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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 18 novembre 1999

• 1809

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte et je souhaite la bienvenue à tous ceux qui se joignent à nous ce soir.

Comme chacun le sait, le Comité des finances tient des audiences publiques dans le cadre des consultations prébudgétaires en vue de faire des recommandations pour le budget de l'an 2000. Nous avons sillonné le Canada d'un océan à l'autre pour demander leur avis aux Canadiens.

Ce soir, nous sommes à Ottawa et nous faisons de même. Nous allons vous demander à vous, les témoins, de nous conseiller.

Nous avons le plaisir d'avoir avec nous des représentants de la Canada Family Action Coalition, de l'Alliance nationale pour les enfants, de la Fédération canadienne des services de garde à l'enfance, et de Troubles d'apprentissage—Association canadienne.

• 1810

Nous allons commencer par la Canada Family Action Coalition, représentée par M. Peter Stock, directeur des affaires nationales.

Comme vous le savez, vous avez cinq minutes pour faire votre exposé. Quand tous les témoins auront terminé, nous aurons une période de questions.

Bienvenue, monsieur Stock.

M. Peter Stock (directeur des affaires nationales, Canada Family Action Coalition): Merci, monsieur le président.

La Canada Family Action Coalition est un groupe national d'action non partisan formé de citoyens. Nous cherchons à promouvoir et à défendre la famille, les droits des parents, et d'autres questions connexes, notamment les normes de comportement communautaire, etc. Nous ne recevons pas d'argent du gouvernement, contrairement à d'autres groupes représentés ici.

Premièrement, nous tenons en tant qu'organisation à remercier le Comité des finances, en particulier pour le travail qu'il effectue depuis un an dans le dossier de la fiscalité des familles, notamment la déduction des frais de garde d'enfants. Certains députés qui sont ici ce soir ont travaillé avec beaucoup de diligence à ce sous-comité. Nous leur sommes reconnaissants pour l'excellent travail qui a été effectué.

Le comité s'est notamment penché sur le besoin d'examiner tout le système de la garde des enfants. Bien sûr, nous sommes d'avis et nous croyons que la plupart des Canadiens sont d'avis que le meilleur régime de garde des enfants, celui qui est de la meilleure qualité, c'est la garde des enfants assurée par les parents des enfants eux-mêmes.

Le gouvernement l'a reconnu, ou tout au moins il s'apprête à le faire dans le prochain budget, en prolongeant le congé parental au titre de l'AE pour les parents qui touchent des prestations de maternité.

Nous croyons qu'il reste du travail à faire dans le domaine de la fiscalité familiale, mais nous trouvons encourageant que le gouvernement semble du moins progresser dans la bonne voie. Nous voudrions que l'on mette fin à la discrimination dans le domaine du mariage. Nous croyons qu'il faut favoriser le mariage, et non pas le défavoriser. Certains aspects du régime fiscal doivent être retouchés.

Le deuxième point que nous voulons aborder ce soir, c'est que les impôts sont globalement trop élevés. À notre avis, aucun nouveau programme social n'est nécessaire. Nous sommes encouragés par le fait que le gouvernement a un soi-disant programme pour les enfants. Nous croyons que ce sont bien sûr les familles qui défendent le mieux les intérêts des enfants, et des familles moins taxées peuvent mieux s'occuper de leurs enfants.

Nous trouvons encourageant que le gouvernement cherche sérieusement à défendre les intérêts des enfants et nous espérons qu'en ce faisant il défendra l'intérêt des familles.

Enfin, nous nous présentons chaque année au Comité des finances avec une liste semblable. Les familles sont préoccupées par des dépenses qu'elles trouvent inutiles, du gaspillage, et qui contribuent à créer une mauvaise situation dans leurs collectivités.

Cette année, nous avons décidé de jeter un petit coup d'oeil sur le Conseil des arts du Canada. Cet organisme a accordé certaines subventions dont nous avons tous entendu parler: le film pornographique intitulé Bubbles Galore, financé grâce à 60 000 $ de deniers publics; les lapins morts suspendus dans les bois près de Winnipeg: 15 000 $. Enfin, en voici une qui n'a pas fait les manchettes, mais je voudrais faire savoir au comité qu'à la fin de septembre et au début d'octobre l'Université Simon Fraser a été l'hôte d'une conférence qu'on a qualifiée de littéraire, intitulée «Le sexe, la drogue et la loi: repousser les limites». Le Conseil des arts a versé 10 000 $ pour cette entreprise. Devinez qui a été conférencier invité? Nul autre que John Sharpe, un pornographe spécialisé dans la pornographie juvénile.

Nous estimons qu'il y a probablement de meilleures façons pour le gouvernement, pour le comité, de dépenser l'argent des contribuables. Nous vous encourageons à continuer de surveiller tout cela, et nous serons réconfortés de voir des améliorations.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Stock.

Nous entendrons maintenant Neil McFadyen.

M. Neil McFadyen (témoignage à titre personnel): En fait, c'est ma femme qui va faire l'exposé.

Mme Sheridan Gardner (témoignage à titre personnel): Je vais parler au nom de M. McFadyen.

Le président: Madame Gardner.

Mme Sheridan Gardner: Je voudrais vous parler de l'équité fiscale pour les familles, en particulier de l'article 63 de la Loi de l'impôt sur le revenu.

L'équité fiscale pour les familles, cela consiste à traiter équitablement les familles qui élèvent des enfants, peu importe que l'un des parents ou les deux travaillent à l'extérieur du foyer. Cela veut dire traiter chaque membre de la famille de la même manière que n'importe quelle autre personne.

Plus précisément, cela veut dire protéger les droits individuels de ceux qui sont identifiés comme conjoints. Il ne s'agit pas de demander des cadeaux ou une exemption plus élevée pour le conjoint sans raison valable. En fait, il s'agit de reconnaître le travail effectué par les conjoints pour élever les enfants, qui a une grande valeur pour la société et qui, s'il était accompli par toute autre personne qu'un conjoint, serait régi par la législation sur le salaire minimum et le Code du travail et pourrait faire l'objet de déductions aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu.

• 1815

L'équité fiscale pour les familles, c'est reconnaître le coût pour les parents et la valeur pour la société du soi-disant travail non rémunéré effectué par le conjoint. Historiquement, ce travail non rémunéré était qualifié de «travail de femme». Par conséquent, l'équité fiscale pour les familles consiste en réalité à traiter équitablement les femmes et les conjoints qui s'occupent des enfants.

La Charte canadienne des droits et libertés est censée garantir les droits individuels, quel que soit l'état civil. Par conséquent, l'état civil d'un conjoint ne devrait pas entrer en ligne de compte. Pourquoi, dans ce cas, la Loi de l'impôt sur le revenu traite-t-elle constamment les personnes mariées, généralement des femmes mariées, comme des conjoints subordonnés à l'autre conjoint, et pourquoi élimine-t-on ainsi leurs droits individuels? C'est l'élimination des droits individuels du conjoint, généralement une femme, qui entraîne un traitement fiscal inéquitable pour les familles.

Je voudrais vous dire brièvement pourquoi mon conjoint et moi- même nous intéressons à cette question.

J'ai été en poste outre-mer à titre d'employée du gouvernement. Mon conjoint m'a accompagnée et a travaillé à l'étranger. À notre retour au Canada, il a reçu une cotisation de plus de 100 000 $ parce qu'il était marié avec moi. En tant que conjoint d'une employée du gouvernement en poste à l'étranger, il n'avait pas droit au statut de non-résident, et on lui a refusé d'invoquer le traité fiscal pertinent. Ce fut pour nous une expérience épouvantable.

Je peux donc dire que nous avons fait personnellement l'expérience, de façon absolument extrême, de la discrimination fiscale imposée aux conjoints par une loi en apparence inoffensive. Il s'agissait de l'article 250 de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Le ministre des Finances a récemment jugé bon d'apporter des modifications à cette loi, et nous lui en sommes très reconnaissants. Toutefois, nous sommes encore tous les deux en instance... enfin, quand je dis tous les deux, mon conjoint s'est adressé à la Cour de l'impôt, et je m'apprête aussi à m'adresser à la Cour de l'impôt, et c'est ce qui explique notre intérêt envers ce dossier.

L'article 63 de la Loi de l'impôt sur le revenu empêche effectivement un conjoint de payer l'autre conjoint pour s'occuper des enfants. Il instaure également une discrimination contre les conjoints. Je veux ce soir proposer certains changements à la Loi de l'impôt sur le revenu pour redresser cette inégalité de la fiscalité des familles et pour protéger les droits individuels des conjoints, en reconnaissant la valeur pour la société de l'éducation des enfants.

L'éducation des enfants n'est pas moins valable pour la société lorsqu'elle est effectuée par un conjoint qui reste à la maison que par quelqu'un d'autre qui est embauché pour faire ce travail. Aux fins de l'impôt, la société canadienne reconnaît déjà les frais de garde d'enfants par une déduction de 7 000 $ par enfant de moins de 7 ans et de 5 000 $ par enfant de plus de sept ans. Pourquoi un parent doit-il accomplir cette tâche gratuitement? La Cour suprême qualifie cette situation d'exploitation dans la récente décision rendue dans l'affaire M. c. H.

Je cite un passage de la décision:

    [...] bien des gens vivent ensemble dans le cadre de telles relations et sont exploités par leur partenaire. Ils ont été incités à entrer dans cette relation et à rester à la maison pour élever les enfants qui sont le fruit de l'union, ou les enfants d'une autre union, et ont ainsi été placés dans une position de dépendance totale, étant retirés du marché du travail pendant de longues périodes. Beaucoup de ces personnes sont ensuite abandonnées et, aux termes de la loi actuelle, elles n'ont aucun recours, sauf s'adresser aux autorités chargées de l'assistance sociale.

Un conjoint ou un parent doit-il s'occuper des enfants gratuitement parce que personne ne lui verse un salaire? Non. Les conjoints ou les parents doivent s'occuper des enfants gratuitement parce que la législation fiscale actuelle empêche un partenaire de rémunérer le conjoint ou le parent en lui refusant le droit de déduire ces dépenses aux fins de l'impôt.

En 1993, M. Jim Boland s'est adressé à la Cour de l'impôt pour contester l'article 63 de la Loi de l'impôt sur le revenu. Il ne voulait pas exploiter sa partenaire et il a essayé de réclamer une déduction pour le salaire qu'il versait à sa femme pour s'occuper des enfants. Le juge n'a pas trouvé qu'il s'agissait d'un cas de discrimination aux termes de l'article 15 de la Charte des droits, sous prétexte que les parents qui restent à la maison ne constituent pas un groupe vulnérable historiquement victime de discrimination.

Je pense que cela contredit directement la référence à l'exploitation des parents qui restent à la maison dans cette décision de la Cour suprême. Ce dont le juge n'a pas tenu compte, c'est que la grande majorité des parents qui restent à la maison pour s'occuper des enfants sont des femmes, qui constituent effectivement un groupe vulnérable historiquement victime de discrimination.

L'article 63 exerce une discrimination contre les parents qui restent à la maison et contre les conjoints et perpétue l'exploitation de ce groupe, qui sont essentiellement des femmes. La législation fiscale a à de nombreux égards pour effet d'empêcher les conjoints d'avoir de l'argent. En particulier, la loi empêche les femmes, les épouses, d'avoir de l'argent. En fait, l'article 63 ressemble aux paragraphes 74(3), 74(4) et 74(5), qui ont été abrogés en 1980. L'article 74 empêche un conjoint d'être rémunéré à titre d'employé de son conjoint, ou d'être rémunéré en partenariat avec son conjoint.

• 1820

En fait, le conjoint était tenu de fournir du travail gratuitement à son conjoint, et c'est là un exemple d'exploitation et de discrimination historiques contre les conjoints. Le mariage ne doit pas servir à condamner les femmes ou les conjoints à la servitude en les obligeant à accomplir du travail gratuitement pour leur conjoint ou pour le plus grand avantage de la société. Le mariage ne transforme pas l'un des conjoints en coupon-repas et l'autre en esclave. Une fois marié, on ne cesse pas d'être une personne. Pourtant, tel était exactement l'effet de l'article 74 et tel est l'effet de l'actuel article 63 de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Il faut signaler que les seules circonstances dans lesquelles un conjoint peut en rémunérer un autre pour s'occuper des enfants, c'est lorsque les partenaires se séparent ou divorcent et que des paiements sont versés sous forme de pension alimentaire. C'est tristement révélateur de la valeur du mariage pour la société que l'un des partenaires puisse de par la loi, avoir accès à la richesse familiale seulement, en cas de rupture de la famille.

