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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vais d'abord me présenter. Je m'appelle Réginald Cotton et je viens de Rivière-au-Renard, en Gaspésie. Je fais partie des pêcheurs de poisson de fond qui, depuis le moratoire, ont recours aux allocations temporaires de crevette.
On vous a fait parvenir le document auquel on travaille depuis presque un an. Je suis le porte-parole de l'Association des capitaines-propriétaires de la Gaspésie. Je représente neuf associations de pêcheurs semi-hauturiers du sud du golfe. Je suis le porte-parole de l'Association des pêcheurs de la MRC Pabok, du Regroupement des pêcheurs professionnels des Îles-de-la-Madeleine, de l'Association Québécoise de l'Industrie de la Pêche, de l'Association des pêcheurs de poisson de fond acadiens, de l'Association des pêcheurs spécialistes indépendants du poisson de fond, de l'Association des morutiers professionnels de la Gaspésie, de la Northern Cape Breton Fishing Vessels Association et de la Prince Edward Island Groundfish Association. De plus, deux gouvernements se sont associés à nous, soit celui du Québec et celui de la Nouvelle-Écosse. Je représente tous ces gens.
Si je suis ici aujourd'hui, c'est parce qu'on a un problème important en ce qui concerne la morue dans le sud du golfe. Il y a un fossé énorme entre la science et ce que les pêcheurs voient et capturent en mer. La même chose est arrivée dans le nord du golfe. Le golfe est séparé en deux. Une première gestion se fait dans le nord du golfe. C'est du ressort de Terre-Neuve et de l'Institut Maurice-Lamontagne. Pour ce qui est du sud du golfe, c'est géré par Moncton.
Il y a plusieurs années, des choses ont changé dans le nord du golfe. Les pêcheurs terre-neuviens allaient à la pêche, prenaient de la morue et en voyaient. Ils ont communiqué la chose aux scientifiques qui gèrent le nord du golfe, et ça a amélioré le sort des pêcheurs.
La semaine passée, on a annoncé le plan de pêche pour le nord du golfe. Les gens vont pêcher 7 000 tonnes métriques de morue. La biomasse est beaucoup plus importante dans le sud du golfe, et on parle d'y imposer un troisième moratoire. Comme je l'ai dit plus tôt, les pêcheurs et les associations qui les représentent s'aperçoivent qu'il y a un fossé énorme entre eux et la science. On veut essayer de corriger un tant soit peu ce problème. On voudrait harmoniser le sud et le nord, c'est-à-dire changer certaines choses.
Simplement à titre d'exemple, je vais mentionner l'outil avec lequel les gens du sud du golfe répertorient le stock, soit le chalut. Ils l'utilisent pour prélever des ressources afin d'inventorier les stocks. Ce chalut date du temps de Noé. Même les pêcheurs se sont départis de cet engin dans les années 1950 parce qu'ils n'étaient pas capables de le faire fonctionner. Il y a, parallèlement à ça, d'autres choses que je n'énumérerai pas étant donné qu'elles se trouvent dans le document.
Dans le nord du golfe, ils ont changé le chalut il y a plusieurs années. Or, les scientifiques du nord du golfe nous disent que dans ce secteur, les prises ont quintuplé. Ça ne veut pas dire que la morue est arrivée hier matin: elle était déjà là. Par contre, du fait que l'outil est beaucoup plus performant, il produit une meilleure photo. Je ne vais pas m'étendre sur ce sujet, étant donné que vous avez tous reçu le document.
On demande à Pêches et Océans Canada de faire quelque chose pour améliorer les données relatives au sud du golfe. Pour des raisons économiques, Pêches et Océans Canada a laissé tomber il y a plusieurs années une sortie en mer, un relevé au printemps. Nous sommes dans un golfe, et en Gaspésie, la morue entre au printemps et sort à l'automne. Je suis assez convaincu, et c'est le cas de tous les pêcheurs et associations que je représente voire même des gouvernements, que la meilleure façon de mesurer la taille du stock de poisson qui entre dans le golfe Saint-Laurent est d'effectuer des mesures et de compter les poissons qui y entrent au printemps.
