmes, le Hub, à Almonte, et l'Exchange, à Carleton Place, ont créé, en collaboration, la maison de transition de Lanark. Je faisais partie du conseil d'administration et je faisais du bénévolat dans le refuge. Plus tard, on m'a embauchée comme conseillère également chargée de la sensibilisation du public.
    Mon travail au refuge m'a ouvert les yeux sur la violence que subissent les femmes en milieu rural. J'ignorais que certaines de mes amies étaient maltraitées. Aucune n'en a parlé avant d'avoir trouvé un lieu sûr pour elles et leurs enfants. Voici un exemple pénible de ces agressions qui passent inaperçues.
    Marie, un nom fictif, la meilleure amie de ma fille aînée, a été violée pendant des années par son père, Robert, un nom également fictif. Nous étions des amies de la famille. Robert était notre photographe, à notre mariage. Marie était une jeune fille enjouée, intelligente, athlétique et charmante. Nous n'avions aucune idée de ce qu'elle endurait. À 14 ans, elle s'est retrouvée enceinte. Robert l'a amenée à l'hôpital municipal d'Ottawa, pour une interruption de grossesse, puis lui a procuré des pilules anticonceptionnelles. C'est à ce moment qu'elle s'est enfuie de chez elle. Elle a tout avoué à sa mère, qui a pris avec elle ses enfants et a quitté son mari. Nous étions au courant de la séparation, mais nous avons tout ignoré des agressions pendant encore plusieurs années, quand Robert a été accusé du viol de la sœur de sa nouvelle femme. C'était deux immigrantes philippines. Il a déclaré à la police qu'il ignorait pourquoi cette femme s'était plainte, parce que sa fille à lui ne l'avait jamais fait.
    La police a interrogé Marie. Elle a accusé Robert d'agressions sexuelles contre sa fille, mais non de ses agressions contre l'immigrante. Robert a été condamné à une peine de deux ans moins un jour.
    Marie est demeurée une personne charmante. Elle occupe un poste de responsabilité dans l'administration fédérale.
    Mon livre, A Narrow Doorway: Women’s Stories of Escape from Abuse (Une issue étroite: histoires de femmes violentées qui s'en sont sorties) a été publié en 1996. Il renferme des entrevues avec 10 femmes qui sont passées par notre refuge ainsi que des actualisations rédigées plusieurs années plus tard, parce qu'il m'a fallu neuf ans pour trouver un éditeur.
    Ce livre, je l'ai relu dernièrement. Ce qui est manifeste, c'est que rien n'a vraiment changé. Les hommes continuent de battre leurs femmes, de violer leurs petites amies, de commettre l'inceste avec leurs filles, de maltraiter leurs animaux de compagnie, etc. Notre société, particulièrement notre système judiciaire, n'a pas encore trouvé les mesures qui permettraient de changer ces mœurs.
    À la campagne, les femmes affrontent des obstacles de taille. En milieu rural, tout le monde se connaît. Une femme violentée appréhenderait la réaction des parents de son partenaire, qui, peut-être, sont les voisins d'à côté, ou l'incrédulité de tiers qui ne pourraient pas croire que Jean, le joueur préféré de l'équipe locale de hockey pourrait être un homme brutal. L'agent de police, un coéquipier, pourrait hésiter à intervenir ou à croire la femme maltraitée. Les voisins de Jean, s'ils savent qu'il a commis des brutalités, pourraient craindre de confirmer le témoignage de sa partenaire, de crainte de représailles. Parfois, la maison n'est branchée ni au téléphone ni à Internet. L'hiver aggrave particulièrement l'isolement. Certaines femmes n'ont pas de moyen de transport. On trouve beaucoup d'armes à feu dans les foyers ruraux. Une femme nous a dit que, après qu'elle et son mari s'étaient disputés, il nettoyait son arme, ce qu'elle considérait comme une menace.
    Le statut de l'homme agresseur dans la communauté est important. Parfois, c'est un employeur, et ses employés, qui dépendent de lui, ne peuvent pas appuyer sa femme. Ou encore, son ami, qui est propriétaire, refusera de louer un logement à l'épouse. C'est peut-être le préfet du canton, hautement apprécié de beaucoup.
    Le nombre de ministres du culte qui sont dans cette situation a été une révélation pour moi. L'un d'eux a immédiatement vidé le compte bancaire de sa femme le jour qu'elle l'a quitté. Le caissier n'a posé aucune question. Après tout, c'était le ministre local.
    Un groupe de ministres ruraux, quatre femmes et deux hommes, avaient l'habitude de me rencontrer au refuge. J'ai fini par apprendre que les deux hommes étaient des agresseurs sexuels. L'un d'eux avait d'ailleurs agressé l'une des femmes ministres.
(1215)
    Elle se demandait comment se comporter désormais avec lui, par crainte de faire de la peine à sa femme ou d'entacher sa réputation.
    Une infirmière de la santé publique m'a dit que lorsqu'elle était en stage à Toronto, dans le milieu des années 1960, on envoyait les étudiants dans le nord de la circonscription de Lanark, où se trouvait le plus fort pourcentage de personnes, en Ontario, qui souffraient d'anomalies congénitales du cœur, signe de l'existence d'un petit pool génique, qui, d'après elle, pouvait être le résultat de l'isolement, des mariages entre cousins ou de l'inceste.
    J'ai longtemps aidé l'unité sanitaire locale à trouver du transport pour les femmes qui avaient besoin d'interrompre leur grossesse. Certaines d'entre elles étaient des immigrantes, fraîchement arrivées, qui travaillaient comme bonnes d'enfants. J'étais curieuse de savoir comment elles s'étaient trouvées enceintes. Je suis sûre que certaines avaient été violées par l'homme de la maison, mais elles ne pouvaient pas risquer de perdre leur emploi en révélant leur état à sa femme.
    Je suis tellement désolée...
    Oui, j'ai terminé.
    Je suis désolée. Vous avez pris exactement le temps qui vous était accordé. Quel témoignage sincère.