Le partage du revenu a été proposé comme solution au problème d'équité fiscale des familles. Encore une fois, cette proposition aurait pour effet d'empêcher les femmes et les autres conjoints d'avoir de l'argent en leur refusant un revenu gagné. De plus, le partage du revenu ne reconnaît pas la valeur du travail accompli par le parent qui reste à la maison pour s'occuper des enfants. Le partage du revenu serait probablement accessible aux conjoints qui ne s'occupent pas des enfants, parce que leur refuser la possibilité de profiter du partage du revenu serait considéré comme une loi fiscale discriminatoire fondée sur la situation familiale.

Par conséquent, il est essentiel que la solution au problème de l'équité fiscale des familles passe par la reconnaissance de la valeur des soins dispensés aux enfants par un parent ou conjoint. C'est un revenu gagné qui sert à récompenser la contribution envers la société de ceux qui s'occupent d'élever les enfants. Un revenu gagné permettrait aux parents qui restent à la maison d'avoir tous les droits et avantages dont jouissent les autres qui gagnent un revenu, c'est à dire que ces personnes pourraient cotiser à un REER, pourraient cotiser au RPC et à l'AE et toucher des prestations, et aussi au régime d'assurance-invalidité, et pourraient avoir des cartes de crédit, des prêts bancaires, etc.

La solution, c'est de commencer par abroger l'article 63 de la Loi de l'impôt sur le revenu. Alors le Canada sera le meilleur endroit du monde pour les femmes.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Gardner.

Passons maintenant à M. Stokes.

M. Frank E. Stokes (témoignage à titre personnel): C'est M. Van Wagner qui prendra la parole.

Le président: Monsieur Van Wagner.

M. Charles E. Van Wagner (témoignage à titre personnel): Merci beaucoup, monsieur le président.

Mesdames et messieurs, mon collègue et moi sommes deux simples citoyens. Nous sommes aussi deux maris qui vivent dans des couples retraités ne recevant chacun qu'une seule pension, et nous voulons vous donner notre point de vue sur le système fiscal.

Nous ne sommes ni d'anciens économistes ni d'anciens fiscalistes, mais nous avons quand même une certaine expérience en la matière, puisque cela fait déjà de 40 à 50 ans que nous payons de l'impôt sur notre revenu. De plus, nous sommes des gens curieux. Il y a plusieurs années, nous nous sommes demandé pourquoi nos revenus étaient taxés comme si nous étions célibataires, alors que notre couple était évidemment formé de deux personnes. Même si nous avons depuis accumulé une liasse de correspondance et fait énormément de lectures, nous n'avons à ce jour rien entendu qui puisse résister devant le moindre débat qui soit.

Commençons par la notion selon laquelle le régime d'imposition n'est qu'un ramassis d'équations arithmétiques. Il y a des hypothèses de base qui découlent aisément de sa structure, et toute interprétation n'est valable que si elle correspond exactement à la structure et à ses résultats. Il suffit d'analyser l'arithmétique des codes fiscaux pour conclure que les couples ayant des revenus égaux sont ceux qui paient le moins d'impôt.

Or, ce sont ceux-là qui sont devenus la norme logique de comparaison. Tous les autres couples paient donc plus d'impôt, au fur et à mesure que leurs revenus divergent. Appelons cette taxe supplémentaire la pénalité imposée sur la différence de revenu et sachons que sa valeur maximale, c'est la pénalité qui s'applique au revenu unique. Malgré le minuscule crédit au conjoint qui est accordé lorsqu'un des deux revenus est nul, le soutien de famille reste taxé comme s'il était célibataire. Notez que, peu importe que les deux revenus diffèrent par choix ou par nécessité, cette pénalité fiscale s'applique dans tous les cas.

Nos tableaux—que vous avez reçus, nous l'espérons—expliquent clairement tout cela, et nous espérons même que nos chiffres vous intrigueront et vous intéresseront.

Ces divergences fiscales se sont évidemment accentuées, particulièrement depuis la révision désastreuse de 1988, lorsque l'on a fait doubler ou tripler d'un seul coup la pénalité s'appliquant à un seul revenu. Je pense que très peu de gens, y compris ceux qui sont au gouvernement, comprennent l'importance et la nature de ces pénalités. Elles sont sans doute les plus lourdes jamais imposées dans le monde, ce qui n'est pas peu dire.

Regardons maintenant les deux différents types de mariages qui coexistent dans le droit canadien et qui sont aussi distincts l'un de l'autre que le feu et l'eau. Dans le droit familial, le mariage est une union sociale et économique de deux partenaires qui partagent tout à égalité et qui jouissent du même niveau de vie. Dans le droit fiscal, au contraire, le mariage est constitué de deux étrangers vivant sous le même toit et vivant de revenus distincts, si inégaux soient-ils.

• 1825

Les autorités fiscales croient-elles vraiment que les couples canadiens continuent à vivre, peu importe ce qui arrive, avec des revenus individuels? Ou pis encore, croient-elles que l'on continue à considérer les revenus comme étant individuels lorsque l'on élève des enfants?

Voyez-vous, l'ingrédient essentiel qui manque dans ce modèle fiscal du mariage, c'est le partage officieux des revenus. Mais nous voilà évidemment sur une pente glissante. Réfuter l'existence de ce partage officieux, cela revient à prétendre que deux sources d'eau différentes ne se mélangent pas dans un même réservoir; mais dès lors que l'on admet que ce partage existe de façon plus ou moins poussée, il devient impossible de justifier la pénalité fiscale qu'on impose actuellement sur la différence de revenu.

Demandons-nous ensuite ce qui arrive lorsque le régime d'imposition fait reposer des caractéristiques secondaires sur un revenu familial conjoint: surgit alors une contradiction insoluble. Pourquoi? Parce que le revenu conjoint n'est pas une véritable mesure de quoi que ce soit lorsque l'on parle d'un couple marié, et certainement pas de l'impôt exigible ni du revenu disponible après impôt.

L'exemple le plus frappant de ce que je viens d'affirmer, c'est évidemment les enfants. Tant que les parents seront imposés séparément, il sera impossible de concevoir un régime de prestation fiscales pour enfant qui soit équitable et fondé sur un revenu conjoint. Seuls les revenus égaux pourront bénéficier de la pleine prestation prévue. Tous les autres couples rembourseront plus à cause d'une taxe imposée sur la différence de leurs revenus, au fur et à mesure que leurs revenus divergeront tout en atteignant le même montant total.

Notez que cette iniquité ne se fait pas sentir uniquement entre les couples à revenu unique, d'une part, et les couples à deux revenus, d'autre part, mais qu'elle se fait sentir également partout où il y a deux revenus. Autrement dit, à moins que le régime d'imposition ne comprenne vraiment ce qui se passe dans les couples en général, il ne comprendra jamais comment il peut aider les enfants.

Cette année est l'Année internationale des personnes âgées, et il est approprié que l'on se demande ce qui arrive aux parents une fois que leurs enfants ont grandi, puisque c'est chez les couples retraités que se constate en premier lieu cette iniquité flagrante et qu'elle est surtout injustifiable. On ne parle plus ici de dépenses reliées à l'emploi ou aux enfants, et il n'est plus question de revenir sur le marché du travail: on parle ici uniquement de couples qui vivent de leurs pensions combinées et qui paient de l'impôt. En fait, la pénalité imposée au revenu simple augmente après la retraite. En effet, les trois caractéristiques particulières qui s'appliquent aux personnes âgées nuisent aux couples ne recevant qu'une seule pension et profitent aux couples recevant deux pensions.

Pire encore, les familles qui auront passé plusieurs années à élever leurs enfants avec un seul revenu ne s'en remettront jamais complètement. En effet, même si les deux parents peuvent toujours gagner autant d'argent l'un que l'autre une fois que les enfants ont quitté le nid familial, il n'est désormais plus question d'avoir deux pensions égales, et on doit parfois se contenter d'une seule. La pénalité fiscale qui s'applique aux années pendant lesquelles on élève sa famille peut donc être considérée comme une condamnation à perpétuité pendant les années de la retraite. Additionnez les pénalités qui ont été imposées pendant plusieurs décennies comme nous l'avons fait dans les tableaux que vous avez reçus, et il saute aux yeux que nombre de couples plus âgés ont perdu une petite fortune, tout simplement parce que leurs revenus n'ont jamais été considérés à parts égales pour les deux membres du couple, ce qui est incompréhensible pour n'importe quel couple qui aurait innocemment tout partagé à égalité pendant la durée du mariage.

En 1966, la Commission royale d'enquête sur la fiscalité affirmait qu'un couple marié était considéré comme une unité économique et qu'il devrait être imposé comme une unité. Les arguments de la commission d'enquête ont été rejetés à l'époque, mais ils nous semblent plus d'actualité aujourd'hui que jamais.

On parle beaucoup aujourd'hui d'allégements fiscaux, mais cela ne ferait que perpétuer en soi l'iniquité actuelle. Or, puisque le gouvernement a un peu plus d'argent dans ses poches, il aurait là une occasion en or d'entreprendre une véritable réforme fiscale. À la veille du nouveau millénaire, il est grandement temps que le Canada ait enfin un système d'imposition neutre qui ne favorise pas un style de vie plutôt qu'un autre ni ne pénalise un couple marié du simple fait que les deux revenus diffèrent.

Le président: Merci.

Nous recevons maintenant Mme Dianne Bascombe, ancienne directrice générale de la Fédération canadienne des services de garde à l'enfance.

Bienvenue, madame Bascombe.

Mme Dianne Bascombe (ancienne directrice générale, Fédération canadienne des services de garde à l'enfance): Bonsoir. Je suis heureuse de me joindre à vous ce soir.

Mes commentaires seront brefs. Nous voulions vous parler brièvement et à nouveau de la recherche qui démontre—même si vous le savez sans doute déjà—que la petite enfance est cruciale pour l'avenir des enfants au Canada et que c'est elle qui leur permet d'atteindre leur plein potentiel.

• 1830

La signature d'une entente sur l'union sociale et le Programme d'action national pour les enfants offrent au Canada une occasion en or d'agir. Il nous est possible aujourd'hui de saisir cette occasion et de faire toute la différence; nous pouvons commencer à renverser la vapeur après les compressions qui ont été imposées dans certains des programmes qui ont touché nos citoyens les plus vulnérables, c'est-à-dire nos petits enfants de zéro à six ans.

Voici ce que nous vous demandons: lorsque vous déposerez votre budget en février de l'an 2000, nous vous exhortons à ouvrir le millénaire avec un budget pour les enfants, en vous engageant sérieusement comme gouvernement fédéral à montrer la voie en vue de concrétiser le Programme d'action national pour les enfants.

Tous ceux qui lisent les journaux et qui ont étudié les résultats des recherches remarquent qu'une part de plus en plus grande des Canadiens s'entendent pour dire qu'il faut investir dans nos enfants les plus jeunes. Il faut nous assurer qu'ils reçoivent les soins de la plus haute qualité dans leur petite enfance ainsi que l'instruction qui leur préparera la voie vers un meilleur avenir.

Je tiens aussi à préciser que, quand nous parlons d'éducation et de soins pour la petite enfance, nous n'envisageons pas des programmes pour un type de famille seulement. Nous pensons plutôt à des programmes qui répondraient à la multitude des besoins de toutes les familles du pays, que les parents travaillent ou qu'ils restent au foyer.