On critique énormément le fait que les gens de Pêches et Océans Canada, en l'occurrence les scientifiques de Moncton, prélèvent la ressource dans le sud du golfe au mois d'août pour essayer d'inventorier les stocks. Je suis probablement le seul pêcheur ici aujourd'hui, et avec raison, mais si vous faites le tour des pêcheurs de l'Atlantique, même les professionnels vont vous dire, tout comme moi, qu'il n'a jamais été possible de prendre de la morue au mois d'août. J'ai 57 ans, je pêche depuis l'âge de 16 ou 17 ans, et ça a toujours été le cas. On ne sait pas pourquoi.
Nous, les pêcheurs, pensons que c'est probablement parce que la morue sort du golfe à l'automne pour préparer sa migration. Je ne sais pas si cette morue se trouve dans une autre colonne d'eau ou dans des territoires où on ne peut pas la trouver, mais les scientifiques profitent de ce temps de l'année pour faire l'inventaire des stocks. C'est une des principales raisons pour lesquelles ces gens n'ont pas de données. Chaque fois qu'ils sortent, il n'y a pas de morue.
Je pourrais faire un parallèle avec la pêche au saumon. Chez nous, en Gaspésie, il y a des grandes rivières à semence qui sont énormément cotées. À la fin des années 1800, quand les gouvernements canadien et québécois se sont aperçus que les Américains avaient un intérêt particulier pour le saumon de la Gaspésie, ils ont d'abord essayé de faire l'inventaire des stocks. Ils ont commencé par faire cet inventaire au moment de la pêche au saumon. Ils se sont aperçus qu'ils ne trouvaient presque pas de saumons parce que lorsque la montaison a lieu, le saumon rentre dans la rivière. Donc, quand ils tentaient de compter les semences dans les pools de saumons, ils n'en trouvaient presque pas. Ce n'est pas qu'ils n'en trouvaient pas, c'est qu'ils ne les voyaient pas.
Quand la luminosité n'est pas bonne, on ne voit pas les saumons dans le fond de l'eau. La plupart du temps, les saumons se cachent derrière de grosses roches. Ils se cachent sous les gros troncs d'arbres morts au fond des rivières. Ils ne peuvent pas les compter. Ils se sont aperçus au fil des années, compte tenu de l'intérêt particulier pour la pêche sportive au saumon, qu'ils pouvaient les compter quand ils remontaient. C'est pour cela que cette méthode est encore utilisée aujourd'hui. Dans toutes les grandes rivières à saumon du Québec et d'ailleurs, ils comptent le saumon lors de la montaison, et c'est encore ainsi qu'on procède aujourd'hui.
Donc, une bonne façon de comprendre ce qui se passe dans le sud du golfe Saint-Laurent est de mesurer, comme on le faisait par le passé, la quantité de poisson qui remonte, mais en utilisant des méthodes modernes.
Le débat s'articule autour de cette question. Comme le nord a changé à cause du chalut, il faudrait changer certaines choses. Peu importe qu'on soit au nord ou au sud du golfe Saint-Laurent, même s'il y a une ligne imaginaire qui a été tracée par des humains, la morue ne va pas nécessairement la reconnaître. On parle de la même espèce, de la morue, qu'elle se trouve dans le nord ou dans le sud du golfe. On peut considérer le golfe Saint-Laurent comme un lac. Même s'il est séparé en deux, il n'y a aucune raison d'adopter des façons de faire différentes dans le nord et dans le sud.
C'est à cause de cela que les pêcheurs se questionnent beaucoup depuis une quinzaine d'années. Le fossé s'accentue énormément année après année avec les scientifiques du sud du golfe, de Moncton. C'est pour ça que nous sommes ici aujourd'hui. Nous demandons au gouvernement canadien d'examiner cette question attentivement. Grâce au travail de ses scientifiques, Pêches et Océans Canada a des données quantitatives. Mais nous savons pertinemment que, grâce à notre savoir et à notre expérience, nous pouvons leur fournir des données qualitatives aussi valables que les données quantitatives des scientifiques.
L'été passé, j'ai participé à un bar des sciences chez nous, à l'Anse-à-Beaufils, dans une vieille usine qui a été rénovée pour devenir un centre artistique. Des scientifiques et des universitaires d'un peu partout participaient à ce bar. À mon grand étonnement, j'ai été invité à cet événement à titre de pêcheur par le gouvernement du Québec et le gouvernement canadien. Il y avait une centaine de personnes dans la salle, et j'étais le seul pêcheur. Je me demandais ce que je faisais à cet endroit, en compagnie d'universitaires aux titres longs comme le bras. J'étais un peu étonné. Ce bar portait sur le changement climatique.