    Oui, je sais.
    Je suis vraiment désolée de vous interrompre.
    Nous commençons les questions. J'espère que nous pourrons en entendre davantage.
    Madame Sahota, vous disposez de six minutes.
    Je remercie tous les témoins de leurs exposés et du récit de leurs expériences et de leurs histoires personnelles. Comme notre présidente l'a dit, c'est très touchant. Merci de votre temps.
    N'importe laquelle de vous trois ou toutes les trois, vous pouvez répondre à ma première question.
    Durant la pandémie, on nous a raconté que le confinement avait coincé des femmes avec leurs bourreaux. En ville, les femmes peuvent trouver des refuges et d'autres prestataires de services d'urgence. Mais, à la campagne, le plus proche voisin peut se trouver à quelques kilomètres de distance, ce qui signifie que les services d'urgence sont hors de question.
    Quelle formation les premiers intervenants devraient-ils recevoir pour mieux reconnaître le problème et aider à y remédier?
    Je me lance.
    Vaste problème. La formation contre les préjugés est essentielle à tous, parce que beaucoup, notamment les personnes d'origine rurale, en entretiennent. Comme Mme Martin l'a dit, on s'imagine que cet homme bon est incapable de faire le mal. Ce sont tous des préjugés. Je pense que cette formation serait aussi vraiment importante.
    Il faut aussi une formation sur les traumatismes, qui fera comprendre leurs conséquences chez les femmes victimes de violence, y compris sexuelle. C'est essentiel pour comprendre comment aborder la personne, s'occuper d'elle, l'écouter, chercher les signes.
    Je sais aussi que Mme Martin possède des renseignements très précis à ce sujet.
(1220)
    Encore une fois, je n'ai pas de solution. Voilà le problème. J'ai souvent cru que la solution logique serait de sortir l'homme du ménage et de laisser la femme et les enfants rester là où ils habitent, puis de conduire l'homme à un endroit où il apprendrait à améliorer son style de vie, à cuisiner et où il recevrait une assistance psychosociale. Il serait dans un refuge pour hommes agresseurs.
    Dans ma région, je pense que nous manquons de services de santé mentale, de soins urgents pour, avec un peu de chance, corriger le problème avant qu'il ne devienne du ressort des ambulanciers paramédicaux.
    Actuellement, au Nouveau-Brunswick, quand on franchit la ligne de la demande d'aide — et nous savons tous que même demander de l'aide c'est difficile — les listes d'attente sont longues et l'aide n'est pas nécessairement imminente. À l'échelle régionale, les communautés auraient besoin de ressources pour corriger ces problèmes de santé mentale à la base, en plein coeur, plus tôt même, ce que je sais ne pas être une tâche facile, indéniablement, une intervention locale pourrait certainement être utile.
    De plus, la formation spéciale n'est pas seulement nécessaire aux premiers intervenants, mais également aux professions judiciaires. Il a été question de la leur donner à l'échelle nationale. Ma soeur, prise dans une relation de maltraitance dans une petite communauté rurale s'est adressée aux tribunaux pour obtenir appui et aide. Ç'a été affreux. Ils lui ont fait subir de nouveaux traumatismes et n'ont pas adressé à son mari une ordonnance restrictive: même si le couple était séparé, elle a continué à subir des agressions verbales et du harcèlement jusqu'à sa mort, en 2009, du fait de la grippe H1N1.
    Nous devons également obliger les magistrats à recevoir une meilleure formation et à comprendre les difficultés qu'affrontent les femmes.
    Voici: Trop souvent, les hommes violents peuvent continuer à voir les enfants. Un jour, à l'Université d'Ottawa, au cours d'une conférence devant des étudiants en droit, à laquelle participait également un avocat de la défense, quand j'ai proposé qu'on interdise aux hommes violents ou agresseurs de voir leurs enfants, il m'est tombé dessus. J'étais comme dans un tribunal. Il a dit que c'était impossible à faire et que les hommes devaient garder la possibilité de voir les enfants.
    Il faudrait y songer.
    Pour faire suite à ce que vous disiez, madame Martin, sur le mari qui avait vidé le compte conjoint de sa femme qu'il agressait continuellement, la police ne peut pas être au courant de tout ni tout remarquer. Comment pouvons-nous former et appuyer le personnel des établissements locaux sur les indices à rechercher et le moment où il faut prévenir la police?
    Par la sensibilisation. C'est tout. Nous devons écouter ceux qui racontent des faits comme ceux que j'ai décrits.
    Avez-vous quelque chose à ajouter, madame Timmons?
    Je serais d'accord. La seule solution serait la sensibilisation et l'accompagnement des femmes qui rencontrent la police, pour les appuyer, prévenir un deuxième traumatisme. Il serait important, pour les femmes des communautés rurales, de confier la tâche à des personnes formées à parler pour elles, qui pourraient ainsi les aider.
(1225)
    Excellent!
    Madame Hutchings, vous disposez de six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Mesdames les femmes fortes, soyez toutes les trois les bienvenues, vous qui nous apportez de puissants témoignages et exemples, de différentes régions du Canada rural. Je vous remercie. Vous nous avez, nous toutes, différemment touchées.
    Madame Timmons, je vous félicite d'abord d'être la première femme nommée présidente de l'Université Memorial de Terre-Neuve-et-Labrador, ma province natale. Bravo!
    Comme vous le savez et comme mes collègues m'ont souvent entendue le dire, je représente une vaste circonscription, plus étendue que la Suisse, parsemée de centaines, littéralement, de communautés minuscules, que, pour beaucoup d'entre elles, vous avez visitées.