Il nous faut reconnaître que notre économie est structurée de telle sorte que les familles et les parents travaillent effectivement. Il faut veiller à ce que, quand les parents travaillent ou étudient, leurs enfants reçoivent des soins de grande qualité. Il nous faut aussi reconnaître que nous devons veiller à assurer aux familles dont les parents sont au foyer une gamme complète de soutiens communautaires et sociaux pour répondre à leurs besoins aussi. Il nous faut offrir des programmes de ressources aux familles. Il nous faut veiller à mettre en place des programmes d'intervention précoce auprès des enfants à risque, afin de nous occuper des plus vulnérables. Quand nous parlons d'éducation et de soins pour la petite enfance, nous parlons finalement d'une vaste gamme de services communautaires qui puissent répondre aux besoins de nos enfants en bas âge.

Brièvement, en tant que membres de l'Alliance nationale pour les enfants—qui vous présentera son exposé après nous par l'entremise d'un de nos collègues—, nous appuyons assurément toutes les recommandations de l'alliance. Nous estimons notamment que le moment est on ne peut plus opportun pour que le gouvernement fédéral investisse dans un fonds d'éducation et de soins pour la petite enfance. Nous avons pensé qu'un montant de deux milliards de dollars constituerait une bonne mise de fonds afin d'aller de l'avant et de faire vraiment la différence dans la vie de nos enfants en bas âge au Canada.

Dans le cadre aussi du programme pour les enfants, il est crucial que le gouvernement fédéral mette de l'argent sur la table dans son budget de l'an 2000. Pareille affectation de fonds permettrait de donner un bon coup d'envoi au processus afin que tous les paliers de gouvernement ainsi que le secteur bénévole et les membres des collectivités puissent travailler de concert à l'établissement d'un système coordonné qui nous permettrait de répondre aux besoins de nos enfants en bas âge en leur offrant toute la gamme des services d'éducation et de soins pour la petite enfance.

Merci.

Le président: Merci.

Nous entendrons maintenant M. Harvey Weiner, de l'Alliance nationale pour les enfants.

Je vous souhaite la bienvenue.

M. Harvey Weiner (sous-secrétaire général, Alliance nationale pour les enfants): Merci, monsieur le président.

C'est tout un honneur que de pouvoir prendre la parole au nom de l'Alliance nationale pour les enfants, qui regroupe plus de 25 organisations nationales de tout le Canada qui offrent des services directement aux enfants et aux jeunes de notre pays.

Ce n'est pas une mince affaire à mon avis que notre alliance, c'est-à-dire les 25 organisations membres ou plus que nous comptons et qui touchent la vie de millions d'enfants et de jeunes dans tout le pays, dont la clientèle—vous n'avez qu'à vous reporter à la liste qui se trouve à la dernière page de notre mémoire—comprend, au bas mot, environ un million de contribuables des différentes régions du pays qui oeuvrent au sein de ces organisations bénévoles et de ces organisations non gouvernementales, comme celle que je représente moi-même, à savoir la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants... que nous ayons réussi à partager notre expertise et nos connaissances en matière de prestation de services dans tous les domaines qui touchent au bien-être et à la santé des enfants et des jeunes du pays entier.

Nous sommes à même d'apprécier le travail qui se fait dans divers ministères fédéraux, ainsi que dans divers ministères provinciaux, par l'entremise de comités mixtes qui ont été créés, et qui augurent bien selon nous pour ce qui est de la possibilité d'avoir des accords en place pour le nouveau millénaire qui permettront d'assurer aux enfants et aux jeunes du pays tout entier des services complets et durables.

• 1835

L'entente cadre sur l'union sociale à laquelle sont arrivés les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux constitue une véritable occasion d'oublier les querelles de compétence et de travailler ensemble en collaboration avec le secteur bénévole et celui des ONG pour assurer une meilleure qualité de vie à nos enfants et à nos jeunes.

Prévoir dans le prochain budget des dépenses cinq milliards de dollars sur deux ans pour les enfants, les jeunes et les familles serait un excellent moyen d'avancer vers la réalisation de cet objectif. Le gouvernement fédéral indiquerait ainsi clairement aux provinces et aux territoires qu'il est prêt à mettre des sommes importantes sur la table s'ils parviennent à s'entendre avec lui sur un ensemble exhaustif de programmes, de services et de soutiens du revenu qui améliorera la qualité de vie des enfants et des jeunes du pays tout entier.

Au chapitre de la sécurité du revenu, nous sommes d'avis qu'une partie de ces sommes devrait être consacrée à la prestation nationale pour enfants, pour relever le montant à 2 500 $ par enfant et l'indexer à l'inflation. On pourrait aussi de ce fait élargir l'application de la prestation afin d'y inclure toutes les familles à faible revenu, peu importe leur source de revenu.

Il serait aussi essentiel de réformer la fiscalité pour répondre aux besoins des enfants et des familles. Ainsi, nous recommandons la mise en place d'un crédit d'impôt non remboursable de 2 000 $ par enfant afin de venir en aide à toutes les familles dont les parents travaillent à l'extérieur ou restent au foyer.

Nous sommes très heureux de l'annonce qu'a faite le gouvernement dans le discours du Trône en ce qui concerne l'allongement des congés parentaux. Nous y voyons un bon premier pas. Notre alliance recommande que le délai de carence de deux semaines soit supprimé et que le niveau des prestations passe de 55 p. 100 à 75 p. 100 des gains antérieurs.

En ce qui concerne les soutiens communautaires, nous nous fondons sur les discussions que nous avons eues et sur le travail que nous avons fait et que nous continuerons à faire comme alliance pour dire qu'il nous faut effectivement une gamme complète de services et de soutiens communautaires pour assurer à tous les enfants les avantages d'un développement sain.

À cette fin, nous recommandons d'inclure dans le budget 2000 un fonds désigné de deux milliards de dollars sur deux ans pour permettre d'apporter des améliorations essentielles à une multitude de services communautaires dans des domaines où le besoin se fait particulièrement sentir, comme l'éducation et les soins pour la petite enfance, le logement social, les programmes pour enfants et jeunes à risque, les services aux jeunes, les soutiens aux parents, ainsi qu'une gamme complète de services de prévention en matière de santé.

La mise en oeuvre du Programme d'action national pour les enfants doit à tout prix comprendre—et nous sommes d'accord là- dessus avec les fonctionnaires qui travaillent à ce dossier—des mécanismes d'évaluation pour que nous puissions surveiller les progrès de nos enfants et de nos jeunes. Cette surveillance s'exercerait à long terme.

Nous sommes enchantés du travail qui a été fait jusqu'à maintenant dans le cadre de l'étude longitudinale nationale des enfants et des jeunes. Les résultats préliminaires de cette étude montrent tous l'opportunité de prendre des mesures comme celles que nous vous proposons aujourd'hui, mais il nous manque toujours un ensemble de données quantitatives de base sur la prestation de services aux enfants, aux jeunes et aux familles.

Nous sommes d'avis qu'un investissement initial de 50 millions de dollars afin de contribuer à l'élaboration et à la mise en oeuvre d'une stratégie nationale qui permettrait de suivre l'état de santé et le bien-être des enfants et des jeunes du Canada, en collaboration... et nous sommes prêts à apporter notre expertise et notre soutien en nature à cette initiative. Je veux parler bien entendu du secteur bénévole et des ONG.

• 1840

En conclusion, monsieur le président, nous croyons que le moment est tout désigné pour que le gouvernement fédéral continue à exercer le leadership dont il commence à faire preuve, en concrétisant les mesures qu'il a proposées et qui en disent long sur sa compassion. Pour concrétiser ces mesures, il lui faudrait prévoir dans le prochain budget des crédits à long terme expressément réservés à cette fin, comme le ministre Martin l'a déjà fait avec succès par le passé quand il a voulu réduire le déficit et comme il semble vouloir le faire pour réduire les impôts. Nos enfants et nos jeunes méritent sûrement un engagement aussi durable et à long terme.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Nous entendrons maintenant l'ancien président de l'Association canadienne des troubles d'apprentissage, M. James Horan.

Je vous souhaite la bienvenue.

[Français]

M. James Horan (ancien président, Association canadienne des troubles d'apprentissage): Monsieur le président et membres du comité, j'aimerais vous remercier de votre invitation.

[Traduction]

Je suis ancien président de Troubles d'apprentissage- Association canadienne. Il y a plus de 15 ans que j'oeuvre au sein de cette association, au niveau local, provincial et national. Notre mission est simple: faire avancer l'instruction, l'emploi, le développement social, les droits juridiques et le bien-être général des personnes ayant un trouble d'apprentissage.

Dans l'exposé que je vous présenterai aujourd'hui, je m'attarderai en fait à quatre recommandations d'importance capitale: la détection précoce chez les enfants, le matériel de compensation, l'évaluation des étudiants du niveau postsecondaire et les allégements fiscaux pour les étudiants du niveau postsecondaire ayant un trouble d'apprentissage.

En faisant ces recommandations, je tiens à préciser que notre association est consciente de la situation précaire de votre comité, car nous savons que vous devez vous occuper d'un côté de la dette nationale et de l'autre d'une foule de gens qui ont toutes sortes de besoins. C'est une situation délicate, mais pas insurmontable. Au coeur de chaque Canadien, il y a une flamme qui brûle, la flamme de l'esprit canadien qui nous permettra d'entrer brillamment dans le prochain millénaire.

La Coalition canadienne pour les droits des enfants a publié aujourd'hui un rapport, et je pense que nous en connaissons tous le contenu. Les titres des journaux sont suffisamment explicites. D'après ce rapport, le Canada respecte en grande partie ses obligations en vertu de la convention. Toutefois, on constate clairement que les enfants canadiens ayant des troubles d'apprentissage ne bénéficient pas des services sociaux et d'enseignement essentiels dont ils ont besoin. Le rapport souligne l'absence de diagnostic précoce et d'intervention appropriés pour les enfants ayant des troubles d'apprentissage.

Les recherches et l'expérience abondantes que nous avons accumulées démontrent que si l'on procède à un diagnostic précoce, si l'on propose un ensemble continu de services et si l'on investit dès le départ, on peut permettre à ces jeunes enfants présentant des troubles d'apprentissage de devenir des adultes qui auront un potentiel.

Car nous faisons des investissements: nous investissons des sommes énormes pour les jeunes de 16, 17, 18 et 19 ans qui ont des troubles d'apprentissage et se retrouvent dans des centres de détention, qui sont incarcérés. Nous investissons pour ces jeunes, c'est incontestable.

La question est de savoir comment on peut prendre une partie de cet argent pour intervenir plus tôt. Est-ce que ce ne serait pas un meilleur investissement? Il serait logique de déplacer une partie de cet argent. Si nous investissons maintenant, le rendement demain sera bien meilleur.

Nous recommandons par conséquent que le gouvernement du Canada s'engage à créer un programme d'action national pour les enfants qui inclura un mécanisme universel et accessible de dépistage des enfants âgés de trois à six ans.

La recommandation 2 concerne le matériel de soutien: les ordinateurs et les logiciels. En cette ère de technologie, il est incontestable que ceux qui n'ont pas accès à ces outils deviennent des exclus. Ceux qui n'y ont pas accès vont vivre dans la pauvreté et ne pourront pas participer aux activités quotidiennes du pays.

Nous avons eu beaucoup de discussions avec Finances Canada. Ils ont peur des abus. Ce que nous répondons, c'est qu'il s'agit d'un très petit pourcentage de Canadiens qui ont de graves troubles d'apprentissage et qui sont désavantagés s'ils ne peuvent pas disposer de logiciels et d'ordinateurs.

• 1845

On sait que lorsqu'il faut aménager une automobile pour des jeunes handicapés physiques, c'est une dépense légitime. Ce que je veux vous dire aujourd'hui, c'est qu'il faudrait permettre à ces jeunes enfants ou adolescents, à ces adultes qui ont de graves troubles d'apprentissage, d'être au même niveau que les autres en leur donnant accès à des ordinateurs et à des logiciels.

Nous recommandons donc que le gouvernement du Canada exonère de taxe l'achat d'outils de soutien comme les logiciels et les ordinateurs par des personnes ayant de graves troubles d'apprentissage.

L'évaluation des étudiant au niveau postsecondaire: je suis enchanté de parler de ce sujet. Naguère, rares étaient les Canadiens ayant des troubles d'apprentissage qui pouvaient aller à l'université, ou même à un collège.