J'ai été le premier à être interrogé. On m'a demandé, dans un premier temps, ce que je pensais du changement climatique et ce que j'observais en mer. J'ai fait part de mes observations. Tous ces gens m'ont dit que j'avais entièrement raison. Les poissons de fond sont les organismes les plus sensibles à un bouleversement ou à un changement climatique.
Je milite dans ce sens depuis la fin des années 1980. Même à la fin des années 1980, alors qu'on prenait énormément de morue, je disais aux scientifiques que quelque chose se passait, parce qu'on ne pouvait plus prendre la morue aux endroits conventionnels. Ça fait des années que moi-même, mes collègues et des représentants d'associations disons que le pattern de migration a changé. Mais au niveau de la science, dans le sud du golfe, on n'a pas changé grand-chose.
Monsieur le président, on demande au gouvernement de nous donner une chance. Dans notre document, nous demandons un projet de trois ans, avec un TPA de 4 000 tonnes. Vous allez peut-être me dire que c'est beaucoup, 4 000 tonnes, mais pour nous, les pêcheurs de l'ensemble du golfe Saint-Laurent, ce n'est pas beaucoup. Je peux vous dire qu'avec un TPA de 1 500 à 2 000 tonnes pour le sud du golfe, il n'y aura pas grand-chose sur la photo.
Quatre mille tonnes conviendraient si tous les pêcheurs allaient en mer. C'est facile aujourd'hui, chaque pêcheur sait ce qu'il a à prendre, qu'il vienne des Maritimes, du Québec, des Îles-de-la-Madeleine ou de n'importe où ailleurs. Si c'était fixé à 4 000 tonnes, chaque pêcheur irait. On demande au gouvernement de comptabiliser et d'analyser toutes les sorties en mer de chaque pêcheur. On croit pertinemment que la photo serait meilleure qu'avec un moratoire de 2 000 ou 500 tonnes.
Monsieur le président, comme tous les gens que je représente, je pense que le plus grand tort qui ait été fait à la biomasse du sud du golfe Saint-Laurent a été causé par la fermeture de la pêche.
Voici un exemple que je donne souvent quand on me demande de parler des pêches. Si quelqu'un de ma famille avait le cancer, je l'isolerais dans un coin et je le laisserais là. Parce qu'il aurait le cancer, on le laisserait mourir tranquillement, même si cela prenait deux ou trois ans. Pourquoi ne pas se donner une chance et essayer de voir d'autres médecins ou d'obtenir d'autres médicaments? Dans le cas la pêche, c'est la même chose. Nous, les pêcheurs, sommes là par expérience, comme les pêcheurs de Terre-Neuve. Si les pêcheurs de Terre-Neuve ont convaincu les scientifiques de changer certaines choses, on devrait le faire aussi dans le sud du golfe.
Si j'ai bien compris, vous nous dites que les conclusions scientifiques sont complètement fausses et qu'elles n'ont rien à voir avec la réalité de la biomasse dans le sud du golfe.
J'aimerais appuyer vos propos. Vous savez peut-être que la pêche à la morue dans la zone 4RS a été fermée en 2003 en raison d'un manque de ressources halieutiques. Puis, en 2007, la pêche à la morue dans la zone 4RS, dans le secteur nord du golfe, a été fixé à 7 000 tonnes métriques. L'allocation est donc passée de zéro tonne en 2003 à 7 000 tonnes en 2007. Pouvez-vous m'expliquer comment, si les conclusions scientifiques qui ont mené à la fermeture de la pêche à la morue étaient exactes, il se fait que maintenant le quota a été fixé en 2007 à 7 000 tonnes métriques?
La crédibilité scientifique du MPO est systématiquement faible en matière de collecte de données et d'établissement de quotas d'exploitation des ressources. Aujourd'hui, vous faites un coup préventif en venant nous voir afin de vous assurer que la même erreur ne se reproduira pas dans le sud du golfe.