    Une qualité que j'apprécie de votre université, c'est les nombreux campus dispersés dans la province. Comme vous l'avez dit, dans votre exposé, il y en a treize.
    Si vous le pouvez, puis-je vous demander d'en dire un peu plus sur l'importance de cet essaimage, qui permet, désormais, à des femmes d'assister à des cours dans leur propre communauté, ce qui diminue le problème de la garde des enfants. Elles peuvent continuer à les élever chez elles. Les enfants adultes qui donnent un coup de main à l'entreprise familiale ou à la poissonnerie locale peuvent suivre des cours à proximité, pour améliorer leurs compétences et en acquérir de nouvelles.
    Pouvez-vous expliquer à quel point ces petits campus éloignés sont importants?
    Ils sont essentiels et ils sont même plus importants, quand on considère le besoin de « microdiplômation » et de perfectionnement professionnel.
    Quand j'ai parcouru la province — notamment votre magnifique circonscription —, j'ai visité beaucoup de ces petites communautés. J'ai écouté les inquiétudes des conseils municipaux et de nos anciens étudiants qui gèrent de petites entreprises locales. Partout, on parlait d'accès: accès à la formation, accès à l'éducation.
    J'ai parlé de ma mère et de ses six enfants, qu'elle a élevés dans le Labrador. Elle a terminé ses études secondaires, mais quand elle s'est trouvée enceinte de son sixième enfant en huit ans, elle a décidé de réagir. Elle s'est inscrite à l'enseignement à distance. À l'époque, tout se faisait par correspondance. Elle a décroché un diplôme en étudiant à la maison, faisant la cuisine, aidant la famille avec tous ses enfants. C'était la seule façon, pour nous, d'aller à l'université. C'est parce qu’elle a pu s'instruire à distance.
    J'ai dit que l'Internet est d'une importance capitale. Dans certaines communautés, il n'y a même pas de service de téléphonie cellulaire. Imaginez à quel point on peut être vulnérable sans lui, mais l'absence d'accès est la principale difficulté que pose l'éducation aux femmes qui travaillent, aux jeunes mères ou aux femmes qui, au milieu de leur carrière, ont besoin d'opérer un virage professionnel.
    C'est d'une importance capitale, et je suis heureuse que vous l'ayez soulevé, absolument. Je vous en remercie.
    Nous vous avons entendue sur le problème de la connectivité, qui a amplement précédé la COVID-19, mais l'épidémie l'a certainement mis au premier plan. Je suis ravie par le Fonds pour la large bande universelle que vient de créer notre gouvernement et par son volet de réponse rapide. Ils changeront vraiment des choses dans le Canada rural.
    Madame McCaie, j'ai une petite question.
    Votre travail, avec vos Femmes Fortes, est époustouflant. Sur tous les cours que vous offrez, lequel est le plus populaire, et pourquoi, d'après vous?
    Nous avons offert plus de 100 séances à ce jour, et nous en évaluons la réussite de diverses façons. Certains cours ne comptent pas beaucoup de participantes, mais celles qui sont là l’adorent. Je pense à l’atelier que nous avons donné sur les droits des personnes LGBTQ, où une seule participante était présente. Elle était mère d’un fils qui venait de lui révéler son homosexualité. Elle a pu poser toutes ses questions dans un environnement ouvert et sécuritaire. Je peux imaginer à quel point une seule personne peut changer la mentalité de sa famille, de sa collectivité, et ainsi de suite.
    Pour ce qui est de la réussite des cours, le degré de participation peut varier, mais les femmes qui les suivent les trouvent très pertinents. Les cours très prisés pour lesquels nous avons des listes d’attente portent sur tout ce qui a trait au travail manuel, à la construction, à la mécanique, au changement d’un pneu en bordure de route, et à tout ce qu’elles ont l’impression de ne pas avoir appris plus tôt dans leur vie. Ce sont des tâches pour lesquelles elles dépendaient peut-être d’une autre personne dans leur vie. Nous remarquons que les veuves aiment particulièrement ces cours.
(1230)
     Je vous remercie.
    Madame Martin, vous serez ravie d’apprendre que nous avons apporté des modifications au projet de loi sur la formation des juges, et qu’il a été adopté à l’unanimité par la Chambre. Nous l’appelons le projet de loi C-3. Il a été présenté par l'honorable Rona Ambrose, qui a fait un travail extraordinaire à ce chapitre. Vous serez heureuse d'apprendre qu'il est maintenant à l'étude du Sénat et qu'il progresse.
    Madame Martin, vous avez parlé de connectivité, et nous sommes tous d’accord pour affirmer que c’est un problème de taille. Pouvez-vous nous dire à quel point la connectivité est importante dans les collectivités rurales, en particulier pour les femmes qui cherchent à échapper à la violence conjugale?
    Pour ces femmes, la connectivité est un gage de sécurité puisqu’elles peuvent entrer en communication avec des personnes pouvant les aider. Qu’ai-je dit à propos de la connectivité?
    Vous avez dit à quel point c’était important.
    Ce qui me pose problème au sujet de la connexion à Internet pour les femmes dans le besoin au sein de collectivités vraiment rurales, c’est de savoir si elles pourront y avoir accès. Dans quelle mesure trouvez-vous important qu’elles aient un endroit sûr dans la collectivité, que ce soit à l’hôtel de ville, dans un sous-sol d’église ou au club Lions, où elles peuvent bénéficier d’une connexion Internet sûre et sécurisée sans que leur agresseur ne puisse épier leurs moindres faits et gestes?
    Je suis désolée, mais la réponse va devoir attendre puisque votre temps est écoulé.
     D’accord.
     Nous allons maintenant écouter Mme Larouche, qui a six minutes.