Le gouvernement du Canada aide les étudiants qui ont des handicaps permanents par le biais des subventions canadiennes pour études, qui étaient autrefois les subventions pour initiatives spéciales. Grâce à ces subventions, un étudiant qui a un handicap permanent peut recevoir jusqu'à 5 000 $ pour couvrir les frais exceptionnels liés à l'enseignement qui sont entraînés par son handicap.

Contrairement aux prêts aux étudiants, ces subventions ne doivent pas être remboursées, mais pour pouvoir y être admissible l'étudiant qui a un trouble d'apprentissage doit fournir des documents prouvant qu'un handicap permanent l'empêche de participer pleinement à des études postsecondaires ou à la population active. Autrement dit, l'étudiant qui a un trouble d'apprentissage doit fournir des documents comportant un diagnostic officiel, qui porte souvent sur trois ans. Bien que la subvention couvre des dépenses exceptionnelles—tuteurs, interprètes, matériel spécial—elle ne couvre jamais les frais de l'évaluation psycho-éducative, qui vont actuellement de 800 $ à 1 500 $.

Les évaluations servent à adresser des recommandations aux professeurs pour qu'ils adaptent leur enseignement et leurs examens en fonction des troubles d'apprentissage des étudiants. En gros, cela permet d'uniformiser les règles du jeu. Cela permet à un jeune présentant des troubles d'apprentissage qui a réussi, en défiant toutes les statistiques, à arriver jusqu'à l'université, d'être placé au même niveau que les autres.

Car, sinon, si ces jeunes ne parviennent pas à suivre des cours à l'université, nous pouvons dire que nous ne faisons pas le bon investissement, puisqu'il va falloir les supporter. Si nous les aidons à obtenir un diplôme, ils pourront apporter leur contribution au Canada, et l'investissement sera rentable, puisqu'ils paieront des impôts.

Actuellement, les listes d'attente pour les évaluations sont très longues. Certaines universités et certains collèges les font moyennant finances. D'autres ne font pas même d'évaluation. Les rares établissements qui proposent ces évaluations ont de longues listes d'attente. Nous avons donc la possibilité extraordinaire de permettre à un plus grand nombre de jeunes Canadiens victimes de troubles d'apprentissage d'aller à l'université, mais il faut les y aider. Si nous leur donnons ce coup de pouce, nous serons largement récompensés.

Le rapport de l'Association nationale des étudiant(es) handicapés(es) au niveau postsecondaire, un tout récent rapport sur l'accès à l'enseignement postsecondaire, montre que 91 p. 100 des 70 établissements étudiés exigent des étudiants qui y présentent une demande des documents prouvant leur handicap. Ces établissements précisent aussi que les documents doivent être signés et attestés par un médecin, un psychiatre ou un psychologue homologué. Autrement dit, si vous n'avez pas un diagnostic officiel à jour, et que vous êtes au niveau universitaire, vous n'aurez pas droit à une bourse d'études. En fait, vous ne pourrez même pas être logé à cette université. La règle du jeu n'est plus la même pour tous.

Nous recommandons que le gouvernement du Canada élargisse les directives concernant les subventions canadiennes pour études afin de considérer l'évaluation des troubles d'apprentissage comme un coût exceptionnel lié à l'éducation. En outre, nous recommandons que le gouvernement du Canada mette 25 millions de dollars à la disposition des universités et collèges pour évaluer les étudiants de niveau postsecondaire ayant des troubles d'apprentissage et pour permettre à des établissements de former des enseignants spécialisés.

Enfin, en 1996, le groupe de travail fédéral sur les questions de handicap—mieux connu sous le nom de Groupe de travail Scott—a recommandé au gouvernement du Canada de ne pas considérer les subventions canadiennes pour études versées à des étudiants handicapés comme revenu imposable dans le cadre du Programme canadien de prêts aux étudiants. Nous recommandons que le gouvernement du Canada ne considère pas les subventions canadiennes pour études versées aux étudiants handicapés comme revenu imposable.

• 1850

En conclusion, à l'aube du troisième millénaire, je pense que nous n'avons pas le droit de nous contenter de tendre la main sans offrir quelque chose en échange au gouvernement. L'Association canadienne des troubles d'apprentissage a déclaré il y a quatre ans, devant Jim Peterson, qu'elle allait travailler sur la question de l'alphabétisation et qu'elle ne demanderait pas d'argent au gouvernement pour cela. Quatre ans après, nous avons un programme de tutorat national qui fonctionne à trois endroits. Ce programme sera lancé dans deux autres provinces au cours des douze prochains mois. Ce programme national de tutorat progresse remarquablement. Nous le menons dans le cadre de partenariats avec des entreprises, grâce à des dons d'entreprises, et grâce au dévouement de nos membres.

Je conjure donc toutes les personnes réunies autour de cette table, quand elles vont repartir dans leurs circonscriptions et dans leurs localités, de tout faire pour que l'étincelle qui brille au coeur de chaque Canadien comme une étoile dans le ciel continue de scintiller, car en agissant ainsi, en agissant tous ensemble, nous permettrons à notre pays tout entier d'entrer plus fort dans le prochain millénaire.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup.

Nous en avons maintenant terminé avec les exposés des témoins. Nous allons passer aux questions et réponses.

Nous commencerons par M. McNally. Vous avez 10 minutes.

M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Merci, monsieur le président.

Merci à tous pour vos exposés. Je sais qu'il commence à se faire tard et que nous sommes tous très occupés; je vous remercie donc d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer. Vous avez couvert des domaines très étendus. Je suis sûr que nous aurons beaucoup de questions à vous poser. J'aimerais commencer par M. Stock.

Vous avez fait des commentaires intéressants. Vous avez parlé de l'Université Simon Fraser et d'une conférence qui s'y est déroulée. Comme je suis un diplômé récent de cette université, je voudrais approfondir un peu cela. Vous avez parlé d'un incident ou d'une proposition de financement dont je n'avais pas entendu parler, une subvention de 10 000 $.

M. Peter Stock: C'est juste.

M. Grant McNally: Excusez-moi, mais je n'ai pas saisi le détail de cette affaire.

M. Peter Stock: Elle a été relatée dans la presse canadienne le 28 septembre 1999. Le Conseil des arts de la Colombie- Britannique et le Conseil des arts du Canada ont financé conjointement une réunion d'experts littéraires à l'université en question. Le thème de cette réunion était le suivant: «Le sexe, la drogue et la loi: repousser les limites». Cette réunion était organisée par le Small Press Action Network et s'est déroulée du 1er au 3 octobre.

Cette réunion a donné la vedette à John Sharpe, le pédophile qui conteste actuellement les lois interdisant la possession de documents pornographiques pédophiles. C'est cette affaire qui va être examinée le 18 janvier de l'année prochaine par la Cour suprême. Notre organisation est évidemment très préoccupée par le cas des personnes qui détiennent des documents de pornographie pédophile, et nous ne sommes pas d'accord pour que les subventions gouvernementales payées par les contribuables servent à financer une tribune permettant à un individu aussi méprisable de faire la promotion de ses activités immondes.

M. Grant McNally: Merci. J'ai les détails maintenant. Merci de nous avoir précisé cela...

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Ce M. Sharpe, je crois, est un pédophile ou...?

M. Grant McNally: Je crois que c'est mon tour, monsieur le président.

Le président: Monsieur Szabo.

M. Paul Szabo: Vous savez que c'est un pédophile, ou est-ce simplement quelqu'un qui a été accusé d'être en possession de documents de pornographie juvénile?

M. Peter Stock: Il a été inculpé pour cela. Si vous lisez ses écrits, vous verrez qu'il se délecte de ce genre de chose.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Il n'a jamais été inculpé...

M. Peter Stock: Il peut me poursuivre s'il le veut.

M. Grant McNally: Merci. Je pense que les faits sont bien établis.

Vous avez dit aussi que, de l'avis de votre groupe, les personnes mariées étaient victimes de discrimination. Pourriez-vous nous donner plus de détails?

M. Peter Stock: Oui. En fait, d'autres témoins ont dit exactement la même chose. De nombreuses dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu pénalisent les gens mariés. Il est clair que les personnes qui vivent ensemble et qui ne se marient pas ou qui divorcent bénéficient de divers allégements fiscaux. Ce sont des choses dont on a déjà parlé en détail à ce comité.

En particulier, la disposition qui nous préoccupe, c'est la déduction pour frais de garde d'enfants. Il ne s'agit pas d'une discrimination en soi à l'égard des personnes mariées, mais d'une discrimination à l'égard des familles qui estiment que la meilleure façon d'élever les enfants, c'est d'avoir un des parents à la maison, et qui voudraient pouvoir le faire au moins pendant les premières années de leurs enfants.

Le président: Vous avez d'autres questions?

M. Grant McNally: Oui, j'ai une ou deux questions à poser à Mme Gardner.

• 1855

Vous avez parlé du travail non rémunéré des conjoints. Vous recommandez donc qu'un des conjoints puisse payer l'autre pour garder les enfants.

Mme Sheridan Gardner: Oui.

M. Grant McNally: Pourriez-vous développer cette idée et nous dire comment nous pourrions appliquer un tel régime concrètement dans l'ensemble du pays? Comment cela pourrait-il fonctionner?

Mme Sheridan Gardner: Ce que je souhaiterais, c'est que des juristes et des législateurs s'entendent sur un texte particulier. Je ne veux pas avoir une attitude sexiste. Néanmoins, il est clair que les femmes qui restent à la maison pour s'occuper de leurs enfants—et les statistiques montrent que ce sont surtout des femmes qui restent à la maison—accomplissent un travail qui a une valeur. Sur le plan fiscal, cette valeur est déjà définie. Si mon mari et moi-même choisissons d'aller travailler, nous sommes obligés d'engager une troisième personne, et je crois savoir que je peux déduire ce coût d'une personne qui s'occupe de garder les enfants.

Si le couple décide qu'un seul des deux parents va aller travailler, pourquoi l'autre est-il obligé d'assurer gratuitement la garde des enfants? Le mariage, ce n'est pas la servitude...

M. Grant McNally: Excusez-moi de vous interrompre. Vous dites que le régime actuel est discriminatoire...

Mme Sheridan Gardner: Je crois que les épouses sont victimes d'une profonde discrimination.

Évidemment, en apparence, la loi a l'air assez inoffensive, mais c'est faux. Si vous regardez la façon dont on a traité les femmes, si vous prenez simplement l'article 74 de la Loi de l'impôt sur le revenu—dont une partie a été annulée pas plus tard qu'en 1980—cet article concerne les conjoints qui peuvent travailler pour leur conjoint, qui peuvent travailler en partenariat avec leur conjoint et qui peuvent travailler pour leur conjoint et les associés de ce conjoint.

Puisque je vous parle d'histoire à ce sujet, je crois que c'est en 1952 qu'un homme a porté sa cause en Cour suprême. C'était un employé de son épouse et des deux employés de celle-ci. Il a porté l'affaire devant les tribunaux. Ce n'était pas le même article de la loi. Ce n'était pas l'article 74 à l'époque, mais c'était le même genre d'article de loi qui l'empêchait d'avoir un revenu. Son revenu devait être déclaré comme revenu de son épouse parce que c'était elle qui était propriétaire de l'entreprise. Il a porté l'affaire devant les tribunaux en 1952 en contestant le terme «l'employé». Aux yeux de la loi, il était «l'employé» de son épouse, et en tant que tel il ne pouvait pas être payé.

Il a soutenu qu'il y avait 86 employés dans l'entreprise et qu'il n'était donc pas «l'employé», mais simplement «un employé», et qu'il voulait être traité comme tous les autres employés. À l'époque, il n'y avait pas de loi sur les droits de la personne; donc il s'est battu sur l'interprétation des mots «le» et «un». Et bien que sa demande ait été rejetée, on a quand même modifié la loi par la suite pour qu'il soit bien clair que les conjoints sont en situation de servitude. C'est inadmissible.

Je crois que la révision de l'article 63 de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui interdit à un conjoint de payer l'autre, va soulever toute la question de l'équité fiscale pour la famille et de l'absence de prestations adéquates pour les familles ayant des enfants.