J'aimerais vous proposer quelque chose. Dans la nouvelle loi sur les pêches, les pouvoirs du ministre sont limités. Or vous êtes ici pour implorer le ministre d'utiliser ses pouvoirs afin d'établir des quotas et que ces décisions ne soient pas contestées par les cours. En vertu de la nouvelle loi sur les pêches, le ministre serait obligé de se soumettre aux conseils des scientifiques, peu importe si ces conseils sont responsables, raisonnables ou logiques. Cette exigence est inscrite dans le projet de loi proposé au Parlement aujourd'hui. Si le ministre ne suit pas ces conseils, les organisations écologiques pourraient contester sa décision dans une cour fédérale et obtenir une injonction empêchant l'exploitation des pêches.
Est-ce qu'il faudrait régler le problème du sud du golfe en adoptant cette nouvelle loi sur les pêches et en laissant les ports décider de ce qui est approprié ou non? Ou, est-ce que vous préféreriez plutôt qu'un ministre puisse prendre des décisions qui ne sont pas seulement basées sur des conclusions scientifiques mais qui sont également fondées sur des conclusions proposées par les pêcheurs en provenance d'organisations similaires à la vôtre? Ces conclusions ne seraient peut-être pas fondées sur la science, mais seraient plutôt fondées sur une expérience en mer qui remonte à plusieurs générations.
Quel choix préférez-vous?
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J'ai déjà lu dans un article qu'un scientifique avait fini par dire que dans le golfe Saint-Laurent, les phoques mangeaient 40 000 tonnes métriques de morue.
Ce que demandent les pêcheurs, c'est un point de non retour, je crois. C'est pour cette raison que nous sommes ici aujourd'hui. Quatre mille tonnes de morue, dans le sud du golfe Saint-Laurent, c'est un grain de sable. Ce n'est pas vrai qu'on va détruire la ressource en prenant 4 000 tonnes de morue.
Je vais vous expliquer une chose. Dans le nord du golfe, à 7 000 tonnes, le taux d'exploitation versus la biomasse totale se situe autour de 20 p. 100. Dans le sud du golfe, à 4 000 tonnes, le taux d'exploitation se situerait entre 2 et 3 p. 100. Donc, on comprend mal.
Les scientifiques qui passeront après nous vont probablement vous dire que dans le sud du golfe, on ne trouve pas de grosses morues. On sait pourquoi ils n'y trouvent pas de grosses morues: c'est à cause de l'engin qu'ils utilisent. Je vous l'ai dit un peu plus tôt, dans le sud du golfe en ce moment, la zone 4T2 est fermée parce que les gens ne peuvent pas pêcher la plie parce qu'il y a trop de morue. Ils pêchent la plie avec de la maille de 170 carrés. Or, ils prennent trop de morue par rapport à ce qu'ils prennent de plie. S'ils prennent de la morue, c'est parce qu'il y en a. On ne demande pas 50 000 tonnes, on demande 4 000 tonnes, pour la comprendre.
Voici ce que nous demandons au ministère: se donne-t-on une dernière chance de travailler ensemble? Travaillons ensemble pour trois ans afin d'élaborer un programme qui tienne compte de la science. Nous avons besoin de ces gens-là parce que nous ne sommes pas instruits. Mais je crois pertinemment que les scientifiques ont aussi besoin de l'apport des pêcheurs, de nos connaissances et de notre expertise. Quand j'ai mal aux dents, je vais chez le dentiste, je ne vais pas chez le barbier. Donc, les gens qui travaillent dans le domaine de la pêche devront se référer aux pêcheurs.
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Merci, monsieur le président.
Pour reprendre les propos de l'un de mes collègues, je déteste quand les politiques sèment la discorde entre les pêcheurs et les scientifiques. Il me semble y avoir une bonne dose de dégoût de soi dans cette salle.
Monsieur Bevan, j'aimerais vous poser une question qui porte sur votre expérience passée. Auparavant, le MPO écoutait les pêcheurs quand ils présentaient des preuves contraires à des énoncés scientifiques. Il existe bon nombre d'exemples récents, dans lesquels on peut voir que les conseils prodigués par les pêcheurs, notamment dans les plans de gestion des pêches, étaient judicieux.
Je vais vous donner un exemple. Dans la côte nord-est de Terre-Neuve, des conclusions scientifiques ont été présentées au MPO puis au ministre, et elles n'appuyaient pas l'ouverture d'une pêche de morue commerciale ni même d'une pêche expérimentale. Le ministre a quand même décidé d'ouvrir la pêche et on a vu qu'il n'y a pas eu de déclin important des ressources. En fait, elles semblent être au même niveau qu'auparavant.