[Français]

     Je remercie beaucoup tous les témoins.
    Vous avez été absolument extraordinaires ce matin. Vous avez livré des témoignages très émotifs.
    J'aimerais continuer à parler de la connectivité à Internet haute vitesse. On sent que cette question exacerbe les différences entre les hommes et les femmes, particulièrement en milieu rural. Les femmes n'y ont pas suffisamment accès. On a parlé de rendre Internet haute vitesse disponible partout en région. Chez moi, à Shefford, ce n'est pas le cas, mais à côté, dans Brome—Missisquoi, il a été démontré que le plan pour Internet à large bande ne pourra pas couvrir tous les besoins.
    J'aimerais entendre Mme Timmons à ce sujet. Une bonne connexion Internet est déjà considérée comme un service essentiel.
    Que faudrait-il faire pour réussir à aider les femmes à y avoir accès? Que peut-on faire de plus?

[Traduction]

    Je peux répondre la première.
    Cela revient à ce que Mme Hutchings a dit. Tant que toutes les collectivités n’auront pas l’Internet haute vitesse, nous devons mettre des nœuds de réseau Internet à la disposition de la population. Je pense que vous avez parlé d’installer un poste de travail à la bibliothèque locale ou au club Lions. À vrai dire, un nœud de réseau devrait être installé dans la salle paroissiale de chaque petite collectivité. Nous étudions la possibilité d’offrir des formations de recyclage.
    Je vais vous donner un exemple. Dans le sud de la péninsule, beaucoup de gens travaillent dans le secteur des pêches, et ils ont besoin de formation continue. Ils sont nombreux à devoir faire bien du chemin pour suivre les cours. Si nous pouvions installer des nœuds de réseau dans ces collectivités, avec des bureaux, des ordinateurs et un accès, je pense que ce serait merveilleux pour les femmes qui cherchent de l’aide et qui subissent des violences dans la collectivité. Ce serait formidable pour les femmes qui envisagent de se perfectionner en obtenant une microcertification.
    Dans le monde d’aujourd’hui, je pense qu’il est essentiel d’installer des nœuds de réseau Internet dans chaque petite collectivité au Canada, en attendant l’arrivée d’Internet haute vitesse.
    À Almonte, les citoyens ont accès à des ordinateurs à la bibliothèque locale, ainsi qu’à des personnes-ressources qui les aident à utiliser le matériel.

[Français]

    Madame Timmons, vous avez beaucoup parlé d'éducation.
    À quel point le fossé entre les milieux urbains et ceux plus éloignés est-il grave? Comment cela se répercute-t-il sur le niveau d'éducation des femmes sur le plan de la diplomation et par conséquent, sur celui de la qualité des emplois?
    Voyons-nous vraiment des différences sur le plan de l'alphabétisation? Est-ce ce à quoi vous pensez lorsque vous parlez de l'importance de travailler à un même accès à l'éducation pour les milieux ruraux que pour les milieux urbains?