La garde d'enfants a la même valeur dans la société, qu'elle soit assurée par un parent ou par quelqu'un d'autre. Il s'agit de législation fiscale ici. Nous parlons de reconnaître la valeur d'un travail aux fins de l'impôt. Que je pense ou non que 7 000 $, c'est un montant suffisant pour rester à la maison et m'occuper d'un enfant de moins de sept ans... Non, ce n'est pas suffisant, mais c'est le montant que le fisc nous autorise à déduire actuellement.

Il est très important de considérer les conjoints comme des êtres vivants, comme des personnes, aux yeux de la loi, et de faire cesser cette discrimination implicite dans l'utilisation du terme neutre «conjoint». C'est à peu près toujours des femmes qu'il s'agit, et les femmes sont un groupe qui a à peu près toujours été victime de discrimination. Il est temps de revoir cette situation. C'est peut-être une révolution de notre façon de penser, mais quand l'article 74 a été révisé en 1980, c'était peut-être aussi une révolution. Je pense que le moment est venu. Nous abordons un nouveau millénaire. Il faut revoir cette question.

• 1900

M. Grant McNally: Donc, selon vous, la législation fiscale ne devrait pas faire de différence entre les diverses dispositions familiales ou de garde d'enfants.

Mme Sheridan Gardner: En effet.

M. Grant McNally: Donc, peu importe que l'on décide de rester à la maison pour s'occuper de ses enfants ou de les placer en garderie ou de faire venir quelqu'un pour s'en occuper, à votre avis la loi devrait rester neutre.

Mme Sheridan Gardner: Je pense que cela laisserait le choix aux familles. Quand des femmes quittent leur travail pour rester à la maison... et il y a beaucoup de femmes qui travaillent. Je crois que les statistiques du recensement de 1998 ont montré que 69 p. 100 des femmes mariées travaillent. Quand elles décident de laisser leur travail et de rester à la maison pour s'occuper de leurs enfants, elles ne devraient pas être obligées de choisir la servitude.

Le président: Merci beaucoup, monsieur McNally.

Monsieur Szabo, suivi par Mme Bennett.

M. Paul Szabo: Je vais laisser la parole à Mme Bennett.

Le président: Bon, et ensuite M. Gallaway pour une question.

Mme Carolyn Bennett: Ma question s'adresse à M. Horan: à partir de quand peut-on détecter un trouble d'apprentissage chez un enfant?

M. James Horan: Actuellement, aux alentours de trois ans. Évidement, les connaissances progressent tellement vite dans ce domaine qu'on commence à avoir une idée assez précise vers l'âge de trois ans.

Mme Carolyn Bennett: Y a-t-il des preuves qui montrent que plus on intervient tôt, plus on obtient de bons résultats?

M. James Horan: Oui. Il existe tout un corpus de recherche qui montre que si l'on assure tout un ensemble continu de services on obtient une différence. Comme nous sommes en contact avec de nombreuses familles à risque dans tout le pays, nous voyons cette différence.

Mme Carolyn Bennett: Y a-t-il des enfants qui échappent à ce dépistage jusqu'au moment où ils se retrouvent en prison?

M. James Horan: Oui. Chose intéressante, les services correctionnels ont lancé récemment un dispositif de dépistage de certains détenus. Ils se sont rendu compte malheureusement qu'un certain nombre d'entre eux avaient des troubles d'apprentissage.

Mme Carolyn Bennett: J'ai vu des études d'après lesquelles le pourcentage pourrait même aller jusqu'à 70 p. 100.

M. James Horan: C'est exact. Ce qui me démoralise le plus, c'est de travailler avec un jeune de 14 ou 15 ans qui a des troubles d'apprentissage, mais dont on ne s'est pas occupé et qui va se retrouver dans un centre de détention. C'est vraiment quelque chose d'affreux à voir. Vous avez en face de vous un jouet brisé, un être humain très difficile à réparer à 14 ou 15 ans.

Mme Carolyn Bennett: Voici une question, monsieur Stock. Savez-vous qu'on a montré que les enfants qui sont mis en contact très jeunes avec des éducateurs sont mieux armés pour apprendre quand ils arrivent à l'école?

M. Peter Stock: Je crois que vous voulez parler de l'enseignement des très jeunes enfants, et je ne suis pas certain...

Mme Carolyn Bennett: Eh bien, je pense que si l'on a affaire à un éducateur de jeunes enfants qui s'y connaît en matière de lecture, qui peut détecter un trouble d'apprentissage de la lecture, qui s'y connaît en matière de résolution de conflits, etc... évidemment, nul ne peut aimer un enfant autant que ses parents. Mais la question que je voudrais poser au sujet de l'enseignement destiné aux tout jeunes enfants... Je ne sais pas si je suis née éducatrice dans l'âme ou si c'est quand mon bébé est né que je suis devenue une éducatrice de jeunes enfants—comparativement à des patients que j'avais et qui en savaient sûrement beaucoup plus que moi sur la question.

Je pense que les recherches montrent l'importance de cette préparation à l'apprentissage et de la détection de choses comme l'alcoolisme foetal et les troubles d'apprentissage. Quand je pratiquais la médecine, il y avait un espace pour les enfants un peu plus bas dans la rue où les mères amenaient leurs enfants et discutaient entre elles de la situation de leurs enfants, voyaient si leur enfant aurait dû savoir lire à l'âge qu'il avait, ce genre de choses, s'il se battait, s'il savait partager, etc.

Je crois que vous êtes contre l'intervention de l'État dans ce genre de chose. Je crois que ce qu'ont dit tous les ministres de la Santé du pays... ils ont constaté qu'il y avait toute une période pendant laquelle on ne voit pas les enfants, jusqu'au moment où ils ont six ans, et on commence à investir, mais c'est déjà trop tard; quand on commence à investir dans ces enfants, leur cerveau est moins malléable, et on peut faire moins de choses.

Seriez-vous opposé à l'existence de centres pour le développement de la petite enfance où les parents qui restent à la maison pourraient profiter de ces services?

• 1905

M. Peter Stock: En un mot, oui. Je crois qu'on peut faire ce genre de choses dans le privé. Par exemple, quand j'étais jeune, ma mère a monté une garderie et...

Mme Carolyn Bennett: Elle avait une formation?

M. Peter Stock: Non.

Mme Carolyn Bennett: Alors, voyons cela, car...

M. Peter Stock: Excusez-moi de vous interrompre, mais je n'ai pas terminé. Il y a deux autres choses que je voulais dire.

La deuxième chose, c'est l'intervention, et franchement...

Mme Carolyn Bennett: Elle était payée pour s'occuper des enfants des autres?

M. Peter Stock: Non, c'était du strict bénévolat...

Mme Carolyn Bennett: Car c'est cela qui me dérange. Nous avons une énorme économie souterraine peuplée de gens qui n'ont pas de formation. Quand vous dites que vous craignez qu'un régime national de garderies n'entraîne un une réaction en chaîne pour les enfants dont on s'occupe, cela me dérange énormément... il y a des tas de gens qui n'ont pas de formation, qui n'ont aucune norme, et certains de ces enfants sont dans une situation bien pire que s'ils étaient dans une garderie homologuée avec des gens compétents pour s'occuper d'eux. Quand vous parlez d'une réaction en chaîne indésirable...

Madame Gardner, ayant pratiqué la médecine familiale pendant 20 ans, je vous dirais que ce qui me dérange surtout dans votre mémoire, c'est le fait qu'il soit prouvé que la Loi de l'impôt sur le revenu... Je veux dire, vous avez pratiquement dit que la Loi de l'impôt sur le revenu provoquait le syndrome de Down. Au bas de la page, vous dites: «... des preuves flagrantes que la Loi de l'impôt sur le revenu a influé sur le choix de certaines personnes de se marier ou non...» J'aimerais savoir de quelles preuves vous parlez. Vous dites aussi que la Loi de l'impôt sur le revenu incite les gens à avoir des enfants plus tard. Je ne comprends pas.

Mme Sheridan Gardner: Je pense simplement aux femmes de mon groupe d'âge qui sont allées à l'université et ont décidé d'avoir une carrière. Elles n'ont pas choisi d'interrompre leur carrière pendant trois ans; elles se sont consacrées à leur carrière pendant 10, 12 ou 15 ans, et à ce moment-là, une fois qu'elles ont eu atteint une stabilité financière, j'imagine...

Mme Carolyn Bennett: Mais vous dites que c'est à cause de la Loi de l'impôt sur le revenu. Vous pouvez m'expliquer?

Mme Sheridan Gardner: La Loi de l'impôt sur le revenu n'apporte pas de soutien; il n'y a plus de déduction pour enfants. On n'incite pas les femmes à rester à la maison une fois qu'elles ont épuisé leurs 15 semaines, ou je ne sais plus combien. Maintenant c'est 25...

Mme Carolyn Bennett: Mais même si vous ne restiez pas à la maison, vous auriez des enfants plus tard?

Mme Sheridan Gardner: Je crois qu'on décide d'avoir des enfants plus tard parce qu'on veut s'occuper de sa carrière. On passe 15 ans à se faire une carrière pour avoir les moyens ensuite de s'arrêter pendant quelque temps.

Mme Carolyn Bennett: À mon avis, ce ne sont pas vraiment des preuves accablantes, mais disons que vous avez des preuves empiriques. Je pense quand même que...

Mme Sheridan Gardner: Soixante-dix p. 100 des femmes appartenaient à la population active en 1998, mais j'ai commencé à travailler au milieu des années 70. J'ai poursuivi ma carrière pendant 15 ans avant d'avoir mes enfants; je les ai eus alors que j'avais plus de 35 ans, et, effectivement, j'ai pu avoir le dépistage du syndrome de Down gratuitement en raison de mon âge. Je ne crois pas que mon expérience soit unique. Je crois qu'elle est tout à fait normale pour mon groupe d'âge.

Mme Carolyn Bennett: Je pense que ce que nous essayons de trouver, c'est le meilleur équilibre possible pour laisser le choix aux gens.

Je n'avais pas le choix. J'ai recommencé à travailler après six semaines parce que mon mari travaillait dans l'industrie cinématographique et que nous n'avions qu'un seul revenu. Je pense que chaque famille est un cas particulier...

Mme Sheridan Gardner: En effet.

Mme Carolyn Bennett: ... et doit faire ses propres choix. Certaines choisissent de déménager, et ce n'est parfois que pour l'unique raison qu'elles préféreraient avoir un jardin plutôt qu'un balcon, et c'est la raison pour laquelle les deux travaillent, n'est-ce pas?

Voilà donc notre dilemme: nous essayons d'arriver à une certaine équité, compte tenu des choix qui se posent à cette famille en question, non pas deux familles différentes, et donc qui ne sont pas comparables, à 60 000 $, mais cette famille dont le revenu est de 60 000 $ ou de 30 000 $, ou je ne sais quoi, lorsqu'il s'agit pour elle de décider de recommencer à travailler ou non, sans se comparer à ses voisins, pour que cette décision soit équitable pour elle.

C'est un peu comme si nous vous comparions à un célibataire. Au moins, dans votre cas, votre situation fiscale est telle que vous êtes deux à pouvoir bénéficier des services de santé, des services de... lorsque deux personnes sont ainsi couvertes par un régime fiscal, il y a de bonnes raisons pour... en fait, votre situation est bien meilleure que celle d'un célibataire, n'est-ce pas?

• 1910

M. Charles Van Wagner: Mais comment évalueriez-vous un couple dont les deux membres ont le même revenu et dont le total est équivalent à notre total? C'est là le problème.

Mme Carolyn Bennett: En effet, si vous faites ce genre de comparaison, mais cela dépend de la personne à qui vous voulez vous comparer.

Merci, monsieur le président.

Le président: En avez-vous terminé, madame Bennett?

Mme Carolyn Bennett: Oui.