Dans la partie nord du golfe, en 2002, on est passé d'un quota de plusieurs milliers de tonnes à un moratoire. L'année dernière, soit trois ans plus tard, on voit qu'il y a beaucoup de ressources halieutiques. Le MPO envisage même d'augmenter la ressource.
Seriez-vous d'accord pour dire que les preuves scientifiques du MPO posent problèmes? Admettez-vous que ces conseils ne sont pas nécessairement bien fondés?
En ce qui concerne le secteur nord du golfe, nous savons maintenant que le Alfred Needler, le navire scientifique du MPO qui faisait ces études était hors service pendant un long moment. Et c'est cela qui a fait en sorte que nous avons imposé un moratoire dans cette région. En fait, le Alfred Needler n'était pas... Le niveau de pêche expérimentale était marginal. De plus, ce niveau a connu des pannes, et je crois un incendie, des problèmes avec les filets, etc.
Sommes-nous saisis d'un problème de manque de ressources? Ou s'agit-il plutôt d'un problème lié aux examens scientifiques qui ont une incidence sur les preuves scientifiques réelles?
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Absolument pas. Absolument pas.
Je crois que la communauté scientifique fait son travail et nous donne les meilleures informations possible dans les circonstances, dans les limites avec lesquelles elle doit travailler. Vous ne pouvez pas vous attendre... Il n'y a personne dans le secteur de la gestion des pêches, où que ce soit dans le monde, qui ait des conseils ou des informations parfaites. Cela n'existe tout simplement pas.
Nous devons prendre des décisions en tenant compte de l'incertitude de la situation et nous devons gérer les risques. Dans le secteur nord, les risques sont maintenant moins élevés qu'ils ne l'étaient auparavant, si bien que nous pouvons autoriser la pêche.
Je ne suis pas sûr, avec le recul, que les décisions prises par le passé étaient bonnes ou mauvaises. Je ne peux pas tirer de conclusions comme celle-là. Je crois que ceux qui prennent ces décisions le font en se fondant sur leur propre expérience. Mais nous sommes bien en-deçà du potentiel pour les deux stocks. Nous avons une pêche dans la partie nord qui n'est que l'ombre de ce qu'elle était auparavant. Nous avons décidé, collectivement — c'est-à-dire les pêcheurs et les gestionnaires, etc. —, de plafonner la pêche, de profiter du potentiel de croissance qui existe maintenant, de ne pas opter pour une approche risquée et de permettre aux stocks de se multiplier pour que nous ayons un revenu plus élevé à l'avenir. C'est ce que nous avons décidé, et la décision était conjointe. Les pêcheurs ont décidé que c'est ce qu'ils voulaient faire.
Dans la partie sud, le risque est extrêmement élevé. Si nous prenons de mauvaises décisions dans le sud, il ne sera plus possible de ramener les stocks à ce qu'ils étaient. La situation sera pareille à celle de la zone 4VW, où il n'y a aucune croissance possible et où il n'y aura vraisemblablement pas de pêche à l'avenir parce que les stocks continuent à baisser. La question à laquelle nous devons répondre est donc de savoir dans quelle voie nous voulons nous engager.
Il est facile de dire qu'il suffirait de dépenser quelques millions de dollars de plus pour trouver plus de poissons. Cette approche n'est pas réaliste. Nous pourrons dépenser tout l'argent que nous voudrons, et l'incertitude persistera. Nous devons tous prendre des décisions dans un contexte incertain et nous devons les prendre en fonction des risques auxquels nous faisons face.
Pour certaines pêches, il n'est pas toujours nécessaire de suivre les conseils à la lettre, parce que les risques sont peu élevés et que les conséquences, si nous nous trompons, seront minimes. Pour d'autres pêches — et je dirais que c'est le cas de la pêche dans le sud du golfe —, si nous commettons une erreur, non seulement nous perdrons quelques millions de dollars aujourd'hui mais nous éliminerons à tout jamais la possibilité de ramener les stocks à ce qu'ils étaient quand ils sous-tendaient une pêche valant plusieurs millions de dollars. Cette façon d'agir ne serait tout simplement pas responsable. Nous devons tenir compte de considérations comme celles-là quand nous prenons nos décisions.