[Traduction]

    Les répercussions sont énormes dans bon nombre de nos collectivités rurales et nordiques. Je parle autant des étudiants que des étudiantes. Ils n'ont pas accès aux cours qui leur permettent de s'inscrire aux différentes filières universitaires. J'ai rencontré des élèves du secondaire au Labrador qui devaient suivre des cours de niveau secondaire en ligne pour obtenir les prérequis leur permettant d'entrer à l'université.
    Il y a un véritable défi sur le plan du genre. De nombreux habitants du Nord et de ces collectivités... Là où j'ai grandi, mes frères travaillaient dans les mines l'été. Ils pouvaient gagner de l'argent pour aider à payer leur université. Ce n'était pas mon cas. Puisque je ne pouvais pas travailler dans les mines, mes emplois étaient toujours beaucoup moins bien payés. Je devais faire un travail très difficile pendant de longues heures. Je plantais des arbres, je gardais des enfants et je faisais tout en mon pouvoir pour gagner de l'argent.
    L'accès à l'emploi est inégal dans les collectivités rurales et nordiques, et la rémunération aussi. Même l'accès au secondaire est inégal là-bas. Je tiens toutefois à préciser que cette iniquité des écoles secondaires touche tant les jeunes hommes que les jeunes femmes.
    Lorsque nous nous attardons à nos femmes autochtones au pays, nous sommes tous au courant de ce qu'elles vivent. Le pays les a souvent laissé tomber. Un des échecs les plus honteux du Canada sur le plan des politiques publiques se rapporte au soutien offert à nos sœurs en milieux autochtones.
    Je vais m'arrêter ici.
(1235)

[Français]

    Madame McCaie, vous avez parlé des communautés LGBTQ2+.
    Comment se fait-il que ces communautés soient encore plus victimes de préjugés dans les milieux ruraux? Quelle est leur situation un peu plus particulière?
     Traditionnellement, il y a beaucoup de personnes LGBTQ2+ en région rurale qui, aussitôt qu'ils obtenaient leur diplôme du secondaire, se dirigeaient vers les grands centres urbains afin de trouver une communauté. C'est certainement un défi en région rurale de montrer de l'inclusivité.
    La population n'est pas sensibilisée à ce type de chose. Ce n'est pas courant. C'est certainement mieux maintenant que ce l'était avant. Chaque année, cela s'améliore, mais il y a beaucoup de travail à faire sur le plan de l'éducation en région.
    Les personnes LGBTQ2+ ne veulent pas nécessairement déménager dans des centres urbains. C'est bien d'avoir l'option de rester dans sa communauté et de se sentir accepté. Je pense que ce sont des besoins particuliers, mais qui s'améliorent avec les années.

[Traduction]