M. Paul Szabo: Terminons-en avec M. Van Wagner.

Monsieur Van Wagner, lorsque le Comité des finances a étudié la situation fiscale des familles à un seul revenu par rapport aux familles à deux revenus, mais dont le revenu total était le même, il a effectivement constaté ce que vous venez de nous dire, mais également que le fait de vous comparer à quelqu'un d'autre n'était pas vraiment un argument très puissant. La véritable question serait celle-ci: admettons que vous gagnez chacun 30 000 $ et que l'un des deux décide de quitter la population active; le revenu de l'autre ne passerait pas à 60 000 $ pour que l'égalité soit conservée.

Dans la vie, nous faisons des choix, de sorte qu'on ne peut pas comparer un revenu de 60 000 $ à deux revenus de 30 000 $. L'argument ne tient pas, il n'a aucune valeur. C'est une question d'ailleurs qui a créé une grosse polémique, et plusieurs personnes ici ont tenté de la faire valoir. Mais en réalité, dans le cas d'un couple dont les deux membres travaillent, d'un couple qui a un enfant, ce couple a deux choix: d'abord, payer quelqu'un pour garder l'enfant et réclamer la déduction fiscale correspondante, ou alors décider que l'un des deux membres du couple arrête de travailler pour s'occuper lui-même ou elle-même de l'enfant.

La plupart des gens disent que la discrimination—et c'est ce que je comprends des propos de Mme Gardner—survient au niveau de la déduction fiscale pour frais de garde d'enfants, mais vous apprendrez sans doute non sans intérêt qu'en 1997, la dernière année complète pour laquelle Revenu Canada a publié son rapport sur les déclarations de revenus des Canadiens, le quart seulement des familles qui le pouvaient—c'est-à-dire des couples à deux revenus ayant des enfants—ont réclamé la déduction. Et parmi ceux qui l'ont réclamée, la déduction moyenne demandée était de 2 554 $, alors qu'en 1997 une famille pouvait réclamer jusqu'à 5 000 $ pour un enfant. Et vous le savez aussi, il y a des familles qui ont plusieurs enfants.

Mme Bennett a donc absolument raison. Il y a, dans le monde de la garde des enfants, une énorme économie souterraine, et c'est à mon avis l'une des raisons pour lesquelles nous en sommes arrivés à conclure que, comme nous avons un aussi grand nombre de configurations différentes, comme cela a été dit d'ailleurs, il est impossible d'arriver à un système juste et équitable qui puisse tenir compte de toutes ces permutations, de toutes ces combinaisons, des couples avec ou sans enfants, etc., et qui serait équitable pour tout le monde.

Le système fiscal repose sur l'unité de taxation individuelle. C'est un système progressif qui tient compte d'une très large gamme de situations possibles, par exemple les familles à un seul revenu, les familles à deux revenus, quelqu'un qui élève seul un enfant et ne peut donc pas scinder son revenu, etc. Il y a énormément de cas d'espèce.

Je voudrais demander à nos témoins, parce qu'ils ont tous à un degré ou à un autre un intérêt immédiat pour la question, s'ils préféreraient—et je parle ici de couples ayant des enfants—qu'on modifie la Loi de l'impôt sur le revenu en conséquence ou qu'on intervienne plutôt en dehors du cadre de la loi, afin que vous ayez plus d'argent disponible pour pouvoir faire les choix que vous souhaitez.

Ne serait-il pas préférable au contraire d'introduire des programmes? On a beaucoup parlé des programmes préscolaires enrichis, des programmes de développement pour la petite enfance, etc. J'aimerais savoir si vous êtes d'accord pour dire qu'il faudrait une palette de programmes suffisamment large pour répondre à tous les besoins, ou si nous parlons en fait surtout du fait que les parents doivent choisir parce quÂeux seuls peuvent vraiment savoir quel est le meilleur arrangement possible pour les enfants. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

Le président: Monsieur Weiner.

M. Harvey Weiner: Je pense que nous pencherions certainement pour les programmes et les services. Il est certain que le soin des enfants revient principalement aux parents. Cela ne fait aucun doute, mais les enfants et les jeunes gens dont nous parlons sont ceux du Canada. Nous avons tous intérêt à offrir une contribution collective pour garantir que ces enfants puissent grandir en bonne santé et devenir des membres utiles de la société civile, des adultes bien équilibrés et qui contribuent à l'économie, et plus nous pourrons en faire pour arriver à cet objectif, plus notre assiette fiscale va augmenter en conséquence.

• 1915

M. Paul Szabo: Vous seriez favorable à un programme qui aurait des paramètres officiellement définis?

M. Harvey Weiner: Tout à fait.

M. Paul Szabo: D'accord.

M. Harvey Weiner: Sans aucun doute, et il est certain...

M. Paul Szabo: Je comprends. Je voudrais passer au reste...

M. Harvey Weiner: ... que les parents choisiraient ces programmes et ces services qui seraient mis à leur disposition, qui seraient cohérents et intégrés, et qui seraient également offerts au moment où ils en ont besoin et en fonction de leurs besoins.

Le président: Madame Bascombe.

Mme Dianne Bascombe: Je voudrais simplement faire valoir qu'à défaut d'investir dans une infrastructure destinée aux programmes pour la petite enfance, les parents n'auront pas vraiment le choix, parce qu'il n'y aura pas dans leur quartier, dans leur localité, une palette suffisante de services d'éducation et de développement de la petite enfance qui leur permettrait de faire un choix.

Je dirais que nous n'avons pas vraiment le choix; nous devons investir dans une infrastructure quelconque, dans des programmes et des services qui permettraient aux parents d'avoir un véritable choix, qu'ils veuillent rester à la maison ou continuer à travailler, afin de leur permettre d'opter valablement pour des programmes de qualité destinés à leurs enfants.

Le président: Monsieur Stock.

M. Peter Stock: Tout d'abord, je n'apprécie pas du tout qu'on laisse entendre que ma mère faisait partie de l'économie souterraine. Il s'agissait d'un travail bénévole.

M. Paul Szabo: Soyons clairs; lorsqu'on parle d'économie souterraine, on parle de quelqu'un qui paie quelqu'un d'autre pour s'occuper d'un enfant, mais sans réclamer la déduction fiscale, et la personne ainsi rémunérée ne déclare pas ce revenu. C'est de la fraude fiscale.

M. Peter Stock: Tout à fait.

M. Paul Szabo: C'est de cela que je voulais parler.

M. Peter Stock: Je m'en rends bien compte.

Par ailleurs, ce qui a été dit un peu plus tôt était inexact. La garderie dans laquelle ma mère travaillait était un service à 100 p. 100 bénévole, et je pense que c'est peut-être souvent le cas. Dans ma famille, mon frère fait garder son enfant par sa belle-mère. Là non plus, l'argent ne change pas de mains. Il s'agit simplement de s'occuper d'un autre membre de la famille alors que les parents sont au travail. Il n'y a pas nécessairement ici une énorme économie souterraine. Il y a d'autres façons de faire garder un enfant que de recourir aux garderies de qualité, comme on les appelle, subventionnées par le gouvernement.

Un autre argument concerne la déduction fiscale pour frais de garde d'un enfant et ceux qui la réclament. Nous en avons parlé devant le sous-comité. Vous avez dit qu'il y avait 25 p. 100 des familles qui réclamaient une déduction moyenne d'environ 2 500 $. Je pense que c'est à peu près l'ordre de grandeur que vous avez mentionné. Pour être un peu plus réaliste, je pense que ce qui se passe, c'est que 10 p. 100 environ de ces familles réclament un très gros montant, et 15 p. 100 réclament un tout petit montant pour des frais comme les colonies de vacances par exemple. Cela correspondrait assez bien au nombre de gens qui ont recours systématiquement à des services de garde officiels et déductibles afin de pouvoir continuer à travailler.

M. Paul Szabo: Mais cela ne marche pas si les deux parents ont chacun un emploi et ont des enfants d'âge préscolaire. Il faut bien que quelqu'un s'occupe de ces enfants. Mais il y a quelque chose qui cloche lorsque deux salariés ne réclament pas ou presque pas de déductions pour la garde d'enfants.

M. Peter Stock: Non. J'essaie de vous faire comprendre qu'il existe toutes sortes d'autres formes de garde, comme celle que je vous expliquais plus tôt pour mon frère et ma mère.

M. Paul Szabo: Bien.

M. Charles Van Wagner: En ce qui nous concerne, vous pouvez comprendre que nous sommes déjà passés par là et avons déjà vécu toutes ces expériences. Nous savons ce que c'est que d'élever des enfants et tous les choix que cela implique. Dans notre temps, c'était bien différent. Nous avons essayé d'expliquer quelles étaient les conséquences que pouvait avoir le style de vie que nous avions adopté et qui, pour nous, devait durer jusqu'à la fin de nos jours.

J'ai déjà entendu cela avant, et nous avons évidemment lu le rapport du sous-comité sur les enfants... l'idée de choisir entre deux revenus et d'en laisser tomber un constitue une partie importante du rapport en question. Mais avez-vous observé ce qui arrive à une famille à revenu unique lorsque l'un des parents choisit de ne plus avoir de revenu? La famille s'expose alors à la pénalité dont nous avons parlé qui s'applique aux familles à revenu unique...

M. Paul Szabo: ... qui pourtant a été changée.

M. Charles Van Wagner: Oh, oui.

M. Paul Szabo: Elle représentait un montant donné, et lorsqu'on laissait tomber le deuxième revenu, le revenu total ne changeait pas.

M. Charles Van Wagner: Dans le rapport, on donne l'exemple d'un couple dont le revenu conjugué est de 60 000 $, avec un ratio de 36:24. Si l'un des parents décide de laisser tomber son revenu de 24 000 $ pour pouvoir rester à la maison, il ne reste plus à la famille que 36 000 $ de revenu, inscrit à un seul des deux noms. Ce couple paiera un impôt sur le revenu de 36 000 $...

M. Paul Szabo: Il paie moins d'impôt.

M. Charles Van Wagner: Oui, mais il paie toujours 1 000 $ d'impôt de plus que si les deux revenus étaient égaux. À eux deux, ils paient une pénalité...

M. Paul Szabo: Ce n'est pas vrai...

M. Charles Van Wagner: ... de 1 000 $ sur le revenu unique.

M. Paul Szabo: ... parce qu'ils reçoivent une exemption de conjoint.

M. Grant McNally: Voulez-vous le laisser terminer.

• 1920

M. Charles Van Wagner: L'exemption pour conjoint est d'environ...

M. Paul Szabo: Six mille dollars.

M. Charles Van Wagner: ... le dixième du revenu familial moyen. Pour mieux comprendre, elle réduit le revenu du soutien de famille d'à peine 1 400 $, ce qui en fait presque un célibataire. Si juste que puisse sembler votre argument pour ce qui est de la qualité et de la quantité, la situation est parfaitement ridicule.

M. Paul Szabo: Beaucoup d'entre vous ont aussi abordé les soins pour les enfants. Vous savez quoi? Vous avez tous raison dans les réponses que vous avez données.

Vous avez tous raison, mais tout dépend si vous parlez d'enfants de 0 à 3 ans ou d'enfants de 4 à 6 ans, car, à ce que je sache, il n'existe pas de programmes préscolaires enrichis ou de programmes d'éducation de la petite enfance destinés aux nourrissons! En fait, si ce qui vous tient à coeur, c'est le développement sain du cerveau, c'est-à-dire le développement neural d'un enfant, ce n'est pas dans une garderie que vous allez pouvoir trouver un adulte—pas nécessairement un parent, mais un adulte engagé qui tisse des liens de sécurité et de permanence avec l'enfant—dans la mesure où c'est ce dont vous parlez.

Si ce n'est pas des enfants en couche dont vous parlez... mais les prématernelles et les maternelles n'existent plus. Si on pouvait offrir un milieu qui remplacerait ces maternelles et qui serait un milieu stimulant, actif, diversifié, il n'y a aucun doute que l'enfant qui aurait grandi dans ce milieu réussirait mieux en 1re année que ceux qui attendent d'arriver à l'école pour apprendre l'alphabet.

Vous avez tous raison. Par conséquent, puisque notre objectif à tous est de former des enfants sains, je vous pose la question suivante: si nous n'avions qu'un seul dollar à dépenser, miseriez-vous sur les enfants de 0 à 3 ans ou sur les enfants de 4 à 6 ans?