    Très bien.
    Nous allons maintenant écouter Mme Mathyssen, qui a six minutes.
     Je vous remercie, madame la présidente.
    Je tiens moi aussi à remercier tous les témoins d'aujourd'hui pour leurs témoignages des plus importants.
    Madame Timmons, vous avez raconté une histoire très similaire à celle de mon enfance. Ma grand-mère ne pouvait pas étudier au-delà de la 8e année. Elle devait travailler à la ferme familiale et à d'autres exploitations agricoles pour contribuer au revenu familial et mettre du pain sur la table. Quand ma mère a vu que ma grand-mère n'avait pas eu accès à l'éducation, elle s'est efforcée de travailler d'arrache-pied pour que cela ne lui arrive pas — ni à moi, qui suis sa fille.
    J'aimerais revenir sur l'accès à l'éducation. De nombreuses études soulignent l'importance d'un accès précoce à l'éducation, et précisent la signification de l'apprentissage précoce et de la garde des jeunes enfants. Pour les femmes et les personnes à faible revenu, l'accès à l'éducation de la petite enfance a une incidence toute la vie: cette éducation augmente la capacité de gagner sa vie, accroît la productivité, réduit le recours aux services de santé et d'assistance sociale, diminue les coûts de la justice pénale et améliore les déterminants sociaux de la santé.
    En ce qui concerne le prolongement de l'enseignement, quel sera son effet sur les étudiants qui visent l'enseignement supérieur? Nous avons beaucoup parlé, surtout pendant la pandémie, des frais de scolarité et de leurs répercussions sur les étudiants qui, comme vous l'avez dit, ne gagnent pas assez d'argent pour payer leurs études. J'aimerais que vous parliez de l'importance d'aborder ce que nous essayons de faire à la Chambre des Communes — à savoir éliminer les intérêts que paient les étudiants sur ces prêts étudiants extrêmes —, mais aussi de l'importance de discuter des frais de scolarité, des prêts eux-mêmes et de la possibilité que les étudiants ne s'inquiètent pas d'une telle condamnation à l'endettement lorsqu'ils tentent de faire des études supérieures.
(1240)
     Puisque je suis psychologue en milieu scolaire, je serai la première à dire que l'éducation et l'intervention pour la petite enfance sont d'une importance capitale au pays. Ce n'est pas seulement dans l'intérêt des enfants, mais aussi des mères, qui peuvent alors se chercher un emploi valorisant ou faire des études.
    Mon fils cherchait un service de garde, mais il n'a rien trouvé. Lorsqu'il s'est fait offrir une place, c'était 1 000 $ par mois. Pour une jeune famille, c'est épouvantable et très difficile. Dans les collectivités rurales, il ne suffit pas de trouver un endroit. Il faut aussi s'assurer que le service de garde est de qualité et que les personnes à la tête des centres de la petite enfance ont les compétences et la formation nécessaires pour que les enfants s'y épanouissent pleinement.
    Je pense que vous avez mis le doigt sur le problème. C'est une des choses les plus importantes. À la fin de mon mot d'ouverture, j'ai dit que les services de garde d'enfants sont déterminants et qu'ils jouent un rôle égalisateur pour les femmes de notre pays.
    En ce qui concerne les frais de scolarité, eh bien, ils s'élèvent à 2 500 $ pour une année complète dans ma province. Je pense que payer 20 000 $ pour obtenir un diplôme universitaire est un excellent investissement. Comme je l'ai dit, j'ai également parlé à un père de St. Anthony dont les trois enfants fréquentent l'université. En tenant compte des déplacements au campus de St. John's et du coût de l'hébergement, le total est largement supérieur aux frais de scolarité. Lorsque nous parlons du coût de l'éducation postsecondaire, je pense que nous devons examiner la situation dans son ensemble plutôt que de nous limiter aux frais de scolarité.
    Il est essentiel que nous envisagions d'offrir des bourses non remboursables aux étudiants qui éprouvent des difficultés financières. Le gouvernement fédéral a fait un travail remarquable à cet égard, et j'espère qu'il poursuivra sur cette voie. Il ne devrait y avoir aucun étudiant au pays qui ne puisse pas fréquenter l'université pour des raisons financières. Nous devons toujours veiller à ce que l'université soit accessible à tous nos jeunes. Je pense que ce que vous avez dit est d'une importance capitale.
    Des mesures ont été prises pendant la COVID. En ce qui concerne la participation du gouvernement, je crois tout à fait que les solutions temporaires doivent devenir permanentes. Nous allons donc continuer à exercer des pressions en ce sens.
    Peu importe qui vous êtes ou vos moyens, à votre famille et à vous, il faut veiller à ce que l'éducation ne dépende pas du montant que vous pouvez payer. Il en va de même pour la garde d'enfants: où que vous soyez, les services de garde d'enfants doivent être accessibles universellement. Pour ce faire, ne croyez-vous pas que le gouvernement pourrait aller de l'avant avec une législation en matière d'éducation et de garde d'enfants, qui ressemblerait beaucoup à la Loi canadienne sur la santé, dont l'objectif est d'offrir un accès égal aux services de santé à tous les citoyens, où qu'ils soient?
    N'importe quel témoin peut répondre à la question.
    Je vais laisser une de mes collègues y répondre.
    C'est une évidence.
    D'accord, la réponse est claire.
     Me reste-t-il du temps?
    Non, votre temps est écoulé. Nous passons maintenant au deuxième tour, à commencer par Mme Shin, qui a cinq minutes.
     Je voudrais remercier tous les témoins d'aujourd'hui pour leurs témoignages. Je suis à la fois bouleversée et émue.
    Ma première question s'adresse à Mme Martin. Je suis profondément troublée d'entendre votre témoignage sur la culture qui est ancrée dans les collectivités éloignées, où la crainte attribuable à la dynamique du pouvoir empêche les gens de s'exprimer et empêche la justice de suivre son cours. Il en découle une loi du silence intergénérationnelle et perpétuelle.
    Avez-vous des suggestions sur la façon dont ces collectivités...? C'est un comportement d'entreprise culturel, n'est-ce pas? De quelles façons pouvons-nous briser ce silence et cette forteresse?
    Malgré les aspects négatifs, il y a des côtés positifs à ce que tout le monde se connaisse. Il y a toujours une personne là pour vous soutenir, vous aider, vous reconduire au besoin, ou du moins pour vous écouter et partager avec vous ses ressources.
    Ce que je veux vraiment dire, c'est que je suis d'avis qu'il y a des abus au sein de notre appareil gouvernemental. Lors de la période des questions, j'aimerais vraiment que le gouvernement donne un exemple de collaboration positive. Lorsqu'une personne se lève pour dire ce qu'elle pense que nous devrions faire, l'autre parti devrait répondre « Pourquoi pas? », plutôt que de dire que l'idée est vraiment stupide.
     Je voudrais que les instances supérieures montrent l'exemple en faisant preuve de respect, d'écoute et d'intérêt à l'égard des autres.
     Je suis désolée. C'est une petite montée de lait politique.
(1245)
     Je vous remercie. J'en prends bonne note. Je suis d'accord pour que les échanges à la Chambre soient plus positifs.
    Ma deuxième question porte sur la loi de Clare. J'ignore si vous êtes au courant. Je sais qu'elle a été mise en oeuvre en Saskatchewan, mais elle comporte une lacune. Pour les personnes qui appuient cette loi, si des modifications sont apportées à la Loi sur la protection des renseignements personnels, la GRC pourrait divulguer les antécédents de violence des contrevenants à leurs partenaires intimes. Vaudrait-il la peine de convaincre le Parlement d'apporter de telles modifications?
    Tous les témoins peuvent répondre.
     Tout à fait.
    Merci beaucoup.
    J'ai le temps de poser une dernière question.
    Pouvez-vous nous raconter des histoires de réussite ayant trait à des hommes sensibilisés? Il s'agit évidemment d'un élément fort important pour éliminer la violence contre les femmes et ce genre de problèmes. Quelles belles réussites pouvez-vous nous raconter?
     Je pense que vous avez mis le doigt sur une chose capitale. La violence fondée sur le sexe et faite aux femmes n'est un problème ni de femmes ni de genre, mais plutôt un problème de société. Nous devons apprendre aux hommes et aux femmes à dénoncer la violence, à en être témoins, à intervenir, à gérer la situation et à composer avec elle.
     Je pense qu'il y a beaucoup d'histoires positives d'hommes qui sont intervenus pour aider les femmes dans ces situations. Or, il y a encore une culture ou un club des copains, surtout dans le sport et à l'université. Une culture entoure les liens affectifs des hommes d'une équipe et ce genre de choses. Nous avons encore beaucoup de travail à faire. Nous devons sensibiliser nos jeunes hommes pour qu'ils contribuent à réduire la violence contre les femmes. Nos jeunes hommes jouent un rôle essentiel.
    Merci beaucoup.
    J'ai une histoire charmante à raconter. Quand je travaillais au refuge, il nous est arrivé d'accueillir des femmes inuites du Nord. J'avais un ami pilote à l'aéroport de Carp qui livrait de la nourriture dans le Nord. Quand nous avions des femmes inuites au refuge, je communiquais avec lui, et il leur rapportait des rôtis de caribou. C'était un chic type.
     Excellent.
     Nous allons maintenant écouter Mme Hutchings, qui a cinq minutes.
     Madame la présidente, je pensais que c'était au tour de M. Serré.
    C'est mon erreur.
    Allez-y, monsieur Serré.
     Merci, madame la présidente. Je remercie les trois témoins, et surtout Mme Martin.
    Votre témoignage est une des principales raisons pour lesquelles je siège au comité de la condition féminine depuis quatre ans. La députée Shin a parlé du volet intergénérationnel, et j'aimerais que nous y consacrions plus de temps. Comme il a été dit, les injustices que nous avons commises à l'égard de nos femmes des Premières Nations sont atroces, et bon nombre des mêmes enjeux touchent les femmes des régions rurales.
    Madame Martin, vous avez parlé des secrets de famille et des dimensions intergénérationnelles et rurales. Vous avez brossé un tableau qui montre que les choses n'ont pas changé depuis 50 ans. C'est là où nous en sommes, à essayer de faire avancer les choses.
     En 2018, nous avions une stratégie de 1,8 million de dollars pour les hommes et les garçons, mais maintenant, le gouvernement travaille avec les provinces, les collectivités autochtones et les municipalités dans l'élaboration d'un plan d'action stratégique national de lutte contre la violence sexiste.
    Je vais également poser la question à Mme Timmons. Angèle McCaie, j'espère que vous pourrez répondre et nous faire part de vos commentaires d'un point de vue rural. Vous avez parlé de l'éducation. Que recommanderiez-vous aujourd'hui comme plan d'action pour s'attaquer à un plus grand nombre de problèmes systémiques qui touchent les régions rurales du Canada dans votre coin de pays?
(1250)
     Je vous remercie.
    Il s'agit d'avoir les ressources dans les petites collectivités et d'avoir accès aux programmes et au financement. Il n'est pas nécessaire que le financement soit considérable, mais il est très important qu'il soit facilement accessible. Le programme Femmes Fortes a commencé avec une modeste subvention au bien-être de 5 000 $ et s'est développé pour devenir le vaste système que nous avons aujourd'hui, et qui se trouve dans d'autres municipalités du Nouveau-Brunswick. Parfois, il ne faut qu'un petit montant de démarrage et les encouragements qui permettent aux autorités locales et aux ressources locales de lancer quelque chose, parce que le Canada rural n'est pas pareil partout. Chacun a des problèmes particuliers à régler. À Rogersville, nous n'avons pas nécessairement un problème d'accès à Internet, mais nous avons la barrière de la langue.
    Il est donc essentiel de consulter les collectivités et de leur donner des ressources pour qu'elles puissent mettre en place ce dont elles ont besoin pour les femmes et les filles.
    J'ajouterais également qu'il est essentiel d'investir dans les organisations de femmes, ce que notre gouvernement a fait. Lorsque nous avons retiré de l'argent aux organisations de femmes dans ce pays, beaucoup de femmes se sont retrouvées en situation de vulnérabilité.
    Les refuges pour femmes qui accueillent des enfants — qui permettent aux femmes d'y amener leurs enfants — sont essentiels. De nombreuses collectivités ont des refuges pour sans-abri, mais ils sont destinés aux hommes; nous avons aussi besoin de refuges pour femmes sans abri. Nous avons besoin de maisons de transition et nous devons nous assurer de les soutenir et de les financer.
    Quand j'étais à Regina, j'ai été stupéfaite de voir le nombre de femmes qu'il fallait refuser au refuge à cause de la liste d'attente. Il n'y avait pas de place. Souvent, lorsque vous refusez des femmes, vous mettez leurs enfants en danger. Si nous voulons être sûrs de soutenir les femmes dans nos collectivités, nous devons soutenir les organisations qui font le travail de première ligne et qui travaillent tous les jours à soutenir les femmes vulnérables, comme l'a fait Mme Martin pendant tant d'années.
    Madame Timmons, vous recommanderiez probablement que toutes les personnes qui travaillent dans des refuges — dans toutes les provinces et tous les pays — soient dorénavant désignées comme étant des travailleuses essentielles.
    Elles sont essentielles.
    Je tiens à vous féliciter d'avoir obtenu le poste de présidente d'une université. Moins de 20 % des présidents d'université sont des femmes; nous devons faire mieux.
    Je vous remercie.
    Excellent.
    C'est maintenant au tour de Mme Larouche, qui dispose de deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je vais continuer ma tournée des témoins. Je n'ai pas encore eu l'occasion d'échanger avec Mme Martin.
    Madame Martin, dans votre témoignage, il est clair que, pour une femme qui habite en milieu rural, l'accès aux services relatifs à une bonne santé reproductive n'est peut-être pas adéquat. Je vous entends bien. Une bonne santé reproductive va du libre-choix jusqu'au bon suivi de grossesse.
    J'aimerais vous entendre particulièrement sur le manque de spécialistes pour accompagner les femmes en ruralité.