M. Peter Stock: Je miserais sur les enfants de zéro à trois ans, pour permettre aux parents de saisir l'occasion et de rester à la maison avec les enfants.

M. Paul Szabo: Bien.

Le président: Monsieur Weiner, qu'en pensez-vous?

M. Harvey Weiner: Mais nous avons plus que cela à dépenser! Il me semble que si vous nous forcez à choisir, nous flouons non seulement les enfants, mais nous-mêmes également.

M. Paul Szabo: Allez, je m'avance. Qu'est-ce qui est le plus important: de zéro à trois ans ou de quatre à six ans?

M. Harvey Weiner: Les deux le sont.

M. Paul Szabo: Qu'est-ce qui est le plus important? Quelles sont les priorités?

Dans toutes les recherches effectuées, à partir de celle de Fraser Mustard jusqu'à toutes les autres, on affirme que la première année est cruciale. M. Mustard l'a dit au Comité du développement des ressources humaines. Tous les rapports confirment que le cerveau a déjà atteint 80 p. 100 de son développement dès l'âge de trois ans. Désolé, mais si le développement physiologique et neural ne se fait pas, peu importe ce que vous tenterez auprès des enfants de quatre, cinq ou six ans, la marchandise sera déjà endommagée, comme certains se sont déjà plu à me l'expliquer. Le développement précoce se fait à partir de la naissance, et si vous ne vous développez pas convenablement avant trois ans, il est impossible de rattraper le retard.

M. Harvey Weiner: Je veux bien que le développement soit critique entre zéro et trois ans, mais si vous êtes en train de me dire qu'il faut abandonner tout espoir à partir de quatre ans parce que 80 p. 100 du cerveau, ou peu importe... Soit dit en passant, Mustard a fait de l'excellent travail, mais sa recherche reste controversée à plusieurs égards. Il est vrai que les premières années sont extrêmement critiques et importantes, mais décider de façon arbitraire que l'on va miser sur les premières années jusqu'à 3 ans et cesser... On a bien plus de dollars que cela à dépenser!

Le président: Madame Bascombe.

Mme Dianne Bascombe: Je ne vais certainement pas contester l'importance du développement avant trois ans. Je ferais également remarquer que 70 p. 100 des mères qui travaillent ont des enfants de moins de trois ans, et que lorsque l'on prétend qu'il faut offrir des services à la petite enfance qui s'adressent aux enfants de zéro à six ans, ils s'adresseront par le fait même aux enfants de zéro à trois ans.

Nous sommes tout à fait d'accord avec l'idée de prolonger le congé de maternité ou de paternité jusqu'à un an, mais il faut être réaliste, puisque l'on sait que les familles doivent retourner sur le marché du travail pour assurer leur sécurité économique. Nous savons également que même les enfants de un, deux, trois, quatre ou même cinq ans doivent avoir accès à des milieux d'apprentissage de grande qualité, que les parents soient à la maison ou au travail.

• 1925

À certains égards, c'est un faux débat que de nous demander de faire le choix entre les deux groupes d'âges, puisque ce sont les mêmes types de soutiens familial, communautaire et social qui vont répondre aux besoins des familles qui ont de jeunes enfants. Ces services ne leur seront pas retirés dès l'âge de trois ans. Il faut maintenir toute la gamme des programmes et services.

Le président: Monsieur Horan.

M. James Horan: L'histoire jugera ceux qui sont autour de la table par ce qu'ils auront fait pour aider les plus vulnérables de la société, à savoir nos plus jeunes citoyens.

Je suis l'ancien président de l'Association canadienne des troubles d'apprentissage, mais je suis également directeur d'une école d'enseignement compensatoire. Que fait-on dans cette école? Je nourris chacun des enfants de mon école tous les jours, à 10 heures.

Si on me demandait à quoi je consacrerais la recherche, je dirais que ma priorité va à l'identification précoce des enfants à risque. À quoi je consacrerais toutes mes ressources? Aux jeunes enfants, avant qu'ils aboutissent dans mon école.

Le programme «Partir d'un bon pas» est lié à mon école. C'est un programme merveilleux, qui s'adresse aux enfants, dès leur naissance et jusqu'à ce qu'ils arrivent chez moi. Il donne de bons résultats. Mais sachez que si vous deviez venir passer quelque temps avec moi, tous les jours, vous seriez tous convaincus qu'il faut investir ce dollar dans les plus vulnérables, c'est-à-dire dans les plus jeunes. C'est aujourd'hui qu'il faut investir, faute de quoi demain nous coûtera très cher.

Madame Bennett, vous avez été médecin de famille pendant une vingtaine d'années. Vous avez été témoin de toutes sortes d'expériences, tout comme moi, qui ai été directeur d'une école d'éducation compensatoire. Nous avons tout vu.

Je vous assure: venez passer quelque temps avec moi ou rendez vous dans un cabinet de médecine familiale que vous signalera Mme Bennett; allez passer quelque temps dans un centre de santé communautaire dans le nord de la ville. Vous en reviendrez complètement changés et aurez une autre vision du Canada.

Le président: Monsieur Gallaway, avez-vous une question à poser?

M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.): Oui, monsieur le président. Merci.

M. Neil McFadyen: Monsieur le président, puis-je...?

Le président: Monsieur McFadyen, vouliez-vous ajouter quelque chose?

M. Neil McFadyen: Je voudrais revenir au financement des centres de développement de la petite enfance. J'imagine que ce dont vous parlez, c'est de créer des garderies améliorées.

Mme Carolyn Bennett: Un peu comme les halte-garderies.

M. Neil McFadyen: Mais vous disiez plus tôt que dans certains des centres actuels, le personnel n'était pas suffisamment qualifié, et que si vous envoyiez votre enfant se faire garder plus loin dans la rue, la gardienne n'était pas nécessairement suffisamment qualifiée non plus.

Mme Carolyn Bennett: Je parle de centres gérés par des éducateurs accrédités en petite enfance...

M. Neil McFadyen: D'accord, mais lorsque vous envoyez un enfant de moins de trois ans se faire garder ailleurs, quelles compétences exigez-vous de la gardienne? Comment savez-vous que le parent ou la gardienne d'à côté ne donne pas les mêmes soins—voire des soins meilleurs—que la personne qui a été embauchée de nulle part...

Mme Carolyn Bennett: Vous pourriez dire la même chose des médecins.

M. Neil McFadyen: ... pour aller travailler dans une garderie et qui a passé un test...

Mme Carolyn Bennett: Si nous n'avions pas de médecins accrédités, certains d'entre eux seraient tout aussi compétents même s'ils n'avaient pas de diplôme, alors que d'autres ne le seraient pas. Ce que nous disons, c'est que les Canadiens doivent être sûrs que l'endroit où ils envoient leurs enfants répond à des normes et que le personnel a suivi une formation de base.

M. Neil McFadyen: Êtes-vous en train de dire que les parents qui élèvent leurs enfants à demeure devraient acquérir certaines compétences avant qu'on leur permette de prendre soin de leurs enfants?

Mme Carolyn Bennett: Je dis que les enfants seraient placés dans une situation plus avantageuse si leurs parents avaient assez de jugeote pour aller les mener dans une de ces garderies—c'est sûr.

M. Roger Gallaway: J'ai une question.

Le président: Oui, monsieur Gallaway.

J'espère que cela ne vexera pas les autres, mais nous aimerions bien nous joindre à vous. M. Gallaway attend déjà depuis plusieurs minutes. M. McNally veut sans doute être inscrit au prochain tour de questions, et il va s'impatienter bientôt, c'est pourquoi je vous demande de me rendre la vie plus facile.

Monsieur Gallaway, vous avez la parole.

M. Roger Gallaway: Merci. C'est agréable d'être spectateur ce soir.

Monsieur Weiner et madame Bascombe, voici votre résumé des mesures à prendre; monsieur Weiner, voici votre tableau, je pense. L'un de vous mentionnait 2 milliards de dollars, alors qu'un autre laissait tomber ces 2,5 milliards.

Ce que j'ai entendu ce soir, c'est que les parents ne sont pas nécessairement les mieux équipés pour élever leurs enfants, et qu'il faudra commencer à emmener les petits dans des centres. Comme parent, j'avoue que ce que j'entends là est alarmant.

Tout ce débat tourne autour du choix. Avoir un enfant, c'est habituellement une question de choix. Dans la vie, nous faisons toutes sortes de choix.

On a parlé de sécurité de revenu, de programmes de soutien social et communautaire, de recherches nationales et de suivi, et je pense que l'on a chiffré tout cela à une cinquantaine de millions de dollars. Ma question est très simple: à quoi estimez- vous le coût des mesures d'aide sociale? Toutes vos propositions peuvent être concrétisées principalement en modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu. Quelle partie des 2,5 milliards que vous avez demandés consacreriez-vous à cette aide sociale et quelle partie aux programmes?

• 1930

Mme Dianne Bascombe: Nous avons révisé notre mémoire. Du côté des mesures de sécurité du revenu, nous demandons un investissement de 2 milliards de dollars au titre du programme de la prestation fiscale pour enfants.

M. Roger Gallaway: Je suppose que vous proposez un investissement annuel de deux milliards de dollars...

Mme Dianne Bascombe: Nous pensions que cet investissement serait échelonné sur deux ans.

M. Harvey Weiner: Sur deux ans.

M. Roger Gallaway: Dans ce cas, quelle serait la somme affectée aux mesures de soutien social et communautaire?

Mme Dianne Bascombe: Deux milliards de dollars.

M. Harvey Weiner: Sur deux ans.

M. Roger Gallaway: Je suis confus. Que représente le crédit d'impôt? Que représente la sécurité du revenu?

M. Harvey Weiner: Un autre... N'est-ce pas 2,5 milliards de dollars?

Mme Dianne Bascombe: Pour la prestation nationale pour enfants.

M. Roger Gallaway: Vous énumérez six mesures. Vous avez bien dû établir ce que leur mise en oeuvre coûterait.

M. Harvey Weiner: C'est 2,5 milliards de dollars dans l'un et l'autre cas.

M. Roger Gallaway: Très bien. C'est donc 2,5 milliards de dollars pour les mesures de soutien social et la même chose pour les mesures de soutien communautaire. Ai-je bien compris?

M. Harvey Weiner: Oui.

M. Roger Gallaway: Sur deux ans.

Mme Dianne Bascombe: C'est juste.

M. Roger Gallaway: Il s'agit donc de cinq milliards de dollars sur deux ans.

Mme Dianne Bascombe: C'est juste.

M. Roger Gallaway: Très bien.

Je trouve toute cette conversation très intéressante, mais nous sommes ici réunis sur la colline du Parlement sous le regard des pères de la Confédération. Nous avons des choix à faire et nous devons consulter les simples citoyens pour savoir ce qu'ils veulent. Nous devons établir si ce que vous recommandez correspond à ce que veulent les simples citoyens.

Je vous signale que le ministère des Finances a procédé dernièrement à des sondages dans tout le pays. Ces sondages ont révélé que les Canadiens attachent beaucoup d'importance aux questions suivantes: le régime de soins de santé, l'enseignement postsecondaire, la réduction des impôts et l'allégement de la dette nationale.

Le programme national pour enfants vient en bas de liste. Les gens ne sont pas favorables à ce qu'on donne tout cet argent à un groupe de travailleurs sociaux et d'enseignants.

M. Paul Szabo: Oh, oh!

M. Roger Gallaway: Ils ne le veulent pas. Ce dont il s'agit...

M. Paul Szabo: Ne soyez pas timide.

M. Roger Gallaway: Il faudrait dire les choses comme elles sont. C'est tout ce que je veux. Oublions la théorie. C'est la réalité qui importe.

Je ne pense pas pouvoir vendre à mes électeurs aucune des idées que vous avez avancées ce soir.

Mme Carolyn Bennett: Buzz Hargrove le peut.

Des voix: Oh, oh!

M. Roger Gallaway: Avant que Mme Bennett ne dise que je suis atteint d'une maladie grave, j'aimerais simplement dire que les mesures que vous proposez ne correspondent pas du tout à ce que souhaitent les Canadiens. Aucune des suggestions que vous nous avez faites ne me paraît acceptable.