[Traduction]

    Je ne suis pas spécialiste de la santé des femmes en régions rurales, mais il est certain que la question de l'avortement est cruciale pour de nombreuses femmes, et on peut dire que les services de santé publique sont essentiels. Ce sont les gens qui, dans l'histoire que j'ai racontée à propos de Lanark-Nord et des anomalies cardiaques congénitales probablement dues à l'inceste.... En 1992 ou 1996, une unité de santé a été créée dans cette région. Je pense que cela changerait beaucoup de choses. Elles auraient accès à l'éducation et à tout cela, ainsi qu'à des services d'avortement.
(1255)

[Français]

    Madame Martin, peut-être de meilleurs transferts en santé pour le Québec et les provinces pourraient-ils créer une meilleure situation dans les milieux ruraux également.
    Il est probablement plus difficile d'intervenir auprès des femmes, notamment dans des situations de violence conjugale et de prostitution, parce qu'elles sont isolées.
    Quels outils pourraient aider ces femmes qui demandent de l'aide, qui ne savent pas vraiment comment quitter leurs communautés ni où aller chercher de l'aide qui pourrait les aider à s'en sortir?

[Traduction]

    Cela revient probablement aux services d'urgence. Les policiers sont les plus susceptibles d'être appelés à intervenir, et il faut les éduquer.
    Ils doivent avoir le soutien nécessaire. Dans certaines circonstances, ils devraient se faire accompagner par des femmes — des employées de refuge ou des policières — qui seraient en mesure de parler avec les femmes.
    Madame Mathyssen, c'est à vous pour deux minutes et demie.
    Voyons ce que je peux en tirer.
    Mes questions seront probablement inspirées de celles de ma collègue, Mme Larouche. J'ai parlé de l'universalité et de la Loi canadienne sur la santé.
    Madame McCaie, au Nouveau-Brunswick, la clinique 554, par exemple, est la seule clinique qui offre des services d'avortement et de santé génésique dans toute votre province. Pour vous et pour les femmes avec lesquelles vous interagissez, quelles ont été les conséquences de cette fermeture sur le plan de l'accès à de tels services en zone rurale?
    Je pense que c'est un grand recul pour les femmes. Cela a gravement ébranlé la confiance que le système de santé inspire aux femmes. Cela montre un réel manque de soutien pour la santé des femmes. C'est incroyable. Le débat que cette fermeture a suscité sur ce qui devrait être accessible aux femmes est assurément important. Malheureusement, les services ne sont pas là, et leur absence provoque de grandes ruptures sociales dans notre collectivité. C'est incroyablement triste.
    Permettez-moi de poser une autre question.
    Nous entendons notamment parler de l'augmentation des incidents de violence conjugale, ce qui se traduit par de graves préjudices pour les victimes. Il y a la violence apparente, mais il y a aussi, pour commencer, des comportements de contrôle ou de contrainte.
    Ma collègue a un projet de loi d'initiative parlementaire visant à fournir ce type d'information aux services de police afin de soutenir les femmes qui subissent de la violence conjugale. Pensez-vous que cela serait utile? Tout le monde peut répondre.
    Oui.
    Des voix: Oui.
    Un « oui » unanime, c'est une excellente façon de conclure notre discussion.
    Je tiens à remercier les témoins de tous leurs témoignages d'aujourd'hui ainsi que de leur contribution à la remarquable période de questions que nous avons eue.
    Sur ce, mesdames et messieurs les membres du Comité, nous vous verrons jeudi. Nous amorcerons la réunion par les travaux du Comité, et nous continuerons à partir de là.
    La séance est levée.
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