M. Harvey Weiner: Nous ne regardons sans doute pas les mêmes sondages, monsieur Gallaway. Permettez-moi de vous fournir certains arguments que vous pourrez faire valoir aux électeurs qui ne semblent pas être convaincus du bien-fondé des mesures que nous proposons.

M. Roger Gallaway: Je vous signale que j'ai déjà exprimé mon point de vue dans les journaux de ma circonscription et qu'il n'y a qu'une personne qui a dit ne pas être d'accord avec moi. Cette personne est un spécialiste de l'intervention éducative auprès de la petite enfance.

M. Harvey Weiner: Très bien.

M. Roger Gallaway: Je ne trouve personne qui appuie ces mesures. Je ne cherche pas à faire de la provocation.

M. Harvey Weiner: Je suppose que le problème s'explique en partie parce qu'on entend pas beaucoup d'enfants et de jeunes dans ce genre de réunion.

Il ne faudrait pas oublier un autre aspect de la question. Notre système de santé, nos régimes de pension, notre qualité de vie, ainsi que les réductions d'impôts que nous souhaitons tous dépendent dans une grande mesure de l'investissement que nous sommes prêts à faire dans nos enfants. J'utilise avec circonspection l'expression «nos enfants». Personne ne laisse entendre, et surtout pas moi, que la responsabilité première des enfants n'appartient pas aux parents.

Quand nous parlons de «nos enfants», nous parlons des enfants du Canada. Que vous ayez eu un enfant qui est maintenant adulte ou que vous n'ayez jamais eu d'enfants, ce sont les enfants d'aujourd'hui qui demain assureront à tous ceux qui prendront leur retraite la qualité de vie et les avantages qu'ils souhaitent avoir. Ce seront sur ces enfants que reposera toute la pyramide. Si nous ne leur donnons pas des chances égales de réussir... Tous les enfants sont nés égaux et chacun d'eux jusqu'au dernier devrait pouvoir atteindre son plein potentiel.

• 1935

Des recherches menées au Canada, aux États-Unis et en Europe montrent que c'est le meilleur investissement qu'on puisse faire. Voilà l'investissement qui permet de réduire davantage les impôts en bout de ligne. En investissant dans l'avenir des enfants aujourd'hui, nous pourrons réduire les dépenses non discrétionnaires que nous sommes forcés de faire. Je songe aux dépenses liées à l'incarcération des criminels et aux sommes que nous devons dépenser pour aider les gens à régler leurs problèmes. Les recherches prouvent que l'argent consacrée aux enfants est un investissement et non pas une dépense.

Mme Dianne Bascombe: Je ne veux pas me lancer dans une guerre de sondages, mais je peux vous assurer qu'il y a des sondages qui montrent que les Canadiens sont favorables à ce qu'on aide les familles et les enfants canadiens. Nous pouvons...

M. Roger Gallaway: Je ne veux pas...

Mme Dianne Bascombe: Oublions donc les sondages. Je me permets cependant de vous rappeler que des millions d'enfants canadiens—de très jeunes enfants—sont tous les jours confiés à la garde d'autres personnes que leurs parents parce que ceux-ci travaillent et étudient. Voilà pourquoi il faut faire en sorte que les services de garde soient les meilleurs possible. Comment les Canadiens ne pourraient-ils pas être favorables à ce qu'on prenne les mesures voulues pour que les services de garde soient aussi bons que possible? Il n'est pas question de donner de l'argent à des travailleurs sociaux ou d'investir dans des programmes inefficaces, qui ne sont pas axés sur les résultats ou qui ne permettent pas aux enfants d'atteindre leur plein potentiel.

Je ne pense pas que vous puissiez contester les résultats des recherches portant sur la première enfance. Nous devons faire en sorte que les parents puissent avoir accès à des services de garde de qualité lorsqu'ils travaillent.

M. Paul Szabo: Monsieur le président, j'aimerais faire une correction. J'aimerais souligner que 70 p. 100 des gens qui ont des enfants...

Mme Dianne Bascombe: Des enfants d'âge préscolaire.

M. Paul Szabo: ... et 70 p. 100 des femmes...

Mme Dianne Bascombe: Font partie de la population active.

M. Paul Szabo: ... travaillent. Ce n'est pas tout à fait exact de dire... Le tiers des femmes qui ont des enfants d'âge préscolaire font partie de la population active. Un autre tiers reste à la maison. Une personne qui travaille 30 heures et plus est considérée comme faisant partie de la population active. Le troisième tiers travaille entre une heure et 30 heures par semaine. J'ai vu ces statistiques. Statistiques Canada va nous les fournir puisque nous les avons demandées.

La vaste majorité des femmes qui appartiennent à ce dernier groupe travaillent très peu d'heures par semaine parce qu'elles travaillent à temps partiel, que leurs heures de travail chevauchent celles de leur mari ou qu'elles vont au travail après que celui-ci est rentré à la maison. Ces femmes s'occupent donc directement de leurs enfants. Je crois que nous allons constater que la majorité des parents qui ont des enfants d'âge préscolaire s'occupent eux-mêmes de leurs enfants contrairement à ce que DRHC dit depuis un certain temps aux Canadiens et aux organismes comme le vôtre.

Mme Dianne Bascombe: Peu importe la façon dont on évalue les choses, le nombre d'enfants d'âge préscolaire visés est très élevé. Que les parents travaillent à temps plein, à temps partiel ou chez eux, ils ont besoin de faire appel à des services de garde. Le nombre d'enfants visés est énorme et nous n'avons pas dans ce pays l'infrastructure voulue dans le domaine des services de garde pour les enfants d'âge préscolaire.

Le président: Monsieur Stock.

Monsieur Van Wagner, vouliez-vous ajouter quelque chose au sujet de cette question?

M. Charles Van Wagner: Monsieur le président, je me demande si l'on peut revenir sur la question de la base de comparaison juste parce que je ne pense pas que l'argument de M. Szabo soit complètement valable.

On peut soutenir qu'il faut comparer le choix d'avoir deux revenus au choix d'en avoir un seul, mais je pense que cet argument n'est pas juste. On ne peut pas ne pas tenir compte du revenu familial total dans le calcul des impôts. Le gouvernement veut tenir compte du revenu familial total quand il s'agit d'établir les besoins des enfants, mais il refuse d'en tenir compte dans le calcul des impôts. L'analyse des systèmes ne repose pas sur ce genre de comparaison boiteuse.

Par ailleurs, si un couple qui n'a qu'un revenu vit exactement comme un autre couple qui a deux revenus, mais dont le revenu total est le même, il est difficile de trouver une bonne raison d'obliger ce dernier couple à payer des milliers de dollars d'impôts de plus. En effet, ce couple reçoit les mêmes services.

M. Paul Szabo: C'est difficile, mais il faut que le système soit juste et équitable. Il y a un problème qui se pose lorsque deux personnes ont décidé de ne pas avoir d'enfants ou ont décidé de vivre ensemble parce que ça leur convenait, et que l'une d'entre elles reste à la maison pour s'occuper du foyer et qu'elles décident cependant de partager leur revenu. Ce sont tous les Canadiens qui paient pour les avantages fiscaux ou les dépenses fiscales...

• 1940

M. Charles Van Wagner: Oh oui.

M. Paul Szabo: ... et s'ils le font, c'est parce qu'ils croient que ces dépenses fiscales visent un objectif national. Je ne vois pas pourquoi vous pensez qu'on devrait permettre à deux personnes qui vivent ensemble de partager leur revenu si cela ne répond pas à un objectif national.

Le président: Je vous remercie, monsieur Szabo.

Je crois que je vais bientôt demander à M. Szabo de comparaître comme témoin.

Monsieur McFadyen, Monsieur Horan et monsieur Stock.

M. Neil McFadyen: Je voudrais dire quelques mots au sujet des sondages auxquels ont fait allusion M. Gallaway et Dianne. Je me demande si on a fait un sondage auprès des enfants. Demandons aux enfants qu'on laisse à une garderie à 7 h 30 s'ils veulent aller à la garderie ou s'ils préféreraient rester à la maison avec leur père ou leur mère. J'aimerais bien voir les résultats de ce sondage.

Le président: Bonne idée.

Monsieur Horan.

M. James Horan: Notre organisme compte 150 sections réparties dans tout le pays. Nous sommes donc présents dans toutes les provinces et dans tous les territoires. On nous pose beaucoup de questions au sujet des adolescents de 14 à 18 ans qui sont incarcérés ou qui se dirigent vers un centre de détention. On me demande souvent ce qui aurait pu être fait pour prévenir cette situation et quand j'ai été mis au courant. C'est une question qui se pose continuellement lorsqu'on travaille avec des personnes qui ont des troubles d'apprentissage.

Voilà pourquoi j'insiste sur le fait qu'il faut identifier aussitôt que possible les enfants à risque. Nous devons évaluer tous les enfants pour établir s'ils présentent des troubles d'apprentissage. Nous discuterons à un autre moment de la façon de le faire, mais je crois qu'un consensus doit se dégager au pays sur la nécessité d'identifier dès que possible les enfants à risque. Si nous ne le faisons pas, chaque fois qu'un jeune est envoyé à un centre de détention, on continuera de nous demander quelles mesures auraient pu être prises pour éviter cette situation et à quel moment elle aurait dû être prise.

Le président: Un dernier commentaire, monsieur Stock.

M. Peter Stock: Un tout petit mot. Il est intéressant que M. Gallaway ait parlé des pères de la Confédération parce qu'une des choses que l'on entend continuellement ici, c'est cette idée de l'instruction de la petite enfance. Quand la Constitution a été rédigée, l'instruction, comme nous le savons, a été décrétée de compétence strictement provinciale. S'il s'agit donc d'un programme social pour encourager la création de garderies améliorées et subventionnées par le gouvernement, c'est peut-être là un domaine de responsabilité fédérale et il se pourrait qu'il soit légitime pour les témoins de venir demander de crédits à notre comité. Cependant, s'il s'agit d'instruction publique ou privée, ces témoins devraient en réalité se tourner vers Queen's Park ou vers les assemblées législatives provinciales pour faire valoir leurs arguments.

Le président: Monsieur Weiner.

M. Harvey Weiner: Je demanderais à l'intervenant précédent d'étudier le document sur l'union sociale. C'est un document qui a été signé par toutes les provinces, sauf le Québec, et par le gouvernement fédéral et il s'y trouve des dispositions claires pour que les provinces et le gouvernement fédéral s'entendent sur les programmes dont nous avons parlé dans nos interventions.

Le président: Merci.

Avez-vous des dernières observations à faire?

Mme Sheridan Gardner: Je voudrais faire une dernière observation, monsieur le président, merci.

Je tiens tout simplement à dire que je ne m'oppose pas à l'instruction dès la petite enfance. Les années de zéro à trois ans sont des années très importantes et, oui, il serait peut-être bon d'avoir un centre de la petite enfance à qui je pourrais ponctuellement confier mes enfants, mais la vérité c'est que je ne pourrai jamais le faire à moins d'avoir la possibilité de rester à la maison pour en prendre soin. La façon de le faire, c'est de remettre plus d'argent dans les poches des familles et la façon d'y parvenir, c'est d'étudier la loi pour voir où nous pourrions équilibrer les choses. Il s'agit d'une situation où l'article 63 de la Loi sur l'impôt est carrément discriminatoire et je crois qu'on devrait s'en occuper.

Le président: Au nom du comité, je vous remercie beaucoup. Il y a une certitude: personne ne s'entend sur cette question précise, du moins pas ce soir, ce qui nous laisse la tâche difficile de décider ce que nous ferons à propos de tout cela. Plaisanteries mises à part, je vous remercie du plus profond de nos coeurs. Comme vous le savez, nous avons des choix à faire et ils sont de taille.

D'après la qualité du débat ici ce soir, je suis sûr que la rédaction du rapport sera très ardue. Je suis sûr que vous retrouverez vos idées dans ce document.

• 1945

Au nom du comité, merci et bonsoir.